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Le réchauffement climatique sera particulière- ment intense aux hautes latitudes et les obser- vations tendent à confirmer que la banquise arctique a commencé à fondre. Les impacts de la disparition de cette banquise sont difficiles à appréhender : extinction potentielle de l’unique faune arctique, altération de la circu- lation océanique générale, accélération du réchauffement climatique, ouverture d’un nouvel océan à la navigation et à l’exploita- tion des ressources naturelles, perturbations socio-économiques et géopolitiques majeures qui s’étendront non seulement à l’Arctique mais à l’ensemble de l’Hémisphère Nord. La communauté scientifique internationale reconnaît unanimement le besoin urgent d’observations directes des conditions et processus océanographiques qui prévalent dans l’Océan Arctique afin de raffiner les simulations numériques du climat qui tentent d’anticiper le rythme et l’étendue du réchauf- fement planétaire. Devant l’accumulation des preuves d’un réchauffement de l’Arctique, plusieurs pays nordiques et la plupart des pays du G-7 ont accéléré leur effort de recherche en océanographie arctique. L’Allemagne mène un programme international d’envergure articulé autour de son brise-glace de recher- ché Polarstern. L’effort américain a récem- ment bénéficié d’une impulsion formidable par le lancement du brise-glace de recherche Healy. Le Japon a augmenté son programme arctique grâce au Mirai, un navire de recher- che à coque renforcée. Le brise-glace de recherche Oden appuie l’effort suédois. Même la Chine soutient un nouveau et vigoureux programme en océanographie arctique grâce à un brise-glace de 150m, le Xuelong. Malgré des responsabilités évidentes dans l’Arctique, le Canada ne s’est impliqué que tardivement dans l’effort international qui vise à comprendre la réponse de l’Océan Arctique au réchauffement climatique. En fait, l’effort de recherche canadien dans l’ensemble de l’Arctique s’est constamment amenuisé depuis 20 ans. Le rapport du Groupe de travail sur la recherche nordique mis sur pied par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et le Conseil de recherche en sciences sociales et humaines du Canada (CRSSH) démontre clairement l’ur- gence de reconstruire le leadership du Canada Un brise-glace de recherche canadien pour l’étude de l’Océan Arctique en mutation 1 Infections des voies respiratoires chez les enfants inuits 4 Le Canada ferme son observatoire de l’ozone arctique 6 L’exploration sur les hydrates de gaz dans l’Arctique 9 Critique de livre : Writing on Ice 12 Quoi de neuf 13 Horizon 14 A U T O M N E / H I V E R 2 0 0 2 D A N S C E N U M É R O UN BRISE-GLACE DE RECHERCHE CANADIEN POUR L’ÉTUDE DE L’OCÉAN ARCTIQUE EN MUTATION Louis Fortier Le NGCC Pierre Radission, navire jumeau du NGCC Sir John Franklin. Photo : Martin Fortier

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Page 1: AUTOMNE/HIVER 2002 DANS CE NUMÉRO Newsletter/02 M… · en recherche arctique (Hutchinson et al., 2000, De l’état de crise à la relance: rétablir le rôle du Canada dans la

Le réchauffement climatique sera particulière-ment intense aux hautes latitudes et les obser-vations tendent à confirmer que la banquisearctique a commencé à fondre. Les impacts dela disparition de cette banquise sont difficiles à appréhender : extinction potentielle de l’unique faune arctique, altération de la circu-lation océanique générale, accélération duréchauffement climatique, ouverture d’unnouvel océan à la navigation et à l’exploita-tion des ressources naturelles, perturbationssocio-économiques et géopolitiques majeuresqui s’étendront non seulement à l’Arctiquemais à l’ensemble de l’Hémisphère Nord. Lacommunauté scientifique internationale reconnaît unanimement le besoin urgentd’observations directes des conditions etprocessus océanographiques qui prévalentdans l’Océan Arctique afin de raffiner lessimulations numériques du climat qui tentent

d’anticiper le rythme et l’étendue du réchauf-fement planétaire. Devant l’accumulation despreuves d’un réchauffement de l’Arctique,plusieurs pays nordiques et la plupart des paysdu G-7 ont accéléré leur effort de recherche enocéanographie arctique. L’Allemagne mèneun programme international d’envergurearticulé autour de son brise-glace de recher-ché Polarstern. L’effort américain a récem-ment bénéficié d’une impulsion formidablepar le lancement du brise-glace de rechercheHealy. Le Japon a augmenté son programmearctique grâce au Mirai, un navire de recher-che à coque renforcée. Le brise-glace derecherche Oden appuie l’effort suédois. Mêmela Chine soutient un nouveau et vigoureuxprogramme en océanographie arctique grâceà un brise-glace de 150m, le Xuelong.

Malgré des responsabilités évidentes dansl’Arctique, le Canada ne s’est impliqué quetardivement dans l’effort international qui viseà comprendre la réponse de l’Océan Arctiqueau réchauffement climatique. En fait, l’effortde recherche canadien dans l’ensemble del’Arctique s’est constamment amenuisé depuis20 ans. Le rapport du Groupe de travail sur larecherche nordique mis sur pied par le Conseilde recherches en sciences naturelles et engénie du Canada (CRSNG) et le Conseil derecherche en sciences sociales et humaines duCanada (CRSSH) démontre clairement l’ur-gence de reconstruire le leadership du Canada

Un brise-glace de recherche canadien

pour l’étude de l’Océan Arctique

en mutation 1

Infections des voies respiratoires

chez les enfants inuits 4

Le Canada ferme son observatoire

de l’ozone arctique 6

L’exploration sur les hydrates de gaz

dans l’Arctique 9

Critique de livre : Writing on Ice 12

Quoi de neuf 13

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D A N S C E N U M É R O U N B R I S E - G L A C E D E R E C H E R C H E C A N A D I E N

P O U R L ’ É T U D E D E L ’ O C É A NA R C T I Q U E E N M U T A T I O N

Louis Fortier

Le NGCC Pierre Radission, navire jumeau du NGCCSir John Franklin. Photo : Martin Fortier

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en recherche arctique (Hutchinson et al.,2000, De l’état de crise à la relance: rétablirle rôle du Canada dans la recherche nor-dique). Le rapport identifie la faiblesse dusoutien logistique comme une des causes prin-cipales du déclin de la présence canadiennedans l’Arctique et conclut que « Si aucunemesure n’est prise, le Canada ne pourra pasrépondre à ses obligations internationales enmatière de sciences et de recherche ou de con-tribuer à des questions d’importance mon-diale. Il ne pourra non plus satisfaire à sesobligations nationales fondamentales de sur-veiller, de gérer et de protéger l’environne-ment du Nord …».

U N P A SS I G N I F I C A T I F

V E R S L AR E V I T A L I S A T I O N

D E L ’ E F F O R TC A N A D I E N

E N S C I E N C E S D E L ’ A R C T I Q U E

Cette situation a récemment évoluée et plu-sieurs signes d’une revitalisation de l’effort derecherche du Canada dans l’Arctique se fontsentir. En particulier, un consortium d’univer-sités canadiennes et de ministères fédéraux asoumis au Fonds international de la Fondationcanadienne pour l’innovation une propositionpour la transformation du brise-glace de 98 mSir John Franklin en un brise-glace de re-cherche de pointe. En juin dernier, la Fonda-tion canadienne pour l’innovation retenait ceprojet pour la phase suivante d’évaluation(voir www.innovation.ca/media/index_f.cfm?websiteid=227). L’infrastructure natio-nale proposée inclue également les équipe-ments scientifiques ultra-modernes néces-saires à l’accomplissement de la mission sci-entifique du navire et une partie des fondsd’opération pour les cinq premières années.Ce brise-glace de recherche est l’étincelle quipermettra de démarrer un programme inter-national d’envergure sous leadership canadi-en, pour étudier l’évolution rapide de l’OcéanArctique pendant les 15 à 20 années à venir.

Avec le succès anticipé de ce projet, lebrise-glace de recherche constituera un cata-

lyste important de la reconstruction de l’effortde recherche canadien dans l’Arctique en pro-curant aux chercheurs un accès sans précé-dent à l’Océan Arctique. De plus, la disponibi-lité d’une telle infrastructure renforcera con-sidérablement la position du Canada dans lesprogrammes arctiques internationaux. Aucours des dix prochaines années, le brise-glace de recherche sera au cúur de plusieursprojets pluridisciplinaires d’envergure interna-tionale visant à avancer notre compréhensiondu climat, de la circulation océanique, de ladynamique des glaces, de la biologie de la bio-géochimie, de la sédimentologie, de la palé-océanographie et de la géologie du secteurcanadien de l’Océan Arctique. Le brise-glaceservira également de base de recherche à desprogrammes sur la réponse des écosystèmesterrestres côtiers au réchauffement climatiqueet à des études épidémiologiques de l’impactdes changements climatiques sur la santé despopulations nordiques. Des exemples de cesprogrammes incluent :« Canadian Arctic Shelf Exchange Study »

(CASES, 2002–2007) (L’Étude interna-tionale du plateau arctique canadien).L’Étude internationale du plateau arctiquecanadien a pour objectif principal de com-prendre et de modéliser la réponse des cyclesbiologiques et biogéochimiques aux variationsdu couvert de glace induits par les flux dechaleur atmosphériques, océaniques et conti-nentaux sur le plateau du Mackenzie dans laMer de Beaufort. « International Monitoring Program of Arc-

tic Canadian Seas » (IMPACS, à com-mencer en 2004–2005) (Le programmeinternational de suivi des mers arc-tiques canadiennes). Notre compréhen-sion de l’évolution présente de l’Arctiqueest fortement entravée par le manque deséries chronologiques à long-terme. Leprogramme international de suivi des mersarctiques canadiennes accumulera desséries temporelles à long terme de vari-ables physiques, biologiques et biogéo-chimiques clés dans le bassin arctique(plateau du Mackenzie) et dans la polyniedes Eaux du Nord.

« Ice Information and Navigation Experi-

ment » (I2NE, à commencer en 2003)(Expérimentation sur l’information etla navigation de la glace). L’étirementde la saison d’eau libre causé par unréchauffement du climat pourrait ouvrir lePassage du Nord-Ouest à la navigationintercontinentale dès 2015 ou 2025. I2NEétablira des modèles prédictifs de ladynamique et de la distribution des glacesde mer dans la région, afin de faciliter ledéveloppement de stratégies d’adaptationqui réduiront les risques de catastrophesmaritimes tout en maximisant la saison denavigation.

« Northern Regional Sensitivity to Climate

Change » (Northern-RiSCC, 2005–2010)(La vulnérabilité des régions nordiquesau changement climatique). Northern-RiSCC se concentre sur une section S-N (deKuujjuarapik à l’île d’Ellesmere) d’échan-tillonnage des milieux terrestres, lacustreset marécageux, afin d’élucider la réponsedes écosystèmes terrestres nordiques à uneremontée des isothermes suite au réchauf-fement de l’Hémisphère Nord. Le brise-glace de recherche servira de base mobileà ce programme, l’accès à la zone côtièreétant assuré par l’hélicoptère, la barge sci-entifique et la navette rapide.

« Role of Ice in the Morphodynamics of

Arctic Coasts » (RIMAC-ACD) (Le rôle dela glace dans les morphodynamiquesdes côtes arctiques). RIMAC étudiera leseffets sur la côte arctique canadienne d’uneréduction de la banquise, de l’augmenta-tion des vagues et des tempêtes et d’unedéstabilisation du pergélisol liées au ré-chauffement du climat. Ces informationssont cruciales afin de développer des mo-dèles globaux des budgets de sédiments etde carbone et pour prédire les impacts duréchauffement planétaire sur les côtes, lesinfrastructures, les habitats, les ressourcesculturelles et les communautés du HautArctique.

« Climate Change and Public Health in the

Canadian Arctic» (2003–2008) (Le change-ment climatique et la santé publique

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dans l’Arctique canadien). Dans le cadrede ce programme, les chercheurs déter-mineront jusqu’à quel point le climat influ-ence la santé humaine dans l’Arctique etdévelopperont des stratégies pour limiterles impacts potentiels sur les communautésnordiques. Le brise-glace fournira un accèsaux communautés et une clinique pour la

collecte d’échantillons biologiques, lesinterviews et les examens médicaux.L’étendue des transformations structurelles

et la diversité des équipements rattachés aunavire en feront une plate-forme polyvalentequi appuiera les efforts de recherche en océ-anographie, bien sûr, mais également dansplusieurs autres domaines de la recherche arc-

tique. Ainsi, le navire sera équipé des systèmesles plus sophistiqués de cartographie des fondsmarins, et, grâce au puit interne et au systèmede positionnement dynamique, pourra effec-tuer des opérations de forage dans des eauxpeu profondes, fournissant ainsi aux géo-logues et aux paleocéanographes un outilextraordinaire pour l’exploration des plateaux

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Principales transformations structurelles pourla mobilisation scientifique du brise-glace :� Un puit interne. La glace de mer et des

températures atmosphériques glacialesposent des difficultés majeures lors dudéploiement d’instruments océanogra-phiques délicats. Le puit interne aplanit cesdifficultés en procurant un accès direct àl’océan de l’intérieur du navire.

� Un système de positionnement dynamique,incluant l’addition de propulseurs à lapoupe et à mi-longueur. Ce système indis-pensable pour les opérations de mouillage,de carottage, de forage et le déploiementde véhicules téléguidés, permet de main-tenir le navire sur une position précise con-tre vents, glaces, courants et marées.

� Des laboratoires ultra-modernes, dont cer-taines unités à température contrôlée, dessalles de microscopie et d’instrumentationpour un total de presque 400 m2 d’espacede travail.

� Un bossoir de débordement rapide pour ledéploiement et la récupération d’unenavette de 7 m, alors que le navire faitroute à des vitesses atteignant 6 nœuds. Cetéquipement permet des économies sub-stantielles de temps (et donc de fonds derecherche) en découplant les opérations delevées et les opérations du navire.

� Un puit acoustique qui permet de changeret d’entretenir les transducteurs acous-tiques sans mettre le navire en cale sèche.Le puit acoustique est indispensable à l’étude exhaustive de la distribution duzooplancton et des poissons.

� Une barge de débarquement scientifique.

� Six conteneurs-laboratoires.� Un système de pointe de communication et

d’enregistrement des données.

Principaux équipements scientifiques rat-tachés au brise-glace :� Deux rosettes océanographiques. La rosette

océanographique, cheval de labours del’océanographe, permet la collecte rapided’échantillons d’eau à différentes profon-deurs, de même que l’enregistrement desprofils verticaux de plusieurs variablesphysiques, chimiques et biologiques.

� Douze ADCPs. Mouillés sur le fond pour de longues périodes, les profileurs acous-tiques à effet Doppler utilisent la réflexiondu son par les organismes zooplancto-niques pour mesurer la vitesse et la direc-tion du courant simultanément à plusieursprofondeurs.

� Vingt-quatre sondes environnementales(CTD, oxygène, fluorescence, couranto-mètre acoustique).

� Vingt-quatre pièges à sédiments.� Vingt-quatre largueurs acoustiques et les

bouées pour 12 mouillages.� Un système d’écholocation pour la récu-

pération des instruments déployés en mer.� Un aileron toué à trajectoire sinusoïdale.

Des gouvernails de profondeur et un treuilcontrôlé par ordinateur détermine la tra-jectoire de cette aileron sous-marin touépar le navire. L’aileron porte une batteried’instruments qui procurent des coupesverticales à haute-résolution des conditionsocéanographiques.

� Un sous-marin téléguidé (ROV).

U N E I N F R A S T R U C T U R E D E R E C H E R C H É P O L Y V A L E N T E

� Un profileur acoustique Doppler de coqueet un système d’analyse en continu del’eau pour le suivi des courants et des con-ditions océanographiques de surface lelong du trajet du navire.

� Spectromètres optique et infra-rouge.� Radiomètres à 19, 37 et 85 ghz.� Une radiosonde pour l’étude du forçage

atmosphérique du couvert de glace. Lessignaux de température, d’humidité et depression transmis par un émetteur radiotransporté par un ballon-sonde permettentd’obtenir le profil vertical des conditionsatmosphériques.

� Une station de réception satellite multi-fréquence.

� Un analyseur de gaz à infra-rouge.� Une panoplie d’équipement pour la ban-

quise, incluant des abris de type Parcol, desmotoneiges lourdes et des motoneigesstandard.

� Un écho-sondeur scientifique.� Des échantillonneurs à nappes de 0.5 et

1.0 m pour le zooplancton.� Un chalut pélagique rectangulaire et des

chaluts expérimentaux.� Un écho-sondeur scientifique à faisceaux

multiples.� Un système de balayage pour la bathy-

métrie en eaux peu profondes.� Des carottiers de différent types et un sépa-

rateur de carottes de sédiments.� Un système de rayon-X pour l’analyse des

carottes de sédiments.� Un système de réflexion séismique.� Un chromatographe en phase liquide dou-

blé d’un spectromètre de masse.

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continentaux et des côtes arctiques. Uneinstrumentation météorologique de pointe etles stations de réception les plus modernespermettront aux spécialistes de l’atmosphèrede calibrer les images satellites avec les obser-vations in situ le long du trajet du navire afind’élucider les relations atmosphère-océandans l’Arctique. Grâce à l’hélicoptère, la bargescientifique et la vedette rapide, l’infrastruc-ture fournira aux écologistes terrestres unaccès sans précédent aux zones côtières del’Archipel canadien. La transformation del’infirmerie et de l’hôpital du navire en clin-ique moderne offrira aux épidémiologistes lesinfrastructures nécessaires à l’étude de lasanté des populations nordiques.

U N E A P P R O C H ET R A N S E C T O R I E L L E

P O U R L AR E C H E R C H E S U R

L E S I M P A C T S D E SC H A N G E M E N T SC L I M A T I Q U E S

Les stratégies internationales visant à stabiliserles émissions de gaz à effet de serre, commecelle proposée par le protocole de Kyoto, ne

peuvent au mieux que ralentir marginalementle taux actuel de réchauffement de l’atmos-phère. Il faut donc envisager rapidement desstratégies pour adapter les sociétés nordiqueset du sud au plein impact d’un réchauffementclimatique d’origine anthropogénique. Lesquestions de niveau écosystémique et les défisscientifiques soulevés par un réchauffement del’Arctique ne peuvent être abordés qu’à tra-vers une approche trans-sectorielle qui im-plique des spécialistes des sciences naturelles,sociales et médicales. Afin d’encourager unetelle approche trans-sectorielle, les promo-teurs du projet de brise-glace proposent égale-ment la création d’un Réseau de centres d’ex-cellence qui regroupera les meilleurs spé-cialistes du Canada et leurs collaborateurs del’étranger. ArcticNet favorisera une synergieentre des centres d’excellence arctiques déjàexistants dans les secteurs des sciences natu-relles, sociales et médicales. L’objectif centraldu Réseau est de traduire notre compréhen-sion croissante d’un Arctique en mutation enévaluation des impacts potentiels, en poli-tiques nationales et en stratégies d’adaptation.

L’implication directe des communautés nor-diques dans le processus scientifique est un desobjectifs premiers du Réseau, qui sera atteintpar l’échange bilatéral des connaissances, dela formation et de la technologie.

Tel que mentionné plus haut, les scien-tifiques sont unanimes à constater qu’unmanque d’observations et de mesures est l’ob-stacle principal qui nous empêche d’aborderles questions soulevées par un changement duclimat arctique. Le Réseau proposé est articuléautour du brise-glace de recherche qui con-tribuera à solutionner ce manque d’observa-tions directes en procurant aux océanogra-phes, écologistes terrestres, géologues, épidé-miologistes et autres spécialistes un accès sansprécédent à l’Arctique et à ses habitants. Fi-nancé, ArcticNet deviendra une source uniqued’expertise pour informer les communautésnordiques des impacts potentiels et des oppor-tunités qu’un changement du climat créeradans l’Arctique et pour aider les décideurs etl’industrie à gérer ces impacts.

Louis Fortier est professeur titulaire de bio-logie à l’Université Laval.

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Tous ceux qui passent du temps dans le Nordconstatent rapidement à quel point les mala-dies respiratoires sont répandues dans cetterégion. Si les habitants du Nord acceptent lestaux élevés d’infections respiratoires et lesconsidèrent comme inévitables, les gens duSud, eux, sont sidérés devant l’ampleur duproblème.

Je suis venue pour la première fois à l’hôpi-tal régional de Baffin, à Iqaluit, Nunavut, en1995, durant mon stage de formation sur lesmaladies infectieuses des enfants. J’ai été trou-blée par la gravité des cas de bronchiolite (unsyndrome respiratoire affectant les jeunesenfants, qu’on attribue à des virus) que j’aiconstatés. Trop souvent, on insérait un tubedans la trachée des bébés inuits et on les trans-

portait par air vers le Sud pour leur administ-rer les traitements essentiels à leur survie. J’aiété étonnée de voir des enfants de 3 ou 4 ansqui semblaient atteints de bronchectasie, unemaladie qui touche habituellement les sexagé-naires ou septuagénaires qui fument depuislongtemps.

Pour essayer de savoir si cette situationétait un réel phénomène, j’ai passé l’été àéplucher les dossiers médicaux. Je voulaisd’abord saisir l’étendue du problème, et en-suite connaître les facteurs à l’origine desaffections. C’est alors que se sont succédé desévénements fortuits qui ont amené des ré-ponses – et suscité davantage de questions.

En peu de temps, je me suis rendu compteque la documentation médicale sur les infec-

Kimberly Tikivik, avec sa mère, Malaya, qui se fait traiterpour une maladie infectieuse des poumons à l’hôpital deBaffin. Photo : Douglas Sage

I N F E C T I O N S D E S V O I E S R E S P I R A T O I R E S C H E Z L E S E N F A N T S I N U I T S

Anna Banerji

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tions pulmonaires chez les enfants inuits,surtout au Canada, était presque inexistante.J’ai examiné les fiches médicales de tous lesenfants de moins de quatre ans qui avaient étéadmis à l’hôpital régional de Baffin et j’ai con-staté que le problème était vraisemblablementpire que ce que j’avais imaginé : la bronchio-lite était à l’origine d’environ 50 % des casd’hospitalisation d’enfants de moins de quatreans. En fait, la majeure partie des dépenses del’hôpital de Baffin pour les enfants étaientassociées à la bronchiolite.

Selon mes calculs, le taux d’admissionsdues à la bronchiolite était de 306 pour 1 000enfants de moins d’un an, soit environ 30 foisle taux observé dans le Sud. Près de 13 % desenfants hospitalisés cette année-là avaient étéintubés. Les résultats de mon évaluation desfacteurs de risque : à peu près le quart desenfants étaient nés avant terme, cinq pourcent avaient une maladie du coeur congéni-tale, et la moitié avaient été admis à l’hôpitalpour la première fois avant l’âge de trois mois– tous ces points sont des facteurs de risqueconnus pour la bronchiolite grave. Lorsquej’ai consulté l’information sur l’infection indi-quée dans ces cas de bronchiolite, je me suisaperçue que le virus respiratoire syncy-tial (VRS), considéré comme la cause la plus fréquente de la bronchiolite, était sous-representé.

J’ai été frappée par la constatation suivante:12 % des enfants avaient les yeux ou les sécré-tions nasales infectées par la chlamydia tra-chomatis. La chlamydia trachomatis est unagent pathogène transmis à l’enfant à la nais-sance, qui cause des maladies ressemblant à la bronchiolite chez les bébés. Je me suisdemandé si une infection à chlamydia nondétectée pourrait être une une importantecause d’infection des voies respiratoiresinférieures chez les enfants inuits.

En 1997, j’ai entrepris une étude prospec-tive. J’ai cherché les facteurs d’infection et lesfacteurs environnementaux qui avaient con-tribué aux infections des voies respiratoiresinférieures chez les enfants de moins de sixmois admis à l’hôpital régional de Baffin, enessayant surtout de comprendre le rôle de la

chlamydia. Cette étude a montré un tauxd’admissions pour des infections des voies res-piratoires inférieures de 484 pour 1 000 en-fants de moins de six mois – l’un des plusélevés qui ait été signalé. Autrement dit, à Baf-fin, un bébé de moins de six mois a à peu prèsune chance sur deux d’être admis à l’hôpital àcause d’une d’infection des voies respiratoiresinférieures.

À notre grande surprise, nous avons con-staté que tous les enfants admis à l’hôpitalavaient été exposés à la fumée de cigarettependant la grossesse et à la fumée secondaireau foyer. En général, ces enfants vivent dansun milieu surpeuplé comparativement auxautres Canadiens. Quarante pour cent desenfants avaient été adoptés par une parente.

Dans le cadre de l’étude, nous avons iden-tifié des organismes infectieux pour 18/27 (66%) cas d’hospitalisation, mais nous n’avonstrouvé aucun enfant porteur de la chlamydia.Pendant la période d’étude, des améliorationsmajeures ont été apportées en ce qui a trait àla sensibilisation, au diagnostic et au traite-ment des infections à chlamydia durant lagrossesse. Le taux de détection de la chlamy-dia s’est accru de 60 %.

De nombreux facteurs ont restreint l’étude,notamment le manque de contrôles sanitaireset le petit nombre de cas. Nous avons dû sur-monter de nombreux obstacles, entre autresun budget limité (8 000 $) et des problèmes delogistique pour le transport des échantillons.L’une de nos plus grandes difficultés provenaitdu fait que, selon l’impression des gens, larecherche dans les milieux inuits ne profitepas directement à la collectivité. Avec l’en-couragement de ceux qui ont compris lesrépercussions des maladies respiratoires dansle Nord, nous avons persévéré.

Mais, encore une fois, c’est un événementfortuit qui a donné des résultats. Les essais decontrôle qualité axés sur la chlamydia tra-chomatis n’ont pas permis d’identifier l’agentpathogène. Mais un autre organisme sem-blable à la chlamydia, maintenant appelésimkania negevensis (SN) a été repéré dans14/22 (64 %) des échantillons examinés. Le SNa été détecté pour la première fois en Israël, oùdes études ont démontré qu’un certain nom-bre d’enfants atteints de bronchiolite étaientporteurs de cet organisme qui avait échappéaux contrôles. Contrairement à la chlamydiaqui est transmise sexuellement, le SN semblesurtout causer des infections respiratoires.Auparavant, la bronchiolite était considéréecomme une maladie virale. Si le SN est unecause courante de la bronchiolite chez lesjeunes enfants inuits, l’infection pourrait êtretraitée avec un antibiotique. J’estimais qu’il nefallait pas écarter cette possibilité.

Quand nous avons cherché à obtenir unsoutien pour poursuivre la recherche, nous

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L’hôpital régional de Baffin reçoit des patients d’Iqaluit etdes onze petites localités de la région de Qikiqtaaluk(Baffin). Photo : Douglas Sage

De nombreux enfants, à Iqaluit et ailleurs dans la région,vivent dans des logements surpeuplés et mal ventilés.Phto : Douglas Sage

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L’Observatoire de l'ozone stratosphérique arc-tique (OOSA) d’Environnement Canada situéà un point élevé dans l’Arctique canadien, àmoins de 100 km du pôle Nord, est entré enservice en 1993. Il nous fournit de précieuxrenseignements sur l'état de la couche d'ozonequi recouvre le Nord canadien. Malheureuse-ment, il semble que l’OOSA ne célébrera passon dixième anniversaire puisque l’établisse-ment est mis au rancart, ce qui permettra augouvernement fédéral d’économiser environ300 000 $ par année sur les frais d’exploitationde base. Cette somme peut sembler considérable, mais en comparai-son, le coût de la tenue du Sommet du G8 à Kananaskis, qui a duré 30 heures, équivautaux frais d’exploitation de l’OOSA pendant 1 000 ans !

L’OOSA est situé sur la crête d’une mon-tagne, près de Slidre Fjord sur l’île d’Ellesmere,à environ 15 km de la station météorologiqueEureka (80°N, 86°O), au Nunavut. L’em-placement est idéal pour les mesures atmos-phériques, car le site en haute latitude et hautealtitude offre un ciel clair pendant presquetoute l’année. En outre, le vortex arctique, unemasse d’air froid isolée qui sert de contenantpour les réactions chimiques qui causent ladestruction de l’ozone, passe régulièrementau-dessus de l’endroit, ce qui permet de fairedes observations à l’intérieur et à l’extérieur

de cette région perturbée par des réactionschimiques. Cette possibilité nous aide beau-coup à élucider les processus chimiques etphysiques qui déterminent le bilan de l’ozonestratosphérique.

L’établissement ultra-moderne a été missur pied par Environnement Canada suite auxpréoccupations exprimées sur l’avenir de lacouche d’ozone qui s’amincit au-dessus del’Arctique canadien. Il abrite une panoplied’instruments scientifiques qui servent àmesurer l’ozone stratosphérique et divers gazà l’état de traces impliqués dans la chimie del’ozone ainsi que la température de l’atmos-phère et les profils des aérosols. Ces instru-ments (plusieurs construits par des entreprisescanadiennes) sont exploités par le Servicemétéorologique du Canada (SMC) et par les

partenaires en recherche de plusieurs univer-sités du Canada, du Japon et des É.-U. On noteen particulier la participation des Japonais. Uncertain nombre d’instruments ont été conçuset utilisés par des scientifiques du Meteoro-logical Research Institute, du CommunicationsResearch Laboratory et des universités deFukuoka et de Nagoya.

En peu de temps, les intéressés ont reconnul’importance de l’OOSA pour les mesuresatmosphériques à l’échelle mondiale, l’obser-vatoire ayant été désigné comme élément dela station primaire pour l’Arctique du Réseaumondial de détection du changement stratos-phérique (RMDCS) coordonné par l’Orga-

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avons constaté que l’étude ne cadrait pas avecle mandat de la plupart des organismes definancement. Grâce au plus nouveau gouver-nement, qui est l’un des plus petits gouverne-ments du Canada, le ministère de la Santé etdes Services sociaux du Nunavut a considérécomme prioritaire le problème des infectionsrespiratoires chez les enfants et a bien vouluaccorder un soutien aux recherches supplé-mentaires.

En janvier 2002, nous avons entrepris la

phase suivante, une étude cas-témoin quiinclut tous les enfants de moins de cinq ansadmis à l’hôpital général de Baffin. Encoreune fois, il faut examiner les facteurs infec-tieux et les facteurs environnementaux desinfections des voies respiratoires inférieurespour cette population, et surtout élucider lerôle du SN.

Lorsque nous comprendrons la cause desinfections respiratoires dans la région de Baf-fin, nous pourrons exercer une réelle influ-

ence. Et nous espérons que les responsabless’attaqueront aux facteurs contributifs proba-bles – tabagisme, logements surpeuplés etpauvreté. Le taux inacceptable d’infectionsrespiratoires à Baffin sera alors une préoccu-pation du passé.

Anna Banerji est pédiatre et spécialiste desmaladies infectieuses au Département depédiatrie de l’Université de la Colombie-Britannique.

L’Observatoire de l'ozone stratosphérique arctique.Photo : M.R. Bassford, Université de Toronto

L E C A N A D A F E R M E S O N O B S E R V A T O I R E D E L ' O Z O N E A R C T I Q U E

Kimberly Strong

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nisation météorologique mondiale. Ainsi, lafermeture de l’OOSA élimine l’un des princi-paux sites du système mondial chargé de sur-veiller la reconstitution (ou non) de la couched’ozone après la signature du Protocole deMontréal et de ses modifications ultérieuresqui visent à réglementer la production dechlorofluorocarbures (CFC) destructeurs del’ozone. Cette fermeture signifie que le Cana-da, qui possède une énorme masse de terreincluant environ 30 % de l’Arctique (plus de60°N), n’a malheureusement plus de sitespleinement engagés dans le RMDCS.

Mes propres interventions en rapport avecl’OOSA ont commencé en 1999, lorsque nousavons déployé pour la première fois notrespectromètre à réseau à l’observatoire, quandla nuit polaire se terminait, à la fin de février.Des étudiants et titulaires de bourses post-doctorales de mon groupe de recherche ontcontinué d’amener notre appareil dans l’Arc-tique durant les trois hivers qui ont suivi. Lanécessité d’équiper le système pour qu’il puissefonctionner dans les températures frigides, àEureka (souvent inférieures à –50°C) consti-tuait un défi. Nous avons trouvé une solutionen mettant l’appareil dans un étui thermosta-tique à l’épreuve des intempéries que nousavons installé sur le toit de l’OOSA. En outre,nous avons automatisé le fonctionnement duspectromètre, de manière à pouvoir le laisserprendre des mesures sans surveillance pen-dant plusieurs mois. Nous exercions un con-trôle interactif à partir de Toronto, avec l’aidedu chef de la station du SMC, à Eureka, aubesoin.

Notre but : prendre des mesures durant leprintemps polaire, c’est-à-dire lorsque surgis-sent les perturbations de la stratosphère néces-saires à la destruction de l’ozone. L’instrumentenregistre les spectres d’absorption UV-visiblesde la lumière dispersée au lever et au coucherdu soleil, qui peuvent produire les concentra-tions d’ozone, de NO2, de BrO et d’OClO. Ilapportait un complément aux mesures prisesà l’OOSA par les lidars, les spectromètresinfra-rouges et d’ondes millimétriques et lesspectromètres d’ozone Brewer qui étaientinstallés à l’observatoire.

En combinant les observations d’excellentequalité faites à l’aide de tels instruments, il estpossible d’obtenir un ensemble complet dedonnées pouvant servir à l’examen des ques-tions non résolues sur l’état et l’évolutionfuture de la couche d’ozone. L’ozone de lastratosphère est crucial en ce qui a trait au climat de la Terre. Il est surtout considérécomme un gaz qui absorbe très efficacementles rayons UV-B nuisibles et qui protège labiosphère contre le rayonnement susceptiblede causer le cancer de la peau et des affectionsoculaires chez les humains, de nuire à la végé-

chlore due aux émissions anthropiques deCFC. Cette situation est particulièrement gravedans les régions polaires, vu les diminutionsconsidérables de l’ozone observées au-dessusde l’Antarctique à la fin de l’hiver et au débutdu printemps. Au cours des années 90, on asouvent noté un appauvrissement de l’ozonede la basse stratosphère au printemps, au-dessus des régions arctiques, et ces dernièresannées on a enregistré de très faibles colonnesd’ozone, notamment des pertes d’ozone cu-mulatives de 60 % à 18 km au début de 2000.Au-dessus de l’Extrême-Arctique canadien, le

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L’installation de notre spectromètre sur le toit de l’OOSA,au printemps 2001. Sur la photo : le Dr Stella Melo etElham Farahani de l’Université de Toronto, Vivek Voora, leDr Richard Mittermeier et le Dr Hans Fast du Servicemétéorologique du Canada. Photo : Y. Makino, JapanMeteorological Agency

tation et aux organismes marins et de décom-poser des matières comme le plastique et lepapier. Cependant, l’absorption du rayon-nement par l’ozone est aussi le principal fac-teur de réchauffement dans la stratosphère,qui influe sur les vents stratosphériques. Donc,la diminution des concentrations d’ozonestratosphérique produira vraisemblablementles effets suivants : une augmentation desrayons UV-B qui parviennent à la terre et desréactions photochimiques qui dépendent desUV dans la troposphère, la réduction des tem-pératures stratosphériques, et éventuellement,des changements dans la dynamique de lastratosphère. En fait, les mesures prises par lespectromètre d’ozone Brewer d’Environne-ment Canada ont prouvé l’existence d’un lienentre l’amincissement de l’ozone et l’augmen-tation des rayons UV.

Les concentrations d’ozone stratosphé-rique ont beaucoup diminué depuis environ1980, suite à l’augmentation des niveaux de

taux de réduction moyen pour les deux der-nières décennies s’élève à environ 12 %.

L’appauvrissement de l’ozone en milieupolaire est un effet saisonnier, qui commenceavec la formation de nuages stratosphériquespolaires (NSP) dans le vortex au cours del’hiver polaire froid. Des réactions hétérogènessur les surfaces de ces nuages convertissent lechlore chimiquement inactif en une formeplus réactive, et lorsque l’ensoleillementrevient, au printemps, il libère des atomes dechlore qui détruisent l’ozone dans un cyclecatalytique. Ce phénomène se poursuit jus-qu’à ce que le Soleil entraîne la dissolutiondynamique du vortex d’hiver et que les NSPs’évaporent.

Jusqu’ici, la déperdition d’ozone au prin-

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temps a été moins grave au-dessus de l’Arc-tique que celle observée au-dessus de l’Antarc-tique parce que les températures stratosphé-riques, en Arctique, sont habituellement plusélevées, et ainsi la formation de NSP néces-saires à la réaction chimique qui détruit l’ozone, est moins fréquente. Cependant, on sepréoccupe de plus en plus à propos de l’ozonede l’Arctique car les modèles laissent supposerque les concentrations croissantes de gaz àeffet de serre pourraient refroidir la stratos-phère arctique. (Les gaz à effet de serre ré-chauffent la basse atmosphère, mais ce pié-geage de la chaleur près de la surface entraîne

de surveillance à long terme de l’ozone, desCFC, des aérosols, de la température, et descomposés de chlore, de brome et d’azote quijouent tous un rôle dans la chimie de l’ozone,nous pourrons seulement deviner ce qui sepassera. Le Canada doit continuer de réaliserde telles mesures à long terme si nous voulonsprendre part aux tentatives internationalespour comprendre le changement de climat.Ces données sont importantes aussi pour lavalidation des mesures satellitaires, commecelles de la mission SCISAT-1 du Canada quicommencera avec le lancement du satellite,en 2003.

la science nordique et la surveillance environ-nementale. Exemple : le budget d’Environne-ment Canada a été réduit, étant passé de 800millions $ en 1988 à 550 millions $ en 1998, etmaintenant ce ministère est le plus petit minis-tère du gouvernement fédéral. Même si depuislors le budget a été augmenté et s’élève main-tenant à 650 millions $, cette réduction a eudes répercussions directes sur le budget derecherche des scientifiques d’EnvironnementCanada. Certains étaient mécontents et ontquitté le ministère. Ceux qui restent se voientobligés de prendre des décisions difficiles etdoivent choisir entre les options suivantes : fer-mer l’OOSA, réduire des projets de recherchetout aussi importants, ou remettre à plus tardles réparations de l’infrastructure vieillissantede stations météorologiques.

Que ferons-nous à l’avenir? L’an prochain,nous pourrions déployer notre spectromètre àResolute Bay, où il y a un observatoire gérépar SRI International au nom de la NationalScience Foundation des É.-U. Cependant, lesmesures à cet endroit portent sur la hauteatmosphère, et non pas sur la stratosphère.Donc, nous ne pourrons plus combiner nosmesures avec celles des instruments complé-mentaires, comme nous l’avons fait à l’OOSA.Malheureusement, cela limitera la valeur sci-entifique des données que nous recueillons.

À plus long terme, nous espérons que lesresponsables trouveront des fonds afin derouvrir l’OOSA, compte tenu de son impor-tance pour la science arctique au Canada et àl’échelle internationale. Idéalement, Environ-nement Canada devrait s’en charger, vu quel’administration fédérale joue un importantrôle dans la surveillance de l’atmosphère àlong terme. Il est plus difficile pour les univer-sités d’exploiter un tel établissement, notam-ment à cause de la durée relativement courtedes postes confiés à des étudiants diplômés et àdes chercheurs au niveau postdoctoral. Ce-pendant, de nombreux scientifiques, au Cana-da et à l’étranger, ont été passablement con-sternés par la mise au rancart récente del’OOSA et donc, nous tentons de former unconsortium de partenaires des universités etdes gouvernements qui pourrait sauver l’ob-

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Vue de l’OOS. Photo : M.R. Bassford,Université deToronto

le refroidissement de la stratosphère.) Selonles prévisions, ce phénomène accentueral’amincissement de l’ozone qui atteindra un sommet au cours des 10–20 prochainesannées dans l’Arctique, et la colonne d’ozonetotal pourrait être réduite jusqu’aux deux tiers.Ce sont les mesures prises par l’OOSA qui ontfourni la première preuve que le réchauffe-ment planétaire augmentait la déperditiond’ozone en Extrême-Arctique.

Il importe donc plus que jamais de faire desobservations comme celles qui peuvent êtreréalisées à l’OOSA. Les effets d’atténuation duProtocole de Montréal et de ses modificationsen ce qui a trait à la réduction des CFC seront-ils contrés par les concentrations croissantesde gaz à effet de serre et la diminution destempératures stratosphériques qui en résulte ?Quelles seront les répercussions des concen-trations changeantes d’autres constituants,comme le méthane, l’oxyde nitreux, la vapeurd’eau et les aérosols de sulfate ? S’il n’y a pas

La fermeture de l’OOSA est un signe de ladiminution de l’intérêt du Canada pour larecherche nordique. La « crise aiguë » à cetégard a été reconnue dans le rapport duGroupe de travail national sur la recherchenordique « De l’état de crise à la relance :Rétablir le rôle du Canada dans la re-cherche nordique » qui a été publié en 2000.De plus en plus, les études sur l’Arctique cana-dien sont réalisées par des scientifiques desautres pays qui se rendent compte de l’impor-tance de cette région en tant que systèmed’alerte rapide pour les changements plané-taires (voir « Toundra Nord-Ouest 99 », Méridi-en, automne/hiver 2001). Les compressionseffectuées par le gouvernement du Canada aucours des dix dernières années ont eu des con-séquences désastreuses sur notre capacité defaire des recherches, surtout en rapport avec

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servatoire. Pour vraiment le faire fonctionnerà pleine capacité, il faudrait au moins 1 mil-lion $ par année. Cette initiative dirigée parmon collègue, le professeur Jim Drummond del’Université de Toronto, en est encore à sesdébuts. Son succès demandera des efforts etdes ressources considérables, mais noussommes convaincus que l’OOSA doit resterouvert. Le Canada a une obligation envers sapopulation et vis-à-vis de la collectivité mon-diale. Il doit faire sa part en ce qui a trait à lasurveillance de la stratosphère arctique aucours des prochaines années durant lesquellesnous essaierons d’élucider les processus com-plexes du système climatique qui entraînentdes rétroactions entre l’ozone stratosphériqueet le changement de climat.

Kimberly Strong est professeure agrégée auDépartement de physique de l’Université deToronto.

Remerciements Ma recherche sur l’Arctique a été directementfinancée par la Fondation canadienne pour lessciences du climat et de l'atmosphère, CRSNG,le Programme de formation scientifique dansle Nord et la Fiduciaire canadienne d’étudesnordiques. Nous sommes aussi très reconnais-sants de l’aide et du soutien logistique quenous ont fournis les scientifiques d’Environ-nement Canada, qui s’occupent de l’OOSA, àEureka.

Pour de plus amples renseignements Pour plus de détails sur la recherche atmos-phérique à l’Université de Toronto, consulterle site atmosp.physics.utoronto.ca.

Pour obtenir des renseignements surl’OOSA, consulter le site Web d’Environne-ment Canada http://exp-studies.tor.ec.gc.ca/e/eureka/eureka.htm.

Le rapport du Groupe de travail nationalsur la recherche nordique « De l’état de criseà la relance : Rétablir le rôle du Canadadans la recherche nordique » est sur le siteftp:// ftp.nserc.ca/pub/nserc_pdf/nor/crisis.pdf.

Le site Web du Réseau mondial de détec-tion du changement stratosphérique est lendsc.ncep.noaa.gov/.

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Figure 1

Figure 2

Les Canadiens recherchent continuellement denouvelles sources d’énergie pour remplacer lescombustibles fossiles conventionnels qui coû-tent de plus en plus cher et dont les réservessont en train de s’épuiser. Les réservoirs d’hy-drates de gaz trouvés dans les profondeurs duplancher océanique qui recouvre le plateaucontinental pourraient fournir un nouveaucombustible.

L’existence d’hydrates de méthane a étéconstatée pour la première fois il y a plus desoixante-dix ans, lorsque des boues glacéesobstruaient les gazoducs. Les hydrates ont étéconsidérés comme une nuisance jusqu’en1964, quand une équipe de forage russe adécouvert des hydrates de méthane d’originenaturelle dans un champ de gaz de la Sibérieet reconnu leur potentiel en tant que res-source. Depuis lors, l’intérêt pour cette sourcede gaz naturel s’est accru, et maintenant lesspécialistes estiment que les hydrates de gazrecèlent un énorme potentiel.

Les hydrates de gaz sont des matièressolides cristallines composées de molécules degaz piégées dans des cages formées par desmolécules d’eau appelées clathrate (Figure 1).De nombreux gaz, comme le dioxyde de car-bone et le sulfure d'hydrogène, peuvent for-mer des hydrates de gaz, mais le méthaneconstitue la plus grande partie des hydrates degaz marins. Il représente donc une sourceconsidérable de gaz naturel.

Les hydrates peuvent stocker d’énormes

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quantités de méthane. Un volume d’eau peutemprisonner 207 volumes équivalents deméthane à la pression atmosphérique nor-male. Un réservoir d’hydrates de gaz peutcontenir 170 fois plus de gaz qu’un réservoirde gaz naturel à haute pression conventionnelde volume égal.

Les principaux facteurs qui interviennentdans la formation des hydrates de gaz et leurstabilité sont la pression, la température, lachimie des gaz, la teneur en sel des eaux inter-stitielles, la porosité des sédiments qui les ren-ferment et l’abondance de gaz libre. Les hyd-rates de gaz sont présents dans la nature à deshautes pressions et à des températures avoisi-nant 0°C. Les hydrates des sédiments se disso-cient rapidement lorsqu’ils sont amenés à lasurface par une baisse de la pression et uneaugmentation de la température. En fait, lessédiments éclatent à la surface, lorsque leshydrates se décomposent et quand le méthanetrès concentré s’échappe dans l’atmosphère.

Les sédiments peuvent même s’enflammerquand les concentrations d’hydrate de mé-thane sont assez élevées (Figure 2). C’est à cephénomène que le terme « glace inflammable »

L ’ E X P L O R A T I O N S U R L E S H Y D R A T E S D E G A Z

D A N S L ’ A R C T I Q U E Adrienne Ethier

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deux fois la totalité des réserves de pétrole, degaz naturel et de charbon connues. Des tra-vaux d’exploration et des essais de productionont été entrepris au Canada avec la collabora-tion d’autres pays, notamment le Japon,l’Allemagne, les États-Unis et l’Inde.

L’un des plus vastes réservoirs d’hydratesde gaz connu dans le monde se trouve dans larégion du delta du Mackenzie et de la mer deBeaufort, dans le Nord canadien (Figure 3).En 1979, la pétrolière Shell a creusé plusieurspuits d’exploration dans le delta du Macken-zie. Le site de forage Mallik L-38 et les autrespuits d’exploration ont confirmé l’existenced’une épaisse couche (~200 m) d’hydrates degaz dans la région.

En 1998, une équipe dirigée par la Com-mission géologique du Canada a foré un puitsde recherche, près de Mallik L-38, afin de

prélever des échantillons et de tester la res-source d’hydrate de gaz. Le nouveau puits,Mallik 2L-38, a réuni des scientifiques duCanada, des États-Unis et du Japon venus pourexaminer le profil vertical des hydrates de gazprésents dans les sédiments afin d’en appren-dre davantage sur les phénomènes géolo-giques qui influent sur l’augmentation deshydrates et leur répartition. L’une des princi-pales composantes du projet, l’extractiond’une carotte de sédiments renfermant deshydrates de gaz, a permis aux scientifiques dese procurer des échantillons d’essai. Les résul-tats ont donné lieu à la planification d’undeuxième programme, plus ambitieux. Aprèsdeux années de préparation, y compris l’in-stallation avant le gel de l’équipement qui aété transporté jusqu’au site par péniche, lesopérations de forage ont commencé en dé-cembre 2001 (Figure 4).

Cette année, à la fin de février, je me suisjointe aux nombreux chercheurs du projet, à l’institut de recherche d’Inuvik, dans les T.N.-O. Nous étions chargés de prélever deséchantillons sur les carottes qui provenaientdu site de forage. J’ai recueilli environ 1 300échantillons. Au cours des prochaines années,ils seront analysés à l’Université d’Ottawapour que nous puissions en savoir plus sur lagéochimie des hydrates de gaz dans leur envi-ronnement naturel. Les méthodes géochi-miques fondées sur les isotopes nous permet-tront de déterminer les détails de la formationet dissociation des hydrates de gaz dans lessédiments. Cette information aidera les autreschercheurs qui participent au projet à mieuxcomprendre le comportement des hydrates degaz dans l’environnement. Nous espéronsqu’elle facilitera l’élaboration de méthodes deproduction ainsi que l’estimation des risquesde contamination. L’information sur la re-cherche et les essais de production sera four-nie sur le site Web de Mallik, au http://icdp.

gfz-potsdam.de/html/sites/mallik/index/.

Le méthane est à peu près 20 fois plus effi-cace que le dioxyde de carbone comme gaz àeffet de serre. Comme les hydrates libèrent duméthane à la température et à la pressionambiantes à la surface, certains craignent que

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doit son origine puisque la dissociation deshydrates de gaz fait geler les sédiments quirenferment les hydrates lorsque ceux-ci sontsoumis aux pressions ambiantes à la surface.

Les hydrates se forment dans les espacesinterstitiels des sédiments, à une profondeurde 130 à 2 000 mètres au-dessous du plancherocéanique, le long des marges de la plupartdes continents. De vastes dépôts ont été repé-rés dans le fossé de Nankai, au large des côtesdu Japon, le long de la côte ouest de l’île deVancouver, et dans la crête Blake, au large dela Caroline du Sud. On trouve aussi des hyd-rates dans les profondeurs des sables du deltadu Mackenzie, sur le littoral de l’Arctiquecanadien.

Selon des estimations prudentes, la quan-tité totale de carbone lié que contiennent leshydrates de gaz représenterait entre 2 800 et 7 600 000 trillions de mètres cubes de gaz, soit

Figure 3

MALLIK

TUKTOYAKTUK

DELTA DU

MACKENZIE

INUVIK

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l’exploitation de cette ressource accélère leréchauffement de la planète. Mais l’exploita-tion de la ressource ne pose pas de problèmessi elle est limitée au remplacement du gazconventionnel. La relation en ce qui a trait auréchauffement mondial est positive : la re-cherche effectuée sur le site de Mallik permet-tra d’augmenter et d’améliorer les donnéesqui servent à créer des modèles sur le climatmondial, car le méthane est un combustiblerelativement « propre ».

La recherche sur les dépôts d’hydrates deméthane de Mallik fournira des données pré-cises pour les modèles sur le changement declimat. Le rôle que pourrait jouer le méthanedans le réchauffement planétaire est un sujetcontroversé. Le méthane est une importantecomposante à l’état de traces de l’atmosphère.Il provient d’une grande variété de sources etde puits, dont les hydrates de méthane. Lalibération soudaine de méthane pourraitaffecter la composition de l’atmosphère etcontribuer au réchauffement mondial (voirG.R. Dickens, 1999, « The blast in the past »,

Nature 401: 752–755 et M.E. Katz, D.K. Pak etal., 1999, « The source and fate of massive car-bon input during the latest paleocene ther-mal maximum », Science 286: 1531–1533),mais le méthane des hydrates de gaz s’échap-pera vraisemblablement plus lentement à lalongue. Ainsi, les processus microbiens etchimiques les oxyderaient et les transfor-meraient en dioxyde de carbone qui seraitensuite absorbé par les océans. On estime quele méthane qui atteindrait l’atmosphère pro-voquerait une réaction avec les radicauxhydroxyles et disparaîtrait en une période d’àpeu près dix ans.

L’autre principale préoccupation en rap-port avec les hydrates de gaz a trait aux ris-ques associés au forage et à la production,c’est-à-dire les éruptions subites et les rupturesde tubage. Les boues de forage utilisées dansles puits d’exploration en 1998 et 2002 ont per-mis de séquestrer la dissociation des hydratesde gaz lorsqu’ils étaient retirés de la carotte, ce

qui a réduit le risque d’éruptions de méthane.Le processus d’extraction des hydrates enquantités commerciales se borne à exposer lessédiments aux changements de température etde pression pour que le gaz se dissocie deshydrates. Ainsi, la libération de méthane noncontrôlée est fort peu probable, et si un telaccident se produisait, il serait très localisé.

Enfin, l’extraction des hydrates de gazpourrait nuire à la stabilité du plancher océ-anique. Les hydrates de gaz gelés remplissentles interstices dans les sédiments, agissantcomme du ciment. L’extraction des hydratespourrait affaiblir les sédiments et entraîner desglissements de terrain sous-marins, ce quipourrait menacer les structures situées dansles environs (comme les puits de gaz conven-tionnels ou les câbles sous-marins).

La demande des consommateurs pour legaz naturel augmente. À mesure que les réser-voirs actuels s’épuiseront, il faudra trouver dessources d’approvisionnement en méthanerentables. Les hydrates de gaz pourraientjouer un rôle majeur en freinant les augmen-tations des prix et en garantissant à longterme un approvisionnement en combustiblefiable, à des prix abordables. À la longue,quand les chercheurs trouveront les réponsesaux questions environnementales et auxautres questions non réglées en rapport avecles hydrates de gaz, à mesure que les tech-niques de production seront mises au point –et que le prix du gaz augmentera – la produc-tion de combustible à partir des hydrates degaz deviendra viable. Il est fort probable qu’aucours des vingt prochaines années cette sourcede combustible servira à combler nos besoinsquotidiens.

En participant au projet de Mallik, le Cana-da joue un rôle prépondérant dans l’explo-ration et la mise en valeur des hydrates degaz. Grâce à son intervention, le gaz naturelprovenant de la « glace inflammable » pourraitdevenir l’une des principales ressourcesénergétiques du Canada.

Adrienne Ethier est étudiante au niveau dudoctorat à la faculté des sciences de la terrede l’Université d’Ottawa.

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Writing on Ice. The Ethnographic Note-books of Vilhjalmur Stefansson, révisé etprésenté par Gisli Palsson, 2001. UniversityPress of New England, Hanover et Londres. xiv+ 351 pages.

Vilhjalmur Stefansson a consacré la plusgrande partie de la période 1906–1918 à desexpéditions dans les régions arctiques duCanada et de l’Alaska. Il a participé aux deuxpremières expéditions à titre d’ethnographe,et Writing on Ice présente des extraits descomptes rendus personnels de ses observa-tions ethnographiques. Il a lui-même dirigé satroisième expédition, qui fut la plus longue etla plus connue. Il estimait alors jouer davan-tage un rôle de géographe et d’explorateur. Unmembre de son expédition était M. DiamondJenness, qui est devenu plus tard un très éminent anthropologue canadien, et M. Stefansson l’a laissé s’occuper du travaild’ethnographie.

M. Palsson signale que les extraits descomptes rendus de Stefansson sur l’anthro-pologie ont déjà été publiés par Clark Wissler,conservateur en anthropologie à l’AmericanMuseum of Natural History, dans le volume 14des articles du musée sur l’anthropologie inti-tulé « Stefansson-Anderson Arctic Expedi-tion ». La partie I présente le propre « rapportethnologique préliminaire » de Stefanssonsuivi des extraits de Wissler qui devaient êtreles données anthropologiques utiles nonincluses dans l’ouvrage de Stefansson inti-tulé My Life with the Eskimo présentés dans l’ordre chronologique. La partie II rédigée parClark Wissler s’intitule « Harpoons and Dartsin the Stefansson Collection », et la dernièresection inclut les corrections et commentairesde Stefansson sur plusieurs points. Ces pas-sages ont été écrits sur le terrain, lorsqu’il nepouvait pas voir les épreuves.

Les extraits révisés par Palsson sont lerésultat d’une très soigneuse compilation faitepar cinq étudiants en anthropologie islandais

à partir de microfilms des comptes rendus quiont été intégrés aux collections spéciales duDartmouth College. Ils peuvent donc être uti-lisés par les chercheurs. Cependant, ils n’in-cluent pas l’information archéologique ougéographique fournie par Wissler et ne sontpas faciles à suivre car les deux cartes sonttrop petites et difficiles à lire. Les cartes claires,publiées dans My Life with the Eskimo, ontété reproduites dans le rapport du musée. Enoutre, les corrections apportées par Stefanssondans le rapport du musée ne sont ni incluses,ni mentionnées. Certaines parties des comptesrendus ont été rédigées en islandais, probable-ment parce que Stefansson les considéraitcomme confidentielles. Elles ont été traduitesen anglais par le réviseur, qui est professeurd’anthropologie à l’université de l’Islande. À ma connaissance, c’est la première foisqu’elles sont publiées.

Dans l’introduction intitulée « HistoricalBackground », le réviseur semble avoir vouluapporter de nouveaux éclaircissements surcertains aspects de la carrière de Stefansson.L’un d’eux concerne sa relation avec FanniePannigabluk, la couturière experte de sa deu-

xième expédition. Son fils, Alex, et les enfantsde Stefansson utilisent le nom Stefansson, et larelation a été généralement acceptée, quoiquejamais publiquement reconnue par Stefans-son. Un autre aspect a trait au leadership de latroisième expédition, qui était dirigée par Stefansson. Celle-ci avait été divisée en deuxsections, soit le Northern Party et le SouthernParty. Le Northern Party s’intéressait surtout àl’exploration, et Stefansson en était le chef àtous points de vue. Le Southern Party, quiregroupait la plupart des scientifiques de l’ex-pédition, était dirigé par M.R.M. Anderson, qui avait accompagné Stefansson à sa deu-xième expédition. Les rapports entre les deuxhommes étaient parfois tendus. La plupart desmembres du Southern Party considéraientleur participation comme indépendante ducontrôle de Stefansson, qui a refusé d’accepterune déclaration écrite à cet égard. Mais, en-core une fois, cela n’est pas nouveau.

Un autre point qui a suscité l’intérêt duréviseur est la référence aux Eskimo blondsfaite par Stefansson. Lors de sa deuxièmeexpédition, Stefansson a été le premier ethno-graphe à entrer en contact avec les inuits ducuivre de l’île Victoria. D’après lui, ces der-niers étaient en plusieurs points différents desautres Eskimo du cuivre qui vivaient dans lesrégions continentales, et leur peau était plusclaire. Stefansson estimait que ces différencespouvaient être dues aux liens avec les Vikingsqui avaient colonisé une partie du Groenlandplusieurs centaines d’années plus tôt, et donton ne connaît guère l’histoire postérieure.Cette supposition a suscité un grand intérêt,mais Diamond Jenness ne l’a pas acceptée etn’a pas confirmé que les Eskimo blondsétaient sensiblement différents des autres inu-its dans les rapports détaillés qu’il a rédigéssur les Eskimo du cuivre. Cette controverse anui à la crédibilité de Stefansson en matièred’anthropologie.

Dans cette œuvre savante, le professeurPalsson essaie de montrer comment les

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C R I T I Q U E D E L I V R E : W R I T I N G O N I C E

Graham W. Rowley

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N O U V E A U X M E M B R E SA U C O N S E I L

D E L A C O M M I S S I O NC A N A D I E N N E

D E S A F F A I R E SP O L A I R E S

La Commission canadienne des affaires po-laires souhaite la bienvenue aux nouveauxmembres du conseil : Jocelyn Barrett (Kuu-jjuaq), Gordon Miles (Iqaluit) et Leah Otak(Igloolik). Nous remercions les membres sor-tants, Julie Cruikshank, Jean Dupuis et WayneAdams, pour le travail accompli au nom de laCommission.

Peter Johnson, ancien vice-président, rem-place Michael Robinson au poste de président.MM. Robinson et Piers McDonald demeurent àleur poste de membre, et Richard Binder est lenouveau vice-président.

U N E S T R A T É G I E D E S C I E N C E

A N T A R C T I Q U E P O U R L E C A N A D A

La Commission canadienne des affaires po-laires et le Comité canadien de la rechercheantarctique ont publié La science antarc-tique et les liens bipolaires : une stratégiepour le Canada. Les intéressés peuventobtenir ce document en s’adressant à la Com-mission ou le consulter en ligne sur le sitepolarcom.gc.ca.

L A L A U R É A T E D E L A B O U R S E

D E L A C O M M I S S I O NC A N A D I E N N E

D E S A F F A I R E SP O L A I R E S

Julie Ross, une étudiante au doctorat de l’Uni-versité de Toronto, a remporté la bourse d’unevaleur de 10 000 $ de la Fiduciaire canadienned’études nordiques accordée par la Commis-sion canadienne des affaires polaires pour2002–2003. Madame Ross utilise des donnéesarchéologiques ainsi que des vestiges dediatomées et de pollen recueillis dans la régionde Cambridge Bay, au Nunavut, pour étudierles liens entre, d’une part, les changementsenvironnementaux et, d’autre part, les migra-tions humaines et l’évolution culturelle régio-nale aux époques passées. Nous la félicitons etlui souhaitons du succès dans ses recherches.

L E N O R T H E R NR E S E A R C H F O R U M

S E T I E N D R A A UC A N A D A E N 2 0 0 4

Le Northern Research Forum réunit des scien-tifiques, politiciens, leaders des collectivités,étudiants, universitaires, bureaucrates et gensd’affaires pour débattre des questions nor-diques dans une ambiance favorable auxlibres échanges (voir Méridien, printemps/été 2001). Les délégués qui ont participé audeuxième Forum, à Veliky Novgorod, Russie,en septembre 2002, ont voté pour que la troi-sième réunion ait lieu dans le Nord canadienen 2004. Le lieu exact sera choisi au cours desprochains mois.

O P P O R T U N I T É D EF I N A N C E M E N T :

C H U R C H I L LN O R T H E R N S T U D I E S

C E N T R E

Le Churchill Northern Studies Centre a leplaisir d’annoncer la compétition NorthernResearch Fund (NRF) pour la saison de re-cherche 2002–2003. Le NRF est un program-me de fonds de contrepartie qui fournit appuifinancier, logement, et location d’équipementaux personnes qualifiées qui entreprennentdes recherches à partir du Churchill NorthernStudies Centre à Churchill, au Manitoba. Leprogramme est disponible aux chercheurs detous les niveaux universitaires et post-univer-sitaires de tous les domaines, y compris les sci-ences sociales.

Les candidats peuvent demander de l’aideprovenant d’un fonds de 7 000 $ en finance-ment direct, de 250 jours-usagers (logement etrepas), de 100 jours-véhicules (véhicules et/ouéquipement, excluant carburant), ou despasses ferroviaires ou aériennes selon disponi-bilité. La date limite de soumission à la com-pétition de cette année est le 6 décembre 2002.Pour plus de renseignements veuillez visiter lesite Internet : cancom.net/~cnsc. Le ChurchillNorthern Studies Centre est appuyé par Mani-toba Conservation, Calm Air InternationalLtd., Via Rail Canada, et par les dons prove-nant de ses membres.

Michael Goodyear Executive DirectorChurchill Northern Studies Centre Box 610, Churchill, MB R0B 0E0 Tél. : (204) 675-2307 Téléc. : (204) 675-2139

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Scomptes rendus viennent étayer les solidescontributions de Stefansson dans le domainede l’ethnographie arctique et de rescaper Stefansson, l’anthropologue, qui avait été pré-senté comme un homme de scène dans le con-texte propre au monde de l’exploration, au

début du vingtième siècle. En tant qu’un deceux qui ont bénéficié grandement de la con-naissance encyclopédique et de la générositéde Stef et sa contribution à l’information surl’arctique, je peux souscrire aux vues de pro-fesseur Palsson.

Graham Rowley est un explorateur, archéo-logue et fonctionnaire à la retraite qui vit àOttawa.

Q U O I D E N E U F

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est publié par la Commission canadienne des affairespolaires.

ISSN 1492-6245© 2002 Commission canadienne des affaires polaires

Rédacteur : John BennettTraduction : Suzanne RebetezConception graphique : Eiko Emori Inc.

Commission canadienne des affaires polairesBureau 1710, Constitution Square360 rue AlbertOttawa, Ontario K1R 7X7

Tél. : (613) 943-8605Sans frais : 1-888-POLAR01Téléc. : (613) 943-8607Courriel : [email protected]

C O N S E I L D ’ A D M I N I S T R A T I O NJocelyn BarrettRichard Binder (Vice-Chairperson)Peter Johnson (Chairperson)Piers McDonaldGordon Miles Leah Otak Mike Robinson

H O R I Z O N

2002 5e colloque international «Land-Ocean Interactions in theRussian Arctic» (LOIRA)12–15 novembre 2002 P.P. Shirshov Institute of OceanologyRAS, Moscou, Russie

Renseignements : M. Vyacheslav Gordeev P.P. Shirshov Institute of Oceanology RAS 36 Nakchimovsky Prospect Moscou 117997, Russie Téléc. : 7-095/124-5983 Tél. : 7-095/124-7737

7e symposium international sur l’exploitation minière dans l’Arctique30 mars – 1er avril 2003Iqaluit, Nunavut, Canada nunanet.com/~cngo/isma.html

Renseignements : M. John E. UddScientifique principal Laboratoires des mines et

des sciences minéralesRessources naturelles Canada 555, rue Booth Ottawa (Ontario) Canada K1A 0G1 Tél. : 1-613-947-8383 Téléc. : 1-613-996-2597

3e conférence internationale sur les mammouths24–29 mai 2003Dawson City, Yukon, CanadaLa conférence internationale sur les mam-mouths concerne la recherche sur les mam-mouths, leur milieu et la faune connexe. Pour de plus amples renseignements, veuillezconsulter notre site Web, au yukonmuseums.ca/mammoth/index.htm.

Renseignements : John Storerpaléontologue du Yukon Téléc. : (867) 667-8007Courriel : [email protected].

4e conférence internationale sur les marges de l’Arctique (ICAM IV)30 septembre – 3 octobre 2003Halifax, Nouvelle-Écosse, Canada icamiv.org/

Renseignements : Mme Ruth JacksonTél. : 1-902- 426-3791 Téléc. : [email protected]

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SNous sommes en train de mettre à date notreinventaire des chercheurs et spécialistes po-laires canadiens. Si vous faites de la recher-che dans l’arctique, veuillez prendre quelquesminutes pour remplir le questionnaire ci-dessous. Vous en trouverez également une ver-sion sur notre site Internet : polarcom. gc.ca.

I N V E N T A I R E D E S C H E R C H E U R S E T S P É C I A L I S T E SP O L A I R E S

Nom

Affiliation

Adresse

Téléphone Télécopieur Courriel

Site internet

Descriptions des projets (2 à 3 lignes)

Domaine

Mots-clés

Emplacement géographique

Organisme(s) subventionnaire(s) et de soutien: Organisme(s) Montant

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Veuillez faire parvenir ce questionnaire à :

Commission canadienne des affaires polairesPièce 1710, Constitution Square360 rue AlbertOttawa, Ontario K1R 7X7

Télécopieur : (613) 943-8607Courriel : [email protected]