au delà de l’aide : un plan

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Au-delà de l’aide : un plan pour la coopération internationale canadienne Mai 2013 Par Anni-Claudine Bülles et Shannon Kindornay

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Page 1: Au delà de l’aide : un plan

Au-delà de l’aide : un plan

pour la coopération

internationale canadienne

Mai 2013

Par

Anni-Claudine Bülles et Shannon Kindornay

Page 2: Au delà de l’aide : un plan

ii

Table des matières Remerciements ............................................................................................................... iii

Acronymes et abréviations ..............................................................................................iv

Résumé ........................................................................................................................... v

Introduction ..................................................................................................................... 1

Cadres stratégiques et cohérence des politiques en matière de développement ........... 4

La cohérence des politiques en matière de développement comme programme

international ................................................................................................................. 5

Formes de cohérence des politiques ........................................................................... 7

Sources d’incohérence des politiques ........................................................................ 10

Assurer la cohérence des politiques en matière de développement .......................... 11

Cohérence des politiques en matière de développement au Canada ........................... 13

Cohérence interne : l’aide canadienne au cours de la dernière décennie ..................... 14

L’efficacité de l’aide : la pierre angulaire de l’aide canadienne .................................. 15

Tendances nationales et internationales en matière d’efficacité de l’aide .................. 16

Progrès sur l’efficacité de l’aide ................................................................................. 20

Continuité politique et priorités évolutives .................................................................. 21

Changer les pays de concentration ............................................................................ 25

Partenariats pour le développement : la nouvelle approche de l’ACDI ...................... 27

Raconter une histoire transparente et cohérente ....................................................... 29

Cohérence à l’intérieur du pays : l’engagement du Canada envers la cohérence des

politiques en matière de développement ....................................................................... 30

Une approche pangouvernementale .......................................................................... 31

Au-delà d’une approche pangouvernementale : la cohérence des politiques en

matière de développement......................................................................................... 32

Défis de la cohérence des politiques au Canada ....................................................... 33

Des solutions institutionnelles pour améliorer la cohérence des politiques en matière

de développement ..................................................................................................... 38

Une vision cohérente : améliorer la cohérence interne et la cohérence au sein d’un pays

...................................................................................................................................... 38

Conclusion : quelle vision? ............................................................................................ 40

Références .................................................................................................................... 41

Page 3: Au delà de l’aide : un plan

iii

Remerciements

L’Institut Nord-Sud (INS) remercie l’Agence canadienne de développement international

(ACDI) pour sa subvention de base et le Centre de recherches pour le développement

international (CRDI) pour sa subvention destinée au programme et au soutien

administratif. Ce rapport ne reflète pas nécessairement les opinions ou les points de

vue de l’INS, de son conseil d’administration, de l’ACDI, du CRDI ou de toute autre

personne consultée durant sa préparation.

Les auteurs remercient Kate Higgins et Bill Morton pour leurs commentaires et leurs

corrections, et Michael Olender pour la révision de la version définitive. Toute erreur et

omission leur appartiennent.

Page 4: Au delà de l’aide : un plan

iv

Acronymes et abréviations

ACDI Agence canadienne de développement international

OSC organisation de la société civile

FCD Forum pour la coopération en matière de développement (Nations

Unies)

MAECI ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du

Canada

MAECD ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du

Développement (Canada)

DFID Department for International Development (Royaume-Uni)

ECOSOC Conseil économique et social (Nations Unies)

FHN-4 Quatrième Forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide

OMD objectifs du Millénaire pour le développement

APD aide publique au développement

LRADO Loi sur la responsabilité en matière d’aide au développement

officielle (Canada)

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques

CAD-OCDE Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération

et de développement économiques

CPD cohérence des politiques en matière de développement

NU Nations Unies

APG approche pangouvernementale

Page 5: Au delà de l’aide : un plan

v

Résumé

Depuis le début des années 1990, le Comité d’aide au développement de l’Organisation

de coopération et de développement économiques (CAD-OCDE) a encouragé les

fournisseurs d’aide au développement officielle à prendre en considération l’incidence

des politiques autres que celles relatives à l’aide sur le développement. Ces politiques,

touchant des domaines comme le commerce, les investissements, la sécurité et la

migration, peuvent avoir (et ont presque toujours) des répercussions sur le

développement plus significatives que l’aide. Reconnaissant cette réalité, les décideurs

et les spécialistes du développement ont demandé aux membres du CAD-OCDE

d’accroître la cohérence des politiques en matière de développement (CPD) afin de

relever un défi : réduire la pauvreté à l’échelle mondiale et former un partenariat clair en

matière de développement. Les promoteurs ont encouragé la création de cadres

stratégiques généraux et l’établissement de mécanismes de coordination, afin de mieux

comprendre l’apport d’aide et autres aux pays en développement, et d’orienter les

décisions à ce sujet.

Ce document étudie l’approche que le Canada a adoptée à l’égard de la CPD. Il semble

que le cadre actuel orientant les efforts en matière d’aide étrangère – c’est-à-dire pour

améliorer l’efficacité de l’aide et la responsabilité – n’est pas un cadre général adéquat

pour définir l’approche du Canada en matière de développement. Pourquoi? Parce que

les efforts relatifs à l’efficacité de l’aide ne représentent qu’une infime partie de

l’engagement du Canada à l’égard des pays en développement. Il faut définir une vision

élargie qui comprend des politiques d’aide et autres afin que le Canada améliore la

CPD et soit un acteur stratégique en matière de développement international.

Le moment est venu d’instaurer un cadre stratégique au Canada. Dans son budget

fédéral de 2013, le gouvernement du Canada a annoncé la fusion de l’Agence

canadienne de développement international et du ministère des Affaires étrangères et

du Commerce international, créant ainsi le ministère des Affaires étrangères, du

Commerce et du Développement. Le gouvernement a indiqué que l’amélioration de la

cohérence des politiques est une raison importante justifiant le changement. Même si

les détails de la fusion n’ont pas encore été dévoilés, elle donne au gouvernement du

Canada une occasion de mettre en place un cadre général en ce qui concerne

l’engagement du Canada à l’égard des pays en développement qui articule clairement

le rôle du développement dans les politiques étrangères canadiennes.

Page 6: Au delà de l’aide : un plan

1

Introduction

Le Canada ne dispose pas de cadre stratégique officiel en matière de développement

servant à orienter son engagement à l’égard des pays en développement. Au cours des

dix dernières années, dans le cadre des différentes annonces concernant des

politiques, le gouvernement canadien a souligné son engagement à accroître l’efficacité

de l’aide, notamment en réduisant le nombre de pays qu’il aide et de secteurs dans

lesquels il s’implique. En outre, il s’est engagé à obtenir de meilleurs résultats et à

accroître la responsabilité1. Même si le gouvernement a un plan d’action pour accroître

l’efficacité de l’aide (voir ACDI, 2010b), les déclarations relatives aux nouveaux

programmes et initiatives en matière de développement ont été de nature plutôt

ponctuelle, faites dans le cadre de discours de ministres ou dévoilées dans des

communiqués de presse2. Les annonces concernant de nouvelles politiques et

initiatives ont tendance à être fragmentées, puisqu’elles ne découlent pas d’un plan

général formulé de manière à offrir une orientation à long terme et à assurer la

cohérence. Les nouvelles directives d’orientation ne sont pas élaborées dans le

contexte d’un cadre stratégique officiel en matière de développement qui oriente

l’engagement de l’Agence canadienne de développement international (ACDI) et

d’autres ministères à l’égard des pays en développement.

Dans son budget fédéral de 2013, le gouvernement du Canada a annoncé la fusion de

l’Agence canadienne de développement international et du ministère des Affaires

étrangères et du Commerce international (MAECI), créant ainsi le ministère des Affaires

étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD) (Canada 2013, 240-41). Le

gouvernement a indiqué que l’amélioration de la cohérence des politiques est une

raison importante justifiant le changement. Cependant, ce virage n’a pas été

accompagné par la création d’un cadre canadien en matière de politique étrangère qui

précise le rôle du développement sur le plan des politiques étrangères. Ainsi, les

membres de la communauté du développement ont exprimé des préoccupations quant

au fait que la fusion pourrait avoir, comme conséquence, que les priorités en matière de

développement occuperont de plus en plus un rôle secondaire, cédant la place aux

enjeux diplomatiques et commerciaux (Smillie 2013; Brown 2013; CBC News 2013).

Toutefois, d’autres membres ont souligné que ce changement institutionnel a du sens,

car il pourrait permettre de laisser plus de place au développement lors des débats

concernant les politiques étrangères et le commerce international. Cela permettrait

d’accroître davantage la cohérence des politiques (Chapin 2013; Paris 2013; Westhead

2013). 1 Voir Brown (2011) et ACDI (2010a, b, c; 2012a).

2 Voir, par exemple, ACDI (2011a, b; 2012d).

Page 7: Au delà de l’aide : un plan

2

Ces lacunes en matière de politiques ont des répercussions sur la cohérence des

politiques du Canada en matière de développement (CPD) et l’efficacité de l’aide du

Canada, sans égard aux structures institutionnelles. Les politiques autres que les

politiques d’aide pourraient ainsi nuire aux efforts de développement du Canada. Ces

autres politiques, comme les politiques commerciales, d’investissement et de migration,

peuvent avoir (et ont presque toujours) des répercussions sur le développement plus

significatives que l’aide. Il existe un certain degré d’incertitude en ce qui a trait à la

manière dont le gouvernement canadien mobilise des partenaires nationaux et

internationaux dans le domaine du développement, en raison de la nature de la

mobilisation et des priorités des programmes et des politiques. C’est attribuable à

l’absence d’un cadre stratégique général en matière de développement. En outre, cette

absence suggère que le gouvernement n’a pas la capacité ou, à tout le moins, la

volonté de formuler une vision et un cadre cohérents pour ses efforts en matière de

développement. Cela donne une mauvaise impression du Canada, et laisse entendre

que les politiciens ne s’engagent pas suffisamment en ce qui concerne la coopération

pour le développement, tout particulièrement en ce qui a trait à l’établissement des

objectifs généraux du Canada et à la manière dont ils seront atteints.

Il faut créer un cadre stratégique général pour l’engagement du Canada auprès des

pays en développement. Ce cadre renfermerait les politiques d’aide et autres politiques

du Canada. Sur le plan de l’aide, le cadre définirait la raison d’être de l’aide canadienne,

expliquerait les différentes politiques, comme celles liées aux priorités thématiques et

aux partenariats institutionnels, les placerait en contexte, et offrirait une orientation aux

représentants gouvernementaux et aux partenaires en matière de développement. Il

assurerait la cohérence interne des politiques d’aide du Canada, et fournirait une raison

d’être et une stratégie cohérente pour les efforts d’aide qu’il déploie à l’intention du

public, ce qui est important pour assurer la mobilisation publique et le soutien à l’égard

du développement. En ce qui concerne les politiques autres que les politiques d’aide,

ce cadre servirait aussi de point de départ pour améliorer la CPD du Canada, en

reconnaissant la contribution des politiques dans certains domaines, comme le

commerce, l’immigration et la sécurité, faisant état du rôle de différents ministères sur le

plan de la stratégie de développement générale du Canada, et articulant les chaînes de

responsabilité, la coordination et la responsabilité.

Un certain nombre de facteurs nationaux nuisent à l’établissement d’un cadre de

développement cohérent au Canada (voir Chapnick, 2012). Cependant, en raison de

l’annonce récente du gouvernement canadien, de la situation internationale changeante

et du rôle évolutif du Canada, il est peut-être venu le temps d’adopter une nouvelle

approche. Le budget fédéral de 2013 montre que le gouvernement souhaite assurer la

Page 8: Au delà de l’aide : un plan

3

synergie et accroître la cohérence des politiques d’aide, de commerce et d’affaires

étrangères.

Tout particulièrement, la situation internationale changeante peut inciter à accroître la

CPD. Malgré les mesures unilatérales récentes (voir Brown, 2012), sur le plan

historique, les politiques d’aide du Canada ont été influencées par les tendances

internationales en matière de coopération pour le développement, comme le montre

Molly den Heyer dans son étude des facteurs influant sur la politique d’aide du Canada

en Tanzanie (voir den Heyer, 2012). Sur le plan international, l’importance de l’aide

comme source de financement du développement diminue. Les sources de

financement privées, particulièrement le commerce, les investissements et les envois

de fonds, dépassent grandement l’apport d’aide. Les contributions d’organisations

philanthropiques privées et l’aide d’économies émergentes, comme le Brésil et la

Chine, diminuent l’importance relative de l’apport d’aide des donateurs traditionnels.

Cela signifie que l’importance de l’aide à titre d’outil de politique étrangère est réduite.

En outre, cela suggère que les donateurs traditionnels, comme le Canada, doivent

réfléchir, de manière plus stratégique, à leurs interactions avec les pays en

développement au-delà de l’aide qu’ils fournissent.

Les institutions œuvrant dans le domaine du développement, comme le Comité d’aide

au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques

(CAD-OCDE) et les Nations Unies (ONU), constatent déjà cette réalité. Par exemple, la

ronde la plus récente des engagements des donateurs du CAD-OCDE concernant

l’efficacité de l’aide comportait des dispositions relatives au commerce, aux

investissements et à la fuite illicite de capitaux (FHN-4, 2011). Au niveau de l’ONU, les

discussions sur le cadre de développement après 2015 portent sur les règles

économiques dans certains domaines, comme les droits de propriété intellectuelle,

l’imposition, le commerce, les finances, les subsides et les produits pharmaceutiques.

Ce sont là tous des enjeux qui dépassent l’aide.

Les pays en développement évoluent rapidement. Jamais autant de pays ne se sont

classés parmi les pays ayant un revenu moyen. Cependant, la majorité des pauvres

dans le monde se trouvent dans des pays à revenu moyen. L’inégalité augmente au

sein des pays et entre ceux-ci, exacerbant les vieux enjeux du développement, comme

l’obtention d’une croissance inclusive et l’atteinte des gens les plus pauvres et les plus

marginalisés. Les enjeux mondiaux, comme les changements climatiques et les crises

alimentaire et financière, qui touchent les pays en développement de manière

démesurée, demeurent des enjeux pressants. Ce paysage changeant, associé à la

diminution relative de l’importance de l’aide, suggère que le Canada doit étudier le rôle

Page 9: Au delà de l’aide : un plan

4

des politiques autres que les politiques d’aide pour voir si elles exacerbent et atténuent

ces enjeux et contribuent aux efforts de développement. Un cadre qui explique

l’approche du Canada en matière de CPD offrirait une orientation aux décideurs

lorsqu’ils collaborent avec les pays en développement, et pourrait jeter les bases de

l’engagement du Canada auprès des nouvelles puissances, dont la montée exige une

nouvelle approche.

Ce document étudie l’approche au Canada en ce qui concerne l’aide et la CPD. Il

illustre que le cadre qui oriente actuellement les efforts d’aide étrangère – soit améliorer

l’efficacité de l’aide et la responsabilité – n’est pas un cadre général adéquat pour ce

qui est de l’approche du Canada à l’égard du développement. Même si l’ACDI met

l’accent sur l’efficacité de l’aide, le cadre actuel ne capture pas pleinement les

engagements internationaux du Canada à l’égard de l’efficacité de l’aide, et n’est pas

une base ni une raison d’être suffisantes pour justifier des changements importants à la

politique d’aide du Canada. En outre, les efforts relatifs à l’efficacité de l’aide ne

représentent qu’une infime partie de l’engagement du Canada à l’égard des pays en

développement. Il faut définir une vision élargie qui comprend des politiques d’aide et

autres, afin que le Canada améliore la CPD et soit un acteur stratégique en matière de

développement international.

La section qui suit propose un aperçu historique du programme de CPD international.

Elle souligne les positions prises par différents intervenants du débat, comme le CAD-

OCDE et le Forum pour la coopération en matière de développement (FCD) de l’ONU.

Elle étudie ensuite la littérature didactique sur la CPD. Par la suite, le rapport examine

la feuille de rendement du Canada en matière de CPD.

Cadres stratégiques et cohérence des politiques

en matière de développement

Importance de la cohérence des politiques en matière de

développement

Les demandes relatives à la CPD accrue découlent de la reconnaissance que, dans un

contexte de mondialisation, les politiques autres que les politiques d’aide, comme le

commerce, les investissements et la migration, ont d’importantes répercussions sur

l’atteinte des objectifs de développement mondiaux, y compris la réduction de la

pauvreté (OCDE, 2009). L’objectif du Millénaire pour le développement (OMD) 8 –

Page 10: Au delà de l’aide : un plan

5

mettre en place un partenariat mondial pour le développement, qui comprend entre

autres le commerce, la dette et le transfert des technologies – reflète cette réalité. Il

reconnaît d’ailleurs l’importance de l’apport d’autres éléments que l’aide pour le

développement. Pour Guido Ashoff, c’est lié à la justification négative de la CPD, qui

mise sur les répercussions négatives des autres politiques que l’aide sur le

développement. Selon cette logique, les répercussions négatives des politiques autres

que les politiques d’aide sur le développement doivent être abordées, afin d’atteindre

les objectifs de développement. Ashoff suggère aussi qu’il y a aussi une justification

programmatique significative pour la CPD. Qu’est-ce qui justifie la CPD? Les demandes

indiquant que les forums de gouvernance mondiale en matière de développement

durable soient un principe directeur, et la reconnaissance de la responsabilité partagée,

comme on peut le lire dans la Déclaration du Millénaire. Au sein des pays développés,

le mouvement en faveur d’une CPD accrue est une manifestation pratique des

engagements mondiaux à l’égard du développement (Ashoff, 2005, 1–2).

Du point de vue des donateurs, la CPD contribue à améliorer l’efficacité de l’aide en

s’assurant que les politiques autres que les politiques d’aide ne nuisent pas aux

objectifs de développement ou, à tout le moins, en donnant l’occasion d’évaluer les

répercussions négatives de ces autres politiques sur le développement et d’atténuer

leurs effets. Les promoteurs de la CPD reconnaissent que la réduction de la pauvreté

mondiale n’est qu’un objectif parmi plusieurs objectifs concurrents, comme la hausse de

la sécurité et l’augmentation de la concurrence nationale (OCDE, 2009, 15; Ashoff,

2005, 2). Cela signifie que les intérêts de différents groupes doivent être équilibrés.

C’est un défi. Cependant, selon l’OCDE (2009, 15), des politiques incohérentes, sans

égard aux domaines stratégiques touchés, « s’avèrent inefficaces et inefficientes, quel

que soit l’objectif prioritaire ». En raison de la nature interdépendante du monde, les

événements qui se produisent dans les pays en développement touchent les pays

développés. Toujours selon l’OCDE (2009, 15), « le fait de négliger l’aspect du

développement est imprévoyant. Au fil du temps, cela nuira à l’atteinte des autres

objectifs ».

La cohérence des politiques en matière de développement

comme programme international

Depuis le début des années 1990, le CAD-OCDE a encouragé une CPD accrue3, qu’il

définit comme « le fait de prendre en considération les besoins et les intérêts des pays

en développement dans le cadre de l’évolution de l’économie mondiale » (OCDE, 2003,

3 L’OCDE a tenu sa première réunion de haut niveau officielle sur la CPD en 1991 (Carbone 2008, 329).

Page 11: Au delà de l’aide : un plan

6

2). Pour pouvoir réduire la pauvreté mondiale, selon lui, les pays donateurs devraient

s’assurer que leurs politiques autres que les politiques d’aide, comme le commerce et

les investissements, appuient les efforts de développement ou, à tout le moins, n’y

nuisent pas (OCDE, 2009, 9)4. La CPD est un des critères grâce auxquels le processus

d’examen par les pairs du CAD-OCDE mesure le rendement des donateurs membres

du CAD. Le CAD-OCDE a joué un rôle clé, contribuant aux études et analyses du débat

sur la CPD, et fait la promotion d’une approche modulaire pour obtenir une cohérence

accrue (OCDE, 2008c).

Le système de l’ONU a aussi pris part au débat sur la CPD. En 2002, dans le cadre du

Consensus de Monterrey, les signataires se sont engagés à respecter un vaste

programme en matière de financement du développement qui allait au-delà de l’aide,

afin d’inclure certains domaines, comme la dette, le commerce et la mobilisation de

ressources internationales pour le développement. Le FCD5 a établi que la CPD accrue

des donateurs et des bénéficiaires est une priorité clé de ses travaux (ECOSOC, 2008,

2010). Selon le FCD, la coopération pour le développement ne permet pas à elle seule

de surmonter les défis en matière de développement à l’échelle mondiale (ECOSOC,

2010, 6). Dans le rapport de juin 2010 du secrétaire général du FCD, on peut lire que

les pays développés doivent veiller à ce que les politiques de tous les secteurs appuient

les objectifs de développement convenus à l’échelle internationale, et que les pays

bénéficiaires doivent s’occuper d’enjeux qui vont au-delà de l’aide (ECOSOC, 2010, 6).

Dans le cadre des engagements qu’ils ont pris récemment en ce qui concerne la CPD,

les donateurs du CAD-OCDE, y compris le Canada, ont signé la Déclaration

ministérielle sur la cohérence des politiques au service du développement de 2008 de

l’OCDE. Les membres de l’OCDE doivent donc prendre en considération les

répercussions du développement lorsqu’ils élaborent des politiques notamment dans

les domaines de la migration, de l’environnement, du commerce et de l’économie

(OCDE, 2008b). Plus récemment, lors du 4e forum de haut niveau sur l’efficacité de

l’aide (FHN-4) qui a eu lieu à Busan, en Corée du Sud, en 2011, les donateurs, les pays

en développement et les organisations de la société civile (OSC) ont élargi le

programme d’efficacité de l’aide afin de mettre l’accent sur le développement efficace,

reconnaissant ainsi que « l’aide n’est qu’un aspect de la solution en ce qui concerne le

développement » (FHN-4, 2011). Les participants ont convenu d’appuyer la coopération

4 Plus récemment, l’OCDE a publié Better Policies for Development qui décrit brièvement comme ses travaux futurs

permettront de s’assurer que le point de vue du développement est pris en considération par ses différents comités et dans ses divers domaines de travail (OCDE, 2011). 5 Au sein du système de l’ONU, le FCD propose un endroit où les différents intervenants du développement peuvent

se regrouper pour discuter des enjeux du développement qui les préoccupent. Il a tenu sa première réunion en juin 2008, et s’est réuni sur une base biennale depuis.

Page 12: Au delà de l’aide : un plan

7

Sud-Sud et triangulaire, de mobiliser le secteur privé et de promouvoir l’aide pour le

commerce, de lutter contre la corruption et les fuites illicites, en plus de promouvoir la

cohérence entre le financement de la lutte contre les changements climatiques et le

financement de la coopération pour le développement plus élargie.

Même si tous s’entendent pour dire qu’il faut accroître la CPD, les examens par les

pairs du CAD-OCDE continuent de révéler « des écarts considérables sur le plan du

degré d’engagement politique des membres à l’égard de la [CPD] » (OCDE, 2009, 10).

Il est difficile de mettre en œuvre la CPD, puisque le programme n’est pas clair. La CPD

peut renvoyer à plusieurs formes différentes de cohérence. En outre, il existe des

lacunes sur le plan de la formulation, de la mise en œuvre et de l’évaluation des

politiques cohérentes. En raison de la nature multidimensionnelle de la CPD, il peut être

difficile, en pratique, d’élaborer une approche tangible pour ce qui est de la mise en

œuvre de la CPD.

Formes de cohérence des politiques

D’après les universitaires, il existe plusieurs types de cohérence des politiques. Selon

Paul Hoebink (2005, 37–38), si on se fonde sur la définition particulière de la cohérence

des politiques, « les mesures ou les activités dans un [autre] domaine ne peuvent pas

nuire aux objectifs des politiques dans un domaine particulier ni les gêner ». La

définition plus générale comprend des interactions au sein des secteurs politiques et

entre ceux-ci. En pratique, la CPD a de nombreuses facettes, et dépend des politiques

des donateurs et des bénéficiaires (Oyejide, 2007).

Dans l’ensemble, les universitaires déterminent quatre types de cohérence des

politiques qui reflètent des définitions générales et plus particulières :

1) la cohérence interne ou verticale entre les politiques d’aide d’un donateur, les

objectifs, les modalités et les organismes de mise en œuvre;

2) la cohérence au sein d’un pays ou horizontale entre différentes politiques

concernant le Sud, prenant en considération l’incidence des politiques autres que

les politiques d’aide sur le développement;

3) la cohérence entre les donateurs concernant les politiques des pays développés

à l’égard des pays en développement, ou « harmonisation » en termes

d’efficacité de l’aide6;

6 Voir l’OCDE (2005) pour obtenir la Déclaration complète de Paris sur l’efficacité de l’aide.

Page 13: Au delà de l’aide : un plan

8

4) la cohérence donateur-bénéficiaire des politiques des donateurs et des pays en

développement, ou « alignement » en termes d’efficacité de l’aide (Hoebink,

2005; Carbone, 2008; Forster et Stokke, 1999b; Picciotto, 2005b)7.

La figure 1 illustre les types de cohérence des politiques8.

La figure 1 illustre différentes formes de cohérence des politiques des donateurs, allant

d’une définition particulière à une définition plus générale. En ce qui concerne la

définition particulière, par cohérence des politiques, on entend la cohérence interne des

politiques et des programmes d’aide. Il faut donc s’assurer que les objectifs, les buts,

les programmes, la mise en œuvre et les résultats de l’aide sont cohérents. À l’échelon

suivant, qui tient compte de la définition plus générale des politiques étrangères, la

cohérence va au-delà de l’aide afin d’inclure les objectifs de la politique étrangère, soit

la sécurité, le commerce et l’action humanitaire. Les approches pangouvernementales

(APG) envers le développement, qui comprennent habituellement les ministères

chargés des affaires étrangères, de l’aide et de la défense, dans des pays touchés par

des conflits, comme l’Afghanistan, sont un exemple de ce niveau de cohérence. Même

7 Le FCD aborde ces formes de cohérence des politiques, ainsi que la cohérence des politiques au sein des pays en

développement (voir ECOSOC, 2010). Une autre forme de cohérence est multilatérale, soit la cohérence entre des organisations multilatérales (Carbone, 2008, 326). 8 Adapté de Hoebink et détaillé (2005, 38).

Page 14: Au delà de l’aide : un plan

9

si les APG sont généralement axées sur les initiatives ou les interventions à l’intention

d’un pays ou d’une situation en particulier, elles représentent une forme plus générale

de cohérence que la cohérence interne des politiques et des programmes d’aide.

La figure 1 illustre aussi la forme la plus générale de CPD des pays donateurs, soit la

cohérence au sein d’un pays ou horizontale. À ce niveau, les ministères chargés des

politiques internes dans des domaines comme l’agriculture, les pêches,

l’environnement, et l’industrie contribuent à la CPD en prenant en considération

l’incidence leurs politiques internes respectives sur le développement international. À ce

niveau, la CPD va au-delà des politiques étrangères, afin de tenir compte des politiques

dans des domaines qui, même s’ils ont une incidence sur le développement à l’échelle

internationale, sont souvent considérés comme des domaines préoccupants à l’échelle

nationale. Par exemple, dans le domaine de l’agriculture, plusieurs gouvernements des

pays développés continuent de verser des subventions à leurs agriculteurs, ce qui nuit

à la concurrence des agriculteurs des pays en développement. Par contre, grâce à

l’aide, ces gouvernements investissent dans les agriculteurs des pays en

développement afin d’accroître leur concurrence sur le marché international. Dans cet

exemple, on peut voir qu’il existe une incohérence entre l’objectif des pays développés

qui est d’appuyer leurs agriculteurs et ceux dans les pays en développement. Il est

évident que les réalités des objectifs nationaux et internationaux concurrents

compliquent la CPD. Malgré tout, par cohérence au sein d’un pays ou horizontale, on

entend la détermination des domaines dans lesquels de telles lacunes sont présentes,

et l’élaboration de stratégies pour atténuer les répercussions négatives tout en

favorisant les répercussions positives.

En ce qui concerne le besoin de mettre en œuvre un cadre stratégique orientant la

politique d’aide du Canada (cohérence interne) et l’approche généralisée du Canada à

l’égard des pays en développement (cohérence au sein d’un pays), ce rapport porte

principalement sur la cohérence interne et au sein d’un pays. Même si elles ne font pas

l’objet d’une grande attention dans ce rapport, la cohérence donateur-bénéficiaire et la

cohérence entre les donateurs importent quand même dans ce contexte. En outre, elles

façonneraient la manière dont la cohérence interne et la cohérence au sein d’un pays

sont assurées pour veiller à ce que les efforts du Canada soient alignés avec les

priorités des pays en développement. Il y a aussi une division des tâches au sein de la

communauté des donateurs. Grâce à leurs engagements internationaux à l’égard de

l’efficacité de l’aide, les donateurs prennent un engagement à l’égard de la prise en

main des projets par les pays bénéficiaires et de l’alignement, des facteurs qui, s’ils

sont pris au sérieux, influent sur l’articulation des cadres stratégiques en matière de

développement.

Page 15: Au delà de l’aide : un plan

10

Sources d’incohérence des politiques

On peut décrire la CPD comme étant forte ou faible selon les efforts que déploient les

gouvernements pour l’assurer. La cohérence est faible lorsque les gouvernements

tentent d’atténuer les répercussions négatives de leurs politiques sur le développement,

tandis que la cohérence est forte lorsqu’ils tentent d’accroître les résultats positifs

pouvant découler des politiques (Mendoza, 2007, 30; Hoebink, 2005). Par exemple, si

un gouvernement met ses politiques d’immigration à jour, pour que la cohérence soit

forte, il doit évaluer les changements éventuels qui pourraient être bénéfiques pour les

pays en développement.

Selon Robert Picciotto (2005a, 11–12), « il est impossible de garantir la cohérence des

résultats ex post même si elle a été assurée ex ante : une conception judicieuse des

politiques n’assure pas nécessairement une mise en œuvre cohérente puisqu’en réalité,

différents obstacles peuvent nuire à l’atteinte des résultats9 ». En effet, il existe un

certain nombre d’obstacles à l’obtention d’une cohérence accrue des politiques.

Hoebink souligne plusieurs types d’incohérence : 1) l’incohérence prévue et imprévue;

2) l’incohérence structurelle, fictive ou temporaire; et 3) l’incohérence institutionnelle ou

politique (Hoebink, 2004).

L’incohérence prévue se produit lorsque les gouvernements savent qu’il existe un conflit

entre des objectifs concurrents, et décident, consciemment, d’adopter une politique qui

peut être contraire à l’atteinte de multiples objectifs. Le cas échéant, les gouvernements

acceptent qu’une telle incohérence existe (Hilker, 2004, 4). L’incohérence imprévue se

produit lorsqu’il existe une contradiction entre des politiques et que les décideurs ne

s’en aperçoivent pas. Dans ce cas, l’incohérence peut être attribuable à un manque

d’information ou d’analyse sur les domaines stratégiques ou entre ceux-ci. En ce qui

concerne le développement, Frank Barry, Michael King et Alan Matthews (2010)

indiquent que l’incohérence prévue et l’incohérence imprévue découlent d’un conflit

entre les objectifs nationaux et les objectifs internationaux en matière de

développement, d’un conflit entre des objectifs en matière de développement et d’un

conflit avec les politiques des pays en développement.

L’incohérence structurelle, fictive ou temporaire se produit lorsque différents groupes

d’intérêt se trouvent avantagés ou défavorisés par diverses politiques (Hoebink, 2004,

42). Par exemple, l’ouverture de marchés peut être avantageuse pour des

consommateurs qui ont accès à des biens moins coûteux. Cependant, cela est nuisible

9 Voir aussi Hilker (2004) et CONCORD (2011).

Page 16: Au delà de l’aide : un plan

11

aux fabricants qui font face à une hausse de la concurrence. Ce résultat peut aussi être

temporaire, tandis que différents groupes s’adaptent à la nouvelle situation

économique.

Au sein de sociétés pluralistes, les valeurs et les intérêts contradictoires sont une

importante cause d’incohérence (Forster et Stokke, 1999a, 24). L’incohérence

institutionnelle ou politique découle d’une concurrence entre institutions ou de

contradictions politiques-économiques qui sont associées à différentes cultures et

idéologies organisationnelles au sein de ministères, et à la nature introspective des

bureaucraties (Hoebink, 2004, 42).

Selon Ashoff (2005), la CPD est difficile à assurer en raison de la complexité du

développement, ainsi que des lacunes sur le plan des connaissances et des concepts

dans ce domaine. Pour que des politiques cohérentes soient avantageuses pour les

pays en développement et qu’elles atteignent leur objectif, la CPD exige un nombre de

renseignements et des analyses significatifs. Même lors des discussions sur la CPD, on

constate des lacunes sur le plan de la perspective des pays en développement

(Mendoza, 2007). Par exemple, une politique proposant un accès privilégié au

commerce à un groupe de pays en développement nuirait au commerce d’un autre.

Dans ce cas, qui bénéficie de la CPD? Ce ne sont pas tous les pays en développement

qui bénéficient de la CPD. En outre, l’incidence de politiques cohérentes peut différer

entre les pays et au sein de ceux-ci, en raison de la nature hétérogène des pays en

développement. Ces enjeux peuvent poser problème aux décideurs, car il peut être

difficile d’obtenir un avis unanime en ce qui concerne l’analyse de l’incohérence et les

mesures requises (Picciotto, 2005a, 12; Barry, King et Matthews, 2010).

Assurer la cohérence des politiques en matière de

développement

Malgré ces défis, les universitaires et les décideurs ont tenté de mieux comprendre les

différents outils, processus et dynamique qui favorisent une hausse de la CPD.

Michael King et Alan Matthews (2012) ont créé une méthodologie, y compris des

indicateurs qui mesurent les moyens, les produits et les résultats des politiques, afin

d’évaluer de manière systémique la CPD des pays développés. Chaque année, le

Center for Global Development publie son Indice de l’engagement envers le

développement, qui cherche aussi à évaluer les progrès des pays développés en ce qui

a trait à l’amélioration des répercussions des politiques autres que les politiques d’aide

sur le développement dans certains domaines, notamment le commerce, les

Page 17: Au delà de l’aide : un plan

12

investissements, l’environnement, l’immigration et la sécurité10. En plus de créer des

outils visant à mesurer les progrès relatifs à la CPD, les universitaires ont cherché à

comprendre la dynamique politique qui est sous-jacente à l’adoption réussie de la CPD

dans les pays développés.

Selon Jacques Forster et Olav Stokke (1999b), la cohérence dépend d’un engagement

aux échelons politique et administratif les plus élevés (voir aussi McGill, 2012;

Gulrajani, 2012). Dans une étude sur l’expérience des pays européens en ce qui a trait

à la CPD, Ashoff (2005) a découvert que la cohérence est beaucoup moins

proéminente lorsque les stratégies et objectifs ne sont pas clairement établis. Il a

constaté que les efforts déployés par le Royaume-Uni, la Suède et les Pays-Bas – des

chefs de file importants sur le plan de la CPD – avaient plusieurs points en commun.

Chacun de ces pays affichait les caractéristiques suivantes :

engagement politique de niveau élevé à l’égard de la cohérence de la part des

ministres chargés des politiques en matière de développement;

importance accordée par le cabinet à la politique en matière de développement;

compétence stratégique en termes de cohérence accrue justifiée de manière

détaillée et étapes pour y parvenir dans des domaines stratégiques particuliers;

préoccupation limitée des ministères à l’égard de la division des tâches;

travaux proactifs sur la cohérence de la part des responsables des politiques en

matière de développement;

réseautage et analyse conjointe des ministères;

recherche intensive, analyse et publication des données (Ashoff, 2005, 4).

L’approche du CAD-OCDE à l’égard de la CDP reflète ces leçons apprises. Selon ce

dernier, la CPD comporte essentiellement trois étapes ou éléments de base. Tout

d’abord, il faut établir les objectifs des politiques. Cela signifie qu’il faut déterminer les

politiques prioritaires et les incompatibilités qui existent entre les politiques et les

objectifs du développement. À cet égard, le fait d’établir les objectifs des politiques peut

« fournir un cadre dans lequel il est possible d’aborder les pressions concurrentes à

court terme afin de ne pas nuire à l’intérêt à long terme envers le développement

international durable et efficace » (McGill, 2012, 28). À cette étape, il faut avoir un

engagement politique élevé des échelons supérieurs. Les politiques doivent permettre

de passer à l’action. Selon le CAD-OCDE, la société civile peut jouer un rôle important

pour accroître la sensibilisation de la population et obtenir un soutien en ce qui

concerne le programme de CPD (OCDE, 2008c, 3). À la deuxième étape, on passe à la

10

Voir CDM (2013).

Page 18: Au delà de l’aide : un plan

13

coordination des politiques. Il faut déterminer comment les politiques seront mises en

œuvre afin d’optimiser la synergie en matière de développement et de minimiser les

effets négatifs des politiques contraires au développement. Le processus de

coordination sert à tenter de résoudre les conflits et à fournir des données probantes

qui permettront de prendre des décisions stratégiques éclairées et d’assurer la

responsabilité. La dernière étape vise la surveillance, l’analyse et la présentation de

rapports. On cherche à connaître l’incidence des différentes politiques et à offrir une

boucle de rétroaction pour assurer la responsabilité et élaborer des politiques de

manière bien informée.

Même s’il semble que, dans la documentation, on s’entend pour dire qu’il faut disposer

d’un engagement politique de haut niveau pour assurer la CPD, les approches varient

selon le contexte. Il n’existe aucune solution uniformisée. Par exemple, l’engagement

de la Suède à l’égard de la CPD a été légiféré, tandis que le Royaume-Uni a adopté un

livre blanc pour faire état de sa vision en matière de développement. Les deux sont des

cadres d’approches respectives en matière de développement. En ce qui concerne le

Canada, la première étape de l’approche modulaire du CAD-OCDE est le premier pas.

Dans la documentation, on s’entend pour dire que la CPD exige une définition attentive

des buts et objectifs. Sinon, la mise en œuvre s’avère difficile, parce que les ministères

fonctionnent différemment selon diverses idéologies, des attitudes diversifiées et une

interprétation hétérogène des objectifs (Hoebink, 2005, 38).

Dans les sections qui suivent du rapport, on examinera la cohérence des politiques

interne du Canada et au sein du pays, et on justifiera l’élaboration d’un cadre pour le

développement.

Cohérence des politiques en matière de

développement au Canada

Au Canada, il y a un certain nombre de raisons derrière l’importance de la CPD. Le

Canada a pris des engagements internationaux quant au soutien de la réduction de la

pauvreté mondiale et à la création de partenariats mondiaux en matière de

développement. Le respect de ces engagements signifie voir au-delà de l’aide.

Dans l’optique des intérêts nationaux, la CPD permet au Canada de collaborer

pleinement avec les pays en développement et de prendre des mesures en matière de

gouvernance mondiale. En cette ère de mondialisation, les problèmes comme la

croissance des inégalités, les changements climatiques ainsi que les crises financières

et alimentaires ont inévitablement des répercussions sur le Canada. Alors que ses

Page 19: Au delà de l’aide : un plan

14

politiques nationales deviennent de plus en plus internationalisées afin de résoudre ces

problèmes, le Canada devra se pencher sur le rôle des politiques portant sur des

secteurs autres que l’aide dans l’exacerbation et l’atténuation des problèmes mondiaux

et la contribution aux efforts de développement.

Comme outil de politique étrangère, l’aide perd de plus en plus son importance comme

un base de la relation avec les pays en développement. Les pays à revenu

intermédiaire démontrent plus d’intérêt à attirer les entreprises et les investissements du

Canada qu’à solliciter son aide. Parallèlement, la plupart des personnes défavorisées

vivent dans ces pays, ce qui donne à penser que l’aide canadienne y a encore sa place.

Le Canada a clairement indiqué que l’aide est un outil important pour poursuivre ses

intérêts en matière de politique étrangère (ACDI, 2012c, 1), mais le rôle qu’elle joue

dans ce contexte et sa coordination avec les autres politiques reste imprécis. Cette

situation a des conséquences sur l’efficacité des politiques étrangères canadiennes, y

compris l’aide, dans l’atteinte des objectifs du gouvernement.

Cohérence interne : l’aide canadienne au cours

de la dernière décennie

Bien que le Canada dispose d’une loi, la Loi sur la responsabilité en matière d’aide au

développement officielle (LRADO)11, qui énonce clairement les principes clés de la

prestation de l’aide canadienne, le Canada n’a historiquement jamais disposé d’une

législation obligatoire qui définit le rôle et le mandat de l’ACDI. Selon le vérificateur

général du Canada, cette situation signifie que les priorités en matière d’aide du

Canada sont déterminées par d’autres « objectifs en matière de politiques du

gouvernement du Canada, les priorités du ministre de la Coopération internationale et

les politiques et stratégies opérationnelles de l’Agence » (Bureau du vérificateur général

du Canada, 2009, 7; voir aussi den Heyer, 2012). Toutefois, le budget fédéral de 2013

promet dès maintenant d’enchâsser dans la loi les rôles du ministre canadien du

Développement et de l’Aide humanitaire. On peut aussi y lire que la réduction de la

pauvreté, le développement et l’aide humanitaire continueront d’être des objectifs du

MAECD.

La LRADO stipule que l’aide canadienne doit être axée sur la réduction de la pauvreté,

tenir compte des points de vue des personnes défavorisées et être harmonisée aux

normes internationales en matière de droits de la personne. À des fins de transparence

11

Voir la Loi sur la responsabilité en matière d’aide au développement officielle, L.C. 2008, ch. 20 (2008).

Page 20: Au delà de l’aide : un plan

15

et de responsabilisation, la Loi exige que tous les ministères indiquent au Parlement

leurs dépenses d’aide (OCDE, 2012, 9). Cette exigence a mené à la production de

rapports normalisés par le MAECI et le ministère des Finances du Canada qui

administrent les fonds d’aide en collaboration avec l’ACDI. Bien que cette Loi puisse

être le point de départ d’un cadre canadien sur le développement (Morton, 2009), il

n’occupe pas une place prédominante dans les priorités d’aide étrangère. L’ACDI

mentionne que ses travaux respectent déjà les exigences de cette Loi, mais qu’elle doit

encore trouver des moyens pour évaluer la mise en œuvre de la Loi ou en transposer

les éléments dans ses pratiques essentielles (Reilly-King, 2012; Brown, 2012, 97–98).

Au Canada, c’est l’efficacité de l’aide et non pas la LRADO qui est la principale priorité

de l’approche du développement.

L’efficacité de l’aide : la pierre angulaire de l’aide

canadienne

Outre l’Énoncé politique international du Canada du gouvernement libéral, publié en

2005, mais jamais adopté en raison de l’arrivée au pouvoir des conservateurs en 2006,

aucun gouvernement canadien n’a publié de document officiel faisant état de son

approche en matière d’aide étrangère au cours de la dernière décennie. Les principaux

changements apportés aux priorités de l’aide étrangère ont été justifiés par le

programme sur l’efficacité de l’aide internationale. En effet, comme le souligne Stephen

Brown : « Presque chaque fois que le gouvernement canadien annonce des

changements à sa politique d’aide, il évoque la nécessité que l’aide ait un plus grand

impact, peu importe qui est au pouvoir » (Brown, 2012, 81). Sans un cadre officiel sur le

développement, les changements de politiques, effectués par des annonces et des

communiqués de presse, semblent être ponctuels. Cette situation a contribué au

manque de continuité stratégique de l’aide canadienne et à la contestation croissante

de la transparence des processus décisionnels sur l’approche canadienne en matière

d’aide et de développement.

Bien que l’efficacité de l’aide doive être à la fois un fondement idéologique et un objectif

pour l’aide canadienne, elle ne parvient pas à elle seule à être un cadre permettant

d’orienter les efforts du Canada. Elle ne constitue pas une base solide pour fixer des

objectifs et établir des priorités ni pour la sélection de partenaires. En d’autres mots,

l’efficacité peut aider à bien faire les choses, à accroître l’efficacité, mais elle ne dit pas

aux décideurs s’ils font les bonnes choses. Sans un cadre général pour orienter les

efforts de développement du Canada, l’efficacité de l’aide semble sonner faux : tout

peut être dit pour accroître l’efficacité, surtout dans un contexte où il n’y a aucune

indication claire de l’interaction entre les priorités, les politiques et les programmes.

Page 21: Au delà de l’aide : un plan

16

Tendances nationales et internationales en matière

d’efficacité de l’aide

L’accent mis par le Canada sur l’efficacité de l’aide peut être compris par rapport aux

tendances internationales (Brown, 2012). Au cours des deux dernières décennies, les

universitaires et les responsables de l’aide sont tous deux devenus de plus en plus

préoccupés par l’efficacité de l’aide dans l’atteinte des objectifs de développement (voir,

par exemple, Burnside et Dollar, 2000; Munro, 2005; Celasun et Walliser, 2008;

Easterly et Pfutze, 2008). L’ACDI a fait l’objet de pressions par des gouvernements

canadiens successifs pour qu’elle donne rapidement des résultats de développement

visibles, tout en maintenant la qualité de son aide (Brown, 2011, 480). Cette pression

s’est traduite par divers engagements visant à maximiser les résultats : mettre l’accent

sur l’efficacité de l’aide, limiter les priorités thématiques et les pays ciblés, et mettre en

place de nouveaux critères et de nouvelles approches pour les partenariats de l’ACDI

avec la société civile et le secteur privé.

La publication de 1996 du CAD-OCDE intitulé Shaping the 21st Century (voir CAD,

1996) a jeté les bases pour les OMD et le programme sur l’efficacité de l’aide

internationale, précisant les principales priorités de la coopération pour le

développement et comment en améliorer l’efficacité (Stern et coll., 2008). En 2002, le

gouvernement libéral de Jean Chrétien a publié un document intitulé Le Canada

contribue à un monde meilleur : énoncé de politique en faveur d’une aide internationale

plus efficace (voir ACDI, 2002). Cet énoncé fait la promotion des principes de

développement efficace de l’OCDE, à savoir la propriété locale, la coordination des

donateurs, des partenariats plus solides, des approches axées sur les résultats et une

meilleure CPD. L’ACDI s’est engagée à promouvoir la bonne gouvernance, à investir

dans le renforcement des capacités et à faire participer la société civile. Les autres

engagements, qui traduisent un passage des approches à l’échelle du projet à des

travaux à l’échelle du programme et du pays, comprennent la priorisation des pays

partenaires (en mettant l’accent sur l’Afrique) et des secteurs, la réduction de l’aide

conditionnelle, la transformation de l’ACDI en une institution axée sur les

connaissances et sa décentralisation, ainsi que l’adoption de systèmes de mesure des

résultats.

En 2005, la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide a été entérinée par plus de

100 pays, dont le Canada, dans le cadre du deuxième Forum de haut niveau sur

l’efficacité de l’aide12. Cette Déclaration, qui représente un grand pas vers l’adoption

d’un accord sur l’efficacité de l’aide entre les donateurs et les bénéficiaires, souligne les

12

Voir Kindornay et Samy (2012) pour un aperçu de l’histoire du programme d’efficacité de l’aide internationale.

Page 22: Au delà de l’aide : un plan

17

principes clés de l’efficacité de l’aide : prise en main, alignement, harmonisation,

responsabilité mutuelle et gestion des résultats13. La Déclaration de Paris portait

principalement sur les processus qui, en théorie, amélioreraient l’efficacité de l’aide. Elle

met l’accent sur la forme que doit prendre la coopération pour le développement plutôt

que sur sa substance (Brown, 2012, 7), ce dont il a été abondamment question dans les

OMD. En 2008, lors du troisième Forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide, le

Programme d’action d’Accra, le successeur de la Déclaration de Paris, a réitéré les

engagements de 2005 et a présenté de nouveaux engagements sur la prévisibilité, le

déliement de l’aide, les partenariats inclusifs et une meilleure utilisation des systèmes

des pays14. En 2011, lors du FHN-4, les membres de la communauté du

développement international ont convenu d’appuyer le Partenariat de Busan pour une

coopération efficace au service du développement (voir FHN-4, 2011), qui a élargi et

approfondi les engagements précédents afin d’améliorer la prise en main des pays en

développement sur les priorités de développement et de mettre l’accent sur les

résultats. Comme mentionné, ce Partenariat comprend aussi des engagements sur

diverses questions de développement, comme la corruption, l’évasion illicite de

capitaux, l’aide au commerce, la collaboration avec le secteur privé et le climat

financier.

Après le Programme d’action d’Accra, l’ACDI a publié son Plan d’action 2009-2012 pour

accroître l’efficacité de l’aide. Ce plan a fait l’objet d’engagements visant à améliorer

l’efficacité de l’aide canadienne, stipulant que le Canada doit faire sa part pour atteindre

les résultats fixés en intensifiant son action (ACDI, 2010d, 1). Il mise sur les

engagements précédents en matière d’efficacité de l’aide nationale et souligne que

l’ACDI a mis l’efficacité de l’aide et la responsabilité à l’égard des résultats du

développement au cœur de son programme en matière de rendement (ACDI, 2010d,

1). On y retrouve un certain nombre de mesures et d’objectifs, notamment :

mettre l’accent sur les priorités géographiques et thématiques;

augmenter l’efficacité par le déliement de l’aide, l’augmentation de la présence

sur le terrain et l’amélioration de la coordination avec les autres;

examiner les politiques et les procédures sous l’angle de l’efficacité de l’aide;

accroître la responsabilisation par de meilleurs suivis, évaluations et rapports;

accroître la prévisibilité de l’aide;

13

Plus précisément, les donateurs et les bénéficiaires conviennent que les bénéficiaires doivent établir leurs stratégies, améliorer les institutions et lutter contre la corruption. Les donateurs doivent ensuite harmoniser ces stratégies et recourir davantage aux systèmes des pays. Les donateurs conviennent également de coordonner ensemble, de simplifier les procédures et de partager l’information. Les donateurs et les bénéficiaires doivent mettre l’accent sur la mesure des résultats du développement et avoir des responsabilités les uns envers les autres sur le plan des résultats (OCDE, 2005). 14

Voir OCDE (2008a) pour le Programme d’action d’Accra complet.

Page 23: Au delà de l’aide : un plan

18

harmoniser avec les stratégies du programme du pays;

s’engager dans des partenariats multipartites inclusifs et les appuyer;

implanter dans les États fragiles des stratégies intégrées ayant pour objectif la

consolidation de la paix, le renforcement de l’État et la réduction de la pauvreté,

et promouvoir le recours à des mécanismes de financement conjoint afin

d’assurer une transition plus efficace entre les préoccupations humanitaires à

court terme et le développement à plus long terme (ACDI, 2010d, 1–6).

En 2010, Beverly J. Oda, la ministre de la Coopération internationale de l’époque, a

annoncé que le gouvernement canadien et l’ACDI devaient travailler plus efficacement

ensemble en vue d’améliorer la transparence et de consolider leurs partenariats avec

les organisations et les organismes de développement nationaux et internationaux ainsi

qu’avec la population (ACDI, 2010e). Cette annonce a coïncidé avec des tendances

internationales d’accorder plus d’importance à la transparence dans la coopération pour

le développement en vue d’accroître la responsabilisation. Lors du FHN-4, le Canada a

annoncé qu’il adhérait à l’Initiative internationale pour la transparence de l’aide, dont

l’objectif est de maximiser l’accessibilité de l’information sur l’aide étrangère15. La

transparence, qui au départ ne faisait pas partie du Plan d’action 2009-2012 pour

accroître l’efficacité de l’aide, est devenue un élément essentiel de la stratégie

canadienne sur l’efficacité de l’aide. L’accent mis sur la transparence a été véhiculé par

des communiqués de presse, des discours et des énoncés de politiques (ACDI, 2012b).

Le CAD-OCDE a félicité le Canada pour les efforts déployés pour accroître l’efficacité.

Toutefois, il indique que le plan d’efficacité de l’aide du Canada ne traduit pas tous ses

engagements en matière d’efficacité de l’aide internationale. La figure 2 ci-dessous

compare le programme d’efficacité de l’aide internationale et le Plan d’action 2009-2012

pour accroître l’efficacité de l’aide16. On peut y voir les zones de convergence et de

divergence.

15

Voir IITA (2012) pour de plus amples renseignements sur cette initiative. Voir Bhushan et Higgins (2012) pour une étude exhaustive des diverses initiatives de transparence du Canada. 16

Il compare en fait le programme canadien avec la Déclaration de Paris de 2005 et le Programme d’action d’Accra en 2008 puisque le plan d’action est antérieur au FHN-4 tenu en 2011.

Page 24: Au delà de l’aide : un plan

19

Source : Compilé par les auteurs de l’ACDI (2010d) et de l’OCDE (2005; 2008a)

Le CAD-OCDE a souligné que l’approche canadienne en matière d’efficacité de l’aide

comportait une faiblesse : « elle ne met pas exclusivement l’accent sur la mise en

œuvre des principes de la Déclaration de Paris », ce qui est à l’origine de deux

importantes faiblesses. Premièrement, le plan d’action du Canada met l’accent sur

l’ACDI plutôt que sur tous les ministères responsables de fournir l’aide canadienne. En

2011, l’ACDI a fourni 68 % de l’aide publique au développement (APD) totale du

Canada (OCDE, 2012, 17). Deuxièmement, il combine l’efficacité organisationnelle, ou

ce que Nilima Gulrajani (2012, 57) appelle l’efficacité des donateurs, et la

responsabilisation nationale avec les principes de Paris, au détriment de ces derniers. Il

englobe des problèmes extérieurs à la Déclaration de Paris qui, selon les croyances,

accroissent l’efficacité organisationnelle, comme augmenter l’efficience et mettre

l’accent sur l’aide bilatérale. Selon le CAD-OCDE, le Canada accuse un retard dans la

mise en œuvre des principes de l’efficacité de l’aide internationale (bien que ce soit le

Page 25: Au delà de l’aide : un plan

20

cas pour la plupart des donateurs), surtout sur le plan de la prévisibilité. Le CAD-OCDE

a souligné que ce retard menace la capacité du Canada à aligner son aide à celle des

pays partenaires (OCDE, 2012, 17–18).

Progrès sur l’efficacité de l’aide

Dans les champs d’action ciblés par l’approche globale d’efficacité de l’aide du Canada,

le CAD-OCDE a constaté que le Canada a réalisé des progrès sur l’utilisation de

stratégies conjointes, le déliement de l’aide et l’amélioration de la transparence. En ce

qui concerne l’amélioration de l’efficacité de l’ACDI, il a félicité le Canada pour la

simplification de ses procédures d’approbation des projets, mais il a aussi demandé que

de nouvelles mesures soient prises sur la décentralisation, mentionnant que plus de

progrès doivent être réalisés dans la délégation de pouvoirs sur le terrain. Le CAD-

OCDE a recommandé que le Canada révise son Plan d’action 2009-2012 pour accroître

l’efficacité de l’aide afin d’accorder une plus grande attention aux principes de

l’efficacité de l’aide internationale, d’appliquer le plan d’action à tous les ministères

fournissant de l’aide canadienne et de veiller à ce que tout futur plan d’action respecte à

la lettre les engagements pris dans le cadre du FHN-4 (OCDE, 2012).

Bien que le rapport de l’ACDI intitulé Le développement axé sur les résultats 2010-2011

souligne l’efficacité accrue de l’aide canadienne et présente des exemples concrets et

quantifiables des résultats de l’ACDI (ACDI, 2012e), les évaluations comparatives

semblent indiquer que le Canada perd du terrain. L’étude de 2008 de William Easterly

et Tobias Pfutze intitulée Where Does the Money Go? Best and Worst Practices in

Foreign Aid compare la distribution de l’aide par 48 organismes d’aide, en se fondant

sur divers éléments comme la transparence, la fragmentation, la sélectivité et les

canaux d’aide inefficaces17. Le Canada a obtenu une note supérieure à la moyenne

pour la transparence, mais il a été nommé un des « donateurs les plus fragmentés »

(Easterly et Pfutze, 2008, 40). Dans l’ensemble, le Canada s’est classé dans la

moyenne parmi les pays ayant les meilleures pratiques d’aide (Easterly et Pfutze,

2008).

Toutefois, l’étude de 2010 intitulée Quality of Official Development Assistance

Assessment (QuODA)18, menée conjointement par le Center for Global Development et

17

La transparence est définie comme la capacité à suivre la distribution de l’aide; les mesures de fragmentation sont définies comme la mesure selon laquelle l’aide est trop dispersée; la sélectivité est définie comme la mesure selon laquelle l’aide est dirigée vers certains pays ou projets plutôt que d’autres; et les canaux d’aide inefficaces sont définis comme la mesure selon laquelle « l’aide est liée aux objectifs politiques visant à alimenter l’aide ou le soutien technique » (Easterly et Pfutze, 2008, 2). 18

Cette étude classe la qualité de l’aide de 23 pays donateurs, utilisant 31 indicateurs sur quatre dimensions : maximiser l’efficacité, favoriser les institutions, réduire le fardeau, ainsi que la transparence et l’apprentissage (CGD, 2012).

Page 26: Au delà de l’aide : un plan

21

la Brookings Institution, parlait du Canada comme d’un pays « moins performant ». Le

Canada s’est classé comme un des pays les moins performants dans les dimensions

suivantes : favoriser les institutions, et transparence et apprentissage (Birdsall et

Kharas, 2010, 3). Cependant, en 2011, le Canada a amélioré la qualité de son aide

dans le cadre des quatre dimensions évaluées par l’étude (Birdsall, Kharas et Perakis,

2012).

L’indice de classement de 2010 de la Banque mondiale intitulé Aid Quality and Donor

Rankings19 a classé le Canada au 29e rang parmi 38 donateurs bilatéraux et

multilatéraux pour la qualité de l’aide offerte20 (Knack, Rogers, et Eubank, 2010). Deux

récentes analyses comparatives qualitatives comparant le Canada à d’autres

donateurs, à savoir le Royaume-Uni, l’Irlande et la Norvège, ont aussi révélé que le

Canada accusait un retard comparativement à ses pairs (McGill, 2012; Gulrajani, 2012).

Malgré les progrès réalisés sur l’amélioration de l’efficacité de l’aide, les études

continuent de laisser entendre que le Canada a encore beaucoup de travail à faire pour

améliorer l’efficacité de son aide et s’assurer que son approche traduit ses

engagements internationaux. Voilà la preuve que le Plan d’action 2009-2012 pour

accroître l’efficacité de l’aide n’est pas idéal comme cadre général pour l’aide

canadienne et que son utilisation comme fondement des efforts d’aide du Canada est

inappropriée.

Continuité politique et priorités évolutives

Au cours de la dernière décennie, les programmes d’aide étrangère du Canada ont été

caractérisés par des priorités évolutives, ce qui contribue à un manque de continuité

politique mettant en danger la cohérence interne et l’efficacité de l’aide. Les

changements de politiques ont été le résultat de changements fréquents au sein du

gouvernement et des ministères, ayant chacun leur programme visant à contribuer à

l’efficacité de l’aide. Comme le souligne Brown (2012, 81), le concept d’efficacité est

suffisamment malléable pour être utilisé afin de justifier toute nouvelle initiative :

« L’efficacité devient une solution de rechange à une bonne politique, qui, à son tour,

est la politique réellement privilégiée par le gouvernement, mais avec une aura de

présumée objectivité et de bonne volonté étayée par le rapport coût-efficacité et la

légitimité internationale. » Malgré un tel cadre, les politiques récemment annoncées,

19

Cet indice de classement sert à mesurer la qualité de l’aide offerte par les donateurs en fonction d’indicateurs de performance des donateurs, comme la performance dans l’alignement, l’harmonisation et la coordination de l’aide. L’objectif de cet indice est d’accroître l’efficacité de l’aide et de permettre aux donateurs de comparer leur performance à celle des autres pays (Knack, Rogers, et Eubank, 2010). 20

Le Canada a obtenu ses moins bons classements dans l’harmonisation et l’alignement de l’aide, se classant aux 29

e et 26

e rangs respectivement. Il a toutefois enregistré de meilleurs résultats dans la sélectivité et la spécialisation,

se classant aux 23e et 21

e rangs respectivement (Knack, Rogers, et Eubank 2010).

Page 27: Au delà de l’aide : un plan

22

dont la plupart par communiqués de presse plutôt que dans de nouveaux documents

politiques, ne correspondent pas au Plan d’action 2009-2012 pour accroître l’efficacité

de l’aide. Ces politiques tiennent compte des programmes des divers gouvernements et

ministères plutôt que de la raison d’être d’une vision plus large du développement.

Entre 1995 et 2009, les priorités thématiques de l’ACDI ont changé à six reprises (voir

le tableau 1). Entre 2003 et 2007, quatre gouvernements différents ont été élus au

Canada, apportant chacun leurs priorités. Durant cette période, l’ACDI a observé des

changements à son orientation fondamentale, ce qui a traduit un manque de continuité

politique entre les gouvernements et au sein des gouvernements. Durant la période de

2000 à 2009, cinq différents ministres de la Coopération internationale ont été à la tête

de l’ACDI. Sous les gouvernements libéraux de Jean Chrétien et de Paul Martin entre

2000 et 2006, trois députés différents ont occupé ce ministère. Toutefois, nous avons

pu constater une certaine continuité sous le gouvernement conservateur de Stephen

Harper (2006 à aujourd’hui). De 2007 à 2012, Beverly J. Oda est devenue une des

ministres de la Coopération internationale à avoir occupé ce poste le plus longtemps.

Julian Fantino, le ministre actuel, est entré en poste en juillet 2012 quand Mme Oda a

annoncé sa retraite. Bien que l’on puisse constater depuis cinq ans une certaine

continuité dans les hautes sphères du Ministère, y compris Margaret Biggs, présidente

de l’ACDI, il y a encore un taux de roulement élevé dans les postes de la haute

direction, comme ceux de vice-président, de directeur financier, de directeur général et

de directeur, ce qui limite les progrès réalisés dans la mise en œuvre des réformes

(OCDE, 2012, 16; Bureau du vérificateur général du Canada, 2009, 7).

Page 28: Au delà de l’aide : un plan

23

21, 22, 23

21

Adapté du Bureau du vérificateur général du Canada (2009). 22

Le MAECI est responsable de deux autres thèmes : promouvoir la démocratie et assurer la sécurité et la stabilité. 23

Voir Canada (2010). Le premier ministre a aussi écrit une lettre d’opinion sur les priorités; voir Harper (2010).

Page 29: Au delà de l’aide : un plan

24

Le plus récent changement aux priorités de l’ACDI, en 2009, a été apporté dans le

cadre de la nouvelle approche de l’ACDI en matière d’efficacité de l’aide. Une fois de

plus, les nouvelles priorités ont été divulguées par communiqué de presse plutôt que

par la publication d’un cadre stratégique cohérent.

Selon le CAD-OCDE et le vérificateur général du Canada, les priorités évolutives sont,

depuis longtemps, une faiblesse de l’aide du Canada (OCDE, 2012, 25; Bureau du

vérificateur général du Canada, 2009; voir aussi Brown, 2012). Il y a de nombreuses

raisons expliquant pourquoi ces priorités évolutives sont problématiques.

Premièrement, la conception et la mise en œuvre appropriées de projets peuvent

prendre plusieurs années. Selon le CAD-OCDE, « les bureaux géographiques et les

gestionnaires de programmes ont été limités par la courte durée de vie des diverses

politiques et priorités d’aide du Canada » (OCDE, 2012, 25). Par exemple, les employés

de l’ACDI qui travaillent en Tanzanie ont signalé de tels problèmes (den Heyer, 2012).

Quand de nouvelles politiques sont annoncées, les programmes doivent être modifiés.

Les répercussions des annonces des nouvelles priorités sont minimales à court terme,

surtout pour les projets en cours. Plutôt que de changer les projets, le personnel

restructure des projets en cours pour qu’ils respectent les nouvelles priorités (Bureau du

vérificateur général du Canada, 2009, 21).

Deuxièmement, les changements fréquents aux thèmes prioritaires nuisent à la

capacité d’un organisme de développement à acquérir une expertise, à miser sur les

réalisations passées et à apprendre de ses erreurs, ce qui réduit la probabilité

d’atteindre des résultats de développement à long terme. La pression exercée en vue

d’accroître l’efficacité et l’optimisation des ressources a tendance à alourdir ces

problèmes puisque les gouvernements mettent l’accent sur les résultats à court terme

pour démontrer leurs réussites aux contribuables. De plus, les fréquents changements

créent de l’incertitude pour les partenaires de développement au pays et à l’étranger

(Bureau du vérificateur général du Canada, 2009).

Troisièmement, les définitions des priorités sont plutôt générales et elles manquent

d’une orientation claire et de plans d’actions (Bureau du vérificateur général du Canada,

2009; OCDE, 2012, 25; Brown, 2012, 91), ce qui compromet la cohérence interne de

l’aide canadienne. Comme le souligne le vérificateur général du Canada, les thèmes

largement définis « peuvent englober un large éventail de secteurs de programmes qui

se chevauchent… Il est difficile de comprendre comment une définition aussi large des

secteurs peut déboucher sur une plus grande concentration de l’aide » (Bureau du

vérificateur général du Canada, 2009, 21). Par exemple, pour un thème comme le

développement du secteur privé, il existe plus de 100 secteurs de programmes

Page 30: Au delà de l’aide : un plan

25

différents. Le CAD-OCDE a demandé la production de documents d’orientation, non

seulement pour les thèmes prioritaires de l’ACDI, mais aussi pour les deux thèmes du

MAECI : promouvoir la démocratie et assurer la sécurité et la stabilité (OCDE, 2012,

25). Ce manque de clarté et d’orientation, qui pourrait être corrigé par un cadre de

développement général, touche non seulement l’ACDI, mais aussi les autres ministères,

ce qui entraîne une incohérence politique et est à l’origine de l’inefficacité des efforts de

développement du Canada.

Changer les pays de concentration

Comme de nombreux donateurs, l’ACDI a limité ses relations bilatérales à un certain

nombre de « pays de concentration », ce qui, selon l’Agence, maximisera la valeur et

l’impact de l’aide au développement du Canada (ACDI, 2012e). L’augmentation du

rayonnement géographique de l’aide canadienne a été encouragée par des

gouvernements canadiens successifs animés par des études du CAD-OCDE qui

soulignaient la très grande fragmentation des programmes nationaux du Canada (CAD,

2002; OCDE, 2007; Brown, 2012, 90–91). Sous les gouvernements libéraux de Jean

Chrétien et de Paul Martin, des pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine ont été

priorisés, alors que sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper, les pays

d’Afrique ont été quelque peu délaissés au profit des pays d’Asie et d’Amérique latine

(Brown, 2008, 95; ACDI, 2002; Canada, 2009; Crane, 2012).

En 2005, après la publication de l’Énoncé politique international du Canada, l’ACDI a

annoncé que la majeure partie de son aide bilatérale serait attribuée à 25 pays en

développement, dont plus de la moitié étaient des pays d’Afrique. Le gouvernement

libéral a indiqué que les pays avaient été sélectionnés selon leur seuil de pauvreté, leur

capacité à utiliser efficacement l’aide et la mesure dans laquelle la présence

canadienne ajouterait de la valeur (Canada, 2005).

En 2009, Mme Oda a annoncé lors d’un point de presse que l’ACDI réduirait son

nombre de pays de concentration, mais elle n’a donné aucun détail (CBC News, 2009).

Voilà un autre exemple d’un important changement de politique qui semble avoir été

effectué de manière ponctuelle. L’ACDI a plus tard divulgué plus de détails sur le plan

du Canada de se concentrer sur 20 pays qui recevraient 80 % de l’aide bilatérale du

Canada (ACDI, 2009). Douze pays du groupe des pays de concentration de 2005

demeuraient des priorités en 2009. Toutefois, ni l’ACDI ni le gouvernement

conservateur n’ont indiqué comment les pays seraient sélectionnés cette fois. Le

manque de transparence du processus de sélection et l’absence d’une justification

Page 31: Au delà de l’aide : un plan

26

adéquate de la sélection de certains pays a soulevé les critiques de membres de la

communauté canadienne de développement24.

Le rapport de l’ACDI intitulé Le développement axé sur les résultats 2010-2011 a plus

tard expliqué que les pays étaient sélectionnés en fonction de leurs besoins, de leur

capacité de gérer les programmes de développement et de leur conformité avec les

priorités de la politique étrangère du Canada (ACDI, 2012e). Néanmoins, l’absence

d’une justification adéquate pour la réduction du nombre de pays de concentration

donne à penser que les décisions n’étaient pas fondées sur une vision claire à long

terme du développement. Bien que le rapport tente d’illustrer la stratégie de

développement du gouvernement du Canada, il ne remplace pas la nécessité de se

doter d’un cadre de développement général.

L’utilisation d’une « efficacité accrue de l’aide » comme justification pour la réduction du

nombre de pays de concentration est loin de répondre aux attentes. Il n’existe aucune

preuve que la réduction du nombre de pays augmentera l’efficacité de l’aide et les

changements fréquents qui y sont apportés rendront l’aide plus volatile, ce qui posera

des risques comme la création d’orphelins de l’aide (Brown, 2011, 477; voir aussi

Munroe, 2005). De plus, le manque de critères clairs et transparents pour la sélection

des pays de concentration a soulevé des débats publics dans les médias et parmi les

membres de la communauté canadienne de développement sur la sélection des pays et

la communication des changements. Les membres de la communauté canadienne de

développement ont fait valoir que la sélection était effectuée selon des motifs

commerciaux et stratégiques, plutôt que selon les besoins. Surtout en tenant compte de

la réduction du soutien canadien aux pays africains, les critiques ont questionné le

soutien canadien aux pays de concentration à revenu intermédiaire comme la

Colombie, le Pérou et l’Ukraine, où le Canada possède des intérêts commerciaux. La

nouvelle liste réduit le nombre de pays de concentration africains de quatorze à sept, ce

que certains observateurs ont qualifié comme un abandon du continent africain, là où

les problèmes de développement sont les plus importants (Lupick, 2009; Cayo, 2009).

La pression exercée sur l’ACDI pour produire des résultats rapides et tangibles était

aussi un facteur décisif dans le retrait de certains pays africains de la liste des priorités

(voir Brown, 2012).

Après avoir félicité le Canada pour avoir doublé son aide à l’Afrique de 2007 à 2012, le

CAD-OCDE a recommandé que le Canada priorise les pays de l’Afrique subsaharienne,

où les besoins sont les plus criants. Il a aussi mentionné que cette approche doit être

élaborée dans le cadre d’une stratégie de coopération pour le développement placée

dans le contexte de la politique étrangère canadienne (OCDE, 2012, 10). 24

Pour une critique des sélections de 2005 et 2009, voir Tomlinson (2009).

Page 32: Au delà de l’aide : un plan

27

Partenariats pour le développement : la nouvelle approche

de l’ACDI

Conformément au programme sur l’efficacité de l’aide de l’ACDI, le gouvernement

conservateur a annoncé un certain nombre de changements à la façon dont l’Agence

collabore avec les partenaires de la société civile et du secteur privé. Une fois de plus,

ces annonces ont été effectuées en l’absence d’une justification ou d’un plan général

pour les décisions qui vont au-delà de l’amélioration de l’efficacité de l’aide.

En juillet 2010, Mme Oda a annoncé que l’ACDI procéderait à une refonte de sa

Direction générale du partenariat canadien, renommée la Direction générale des

partenariats avec les Canadiens, par la mise en place de nouvelles lignes directrices en

matière de financement pour les OSC dans l’espoir de simplifier les processus de

demandes et de réduire les fardeaux administratifs pour les demandes de projets des

OSC (ACDI, 2010e). Cette annonce a mené au passage d’un mécanisme de

financement plus réactif à un processus concurrentiel fondé sur les appels d’offres.

Dans le but de cibler les efforts de développement du Canada, la Direction générale

des partenariats avec les Canadiens s’assurerait que la moitié du financement des

partenariats soit consacré aux vingt pays de concentration et que 80 % de ces

investissements seraient conformes aux priorités de l’ACDI. Mme Oda a expliqué

qu’« en rendant le financement des partenariats plus prévisible et plus transparent et en

le fournissant en temps utile… les investissements des Canadiens dans le

développement international auront des retombées plus importantes et déboucheront

sur des résultats durables » (ACDI, 2010e). L’harmonisation du financement des OSC

et des priorités de l’ACDI était une mesure délibérée visant à accroître l’efficacité de

l’aide.

En plus des changements apportés aux partenariats des OSC, l’ACDI s’est penchée sur

la possibilité que le secteur privé contribue à prendre en main les enjeux du

développement dans les domaines de la croissance économique durable, de la sécurité

alimentaire ainsi que des enfants et des jeunes (ACDI, 2012f). Bien qu’elle dispose

d’une Politique en matière de développement du secteur privé qui met l’accent sur le

développement des secteurs privés des pays (voir ACDI, 2003), l’Agence a commencé

à élaborer une stratégie du secteur privé afin d’exposer clairement comment elle prévoit

tirer parti de la contribution du secteur privé dans son approche à l’égard du

développement (bien que, compte tenu de la fusion entre l’ACDI et le MAECI, on ne

peut établir clairement si et comment une telle stratégie sera mise de l’avant). Malgré

l’absence d’une stratégie officielle, l’ACDI a annoncé un certain nombre de partenariats

Page 33: Au delà de l’aide : un plan

28

avec le secteur privé en se fondant sur l’idée qu’un partenariat accru avec le secteur

privé améliorera l’efficacité de l’aide.

En 2011, dans le cadre de la Stratégie de l’ACDI sur la croissance économique durable

et de la Stratégie de responsabilité sociale des entreprises du gouvernement, Mme Oda

a annoncé que l’ACDI mettrait en œuvre des partenariats avec les organisations non

gouvernementales et les sociétés minières, dépensant 26,7 millions de dollars pour

appuyer des projets visant à réduire la pauvreté en Colombie, au Pérou, en Bolivie, au

Ghana et au Burkina Faso (ACDI, 2011b)25. Ces projets reposent sur des organisations

non gouvernementales, Plan Canada, Entraide universitaire mondiale du Canada,

Vision mondiale Canada, qui collaborent avec des sociétés minières, IAMGOLD, Rio

Tinto Alcan, et Barrick Gold (ACDI, 2011b). Bien que le gouvernement appuie de

nombreuses initiatives du secteur privé26, le soutien de l’ACDI envers les initiatives de

responsabilité sociale d’entreprise, surtout celles mettant en jeu les sociétés du secteur

de l’extraction minière, a soulevé un débat public sur la façon dont ces contrats sont

octroyés et sur le rôle d’un organisme d’aide dans le soutien du travail sur la

responsabilité sociale d’entreprise. Le manque de transparence sur comment et avec

qui l’ACDI s’engage ainsi que l’absence de politiques et de processus clairs pour la

sélection des partenaires ont fait l’objet de nombreuses critiques (CBC News, 2012). Le

CAD-OCDE mentionne que le Canada doit s’assurer que les objectifs de

développement et que la prise en main des pays en développement sont reflétés dans

les activités que l’ACDI entreprend avec le secteur privé (OCDE, 2012, 11).

Un enjeu important pour les partenariats de l’ACDI est que le gouvernement canadien

manque non seulement d’une stratégie globale de développement qui énonce une

vision pour le développement (et le rôle des partenaires), mais aussi d’une politique

plus générale pour les partenariats. Bien que de nouvelles initiatives et de nouveaux

mécanismes aient été annoncés pour accroître l’efficacité de l’aide canadienne par le

biais des partenariats, il n’existe aucun cadre général qui servirait de base pour lier ces

mécanismes et assurer la cohérence entre les conditions, les priorités et les objectifs

des partenariats. Par conséquent, l’approche de l’ACDI en matière de partenariats

semble ponctuelle; elle manque de transparence et d’une raison d’être claire justifiant

les processus décisionnels. Le Canada a besoin d’un cadre de développement clair

élaboré en collaboration avec ses partenaires. Ce cadre devrait définir comment le

nouveau MAECD travaillera en collaboration avec ses partenaires, tant sur la scène

nationale qu’internationale, et dans quelles circonstances. Un tel cadre devrait être en

mesure d’assurer la cohérence interne du programme de développement du Canada.

25

Voir Blackwood et Stewart (2012) pour un examen critique du travail de l’ACDI dans le secteur minier. 26

Voir Reilly-King (2012) pour une liste de ces initiatives.

Page 34: Au delà de l’aide : un plan

29

Raconter une histoire transparente et cohérente

Le thème de l’efficacité de l’aide sert de description et de justification sous-jacentes

pour les principaux changements et orientations stratégiques de l’approche canadienne

en matière d’aide étrangère. Toutefois, l’absence d’un cadre stratégique général clair

qui oriente les efforts de développement du Canada laisse présumer que les

changements stratégiques sont ponctuels et qu’ils manquent de transparence.

L’absence d’un tel cadre empêche le gouvernement et l’ACDI de communiquer

efficacement leur vision du développement à la population. En effet, le CAD-OCDE a

recommandé que l’ACDI soit « plus ouverte et qu’elle utilise un dialogue et une

communication constants afin de tenir les employés et les partenaires informés des

changements et des réformes apportés » et qu’elle élabore des lignes directrices sur la

consultation en matière de politiques (OCDE, 2012, 16, 31).

Les efforts d’aide du Canada tireraient profit de la création d’un cadre de

développement général servant d’approche à long terme par rapport au

développement. Un tel cadre aiderait à placer la politique d’aide canadienne dans son

contexte élargi de politique étrangère et assurerait la continuité des annonces des

importantes décisions politiques. Un cadre de développement général contribuerait

aussi à l’amélioration de la transparence des processus décisionnels en permettant de

justifier les priorités et d’énoncer comment les politiques, les programmes et les

partenariats de l’ACDI travaillent ensemble. De plus, il contribuerait à améliorer la

cohérence interne de l’aide canadienne en démontrant comment les objectifs, les

programmes, la surveillance et la présentation de rapports collaborent. L’approche

actuelle qui définit l’aide canadienne, à savoir une série de tentatives ponctuelles

d’améliorer l’efficacité de l’aide, n’est pas suffisantes pour atteindre ces objectifs. Le

cadre de l’efficacité de l’aide ne couvre qu’une petite partie de l’engagement du Canada

envers les pays en développement. Une vision plus large qui comprend les politiques

liées à l’aide ou non est essentielle pour que le Canada puisse atteindre une meilleure

CPD et être un acteur du développement international efficace.

Page 35: Au delà de l’aide : un plan

30

Cohérence à l’intérieur du pays : l’engagement

du Canada envers la cohérence des politiques en

matière de développement

Au cours de la dernière décennie, divers rapports et énoncés de l’ACDI soulignaient

que pour que le développement soit efficace, il fallait mettre en place une stratégie de

développement stable et à long terme. L’Énoncé politique international du Canada

jamais adopté mettait l’accent sur l’importance de rendre les « politiques liées à l’aide

ou non du gouvernement » plus cohérentes (Canada 2005). Cet énoncé, qui s’appuyait

sur de vastes consultations avec les OSC et sur des discussions interministérielles

(Hunter, 2012, 28), préconisait que le Canada : (1) doit accorder une plus grande

attention aux interactions entre le programme international du Canada et ses objectifs

de développement; (2) doit utiliser une APG plus forte; et (3) doit disposer d’une

approche plus solide et plus intégrative envers la recherche sur les politiques (Canada,

2005). Plus récemment, Mme Oda a mentionné ne pas voir de différence entre les

intérêts de la politique commerciale et étrangère et les objectifs de développement du

Canada (Payne, 2012). Le budget fédéral de 2013 a clairement énoncé une meilleure

harmonisation entre la politique étrangère et les objectifs de développement du Canada

par la création du MAECD, et ce, bien que l’on ne sache pas vraiment comment il sera

mis en pratique.

Bien que le Canada ne dispose pas d’un cadre de développement stratégique, il existe

certains exemples de cohérence horizontale entre les ministères fédéraux.

Traditionnellement, le Canada a défini ses efforts de CPD sous la forme d’une APG qu’il

utilise surtout dans les États fragiles comme l’Afghanistan et Haïti (en lieu et place de

son approche générale d’engagement avec les États fragiles). L’APG, une sorte de

cohérence voulue, met habituellement l’accent sur la coordination des ministères dans

un contexte national et dans un but précis. Il ne s’agit pas d’un système de cohérence

et de coordination plus large qui peut être ou qui a été appliqué à tous les pays en

développement avec lesquels le Canada s’engage. Cette section expose l’APG du

Canada et soutient que la CPD doit passer outre cette approche et être orientée par un

cadre qui considère les répercussions des politiques non liées à l’aide sur le

développement dans un contexte plus large.

Page 36: Au delà de l’aide : un plan

31

Une approche pangouvernementale

Selon l’OCE (2006, 64), comparativement aux autres pays donateurs, le Canada

occupe une position intermédiaire en ce qui a trait aux progrès réalisés dans la mise en

place de mécanismes de coordination des politiques, l’un étant l’APG. Le rapport de

2006 de l’OCDE intitulé Les approches à l’échelle de l’administration pour les États

fragiles souligne qu’une APG est nécessaire pour que les donateurs travaillent

efficacement « dans les domaines politique, sécuritaire, économique et administratif »

(OCDE, 2006), puisqu’il facilite la cohérence à l’intérieur du pays. Dans le contexte

canadien, l’APG comporte trois dimensions : la politique étrangère, la promotion de la

paix et de la sécurité, et le développement durable (OCDE, 2007, 64). La première APG

canadienne a été présentée en 2005 durant la mission en Afghanistan et dans le

contexte plus large des États fragiles et des pays en crise, comme Haïti et le Soudan

(OCDE, 2007). En Afghanistan, le gouvernement a considéré l’aide canadienne comme

un moyen de réduire la pauvreté et de lutter contre l’extrémisme, ce qui a également

contribué à la sécurité nationale du Canada (OECD 2007, 30).27

En 2010, le Canada a annoncé de nouveaux engagements. Les efforts du Canada en

Afghanistan après la période de 2011 à 2014 seraient axés sur quatre thèmes :

l’éducation et la santé des enfants et des jeunes, le renforcement de la sécurité et de la

primauté du droit, la diplomatie à l’échelle régionale, et l’aide humanitaire (MAECI,

2010; Canada, 2012). Toutefois, les critiques ont mentionné que l’accent mis par le

gouvernement conservateur sur les dépenses militaires a soulevé des questions quant

aux priorités réelles du Canada en Afghanistan (Crane, 2012; McLeod Group, 2012),

surtout compte tenu des coupures à l’aide internationale canadienne versée à

l’Afghanistan en 2012 (Berthiaume, 2012).

Divers ministères reconnaissent le manque de communication interministérielle et qu’il

fait accroître la cohérence dans les « mesures économiques, sociales, politiques et

environnementales » (OCDE, 2007, 13). Parallèlement, le CAD-OCDE a estimé que

l’approche pangouvernementale canadienne avait contribué à la cohérence

interministérielle et des politiques (OCDE, 2007, 23, 31, 64; OCDE, 2012). Dans son

examen de la coordination du Canada durant des urgences humanitaires pour

lesquelles le Canada a adopté une APG, le CAD-OCDE a félicité le gouvernement pour

27

Dans le contexte des États fragiles et des pays touchés par le conflit, l’APG regroupe le MAECI, le ministère de la Défense nationale et l’ACDI (OCDE, 2007).

Page 37: Au delà de l’aide : un plan

32

sa coordination interministérielle et son choix de solutions rapides et complètes (OCDE,

2012, 19)28.

Bien que l’APG puisse accroître la cohérence, elle ne doit pas être perçue comme une

solution de rechange au cadre de développement général. Comme nous l’avons

mentionné précédemment, une APG s’applique principalement à des contextes

nationaux précis. Un cadre de développement général concerne les répercussions de

toutes les politiques sur le développement (voir la figure 1), distribue les rôles et les

responsabilités à divers ministères, et fournit de l’information sur l’approche globale en

matière de développement.

Au-delà d’une approche pangouvernementale : la

cohérence des politiques en matière de développement

L’absence d’un cadre de développement clair qui pourrait être utilisé pour améliorer la

CPD va à l’encontre de la contribution canadienne au développement par l’aide

étrangère et entrave le travail de l’ensemble du gouvernement canadien (OCDE, 2007,

31; Rae et Johnston, 2010, 6). En 1995, le gouvernement libéral de Jean Chrétien a

publié Le Canada dans le monde, une étude de la politique étrangère canadienne dont

le but était d’atteindre les objectifs stratégiques étrangers plus efficacement et en

minimisant les coûts grâce à une meilleure coopération internationale et à des

politiques économiques complémentaires nationales et internationales. Dans cette

étude, le gouvernement a mis l’accent sur la nécessité de fixer une orientation

cohérente pour le rôle international du Canada. De plus, l’étude souligne que les

Canadiens veulent une politique étrangère active et comprennent qu’un « Canada fort

et uni » est essentiel à l’atteinte des objectifs du Canada dans le monde (MAECI, 1995).

En 2002, sous la direction de Susan Whelan, alors ministre de la Coopération

internationale, l’ACDI s’est engagée à améliorer sa cohérence des politiques envers les

pays en développement au sein du gouvernement canadien et elle a déterminé que la

cohérence des politiques serait un élément clé de sa coopération pour le

développement (ACDI, 2002). Lors du Sommet du Groupe des huit tenu en 2002 à

Kananaskis, le Canada s’est engagé à mettre l’accent sur la croissance économique

mondiale, à soutenir le Nouveau partenariat économique pour le développement de

l’Afrique, à lutter contre le terrorisme, et à libéraliser le commerce au profit des pays les

28

Toutefois, le CAD-OCDE a critiqué le Canada pour l’absence d’une vision claire et stratégique qui applique les principes humanitaires et le manque de responsabilité transparente dans les programmes humanitaires. Il a aussi demandé l’adoption d’un programme mieux ciblé et plus transparent pour améliorer la prévisibilité du financement canadien dans le cas d’urgences humanitaires, surtout dans le contexte de régimes d’aide où le gouvernement promet de verser un montant équivalent à celui amasser par les efforts de collectes publiques de fonds (OCDE, 2012, 19).

Page 38: Au delà de l’aide : un plan

33

moins développés (Martin, Lavallee, et Ben-Aron, 2002). En vertu de l’exemption des

droits de douane, une initiative de commerce hors quota adoptée lors du Sommet de

Kananaskis, les pays les moins développés se sont vus offrir un accès favorable aux

marchés canadiens. Le CAD-OCDE souligne que cette initiative est un exemple positif

de la CPD sur la politique commerciale (OCDE, 2012, 12).

Dans son Énoncé politique international du Canada, le gouvernement a promis une

cohérence entre les politiques liées à l’aide et les autres politiques (Canada, 2005;

Goldfarb et Tapp, 2006, 13). Il a fallu passer par plusieurs étapes pour mettre en

commun le savoir-faire des ministères, des organismes et des organes indépendants

en vue d’améliorer la CPD. Par exemple, un accord-cadre a été signé par l’ACDI et le

Bureau du vérificateur général du Canada (OCDE, 2007, 32), ce qui a mené à la

présentation au Parlement de rapports sur la contribution en APD du gouvernement29.

Bien que l’ACDI mentionne avoir signé des ententes administratives avec un certain

nombre de ministères (ACDI, 2004; ACDI, 2006; ACDI, 2008), aucun détail n’a été

communiqué sur l’identité des ministères impliqués.

Le CAD-OCDE a reconnu que le Canada a réalisé certains progrès en matière de CPD,

mais qu’il reste encore du travail à faire. Il montre notamment que le Canada a réalisé

certains progrès sur l’élaboration d’un cadre de développement général clair, sur des

mécanismes de coordination des politiques et sur des systèmes de surveillance,

d’analyse et de présentation de rapports. Le CAD-OCDE souligne que, bien qu’il existe

un certain nombre de mécanismes de coordination, l’ACDI a eu de la difficulté à

« dresser une liste de problèmes qui requièrent une action », ce qui est compliqué par

l’absence d’un cadre de développement. En ce qui concerne les systèmes de

surveillance, d’analyse et de présentation de rapports, le CAD-OCDE a cité l’ajout d’un

indicateur de la cohérence des politiques dans le rapport 2010-2011 de l’ACDI au

Parlement comme un certain progrès (OCDE, 2012, 36).

Défis de la cohérence des politiques au Canada

Le Canada doit relever de nombreux défis dans l’amélioration de la CPD : l’incohérence

institutionnelle et politique, ainsi qu’une incohérence voulue et non voulue découlant

d’objectifs nationaux contradictoires et d’objectifs de développement internationaux.

Une étude historique menée par l’Institut Nord-Sud a jeté un peu de lumière sur ces

défis (voir INS, 2003).

D’un point de vue formel, le pouvoir d’améliorer la cohérence des politiques est entre

les mains des institutions du gouvernement central (le Cabinet du Premier ministre, le

29

Voir, par exemple, ACDI (2012c).

Page 39: Au delà de l’aide : un plan

34

Bureau du Conseil privé (BCP), et le Cabinet)30 et de différents ministères et

organismes qui disposent de diverses ressources, exercent différentes fonctions

décisionnelles et affichent des niveaux de capacités différents (Weston et Pierre-

Antoine, 2003, 36). Par le passé, la structure institutionnelle complexe du

gouvernement a fait peu de choses pour faciliter la cohérence et la coordination : le

ministre de l’ACDI relevant directement du Parlement plutôt que du ministre des Affaires

étrangères (Goldfarb et Tapp, 2006, 14). Le CAD-OCDE a souligné que bien que l’ACDI

soit responsable d’avoir facilité la CPD, elle ne disposait pas d’un mandat assez fort et

elle n’avait pas les pouvoirs et la capacité nécessaires pour améliorer la cohérence

(OCDE, 2012, 38). Bill Morton (2009, 6) ajoute qu’il y a un manque de communication

entre l’ACDI et l’ensemble du gouvernement, ce qui contribue aux lacunes en matière

de cohérence des politiques. Les ministères semblent faire des déclarations

contradictoires, ce qui pourrait être causé par les changements apportés aux priorités

politiques. Les politiques résistent difficilement à de tels changements (OCDE, 2007,

30). Le CAD-OCDE a recommandé que le Canada veille à mettre en place les

procédures nécessaires pour assurer une coopération interministérielle efficace (OCDE,

2012, 39).

Bien que la majorité du budget d’aide du Canada ait toujours été géré par l’ACDI, le

ministère des Finances du Canada et le MAECI participent aussi à la prestation d’aide

internationale. Les intérêts des autres ministères, comme Industrie Canada, Santé

Canada, le ministère de la Défense nationale et Ressources naturelles Canada, sont

aussi entrés en jeu lors de l’établissement du budget (Goldfarb et Tapp, 2006, 5). La

figure 3 montre les ministères gouvernementaux qui ont participé à la prestation de

l’APD canadienne durant l’exercice financier 2010-2011.

30

Le Cabinet du Premier ministre propose des candidats au gouverneur général du Canada pour les importants postes gouvernementaux. De plus, il s’occupe des relations avec les médias et le public, comme les allocutions (Hodgetts n.d.). Le rôle du Bureau du Conseil privé est de fournir des conseils et du soutien au premier ministre et au Cabinet (BCP, 2012). Le rôle du Cabinet est de formuler des priorités et des politiques gouvernementales (Hodgetts n.d.). Chaque organe est un élément essentiel du processus décisionnel gouvernemental qui peut influencer comment les décisions prises entraînent l’élaboration de politiques et comment elles sont communiquées.

Page 40: Au delà de l’aide : un plan

35

Source : INS (2013)

Ce régime signifie que des organes, comme le MAECI, le ministère des Finances du

Canada et le Cabinet du Premier ministre, sont des décideurs influents sur le plan des

dépenses d’aide, ce qui, selon les observateurs, entrave la liberté de fonctionnement de

l’ACDI (Johnston, 2010, 49; Carin et Smith, 2010, v). En effet, comme le souligne

Brown (2011, 478–79), la CPD n’est pas positive en soi, elle dépend des priorités des

institutions du gouvernement central et des intérêts des divers ministères et

organismes.

Certains critiques mentionnent que les politiques de l’aide canadienne, malgré leur

objectif déclaré de soutien de la réduction de la pauvreté, servent en grande partie « les

intérêts économiques, de politique étrangère et de sécurité du Canada » (Swiss, 2010,

2). Dans ce cas, l’incohérence peut être voulue ou non. Bien que l’aide canadienne

mette l’accent sur le développement à long terme dans une optique de réduction de la

pauvreté, elle est influencée par les intérêts politiques et les motifs commerciaux

nationaux (Goldfarb et Tapp, 2006, 2). Jusqu’à tout récemment, le manque de

ACDI 69%

MAECI 8%

Environnement Canada

0.1%

Ministère des Finances

9%

Santé Canada 0.2%

CRDI 4%

Autre 9%

Provinces et municipalités

0.3%

Gendarmerie royale du Canada

1%

Figure 3. Aide internationale canadienne en 2012: Principaux ministères et organismes

Page 41: Au delà de l’aide : un plan

36

transparence entourant les priorités gouvernementales a soulevé des questions sur les

stratégies qui semblent cohérentes, mais ne pas avoir un solide objectif de

développement.

Par exemple, un certain nombre de pays de concentration de l’ACDI sont de nouveaux

partenaires du Canada, dont la plupart ont atteint le statut de pays à revenu

intermédiaire. L’Accord de libre-échange Canada-Colombie a été signé en 2008. En

2009, le Canada a annoncé que la Colombie était un des pays de concentration de

l’ACDI. Parallèlement, l’Accord de libre-échange Canada-Pérou est entré en vigueur en

2009. Le Pérou est aussi un pays de concentration. Bien qu’il y ait encore des défis en

matière de développement à relever dans ces pays à revenu intermédiaire, les critiques

soulignent que le gouvernement a utilisé l’aide étrangère au profit de ses relations

commerciales dans ce qui semble être une stratégie cohérente. En raison de l’absence

d’un cadre stratégique, le gouvernement a essuyé des critiques pour ce qui semble être

une stratégie cohérente qui sert les intérêts commerciaux du Canada. Les critiques

considèrent l’élaboration d’un cadre de développement clair comme une façon de

minimiser l’influence des intérêts politiques dans l’approche du Canada en matière de

développement (Gulrajani, 2010, 41; Brown, 2011, 480).

Plus récemment, le gouvernement a apporté des précisions sur le rôle de l’aide dans la

politique étrangère canadienne. Dans le cadre de la mise en œuvre de la LRADO, le

ministre de la Coopération internationale doit présenter au Parlement un rapport sur

l’APD du Canada. Contrairement aux rapports précédents qui mettaient grandement

l’accent sur les résultats de l’APD sans la placer dans le contexte d’une politique

étrangère plus large, le rapport de 2011-2012 stipule que :

L'aide au développement officielle du Canada favorise l'avancement des

objectifs de la politique étrangère de notre pays : 1) améliorer les perspectives

économiques au moyen d'un engagement international; 2) atténuer les risques

en matière de sécurité; et 3) promouvoir les principes et les valeurs du

Canada, p. ex. la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la

primauté du droit. À la lumière de ces priorités de la politique étrangère, et

compte tenu de l'objectif général qu'est la réduction de la pauvreté, l'aide

internationale du Canada touche cinq priorités : la sécurité alimentaire; une

croissance économique durable; les enfants et les jeunes; promouvoir la

démocratie; ainsi que la sécurité et la stabilité. (ACDI, 2012c, 1)

Bien que le rapport précise que l’aide respecte les objectifs de la politique étrangère

canadienne, il ne décortique pas la relation entre les objectifs de l’aide, comme la

Page 42: Au delà de l’aide : un plan

37

réduction de la pauvreté, et les objectifs plus généraux de la politique étrangère

canadienne, comme la recherche des possibilités économiques. Néanmoins, le rapport

donne un signal clair que le gouvernement canadien considère l’aide comme un outil lui

permettant de poursuivre ses intérêts nationaux.

Les écarts conceptuels sont un autre problème découlant de l’incohérence (voir

Picciotto, 2005a, 12; Barry, King, et Matthews, 2010). Dans son examen de la

coopération pour le développement du Canada, le CAD-OCDE a constaté que les

décideurs canadiens interprétaient la CPD de deux façons. La première est que la

coopération pour le développement est conforme à la politique étrangère. Selon cette

interprétation, l’accent est mis sur les répercussions des politiques de développement

sur les politiques étrangères, plutôt que l’inverse (OCDE, 2007, 13). Dans la deuxième

interprétation, les décideurs mettent l’accent sur la cohérence interne comme un

mécanisme visant à accroître l’efficacité de l’aide (OCDE, 2007, 31). Cette

interprétation implique que l’ACDI améliore la cohérence « entre ses partenariats et ses

programmes bilatéraux » (OCDE, 2007, 31). En vue d’accroître la compréhension et la

connaissance de la CPD au sein du gouvernement, le CAD-OCDE a demandé (1) un

engagement politique de haut niveau envers la CPD, y compris les exigences pour tous

les ministères et organismes; (2) l’établissement d’objectifs stratégiques

interministériels; (3) une meilleure compréhension du développement dans les

principaux ministères et une capacité accrue de faciliter davantage la CPD (OCDE,

2012, 37).

La mesure dans laquelle la création du MAECD corrigera les principaux problèmes à la

source de l’incohérence au Canada, à savoir ceux qui ont entraîné une incohérence

politique, institutionnelle, voulue et non voulue, reste à établir. L’annonce de la fusion de

l’ACDI et du MAECI ne faisait pas mention d’un cadre stratégique connexe. Le passé

regorge d’exemples d’un manque évident d’engagement politique pour établir un tel

cadre. Comme le souligne Adam Chapnick, il y a un manque de volonté politique au

Canada en matière de développement et l’établissement d’un cadre de développement

général devient ainsi une priorité. Il mentionne aussi que le portefeuille de l’aide au

développement n’a jamais été une priorité des gouvernements des deux dernières

décennies, contrairement à d’autres pays, comme le Royaume-Uni, où le soutien du

développement fait partie du programme de tous les partis. De plus, la politisation de

l’aide canadienne limite la planification stratégique à long terme (Chapnick, 2012, 307–

315).

Page 43: Au delà de l’aide : un plan

38

Des solutions institutionnelles pour améliorer la

cohérence des politiques en matière de développement

Les critiques ont proposé divers moyens pour améliorer la CPD du Canada; des

moyens surtout axés sur la structure institutionnelle du gouvernement et sur le meilleur

moyen d’aborder les problèmes de cohérence et de coordination. Voici quelques

solutions proposées : la fusion de l’ACDI et du MAECI pour assurer une meilleure

cohérence, la précision de la division du travail entre le MAECI et l’ACDI, et la mise sur

pied d’un organisme d’aide plus autonome, similaire au Centre de recherches pour le

développement international31 (Weston et Pierre-Antoine, 2003; Canada, 2007;

Gulrajani, 2010, 44; Carin et Smith, 2010, 10–11; Johnston, 2010; Brown, 2011, 473;

Greenspon, 2010, 83).

Bien que de nombreux critiques conviennent que l’approche canadienne en matière de

développement et que les institutions qui en sont responsables doivent changer, il

faudra de nombreuses années avant que le MAECD soit mis sur pied et entièrement

fonctionnel. Bien que le MAECD puisse être en mesure d’améliorer la cohérence des

politiques, la composition institutionnelle est seulement un moyen de maximiser la CPD.

D’autres facteurs sont essentiels. En effet, comme le souligne Gulrajani (2012, 55–56)

dans son analyse comparative de l’aide canadienne, norvégienne et britannique, le

leadership, un soutien politique multipartite et une vision cohérente pour un

développement international progressif peuvent être des facteurs importants. En

l’absence d’un cadre de développement général qui priorise le développement, il n’y a

aucune garantie que la fusion de l’ACDI et du MAECI accroîtra la CPD. Certains

critiques suggèrent que la fusion entraînera la priorisation des objectifs de la politique

nationale qui nuisent aux politiques de développement (Gulrajani, 2010, 43; Smillie,

2004, 19).

Une vision cohérente : améliorer la cohérence

interne et la cohérence au sein d’un pays

Un cadre de développement général pourrait permettre d’articuler une vision à long

terme en ce qui concerne le rôle du Canada sur le plan du développement international,

d’indiquer qui est responsable de quoi au sein des ministères et organismes

gouvernementaux, et de promouvoir la cohérence interne et horizontale. Grâce à un tel

cadre, le gouvernement et la population auraient une indication claire de l’approche du 31

Le Centre de recherches pour le développement international est une société d’État sans lien de dépendance.

Page 44: Au delà de l’aide : un plan

39

Canada à l’égard du développement, de ses partenariats, et de ses contributions. Pour

assurer sa production, le gouvernement aurait à y consacrer temps et ressources, afin

d’y réfléchir et d’expliquer les éléments de base de son engagement avec les pays en

développement.

Un cadre de développement stratégique permettrait d’améliorer la cohérence interne de

l’ACDI, l’efficacité de l’aide et la transparence. Un cadre qui propose une base concrète

pour les priorités et la planification à long terme offrirait la prévisibilité et l’uniformité

nécessaires aux ministères et organismes gouvernementaux fournissant l’aide, afin

d’accroître leur expertise, de déterminer les leçons apprises et, en fin de compte,

d’améliorer l’efficacité de l’aide. Même si, comme le souligne le CAD-OCDE, le

gouvernement devrait consacrer temps et ressources à cette initiative, il faut qu’il

définisse comment les priorités, les partenariats, les procédures, les programmes et les

projets fonctionnent ensemble, de manière cohérente, pour permettre au Canada

d’atteindre ses objectifs en matière de développement. Un cadre de développement

général pourrait préciser comment toutes ces pièces s’emboîtent. En outre, il pourrait

servir de mécanisme essentiel pour améliorer la cohérence. Enfin, un tel cadre

améliorerait la transparence des priorités canadiennes en matière d’aide et deviendrait

un outil de mobilisation de la population.

De plus, un cadre de développement stratégique permettrait au gouvernement d’aller

au-delà du concept d’APG sur lequel il met l’accent. Par CPD, on entend, du moins en

partie, l’évaluation systématique des répercussions des politiques autres que les

politiques d’aide sur les résultats du développement (OCDE, 2012, 11). À cette étape,

le Canada ne dispose d’aucun moyen officiel pour réaliser une telle évaluation. Un

cadre de développement représenterait un point de départ. S’il est élaboré en

partenariat avec d’autres ministères et organismes et appliqué à ceux-ci, un cadre de

développement général permettrait de définir les chaînes de responsabilité et la

responsabilité de l’engagement du Canada à l’égard des pays en développement. Il

contribuerait aussi à dissiper les idées fausses sur le rôle des différents ministères et

organismes gouvernementaux chargés de l’aide canadienne et, de manière plus

élargie, la relation du Canada avec les pays en développement. Une approche

collaborative en ce qui a trait à l’élaboration du cadre s’avère essentielle pour garantir

une approbation à l’échelle du gouvernement. En outre, elle permettra d’acquérir une

expertise à l’interne sur le développement à l’échelle des ministères et des organismes.

En effet, parmi les recommandations du CAD-OCDE dans son examen par les pairs de

2012, on suggérait au Canada d’accroître sa capacité d’analyse des répercussions des

politiques nationales sur les pays en développement (OCDE, 2012, 11). Une approche

Page 45: Au delà de l’aide : un plan

40

de collaboration contribuerait aussi à former des relations de travail concernant les

objectifs communs de tous les intervenants.

Conclusion : quelle vision?

Bien que les universitaires et les analystes des politiques s’accordent sur la nécessité

d’un cadre de développement général, les opinions diffèrent sur son contenu. Barry

Carin et Gordon Smith (2010, 9) suggèrent que les valeurs canadiennes doivent être

ouvertement exprimées dans la politique d’aide du Canada, ce qui traduirait un certain

degré de cohérence entre les politiques des divers ministères, surtout le MAECD et le

ministère de la Défense nationale. De son côté, Liam Swiss demande un « projet

national » sur la coopération pour le développement plus ambitieux qui s’harmonise aux

donateurs novateurs. En plus d’y inclure des valeurs canadiennes partagées, il milite

pour l’ajout de caractéristiques comme un engagement interministériel sur le

développement, l’adoption du multilatéralisme, ainsi qu’une volonté politique et un

soutien public plus importants (Swiss, 2010, 6–7).

En reconnaissant que la consolidation de la coopération pour le développement du

Canada signifie de renforcer l’ensemble des politiques et des programmes du

gouvernement, Morton (2009, 1, 6–7) suggère que la LRADO de 2008 puisse servir de

point de départ pour un cadre de développement général. Toutefois, Brown (2011, 481)

avertit que cette Loi manque de substance. De plus, elle ne donne aucun mandat légal

à l’ACDI ni à aucun autre ministère, comme c’est le cas des lois dans les autres pays

(Gulrajani 2010, 45). Il en est ainsi parce que la LRADO définit les dépenses de

développement en fonction de l’APD et des dépenses liées aux catastrophes naturelles

(ce ne sont pas toutes les activités menées par l’ACDI qui sont admissibles à l’APD).

Pour l’exercice financier 2009-2010, la LRADO a couvert 90,2 % des investissements

du Canada dans les pays en développement (ACDI, 2013).

Le présent rapport ne donne pas une vision détaillée du cadre de développement du

Canada, bien que les auteurs supposent qu’une telle vision porterait sur les

engagements nationaux et internationaux du Canada en matière de coopération pour le

développement, comme le programme d’efficacité de l’aide internationale et la LRADO.

Peu importe la forme qu’il prend, il est essentiel d’adopter un cadre de développement

général sur l’engagement du Canada dans les pays en développement. Les principaux

éléments de ce cadre sont la justification et la vision de l’aide et de l’engagement du

Canada dans les pays en développement, la précision du rôle des différents partenaires

et politiques, et l’orientation de l’ensemble du gouvernement canadien. Un tel cadre

pourrait permettre au Canada de démontrer efficacement son engagement envers le

Page 46: Au delà de l’aide : un plan

41

développement mondial et servir de base pour ses relations avec les pays en

développement.

La CPD est une question complexe et un certain nombre de défis doivent encore être

relevés. Depuis près de dix ans, le gouvernement canadien n’a jamais démontré sa

volonté ni sa capacité à allouer le temps et les ressources nécessaires pour améliorer

la CPD et adopter un cadre initial à cette fin. La fusion de l’ACDI et du MAECI est une

porte ouverte sur le changement. Alors que le gouvernement va de l’avant avec sa loi

pour régir le MAECD, les questions sur la CPD prendront sans doute l’avant-scène.

Page 47: Au delà de l’aide : un plan

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