atma 2014 etude et modélisation des petits navires de

15
ATMA 2014 Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de pêche pour l’amélioration de leur comportement par mer forte Antoine PAGÈS, Jean-Jacques MAISONNEUVE DCNS Research – SIREHNA/MSH – Nantes (France) Xavier DAL SANTO DCNS Research – SIREHNA/PIL – Nantes (France) SOMMAIRE Le projet SOS-Stabilité 1 visait à améliorer la sécurité des petits navires de pêche et leur aptitude à naviguer sur des mers fortes en fonction de leur mode de navigation (en route libre ou en pêche). L’objectif était ainsi : - de mieux appréhender et modéliser les phénomènes impliqués dans les problèmes de stabilité dynamique de cette gamme de navires ; - de développer des solutions pour améliorer leur comportement et leur sécurité, en particulier grâce à la conception de systèmes embarqués adaptés. Cet article présente différentes parties du projet réalisées par DCNS Research/SIREHNA : essais à la mer et en bassin sur un chalutier de 23 mètres et des maquettes libres de 2 mètres et 8 mètres fortement instrumentés ; développement et validation d’un simulateur de comportement global de navire ; développement d’un démonstrateur de système embarqué qui permet de fournir aux marins des informations et alertes, d'éviter les situations à risque ou d'améliorer le contrôle du navire dans ces conditions. SUMMARY The French SOS-Stabilité 1 research project aimed at improving small fishing vessel behaviour and their ability to sail in rough seas depending on their sailing mode (in course or fishing). The goal was: - to better know and model phenomena involved in dynamic stability issues occurring on this kind of vessels; - to develop solutions for improving their behaviour and security, especially through the design of appropriate embedded systems. This article presents various parts of the project carried out by DCNS Research/SIREHNA: sea and basin trials with a 23 m trawler and free models of 2 m and 8 m equipped with very complete measurement systems; development and validation development of a ship behaviour time-domain simulator; development of an embedded system demonstrator able to give information and warnings to sailors, to avoid dangerous conditions or to improve ship control in these conditions. 1 SOS-Stabilité : amélioration de la sécurité des petits navires de pêche – stabilité dynamique.

Upload: others

Post on 20-Jun-2022

0 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

ATMA 2014

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

Etude et modélisation des petits navires de pêche pour l’amélioration de leur comportement par mer forte

Antoine PAGÈS, Jean-Jacques MAISONNEUVE DCNS Research – SIREHNA/MSH – Nantes (France)

Xavier DAL SANTO DCNS Research – SIREHNA/PIL – Nantes (France)

SOMMAIRE

Le projet SOS-Stabilité1 visait à améliorer la sécurité des petits navires de pêche et leur aptitude à naviguer sur des mers fortes en fonction de leur mode de navigation (en route libre ou en pêche).

L’objectif était ainsi :

- de mieux appréhender et modéliser les phénomènes impliqués dans les problèmes de stabilité dynamique de cette gamme de navires ;

- de développer des solutions pour améliorer leur comportement et leur sécurité, en particulier grâce à la conception de systèmes embarqués adaptés.

Cet article présente différentes parties du projet réalisées par DCNS Research/SIREHNA : essais à la mer et en bassin sur un chalutier de 23 mètres et des maquettes libres de 2 mètres et 8 mètres fortement instrumentés ; développement et validation d’un simulateur de comportement global de navire ; développement d’un démonstrateur de système embarqué qui permet de fournir aux marins des informations et alertes, d'éviter les situations à risque ou d'améliorer le contrôle du navire dans ces conditions.

SUMMARY

The French SOS-Stabilité1 research project aimed at improving small fishing vessel behaviour and their ability to sail in rough seas depending on their sailing mode (in course or fishing).

The goal was:

- to better know and model phenomena involved in dynamic stability issues occurring on this kind of vessels;

- to develop solutions for improving their behaviour and security, especially through the design of appropriate embedded systems.

This article presents various parts of the project carried out by DCNS Research/SIREHNA: sea and basin trials with a 23 m trawler and free models of 2 m and 8 m equipped with very complete measurement systems; development and validation development of a ship behaviour time-domain simulator; development of an embedded system demonstrator able to give information and warnings to sailors, to avoid dangerous conditions or to improve ship control in these conditions.

1 SOS-Stabilité : amélioration de la sécurité des petits navires de pêche – stabilité dynamique.

Page 2: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

1. INTRODUCTION

Le projet SOS-Stabilité vise à améliorer la sécurité des petits navires de pêche et leur aptitude à naviguer sur des mers fortes en fonction de leur mode de navigation (en route libre ou en pêche).

La première partie du projet a consisté en la réalisation d’essais à la mer préliminaires sur un chalutier de 23 mètres. Une maquette libre de 2 mètres et une plateforme d’essais de 8 mètres fortement instrumentées ont ensuite été développées, et utilisées en bassin et en mer pour acquérir des données plus avancées sur mer forte, pour les deux modes de navigation.

Les essais à la mer sur le chalutier réel ont permis de mesurer différents efforts subis par le navire (safran, funes, ...) ainsi que son comportement à la mer. Les essais sur la maquette de 2 m ont permis d’étudier le comportement du navire par mer de l’arrière, oblique de l’arrière et de travers, avec et sans vitesse d’avance. Les essais à la mer sur la plateforme de 8 m ont quant à eux permis de réaliser un grand nombre de mesures en s’affranchissant au maximum des effets d’échelle liés à la petite taille d’une maquette pour des essais en bassin tout en gardant au mieux le contrôle des configurations étudiées.

Les résultats obtenus ont contribué à valider un simulateur de comportement global de navire développé dans le cadre du projet. L’objectif de ce simulateur temporel est de modéliser le comportement dynamique non-linéaire des navires par mer forte avec des temps de calculs courts, pour permettre des variations systématiques des paramètres de conception ou de contrôle de ces navires et à analyser leur sécurité vis-à-vis de leur stabilité dynamique.

Les développements se sont principalement intéressés aux phénomènes observés par mer de l’arrière, comme le broaching, qui implique un fort couplage entre les différents degrés de liberté du navire et de fortes variations de la stabilité en roulis et en lacet.

Enfin, en s’appuyant sur les essais réalisés et sur le simulateur de comportement de navire, le projet a abouti au développement d’un démonstrateur de système embarqué qui permet, à partir de la mesure de l'état du navire

et de son environnement, de fournir en passerelle des informations et alertes, d'éviter les situations à risque (broaching, surf-riding, roulis paramétrique, …), ou d'améliorer le contrôle du navire dans ces conditions.

2. NAVIRE CIBLE

Le navire choisi pour les différents essais (à la mer et en bassin) est un chalutier de 23 m, l’Anthinéas, construit en France en 1991, propriété de l'ACAV. Son port d’attache est les Sables d’Olonne. Ses caractéristiques principales sont données dans le Tableau 1. Les figures ci-dessous montrent une vue de côté ainsi qu’une photo du chalutier.

Figure 1 : Vue du chalutier Anthinéas.

Figure 2 : Photo du chalutier Anthinéas.

Le système de pêche est composé de chaluts jumeaux remorqués par 3 funes. La pêche pratiquée par ce navire est le chalut de fond.

Les raisons ayant conduit au choix de ce navire sont la taille de celui-ci, rentrant dans le cadre du projet, la proximité du port d’attache, facilitant ainsi l’instrumentation et la rotation des ingénieurs à bord, et l’intérêt des son armateur pour le projet.

Page 3: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

3. ESSAIS

3.1. Essais à la mer sur le chalutier réel

Le principal objectif des essais à la mer était d’acquérir de l’expérience sur l’environnement de la pêche, sur le comportement d’un chalutier standard et sur les mesures réalisables à bord du navire. Les essais à la mer ont ainsi été conduits sur un navire opérationnel en essayant de limiter au mieux les interférences avec le comportement habituel de l’équipage ; ces considérations ont impliquées des limitations sur le contrôle des essais réalisés, sur les systèmes de mesure installés et sur leur facilité d’utilisation.

3.1.1. Instrumentation

L’instrumentation installée à bord du navire peut être divisée en quatre groupes.

- Le groupe "mouvements" : mesure des mouvements du navire (attitude, vitesse fond, accélérations, vitesses angulaires) et de sa trajectoire (cap, latitude, longitude).

- Le groupe "commandes" : mesure du pas d’hélice, de la vitesse de rotation du moteur, de l’angle de barre, des efforts sur le safran.

- Le groupe "funes" : mesure des efforts et de l’orientation des trois funes.

- Le groupe "environnement" : mesure de la vitesse et de la direction du vent, estimation de l’état de mer.

3.1.2. Essais

Au cours des essais, le navire a navigué dans le Golfe de Gascogne, près de la côte (à environ 10 milles nautiques), entre Saint-Gilles-Croix-de-Vie et l’Ile d’Oléron, pendant 12 jours. Les essais ont eu lieu en septembre 2009.

Plusieurs types d’essais ont été réalisés, en pêche (au cours des manœuvres habituelles de l’équipage) et en route libre (essais dédiés). Le déplacement du navire au cours des essais a varié de 206 t à 182 t. Les variations sont dues principalement à la consommation de gasoil, à celle d’eau douce et au poids des prises.

Au cours des phases de pêche, les essais suivants ont été réalisés :

- action de pêche, avec ou sans giration ;

- action de virage des funes ;

- action de filage des funes.

Au cours des phases de route libre, les essais suivants ont été réalisés :

- giration ;

- extinctions en roulis ;

- décélération ;

- tests de vitesse.

3.2. Essais en bassin sur la maquette de 2 m

L’un des objectifs du projet SOS-Stabilité est l’identification et la modélisation des conditions les plus extrêmes et les plus critiques pour la stabilité du navire. Par conséquent, des essais en bassin ont été réalisés pour pouvoir contrôler l’environnement, et en particulier générer de la forte houle, et ainsi mesurer la réponse non-linéaire du navire.

Deux campagnes d’essais principales ont été menées :

- une première campagne sans vitesse d’avance pour étudier les houles de travers avec différentes conditions d’envahissement du navire et les houles de l’arrière en action de pêche ; la campagne a été réalisée au bassin de houle de l’Ecole Centrale de Nantes (50 m de long, 30 m de large et 5 m de profondeur ; le batteur de houle peut créer des houles régulières et irrégulières de 1.0 m de haut) ;

- une deuxième campagne avec vitesse d’avance et houle de l’arrière ; la campagne a été réalisée au Seakeeping and Maneuvering Basin de MARIN, aux Pays-Bas (170 m de long, 40 m de large et 5 m de profondeur ; le batteur de houle peut créer des houles régulières et irrégulières jusqu’a 0.3 m de haut).

Une campagne complémentaire en extérieur sur mer calme a également été réalisée pour régler certains paramètres de la maquette comme le pilote automatique, pour étudier le comportement du navire sur mer calme et pour

Page 4: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

vérifier ses performances avant les essais à MARIN.

3.2.1. Description de la maquette

La maquette utilisée pour les essais en bassin est une maquette du chalutier à l’échelle 1/11ème. Un déplacement de 250 t à l’échelle réelle a été choisi : ce déplacement correspond au cas de chargement "départ", avec la moins bonne stabilité initiale d’après ses caractéristiques de stabilité. Un autre cas de chargement a également été utilisé lors des essais au bassin de MARIN : à partir du cas de chargement initial, le centre de gravité a été élevé, conduisant à un cas de chargement avec GM dégradé.

Les caractéristiques principales du navire pour le cas de chargement choisi sont données dans le Tableau 1, à l’échelle maquette et à l’échelle réelle.

Echelle Maquette Réelle

Longueur hors-tout (m) 2.08 22.89

Longueur entre perpendi-culaires (m)

1.85 20.39

Largeur hors-tout (m) 0.64 7.04

Tirant d’eau avant (m) 0.27 2.97

Tirant d’eau arrière (m) 0.345 3.8

Déplacement lège (t) - 173

Déplacement (t) 0.188 250

Volume envahissable (L) 50 66550

GM nominal (m) 0.0657 0.723

GM dégradé (m) 0.046 0.506

Tableau 1 : Caractéristiques principales du chalutier à l’échelle maquette et au réel.

La maquette est équipée d’un moteur électrique délivrant une puissance maximale de 390 W. La vitesse maximale de rotation de l’arbre d’hélice est de 2000 tr/min.

Pour modéliser le roulis du navire réel au mieux, la maquette est équipée de quilles anti-roulis dont les dimensions correspondent à celles du navire réel.

L’envahissement étant un des intérêts des essais en bassin, la maquette est également

équipée d’ouvertures sur le pont principal : 6 sabords permettant d’évacuer l’eau embarquée sur le pont et une grande trappe sur le bordé, à l’avant sur tribord afin de générer un envahissement significatif.

L’étude du comportement du navire en action de pêche faisant également partie des objectifs des essais, plusieurs points de remorquage des funes sont utilisables. L’engin de pêche est simplement modélisé par un élastique dont la raideur et l’amortissement sont connus.

Une vue de la maquette est montrée ci-dessous.

Figure 3 : Vue de la maquette au 1/11ème.

3.2.2. Instrumentation

Les systèmes de mesure et d’enregistrement utilisés pour les essais en bassin sont :

- un dispositif de trajectographie mesu-rant les mouvements du navire ;

- une centrale inertielle mesurant l’attitude du navire (roulis, tangage et lacet) ;

- des dynamomètres mesurant les efforts pertinents (couple et poussée d’hélice, torseur d’efforts sur l’axe du safran, efforts de pêche) ;

- des sondes capacitives mesurant la hauteur relative de l’eau en trois points du navire ;

- deux caméras, pouvant filmer différents endroits du navire en fonction des essais ;

- une antenne GPS mesurant la vitesse et la position du navire (pour les essais en extérieur uniquement).

Page 5: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

3.2.3. Essais au point fixe

Trois types d’essais ont été réalisés au point fixe :

- mer de travers avec différentes périodes de houle ;

- mer de l’arrière et navire maintenu par des câbles (élastiques) avec différentes périodes de houle et différents régimes moteur ;

- sans houle, navire maintenu par des câbles (élastiques) et simulation qualitative de croche.

3.2.4. Essais en extérieur

Les essais en extérieur ont été réalisés sur l’Erdre (près de Nantes). Leur objectif était d’étudier le comportement du navire sur mer calme (manœuvrabilité, résistance, accélération, décélération), vérifier ses capacités propulsives et régler le pilote automatique.

Les différents essais réalisés sont :

- vitesse du navire pour différents régimes moteur pour obtenir la courbe d’étalonnage de la vitesse ;

- accélération de la maquette pour déterminer le temps et la distance nécessaires à la maquette pour atteindre sa vitesse cible maximale ainsi que la variation temporelle de la vitesse ;

- décélération de la maquette pour déterminer le temps et la distance nécessaires à la maquette pour s’arrêter ainsi que la variation temporelle de la vitesse ;

- girations pour différentes vitesses du navire et angles de barre pour obtenir les coefficients du modèle de manœuvrabilité.

3.2.5. Essais avec vitesse d’avance

Trois types d’essais ont été réalisés avec vitesse d’avance :

- houle régulière de travers pour deux vitesses d’avance (vitesses de route et de pêche) avec période de houle

correspondant à la période de résonance en roulis du navire ;

- houle de l’arrière avec différentes périodes de houle (houles légèrement rattrapantes, houles légèrement rattrapées, cambrure de houle maximale) ;

- houle oblique de l’arrière (30 deg et 45 deg) avec différentes périodes de houle (houles légèrement rattrapantes, houles légèrement rattrapées, cambrure de houle maximale).

Au cours de l’ensemble de ces essais, la conduite du navire était contrôlée par le pilote automatique.

Une vue de la maquette au cours de l’un des essais réalisés est montrée ci-dessous.

Figure 4 : Vue de la maquette au 1/11ème au cours des essais à MARIN.

3.3. Essais en mer sur la plateforme de 8 m

Les mers fortes constituent des conditions critiques pour la tenue à la mer des petits navires de pêche, en particulier par mer de l’arrière. Or, il s’avère qu’il est compliqué d’observer ces conditions et la réponse du navire correspondante, que ce soit en bassin sur une maquette ou à la mer sur un navire réel.

En effet, les essais en bassin nécessitent alors des équipements très sophistiqués pour éliminer les effets d’échelle et recréer des conditions environnementales réalistes, ainsi que des maquettes pas trop grandes ; pour des maquettes de taille significative, les mers fortes sont en effet inaccessibles.

Quant aux essais sur un navire réel, ils sont souvent limités par la capacité d’instru-mentation embarquée (qui ne doit pas gêner

Page 6: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

les opérations du navire), par la sécurité de l’équipage et par la capacité à modifier la configuration du navire.

Par conséquent, pour s’affranchir des inconvénients des essais sur maquette et sur navire réel, une maquette du chalutier à l’échelle 1/3 a été fabriquée et équipée de manière à être autonome et à pouvoir affronter tout type de condition environnementale, y compris des conditions menant à des situations critiques. Cette maquette a ensuite été utilisée dans le cadre d’une campagne d’essais à la mer au cours de laquelle de nombreux types d’essais ont été réalisés : tests de propulsion, extinctions en roulis avec et sans vitesse d’avance, girations, croche, envahissement, …

3.3.1. Description de la plateforme

La plateforme utilisée pour les essais en mer est une maquette du chalutier à l’échelle 1/3. Comme pour les essais en bassin, un déplacement de 250 t à l’échelle réelle a été choisi. D’autres cas de chargement ont également été utilisés au cours des essais ; en particulier, en partant du cas de chargement initial, le centre de gravité a été élevé, conduisant à un cas de chargement avec GM dégradé.

Les caractéristiques principales du navire pour le cas de chargement choisi sont données dans le Tableau 2, pour la plateforme et pour le navire réel.

Echelle Maquette Réelle

Longueur hors-tout (m) 7.63 22.89

Longueur entre perpendi-culaires (m)

6.80 20.39

Largeur hors-tout (m) 2.35 7.04

Tirant d’eau moyen (m) 1.13 3.39

Déplacement (t) 9.26 250

GM nominal (m) 0.241 0.723

GM dégradé (m) 0.214 0.642

Tableau 2 : Caractéristiques principales du navire à l’échelle 1/3 et au réel.

La plateforme est équipée d’un moteur électrique délivrant une puissance maximale

de 9.5 kW. La vitesse maximale de rotation de l’arbre d’hélice est de 2400 tr/min.

La plateforme a été conçue pour être autonome et totalement étanche de manière à pouvoir rester opérationnelle même après un chavire-ment.

L’équipement de la plateforme permet par ailleurs de modifier son chargement (variation de déplacement et / ou variation de la position du centre de gravité), de réaliser des essais d’envahissement (cales envahissables).

Une vue de la plateforme est montrée sur l’image ci-dessous.

Figure 5 : Vue de la plateforme d’essais.

3.3.2. Instrumentation

La plateforme d’essais est équipée des instruments de mesure suivants :

- une centrale inertielle permettant de mesurer les mouvements et accéléra-tions du navire ;

- une antenne GPS mesurant la vitesse absolue et la position du navire ;

- différents systèmes de mesure de la vitesse relative du navire : deux lochs (un classique à moulinet et un à ultrason), et un vélocimètre doppler permettant une mesure ponctuelle des trois composantes de la vitesse au voisinage du safran ;

- un capteur d’angle de barre ;

- une instrumentation permettant la mesure des efforts pertinents (couple et poussée d’hélice, torseur d’efforts sur l’axe du safran, efforts dans les funes et angle de celles-ci) ;

Page 7: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

- des capteurs de pression permettant de mesurer les tirants d’eau avant et arrière ;

- des capteurs de hauteurs de franc-bord donnant accès à la hauteur relative de l’eau en quatre points du navire ;

- des caméras pouvant filmer différents endroits du navire en fonction des essais.

3.3.3. Essais

Les essais de la plateforme se sont déroulés dans la baie de Quiberon pendant deux semaines en février 2013. Les conditions de mer rencontrées pendant cette campagne d'essais ont cependant été relativement clémentes et n’ont pas permis de tester la plateforme dans les conditions extrêmes envisagées initialement.

Plusieurs types d’essais ont été réalisés (environ 80 enregistrements différents), parmi lesquels :

- résistance /propulsion, sur mer calme et avec petite houle ;

- giration, sur mer calme et avec petite houle ;

- essais en route avec différentes conditions de houle (hauteur et incidence) et différentes vitesses d’avance du navire ;

- essais avec GM dégradé ;

- essais avec compartiment avant en-vahi ;

- essais en conditions de pêche ;

- essais de croche.

4. SIMULATEUR TEMPOREL

Le simulateur temporel de navire développé dans le cadre du projet SOS-Stabilité est un simulateur prenant en compte l’ensemble des efforts pertinents tout en maintenant des temps de calcul courts. Ces caractéristiques doivent permettre au simulateur d’être utilisé de manière efficace pour réaliser des variations systématiques des paramètres de conception ou de contrôle des navires.

Les modèles d’efforts implémentés dans le simulateur sont détaillés ci-dessous.

4.1. Description, méthode, modèles

Le simulateur est composé d’un bloc qui résout les équations de la dynamique pour un corps solide à six degrés de liberté et de différents modules modélisant les efforts extérieurs (propulsion, résistance, manœuvra-bilité, pêche, …).

Une fonctionnalité particulière du simulateur est que les effets non-linéaires (en particulier les effets de Froude-Krylov hydrostatiques et hydrodynamiques ainsi que l’amortissement en roulis) sont pris en compte de manière à modéliser correctement les grands mouve-ments des navires.

Les modules d’efforts extérieurs implémentés dans le simulateur sont brièvement décrits ci-dessous.

- Propulsion : poussée de l’hélice qui dépend de la vitesse de rotation de l’hélice, du pas d’hélice et de la vitesse relative du navire par rapport à l’eau (prise en compte du courant, de la dérive et de la vitesse orbitale de la houle) ; les paramètres du module sont déterminés à partir de données connues, expérimentales ou estimées.

- Résistance : efforts longitudinaux et verticaux et moment en tangage qui dépendent de la vitesse relative du navire par rapport à l’eau ; modèle basé sur des modèles statistiques ([1] et [2]).

- Manœuvrabilité : efforts longitudinaux et latéraux et moment de lacet qui dépendent de la vitesse relative du navire par rapport à l’eau et de la vitesse en lacet ; modèle de manœu-vrabilité sur mer calme classique proche de celui proposé par Lewis ([3]).

- Safran : module d’efforts sur le safran spécifique prenant en compte l’interaction avec le jet de l’hélice ([4]) et la vitesse orbitale de la houle à la position du safran.

- Surfaces portantes : module général prenant en compte l’effet de surfaces portantes, comme des quilles anti-roulis, par l’intermédiaire de coeffi-cients de portance et de trainée.

Page 8: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

- Hydrostatique et hydrodynamique (houle incidente) : calcul de la pression de l’eau sur la carène du navire (Froude-Krylov) en négligeant les efforts de diffraction ; le modèle permet la prise en compte des non-linéarités liées aux grands mouve-ments par intégration directe des pressions sur la partie mouillée de la carène.

- Poids : efforts de gravité.

- Radiation : seuls les masses ajoutées et l’amortissement de radiation sont pris en compte ; ces paramètres sont déterminés par des calculs dans le domaine fréquentiel.

- Amortissement : coefficients d’amor-tissement linéaire en pilonnement roulis et tangage et coefficients d’amortissement quadratique en roulis, déterminés à partir de données expérimentales ou empiriques ([5]) ; les coefficients peuvent dépendre de la vitesse d’avance du navire.

- Vent : efforts longitudinaux et latéraux et moment de lacet qui dépendent de la vitesse relative du navire par rapport à l’air.

- Pêche : les engins de pêche sont modélisés de manière simplifiée par des systèmes à trois degrés de liberté (dans le plan horizontal) couplés au système à six degrés de liberté du navire ; les efforts des funes sont alors transmis au navire par l’intermédiaire de leurs points de tire.

- Envahissement : efforts dus à l’embarquement d’eau et la propaga-tion de celle-ci dans les différents compartiments du navire (cale à moteur, cale à poissons, …) ; les effets dynamiques de l’eau dans les compar-timents (sloshing en particulier) ne sont pas directement pris en compte.

Des houles régulières ou irrégulières peuvent être générées par le simulateur. Les houles irrégulières sont modélisées par la superposi-tion de vagues régulières (houle d'Airy). Ainsi, un système de vague est défini par les caracté-ristiques de chacune des ses composantes

(amplitude, période, phase et direction de propagation). Des mers croisées peuvent également être générées.

Un bloc dédié au pilote automatique peut également être utilisée pour contrôler le cap du navire : il peut ainsi être changé facilement au sein du simulateur. Cette fonctionnalité est nécessaire dans le cadre du projet SOS-Stabilité dans la mesure où l’un des objectifs du projet est l’amélioration du contrôle du navire, en particulier par mer de l’arrière.

4.2. Validation

Plusieurs validations qualitatives et quantita-tives du simulateur décrit ci-dessus ont été réalisées, en particulier pour les phénomènes non-linéaires :

- validation qualitative du roulis paramétrique à partir de résultats d’essais antérieurs réalisés par Sirehna sur un navire de pêche ([6]) ;

- validation qualitative de broaching à partir d’essais réalisés sur un navire de pêche japonais ([7] et [8]) ;

- validation quantitative à partir des essais réalisés dans le cadre du projet SOS-Stabilité (essentiellement essais à la mer sur le chalutier réel et essais en bassin sur la maquette au 1/11ème) et décrits ci-dessus.

4.2.1. Roulis paramétrique

Des essais à la mer sur un navire de pêche sujet au roulis paramétrique ont été réalisés par Sirehna ([6]). Les conditions environne-mentales rencontrées lors des essais ont été reproduites dans le simulateur.

Les mouvements mesurés lors des essais et calculés par le simulateur sont montrés sur les figures ci-dessous. Sur ces figures, le pilonnement est positif vers le bas, le roulis est positif vers tribord et le tangage est positif nez vers le haut. Par ailleurs, les flèches indiquent un minimum de pilonnement, ce qui signifie que le navire est sur la crête d’une vague.

Page 9: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

Figure 6 : Signal temporel de roulis (simulateur).

Figure 7 : Signaux temporels de pilonnement, roulis et tangage (essais).

Figure 8 : Signaux temporels de pilonnement, roulis et tangage (simulateur).

Ces figures montrent que le roulis paramétrique, obtenu sans déclenchement particulier, est correctement représenté par le simulateur (apparition de "bouffées" de fort roulis). Les déphasages entre les mouvements de pilonnement, roulis et tangage sont très similaires pour les essais et la simulation : la position du navire sur une crête de vague est obtenue juste avant les maxima de roulis.

La différence principale entre les essais et la simulation est l’amplitude plus importante des mouvements pour le simulateur, en particulier pour le roulis. Une explication est que seul de l’amortissement linéaire a été utilisé pour les simulations (les coefficients d’amortissement quadratique n’ont pas été utilisés pour simplifier la mise en données du cas de calcul).

4.2.2. Broaching

Des essais en bassin sur un navire de pêche japonais de 35 m (au 1/15ème) sujet au broaching ont été réalisés par N. Umeda ([7] et [8]). Lors des essais, une houle régulière a été utilisée.

Différents cas-test ont été reproduits avec le simulateur, avec trois conditions de houle (hauteur et période de houle croissantes du premier au dernier cas-test, et variation de l’incidence de la houle). Les trois conditions de houle ont mené au chavirement lors des essais en bassin.

Les figures ci-dessous montrent les signaux de roulis, tangage et lacet obtenus avec le simulateur pour la première et la troisième condition de houle.

Figure 9 : Signaux temporels de roulis, tangage et lacet pour la première condition de

houle (simulateur).

Page 10: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

Figure 10 : Signaux temporels de roulis, tangage et lacet pour la troisième condition de

houle (simulateur).

Les trois cas simulés conduisent à une situation de broaching (l’angle de lacet dévie de 40 deg par rapport à sa valeur initiale et de forts angles de roulis sont obtenus), mais seule la première condition de houle conduit au chavirement du navire.

Ces résultats montrent ainsi que le phénomène de broaching est bien représenté qualitative-ment par le simulateur, mais que les modèles implémentés doivent être améliorés pour obtenir une bonne adéquation avec les mesures expérimentales.

4.2.3. Validation à partir des essais à la mer des essais maquette en extérieur

Les essais en mer au réel et les essais en extérieur sur la maquette de 2 m sont utiles pour valider le simulateur vis-à-vis du comportement sur mer calme (validation des modules implémentés dans le simulateur et réglage des paramètres d’entrée pour le navire).

Les figures ci-dessous montrent une comparaison des résultats expérimentaux et numériques pour quelques validations élémentaires. Le cas échéant, les données expérimentales ont été converties de l’échelle maquette à l’échelle réelle.

Figure 11 : Variation de la vitesse du navire au cours d’une accélération (essais / simulateur).

Figure 12 : Diamètre de giration pour trois angles de barre (essais / simulateur).

Figure 13 : Traction des funes (essais / simulateur) ; remarque : les signaux

expérimentaux ont été filtrés.

Ces figures montrent que les résultats des simulations sont proches des mesures expérimentales pour ces quelques tests élémentaires ; il en est de même pour l’ensemble des tests élémentaires. Le navire modélisé a ainsi un comportement proche de celui du navire réel observé lors des différents essais utilisés ici.

Page 11: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

4.2.4. Validation à partir des essais en bassin

Une fois les données d’entrée du navire réglées, les essais en bassin peuvent être utilisés pour réaliser des validations plus complètes, en particulier les modules impliqués dans la tenue à la mer (efforts de Froude-Krylov, amortissement quadratique en roulis, ...).

Les figures et tableaux ci-dessous présentent une comparaison des mesures expérimentales et des résultats numériques pour certains des essais réalisés au bassin de l’Ecole Centrale de Nantes. Les données expérimentales ont été converties de l’échelle maquette à l’échelle réelle.

Figure 14 : Essais d’extinction en roulis, avec et sans funes, au point fixe.

Période

(s)

Hauteur

(m)

Type de

run

Roulis

(°)

Tangage

(°)

Pil.

(m)

Roulis

(°)

Tangage

(°)

Pil.

(m)

6.30 1.1

Résonance

en roulis14.0 0.7 0.6 14.5 2.0 0.8

6.30 2.2

Résonance

en roulis24.0 2.7 1.2 24.0 3.0 1.3

6.30 3.3

Résonance

en roulis29.0 3.7 1.8 31.0 2.0 1.7

9.95 5.5

Grande

période13.3 3.1 2.4 13.5 1.0 2.9

9.95 9.9

Grande

période18.5 2.2 5.1 20.0 2.0 5.4

Amplitude des

réponses - Essais

Amplitude des

réponses - SimulateurParamètres de houle

Tableau 3 : Amplitudes de roulis, tangage et pilonnement avec mer régulière de travers, au

point fixe.

Figure 15 : Essai d’envahissement par mer régulière de travers (Hhoule=1.4 m, Thoule=3.3 s),

sabords et porte de cale à poissons ouverts.

Les résultats numériques sont globalement proches des mesures expérimentales. Pour l’essai d’envahissement, même si les amplitudes de pilonnement diffèrent, les valeurs moyennes sont très proches.

Les résultats montrent donc que le comportement du navire pour des mers de travers au point fixe est modélisé correctement par le simulateur.

Les figures suivantes montrent une comparaison des mesures expérimentales et des résultats numériques pour certains des essais réalisés au bassin de MARIN. Les données expérimentales ont été converties de l’échelle maquette à l’échelle réelle.

Figure 16 : Roulis par mer régulière de travers (Hhoule=3.3 m, période=résonance en roulis),

avec vitesse d’avance (V=10 nd).

Page 12: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

Figure 17 : Pilonnement par mer régulière de l’arrière (Hhoule=3.3 m, Thoule=9 s), avec vitesse

d’avance (V=10 nd).

Ces résultats montrent que la réponse du bateau par mer de travers est bien calculée, mais celle par mer de l’arrière est surestimée par le simulateur.

De façon générale, la comparaison des résultats numériques et expérimentaux pour les houles de l’arrière donne généralement des écarts assez importants. Il convient cependant de noter que, pour avoir des célérités de houle proches de la vitesse du navire, dans un certain nombre des essais réalisés à MARIN, la houle générée était très courte comparée à la taille du navire (longueur d’onde de l’ordre de grandeur de la longueur du navire, voire plus faible) et de hauteur relativement faible ; cette houle était alors très déformée par le champ de vagues généré par l’avance de la maquette, phénomène non pris en compte par les modèles numériques implémentés (hypothèse de houle non déformée au voisinage du navire). Ces houles ne sont cependant pas les plus critiques vis-à-vis de la sécurité du navire. Des travaux restent à réaliser pour mieux modéliser ces configurations.

Les résultats pour les houles de travers sont meilleurs et les mouvements obtenus avec le simulateur sont assez proches des mesures expérimentales.

5. DEMONSTRATEUR DE SYSTEME EMBARQUE

Compte-tenu de la nature des phénomènes mis en jeu lors d'accidents de petits navires de pêche (voire également de navires du taille plus importante), la sécurité peut être améliorée de manière significative par l'utilisation de moyens embarqués visant à alerter au plus vite l'équipage, voire à réagir de

manière active à des situations dangereuses, en tenant compte des aspects comportementaux.

Un prototype de système embarqué pour répondre à cette problématique a ainsi été développé au cours du projet SOS-Stabilité, en considérant cependant un périmètre plus large que l'application aux navires de pêche.

Les systèmes visés sont de deux types :

- systèmes de type "monitoring", consistant à mesurer et à suivre l'évolution de l'état du navire et de l'environnement et à en déduire, selon un ensemble de critères, des alertes affichables au niveau du poste de pilotage ; cela permet de détecter et d’anticiper les conditions potentielle-ment dangereuses ;

- systèmes de type "contrôle dynamique", consistant à agir en temps réel sur les actionneurs du navire pour éviter ou contrer des mouvements critiques ; en pratique, sur les petits navires de pêche, il s'agit en quelque sorte d'un pilote automatique amélioré.

5.1. Système de type "monitoring"

Le système de type "monitoring" (surveillance) a pour objectifs de fournir des informations relatives à la proximité d’évènements dangereux et d’alerter l’opérateur du risque ou de la réalisation d’un phénomène dangereux. Ceci est réalisé notamment par l'affichage (interface graphique) des risques de perte de stabilité et de conseils de pilotage pour aider l’équipage à diminuer ces risques. Cette première fonction, "monitoring", constitue une aide à la décision. Dans cette fonction, aucune action sur les actionneurs du navire n’est effectuée, c'est l’opérateur qui choisit de prendre en compte ou non les informations fournies par le système. Cette fonction "monitoring" s'accompagne de modules d'estimation capables d'informer en temps réel sur l'état du navire et des conditions de navigation.

5.1.1. Interface graphique

Les fonctions implémentées pour réaliser l'affichage sont :

Page 13: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

- une fonction de calcul de zones à risque, dans lesquelles le navire a une probabilité plus élevée de se retrouver dans une situation dangereuse ;

- un affichage de la position du navire par rapport à ces zones ;

- une fonction de déclenchement de plusieurs alarmes qui préviennent de l’apparition d’un phénomène dangereux ;

- un affichage de l’état du navire et d’un indicateur concernant sa stabilité en roulis ;

- un affichage d’informations et de conseils supplémentaires, destinés à informer et orienter l’opérateur dans le but de réduire les risques.

Une interface graphique a été développée pour faire le lien entre l’opérateur et le système de monitoring. Les différentes zones de danger sont représentées dans le radar dans la partie droite de l’interface graphique et évoluent dynamiquement suivant la houle et l'état du navire.

Une vue de l’interface graphique est montrée ci-dessous.

Figure 18 : Vue d'ensemble de l'interface graphique.

5.1.2. Modules d’estimation

Les modules d'estimation représentent la partie la plus critique du système car ils déterminent les informations essentielles pour la levée des alarmes. Il faut que les modules soient capables d'évaluer en temps réel :

- l'état de la stabilité en roulis,

- l'état de la stabilité en lacet,

- l'état de mer.

Ces différents modules sont brièvement décrits ci-dessous.

Stabilité en roulis.

Le GM est une grandeur qui caractérise la raideur du navire. Le GM est donc une grandeur indispensable à estimer dans le cadre du développement du système embarqué. Pour de faibles oscillations (linéarisation), la hauteur métacentrique varie comme l’inverse du carré de la période de résonance. Le monitoring de la stabilité en roulis repose alors sur l'estimation de la période naturelle de roulis. Cette dernière doit permettre d'afficher correctement les zones de danger, tandis que l'estimation du GM devra permettre la levée de l'alarme détectant une variation du GM.

Ce module d'estimation a fait l'objet d'une validation avec des mesures issues d'essais en mer.

Stabilité en lacet.

La stabilité en lacet est la capacité du navire à conserver une trajectoire après perturbation. Ceci est particulièrement important lorsqu'on s'intéresse au comportement sur houle de l'arrière, et aux phénomènes de type broaching.

Etat de mer.

L'estimation de l'état de mer repose sur quatre grandeurs fondamentales :

- la direction moyenne de propagation de la houle,

- la période modale des vagues,

- la période de rencontre du navire avec les vagues,

- la hauteur significative des vagues.

Conformément à la volonté de développer un produit pouvant s’interfacer directement aux équipements déjà présents à bord sans nécessiter de modifications lourdes ou d’installations de capteurs supplémentaires (système dit "exogène"), l'estimation de l'état de mer ne repose que sur des mesures du mouvement du navire dans les vagues.

Page 14: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

Ce module a été testé avec des données issues d'essais en mer de la plateforme et a donné des résultats en précision suffisants pour le traitement des alarmes, l'affichage des zones de danger et le pilotage.

5.2. Système de type "contrôle dynamique"

En tant que système exogène au navire, le contrôle dynamique s'interface directement avec le pilote automatique déjà présent à bord. La communication entre ces deux systèmes s’effectue par passage de consignes de cap.

En transit, le système "monitoring" détecte des zones de dangers. Le système de contrôle peut alors agir sur les commandes pour maintenir le navire en conditions de sécurité. Cette fonctionnalité nécessite la connaissance de l’état de mer et de la position du navire par rapport à la vague (sur la crête ou dans un creux), et de surveiller d’autres mesures telles que l’accélération en cavalement. C'est en ce sens que le système de type "contrôle dynamique" fournit une fonctionnalité de niveau supérieur par rapport au système de type "monitoring".

Le contrôle dynamique est davantage conçu pour prévenir les situations dangereuses que pour rattraper une situation critique par une manœuvre "de la dernière chance". En effet le seul levier de contrôle à réaction rapide étant le safran, et les situations à fort risque de chavirement étant précisément celles où il n’est plus assez efficace pour contrer les instabilités, un tel système ne donnerait pas de résultats satisfaisants. Il est toutefois possible de proposer des actions automatiques pour des échéances très courtes, mais il faut qu’elles modifient de manière très rapide l’état du bateau (détachement des funes, gonflage de flotteurs,…).

Dans le cadre du projet, trois types de situations dangereuses qu’il est possible de prévenir en modifiant le cap ou la vitesse ont été traitées.

5.2.1. Pilotage en condition de surf-riding

Lorsqu’une situation de surf-riding est détectée il convient d’adapter la consigne de cap afin de rétablir un état plus stable du navire, où le risque de surf-broaching voire de chavirement est réduit significativement.

Cette fonction permet au navire de naviguer autour de la zone de surf, soit en réduisant sa vitesse et en conservant son cap, soit en tirant des bords autour de la zone et en conservant sa vitesse. Ce module est conçu dans le but de réduire les risques de surf-broaching. Il s’active lorsque les consignes de l’opérateur (cap et vitesse) sont situées dans cette zone. Les consignes situées en dehors de la zone sont traitées normalement.

5.2.2. Contournement des zones de roulis paramétrique ou résonant

Tout comme pour l’évitement des zones de surf, une modification du cap ou de la vitesse de consigne permet de positionner le navire en dehors des zones de roulis paramétrique et résonant. Le principe de fonctionnement est :

- de ne piloter que la vitesse (accélérer ou réduire l’allure) et donc de positionner le navire en limite de zone (avec une marge de sécurité) ; en fonction du cap du navire et de la position de la zone, cette vitesse est facilement calculable ;

- de ne piloter que le cap en conservant une vitesse d’avance constante ; cette méthode se base sur une variation automatique du cap de consigne (tirer des bords ou changer de route) et positionne le navire en dehors de la zone dangereuse.

5.2.3. Atténuation du roulis – Module rudder-roll

Un module de pilotage type rudder-roll peut également être utilisé pour réduire l’amplitude des oscillations en roulis. Ce système se base sur une forte sollicitation des barres qui oscillent à une vitesse maximum pour compenser les mouvements de roulis. La limitation de ce module vient du dimensionnement des actionneurs qui ne sont pas prévus pour cette tâche, du moins pour les navires existants. Un système plus efficace pourrait être conçu en prenant en compte dès la conception du navire des actionneurs plus rapides et plus efficaces. En réalisant cette fonction rudder-roll, le système de pilotage sortirait du cadre d’un système exogène générique.

Page 15: ATMA 2014 Etude et modélisation des petits navires de

Tous droits de reproduction réservés – ATMA 2014

Outre les aspects sécurité, un tel système pourrait également permettre une amélioration du confort de travail à bord du navire.

6. CONCLUSION

L’objectif du projet SOS-Stabilité était ambitieux. Dans le cadre du projet, des moyens d’essais complets ont été développés et ont permis d’obtenir un grand nombre de mesure dans des conditions très variées sur un chalutier de 23 m.

De nombreux développements ont également été réalisés, tant sur le plan de la modélisation du comportement dynamique non-linéaire des navires par mer forte que sur la conception de systèmes embarqués permettant d’améliorer leur comportement et leur sécurité.

Les travaux futurs vont consister d'une part à poursuivre l'amélioration de la modélisation de la stabilité dynamique des navires, d'autre part à développer des systèmes embarqués multifonctions, intégrant le suivi et la gestion de la sécurité vis-à-vis de la stabilité dynamique par mer forte.

7. REMERCIEMENTS

Les auteurs remercient les financeurs du projet SOS-Stabilité : Ministère de l'Economie de l'Industrie et de l'Emploi, Direction Générale des Entreprises ; Région Bretagne, Pôle Mer Bretagne ; Région Provence Alpes Côte d'Azur, Pôle Mer Paca ; Région Pays de la Loire.

Les auteurs souhaitent également remercier Bureau d’études Mauric, Bureau Veritas, IFREMER, Institut Maritime de Prévention, Société des Etablissement Merré et PRINCIPIA SAS pour leur collaboration active au projet SOS-Stabilité, ainsi que BEAmer pour son accompagnement en tant que conseil d’experts.

Les auteurs souhaitent enfin remercier l’ACAV pour avoir mis à disposition du projet le chalutier Anthinéas et son équipage.

8. REFERENCES

[1] J. Holtrop and G.G.J. Mennen – An Ap-proximate Powering Prediction Method – International Shipbuilding Progress, Vol. 29, pp. 166-170 – 1982.

[2] J. Holtrop – A Statistical Re-analysis of Resistance and Propulsion Data – Interna-tional Shipbuilding Progress, Vol. 31, pp. 272-276 – 1984.

[3] E.V. Lewis – Principles of Naval Archi-tecture, Second Revision, Vol. III, Motions in Waves and Controllability – SNAME – 1989.

[4] J. Brix, – “Manoeuvring Technical Ma-nual” – Seehafen Verlag – Hamburg – 1993.

[5] Y. Himeno – Prediction of ship roll damping - State of the art – Research Re-port – Department of Naval Architecture and Marine Engineering, College of Engineering, The University of Michigan, Ann Arbor, Michigan – 1981.

[6] J.J. Maisonneuve – Rapport des essais en mer sur le navire P85 – Rapport technique – Sirehna – 2007.

[7] N. Umeda et al. – Stability assessment for intact ships in light of model experiments – Journal of Marine Science and Techno-logy, Vol. 4, n°2, pp. 45-57 – 1999.

[8] N. Umeda – Data of Model Experiments for Ship A-2 – 23rd ITTC Specialist Com-mittee on Prediction of Extreme Motions and Capsizing – 2000.