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“La physicochimie de l’art”par le Laboratoire d’Archéologie Moléculaire et Structurale et en partenariat avec l’UPMC et le CNRS
L’ET LA SCIENCE
Le salon des fournisseursde matériels et services
pour le Laboratoire
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Issue du partenariat entre Equip Labo et Erlab, 2 sociétés françaises leaders dans leursdomaines, la nouvelle sorbonne Green Protect s’inscrit parmi les innovations qui visentà réduire la consommation énergétique des sorbonnes.En intégrant les technologies Green Fume Hood d’Erlab, Equip Labo propose une sorbonnedépourvue de système de raccordement aéraulique qui assure la protection du personnel sansrecourir à la ventilation du bâtiment.
Cette technologie « autonome » élimine les besoins en apport d’air neuf de compensation et lescoûts engendrés à sa production ainsi que les coûts d’investissement liés à la réalisation d’uneinfrastructure aéraulique lourde et complexe.
Son principe repose sur les mêmes principes de confinement que ceux d’une sorbonne raccordée, mais au lieu de rejeter l’airextrait de la sorbonne à l’extérieur du bâtiment, la sorbonne Green Protect filtre les polluants avant de recycler un air épuré dansle local. La présence de nombreux capteurs innovants permettent d’informer les utilisateurs en temps réel sur la qualité de leurprotection. Cette nouvelle sorbonne autonome offre une alternative économique aux sorbonnes raccordées, tout en garantissant un trèshaut niveau de sécurité pour les utilisateurs.
Ses performances de confinement répondent aux mêmes critères normatifs, tandis que ses performances de filtration sontprouvées par sa conformité à la norme AFNOR NF X 15211.
www.equiplabo.com
SORBONNE GREEN PROTECT
STAND : B23
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Présentation de l’animation : L’Art et la Science Page 4
LES COLORANTS
ATELIER : Rose Garance Page 5
ATELIER : Dans l’atelier du peintre : préparation de la peinture, formulation et rhéologie Page 6
Teinture du cheveu Page 7
ATELIER : Bleu Maya Page 8
ATELIER : Fausse pourpre de Tyr Page 9
ATELIER : Oxydes de fer Page 10
LES SECRETS CACHÉS D’ŒUVRES D’ART Page 11
POSTER : La Joconde Page 12
POSTER : Les peintures préhistoriques du Nord du Chili Page 13
POSTER : Eliézer et Rebecca Page 14
POSTER : Les peintures murales égyptiennes Tombe thébaine de Menna Page 15
POSTER : Les pigments bleus à l’époque de Napoléon Page 16
POSTER : La Vierge de François 1er (Copie sur porcelaine des peintures de Raphaël) Page 17
SOMMAIRE
PLANNING DES ATELIERS : LES COLORANTS
Mardi 31 mars Mercredi 1er avril Jeudi 2 avril
Matin10h00
Après-midi14h00
16h00
ATELIER
Bleu Maya
ATELIER
Teinture du cheveu
ATELIER
Oxydes de fer
ATELIER
Dans l’atelier du peintre
ATELIER
Rose Garance
ATELIER
Pourpre de Tyr
ATELIER
Bleu Maya
ATELIER
Teinture du cheveu
Conférence plénière« La physicochimie de l’art »
par Philippe WALTER16h30 au bout de l'allée C
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Depuis des années, la Science se met au service de l’Art pourdéfendre, soutenir, analyser et comprendre le travail desartistes et l’histoire matérielle des œuvres d’art. Encollaboration avec le Laboratoire d’Archéologie Moléculaireet Structurale de l’UPMC dirigé par Philippe WALTER, ForumLABO & BIOTECH crée une animation inédite et passionnanteassociant ateliers et posters afin de découvrir une desapplications méconnues du travail de laboratoire.
L e peintre anglais et théoricien des techniques Charles LockEastlake considérait, au milieu du XIXe siècle, que « la
chimie a été de tout temps l’auxiliaire professé du peintre ».D’autres artistes regrettèrent de ne pas maîtriser cettediscipline pour s’exprimer au mieux dans leur art. Vincent VanGogh confiait ainsi dans une lettre à son frère Théo, environ unmois avant sa mort : « dans les couleurs il y a un tripotage comme dans les vins.Comment pouvoir juger juste lorsque comme moi on ignore la chimie. » L’étudedes textes anciens, la reconstitution des recettes de fabrication de pigments oude matières picturales et la reproduction des gestes des artistes fournissentaujourd’hui une nouvelle opportunité pour redécouvrir le travail qui était effectuédans l’atelier des artistes. Plus nous progressons dans ces compréhensions des pratiques anciennes à l’aidedes concepts et des outils de la chimie moderne, plus nous nous rendons comptecombien, de tous temps, les matières et les techniques ont été des contraintespour les créateurs. En analysant les œuvres elles-mêmes, cette dimensionmatérielle de la création artistique se précise progressivement en faisantapparaître, chez certains Maîtres ou à certaines périodes, des innovations quisont souvent à mettre en parallèle avec des changements stylistiques ou de paradigmes ainsi qu’avec l’évolution des connaissances scientifiques.
L’ET LA SCIENCE
Les six Ateliers « Colorants » et les six Posters « Secretscachés d’œuvres d’art »présentés ici sont des exemplesqui illustrent cette nouvellemanière de faire de la chimie et de l’histoire de l’art.
Localisé à Paris, sur le campus universitaire de Jussieu, le LAMS est un laboratoirede recherche créé le 1er janvier 2012 par l’Université Pierre et Marie Curie et le CNRS.Une équipe de 25 personnes y développe des travaux visant, d’une part, àapprofondir notre connaissance de l’évolution des productions matérielles dans desaires géoculturelles variées, par l’étude des matières premières naturelles ousynthétiques, de leur formulation et des autres pratiques de leur mise en œuvre et,d’autre part, à mieux comprendre l’évolution des matériaux sur le long terme dansle but de les dater et de décrire les mécanismes chimiques à cinétique lente qui sontà l’origine de l’évolution et parfois de dégradations des objets. Cela conduit audéveloppement de techniques innovantes d’analyse chimique, portables et noninvasives, qui permettent de déplacer le laboratoire dans les musées et lesmonuments pour réaliser les études in situ.
Laboratoire d’archéologie moléculaire et structurale UMR 8220
dirigé par Philippe WALTER
STAND A 71
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Recette :
➊ Dans un bécher, verser 100mL d’eau distillée. Sous agitation, ajouter 5g de seld’alun. Chauffer la solution à 60°C, jusqu’à dissolution du sel.
❷ Introduire 1g de racines sèches de garance dans la solution. Attendre au moins 10 minutes, sous agitation et sans chauffer, que la solution se colore en rouge.
➌ Arrêter l’agitation, laisser décanter quelques minutes etrécupérer un maximum de filtrat coloré à l’aide d’une pipettejaugée. Transférer le tout dans un erlenmeyer.
➍ Sous agitation, introduire 30mL de la solution de bicarbonate de potassium jusqu’à la neutralisation de la solution initiale. Un précipité se forme. On observe également un fort dégagement gazeux.
➎ Une fois la réaction terminée, filtrer. Laver 3 fois le « gâteau » de pigment à l’eau distillée puis sécher à l’étuve(50°C). Broyer finement dans un mortier en porcelaine et conditionner en pilulier de verre.
Fabrication d’un pigment laqué à base d’extrait de racines de garance
RoseGarance
Produits :
• Racines de garance : 1g
• Eau déminéralisée : 100 mL + 300 mL pour le lavage
• Sel d’alun AlKO8S2.12H2O : 5g
• Solution de bicarbonate de potassium 0,5M : 30 mL
Matériel nécessaire :
• 1 plaque chauffante avec agitation magnétique
• 1 bécher 250mL ; 1 erlenmeyer 100mL
• 1 pipette jaugée 20mL
• 1 banc Büchner de filtration sous vide avec filtre en papier n°5
• 1 mortier en porcelaine
• 1 étuve (réglée à 50°C)
• 1 pilulier en verre de 5mL
• 1 spatule
Valeur ajoutée du laboboratoire
Les racines des plantes de la famille de la garance contiennentdes colorants dérivés de l’anthraquinone, notamment l’alizarineet/ou la purpurine. Grace à ce procédé de chimie douce, employédéjà durant l’Antiquité grecque, les molécules colorantescontenues dans la racine de la plante sont extraites en solution,puis co-précipitées avec le sel d’aluminium pour former unpigment laqué, une poudre très fine et stable lors de son emploien peinture ou pour le maquillage du visage.
ATELIER LES COLORANTS
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Préparation de la peinture, formulation et rhéologie
ATELIER LES COLORANTS
Dans l’atelier du peintre
Produits :
• Huile de lin ≈ 10 g
• Pigments : - terre verte (Sennelier) ≈ 17 g- ou laque d’alizarine (Sennelier) ≈ 6 g
• Additif : essence de térébenthine
Matériel nécessaire :
• 1 mortier et pilon
• 1 molette et plaque de verre dépoli
• 1 spatule
• Pipettes plastiques (environ 10)
• Lames de verre (2)
Recette :
➊ Placer le pigment dans le mortier. Ajouter l’huile et mélanger en broyant avec le pilon jusqu’à l’obtention d’une pâte compacte (taux de prise d’huile). Ajouter quelques gouttes d’huile et mélanger encore : la formulation est alors suffisamment fluide pour être utilisée en peinture.
➋ Placer un tiers environ du mélange sur la plaque de verre, côté face dépolie.Placer la molette au dessus et broyer en effectuant de petits cercles.
➌ Récupérer la peinture avec une spatule. En étaler sur une lame de verre et comparer avant et après broyage à la molette. Observer la consistance de la peinture : elle s’écoule moins. Dans le cas de la terre verte, on ne peut plus l’utiliser pour peindre. Ajouter quelques gouttes d’essence de térébenthine pour diminuer de nouveaula viscosité. Observer la consistance obtenue.
➍ Recommencer le broyage fin pour le reste du mélange. L’opération peut prendreplusieurs heures !
Valeur ajoutée du laboboratoire
Dans l’atelier du peintre, les « apprentis » préparaient la matièrepicturale qui sera ensuite utilisée par le Maître : le temps debroyage, les ingrédients utilisés et leur proportion conditionnentles propriétés rhéologiques de la peinture et, par conséquence, lerendu final de l’œuvre : suivant la consistance et les propriétésd’écoulement de la peinture, les traces du travail de l’artisteseront plus ou moins visibles, renforcées ou totalementestompées. Ce type d’observation sur une œuvre permet depréciser les formulations utilisées par les grands peintres.
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Recette :
➊ Dans une bouteille de grande contenance, préparer sousagitation environ 500 mL d’une solution saturée d’hydroxydede calcium. Le pH de la solution est alors de 12,5.
➋ Répartir la solution dans les 5 erlenmeyers ; ajouter danschacun d’eux 3g de litharge, puis une mèche de cheveux.Mettre les récipients dans l’étuve.
➌ Toutes les 15 minutes, la première heure, puis toutes lesheures pour les suivants, retirer un erlenmeyer. A l’aide d’unepince, prélever la mèche et la laver. Faire sécher sur du papierabsorbant.
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Reconstitution du procédé ancien de teinturepermanente du cheveu à partir de sels de plombs
ATELIER LES COLORANTS
Produits :
• Litharge PbO : 15g
• Eau déminéralisée : 500 mL + 500 mL pour le lavage
• Hydroxyde de calcium : 10 g environ
• 6 mèches de cheveux (blancs ou blonds)
Matériel nécessaire :
• 1 étuve réglée à 60°C
• 1 agitateur magnétique
• 6 erlenmeyer de 100 mL col large avec bouchon à vis
• 1 bouteille de 500mL
• 1 pince
• papier absorbant
• bandes de papier pH
Valeur ajoutée du laboboratoire
Cette teinture consiste à transformer à pH 12,5 un acide aminé contenu dans lakératine du cheveu, la cystine, pour libérer du soufre qui, lui même, réagira avecles sels de plomb pour former du sulfure de plomb noir. Les observations aumicroscope électronique à transmission montrent que ce sont des nanoparticulesde galène (PbS) qui se forment : leur croissance cristalline est limitée à 5 nmenviron par la structure supramoléculaire du cheveu. La lente cinétique de laréaction impose, à température ambiante, plusieurs nuits de traitement pourobtenir des cheveux noirs.
Teinturedu cheveu
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ATELIER LES COLORANTS
Reconstitution d’un pigment hybride basé sur la molécule d’indigo
Bleu Maya Produits :
• Indigo de pastel
• Argile blanche à canaux : palygorskyte ou sépiolite
Matériel nécessaire :
• 1 mortier en agate de contenance 100mL + pilon
• 1 presse à main
• 1 étuve (réglée à 190°C)
• 1 boite de pétri
• 3 piluliers de verre
Recette :
➊ Dans un mortier en agate, introduire l’argileet 5, 10 et 20 % (en masse) d’indigo pourobtenir une palette de teintes.
➋ Homogénéiser le mélange à l’aide d’unespatule, puis broyer durant 10 minutes àl’aide du pilon.
➌ Mettre la poudre en forme de pastilles à l’aided’une presse à main, puis les cuire 5 heures à190°C dans une boite de pétri.
➍ A la fin de la cuisson, attendre que lespastilles refroidissent avant de les réduire enpoudre fine dans le mortier et conditionnerles pigments en piluliers de verre.
Valeur ajoutée du laboboratoire
Une particularité du bleu Maya est sa stabilité et la persistance de la couleur,même dans l’acide nitrique concentré. Lors de la cuisson du mélange, lesmolécules d’indigo peuplent l’entrée des canaux de la palygorskite et jouentun rôle de « vanne » thermique, essentiel dans l’explication de la durabilitédu pigment, en laissant diffuser les molécules d’indigo à l’intérieur destunnels à haute température et en les piégeant à température ambiante. Deplus, l’encombrement stérique induit par la matrice inorganique autour de ladouble liaison centrale de la molécule d’indigo l’empêche d’avoir laconfiguration voulue pour une dégradation par l’acide nitrique.
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Comment faire un pigmentqui ressemble à la trèscélèbre pourpre ?
ATELIER LES COLORANTS
Produits :
• Racines d’orcanette : 0,5g
• Ethanol : 50mL
• Eau déminéralisée : 100 mL + 300 mL pour le lavage
• Sel d’alun AlKO8S2.12H2O : 5g
• Calcite : 1g
Matériel nécessaire :
• 1 plaque chauffante avec agitation magnétique
• 1 bécher 100mL ; 1 bécher 250mL
• 1 banc Büchner de filtration sous vide avec filtre en papier n°5
• 1 mortier en porcelaine
• 1 étuve (réglée à 50°C)
• 1 boite de pétri
• 1 pilulier en verre 5mL
• 1 spatule
Recette :
➊ Dans un bécher de 100mL, verser 50mL d’éthanol, introduire les racines d’orcanette et laisser poser de quelques minutes àquelques heures, de façon à extraire les colorants.
➋ Dans un bécher de 250mL, verser 100mL d’eau distillée. Sousagitation, ajouter 5g de sel d’alun. Chauffer la solution à 60°C,jusqu’à la dissolution du sel.
➌ Arrêter l’agitation, introduire 20mL du filtrat coloréd’orcanette.
➍ Sous agitation, introduire la calcite, on observe un fortdégagement gazeux. Attendre la fin de la réaction.
➎ Une fois la réaction terminée, filtrer. Laver 3 fois le « gâteau »à l’eau distillée puis sécher à l’étuve (50°C).
➏ Broyer le pigment finement dans un mortier et le conditionneren pilulier de verre.
Valeur ajoutée du laboboratoire
La vraie couleur pourpre (ou pourpre de Tyr),était obtenue en extrayant les moléculescolorantes (dibromoindigo) de la glande d’unpetit coquillage du genre Murex. Le produitétait très cher car la quantité de matièreproduite était très petite. Un substitut decette matière a alors été recherché durantl’époque gréco-romaine. Les racines del’orcanette permettent ainsi de fabriquerune poudre de couleur rouge violacée.Cependant, le pigment laqué produit n’estpas stable à la lumière, ce qui fait que cettematière n’a jamais pu être observée encontexte archéologique.
Fausse pourpre de Tyr
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La technique de préparation de la peinture employéepour les bâtiments en Scandinavie
Oxydes de fer ATELIER
LES COLORANTS
Produits :
• Oxyde de fer jaune (goethite) : 40g
• Huile de lin : 16g
• Farine de blé : 10g
• Sulfate de fer : 4g
Matériel nécessaire :
• 3 creusets en céramiques
• 1 four à moufle
• 1 mortier en agate
• 1 agitateur chauffant
Recette :
➊ Préparer 4 fractions de 10 g de l’oxyde de fer jaune et les placer dans les creusets (une fraction estconservée telle qu’elle).
➋ Chauffer les pigments respectivement à 500°C, 700°Cet 950°C durant au moins une heure. Laisser refroidir.Les broyer finement dans un mortier.
Pour chaque poudre, suivre la procédure de préparation de la peinture suivante :➊ Faire bouillir 28 mL d’eau
➋ Ajouter 2,5 g d’amidon de blé préalablement mélangé avec 5 mL d’eau, faire bouillir durant 15 minutes
➌ Ajouter 10 g de pigment et 1g de sulfate de fer, puis 4 g d’huile de lin. Faire bouillir de nouveau le mélange, sans agitation. Lorsque la peinture est refroidie, elle est prête à l’emploi.
Valeur ajoutée du laboboratoire
Cette recette est employée à Falun, en Suède, pour la fabricationde peintures qui servent à décorer et protéger les bâtiments enbois dans toute la Scandinavie. Les oxydes de fer sont déshydratéslors de la cuisson et un changement de phase se produit : lagoethite FeOOH se transforme en hématite α-Fe2O3. Aujourd’huiclassées au Patrimoine de l’humanité par l’UNESCO, les mines deFalun sont exploitées depuis le XVIe siècle pour son minerai decuivre et la production de ces couleurs jaune, rouge et noire.
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Place maintenant à l’analyse physico-chimique !
Longtemps, des prélèvements ont été nécessairespour pouvoir étudier les matières mises en œuvre par les peintres. De petites dimensions (environ un demi-millimètre de côté), ces échantillons étaient le plus souvent réalisés sur les bords du tableau, sous le cadre, et ne permettaient pas de révéler toutela sophistication des pratiques d’un Maître.Aujourd’hui, la miniaturisation de l’instrumentationet le développement de nouvelles méthodes d’analysepermettent de concevoir autrement les études des chefs-d’œuvre. Grace au soutien du domained’intérêt majeur Analytics de la région Ile-de-France,le LAMS construit un laboratoire mobile d’analyse et non invasive, associant des instrumentsdisponibles chez les fournisseurs à des prototypesqu’il développe lui-même. En combinant desspectroscopies UV-visible, proche-infrarouge, moyeninfrarouge, Raman aux fluorescence et diffractiondes rayons X, les multiples données obtenuesconduisent à l’identification des matières employéespar le peintre, de leurs mélanges et superpositions.
POSTERLa Vierge de François 1er
(Copie sur porcelaine des peintures de Raphaël)
DÉCOUVREZLes secrets cachés
d’œuvres d’art
POSTER Les peintures préhistoriquesdu Nord du Chili
POSTER Eliézer et Rebecca
POSTER Les peintures muraleségyptiennes Tombethébaine de Menna
POSTER Les pigments bleus à l’époque de Napoléon
POSTER La Joconde
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La Joconde (1503-1506)
Léonard de Vinci Musée du Louvre
Valeur ajoutée de l’étude des matériaux
Le nombre de couches de glacis qui ont été déposées et le
temps nécessaire à leur séchage avant chaque application
contribuent à expliquer un commentaire de Giorgio Vasari,
au milieu du XVIe siècle, sur le temps de réalisation de cette
œuvre. Léonard de Vinci aurait mis quatre années pour
réaliser la Joconde !
Démarche analytique
Une série de mesures a été réaliséepar spectrométrie de fluorescencedes rayons X pour observerl’évolution des signaux générés parla peinture, lorsqu’on déplace ledispositif d’analyse du bord du nezà l’oreille gauche de Mona Lisa.Grâce à la modélisation desspectres obtenus et la connaissancedes pratiques techniques de cetteépoque, il est possible d’estimer demanière non invasive l’épaisseur deces couches de glacis ainsi que laconcentration des pigments.
RésultatLe glacis est une matière bien particulière sur la palette du peintre. Elle est préparée enajoutant une faible quantité de pigment à un liant principalement composé d’un mélangede résine et d’huile. Elle met beaucoup de temps à sécher (quelques semaines) et, étantrelativement fluide, elle forme progressivement un film lisse qui efface toutes les tracesdu pinceau. Inconvénient de la pratique : il faut attendre qu’une couche durcisse avantd’en déposer une nouvelle pour rendre une partie de la représentation plus sombre.Léonard de Vinci a ainsi déposé 15 à 20 couches pour obtenir l’effet incroyablementsubtil que l’on peut observer aujourd’hui.
Léonard de Vinci a appliquédes glacis translucides dequelques micromètresd’épaisseur, teintés par despigments noirs, pour créerune impression de relief surle visage de Mona Lisa etgénérer son sourire. C’estpar la superposition d’ungrand nombre de cescouches qu’il a pu créer desombres « fondues commeune fumée » quicontribuent à son effetappelé « sfumato ».
POSTER SECRETS D’ŒUVRES D’ART
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les peinturespréhistoriques
du Nord du Chili Chili, Arica et altiplano andin,
entre 300 et 7000 avant notre ère
Démarche analytique
L’étude de la compositioncomplexe de ces couleurs a étéréalisée à partir de prélèvementsqui ont été inclus dans un bloc derésine pour réaliser leur coupestratigraphique. Leur analyse peutalors combiner toute une série deméthodes, notamment lamicroscopie électronique àbalayage avec microanalyse desrayons X et la microdiffraction desrayons X. La nature minéralogiquedes pigments, les impuretésassociées et la forme des cristauxpermettent de faire un lien entreles manifestations artistiques etles sources de pigments retrouvéslors de prospections géologiques.
RésultatL’analyse des masques funéraires des momies montrent la superposition deplusieurs couches de peintures teintées par des pigment variés : oxydes de fer etoxydes de manganèse pour les teintes rouge, orange, jaune et noir, carbonates decuivre pour le vert. Ces mêmes pigments ont été employés pour décorer des objetsainsi que des abris avec des représentations animales et humaines. Ces pigmentsn’était pas toujours disponibles à proximité des sites d’habitation côtiers : certainsd’entre eux, notamment les noirs à base de manganèse, ont été collectés dans lacordillère des Andes, jusqu’à une altitude de près de 5000 mètres.
Valeur ajoutée de l’étude des matériaux
Ces résultats indiquent que ces groupes humains
préhistoriques de chasseurs/pécheurs et cueilleurs,
ont développé des technologies complexes de collecte
et de préparation des matières colorantes pour la
réalisation de pratiques religieuses et la décoration
des objets de leur quotidien.
L’art préhistoire du Nord du Chilis’est enrichi de nombreusesdécouvertes ces 30 dernières années :certaines momies de la civilisationChinchorro, datées d’il y 7000 anspour les plus anciennes, ont été retrouvées au bord de la meravec des masques funérairespolychromes ; de nombreusespeintures ornent des abris sous roche dans les hautes valléesandines.
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Eliézer et Rebecca (1648)
Nicolas Poussin Fitzwilliam Museum, Cambridge, Royaume-Uni
Valeur ajoutée de l’étude des matériaux
Grâce à la lecture de traités sur les ombres et les perspectives
écrits vers 1620 par Matteo Zaccolini, peintre et théoricien de la
couleur, Nicolas Poussin a compris la distinction importante qui
existe entre un pigment et sa couleur apparente telle que nos
yeux peuvent la percevoir dans différents contextes naturels,
c’est-à-dire conditionnés par différentes interactions optiques
et par les conditions d’observation.
Démarche analytique
Quelques mesures effectuées parspectrométrie de fluorescencedes rayons X sur des zonesclaires ou sombres du manteaurévèlent qu’une couleur a étéréalisée à partir de composésriches en fer, caractéristiquesdes terres naturelles, alors quel’autre contient un pigment richeen plomb et en antimoine, quel’on sait avoir été synthétisé àl’époque de Nicolas Poussin.
RésultatLe travail du peintre s’effectue en aplats, en glacis, en superpositions et enjuxtapositions de couleurs. Le choix des pigments et leur formulation avec le liantpour retenir plus ou moins la lumière à travers les couches et laisser ou non la tracedu pinceau, ont joué un grand rôle dans les évolutions des pratiques artistiques. Ici, on démontre que l’ombre n’est plus créée par l’ajout d’un pigment sombre surune couleur uniforme, comme chez Léonard de Vinci. Elle était présente dans l’espritde l’artiste et elle a été préparée sur sa palette.
Les analyses chimiques d’œuvres de Nicolas Poussin nous éclairent sur samanière de représenter les ombres et les couleurs. L’artiste a ici choisi despigments jaunes différents pour représenter les plis clairs et les plis sombresdu manteau du personnage central de cette œuvre, Eliézer.
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Les peintures murales égyptiennesTombe thébaine de Menna,
Vers 1350 avant notre ère, Louxor, Egypte
Démarche analytique
Ce projet a permis, pour lapremière fois, d’effectuer uneétude non invasive complèted’une tombe égyptienne enmettant en œuvre sur placedes méthodescomplémentaires d’analysechimiques (spectroscopie UV,Vis, NIR, Raman, infrarouge,fluorescence des rayons X).Les conditions de travail ontété parfois difficiles à causede la température parfoisélevée et d’une poussièreomniprésente.
RésultatL’identification des pigments montre qu’une palette très classique de couleurs a été employée :le noir de carbone, l’hématite rouge, la huntite blanche, l’orpiment jaune, le bleu et le vertégyptiens, … sont des pigments bien connus à l’époque des Pharaons. Des couleursintermédiaires furent également obtenues par le mélange de ces pigments selon une pratiquequi ne semble apparaître en Egypte qu’à partir de cette époque, celle de la XVIIIe dynastie. Les teintes des chairs associent ainsi des oxydes de fer jaunes et rouges à de l’orpiment pourcréer une variété de nuances, ensuite plus ou moins éclaircie par l’apport de pigment blanc.
Valeur ajoutée de l’étude des matériaux
La peinture égyptienne a longtemps été fondée sur le
dessin qui définissait les formes ensuite colorées en
teintes plates avec des pigments purs. Par ces mélanges,
les artistes ont commencé à pouvoir suggérer les effets
de la transparence d’un tissu de lin très fin sur un corps
ou bien le relief d’une forme. Ces notions se
développeront ensuite à l’époque grecque.
Une collaboration internationale associant des équipes américaines, belges et françaises a conduit l’étude des décors de la tombe de Menna, l’une des plus
impressionnantes de la vallée thébaine. Les techniques des artistes sontprécisées grâce à la mise en œuvre de différentes techniques spectroscopiques.
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Les pigments bleus à l’époque de Napoléon (Début du XIXe siècle)
Bibliothèque Marmottan, Boulogne-Billancourt
Valeur ajoutée de l’étude des matériaux
Vincent Van Gogh écrivait à son frère Theo que « le bleu
de cobalt est une couleur divine et il n'y a rien de plus
beau pour installer une atmosphère ». Les analyses
montrent à quel point les peintres recherchaient les
dernières nouveautés proposées par l’industrie chimique
au XIXe siècle pour disposer des multiples nuances
nécessaires à leur projet artistique.
Démarche analytique
Les analyses par spectrométrie de fluorescence des rayons X,diffraction des rayons X etspectroscopie UV-visible sontautant de moyens de discriminerles différents pigments bleusemployés à cette époque. Laprésence de cobalt montre l’usagedu bleu Thénard, des bandesd’absorption caractérisent l’indigoet la diffraction des rayons X révèlela lazurite, la phase minéraleprincipale du lapis-lazuli, ainsi que le bleu de Prusse.
Résultat« De toutes les couleurs qui manquent à la peinture, il n'en est aucunequi lui soit plus nécessaire que le bleu ; on peut même dire que c'estcelle dont elle a le plus besoin » écrivait Thénard en 1804. C’est ens’inspirant des pratiques de la Manufacture de Sèvres pour réaliserdes porcelaines bleues qu’il a synthétisé un pigment à base de cobalt.L’étude des tableaux de la collection de Paul Marmottan datés desannées 1800-1830 permet d’observer les choix effectués par certainspeintres pour l’usage des différentes teintes bleues. Le bleu de cobalt apparaît en particulier pour la réalisation des ciels.
De nouveaux pigments bleus sontdisponibles à partir du début du XIXe siècle pour remplacer l’outremernaturel (lapis-lazuli), trop cher, ou le bleude Prusse, pas toujours assez stable à lalumière. Le chimiste Thénard inventeainsi en 1804 un nouveau bleu à base decobalt. L’analyse d’un ensemble detableaux datant de l’époquenapoléonienne permet d’observerl’adoption immédiate de ce pigment parles peintres.
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La Vierge de François 1er
Copie sur porcelaine des peintures de Raphaël Abraham Constantin, La Vierge de François 1er, 1818Cité de la Céramique, Musée de Sèvres
Valeur ajoutée de l’étude des matériaux
L’analyse permet de retrouver les mélanges de substances qui étaient
employées par l’artiste pour approcher au plus près l’aspect des
peintures de Raphael. Deux exemples de couleurs : pour réaliser
le jaune, le peintre appliquait un pigment rouge clair qui contenait
du PbO et du Sb2O3. Après cuisson de la plaque, la couleur se révélait
avec la formation d’un antimoniate de plomb d’un beau jaune.
Le chromate de plomb vert était, quant à lui, synthétisé préalablement
à la peinture à partir de sels métalliques réfractaires broyés puis
calcinés à 1400°C. A Sèvres, on compte 138 références de colorants purs.
Démarche analytique
L’analyse quantitative parspectrométrie de fluorescence desrayons X permet de retrouver lesrecettes et de comparer cescompositions aux livres encoreconservés à la Manufacture.
Exemple : Recette traditionnelle de dorure verte :sous-nitrate de bismuth 9.09 %,Carbonate d’argent 18.08 %, or enpoudre 72.73 %. Résultat de l’analyse de la dorure de la plaque : Or 81%, Bismuth 6%,Argent 13% ; épaisseur de la couche de dorure 0.65µm
RésultatPour tester la température de cuisson des plaques de porcelaine peintes, de l’or de Cassiusétait employé (traits en bas à gauche de la plaque). La manufacture de Sèvres préparaitcette matière constituée d’agrégats d’hydroxyde d’étain, gélatineux en solution aqueuse,sur lesquels étaient fixés des nanoparticules d’or. Après cuisson à la bonne température(vers 900°C), la couleur pourpre apparaissait. Si la température était trop importante ou insuffisante, la couleur était différente. Cette couleur est en effet due à un phénomènede résonance lors de l’interaction entre la lumière et les nanoparticules, appelé résonancede plasmon de surface. Typiquement, des nanoparticules d’or de 20 nm apparaissent rougecar elles ont une bande de résonance de plasmon à 520 nm (absorption dans le vert).
La copie de tableaux surporcelaine dure s’est développéeau début du XIXe siècle etrépondait, à l’époque, à un soucide conservation du Patrimoine.L’analyse des couleurs a permisde préciser les recettesemployées comme par exemplecelles contenant des sels d’orpour créer la couleur pourpre.
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ET LA SCIENCE
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12 QUESTIONSQUESTION 1/ Un pigment sombre rarement employé pour la peintureà l’huile a été utilisé par Léonard de Vinci pour réaliser les ombres sur levisage de la Joconde. Lequel ?
a) Le noir d’ivoireb) L’oxyde de manganèse c) La galène
QUESTION 2/ La découverte des éléments chimiques purs a conduit leschimistes du début du XIXe siècle à inventer de nouveaux pigments pourl’art. L’un de ces éléments chimiques était aussi employé pour faire lemagnifique bleu des porcelaines de la Manufacture de Sèvres. Lequel ?
a) Le cuivreb) Le cobalt c) Le fer
QUESTION 3/ Les Egyptiens employaient pour leurs peintures unpigment bleu composé d'une phase minérale bien particulière qui étaitsynthétisée en chauffant à une température élevée un savant mélanged’ingrédients. Quelle est cette phase ?
a) La lazuriteb) L’azuritec) La cuprorivaite
QUESTION 4/ Il existe différentes variétés de garance dont les racinescontiennent des colorants employés pour élaborer des pigments ou teindredes textiles. La variété sauvage Rubia peregrina contient une molécule engrande quantité. Laquelle ?
a) La purpurine b) L’alizarinec) L’éosine
QUESTION 5/ Teindre ses cheveux est une préoccupation très ancienne.Différents colorants extraits de plantes étaient employés durantl’Antiquité. Mais aussi certains métaux. Quel sel métallique était utilisépour teindre progressivement les cheveux en noir ?
a) L’oxyde de manganèseb) L’oxyde de cuivrec) L’oxyde de plomb
QUESTION 6/ Le bleu Maya est l’un des premiers pigments hybridesassociant une argile et un colorant d’origine végétal, l’indigo. Quelle estla phase minérale ?
a) La kaoliniteb) La montmorillonitec) La palygorskite Question 1/b) - Question 2/b) - Question 3/c) - Question 4/ a) -
Question 5/c) - Question 6/ c) - Question 7/a) - Question 8/a) -Question 9/ b) - Question 10/c) - Question 11/ a) - Question 12/c) -
QUESTION 7/ La magnifique couleur pourpre symbole de richesse etde puissance depuis l’Antiquité est-elle obtenue à partir de :
a) Glandes d’un petit coquillage b) Baies d’un arbustec) Résine qui exsude d’un conifère
QUESTION 8/ Quel est le pigment noir qui a été employé par leshommes préhistoriques pour réaliser les peintures de la grotte Chauvet ?
a) Du charbon de bois b) De l’os brûléc) De l’oxyde de manganèse
QUESTION 9/ La goethite est un minéral de couleur jaune à brune quel’on peut transformer par chauffage pour obtenir une magnifique couleurrouge. Quelle est la phase minérale formée ?
a) Le cinabreb) L’hématite c) Le rubis
QUESTION 10/ Le lapis-lazuli était importé de fort loin depuisl’Antiquité pour fournir un pigment bleu exceptionnel appelé outremer. Lacouleur de la meilleure qualité était à la Renaissance vendue au prix del’or. De quel pays était importé ce minéral ?
a) Chineb) Norvègec) Afghanistan
QUESTION 11/ De nombreux pigments ont été inventés au XXe siècle.L’un d’entre eux est facilement détectable par spectrométrie defluorescence des rayons X et sert pour détecter la falsification des œuvres.En effet, si ce pigment, apparu vers les années 1920, est présent dans uneœuvre supposée antérieure, l’œuvre est fausse ! Quel est ce pigment ?
a) Le dioxyde de titane b) Le carbonate de plombc) Le sulfure de zinc
QUESTION 12/ Certains artistes ont voulu au début du XIXe siècledévelopper une technique qui permettait de donner immédiatement uneapparence ancienne à leur œuvre. C’est le cas par exemple du Radeau dela Méduse, peint par Théodore Géricault entre 1818 et 1819. Cette matièreinduit aujourd’hui de graves problèmes de conservation. De quelle matières’agit-il ?
a) La résine de jujubierb) L’encre de seichec) Le bitume de Judée
Réponses
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