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29 RUE DE CHATEAUDUN 75308 PARIS CEDEX 9 - 01 75 55 10 00 JUIL/AOUT 14 Mensuel OJD : 57216 Surface approx. (cm²) : 1681 N° de page : 32-35 Page 1/4 LIANALEVI 3042660400506/GCP/OTO/2 Tous droits réservés à l'éditeur Après la guerre Hervé Le Corre O N NE REMERCIERA jamais assez les écrivains d'inventer d'admirables salauds A oe titre, Herve Le Corre vient de frapper un grand coup, avec cette inoubliable crapule de commissaire Darlac « ll est pas mal, hem "? » remarque, amuse, cet auteur discret dont le nouveau polar, Apres la guerre enthousiasme depuis plu sieurs semaines les amoureux du genre Ce plebiscite ne doit rien au hasard , il est le fruit d'un savoir faire imparable, édifie au fil des ouvrages Pourtant, Herve Le Corre n est pas immé- diatement tombe dans le roman noir « A l'adolescence, j'ai commence par écrire de la poesie », se souvient ce Girondin pur jus Alors qu'il envisageait une carriere medicale, ce garçon d'un milieu modeste opta finale- ment pour les lettres, qui le menèrent a un poste de professeur de français dans un college C'est sur le tard que cet admirateur de Garcia Marquez a mis le nez dans le polar « Mon premier coup de coeur fut Le Petit Bleu de la côte Ouest de Jean- Patrick Manchette Grâce a lui, j'ai découvert tous les monstres sacres américains A leur lecture, j'ai d abord cru qu'écrire un polar était quelque chose de facile Maîs j'ai rapidement compris qu'il en était tout autrement » En 1990, Herve Le Corre publie son pre- mier roman, La Douleur des morts, a la Serie noire « Je l'ai envoyé par la Poste, sans connaître personne », dit-il peut-être avec un poil de mauvaise foi La-bas, il fait paraî- tre sans faire de bruit trois autres romans - « dont une fiction d'anticipation, vraiment tres mauvaise » Lorsque Patrick Raynal quitte Gallimard, Le Corre rejoint François Guenf chez Rivages Bien lui en prit puisque L'Homme aux levres de saphir reçoit le if-kir Apres la guerre par Hervé Le Corre, 524 p Rivages 1990€ Grand Prix du roman noir français de Paris en 2005 et quatre ans plus tard Les Coeurs déchiquetés rafle le tres convoite Grand Prix de litterature policière L'idée d'âpres la guerre lui est venue lors d'une rencontre dans son college il y a une douzaine d'années avec le resistant Michel Shtinski, connu pour être a I origine du célèbre proces de Maurice Papon < En descendant d'un bus, il a reconnu l'un des policiers qui avait fait arrêter sa famille Soudain, il s'est dit "Ils sont encore la, ceux-là '" » Si cette anecdote fut un declic, Herve Le Corre a tou- tefois compose une histoire originale, ambi- tieuse et diablement bien construite Des les premieres pages - un interroge loire tres sauvage -, il nous fascine grâce a ses trois personnages, reunis dans le Bordeaux taiseux des annees 1950, trauma- tise par le spectre de la Seconde Guerre mondiale et les feux de la guerre d'Algérie ll y a Daniel, jeune apprenti mecanicien ap- pelé sous les drapeaux et dont les parents ont ete déportes l'étrange Andre Vaillant (c'est un pseudonyme ) qui rumine une ven- geance féroce et on y revient le cynique commissaire Albert Darlac, ayant bien profite de l'Occupation et que son reseau rend au jourd'hui (presque) intouchable « A travers lui, j'ai tente de cristalliser différentes fa celtes de la saloperie humaine Pour autant ce type se devait d'être un homme ordinaire C'est a cause d'individus comme lui que les dictatures peuvent exister > Au fait, trouvera t on un autre méchant d'anthologie dans son prochain roman ? « Tout ce que je peux vous dire, c'est que ça sera l'histoire d'un crétin a la poursuite d'une folle » Baptiste Liger

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29 RUE DE CHATEAUDUN75308 PARIS CEDEX 9 - 01 75 55 10 00

JUIL/AOUT 14Mensuel

OJD : 57216

Surface approx. (cm²) : 1681N° de page : 32-35

Page 1/4

LIANALEVI3042660400506/GCP/OTO/2

Tous droits réservés à l'éditeur

Après la guerreHervé Le Corre

ON NE REMERCIERA jamais assez lesécrivains d'inventer d'admirablessalauds A oe titre, Herve Le Corre

vient de frapper un grand coup, avec cetteinoubliable crapule de commissaire Darlac« ll est pas mal, hem "? » remarque, amuse,cet auteur discret dont le nouveau polar,Apres la guerre enthousiasme depuis plusieurs semaines les amoureux du genre Ceplebiscite ne doit rien au hasard , il est lefruit d'un savoir faire imparable, édifie au fildes ouvrages

Pourtant, Herve Le Corre n est pas immé-diatement tombe dans le roman noir « Al'adolescence, j'ai commence par écrire dela poesie », se souvient ce Girondin pur jusAlors qu'il envisageait une carriere medicale,ce garçon d'un milieu modeste opta finale-ment pour les lettres, qui le menèrent a unposte de professeur de français dans uncollege C'est sur le tard que cet admirateurde Garcia Marquez a mis le nez dans lepolar « Mon premier coup de coeur futLe Petit Bleu de la côte Ouest de Jean-Patrick Manchette Grâce a lui, j'ai découverttous les monstres sacres américains A leurlecture, j 'ai d abord cru qu'écrire un polarétait quelque chose de facile Maîs j'airapidement compris qu'il en était toutautrement »

En 1990, Herve Le Corre publie son pre-mier roman, La Douleur des morts, a la Serienoire « Je l'ai envoyé par la Poste, sansconnaître personne », dit-il peut-être avecun poil de mauvaise foi La-bas, il fait paraî-tre sans faire de bruit trois autres romans -« dont une fiction d'anticipation, vraimenttres mauvaise » Lorsque Patrick Raynalquitte Gallimard, Le Corre rejoint FrançoisGuenf chez Rivages Bien lui en prit puisqueL'Homme aux levres de saphir reçoit le

if-kir Apres la guerre par Hervé Le Corre,524 p Rivages 1990€

Grand Prix du roman noir français de Parisen 2005 et quatre ans plus tard Les Cœursdéchiquetés rafle le tres convoite Grand Prixde litterature policière

L'idée d'âpres la guerre lui est venue lorsd'une rencontre dans son college il y a unedouzaine d'années avec le resistant MichelShtinski, connu pour être a I origine du célèbreproces de Maurice Papon < En descendantd'un bus, il a reconnu l'un des policiers quiavait fait arrêter sa famille Soudain, il s'estdit "Ils sont encore la, ceux-là '" » Si cetteanecdote fut un declic, Herve Le Corre a tou-tefois compose une histoire originale, ambi-tieuse et diablement bien construite

Des les premieres pages - un interrogeloire tres sauvage -, il nous fascine grâce ases trois personnages, reunis dans leBordeaux taiseux des annees 1950, trauma-tise par le spectre de la Seconde Guerremondiale et les feux de la guerre d'Algériell y a Daniel, jeune apprenti mecanicien ap-pelé sous les drapeaux et dont les parentsont ete déportes l'étrange Andre Vaillant(c'est un pseudonyme ) qui rumine une ven-geance féroce et on y revient le cyniquecommissaire Albert Darlac, ayant bien profitede l'Occupation et que son reseau rend aujourd'hui (presque) intouchable « A traverslui, j'ai tente de cristalliser différentes faceltes de la saloperie humaine Pour autantce type se devait d'être un homme ordinaireC'est a cause d'individus comme lui que lesdictatures peuvent exister >

Au fait, trouvera t on un autre méchantd'anthologie dans son prochain roman ?« Tout ce que je peux vous dire, c'est queça sera l'histoire d'un crétin a la poursuited'une folle » Baptiste Liger

29 RUE DE CHATEAUDUN75308 PARIS CEDEX 9 - 01 75 55 10 00

JUIL/AOUT 14Mensuel

OJD : 57216

Surface approx. (cm²) : 1681N° de page : 32-35

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Je suis PilgrimJerry Rayes

L E PROBLEME avec le metier d'espion,« c'est qu'on peut démissionner, maîson ne le quitte jamais tout a fait » Peter

Campbell - dit Pilgrim - le sait mieux que qui-conque Pendant des annees, ce grand pro-fessionnel a appartenu a une agence americame chargée de « contrôler l'ensemble desservices de renseignement du pays » ll peutaussi se targuer d'avoir signe sous le pseu-donyme de Jude Garrett, un ouvrage trespointu sur les techniques d investigation, quiconnut un grand retentissement C'est ainsique Pilgrim se retrouve en compagnie d'unlieutenant du NYPD, Ben Bradley, sur les lieuxd'un crime (presque) ordinaire On vient dedecouvrir, dans une chambre d'hôtel new-yorkaise a deux pas de Ground Zero lespectre du 11 Septembre est bien la -, lecorps sans vie d'une femme, la gorge iranchee et « flottant sur le ventre dans une baignoire remplie d'acide sulfunque » Le grandmanitou du renseignement comprend immé-diatement que « c'est tout sauf un banal homicide pour de l'argent, de la drogue ou unequelconque pulsion sexuelle »

Ainsi presente, Je suis Pilgrim pourrait relever du classique roman noir C est sanscompter sur le destin parallèle d'un terroristesaoudien surnomme le Sarrasin Adolescentil vit son pere, zoologiste être décapite parles autorites locales, a Djedda Des lors« par amour et par fidelite a I égard de sonpere, il allait devenir plus croyant que jamaisen l'islam conservateur, ennemi jure de

toutes les valeurs occidentales, torpilleur dé-clare de la dynastie Fahd et partisan dudjihad par I epee » Pendant des annees, ilva alors peaufiner un plan machiavéliqueune menace bactériologique a base d'unesource de variole resistant aux vaccins Quefaire face a un tel ennemi ?

S'il signe la son premier roman, JerryHayes n'est toutefois pas inconnu des cinephiles - on doit a cet ancien journaliste les

brillants scénarios de Mac/ Max 2, Calmeblanc ou Flight Plan On pourrait certes tiquerdevant des raccourcis psychologiques et uneécriture trop fonctionnelle, maîs l'auteur anglo-australien a su composer un puzzle geo-politique d'une évidente virtuosité, sachantrestituer la complexité du monde et faire re-bondir son récit a un rythme haletant JamesBond et Jason Bourne n'ont qu'a bien setenir Pilgrim est dans la place i B.L

\Iau\ais CoucheurCarl Hiaasen

*-*-/e suis Pilgrim (I Am Pilgrim)par Terry Hayes, traduit de I anglais parSophie Bastide Foto, 648 p JC Lattes 22 90 €

DIGNE EMULE d un Elmore Leonard, CarlHiaasen a ete l'une des fines plumesdu Miami Herald Ses romans sont tout

autant de portraits au vitriol de l'Etat de FlorideD irrésistibles comédies noires, ou il s'enprend a la corruption brocarde les charlatanset les escrocs a la petite ou grande semaineApres Cousu main (Albin Michel 1991, reprisaux editions des Deux Terres) ou Pressepeople (Les Deux Terres, repris en 10/18), lerevoici avec Mauvais Coucheur

Son heros du jour se nomme AndrewYancy Amateur de rhum, de pêche au tarponet du rock de Little Feat, celui ci a décide dedevenir policier le jour de l'enterrement de sagrand mere, quand des cambrioleurs ont pillel'appartement de la défunte Inspecteur aMiami, Andrew a perdu son insigne et a eterétrograde Pour avoir profère des accusationsmensongères a rencontre d'un collègue detravail et pour tentative d'extorsion Ajoutonsqu'il a devant témoin agresse un homme avec« le prolongateur tubulaire destine a aller dansles recoins d'un aspirateur » Instrument qu'ila cherche a introduire dans le fondement dudocteur Clifford Will Le man de sa future ex-petite copine Bonnie qui s avère être recherchee en Oklahoma i

Désormais Andrew qui rêvait adolescentde devenir guide dans I arrière pays, est ins-pecteur des restaurants dans « la brigade descafards » ! Ce qu'il voit tous les jours le detourne sérieusement de l'envie de mangerquoi que ce soit Au point qu'il n'a plus qu'une

crainte attraper la salmonellose apres avoirvisite un Burger King ou un restaurant de fruitsde mer a l'hygiène douteuse i Pour ne rienarranger a la situation, un couple de jeunesmaries en pleine lune de miel vient de pêcherdans les eaux de Key West un bras humainen décomposition De Nicholas JosephStriplmg qui a jadis arnaque les compagniesd'assurances il ne reste qu'un poing serreavec un majeur tendu Toujours aussi enverve, Carl Hiaasen mené son affaire tambourbattant Pas le temps de souffler pour lelecteur comme pour un Yancy appelé acroiser sur sa route le dénomme Drmg Linsinge, adroit et sournois, qui trimballe untemperament infect i Alexandre Fillon

•k-kMauvais Coucheur (Bad Monkey)par Carl Hiaasen, traduit de I anglais(Etats Unis) par Yves Sarda, 393 p,Les Deux Terres 20 €

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l'Alice elu sycomore*jJohn Grisham

A VRAI DIRE, Jake Bngance n'apprécie pastellement les affaires de successionMaîs « a grand heritage, grands hono-

raires » Peut-être ce célèbre avocat en a-t-ilaussi assez d'être mêle a des proces suscep-tibles de mettre sa famille en danger Les

lecteurs de Non coupable de John Grisham(devenu au cinema Le Droit de tuer ') se sou-viennent forcement de ses pérégrinations et

•k-kL'Allée du sycomore (Sycamore Row)par John Grisham, traduit de I anglais(Etats Unis) par Dominique Defert, 546 pJC Lattes, 22,90 €

des menaces du Ku Klux Klan, lorsque ce tenordu barreau fit acquitter Carl Lee Hailey

Plus de trois ans apres cette histoire,Bngance reçoit un jour la lettre posthumed'un millionnaire local, Beth Hubbard, toutjuste retrouve au bout d'une corde de chan-vre, un escabeau a ses côtes, pendu a l'un

des vieux sycomores de sa propriete Danssa missive, le défunt charge le juriste de de-

fendre ses intérêts post mortem et, a ce titre,lui confie un testament olographe, dénonçantune précédente version de ses volontésDans ce document, on découvre qu'il rayeses enfants et petits-enfants de sa succession, ne compte absolument rien donner ases deux ex-femmes et, surtout, lègue quatre-vingt-dix pour cent de ses biens a sa femmede menage noire, Lettie Lang

Si Hubbard a mis fin a ses jours, c'est aussi,

semble-t il, parce qu'il était atteint d'un canceren phase terminale, ce qui n'a pas échappeaux « oublies » du testament, furieux de voir unepart de la colossale fortune leur glisser entreles mains Le traitement qu'il prenait pourraitbien prouver que le vieil homme n avait plustoute sa tête au moment de la redaction de cetacte - surtout si l'on est confronte a un rapportmedical incompréhensible pouvant berner le

jury Quel est le veritable montant de l'héri-

tage ' Hubbard rïaurait-il pas cherche a révélerquelque chose ou aurait il ete victime d'unemanipulation ? Une chose est sûre en dehorsde la cour Jake Bngance va devoir fairequèlques kilometres, au volant de sa Saabrouge, pour eclairer ce mystere

Dans le domaine du thriller juridique, JohnGrisham n'a plus a démontrer son savoir-faireet L'Allée du sycomore possède une efficacité

hors pair, notamment grâce a ses dialoguesqui raviront les amoureux des « Objection, VotreHonneur i » et autres « Je vous condamne pouroutrage a la cour » Si l'intrigue n'est pas d'unegrande originalité, le maître du genre n'a passon pareil pour nous divertir, montrer lesmécanismes parfois vicieux de la justiceaméricaine et, sans en avoir l'air, brosser leportrait d'une Amerique raciste et vénale Pasd'objection ? Baptiste Liger

La Berceuse dc StalineGuillaume Prévost

COUSIN DE Sherlock Holmes et deRouletabille, François Claudius Simonn'en finit pas d'intervenir sur des en

quêtes dignes des Experts maîs un siecleplus tôt Apres l'excellent Quadrille des maudits,Guillaume Prevost offre avec La Berceuse deStaline une nouvelle aventure a son heros recurrent, vétéran de la Grande Guerre et pion-nier de la police scientifique au 36, quai desOrfèvres En mars 1920, ce fin limier est charged'eclaircir l'assassinat d'un réfugie russe etd'une partie de sa famille A Pans, le défunt sefaisait appeler Ivan Mihanov maîs, en Russie.Ivan Kaspov, agent de la police secrete du tsar

A ce titre ce dernier avait enquête en 1907sur une affaire d'attaque de banque attribuée

a un certain Ter Petrossian, depuis évade deprison Maîs le groupe Russie integrale quidésire remettre les Romanov sur le trône -n aurait il pas un lien avec l'assassinat d'Ivan fN'y aurart-il pas un message cache dans la ber-ceuse 238, trouvée au milieu des documentssur le lieu du crime et signée « Sosso » - plusconnu sous le nom de Joseph Staline ?François-Claudius part alors en mission secreteen Russie - I occasion pour lui de retrouver sachere Elsa, fascinée par la Grande Revolution

Sans jamais être étouffe par sa reconstitutionhistorique minutieuse, Guillaume Prevost res-suscite le roman-feuilleton a l'ancienne, le toutsur un rythme haletant et avec des dialoguestres efficaces Joli travail, camarade! B.L.

•k-k La Berceuse cfe Stalinepar Guillaume Prevost, 352 p, Nil 20 €

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Un mensonge explosifChristophe Revdi-Gramond

A ux FOIS THRILLER et roman d espionnage, ce premier polar du BordelaisChristophe Reydi-Gramond n'a pas

peur des gros mots comme raison d'Etat,atteinte a la liberte de la presse manipulationinternationale S il place en exergue unephrase lapidaire de Napoleon Bonaparte surle mariage contre nature de l'Histoire et dumensonge, il n'y a pas de hasard, juste une

saine colere et un goût pour les idéalistesqui n'ont pas froid aux yeux

Toulouse, une usine chimique qui exploseen 2001, des dizaines de morts et desmilliers de blesses Personne n'a oublie lacatastrophe de l'usine AZF et ses consé-quences pour les annees qui suivront Cejour-la, un gamin de 11 ans, passionne d'or-mthologie, s'installe sur une colline, face a

Ceux qui tombentMichael Connelly

BONNE NOUVELLE, revoici Harry Bosch,le sursitaire ll peut encore travailleraux affaires non résolues pendant

quatre ans Ensuite, ce sera la retraite amoins d'obtenir une derniere petite rallongeAvec Harry, on a l'assurance de retrouverLos Angeles, entre stars et corruption, ban-lieues sans grâce et avenues bien éclairéesMichael Connelly lui fait mener deux en-quêtes de front D un côte, une histoire vieillede vingt ans avec une adolescente retrouvéeviolée et étranglée, une erreur de labo, lesprogres de la science et des analyses ADNqui permettent de revenir sur des faits ou-blies De l'autre, une affaire plus politiqueet contemporaine mettant en scene, une fois

-k+Ceux qui tombent (The Drop)par Michael Connelly, traduit de I anglais(Etats Unis) par Robert Pépin, 390 pCalmannlevy, 21 50 €

encore, le vieil ennemi de Bosch, Iran Irang,conseiller municipal peu scrupuleux Sonfils, George Irving, vient d'être retrouve mortau pied du Château Marmont, I hôtel desstars Meurtre, suicide'? Il faut faire la partdes choses et Bosch est le flic idéal dansce genre de situation délicate

ll ne faut pas chercher de l'inédit danscette nouvelle enquête de Michael Connellymaîs une impression agréable de chausserdes pantoufles et de retrouver un vieil ami sou-vent absent Quèlques pincées de souvenirs,quand Bosch était soldat dans les tunnelsvietnamiens, des emotions familiales avec lafille de Harry qui ne cesse de grandir, unehistoire d'amour envisagée entre le vieuxcélibataire et une femme a poigne, un talentde tricoteur d'histoires qui ne faiblit pas, tousles ingrédients sont dans la bonne soupière

Si l'on veut se montrer chafouin, on repro-chera a l'écrivain chevronné de ronronnerun peu Bien documente grâce a ses amisde la police, Michael Connelly ne peut pass'empêcher de ramener sa science sur lesarmes, les methodes, le code de bonneconduite Quant aux intrigues, elles sont bienhuilées, rappellent d'autres livres précédentset quèlques plans cinématographiques Maîsil ne faut pas bouder son plaisir Connellyest un écrivain, pas un faiseur de thrillers niun fabricant de best-sellers a la pelle llmarche un peu trop dans les clous maîscontinue de jouer juste Et pour un amateurde jazz, l'argument n'est pas a négliger

Christine Ferniot

la ville ll voit et photographie presque in-consciemment I eclair gigantesque, la dé-flagration les hommes et les femmes quihurlent et s'enfuient, les cadavres calcinesClovis Lenoir commissaire a l'antrterronsme,est dans cette foule qui vient de subir l'ex-plosion et tente de porter secours a tousceux qu'il croise dans la panique la plus to-tale A quèlques minutes pres, pense-t-il, onaurait pu tout arrêter ll parle d'attentat quandles autorites évoquent avec une insistancecoupable la these de l'accident industriel

A partir de la, le romancier développe unehistoire remarquablement construite ou touts'emboîte parfaitement, d'un bout du mondea l'autre On y croise une femme d'affairesprête a toutes les bassesses et a tous lescoups tordus pour reussir ll faut ajouter unjournaliste qui monte un dossier dangereuxl'obligeant a fuir avec femme et enfant Maîsaussi un espion, un physicien, des politiquesdans tous les coms, des flics de la DGSE,DSI, SDECE et autres majuscules offi-cielles, quèlques Russes ou Américains etmême un certain Hissene Habre du côte deDakar Beaucoup de monde, énormémentde pistes, fausses ou crédibles, des men-songes officiels a chaque conference depresse, et pourtant tout se tient

Christophe Reydi-Gramond domine sonintrigue, tantôt rigoureux comme la romancièreet historienne Dominique Manotti, tantôt plusdistance a la maniere d'un James GradyDernier détail, et pas des moins intrigantsauteur de livres pour enfants, ChristopheReydi Gramond anime aujourd'hui « lacommunication institutionnelle d'une grandeentreprise française » C.F.

**t/n mensonge explosifpar Christophe Reydi-Gramond,400 p, Liana Levi, 19 €