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Approche méthodologique pour une cartographie numérique du sous-sol parisien Secteur d’essai du troisième arrondissement Stéphane Konik INRAP Centre-Ile-de-France Une approche méthodologique pour une cartographie numérique du sous-sol parisien a été entreprise. Cette cartographie est conçue sous la forme d’un modèle numérique de terrain (MNT), c’est-à-dire à une représentation de la topographie et de l’altimétrie de certaines formations du sous- sol adaptée à utilisation par ordinateur. Il s’agit d’obtenir, par géoréférencement de données – préalablement vérifiées et confrontées entre elles–, une cartographie du sous sol qui, à terme, pourrait s’insérer dans le système d’information géographique du PCR Cartographie de l’espace parisien. Ce rapport présente les principes généraux de la démarche entreprise, illustrés par une toute première expérimentation à partir d’exemples de données du sous-sol du troisième arrondissement et de ses marges. Objectifs de cette cartographie numérique Dès le début, deux objectifs principaux ont été définis pour cette cartographie : cartographier en 2D et modéliser en 3D le sous-sol parisien, en tenant compte des contextes géomorphologiques et de l’altimétrie des remblais, des formations superficielles (alluvions, colluvions,…) et du toit (sommet) du substratum tertiaire. La modélisation du sous-sol parisien doit être mise en relation avec le parcellaire actuel ; • offrir une aide aux moyens d’intervention. L’objectif est de mettre en évidence les dépôts renfermant –ou bien, en raison de leur chronologie, susceptibles de renfermer– des vestiges archéologiques. Il s’agit aussi de distinguer les dépôts ayant un potentiel pour des études paléoenvironnementales (par exemple ceux qui permettent la conservation de la matière organique) souvent présents dans certains secteurs clés : ancien bras nord de la Seine, anciens rus, marais, berges de différentes époques, ... Collecte des données Le géoréférencement de toutes les données prises en compte permet de croiser puis, après vérification, d’intégrer des informations issues de différentes sources. Dans le cadre de cet essai portant sur le troisième arrondissement et ses marges et visant simplement à tester la méthode (il ne s’agit pas encore d’obtenir une représentation complète et précise du sous-sol), nous avons entrepris de recueillir des données auprès des établissements suivants : 1

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Page 1: Approche méthodologique pour une cartographie …...Une approche méthodologique pour une cartographie numérique du sous-sol parisien a été entreprise. Cette cartographie est conçue

Approche méthodologique pour une cartographie numérique

du sous-sol parisien

Secteur d’essai du troisième arrondissement

Stéphane KonikINRAP Centre-Ile-de-France

Une approche méthodologique pour une cartographie numérique du sous-sol parisien a été entreprise. Cette cartographie est conçue sous la forme d’un modèle numérique de terrain (MNT), c’est-à-dire à une représentation de la topographie et de l’altimétrie de certaines formations du sous-sol adaptée à utilisation par ordinateur. Il s’agit d’obtenir, par géoréférencement de données –préalablement vérifiées et confrontées entre elles–, une cartographie du sous sol qui, à terme, pourrait s’insérer dans le système d’information géographique du PCR Cartographie de l’espace parisien. Ce rapport présente les principes généraux de la démarche entreprise, illustrés par une toute première expérimentation à partir d’exemples de données du sous-sol du troisième arrondissement et de ses marges.

Objectifs de cette cartographie numérique

Dès le début, deux objectifs principaux ont été définis pour cette cartographie :

• cartographier en 2D et modéliser en 3D le sous-sol parisien, en tenant compte des contextes géomorphologiques et de l’altimétrie des remblais, des formations superficielles (alluvions, colluvions,…) et du toit (sommet) du substratum tertiaire. La modélisation du sous-sol parisien doit être mise en relation avec le parcellaire actuel ;

• offrir une aide aux moyens d’intervention. L’objectif est de mettre en évidence les dépôts renfermant –ou bien, en raison de leur chronologie, susceptibles de renfermer– des vestiges archéologiques. Il s’agit aussi de distinguer les dépôts ayant un potentiel pour des études paléoenvironnementales (par exemple ceux qui permettent la conservation de la matière organique) souvent présents dans certains secteurs clés : ancien bras nord de la Seine, anciens rus, marais, berges de différentes époques, ...

Collecte des données

Le géoréférencement de toutes les données prises en compte permet de croiser puis, après vérification, d’intégrer des informations issues de différentes sources. Dans le cadre de cet essai portant sur le troisième arrondissement et ses marges et visant simplement à tester la méthode (il ne s’agit pas encore d’obtenir une représentation complète et précise du sous-sol), nous avons entrepris de recueillir des données auprès des établissements suivants :

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Page 2: Approche méthodologique pour une cartographie …...Une approche méthodologique pour une cartographie numérique du sous-sol parisien a été entreprise. Cette cartographie est conçue

• Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) :

• Service géologique régional d’Ile-de-France.

• Sondages archivés sur le site web infoterre.brgm.fr (figure 1)La Banque de données du sous-sol (BSS) résulte de l'application du code minier qui rend obligatoire la déclaration des ouvrages d'une profondeur supérieure à 10 m.

• Archives géologiques RATP du Département des projets et de l'ingénierie des lieux (Fontenay-sous-Bois)

• Sondages archivés (figure 2)

• Coupes géologiques suivant le tracé des lignes souterraines de métro et de RER (figures 3 et 4)

Figure 1 : Capture d’écran du site web InfoTerre du BRGM présentant les implantations, dans le troisième arrondissement et ses environs, de sondages géologiques enregistrés dans la Banque de données du sous-sol. © BRGM

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Figure 2 : Extrait d’un document, appartenant aux archives de la RATP, représentant le sous-sol du 16, Passage de l’Industrie. © RATP

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Figure 3 : Extrait d’une coupe géologique, conservée aux archives de la RATP, qui représente le sous-sol de la place de la République et de ses environs avec le tracé de la ligne 3 du métro. Elle a été réalisée lors des études préalables à la construction de cette ligne. Il convient de noter que certaines données archéologiques ont été reportées © RATP

Figure 4 : Autre extrait d’une coupe géologique, conservée aux archives de la RATP, du sous-sol de la place de la République et de ses environs avec le tracé de la ligne 11 du métro. © RATP

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• Collecte des données : rapports d’opérations archéologiques

• Synthèse des données géomorphologiques et stratigraphiques concernant les formations alluviales de la Seine à Paris

• Données issues d’opérations INRAP/AFAN

• Autres sources de données (Commission du Vieux Paris,…)

• Collecte des données : sondages géotechniques joints à certains dossiers de permis de construire

• Mairie de Paris – Inspection Générale des Carrières

• Universités, unités de recherche disposant de données concernant l’archéologie de Paris ou concernant le sous-sol de Paris.

Exploitation des données

Les descriptions sédimentaires sont interprétées en grandes « formations de référence ». Des corrélations pourront être établies en fonction du contexte géomorphologique. Il s’agit d’aboutir à une représentation 3D du sous-sol parisien, depuis le sommet des formations tertiaires jusqu’aux remblais. Le logiciel de topographie et de cartographie utilisé pour cet essai est AutoCAD, édité par Autodesk, avec l’applicatif COVADIS édité par GEOMEDIA SA.

Les « formations de référence » retenues dans le cadre de cet essai limité au troisième arrondissement et à ses marges sont :

• Remblais

• Alluvions « récentes » (« modernes ») : alluvions plus fines mises en place sous climat tempéré ;

• Alluvions « anciennes » : alluvions plus grossières mises en place sous environnement périglaciaire ;

• Substratum tertiaire (sables, marnes, calcaire, meulière, grès…) et son étage géologique.

Les sondages et coupes géologiques sont, après interprétation, subdivisées selon ces formations de référence (figure 5). Les données de différentes sources sont confrontées, par secteur géographique, afin de vérifier si elles s’accordent bien entre elles. Des erreurs peuvent ainsi être décelées. Au cours de cette phase, il convient d’établir, à partir des données géologiques et géomorphologiques, les limites des couches à corréler entre différents sondages. Les sondages et leurs corrélations sont regroupées dans un tableau (figure 6) comportant notamment leurs coordonnées de localisation (exprimées en Lambert 1) et l’altimétrie des limites (sommet et base) de formations corrélées devant être intégrées dans le modèle numérique de terrain.

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Figure 5 : Exemple d’un sondage géologique extrait d’un dossier de permis de construire. Il a été subdivisé selon les formations de référence recoupées (remblais en rouge, alluvions « récentes » en bleu clair, alluvions « anciennes » en bleu foncé, substratum tertiaire en orange.

Figure 6 : Tableau regroupant les données de localisation de différents sondages pris en compte (coordonnées Lambert 1) et l’altimétrie (sommet et base) des couches des formations de référence recoupées (remblais en rouge, alluvions « récentes » en bleu clair, alluvions « anciennes » en bleu foncé, substratum tertiaire en orange).

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Les figures 7 à 9 illustrent quelques possibilités de représentation cartographiques des données du sous-sol modélisées. La cartographie des emplacements des sondages géologiques automatiquement reportés sur le parcellaire actuel peut ainsi être réalisée à l’échelle souhaitée (figure 7).

Différents types de représentations, en 2D (sous forme de carte ou de coupe) ou en 3D (sous forme de bloc-diagramme), peuvent être élaborées concernant les formations de référence. Les deux exemples présentés ci-dessous n’ont pas d’autre intérêt que d’illustrer certaines possibilités de traitement des données et le potentiel de cet outil. En effet, ils ont été réalisés à partir d’un échantillon de sondages géologiques beaucoup trop restreint (seulement quelques dizaines de sondages) pour prétendre apporter une représentation aboutie du sous-sol du secteur d’essai. Les cartographies de l’épaisseur des remblais (figure 8) ou bien celle de l’altitude (donc du modelé) du toit du substratum tertiaire (figure 9) peuvent ainsi être réalisées. Cette dernière cartographie, lorsqu’elle aura été affinée par la prise en compte d’un plus grand nombre de sondages ou de coupes géologiques, permettra notamment de repérer les incisions du toit du substratum tertiaire causées par le réseau hydrographique (problématique de l’ancien bras nord de la Seine et de certains petits affluents).

Figure 7 : Une fois le tableau de données de sondages géologiques (fig. 6) introduit dans le modèle numérique de terrain, il est possible d’afficher une représentation cartographique des sondages reportés sur le parcellaire actuel. Chaque carré bleu matérialise le lieu d’implantation d’un sondage pris en compte pour la modélisation. Capture d’écran du logiciel Covadis.

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Figure 8 : Capture d’écran du logiciel Covadis représentant l’épaisseur des remblais et des formations superficielles sous forme de courbes de niveau (variations des épaisseurs entre 5 et 17 m). Le géoréférencement des données permet le report sur le parcellaire actuel.

Figure 9 : Capture d’écran du logiciel Covadis présentant une cartographie des altitudes du toit du substratum tertiaire obtenue à partir des sondages pris en compte. Les altitudes les plus basses sont en vert foncé, les plus élevées sont en marron puis en blanc. Cette cartographie est encore inexacte, notamment sur ses marges, du fait du trop petit nombre de sondages pris en compte pour cet essai qui vise simplement à tester la méthode.

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Conclusion

Cette première expérimentation montre la possibilité d’obtenir une représentation du sous-sol parisien, sous la forme d’un modèle numérique de terrain, à partir de données géologiques et stratigraphiques issues de sources diverses, sous réserve de les avoir préalablement vérifiées et corrélées. En effet, les informations concernant le sous-sol parisien comprennent un nombre élevé de sondages et de coupes géologiques bénéficiant d’une excellente répartition spatiale dans l’espace communal et sa périphérie, ce qui est important pour vérifier la concordance des données et obtenir une modélisation qui conserve la précision voulue sur tout l’espace représenté. Les possibilités existent donc pour l’élaboration d’un outil permettant, à la fois, de classer les données du sous-sol parisien et d’offrir une aide aux moyens d’intervention. En effet, certaines opérations archéologiques pourraient tirer parti, dès la phase d’organisation, d’une meilleure cartographie des formations du sous-sol parisien et de leurs potentialités archéologiques et paléoenvironnementales. A terme, l’outil fonctionnerait en liaison avec le système d’information géographique du PCR Cartographie de l’espace parisien.

Remerciements

À M. Lauby, géologue au Département des projets et de l’ingénierie des lieux de la RATP à Fontenay-sous-Bois, pour les conseils qu’il nous a donnés.

À P. Raymond, topographe à l’INRAP, pour l’aide apportée au traitement des données

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