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Analyse et comparaison de deux méthodes d’identification paysagère dans la province du Bas-Congo en RDC. Travail de fin d’étude réalisé en vue de l’obtention du diplôme de Master en Architecture du Paysage Bertrand LAVIS Promoteurs : Prof. Cédric VERMEULEN (ULG, GxABT) Prof. Jan BOGAERT (ULG, GxABT) Année académique 2011-2012

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Analyse et comparaison de deux méthodes d’identification paysagère dans la province du

Bas-Congo en RDC.

Travail de fin d’étude réalisé en vue de l’obtention du diplôme de Master en Architecture du Paysage

Bertrand LAVIS

Promoteurs :!Prof. Cédric VERMEULEN (ULG, GxABT)! ! Prof. Jan BOGAERT (ULG, GxABT)

Année académique 2011-2012

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«Toute reproduction du présent document par quelque procédé que ce soit ne peut être autorisée

qu’avec l’autorisation de l’auteur et du président du Comité de Gestion du Master en Architecture

du paysage »

«Le présent document n’engage que son auteur»

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Analyse et comparaison de deux méthodes d’identification paysagère dans la province du

Bas-Congo en RDC.

Travail de fin d’étude réalisé en vue de l’obtention du diplôme de Master en Architecture du Paysage

Bertrand LAVIS

Promoteurs :!Prof. Cédric VERMEULEN (ULG, GxABT)! ! Prof. Jan BOGAERT (ULG, GxABT)

Année académique 2011-2012

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Remerciements

Je tiens d'abord à adresser mes plus sincères remerciements aux Professeurs Cédric Vermeulen et Jan Bogaert pour m’avoir permis de réaliser ce mémoire dans d’aussi bonnes conditions. Le Professeur Vermeulen m’a permis d’intégrer la structure du projet UE MAKALA (Aid DCI-ENV/2008/151-384) et avec le Professeur Bogaert, ils m’ont encadré durant la réalisation de ce travail en m’apportant leurs écoutes, leurs conseils et leurs encouragements.

Je remercie également l’ensemble des membres du projet MAKALA et plus particulièrement Emilien Dubiez, responsable des opérations du module 3, qui a été une personne de référence plus qu’importante dans ce mémoire. Il m’a parfaitement intégré à l’équipe du projet à Kinshasa. Grâce à lui, j’ai pu réaliser mes 3 mois de stage en RDC dans des conditions idéales. Il m’a aussi donné de son temps et de précieux conseils lors des relectures de mon travail.

Je tiens à exprimer ma très vive reconnaissance à Marie André, assistante à l’unité de biodiversité et paysage de GxABT pour le temps et la patience qu’elle m’a accordés.

Je voudrais aussi saluer l’équipe congolaise qui m’a véritablement aidé dans mon travail sur le terrain : Timothée Yamba Yamba, ingénieur du projet, pour les longues discussions sur le sujet, Baby Mvolo et Serge Mawa, animateurs au Bas-Congo, pour les longues promenades dans les terroirs et Sam Samazala, chauffeur officiel du projet à Kinshasa, pour sa disponibilité et pour les trajets dans les villages.

Sur le plan personnel, je remercie ma famille et plus particulièrement mes parents, Karline et Dominique Lavis. Ils m’ont permis de vivre cette magnifique expérience ô combien enrichissante. Je ne l’oublierai jamais. Merci également à mon oncle Dominique Lafleur et ma tante Ann Léonard pour leur accueil à Kinshasa. Ils m’ont facilité la vie en RDC en m’aidant dans les démarches administratives. Ils m’ont donné la possibilité de découvrir une autre facette de la vie congolaise. J’ai aussi une dette particulière pour mes grand-parents, Henriette et Lucien Léonard et Anna et Léon Lavis. Ils ont été des lecteurs assidus et performants, traquant la moindre faute d’orthographe.

Je tiens à exprimer ma très vive reconnaissance à l’ensemble des villageois de Kinduala pour leur accueil et leur gentillesse. Plus particulièrement mon ami Clovis avec qui j’ai passé de longues heures à jouer aux dès en buvant du longuila. Il m’a facilité la vie au village en m’assurant une intégration plus que remarquable. Je remercie aussi les membres de l’équipe du FC Kinduala de m’avoir permis de jouer avec eux au ballon rond.

Enfin, je ne peux pas oublier mes amis : Le Kot du Blokker (Dimi, Nico, Gus, Mathieu, So, Emi, Anne-So et Panda) pour sa présence incroyable et les moments croustillants arrosés de champagne, les Rochefortois pour leur soutien, Alexandre Ziegler et Camille Reyniers pour leur présence dans les moments difficiles en RDC et Jean Goubald pour son incroyable talent.

Tous, ils m’ont permis d’aller au bout de ce travail.

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Résumé

La combustion du bois est la principale source d’énergie en République Démocratique du Congo. La gestion de la ressource en bois-énergie est donc primordiale compte tenu de l’évolution démographique grandissante du pays. Dans cette optique, le projet UE MAKALA met en place des plans simples de gestion des espaces forestiers de manière participative avec les villageois.Ce mémoire s’est intéressé à la question de savoir si les méthodes de cartographies participatives utilisées dans les plans simples de gestion étaient optimales. Notre objectif a été de comparer la méthode de cartographie participative (CP) en se basant sur une méthode de cartographie non-participative par contraste (CNC), issue de l’écologie du paysage.

Plusieurs étapes de recherches ont permis d’alimenter notre réflexion :Un premier travail de terrain a été de réaliser une cartographie participative sur 4 terroirs villageois dans la province du Bas-Congo en RDC. L’objectif était de comprendre le processus de cartographie participative ainsi que les critères utilisés par les populations locales pour qualifier leurs terroirs.La seconde phase de recherche à été de réaliser une cartographie non-participative, basée sur une notion de contraste, des 4 mêmes terroirs. Le but était de comprendre le processus d’une cartographie axée sur des éléments d’écologie du paysage.

Les résultats ont montré que globalement les deux méthodes présentaient des différences de représentations marquantes pour certains éléments paysagers et également une structure du territoire divergente.

Nous en avons conclu que la représentation mentale du territoire que se font les populations locales est liée à des notions culturelles qui échappent à la cartographie axée sur l’écologie du paysage. Nous avons également montré que la cartographie participative est un outil idéal pour la gestion territoriale au Sud mais que celui-ci peut être complété par des données issues de la cartographie non-participative par contraste. Nous avons terminé en proposant une méthode transversale, basée sur les deux méthodologies étudiées, dans le but d’être encore plus performant.

Mots-clés : participatif, écologie du paysage, contraste, Congo, cartographie, comparaison, gestion territoire, terroir villageois

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Abstract

Wood combustion is the main energy source in the Democratic Republic of Congo. Management of

timber resources and energy is therefore crucial in view of the country's growing demography. From

this perspective, the project called Makala implements simple management plans for forest areas in

a participatory way, with the villagers. This thesis has focused on the question of whether

participatory mapping methods used in simple management plans were optimal. Our objective was

to compare the participatory mapping methods based on a non-participatory method of mapping in

contrast, which is derived from landscape ecology.

Several steps of research have helped feed our thinking: an initial fieldwork was to conduct a

participatory mapping of four village lands in the province of Low-Congo in DRC. The objective

was to understand the process of participatory mapping and the criteria used by local people to

describe their soils. The second phase of our research was to conduct on the same four lands a non-

participatory mapping, based on a notion of contrast. The goal was to understand the process of

mapping focused on elements of landscape ecology.

The results showed that the two methods globally showed notable differences in representation for

specific items and also a divergent structure of the territory.

We concluded that local people’s representation of the territory is linked to cultural notions that are

beyond mapping focused on landscape ecology. We also showed that participatory mapping is an

ideal tool for territorial management in the South but that it can be completed by data from non-

participatory mapping by contrast. We finally proposed a mixed method, based on the two

methodologies studied in order to be more efficient.

Keywords : participatory, landscape ecology, contrast, Congo, mapping, comparison, territory

management, local villagers,

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Tables des matières

1. Introduction générale 1

1.1. Zone d’étude 1

1.1.1. Contexte macro-économique et politique de la RDC 2

1.1.2. Contexte biophysique 2

1.1.2.1. Le climat 2

1.1.2.2. Le sol 3

1.1.2.3. Le relief 3

1.1.2.4. La végétation 4

1.1.3. Contexte sociologique 5

1.1.3.1. Organisation sociale villageoise au Bas-Congo 5

1.1.3.2. Organisation du village 5

1.2. Contexte du mémoire 6

1.2.1. Projet Makala 6

1.2.1.1. Description du projet 6

1.2.1.2. Situation des activités 7

1.2.1.3. Structure du projet 8

1.3. Problématique 8

1.4. Définition des hypothèses, objectifs et activités 9

1.4.1. Hypothèses 9

1.4.2. Objectif général et sous-objectifs 9

1.4.3. Activités 10

2. Cadrage théorique 11

2.1. Ecologie du paysage 11

2.1.1. Pattern/process paradigm 11

2.1.2. Le modèle patch-corridor-matrix 12

2.1.3. Echelle spatiale 14

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2.1.4. Contraste 16

2.1.5. Effet de lisière (edge effect) 17

2.2. La participation en gestion territoriale 17

2.2.1. Rôle de la participation dans l’aménagement du territoire 17

2.2.2. La participation au Nord 18

2.2.3. La participation au Sud 18

2.2.4. La perception visuelle paysagère : principes 19

2.2.5. Caractérisation du paysage par les populations locales 19

2.2.6. La cartographie participative : concepts 20

3. Méthodologies 22

3.1. Cartographie non-participative par contraste (CNC) 22

3.2. Cartographie participative (CP) 23

4. Résultats 25

4.1. Cartographie non-participative par contraste 25

4.1.1. Village de Kinduala, lignée 1 - Terroir référence 25

4.1.1.1. Application des critères visuels 25

4.1.1.2. Les unités paysagères 25

4.1.1.3. Structure spatiale 27

4.1.2. Village de Kinduala, lignée 2 29

4.1.3. Village de Ngongo 31

4.1.4. Village de Kisimba 32

4.2. Cartographie participative 34

4.2.1. Village de Kinduala, lignée 1 34

4.2.2. Village de Kinduala, lignée 2 36

4.2.3. Village de Ngongo 38

4.2.4. Village de Kisimba 39

4.3. Comparaison des cartes 41

4.3.1. Kinduala - Lignée 1 41

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4.3.2. Kinduala - Lignée 2 43

4.3.3. Ngongo 46

4.3.4. Kisimba 47

5. Discussion et perspectives 50

5.1. Interprétations des résultats et comparaisons des cartes 50

5.2. Evaluations des méthodes 51

5.2.1. CNC 52

5.2.1.1. Mise en place de la méthode 52

5.2.1.2. Confrontation aux populations locales 53

5.2.1.3. Traitement des données 54

5.2.2. CP 54

5.2.2.1. Mise en place de la méthode 54

5.2.2.2. Rôles des intervenants 55

5.2.2.3. Véracité et utilisation des données 56

5.3. Comparaison des méthodes 57

5.3.1. Avantages de la méthode CP 57

5.3.2. Avantages de la méthode CNC 57

5.3.3. Désavantages de la méthode CP 57

5.3.4. Désavantages de la méthode CNC 58

5.3.5. Adéquation entre les deux méthodes et la gestion territoriale 58

5.3.6. Perspective méthodologique 59

5.4. Vérification des hypothèses 60

6. Conclusions 61

7. Bibliographie 62

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Liste des figures

Figure 1. Situation de la zone d’étude dans la province du Bas-Congo. 1

Figure 2. Diagramme ombrothermique de la station météorologique de l’INERA Mvuazi (Kolo,

Mbanza-Ngungu, Bas-Congo) pour les années 1999 à 2008. 3

Figure 3. Carte de la RDC - Situation des différentes antennes du projet Makala. 7

Figure 4. Relations entre composition et configuration. 11

Figure 5. Schéma exposant le Pattern/process paradigm. 12

Figure 6. Représentation du modèle patch-corridor-matrix. 13

Figure 7. Lien entre structure spatiale et fonctionnement écologique. 13

Figure 8. Le paysage au sein de l’organisation hiérarchique de notre biosphère. 15

Figure 9. Une modification de la résolution ou de l’étendue entraine une modification des données

à notre disposition. 16

Figure 10. Carte non participative par contraste du terroir de la lignée1 du village de Kinduala. 27

Figure 11. Carte non participative par contraste du terroir de la lignée 2 du village de Kinduala. 29

Figure 12. Carte non participative par contraste du terroir villageois de Ngongo. 31

Figure 13. Carte non participative par contraste du terroir villageois de Kisimba. 33

Figure 14. Carte participative du terroir de la lignée 1 du village de Kinduala. 34

Figure 15. Carte participative du terroir de la lignée 2 du village de Kinduala. 36

Figure 16. Carte participative du terroir villageois de Ngongo. 38

Figure 17. Carte participative du terroir villageois de Kisimba. 40

Figure 18. Comparaison des deux cartographies réalisées sur le terroir de la lignée 1 du village de

Kinduala. 43

Figure 19. Comparaison des deux cartographies réalisées sur le terroir de la lignée 2 du village de

Kinduala. 45

Figure 20. Comparaison des deux cartographies réalisées sur le terroir villageois de Ngongo. 47

Figure 21. Comparaison des deux cartographies réalisées sur le terroir villageois de Kisimba. 49

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Liste des tableaux

Tableau 1. Tableau reprenant les différents partenaires du projet Makala 8

Tableau 2. Tableau reprenant l’ensemble des unités paysagères observées sur le terroir de la lignée

1 du village de Kinduala ainsi que les critères principaux de classification correspondant. 26

Tableau 3. Tableau reprenant les superficies des UP identifiées dans le terroir de la lignée1 du

village de Kinduala. 28

Tableau 4. Tableau reprenant les superficies des UP identifiées dans le terroir de la lignée 2 du

village de Kinduala. 30

Tableau 5. Tableau reprenant les superficies des UP identifiées dans le terroir villageois de Ngongo

32

Tableau 6. Tableau reprenant les superficies des UP identifiées dans le terroir villageois de

Kisimba. 34

Tableau 7. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées dans le terroir

villageois de la lignée 1 de Kinduala. 35

Tableau 8. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées dans le terroir

villageois de la lignée 2 de Kinduala. 37

Tableau 9. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées dans le terroir

villageois de Ngongo. 39

Tableau 10. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées dans le

terroir villageois de Kisimba. 41

Tableau 11. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées selon les

deux méthodes sur le terroir de la lignée 1 de Kinduala. 42

Tableau 12. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées selon les

deux méthodes sur le terroir de la lignée 2 de Kinduala. 44

Tableau 13. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées selon les

deux méthodes sur le terroir de Ngongo. 46

Tableau 14. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées selon les

deux méthodes sur le terroir de Kisimba. 48

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1. Introduction générale

1.1. Zone d’étude

Au cœur de l’Afrique Centrale, la République Démocratique du Congo est le troisième plus grand

pays d’Afrique avec une superficie approximative de 2.345.000 km2 (Commission Européenne,

2009). La province du Bas-Congo se situe dans la partie Sud-Ouest de la RDC. Elle représente

environ 2,3% du territoire national avec ses 53.920 km2. Elle est bordée au Nord par la République

du Congo (Brazzaville, RC), à l’Ouest par l’Océan Atlantique et au Sud par l’Angola. Les grandes

villes de cette province sont les entités de Matadi et de Boma.

La zone étudiée (Figure 1) se situe entre 15°08’28,07’’ et 15°11’56.05’’ de longitude Est et entre

5°05’13,85’’ et 5°08’15,83’’ de latitude Sud. Cette zone d’une superficie de 36 km2 est localisée à

environ 100 km de la capitale, Kinshasa (15°24’E, 4°24’S).

Figure 1. Situation de la zone d’étude dans la province du Bas-Congo. (Vermeulen, 2011)

1

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1.1.1. Contexte macro-économique et politique de la RDCD’après les estimations des Nations Unies, la RDC comptait près de 66 millions d’habitants en

2009 (ONU, 2012). Ce chiffre devrait, selon les prévisions, dépasser la barre des 93 millions en

2020. Néanmoins, la répartition n’est pas homogène sur l’ensemble du territoire. Les zones à plus

forte densité se trouvent dans l’Est du pays, autour de la ville de Kinshasa et dans le Bas-Congo.

Selon les chiffres du fond monétaire international (FMI, 2012), le produit intérieur brut (PIB) était

de 17,3 milliards de $ en 2012, ce qui correspondait à un PIB/habitant d’environ 260$. Cela fait de

la RDC un des pays les plus pauvres du continent africain et du monde.

Avec plus de 53% du PIB, c’est le secteur primaire qui domine l’économie en RDC. On y retrouve

essentiellement une activité agricole très forte (Commission Européenne, 2009)

Le contexte politique est un contexte de post-conflit. Le pays a connu de très graves troubles dans

les années 1990 avec des pillages en 1991 et 1993 suivis de conflits armés en 1997 et de 1998 à

2002. Ensuite le pays est entré dans une période de transition accompagnée en 2006 et 2011

d’élections libres et (presque) démocratiques. Le pays a donc connu une certaine régression dans

son développement. Beaucoup d’infrastructures et de bâtiments ont été détruits et certaines

institutions quasiment anéanties. «Cette situation, caractérisée par une insécurité généralisée, a

poussé la large majorité des populations à se tourner vers des activités de subsistance et

informelles» (Commission Européenne, 2009).

1.1.2. Contexte biophysique1.1.2.1.Le climat

La province du Bas-Congo est caractérisée par un climat tropical soudanien de type Aw4 selon la

classification de Köppen. Cela correspond à une courte saison sèche de mai à septembre et à une

longue saison des pluies d’octobre à mai (Bamba, 2008 ; Lunkayilakio, 2010).

La température moyenne est de 25°C et les précipitations moyennes annuelles varient entre 900 et

1500mm (Bamba, 2008).

Ces observations peuvent être résumées sous la forme d’un diagramme ombrothermique (Figure 2).

On remarque très clairement les deux saisons bien distinctes sur cette figure.

2

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1.1.2.2. Le solLes sols du Bas-Congo appartiennent au type ferralsols selon la classification de la FAO (1998). La

zone étudiée présente des sols de type argilo-sablonneux à argileux. Les horizons sablonneux se

retrouvent sur les plateaux et les bas-fonds alors que les terres argileuses sont situées sur les

versants (Fahem, 1978).

On considère la fertilité de la zone comme bonne (Bamba, 2008).

1.1.2.3. Le reliefLa zone étudiée appartient au bassin hydrographique du fleuve Congo. Ce dernier coule de

Kinshasa à Matadi dans un axe Nord/Est - Sud/Ouest.

Une grande partie du territoire du Bas-Congo présente un relief de collines. Le réseau

hydrographique y est très dense.

Figure 2. Diagramme ombrothermique de la station météorologique de l’INERA Mvuazi (Kolo, Mbanza-Ngungu, Bas-Congo) pour les années 1999 à 2008. (Lunkayilakio, 2010)

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1.1.2.4. La végétation

Malgré un climat favorable aux formations forestières, la végétation dominante dans la province du

Bas-Congo est de type savanicole. On peut expliquer cela par une forte perturbation du territoire par

l’homme. La pression anthropique, couplée à des méthodes de gestion peu durable, conduit à une

savanisation importante. Cela se traduit par une savane herbeuse ou arbustive (Bamba, 2008).

La savane herbeuse est le résultat de la destruction d’un domaine forestier par l’agriculture ou le

feu. Elle est caractérisée par un tapis continu de 80cm de hauteur d’herbacées, ponctué d’arbres et

d’arbustes épars (Compère, 1970 ; Vancutsem, 2006).

Les espèces dominantes sont Andropogon pseudapricus et Hyparrhenia diplandra. Ces graminées

sont fréquentes sur les sols sablonneux (Rattray, 1960 ; Lunkayilakio, 2010).

Les forêts sont donc peu présentes mais apparaissent néanmoins sous différentes formes. On

retrouve des formations forestières dont les espèces principales appartiennent à la flore des forêts

secondaires. Il s’agit de Chaetocarpus africanus, Dichostemma glaucescens, Pentaclethra

eetveldeana, Pentaclethra macrophylla, Pseudospondias microcarpa ou Pycnanthus angolensis

(Lavialle et Rerolle, 2012). Elles se situent généralement dans les fonds de vallées ou en bordure de

rivières (forêts galeries). Mais ces formations végétales sont rarement conséquentes et ce que l’on

observe est souvent des reliquats forestiers.

Les autres formes forestières sont généralement des formations anthropiques. Elles se déclinent

sous deux types dans cette région: les Nkunku et les Voka.

Le Nkunku est une sorte de jachère forestière, mise en défense par les villageois pour une durée

souvent déterminée. Elle leur permet de récolter toutes sortes de denrées alimentaires (insectes,

fruits) mais aussi médicales (pharmacopée traditionnelle). Mais le Nkunku permet surtout de

reconstituer la fertilité des sols et de préserver un capital bois, ce qui est très important pour les

populations locales (Peltier, 2009 ; Bamba, 2010).

Les Voka sont des zones forestières ayant une importance spirituelle. Ce sont d’anciens villages

issus des mouvements migratoires et ayant une vocation de terres sacrées. Certains arbres

symbolisent les lieux de sépulture des ancêtres. On y retrouve également des arbres fruitiers comme

Coffea sp. ou Mangifera indica (preuve de la présence de l’homme), et des essences forestières

telles que Trilepisium madagascariense ou Lovoa trichilioides qui se sont installés dans ces espaces

préservés (Bamba, 2010 ; Lavialle et Rerolle, 2011).

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1.1.3. Contexte sociologique1.1.3.1. Organisation sociale villageoise au Bas-Congo

La zone d’étude se situe sur le territoire de l’ethnie Bakongo. Celle-ci est présente en Angola, au

Congo, et à l’Ouest de la République Démocratique du Congo. Dans les villages où nous avons

travaillé (Kinduala, Kisimba et Ngongo), le sous-groupe ethnique est celui des Bantandu (Lavialle

et Rerolle, 2012).

Les populations y sont regroupées en clans. Le clan est composé de frères descendant de la même

mère. Ces clans forment une communauté de résidence, appelé par Vermeulen et al. (2011) le

village administratif.

Au niveau de la succession et de la transmission, le système est matriarcal. L’enfant appartient au

clan de sa mère. Et ce n’est pas le fils de l’homme qui lui succède mais son neveu (le fils de sa

soeur). L’unité sociale utilisée est donc particulière. Il s’agit du lignage. Les lignages sont les

branches qui descendent de la même mère. Ces branches observent une hiérarchie en fonction de

l’aîné (Lavialle et Rerolle, 2012).

A Kinduala, le village est composé de 3 lignées (il existe également des sous-lignées), chacune

représentée par son chef (Vermeulen et al., 2012).

«Les villages sont ensuite fédérés en groupements de mêmes locuteurs. Chaque niveau est

représenté par un chef (de famille, de lignée, de village, de groupement).»

Le chef de village présente un pouvoir mixte. Il est à la fois le responsable administratif et

coutumier. Le chef de lignée ne représente que le pouvoir coutumier (Vermeulen et al., 2011).

1.1.3.2. Organisation du villageLe finage villageois est divisé en différentes parties, selon le nombre de lignées. Chaque chef de

lignée est responsable d’un terroir. Il attribue la terre aux membres de sa lignée. L’accès à la terre

est gratuit pour ces derniers. A Kinduala, le finage est divisé en 4 parties. Trois correspondent à

chaque lignée du village et la quatrième est un terroir commun correspondant au terroir d’origine

(Vermeulen et al., 2011).

Le noyau villageois est composé de plusieurs parcelles bordant une route. Chacune de ces parcelles

correspond à une habitation, ou «case». Elles sont généralement entourées d’un espace planté, le

jardin de case. Celui-ci est là pour assurer la disponibilité de certaines ressources comme les fruits

(papayer, manguier, ...) ou certains légumes (épinard, piments, petits pois, ...) (Lavialle et Rerolle,

2012).

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Chaque famille reçoit une portion de terre à cultiver du chef de lignée. Selon Vermeulen et al.

(2011) «la surface disponible par Unité Familiale est de l’ordre de 0,082 km2 pour le village de

Kinduala.»

Les villageois cultivent selon la méthode de culture par abattis-brûlis. Ils coupent l’espace voué au

champ, ensuite ils y mettent le feu afin de restituer le carbone végétal au sol. Ils plantent leurs

cultures sur des billons. Ce sont des petites buttes d’une quinzaine de centimètres de hauteur et

préparées l’année précédente. Ils récoltent lorsque les cultures sont à maturité. Enfin, ils laissent le

champ en jachère et passent à une autre parcelle afin de reconstituer un stock de carbone végétal et

surtout la fertilité des sols.

Cette méthode est donc cyclique car après un certain temps de jachère (idéalement 7 à 8 ans), ils

retournent sur le premier champ cultivé (Bogaert, 2012).

1.2. Contexte du mémoire

Afin de traiter au mieux le sujet de ce mémoire, nous avons effectué durant 3 mois un stage en

République Démocratique du Congo (RDC) au sein du projet Makala. La période de ce séjour s’est

étalée du 31 janvier au 6 mai 2012.

Nous allons donc présenter dans ce chapitre le projet, sa structure, ses activités ainsi que la

problématique autour de laquelle il développe son action.

1.2.1. Projet Makala1.2.1.1. Description du projet

Ce projet, qui a pour titre «Gérer durablement la ressource en bois énergie», est un projet de

coopération financé par l’Union Européenne. Il traite de la problématique de la dégradation et de la

déforestation des écosystèmes forestiers pour l’approvisionnement en bois énergie des centres

urbains en RDC.

«L’enjeu du projet est de répondre à l’augmentation continue des besoins et aux risques de gestion

non durable des ressources forestières en améliorant la durabilité de l’approvisionnement en

ressource bois énergie en RDC, et au-delà, en Afrique tropicale humide» (Projet Makala, 2010).

L’objectif principal du projet est de «contribuer à sécuriser la ressource en bois pour

l’approvisionnement en énergie de deux villes de RDC (Kinshasa et Kisangani) et une ville du

Congo (Brazzaville), par une amélioration de la gestion des forêts (naturelles et plantées) et de

l’efficacité de la transformation énergétique, en vue d’augmenter durablement le niveau de vie des

populations locales» (Projet Makala, 2010).

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Afin d’assurer la réussite de son objectif, le projet est divisé en plusieurs modules. Nous avons été

intégrés au sein du module 3. Celui-ci est piloté par le Laboratoire de Foresterie Tropicale et

Subtropicale de Gembloux agro bio tech.

L’idée principale de ce module est d’élaborer selon une méthode participative des plans de gestion

(appelés Plans Simples de Gestion ou PSG) des ressources ligneuses (Projet Makala, 2010).

1.2.1.2. Situation des activitésLe projet se réalise essentiellement en RDC, dans les bassins d’approvisionnement en bois énergie

des villes de Kinshasa et Kisangani, au Bas-Congo (périphérie de Kisantu) et sur le plateau des

Bateke (périphérie de Mbankana). Il travaille aussi en périphérie de Brazzavile (RC) afin d’élargir

la portée du projet au niveau régional. La figure 3 ci-dessous reprend l’ensemble de la zone

d’activité du projet.

Il a ses bureaux au sein du bâtiment de la fondation Hanns-Seidel à Kinshasa.

Figure 3. Carte de la RDC - Situation des différentes antennes du projet Makala - Réalisation personnelle

Soudan

Ouganda

Rwanda

Burundi

TanzanieKinshasa

Brazzaville

Kisangani

Matadi

Lubumbashi

Zambie

Angola

Congo(Brazzaville)

République centrafricaine

Katanga

Kasai oriental

Kasai occidental

Bandundu

Equateur

Haut-Congo

Nord Kivu

Sud Kivu

Maniema

Bas Congo

Légende

Kinshasa Villes principales

Bas Congo Provinces

Lieux d'activités du projet Makala

Réseau hydrogra- phique

400km

0m

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Pour les parties de terrain, nous avons passé la majeure partie de notre temps dans les finages des

villages de Ngongo, Kisimba et Kinduala (15°10’18.52’’ E, 5°06’17.19’’ S) dans la province du

Bas-Congo.

1.2.1.3. Structure du projetLe projet est un partenariat entre différentes institutions issues de différents pays. Le tableau 1 ci-

dessous reprend l’ensemble des partenaires ainsi que les pays d’origine.

C’est le Centre International de Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD) qui gère

ce projet. Il collabore avec la Faculté de Gembloux Agro-BioTech (GxABT), la Fondation Hanns

Seidel (FHS), l’Université de Kisangani, le Center for International Forestry Research (CIFOR) et

la Faculté des Sciences de Kisangani.

Les partenaires sont aidés dans leurs actions par des associés. Les associés du projet sont des

organismes de l’état. Ils sont là pour assurer les bonnes relations avec les différents ministères et

directions touchés de près ou de loin par les actions du projet.

Travailler avec l’administration permet également un transfert de compétences et une meilleure

appropriation des méthodes développées par le projet dans le domaine d’intervention (Projet

Makala, 2010).

1.3. Problématique

Le bois, via sa combustion, est la principale source d’énergie en République Démocratique du

Congo. Sachant qu’à elle seule la ville/capitale de Kinshasa compte au moins 10 millions

d’habitants, on peut facilement imaginer la pression qu’une telle démographie peut imposer à une

ressource comme le bois (Nsimundele et al., 2010 ; Projet Makala, 2010).

Cette ressource a longtemps été considérée comme illimitée en Afrique Centrale.

Tableau 1. Tableau reprenant les différents partenaires du projet Makala - (Réalisation personnelle)

Partenaires Pays d’origine

CIRAD France

GxABT Belgique

Université de Kisangani RDC

FHS Allemagne

CIFOR Indonésie

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Il n’y avait pas de gestion pour ainsi dire, organisée sur les forêts d’Afrique tropicale humide. Il

existait bien une gestion traditionnelle mais celle-ci a failli dans son rôle. On assiste donc

aujourd’hui une gestion non durable et très souvent incontrôlée de cette ressource (Projet Makala,

2010)

En effet, la production de charbon de bois (makala en lingala) est une activité lucrative sur le court

terme pour les populations rurales. C’est donc une opération très intéressante financièrement sur le

court terme. On remarque même que, dans certains villages, les arbres «sacrés» (dédiés aux

ancêtres) sont eux aussi très souvent coupés. Dans la zone étudiée, il en va de même pour les

fruitiers. Cela traduit bien la nécessité des populations à s’approvisionner en bois (Nsimundele et al.

2010).

Et à force de couper, on remarque aujourd’hui que l’approvisionnement en bois énergie des grandes

villes (Kinshasa, Kisangani, Brazzaville,...) est une des causes majeures de déforestation et de

dégradation du couvert forestier en Afrique tropicale humide avec l’agriculture par abattis-brûlis.

S’y ajoutent les techniques de production de charbon utilisées par les populations locales qui ne

sont pas optimales. On observe un gaspillage de la ressource (Projet Makala, 2010).

Il y a donc plusieurs enjeux derrière cette problématique : des enjeux économiques, sociaux mais

aussi et avant tout environnementaux.

1.4. Définition des hypothèses, objectifs et activités

1.4.1. Hypothèses

Pour ce travail, nous avons émis 2 hypothèses.

La première est que la cartographie participative (CP) est une méthode cartographique qui

représente bien la réalité du terrain.

La deuxième est que la cartographie participative est une méthode d’identification paysagère

adéquate en vue de la réalisation de plans simples de gestion du bois énergie à l’échelle du finage

villageois.

1.4.2. Objectif général et sous-objectifsL’objectif général est de valider la cartographie participative en se basant sur une méthode de

cartographie non-participative par contraste (CNC), issue de l’écologie du paysage.

Pour un meilleur accomplissement du travail, nous avons divisé l’objectif général en plusieurs

objectifs spécifiques.

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• Comprendre le processus de cartographie participative ainsi que les critères utilisés par les populations.

• Comprendre le processus de cartographie non-participative par contraste.

• Evaluer et comprendre les similitudes, les avantages et inconvénients des deux méthodes.

• Evaluer le potentiel des cartes générées pour la gestion territoriale

1.4.3. ActivitésAfin de réaliser nos objectifs, nous avons mis en place toute une série d’activités.

• Collectionner des données bibliographiques afin de replacer les différentes disciplines étudiées (participation, écologie du paysage) dans leurs contextes respectifs.

• Mettre au point une méthode de cartographie participative (CP).

• Mettre au point une méthode de cartographie non-participative par contraste (CNC).

• Cartographier 4 terroirs villageois selon les deux méthodes.

• Comparer les différentes cartes réalisées en analysant différents critères (composition, répartition,...)

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2.Cadrage théorique

2.1. Ecologie du paysage

La méthode CNC est basée sur une approche écologique du paysage. Le point central de cette

approche est le paysage en tant que tel.

2.1.1. Pattern/process paradigm

Le paysage comme défini en écologie du paysage est un éco-complexe, c’est-à-dire un ensemble de

plusieurs écosystèmes. (Bogaert, 2011)

On parle de structure spatiale pour décrire un paysage. La structure spatiale d’un paysage est

caractérisée par sa composition (nombre de classes d’occupation du sol, proportions prises par ces

classes, la nature des classes) et sa configuration (arrangement ou organisation spatiale des éléments

paysagers). La figure 4 suivante présente les relations entre composition et configuration.

Cette structure spatiale occupe une place importante au sein de l’écologie du paysage. Celle-ci a

pour objectif d’étudier les processus écologiques dans leur contexte spatial. (Bogaert, 2012) On

peut donc observer un lien direct entre la structure spatiale du paysage et son fonctionnement d’un

point de vue écologique (photosynthèse, reproduction, pollinisation, production de biomasse, etc...)

Cette relation est appelée le «pattern/process paradigm».

Dans la figure 5 ci-contre, on remarque que les trois piliers (composition & configuration et

process) sont liés entre eux. Lorsque la configuration et/ou la composition changent (ils sont liés

entre eux), le fonctionnement écologique (process) du paysage se modifie aussi (Bogaert et

Mahamane, 2005 ; Claessens, 2008).

Figure 4. Relations entre composition et configuration - (In Bogaert 2012)

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2.1.2. Le modèle patch-corridor-matrixAfin de pouvoir quantifier la notion de structure spatiale, il faut pouvoir reproduire les différents

éléments paysagers sur une carte.

Selon Forman & Godron (1986), on peut résumer le paysage à un système patch/corridor/matrix. La

figure 6 reprend les 3 composantes principales de ce système.

L’unité de base utilisée est la tache (patch). Une tache correspond à une affectation du sol

homogène définie selon plusieurs critères. On identifie ainsi plusieurs taches qui peuvent être

groupées en classes en fonction de leurs caractéristiques propres (plusieurs mêmes taches forment

une classe) et, selon qu’elles soient dominantes ou pas, sont appelées matrices (matrix), la matrice

étant la classe dominante. Ces classes sont reliées entre elles par d’autres taches appelées corridors.

Les paysages sont donc caractérisés par un ensemble de classes dans une matrice reliées entre elles

par des corridors.

Figure 5. Schéma exposant le Pattern/process paradigm. La forme en triangle équilatéral représente les interactions entre les trois piliers (Noon & Dale, 2002)

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Ce modèle permet d’avoir une approche du territoire à différentes échelles.

On peut maintenant illustrer le lien entre fonctionnement écologique et structure spatiale avec un

exemple d’un paysage qui se fragmente, présenté sur la figure 7 suivante.

En se fragmentant, sa structure (composition et configuration) va changer. Ce changement va avoir

des effets directs sur son fonctionnement écologique : perte d’habitats, et donc diminution de la

biodiversité mais aussi diminution de la taille des populations ou encore isolement de certaines

autres, etc

Figure 6. Représentation du modèle patch-corridor-matrix. ( Burel et Baudry, 2002)

Figure 7. Lien entre structure spatiale et fonctionnement écologique. (In Bogaert 2012)

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C’est ce phénomène que nous pouvons observer en Afrique Centrale (Bogaert et al., 2008) et plus

particulièrement en République Démocratique du Congo. Selon Bamba (2010), ce phénomène de

fragmentation affectant les habitats forestiers et la biodiversité est le résultat d’une augmentation de

la densité de population dans cette région. Une augmentation de cette densité de population

(fonctionnement écologique) a une influence sur l’occupation du sol et donc la structure spatiale du

paysage (Bamba, 2008).

Toujours selon Forman & Godron (1986), il existe 4 types de taches (patches) en fonction de leurs

origines. A partir de cette approche, on a un aperçu de l’histoire, de la stabilité mais aussi du

possible futur de ces taches. On peut observer des taches dites de :

- perturbation (disturbance patch) : Ex: une savane qui aurait brulé, avalanches, tempêtes,

activité humaine...;

On observe souvent des dynamiques particulières de re-colonisation après une perturbation

selon les espèces présentes.

- vestige (remnant patch) : il reste dans la matrice des reliquats, comme par exemple des

vestiges d’une petite zone boisée au milieu d’une matrice qui devient de plus en plus

agricole. Ce type de patch intervient après une perturbation généralisée sur l’ensemble d’une

petite zone (à l’inverse des disturbance patches)

- introduite (introduced patch) : ces taches sont mises en place par l’homme, comme par

exemple « l'installation » d’un champ. L’homme y introduit des espèces qui vont caractériser

ces nouvelles taches (plantation, habitations).

- ressources environnementales (environnemental ressource patch) : en fonction de

l’hétérogénéité spatiale des facteurs écologiques (Ex: une zone humide présentera des

végétaux particuliers).

2.1.3. Echelle spatialeUne notion importante dans ces analyses est la notion d’échelle spatiale. L’écologie du paysage

comme elle est décrite ci-dessus permet une analyse des paysages à différentes échelles.

Comme indiqué sur la figure 8, la biosphère telle que nous la connaissons est organisée de manière

hiérarchique. A chaque niveau de cette hiérarchie vont correspondre des processus écologiques

différents.

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On parle de résolution pour définir la précision de notre analyse. Un changement de résolution va

jouer sur le «grain» de l’information qui nous est transmise. On peut aussi s’attarder sur la surface

ou étendue à notre disposition. La figure 9 présente l’importance que des changements de résolution

ou d’étendue pourraient avoir sur l’analyse d’un paysage. (Bogaert et Mahamane, 2005)

Il est aussi très facile de faire un lien entre échelle spatiale et échelle temporelle. Des phénomènes

rapides (glissement de terrain, éboulement) se font généralement dans des échelles de temps plus

réduites qu’un ouragan qui, lui, va avoir une période d’action de l’ordre du jour sur des surfaces

couvrant parfois des centaines de km2.

L’analyse d’un paysage doit prendre en compte cette notion d’échelle. Selon celle utilisée, nous ne

pourrons pas observer tel ou tel phénomène. Lorsque l’on modifie l’échelle (spatiale ou temporelle),

on modifie les informations disponibles.

Afin de ne pas biaiser les informations, il est primordial de toujours replacer le niveau étudié par

rapport aux autres niveaux adjacents afin de bien comprendre le contexte, les mécanismes ou les

causes des processus paysagers (Bogaert, 2012).

Prenons par exemple la formation de grottes via le phénomène karstique dans la région de

Rochefort (Province de Namur, Belgique). Il faut prendre l’échelle du territoire géologique pour

comprendre que la roche dans cette zone est essentiellement calcaire. Mais il faut aussi se

positionner à un niveau plus précis pour comprendre les phénomènes chimiques entre l’acidité des

eaux de pluie et le calcaire de la roche.

Figure 8. Le paysage au sein de l’organisation hiérarchique de notre biosphère. (Forman et Godron, 1986)

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2.1.4. ContrasteLe modèle patch-corridor-matrix, défini plus haut, permet d’obtenir une multitude de combinaisons

des différents éléments paysagers.

Ceux-ci sont souvent directement liés aux activités humaines telles que l’agriculture, la gestion

forestière ou encore l’urbanisation. La principale caractéristique de ces activités est d’induire du

contraste dans les paysages.

On parle de contraste fort lorsque des éléments paysagers adjacents sont très différents les uns des

autres et que les transitions entre eux sont presque invisibles voir inexistantes.

A contrario, une structure paysagère ayant un contraste faible serait en fait composée d’un seul type

d’éléments paysagers. Cet élément serait la matrice (matrix). Il n’y aurait pas de patch ou de

corridor (Forman et Godron, 1986).

On va utiliser ici le concept de contraste pour mettre en avant des différences entre deux types

d’occupation du sol. On observe à quel point telle tache est différente d’une autre. Il y a donc

d'abord un travail de repérage sur carte et ensuite de validation sur le terrain (Ex : différence entre

un champ et une forêt).

Le contraste entre deux taches peut se mesurer de différentes manières. Généralement, on utilise des

mesures rigoureuses comme la hauteur de végétation, la quantité de biomasse, la surface terrière,

etc..

Nous, nous allons utiliser des indicateurs plutôt visuels.

Cette méthode du contraste permet de réaliser une cartographie d’un paysage étudié. On identifie

ainsi toute une série de taches, classes interagissant au sein d’une matrice.

Figure 9. Une modification de la résolution ou de l’étendue entraine une modification des données à notre disposition. (In Bogaert 2012).

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2.1.5. Effet de lisière (edge effect)La délimitation des patches (taches) se fait rarement de manière ultra-précise. Il existe toujours une

zone de transition entre deux taches adjacentes. Elle présentera des caractéristiques communes aux

deux taches. Cette zone est appelée la lisière de la tache (edge of the patch). On trouve dans cette

zone une composition végétale et une répartition végétale différentes. C’est ce qu’on appelle l’effet

de lisière. (Burel et Baudry, 1999 ; Forman et Godron, 1986)

Prenons l’exemple d’une petite tache boisée au milieu d’une matrice agricole. Les conditions

climatiques, comme le vent ou la pluie, n’affecteront pas de la même manière les végétaux de la

lisière par rapport à ceux au centre de la tache. Ceux en lisière seront beaucoup plus sollicités par le

vent.

L’angle d’attaque du soleil peut aussi jouer un rôle important. Encore une fois, les végétaux au

centre de la tache seront moins exposés aux rayons du soleil que ceux en lisière. (Forman et

Godron, 1986)

2.2. La participation en gestion territoriale

2.2.1.Rôle de la participation dans l’aménagement du territoire

Selon la convention de Florence (Convention Européenne du Paysage, Florence, 2000), le paysage

est défini comme étant «une portion de territoire telle que perçue par les populations, et dont le

caractère résulte de l’action de facteurs naturels et/ ou humains et de leurs interrelations».

La perception des populations est donc le point central de cette définition. «L’observateur est aussi

important que ce qu’il voit» (Neuray, 1982).

En gestion territoriale, nous avons souvent recours à des experts extérieurs au site d’intervention.

Ces experts ne connaissent généralement pas bien le territoire sur lequel ils sont en train

d’intervenir.

La participation des populations locales est donc primordiale pour obtenir de bons résultats et pour

caractériser les perceptions (Fagerholm et al., 2011). Les acteurs locaux (agriculteurs, villageois,...)

ont très souvent des connaissances élevées à l’échelle de leur terroir. Il est donc important de les

intégrer comme informateurs clés lors de la recherche d’informations.

Fagerholm & al. (2011) ont démontré que, dans le cas d’évaluations des services écologiques d’un

paysage, l’implication des populations permet d’avoir de meilleurs résultats.

Ils montrent aussi que les acteurs locaux ont une sensibilité à la notion de «paysage culturel» que

les experts externes n’ont pas.

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2.2.2. La participation au NordLe dictionnaire définit la participation comme l’«action de participer à quelque chose». Cette

définition reste très vague. Il faut en effet préciser la manière de participer ainsi que l’objectif de la

participation. On peut donc compléter cette définition en disant que la participation «désigne des

tentatives de donner un rôle aux individus dans une prise de décision affectant une

communauté» (Harou, 2003).

A notre échelle européenne, et plus précisément belge, la participation est avant tout une

participation citoyenne : «La participation des citoyens à la vie communale est l’action de prendre

part, collaborer, contribuer à la construction de réponses aux besoins de la collectivité et/ou des

divers groupes qui la composent.» Cette participation peut être spontanée ou institutionnelle,

spontanée si elle émane du citoyen et institutionnelle si elle est proposée par les pouvoirs publics.

(Harou, 2003).

Elle vise surtout la gestion et l’aménagement de l’espace public.

2.2.3. La participation au Sud

Les pays du Sud ou pays en développement sont des pays moins développés économiquement que

les pays du Nord.Dans ces pays, ce n’est pas la gestion de l’espace public qui est visée par la

participation, mais la gestion des ressources naturelles.

Depuis quelques temps, et pour «des raisons qui tiennent à des contingences internationales», on

observe une mise en valeur des ressources naturelles, telles que les ressources forestières, «selon

des préoccupations écologiques et sociales» (Joiris, 2010).

L’exploitation actuelle de ces ressources est orientée vers une «valorisation écologiquement durable

ainsi que sur l’amélioration des conditions de vie des populations riveraines» (Joiris,2010).

Petit à petit, les populations concernées se sont vues intégrées dans des processus participatifs de

gestion des ressources. Au départ, les projets étaient de type top-down, c’est-à-dire des projets

partant d’une échelle plus générale vers une échelle locale. Mais ces projets ont rapidement montré

leurs limites. A partir des années 1980, les stratégies se sont inversées pour déboucher sur des

projets bottom-up. On se base sur des données plus précises et sur une décentralisation des

processus décisionnels (Joiris, 2010).

Aujourd’hui, «tout projet qui ne se réfère pas à l’approche participative n’est pas crédible aux yeux

de la communauté internationale» (Nguinguiri, 1999).

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L’Afrique Centrale est une région du monde ayant un passé colonial très marqué. Durant des

années, les populations ont été empreintes par des modes de gestion très occidentaux et souvent à

mille lieux de leurs modes de fonctionnement personnels. Et encore aujourd’hui, et ce malgré

l’indépendance de nombreux pays, ces modes de gouvernance ancestraux sont encore fortement

ancrés dans les habitudes administratives.

Il en résulte actuellement un « déphasage entre les ambitions populistes et égalitaristes de

l’approche participative et les continuités historiques, colonialistes et néo- ou postcolonialistes à

travers lesquelles les populations sont gouvernées » (Joiris 2010) .

2.2.4. La perception visuelle paysagère : principesPour Neuray (1982), « la perception du paysage est la représentation que nous nous en faisons ».

Selon lui, elle est fonction d’un grand nombre de paramètres propres à l’observateur. Il décrit le

sens de la vue, la longueur de la vue, la largeur de la vue ou encore la position du spectateur.

Dramstad et al. (2006) ont tenté d’établir des liens entre des indicateurs dérivés de cartes issues de

la télédétection et un indicateur de préférence visuelle des paysages en Norvège. Ils ont pour cela

utilisé un groupe de locaux et un groupe d’étudiants extérieurs (mais ayant tous un lien avec les

notions d’écologie, biologie, etc). Ils leur ont montré différentes photos de paysages, qu’ils devaient

noter de 1 à 5 selon leurs préférences.

Les chercheurs ont remarqué que les différents types de groupes préféraient des paysages différents.

Ils expliquent ces différences par le fait que les étudiants ont des notions en écologie et en

biodiversité, ce qui influençaient leurs choix. Il est donc, selon eux, primordial de différencier la

perception paysagère d’un observateur externe à celle d’un local.

Ils concluent en suggérant d’intégrer les populations locales aux processus décisionnels dans le

cadre d’un aménagement du territoire.

2.2.5. Caractérisation du paysage par les populations locales

Les populations locales sont les acteurs principaux des méthodes participatives. Et le paysage en

tant qu’écocomplexe est un élément d’analyse idéal des territoires. L’étude de la caractérisation des

paysages par les populations locales est donc tout indiquée dans l’élaboration de ce type d’activités

(Gobin, 2000).

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Un travail de recherche en Indonésie (Sheil, 2004) s’est penché sur le sujet. Les chercheurs ont mis

en place des méthodologies pluridisciplinaires afin de comprendre l’importance que donnent les

populations locales aux unités paysagères de leurs terroirs en fonction de l’utilisation des

ressources. Les objectifs étaient de mettre en avant ce qui compte réellement ou pas pour les

populations et de rendre ces préférences plus intelligibles.

Grâce à cela, ils ont tenté de déterminer quelles informations seraient nécessaires pour prendre de

meilleures décisions pour l’aménagement et la gestion de forêts en milieu tropical.

Le projet a déjà démontré que l’existence d’informations spécifiques à certains sites pouvait guider

la politique locale d’aménagement des forêts et du territoire. Une autre partie du travail a montré

que les populations locales s’inquiètent et prennent conscience de la diminution de certaines

ressources importantes, comme le gibier et les plantes d’usage quotidien.

De plus, certains sites culturellement importants (cimetière, lieux de cultes) sont parfois

endommagés par diverses exploitations forestières. Connaître les priorités des habitants permet

d’éviter certains conflits pouvant bien souvent « bloquer » les programmes d’aménagement pendant

une période très longue.

2.2.6. La cartographie participative : conceptsUne méthode simple de participation est la cartographie participative. Selon Jackson et al. (1994)

elle est un outil indispensable dans le cas de gestion de forêts communautaires. C’est une méthode

simple qui permet rapidement de collecter des données socio-économiques, culturelles ou encore

biophysiques.

La cartographie participative est une méthode jeune. Elle s’est développée d’une manière rapide,

beaucoup plus vite que les méthodes dites « classiques » en technologie spatiale. Cette approche

participative est utilisée dans un grand nombre de branches différentes et notamment en gestion

territoriale.

La méthode consiste en fait à faire réaliser une carte du territoire par les populations locales. Dans

le cadre du projet Makala, la représentation schématique de l’espace a été réalisée à l’aide d’une

maquette interactive permettant d’avoir une représentation en relief facilement compréhensible par

les populations locales (Larzillière et al. 2011).

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«Avant cette méthode, les scientifiques étaient tellement occupés à tenter de faire des cartes bien

propres, en pensant qu’ils étaient les seuls à pouvoir le faire, qu’ils n’ont pas réalisé combien les

locaux pouvaient être utiles. Ils pouvaient parfois passer des jours à cartographier un site. Et

lorsqu’ils présentaient leurs résultats à la population, ils se rendaient compte qu’il manquait parfois

l’essentiel» (Chambers, 2006).

Néanmoins cette méthode participative peut sembler très aléatoire. En effet, les résultats vont

dépendre très fortement du comportement des personnes qui vont diriger le processus. Les moyens

mis en œuvre pour la réalisation de la carte vont aussi influencer les personnes qui vont y prendre

part ainsi que la nature des résultats.

De plus, cette méthode peut parfois poser un problème d’éthique. Elle vise souvent des populations

plus défavorisées. Et pour celles-ci le temps qu’elles ne passent pas aux champs est souvent

préjudiciable. Elles peuvent aussi être déçues par rapport aux résultats. Cette méthode n’apporte

rien de concret aux premiers abords. Enfin elle peut causer des tensions au sein d’une communauté

(Chambers, 2006). Il est donc nécessaire d’avoir ces notions en tête pour éviter toute dérive.

En outre cette méthode permet de comprendre les rapports qui unissent le milieu de vie à leurs

populations. En effet, celles-ci sont souvent responsables en grande partie des changements opérés

au sein des systèmes paysagers (Evans et al., 2006).

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3.Méthodologies

3.1. Cartographie non-participative par contraste (CNC)

Afin de suivre notre objectif de compréhension des processus d’écologie du paysage, nous avons

développé une méthode de cartographie non-participative basée sur la notion de contraste.

Le but est d’obtenir une carte qui sera par la suite comparée aux cartes participatives.

Cette méthode est divisée en 5 étapes.

Etape 1: Identification visuelle

Pour la première étape, nous nous sommes rendus à un endroit « point de vue » afin d’avoir une

vision d’ensemble du terroir à analyser.

Nous sommes accompagnés par un villageois connaissant bien son terroir. Celui-ci était là pour

nous aider à identifier visuellement les limites territoriales.

Cette «observation globale» a permis de nous faire une idée générale du territoire et des grandes

unités paysagères qui s’en dégagent.

A partir de nos observations, nous avons établi schématiquement une ébauche de carte, reprenant les

grands ensembles paysagers (unités paysagères) ainsi que les différentes limites physiques (rivières,

routes,...) qui se trouvaient face à nous.

Etape 2 : Confrontation du terrain

A partir de cette carte, nous sommes « descendus » dans ces unités paysagères afin d’affiner nos

observations et de qualifier chaque zone via une série de critères.

Nous avons axé l’essentiel du travail sur un ensemble de critères visuels. C’est en fonction du

terrain que nous avons déterminé ceux-ci.

Le premier terroir analysé nous a servi de référence. A l’aide des critères observés, nous avons

réalisé une clé de détermination des unités paysagères du territoire. Cette clé s’est réalisée au fur et

à mesure de nos observations sur le terrain et nous a servi pour les 3 autres terroirs.

Etape 3 : Cartographie

Après ce travail nous avons repris la première ébauche de carte pour la compléter et y ajouter les

nouvelles classes identifiées sous forme d’une carte schématique.

Pour nous aider lors de cette étape, nous avons utilisé la clé de détermination. Cela nous a permis

d’identifier de la même manière l’ensemble des unités paysagères des 4 terroirs.

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Etape 4 : Relevés GPS

Afin de disposer d’une cartographie précise, nous sommes « descendus » une nouvelle fois sur le

terrain pour, cette fois, relever exactement les différentes zones en coordonnées GPS. Pour cette

opération, nous avons utilisé notre carte de l’étape 3 afin de nous déplacer sur le terrain.

A l’aide d’un GPS de la marque Garmin CX60 et plus particulièrement de sa fonction « trace »,

nous avons suivi les limites des taches identifiées sur la carte. Visuellement nous nous repérions

donc via les différences de végétations, de hauteurs (notion de contraste entre deux taches) afin de

suivre les contours.

Etape 5 : Traitement des données

Les différentes données GPS obtenues sous format « shapefiles » ont été introduites dans le logiciel

Google Earth pour ensuite être traitées avec le logiciel de création graphique vectorielle Adobe

Illustrator CS3 afin d’obtenir un document cartographique clair et facilement utilisable en vue des

analyses. Nous avons utilisé la fonction « area » du plug-in CADtracker dans Illustrator pour

effectuer les mesures de superficies. Pour une meilleure comparaison avec la méthode participative,

nous avons transformé ces superficies en pourcentage.

3.2. Cartographie participative (CP)

Cette méthode participative est la méthode qui a été utilisée par le Projet Makala (Larzillière et al.

2011). Elle a été appliquée au 4 mêmes terroirs villageois que pour la méthode non participative par

contraste afin d’en proposer une comparaison.

Cette approche est divisée en 4 étapes :

Etape 1: Visite du terroir local

Avec un groupe représentatif de villageois, nous avons parcouru le territoire afin qu’ils identifient

les différents éléments composant leur terroir.

Cette étape permet de nous rendre dans des lieux offrant une visibilité quasiment complète du

terroir (points de vue) où les acteurs villageois peuvent nous montrer et nous expliquer ce qui

compose leur terroir.

Etape 2: Maquette interactive

Après les discussions relatives à la structure du territoire, le groupe de travail fixe ses observations à

l’aide d’une maquette interactive.

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Cette maquette est composée de différents éléments représentant l’environnement adjacent. Un

morceau de tissu figure le territoire à cartographier. Comme le montre la photo suivante, on

retrouve des petits modules en bois représentant des maisons, une église ou un cimetière. Il y a aussi

des éléments (petits bâtonnets de bois colorés) figurant les routes les rivières et enfin des petites

plaquettes représentant les champs, les savanes, les forêts.

On a d'abord demandé aux villageois de disposer les limites physiques telles que les routes, les

rivières. Une fois que la « trame » a été mise en place, nous leur avons demandé d’y placer les

éléments plus ponctuels tels que les champs, les sources, les savanes ou les forêts. Petit à petit, la

maquette se dessine sous nos yeux. Une fois que tout est bon pour l’ensemble du groupe, on décide

de valider cette carte.

Cette étape permet d’avoir une vision en 3 dimensions du terroir et facilite la représentation

graphique des éléments paysagers. Elle permet en outre d’amener une discussion enrichissante sur

les questions de limites physiques.

Etape 3 : Unités paysagères

A partir de la maquette validée par l’ensemble du groupe, l’espace schématisé est divisé en unités

paysagères. On demande aux villageois de représenter la maquette sur une feuille de papier et d’y

regrouper les éléments présentant pour eux des similitudes. Ils dessinent ainsi des formes générales,

ce sont les unités paysagères que nous comparerons aux unités paysagère définies lors de la

méthode CNC.

Le report des observations obtenues sur papier permet de conserver le tout sous forme de schéma

participatif.

Etape 4 : Traitement des données

Les schémas participatifs obtenus sous format papier ont été ensuite recopiés à l’aide du logiciel de

création graphique vectorielle Adobe Illustrator CS3 dans le but d’obtenir un document

cartographique gardant la même charte graphique que les cartes CNC. Enfin nous avons, grâce à la

fonction « area » du plug-in CADtracker dans Illustrator, effectué une mesure de pourcentages

relatifs des occupations du sol des différentes unités paysagères relevées.

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4.Résultats

4.1. Cartographie non-participative par contraste

Ici, nous allons présenter les résultats obtenus suite à la mise en place de la méthodologie CNC sur

l’ensemble de 4 terroirs villageois dans la province du Bas-Congo.

4.1.1.Village de Kinduala, lignée 1 - Terroir référence

Le premier terroir qui a été étudié (terroir villageois de la lignée 1 de Kinduala) a servi de terroir

référence. C’est en effet à partir de celui-ci que les critères essentiels à la mise en oeuvre de la

méthode ont été observés. Ils vont être présentés dans la séquence suivante.

4.1.1.1. Application des critères visuelsNous avons commencé nos observations par la lignée 1 du village de Kinduala. L’application

complète de la méthode a pris 5 jours.

Les étapes 1 et 2 de la méthodologie CNC nous ont permis d’identifier 8 types d’unités paysagères

reprises dans le tableau 2.

Lors de l’étape 2, nous avons identifié 4 critères qui nous semblaient pertinents dans notre

démarche d’identification paysagère. Avec ces 4 critères, nous pouvions caractériser l’ensemble des

8 unités paysagères retenues.

Ces critères ont été choisis car ils présentaient la particularité d’être essentiellement visuels et donc

facilement utilisables sur le terrain.

Voici les 4 critères retenus :

• La hauteur de la végétation dominante : Hauteur du couvert végétal qui domine de manière

visuelle.

• Le type de végétation dominante : Type de végétation qui domine sur une surface déterminée de

manière visuelle.

• Le nombre d’espèces différentes et dominantes : On évalue visuellement le nombre d’espèces

différentes qui dominent.

• La présence d’éléments particuliers : Il s’agit ici de la présence d’eau ou de billons.

4.1.1.2. Les unités paysagères

Les unités paysagères (UP) qui vont être décrites dans cette partie ont été caractérisées selon un

ensemble de critères visuels. Ces critères ainsi que les UP sont présentés dans le tableau 2.

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La savane est une UP importante dans la structure paysagère des terroirs visités. La végétation ne

dépasse généralement pas les 2 m de haut et est peu variée. La végétation dominante est

essentiellement herbacée. On peut y retrouver des arbustes mais ceux-ci représentent environ 10%

du couvert global et sont donc peu présents.

La savane arbustive se différencie de la savane «classique» par sa densité végétale. Essentiellement

arbustive, la végétation y est variée et on y retrouve beaucoup d’espèces différentes. Les herbacées

sont toujours présentes mais y sont minoritaires.

Les champs sont facilement reconnaissables par leur végétation. Celle-ci est purement de type

«culture» et est représentée par le manioc. De plus, cette UP est toujours accompagnée de billons

sur le sol. Il s’agit donc de taches introduites.

La jachère accompagne souvent les champs. Elle présente des restes de manioc et aussi d’anciens

billons. L’aspect peut parfois faire penser à un champ non sarclé. Sur le terrain, il est souvent très

difficile de différencier un champ «âgé» d’une «jeune» jachère. C’est pourquoi nous avons décidé

de regrouper ces deux UP en une seule.

La jachère forestière est en fait une jachère assez vieille. Cette zone est généralement mise en

défens par les villageois pendant un certain nombre d’années, parfois 10-15 ans.

Tableau 2. Tableau reprenant l’ensemble des unités paysagères observées sur le terroir de la lignée1 du village de Kinduala ainsi que les critères principaux de classification correspondant.

Unités paysagères Hauteur de végétation dominante

Type de végétation dominante

Nombre d’espèces différentes dominantes

Autres

Savane

Champs

Ancien village - Palmiers

Forêts marécageuses

Ancien village -Forestier

Jachère forestière

Savane arbustive

Jachère

2m Herbacées 90% Arbustes 10%

1 - 2 /

0-2m Cultures 95% Autres 5%

1 Billons

0-2m Cultures90% Arbres (palmiers) 10%

2 Billons

10-12m Herbacées 35% Arbres 65%

3 et + Eau

15m et + Arbres 90% 3 et + /

10-12m Arbres 75% Arbustes 25%

3 et + /

2-3m Herbacées 15% Arbustes 85%

3 et + /

0-3m Herbacées 85% Arbustes 15%

1 - 3 Billons

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Les anciens villages se déclinent en deux types. Nous les appellerons les anciens villages à palmiers

(AVP) et les anciens villages forestiers (AVF). Selon Forman et Godron (1986) il s’agit de Remnant

patches, ou taches de vestiges.

Ce sont en effet des restes d’une activité humaine ayant une vocation aujourd’hui de terre sacrée.

Les AVP présentent une végétation dominée par les palmiers. Elles s’accompagnent généralement

de cultures de manioc, tomates, haricots ou piments. Les AVF sont dominées par des arbres plus

imposants et présentent une densité et une diversité végétale assez élevée.

Enfin, les forêts marécageuses présentent elles aussi une diversité et une densité végétale très forte.

En effet, on y retrouve parfois plus de 5 espèces dominantes différentes. Mais elles se différencient

des AVP par la présence d’eau. Ces forêts marécageuses sont toujours situées en bordure de rivières.

4.1.1.3. Structure spatialeLa carte suivante représente l’ensemble du terroir de la lignée 1 du village de Kinduala

(15°10’18.52’’ E, 5°06’17.19’’ S).

Figure 10. Carte non participative par contraste du terroir de la lignée1 du village de Kinduala.

Légende

Anciens villages palmiers

Jachère forestière

Forêt marécageuse

Savane

Champs

Anciens villages forestiers

Savane arbustive

5°06'08" S

N

1000m

0m

5°07'18" S

15°10'33" S15°09'39" S

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Nous allons étudier la structure spatiale de la zone. Le tableau 3 ci-dessous reprend la superficie en

hectares (ha) des 7 taches ou unités paysagères identifiées.

On remarque directement que l’unité paysagère «savane» domine très clairement la structure

paysagère. Nous sommes ici en présence d’une matrice savanicole. Très étendue, elle représente,

avec 113,9ha 65% du terroir villageois.

Elle peut présenter par endroits de petites unités peu significatives de champs épars. On observe

aussi à certains endroits des zones que l’on pourrait caractériser de «savane marécageuse», par la

présence d’eau, mais encore une fois cela ne représente qu’une infime partie du territoire.

Dans cette matrice, on retrouve une tache plus importante : la tache des champs. Celle-ci se situe à

proximité directe de la route (limite Nord de la carte). Elle est assez homogène et est positionnée sur

un plateau. Elle forme clairement une unité dans le Nord de la carte, pouvant parfois être ponctuée

de jachères.

Les jachères forestières sont situées quant à elles, à proximité directe du noyau central villageois.

On en recense 3 assez marquantes.

Sur le terroir de la lignée 1 de Kinduala, on observe une tache de forêt marécageuse. Celle-ci est

assez étroite et de forme allongée car elle suit un cours d’eau. Elle représente environ 3,7% de la

surface totale.

Tableau 3. Tableau reprenant les superficies des UP identifiées dans le terroir de la lignée1 du village de Kinduala.

UP Superficie (ha) %

Savane 113,9 65

Champs 40,4 23

Jachère forestière 7 4

Forêt marécageuse 6,5 3,7

Savane arbustive 3,9 2,2

Anciens villages - Palmiers 2,6 1,4

Anciens villages - Forestier 0,6 0,7

TOTAL 175 100

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Au Nord-Ouest de la carte, on distingue une tache de savane arbustive. Celle-ci est beaucoup plus

petite que la tache de savane «classique» et représente environ 2% du territoire.

Les anciens villages forestiers et palmiers représentent des proportions minimes dans le paysage.

Les éléments paysagers sont disposés parallèlement entre eux. Ils semblent suivre un axe Ouest/

Nord-Ouest.

Sur le terrain, ils sont reliés entre eux par un réseau assez dense de petits sentiers parfois

difficilement perceptibles pour un utilisateur non-averti.

Mis à part la tache «champs», les autres taches présentent une certaine équitabilité en terme de

superficie et restent dans des ordres de grandeurs assez proches les unes des autres.

4.1.2.Village de Kinduala, lignée 2La carte suivante (figure 11) représente l’ensemble du terroir de la lignée 2 du village de Kinduala

(15°10’18.52’’ E, 5°06’17.19’’ S).

Le tableau 4 reprend l’ensemble des unités paysagères observées, ainsi que leurs superficies

respectives.

Figure 11. Carte non participative par contraste du terroir de la lignée 2 du village de Kinduala.

Légende

Anciens villages palmiers

Jachère forestière

Forêt marécageuse

Savane

Champs

Anciens villages forestiers

1000m

0m

15°10'59" E

5°06'37" S

5°05'35" S

15°09'14" S

N

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Ce terroir est le plus grand des 4 étudiés. Sa superficie est de 415,1ha, ce qui correspond environ au

double des trois autres.

Ici encore, comme le montrent la figure 11 et le tableau 4, l’UP dominante est l’UP de savane. Avec

316,4ha, ce qui représente près de 76,2% de la superficie totale, cette tache est bel et bien la

matrice.

L’UP « champs » représente 15,4% de la superficie totale. Cette UP est divisée en 3 taches

distinctes. La plus grande des trois se situe au Sud de la carte, juste derrière le noyau villageois. Elle

est presque séparée en 2 parties par une avancée de la savane. Les 2 autres taches sont de tailles plus

réduites.

Nous observons également au Nord, une tache de forêt marécageuse. Celle-ci est de forme allongée

et peu large. Elle se développe en suivant le cours d’une rivière.

Nous pouvons remarquer sur ce terroir deux taches d’anciens villages palmiers ainsi qu’une tache

d’anciens villages forestiers. Ces dernières sont très petites en terme de superficie et sont de formes

circulaires à oblongues.

Enfin, nous remarquons aussi sur le territoire, une tache de jachère forestière. Celle-ci représente

0,3% de la superficie totale et est de forme quasiment circulaire. Elle est incluse dans la matrice

savanicole.

Tableau 4. Tableau reprenant les superficies des UP identifiées dans le terroir de la lignée 2 du village de Kinduala.

UP Superficie (ha) %

Savane 316,4 76,2

Champs 64 15,4

Forêt marécageuses 23,8 5,7

Anciens villages - Palmiers 9 2,1

Anciens villages - Forestiers 1,2 0,3

Jachère forestière 0,7 0,3

TOTAL 415,1 100

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4.1.3. Village de NgongoLa carte suivante (Figure 12) représente l’ensemble du terroir villageois de Ngongo (15°09’E,

5°07’S). Pour ce terroir, nous avons identifié 5 unités paysagères distinctes.

On observe que le terroir est co-dominé par une matrice champs-savane. Les données, relatives à la

superficie présentées dans le tableau 5, viennent confirmer ces observations. Avec respectivement

97,6ha et 93ha, les taches « savane » et « champs » représentent 48 et 45,8% de la superficie totale

du terroir. Cette co-dominance traduit bien le caractère anthropique de la zone.

Dans cette matrice, on retrouve peu de types différents. La structure paysagère est assez homogène

et les types paysagers présents représentent une portion très minime de la surface totale.

Nous remarquons deux petites taches d’anciens villages forestiers de 0,7ha et 0,3ha au Nord et à

l’Est de la carte. Celles-ci sont à chaque fois incluses dans les taches de champs.

Figure 12. Carte non participative par contraste du terroir villageois de Ngongo.

1000m

0m

Légende

Anciens villages palmiers

Savane

Champs

Anciens villages forestiers

Savane arbustive

Plantation acacias

5°06'52" S

15°09'49" E5°08'24" S

15°08'42" E

N

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A l’Ouest, nous pouvons observer une tache de savane arbustive. Celle-ci se situe au milieu de la

matrice savanicole.

Enfin, sur le terroir villageois de Ngongo, nous avons repéré une unité paysagère que nous n’avons

retrouvé nulle part ailleurs. Il s’agit d’une tache « plantation d’acacias ». Cette tache est très

clairement de nature anthropique et est de taille réduite. Elle représente 0,4% de la surface totale du

territoire cartographié. Cette UP se trouve en plein milieu de la matrice savanicole, à proximité du

village.

4.1.4. Village de KisimbaLa carte suivante (Figure 13) représente l’ensemble du terroir villageois de Kisimba (15°10’E,

5°07’S).

Pour ce terroir, nous avons identifié 4 unités paysagères distinctes.

C’est à nouveau l’unité paysagère «savane» qui est la tache dominante avec 134,9ha, soit 67,3% de

la surface totale du terroir. Le tableau 6 reprend l’ensemble des unités paysagères observées ainsi

que leurs surfaces respectives.

Une tache «champs» se situe en plein milieu du territoire et en couvre environ 16,6%. Cette tache se

développe selon un axe Sud/Ouest - Nord/Est qui correspond en fait à un cours d’eau. Les champs

sont répartis de part et d’autre. Elle présente une forme allongée.

Tableau 5. Tableau reprenant les superficies des UP identifiées dans le terroir villageois de Ngongo

UP Superficie (ha) %

Savane 97,6 48

Champs 93 45,8

Savane arbustive 10,8 5,3

Anciens villages - Forestier 1 0,5

Plantation d’acacias 0,6 0,4

TOTAL 203 100

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La troisième unité paysagère en terme d’importance est l’UP jachère forestière. Elle est divisée en

deux taches distinctes. Ces dernières se situent à proximité directe du noyau villageois. Elles sont

disposées le long de la route principale. La plus grande des deux est de forme oblongue alors que la

plus petite présente une forme plutôt circulaire.

La dernière UP, et la moins significative, est la forêt marécageuse. Elle représente 3,6% de la

surface totale du terroir. Elle est située au Nord/Est de la carte et se développe en suivant un cours

d’eau. Elle est plus longue que large. Elle fait office de corridor.

Dans ce terroir, on ne retrouve pas d’UP « anciens villages ». La structure paysagère est donc très

homogène car le nombre de taches est très réduit.

Figure 13. Carte non participative par contraste du terroir villageois de Kisimba.

Légende

Jachère forestière

Forêt marécageuse

Savane

Champs

1000m

0m

N

5°06'50" S

5°08'16" S

15°11'03" S15°10'02" S

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4.2. Cartographie participative

Dans cette partie, nous allons présenter les résultats obtenus suite à la mise en oeuvre de la méthode

CP sur 4 terroirs villageois dans la province du Bas-Congo.

4.2.1.Village de Kinduala, lignée 1La carte suivante (Figure 14) présente la carte participative du terroir villageois de la lignée 1 de

Kinduala.

Tableau 6. Tableau reprenant les superficies des UP identifiées dans le terroir villageois de Kisimba.

UP Superficie (ha) %

Savane 134,9 67,3

Champs 33,2 16,6

Jachère forestière 25 12,5

Forêt marécageuse 7,3 3,6

TOTAL 200,4 100

Légende

Jachère forestière

Savane

Forêt marécageuse

Champs

Anciens villages forestiers

Anciens villages palmiers

Rivières

Routes

Limites

Village

Pont

Source

Cimetière

N

Figure 14. Carte participative du terroir de la lignée 1 du village de Kinduala.

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Le tableau 7 nous donne les pourcentages d’occupation de l’espace pour chaque unité paysagère.

On remarque directement que l’unité paysagère dominante est la savane. Elle occupe une place

importante dans la structure paysagère et occupe 74,9% du terroir .

Les champs ont été représentés de manière éparse. Ils présentent une forme rectangulaire. Ces

taches sont assez petites par rapport aux autres et semblent présenter une moindre importance dans

le terroir (2%).

Les taches qui attirent l’attention sont les UP d’anciens villages palmiers. On remarque 3 taches

bien distinctes et assez importantes en terme de présence dans la structure paysagère villageoise

(12,5%). Elles sont de formes ovales et s’étirent selon un axe Nord/Ouest - Sud/Est.

Pour ce qui est des taches d’anciens villages forestiers, on en observe deux. Elles sont bien plus

grandes que les taches de champs. Elles semblent se développer dans le même axe et selon la même

forme que les UP précédentes.

Une cinquième unité paysagère identifiée est l’UP jachère forestière. Elle est assez longue et étroite,

mais de superficie moins importante par rapport aux taches des UP «anciens villages forestiers».

Elle occupe 1,8% du territoire. L'extrémité Nord est à proximité directe de la route et du village.

Enfin, le long d’un cours d’eau, on observe également une tache de forêt marécageuse. Elle est

assez étroite mais c’est celle-ci qui est la plus longue.

Tableau 7. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées dans le terroir villageois de la lignée 1 de Kinduala.

UP %

Savane 74,9

Anciens villages - Palmiers 12,5

Jachère forestière 5

Anciens villages - Forestiers 3,8

Champs 2

Forêt marécageuse 1,8

TOTAL 100

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Dans cette carte participative, on observe d’autres éléments plus ponctuels. On repère des maisons.

Il s’agit du positionnement d’un village. On observe aussi un pont ainsi que des cimetières et des

sources.

Dans ces cartes apparaissent également des éléments linéaires que sont les routes et les rivières.

4.2.2.Village de Kinduala, lignée 2La carte suivante représente le terroir villageois de la lignée 2 de Kinduala selon la méthode

participative. Le tableau 8 reprend les pourcentages d’occupation du sol de chaque UP.

On peut observer que c’est la savane qui est dominante dans ce territoire. Elle occupe 77% de la

superficie totale.

Elle est ponctuée de petites zones de champs rectangulaires. Celles-ci sont essentiellement

disposées le long de la limite Nord qui est une rivière. Visuellement, la densité des champs n’est pas

très grande. Ils représentent 5,9% du territoire.

Figure 15. Carte participative du terroir de la lignée 2 du village de Kinduala.

N

Légende

Jachère forestière

Savane

Forêt marécageuse

Champs

Anciens villages forestiers

Anciens villages palmiers

Rivières

Routes

Limites

Village

Pont

36

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Nous pouvons remarquer trois zones d’anciens villages forestiers. Une est de très grande taille par

rapport à l’ensemble des UP présentes sur la carte. Elle est de forme ovale. Les deux autres sont de

tailles plus réduites et de formes circulaires.

Les « anciens villages palmiers » sont eux aussi bien représentés sur ce terroir. On en observe

également trois zones d’assez grandes dimensions. Celle au Nord/Est est de forme ovale alors que le

deux autres présentent des formes plus aléatoires. La plus grande zone des trois, au Sud, englobe

une des UP d’anciens villages forestiers.

Toujours au Sud, on remarque une unité paysagère de jachère forestière. Celle-ci est assez longue et

plutôt étroite. Elle se situe le long de la route et à proximité directe du village.

Enfin, on observe également une forêt marécageuse. Cette dernière est disposée sur l'entièreté de la

limite Nord. Elle suit un cours d’eau. Elle est de forme assez allongée et peu large. Sa largeur reste

régulière.

Dans cette carte, nous pouvons de nouveau observer des éléments plus ponctuels. Les bâtiments,

représentant le village, ont été ajoutés comme points de repères ainsi qu’un pont au Nord/Est.

Des éléments linéaires sont aussi présents. Ce sont des routes ou des rivières.

Tableau 8. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées dans le terroir villageois de la lignée 2 de Kinduala.

UP %

Savane 77

Champs 5,9

Forêt marécageuse 5,4

Anciens villages - Forestiers 5,2

Anciens villages - Palmiers 4,9

Jachère forestière 1,6

TOTAL 100

37

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4.2.3.Village de NgongoLa carte suivante présente l’ensemble du terroir villageois de Ngongo tel que perçu par les

populations locales. Le tableau 9 reprend les pourcentages d’occupation du sol de chaque UP.

Deux unités paysagères semblent ici dominer le territoire. Il s’agit de la savane et des champs. En

effet, les villageois ont représenté de grandes zones de ces deux UP. Visuellement, elles semblent

être réparties de manière égale sur le terroir. Elles représentent respectivement 38,9% et 55,4% du

terroir.

Au niveau de la situation à proprement parler, on peut remarquer que les deux plus grandes zones

de champs sont séparées par la route. Cette dernière jouant donc un élément limitant et accentuant

la discontinuité des zones.

Nous pouvons aussi remarquer une zone d’anciens villages palmiers le long de la route centrale et à

proximité directe du village. Elle est assez longue et large.

Figure 16. Carte participative du terroir villageois de Ngongo.

Légende

Savane

Champs

Anciens villages forestiers

Anciens villages palmiers

Rivières

N

Routes

Limites

Village

Pont

Source

Cimetière

Plantation acacias

38

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Nous observons également 3 zones d’anciens villages forestiers sur le territoire. Celles-ci ont été

représentées de manière circulaire. Elles sont de tailles assez réduites, en comparaison des zones de

champs et de savane.Elles représentent 1% du territoire total. Elles sont situées vers les extrémités

de la carte.

Un cinquième type d’unité paysagère est ici présent. Nous ne le retrouvons sur aucune autre carte. Il

s’agit d’une petite zone de plantation d'acacias. Elle a été représentée de la même manière que les 3

zones d’anciens villages forestiers. Elle se situe à proximité directe du village.

Nous retrouvons de nouveau des éléments ponctuels comme des sources, des cimetières, des ponts

ou encore des maisons pour représenter le village. En effet, ici, le long de la route centrale, les

villageois ont étalé le village à l’aide de plusieurs symboles « maison ».

Enfin, ce sont toujours des éléments linéaires qui structurent le territoire, les rivières représentant

l’ensemble des limites extérieures.

4.2.4. Village de KisimbaLa carte suivante (Figure 17) présente les résultats de la méthode participative pour l’ensemble du

terroir villageois de Kisimba. Le tableau 10 présente les pourcentages d’occupation du sol des UP.

L’unité paysagère qui est dominante est la savane. Sur la carte, elle représente 61,2% du territoire.

Ce sont les champs qui présentent eux aussi une relativement grande importance dans le terroir avec

26,6% de présence. On dénombre 5 zones bien distinctes. Bien que les deux zones les plus à l’Ouest

ne soient séparées que par la route, elles présentent toutes des formes assez aléatoires. Elles sont de

tailles variées mais néanmoins assez grandes.

Tableau 9. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées dans le terroir villageois de Ngongo.

UP %

Champs 55,4

Savane 38,9

Anciens villages - Palmiers 4,2

Anciens villages - Forestiers 1

Plantation acacias 0,5

TOTAL 100

39

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Le troisième type observé d’unités paysagères est celui de la jachère forestière. On compte 4 zones

sur le terroir. Celles-ci sont toutes accolées à une route et trois d’entre elles à l’axe Sud/Ouest -

Nord/Est qui est l’axe principal du village.

Nous remarquons également une petite zone d’anciens villages palmiers au Sud de la carte. Elle

àaété représentée de manière quasi circulaire. Elle est de petite taille par rapport aux zones de

champs ou encore aux zones de jachères forestières. Elle représente 0,8% du territoire.

Au Nord/Est, nous pouvons observer une zone de forêt marécageuse. Cette dernière est plus longue

que large et suit une rivière. Elle est de petite taille par rapport aux champs ou aux jachères

forestières.

Figure 17. Carte participative du terroir villageois de Kisimba.

N

Légende

Jachère forestière

Savane

Forêt marécageuse

Champs

N

Anciens villages palmiers

Rivières

Routes

Limites

Village

Pont

Source

40

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Dans ce terroir, des éléments ponctuels ont été également représentés. On dénombre 4 sources, un

cimetière et deux ponts. Les symboles «maisons» ont aussi été ajoutés à la carte afin de situer les

villages.

Enfin, ce sont de nouveau des éléments linéaires qui structurent la carte. Les rivières ont été placées

selon un plan orthogonal. Les routes ont été disposées de la même manière.

4.3. Comparaison des cartes

Dans cette partie, les cartes vont être comparées entre elles. Nous allons donc analyser chaque

terroir en mettant en vis-à-vis les résultats des deux méthodes utilisées. Nous allons ainsi pouvoir

mettre en avant les différences et les similitudes entre les méthodes.

4.3.1. Kinduala - Lignée 1La figure 18 présente les résultats des deux méthodes de cartographie pour le terroir de la lignée 1

de Kinduala. Le tableau 11 reprend les différentes unités paysagères, le pourcentage d’occupation

du territoire de chacune ainsi que la valeur absolue de la différence entre ces deux pourcentages.

Dans les deux cas, c’est l’unité paysagère «savane» qui domine clairement la structure paysagère.

Néanmoins, on remarque de nombreuses différences entre les deux cartes. Ces différences se situent

au niveau de la répartition des taches mais aussi au niveau du nombre de taches.

Tableau 10. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées dans le terroir villageois de Kisimba.

UP %

Savane 61,2

Champs 26,6

Jachère forestière 10,2

Forêts marécageuses 1,2

Anciens villages - Palmiers 0,8

TOTAL 100

41

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Par exemple, l’unité paysagère « champs » est très peu représentée dans la CP, alors qu’elle est la

deuxième en terme de superficie pour la CNC. Le tableau 11 montre une différence de 21%

d’occupation du sol entre les deux cartes.

De plus, les villageois ont placé les champs plutôt dans le centre de la carte alors qu’ils se

retrouvent en majeure partie vers le Nord de la carte pour la CNC. On a l’impression en comparant

les deux cartes qu’il «manque» des champs.

On remarque aussi certaines différences au niveau de l’unité paysagère «jachère forestière». On

compte 3 taches pour la méthode CNC contre une seule pour la méthode CP. Mais cette dernière

semble être beaucoup plus grande que les autres.

Mais le plus flagrant, est au niveau des unités paysagères « anciens villages forestiers ». Elles sont

clairement sur-évaluées par les villageois. Le nombre de taches est identique aux deux méthodes

(2) mais leurs formes et leurs tailles diffèrent fortement. La remarque est exactement la même que

pour l’unité paysagère « anciens villages palmiers ». Les villageois ont montré 3 taches, dont une

très grande alors que la méthode CP n’en dévoile qu’une seule. Le tableau 11 expose bien ces

divergences de représentations avec une différence de 11,1% entre les deux méthodes pour les AVP.

Une autre grosse différence est la présence sur la carte participative d’éléments ponctuels. Les

villageois ont en effet placé des éléments comme les maisons ou les cimetières. Ceux-ci sont des

points de repères dans le paysage. Cela leur permet de situer les autres éléments plus grands par

rapport à ceux-ci.

UP % CNC % CP Différence (%)

Savane 65 74,9 9,9

Champs 23 2 21

Jachère forestière 4 5 1

Forêt marécageuse 3,7 1,8 1,9

Savane arbustive 2,2 / 2,2

Anciens villages - Palmiers 1,4 12,5 11,1

Anciens villages - Forestiers 0,7 3,8 3,1

Tableau 11. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées selon les deux méthodes sur le terroir de la lignée 1 de Kinduala ainsi que la valeur absolue de la différence entre les pourcentages obtenus par les deux méthodes.

42

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Par contre, pour l’unité paysagère «forêts marécageuse», on peut observer certaines similitudes

entre les deux cartes. On retrouve une seule tache sur le terroir. Elle est dans les deux cas disposée à

l’Est de la carte. Pour ce qui est de la superficie couverte, la ressemblance est là aussi frappante.

4.3.2. Kinduala - Lignée 2La figure 19 présente les résultats des deux méthodes de cartographie pour le terroir de la lignée 2

de Kinduala. Le tableau 12 reprend les différentes unités paysagères, le pourcentage d’occupation

du territoire de chacune ainsi que la valeur absolue de la différence entre ces deux pourcentages.

Figure 18. Comparaison des deux cartographies réalisées sur le terroir de la lignée 1 du village de Kinduala. A gauche carte participative et à droite carte CNC.

Rivières

Routes

Limites

Village

Pont

Source

Cimetière

Légende

Anciens villages palmiers

Jachère forestière

Forêt marécageuse

Savane

Champs

Anciens villages forestiers

Savane arbustive

5°06'08" S

1000m

0m

5°07'18" S

15°10'33" S15°09'39" S

N

43

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Comme pour le terroir précédent, l’unité paysagère dominante est la même pour les deux cartes. Il

s’agit de l’UP «savane». Dans les deux cas elle est représentée de la même importance, environ

77% du territoire.

L’unité paysagère qui présente également des similitudes sur les deux cartes est l’UP « forêts

marécageuses ». Elle est présente de la même manière sur les deux carte avec seulement une

différence de superficie relative de 0,3%. On observe une longue tache sur chacune des cartes. Elles

sont positionnées à chaque fois au Nord des cartes. Elles se développent le long d’un cours d’eau

sur la carte participative. C’est ce qui permet donc d’avoir des ressemblances. Le cours d’eau jouant

un rôle de repère physique dans le terroir villageois.

Dans la carte participative, les champs ont été représentés de manière éparse. Ils y sont aussi très

peu présents. Ils représentent 5,9% alors que dans la carte de droite, ils sont la deuxième unité

paysagère, en terme de superficie représentée avec 15,4% d’occupation du sol. Ils se situent

principalement dans le sud de la carte.

Sur la carte de gauche, les quelques taches « champs » sont représentées au centre du terroir et sur

l’extrémité Nord, le long du cours d’eau.

UP % CNC % CP Différence (%)

Savane 76,2 77 0,8

Champs 15,4 5,9 9,5

Forêt marécageuse 5,7 5,4 0,3

Anciens villages - Palmiers 2,1 4,9 2,8

Anciens villages - Forestiers 0,3 5,2 4,9

Jachère forestière 0,3 1,6 1,3

Tableau 12. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées selon les deux méthodes sur le terroir de la lignée 2 de Kinduala ainsi que la valeur absolue de la différence entre les pourcentages obtenus par les deux méthodes..

44

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Nous pouvons ensuite observer deux autres différences assez marquantes.

La première est celle qui caractérise l’unité paysagère « jachère forestière ». Les villageois de la

lignée 2 de Kinduala ont mis en avant une tache le long de la limite Nord de leur terroir. Alors que

sur la carte CNC, nous observons également une seule tache mais de dimensions beaucoup plus

réduites. Autre point de divergence, cette tache se situe au Nord/Ouest de la carte CNC.

La deuxième différence se remarque au niveau des unités paysagères « anciens villages forestiers

» (AVF) et « anciens villages palmiers » (AVP). Dans la carte participative, ces deux UP sont

représentées de manières imposantes par rapport au reste de la carte, alors que sur la carte CNC

elles représentent de très faibles pourcentages de superficies.

De plus, on compte trois taches «anciens villages palmiers» sur la carte participative contre 2 pour

la carte CNC. Sur cette dernière, ce sont des champs qui entoure la tache « AVF » alors que sur la

carte participative c’est une tache « AVP ». Néanmoins, les autres taches « AVP » sont positionnées

de la même manière sur les deux cartes.

Figure 19. Comparaison des deux cartographies réalisées sur le terroir de la lignée 2 du village de Kinduala. A gauche carte participative et à droite carte CNC.

1000m

0m

15°10'59" E

5°06'37" S

5°05'35" S

15°09'14" S

Rivières

Routes

Limites

Village

Pont

Source

Cimetière

Légende

Anciens villages palmiers

Jachère forestière

Forêt marécageuse

Savane

Champs

Anciens villages forestiers

Savane arbustive

N

45

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Si maintenant on observe les taches « anciens villages forestiers », on en compte deux sur la carte

participative et une seule sur la carte CNC. Si nous regardons la tache au Nord/Ouest de la carte

participative et la tache de jachère forestière de la carte CNC, nous pouvons remarquer qu’elles se

situent dans la même zone. Comparativement, les superficies ont l’air fort proche. Il est sans doute

probable qu’il s’agisse de la même unité paysagère. La différence se situe donc sur l’affectation que

l’on en a fait. Pour les populations locales il s’agit d’un ancien village forestier alors que pour nous

il s’agissait d’une jachère forestière.

4.3.3. Ngongo

La figure 20 présente les résultats des deux méthodes de cartographie pour le terroir villageois de

Ngongo. Le tableau 13 reprend les différentes unités paysagères, le pourcentage d’occupation du

territoire de chacune ainsi que la valeur absolue de la différence entre ces deux pourcentages.

On observe bien sur les deux cartes une co-dominance des taches « savanes » et « champs ». On

remarque néanmoins des différences en terme de superficies représentées. Mais ces dernières restent

tout de même dans des ordres de grandeur forts proches dans les deux méthodes.

On compte 3 taches «anciens villages forestiers» pour la carte CP contre 2 pour la carte CNC. Elles

présentent des formes similaires et sont peu différentes d’un terroir à l’autre en terme de superficie

(0,5% et 1%). Il en va de même pour l’unité paysagère « plantation d’acacias ». Elle est située de la

même manière sur les deux cartes et représente chaque fois environ 0,5% du territoire.

UP % CNC % CP Différence (%)

Savane 48 38,9 9,1

Champs 45,8 55,4 9,6

Savane arbustive 5,3 / 5,3

Anciens villages - Palmiers / 4,2 4,2

Anciens villages - Forestiers 0,5 1 0,5

Plantation d’acacias 0,4 0,5 0,1

Tableau 13. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées selon les deux méthodes sur le terroir de Ngongo ainsi que la valeur absolue de la différence entre les pourcentages obtenus par les deux méthodes.

46

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Figure 20. Comparaison des deux cartographies réalisées sur le terroir villageois de Ngongo. A gauche carte participative et à droite carte CNC.

Rivières

Routes

Limites

Village

Pont

Source

Cimetière

Légende

Anciens villages palmiers

Savane

Champs

Anciens villages forestiers

Savane arbustive

1000m

0m

Plantation accacia

5°06'52" S

15°09'49" E5°08'24" S

15°08'42" E

N

La plus grosse différence entre les deux cartes est au niveau de la trame générale du terroir. Sur la

carte CP elle est très rectangulaire alors que la carte CNC est plutôt disposée sous la forme d’un

«L» inversé.

L’unité paysagère « savane arbustive » à été représentée sur la carte CNC alors qu’elle manque sur

la carte CP. La remarque est la même pour l’unité paysagère « anciens villages palmiers » mais

d’ans l’autre sens cette fois. Elle est présente sur la carte CP et pas sur celle CNC.

Enfin, on retrouve des éléments ponctuels et des éléments linéaires sur la carte participative alors

qu’ils sont absent de la carte CNC.

4.3.4. KisimbaLa figure 21 présente les résultats des deux méthodes de cartographie pour le terroir villageois de

Ngongo. Le tableau 14 reprend les différentes unités paysagères, le pourcentage d’occupation du

territoire de chacune ainsi que la valeur absolue de la différence entre ces deux pourcentages.

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La savane est dominante pour les deux méthodes. L’occupation du territoire se chiffre aux environs

de 65% pour les deux cartes.

On remarque également des ressemblances pour l’unité paysagère « jachère forestière ». Les

différentes taches des deux cartes sont disposées selon le même axe, le long de la limite Ouest du

terroir. Elles occupent un total de 12,5% pour la méthode CNC et de 10,2% pour la méthode CP. Ce

qui est relativement semblable.

Idem pour l’UP « forêt marécageuse ». La forme des taches est identique sur les deux

représentations. Néanmoins le pourcentage d’occupation du sol varie de plus de moitié.

La grosse différence se situe une nouvelle fois au niveau de l’unité paysagère « champs ». On

observe qu’elle est beaucoup plus représentée pour la carte CP. Il y a une différence de 10% entre

les deux méthodes ce qui est assez significatif. De plus, les villageois ont représenté une tache «

anciens villages forestiers » sur leur terroir alors que nous n’en avons pas signalé sur la carte CNC.

Enfin, on peut observer sur la carte CP des éléments linéaires, comme des rivières ou des routes,

ainsi que des éléments plus ponctuels comme des sources ou des maisons. Sur la carte CNC nous ne

remarquons rien de tout cela.

UP % CNC % CP Différence (%)

Savane 67,3 61,2 6,1

Champs 16,6 26,6 10

Jachère forestière 12,5 10,2 2,3

Forêt marécageuse 3,6 1,2 2,4

Anciens villages - Palmiers / 0,8 0,8

Tableau 14. Tableau reprenant les pourcentages d’occupation du sol des UP identifiées selon les deux méthodes sur le terroir de Kisimba ainsi que la valeur absolue de la différence entre les pourcentages obtenus par les deux méthodes.

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Figure 21. Comparaison des deux cartographies réalisées sur le terroir villageois de Kisimba. A gauche carte participative et à droite carte CNC.

Légende

Jachère forestière

Savane

Forêt marécageuse

Champs

NAnciens villages palmiers

Rivières

Routes

Limites

Village

Pont

Source

1000m

0m

5°06'50" S

5°08'16" S

15°11'03" S15°10'02" S

49

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5. Discussion et perspectives

5.1. Interprétations des résultats et comparaisons des cartes

Il est maintenant intéressant de revenir sur certains résultats issus des comparaisons des différentes

méthodes. En effet, on observe certaines récurrences sur les cartes propres à chaque unité

paysagère.

L’élément le plus marquant est que les cartes CNC n’utilisent que des éléments surfaciques. Alors

que les cartes participatives utilisent en plus des éléments linéaires et ponctuels. L’utilisation de

différents types d’éléments, comme le montrent les résultats de la cartographie participative, va

dans le sens de la théorie développée par Kévin Lynch (1960).

Il a effectué des études sur la manière dont les populations perçoivent la structure spatiale urbaine

les entourant ainsi que les différents éléments la composant. Il en a retiré qu’une ville était

composée de plusieurs éléments comme des voies (rues, chemin de fer,...), des points de repère

(arbres, tours,...), des limites, des noeuds (carrefours) ou des quartiers (Lynch, 1960). Ce modèle, tel

qu’il est décrit ici, est un modèle qui semble s’opposer au modèle « patch-matrix-corridor » de la

méthode CNC.

On retrouve dans la cartographie participative toute une série des éléments de Lynch. Les plus

importants et les plus présents sont les routes et les cours d’eau. On peut les assimiler aux voies de

Lynch. On remarque que ces éléments linéaires ont une importance dans la représentation que se

font les populations locales de leurs terroirs.

L’unité paysagère qui nous permet cette affirmation est l’UP «forêt marécageuse». Sur les 8 cartes,

c’est cette UP qui est à chaque fois positionnée au même endroit selon les deux méthodes utilisées.

C’est dû au fait que cette UP est liée à la présence d’un cours d’eau. La forêt marécageuse étant par

définition caractérisée par une forte présence d’eau. Les cours d’eau sont des éléments marquants et

structurants du paysage. En plus de cela, l’eau a une importance particulière pour les villageois. Elle

est essentielle à la vie du village. Les cours d’eau sont également des limites physiques des terroirs

visités. En situant les cours d’eau sur la carte participative, les populations locales situent donc très

facilement les forêts marécageuses.

Une autre similitude, qui se retrouve sur l’ensemble des cartes, est la mise en avant d’une UP

dominante. Dans 3 des 4 terroirs, il s’agit de la savane. Pour le dernier terroir, c’est une co-

dominance savane-champs. La perception paysagère villageoise est avant tout visuelle comme

l’explique Neuray (1982). Dans le cas présent, les mesures de superficies montrent très clairement

la dominance. Elle est très nette. Il est donc normal, que visuellement parlant, elle le soit aussi.

50

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Les éléments ponctuels, tels que les sources ou les ponts, sont aussi présents sur les cartes

participatives. Ils servent également de points de repère pour le positionnement des différentes UP.

Ce qui devient assez intéressant, c’est le fait que dans la cartographie CNC, des UP comme les

champs sont des éléments surfaciques du territoire. Alors que dans la cartographie participative, les

champs deviennent quasiment des éléments ponctuels. On remarque alors d’énormes différences

entre les méthodes au niveau des proportions prises par cette UP dans le terroir. Dans 3 des 4 carte s

participatives, l’UP « champs » est sous estimée. Cela peut être expliqué par le fait que, lors de la

mise en oeuvre de la méthode CP, l’ensemble des villageois n’étaient pas présents. Les villageois

ayant participé ont donc plutôt placé les champs qu’ils connaissaient, c’est-à-dire les leurs. De plus,

les éléments utilisés pour figurer les champs dans la méthode CP sont des petites plaquettes de bois.

Elles sont facilement assimilables à des éléments ponctuels.

Une autre remarque faite sur les résultats obtenus touche à la cohérence de représentation entre les

différents villages. Dans chaque cas, les UP « anciens villages forestiers » sont systématiquement

sur-évalués dans les cartes participatives. Ce sont des zones qui ont une vocation sacrée pour les

populations. Autrefois, elles étaient souvent très grandes mais elles ont été très sévèrement

exploitées. C’est pour cela que dans la représentation que les gens s’en font, elles gardent une place

assez importante.

Il en va de même pour les UP « anciens villages palmiers ». Elles sont généralement sur-évaluées en

terme de superficies. De plus on observe également que les zones définies comme des UP «AVP»

dans la cartographie CP sont souvent des UP «champs» dans la cartographie CNC.

Cela peut s’expliquer par le fait que les AVP sont souvent associés à des cultures par les

populations. En effet, à l’ombre des palmiers, il est plus agréable de travailler.

Pour les villageois, c’est l’élément «palmier» qui va être le plus significatif car il a une valeur

sacrée et historique. C’est pour cela qu’ils délimitent une UP «AVP». Pour nous, comme la

proportion de palmiers était très faible par rapport aux champs, nous avons classé cette zone dans la

catégorie «champs».

5.2. Evaluations des méthodes

Nous allons maintenant discuter des deux méthodes utilisées lors de ce travail. Nous allons proposer

une évaluation sur base de notre vécu et de nos observations.

51

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5.2.1. CNC5.2.1.1. Mise en place de la méthode

La méthode de cartographie non-participative par contraste nous propose des résultats assez

intéressants. D’un point de vue pratique, elle est évidemment plus difficile à mettre en place que la

méthode participative. L’utilisation d’outils comme le GPS rend la méthode inutilisable pour des

non-initiés. En effet, utiliser une telle méthode de manière autonome par les populations locales

serait terriblement difficile. Le GPS jouerait en quelque sorte le rôle d’élément limitant. Lescuyer et

Emerit (2005) ont travaillé sur un système d’information géographique (SIG) participatif. Pour eux,

ce type de système reste avant tout un travail qui est piloté par des experts extérieurs. On pourrait

alors imaginer des formations afin de «mettre les gens à niveau». Mais comme l’ont mentionné

Lescuyer et Emerit (2005), il y a risque dans ce cas de déclencher une marginalisation des gens

n’ayant pas eu la formation. Il y a risque également d’obtenir une mise à l’écart des villageois qui

ne reconnaissent pas le processus.

En plus de cela, cette méthode demande quand même une aide extérieure. Il n’existe pas de

documents officiels reprenant les limites territoriales entre plusieurs villages. Il faut donc à chaque

fois, du moins dans les premières étapes du travail, se faire accompagner par une personne

référence du village, comme le chef ou un neveu de celui-ci.

Une grande partie de la démarche dépend donc des affirmations proposées par ces personnes

références. C’est pourquoi il faut tenter, dans la mesure du possible, de recouper ses informations

avec plusieurs «personnalités villageoises.»

La méthode est une méthode de terrain. Il faut donc parfois agir avec les différents aléas que cela

peut engendrer. Il n’est pas rare de tomber sur des zones difficilement accessibles. C’est souvent le

cas dans les UP de forêts marécageuses. La présence de marécages est souvent limitante dans le bon

déroulement du processus.

Une autre difficulté provient du fait que cette méthode se base sur des critères visuels. Une petite

part de subjectivité entre en jeu lors du travail GPS. Ce constat se ressent très fortement au niveau

des bordures des unités paysagères. La démarcation entre deux UP n’est pas toujours très nette. Il

faut donc faire preuve de réflexion pour tenter d’être le plus précis possible dans notre analyse. Pour

certaines UP, la limite est très claire. Par exemple, un champ qui vient d’être sarclé présente un

contraste très fort avec la savane adjacente. A contrario, il est difficile de faire la différence entre un

champ non sarclé mais néanmoins toujours actif et par exemple une jachère. La délimitation se fait

donc sur base d’une interprétation de la personne qui met en place la méthodologie.

52

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Enfin, il aurait été intéressant de situer sur la carte CNC les différents cours d’eau et routes afin de

vérifier la disposition des taches par rapport à ceux-ci et de pouvoir comparer la position des

éléments linéaires et ponctuels des deux méthodes. Dans ce travail, ces données n’ont pas été prises

en compte car elles n’entraient pas dans le modèle « patch - matrix- corridor ». Néanmoins, en

traitant les résultats, nous nous sommes aperçu qu’il aurait été intéressant de le faire.

5.2.1.2. Confrontation aux populations localesComme précisé plus haut, la méthode CNC demande également une petite participation des

populations locales. Dans le village de Kinduala, nous avions la chance d’être entourés de villageois

qui connaissaient le projet Makala, ses objectifs et les différents intervenants. Les relations étaient

donc toujours très bonnes et la confiance qu’on nous accordait de plus en plus grandissante au fil

des jours passés au village.

Néanmoins, il fallait chaque fois se faire accompagner lors de nos visites. Cet accompagnement,

avant d’être simplement de nature indicative, est d'abord une sorte de sécurité. Dans la culture

Bakongo, on ne laisse pas n’importe qui pénétrer dans le territoire. Selon Lavialle et Rerolle (2011),

le monde sous-terrain est la propriété des ancêtres disparus du monde des vivants. Il faut donc

veiller à ne pas trop les déranger. Afin de s’assurer la parfaite collaboration des autochtones, il est

évidemment conseillé de respecter leurs traditions et coutumes.

Malgré cela, il n’en était pas toujours de même dans d’autres terroirs. Certains villageois ne

voyaient pas d’un bon oeil notre présence sur leur territoire. L’image du blanc colonial, venu piller

les ressources congolaises, est souvent encore fortement présente dans l’imaginaire collectif.

Il existe aussi des difficultés liées aux frontières entre les terroirs. Ces dernières ne sont

généralement pas claires. Il subsiste toujours une petite zone d’ombre concernant les limites

ancestrales. Des tensions peuvent exister entre différents villages. Le fait de voir une personne

externe parcourir ces limites munie d’un GPS peut attiser ces tensions. Se faire accompagner par

une personne de la région, permet ainsi de régler certains débuts de conflits simplement dus à la

présence d’étrangers sur le territoire.

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5.2.1.3. Traitement des donnéesLe traitement des données n’est pas une chose aisée. Il faut en effet être assez rigoureux lors de la

récolte de celles-ci. Il arrive parfois que certaines manquent, comme des points GPS. Cela peut être

dû à la difficulté d’accès de certains endroits. Il est alors intéressant de se demander si des outils, de

plus en plus performants, comme le logiciel Google Earth, ne seraient pas plus indiqués pour

effectuer les différentes cartes. En effet, le GPS offre une précision toute relative. Celle-ci se situe

aux alentours de 5-10m pour le mode «trace». Ajoutons à cela des endroits difficilement

accessibles, et nous pouvons parfois obtenir des écarts de précisions de l’ordre de 30 à 60m.

Malgré tout, utiliser des images satellites comme données est parfois risqué. Les régions étudiées

disposent rarement d’images récentes. Or, des changements d’affectation du sol sont parfois

extrêmement rapides, parfois à l’échelle d’une année. L’homme est capable de modifier l’échelle

temporelle d’un processus. Par exemple, passer d’un état «jachère forestière» à un état « champ »

peut être très rapide pour les populations.

Il faut donc, pour pouvoir mettre en place des plans de gestion performants, comme proposés par le

Projet Makala, des données relativement récentes. La partie « terrain » de la méthode CNC est donc

une excellente base de travail pour obtenir ces données. Cette méthode reflète assez bien la réalité

du terrain en terme d’unités paysagères.

Néanmoins, l’outils Google Earth est un excellent complément pour relever des données plus

statiques dans le temps. En effet, les routes et les rivières sont souvent des limites physiques des

terroirs étudiés. Et leur état varie très peu. Comme l’ont montré Mather et al. (1998), l’utilisation de

photographies aériennes permet de rendre compte de la situation exacte du territoire. Ce procédé

peut en outre régler certains conflits dus aux difficultés de démarcations. Cette tactique va dans le

sens de nos observations relatives aux tensions pouvant exister entre plusieurs villages par rapport à

leurs frontières.

5.2.2. CP5.2.2.1. Mise en place de la méthode

On l’a vu dans ce travail, cette méthode donne des résultats assez intéressants. Mais ces derniers

sont très variables. Ils dépendent de beaucoup de paramètres propres à l’application de la

méthodologie. Le simple fait d’utiliser un support en tissu rectangulaire lors de l’étape « maquette

participative » peut influencer la forme générale de la carte. Les acteurs locaux ayant tendance à «

remplir » ce tissu. On se retrouve alors avec une carte présentant une forme rectangulaire.

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Les différents éléments en bois de la maquette peuvent aussi jouer un rôle d’influence. Les

plaquettes en bois sont des éléments ponctuels. On a pu l’observer sur certaines cartes, les champs

sont souvent sous-évalués car ils sont assimilés à une unité et non à un ensemble surfacique.

Le vécu participatif doit aussi être pris en compte. Selon les expériences que les populations locales

ont eu par le passé, les résultats peuvent différer. Il faut avoir à l’idée qu’une mauvaise première

impression peut conditionner l’état d’esprit dans lequel les villageois vont se présenter. Si ils

viennent avec les « pieds de plomb » aux réunions, ils y participeront de fait beaucoup moins.

5.2.2.2. Rôles des intervenants

Comme son nom l’indique, la méthode participative demande la participation active des populations

locales concernées.

Dès lors, la mise en oeuvre du processus peut parfois être mise en difficulté par le rôle que prennent

les différents intervenants. Comme nous l’avons vu dans un chapitre précédent, la structure sociale

villageoise est organisée autour du chef. Celui-ci est véritablement le leader du groupe. Il est suivi

par tous.

C’est le chef du village qui est la personne de référence pour la réalisation de notre travail. C’est

vers lui qu’il faut aller pour programmer des réunions ou des visites de terroirs. Il faut passer par lui

pour donner rendez-vous à la population. En le négligeant, nous pourrions le vexer et compromettre

la bon déroulement de la méthode.

De plus, un chef qui ne se verrait pas concerné par le travail pourrait rendre laborieux la réalisation

des différentes étapes. En effet, en se désintéressant du travail, il envoie ainsi un signal fort aux

villageois. « Si notre chef n’y participe pas, pourquoi devrions-nous le faire...? ».

A contrario, un chef fort, actif et entreprenant peut être un formidable moteur pour de tels projets.

La structure sociale peut aussi poser problème d’une autre manière. Comme vu précédemment, ce

sont les neveux et non les fils du chef qui hériteront du terroir à la mort de celui-ci. Dès lors, ces

derniers ne sont généralement pas concernés par les travaux. En effet, pourquoi perdre du temps sur

des réunions participatives et sur de la gestion de terroirs qui, de toute façon, ne leur reviendra pas.

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Mais la difficulté ne vient pas seulement des populations locales. L’animateur de réunion peut aussi

avoir une importance dans les résultats. Il faut veiller à ne pas trop orienter les débats. En tant

qu’Européen, nous avons une vision du territoire assez différente des villageois. Nous l’avons vu

lors de la comparaison des différentes cartes. Une même zone pourra avoir différentes affectations

en fonction des personnes qui la décrivent.

La réussite d’un tel travail dépend donc fortement des personnes que nous allons rencontrer.

5.2.2.3. Véracité et utilisation des donnéesLa méthodologie participative est par définition très subjective. Cela peut avoir des conséquences

sur les résultats obtenus.

Il peut arriver que, pour des raisons une nouvelle fois conflictuelles, les acteurs locaux n’indiquent

pas exactement sur la carte participative la réalité du terrain. C’est un des inconvénients de la

méthode : les données récoltées sont généralement peu précises.

Dès lors, les limites territoriales (c’est là que se retrouvent la majorité des conflits) sont souvent

escamotées afin d’arranger les participants.

De plus, cette imprécision rend difficile une utilisation des documents. Il est très compliqué, voir

impossible, de placer des échelles sur ces cartes. Les distances sont donc peu respectées.

Les documents obtenus sont plutôt qualitatifs que quantitatifs. Néanmoins, ils rendent compte d’une

réalité culturelle propre à chaque terroir et propre à chaque population.

Un étude de Burini (2008) sur les savoirs traditionnels en Afrique subsaharienne indique que « la

cartographie participative, en abandonnant la logique rédactionnelle de type euclidien et prévoyant

une pluralité d’acteurs qui se prononcent sur leur territoire, montre une mise en scène de leur vision

de l’espace, une démonstrations des savoirs référés aux ressources et donc la restitutions des valeurs

identitaires ».

Les informations récoltées reflètent une valeur culturelle qui peut nous échapper en tant

qu’Européens. Les références ne sont pas les mêmes. Dès lors utiliser une cartographie participative

hors de son contexte est souvent laborieux.

Casti (2004) identifie la cartographie comme un « champ sémiotique ». Selon lui, les signes

présents sur la carte deviennent des « véhicules communicatifs » chargés de sens. Il admet

également que ces informations doivent être transmises via un interprète.

Les cartes participatives sont difficilement utilisables par des personnes extérieures n’ayant aucunes

informations sur le contexte.

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5.3. Comparaison des méthodes

Les deux méthodes qui ont été présentées ici ont toutes les deux leurs avantages et leurs

inconvénients. Nous allons en discuter dans cette section.

5.3.1. Avantages de la méthode CP

Comme le soulignent Mather et al. (1998), la cartographie participative est « un moyen de redonner

la parole aux populations locales ». Les acteurs locaux connaissent parfaitement leurs ressources. Ils

ont donc plus de chances de pouvoir participer de manière active dans l’étude de leur territoire.

Cette méthode donne donc accès à une source d’informations très intéressantes et généralement

propres aux populations ciblées. Vermeulen et Feteke (2007) ont utilisé une méthodologie de

cartographie axée sur l’occupation spatiale du territoire comme base de l’aménagement dans des

terroirs de l’Est du Cameroun. Ils ont obtenu comme résultat une cartographie des activités

humaines sur le territoire étudié. Cette dernière était unique et propre aux groupes ethniques

consultés.

De plus, la fonction ludique de la CP permet une appropriation directe par les villageois. Elle

permet également d’impliquer de manière rapide la majorité des acteurs locaux. En effet, elle

demande peu de préparation et elle peut se réaliser dans des laps de temps très courts.

C’est en outre une méthode qui a besoin de très peu de matériel et qui est peu onéreuse.

5.3.2. Avantages de la méthode CNCLe point fort de cette méthode est qu’elle offre des résultats fort proches de la réalité et souvent

précis. Ceux-ci peuvent souvent être complétés par des photographies aériennes ou des images

satellites.

La méthode permet également de palier le manque de données cartographiques des zones étudiées.

5.3.3. Désavantages de la méthode CPOn l’a vu dans ce travail, la méthode participative manque cruellement de précisions. Il est difficile

de placer des échelles sur les documents cartographiques produits. Les limites des territoires sont

souvent peu fiables.

De plus, on ne gère pas toujours les informations qui sont données par les populations locales. Il

peut arriver qu’elles soient fausses afin d’arranger les gens. Certaines peuvent être sur ou sous-

évaluées. On dépend donc fortement des acteurs locaux, de leur implication. Mais aussi de leurs

vécus, de leurs expériences participatives. Une réunion précédente qui s’est mal passée risque de

rendre les gens réticents à un nouvel essai.

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5.3.4. Désavantages de la méthode CNCIl est clair que les résultats obtenus sont peu utilisables directement par les populations locales. Les

cartes produites ne véhiculent pas les mêmes significations, les mêmes modèles. Elles ne

s’inscrivent pas dans les mêmes modes de réflexion.

De plus, la méthode demande du temps. Parcourir l’entièreté d’un terroir villageois ne se fait pas en

une seule journée. Il faut aussi du matériel spécifique comme un GPS et donc une personne sachant

l’utiliser.

Enfin, telle qu’elle a été présentée ici, la méthode est en fait une vision externe du territoire. Elle

reflète une réalité qui n’est pas celle perçue par les populations locales.

5.3.5. Adéquation entre les deux méthodes et la gestion territorialeIl ne faut plus démontrer maintenant que l’utilisation du savoir des populations locales est devenu

un enjeu crucial dans l’aménagement du territoire. La méthode participative semble donc être

parfaitement adaptée.

Néanmoins, on peut se demander quelle méthode de cartographie est la plus adéquate dans la

perspective d’un travail de coopération, comme par exemple la réalisation de plans simples de

gestion. Est-il mieux d’avoir une carte issue d’une méthode plutôt rigoureuse et facilement

quantifiable, mais une carte que les populations locales ne s’approprieraient pas ? Ou alors une carte

produite par les acteurs locaux, peu précise mais facilement utilisable par ces derniers ?

On l’a vu, la carte participative utilise plutôt des éléments ponctuels chargés culturellement et

servant de points de repères dans la représentation mentale des populations locales.

Sous cet angle, elle se rapproche plus de l’iconographie que de la cartographie. Selon Casti (2004),

en plaçant les informations sous une perspective culturelle on « iconise le monde ». Le système

iconique, tel que décrit par l’auteur permet à la carte de « transmettre les valeurs profondes du

territoire ». C’est cette transmission de valeurs qui va influencer notre décision dans le choix de

telle ou telle méthode.

Dans l’optique d’un plan simple de gestion, on peut imaginer que c’est la durabilité qui prime. Une

carte que les acteurs locaux comprennent sera moins vite délaissée et aura donc un impact plus

grand dans les processus décisionnels. Ce type de cartographie participative, qui prend en compte

les attentes des populations, est plus durable.

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Nous pouvons également réfléchir à la question de savoir si l’échelle à laquelle les méthodes ont été

appliquées est la plus judicieuse. Nous avons travaillé à l'échelle de terroirs villageois d’environ

200ha. Par comparaison, Vermeulen et al. (2011) ont étudié des finages villageois de 7230ha sur le

plateau des Bateke (RDC). Sur de telles surfaces, la méthode CNC serait extrêmement laborieuse. Il

faudrait parcourir des territoires immenses pour obtenir des cartographies précises. Or, la réflexion

d’aménagement mise en place par le Projet Makala porte sur l’ensemble du territoire du bassin

d’approvisionnement de la ville de Kinshasa et alentours. On peut dès lors se demander, si avec des

moyens différents et plus de temps, ce travail pourrait être appliqué à une plus grande échelle? On

pourrait à ce moment là proposer de travailler avec les agents des administrations locales

compétentes pour les parties de terrains plus complexes.

5.3.6. Perspective méthodologiqueNéanmoins, la méthode CNC n’est pas à exclure totalement. Nous pensons qu’elle peut être

complémentaire à la réalisation de cartes participatives. Elle permettrait d’offrir une base à la

discussion. L’étude de Malther et al. (1998) sur l’utilisation de photos aériennes dans la foresterie

communautaire au Népal va dans ce sens. Ces photos aériennes auraient pour effet de « déclencher

» la participation des gens.

Il serait dès lors judicieux de proposer une méthodologie transversale qui combinerait les deux

méthodes étudiées dans ce mémoire. Nous proposons une méthodologie en plusieurs étapes. La

première partie consisterait à réaliser une première réunion participative. Lors de celle-ci on

réaliserait une carte participative selon la méthodologie CP en évitant, lors de la phase « maquette »,

d’utiliser le fond en tissu. Cela permettrait de moins influencer les résultats et notamment la forme

des cartes produites.

Ensuite, on effectuerait une cartographie non-participative par contraste du terroir en combinant les

relevés GPS et les images satellites. On identifierait sur la carte les différentes unités paysagères

présentes sur le territoire, sans oublier les éléments linéaires et ponctuels.

Cette représentation serait par la suite utilisée dans une deuxième réunion participative afin de

comparer directement et avec les populations locales les deux cartes. Cette étape aurait pour effet de

susciter la discussion. On pourrait de cette manière comprendre pourquoi tel ou tel élément à été

ignoré ou pourquoi celui-ci a été exagéré. La carte participative serait de cette manière modifiée ou

confirmée selon les débats.

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La méthode aboutirait à une carte plus proche de la réalité que celles qu’on a pu observer dans ce

mémoire et qui conserverait les valeurs culturelles, propres aux populations consultées. Dans un

objectif de gestion territoriale, on disposerait d’une meilleure image de la ressource. Ce qui serait

bénéfique au processus décisionnel.

5.4. Vérification des hypothèses

Pour ce travail, nous avions émis 2 hypothèses.

La première était que la cartographie participative (CP) est une méthode cartographique qui

représente bien la réalité du terrain. A la vue des cartes obtenues, ce n’est pas exactement ce qu’il en

ressort. Ce mémoire à démontré que les résultats sont très aléatoires et ne correspondent pas

toujours à la réalité du terrain de la méthode de cartographie non-participative par contraste. Il a

également apporté la preuve qu’il y a une importance culturelle de la perception des terroirs par les

populations locales. Le territoire est décrit non pas comme il est mais comme les villageois pensent

qu’il est.

La deuxième hypothèse était que la cartographie participative est une méthode d’identification

paysagère adéquate en vue de la réalisation de plans simples de gestion du bois énergie à l’échelle

du finage villageois. Dans ce cas là, on peut confirmer l’hypothèse. La méthode CP est adaptée car

elle prend en compte les attentes et les perceptions des populations. Elle permet donc d’assurer une

appropriation des outils et une compréhension de ceux-ci. Elle a très clairement sa place dans la

réalisation de plans simples de gestion. Les populations s’investissent et permettent la durabilité de

tels projets.

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6. Conclusions

Ce travail avait pour objectif d’étudier la cartographie participative en la comparant avec une

méthode de cartographie non-participative par contraste issue de l’écologie du paysage. Les études

ont été menées dans la province du Bas-Congo en République Démocratique du Congo.

A l’issue de ce mémoire, nous avons conclu que le processus de cartographie participative est une

méthode qui est très facile à appliquer et qui demande peu de temps en terme d’utilisation. Mais en

se basant sur la vision des villageois, elle devient une méthode assez subjective. Elle représente une

image du terroir qui n’est pas exactement la réalité du terrain. Nous avons montré qu’il existe une

relation entre la perception des éléments paysagers et le vécu culturel des populations locales.

Il découle également de ce travail que la méthode de cartographie non-participative par contraste

est, elle, idéale pour récolter des données précises sur les terroirs villageois. Par contre, elle

demande du matériel adapté et du temps, ce qui la rend difficilement utilisable par les acteurs

locaux.

En définitive, cette étude à permis de montrer que ces 2 approches paysagères avaient des points

forts et des points faibles. Néanmoins, nous avons conclu que dans l’optique de la réalisation de

plans simples de gestion, comme ceux proposés par le projet Makala, c’est la méthode participative

qui est la plus adéquate. Elle permet une appropriation des outils produits par les acteurs locaux. Ce

qui tend à rendre l’action des processus décisionnels beaucoup plus durable.

Une méthode transversale, qui serait un mélange des deux méthodes étudiées, serait parfaitement

indiquée dans la gestion territoriale. Cela permettrait d’avoir un regard plus précis de la ressource

analysée tout en favorisant l’intégration des populations locales au processus.

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