analgésie postopératoire chez les patients ayant un syndrome d’apnée du sommeil

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Le Praticien en anesthésie réanimation (2010) 14, 303—308 RUBRIQUE PRATIQUE Analgésie postopératoire chez les patients ayant un syndrome d’apnée du sommeil Postoperative analgesia in patients with sleep apnea syndrome Valentina Faitot 1 , Hawa Keïta Service d’anesthésie, hôpital Louis-Mourier, Assistance publique—Hôpitaux de Paris, université René-Descartes, 178, rue des Renouillers, 92701 Colombes, France Disponible sur Internet le 13 novembre 2010 MOTS CLÉS Syndrome d’apnée du sommeil ; Opiacés ; Analgésie postopératoire Résumé Un patient adulte sur cinq pourrait être atteint d’un syndrome d’apnée du som- meil (SAS) non sévère et non diagnostiqué. Le diagnostic de SAS doit être évoqué sur des signes cliniques évocateurs lors de la consultation d’anesthésie, devant une intubation diffi- cile non prévue ou un nombre important d’apnées et d’épisodes de désaturation artérielle en oxygène en postopératoire. Le diagnostic est confirmé par la polysomnographie. Le SAS de type obstructif (SASO) est la forme la plus courante. Chez ces patients, le risque d’apnée est théoriquement majoré pendant toute la première semaine postopératoire en raison des per- turbations de l’architecture du sommeil, des conséquences spécifiques de certaines chirurgies sur les voies aériennes supérieures et de l’utilisation d’opiacés pour l’analgésie postopéra- toire. L’analgésie postopératoire doit privilégier les techniques d’anesthésie locorégionale et les analgésiques non opiacés. Pour autant, l’administration de morphine n’est pas formellement contre-indiquée dans ce contexte mais elle nécessite une surveillance adaptée et une prise en charge plus globale basée sur des éléments comme le positionnement en décubitus latéral ou en position semi-assise, l’oxygénothérapie et l’utilisation de la CPAP. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (H. Keïta). 1 Photo de l’auteur. 1279-7960/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.pratan.2010.10.002

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Page 1: Analgésie postopératoire chez les patients ayant un syndrome d’apnée du sommeil

Le Praticien en anesthésie réanimation (2010) 14, 303—308

RUBRIQUE PRATIQUE

Analgésie postopératoire chez les patients ayant unsyndrome d’apnée du sommeil

Postoperative analgesia in patients with sleep apnea syndrome

Valentina Faitot1, Hawa Keïta ∗

Service d’anesthésie, hôpital Louis-Mourier, Assistance publique—Hôpitaux de Paris,université René-Descartes, 178, rue des Renouillers, 92701 Colombes, France

Disponible sur Internet le 13 novembre 2010

MOTS CLÉSSyndrome d’apnée dusommeil ;Opiacés ;Analgésiepostopératoire

Résumé Un patient adulte sur cinq pourrait être atteint d’un syndrome d’apnée du som-meil (SAS) non sévère et non diagnostiqué. Le diagnostic de SAS doit être évoqué sur dessignes cliniques évocateurs lors de la consultation d’anesthésie, devant une intubation diffi-cile non prévue ou un nombre important d’apnées et d’épisodes de désaturation artérielleen oxygène en postopératoire. Le diagnostic est confirmé par la polysomnographie. Le SAS detype obstructif (SASO) est la forme la plus courante. Chez ces patients, le risque d’apnée estthéoriquement majoré pendant toute la première semaine postopératoire en raison des per-turbations de l’architecture du sommeil, des conséquences spécifiques de certaines chirurgiessur les voies aériennes supérieures et de l’utilisation d’opiacés pour l’analgésie postopéra-toire. L’analgésie postopératoire doit privilégier les techniques d’anesthésie locorégionale etles analgésiques non opiacés. Pour autant, l’administration de morphine n’est pas formellement

contre-indiquée dans ce contexte mais elle nécessite une surveillance adaptée et une prise encharge plus globale basée sur des éléments comme le positionnement en décubitus latéral ou

ygénothérapie et l’utilisation de la CPAP.

en position semi-assise, l’ox © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (H. Keïta).

1 Photo de l’auteur.

1279-7960/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.pratan.2010.10.002

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304 V. Faitot, H. Keïta

KEYWORDSSleep apneasyndrome;Opiates;Postoperativeanalgesia

Summary One over five patients scheduled for surgery may suffer from sleep apnea syndrome(SAS). SAS may be suspected during preoperative consultation in front of clinical symptoms, orafter an unexpected difficult intubation or because of several episodes of apnea and/or arterialoxygen desaturation in the postoperative period, and confirmed by polysomnography. Obstruc-tive SAS is the most common feature. The risk of apnea is increased in these patients during thefirst postoperative week due to sleep disturbances, consequences of certain surgical procedures,and administration of opiates for postoperative analgesia. Postoperative analgesia may indeedfavour regional anaesthesia and non opiaes analgesics administration. Opiates are not contra-indicated but required specific and careful monitoring and a global management of patientsincluding positioning (left lateral decubitus or half upright position), oxygen supplementationand the use of CPAP.© 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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ntroduction

e syndrome d’apnée du sommeil (SAS) est décrit comme unrouble du sommeil intrinsèque [1]. Le diagnostic cliniquee SAS n’est pas facile et on estime qu’il n’est pas éta-li chez la très grande majorité (> 80 %) des hommes et desemmes qui en souffrent [2]. De nombreux patients se pré-entant pour une chirurgie ont donc un SAS non diagnostiqué.l existe une corrélation entre SASO et obésité, l’obésitétant présente chez 60 à 90 % des malades ayant un SASO.es patients font plus de complications postopératoires que

a population générale [3]. Sur ces terrains où les pathologiesardiovasculaires sont très souvent associées, une analgé-ie efficace est particulièrement recommandée. Cependant,’utilisation des opiacés est limitée dans le contexte du SASOn raison d’une augmentation du risque d’apnée postopé-atoire et liée aux effets respiratoires de ces agents. Pourutant, en cas de douleurs sévères, les opiacés ne sont pasormellement contre-indiqués mais leur administration doittre contrôlée et particulièrement surveillée.

hysiopathologie

hez l’adulte, il existe trois types de SAS : obstructif (ouériphérique), central et mixte. Le syndrome d’apnée duommeil de type obstructif (SASO), est le plus courammentbservé. La prévalence du SASO sans somnolence diurne,été estimée à 24 % chez les hommes et 9 % chez les

emmes d’âge moyen, aux États-Unis (où le pourcentagee sujets obèses est toutefois plus important qu’en Europe)4]. Le SASO est la conséquence d’un collapsus pharyngéui survient plus particulièrement lors d’une augmenta-ion des pressions inspiratoires négatives, comme en cas’obstruction des voies aériennes. Il est caractérisé par despnées obstructives (interruption du flux aérien plus de dixecondes avec une persistance d’efforts inspiratoires) asso-iées à des hypopnées (réduction transitoire du flux aérienais sans arrêt complet). L’amplitude du volume courant

eut être réduite de plus ou moins 50 %, mais associée,oit à une désaturation artérielle en oxygène > 3 %, soit à unicroéveil). C’est le « réveil cortical » associé à une ouver-

ure de l’espace pharyngé qui met un terme à ces épisodes.a contraction du muscle genioglosse, qui permet la traction

rqqpi

ers l’avant de la langue et favorise l’ouverture des voiesériennes supérieures (VAS), diminue pendant le sommeilhez le sujet normal, disparaît presque pendant le sommeilrofond rapid eye movements (REM) et est abolie chez lesatients avec un SASO [5]. L’obésité majore ce phénomène.

Dans le SAS de type central, plus rare (10 % des patients),es apnées ne s’accompagnent d’aucun mouvement respi-atoire du fait d’une perte du contrôle respiratoire par leystème nerveux central. L’apnée mixte survient lorsqu’ilxiste une pause centrale suivie d’un blocage des effortsentilatoires.

iagnostic

Dans la population générale, l’incidence duSAS diagnostiqué n’est que de 2 % chez les

femmes et de 9 % chez les hommes, mais unadulte sur cinq pourrait être atteint d’un SAS

non sévère et non diagnostiqué [6].

On retrouve une obésité chez 60 à 90 % des maladesrésentant un SAS et il existe une corrélation significa-ive entre la gravité du SAS et l’importance de l’obésitéesurée par l’index de masse corporelle (IMC), le péri-ètre abdominal ou encore la circonférence de la hanche

t du cou [5]. La présence de ces éléments doit fairevoquer la possibilité d’un SAS et proposer un dépistagear questionnaire en consultation d’anesthésie. La Sociétéméricaine d’anesthésie (ASA) propose un questionnaire deépistage, associant des signes cliniques (IMC > 35 kg/m2,irconférence du cou, anomalies craniofaciales, hypertro-hie amygdalienne, impossibilité de visualisation du palaisou) et des symptômes (ronflement, pauses inspiratoires,

éveil pendant le sommeil, somnolence diurne) [7]. Ce ques-ionnaire permet de sélectionner les patients nécessitantne polysomnographie pour confirmer et apprécier la sévé-

ité du SAS [7]. La sensibilité de dépistage du SAS par lesuestionnaires proposés dans la littérature (ASA check-list,uestionnaire de Berlin et questionnaire STOP) reste limitéeour les SAS non sévères (65—87 %), mais chez les patientsdentifiés comme à haut risque de SAS par ces question-
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Analgésie postopératoire chez les patients ayant un syndrom

naires, on retrouve une incidence élevée de complicationsrespiratoires postopératoires [8].

En peropératoire, la survenue d’une intubation dif-ficile non prévue peut être associée à un SAS etla surveillance postopératoire qui suit doit être adap-tée.

De même, un SAS doit être suspecté chez les patientsqui présentent des apnées et des épisodes de désaturationfréquents après administration d’opiacés ou de sédatifs ensalle de réveil [9].

La confirmation du diagnostic de SAS et l’appréciationde sa sévérité se font par la polysomnographie sur la basedu calcul de l’index d’apnées/hypopnées (IAH, nombred’apnées et d’hypopnées par heure de sommeil). En pré-sence de signes cliniques (somnolence diurne, existence deronflements, d’apnées pendant le sommeil. . .) le diagnos-tic est retenu quand l’IAH est supérieur à cinq. Le SASest classé comme léger (IAH entre cinq et 15), modéré(IAH entre 15 et 30), ou sévère (IAH > 30). Les apnées etles hypopnées sont responsables d’une hypoxémie, d’unehypercapnie et d’une fragmentation du sommeil, aveccomme conséquence un risque majoré de développer unehypertension artérielle, une augmentation de la morbi-mortalité cardiovasculaire et du risque de mort subite[10].

Problématique de l’analgésiepostopératoire chez les patients porteursd’un syndrome d’apnée du sommeil

Modification de l’architecture du sommeil enpostopératoire

En postopératoire immédiat, l’architecture du sommeil estperturbée par différents éléments dont la douleur, lesvisites nocturnes du personnel, le bruit, les changementshormonaux et métaboliques induits par la chirurgie. . .,avec comme conséquence une réduction de la durée etune fragmentation du sommeil pendant les premièresnuits postopératoires [9]. Les phases de sommeil pro-fond REM qui sont accompagnées d’une atonie musculairephysiologique (en particulier, du muscle génioglosse), dis-paraissent souvent jusqu’au troisième jour postopératoire.Puis, chez la majorité des patients, on observe unrebond du sommeil REM vers le troisième ou quatrièmejour postopératoire, avec une augmentation de la fré-quence et de la durée des apnées ainsi que des épisodesd’hypoxémie [11]. Le risque d’apnée est théoriquementmajoré pendant toute la première semaine postopératoire[12].

Majoration du risque d’obstruction des voiesaériennes supérieures

La chirurgie maxillofaciale et ORL (adenotonsillec-

tomie, vélopalatopharyngoplastie, chirurgie dupalais, plastie nasale) peuvent aggraver le SAS enmajorant le rétrécissement des VAS en raison del’œdème pharyngolaryngé présent en postopératoire[9].

lose

apnée du sommeil 305

onséquences de l’analgésie morphinique

es opiacés modifient l’architecture du sommeil et ontes effets dépresseurs respiratoires directs. Ces agentsugmentent les apnées postopératoires et le risque deomplications respiratoires chez les malades avec unAS. Durant la période postopératoire précoce, les effetsépresseurs centraux des agents utilisés pour l’anesthésiehypnotiques, en particulier, les benzodiazépines, opia-és) se surajoutent à ceux de la morphine utilisée pour’analgésie postopératoire. Des doses thérapeutiques deorphine augmentent le stade 2 superficiel des phases de

ommeil non paradoxal (NREM), diminuent les stades pro-onds 3 et 4 du sommeil NREM et la phase REM de sommeilrofond. Le mécanisme impliqué dans ces phénomènesemble être dépendant du taux d’adénosine (un somnogènendogène) dans la formation réticulaire pontique et la sub-tantia innominata de la base du cerveau. L’exposition dees zones aux opiacés interrompt le sommeil par une dimi-ution du taux d’adénosine. Cet effet est réversible par laaloxone. L’administration concomitante d’un inhibiteur dea déamination de l’adénosine peut prévenir les troubles duommeil induits par les opiacés sur un modèle animal [13].es effets des opiacés sur le sommeil dépendent du site,u récepteur et de la dose. L’administration au niveau duoyau préoptique ventrolatéral d’agonistes � inhibe le som-eil, alors que l’injection d’agonistes � induit le sommeil.es phénomènes peuvent expliquer l’effet paradoxal de laorphine, qui peut induire une sédation mais aussi un état’éveil.

La dépression respiratoire induite par les opiacés estn effet direct prédominant sur les centres respiratoiresulbaires et a pour conséquence une augmentation desauses respiratoires, un retard de l’expiration, une irré-ularité du rythme respiratoire et une diminution duolume courant. L’allongement du temps expiratoire danse cycle respiratoire est la principale cause de réduc-ion de la fréquence respiratoire après administration’opiacés. L’administration de morphine chez des sujetsains induit une diminution de la réponse ventilatoire à’hypoxie et l’hypercapnie. Chez le malade porteur d’unASO, la réaction adaptative de réveil après des épisodes’apnées est retardée et l’on observe une diminution mar-uée de la réponse ventilatoire aussi bien à l’hypoxie qu’à’hypercapnie.

La voie (intraveineuse, intramusculaire, intrathécale,u péridurale) et la technique (analgésie contrôlée par leatient (ACP) ou contrôlée par l’infirmière) d’administratione semblent pas avoir d’influence sur les risques respi-atoires, spécifiquement chez les patients porteurs d’unASO [14,15]. Deux revues rétrospectives, portant sur unollectif de plus de 1000 patients chirurgicaux, indiquentu’une dépression respiratoire postopératoire peut surve-ir chez 1 à 2 % des patients sous analgésie autocontrôléear la morphine intraveineuse [16,17]. La présence de SASOst un facteur de risque identifié parmi d’autres facteursomme l’utilisation d’une perfusion continue de morphine,

’âge avancé et l’administration concomitante de sédatifsu d’hypnotiques [14]. Le risque de dépression respiratoireurvient entre la deuxième et la 31e heure après la misen route de l’analgésie [16]. Les opiacés utilisés en péridu-
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ale ont également des effets sur le sommeil et supprimentes mécanismes adaptatifs de réveil réactionnel à l’hypoxiet l’hypercapnie, liées aux obstructions des VAS. La bra-ypnée, signe de surdosage, est souvent absente, ce quietarde le diagnostic et la prise en charge. Des décès parrrêts cardiaques sur des apnées postopératoires ont étéapportés chez des patients avec un SASO, probablementn rapport avec l’administration d’opiacés en périmédul-aire sans surveillance appropriée [15]. Administrée parette voie, les effets dépresseurs respiratoire de la mor-hine peuvent survenir dans les six à 12 heures, mais ceersistent jusqu’à la 24e heure (en raison de la migrationéphalique). Les opiacés liposolubles ont des effets dépres-eurs respiratoires plus précoces du fait de leur résorptionystémique. Cependant, ces effets peuvent persister en cas’administration continue ou de réinjections. La ASA recom-ande d’utiliser des solutions d’anesthésiques locaux sans

piacé pour l’analgésie péridurale des patients ayant unASO [7].

tratégie de l’analgésie postopératoire

l existe peu d’études randomisées sur le sujet spécifiquee l’analgésie postopératoire du patient avec SASO. La lit-érature repose essentiellement sur des analyses de cassolés ou de petites séries, d’études rétrospectives ou d’avis’experts. On retiendra, cependant, que dans le contexteu SASO, en raison de l’influence qu’ils peuvent avoir sura physiologie respiratoire (cf. supra), la stratégie analgé-ique tiendra compte de la nécessité ou non de recourir auxorphiniques et si oui, on définira les conditions de leur

tilisation. Il est important de rappeler que même s’il estecommandé de ne pas recourir aux opiacés en premièrentention [18], le SASO n’est pas une contre-indication à leursage.

rivilégier l’analgésie locorégionalehez les patients porteurs de SASO, recevant de la mor-hine, Carley et al. ont rapporté une forte prévalence’épisodes hypoxémiques sévères dans les 16 heures suivant’administration : 456 épisodes chez dix des 16 patients étu-iés contre zéro épisodes chez 16 patients bénéficiant d’unenalgésie locorégionale [19]. Pour l’analgésie périmédul-aire, il est recommandé d’utiliser des protocoles avec desolutions d’anesthésiques locaux seuls sans morphinique [7].n termes de bénéfice—risque, les blocs périphériques etes infiltrations cicatricielles sont particulièrement intéres-ants.

voir recours à une analgésie multimodalene approche multimodale combinant des antalgiques deifférentes classes (paracétamol, AINS, néfopam, kétamine)st une stratégie adaptée aux patients ayant un SASO. Lesbjectifs de ces associations sont d’améliorer l’efficaciténalgésique, de réduire la consommation d’opiacés et ainsiéduire leurs effets indésirables respiratoires. L’utilisation

es AINS est fortement recommandée dans ce contexte7,20]. Des études récentes ont proposé l’administration’agonistes �2 adrénergiques : clonidine et dexmedetomi-ine. Chez le patient obèse avec un SASO, la clonidine enrémédication diminue les besoins en opiacés per- et post-

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V. Faitot, H. Keïta

pératoires [21]. L’administration par voie intraveineuse deexmedetomidine a même permis d’effectuer une analgé-ie sans opiacé en chirurgie bariatrique [22]. Pour autant, lesonnées de la littérature ne suffisent pas à l’heure actuelleour recommander l’utilisation systématique des agonistes−2 adrénergiques chez le patient souffrant d’un SAS.

ntégrer l’analgésie postopératoire dans une prisen charge globale du patientn certain nombre de mesures simples permettent de limi-er les risques d’apnée en postopératoire :

positionner les patients en décubitus latéral pourdiminuer le collapsus du pharynx au cours du cycle res-piratoire, du fait d’une anesthésie résiduelle [23] ;utiliser la CPAP (pression expiratoire positive continue)très précocement en postopératoire [10]. Certaines situa-tions peuvent rendre plus difficile l’utilisation de la CPAPen postopératoire : hypoxie, agitation, douleurs pouvantdiminuer la coopération du patient ; sonde nasogastrique ;chirurgie nasale. . . ;administrer systématiquement de l’O2. Cependant, mal-gré l’apport supplémentaire d’oxygène, l’hypoxie n’estqu’incomplètement corrigée chez les patients porteursd’un SAS. Le seuil de réponse centrale à l’hypoxieliée aux obstructions des voies aériennes reste élevéet l’hypercapnie associée persiste. Les épisodes récur-rents d’hypoxie liée aux apnées, aux atélectasies et àl’hypoventilation peuvent être masqués et le diagnos-tic retardé [9]. L’oxygénothérapie doit être associée à laCPAP lorsque celle-ci est nécessaire (notamment lorsquele patient est ainsi traité en préopératoire et vient avecson propre matériel). L’apport d’oxygène se fera jusqu’àce que le patient soit capable de maintenir en air ambiantle niveau de saturation en oxygène qu’il avait en préope-ratoire.

ù et comment surveiller les patients ayant unyndrome d’apnée du sommeil ?’environnement (hospitalisation standard, salle de sur-eillance post-interventionnelle [SSPI], unité de soinsntensifs continus, unité de réanimation) et la surveillancemonitorage continu de la SaO2 ; surveillance régulière dea fréquence respiratoire, du niveau de sédation et desonflements du patient) dépendent de plusieurs facteurs :ecours aux opiacés en postopératoire, sévérité du SASO,MC, pathologies cardiopulmonaires associées, complianceu patient à l’utilisation de la CPAP, caractère invasif dea chirurgie. En fonction de la présence et de la sévéritée ces facteurs, les attitudes varient et certains auteursroposent des conduites à tenir [5,10,23,24] (Tableau 1 etig. 1). Quoi qu’il en soit, des règles de base doivent êtreespectées pour limiter le risque de dépression respiratoire7,24] : ne pas viser l’obtention d’une analgésie complèteui peut précéder le surdosage, ne pas programmer deode perfusion continue avec l’analgésie autocontrôlée

t prévoir une période réfractaire plus longue, adminis-

rer de l’oxygène en continue tant que le patient n’estas capable de maintenir sa saturation en oxygène dease en air ambiant, initier la CPAP immédiatement enostopératoire, surtout si le patient bénéficiait de ce trai-ement en préopératoire, ne pas associer d’agents sédatifs
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Analgésie postopératoire chez les patients ayant un syndrome d’apnée du sommeil 307

Tableau 1 Recommandations pour la surveillance postopératoire des patients avec syndrome d’apnée du sommeil detype obstructif sévère [23].

Unitéd’hospitalisationsans monitorage

Unité d’hospitalisationavec monitorage de laSaO2

SSPI ou USIC avecmonitorage de laSaO2

CPAP (+)Opiacés (−) Acceptable Souhaitable Non nécessaireOpiacés (+) Non recommandé Acceptable Souhaitable

CPAP (−)Opiacés −, voie nasale + Acceptable Souhaitable SouhaitableOpiacés −, voie nasale − Non recommandé Non recommandé SouhaitableOpiacés (+) Non recommandé Non recommandé Souhaitable

CPAP : continuous positive airway pressure ; SaO2 : saturation en oxyunité de soins intensifs continus.

SAS10

SAS connu chez le patient

nCAP

Oui Non

Bonne utilisation

MorphineOui Non

Salle d’hospitalisation*Non Oui

Salle d’hospitalisation SSPI 24h + SaO2 ± O2

Figure 1. Proposition de prise en charge postopératoire chez lespatients porteurs d’un syndrome d’apnée du sommeil [10]. nCPAP :nasal continuous positive airway pressure ; SaO2 : saturation en oxy-

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198—205.[13] Nelson AM, Battersby AS, Baghdoyan HA, Lydic R. Opioid-

induced decreases in rat brain adenosine levels are

gène ; SSPI : salle de surveillance post-interventionnelle.

(benzodiazépines, barbituriques. . .) et favoriser la positionlatérale ou semi-assise plutôt que le décubitus dorsal.

Conflit d’intérêt

Les auteurs n’ont aucun conflit d’intérêt à déclarer.

gène ; SSPI : salle de surveillance post-interventionnelle ; USIC :

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