travail domestique et genre annie dussuet sociologue université de nantes - gtm/cnrs - france

Post on 03-Apr-2015

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Travail domestique et genre

Annie Dussuetsociologue

Université de Nantes - GTM/CNRS - France

Les services domestiques : un gisement d ’emplois ?

• un secteur riche en emplois potentiels

- des services qui ne peuvent être délocalisés

- une faible productivité

• une demande en croissance- augmentation du niveau de vie

- vieillissement de la population

- augmentation de l ’activité salariée féminine

Mais des emplois précaires : comment envisager leur développement positivement ?

• au cœur de la division sexuelle du travail

• des emplois de femmes de mauvaise qualité

• travail domestique et espace privé

Pour un espace public de travail domestique

« Travail domestique » : une expression ambiguë pour 2 situations différentes :

• Des femmes qui effectuent dans leur propre foyer, des tâches non rémunérées à destination de leur propre famille

• Des femmes salariées pour effectuer le même type de tâches au domicile de personnes qui leur sont a priori étrangères

1- Au cœur de la division sexuelle du travail

Mais un point commun :

un travail de femmes• dans les familles, 80 % des tâches domestiques les plus

essentielles (hors jardinage et bricolage) sont effectuées par les femmes. (Enquête emploi du temps, INSEE, 1999)

• du côté du travail salarié, 98 % de femmes dans les services directs aux particuliers délivrés à domicile (Enquête emploi, INSEE, 2002).

La division sexuelle du travail assigne

toujours prioritairement aux femmes le travail domestique, gratuit ou salarié.

Mais une nouvelle division du travail entre femmes apparaît

Hausse de l’activité salariée

des femmes

La demande de travail domestique salarié augmente

Il y a une externalisation du travail domestique, mais pas de modification de la division sexuelle du travail.

Une avancée vers l ’égalité hommes-femmes ?

Oui car le développement de

services à domicile permet aux femmes désormais fortement scolarisées et diplômées d’envisager une carrière sur un mode masculin (éviter le « plafond de verre »)

Non

car les emplois offerts aux femmes dans ces services sont particulièrement précaires, mal reconnus, et mal rémunérés

2- La « mauvaise qualité » des emplois de service à domicile *:

• des contrats de travail atypiques : le gré à gré...- des employeur-se-s non professionnels : respect du droit ?

- les aléas biographiques du contrat

- des contrats multiples : une salariée/plusieurs employeurs, comment concilier ?

• des temps « très partiels »… des salaires très partiels aussi

- 30% des femmes travaillent moins de 15 h par semaine (enquête emploi 2002, INSEE)

- Salaire médian : 457 euros (enquête emploi 2002, INSEE)

… des salaires « de femme » : ils ne permettent pas l ’autonomie économique, ils supposent une inscription identitaire alternative à celle de

salarié comme épouse et/ou mère...* il ne s’agit ici que des emplois « déclarés »

• Une qualification mal reconnue- ces emplois sont accessibles sans formation, sans diplôme,

- les utilisateurs considèrent généralement que ce n ’est pas nécessaire

puisque « toutes les femmes savent faire la cuisine, le ménage, les courses, élever les enfants, et prendre soin des personnes âgées »…

la preuve ? « elles le font gratuitement chez elles »

La qualification des travailleuses domestiques est ramenée à un ensemble de « qualités personnelles », identifiées à des qualités féminines innées.

Travail domestique et espace privé• une logique du don ...- obligation de donner, rendre et recevoir (Marcel Mauss)

- qui impose de ne pas compter

- pour assurer le lien d’amour dans le groupe

• … qui rend invisible le travail domestique - on ne le voit que quand il n’est pas, ou mal fait

-une partie essentielle est invisible (charge mentale, préoccupation)

- il n ’est jamais défini : qu’est-ce que « prendre soin de ses enfants »? Qu’est-ce que « faire le ménage »?

Autant de familles, autant de réponses… (même si les normes culturelles sont déterminantes)

• Du travail ? Ou de l ’amour ?

Surtout, le travail domestique ne peut pas être dit, nommé comme travail :

- il ne peut pas être défini

- s ’agit-il bien même de travail ?

Ce doute sur la qualité de travail se retrouve quand le travail domestique

est salarié

• Confusion entre espace privé et espace public

- le travail salarié, même domestique appartient à l ’espace public, puisqu’il découle d ’une relation marchande et non d ’une relation de don : on doit pouvoir compter son travail quand on est salariée.

- mais les salariées domestiques peinent à faire reconnaître ce qu’elles font comme du travail, à le compter comme tel :

- cadre domestique

- relations interpersonnelles

- travail « d ’aide » auprès des personnes âgées

En conclusion : Nécessité de création d ’un véritable espace public de travail au sein même du domicile privé

- des possibilités de professionnalisation dans le secteur (enquête sur les services à domicile aux personnes âgées dans les Pays de la Loire- France, 2002)

. Durée de travail au moins à mi-temps

. Reconnaissance de qualification

.Collectif de travail

- nécessite la médiation d ’un organisme employeur (distinct de l ’utilisateur) soucieux de la qualité des emplois proposés

. Définition du travail à réaliser

. Reconnaissance de la qualification nécessaire (ex des travailleuses familiales)

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