prÉcipitations atmosphÉriques
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Research Collection
Doctoral Thesis
Le Cycle des précipitations atmosphériquesessai d'une formule donnant l'écoulement en fonction desprécipitations
Author(s): Lugeon, Jean
Publication Date: 1928
Permanent Link: https://doi.org/10.3929/ethz-a-000097127
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ETH Library
LE CYCLE DES
PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
NEUCHATEL
PARIS
Dunod, éditeur, 92, rue Bonaparte (VIe)
Le Cycle des
Précipitations Atmosphériques
1. Etudes d'hydrologie dans la région des Alpes.2. Essai d'une formule donnant l'écoulement en
fonction des précipitations.
THÈSE
présentée à l'Ecole Polytechnique Fédérale, Zurich,
pour l'obtention du grade de Docteur es sciences techniques
PAR
JEAN LUGEON
Ingénieur civil diplômé E. I. L.
de CHEVILLY (Vaud)
N° 496Rapporteur: Prof. E. Meyer-Peter
Corapporteur : Prof. Dr F. Machatschek
NEUCHATEL
IMPRIMERIE PAUL ATTINGER S. A.
1928
Imprimé en Suisse.
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A mon père
Monsieur MAURICE LUGEON
Professeur de Géologie à V Université de Lausanne
Correspondant de V Institut
en témoignage de
profonde reconnaissance.
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Le Cycle des
Précipitations Atmosphériques
INTRODUCTION
Parmi les problèmes économiques de la vie moderne, celui
de la houille blanche joue un rôle de tout premier plan. Avec
le développement considérable des réseaux transportant
l'énergie électrique se posent une série de nouvelles questions,
parfois fort compliquées à résoudre dans un pays accidenté.
Soit au point de vue technique ou financier, l'exploitationrationnelle de la force hydraulique qui descend de nos mon¬
tagnes réside dans la conjugaison des usines au fil de l'eau,
avec les bassins d'accumulation du Jura et des Alpes. Les
centrales électriques, assimilables à de véritables organismesvivants, ne peuvent prospérer, dans de bonnes conditions,
que si elles sont parfaitement adaptées aux conditions cli¬
matiques. La variabilité de ces dernières ont mis plus que
jamais en évidence, dans le cours de ces dernières années,
la nécessité de l'accumulation. Pendant les sécheresses de
l'hiver 1924 et du printemps 1925, plusieurs compagnies de
distribution — faute précisément de réserves — furent ré¬
duites à restreindre le courant de leurs abonnés dans de
8 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
larges mesures. Le Conseil fédéral avait même préparé un
décret, pour éviter qu'en cas de prolongation de cet état des
choses, des conflits ne prennent naissance.
Est-ce une utopie que de songer, dans ce cas, à une ré¬
glementation pour défendre les intérêts des consommateurs
contre les contingences de la nature ?
Un certain nombre de points paraissent, aujourd'hui déjà,susceptibles d'être améliorés. L'idée de baser l'exploitation
hydroélectrique sur les précipitations atmosphériques peutfaire sourire. Car la pluie est un élément fort variable.
Néanmoins, depuis la guerre, il a paru utile à maintes com¬
pagnies de suivre cette idée de très près. Quelques pays
d'Europe possédant des services hydrographiques organisés
pour la surveillance des crues des grands fleuves, ont institué
déjà des offices d'avertissements aux usines hydroélectri¬
ques. Ne s'agirait-il, en Suisse, que de prévision à brève
échéance ou simplement de renseignements télégraphiquessur lesquels l'exploitant pourrait se baser en toute sécurité,voilà déjà une raison suffisante pour chercher à étudier
les corrélations de la quasi puissance instantanée, avec les
variations des précipitations dans les diverses régions des
Alpes.L'industrie de la houille blanche réclame aujourd'hui de
l'hydrologie des chiffres précis. Et le problème se pose ainsi
sous deux faces : la connaissance des écoulements moyens,
nécessaire pour déterminer l'équipement des chutes, et le cal¬
cul des écoulements immédiats et réserves naturelles sous
forme solide et liquide, pour tirer le rendement maximum
des chutes aménagées.Si les données pluviométriques ne sont pas directement
nécessaires pour résoudre le premier de ces points, le second,
par contre, implique une connaissance approfondie du méca¬
nisme hydrologique. Il n'est d'ailleurs pas superflu de véri¬
fier les écoulements moyens à l'aide de la pluviosité. De telles
investigations révèlent souvent des anomalies intéressantes,
qui échapperaient sans cela.
INTRODUCTION 9
L'idée qui domine dans ce travail est de poser les premiersjalons dans le domaine peu exploré de l'hydrologie dynamiquede la région des Alpes. Pour arriver à un but quelque peu
utile à l'ingénieur il a fallu commencer par examiner les
bases de tout calcul, c'est-à-dire critiquer la valeur des
observations et faire surtout l'examen des possibilités de
calcul. C'est l'objet de la première partie où, après un bref
rappel de connaissances élémentaires, sont décrits aussi
abrégés que possible, la plupart des phénomènes inhérents à
la pluviométrie, aux erreurs de mesure, à la répartition et à la
dynamique des précipitations, aux phénomènes connexes,
évaporation et condensation, et enfin, pour compléter le
cycle, aux principales caractéristiques du ruissellement et
des infiltrations. Indépendamment de quelques idées et for¬
mules nouvelles, ces chapitres répondent, autant que faire
se peut, à une mise au point, étayée sur les plus récentes
publications. Ils sont illustrés de tableaux de chiffres et obser¬
vations de divers auteurs, pouvant servir, à la rigueur aussi,
pour des calculs de détail.
Fort de ces prémisses, il a été possible d'aborder dans la
deuxième partie, le problème principal : le calcul des écoule¬
ments en fonction des précipitations.Dans beaucoup de vallées des Alpes existent des cours
d'eau dont on ignore les débits exacts, faute ou insuffisance
de jaugeages. Par contre, les précipitations, grâce à leur
croissance souvent très régulière selon les versants, sont
mieux connues. Quelques collecteurs des bassins préalpinsse prêtent à des études assez précises sur la dynamique du
cycle des eaux météoriques. La découverte des lois de leur
régime hydrologique permettra donc de prévoir dans une
bonne mesure les écoulements ignorés de cours d'eau non
jaugés.
10 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
L'interprétation des données limnimétriques et pluvio-
métriques d'un des grands bassins préalpins conduisit à une
formule hydrologique générale, donnant le module annuel
d'écoulement ; une autre relation algébrique appelée for¬mule de transposition, a permis d'adapter la première à toutes
les régions de la chaîne alpine'et même à des latitudes plusbasses.
Ces méthodes de calcul ont été vérifiées sur une dizaine
de cours d'eau du type fluvial préalpin, c'est-à-dire ne com¬
prenant pas de glaciers. Les comparaisons prouvent qu'avecun nombre restreint d'observations pluviométriques, on
obtient des résultats satisfaisants.
Le détail de la formule hydrologique glaciaire n'a pu être
établi, faute de matériel d'observation suffisant. Mais elle
diffère peu de la précédente, quant à son principe.De la quantité d'eau écoulée chaque année, et calculée
avec les méthodes préconisées, dérive le module moyen,
indispensable pour projeter une installation hydroélectrique.Une incursion dans le domaine de l'hydrologie pure,
— où
sont traitées les corrélations entre les précipitations et leur
ruissellement immédiat — fait entrevoir la possibilité des
prévisions de débit, basées sur la notion nouvelle de moment
d'infiltration. C'est le développement des quelques idées de
ce chapitre, qui doit, semble-t-il, amener l'hydrologie à de¬
venir une science indispensable à l'exploitation rationnelle
de la houille blanche.
Puisse ce modeste travail contribuer tant soit peu à la
solution des problèmes techniques et économiques que sou¬
lève la Science de l'Eau, dans l'intérêt du pays.
Lausanne et Zurich, 1925-1926.
PREMIÈRE PARTIE
CHAPITRE PREMIER
Considérations générales et définitions
Afin d'éviter toute confusion entre les expressions diverses
et quelquefois synonymes employées dans le langage courant
de la technique, et aussi pour éviter toute équivoque sur le
vocabulaire que nous avons employé, nous donnons ici
brièvement un certain nombre de définitions indispensables.Les symboles qui figurent dans les formules sont résumés
dans la liste suivante :
NOTATIONS
P hauteur des précipitations mesurées pendant un espace de temps
quelconque (mm., cm., m.).
P0 hauteur de précipitation définie.
P,„ hauteur de précipitation moyenne annuelle.
A densité des précipitations.N hauteur des précipitations neigeuses (mm., cm., m.),
v indice de nivosité.
Q débit des eaux d'une manière générale (m3/sec., lit. /sec).
Qmoj/ débit caractéristique moyen.
Qé débit caractéristique d'étiage.
12 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
QH module d'écoulement exprimé en débit par unité de surface de
bassin d'alimentation.
H hauteur annuelle d'écoulement ou module d'écoulement (mm.,cm., m.).
q débit des eaux en lit. /sec. /km2.G capacité glaciaire d'écoulement (débit ou module).D coefficient d'écoulement exprimé en %.E évaporation en général (équivalent à la hauteur d'une tranche
d'eau évaporée dans l'air), (mm., cm., m.).E|3 perte brute, assimilable à une évaporation, appelée aussi perte
apparente (mm., cm., m.).
E„ perte nette par évaporation (mm., cm., m.).E0 évaporation ou perte nette maximum (mm., cm., m.).E). évaporation hydrologique (mm., cm., m.).E? évaporation physique (mm., cm., m.).Ev évaporation de la neige (mm., cm., m.).7) indice d'évaporation.C condensation ou précipitations occultes (équivalent delà hauteur
d'une tranche d'eau condensée), (mm., cm., m.).T température en degrés centigrades.t en indice signifie température.B pression barométrique (mm.).p pression ou tension de la vapeur d'eau.
e % humidité relative de l'air.
p porosité des roches.
1 infiltration (équivalent à une hauteur d'une tranche d'eau
infiltrée dans le sol), (mm.),
y coefficient d'infiltration [Lauterburg].(a coefficient de perméabilité du terrain [Porchet].K coefficient de filtration de Darcy.t, hauteur capillaire.Ab moment d'infiltration.
x, y, z, X, Y, Z axes de coordonnées.
Y = F(X), y = f(x) fonctions.
2 somme.
e base de l'exponentielle = 2,7182...k, > constantes ou coefficients d'une manière générale.S, s surface (m2, km"2).L, l longueur.V volume (m3).h hauteur quelconque, en hydraulique hauteur de charge.0 instant ou espace de temps (seconde, minute, etc.).
CONSIDÉRATIONS GENERALES ET DEFINITIONS 13
J nombre de jours.u vitesse.
n nombre d'observations.
m moyenne de chiffres ou d'observations.
moy., max., min., en indice, signifient moyen ou moyenne, maximum,minimum,
a en indice signifie année actuelle.
(x) en indice signifie année précédente,u en indice signifie année humide.
a en indice signifie année sèche.
e écart ou différence -f ou — d'une observation avec la moyenne
m, des observations d'un même facteur ou phénomène.R erreur affectant une mesure ou erreur affectant des calculs
relatifs à un phénomène.R0 erreur moyenne qui affecte une observation.
Ri erreur probable d'une observation.
Rm erreur la plus probable sur la moyenne arithmétique.Rc erreur à craindre sur la moyenne arithmétique.r facteur de corrélation.
A altitude au-dessus de la mer ou différence d'altitude entre deux
stations (mètres).£> centre de gravité topographique./2 centre de gravité hydrologique.
§ I. Eaux météoriques.
1. Instruments.
Les précipitations atmosphériques solides ou liquides sont
mesurées au moyen de pluviomètres de types divers, soit :
pluviomètre ordinaire, dont les indications se lisent direc¬
tement après leur remplissage ou dans un espace de tempsn'excédant pas 24 heures, soit : totalisateur, si le contrôle
n'est fait qu'à de grands intervalles, pouvant aller de quel¬
ques mois à une année.
On recueille les précipitations quelle que soit leur trajec¬toire, dans un pluviomètre à bord circulaire tranchant,maintenu horizontal. Elles sont mesurées directement en
hauteur d'eau verticale, au 1/10 de millimètre. Dans le cas
14 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
de la neige ou de la grêle, la mesure est la même. Son résul¬
tat se lit après avoir fondu lentement le contenu du récep¬tacle.
Une convention internationale a stipulé que les publi¬cations des observations pluviométriques se feraient tou¬
jours en millimètres arrondis.
Les appareils totalisant les précipitations possèdent un
vaste réservoir contenant un mélange abaissant très bas le
point de congélation de l'eau, en sorte que la neige qui y
pénètre soit immédiatement convertie en eau. L'évapora-tion est abaissée au minimum par une couche d'huile. Les
types divers que l'on rencontre sont tous construits sur le
modèle de Mougin, avec un cercle protecteur ou paravent
tronconique de Nipher, formant écran autour de l'embou¬
chure maintenue horizontale et empêchant le tourbillon¬
nement de l'air. Ces totalisateurs sont contrôlés dans la
règle, en Suisse, une fois par an, vers la fin de la périodeestivale.
L'interprétation des données pluviométriques donne lieu
aux définitions suivantes :
2. Répartition.
L'étude de la répartition moyenne des eaux météoriquessur une surface déterminée nécessite quelquefois, et plusspécialement pour la comparaison de réseaux à mailles
différentes, la connaissance du rapport pluvionivotopogra¬phique, qui est le quotient du nombre de pluviomètres par
la surface considérée en myriamètres carrés et en projectionhorizontale. Il est actuellement pour la France de 0,40 et
pour la Suisse, en 1923, deTry-qo
= 0,69. Ce chiffre est
relativement faible, et varie d'ailleurs beaucoup suivant que
l'on envisage les aires des bassins fluviaux ou les cantons.
Il présente avant tout un intérêt en donnant une orientation
sur le degré de précision dans le calcul du coefficient d'écou¬
lement.
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES ET DÉFINITIONS 15
Quelques valeurs du rapport pluvionivotopographiqueen Suisse.
Tab. 1
0,79
0,84 i
0,90
0,68
0,93
1,6
1,4
1,1
1,8
i
3. Grandeur et nature.
Les hauteurs des précipitations sont toujours publiéesdans les Annales des services météorologiques, sans distinguerleur nature,.en hauteur totale recueillie pendant un laps de
temps déterminé. Les mesures dans les stations pluvio-métriques se faisant tous les jours à 7 h. % du matin, on les
exprimera donc en hauteur par 24 heures, ou hauteur jour¬nalière. C'est là une qualification critiquable et qui ne permet
pas d'approfondir certaines recherches scientifiques. Mais
il ne peut d'ailleurs en être autrement puisque les instru¬
ments de mesure ne sont pas enregistreurs, et par conséquentne permettent pas de donner des hauteurs horaires. Certains
42Bassin du Rhône jusqu'à la Porte du Scex
54
13fessin et affluents jusqu'au lac Majeur
J l J15,5
Bassin de l'Aar mscru à BerneJ 4
30,213
Bassin de la Sarine jusqu'à l'AarJ 4
19,040
Bassin du Rhin aucomplet jusqu'à Sargans..
F J H 843,039
Bassin de la Limmat, des sources jusqu'à l'Aar24,313
Bassin de la Birse jusqu'au Rhin "TTrT
38Bassin de la Reuss jusqu'à l'Aar ———
34,231
Bassin de la Thur jusqu'au RhinJ M
16,9
16 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
services se contentent de publier des hauteurs hebdoma¬
daires, mensuelles ou annuelles.
NOn entend par indice de nwosité le rapport v = — de la
hauteur d'eau tombée à l'état de neige N, à la hauteur
d'eau totale neige et pluie P.
Les climatologistes de l'école française avec Angot, de
l'école allemande avec Hellmann, ont cherché à classer les
précipitations suivant leur intensité, leur hauteur, leur varia¬
tion journalière, saisonnière, etc., et à les rapporter à des
moyennes mensuelles, ou annuelles, calculées pour plusieursannées. Tous ces travaux intéressent plutôt le géographe ou
le botaniste.
4. Rapports.
Il est suffisant de rappeler ici ce que l'on entend d'une
manière générale par coefficient pluviométrique [1 à 5]. C'est
le rapport entre la quantité réelle de pluie tombée pendantun mois, à celle qui aurait dû y être mesurée, si la pluie eût
été uniformément répartie sur toute l'année. Ce coefficient
peut présenter un grand intérêt lorsque l'on applique la loi
générale de périodicité des précipitations pour la prévisiondes réserves d'eau dans un bassin d'accumulation. On peutainsi se faire une idée, par son application convenable au
calcul des probabilités, du bilan d'eau futur d'une instal¬
lation hydroélectrique pendant son exploitation. Un mois
sera normal, par exemple, lorsque le coefficient pluvio-métrique égalera 1, anormal par défaut de précipitations,lorsqu'il sera plus petit que 1, et anormal par excès, s'il est
supérieur à 1. Il a été fait diverses applications de ce coeffi¬
cient, non pas seulement à des mois de 30 jours, mais à des
périodes plus étendues ou plus courtes, qui caractérisent
souvent mieux des phénomènes hydrologiques.La grandeur de l'écart entre les coefficients pluviomé-
triques extrêmes d'une série d'années civiles, caractérisent
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES ET DEFINITIONS 17
le régime pluviométrique, d'une région déterminée [6]. Dans
les pays germains, le régime pluviométrique est défini de
préférence par la variabilité des précipitations. Cette notion
très simple exprime en % l'écart moyen annuel de la
moyenne annuelle des précipitations d'un grand nombre
d'années.
5. Représentation graphique.
La représentation ordinaire de la hauteur annuelle des
précipitations se fait sur la carte topographique, au moyen
de courbes isohiètes, limitant des surfaces d'égale hauteur
d'eau, calculées avec des moyennes s'étendant sur plusieursannées consécutives. On fait appel, pour dessiner ces cartes,
à divers procédés d'interpolation ou d'extrapolation, à des
considérations climatologiques, à des lois de variation, etc.
Ces cartes présentent un grand intérêt quand il ne s'agit que
de donner une orientation rapide sur les pluies d'un pays.
Mais elles ne sauraient jouer un rôle important dans les
études de détail, leur construction étant basée sur des
moyennes de données par trop variables dans le temps.D'une manière générale, nous utiliserons toujours avec de
grandes précautions les chiffres fournis par des moyennes
ou des statistiques, car cette dernière méthode d'analysecache presque toujours des phénomènes, ou mieux dit ne
permet pas de donner fidèlement la valeur des phénomènesphysiques réels.
6. Densité et débit des précipitations.
Afin de faciliter l'analyse des variations du débit des
cours d'eau en fonction des précipitations, et pour rendre
plus compréhensibles d'autres phénomènes de variation, il a
été introduit dans ce travail deux notions bien connues par
les travaux qu'elles ont suscités [6], mais nouvelles par
l'application mathématique que nous en ferons.
LUQKON — 2
18 PKÉCIPITA1IONS ATMOSPHÉRIQUES
Sans faire appel à la structure même de la pluie, nous défi¬
nirons sa densité à un instant quelconque, par l'expression :
vdV
A> 1 ' - i \P
A = -rr ou aussi d une manière plus générale Amo,y= ->
c'est-à-dire, pour la première expression, la dérivée de la
fonction P = F (0) que décrit un pluviomètre à flotteur enre¬
gistrant les hauteurs d'eau P en ordonnée et les temps 0 en
abscisse. La valeur \mov de la seconde expression, multipliée
par le temps 0, (seconde, minute, heure, jour), exprime pour
ce temps-là, le débit moyen des précipitations QP, en grandeurlinéaire. Le débit moyen réparti de la pluie, en centimètres
cubes par seconde, par exemple — donc sur un centimètre
carré de terrain — s'exprimera en affectant ce chiffre QP de
dVl'indice cm3/sec, si dans -jr on a fait P en centimètres et 0
en secondes. Cette valeur QP sera généralement utilisée en
débit moyen horaire et journalier, pour rester en connexion
avec les cours d'eau, dont on connaît généralement, par les
publications, le débit moyen journalier, ou le débit par se¬
conde et par kilomètre carré de bassin d'alimentation.
Le module pluviométrique exprime la quantité annuelle
d'eau tombée. Elle est donnée en millimètres de hauteur de
la tranche d'eau, appelée parfois tranche pluviale.
7. Facteur de corrélation.
Pour se rendre compte s'il existe une liaison statistique ou
physique entre deux phénomènes ou éléments X, Y, de
nature différente, comme par exemple les précipitations et
l'écoulement des cours d'eau, ou le ruissellement et la
perméabilité des terrains, on emploie quelquefois la notion
de facteur de corrélation r [p. 776, 7 et 8]. Ce chiffre se calcule
par la formule générale :
r=2(£x£y)
CONSIDÉRATIONS GENERALES ET DEFINITIONS 19
où tx et ey sont pour chacune des observations de X et de Y,les différences + ou — entre chaque observation X,, X2...Xn et Yj, Y2...Y„, et les moyennes arithmétiques respectives(X1 + X2 + ...XB) (Yt+Y2+...YJ . .
et de celles-ci, si les deuxn n
phénomènes sont observés n fois. Le facteur r exprime évi¬
demment la corrélation pour ces n cas seulement, r varie
entre -(- 1 et — 1 et donne donc l'ordre de grandeur relatif de
la corrélation liant les deux éléments. Quand il est + 1, les
variations des deux éléments X et Y sont parfaitementsynchrones, leur représentation graphique figure des courbes
parallèles. S'il est — 1, la corrélation est inverse, et pour
r = o, il n'y a pas de corrélation.
Le calcul des probabilités permet d'évaluer le degréd'exactitude de la corrélation, si les ex et eY suivent la loi
de Gauss, c'est-à-dire s'ils sont disséminés autour des
moyennes arithmétiques, comme le seraient des erreurs for¬
tuites dans le cas de n mesures d'un phénomène ou élément
invariable, par exemple la mesure d'un angle en topo¬
graphie.Le facteur r est donc entaché d'une certaine erreur Rr, qui,
pour tous les phénomènes hydrologiques et météorologiquesque nous envisageons ici, peut se calculer, les variations de
ces phénomènes autour de leur moyenne absolue, pour un
grand nombre d'observations, suivant précisément la loi
de Gauss.
Pearson, en développant ces calculs, a montré que l'erreur
la plus probable Rr, sur le facteur de corrélation r est :
0,6745(l-r2)
y n
On exprime souvent R,, en pour cent de r. Il est clair que
plus la valeur du quotient vr- augmente, plus la valeur
calculée de la corrélation s'approche du facteur de corré¬
lation vrai.
20 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
L'emploi des courbes de Gauss s'est aussi généralisé dans
les applications de la pluviométrie. Nous aurons l'occasion
d'y revenir. On lira avec profit, à ce sujet, les études récentes
de M. Montessus de Ballore [8].
8. Calcul des probabilités et des erreurs.
Il est nécessaire d'ouvrir ici une parenthèse au sujet de
l'emploi du calcul des probabilités et de l'application de la
théorie des erreurs dans les phénomènes hydrologiques.Que l'on ait à interpréter des moyennes de précipitations,
des coefficients pluviométriques, des coefficients d'écoule¬
ment, ou à rechercher d'une manière générale les lois quilient les phénomènes atmosphériques et l'écoulement sur le
sol, il faut, avant toutes choses, se rendre compte exactement
si les chiffres que l'on utilise répondent vraiment à des lois
physiques indépendantes, et ne sont pas des chiffres moyens.
En d'autres termes, on ne peut pas tirer de moyennes, des
lois physiques de détail. C'est malheureusement ce qui a été
fréquemment oublié par bien des auteurs, partisans acharnés
des méthodes de la statistique. Ainsi les coefficients d'écou¬
lement globaux s'étendant par exemple sur une année, tels
ceux publiés par divers instituts hydrographiques, pour ne
citer que ceux de Bavière et d'Autriche, ne répondent à
aucun phénomène physique réel, mais à un vaste ensemble
de lois.
Ces données renferment donc, sous un même chiffre, des
phénomènes souvent antagonistes ou plus simplement des
compensations négatives et positives, qui se surajoutantfinissent par donner un résultat remarquablement constant.
Ce n'est là d'ailleurs qu'une application de la théorie des
grands nombres. Mais comme il a été dit plus haut déjà, au
sujet des isohiètes, les moyennes ne sont toujours qu'uneorientation.
Voici d'autres suggestions intéressant les variations des
phénomènes météorologiques.
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES ET DÉFINITIONS 21
Angot, dans plusieurs études remarquables [2], a établi des
méthodes aussi simples que générales pour l'interprétationde tous les phénomènes à variation continue ou discontinue.
Il est toujours fait usage de deux genres de moyennes : la
moyenne géométrique, pour les phénomènes dits continus,comme les débits, la température, etc., et la moyenne
arithmétique, qui est essentiellement conventionnelle et quicherche à représenter par une quantité constante, une quan¬
tité variable qui oscille constamment autour de la premièreet produit le même effet total. Cette moyenne convient aux
phénomènes discontinus comme les précipitations, mais peut
s'appliquer aussi à ceux qui ont un caractère continu, comme
la nébulosité. Toutefois ce mode de représentation peut pré¬cisément conduire à de graves erreurs, s'il ne représente pas
une loi physique existante, ce dont il faudra se rendre compte
préalablement. Il y a un moyen simple d'y arriver, grâce à
l'application du calcul des probabilités.Si a, b, c,. . .
sont les valeurs successives de l'élément
variable considéré, m-a, m-b, m-c,... les écarts relatifs £
,, ,
a -f- b + c..., ,
autour de la moyenne simple m =,ou n est le
nombre total des observations, ±2j£|, la somme de tous les
écarts en valeur absolue, l'expression
n
est appelée l'écart moyen.
L'erreur moyenne qui affecte une observation est :
"• - * vSCette valeur revêt une certaine importance, car elle permet
de juger immédiatement s'il est intéressant dans tel ou tel
cas de pousser les opérations arithmétiques plus avant, ou
s'il est nécessaire d'introduire d'autres facteurs d'un ordre de
grandeur différent (par exemple % d'exactitude des hau¬
teurs limnimétriqués et évaporation).
22 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
L'erreur probable d'une observation est :
Uj = 0,6745. ï\0 = 0,6745 i/lÉl..
V n—1
L'erreur Rm la plus probable, de la moyenne arithmétiqueou erreur à craindre, est :
RiRra = -U- = 0,6745 i/_A£
\ n \ n [n- -1)
L'erreur à craindre sur la moyenne arithmétique, dans le
cas d'observations d'un facteur dont les variations sont
assimilables à des erreurs fortuites, est :
R, JZK>V n In- -1)
Avec ces quelques formules, il sera facile de se rendre
compte, par le calcul, de la valeur réelle de certaines moyen¬
nes ou statistiques auxquelles on a souvent attribué, par
manque de critique, un rôle injustifié.*
1 Un cas particulièrement intéressant pour nos études est la connais¬
sance de la loi des erreurs sur la moyenne arithmétique de la pluviosité,lorsqu'on ne possède qu'un nombre restreint d'années d'observations. La
moyenne arithmétique ne sera théoriquement exacte que pour un nombre
infini d'épreuves. Mais l'erreur est assez rapidement décroissante, pour
qu'il soit permis de considérer comme exactes des moyennes d'une
vingtaine d'années, déjà.Voici, par exemple, pour Genève, les erreurs à craindre sur les moyen¬
nes arithmétiques annuelles de la pluviosité, d'après la formule rappelée.
Années
d'observations de
la pluviosité à
Genève
n
Moyennearithmétiquede la pluvio¬sité en mm.
2\e\v
Erreur
à
craindre
en %V n(n—1)
en mm.
1876 à 1925 50 904,2 1 344 026 23,4 2,51901 à 1925 25 914,0 876 750 38,6 4,21915 à 1924 10 975,2 569 162 79,6 8,21921 à 1922 2 864,0 334 498 409,0 47,4
(1921 = année la >lus sèch 3 ; 1922 = année la plus humide, entre 1876 et 1925.)
Comme le montre ce tableau, la moyenne la plus approchée de la vé¬
rité est évidemment 904,3 mm., avec un doute de 2,5 %. Mais ce doute
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES ET DÉFINITIONS 23
9. Évaporation.
La loi hydrologique très grossière qui exprime l'évapora-tion comme étant égale à la différence en volume d'eau des
précipitations moins l'écoulement, entend sous le mot éva¬
poration tout ce qui ne s'écoule pas. Cette considération est
insuffisante, l'évaporation étant un phénomène complexe.D'une manière générale tout ce qui est sur la terre rend de
l'eau à l'atmosphère, et il n'est pas superflu de chercher à
classer qualitativement et quantitativement les volumes
d'eau évaporés dans les bassins que l'on étudiera.
Le problème de l'évaporation n'est aujourd'hui que posé.Il ne sera peut-être jamais résolu à complète satisfaction.
Néanmoins on connaît avec un certain degré d'approxi¬mation :
1° L'évaporation des surfaces d'eau immobiles des marais,lacs et lagunes [9], qui se détermine soit par la comparaisondes débits des émissaires et affluents, soit directement au
moyen d'appareils simples comme les atmomètres de Li-
vingston, les sissimètres, évaporomètres, la balance de Wild,
etc. Ces données instrumentales peuvent être contrôlées
par des formules compliquées tenant compte du déficit
hygrométrique, de la température ambiante et propre, de
l'agitation de la surface due au mouvement de l'air, etc.
Toutes ces formules sont d'ailleurs basées sur des lois phy¬
siques et expériences de laboratoire connues, comme la
théorie de Stéphan sur la diffusion des gaz et celle de la
tension superficielle des liquides [10].
est pratiquement plus faible, puisque la moyenne de 25 années ne dilïère
que de 10 mm. de celle de 50 années, c'est-à-dire d'environ 1 %.On voit aussi que la courbe des erreurs en fonction du nombre des
années d'observations est une hyperbole asymptotique aux deux axes de
coordonnées. En effet, pour une observation l'erreur est infinie ou indé¬
terminée, et pour un nombre infini d'observations elle est zéro.
En ce qui concerne la probabilité des années d'extrême sécheresse,M. Goutereau (Annuaire de la Soc. Météo, de France, 1921, 3e fascicule)a calculé que la pluviosité d'une année telle que 1921 ne pouvait se répéterque 13 fois en mille ans, ou 1 à 2 fois par siècle.
24 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
2° L'évaporation directe des cours d'eau, très difficilement
déterminable pour des torrents et ruisseaux, est mal connue
pour des fleuves importants et tranquilles.
3° La sudation des végétaux — données physiologiques et
biobotaniques, — déterminée soit par des expériences de
laboratoire (balance, cage de verre), soit directement par
des forestiers dans la nature, en fossoyant des auges autour
des arbres et en observant leur déperdition en eau, etc., est
un peu mieux connue, et permet aujourd'hui de calculer
avec une certaine exactitude la consommation des versants
recouverts de forêts [11].
4° Des données précises sur la transpiration des terres
nues, des terres herbeuses, des sables, des roches compactes
ou détritiques manquent presque complètement.
5° L'évaporation directe des neiges et des glaces déter¬
minée simplement par la comparaison des hauteurs de fusion
a fait l'objet d'intéressantes recherches en Suisse, publiéesdans les Annales de l'Institut Central Météorologique, en
1918.
Mais elles ont malheureusement été insuffisamment déve¬
loppées au point de vue mathématique pour qu'il soit possi¬ble d'en tirer des extrapolations quelque peu précises. Ce
facteur, avant tout en rapport avec la température et la
pression, intéresse le glaciologue et, par conséquent, l'hydro¬
logue qui étudie la haute montagne.Au problème de la vaporisation de la neige est lié celui de
la radiation calorique des surfaces couvertes de neige, ce
qui complique notablement le calcul de l'évaporation pro¬
prement dite. Toutes sortes de facteurs auxiliaires tels que
le vent et la nébulosité inobservables de nuit, interviennent ;
et, dans l'état actuel de nos connaissances, il est même im¬
possible d'édifier a priori une théorie qui aurait quelquechance de fortune [12 et 13].
6° L'évaporation de l'eau consommée par les êtres vi¬
vants dont la connaissance peut présenter un certain intérêt
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES ET DEFINITIONS 25
dans les sciences urbaines est extrêmement faible. Il n'y a pas
lieu d'en tenir compte [14].7° L'évaporation directe des précipitations sur les végé¬
taux a fait l'objet de recherches de la part des forestiers.
10. Condensation.
A cette place, il convient d'ajouter encore quelques mots
sur la condensation de la vapeur d'eau atmosphérique, sur
les surfaces liquides ou solides. On sait, en effet, qu'un peu
après la rosée, par ciel serein, et à certaines saisons, les cours
d'eau alimentés par des sources accusent une légère augmen¬
tation de débit, qui provient précisément de la condensation
occulte. Il en résulte que la loi grossière de l'hydrologie est
fausse si on ne lui adjoint pas ce terme bien défini. Jusqu'àces dernières années on n'avait guère tenu compte de la
condensation qui peut atteindre des valeurs considérables,
dépassant même en hauteur d'eau celle des précipitationsannuelles. En Suisse, la condensation est très variable sui¬
vant l'altitude à laquelle on la considère. D'une manière gé¬nérale, elle croît de la plaine aux sommets, à l'inverse de
l'évaporation. Les fluctuations des cours d'eau à régimepréalpin peuvent accuser des variations de débit allant jus¬qu'à 20 %, suivant qu'il s'est condensé peu ou beaucoupd'eau pendant la nuit. Pour les organismes glaciaires, cette
valeur augmente considérablement et peut dépasser 100 %.Il semble démontré, en tous cas, qu'il se condense presque
autant d'eau qu'il s'en précipite dans les pays montagneuxà climat maritime [15].
Il devient donc de première importance d'introduire ces
facteurs dans tous les calculs hydrologiques des bassins de
plaine ou de montagne, mais malheureusement ici encore
des données quelque peu précises manquent, et l'on est obligéde se contenter d'hypothèses, qui d'ailleurs, sont bien prèsde la réalité, comme nous aurons l'occasion de le montrer
26 PRECIPITATIONS \TMOSPHERIQUES
plus loin. La détermination expérimentale de la condensa¬
tion de la vapeur d'eau sur les terrains divers de la nature n'a
pas été entreprise à proprement parler. Mais on peut se con¬
tenter des méthodes de l'hygrométrie pour obtenir une
première orientation quantitative. Sur la neige ou la glacele problème est déjà mieux étudié, grâce aux expériences célè¬
bres de Ch. Dufour et F.-A. Forel au glacier du Rhône,
reprises il y a quelques années par d'autres auteurs. Les lon¬
gues séries d'observations de la température du sol à quel¬
ques centimètres de profondeur rendront pour le calcul de la
condensation sur les terres des services très appréciables. Il
faudrait les poursuivre dans des stations météorologiques de
haute montagne.
§ II. Ecoulement des eaux.
1. Débit et jaugeage.
Le débit des eaux qui s'écoulent dans les cours d'eau est
exprimé en litres par seconde ou plus fréquemment en mètre
cube par seconde. Les hauteurs limnimétriques qui servent
à la détermination des débits sont mesurées soit d'une ma¬
nière continue au moyen de limnimètres ou fluviomètres
(jaugeage par flotteur) ou d'une manière discontinue par
des échelles limnimétriques lues une, deux ou trois fois par
jour. Ces deux méthodes consistent à mesurer la hauteur
de la surface libre de l'eau courante, au droit d'un repèrefixe. Celui-ci est en amont ou en aval d'une passe ou profilde jaugeage dont la forme est déterminée avec exactitude.
Si, par suite de l'érosion ou de l'apport d'alluvions ce profilvarie, et que l'on ne puisse pas en corriger la forme, on pro¬
cède alors à de nouveaux jaugeages. Le débit se calcule
graphiquement au moyen de la courbe limnimétrique des
CONSIDÉRATIONS GENERALES ET DEFINITIONS 27
débits déterminée expérimentalement une fois pour toutes,et donnant, pour chaque hauteur d'eau du limnimètre, le
débit correspondant. Cette courbe se tire en principe de la
formule de débit Q = AS.U, où les AS sont un certain
nombre d'éléments partageant la section transversale S du
cours d'eau, et U la vitesse moyenne des filets liquides dans
chaque élément, obtenue expérimentalement surtout au
moyen du moulinet, et parfois au tube Pitot-Darcy, Ritter,de la Brosse, etc. Ce procédé de jaugeage qui est le plususuel, peut donner pour les cours d'eau suisses de moyenne
importance une exactitude de 2 % sur le débit. Des erreurs
notoires, provenant du fait que les échelles ou limnigraphessont placés parfois pour des raisons pratiques assez loin de
la passe de jaugeage, affectent les débits évalués à l'aide de
la courbe limnigraphique. Ces erreurs sont dues à des per¬
tes par évaporation ou infiltration ou aussi à des apports
étrangers au bassin.
Si l'on a affaire à un lit régulier, à alignement droit, à
section et pente connues, il est possible, en principe, de calcu¬
ler les débits par les formules de Chésy, Boussinesq, Lom-
bardini, etc., à condition de connaître suffisamment bien le
coefficient de rugosité du lit. Ganguillet et Kutter, Mougnié,Strickler et d'autres, ont donné des formules pour calculer
ce coefficient.
Les jaugeages sont aussi obtenus par la méthode chimiquede Boucher-Mellet et Collet [16 à 18], consistant à laisser cou¬
ler avec un débit rigoureusement constant une solution de sel
ordinaire dans un cours d'eau à écoulement tumultueux et
à effectuer la titration d'échantillons d'eau prélevés à une
certaine distance du lieu de mélange. La solution saline se
dilue proportionnellement au débit. Cette méthode simpledonne d'excellents résultats pour des torrents où le brassageest intense; par contre, elle est peu utilisable pour des largescours d'eau à écoulement régulier, comme les fleuves [19].La méthode classique pour calculer le débit de cours
d'eau passant par-dessus un déversoir, instituée par Bazin
28 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
[20] et développée par de nombreux auteurs, Bonnet,
Freese, Dariès, Rehbock, la Société Suisse des Ingénieurset Architectes, etc., permet d'atteindre une exactitude de
1 à 3 % pour des charges ne dépassant pas 60 cm. D'au¬
tres procédés de jaugeage, comme celui du venturi pour
les conduites forcées, du rideau d'Andersson pour des ca¬
naux à profil constant, de la méthode chronophotographi-
que des corps flottants sur la lame déversante [22], sont
moins appliqués.De ces différentes méthodes, aucune ne donne en somme
des résultats absolument parfaits pour des cours d'eau de
moyenne et de grande importance (débit 5000 à 6000 ou
plus m3/sec.). Néanmoins, elles suffisent pour les besoins
courants de la pratique. Il serait désirable que les services
d'État publiant les courbes limnimétriques et les débits
moyens journaliers, comme c'est le cas en Suisse, donnent
aussi des renseignements sur les % d'approximation avec
lesquels ces chiffres sont calculés. Il arrive, en effet, que cer¬
tains débits publiés soient affectés d'erreurs atteignant 20 %
[19, 26], ce qui rend tout calcul hydrologique impossible.La lecture d'une échelle limnimétrique ne peut guère se
faire qu'avec l'exactitude du demi-centimètre, à cause de
l'agitation constante de l'eau, sans compter les erreurs pro¬
venant du changement des observateurs et de leur équationpersonnelle.La Société Suisse des Ingénieurs et Architectes a fait pu¬
blier en 1924 des Normes de Jaugeages, ouvrage importantde mise au point, auquel on se référera.
2. Courbes et graphiques caractérisant les cours d'eau.
La courbe de régime donne à chaque instant le débit du
cours d'eau ; le débit instantané, horaire, journalier, hebdo¬
madaire ou mensuel est porté en ordonnée. L'étude comparéede ces courbes dessinées pour plusieurs années permet de
CONSIDÉRATIONS GENERALES ET DÉFINITIONS 29
définir le caractère du régime : torrentiel, fluvial, alpin ou en¬
core glaciaire, préalpin, pluvial [24 à 32]. Ces courbes sont
la base même de tout le problème de l'hydrologie. Elles don¬
nent aussi des indications précises sur l'année climatologique(sèche, normale, humide).On distingue sur la courbe de régime des débits d'hiver et
d'été, ainsi que des débits maxima de crue et minima d'étiage.Le débit caractéristique d'étiage est celui au-dessous duquel
le cours d'eau est descendu pendant dix jours au plus dans
l'année considérée.
Le débit caractéristique des hautes eaux est le débit qui est
dépassé pendant plus de dix jours par an.
Le débit caractéristique moyen ou débit minimum semi-
permanent, est celui au-dessous duquel le cours d'eau des¬
cend pendant six mois (180 jours) consécutifs ou non.
Le coefficient de débit est le rapport de la quantité d'eau
qui s'est écoulée pendant une période prise pour unité (mois)à celle qui se serait écoulée si l'écoulement avait été uniforme
durant toute l'année.
Pour l'établissement des projets d'usines hydroélectriqueson utilise le plus fréquemment les données suivantes :
Les débits moyens mensuels tirés directement de la courbe
de régime, donnant aussi le débit limite.
Les débits moyens extrêmes pour une année sèche, ce qui
représente le cas le plus défavorable pour l'utilisation. Ils
sont accompagnés, à titre de renseignement, des mêmes dé¬
bits pour une année sèche et une autre humide.
Les débits minima absolus et maxima absolus.
Le débit moyen annuel ou module qui est exprimé par la
somme des volumes d'eau écoulés, divisée par le nombre
de secondes d'une année.
La hauteur annuelle d'écoulement, représentant la hauteur
de la tranche d'eau qui s'écoulerait si le débit était invariable
et réparti sur tout le bassin du cours d'eau.
Le débit de six mois ou de neuf mois qui est le débit moyen
quotidien atteint ou dépassé pendant cet espace de temps.
30 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
L'étude détaillée de l'aménagement des cours d'eau né¬
cessite encore d'autres définitions. Les demandes de conces¬
sions doivent généralement être accompagnées de la courbe
des débits classés [19], déduite de la courbe moyenne des dé¬
bits ou courbe de régime. Elle a aussi été appelée courbe de
fréquence des débits et donne pour un débit convenu le nom¬
bre de jours consécutifs ou non pendant lesquels ce débit a
été atteint ou dépassé. Elle a comme abscisses les 365 joursde l'année, et comme ordonnées les débits. On y distinguefacilement aussi les trois périodes de l'organisme, soit les
basses, les moyennes et les hautes eaux.
Enfin, récemment, M. Coutagne [33] a introduit une défi¬
nition nouvelle : le coefficient d'irrégularité n des cours d'eau,
qui se calcule par la formule suivante :
Qh - Q<~
~^~
où Qmoy est le débit caractéristique moyen, Qé le dé¬
bit caractéristique d'étiage et QH le module, donné en
débit.
Le but que s'est proposé M. Coutagne est de remplacer par
des relations algébriques simples, les divers éléments de débits
qui entrent dans les projets des installations hydrauliques.La sus dite expression, qui n'est autre qu'une courbe para¬
bolique de degré n, permet de construire la courbe de fré¬
quence des débits de n'importe quel organisme fluvial,
lorsqu'on ne possède que les trois débits indiqués, et ceci avec
une exactitude industriellement suffisante. Le coefficient
d'irrégularité n varie d'une année à l'autre, mais il reste
semblable au cours des années, pour des organismes diffé¬
rents de régions assez étendues ; son emploi facilite, en une
certaine mesure, les extrapolations de rivières à débits con¬
nus, à des rivières voisines. En outre, il caractérise le degréde « torrentialité » d'un cours d'eau. En effet, plus les varia¬
tions de n sont grandes d'une année à l'autre, plus un orga¬nisme d'écoulement se rapproche du type torrentiel.
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES ET DEFINITIONS 31
Pour l'étude de la régularisation, et pour le calcul rapidedes capacités à donner aux réservoirs, la courbe des débits
cumulés présente des avantages précieux. Elle permettrade déterminer les disponibilités globales de l'eau pour la
création des bassins de retenue. Elle est construite en re¬
portant sur un système d'axes rectangulaires les temps0 en abscisses (par exemple les jours) et les débits Q cumulés
en ordonnées (jour après jour). Le débit instantané est
alors Q = -^- (tg. à la courbe), et le volume total de l'eau
écoulée entre deux temps quelconques 0o et 9,, est
r» 6i
Vu_0o=\ Q.dO.
Jô0La variation de la tangente en divers points de la courbe don¬
nera les excès ou les défauts d'eau dans le réservoir, dont le
volume est déterminé par une sécante tracée entre deux pointsfixés par des ordonnées distantes de 365 jours, par exemple.En combinant les courbes de divers cours d'eau à régimes
différents, il est aisé de trouver les solutions les plus écono¬
miques pour la conjugaison d'usines, et la valeur des puis¬sances diverses y relatives : puissance instantanée, journa¬lière, mensuelle, puissance moyenne continue, puissance
moyenne annuelle continue, etc.
Pour l'aménagement des cours d'eau à régime essentielle¬
ment glaciaire, MM. Boucher et Chenaux ont calculé des
diagrammes au moyen du coefficient d'écoulement, quipermettent de déterminer sans peine la puissance moyenne
installable (Bull, techn. Suisse romande).Pour comparer facilement les caractères du régime de
plusieurs cours d'e"au, les hydrologues ont introduit la notion
de courbe isoplète, donnant la durée des débits en % par mois.
Les divers problèmes qui se rattachent aux calculs hy¬
drauliques des installations électriques et autres sur cours
d'eau, ont fait dernièrement l'objet d'une mise au pointdu professeur Meyer-Peter (voir Schw. Bauzeitung 1926).
32 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
§ III. Précipitations atmosphériques et écoulement.
1. Définitions.
Les différents rapports entre les précipitations (abstrac¬tion faite de leur état liquide ou solide), et leur ruissellement
sur le sol, font l'objet des définitions générales suivantes :
Le coefficient de ruissellement ou coefficient d'écoulement,est le quotient de la quantité d'eau s'écoulant superficielle¬ment par un cours d'eau collecteur, sur la quantité totale
d'eau précipitée dans son bassin d'alimentation, c'est-à-dire
sur toute la surface du terrain qui rend l'écoulement possible.Ce coefficient est exprimé en %, et étendu généralementà l'année, dans les publications des services hydrographi¬
ques. Il est essentiellement variable et va de 20 % en plaineà plus de 100 % en haute montagne. Il doit d'ailleurs être
utilisé avec de grandes précautions dans tout calcul, étant
donné la quantité de phénomènes complexes qu'il enve¬
loppe, tels que l'évaporation, la condensation, l'infiltration,les eaux perdues, etc.
En première approximation le débit moyen annuel Qmo,,d'un cours d'eau, en mètres cubes par seconde, peut être
déterminé à l'aide du coefficient d'écoulement par la for¬
mule :
_
DPqS iooooooMmoj, -
31 53g 000
où P0= hauteur d'eau moyenne en mètres tombée pendantun an dans le bassin du cours d'eau, D = le coefficient
d'écoulement, soit ici simplement le rapport -p-, où H est1
o
la hauteur annuelle d'écoulement en mètres, S = la super¬
ficie du bassin en kilomètres carrés.
Dans beaucoup de publications hydrologiques on remplaceles débits en m3/sec, portés en ordonnées dans les courbes
de débit, par un chiffre équivalent qui est le débit exprimé
CONSIDÉRATIONS GENERALES ET DÉFINITIONS 33
en litres par kilomètre carré de bassin et par seconde. Cette
manière d'envisager un système fluvial peut présenter un
certain intérêt technique, mais ne répond pas du tout à un
phénomène scientifiquement exact, le ruissellement n'étant
jamais identique en tous les points du bassin. Une peut donc
être question d'utiliser cette définition dans les études de
détail.
Une quantité d'autres points qui entrent dans ce paragra¬
phe comme l'évaporation, les divers coefficients de porosité,d'infiltration, les capacités de rétention, etc., seront traités
au fur et à mesure, dans les chapitres suivants.
LUGEON — 3
Recherches
CHAPITRE DEUXIÈME
§ I. Les eaux météoriques.
1. Les erreurs dans les observations pluviométriques.
Avant d'entreprendre toute étude hydrologique, il est
indispensable de se faire une idée précise de la valeur des
données pluviométriques. On ne saurait jamais assez criti¬
quer les chiffres publiés par les instituts météorologiques, si
nombreux et variables sont les éléments qui entrent en jeudans la mesure de la pluie, de la neige et de la grêle.Nous nous abstiendrons ici de toute énumération histori¬
que ou du résumé des critiques et arguments qui ont fait
l'objet de nombreux travaux importants [34], tels que ceux
d'Angot, de Hann, de Hellmann, etc. On trouve, en abon¬
dance des renseignements dans la littérature météorologique.Il nous suffira donc simplement de savoir sur quelle approxi¬mation on peut tabler, d'une manière générale, dans les
mesures pluviométriques, en en cherchant les démonstrations
expérimentales les plus récentes.
Deux éléments essentiels contrarient les mesures des préci¬pitations et en compliquent l'unification. Ce sont le vent,
d'une part, et la hauteur du pluviomètre au-dessus du sol,d'autre part. Ces deux facteurs, d'ailleurs, combinent leurs
effets.
ERREURS DANS LES OBSERVATIONS 35
On sait aujourd'hui, grâce à de nombreuses années d'ob¬
servations, que les précipitations croissent avec l'altitude,alors que des expériences célèbres avaient prouvé pendant
longtemps le contraire. Ainsi, pour des pluviomètres placéssur une même verticale, entre 0 et 50 m., les mesures des
hauteurs d'eau recueillies après les pluies tombant par temps
calme, étaient identiques. Par contre, sitôt que quelque brise
s'élevait, on trouvait toujours moins d'eau dans les appareils
supérieurs. Ceux-ci étant les plus exposés aux vents et par
conséquent aux tourbillons d'air, il était bien compréhensible
que l'accès de leur ouverture aux gouttelettes légères, chas¬
sées et dispersées, fut moins favorable que pour ceux placés
près du sol.
Pour éviter l'influence de la hauteur du pluviomètre,sur la quantité d'eau qu'il reçoit, afin de rendre comparablestoutes les données, on a convenu de placer l'ouverture de
tous les réceptacles relevés chaque jour, à 1,50 m. au-dessus
du sol. En outre, ces appareils doivent être situés dans des
lieux abrités. Les totalisateurs, pour des raisons différentes,en particulier la hauteur de la couche de neige sur le sol, sont
placés à 2,50 ou 3 m. L'effet combiné de la hauteur et du vent
est alors combattu par un écran circulaire arasé un peu plushaut que le gueuloir, du type de Nipher, Mougin [35] ou
italien. Abstraction faite de quelques postes d'observations,tous les pluviomètres des réseaux des pays européens sont
disposés de cette manière.
Les erreurs essentielles qui affectent les données pluvio-métriques publiées par les instituts météorologiques, ne peu¬
vent malheureusement pas être exprimées au moyen d'une
fonction quelconque, parce que ces chiffres ne disent pas si
la précipitation est tombée sous forme solide ou liquide :
pluie, neige, grêle, grésil, paillettes de glace.C'est là une fâcheuse lacune qui complique l'établissement
d'un tableau de coefficients de correction, exprimés par
exemple en % de la hauteur mesurée, et de la rose des vents
pluvieux.
36 PRÉCIPII ATIONS ATMOSPHERIQUES
Si l'on classe les erreurs d'observations en erreurs systéma¬
tiques et en erreurs fortuites ou accidentelles, il convient, en
effet, d'attribuer des corrections bien différentes pour la
pluie ou la neige.Ainsi pour les erreurs systématiques auxquelles on doit
rattacher l'influence de la vitesse et de la direction du vent,
et la hauteur de l'appareil, on trouve d'après les expériencestrès instructives de Hellmann [6], pour des pluviomètresdistants de % kilomètre sur terrain plat, une valeur moyenne
de — 5 % de la quantité d'eau tombée. Nous pouvons
adopter ce chiffre comme maximum moyen, mais pour de la
pluie exclusivement, car Hellmann a montré qu'il pouvaits'élever à 100 % par des tourmentes et la neige, ce qui est
d'ailleurs très rare.
Cette erreur de 5 % a été calculée avec des pluviomètresdu type ordinaire, analogues à ceux que l'on rencontre en
Suisse. Par contre, pour ceux qui sont abrités par un écran
de Nipher ou de Wild, l'approximation des mesures croît,oscille autour de 1 à 2 % en moyenne. Mais nous ne nous
appuyerons pas sur ces valeurs, puisque ces types de récepta¬cles ne sont pas utilisés d'une manière générale en Suisse [36].En ce qui concerne la neige, il est plus difficile de s'orienter.
Du fait de la variabilité très grande de sa structure, de la
densité des flocons, de la température à laquelle on la fond
pour en mesurer sa hauteur d'eau, Terreur moyenne maximum
pendant les mois d'hiver et pour nos climats, atteint à l'alti¬
tude du Plateau suisse —8 %. Ce chiffre peut être plus élevé
pour les stations de montagne, les flocons y étant générale¬ment plus légers et plus secs, et par conséquent se fixant
avec moins de facilité dans le col de l'entonnoir. Mais si Ton
s'en rapporte aux travaux faits par divers auteurs aux lati¬
tudes élevées [37], on voit que le chiffre indiqué peut conve¬
nir comme maximum moyen.
Les belles séries d'observations pluviométriques du Grand
Saint-Bernard, complétées dès 1917 par l'adjonction d'un
deuxième appareil, abrité par un paravent tronconique de
ERREURS DANS LES OBSERVATIONS 37
Nipher, sont une contribution inappréciable à la connais¬
sance de la valeur réelle des précipitations de neige et de
pluie, en haute montagne. M. le Prof. Raoul Gautier, à quil'on doit l'initiative de ces nouvelles et heureuses observa¬
tions, a publié en détail la comparaison des deux relevés [38].Il constate que la hauteur moyenne annuelle de 1300 mm.,
au Grand Saint-Bernard, dans les quarante années de 1864
à 1903, devrait être portée à 1800 mm., si les mesures avaient
été faites avec le pluviomètre abrité. En admettant que cet
appareil donne un témoignage exact, qu'on puisse en quel¬
que sorte l'assimiler à un pluviomètre étalon, il faudrait,
pour avoir des hauteurs vraies, augmenter annuellement
de 38 % environ de leur valeur les relevés des stations si¬
tuées à l'altitude du Grand Saint-Bernard.
Des études analogues ont été entreprises dans les pays
Scandinaves. Signalons les intéressantes recherches de M.
F. Lindholm [39] qui a non seulement étudié le rapport de
fonctionnement des deux types d'appareils, mais a démontré
que la grandeur de l'ouverture joue un rôle quasi négligeablesur la récolte de la pluie et de la neige, pour des pluviomètresde 100 et 200 centimètres carrés du moins. Par contre,
par le vent, et en proportion avec sa vitesse, les données du
petit pluviomètre sont en déficit sur le grand. Ainsi de
0 à 4 m./sec, il accuse —8 %, de 5 à 9, —10 %, de 10 à 14,
—19 %, et au-dessus de 15 m./sec, — 12 %, par rapport au
grand.Pour les stations du Saint-Gothard et du Rigi, qui possè¬
dent les deux types de récepteurs, nous avons calculé les
écarts en % et par mois pour les années 1922 à 1925. Ils
figurent dans le tableau ci-après, en face de ceux des autres
auteurs.
Lorsqu'on compare jour après jour les hauteurs pluviomé-
triques, la direction et la force des vents et la température, on
arrive aux constatations suivantes :
Pour la neige, plus la température est basse, plus les écarts
sont grands. A —10°, ils atteignent parfois au Rigi 100 %,
38 PRECIPITAI IONS ATMOSPHERIQUES
tandis qu'à +1°, ils ne dépassent guère 10 %. Si les vents
conservent leur direction au cours de la pluie ou de la neige,les écarts sont sensiblement constants et inversement pro¬
portionnels à la densité. Au Saint-Gothard, les écarts sont
beaucoup plus faibles qu'au Rigi, et cela s'explique par la
ventilation qui n'agit là que dans deux sens, alors qu'au
Rigi les réceptacles sont exposés aux courants des quatre
points cardinaux. Des écarts dans le sens direct, c'est-à-dire
avec excès de neige dans le pluviomètre non abrité sont
rares. Ils atteignent au maximum 15 % par chute, au Rigi.
Ecarts en °/0 des hauteurs de précipitations mesurées par un
pluviomètre non abrité, sur celles d'un pluviomètre protégé
par un écran tronconique de Nipher. „ „
Mois I 11 111 IV V VI VII VIII IX X XI XII 1 Année! o,
1 /o % % % % % % % o/o % % % %
Sârna )
1907-1910 [-20 -35 -21 -27 -12 -3 -2 -4 -3 -3 -21 -24 -10
F. Lindholm /
1
Gd S'-Bernard1
Alt. 2475 m.
1917-1922 [-57 •61 -54 -48 -51 -33 -19 -26 -27 -38 -45 -50 -43
R. Gautier /
Rigi1
Alt. 1787 m. -48 -30 -38 -19 -8 -7 -3 -6 -5 -6 -46 -98 -25
1922-1925
Saint-Gothardi
-36Alt. 2103 m. -33 -44 -30 -19 -11 -3 -2 -5 -5 -58 -25 -18
1922-1925 î1
Pour la moyenne des années 1919 à 1923, la différence
entre les données du totalisateur et du pluviomètre du
Sàntis, à 2500 m. est de 473 — 357 = 116 cm. c'est-à-dire
que le totalisateur donne un surplus de 32,6 % sur le plu-
ERREURS DANS LES OBSERVATIONS 39
viomètre. Pour 1919 à 1926, ce chiffre s'élève même à 45 %,
qui est- bien près de la valeur du Grand Saint-Bernard.
Quoi qu'il en soit, et d'une manière générale, il faut bien
noter que toutes ces erreurs ont le même sens, c'est-à-dire
que les pluviomètres indiquent toujours moins d'eau qu'iln'en est en réalité tombé sur le sol. Une seule exception ca¬
ractérise certains totalisateurs qui reçoivent parfois des par¬
celles de neige soulevées du sol par la tempête.'
Les erreurs varient aussi avec le débit des précipitations,avec la densité de la pluie, comme nous l'avons nommée. Il
est évident qu'elles sont rabaissées, dans une certaines pro¬
portion, avec l'augmentation de la densité. Pendant de lon¬
gues périodes estivales, le 1 % d'erreur, seulement, affecte
les mesures de la pluie, et le 3 % les mesures de la neige.Cherchons maintenant pour les postes pluviométriques
suisses, le facteur de correction attribuable aux sommes men¬
suelles et annuelles des précipitations afin de les ramener à
une valeur exacte. Ce chiffre qui n'est donc pas constant,
varie avec la température moyenne du lieu considéré, dont
dépend la nature solide ou liquide de la précipitation.Nous ne donnons ici que le résumé de recherches faites sur
la base de statistiques diverses de 19 stations pluviométri¬
ques.2
1 Voici ce que dit à ce sujet M. Rôstad qui a montré clairement par des
esquisses quelles étaient les lignes de flux d'air autour des totalisateurs
du type Mougin-Nipher :
«Wenn der geschûtzte Niederschlagsmesser auf geneigten Boden auf-
gestellt ist und der Wind die Neigung hinanstrômt, werden die Nieder-
schlagsteilchen hôher ùber den Niederschlagsmesser aufgewirbelt, so dass
die aufgefangene Niederschlagsmenge verkieinert wird; wenn der Wind
dagegen dieBôschung hinabstrômt, werden die Niederschlagsteilchen gegendas Auffanggefàss hinuntergeschleudert, so dass zu viel aufgefangen wird.
Wenn die obère Offnungsflâche des Schutztrichters mit dem Boden pa-rallel ist, tritt vielleicht der Grenzfall ein, dass die gemessene Niederschlags¬menge von der Windgeschwindigkeit unabhangig wird. » (Meteo. Zeit.,
p. 240, août 1924.)"2 Genève, Cologny, Chambésy (430 m.) ; Zurich, Zollikon, Kussnacht
(420-500 m.) ; Fontainemelon, Cernier, Dombresson (1000 m.) ; Lauenen,Gsteig, Lenk, Adelboden (1200-1400 m.) ; Saint-Moritz, Bevers (Pontresina)(1800 m.); Spliigen, Inner-Ferrera, Avers-Crestra (1800 m.).
40 PRECIPIT4_lIOPvb \TMOSPHERIQLES
Chacun des chiffres du tableau ci-dessous représente l'er¬
reur moyenne maximum d'un nombre d'observations indé¬
terminé, mais pas inférieur à quinze lectures journalières.L'erreur systématique réelle qui entre dans chaque lecture
est essentiellement variable. Nous insistons donc sur la va¬
leur tout apparente de ce tableau. Les chiffres qu'il donne,
quoique calculés rigoureusement, ne sont qu'une orienta¬
tion sur l'ordre de grandeur de l'erreur à admettre pour corri¬
ger les lectures. L'exactitude de la correction croît évidem¬
ment, dès que l'on ne cherche plus à corriger une seule obser¬
vation, mais la somme des hauteurs d'un grand nombre de
lectures. La question des erreurs reste donc, en partie, ou¬
verte pour des observations isolées. Et il en sera d'ailleurs
toujours ainsi, car il est mathématiquement impossible d'y
pourvoir.
Facteur de correction mensuel moyen maximum des observations
pluviométriques en °j0 de la hauteur d'eau mesurée.
Tab. 3
Altitude I II III IV V VI VII VIII IX X XI XII Année
% % % % % % % % % % % %'%
400 m. 7 6 4 3 2 1 1 2 1 2 3 4 2,7700 m. 7 7 7 4 2 1 1 2 \ L 3 4| 2,4
1000 m. 8 7 6 5 2 J 1 2 i 2 4 5 ! 2,91250 m. 9 8 8 7 3 2 2 2 1 2 5 7 4,41500 m.
* 10 11 10 9 3 2 3 2 1 2 7 9 5,01750 m.
* 15 15 16 12 4 2 3 3 1 3 8 13 5,7
* Signifie partiellement extrapolé.
Ce tableau nous permet de justifier certaines assertions de
Riggenbach, qui mettent en doute la possibilité de mesurer
la pluie avec une précision dépassant 0,5 cm.
La méthode employée pour le calcul de ces chiffres est
simple. Elle est basée sur la combinaison des écarts moyens
et des moindres carrés, citée plus haut. Ainsi pour chaquealtitude nous avons considéré trois stations aussi rapprochées
ERREURS DANS LES OBSERVATIONS 41
que possible et dans des mêmes conditions orographiques,dont la hauteur moyenne annuelle des précipitations calculée
pour 50, 37, 20, 13 ou 10 années, se trouve sans correction,être la même à quelques dixièmes de millimètres près. Pour
nous assurer doublement que ces stations sont bien situées
dans une région où le régime pluviométrique est semblable
en tous points, nous avons comparé les unes aux autres les
moyennes mensuelles. Chaque fois qu'il y avait, sans cause
apparente, des écarts dépassant le 10 % de la hauteur men¬
suelle, le jeu des stations a été écarté du calcul.
Nous avons comparé ensuite pour chacune des trois années
séparément, toutes les chutes de pluie et de neige, en ne choi¬
sissant pour le calcul du facteur de correction que les hau¬
teurs d'eau en 24 heures, supérieures à 5 mm., et tombées
par des mêmes conditions de température et de vent, et
pendant un même nombre de jours.Les sommes ainsi trouvées étaient exprimées séparément
pour chaque station, en % de la valeur moyenne mensuelle
du plus grand nombre d'années possible. La moyenne inté¬
grale des carrés des différences de station à station de ces
derniers chiffres, donne donc sur la base de ces trois stations
choisies, l'erreur moyenne par station, et ceci pour le nombre
de jours pluvieux considérés pendant le mois.
Ce chiffre peut être étendu à toutes les chutes du mois. Il
n'en résulte, d'ailleurs, aucune erreur supplémentaire, comme
on le voit facilement sur le tableau. Il y a bien continuité
entre deux mois successifs.
A titre de contrôle supplémentaire, le même calcul a été
répété sur des bases un peu différentes, en partant de la
moyenne annuelle et en considérant les sommes des mois
les plus pluvieux, d'une part, et celles des mois les moins
pluvieux, d'autre part, afin de se rendre compte si le coeffi¬
cient trouvé s'applique bien aux mois plavieux comme aux
mois secs. La différence a été trouvée tout à fait négligeable
(0,03 %). Le facteur de correction peut donc être appliquéà toutes les précipitations.
42 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Ce tableau permet de tirer d'autres conclusions. Ainsi
il montre que la courbe des erreurs d'observations croît avec
l'altitude. (A ce sujet, il serait des plus utiles que l'on cher¬
chât à préciser par d'autres moyens expérimentaux les
écarts entre la marche des totalisateurs et des pluviomètresordinaires. La publication régulière des observations de haute
montagne, comme celle du Sântis, dans ce domaine, aurait
permis à maints chercheurs de calculer ces coefficients quinous intéressent.) On peut dans une certaine mesure extra¬
poler vers les sommets les chiffres déterminés pour l'altitude
1750 m. et ainsi se faire une idée sur le fonctionnement des
totalisateurs, dont les données sont si critiquées, faute pré¬cisément de points de comparaison.
1
Soit dit en passant, il ne faut pas confondre cette loi des
erreurs qui se trouve ainsi résumée par des chiffres, avec
celle de Wild, sur l'influence de la hauteur h du pluviomètreau-dessus du sol, exprimant les erreurs de la quantité d'eau
mesurée, comme étant fonction de 6V'A [40].Il a été dit plus haut que nos facteurs s'étendaient à tou¬
tes les mesures pluviométriques. On peut se demander pour¬
tant s'ils sont aussi applicables à toutes les valeurs inférieures
à 5 mm.
Nous avons procédé à diverses expériences pour nous ren¬
dre compte du rôle que pouvaient jouer les températuresde la pluie et du réceptacle, au point de vue évaporation,
pour les faibles quantités, de Tordre du millimètre [41].Il ressort de ces essais, qu'en exposant au soleil, pendant
les fortes chaleurs, des pluviomètres du type de l'Institut
Central Météorologique, et en y versant de faibles quantitésd'eau à des températures différentes, l'évaporation et l'opé-
1 Dans sa communication, au Troisième Congrès de la Houille Blanche,à Grenoble (1925), M. Mougin nous dit: «Des mesures de contrôle exé¬
cutées ces trois dernières années à la Station régionale de physique et de
météorologie agricoles de Montpellier, il résulte que les totalisateurs don¬
nent en moyenne les 0,94 de la lame d'eau accusée simultanément parle pluviomètre. » (Communication de l'Administration des Eaux et Forêts
et la Houille Blanche.)
EXTENSION DES DONNEES 43
ration de vidange retiennent jusqu'à 5/10 de mm., par
millimètre, donc le 50 %. A mesure que les quantités d'eau
augmentent, l'effet de l'évaporation diminue. Pour 10 mm.
de pluie et 10 h. d'exposition au grand soleil, l'écart constaté
ne dépassait pas 3/10 de mm., donc le 3/100 du contenu.
11 n'y a donc que la mesure des faibles pluies qui soit affectée
d'erreurs systématiques importantes et dues à l'évaporation.D'une manière générale, ces erreurs étant inférieures au
1 /10 de mm., il ne vaut pas la peine d'en tenir compte.
Signalons, en passant, que des épreuves analogues faites
sur le nouveau pluviomètre « Ville de Paris », qui réalise
la perfection, ont donné des résultats identiques aux nô¬
tres [42].Les erreurs fortuites ou accidentelles échappent quelque¬
fois au contrôle des observateurs les plus sagaces. Mais c'est
rare en Suisse, où les instructions sont bien suivies. Toute
donnée quelque peu anormale sera, si besoin est, ou aban¬
donnée, ou corrigée avec précaution. Ce travail est généra¬lement fait dans les instituts qui publient ces observations.
2. Extension des données pluviométriques.
Une seconde et importante question se rattache à la plu¬viométrie : quel est le rayon périphérique auquel on peut
étendre les données d'un pluviomètre ?
Hellmann, par de longues statistiques, nous montre qu'en
pays plat — autour de Berlin — on peut compter en moyenne
sur un rayon de % km.
En considérant la nouvelle carte pluviométrique de la
Suisse dressée par M. H. Brockmann [43] qui, quoique fort
discutable, est une tentative statistique intéressante, on
voit qu'en certaines régions plates, les données moyennes
d'un appareil, pour plusieurs années, peuvent être étendues
sur une surface allant jusqu'à 8 et même 10 km. de dia¬
mètre. (Avenches et Courtelin, distants de 6 km., chacun
44 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
96 cm. ; Nyon et Céligny, 4 % km., 95 cm. ; Châtelaine,
Collex, Satigny, 7 % km., 96 cm.)Mais dans un pays accidenté ce sont là des cas peu fré¬
quents. D'ailleurs ces moyennes variables, étendues sur
10 à 50 ans, ne signifient pas grand'chose, pour l'étude des
phénomènes hydrologiques de détail. Elles ne représententen somme aucun fait physique réel, et il est difficile d'en
tirer un autre profit qu'une simple indication de grandeur.Des faits nouveaux concernant la répartition des précipi¬
tations dans les vallées et sur les plus hauts sommets de la
chaîne alpine, sont aujourd'hui acquis à la pluviométrie,grâce aux beaux travaux de M. Liitschg au Mattmarkgebiet[44], par les Bernische Kraftwerke au Grimsel, etc. Ces bases
expérimentales sont du plus haut intérêt soit pour traiter la
loi de variation des précipitations avec l'altitude en haute
montagne, soit pour extrapoler les mesures des appareilsplacés dans les fonds de vallées.
En résumé, nous admettons, comme rayon d'extension
d'un pluviomètre, 1 kilomètre pour les pays plats, et 500 à
quelques mètres pour les contrées accidentées, suivant la
pente du terrain.
3. La loi de variation des précipitations avec l'altitude.
La loi de variation des précipitations avec l'altitude a été
étudiée par divers auteurs. Il faut citer en premier lieu pour
la Suisse, le savant bâlois Riggenbach, dont les recherches,datant du siècle passé, ont aiguillonné plus tard les météoro¬
logistes étrangers. Pour ce qui en est de l'expérience, l'Ins¬
titut Central Météorologique à Zurich a entrepris la lourde
tâche d'ériger les premiers totalisateurs, il y aura bientôt
une quinzaine d'années [45, 46]. Mais il faut reconnaître que
ce n'est que depuis que M. Liitschg a interprété — grâce à
ses remarquables expériences — les résultats du Matt¬
markgebiet, que nous sommes mieux renseignés sur la répar-
VARIATION AVEC L'ALTITUDE 45
tition des précipitations sur les glaciers suisses et sur les
sommets voisins de 4000 m.
En France, MM. Mougin et Valot furent les promoteurs de
ces recherches. C'est à eux que revient la priorité, avec les
savants de la première mission scientifique du Groenland,de 1892.
Examinons rapidement les travaux de l'école bâloise [47].Riggenbach a basé sa théorie sur la thermodynamique de
l'atmosphère, dont les lois sont assez bien connues. Les vents
humides et ascendants d'un versant, condensent d'autant
plus d'eau qu'ils s'élèvent avec plus d'énergie, et par consé¬
quent se détendent en perdant de la chaleur. D'aprèsRiggenbach, les précipitations sont indépendantes de la
direction et de la vitesse du vent par rapport au versant où
elles tombent. Pourvu que le vent monte, il pleuvra davan¬
tage en altitude qu'en plaine.Partant de ce principe, il établit pour les précipitations
annuelles de deux stations d'altitude différente la formule
suivante :
P = V0+g.k + k.tg.z
où P est la hauteur des précipitations annuelles en milli¬
mètres, à calculer pour une station supérieure A, P0, la hau¬
teur des précipitations en mm. dans une station inférieure à
A (plateau de Bâle), g, l'augmentation de la pluie en milli¬
mètres par mètre d'altitude ou gradient des précipitations,A, la hauteur en mètres de la station supérieure, comptéeà partir de la station inférieure, k, une constante, et, tan¬
gente z, l'inclinaison moyenne du versant à l'altitude A.
Notons que P0, g, k, sont constants pour toute altitude
envisagée, lorsque le choix des deux stations est fait. Ainsi
pour g, Riggenbach trouve à Bâle 0,414 mm. /m. ; entre
Zoug et le Rigi g = 0,446, et la formule devient :
P= 904+ 0,446 A
Aujourd'hui, nous ne sommes plus tout à fait d'accord
avec ces conceptions. Il a été en effet reconnu que la vitesse
46 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
et la direction du vent influent sur la répartition des précipi¬tations suivant les versants des montagnes, et cela indépen¬
damment de la question des erreurs systématiques de mesure
énoncées plus haut. De plus, la variation des précipitationsn'est pas linéaire, comme l'avait d'ailleurs déjà fait remar¬
quer R. Huber [48]. Nous verrons plus loin que cette variation
est parabolique, au moins jusqu'aux altitudes de 2500 m.
La formule de Riggenbach est pourtant employée cou¬
ramment dans les services hydrographiques, lorsqu'il s'agitde calculer les coefficients d'écoulement de grands bassins.
Il a lui-même proposé cette utilisation et montré qu'elleoffrait une approximation suffisante. Nous ajouterons que si
l'emploi est justifié pour des cours d'eau serpentant sur des
versants assez réguliers, comme les grands fleuves de France
et d'Allemagne, exception faite pour ceux qui ont leur
origine dans les Alpes, il n'est pas question de s'en servir en
haute montagne, et même pour des cours d'eau à régime
préalpin, en laissant ouverte, bien entendu, la question des
moyennes étendues à un très grand nombre d'années.
On constate, en étudiant le coelïicient d'écoulement pour
des cas isolés d'une durée inférieure à une année, que la
formule de Riggenbach ne donne que dans de rares cas la
répartition exacte des précipitations dans un bassin. Elle est
applicable seulement si les vents pluvieux conservent tou¬
jours la même direction. Pour un versant arrière, sur lequelles vents soufflent en descendant dans une vallée, après avoir
passé par-dessus une crête, les précipitations sont souvent
plus fortes en bas qu'en haut. Il y a alors inversion com¬
plète, et elle peut être permanente. Le phénomène com¬
plexe du foehn nous en montre un exemple typique, tout
comme l'arrivée de la bise pluvieuse, dans les Alpes fribour-
geoises. C'est principalement pour ces raisons que nous avons
préféré nous orienter dans une direction différente, en
essayant d'embrasser dans une seule méthode tous les fac¬
teurs qui déterminent la variation des précipitations avec
l'altitude.
VARIATION AVEC L'ALTITUDE 47
Signalons encore en passant les travaux de R. Wolf [49],Maurer [45], Mathias [51], Rehbock et Huber, [l. cit. 48],qui a corrigé la formule de Riggenbach et lui a donné la
forme suivante :
P= 793,3 +0,414. A+ 381,6. a
où A = altitude moins 300 mètres, et, y-, tangente au ver¬
sant. Cette dernière est calculée d'après la méthode de
Finsterwalder.
Il semble démontré aujourd'hui que l'expression algé¬brique qui lie la variation des précipitations avec l'altitude,
jusqu'aux plus hauts sommets ait la forme théorique sui-
vante :; / a a \«
P = Pm.c ( A»)".
où e = 2,7182..,
si les précipitations P et les altitudes A sont reportés sur
deux axes rectangulaires. Dans cette expression qui n'est
autre qu'une courbe en cloche, P est la pluviosité à une
altitude quelconque A, et Pm la plus forte pluviosité pro¬
bable, correspondant à une altitude Am. La constante k dé¬
pend de l'inclinaison des versants sur lesquels tombe la pluie.
L'expérience montre, en effet, qu'en partant d'une altitude
de 1000 m., très approximativement, les précipitations en
fonction de l'altitude croissent d'abord suivant une courbure
parabolique ou hyperbolique à concavité tournée vers le ciel,
puis vers 2000 m. une inflexion se produit et la courbe tout
en continuant à monter se couche sur l'axe des abscisses A,dans le sens opposé au déb,ut, c'est-à-dire en devenant
convexe vers le ciel. Au delà de 3500-4000 m., où les préci¬
pitations atteignent vraisemblablement leur maximum, elle
doivent décroître lentement, pour des raisons de tempé¬
rature, d'état hygrométrique de l'air et de pression baro¬
métrique.Vu que les précipitations tombent en plus grande quantité
à la montagne qu'en plaine, il est indispensable, avant
d'utiliser des données journalières, mensuelles ou annuelles,
publiées, de se faire une idée exacte de la façon dont elles se
48 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
répartissent dans le temps, en deux ou plusieurs stations
situées dans une même région et à des altitudes différentes.
Nous baserons dorénavant certains de nos calculs sur ce
point de vue qui est bien différent de celui des auteurs
précités.En effet, les données pluviométriques se rapportant tou¬
jours à des lectures faites toutes les 24 heures, le cas se
présente, lorsqu'on les considère jour après jour pour plu¬sieurs stations simultanément, qu'à telle altitude il n'a pas
plu ou qu'au contraire il a plu pendant un temps plus long.Ainsi peut être entièrement masquée la loi de variation quin'est plus alors qu'une expression moyenne.
Il est donc nécessaire de connaître le rapport des temps,
exprimés en heures ou en jours de pluie, entre deux ou plu¬sieurs postes pluviométriques situés à des altitudes diffé¬
rentes. C'est ce que nous avons cherché à établir par la
comparaison de quelques stations du réseau suisse, notant
assez fidèlement l'heure du début et de la fin des précipita¬tions. Pour le Jura et la chaîne alpine, sur un versant barrant
normalement la circulation générale atmosphérique (chaînedes Alpes bernoises avec les vents du NW., chaîne des Alpesvaudoises avec les vents du SW.), la durée moyenne des
précipitations est plus forte de 20 % dans les stations situées
à l'altitude de 1100-1400 m., qu'en plaine, à 500 m. Mais
ceci n'est pas le cas pour les versants face au vent, que l'on
pourrait aussi qualifier de versants debouts, par oppositionaux versants arrières qui sont de l'autre côté de la chaîne
et où le rapport semble être inverse, c'est-à-dire qu'il y pleutun peu moins longtemps en altitude que dans le bas. La
carte de M. Lûtschg, pour le Mattmarkgebiet, qui est en
quelque sorte la résultante statique de ces effets, confirme
sans doute ces considérations dynamiques. On voit donc
l'importance qu'il y a à rattacher les précipitations au
temps, pour l'étude du détail des processus hydrologiques.Signalons, entre parenthèses, qu'il est bien connu des alpi¬
nistes que la quantité de pluie en un même espace de temps
VARIATION AVEC L'ALTITUDE 49
est plus grande à la montagne qu'en plaine. Elle y mouille
beaucoup plus, et les tissus sont très rapidement imprégnés.Donc, indépendamment de la qualité des précipitations,
de la grosseur des gouttes, de la forme des flocons, de leur
vitesse de chute et de leur espacement, on peut introduire la
notion de densité telle qu'elle a été définie au chapitreprécédent.
Voyons maintenant comment il est possible d'expliquerla forme de la courbe de variation des précipitations avec
l'altitude. Considérons, figure 1 A, le cas idéal d'un versant
dont le profil d'équilibre est atteint et qui affecte la forme
d'une courbe parabolique à concavité tournée vers le ciel
[53]. Ce profil est très fréquent dans les pays où la pénéplainea atteint un stade avancé. Il est également celui vers lequeltendent tous les versants en vertu de lois de l'érosion, et la
plupart des thalwegs des vallées de nos grands fleuves l'ont
atteint.
Supposons une pluie tombant verticalement et simplifionsle problème en négligeant le processus de la condensation
des gouttes, fort mal connu. La pluie se détache à partird'une certaine altitude A„, au-dessus du sol, d'un milieu
nuageux dont la surface inférieure est à peu près horizon¬
tale. Ce milieu ou cette couche, dont nous considérons une
section verticale d'épaisseur h, est susceptible de condenser
à l'altitude An une pluie de densité \n. La hauteur totale
'd'eau tombée pendant la durée 0 de la précipitation sera
P„ = AnA1 Cette quantité est évidemment proportionnelle
à la masse d'eau condensée dans la couche. En d'autres
termes, on peut admettre que h est la hauteur représentativede la quantité P„. Pour un temps 0 = 1, elle représente la
densité \n de la pluie, au niveau An, bien entendu. Mais dans
leur chute les gouttes de pluie traversent une couche d'air
dont la température croît au fur et à mesure qu'on se rap¬
proche du sol. Il se produira donc une évaporation pendant
1 Cette expression sera démontrée au § 4 suivant.
LTTGEON 4
50 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
la chute et par conséquent une diminution régulière de la
densité de la pluie, entre le niveau de la couche nuageuse et
le sol. Or, on sait que la température de l'air varie linéai¬
rement selon l'altitude. Tout porte à croire, dans le cas
présent, qu'il en est de même de l'évaporation des gouttesde pluie, d'où l'on conclut que sur une verticale entre le sol
et la couche nuageuse, la densité de la pluie croît linéai¬
rement avec l'altitude. Si la durée 0 de la pluie est la même
à toute altitude, A est remplaçable par P, car ces deux gran¬deurs varient alors selon une même loi.
VARIATION 4.VEC L'ALTITUDE 51
Ce simple raisonnement explique la variation paraboliquede la pluviosité le long du versant considéré. Soit, en effet,
figure 1 A, le profil du versant en projection verticale
(X = trace, A = altitude). A chacun des points du profilcorrespond une hauteur de pluie P (ou une densité A) qui se
lit dans le diagramme (P, A), donnant P en fonction de A,
figure 1 B. Si on reporte les segments P1} P2. . . sur chacun
des points du profil, il est évident que la ligne qui passe par
leurs extrémités présentera la même allure parabolique que
le versant. De plus nous avons vu qu'en général la durée de la
pluie croissait avec l'altitude. Il en découle alors que la
courbure de la ligne des précipitations Pt, P2,. . .obser¬
vées et reportées sur le terrain, sera renforcée, c'est-à-dire
que la concavité vers le ciel sera plus forte que celle du
terrain. C'est effectivement ce que l'expérience vient démon¬
trer pour des versants situés au-dessous de 1000 m. Mais
au-dessus de cette altitude le phénomène est souvent inversé,la concavité de la ligne des précipitations est plus faible que
celle des versants et répond à la ligne Pî, P2.Si l'on supprime le versant par la pensée et que l'on
reporte sur deux systèmes de deux axes rectangulaires,
figure 1 C, D, les segments P, P", en abscisses et les alti¬
tudes en ordonnées, on obtient donc deux courbes para¬
boliques dont la convexité regarde l'axe des A, pour les
basses altitudes, et la concavité pour les hautes.
En raccordant bout à bout ces deux courbes, reportées sur
un système d'axes A, P, unique, s'étendant des plus basses
aux plus hautes altitudes, on obtiendra donc une courbe qui
présentera à une certaine altitude un point d'inflexion,
figure 1 E. L'allure de cette courbe doit précisément confir¬
mer à peu de chose près, l'expression algébrique que nous
avons proposée précédemment, sauf en dehors des limites
des tronçons paraboliques P et P" où elle affecte la forme de
la courbe en cloche.
Dans la plupart des bassins des Préalpes, on ne retrouve
pas d'inflexion dans la courbe des précipitations. Celles-ci
52 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
croissent presque toujours selon une courbe paraboliquedont la concavité regarde l'axe des altitudes, dans le dia¬
gramme (P, A). (Voir les graphiques de M. Roder et de
M. Brockman où toutes les stations se groupent autour de
paraboles.)L'intégration de la surface comprise entre la courbe des
précipitations et le profil du versant donnera le volume d'eau
tombée par unité de largeur, entre deux profils de terrain
très rapprochés.
L'expérience montre encore que les aspérités du sol, les
changements de pente brusques, n'ont pas grande impor¬tance sur la répartition des précipitations d'un grand ver¬
sant, même si sa concavité vers le ciel se change en convexité
sur de longues distances. Nous reviendrons sur les anomalies
de répartition de la pluviosité au § 5.
Sans nous préoccuper des processus thermodynamiquescompliqués d'où résulte la pluie, nous pouvons imaginer que
la hauteur représentative des densités au sol est inhérente à
la couche nuageuse qui le surplombe. Que cette couche soit
animée d'un mouvement horizontal ou non, nous dessinerons
à son intérieur même, en projection verticale au-dessus du
versant, la courbe dite courbe représentative des densités.
Ceci admis, examinons rapidement, figure 2, ce qui se
passe quand la chute de la pluie est contrariée par le vent.
Considérons comme précédemment le cas idéal d'un profilde terrain parabolique et une tranche horizontale nuageuse
de hauteur h, que les gouttes quittent pour suivre la trajec¬toire inclinée, faisant un angle a. avec la verticale. (Cetteligne est généralement sinueuse à cause des vitesses variables
du vent aux différents étages de l'atmosphère ; raisonnons
comme si elle était droite.)Le réceptacle ayant son embouchure horizontale, on voit
que quel que soit l'angle «, le nombre de gouttes qui y tombe
est constant. Il est donc indépendant de la force et de la
direction du vent, abstraction faite, bien entendu, des
erreurs systématiques exposées plus haut, et provenant des
VARIVTION AVEC L'ALTITUDE 53
tourbillons d'air au voisinage du sol et sur l'appareil. Les
hauteurs fournies par des pluviomètres disséminés d'une
manière quelconque sur un versant sont donc fonction
directe de l'altitude.
Soit une section B C du versant (fig. 2). Le pluviomètreen B recevra la quantité d'eau correspondant à B', dont la
densité absolue est certainement inférieure à celle de la
quantité qu'il aurait reçue si la pluie était tombée verti¬
calement de B.Le même raisonnement s'applique aux
autres points, C, D, etc.
C'est d'ailleurs un fait constaté expérimentalement que
tout le long du profil la quantité de pluie d'une même
situation météorologique est presque toujours plus faible par
vent fort dirigé vers l'amont, que par vent faible.
En effet, le parcours des gouttes, entre la couche nuageuse
et le sol est d'autant plus long que la force du vent est
5'i PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
grande. L'évaporation agit en conséquence, en diminuant la
densité de celle-ci.
Toutefois ce simple raisonnement ne s'applique que si le
courant d'air circulant sur le versant ne déforme pas la
surface inférieure de la couche nuageuse, supposée plus ou
moins horizontale. Ce cas est d'ailleurs presque toujoursréalisé en Suisse, pour les vents du secteur W.
Quelle que soit donc la vitesse du vent montant, l'équationde la variation de la densité le long du versant subsistera,
mais son paramètre changera en fonction de la vitesse.
Au cas, par exemple, où l'on voudrait extrapoler en alti¬
tude les données d'un seul pluviomètre, par comparaisonavec d'autres régions, il faudrait chaque fois tenir compte de
l'angle «, l'équation de la variation de la densité ayant été
déterminée préalablement avec les observations de trois
postes ABC. Pour chaque valeur de a on aura ainsi une
courbe, dont l'ensemble formera une famille.
Ce dessin, figure 2, montre encore qu'une partie de la sec¬
tion pluvieuse considérée (hachures) ne tombe pas sur le ver¬
sant AE, mais sur l'opposé, qui recevra alors beaucoup plusd'eau dans sa partie culminante E Dl5 si l'on suppose que la
courbe représentative des densités conserve la même allure.
Si le vent souffle en sens contraire, le raisonnement inverse
s'applique. On conçoit aisément que les ordonnées de la
courbe des densités sont simplement renversées, par rapport
au sommet du versant.
Il est bien entendu que cette façon d'envisager la répar¬tition des précipitations en altitude reste tout à fait schéma¬
tique et n'a rien à voir avec leur processus.
Si un versant A B est attaqué à sa base par un vent à peu
près horizontal VA, engendré par un gradient isobarique et
non thermique, la figure 2 B montre quelle sera la trajectoirede la résultante R, des filets d'air près du sol. R est égal à
la somme vectorielle de \'h et Vr, le vent au ras du versant.
On voit de suite que si l'état hygrométrique est voisin de
la saturation à la base du versant, les précipitations augmen-
VARIATION A\EC L'ALTITUDE 55
teront progressivement avec l'altitude, et cet accroissement
sera d'autant plus accentué que le gradient vertical de tem¬
pérature sera plus marqué. Au cas où le vent serait d'origine
thermique, M. S. de Perrot [58] a montré que la vitesse u est
produite, comme en hydraulique, par une hauteur de
charge h, exprimée en millimètres de mercure, répondantà la formule u = \1gh. Ceci n'intéresse d'ailleurs pas les
vents chargés d'humidité et de brouillards. Hann [7, p. 315
ef suis>.'\ a donné le résumé bibliographique des méthodes de
calcul, pour la condensation des courants ascendants. Mais
ce serait sortir du cadre de ce travail que d'entrer ici dans des
considérations plus détaillées, ces phénomènes météorolo¬
giques étant en réalité extrêmement compliqués ; toutes
sortes de facteurs sont à introduire simultanément dans les
analyses mathématiques : l'évaporation, la condensation, la
température, l'état hygrométrique, le frottement, la pres¬
sion, la force d'expansion et ascensionnelle.
Comme le phénomène global est résumé par une simplehauteur d'eau, nous allons essayer de tirer le meilleur partide ce chiffre, sans compliquer inutilement nos investigations.
L'image théorique que nous venons de tracer permet
d'expliquer, avec l'aide des vents dominants, certaines ano¬
malies constatées dans les données des totalisateurs de haute
montagne, comme le fait que plusieurs de ces appareils
placés au flanc des sommets, versant dos au vent, reçoivent
plus d'eau que ceux placés sur le versant face au vent, etc.
Cette image est aussi valable pour les stations de haute
montagne, non seulement si la couche nuageuse (ci-devant
représentée par sa hauteur h) plane au-dessus des plus hautes
d'entre elles, mais également si ces stations baignent à
l'intérieur du milieu condensant.
M. Mougin, Inspecteur général des Eaux et Forêts, en
collaboration avec M. Vallot, Directeur de l'Observatoire du
Mont-Blanc, a étudié ces influences diverses par de savantes
recherches dans les Alpes françaises et les Pyrénées. Il en
donne un résumé dans les « Études glaciologiques ».
56 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Les courbes qu'ils obtinrent, entre autres, pour le massif
du Mont-Blanc (1902 à 1911) indiquent une baisse des préci¬pitations dès l'altitude de 2650 m. Est-ce dû à des conditions
de fonctionnement défectueuses ? M. Mougin ne le dit pas. Il
nous semble que ce soit pourtant le cas d'après les obser¬
vations faites en Suisse, quoique celles-ci aient débuté plustard, en 1913. Avec des mêmes types d'appareils, l'inflexion
de la courbe doit avoir lieu dans les Alpes à une altitude
beaucoup plus élevée. Pour le massif de la Belle Plinier, les
précipitations sont par contre encore croissantes à l'altitude
de 3090 m. [59].M. Liitschg [44] écrit qu'en Suisse, au-dessus d'une alti¬
tude voisine de 3500 à 4000 m., les précipitations auraient
tendance à décroître. Par contre, jusque-là, la loi para¬
bolique semble subsister inaltérée. Pour l'instant, il n'est pas
encore possible de trancher définitivement cette question.On n'est pas assez renseigné sur la marche des totalisateurs.
Plusieurs autres facteurs concourent à l'explication de la
densité croissante des précipitations. Ainsi ce fait que beau¬
coup d'entre elles ont lieu directement dans le nuage qui se
résorbe. M. Mougin décrit quelque part dans ses monogra¬
phies le cas de pluies sédentaires dans les fonds de vallées de
la Haute-Savoie, pendant que les sommets les plus élevés
étaient dégagés de toute nébulosité. Il attribue à ce phéno¬mène le renflement des précipitations entre 1000 et 2000 m.
La limite inférieure des nuages à précipitations, comme le
nimbus et les brouillards denses, présente donc un intérêt
évident. Il est probable qu'elle coïncide statistiquement avec
l'altitude du maximum de courbure de la parabole de den¬
sité. Les profils dessinés par M. Brockmann et dont nous avons
déjà parlé, montrent en effet un changement assez brusquede la courbure des hauteurs pluviométriques vers l'altitude
de 1300 à 1600 m. pour le Valais, de 900 à 1000 m. pour le
Tessin, ce qui correspondrait assez bien avec l'altitude
moyenne du nimbus.
Il faut d'ailleurs tenir compte dans la plupart des cas des
VARIATION AVEC L'ALTITUDE 57
conditions locales, des vents de vallée dont les lois sont mal
connues, etc. Le fœhn, qui a donné lieu à de nombreuses et
intéressantes études, est un cas si spécial que son processus
ne saurait s'étendre aux autres vents de la région des Alpes,tels que ceux qui soufflent de France par-dessus le Jura.
Nous aurons d'ailleurs l'occasion de revenir sur cette ques¬
tion dans le chapitre des applications.Il n'est pas sans intérêt de remarquer ici que M. Mathias,
par des considérations tout à fait différentes des nôtres est
arrivé aussi à une formule parabolique pour l'expression de
la loi de variation des précipitations avec l'altitude [51].Il montre au moyen des observations recueillies dans 1400
stations de France, que la hauteur annuelle de la pluie peut
être calculée à toute altitude par la relation :
P=P0-KA-l^)aoù A est la différence d'altitude en mètres, entre une station
inférieure dont la précipitation P0 est connue et la station
supérieure dont la précipitation P est inconnue. P et P0 sont
en millimètres. K est une constante dépendant de la régionà laquelle on applique la formule. Cette constante varie de
0,6 à 0,9.en France.
Un savant allemand, M. G. Wussow [52], qui a critiquésévèrement la formule de Mathias, propose à sa place la
relation suivante :
P= po + 44_v44ïZrÂ*^8ÔÂ
qui est donc une courbe hyperbolique, où P est la précipi¬tation inconnue de la station supérieure, P0, celle connue de
la station inférieure, en décimètres, et A la différence de
niveau des deux stations, en hectomètres.
M. Wussow essaye de démontrer avec les données des tota¬
lisateurs suisses que sa formule est exacte. Il utilise en parti¬culier les valeurs du Jungfraujoch. Or, non seulement les
valeurs qu'il a employées sont inexactes, mais les moyennes
58 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
des observations se rapportent à des groupes d'années diffé¬
rents. Nous avons essayé de vérifier sa formule pour une
vingtaine de totalisateurs. Elle n'a donné en aucun cas des
résultats satisfaisants, les erreurs dépassant toujours le 15 %de la pluviosité et atteignant même quelquefois le 40 %.Une formule à coefficients uniques donnant la pluviosité de
stations dispersées, comme le Jungfraujoch, Gletsch, les
Diablerets, etc., n'existe pas. Il n'est pas rationnel de ratta¬
cher les précipitations des sommets et même celles des vallées
rapprochées à une seule formule. Il se peut qu'en moyenne,
sur un espace de plusieurs dizaines de kilomètres, les
moyennes des précipitations de toutes les stations à une alti¬
tude identique se trouvent situées sur une courbe idéale,mais ce fait n'implique pas pour cela que la formule soit
exacte. Chaque vallée a sa formule, a son « gradient vertical
de pluviosité ».
4. Densité des précipitations et méthode rapide pour
leur représentation graphique.
Si la représentation usuelle des précipitations par des iso-
hiètes tracées sur la carte topographique est le moyen le plussimple pour s'orienter sur la pluviométrie d'une région, les
méthodes employées pour dessiner ces courbes nécessitent
beaucoup de temps. Le principe même qui est à la base de la
carte est empirique, puisque l'extrapolation et l'interpolationsont, avec le bon sens, les seuls procédés de construction.
Nous avons étudié un moyen simple et rapide qui, croyons-
nous, a cet avantage de permettre, d'une part, le calcul des
débits des précipitations, c'est-à-dire leur intensité en chaquepoint d'une surface topographique donnée, et, d'autre part,de rendre instantanée la comparaison des précipitationsappartenant aux régimes météorologiques les plus divers, ce
qui peut avoir une certaine utilité en hydrologie. Il est tenu
compte des vents dominants et de la variation des précipi¬tations avec l'altitude.
DENSITÉ ET REPRÉSENTATION GRAPHIQUE 59
L'étude corrélative des précipitations et de l'écoulement
des cours d'eau qu'elles alimentent ne pourrait pas se faire
aisément si l'on n'avait pas une méthode rapide pour calcu¬
ler, pendant et après un phénomène hydrologique déterminé
dans le temps, les valeurs respectives des quantités d'eau
en présence. La comparaison de phénomènes divers sera
donc facilitée s'il est possible d'éviter le fastidieux dressagede nombreuses cartes d'isohiètes.
Le principe de cette méthode est basée sur la notion de
densité des précipitations définie précédemment. Ajoutonsque nous avons en somme donné deux significations à ce
terme. L'une qu'on pourrait nommer densité qualitative, au
sens physique, et qui a
fait l'objet de la discus¬
sion de la loi de varia¬
tion avec l'altitude, et
l'autre, densité quanti¬tative, au sens dynami¬
que, dont l'énoncé va
suivre :
Densité. Supposons,
pour fixer les idées, deux
axes de coordonnées (0,
P), où 0 représente le temps, dont l'unité la plus commodeest l'heure, — ce pourrait être aussi la minute, le jour,etc. — et P les hauteurs de précipitations en millimètres
(fig. 3).Une pluie continue pendant un temps 6, sera donc repré¬
sentée par une courbe P = / (0).dP
En tout point de cette courbe la dérivée -77- donnera ainsi
l'intensité instantanée de la pluie au temps correspondant.C'est cette dérivée que nous appellerons la densité de la
pluie, qui équivaut aussi à une vitesse. Pour donner un ca¬
ractère pratique à cette définition, nous la généraliserons en
Jours
60 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
appelant densité A} le débit moyen de la pluie ininterrompue
pendant un espace de temps quelconque.Ainsi, si l'heure est adoptée comme unité de temps, et
qu'en un jour il soit tombé 24,8 mm. de pluie d'une manière
continue, la densité horaire — moyenne absolue — sera :
A=MW= 1>03.l\ heures
Pour convertir la densité en millimètres de hauteur, dans
le système d'unités choisi, il suffit donc de multiplier A par
le temps 6. On a P = A.O.
Ceci dit, voyons comment on peut tirer parti de cette
définition pour des observations faites seulement toutes les
24 h.
Soit reporté sur l'axe des 0 avec une unité convenue, un
certain nombre de jours, et en ordonnées les hauteurs cumu¬
lées jour après jour des hauteurs millimétriques mesurées
(fig. 3). Si pour les besoins de notre exposé nous supposons
que la pluie soit répartie régulièrement dans chaque inter¬
valle de 24 h., c'est-à-dire que son débit ait été constant,
l'équation de la courbe P = f (H), joignant des points AB,
BC..., distants de 24 h. sera celle de la densité. La densité
pour chaque intervalle, faisant un angle a. quelconque avec
l'axe des abscisses, sera donc constante et égale à :
4dF P P
si on la rapporte à l'heure prise comme unité. On conviendra
donc de dire que la densité moyenne journalière rapportéeà l'heure est,
.
P millimètres mesurés au bout de 24 heures
24 heures
P et ') étant mesurés au moyen de l'unité métrique.Remarquons que cette définition n'a rien d'irrationnel,
car quelle que soit l'allure du phénomène pluvieux, son ré¬
sultat est en définitive exprimé au bout des 24 heures par
DENSITE ET REPRESENTATION GRAPHIQUE 61
une seule grandeur, mesurable avec une unité quelconque.Il suffit d'ailleurs pour être plus précis de dire que la densité
ainsi traduite est la densité moyenne journalière absolue,
rapportée à l'heure. Nous convenons de l'appeler par la
suite : densité horaire, sous-entendu rapportée au jour de
24 h. La densité horaire du second jour sera par conséquentP3 . .
P
^4, du troisième —,... La densité horaire pendant la période
complète, sera exprimée par la tangente de l'angle que fait
la résultante de la ligne polygonale AG avec 0. Il faut bien
remarquer qu'elle ne correspond pas à un phénomène vrai,mais en exprime simplement le résultat. La hauteur d'eau P0
au bout du sixième jour est :
P0= P, + Pa + ... P0=6x24"xtga=144.Am
Représentation graphique. Pour ne pas compliquer notre
développement nous ne considérerons que le cas générald'une surface topographique à pente et à contours plus ou
moins réguliers, toujours inclinée dans la même direction.
Ce sera le versant d'une chaîne de montagne, par exemple.Soit un système d'axes de coordonnées rectangulaires
dans l'espace et rabattu sur un plan (fig. 4J. Sur l'axe des
abscisses, commun aux deux quadrants, seront reportéesles altitudes A, sur l'axe des ordonnées, dans le quadrant
supérieur les densités de la pluie A, selon la relation
A = /j (A) qui est donc la variation de la densité en fonction
de l'altitude. Cette courbe, comme nous l'avons vu plushaut, a une allure parabolique. Sur le système d'axes (A, S)sera dessinée la fonction S' = /2 (A), qui est la courbe
hypsographique simple de la surface topographique. On
l'obtient en planimétrant les surfaces entre les isohypsessuccessives, en divisant ces surfaces élémentaires par l'équi-distance des isohypses et en reportant la longueur ainsi
obtenue sous l'axe A, dans le sens des S'. Ainsi entre les
deux altitudes A0 et A1} le terrain a une surface Sj, entre
deux altitudes A1 et A2, une surface S2 en projection hori-
62 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
zontale, etc. La somme des éléments de surface S1 + S2+---Sn,est égale à la surface topographique totale. Si ces élé¬
ments Sj, S2, etc., sont infiniment minces, la ligne qui passe
par leurs extrémités est précisément la courbe hypsogra-phique S' = /2 (A). Entre deux isohypses d'altitude quel¬
conque Ai et A4, la surface du terrain en projection hori¬
zontale, sera donc :
Sa.a^VMA) dk.
Pour évaluer la densité de la pluie en n'importe quel pointde la surface topographique, nous ferons l'hypothèse que les
isohiètes sont confondues avec les isohypses ou ceci à très
peu de chose près. Cette hypothèse se trouve d'ailleurs
vérifiée a priori pour une bande de terrain très étroite quiencadre la ligne de plusgrande pente, si tous les
pluviomètres sont placéssur celle-ci.
L'écart entre les iso¬
hypses et les isohiètes
ne peut de toute façon
qu'être faible comme nous
le verrons plus loin. Nous
nous en sommes rendu
compte en utilisant pour
des mêmes périodes les
pluviosités de toutes les
stations situées sur les
versants assez réguliersde l'Oberland zuricois, et en traçant pour la même surface
deux lignes de densités à l'aide des données de pluviomètresdifférents. Les écarts de ces lignes étaient minimes. Dès lors,la densité en tout point d'altitude A, quelle que soit sa posi¬tion géographique sur la surface considérée, est donnée par
l'expression \ = fx (A).
Fig. 4.
DENSITÉ ET REPRÉSENTATION GRAPHIQUE 63
Le volume total précipité sur le versant, pendant un temps0 est égal à la somme des éléments de surface infiniment
minces Sj, S2... S„, multipliés par les densités A1} A2, àn élevées
sur chacun d'eux et par le temps 0 ; ceci supposant un sys¬
tème de coordonnées dans l'espace : (A, A) dans le plan ver¬
tical et (S', A) dans le plan horizontal (fig. 4).On démontre facilement qu'entre des altitudes quelcon¬
ques Ax et A4, le volume précipité PV9 pendant un temps G,est égal à :
PV9 = e\/1(A)./î(A).iA.J A,
On a, en effet, d'une manière générale :
/(A,S') dX dS'
ce que l'on peut écrire :
rnPve = 0\ \f(A,S')dS'dA
J ai J s;
d'après la définition de l'intégrale double. Or, la fonction
/ (A, S), qui exprime la surface cylindrique engendrée par
une génératrice horizontale s'appuyant sur la courbe des
densités, n'est, en réalité, que fonction de A, d'après ce que
nous avons dit au sujet de la variation de la densité avec
l'altitude. Cette fonction est A = /, (A). On pourra donc
écrire :
/](A)«' = /1(A)(S/;-S1)
's;
or S4 — Si = /2(A), car la surface est fonction de l'altitude ;
d'où:
SA/,r» a4
U{k) (s;-s,va = e\/4(A) /a(A) dk.
Ai J Af
64 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Cette expression n'est intéressante que pour autant que la
fonction f2 est facile à déterminer, ce qui est rarement le
cas. Pratiquement on se bornera donc, pour calculer le vo¬
lume précipité pendant 6, entre deux altitudes quelconquesAi et A4, à faire la somme des volumes élémentaires obtenus
en divisant la surface comprise entre At et A4 en un certain
nombre de tranches rectangulaires St, S2, etc., de base
au a2, etc., que l'on multipliera respectivement par les den¬
sités A1? A2, etc. Ces densités passent par les centres de
gravité des surfaces limitées par les segments ar, a2, etc., et la
courbe des densités.
Il est intéressant d'étudier la fonction A = ft (A). L'expé¬rience montre que les courbes de densité pour quelques jourssont des paraboles dont le degré varie en une certaine mesure
avec la situation météorologique qui a donné lieu à la préci¬
pitation.Dans beaucoup de bassins des Préalpes les pluviomètres
étant placés à la base et à mi-hauteur des sommets, il est
utile de chercher à en combiner les données au moyen d'une
relation algébrique, pour faciliter les extrapolations en
altitude.
Soit l'équation générale de la parabole :
A = A0 + kA>- (1)
dans le système d'axes, A abscisses, A ordonnées, dans la¬
quelle k est une constante ainsi que A0, que nous prendronscomme la densité des précipitations à la base de la courbe,au-dessus de l'origine (fig- 4).
Cherchons à déterminer k de manière à ce que la densité
à toute altitude puisse être calculée au moyen d'un facteur
dépendant de la situation météorologique (vitesse et direc¬
tion des vents dominants). Soit ) ce facteur supposé inva¬
riable sur de grandes distances. Il pourra donc toujours être
calculé dans une région voisine où la loi de variation des pré¬
cipitations avec l'altitude est bien connue.
Exprimons k en fonction de la densité moyenne des pré-
DENSITÉ ET KEPRÉSENTATION GRAPHIQUE 63
cipitations Am entre les altitudes A0 et An. On a, d'après la
formule précédente :
(2)
m ° '
X-4-1 A„ _A0d'où :
. _(l + l){\m— A0)(A„— A0)
En remplaçant /c dans l'expression précédente 1), on ob¬
tient l'équation de A :
(x+l)(Am—\o)(K—K) xiA0
ik+l _ Ax+1
où A est donc la densité inconnue à calculer à l'altitude
quelconque A. Am se détermine facilement à l'aide des don¬
nées des pluviomètres situés entre l'altitude de la base
du versant A0 et A„, l'altitude du pluviomètre le plus élevé.
L'exactitude de Am dépend du nombre de pluviomètres à
disposition entre A0 et An. En principe trois postes suffisent.
>. est donc supposé tiré de l'expérience et connu pour chaquesituation météorologique donnant lieu à des précipitations.
Cette méthode peut s'appliquer à toutes les formes oro¬
graphiques que l'on rencontre, si l'on possède les observa¬
tions pluviométriques de base, indispensables.Pour entrer dans le détail des phénomènes hydrologiques,
il sera nécessaire de calculer les volumes des précipitations24 h. par 24 h. A chaque observation correspondra donc une
courbe des densités.
D'autre part, dans le cas où, contrairement à la remarque
formulée plus haut, l'observation démontrerait que les isohiè-
tes sont très écartées des isohypses passant par les stations
— ce qui, pour d'autres raisons encore, nous paraît douteux
LUGEON 5
66 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
— il serait facile de transformer la méthode en considérant
ensemble plusieurs courbes hypsographiques correspondantà diverses .sections de la même surface topographique. La
comparaison des cotes des points correspondants à ces cour¬
bes donne directement les écarts isohiètes-isohypses. Nous
n'entrerons pas dans ces détails pour l'instant.
5. Quelques faits fondamentaux intéressant la dynamiquedes précipitations et leur représentation dans les
régions montagneuses.
Nous ne voulons pas faire un résumé complet de cette
vaste partie de la climatologie. L'étude de la répartitionmensuelle, saisonnière et annuelle des précipitations est
le travail des météorologistes, plus que celui des hydrologues.La Suisse est peut-être une des contrées les plus compli¬
quées à étudier à ce point de vue, si grande est la variété des
phénomènes météorologiques qui s'y déroulent et dont la
résultante est le climat. Examinons d'une manière généraleet brève ce qui nous intéresse, c'est-à-dire la dynamique ou
plutôt le processus des phénomènes de précipitations et lais¬
sons de côté la statistique, méthode d'investigation sûre,sans nul doute, mais qui, aujourd'hui, dans cet ordre d'idées
au moins, ne peut plus nous contenter.
Les courants aériens et les précipitations. — Les courants
aériens humides qui donnent lieu aux précipitations, sont
engendrés par les gradients barométriques, appartenant à
des types de temps bien définis [61]. Il en ressort que la
carte pluviométrique annuelle dressée pour une période d'un
certain nombre d'années ne peut donner d'indications de dé¬
tail, même statistique, des phénomènes. M.Montessus deBal-
lore, soit dit en passant, a montré dans ses études mathéma¬
tiques, que pour le cas de la pluie, la statistique pure n'était
intéressante que lorsqu'on dispose d'un nombre considérable
d'observations. Le calcul des probabilités, au contraire, est
DYNAMIQUE ET RÉGIONS MONTAGNEUSES 67
une méthode d'investigation bien plus fructueuse, et si on
lui applique judicieusement la méthode de corrélation, elle
devient féconde en découvertes physiques. Elle nécessite, en
outre, un nombre minime d'observations [8].La carte pluviométrique n'est donc que la résultante
moyenne de la somme des phénomènes, dont des effets isolés
essentiels peuvent être entièrement cachés. Il conviendrait
de dresser non pas par mois ou par année des cartes pluvio-
Fig. 5.
métriques, mais pour chaque type de temps. Elles donne¬
raient des indications précieuses sur l'influence des vents.
Considérons le cas idéal d'une vallée symétrique à profilen V, bordée par des chaînes de montagnes de moyenne alti¬
tude (Préalpes), et représentée à la figure 5 par des isohypses.Supposons que le gradient barométrique soit orienté de telle
sorte que les vents pluvieux jusque dans les couches élevées
de l'atmosphère pénètrent par le bas de la vallée, suivant son
axe longitudinal TS. Les isohiètes seront sensiblement con¬
fondues avec les courbes de niveau, et l'image sera symétri¬que. La loi de variation parabolique se vérifiera, selon un
profil I. Si le vent en suivant la même direction souffle dans
68 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
le sens opposé, c'est-à-dire s'il est descendant, la distribution
des isohiètes sur le versant restera la même, mais pour des
raisons bariques et thermiques, il peut pleuvoir proportion¬nellement davantage aux basses altitudes que sur les hau¬
teurs. La courbe des densités le long de l'.axe TS s'abaisse
d'abord pour passer par un minimum, puis remonte selon
un profil II. Très rarement ce cas peut aussi se produire
par vent montant.
Si le courant suit la flèche III, normale à la vallée TS,le versant debout ASDE, recevra plus d'eau que l'opposé
AST, exception faite de la zone comprise directement sous
l'arête SA. Le minimum des précipitations aura lieu générale¬ment sur la base du versant debout CST, et la forme de la
courbe des densités sera celle qui est dessinée sur la flèche III.
Enfin dans le cas IV où le vent soufflerait de biais, le phéno¬mène se complique, les versants reçoivent d'inégales quanti¬tés d'eau, théoriquement dans le rapport du sinus de l'angle
que fait la flèche IV avec TS. Ce cas est rare du reste, car
le vent est presque immédiatement canalisé par la vallée,
lorsqu'il s'élève, mais il est un de ceux, précisément, où les
isohiètes ne sont pas confondues avec les isohypses. La mé¬
thode de répartition que nous avons préconisée s'applique
encore, à condition de faire intervenir l'angle du vent avec
les deux systèmes de profils et de courbes hypsographiquesdes deux versants.
Ajoutons à cette image que la vitesse du vent peut aussi
jouer un certain rôle. Lorsqu'elle est grande, il en résulte des
variations de pression et de frottement de l'air sur les ver¬
sants, qui ont leur répercussion immédiate sur la pluie. On
voit sur la carte pluviométrique de la Suisse, qu'au voisinagedes défilés étroits du Rhône et du Rhin, les précipitationssont plus élevées. Cela provient précisément de la compres¬
sion relative des filets d'air à l'entrée, et de leur détente
brusque à la sortie, occasionnant ainsi une surcondensation.
Ce phénomène a été signalé il y a bien des années par
M. Maurer.
DYNAMIQUE ET RÉGIONS MONTAGNEUSES 69
Notre rapide esquisse représente donc les différents cas
qui se produisent pour des vents non contrariés. Pour des
vents contrariés, c'est-à-dire pour ceux auxquels les hautes
montagnes s'opposent en obstacles quasi infranchissables,les phénomènes se compliquent de telle sorte qu'il est inutile
de chercher à en ébaucher une théorie qui aurait chance de
succès. La carte pluviométrique de M. Lùtschg, du Matt-
markgebiet est un exemple frappant de la complexité du
problème [44]. L'extrapolation des données des quelques to¬
talisateurs très dispersés que possède la Suisse est délicate
dans des régions élevées dépassant 2000 m., ou ce qui revient
au même pour des hauteurs de 2 m. d'eau.
Dans un récent travail intitulé : Mouvement de Vair et de
Veau sur le sol, M. A.-B. Dobrowolski [62] montre très judi¬cieusement que le mécanisme de la circulation générale de
l'air sur les montagnes est beaucoup plus compliqué qu'onne le suppose. On l'a jusqu'ici fort mal interprété, en ne lui
donnant pas de base hydrodynamique. Les moyens d'investi¬
gation de la météorologie dynamique s'appuient de plus en
plus sur les phénomènes hydrauliques connus expérimentale¬ment et sur les méthodes de calcul de cette science.
Dans les fonds de vallée les vents pluvieux ont une direc¬
tion constante et il n'est pas difficile d'y interpoler les don¬
nées des pluviomètres. Il en est autrement des plaines où
la rose des vents est très étoilée. Combinée avec celle des
précipitations, elle se complique de plus en plus lorsqu'onchemine de la chaîne alpine vers le nord de la Suisse. A
Berne, par exemple, la répartition des vents pluvieux (enheures de vent pour 1 h. de pluie) est la suivante :
N NE E SE S SW W NW
16,1 22,8 11,4 10,6 9,2 4,6 5 9,7
Il est donc intéressant avant de faire l'étude hydrologiqued'une région de s'orienter sur la rose des précipitations, si l'on
donne ce nom à la combinaison graphique de la fréquence
70 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
des précipitations à la fréquence du vent. Mais comme il l'a
été dit plus haut, la courbe des densités peut pourvoir au
défaut d'observations du vent.
Voici, à titre documentaire pour la région des Alpes,d'après M. Ahlmann [63], une rose des vents rangés par
fréquence. Les vents pluvieux soufflent des quadrants S à N
en passant par l'W. Ce fait complique l'interpolation des
isohiètes dans les régions élevées et très aérées. Les girouettesde quelques stations comme le Bernardin et le Grand Saint-
Bernard ne donnent pas la rose des courants aériens non
contrariés, car elles se trouvent dans des vallées ou sur des
cols. Les vents les plus pluvieux ont une composante à peu
près normale à la chaîne des Alpes, sur ses deux versants
S et N.
Tab. 4
d'après Ahlmann [63]
Stations
météorologiquesAltitude
Fréquence des vents en pourcentage
N NE E SE SW I W NW
Sàntis
RigiPilate
Gd Sl-Bernard
S'-Bernardin.
S'-Gotthard. .
M' Generoso..
Zugspitze....Sonnblick...
.
2500
1787
2068
2476
2073
2096
1610
2964
3095
o
1
10
47
61
1
11
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7
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6
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8 17 8
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7
21
l
3
1
40
35
11
(Les vents pluvieux sont en caractère gras.]
Remarques sur le tracé des isohiètes et le relief montagneux
de la Suisse.
L'étude attentive de la pluviosité en Suisse, le tracé
de nombreux profils au travers de toutes les principalesvallées et l'examen des données d'une cinquantaine de
DYNAMIQUE ET RÉGIONS MONTAGNEUSES 71
totalisateurs 'nous ont conduit aux quelques remarques
suivantes :
Dans les massifs intérieurs de la Suisse, ainsi que dans le
Jura, la répartition des précipitations selon l'altitude est
beaucoup plus régulière que dans les massifs en bordure, où
les effets des courants compliqués des deux régimes médi¬
terranéen et océanien sont parfois très difficiles à interpréter.Cette constatation est relatée clairement par les données des
totalisateurs des deux chaînes bordant la vallée du Rhône.
Dans les Alpes bernoises, les isohiètes dues aux précipitationscondensées principalement dans les courants dus aux sec¬
teurs SW-NW, suivent les isohypses jusqu'à une grande alti¬
tude, c'est-à-dire dans les régions qui ne sont pas hérissées
d'obstacles de forme compliquée. Les cols cependant, sous
l'influence des courants composés, et les endroits de fréquen¬tes interférences entre le fœhn et les vents du secteur ouest,
font exception. Ainsi, au col du Grimsel, la pluviosité
moyenne atteint 220 cm., mais elle s'abaisse à près de 150 cm.
au débouché des vallées latérales du glacier de l'Aar. Il est
vrai que les thalwegs de ces vallées, quoique situés à une
altitude plus élevée que le col, sont fortement encaissés, et
les totalisateurs s'y trouvent de' ce fait à l'abri des grandscourants de perturbations.
Ces minima fermés sont l'apanage d'autres régions des
Alpes situées au-dessus de 2000 m.
Le caractère de régularité dans l'augmentation des préci¬pitations sur le versant N de la chaîne des Alpes bernoises
est nettement relaté par le profil Interlaken-Jungfraujoch.En portant la pluviosité en abscisses et les altitudes en or¬
données, on voit que les données réduites à la moyenne de
vingt-cinq années des stations de Lauterbrunnen (810 m.,
118 cm.), Grindelwald (1050 m., 123 cm.), Eigergletscher"2323 m., 202 cm.), Scheidfluh (2800 m., 233 cm.), Concordia
1 D'après les données du Service Hydrologique de l'Institut Central
Météorologique à l'Exposition de la navigation intérieure, à Bâle en 1926,la Suisse possédait, en 1925, environ 70 totalisateurs.
72 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
(2850 m., 234 cm.), Jungfraujoch (3480 m., 294 cm.),Mônchsgrat (3810 m., 323 cm.), sont exactement sur une
courbe parabolique. Cette courbe régulière, ne présentantdonc aucun point d'inflexion, implique que les précipita¬tions ne cessent pas de croître jusqu'au totalisateur à 3810 m.
L'extrapolation en altitude des données des stations de
vallée est par contre très délicate. Le gradient des précipi¬tations, c'est-à-dire la croissance de la tranche pluviale par
100 m. de différence de niveau dépend de l'altitude des
sommets, d'une part, et de l'inclinaison moyenne des ver¬
sants, d'autre part.
En suivant une même isohypse, au pied d'une chaîne •
de montagne barrant normalement les courants humides,on remarque que la pluviosité diminue en raison inverse
de l'altitude de la crête. Pour la chaîne bernoise, la pluvio¬sité diminue manifestement du pied du massif du Wildhorn
(3268 m.), à la région de Grindelwald que surplombe la
Jungfrau (4167 m.).Cet abaissement progressif des isohiètes, en connexion
avec l'abaissement du niveau des sommets (de la Gipfelflurdes Allemands) [54] est aussi très prononcé dans les Alpesvalaisannes, comme on le verrait sur un profil longitudinaltracé entre Saas-Fée et le Grand Saint-Bernard. La chaîne
des Alpes valaisannes d'ailleurs, est assimilable à un véritable
brise-lame érigé en première ligne contre les courants du
fœhn montant plusieurs fois par année avec violence de la
vallée du Pô. Le flux d'air qui se sectionne autour des hauts
sommets de 4000 m., tourbillonne à l'arrière des obstacles,donne lieu à de véritables trous d'air au-dessus des fonds de
vallées, et perd une bonne part de son énergie avant de ren¬
contrer en second lieu et sous un angle aigu, la chaîne ber¬
noise. La violence de ces phénomènes est un des faits quiexpliquent la grande complexité dans la distribution des '
précipitations de la haute vallée de Saas, comme M. Lùtschgl'a si bien dit.
Les vents du NW, par contre, beaucoup plus réguliers
DYNAMIQUE ET REGIONS MONTAGNEUSES 73
et moins rapides, expliquent pour une bonne part, la régula¬rité des isohiètes de la chaîne bernoise, moins sujette au
fœhn.
Les courants du SW, qui suivent à peu près longitudina-lement les deux grandes chaînes, ne semblent pas non plusêtre une des causes de la grande variabilité des précipitationsvalaisannes. Ils n'agissent irrégulièrement que par des cou¬
rants secondaires locaux du S, qu'ils engendrent dans les
vallées latérales du bassin du Pô. Mais cet appel d'air mé¬
diterranéen est alors bien différent du fœhn.
La question des « abris » joue un rôle de tout premierplan en pluviométrie de haute montagne. La tranche plu¬viale de petites vallées, subissant les effets composés des deux
principaux courants pluvieux, peut être très faible suivant
la disposition des barrages. Ainsi la vallée de Binn reçoitfort peu d'eau en regard des régions voisines, parce qu'elleest protégée contre les courants du NW et que le fœhn,barré par la chaîne bernoise, est dérivé à sa gauche et à sa
droite par le Grimsel et le Simplon.
La loi de variation des précipitations avec l'altitude ne
dépend pas seulement de l'altitude, de la pente et du relief,mais la nature même des précipitations intervient pour ex¬
pliquer les anomalies de certains totalisateurs de haute
montagne, très rapprochés. On sait que plus on s'élève au-
dessus des coteaux réguliers des vallées, plus le relief se com¬
plique. Il en résulte que la turbulence atmosphérique autour
des sommets sera accrue en raison de leur altitude. Or,comme l'indice de nivosité, c'est-à-dire le rapport entre les
chutes neigeuses et pluvieuses croît également avec l'altitude,la distribution des précipitations en sera d'autant plus irré¬
gulière. En effet, les flocons plus légers que les gouttes
d'eau, sont aussi plus facilement chassés par les vents. Ils
atteignent le sol après un long parcours, en sont soulevés
parfois, et se déposent dans les zones calmes où la pluietombe normalement en moins grande quantité. Les formes de
74 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
la couche de neige sur le sol, les soufflures, les rides sastru-
gis, etc., attestent cette irrégularité, alors que la pluie une
fois tombée, est gagnée définitivement par le sol, avant de
continuer son cycle.Vers 3000 m., le dixième, seulement, de la précipitation
annuelle est pluvieuse. Les erreurs instrumentales s'accrois¬
sent donc avec l'indice de nivosité et le degré d'exactitude
sur les moyennes s'abaisse. Un plus grand nombre d'années
d'observations des précipitations est nécessaire en haute
montagne, pour atteindre le même degré de sécurité sur les
moyennes, que dans la plaine. Ainsi pour la série des vingt-cinq années 1901-1925, l'erreur à craindre sur la moyenne
du Sàntis (2500 m.), de 3012 mm., est de 4,47 %, alors qu'àEinsiedeln (914 m.), sur 1627 mm., l'erreur n'est que de
2,82 %.En Suisse, l'irrégularité dans l'augmentation des précipi¬
tations, commence en général à se faire sentir vers 2000-
2300 m. C'est à partir de cette altitude aussi que les flancs
des vallées se démembrent et que le crénelage des chaînes
s'accentue. Jusque-là les isohiètes suivent plus ou moins
régulièrement les isohypses, s'il n'y a pas de raison dyna¬mique spéciale qui intervienne pour changer cette distribu¬
tion.
La figure 6 A représente la variation du gradient vertical
des précipitations suivant la pente, la figure B, l'inflexion des
isohiètes sur l'éperon terminal de la vallée de Lauterbrunnen,cas type de vallée transversale, rencontrée de biais par les
vents pluvieux, la figure C, l'altitude différente de mêmes
isohiètes, sur les versants de la vallée (diminution de la plu¬viosité dans les régions abritées).Pour étudier la pluviosité d'une vallée, il est à notre avis
préférable de placer les récepteurs sur les sommets, en pleinvents « non contrariés », ou tout au moins peu contrariés.
Ces appareils décèleront plus fidèlement les condensations
réelles des courants et seront d'ailleurs des points de repèressûrs pour le raccordement des courbes de variation avec
DYNAMIQUE ET REGIONS MONTAGNEUSES 75
l'altitude, qui lient les postes de vallée avec la haute mon¬
tagne. Il y a lieu de croire que le volume total des précipi¬tations tombées entre une sommité et le niveau de base d'une
vallée dépend moins de la distribution compliquée et de l'ir-
Fig. 6.
régularité des isohiètes au-dessus des flancs de la vallée, que
du volume total d'air déplacé. Ce qui revient à dire qu'aucas où la pluviosité du sommet est soigneusement mesurée,celle du thalweg étant exacte — on le sait — la distribution
des quantités de pluie autour de la ligne de variation avec
l'altitude a quantitativement peu d'importance pour l'éva-
76 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
luation du volume total précipité : les points disséminés au¬
tour de la courbe se compensent les uns les autres, la courbe
se régularise d'elle-même, et devient ainsi une courbe
moyenne.
Lorsqu'on ne possède que quelques données pour dessiner
la carte pluviométrique d'une région montagneuse, il est
préférable de confondre les isohiètes avec les isohypses,
plutôt que de tracer ces courbes grosso modo au hasard,
comme on le fait presque toujours. Sur ce point seulement,nous sommes partisans des idées qui ont dirigé M. Brock-
mann, dans le tracé de sa carte.
Si, au lieu de représenter graphiquement les précipitations
par des isohiètes, sur le canevas trigonométrique, on trace
p
les courbes de densité moyenne annuelle \moy =—^ de n''
moi/
années, où P est le module pluviométrique et imoy est le
nombre moyen de jours de pluie, on obtient une image très
différente qui donne déjà un caractère sur le régime pluvio¬
métrique. Puis si l'on dessine sur cette épure les courbes d'é¬
gale fréquence exprimées très simplement par le nombre
moyen de jours où il a plu par an et étendu au même
nombre d'années, on obtient un réseau de courbes qui s'en¬
trecoupent. Le module est donné en chaque point d'inter¬
section par le produit des chiffres ±molj et Jmay, des courbes
correspondantes.Ce mode de représentation permet de voir d'un coup d'œil
le caractère complet de la région, ce que l'on pourrait appe¬
ler, par analogie avec les cours d'eau, le coefficient d'irré¬
gularité des précipitations.Pour prendre un cas concret, considérons la carte pluvio¬
métrique de la Suisse. L'hydrologue qui n'est pas renseignésur les climats très différents des diverses zones orographi¬ques, et ne possède pas d'autres sources de renseignements
DYNAMIQUE ET REGIONS MONTAGNEUSES 77
que les isohiètes, peut facilement confondre sous un même
régime pluvial les cours d'eau des versants sud et nord des
Alpes. Les hauteurs pluviométriques sont en effet les mêmes.
Mais au Tessin la fréquence des jours pluvieux est deux fois
moindre que dans les cantons de la Suisse centrale. Le carac¬
tère des précipitations y est donc bien différent, et c'est
justement ce que montreront les deux réseaux de courbes.
Il eût été plus simple d'exprimer cette variation de la fré¬
quence et de la densité des précipitations par un seul chiffre
qui eût servi aussi à la construction de la carte du coefficient
d'irrégularité. Mais ce n'est pas très facile. Nous avons essayéde fixer cette double variation par une formule tirée des
fonctions périodiques où le coefficient entre sous forme de
puissance. Malheureusement cette formule a dû être aban¬
donnée, car elle ne présentait plus alors qu'un intérêt ana¬
lytique.Toute autre formule basée sur la densité et la fréquence
seules, ne signifie pas grand'chose non plus, car il arrive
souvent que des opérations arithmétiques effectuées don¬
nent, pour des stations à régime bien différents, des résultats
identiques. Ainsi pour Faido et Einsiedeln, où il tombe la
même hauteur d'eau, la densité et la fréquence sont dans le
rapport 1 à 2 et 2 à 1, en sorte que toute combinaison finit
par donner deux chiffres identiques, qui n'expliquent évi¬
demment plus les différences essentielles des régimes de ces
stations.
Il ne faudrait pas croire que tout ceci vienne compliquerle problème élémentaire de la pluviométrie. Nous aurons
l'occasion de montrer plus tard qu'il est au contraire de la
plus haute importance de combiner, même dans des moyen¬
nes tout à fait générales, s'étendant sur des années, ces deux
éléments dynamiques : la fréquence et la densité. Nous ne
sommes pas seul à penser de la sorte. M. Coutagne [64, 65] dans
un de ses nombreux travaux d'hydrologie, s'exprime ainsi :
« Nous croyons d'ailleurs que si l'étude du ruissellement est
à ce jour si peu avancée, c'est qu'au lieu d'aller du simple
78 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
au complexe, on a procédé à rebours, et dans le temps, et
dans l'espace. »
Signalons encore une série de définitions récentes se rap¬
portant aux précipitations et dues à cet auteur [66].Il appelle indice de variabilité du module pluviométrique,
par analogie avec le coefficient pluviométrique d'Angot, la
variation des modules autour du module moyen absolu.
Cette définition se traduit de la manière suivante :
Si l'on porte en abscisses les modules pluviométriquesannuels P0 et en ordonnées leur fréquence /, pour un grandnombre d'années, on obtient une courbe en cloche, qui n'est
autre que la courbe de probabilité :
/ = ke ^"(^o Vom)*
où Pom est la moyenne arithmétique pour laquelle / est
maximum et égal à k. a et k sont d'ailleurs liés par la rela¬
tion k =-y=—.
C'est le coefficient "k qui caractérise la varia¬
tion du module pluviométrique. Plus il est grand, moins
sont accentués les écarts des modules annuels de part et
d'autre du module moyen, ce qui revient à dire que plus la
courbe est pointue, plus les variations de la pluviosité sont
faibles.
Ainsi pour les stations de la Méditerranée, connues par la
grande variabilité du module d'une année à l'autre, les ailes
de la courbe seront très aplaties.La probabilité pour que la hauteur de la pluie soit com¬
prise entre deux valeurs P0i et Po2 est donnée par le rapportde l'aire de la courbe comprise entre les ordonnées élevées
sur ces deux valeurs, à l'aire totale.
M. Coutagne signale encore comme importants pour la con¬
naissance d'une station, les rapports suivants : [66, p. 720]1. Le rapport 'de la hauteur d'eau annuelle maximum
PVmax au module moyen Pm, soit -~ = çmax, qui caractérise
l'écart maximum au-dessus de la moyenne.
DYNAMIQUE ET RÉGIONS MONTAGNEUSES 79
2. Le rapport de la hauteur d'eau annuelle minimumP
Pmi„ au module pluviométrique moyen, soit ~^ = vmm, qui"m
caractérise l'écart maximum au-dessous de la moyenne.
3. Le rapport de la hauteur maximum à la hauteur mini-
mum, soit p"^ = vm, qui caractérise l'amplitude maximum
des écarts.
Il serait évidemment intéressant d'entrer dans le détail
des phénomènes météorologiques divers qui sont la cause des
précipitations. Mais ce chapitre emprunte les hypothèseshardies de la thermodynamique de l'atmosphère et nous ne
pouvons nous y arrêter. Contentons-nous de résumer les
idées les plus modernes sur la formation des pluies en Europecentrale. Car il nous semble indispensable de connaître au
moins sommairement les processus pluvieux avant de cher¬
cher à interpréter les phénomènes complexes d'écoulement
qui sont autant en rapport avec la température qu'avec les
précipitations elles-mêmes.
La théorie du front polaire et de ses dérivés est aujour¬d'hui admise dans tous les instituts où, pour prévoir le
temps, on calcule d'avance les « passages » des fronts plu¬vieux, en les rattachant entre autres aux variations de tem¬
pérature. L'idée fondamentale des discontinuités dans l'at¬
mosphère se retrouve indéniablement dans presque toutes
les causes de la pluie. On se référera avec intérêt aux œuvres
magistrales des savants de l'école norvégienne [67, 68, 69, 70]dont un des chefs, M. J. Bjerknes, a emprunté à la Suisse
divers cas pour démontrer l'extension de ces méthodes à tout
le continent. Ces idées nous permettent de classer plus intel¬
ligemment qu'on a pu le faire jusqu'ici, les situations baro¬
métriques correspondant aux types de pluies.Les dépressions qui nous viennent de l'Atlantique sont
avec celles de la Méditerranée les principaux facteurs du
80 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
climat de l'Europe centrale. Elles ont toutes une origine
thermique. La rencontre des masses d'air froid descendant
des régions polaires avec l'air chaud montant de l'équateurfavorise la naissance du tourbillonnement, tout comme en
hydraulique le long des filets d'inégale vitesse et direction,
les molécules d'eau se mettent à tourner en spirale. Ces
dépressions sont formées, comme l'indique le schéma, de
deux masses d'air de températures différentes, séparées par
des lignes de discontinuité appelées front chaud et front
froid. Le front chaud est précédé d'une zone pluvieuse, car
l'air du secteur chaud, obligé de monter sur l'air froid de
l'avant de la dépression, condense sa vapeur d'eau par dé¬
tente. Le long d'un front froid, les positions des deux airs
étant inversées, il se condense une plus faible quantité de
vapeur d'eau, et les précipitations sont moins denses.
Au cours du déplacement de la dépression et avant d'ar¬
river sur le continent, ces deux systèmes de lignes de discon¬
tinuité se rejoignent fréquemment ; il en résulte un cycloneà ligne unique, dite d'occlusion. Le terme occlu signifie que
le secteur chaud n'existe plus (fig. 7).Cette image trouve son homologue dans les trains de tour¬
billons que l'on voit naître à la surface des eaux courantes ;
la traîne des tourbillons migrateurs représente grossièrementles fronts [71].La Suisse reçoit des dépressions de l'Atlantique, des fronts
qui sont la plupart du temps occlus, et les précipitations qui
s'y rattachent sont remarquables par leur caractère tempo¬
raire, à l'inverse des pluies dites de relief qui séjournent sou¬
vent quelques jours.
Lorsqu'un secteur chaud conservé sans déformation tra¬
verse la chaîne alpine, aux deux phases chaudes et humides,froides et sèches, correspondent des oscillations extrêmement
puissantes des cours d'eau. On les a, à tort, attribuées jus¬
qu'ici au fœhn, exclusivement. Un cas remarquable est celui
du 5 août 1925, où il a été possible de prévoir à Zurich,
24 heures à l'avance, une forte hausse de température,
DYNAMIQUE ET RÉGIONS MONTAGNEUSES 81
d'abondantes précipitations dans la région du Jura, et par
conséquent une forte augmentation du débit des rivières.
En quelques heures le limnimètre de Bâle marquait —|—40 cen¬
timètres, sans que le fœhn ait soufflé : un secteur chaud
venait de traverser la Suisse.
La météorologie a reçu une impulsion très heureuse, grâceà ces découvertes, ce qui, sans nul doute, aura sa répercus-
CYCLONE THÉORIQUE DE BDERKNES
Fig 7
sion prochaine dans la partie de l'hydrologie purement dyna¬mique. Car il n'y a pas que la connaissance des causes des
précipitations qui soit nécessaire aux investigations, mais
aussi celles des variations de température, indispensables,
pour les calculs concernant la fusion des neiges.La météorologie dynamique de la Suisse est un vaste pro¬
blème qui n'a été jusqu'ici qu'effleuré. Nous y consacrerons
quelque attention dans la suite, car elle est en somme la
source de tout phénomène hydrologique.Au point de vue statistique, il ne faut pas oublier la ques¬
tion des plages de minima et maxima des précipitations, dont
LUGEON 0
82 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
l'importance est signalée pour la régularisation des longsorganismes fluviaux et surtout pour la conjugaison des
usines hydro-électriques, où l'on doit faire appel, en pays
montagneux, à toutes les ressources que nous offre la ther¬
mique de l'air. Malheureusement ces statistiques climatolo-
giques sont basées sur un ensemble de facteurs dont les lois
de corrélation sont mal connues. 11 faut de la prudence.M. Brockmann a dessiné quelques cartes de maxima très
suggestives et nous avons essayé de les comparer avec des
moyennes de débits des cours d'eau drainant les régionsauxquelles elles se rapportent. Ces études ne nous ont rien
apporté de nouveau.
Plus intéressantes sont les cartes de maxima que publiele Bureau Central Météorologique, pour des précipitationsd'un ou deux jours. Elles facilitent la recherche de cas
importants.On sait que la variabilité extrême des précipitations obéit
dans le temps à des règles très approximatives, et il convient
de chercher à classer par ordre de grandeur les hauteurs
d'eau et les phénomènes dynamiques qui en sont la cause.
Nous avons essayé aussi de faire quelques statistiques des
hauteurs de pluie recueillies après les passages des fronts.
La description ci-après n'a d'autre prétention que de donner
une idée sur la quantité d'eau qu'entraîne vers le sol l'évo¬
lution des principaux phénomènes météorologiques.
6. Classification des pluies pour la Suisse.
a) Pluies préfrontales, dues surtout à des averses d'insta¬
bilité prenant naissance au moment de la baisse baromé¬
trique qui précède un front. Cause essentielle : variation
brusque de la pression, détente adiabatique. Hauteur
moyenne des précipitations : 3 millimètres.
b) Pluies de front chaud (d'après Bjerknes), formées au
sein d'une masse d'air chaud qui s'élève au-dessus d'une
masse d'air froid en forçant cette dernière à reculer. La plu-
CLASSIFICATION POUR LA SUISSE 83
part de ces discontinuités atteignent ou dépassent les plushauts sommets des Alpes. Pendant qu'elles traversent la
Suisse de l'W à l'E, leurs précipitations sont parfois augmen¬tées par des courants locaux de vallées, ou par la combinaison
des effets du fœhn (air humide méditerranéen). Ce sont les
fronts chauds qui donnent les plus fortes précipitations.Hauteur moyenne : 18 millimètres.
c) Pluies de front froid (d'après Bjerknes), formées au sein
de l'air chaud déplacé par l'arrivée d'un coin d'air froid.
Beaucoup moins importantes que les précédentes, ces préci¬
pitations atteignent en moyenne 6 millimètres.
d) Pluies des lignes d'occlusion, formées par la jonction de
deux lignes, chaude et froide. Elles ont plutôt le caractère de
grains. Par prépondérance d'air chaud, les précipitations
atteignent 8 à 10 mm. Si l'air froid domine, elles donnent en
moyenne 15 mm. Ces lignes ont d'ailleurs des caractères très
variables et sont parfois indistinctes, parce que n'atteignant
pas le sol. Dans la saison estivale, des manifestations ora¬
geuses les accompagnent souvent et apportent de plus gran¬
des quantités d'eau. Lorsque la vitesse des éléments météo¬
rologiques est faible sur le continent, on les voit séjourner
plusieurs jours à la même place en se régénérant parfois, et
prolongeant les pluies.
e) Les pluies dites orographiques sont complexes et diffè¬
rent, suivant la région où elles se forment. Par définition,elles sont dues à l'ascension de l'air chaud vers les monta¬
gnes. Sous cette même expression, nous pouvons classer les
averses d'instabilité continentales, dues également à réchauf¬
fement différent de la plaine et de la montagne, donnant
naissance à des orages locaux (Léman, Alpes de Savoie et de
Fribourg et Appenzell en particulier). Les précipitations du
fœhn peuvent aussi, dans une certaine mesure, être assi¬
milées à une pluie orographique, comme l'ont montré bien
des études, celles de Wild entre autres. Mais généralement ce
vent se combine avec le passage d'un front chaud venant de
l'Atlantique. Il n'est pas exclu d'ailleurs que le fœhn ne soit
84 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
dû en partie à une surface de discontinuité plus ou moins
stationnaire en altitude, pendant sa première phase, et quiserait subitement déséquilibrée par l'augmentation brutale
du gradient barométrique. Le mélange spontané des masses
d'air qu'elle sépare expliquerait l'abondance des condensa¬
tions. L'analyse détaillée du cas du 15 février 1925 semble
étayer une théorie de ce genre.
Les pluies du Rhône français qui montent de la Méditer¬
ranée jusqu'à Lyon peuvent être aussi d'origine purement
orographique et trouver naissance dans la contre-circulation
ascendante et descendante de la vallée. La théorie des tour¬
billons verticaux dans l'atmosphère n'a pas encore ses adep¬tes, néanmoins elle serait d'un précieux concours dans ces
investigations.
f) Les pluies de brouillard (bruine) insignifiantes par les
quantités qu'elles apportent au pluviomètre, sont d'une
importance énorme dans le problème de la condensation
occulte, en haute montagne spécialement.g) Pluies sédentaires de noyaux pluvieux [72]. Tirant leur
origine d'air essentiellement océanique, ces pluies persistentsouvent quelques semaines. Les courants très humides du
NW, engendrés par la disposition parallèle des isobares sur
le continent, fixent contre la chaîne alpine des masses nua¬
geuses en constant renouvellement. Par des effets orogra¬
phiques, ces précipitations atteignent des valeurs élevées de
12 mm. en moyenne et par jour. On peut leur rattacher aussi
les pluies des situations de marais barométriques, suivant la
nomenclature de l'école française, et dues à des courants
ascendants mal définis et très variables qui se produisentquand les isobares sont sinueuses et sans caractère, sur l'Eu¬
rope centrale. En été, ce sont de telles situations qui favo¬
risent les orages importants.h) Pluies des fronts quasi-stationnaires. MM. Bergeron et
Swoboda [70] ont montré que des surfaces de discontinuité
dues à la rencontre d'un courant lent du N avec l'air montant
des tropiques, pouvaient séjourner plusieurs semaines sur
CLASSIFICATION POUR LA SUISSE 85
l'Europe centrale en ne se déplaçant pour ainsi dire pas. Leur
axe suit généralement un parallèle et les fortes condensations
auxquelles elles donnent naissance atteignent sur le plateausuisse, en moyenne, une dixaine de millimètres par jour. En
été, ces fronts quasi-stationnaires sont presque toujours
accompagnés d'orages qui se forment au sein même de la
discontinuité. Il peut alors en résulter des zones locales de
précipitations très denses. Ainsi les orages les plus impor¬tants notés au cours de l'année 1925, en Suisse, sont dus au
stationnement de telles lignes entre la chaîne des hautes
Alpes bernoises et centrales, et le Jura jusqu'au lac de Cons¬
tance.
Nous ne croyons pas nécessaire de disserter sur les types
de temps et les ensembles d'isobares qui se rattachent à ces
classes de précipitations. Ce serait là empiéter sur le domaine
de la météorologie pure. Une seule remarque pourtant. Ces
diverses pluies n'atteignent pas toutes les régions de la Suisse.
Le fœhn, par exemple, ne se fait sentir qu'exceptionnelle¬ment dans la Suisse occidentale par ses précipitations. Le
Plateau et le Jura vaudois en sont exempts. Il provoque,
par contre, des chutes de l'ordre de 5 millimètres dans le
Jura neuchâtelois.
Les vents d'W et les fronts chauds laissent souvent de
côté les Grisons, et le Tessin est isolé de la circulation géné¬rale d'W, du versant N des Alpes.
L'essentiel à retenir, est le caractère dynamique des
précipitations, c'est-à-dire les vents qui les accompagnent,
car à chaque pluie appartient un vent bien déterminé.
Ainsi les fronts chauds sont accompagnés de vents d'entre
SW et WNW en Suisse française, et entre WSW et NW en
Suisse allemande. Pour les lignes d'occlusion le vent varie du
SSW au NNW ; pour le fœhn, du SSE au S ; pour les pluiessédentaires de l'W au NW, généralement. Aux vents du
secteur N à E appartiennent fort peu de précipitations. Il
est rare que des lignes quelconques traversent la Suisse dans
cette direction. Tout au plus les vents d'E, en connexion
86 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
avec la naissance d'une dépression secondaire sur le Golfe
de Gênes, « achèvent » une situation pluvieuse. Dans ce
cas, la giration brusque des vents en altitude peut ame¬
ner des changements de température importants et par
là des neiges très sèches. Ainsi à Lausanne, le 7 février
1917, peu après que la bise se fût levée, on recueillait
sur le sol des paillettes de glace atteignant 2 % cm. de
longueur.11 arrive quelquefois que des versants opposés aux vents
reçoivent peu de précipitations, alors que la plaine qu'ilsdominent est littéralement inondée. Le cas du 12 au 14 juin1923 est frappant pour les Alpes de Fribourg et le Plateau
vaudois. Yverdon reçut 36,4 mm. d'eau, alors que la Val-
sainte n'en obtient que 1,7 mm.
Ce genre de pluie pourrait être qualifié de pluie d'inter¬
férence, parce que due à la rencontre « accidentelle » de deux
courants dont l'un d'eux s'est opposé brusquement au pas¬
sage de l'autre en arrêtant ainsi un phénomène en pleineévolution. Tel est le cas du freinage brusque d'une ligned'occlusion se mouvant dans le sens W—E, par un courant
s'élevant du NE, par suite de la formation d'une dépressionsur la Méditerranée.
Ce type de rencontre se présente ailleurs, aussi. Il est
important de le constater, car il joue son rôle dans la
répartition des précipitations sur les versants. C'est là
justement un de ces cas où la courbe des densités peutêtre inversée.
Comme M. J. Bjerknes l'indique dans sa monographie, il est
possible d'imaginer encore d'autres théories sur la formation
de la pluie. Mais, dans l'état de nos connaissances, elles se
rattachent en somme à celles que nous venons brièvement
d'examiner.
Au point de vue hydrologique, on peut facilement, avec
une certaine habitude, reconnaître sur les courbes limni-
métriques les phénomènes pluvieux qui caractérisent telle
ou telle variation du niveau des cours d'eau.
LA NEIGE 87
§ II. L'enneigement et la glace.
1. La neige.
Un des problèmes les plus importants de l'hydrologie d'un
pays montagneux est celui de la variation d'altitude de la
limite inférieure des neiges.Les premières études sur ce sujet ont été entreprises il y
a environ trois quarts de siècle par Denzler [73] qui a recueilli
et commenté les observations faites entre le lac de Constance
et le Sàntis. Plus tard, J. Jegerlehner [74], dans un importanttravail, a déterminé, pour tous les glaciers suisses, l'altitude
de la limite moyenne inférieure des neiges dites persistantes.Nous reproduisons quelques-uns de ces chiffres, vu leur im¬
portance pour la suite. Titlis 2610 m., Urirotstock 2560,Glârnisch 2500, Sàntis 2450, Mordes 2750, Diablerets 2740,Wildhorn 2775, Wildstrubel 2780, Balmerhorn 2940, Finster-
aarhorn 2950, Trift 2750, Oberalpstock 2600, Tôdi 2710,Sardona 2630, Dents du Midi 2900, Mont-Blanc 3100,Combin 3100, Otemma 3040, Cervin 3100, Mont-Rose 3260,Fletschhorn 3040, Monte-Léone 2945, Blindenhorn 2780,St. Gothard 2700, Camada 2750, Rheinwaldhorn 2760,Tambohorn 2800, Surretahorn 2760, Pitz Stella 2700, Pitz
d'Err 2930, Pitz Kesch 2820, Silvretta 2900, Disgrazia 2750,Bernina 2960, Spôllalpen 3000.
Malheureusement cet auteur ne parle pas de l'enneige¬ment sur le rocher.
Kerner a été le second à nous renseigner sur la variation
des neiges, par ses études faites en Engadine et aujourd'hui
classiques [75]. A l'instigation de F.-A. Forel, la Commission
des Glaciers de la Société Helvétique des Sciences Naturelles
centralise les documents qui lui parviennent sur l'enneige¬ment des glaciers, depuis environ un quart de siècle, sans
cependant s'occuper de ce qui a trait aux régions situées
88 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
en dessous du niveau de glaciation. C'est aux pionniers de la
glaciologie française, et à M. Mougin surtout, que nous
devons d'intéressantes statistiques sur l'enneigement des
versants des Alpes savoisiennes, depuis l'altitude de Cham-
béry [76]. Il est très regrettable que des recherches analoguesà celles de M. Mougin ne soient pas poursuivies en Suisse.
M. Maurer [77 à 83], en 1909, a reprit les statistiques de
Denzler, en les complétant avec une nouvelle série d'obser¬
vations. Enfin dernièrement, l'Inspecteur forestier Moreillon
[85] a publié une étude personnelle, pleine d'intérêt, sur les
neiges du Jura. Il compare ses valeurs avec celles des auteurs
précités et construit des courbes importantes en mettant en
relief les effets de la température. Ainsi il calcule la vitesse
en mètres par jour de l'abaissement et de l'élévation de la
limite des neiges au Suchet. Engler [11], dans son gros
ouvrage Einfluss des Waldes auf den Stand der Gewâsser,donne le résultat de ses longues observations des effets de la
fusion de la neige sur le régime de petites rivières. Ce cha¬
pitre sera analysé plus loin.
Nous avons cherché aussi à nous faire une idée de l'allure
de ces courbes de variation en reprenant les observations
de la décennie 1913-1922, des stations suivantes :*
Zurich 493 m., Rigi 1787, Altdorf 453, Sântis 2500,Heiden 804, Saint-Gall 702, Lohn 640, Claris 479, Elm 959,Gôschenen 1107, Engelberg 1010, Einsiedeln 914, Lucerne
497, Meiringen 604, Andermatt 1010, St. Gothard 2102,
pour le versant N des Alpes. Bellinzona 236, Locarno 239,Monte Generoso 1610 (incomplet), Faido 759, Bernardin
2073, Airolo 1143, Monte-Bré 910, pour le versant S des
Alpes. Arosa 1850, Davos 1560, St.-Moritz 1840, pour les Gri¬
sons. Montreux-Clarens 376, Leysin 1353, Grand Saint-Ber¬
nard 2476, Sion 548, Reckingen 1332, Saas-Fée 1800 (incom¬plet), Zermatt 1610 (incomplet), pour les Préalpes et le Valais.
Neuchâtel 487, La Brévine 1077, Cernier 800, Mont-Soleil
Ces stations n'ont pas toutes des séries d'observations complètes.
LA NEIGE 89
1200, Weissenstein 1285, Soleure 470, Bâle 277, pour le Jura.
Nous avons calculé pour la plupart d'entre elles la
moyenne des jours où la neige recouvre le sol. Comme les
observations ne sont pas toujours faites régulièrement, il a
été nécessaire de déterminer ces chiffres par d'autres moyens,
là où ils font défaut. Pour cela, nous nous sommes servi de la
valeur mensuelle du nombre de jours où il a neigé, en le
5000
VARIATION de l ALTITUDE oe la LIMITE INFÉRIEURE
des NEIGES en SUISSE
(VERSANT NORD DES ALPES )
2500
£000
1500
1000
SOO
r^' w
KOIS I IIIYIIHIXfla
Fig. 8.
comparant à la hauteur en eau de la neige. On sait en effet
que lorsqu'il tombe une certaine quantité de neige sur le sol,elle ne peut pas fondre immédiatement, même par de fortes
hausses de température. H y a par là une certaine propor¬
tionnalité entre l'importance de la chute de neige et la durée
de son séjour sur le sol, suivant la saison. Les détails au cours
du mois, qui échapperaient sur une courbe de variation
moyenne mensuelle, ont été dessinés en décomposant le
mois en six parties, comme l'a fait M. Maurer, figure 8.
90 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Pour les altitudes intermédiaires ou supérieures à celles
des stations examinées, nous avons été obligé d'interpolerdans d'assez larges mesures, en nous aidant pour cela d'une
courbe d'extrapolation : isotherme-zéro-limite inférieure de
la neige, construite une fois pour toutes d'après les données
du Sântis.
La limite inférieure de la neige se trouvant pour les mois
de juillet à août au-dessus de l'altitude de ce sommet, il en
résulte une approximation moins grande dans la courbe
d'extrapolation. Pour son tracé au cours de ces mois, nous
nous sommes aidé des chiffres déjà extrapolés de Maurer, en
corrigeant au jugé les défauts de continuité de la courbe
obtenue.
Le gradient vertical de température, c'est-à-dire la diffé¬
rence de température en degrés centigrades pour une élé¬
vation de 100 m. a été également recalculé par mois pour la
moyenne des dix années 1913 à 1922, d'après les observations
de température du Sàntis, 2500 m., du Rigi, 1787 m., de
Berne, 572 m., et de Zurich, 493 m.
Gradient vertical de température.(Moyennes mensuelles et annuelle)
I II III IV V VI VII VIII IX X XI XII Année
0,40 0,49 0,58 0,63 0,62 0,60 0,56 0,5 L 0,48 0,46 0,44 0,40 0,51
L'altitude moyenne mensuelle de l'isotherme de zéro qui se
détermine à l'aide de la température moyenne mensuelle
d'un lieu et du gradient vertical de température, figure dans
le tableau ci-après. Les chiffres de M. Moreillon relatifs à
la limite inférieure de la neige au Suchet, sont obtenus en
planimétrant sa courbe pour chacun des mois et en divisant
la surface trouvée par le nombre de jours du mois, pour
avoir l'altitude moyenne mensuelle. Le décalage entre l'iso¬
therme de zéro A„, et la limite inférieure de la neige A,n, soit
Ath — Aln, — valeur qui a permis de construire la courbe
d'extrapolation, — est également donnée dans le tableau.
LA NEIGE 91
Tab. 5
Altitude moyenne mensuelle de Visotherme de zéro degré:
Mois I II III IV V VI VII VIII| IX X | XI XII
Versant Nord des Alpes
Maurer 1 170 708 1167 1893 2566 3176 3776 3770 3385 2362 1367 362
Lugeon J
1913 — 715 1170 1907 2560 3115 3690 3655 3350 2370 1320
1922 \
Jura, jusqu'à 1680 m. et Préalpes jusqu'à 2550 m.
Lugeon/id. j
735 1190 1910 2590 — — — — 2400 1410 —
Valais
Lugeonjid. j
" 850 1250 1930 2620 3200 3700 3900 3250 2415 1445 —
Altitude moyenne mensuelle de la limite inférieure de la neige :
Versant Nord des Alpes
Maurer J
1889 623
1908 \592 724 994 1318 1940 2423 2795 2400 1690 1305 662
LugeonJ! 1913 >6i0 615 737 1000 1395 1945 2470 2685 2370 1650 1320 672
1922 \
Jura et Préalpes
Moreillon { nn,, 664 680 880 1174 1590 2000 2550 — 2550 1730 1008 776
Valaisr
.Lugeon 700 730 915 1234 1590 2150 2690 3100 2680 1730 1370 700
Décalage ale Visotherme 0° sur la limite de la neige, en mètres:
Veisantlord,ro
j i. (-453des Alpes ]
100 433 907 1165 1170 1120 960 980 720 0 -338
Préalpe-. j1 et Jnra j
55 310 736 1000 — — — — 670 402 —
1Valais 120 335 696 1030 1050 1010 800 570 685 75 —
92 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
La température moyenne annuelle T, en degrés centi¬
grades, à toute altitude A, en mètres, dans l'atmosphère
libre, peut se calculer par la formule de Toussaint [87]. Pour
les pays de l'Europe occidentale, on a :
T = L5 — 0,0065 A
Selon des vérifications que nous avons faites pour la Suisse,et pour la moyenne des années 1913 à 1922, cette formule
donne de bons résultats à condition d'y remplacer le chiffre
15 par 13,2.Dans l'état actuel des observations de haute montagne, il
n'est malheureusement pas possible d'établir une formule
liant la variation des isothermes en altitude et la limite des
neiges. Une tentative de ce genre a dû être entreprise der¬
nièrement par un des instituts hydrographiques de Scandi¬
navie. Mais il ne nous a pas été possible d'obtenir ces « dia¬
grammes de fusion », non publiés.Dans un autre ordre d'idées, des essais fort instructifs ont
été faits en Suisse. Il convient de signaler le travail de
de Quervain : Die Hebung der atmosphàrischen Isothermen in
den Schweizer Alpen und ihre Beziehung zu den Hôhengrenzen,
qui permet de tirer des conclusions statistiques sur la situa¬
tion des diverses frontières de la végétation. J. Hann a
donné plusieurs formules pour calculer le gradient vertical
de température [86] et a déterminé pour les Alpes autri¬
chiennes l'altitude de l'isotherme de zéro degré sans se
prononcer sur sa corrélation avec la couverture de neige.Mais on ne saurait faire cas de tous ces travaux climatolo-
giques, basés sur des statistiques s'étendant sur plusieursannées, pour des études dynamiques, c'est-à-dire pour des
phénomènes se limitant à quelques jours par exemple, telle
la débâcle printanière.Il ne faut donc pas attacher une grande importance à ces
courbes, d'autant plus qu'en Suisse leur allure peut être très
différente, suivant les vallées, la morphologie et l'expositiondes versants, et surtout suivant les vents dominants, comme
LA NEIGE 93
l'a brillamment montré M. Ahlmann, pour le problèmedes glaciers. La fréquence des avalanches et toute autre
accumulation accidentelle ne doit d'ailleurs pas être laissée
de côté non plus.Au problème de la répartition des neiges est rattaché celui
de la fusion et de l'évaporation. Quelle est en % de la hau¬
teur de la neige exprimée en millimètres d'eau, la quantitéd'eau de fusion naturelle qui s'écoule ou pénètre dans le sol ?
Les données sur ce sujet font en Suisse presque entière¬
ment défaut. Il faut s'en rapporter aux excellentes séries
d'observations faites en Savoie et publiées par M. Mougindans ses Etudes glaciologiques, pour avoir quelques rensei¬
gnements. D'autres auteurs, comme MM. Epper, Roder,
Horwitz, Roth, Lûtschg, etc., signalent l'importance de ce
problème dans l'écoulement des cours d'eau.
Le processus de la fusion de la neige en pleine nature est
mal connu. Dans la couche de neige qui va en croissant
depuis sa limite inférieure jusque vers les sommets, la quan¬
tité d'eau qui se résorbe peut être nulle à partir d'une cer¬
taine altitude. Là où la température du sol reste inférieure
à 0°, il n'y aura pas d'écoulement possible. Il est à propre¬
ment parler difficile de dire quelles sont les couches quientrent les premières en fusion. Généralement, c'est la cha¬
leur de rayonnement solaire qui produit la fusion à la surface
libre, et l'eau s'infiltre, imbibe les couches inférieures, mais
sans nécessairement atteindre le sol. Elle peut même se
congeler en route. Si donc l'épaisseur de la neige est grandeet qu'il en fond d'importantes quantités, il n'en résulte pas
nécessairement un écoulement sur le sol.
Pour le cas général des bassins d'alimentation des cours
d'eau, nous croyons pouvoir poser en thèse que les premierscent mètres seuls, à partir de la limite inférieure de la neige,alimentent le ruissellement. Cette limite gagnant progressi¬vement les sommets, de pair avec l'ascendance de l'isotherme
0°, la fusion n'atteindra son effet maximum que vers le
début de la période printanière.
94 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Une partie de la neige s'évapore directement et ce fait peut
compliquer dans une certaine mesure les calculs du coeffi¬
cient d'écoulement. Il serait des plus utile que les services
météorologiques entreprennent des mesures systématiquesd'évaporation de la neige en haute montagne. De courtes
séries d'expériences de ce genre exécutées il y a plusieursannées à Davos, au Gothard et au Jungfraujoch par les soins
de l'Institut Central Météorologique, figurent dans les Anna¬
les de l'année 1918.
A l'évaporation des surfaces enneigées est liée la conden¬
sation de la vapeur d'eau atmosphérique. La plupart des
expérimentateurs ont traité simultanément ces deux phéno¬mènes. Il s'agit pour la neige, en effet, d'un continuel
échange d'eau entre sa surface et l'air libre.
F.-A. Forel, l'instigateur de ces recherches [88 à 90], n'a
opéré que sur la glace et sur les glaciers, pendant la saison
estivale. Mais les conditions d'échange pour la neige, et
surtout en hiver, ne sont pas du tout les mêmes. C'est pour
cela que les résultats trouvés ne concordent guère. On a
à faire là à deux problèmes différents, qu'il ne faut pas
mettre en parallèle ; la structure de la glace et de la neige,ainsi que leurs températures de surface, ne sont pas pareilles.
D'une manière générale, en Europe centrale, la neige rend
à l'air davantage d'eau qu'elle n'en condense. On a obtenu
les résultats expérimentaux suivants pour l'intensité de
l'évaporation et de la condensation, exprimés en milli¬
mètres de hauteur.
Au mois de janvier, à l'altitude de 1800 m., l'évaporationmaximum horaire est de 0,04 mm. au grand soleil, et lorsquela température de la surface de la neige est voisine de 0°.
La condensation, par contre, est bien inférieure. Pendant les
nuits claires, elle n'atteint à l'heure que 0,005 mm. Ce
dernier phénomène semble presque toujours l'emporter dans
le cas de la glace sur les glaciers découverts et aux hautes
altitudes, alors que pour la neige il ne parvient pas à com¬
penser l'évaporation.
LA NEIGE 95
Mais ces données sont, hélas, encore trop pleines d'incer¬
titudes, pour que leur application à la technique puisse être
d'un réel intérêt. Références diverses [91 à 95].Un élément, heureusement assez bien défini aujourd'hui,
est la densité de la neige. De longues séries d'observations
ont été faites dans les pays du nord de l'Europe, et en
Amérique. Pour les Alpes, nous nous en référons aux études
de M. Mougin, qui a installé en Savoie un certain nombre
de stations pour l'observation de la neige.Des résumés de ses travaux, publiés également dans ses
Études glaciologiques, il ressort qu'à poids égal, le volume
de la neige est en moyenne dix fois plus grand que celui de sa
quantité mesurée en eau de fusion.
Hann, [7, p. 313], a appelé la hauteur spécifique de la neige(spezifische Schneetiefe) la hauteur de neige qui, fondue,donne une hauteur d'eau égale à l'unité. Ainsi, la hauteur
spécifique sera 1, si 10 cm. de neige fondue valent 10 mm.
d'eau.
Dans d'assez grandes limites, la connaissance de l'épais¬seur de la neige permettra donc de déterminer le volume
d'eau qui s'en écoule, en tenant compte de l'évaporation et
de la condensation de la vapeur d'eau à sa surface, cela va
de soi. En hydrologie, cette relation est d'une importance
capitale, et nous chercherons plus loin à établir, pour certains
bassins, des « caractéristiques de fonte » en faisant appel aux
facteurs météorologiques.Parmi d'autres questions qui intéressent les neiges et
l'hydrologie, le rapport des écoulements sur le sol de deux
quantités identiques de neige et de pluie revêt une grandeimportance. S'il était en effet possible de déterminer expé-i-imentalement cette simple relation arithmétique, on aurait
d'un trait rendu possible l'extension des formules du coeffi¬
cient d'écoulement aux précipitations liquides et solides.
L'analyse détaillée des cours d'eau drainant des régions des
Préalpes, où la neige disparaît entièrement au cours d'une
année, serait facilitée.
m PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Nous avons essayé de calculer ce rapport, pour la Jogne,en comparant les données limnimétriques du Service fédéral
des Eaux des années 1918 et 1919 avec les deux pluviomètresde la Valsainte et de Jaun. Pour des hauteurs millimétriqueségales d'eau de neige et de pluie, suivies d'un même nombre
de jours de sécheresse, nous trouvons que ce rapport est à
peu près constant pendant les trois saisons automne, hiver et
printemps. Il faut presque dix fois plus de neige que de
pluie pour produire un même effet immédiat sur le cours
d'eau. Contrairement donc à ce que l'on pourrait penser, il
s'infiltre durant les mois d'hiver davantage de précipitationstombées à l'état solide qu'à l'état liquide.
Encore un point important à ne pas oublier est celui de
Faccumulation hivernale des eaux météoriques sous forme
solide.
Le bilan hydraulique de la plupart des installations hydro¬électriques de Suisse dépend, pour une grande part, du
volume des neiges accumulées dans les hauts bassins pendantla saison hivernale. Est-il possible, à priori, de calculer la
valeur turbinable de ces réserves uaturelles et saisonnières ?
Cette question peut être résolue d'une manière simple. Si
l'on a affaire à des bassins de retenue ou à des prises d'eau sur
rivière, situés à une certaine altitude, 1600 m. par exemple,où la température moyenne mensuelle reste pendant plu¬sieurs mois au-dessous de zéro, on peut déterminer avec une
bonne sécurité des diagrammes de fonte des neiges, quidonneront, en fonction du volume accumulé sous forme
solide sur les versants, la marche globale de l'écoulement
pendant les derniers mois de la saison froide. On sait approxi¬mativement quand la débâcle printanière commence à se
faire sentir, et par là l'instant critique où la masse neigeusecommence à alimenter les collecteurs ou les bassins réser¬
voirs.
La détermination exacte des volumes amassés sur les
versants de la montagne n'est cependant pas aussi simplequ'on se l'imagine volontiers. Car il ne suffit pas de con-
LA NEIGE 97
naître l'épaisseur de la couche de neige en plusieurs pointspour pouvoir calculer son volume en eau au moyen de la
relation précitée. La neige a une structure et une densité
très variables suivant les versants où elle repose. Son poidsspécifique peut varier entre 0,915 et 0,1. Une section faite
verticalement dans la couche montre sa stratification com¬
plexe. Près du sol, par le fait du tassement, du dégel et du
vent, les strates sont souvent transformées en glace, ailleurs
elles sont molles, voir farineuses, etc. Il importe donc d'étu¬
dier en détail cette stratification avant de pouvoir calculer
les écoulements dus à la fusion.
Nous préconiserions ainsi pour les usines de haute altitude
des tournées de sondages que les ingénieurs attachés aux
services entreprendraient aux moments les plus opportuns,vers la fin de la seconde partie de l'hiver.
Pour mesurer la densité exacte de la neige, ou mieux sa
hauteur spécifique, on pourra faire usage de sondes compo¬
sées d'un simple tube en métal, à diamètre intérieur constant
sur toute sa longueur, que l'on enfoncera verticalement dans
la neige. La carotte de neige sera retenue par un clapetspécialement aménagé à l'extrémité inférieure, commandé
par une ficelle, et le tube sera utilisé pour toute profondeur.Une fois la prise de neige effectuée, la carotte, pesée ou fondue
rapidement par un procédé chimique quelconque, donnera
la hauteur d'eau de fusion correspondant à la hauteur de la
neige, mesurée par une échelle inscrite sur le tube lui-même.
Un certain nombre d'échantillons seront ainsi prélevés sur
tous les points intéressants du bassin de réception, et suscep¬
tibles de fournir des indications d'ensemble ; points d'ail¬
leurs choisis d'avance et marqués d'une balise, afin qu'on les
retrouve facilement en hiver.
Pour obtenir plus de sécurité dans ces mesures, la sonde
sera enfoncée à quelques centimètres de la perche de repère,et au droit d'une dalle plate ou pierre, préalablement fixée
en terre et arasée au niveau du sol. Plus le réseau de ces
stations nivométriques sera serré, meilleurs seront évidem-
LUGEON — 7
98 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
ment les calculs volumétriques. Nous croyons cependantqu'il n'y a pas intérêt à en exagérer le nombre. On se rendra
rapidement compte des lieux qui caractérisent le mieux
l'enneigement des versants. Il n'y a pas de règle à énoncer,
tout dépend de la morphologie de la région.L'intérêt de ces mesures serait considérablement aug¬
menté, si l'on disposait de quelques totalisateurs contrôlés
en même temps que les stations nivométriques.Des recherches analogues dans quelques bassins d'accès
facile et dont les conditions sont particulièrement avanta¬
geuses donneraient d'heureux renseignements. Nous pensons
aux installations hydro-électriques de Fully et du Wàggital,en particulier.De prime abord, il semble que la dépense de ces réservoirs
pourra être poussée plus loin, vers la fin de la saison froide,si l'on arrive réellement à calculer avec une approximationsuffisante l'accumulation naturelle qu'est la neige et si,,comme il a été dit, ces provisions peuvent être prévues par
des graphiques tirés de quelques années d'observations com¬
paratives des écoulements et du volume total des neiges.
Après des hivers secs, ces chiffres seront particulièrementutiles.
Une méthode thermique pour évaluer Valtitude de la limite
inférieure des neiges.
Il semble que l'évaluation approximative de l'altitude de
la limite inférieure des neiges puisse se faire à l'aide de la
thermique des eaux d'écoulement. Si, au bas d'un bassin de
réception, on mesure continuellement la température des
eaux du collecteur principal, on s'aperçoit qu'elle oscille
dans d'assez larges limites avec le débit, mais surtout avec
l'époque de l'année. Pour un torrent alimenté principalement
par de petites sources superficielles, il est clair que la fusion
des neiges, abaissant la température des eaux de ruisselle¬
ment, se fera sentir sur un long parcours. Si At est l'altitude
LA GLACE 99
du thermomètre plongé dans le lit et indiquant la tempé¬rature T„ A„ l'altitude moyenne de la limite inférieure des
neiges où la température du lit est Tn, la connaissance du
gradient thermique M, le long du cours d'eau, c'est-à-dire la
décroissance de température par unité d'altitude, quidépend essentiellement du débit et des conditions journa¬lières de la température de l'air, permettra de situer l'altitude
moyenne inférieure de la région enneigée. On aura, en effet,
pour un débit déterminé :
T,— Tn= (A„— At)M
d'où l'on tirera A„.La valeur de Tn est probablement fonction de la tem¬
pérature de l'air; mais elle ne varie que dans d'étroites
limites.
Pour quelques mesurées isolées que nous avons effectuées
dans les Alpes centrales, au printemps 1926, nous avons
trouvé par beau temps et vers midi, Tn = 0°5 et pour le
gradient par mètre, Af = 0,006.Le problème comporte, cela va sans dire, quelques incon¬
nues, comme beaucoup de problèmes d'hydrologie. Il faut y
introduire des constantes locales : la distribution des sur¬
faces autour des profils en long des lits, la position des
sources, la fonction température-débit-gradient, etc.
Si imparfaite que puisse être la détermination de An, il
n'en reste pas moins vrai que des prises régulières de tempé¬rature contribueraient pour beaucoup à la thermique mal
connue des cours d'eau préalpins [5 et 99 à 104].
2. La glace.
Enfin, un point fondamental qui intéresse encore l'hydro¬électricité est celui de l'altitude limite, au-dessus de laquelleil devient dangereux de créer des réservoirs. Pour l'Europecentrale, les avis sont assez partagés.
100 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Nous avons essayé de construire une courbe moyenne de
l'altitude et de l'époque de la débâcle et de la congélationdes lacs de montagne des Alpes (fig. 9).
Elle est basée sur diverses données émanant des mono¬
graphies de Forel [105], Arnet, Collet et Mellet [98 et 104],
Lùtschg [97] et de renseignements personnels.
Quelqu'approximative qu'elle soit, cette courbe montre
titudes mètresVARIATION de lALTITUDE dE la CONGÉLATION
et « la DÉBÂCLE DES LACS ALPINS
<s D'APRÈS ~ 500 OBSEQVATIONS
SOOO
3500 \
2ooo
\o
15OO
3/> I
Q'/
lOOO
500
\
\\
•
'
MOIS I n n M Y H m m E ï II M
Fig. 9.
qu'au-dessus de 2800 m. la glace est persistante. C'est
d'ailleurs le niveau supérieur des lacs de montagne. Il faut
descendre assez bas, jusqu'aux environs de 2300 m., pour
trouver des bassins libérés au moins trois mois par an.
L'altitude de 2300 m. est à considérer comme limite pour
la création de nouveaux bassins d'accumulation artificiels.
Il en est évidemment autrement de l'utilisation des lacs
naturels. Néanmoins la courbe de la limite inférieure des
neiges, nous enseigne que dans ces parages, elles ne quittent
LA GLACE 101
les versants pendant guère plus de trois mois. La températurede l'air y est en outre peu au-dessus de zéro en été ; les nuits
apportent presque toujours le gel. Les conjonctures généralessont donc défavorables à l'installation de chantiers.
Il nous a paru utile d'enquêter auprès de divers directeurs
d'entreprises hydro-électriques de haute montagne, sur les
conditions d'exploitation des bassins réservoirs, pour les
cas imprévus d'hivers très rigoureux. Nous avons eu à ce
sujet connaissance d'usines norvégiennes qui ont dû, par
défaut d'eau et excès de glace, suspendre pendant plu¬sieurs mois leur exploitation. Pour la Suisse, il nous a été
répondu que la plupart des bassins actuels ne risquaient pas
ces accidents.
Sans vouloir entrer dans des considérations climatolo-
giques, signalons en passant que les grandes variations du
climat pourraient, par la suite des siècles, jouer un certain
rôle dans l'exploitation des usines actuellement projetéesdans les hauts parages des Alpes. Il n'est pas fantaisiste de
rattacher les grandes variations du climat à ce chapitre de
la technique. On sait, en effet, que les oscillations de la
marche des glaciers et du niveau des lacs à affluents glaciai¬
res, sont réglés par des cycles dont la périodicité est assez
bien connue. Dans une étude fondamentale, le professeurBrûckner [106 à 111] montre, sur la base de 804 stations et
36 900 années d'observations totales, 1565 à 1885, que les
mêmes phénomènes météorologiques réapparaissent avec
une certaine régularité de 35 en 35 ans. Il ne lui a toutefois
pas été possible de tirer des conclusions quantitatives sur les
minima et maxima de température. Néanmoins, il suffirait
qu'au cours de ce siècle la température moyenne baissât de
un degré centigrade seulement, dans la région des Alpes,
pour que toutes les installations hydro-électriques dont les
bassins sont alimentés directement par les glaciers, voient
leurs conditions changées du tout au tout.
MM. Wegener et Koppen [112], dans un important travail
sur les grandes variations du climat mondial et la dérive des
102 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
continents, ont calculé qu'une baisse de température de
4 degrés nous ramènerait au temps préhistorique des grandes
glaciations.D'après nous, % degré de baisse de température — et
c'est peut-être dans les limites des possibilités — suffirait
pour paralyser l'exploitation des bassins situés au-dessus de
2200 m. d'altitude.
Au point de vue suisse, il est intéressant de suivre, dans
ses conclusions, Buhrer qui a étudié avec force documents les
variations du climat du Valais [113]. Il nous dit « la détério¬
ration du climat signalée au commencement du XVlIme siè¬
cle dans les Alpes suisses a réellement eu lieu et ses effets se
sont manifestés par un recul de la végétation et l'obstruction
par les glaciers de nombreux passages alpestres ». Qu'on ne
considère que l'Engadine, par exemple, dont les hauts pla¬teaux (Bernina, etc.) étaient recouverts d'une abondante
végétation forestière, il y a quelques centaines d'années, et
l'on ne sera pas étonné de constater qu'en effet le niveau de
l'isotherme zéro s'est abaissé au cours du siècle précédent.1
3. Les glaciers.
La glaciologie, qui est aujourd'hui une science indépen¬dante, offre à l'hydrologie des bassins de montagne quelques
moyens de calcul. La question fondamentale qui nous inté¬
resse est celle des oscillations du débit des torrents, émis¬
saires des glaciers, et leurs courbes de régime.La fusion des glaces et des neiges dépend de plusieurs
facteurs, dont les deux principaux sont : 1° la températurede l'air ambiant ; 2° le rayonnement calorifique solaire. On a
essayé à plusieurs reprises d'établir des formules liant ces
éléments, dans le but de calculer sans observations limni-
1 On lira avec profit un important ouvrage critique remarquablementrédigé par M. Mascart, directeur de l'Observatoire de Lyon, qui a trait
aux grandes variations du climat [114],
LES GLACIERS 103
métriques les oscillations du débit des cours d'eau glaciaires.Malheureusement c'est la base qui manque, comme pour
bien d'autres problèmes se rattachant aux phénomènes géo¬
physiques de haute montagne. Il est hasardeux d'extrapolerles données héliographiques ne s'étendant qu'aux régionsbasses, puisque, à part le Sântis, aucun autre observatoire
de haute montagne n'enregistre l'insolation.
Quelques tentatives de calcul intéressantes sont signalées
par Penck, pour le calcul de la somme de calories reçues par
le sol ou directement consommées sur des surfaces enneigées,tant par la fusion que par l'évaporation [115]. Citons aussi
les calculs de M. Maurer [116] qui donne un exemple, pour la
Suisse, du nombre annuel de calories envoyé par le soleil sur
la surface des glaciers, et sa corrélation avec l'épaisseur de
glace fondue. Mais ce ne sont là évidemment que des essais
théoriques.On peut envisager le problème sous un autre point de vue,
en calculant la fusion brute directement, au moyen des
données limnimétriques, sans tenir compte des phénomènes
qui y prennent part. C'est ainsi que Gravelius s'y est prisdans ses diverses études et critiques sur les cours d'eau des
Alpes [117].MM. Roder, Roth, Liïtschg ont calculé de la sorte le débit
des eaux des glaciers des Grisons, de la Reuss, Massa,
Viège [118], etc. Mais, d'une manière générale, les chiffres
obtenus ne nous renseignent que grossièrement sur le débit
estival des glaciers (Rhin 600 à 700 1. /sec. /km2, contesté par
Horwitz [loc. cit. 26] ; Reuss, en juillet 739, en août 642
1./sec./km2). Le gros travail fait au glacier du Rhône par la
Commission fédérale des glaciers renferme également quel¬
ques chiffres.
Mais nous ne connaissons aucune étude sur la continuité
des phénomènes d'écoulement du glacier, dans laquelleentrerait la fusion, l'apport des précipitations, la conden¬
sation et l'évaporation. La formule générale de l'hydrologieglaciaire n'a pas encore été établie. C'est là une lacune qu'il
104 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
est indispensable de combler avec les matériaux dont on
dispose actuellement.
M. Mougin [119] a donné une méthode nivométrique très
complète pour calculer la fusion de la neige et de la glace.Les études qu'il a poursuivies sur les glaciers de Savoie ont
contribué pour beaucoup à la connaissance des capacitésd'écoulement des organismes glaciaires. En Suisse, Forel
d'abord [120], puis Liitschg, dans d'importantes publi¬cations, précisent par des chiffres les oscillations des torrents
glaciaires. Ce dernier auteur nous a montré en particulier un
exemple admirable du rôle immédiat des précipitations,combiné avec la fusion, dans la terrible crue de septembre1920, de la vallée de Saas [44]. Ce sont là de précieusessources de renseignements. On trouvera aussi d'autres détails
intéressant ce sujet dans les Mensurations au glacier du
Rhône, rédigé par M. P.-L. Mercanton [121].Ajoutons que l'alimentation des torrents glaciaires n'est
pas seulement le résultat de la fusion due à la températurede l'air et à la radiation solaire. Pour des raisons encore peu
connues, les glaciers produisent de l'eau par-dessous. Des
agents physiques et mécaniques, comme la cristallisation
interne, la compression, le frottement, la chaleur telluriqueémanant du lit, les sources, l'air chaud et humide, etc.,
agissent toute l'année. Le travail des eaux du glacier est
perpétuel. Il ne s'arrête pas sous la seule influence des agentsextérieurs ou de surface, tels que la chaleur de l'air.
Donc, grâce à la connaissance plus précise des variations
de la température en altitude, et des progrès réalisés dans le
domaine des précipitations, il sera possible aux glaciologues,dans un avenir rapproché, de jeter quelque lumière sur le
processus de l'écoulement glaciaire en général. De toute
façon des progrès sérieux ne peuvent être faits qu'avec l'aide
de la météorologie, car non seulement la température de
l'air doit être connue, mais également, et dans d'étroites
limites, celle des précipitations. Ne citons à l'appui de cette
thèse que le cas des passages des fronts chauds et froids avec
LES GLACIERS 105
leurs précipitations liquides et solides. Ainsi l'écoulement
sera toujours maximum au passage d'un front chaud, succé¬
dant à une série de chutes de neige, grâce à l'effet combiné
de l'air chaud et des pluies abondantes qu'il transporte.
Appelons maintenant capacité glaciaire d'écoulement, le
débit des eaux sortant au portail du glacier, et dues essen¬
tiellement à la fusion. Cette qualification s'entend pour le
débit instantané en m3/sec, comme aussi pour le débit
moyen mensuel ou annuel. On en saisira mieux le sens par
la suite.
La capacité glaciaire d'écoulement peut être exprimée de
diverses manières, suivant le processus de fusion envisagé.Nous avons vu plus haut les causes thermiques et méca¬
niques qui provoquent la fusion des glaciers, en négligeantde discuter sur la manière dont le glacier digère sa nourriture.
La neige, la pluie et le grésil, ne sont en effet pas sa seule
alimentation. Un auteur distingué, M. W:son Ahlmann
[15], signalé antérieurement, a démontré pour les glaciers de
Scandinavie le rôle énorme que joue — à côté des précipi¬tations — la condensation de la vapeur d'eau sur la surface
et dans les cavités. Il rattache même à ce facteur toutes les
variations du débit d'écoulement des glaciers, en négligeantl'action relativement minime des autres facteurs précités.
Or, comme la condensation est fonction directe de la
température de l'air, cette dernière devient, d'après Ahl¬
mann, l'unique facteur pour le calcul des écoulements du
glacier. Il serait plus exact de dire que la fusion est l'expres¬sion finale d'un ensemble complexe de phénomènes où la
température joue le rôle principal.En Suisse, toutefois, nous ne saurions admettre de fait la
doctrine Scandinave. Car la condensation, comme nous le
verrons plus bas, n'intervient pas aussi manifestement que
dans ces pays à climat maritime.
Lorsqu'on ne cherche pas à entrer dans les détails de l'ali¬
mentation des glaciers, il est avantageux de n'utiliser pour
les calculs hydrologiques que la température. Ce facteur est
106 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
aussi celui qui se prête le mieux à l'extrapolation. Assez de
travaux ont montré le degré d'exactitude que l'on peut
atteindre dans la détermination des isothermes, au delà des
stations météorologiques les plus élevées, pour que ce mode
d'investigation en reste critiquable.Dans la formule hydrologique générale : écoulement =
somme des apports — les pertes, on peut mettre les deux
éléments condensation et évaporation sous un même terme.
En effet, divers auteurs ont montré que ces deux facteurs
étaient à peu près constants au cours d'une série d'années.
Ainsi, en Suède, M. Wallèn a calculé que l'évaporation totale
annuelle se retrouve presque toujours identique, et voisine
de 400 mm., dans toutes les régions du centre [122]. Antvers
[123], dans un important mémoire sur les glaciations au Ca¬
nada, arrive à peu près aux mêmes conclusions. Il confirme
du moins les vues de M. Wallèn. Pour la Suisse, M. Brock-
mann [43, p. 167] trouve des valeurs qui oscillent entre
380 et 770 mm. Il y a lieu toutefois de ne pas accorder un
trop grand crédit à ces chiffres, car cet auteur n'a calculé
l'évaporation qu'en fonction des précipitations, sans intro¬
duire dans ses diagrammes le facteur condensation et en
négligeant toutes les capacités de rétention.
Pour en revenir au travail de M. Ahlmann, ajoutons dans
un autre ordre d'idées qu'il s'avance trop en nous annonçant
que le débit des fleuves glaciaires est uniquement en relation
avec la température d'été au niveau de glaciation. « Aux
mêmes isothermes régnent à peu près les mêmes débits des
fleuves, c'est-à-dire les mêmes quantités d'humidité conden¬
sée, moins l'évaporation... ces isothermes sont des isohy-dates relatives...1 [15, p. 246]. » M. Ahlmann, en effet, a étayéses arguments sur les données fournies par les quelques
quarante stations limnimétriques de l'HydrographischesZentralbureau de \'ienne, sans tenir compte du fait que ces
postes ne sont pas tous situés près des portails des glaciers.
1 Isohydate signifie courbe d'égale hauteur d'eau condensée.
LES GLACIERS 107
Car, en effet, aussitôt que le bassin d'alimentation com¬
prend une surface non recouverte de neige ou de glace, la
température n'agit plus seule, mais le ruissellement se fait
sentir dans de larges mesures. Les conclusions de M. Ahl-
mann ne sont donc pas tout à fait exactes, pour autant que
le quotient des surfaces nues, par les surfaces enneigéess'éloigne de zéro.
En Norvège, le phénomène de la condensation revêt d'ail¬
leurs une importance considérable. M. Ahlmann a dessiné
des cartes très instructives d'isohydates annuelles, tirées
directement de l'étude du débit des cours d'eau. La conden¬
sation globale peut atteindre le chiffre énorme de 400 centi¬
mètres, évaporation déduite, alors que la quantité d'eau
précipitée et recueillie dans les fonds de vallée n'atteint que
180 cm.
Pour l'Europe centrale, ces chiffres sont évidemment diffé¬
rents. La Norvège est située dans des conditions géogra¬
phiques exceptionnellement favorables à la condensation. Le
fait que les vents humides soufflent de la mer contre la bar¬
rière des montagnes, suffit à mettre en «évidence que la
condensation directe d'humidité sous forme de frimas et de
précipitations de brouillard joue un rôle très important».[15, p. 2691.
Les calculs hydrologiques de M. Liitschg, pour le Matt-
markgebiet, ont mis en relief l'importance de la condensation
dans les Alpes. Malheureusement, les autres mesures éparses
que l'on possède ne se prêtent pas à des extrapolations s'é-
tendant à toute une année. Il serait du plus grand intérêt
que l'on installât quelque part en Suisse, à la Station du
Jungfraujoch ou au Gornergrat, par exemple, une station
d'étude avec des appareils à enregistrement continu. Il nous
semble que toutes les difficultés techniques que représente¬raient cette installation seraient largement compensées par
les résultats pratiques qu'on en pourrait tirer. Pour l'instant,on doit se contenter de la formule de M. Ahlmann en l'adap¬tant convenablement aux conditions orographiques de la
108 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
région des Alpes, quoiqu'il soit assez difficile d'en dégagerdes chiffres précis, comme l'auteur le dit lui-même.
Pour la période de juin à septembre, et avec un gradientvertical de température de 0°7 par 100 m., M. Ahlmann
donne :
C=,0,3l[e°'9°-T-l] e= 2,7182
où C est la condensation en centimètres et T la température
moyenne en degrés centigrades pendant la dite période.En Suisse, selon toute apparence, la condensation au
ày)
O
ECOULEMENT M0TEN MENSUEL dES GLACIERS
CAPACITÉ GLACIAIRE D'ECOULEMENT
EN LIT/SEC/ KM'
250
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sec
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Fig. 10.
niveau de glaciation ne serait pas inférieure à 100 cm. par an,
si l'on estime sa valeur voisine de 45 cm. pendant les mois
chauds de juin à mi-octobre, et cela au-dessus de l'altitude
de 2800 m.
Nous donnons ici à titre de renseignement une courbe
moyenne mensuelle de la capacité glaciaire d'écoulement,
LES GLACIERS 109
exprimant grosso modo le débit d'eau de fusion en litres
seconde par kilomètre carré de glacier, figure 10. Elle a été
dressée à l'aide des courbes limnigraphiques d'un certain
nombre de cours d'eau glaciaires des Alpes, publiées par le
Service fédéral des Eaux pour les années 1916 à 1925. Nous
nous sommes plu à discerner quatre classes d'années : sèches
et chaudes, sèches et froides, humides et chaudes, humides et
froides.
Le schéma qui accompagne cette courbe (fig. 10 bis) mon¬
tre la manière dont il faut décomposer les divers éléments
Fig 10 bis
d'alimentation du régime glaciaire, si l'on désire faire la
synthèse complète d'une ri\ière de ce caractère.
La formule hydrologique d'un cours d'eau à régime pure¬
ment glaciaire, comme la Viège ou le Rhône à Brigue, par
exemple, peut être mise sous la simple forme :
Écoulement = F, (capacité glaciaire d'écoulement) -\- F2
(neiges accumulées) +F3 (précipitations) -f-F4 (condensationsur les sols) — F5 (évaporation totale : glaces, neiges et préci¬pitations, et infiltration).On voit immédiatement l'importance qu'il y a à déter¬
miner avec le plus de précision possible le terme Ft (capacitéglaciaire d'écoulement), car, une fois connu, il est relative-
110 PRÉCIPITATIONS ATiMOSPHÉRIQUES
ment simple de suivre les fluctuations corrélatives du cours
d'eau avec les autres fonctions. Le second terme, concernant
l'accumulation de la neige et sa fonte printanière, se calcule
sans difficulté au moyen de la variation de la températuresur la base de la courbe que nous avons dressée plus haut
(fig. 8). L'effet direct des précipitations liquides F3 (préci¬pitations) est réglé par des lois qui se tirent aisément des
cours d'eau à régime préalpin. Enfin, F4 (condensation sur
les sols), c'est-à-dire la condensation occulte, et ce qui con¬
cerne aussi l'infiltration et la réserve des eaux souterraines,fera l'objet d'études locales. Le facteur évaporation, comme
nous le montrerons plus loin est aussi déterminable et rela¬
tivement peu variable. La méthode la plus simple pour inter¬
préter les données du limnigraphe d'un cours d'eau glaciaire,consiste à diviser les ordonnées de la courbe des débits en
deux parties, et d'obtenir ainsi deux lames d'eau super¬
posées dont l'inférieure représente le débit des eaux du gla¬cier seulement, et la supérieure les eaux des sources, du
ruissellement immédiat, etc. L'analyse sera plus complètesi l'on peut encore décomposer par le calcul la tranche supé¬rieure en deux lamelles : l'une le débit des précipitationsliquides à effet immédiat, et l'autre les précipitations solides,sous forme d'accumulation des neiges, dont la consommation
varie suivant l'époque de l'année. La courbe primitive des
débits n'est donc qu'une courbe-enveloppe des diverses
tranches d'eau qui concourent à l'alimentation.
L'étude des cours d'eau mixtes, formés d'affluents alpinset préalpins, tel le Rhin avant son entrée dans le lac de
Constance, sera facilitée si l'on suit ces prescriptions. On
décomposera ainsi la courbe du dernier limnigraphe, en une
série de courbes qui appartiendront aux divers organismescomposant le réseau hydrographique.
D'une manière plus générale, le problème des cours d'eau
mixtes devrait être traité comme un problème de régulari¬sation naturelle, à l'inverse de la régularisation artificielle au
moyen de bassins de retenue.
LES GLACIERS 111
Voici encore un petit article suggestif, qui montre l'impor¬tance d'une étude très sérieuse de l'hydrologie de la Suisse.
Il est tiré du Service des eaux du Rhin ;
La montée du Rhin. — Le 1er janvier de cette année (1926), le
niveau du Rhin au fluviomètre de Coblence a atteint la cote de 9,30 m.C'est le plus haut niveau enregistré depuis 142 ans. Le 29 février 1784,on observa la cote de 10,20 m., qui dépasse encore de 90 cm. les hautes
eaux de ces derniers jours. Au cours de ces cent quarante-deux années,la cote de 9 m. n'a été dépassée que trois fois : le 30 mars 1825, avec
9,12 m., le 28 novembre 1882, avec 9,20 m. et le 15 janvier 1920 avec
9,23 m.
Considérant que les inondations sont devenues beaucoup plusfréquentes ces dernières années, car on en compte quatre de 1880 à
1914 et sept de 1915 à 1926, les experts se demandent s'il ne faut pas
attribuer ce phénomène aux déboisements considérables qui ont été
pratiqués depuis une dizaine d'années dans les pays arrosés par le
Main et le Rhin. Ce peut être une des causes ; mais, pour ce qui est de
la dernière catastrophe, une autre explication se présente à l'esprit :
la neige a recouvert le sol dans toute l'Europe centrale après une
période de froid très vif, et l'a maintenu à celte température ; le dégelsurvenu brusquement a rapidement fondu la neige superficielle et
l'eau de fusion, s'ajoutant à celle provenant des pluies abondantes,s'est rendue aux rivières sur un sol gelé qui ne l'absorbait pas. Il
serait intéressant de rechercher si cette explication peut s'appliqueraussi à quelques-unes des hautes eaux des dernières quarante années,
tout au moins, et si elles ne résultent pas du rythme climatique sin¬
gulier, qui, à plusieurs reprises, a valu à l'Europe occidentale un début
d'hiver relativement froid, suivi d'un redoux survenant vers la fin
de novembre ou dans le courant de décembre. [Gazette de Lausanne
du 7 janvier 1926.)
Les cartes très suggestives de pluviosité et de nivosité
pour cette crue extraordinaire, exposées par la Preussische
Landesanstalt fur Gewâsserkunde à l'Exposition interna¬
tionale de la navigation intérieure à Bàle, en 1926, sont un
modèle du genre. Il serait désirable d'adopter ce genre de
représentation en Suisse.
CHAPITRE TROISIÈME
§ I. Le sol et les précipitations.
1. Généralités.
Si l'on voulait analyser dans le détail les nombreux phéno¬mènes qui participent au cycle de l'eau, limité entre l'instant
où les précipitations tombent sur le sol et celui où elles
s'écoulent dans le lit d'un cours d'eau, il faudrait écrire un
volume. Tel n'est pas notre but. Il existe plusieurs traités
importants auxquels on se reportera. Ce sont ceux de
Daubrée, Brouardel et Mosny, E. A. Martel, Keilhack,
Prinz, Maillet, Hôfer von Heimhalt, Lueger-Weyrauch,de Martonne [124 à 135], etc.
Nous ne voulons utiliser ici que quelques notions indispen¬sables de l'hydrologie générale de surface et souterraine, et
jeter un coup d'œil sur l'orientation actuelle des recherches.
Ce qui importe à l'ingénieur qui se propose de récupérerles eaux d'un bassin ou d'une rivière n'est pas tant de la
description, que des faits précis, des chiffres et des méthodes
succeptibles de l'amener dans ses calculs à un but aussi
proche que possible de la réalité.
C'est pour cela que nous laisserons de côté toute disser¬
tation sur le vaste chapitre des eaux souterraines, en ne lui
empruntant que le strict minimum ne nécessitant pas l'appeldu géologue dans les projets.
D'ailleurs, aujourd'hui encore, bien des problèmes de l'hy¬drologie ne sont que posés. On connaît, il est vrai, un grand
SOL ET PRÉCIPITATIONS 113
nombre de lois réglant l'écoulement souterrain, le ruisselle¬
ment superficiel, l'infiltration, la condensation, etc., mais il
n'existe aucune méthode d'ensemble, à part quelques tra¬
vaux mathématiques très spéciaux de Bouissinesq, qui tra¬
duisent ces lois en formules et en chiffres. Il est vrai aussi que
chaque cas rencontré dans la nature est si original, qu'ona toujours grand'peine à le rattacher à d'autres, mieux con¬
nus.
Si l'on parcourt par la pensée, à chaque saison et par tous
les temps, des bassins qui se ressemblent, comme les vallées
des Préalpes ou des Hautes-Alpes, on est malgré tout frappéde la régularité et de la périodicité apparente des facteurs quiconcourent à l'écoulement des collecteurs.
Nous nous proposons, dans l'idée de contribuer à l'élabo¬
ration d'une méthode facilitant le calcul du coefficient
d'écoulement, d'énumérer tout ce qui peut pratiquementservir, en fait de chiffres, pour les régions des Alpes.
Celui qui a pour tâche de calculer le volume le plus favo¬
rable d'une future retenue, ou de conjuguer des usines hydro¬électriques prenant leur force dans des organismes à régimetrès dissemblables, peut se contenter des courbes limni-
graphiques d'un certain nombre d'années antérieures. Par
contre, s'il doit étudier-le régime d'un cours d'eau sur la base
de quelques observations limnimétriques isolées et de rares
jaugeages, l'hydrologie lui sera un complément indispen¬sable.
En Suisse, des cas de ce genre peuvent encore se présenter,mais ils sont rares, car le Service fédéral des Eaux a pris à
tâche de mesurer les variations de presque tous les cours
d'eau d'une notable importance. Dans des pays neufs, il en
va bien autrement. Quoique subordonnés aux conditions
locales, les coefficients divers que nous allons plus loin
essayer de calculer, pour diverses rivières dont les débits sont
connus, pourront dans une certaine mesure être appliquésailleurs.
LUGEON 8
114 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQL ES
2. Le partage des eaux météoriques.
Les précipitations qui atteignent le sol poursuivent leur
cycle de plusieurs façons. Nous ne répétons ici qu'à titre de
mémoire, le schéma élémentaire du cycle, d'après l'image
d'Engler [11, p. 140].
PRÉCIPITATIONS
(Pluie, neige, grêle)
[Arrêtée
par la
végétation.
1S'égoutte
et coule sur
le sol.
Y
S'évapore.
Y
S'évaporesur la sur¬
face du sol.
IS'écoule
sur la sur¬
face du sol.
iArrive
directement
sur le sol.
iInfiltration.
Evaporation Evaporation Ecoulement
des eaux par les souterrain,ascendantes plantes ; sources et
par absorption. humidité
capillarité. des sols.
LE RUISSELLEMENT 115
3. Le ruissellement.
La part des précipitations qui contribue directement à
l'écoulement des cours d'eau est beaucoup plus faible qu'onne le croit en général. Les pluies ne les alimentent presque
jamais instantanément. Il y a toujours un espace de temps,fonction d'ailleurs de la densité de la pluie, entre le début
d'une chute et l'inflexion de la courbe du limnigraphe. Cet
instant sera réduit à peu de chose pour les précipitationstrès denses des orages, ou en général des pluies précédéesd'un temps humide et couvert, ou également très sec. Le sol
doit être préparé en quelque sorte, pour que le ruissellement
se produise. Il y a d'ailleurs des précipitations qui ne ruis¬
sellent jamais, et qui sont tout à fait perdues. Leur intensité
ne dépasse alors pas quelques dixièmes de millimètres en
24 heures.
Le ruissellement est donc fonction de plusieurs facteurs :
1° la densité ou l'intensité de la pluie,2° la durée de la pluie,3° le caractère météorologique de la période précédant la
pluie,4° la température au moment de la pluie,5° la nature du sol, sa pente, et la surface du bassin ali¬
mentant l'écoulement.
En' suivant la courbe du limnigraphe, et jour après jourles données pluviométriques, on remarque qu'il faut des
précipitations relativement denses pour produire des varia¬
tions faibles du débit. Nous avons calculé pour les diverses
régions de la Suisse qu'au-dessous des valeurs moyennes
suivantes les précipitations n'influencent plus les cours d'eau
si elles tombent après quelques jours de sécheresse. (Voirtableau 6.)
116 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Tab. 6
Terrains perméables
Plateau Préalpes H. Alpes
Terrains imperméables
Plateau Préalpes H. Alpes
Printemps et
fin automne
Eté et début
de l'automne
mm.
10
8
mm.
7
5
mm.
4
4
mm.
8
6
mm.
6
3
mm.
3
3
Ces chiffres prouvent bien qu'une grande partie des préci¬
pitations annuelles sont retenues directement par la végé¬
tation, les terres, graviers, sables, ou en général les alluvions
et le glaciaire. Il est donc de première importance de calculer
ces rétentions, qui peuvent, suivant les bassins, modifier du
tout au tout les facteurs de la formule hydrologique.
Lorsque les précipitations tombent pendant de longues
périodes en des quantités inférieures à celles que nous avons
calculées, le ruissellement est réduit à fort peu de chose, le
cours d'eau vit sur les réserves des sources et son débit dimi¬
nue graduellement. Ce fait constaté il y a une cinquantained'années par l'Ingénieur en chef Belgrand, donna lieu à la
découverte de lois importantes pour le bassin de la
Seine [136].La théorie du ruissellement a été envisagée sous bien des
rapports différents. Si l'on classe les cours d'eau suivant leur
pente, comme l'a fait Surell le premier [137], on considérera à
part : les fleuves, dont la pente moyenne va de zéro jusqu'à1 ou 2 pour mille (Seine de Paris à la mer 0,085, Loire
moyenne 1,44, Rhône à Lyon, 0,7, Danube à Obernzell 0,5 à
0,1 pour mille, etc.), les rivières à caractère assez constant,
avec une pente moyenne de 2 à 4 pour mille (Durance 3 à
1,9 pour mille), les rivières à caractère torrentiel, comme la
Plessur, dont la pente moyenne s'élève à 10 pour mille, et
enfin les torrents, pour lesquels la limite inférieure de pente
est définie à 6 %. Les ruisseaux, les rigoles, les fentes, les
diaclases de surface, les vires, les caniveaux, etc., forment le
ruissellement proprement dit.
LE RUISSELLEMENT 117
Suivons cette classification :
Les fleuves.
Ils sont alimentés par un vaste réseau d'affluents quiappartiennent aux divers types cités, formant le chevelu
hydrographique. Pendant les périodes pluvieuses, leur ali¬
mentation sera fonction du ruissellement dans tous les
bassins de réception. Il convient de calculer d'avance, pour
chacune des dites régions, les coefficients d'écoulement quicorrespondent à toutes les densités de pluies, si l'on veut
chercher les diverses caractéristiques d'écoulement de l'en¬
semble de l'organisme. Le coefficient d'écoulement calculé
grosso modo comme le quotient de la hauteur annuelle
d'écoulement, par le module pluviométrique, donnera une
première orientation sur le rôle du ruissellement vers le
fleuve. En effet, on sait que plus ce coefficient s'élève, plussont notables les effets directs des précipitations. Dans la
suite, nous verrons la relation de ces faits avec la pente des
thalwegs collecteurs.
Sur les fleuves dits tranquilles, comme la Seine, on ne
connaît pas de crue subite ou d'orage, car si intenses que
soient les précipitations, elles ne trouvent pas assez de pente
pour s'écouler avec une grande accélération. Dans des cir¬
constances tout-à-fait exceptionnelles, lors des grandespériodes pluvieuses de l'hiver 1910, le ruissellement immé¬
diat a atteint pendant quelques heures, tout au plus, la
valeur de 90 %. Mais il est resté voisin de 86 à 88 % au
cours des deux mois de janvier et février.
Dans le nord, par contre, ainsi que dans les Appalaches, où
le ruissellement varie entre 40 et 75 %, par temps humide,les effets sont plus brusques. Ils sont bénins, en général, pourles fleuves de l'Europe centrale qui ne prennent pas naissance
dans les Alpes. Par exemple on trouve pour l'Elbe, un coeffi¬
cient de 27 %, Oder 26, Dniestr 25, Weser 34, Moselle 44,Saale 45 %, quoique ces trois derniers drainent des terrains
118 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
imperméables [138]. Sitôt que le niveau des sources et des
bassins de réception s'élève en altitude, on trouve déjà des
crochets notoires sur les courbes des limnigraphes. Les
coefficients d'écoulement sont alors supérieurs à 50 %.Ainsi pour l'Isar 59, le Danube à Obernzell 58 [139], l'Inn
à Innsbruck 80 %.Comme pour tout autre élément géophysique, le ruisselle¬
ment obéit aussi à une périodicité annuelle. Dans un beau
travail sur le Main, publié par le « Central Bureau fur
Météorologie und Hydrologie im Grossherzogtum Baden »,
[140], von Tein a calculé qu'il s'écoule le 60 % des précipi¬tations en janvier, février, mars, le 45, en avril, le 20, de mai
à octobre, et enfin le 30, en novembre et décembre. Ce quifait pour l'année, le 29 % environ. Les agents qui contre-ba-
lancent le ruissellement seraient Févaporation physique agis¬sant seule en hiver pour 40 %, l'infiltration qui s'y ajouteen automne pour 30 à 40 %, la végétation qui absorbe
en été le 25 %, avec une évaporation physique de 55 %.Mais si toutes ces moyennes ne nous disent pas grand'chose
du processus d'alimentation des fleuves, du lien qui lie les
précipitations et l'écoulement, c'est que nous avons jus¬
qu'ici omis le facteur vitesse.
Ce point est à envisager différemment, suivant qu'il s'agitdu calcul de la propagation des crues, pour lequel plusieursméthodes ont été proposées [141] ou du calcul de la vitesse
du ruissellement, dès l'instant où la pluie a touché le sol
jusqu'à son arrivée au prochain limnigraphe.A ce sujet, l'Ingénieur en chef Imbeaux a imaginé une
méthode de calcul intéressante, avec un exemple d'appli¬cation à la Durance. Voir : Eydoux, Hydraulique générale et
appliquée, Paris, 1921, p. 396.
Il est malaisé de calculer, pour les deux seuls fleuves
importants que possède la Suisse, le Rhône et le Rhin, les
précipitations minima qui occasionnent le ruissellement dans
le voisinage immédiat de leur lit. Car ces organismes com¬
plexes sont alimentés par un si grand nombre de torrents,
LE RUISSELLEMENT 119
affluant de régions diverses au point de vue orographique et
climatologique, qu'on en est réduit pour identifier la nature
des écoulements à une longue méthode de sommation de
débits. A l'entrée des lacs de Constance et du Léman,
pourtant, ces phénomènes sont mieux visibles, et, comme
nous l'avons mentionné plus haut, ce n'est guère qu'au-dessus de 10 mm. de pluie que le ruissellement commence à
se faire sentir. Conformément aux lois de Belgrand, par
contre, aussitôt que les apports des rivières torrentielles
débutent — car à 10 mm. elles réagissent fortement — les
pluviomètres accusent une montée rapide.On a bien affaire ici à deux phénomènes distincts et espa¬
cés : le ruissellement direct à l'entour du fleuve, et l'alimen¬
tation par les affluents.
Lorsqu'un front chaud traverse le nord de la Suisse, en
marge de la chaîne alpine, le limnimètre de Bâle accuse sou¬
vent de fortes fluctuations, suivant la pluie à quelques heures
d'intervalle, puis le niveau s'abaisse en attendant l'arrivée
tardive des eaux des Alpes. C'est dans ce cas, précisément,qu'il est possible de déterminer la valeur minimum des pluiesruisselant exclusivement vers le fleuve.
Dans d'autres contrées, comme dans le nord de l'Allema¬
gne, l'ouest de la France, les fleuves réagissent à des taux
beaucoup plus élevés. Suivant la période qui a précédé la
pluie, il faut au minimum 20 mm. pour influencer la Loire,25 pour le Rhin, près de son embouchure dans la mer. Dans
le bassin du Mississipi où l'évaporation joue un rôle consi¬
dérable (coefficient d'écoulement 20 %) l'influence d'une
pluie de 40 mm. est tout juste notable.
Nous avons eu le privilège de correspondre, au sujet de ces
grands fleuves, avec un spécialiste, l'Ingénieur en chef de
Kalbermatten, à Paris. Pour le Rio Negro, de la Républiqued'Uruguay, qu'il a étudié en détail, il trouve des chiffres bien
inférieurs à ceux du Mississipi : minimum du coefficient de
ruissellement : 0,033, en 1917, maximum en 1914 : 0,567,
moyenne 1914-1923 : 0,357. Vraisemblablement, d'après la
120 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
durée de précipitations dans ces pays de l'Amérique du Sud,le minimum de pluie nécessaire pour actionner le ruisselle¬
ment doit être voisin de 100 mm. en 24 h. Pour le Rio Negroce chiffre est probablement supérieur encore, parce que ce
fleuve coule dans des terrains très perméables, composésen majeure partie de sables.
En résumé, plus les fleuves sont importants, plus est mo¬
deste le rôle des précipitations immédiates.
Les rivières et les torrents.
Passons maintenant aux terrains à pente accusée : les ver¬
sants du Jura, des Préalpes et des Hautes-Alpes.Le problème du ruissellement y est plus simple à analyser :
les dimensions sont réduites, et les phénomènes sont toujours'très marqués.La perméabilité du sous-sol qui joue un rôle relativement
faible pour les fleuves, devient ici, avec la nature de la végé¬tation, de toute première importance. Le ruissellement est
donc lié intimement à la zone de métasomatose. Examinons
le rôle de la végétation sur la base de la classification suivante,
qui suffit amplement aux besoins actuels de l'hydrologue.1° Terrains rocailleux et élevés, au-dessus de 2200 m. :
quelques centimètres de terre végétale ou sablonneuse, touf¬
fes d'herbe clairsemées, androsaces aux racines serpentantes,flore des Hautes-Alpes, pâturages des moutons et des chè¬
vres : ruissellement 100 % dès que la pente excède 2 à 3 %,avec début après 2 ou 3 mm. de pluie.
2° Végétation des alpages à gros bétail : prairies, herbe
serrée, rhubarbes sauvages, rhododendrons, flore abondante,terre végétale d'une épaisseur de 10 cm. sur le rocher :
ruissellement atteignant très vite le 95 %, après quelques3 à 4 mm. de pluie, sur des pentes supérieures à 7 %.
3° Zone des forêts élevées : mélèzes, arolles, vernes, vers
1800 m., terre végétale dépassant 10 cm. : ruissellement
rapide sur les versants peu recouverts, atteignant 90 % après
LE RUISSELLEMENT 121
5 mm. de pluie. L'effet régulateur des forêts touffues se fait
déjà sentir.
4° Végétation arborescente des régions basses, des colli¬
nes, du Plateau et des plaines, avec une pente beaucoup plusfaible : à part les ravins et les tranchées façonnées par l'éro¬
sion des cours d'eau où le ruissellement atteint un taux élevé,il est, dans la règle, très variable. Chaque région demande
une étude particulière, compliquée par le rôle des eaux sou¬
terraines. Le ruissellement direct peut aller jusqu'à 80 %
par des pluies denses et de l'ordre de 20 mm. en 24 heures.
On aura une idée du ruissellement moyen annuel, qu'il ne
faut pas confondre avec le ruissellement direct ou retardé,
par les chiffres que M. Brockmann [43] a calculés au moyen
de sa carte pluviométrique de la Suisse. Nous reproduisonsquelques-unes de ces valeurs :
Tab. 7
Cours d'eau AltitudeCoefficient d'écoulement Ecoulement en
moyen annuel en % lit./sec./km'2
Orbe. . .
m.
1000-500 69 37
Areuse 1100-600 77 36
Linth. 3600-500 84 61
L Sihl.
2200-800 74 42
Thur.
2400-600 75 49
Rhin.
3100-1000 59 35
Inn..
3400-1150 60 40
Tessin 3150-900 85 59
En résumé, la variation du ruissellement suivant l'altitude
et par conséquent suivant la pente, puisque la pente est
fonction de l'altitude, peut être représentée comme une
fonction du minimum de précipitations nécessaires à sa pro¬
duction. Le graphique, figure 11, dressé par l'analyse si¬
multanée d'un grand nombre de courbes Hmnigraphiqueset des précipitations, est valable pour la Suisse, le Tyrol et
les Alpes de Haute-Savoie.
La vitesse du ruissellement est assez bien connue dans les
122 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
parages élevés. Plusieurs savants se sont occupés de cette
question depuis les célèbres recherches d'Agassiz et de
Surell. MM. Vallot, de l'Observatoire du Mont-Blanc [142],entre autres, ont fait quelques séries de mesures sur les tor¬
rents glaciaires et le réseau de leurs petits affluents. La
vitesse n'a pas été trouvée en relation directe avec la pente,mais dépendante de la nature des terrains traversés, c'est-à-
dire des obstacles que forment les blocs et les éboulis des
lits. Dans les terrains de la classe 1 précitée1, la vitesse des
PRÉCIPITATION MINIMUM MOYENNE. EN *%,,NÉCESSAIRE POUR PRODUIRE LÉCOUUEMENT
EN FONCTION de t'ALTITUDE
iooo 1500 2000 Mètres
FlG. 11.
eaux sauvages est faible et de l'ordre de 1 à 4 kilomètres
à l'heure au maximum. Plus on s'abaisse vers la région des
collines ou du niveau de base des émissaires des vallées,
plus elle croît pour atteindre et même dépasser 10 km. /h.dans les lits peu encombrés et à débit important. Puis elle
décroît de nouveau un peu sur le Plateau, sauf, évidem¬
ment, dans les lits des fleuves où 15 km. /h. est une vitesse
moyenne fréquente des filets [120, 136, 137].Par les oscillations journalières de la Viège à Randa, nous
avons calculé d'après les chiffres de M. Lutschg [118], en
1 Page 120.
LE RUISSELLEMENT 123
nous basant sur l'instant du maximum de température et
de fusion, que la vitesse moyenne atteint 5,5 à 6 km. /h. Mais
elle peut dépasser 12 km. /h. lorsque les eaux sont enflées
par les fortes précipitations d'un orage.
Pour les torrents préalpins comme la Jogne, la vitesse du
ruissellement calculée d'après les oscillations dues à la fonte
des neiges retirées près des sommets, se trouve en moyenne
égale à 8 km. /h. par temps sec.
Ces quelques chiffres en disent assez sur la rapidité avec
laquelle les crues d'orages arrivent au bas des vallées. Elle
est de l'ordre de 1 à 2 h. pour les collecteurs courts du genre
torrentiel, et de 3 à 5 h. pour les rivières plus longues et plus
tranquilles, comme celles des vallées transversales du Valais
et des Grisons, par exemple.Mais on voit par là aussi la difficulté du calcul exact du
coefficient d'écoulement au cours d'un phénomène de crue ra¬
pide, puisque les observations pluviométriques ne sont faites
que toutes les 24 h. Le coefficient ne sera donc, la plupart du
temps, que l'expression moyenne journalière du phénomène.A côté du ruissellement immédiat, il convient de distin¬
guer le ruissellement retardé. Si après une période pluvieused'une durée de 9 jours, succède une sécheresse suffisamment
longue, on constate que le cours d'eau arrivera à son débit
primitif après un certain temps, dépendant en premier lieu
du produit O.A, où A est la densité moyenne de la pluie, et
en second lieu de l'humidité et de la température.
Jusqu'à ce que les couches superficielles des terres du
bassin d'alimentation aient rendu leur part d'eau au ruissel¬
lement, abstraction faite, bien entendu, du débit des sources
profondes, il faut donc un certain nombre de jours, qui n'est
pas le même pour tous les versants. Il varie suivant leur expo¬
sition au soleil. Sur les côtés nord de la montagne, l'humi¬
dité restera fixée plus longtemps, surtout s'ils sont recouverts
de végétation forestière, que sur les versants sud desséchés
promptement.Le diagramme à trois entrées (fig. 12), que nous avons
124 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
construit d'après les courbes limnigraphiques du Service
fédéral des Eaux, donne une idée du ruissellement retardé
pour les cours d'eau du versant nord des Alpes. Ainsi, à l'alti¬
tude de 1500 m., il faut compter environ 7 jours jusqu'à ce
qu'une pluie de 150 mm. /jour ait cessé de ruisseler, et cela
depuis le début de la sécheresse. Ce graphique permet aussi
de calculer très grossièrement les effets d'un chevauchement
Fig. 12.
d'une nouvelle période pluvieuse arrivant avant la fin du
ruissellement retardé de la précédente.Examinons maintenant, en nous basant en partie sur l'im¬
portant travail d'Engler et l'excellente analyse qu'en a fait
M. Huffel [143], les conditions du ruissellement dans les
zones d'altitude moyenne.
1° A la suite d'averses courtes et violentes, ainsi qu'aucours de la saison estivale.
2° Au cours et à la suite d'une période de pluies prolongées.
LE RUISSELLEMENT 125
3° Au cours d'une période de dégel rapide avec ou sans
neige.4° Au cours de l'hiver.
5° Au cours de l'année civile.
Il convient de distinguer sommairement dans chacun de
ces cas l'état du sol avant le phénomène. Il varie suivant
les types de temps et peut être : 1° parfaitement sec en sur¬
face, 2° légèrement humide, 3° très humide, détrempé ou
saturé, 4° gelé jusqu'à une certaine profondeur.Les quelques chiffres que nous avons calculés d'après les
tableaux d'Engler, s'étendent à des vallons à profil en V,dont les versants ont une pente moyenne de 43 à 51 % et
dont le thalweg collecteur varie entre 17 et 20 %.
Cas N° 1.
L'écoulement dépend donc avant tout de la période mé¬
téorologique qui a précédé l'averse. Il est différent dans les
régions boisées et dans celles qui ne sont pas ou peu recou¬
vertes de végétation.En forêt, le taux d'écoulement, c'est-à-dire le rapport
entre la quantité d'eau tombée et celle qui s'écoule hors d'un
bassin pendant la période de crue est toujours beaucovr plusfaible que sur terrain nu. Après un hiver rigoureux qui a
divisé le sol par l'action de la gelée ou après une période de sé¬
cheresse prolongée, l'effet des pluies d'orages est bénin en
comparaison du ruissellement qui suit une période humide
prolongée.
Engler tire les conclusions suivantes, pour ses quelquetreize ans d'observations des vallons du Rappengraben et
du Sperbelgraben situés dans le bassin de l'Emme (cantonde Berne) à l'altitude moyenne de 1000 m. :
Plus les précipitations sont denses, plus est rapide l'ac¬
croissement du débit, et plus est court le temps que met le
cours d'eau pour arriver à l'étalé. Cette dernière est d'ailleurs
de très courte durée. Dès que la pluie cesse, le ruissellement
126 PRECIPITATIONS 1TMOSPH EîtIQUES
diminue très rapidement d'abord, puis lentement. Après des
périodes sèches, le coefficient d'écoulement atteint, pour des
précipitations supérieures à 20 mm., 35 % sur terrain dé¬
boisé ; par contre, il reste faible en forêt et ne dépasse guère25 %. En été, par un temps extraordinairement sec, les
maxima baissent, respectivement jusqu'à 12 et 8 % dans les
dites zones. Pour des pluies inférieures à 10 mm., le coefficient
d'écoulement atteint tout au plus 25 et 10 %.Les fluctuations de la courbe d'écoulement suivent exac¬
tement celles de la pluie, avec un décalage insignifiant, de
l'ordre de quelques minutes, dans les deux bassins en exa¬
men. Mais en proportion avec l'intensité de la pluie, le ruis¬
sellement est plus rapide sur le terrain peu boisé que dans la
forêt. En un même espace de temps le volume écoulé est
trois fois moindre en forêt. D'une manière générale, les obser¬
vations d'Engler montrent que le coefficient d'écoulement
est très variable pour les averses et change pour des mêmes
quantités de pluie, suivant les saisons.
L'influence de la forêt sur le régime des sources et les
eaux phréatiques se résume dans ce fait, que les bassins boi¬
sés retiennent dans la masse de leur sol les deux tiers de l'eau
qui est tombée, et en laissent écouler un tiers, alors que les
bassins pauvres en bois laissent ruisseler les six dixièmes de
l'eau qu'ils reçoivent. L'effet régulateur de la forêt se fait sur¬
tout sentir dans les périodes aux caractères météorologiquesextrêmes. Ainsi, au cours de l'été si chaud de 1911, le bassin
boisé a débité en moyenne cinq fois plus d'eau que l'autre.
Jusqu'à quelle altitude peut-on étendre ces conclusions ?
L'analyse de plusieurs cours d'eau suisses nous a montré
qu'il n'y avait en somme pas de limite pour autant que la
pente moyenne ne s'abaisse pas au-dessous de 20 %. Ainsi,
pour le bassin de la Plessur qui atteint près de 3000 m. d'al¬
titude (263 km2, 17,2 % de rochers et éboulis, 20 % de
forêts, 62,8 % de prés de pâturages), le coefficient d'écoule¬
ment pour de courtes averses de 15 mm. en période sèche,atteint le chiffre de 20 %.
LE RUISSELLEMENT 127
Cas N° 2.
Pendant les pluies de front, les pluies orographiques et
d'une manière générale les pluies sédentaires de longuedurée (Landregen et Regenperioden des Allemands), le ruis¬
sellement se comporte tout autrement. On ne distingue plusde différence entre les débits des diverses régions. Le rôle
de la végétation s'efface et Engler constate que dans ses deux
vallons le coefficient d'écoulement apparent atteint souvent
le taux élevé le 80 à 90 %.Au début de ces périodes, pourtant, les zones forestières
ont un certain pouvoir de rétention, qui dépend d'ailleurs de
l'état du sol. Plus celui-ci est humide et les sources actives,
plus le ruissellement immédiat est accusé. Au cours d'une
série de journées de brouillard et de forte condensation, le
sol se sature en quelque sorte, au point de devenir un vérita¬
ble glacis impénétrable aux pluies. Ce pouvoir des sols, sur
lequel nous aurons l'occasion de revenir, est parfois très mi¬
nime au cours du printemps, surtout après un hiver pluvieuxet doux. Il est en corrélation étroite avec le déficit hygro¬métrique de l'air.
En ce qui concerne l'intensité et la fréquence des précipi¬tations au cours d'une même période pluvieuse, on constate
que plus la durée de la pluie est prolongée, plus les effets ré¬
gulateurs de la forêt diminuent. Par contre, pour un même
total de pluie, la forêt retient d'autant plus d'eau que les
intervalles des chutes sont plus espacés.De toute façon, le coefficient d'écoulement croît toujours
pendant une longue série pluvieuse. Ainsi pour 15 jours de
pluie avec un total de 160 mm., soit à peu près 10 mm. par
jour, l'écoulement de 10 % au début, a cru régulièrement
jusqu'à 70 %, à la fin de la période (IX, 1916).Dans un autre cas (VII, 1909), pour 160 mm. en 7 jours,
soit environ 20 mm. par jour, l'écoulement passa de 10 % à
75 % pour les terrains boisés et de 11 à 87 % pour les ter¬
rains peu boisés.
128 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
En août 1915, pour 60 mm. en 4 jours, le taux varia de
30 à 51 % dans les pâturages et de 47 à 61 % dans la forêt,ce qui s'explique par l'état humide du sol avant la pluie.
Enfin, après une période de préparation très humide, alors
que le sol était saturé d'eau (14-15 juin 1910), le coefficient
d'écoulement est monté avec une extraordinaire rapidité de
50 à 106 % dans la région forestière et de 50 à 101 % dans
le vallon peu boisé, pour environ 75 mm. tombés en 48 h.
C'est là un maximum, constaté une seule fois au cours de
treize années d'observations.
Les chiffres qui viennent d'être cités comprennent l'écou¬
lement total, apport des sources compris. Pour avoir le ruis¬
sellement unique des précipitations, ils sont à diminuer de
10 % environ.
Cas N° 3.
La connaissance du ruissellement au cours d'une périodede dégel rapide, alors que la neige recouvre encore les terrains,est d'une grande importance hydrologique dans nos climats,car presque tous les cours d'eau sont alimentés par la neige,dans la première moitié de l'année.
L'étude du dégel rapide, lorsque le processus d'alimenta¬
tion est très net, se prête mieux au calcul des volumes solides
et liquides qui entrent en présence au printemps, que l'étude
de longues périodes où l'activité de la fusion est faible.
Nous emprunterons ici encore, aux beaux travaux d'Eng-ler, la base expérimentale de nos calculs.
Dans un bassin torrentiel recouvert de neige, le régime de
l'écoulement a de grandes analogies avec celui du régimeglaciaire. On constate des oscillations journalières des débits
qui suivent de très près les variations de la température de
l'air. Au fur et à mesure que la limite inférieure de la neiges'élève vers les sommets, l'amplitude de ces oscillations
croît d'abord, passe par un maximum, puis décroît et s'éteint
un ou deux jours après que la neige a disparu. Un seul coup
LE RUISSELLEMENT 129
d'œil sur la courbe limnigraphique permettra donc de dire
s'il y a encore de la neige qui participe à l'alimentation du
collecteur. Et cela est fort important dès l'instant où l'on
calcule le taux du ruissellement purement pluvial.Indépendamment de la température de l'air, la fusion de la
neige est en liaison très étroite avec la végétation. On peutdire, d'une manière générale, qu'à toute saison le débit des
eaux de la fonte des neiges varie du simple au double en pas¬
sant d'une région entièrement boisée à un sol sans arbre.
Au printemps, lors de la fusion rapide, les amplitudesmaxima des débits, ainsi que les débits moyens journaliers,restent toujours supérieurs dans les bassins nus. L'eau ruis¬
selle surtout en surface ou à quelques millimètres dans le sol
d'humus des prairies. Dans les bassins boisés, l'eau pénètreplus profondément et l'écoulement est d'autant plus ralenti
que le terrain est plus capable d'absorption.Par kilomètre carré de bassin, l'écoulement atteint dans
toute la période printanière rarement 400 litres par seconde.
Voici les débits maxima par km2, lorsque des flaques de neigeémaillent encore les versants.
Bassin boisé : Bassin peu boise :
23 mai 1906 252 lit./sec./km2. 532 lit./sec./km"2.21 mars 1916 116 » 240
2 mai 1917 260 » 487 »
Les oscillations journalières de la courbe limnigraphique,sont toujours plus accusées dans la région peu boisée. Si l'on
reporte les courbes des deux bassins sur un même systèmed'axes, on voit que les maxima sont assez distants alors que
les minima coïncident généralement, ou, en d'autres termes,
que la forêt protège la neige contre la fusion rapide.Le débit minimum journalier se fait sentir entre 9 et 11 h.
du matin, et le maximum vers 16 à 18 h. Le débit est plusaccéléré à la hausse qu'à la baisse.
Dans les bassins boisés, les plus petits débits et les plus
petites oscillations trouvent leur cause dans l'effet combiné
des variations de l'écoulement dans le sol et dans les faibles
nierez — y
130 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
variations de la température de l'air et de la surface du sol.
Au cours d'une période printanière sans précipitations, les
courbes des débits des deux bassins se suivent avec un paral¬lélisme pour ainsi dire absolu. L'écart sur la courbe du ther¬
mographe est assez constant et oscille autour de 4 h., c'est-à-
dire que si la température de l'air commence à monter forte¬
ment vers 8 h. du matin, la courbe des débits suivra vers midi.
On distingue plusieurs phases nettes dans le processus de la
fusion : 1° une phase de préparation d'une durée de 4 h.,
pendant laquelle le sol et la neige absorbent des calories ;
2° une phase d'écoulement croissant qui atteint son maxi¬
mum 6 h. après le maximum de température de l'air et dure
de 6 à 7 h. (débit max. 17-18 h., T. max. 12-13 h.) ; 3° une
phase d'écoulement décroissant qui se poursuit pendant la
nuit, jusqu'au jour suivant, soit environ 16 h. après la pointe.Au cas où de la pluie surprend une couche de neige fraîche,
le ruissellement immédiat est accéléré. Pour peu que le sol
soit gelé, le coefficient d'écoulement atteint en l'espace de
quelques minutes des valeurs supérieures à 100 %. C'est
dans ces conditions que se font les plus fortes crues hiverna¬
les, dont le danger est si grand.Examinons maintenant, d'après les courbes limnigraphi-
ques publiées par Engler, le volume de neige moyen journa¬lier, qui se transforme en eau, lorsque la neige est atteinte
par une fusion rapide, peu après une période de gelNous disposons pour cela d'un matériel très complet d'ob¬
servations s'étendant sur deux périodes d'une dizaine de
jours. Une idée bien précise des phénomènes qui caractéri¬
sent le dégel rapide est donnée par la période du 26 avril au
5 mai 1917, accompagnée, en outre, des observations mé¬
téorologiques : température et état du ciel. L'état hygro¬métrique est tiré par interpolation des observations de Berne,Zurich et du Rigi, avec une erreur maximum de 5 %.Les calculs que nous présentons ne se rapportent qu'au Rap-
pengraben, vallon peu boisé, d'une superficie de 697.100 m2,à l'altitude moyenne de 1000 m. et dont la végétation est
LE RUISSELLEMENT 131
répartie ainsi : prairies 54,7 % cultures 1,7 %, prés 8,45 %,bois ou forêts 35,5 %. Dans les calculs la surface a été rap¬
portée à 1 km2 pour faciliter les comparaisons.Le volume total de la neige au début du phénomène en
examen est d'environ 650.000 m3 le 26 avril, soit approxi¬mativement 65.000 m3 d'eau de fusion. Ce chiffre a été calculé
d'après les lectures faites à trois stations et il suppose que
le rapport des hauteurs de la neige, sur les deux versants
sud et nord du bassin, qui se partagent à peu près la moitié
de la superficie totale, est voisin de 2,0. Engler nous a mon¬
tré, d'après de nombreuses séries de mesures faites sur sol
ombré et sur sol ensoleillé, que ce rapport était en moyenne
égal à 2,5.L'évaluation globale des neiges, sur la base de ces trois
postes à altitudes différentes, mais malheureusement situés
sur le versant sud, est sujette à des erreurs. Dans notre cas,
nous pensons qu'elles n'excèdent pas le 5 % de la valeur
indiquée.Si l'on s'en rapporte à de nombreux jaugeages effectués au
printemps, on peut considérer les sources comme débitant
d'une manière constante au cours de ces dix jours, 4,5 litres
par seconde.
Il n'est pas tombé de précipitations et le temps, exceptéle 26, est resté beau. Le coefficient d'écoulement moyen, au
cours du mois d'avril, dans la période qui a précédé le 26,fut trouvé par Engler, égal à 102,3 %. Le sol resta d'ailleurs
toujours recouvert de neige et ce taux élevé s'explique non
par le ruissellement immédiat, mais par le travail des eaux
d'imbibition en réserve.
Le graphique (fig. 13) montre d'une manière claire la
forme de l'écoulement, décomposable en deux courbes, l'une
régulière, joignant tous les minima de débit journalier, et
l'autre d'allure sinusoïdale, dont les minima s'appuient sur
la première.'
La fréquence des oscillations est d'un jour et leur ampli¬tude est d'abord croissante jusqu'à l'arrivée d'un maximum
D=1G6%
D-190%
248%
D
=258%
D
=383%
F
i
g
.
13.
LE RUISSELLEMENT 133
correspondant à l'instant où le sol superficiel est saturé
d'eau. Dès ce moment, les oscillations s'amortissent graduel¬lement et lorsqu'elles s'éteignent, la neige a totalement
disparu du bassin d'alimentation.
L'humidité du sol joue un rôle considérable pendant ce
phénomène, et, quoique la température de surface, pendantles jours précédents, n'ait guère dépassé le point de congé¬lation, les couches ont fourni dans l'ensemble assez de calo¬
ries pour que le niveau de la neige ait diminué journellement
TRAVAIL du SOL a la TONTE des NEIGES
» : i-goi-ircesT
-t—*—
flarche du àéb\\ des eaux phréahques et d'imhbvUon
Fig. 14.
de quelques millimètres. Une fraction de cette eau de fusion
a contribué au ruissellement, mais elle s'est infiltrée en
grande partie jusqu'à une profondeur atteignant par places
un mètre.
A part les nappes aquifères des sources profondes, le
bassin contient dans sa terre arable un volume d'eau égaltrès approximativement à 45 % X 1 m. X 697 100 m2 =
314 000 m3 (pour 1 km2 = 450 000 m3) où 45 % représentele pouvoir de rétention moyen en eau de l'ensemble de la
couche de terre, au début de la fusion. Aussitôt que l'eau
abondante des neiges atteint cette couche, l'échange est
activé, l'humidité est accrue, et la courbe correspondant au
134 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
débit des eaux d'imbibition rendues par le terrain, s'élève
pour atteindre la forme schématique de la figure 14.
Nous avons calculé soigneusement pour chaque journée,
d'après les chiffres d'Engler, la quantité de neige convertie
en eau. Les casiers de la courbe en escalier (fig. 13) corres¬
pondent à 22-24 heures, l'espace de temps qui sépare deux
minima successifs. Le coefficient d'écoulement global pour
ce temps est représenté en % par le chiffre D = vr, quotient
du débit total Q écoulé entre deux minima, sur la masse
totale d'eau de fusion N. Il varie dans d'assez larges limites,ce qui s'explique par le rôle complexe du sol : min. 116 %,max. 383 %. Pour le phénomène total du 26 avril au 5 mai,c'est-à-dire pour la moyenne des jours qu'a nécessité la
fusion de 55 cm. de neige :
D_Q=100 144021jr^__D-N__1UUX 65000m3
- ^V/o
ou, avec déduction de l'apport des sources :
D = 100x^74=216o/o65 000 m'1
Si l'on compte l'excès d'eau x, apporté par le terrain, en %de la quantité totale écoulée, sans faire abstraction des sources
qui entrent pour une part minime, inférieure à 3 %, on a :
(100 % + x %) 65 000 m3 = 144 021 m3, et x = 121,5 %
= participation à l'écoulement ne provenant pas de l'eau de
fusion, soit un chiffre encore supérieur aux précipitationssolides accumulées.
Ce phénomène est important à retenir, car il démontre
l'avantage économique énorme dans le bilan annuel des
eaux d'un bassin, qui résulte du fait que les précipitationstombent sous forme de neige, au lieu de pluie. Le rôle de
l'évaporation est considérablement diminué.
Signalons en passant qu'on a trouvé au Wàggital [144]
LE RUISSELLEMENT 135
pour les mois de mai et de juin 1925, un écoulement de 60 %supérieur aux précipitations.Au moyen du graphique figure 13, nous avons encore
calculé le coefficient d'écoulement journalier, correspondantau volume de chaque boucle d'oscillation, comptée au-dessus
de ses minima. Ce chiffre D', donné en %, est intéressant, car
il montre la part certaine du volume quotidien N de neige,qui entre dans le ruissellement immédiat.
Le volume représenté par la différence en valeur absolue
de [(100 % — D'%)| X N, ce qui revient à dire le volume
N d'eau de fusion, moins le volume des boucles, comptéau-dessus de leurs minima, rejoint aussi le thalweg, mais sous
forme d'un mélange d'eau de fusion et d'eau phréatique.Dans le graphique, il se trouve d'ailleurs compris en partieà l'intérieur de la courbe joignant les minima des oscillations.
Cette manière plus ou moins hypothétique de figurerl'action individuelle des différents volumes d'eau qui entrent
en présence lors de la fusion des neiges, est certainement
critiquable. Le problème aurait pu être abordé moins empi¬riquement. Mais dans l'état actuel de nos connaissances sur
le processus des eaux superficielles d'imbibition, il est diffi¬
cile de mieux partager les rôles. On ne sait pas en somme
comment le sol débite sous la neige, et surtout quelle est la
corrélation de ce débit avec les oscillations journalières du
débit total.
N'oublions pas d'ajouter — au cas où la courbe joignantles minima serait la valeur exacte du débit des eaux phréa¬
tiques et d'imbibition — que le volume représenté par la
différence j (100 % — D'%)j X N, n'est pas perdu sous
forme d'évaporation. La quantité d'eau qu'exprime cette
différence participe certainement au ruissellement, et l'on
en sera convaincu par la démonstration qui va suivre.
Grâce à la connaissance de la variation de l'humidité des
terres, il est possible, en une certaine mesure, de calculer, à
part, le volume des eaux rejetées par le sol.
Engler, qui a étudié en détail la question de l'absorption
136 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
des précipitations et la teneur en eau du sol, indique qu'au
printemps, à la fonte des neiges, les terres du Rappengrabenrefusent de l'eau, lorsque le 56 % de leur volume est composéd'eau d'infiltration. Ce pourcentage varie, et aux époques de
grande sécheresse, il ne descend jamais au-dessous de 20 %.Dans notre cas, l'humidité des couches supérieures des
terres n'a, de toutes façons, pas varié entre des marges dépas¬sant 45 % à 56 % pendant la montée des eaux, et 56 % à
36 % pendant leur descente, du début à la fin de ces neuf
jours de fonte.
Le volume total des eaux expurgées, représenté par une
variation de 56 % à 36 % de l'humidité dans les vingt-cinq
premiers centimètres de la couche de terre arable du Rappen¬
graben, serait d'environ 50,000 m3. Pour une variation de
20 %, dans une couche d'une épaisseur de 40 cm. :
80 000 m3, etc.
Ces chiffres sont conformes à ceux qu'a trouvés Engler par
la mesure directe sur le terrain, du débit des sources, suin¬
tement et transpiration des terres (Chap. IV, p. 92 : Anteil
des Quellwassers und des Bodenschweisses). Ainsi au prin¬
temps le 40 à 43 % des eaux écoulées n'est justement pas dû
au ruissellement immédiat des précipitations, mais est
emprunté à la réserve des eaux accumulées dans les terres au
cours de l'hiver. Le 42 % représenterait dans notre cas un
volume de 60 000 m3. Il correspond à l'emmagasinementtotal d'une précipitation de 85 mm., soit la moitié de celle
d'un mois normal, ou le 1 /25 de la période d'hiver.
En résumé, si nous admettons que l'apport du sol est de
60 000 m3, pour tenir compte du fait qu'il travaille encore
activement à la fin de la fusion, nous trouvons comme
coefficient d'écoulement effectif :
Écoulement des eaux de fusion 83 978 m3.
Ë^x~de fusion= 1UU
65 000 irf= 9 /o'
Ce chiffre semble paradoxal. Et pourtant, même en forçantles erreurs d'évaluation au maximum probable, c'est-à-dire
LE RUISSELLEMENT 137
pour les débits — 3 %, pour la neige + 20 %, pour les eaux
d'imbibition — 25 %, de leurs valeurs respectives, on trou¬
verait qu'il s'est écoulé plus d'eau de neige qu'il n'y en avait
à disposition.Dorénavant, on peut donc être assuré qu'au cours de ce
phénomène de fusion rapide, toute la neige s'est écoulée sans
perte, c'est-à-dire sans évaporation. Puisque les pertes sont
en quelque sorte négatives, il y a eu gain par la condensation
d'eau contenue dans l'atmosphère.Examinons brièvement, par la méthode très simple du
point de rosée, la valeur approximative de cet apport
extérieur.
Entre le sol et l'atmosphère se produit un constant échanged'eau réglé par le déficit hygrométrique et par la différence
de température du sol et de l'air. L'hygrométrie nous ensei¬
gne que si la température de l'air est supérieure à celle de la
surface d'un hygromètre à condensation, il se déposera de la
rosée sur celle-ci chaque fois que la tension de la vapeur d'eau
contenue dans l'air est égale ou supérieure à la tension cor¬
respondante à la température de la surface. On peut assi¬
miler la surface du sol à un hygromètre de ce genre.
A la température de zéro degré, qui est à peu -près celle
de la neige fondante et du sol sur lequel ruisselle l'eau de
fusion, la tension de la vapeur d'eau est 4,58 mm., ou, ce quirevient au même, i m3 d'air contient 4,85 gr. d'eau. Toutes
les fois que la tension de la vapeur d'eau dans la couche d'air
qui repose sur le sol dépassera ce chiffre, il se déposera de la
rosée, dont le volume sera dans un certain rapport de propor¬
tionnalité avec la différence des tensions. Par contre, dès que
l'état hygrométrique absolu de l'air s'abaissera au-dessous
de 4,58 mm., le sol rendra de l'eau par évaporation.Au cours du phénomène de fusion qui vient d'être décrit,
cette différence de tension a été trouvée presque toujours
positive. L'échange d'eau s'est donc fait dans le sens de la
condensation air-sol. La différence moyenne des tensions
était de 0,35 mm.
138 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Pour calculer l'intensité de la condensation, on peut partirde l'hypothèse suivante : Dans les couches d'air de faible
épaisseur (10 à 20 cm.) en contact avec le sol, la totalité de
la vapeur d'eau qui se trouve en surplus au point de satu¬
ration se condense sur le sol en forme de rosée. Cette con¬
densation est fonction de la vitesse de déplacement des
couches d'air en contact avec celui-ci.
Au cours de la période envisagée la vitesse du vent a été
faible ; Engler ne Fa pas notée, mais d'après les observations
de Berne, Zurich et du Rigi, elle a dû varier entre 1 et 3 m.
par seconde, en moyenne.
On trouve qu'il se condense ainsi d'une tranche de 10 cm.
d'air, pour une vitesse du vent de 1 m. /sec. : 0,00000035 cm3 /sec. par m2 de terrain, soit un prisme de 0,0126 mm. de hau¬
teur, par heure, ou 0,3024 mm. par jour de 24 h., ou 300 m3,
par jour, pour le bassin de réception en entier. Pour les
neuf jours, cela ferait 2700 m3, chiffre qui ne représente qu'un
peu moins du 2 % du volume total des eaux écoulées. Cette
valeur est assurément beaucoup trop faible, car, abstraction
faite des erreurs, nous avons vu que le coefficient d'écoule¬
ment était 129 %, et représentait un excès d'eau de
18,978 m3, venant de l'extérieur.
En admettant la moitié des erreurs maxima précitées, nous
pouvons abaisser cet apport à 7500 m3, soit 840 m3 supplé¬mentaires par jour, ce qui correspondrait à une condensation
de 1,2 litre par m2 et en 24 h. (1,2 mm. de hauteur). Dans
ce cas, la vitesse de l'air serait de 2 m. /sec, et l'épaisseur de
la tranche d'air de condensation, 40 cm., choses encore
parfaitement admissibles.
Ce chiffre de 1,2 mm. par 24 h. n'est donc de toute façon
qu'un minimum. Toutes proportions gardées, il s'élèverait
dans notre cas à 2,85 mm. par 24 h.
Il est important de retenir ces valeurs, car elles démon¬
trent d'une manière indéniable le rôle énorme de la conden¬
sation, lorsque les neiges quittent les versants alimentant les
cours d'eau. On conclut de là aussi qu'au cours d'une période
LE RUISSELLEMENT 139
de dégel rapide, la totalité des neiges s'écoulent dans le col¬
lecteur général.Un calcul plus rigoureux de la condensation peut se faire
par une méthode hydrographique. Considérons (fig. 14 p. 133)les oscillations journalières du débit. Si la courbe des minima
devenait après un certain temps parallèle à l'axe des temps,il en résulterait alors un équilibre dans le ruissellement, le
sol saturé refusant toute quantité nouvelle d'eau. La pressionhydrostatique et le débit ascendant et descendant dans le sol,une fois en équilibre, le volume d'eau d'une oscilla¬
tion comptée entre ses minima devient égale au volume de
neige fondue, plus ou moins la condensation ou l'évapora-tion.
Toutefois, dans notre cas, nous n'avons pu justifier cette
proposition, d'abord parce qu'une seule oscillation s'appuiesur deux ordonnées de la même hauteur (178,4 lit. /sec.) et
parce qu'au cours de la journée les conditions de températureet d'humidité ont été justement défavorables à la conden¬
sation.
Un examen attentif et des calculs faits sur d'autres cas
présentés par Engler confirment pourtant les théories émi¬
ses. (Période du 17-25 mars 1916.)On peut se demander maintenant quel est le processus de
l'écoulement d'un cours d'eau au moment de la fonte géné¬rale des neiges, dans la saison printanière. L'analyse d'un
grand nombre de courbes limnigraphiques au niveau de base
des cours d'eau suisses, montre que les oscillations caracté¬
ristiques ne durent que fort peu de temps, relativement à
l'ensemble des jours de fonte. Elles varient d'amplitude sui¬
vant l'altitude de la limite inférieure de la neige, et attei¬
gnent leur maximum lorsque les bassins sont dénudés jusqu'à1000-1500 m. Dès que la neige dépasse 1800-2000 m., elles
diminuent et le coefficient d'écoulement passe au-dessous de
100 %. A partir de 2200 m., il n'y a plus guère moyen de lire
sur les diagrammes les effets de la fusion, dans les bassins
préalpins, cela va de soi. Car pour les émissaires glaciaires,
140 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
c'est au contraire vers le mois de juin que commencent les
plus fortes oscillations.
L'arrivée du dégel intense sur des terrains que la neigevient de quitter est relatée aussi par de faibles oscillations,
correspondant au dégagement des eaux superficielles et
phréatiques, sensibles aux variations de la température de
l'air.
Cas No 4.
Esquissons rapidement, pour compléter la collection de
ces phénomènes hydrologiques, la marche de l'écoulement
au milieu de l'hiver.
Dans les régions de haute altitude le problème se présentetrès simplement. Pendant les mois d'hiver où la températurede l'air reste au-dessous de zéro degré, l'écoulement est très
régulier, et les versants des classes 1 et 2 précédentes (p. 120)ne livrent en moyenne au thalweg que 2 à 3 litres par seconde
et par km2. Certaines difficultés techniques ne permettent
malheureusement pas toujours de préciser ces chiffres, car il
arrive que les mouvements des limnigraphes soient paralysés
par la glace. Les courbes ne présentent alors plus aucun
intérêt.
Pour les régions plus basses, 1000-1500 m., nous nous
adresserons encore à l'ouvrage d'Engler qui, sur la foi de
l'expérience, arrive aux conclusions suivantes :
L'écoulement au cours de la période hivernale dépendavant toute chose de la température de l'air. Dans nos cli¬
mats, et en général dans toute l'Europe centrale, le caractère
du ruissellement n'est jamais constant, car nous sommes sous
l'influence des vents des secteurs S-W, qui amènent des sauts
de température fréquents. Le ruissellement est donc compli¬qué dans cette saison, soit par la nature changeante des
précipitations, soit par l'accumulation temporaire d'eau sous
forme de couche de neige. Il est pour ainsi dire impossible de
formuler une loi générale du dégel, dans les cas spontanés de
LE RUISSELLEMENT 141
hausse de température, accompagnés de précipitations liqui¬des ou solides. Ces genres de phénomènes se passent avec une
beaucoup plus grande rapidité que l'établissement d'un
régime pluvieux en été. Le coefficient global d'écoulement
peut sauter en 48 heures de 50 % à 500 %.Engler nous montre qu'en hiver, comme d'ailleurs en
toute autre saison, la forêt joue un rôle régulateur sur le
ruissellement. Lorsqu'une période de dégel rapide est accom¬
pagnée de pluie, le sol forestier retient les eaux en grandepartie, à l'inverse des prairies et des champs qui débitent, à
superficie égale, jusqu'à 2,5 et même cinq fois plus.Les courbes limnigraphiques d'orage et de dégel rapide
présentent entre elles une certaine analogie. En hiver,
l'apport supplémentaire de la neige accroît évidemment
l'amplitude des oscillations, mais l'action de l'évaporationest pour ainsi dire nulle.
Pendant les périodes de grand froid, l'écoulement est à peu
près le même que dans la haute montagne. Pour autant que
l'enregistrement le permit, Engler constata que lorsqu'au-cune goutte d'eau ne sortait du Rappengraben, l'écoulement
de la région boisée du Sperbelgraben ne fut jamais inférieur
à 4 lit. /sec. /km2.Ce fait est aussi important à retenir, pour ce qui concerne
l'économie annuelle des eaux d'un bassin de moyenne altitude.
Voici le résumé des principaux résultats :
Ruissellement en lit.Isec.jkm2. Tab. 8
D'après Engler.
Bassin
Temp.air
Ruis. Temp.air
Ruis. Temp.air
Ruis. Temp.air
Ruis.
+ 9?1 5,8 —6°1 5,2 j_2°7 5,8 +0°7 5,5
,forestier a
6,5
a
6,9
a
7,6
a
5,6
Bassin. +7°9 1,6 —6°5 2,4 +2°7 3,1 —0°6 2,2
peu boisé a
2,9
a
3,6
a
5,6
a
3,6
142 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Il n'est pas facile de se prononcer sur le rôle direct du
gel. Ainsi Engler observa qu'après quelques jours de froid
(16-21 nov. 1918. T. moy.— 3°5), il s'était fait sentir jusqu'à
15 cm. dans la terre arable d'un jardin, et à 6 cm. en prairie.Par contre, après un plus long terme, la gelée atteignit par¬
fois 1,50 m. de profondeur sur le versant nord du Rappengra-ben. Si le gel ininterrompu surprend un sol saturé d'eau, il
est clair que la plus grande partie de celle-ci sera rendue au
ruissellement lors du prochain dégel. La gélive des sols peutdonc jouer un rôle accumulateur momentané. D'ailleurs une
série d'autres facteurs activent encore ce pouvoir de réten¬
tion. Ainsi le craquellement superficiel des sols facilite l'in¬
filtration des eaux de fusion, les tapis de feuilles mortes,
prises par le gel maintiennent la température superficielledes terres au-dessus du point de congélation, etc.
En résumé, au cours de deux hivers, Engler trouva les va¬
leurs suivantes du coefficient d'écoulement (loc. cit. 11, p. 523.)
Tab. 9 D'après Engler.
Coefficients d'écoulement en
Bassin boisé l Bassin peu boisé
1915/1916Mois I Mois
Décembre 77,9 ,Décembre 90,5
Janvier 87,0,
Janvier. 90,1Février 60,6 I Février 66,6Mars 98,9 Mars 126,9Avril (1-15) ^8 Avril (1-15) ^32^5
Moyenne 78,9 ! Moyenne 98,8
Mois
Décembre 77,1Janvier 95,7Février 75,5
1916/1917Mois
Décembre 86,4Janvier 104,6Février 50,1
Mars 15,0'
Mars. 12,4
Avril (1-15) 873 ! Avril (1-15) \fflfi
Moyenne.... 59,5 ' Moyenne.... 64,3
LE BUISSELLEMENT 143
Nous avons tenu à reproduire ce tableau pour montrer la
corrélation entre ces chiffres et la variation de la limite
inférieure des neiges. C'est en effet vers la fin du mois de
mars ou au début d'avril que la fusion se produit à l'altitude
de 1000-1200 m., soit au niveau des deux ravins, ce que l'on
voit par les taux élevés du coefficient d'écoulement qui coïn¬
cident précisément avec cette époque.Le coefficient d'écoulement atteint son maximum entre
l'instant où la fusion attaque les neiges d'un versant et
l'instant où elle achève son œuvre.
Cas N° 5.
L'étude du ruissellement au cours de toute une année est
complexe dans une région montagneuse, car sa variation est
double : suivant la saison et suivant l'altitude. 11 est difficile,dans l'état actuel de nos connaissances, d'établir une loi quilierait ces trois variables : le temps, le ruissellement et l'alti¬
tude.
Certains auteurs ont tourné la difficulté en embrassant
sous un seul coefficient des cours d'eau du genre du Rhin, de
la Reuss, etc., qui parcourent pourtant des régions à grandedénivellation. Mais ce procédé n'apporte aucune contri¬
bution de valeur à l'étude du ruissellement.
Nous avons vu plus haut que ce dernier croit dans de lar¬
ges mesures proportionnellement avec l'altitude, et que vers
les sommets de 3000 m., il atteint, après de faibles pluies,le maximum de 100 %, alors que dans la plaine l'écoule¬
ment immédiat dépasse rarement la moitié des précipitations.S'il était possible de dessiner pour des tranches de 300 en
300 m., par exemple, des courbes de variation annuelle du
coefficient d'écoulement, on verrait qu'elles sont toutes
décalées dans le sens du temps et de l'altitude d'une valeur
à peu près constante et égale à trois jours. Un tel graphiquemontrerait aussi la position très approximative de la limite
144 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
inférieure des neiges, relatée par les inflexions brusques des
courbes au cours des premiers mois de l'année.
La variation du ruissellement moyen annuel, suivant la
pente du terrain, peut dans une très large mesure être assi¬
milée à sa variation suivant l'altitude. Car la pente aug¬
mente sensiblement avec l'altitude, si l'on envisage l'ensem¬
ble d'une région.Nous avons donc cherché à établir un diagramme (fig. 15)
qui donne une idée nette de cette variation. La distinction
des trois zones fondamentales est basée par analogie sur les
chiffres d'Engler et sur la comparaison des taux de boisement
Fig. 15.
des bassins divers qui ont servi à dresser les courbes (Orbe,Jogne, Veveyse, Sihl, Sitter, Emme, Plessur).
Engler, dans son commentaire très détaillé sur la variation
de l'écoulement annuel, nous dit que ses chiffres s'étendent
vraisemblablement à la grande marge des altitudes entre
800 et 2000 m. Pour les besoins de nos calculs, nous les réca¬
pitulons plus bas en admettant qu'ils peuvent être utilisés
pour la majeure partie des cours d'eau préalpins.Au cours des mois d'avril à novembre, la différence entre
les débits des deux bassins du Sperbelgraben et du Rappen-graben, assimilables en grand à la forêt et à l'alpage peu
boisé, est la suivante : les plus grands écarts dans le ruisselle¬
ment ont lieu en avril et en mai. Pendant ces mois, ainsi
LE RUISSELLEMENT 145
qu'en septembre, octobre et novembre, le bassin peu boisé
abandonne plus d'eau que l'autre. En été, de juin à août,l'écoulement est en toutes régions sensiblement le même, sauf
dans les périodes d'extrême sécheresse. L'influence de la vé¬
gétation sur les débits est donc très faible au cours de ces mois.
Durant les treize années d'observations (1903-1915), le
coefficient d'écoulement global a été, dans la période du
16 avril au 30 novembre, 54,6 % pour le bassin boisé et
61,2 % pour le bassin peu boisé. Ces chiffres sont donnés
sans corrections, mais Engler a montré qu'en réalité il fallait,dans les deux cas, corriger la valeur des précipitations et de
l'écoulement, en sorte qu'on arrive finalement aux taux de
55,1 % et 55,2 %. L'écoulement est donc rigoureusement le
même dans les deux régions ; les excès et les défauts men¬
suels se compensent.Les maxima et minima annuels des deux vallons sont respec¬
tivement en 1910: 66,4% et 76,9%, en 1911: 40,5 % et 52,1 %.
Coefficient d'écoulement moyen mensuel pour 1903-1915, et
pour 1 kilomètre carré de bassin.
(Tabelle 118, p. 549, Engler.)
Chiffres exprimés en %. Tab. 10
Bassin boisé Bassin peu boisé
% non corriges
Avril (16-30) 90,1Mai 66,8Juin 52,0Juillet 53,0Août 40,9
Septembre 49,2Octobre 54,5Novembre (1-30) . . . 49,9
Moyenne ' 54,6
Moyenne corrigée : 55,1
%, non corrigés
102,2 ..
81,7 ..
53,9 ..
•
54,8 ..
44,1 . .
54,0 ..
60.5 ..
62.6 ..
61,2
55,2
% corrigés
98,0
78,451,652,4
42,1
51,4
57,860,1
55,2
55.2
1 La moyenne est égale au quotient de la somme des écoulements mensuels
sur la pluviosité.
LUGI 0% — 10
148 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Diverses hypothèses ont été formulées pour chercher à
expliquer les écarts mensuels entre les régions boiséps et les
champs cultivés ou prairies. Il est certain qu'indépendam¬ment de son sous-sol, le sol arable forestier joue le rôle d'un
réservoir, accumulant au cours de la fonte des neiges une
grande partie des eaux, qu'il rend petit à petit pendant les
mois d'été. La perte par évaporation est également amoindrie
dans la forêt, en juin, juillet et août, et ce sont surtout les
terrains à végétation rare qui rendent le plus d'eau à l'at¬
mosphère.Pendant la phase de croissance intense de la végétation,
qui ne dure qu'un mois ou deux, il se peut que la forêt aban¬
donne momentanément davantage d'eau à l'air, mais en été,de toute façon, elle joue le rôle de condensateur. Ainsi au
cours des mois de juillet et août de l'été extraordinairement
chaud de l'année 1911, le sol épineux du Sperbelgrabenaurait condensé, d'après nos calculs, 43 m3 d'eau par 24 h.
et par km2, soit une tranche de 0,043 mm. de hauteur ou
0,00018 mm. à l'heure. Ce ne serait d'ailleurs là qu'unminimum, car vraisemblablement cet apport peut s'élever
jusqu'à 0,1 mm. en 24 h., pour autant que la méthode que
nous avons employée, analogue à celle pour la condensation
au moment de la fusion des neiges, est exacte.
Il est intéressant de constater aussi qu'au cours des épo¬
ques de sécheresse les débits des ruisseaux oscillent avec une
période sensiblement égale à un jour. Les maxima ont lieu
vers minuit et les minima vers midi. L'amplitude est dans
notre cas de (3,9 — 3,4) = 0,5 lit. /sec. /km2. Ces oscillations,dont les ruisseaux drainant le sol herbeux sont exempts, ne
peuvent être attribuables qu'aux fortes condensations noc¬
turnes, comme nous en avons fait part déjà au début de ces
pages. Il ne semble pas, en effet, être question ici des varia¬
tions de la température de l'air. Elles sont très amorties par
la végétation, à l'intérieur de la forêt. D'ailleurs la thermiquedes sols d'humus est mal connue. M. Luedecke [145], puisM. Howson [146], auteurs de diverses mesures faites avec des
LE RUISSELLEMENT 147
sables, dans le but de corriger la formule classique de Darcy,signalent que seuls des effets thermiques d'une durée rela¬
tivement longue sont susceptibles de produire des change¬ments dans l'état visqueux ou capillaire du milieu qui retient
les eaux.
Les minima et maxima du ruissellement au cours de toute
l'année furent pour 1 km2 :
En terrain boisé : 2,7 et 878,2 lit. /sec. /km2.En terrain peu boisé : 0 et 1901,4 lit./sec./km2.
Au cours de la période hivernale (1er décembre-15 avril), le
coefficient d'écoulement moyen pour toutes les précipitationsest de 70 % dans le territoire boisé et de 73,8 % dans l'autre.
Pendant le reste de l'année, il est donc de 54,6 et 61,2 %.Engler donne comme conclusion générale à son ouvrage,
que dans les Préalpes, pour un même climat et un même ter¬
rain, il s'écoule et il s'évapore des quantités d'eau identiquesdans la forêt et sur les terrains libres de toute végétationarborescente, ce qui se résume par le tableau très important :
Bilan général de l'écoulement au cours de toute Vannée.
Tab. 11
Emprunté à Engler.
Dans LA FORÊT : Dans les champs :
Ecoulement.... 60% des précipitations 60% des précipitations
Evaporation sur i
la végétation. 15% » » 10% » )>
Evaporation ou
sudation de la
végétation . . . 20% » » 6% »
Evaporation di¬
recte du sol.
Total.. .
5% »> 24% >»
100% des précipitations100% des précipitations
Ce résultat est le meilleur, à l'heure actuelle, pour toute la
région de l'Europe centrale. Et, à défaut d'autres travaux
148 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
expérimentaux, on peut se baser avec une grande sécurité
sur ces chiffres qu'Engler a déterminés avec une impartialitéet une conscience défiant toute critique.
CATALOGUE DE PHENOMENES HYDROLOGIQUES
Effet des précipitations sur l'écoulement" après une périodesèche humide de neige
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T^ô^'Ui Je-T'ai Oenologique
Fig. 16.
Pourtant, si Engler a négligé de nous parler de la conden¬
sation, à part quelques lignes consacrées à la neige, il faut
admettre qu'elle est comprise sous les chiffres de l'évapora-tion donnant le déficit du bilan général des eaux. Il eut peut-être été préférable que la condensation fut ajoutée directe¬
ment aux précipitations, quitte à ajouter la même valeur à
l'évaporation, puisqu'à défaut d'observations l'exactitude
INFILTRATION ET EAUX DANS LE SOL 149
de ces chiffres n'est pas assurée. L'image du cycle des eaux,
en définitive, serait plus fidèle.
Pour illustrer ce chapitre du ruissellement, nous avons
cherché un certain nombre de modèles de courbes limni-
graphiques qui caractérisent des phénomènes remarquables.Dans chacun des petits diagrammes de la figure 16, les
débits Q sont portés comme à l'ordinaire en ordonnées et les
temps en abscisses. Pour ne pas charger les diagrammes quiont le simple but de donner une idée qualitative des phéno¬mènes, nous n'y avons pas inscrit les valeurs des débits. Les
précipitations P sont reportées par la courbe intégrale que
dessinerait le pluviomètre à flotteur qui les enregistre dès
leur début. La fin des précipitations figure au dessin par un
trait pointillé et leur hauteur se lit sur l'axe des ordonnées.
Ces courbes P sont en partie construites à l'aide des mesures
journalières. Comme elles ne sont pas directement compa¬
rables à celles des Q — courbes chronologiques — nous
avons encore dessiné en traits interrompus, sur les mêmes
axes que les débits des cours d'eau, les courbes des débits de
la pluie A, répondant donc aussi à la densité instantanée de
la pluie, d'après la définition.
4. Sur quelques points concernant l'infiltration et les
eaux dans le sol.
Le problème de l'infiltration des précipitations et de l'ali¬
mentation des eaux souterraines d'un vaste bassin de récep¬tion est extrêmement complexe. Il est pour ainsi dire impos¬sible de chercher à calculer dans le détail le travail considé¬
rable qui se fait continuellement dans le sol et la part respec¬
tive des précipitations qui s'y emmagasinent. Une quantitéde travaux théoriques, expérimentaux et descriptifs, parmilesquels nous citerons les plus récents de MM. Porchet [147],tuedecke [145], Mezger [148], K. Fischer [149, 150], Gra-
velius [151], Hug [152], Koehne [153], Lummert [154],E. van den Broeck [155], René d'Andrémont [156], J. Dele-
150 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
court [157], Ludwig Frank [158], etc., renseignent abondam¬
ment sur ce problème extrêmement vaste.
Lorsqu'à défaut de longues séries d'observations limnimé-
triques on veut faire la synthèse hydrologique d'un bassin en
vue de créer une installation hydroélectrique, il n'est en
somme pas de la première importance de connaître exacte¬
ment le jeu de l'infiltration et des sources, car les eaux
pluviales, dans leur presque totalité, se retrouvent toujoursau bout d'un temps plus ou moins long. Par contre, cet
examen deviendra indispensable, si l'on veut entrer dans le
détail des effets de chaque précipitation, pour arriver à
établir, mois après mois, les capacités d'absorption et de
rétention des terrains. Une entreprise de ce genre nécessite
évidemment des bases géologiques plus ou moins approfon¬dies, et ce serait sortir du cadre de ce chapitre que d'énu-
mérer tous les types de dispositions que l'on rencontre dans
la nature. Nous ne rappelons donc ici que l'indispensable.Tous les bassins fluviaux sont composés d'un substratum
immeuble, la roche, recouverte ou non d'une couverture
meuble, les produits de la zone de métasomatose ou les pro¬
duits du transport glaciaire, fluvial ou éolien. La masse
compacte de la roche-mère est imperméable à partir d'une
certaine profondeur, par contre tous les matériaux meubles
qui la recouvrent, sauf quelques rares exceptions, sont très
perméables aux eaux météoriques.Dans l'une ou l'autre de ces deux grandes subdivisions, les
eaux voyagent et s'accumulent soit dans les pores, dans les
vides des masses superficielles, soit dans les interstices du
substratum profond, les diaclases, les failles, les cavités, etc.
Alors que la roche-mère est l'apanage des sources profon¬des, et fonctionne en quelque sorte comme la paroi d'un
réservoir étanche, le processus de la zone de métasomatose
est assimilable à une éponge dont l'imbibition est variable
suivant l'année. Toutefois, il faut se garder de généraliserces définitions théoriques. Si la texture de la roche-mère est
imperméable, sa structure, par contre, est très variable, et
INFILTRATION ET EAUX DANS LE SOL 151
c'est d'elle dont dépend le régime de la majeure partie des
sources, partant, des cours d'eau.
Donc indépendamment de la partie superficielle du ter¬
rain, on distinguera : 1° les roches imperméables qui sont les
roches cristallines, les gneiss, les roches ignées abyssales, les
schistes et toutes les roches dites poreuses et imperméablesqui appréhendent l'eau, la retiennent, mais ne la rendent pas :
les argiles mouillées, les marnes, certains tufs volcaniques et
roches d'épanchement comme la trachyte, etc. ; 2° les
roches perméables en grand, telles que les diverses classes de
calcaires, le gypse, etc., caractérisées par les grandes fissu¬
rations en diaclases, leptoclases, piézoclases, failles, cavernes
d'érosion, de dissolution, etc. ; 3° les roches perméables en
petit, soit les produits de désagrégation de la zone de méta-
somatose, et en général les grès, graviers, sables, transportésou déposés sous la forme d'alluvions ou de moraines. Enfin le
produit superficiel, résidu des précédents : la terre de culture
et les terrains jeunes en décomposition comme les tourbes,
qui n'atteignent que de faibles épaisseurs. Ce sont ces terrains
qui compliquent précisément le problème de l'infiltration,
par la variation de leur humidité interne et leur grand pou¬
voir de rétention.
Au point de vue du régime des sources, on peut dire d'une
manière générale, que dans les bassins composés de roches
imperméables, le régime est régulier, c'est-à-dire que les
variations des débits sont faibles et ne suivent pas direc¬
tement les précipitations, du moins pour celles qui n'ont pas
un caractère intense. L'infiltration au travers des interstices
y est lente, et le chemin que parcourent les eaux de surface
jusqu'aux nappes est souvent long.Tout au contraire le régime des sources des bassins com¬
posés de roches perméables en grand et des calcaires en parti¬culier, est très variable. Le cheminement souterrain est
facile et rapide, les débits varient dans des proportions aussi
importantes que ceux des rivières.
Le régime des sources émergeant des roches perméables en
152 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
petit se rapproche beaucoup de celui des roches imperméa¬bles. Lorsque les terrains glaciaires ou les alluvions reposent
sur des roches de cette nature, il se forme souvent de vastes
nappes phréatiques dont les sources ont un débit n'oscillant
que dans d'étroites limites, parfois inférieures à + 10 % du
débit moyen. Par contre, si les roches perméables en petit
reposent en de minces épaisseurs sur les calcaires, le régimedes sources est alors presque toujours l'apanage de la roche-
mère.
En vue de chercher un lien entre les caractères des régimesdes différentes classes de sources, au point de vue de leur
alimentation par les eaux pluviales, nous supposerons le cas
idéal d'un grand bassin préalpin composé d'un substratum
appartenant à la classe des roches imperméables, recouvert
partiellement des produits de la zone de métasomatose et
de roches perméables en petit, alluvions et moraines.
Le schéma qui va suivre n'est pas directement appli-
quable aux bassins dont le substratum est formé par des
roches perméables en grand, comme les calcaires, par
exemple.Nous entendons par capacité, la rétention ou le volume
d'eau accumulé à l'état dynamique, c'est-à-dire en mouve¬
ment. Quel que soit le degré de perméabilité d'un substratum,
on distinguera dans tous les bassins d'alimentation d'un
cours d'eau, sauf les restrictions mentionnées, les quatreclasses de capacités suivantes :
1° La capacité intarissable, qui a une périodicité annuelle
et ne suit pas les fluctuations des précipitations, mais varie
en fonction périodique du module pluviométrique. (Classedes sources profondes à nappes libres ou captives dans la
roche-mère, sources d'affleurement et de thalweg.)2° La capacité tarissable, qui est apériodique et suit dans
d'assez larges limites la variation mensuelle des précipita¬tions. (Classe des eaux filoniennes, des sources superficielles,caractérisées aussi par les fortes oscillations des niveaux
piézométriques et des résurgences : sources des vallées
INFILTRATION ET EAUX DANS LE SOL 153
épigénétiques ; rôle prédominant de la rétention des morai¬
nes et des alluvions, et en général du matériau quaternaireet moderne : cônes de déjection et cônes d'éboulis.)
3° La capacité infrasuperficielle, qui est fonction directe
des précipitations, du ruissellement et des facteurs météo¬
rologiques : température, état hygrométrique, etc. (Classedes petites sources de surface et des filets récoltant les eaux
du suintement et de la transpiration des terres, rôle prédo-
Fig 17.
minant des variations d'humidité du sol arable, des sables,
graviers, etc., en couche mince.)L'attention sera spécialement attirée sur ces terrains qui,
en recevant les premiers les eaux météoriques, vont faire
office de triage, en dirigeant une partie des eaux vers le
ruissellement immédiat, l'autre étant absorbée et conservée
en surface ou distribuée aux nappes profondes. Le pouvoirde rétention de ces terres dépasse de beaucoup celui des deux
classes précédentes.4° Enfin, la capacité de rétention et de condensation de la
végétation, qui est très faible, mais peut contribuer à alimen¬
ter les sources superficielles. (Effets de la rosée, gelée blan-
154 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
che ; protection de l'évaporation du sol par les feuilles
mortes, les aiguilles de sapin, les herbes desséchées, etc.)Le jeu d'ensemble de ces quatre classes peut être repré¬
senté schématiquement par des courbes de débit (fig- 17).Il est évident qu'entre chacun des étages du sol se produi¬
sent des échanges d'eau, dont il est hasardeux d'expliquerle fonctionnement à moins de coupes au travers des bassins.
Nous laissons ce soin au géologue.Passons maintenant aux calculs relatifs aux sources.
On sait qu'en une certaine mesure, il est possible de cal¬
culer, d'après la surface du bassin de réception, la quantitédes précipitations qui se rendent vers les nappes souterrai¬
nes. Lauterburg, entre autres, a donné pour les sources
alimentées par les eaux d'infiltration exclusivement, la
formule suivante : Q = y S.P, où 7, appelé vulgairement le
coefficient d'infiltration,1 varie de 0,11 à 0,35 dans les
terrains dont la pente est comprise entre 3^5 et 11°, P est la
hauteur annuelle des précipitations en mètres, S est la surface
du bassin d'alimentation en km2, et Q le débit moyen annuel
de la source en litres par seconde.
Pour des sources de 1 km2 de surface, dont le bassin d'ali¬
mentation est situé dans les Alpes suisses, Lauterburg donne
les débits minima suivants (Tableau 12 emprunté à l'ou¬
vrage de Keilhack : Grundwasser und Quellenkunde.) [127].Ces valeurs deviennent jusqu'à cinquante fois plus grandes
pour les sources superficielles, par temps très humide.
L'étiage d'une rivière pendant une longue période exemptede précipitations présente un grand intérêt pour le calcul du
volume global des principales sources de son bassin.
Un des précurseurs de l'hydrologie dynamique souterraine,M. Maillet [129, 130], qui a étudié beaucoup de bassins d'ali¬
mentation de sources et les liens de leurs débits avec les
précipitations, les classe ainsi : 1° Sources à débit constant,
dont le régime n'est connu qu'après plusieurs années de
1 Ce coefficient y ne doit pas être confondu avec celui de la formule
de Darcy, appelé également quelquefois coefficient d'infiltration.
Débitsminima
des
sources
en
lit./sec.po
u
r
1km2
de
bassin
a"alimentation.
T
a
b
.
12
Région
du
Bassind'alimentation
Perméabilité
et
pente
du
terrain
Imperméable
Forte
Moyenne
P
l
a
t
Perméabilitémoyenne
Forte
Moyenne
P
l
a
t
Perméabilité
en
grand
Forte
Moyenne
P
l
a
t
a
2,0
;*• 1,1
0,36
I.
Alpes
1.
Glaciers,névés,
mo-
i1,1
raines,terrescrevassées,
~
forêtsdenses
2.
Terrescultivéesou
peu
boisées
3.
Prairies
4.
Terrainsrocailleuxo
u
rochers
II.
Collines
et
Plateau
1.
Forêtsfermées.T
e
r
¬
rains
charriés
2.
Terrescultivées,
v
e
r
¬
g
e
r
s
peu
boisés
3.
Prairies
et
champs..
.
4.
Terrainsrocailleux
et
rochers
1,3 à
2,7
2,1
1,8
0,72
1,3 à
2,3
1,7
1,5
0,6
1,3 à
2,6
2,2
2,1
0,9
1,9
à
3,2
2,1
1,8
0,72
2,3 à
3,9
2,7
2,5
1,07
1,9 à
3,2
2,2
2,1
0,9
2,3 à
3,8
2,7
2,7
1,2
3,4 à
6,4
2,7
2,5
1,07
3,5 à
5,5
3,3
3,2
1,43
2,8 à
4,5
2,7
2,7
1,2
3,3 à
5,2
3,2
3,1
1,5
y, m p H » > S H H M > X a > 2 o t->
Ces
valeursdeviennent jusqu'àcinquantef
o
i
s
plus
grandespo
u
r
les
sources
superficielles,p
ar
tempst
r
è
s
humide.
en
ai
156 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
jaugeages, ce qui correspond à notre capacité intarissable ;
2° Sources à débit moyen variable, dont les amplitudes des
oscillations sont de l'ordre de 2 à 10, soit notre capacitétarissable ; 3° Sources à débit très variable, dont les varia¬
tions vont de 10 à 50, et suivent directement les précipi¬tations, soit notre capacité infrasuperficielle.
Pour les sources de la classe 1, dont les amplitudes peuventaussi ne pas suivre du tout le module pluviométrique, et
pour la majeure partie des sources de la classe 2, il est pos¬
sible, à l'aide de la formule de Maillet, de calculer approxi¬mativement le volume global et par là, à peu de chose près,la puissance globale de rétention des sources d'un grandbassin. Ce chiffre a une importance primordiale pour faire la
comptabilité des eaux météoriques, qui, en s'infiltrant,forment momentanément une réserve à porter à l'actif d'un
bilan annuel.
La théorie développée par Maillet, consiste à rechercher la
loi de variation du débit d'une source, en fonction du temps,
au cours d'une période où la source vit exclusivement de ses
réserves, c'est-à-dire où les précipitations n'ont plus d'action
directe sur le débit. Cette loi s'écrit 0 = / (Q, Q0, a), où Q0est le débit à un certain moment pris pour origine du temps 'i,
Q est le débit au temps fo, et a est une constante dépendantde la source.
Cette théorie est aussi applicable aux cours d'eau alimentés
par un ensemble de sources, à condition de ne considérer que
les débits à l'époque de l'étiage, si celle-ci coïncide avec une
longue période de sécheresse.
En supposant dans ce cas avec Maillet, qu'à un instant
quelconque le débit Q du cours d'eau est fonction du vo¬
lume Y accumulé dans les nappes alimentaires de ses sources,
c'est-à-dire que l'on ait V = / (Q), on peut démontrer à l'aide
de calculs expérimentaux, pour les détails desquels nous
nous en référons à Maillet [Réf. Dariès, 130], la relation
suivante :
o -n" *H
INFILTRATION, ET EAUX DANS LE SOL 157
où Qmm, est le débit minimum minimorum du cours d'eau
au temps 0, Q0 est le débit à un instant zéro, pris pour
origine, un peu après le début de la période de sécheresse, et
a un nombre, appelé coefficient de tarissement.
Qmm? Qo e* l> étant donnés par l'expérience, permettent de
calculer le nombre a.
Maillet a en outre démontré qu'entre V, Q et a existe la
relation : V = — Le temps 0, dans l'expression ci-dessus
s'exprimant généralement en nombre de jours, et le débit Qen secondes, on rend la formule homogène en exprimant a
aussi en secondes, c'est-à-dire que le volume est donné dans
notre cas par Y = — • 86400.
Le problème général de la circulation des eaux dans les
terrains perméables en petit, et plus particulièrement dans
les sables et graviers des moraines, peut être posé par la
formule bien connue de Darcy [161], reprise et généralisée parDupuit, Smrecker [162], Porchet [147] et d'autres auteurs.
Darcy a reconnu qu'en appelant q le débit par mètre carré
de surface horizontale d'une couche de matière filtrante —
de sable — d'épaisseur l, placée dans une éprouvette à fond
perméable, en mousseline, laissant librement couler l'eau
d'infiltration dont la couche est chargée, h étant la chargeà la base de l'éprouvette, mesurée au manomètre, on a :
où K est un coefficient de filtration variable seulement
suivant la nature du matériau traversé par l'eau, qui a donc
la grandeur d'une vitesse. Si v est la vitesse moyenne de
l'eau au travers de la couche, p la porosité, c'est-à-dire le
rapport des vides de la masse au volume total qui représentedonc ici la section horizontale d'écoulement par m2 de sur¬
face, on a :
h pq = pe, et par suite
j= J> v,
158 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
y est la perte de charge par mètre de parcours vertical au
travers de la couche. Cette perte de charge est donc propor¬
tionnelle à la vitesse v. Le coefficient de filtration K a fait
l'objet de nombreuses études de Thiem [163], de Daubrée,de Prinz, Porchet, etc. Il varie beaucoup et c'est ce qui rend
malheureusement inapte l'application de la formule de Darcyà de grandes étendues. (Alluvions : K = 0,96 à 29,10 ;
moraines : K = 1,45 à 5,15 lit. /sec. /m2, pour des pentes de
1 : 40 à 1 : 7000.)Voici quelques chiffres donnant la porosité des roches
(Tab. 13), c'est-à-dire le rapport en pour cent des vides de
la masse, au volume total. Ces chiffres sont obtenus expé-y[ M
rimentalement par la relation [/.„(%) = V. 1 100 (%) où M2î
est le poids de la roche saturée d'eau et Mt son poids à l'état
sec.
Porosité des roches en °J0.Tab. 13
D'après Keilhack [127 p. 115}.
Sable de rivière grossier 25-14
Gravier de sable régulier 37
Gravier de sable irrégulier 29
Sable très grossier avec
gravier 38
Limite pr tous les sables 40-28
Gravier moyen de 7 mm. 37
Gravier fin de 4 mm.... 36
Grains ou sable grossierde 2 mm 36
Terre glaise 34
31
44
37
28
50
23
50
46
48
50
Terre glaise grise grossièreArgile brune
Humus argileux noir. . .
Terre arable noire
Argile pure
Argile sous 3 Atm. pressionArgile lourde
Terrain argileux ou mar¬
neux
Humus peu argileux. . . .
Humus sablonneux et ar¬
gileux
Sable moyen de 1 mm.. 40
Sable fin de {/3 mm.... 42
Sable blanc tamisé. . .
24-23
Pour la teneur en eau des terres arables cultivées ou recou¬
vertes de végétation naturelle, les forestiers suisses ont éga¬lement fait des mesures dans diverses stations. Engler donne
INFILTRATION ET EAUX DANS LE SOL 159
le résumé des essais de ses deux vallons. Il trouve aussi que
la porosité varie suivant la saison, comme on le voit dans le
tableau 14, très suggestif.
Porosité en °/0.Tab. 14
D'après Engler [11].
Saison
Profondeur 0-10 cm. Profondeur 40-50 cm.
Terrain
champêtre
Terrain
boisé
Terrain
champêtreTerrain
boisé |
Automne 1915
Printemps 1916
Automne 1916
Printemps 1917
50,2
48,347,2
51,0
42,1
45,143,8
46,1
41,8
37,2
33,8
35,3
38,6''
36,2'
33,5
35,2
Le volume des pores est plus élevé au printemps qu'en au¬
tomne d'après Engler. Dès 50 cm. de profondeur, les condi¬
tions de porosité sont les mêmes, quelle que soit la végétation.D'après les graphiques d'Engler, voici la variation de
l'humidité du sol, exprimée également en % d'eau d'un vo¬
lume de terre unité (Tab. 15).Tab. 15
Profondeur
en cm.
Printemps Automne Été sec de 1911
Terrain
boisé
Terrain
champêtre
Terrain
boisé
Terrain
champêtre
Terrain
boisé
Terrain
champêtre
5
15
45
85
125
40-44
34-37
22-26
22-23
22-23
39-46
34-42
30-40
25-32
22-27
40-50
35-40
25-31
23-27
22-25
35-42
33-41
28-34
24-31
21-32
11
23
22
23
8 !13
'
18 !21 :
La mesure de l'infiltration de la pluie a fait l'objet de
nombreuses recherches de divers savants anglais et en parti¬culier, aussi, de l'allemand Ebermayer [159], qui a imaginé
pour cela un appareil simple, le lysimètre, composé d'un ré-
160 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
cipient de 2 m2 de surface et de 1,20 m. de profondeur, à la
base duquel est ajusté un tube d'écoulement qui sert à re¬
cueillir les eaux de pluie absorbées par les matériaux dont
il est rempli.Au tableau 16 figurent quelques valeurs de l'infiltration
de la pluie, auxquelles il ne faut pas attacher trop d'impor¬tance, car elles ne représentent que des mesures expérimen¬tales de laboratoire.
Tab. 16
Nature
DU SOL
Infiltration en % de la hauteur de la pllie Pluie
en mm.Printemps Été Automne Hiver Année
Tourbe....
Terre arable
de jardin.
64,0
6,9
11,0
4,6
49,0
0,6
99,0
4,7
53,0
3,1
865
958
Des mesures analogues ont été faites dans diverses sta¬
tions d'essais forestiers. Il convient de citer ici la belle série
publiée par M. Badoux, pour l'Adlisberg, à Zurich (1899-1903) [160] (Tah. 17).
Tab. 17
Emprunté à M. Badoux.
Température
Eau d'imiltration
tn % des précipitationsPluie
en mm.
HumusTerre arqileusemelee de cailloux
Sables de
molasse
I Avril.. .
Mai
7°7
11?8J6°0
18?417°2
13?9
49-59
35
23-33
23-33
24-33
18-43
53-77
40-58
29-36
33-43
31-38
47-50
80-86
59-61
31-50
30-50
26-50
43-57
103
85
113
135'
135
98
Juin.
Juillet
Août. .
Septembre
Engler, pour ses ravins du Sperbelgraben et du Rappen-graben, conclut que l'infiltration est environ cinquante fois
plus rapide dans le sol forestier que dans le sol herbeux de
la rase campagne.
INFILTRATION ET EAUX DANS LE SOL 161
Vitesse des eaux des nappes souterraines.
Diverses méthodes permettent d'estimer avec une ap¬
proximation assez grande les vitesses de l'eau dans le sol.
Citons pour mémoire la méthode allemande de la vague
(Grundwasserwelle), les divers procédés de salaison et de
coloration, la déperdition de courants électriques dans le
sol, etc.
Dans les plaines et déjà sur le Plateau suisse, comme l'ont
montré les recherches de Hug, les eaux d'infiltration et les
eaux dites souterraines (Grundwasser des Allemands), attei¬
gnent des valeurs importantes, qui peuvent dans une cer¬
taine mesure fausser l'estimation du débit des grands fleuves.
En Allemagne, on a trouvé les vitesses suivantes du flux
souterrain : Gotherburg 0,3, Mannheim 1,2 à 1,6, Kiel 4,7,
Strasbourg près du Rhin 3,0 à 7,0 m. par jour. [128, p. 143].Le temps que mettent les eaux météoriques fraîchement
infiltrées pour arriver aux sources profondes est aussi très
variable. Il dépend de la roche-mère. Diénert, pour ses expé¬riences classiques de coloration, relate dans son Hydrologieagricole [165] qu'aux sources de l'Avre, il faut en moyenne
78 h. pour que les eaux de surface atteignent le niveau des
nappes imperméables.Pour les eaux ordinaires d'infiltration (irrigation), dans des
sols à texture fine et serrée, des vitesses de 3 à 5 m. par jourdoivent être considérées comme élevées.
Dans les terrains calcaires, où il n'y a pas précisémentlieu de parler d'infiltration, les vitesses peuvent être considé¬
rables, et vont jusqu'à 4000 et même 6000 m. par jour,
d'après Le Couppey de la Forest [166, 167].Lors de la perforation des grands tunnels suisses du Saint-
Gothard et du Simplon, on a fait une quantité de mesures sur
les eaux souterraines, sans cependant arriver à définir la
vitesse d'infiltration depuis la montagne, à cause de la com¬
plexité de la tectonique. Mais on a remarqué combien les
LUGEON — Il
162 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
travaux d'art, en particulier les drainages, les tranchées, les
puits, etc., se prêtent à des expériences fructueuses sur
l'infiltration.
Eaux capillaires.
A côté de la circulation générale des eaux dans le sol, il
s'y produit une circulation très ralentie et d'une importancemoindre qu'on a nommée la circulation capillaire. Elle se
fait dans toutes les directions et n'obéit pas à la pesanteur.C'est par elle que l'eau arrive jusqu'aux racines de la végé¬tation. La vitesse des molécules liquides dans les terres
d'humus n'atteint guère plus de 0,006 mm./sec, et dans les
sables 0,0058 à 0,1116 mm. /sec, d'après Spôttle [164].Ramann, dans son Traité des Sols, distingue encore une autre
espèce d'eau sous le nom de Haftwasser, et dont le rôle est
complexe.
Ce bref aperçu qui demanderait, pour être complet, l'ana¬
lyse d'un grand nombre de travaux particuliers dans les¬
quels nous ne pouvons pas entrer, pour respecter le cadre de
ce travail, suffit pour conclure : actuellement le problèmegénéral de l'infiltration et du mouvement des eaux dans le
sol est complexe et local ; il n'existe pas de lois d'ensemble,il n'y a que des moyens de calcul.
Chaque bassin a ses coefficients spécifiques qu'il faudra
chercher à calculer au plus près possible, avec l'aide des
courbes limnigraphiques des débits, si l'on veut en établir
le bilan hydraulique au complet.Le meilleur schéma de calcul qui se prête à ces recherches,
pour des bassins préalpins et alpins, consiste à départager les
surfaces. Toutes sortes de possibilités se présentent dans la
nature pour que les eaux du ruissellement et de l'infiltration
ne parviennent pas au limnigraphe du niveau de base. En
LE PROBLÈME DE LA CONDENSATION 163
premier lieu, il faut donc être renseigné sur la tectonique des
régions envisagées, et s'assurer que le bassin ne fuit pas dans
son voisin, ou réciproquement. Puis, le sous-sol connu, on
cherchera à tracer sur la carte topographique les limites des
bassins d'alimentation des principales sources profondes.
Après quoi on passera au partage des terrains de surface,
alluvions, moraines, terres arables, etc., et à la répartitionde la végétation. On prêtera son attention aux zones de
faible déclivité qui peuvent être des plages mortes ou inacti¬
ves, sortes de bassins fermés, sans attache avec le collecteur
[168]. Les eaux météoriques qui y tombent sont entièrement
consommées par la végétation et l'évaporation. De nom¬
breux profils et des coupes du terrain seront d'ailleurs les
compléments indispensables, pour les tracés des pentes
moyennes.
Les coefficients de perméabilité, porosité, etc., reportéssur les zones, permettront le calcul des diverses capacités, de
rétention et des vitesses de ruissellement, d'absorption et
d'éjection.Cette sorte de canevas servira de base pour la construction
du mécanisme hydrologique.
§ II. Condensation et évaporation.
1. Le problème de la condensation.
Nous ne reviendrons pas sur les diverses manifestations de
la condensation effleurées à diverses reprises, soit au sujet des
glaciers, soit pour la fonte des neiges.Le problème, dans son ensemble, n'est aujourd'hui encore
que posé.La théorie dite de \ olger [169] qui a eu sa grande vogue
il y a un demi-siècle, a été mise à contribution par bien des
hydrologues. Cet auteur admettait que la condensation de la
164 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
vapeur d'eau contenue dans les interstices du sol, était seule
susceptible d'alimenter les nappes souterraines. On sait que
ce n'est pas le cas, et il est permis de douter, d'ailleurs, qu'audelà d'une profondeur de quelques dizaines de centimètres,les conditions des terres soient encore requises, pour que
cette transformation d'état puisse avoir lieu.
Le savant anglais Latham [170] est venu jeter quelque lu¬
mière sur la valeur réelle des condensations sur des surfaces
liquides. Les moyennes des trente années d'observations con¬
tinues faites à Croydon sont résumées dans le tableau 18.
Les écarts extrêmes trouvés par Latham sont de 32,9 mm.
dans une année très humide, et 2,41 mm. dans une année
très sèche. La moyenne générale est de 7,50 mm. par an.
Répartition mensuelle de la condensation en millimètres d'eau.
Tab. 18
mm. mm. mm.
Janvier. 1,54 Mai 0,03 Septembre 0,95
Février.. 1,17 Juin
. . . 0,07 Octobre. . 0,96
Mars 0,46 Juillet. 0,001 N ivembre 1,66
Avril.... 0,10 Août..
. 0,05 Décembre 2,41
Ce tableau nous renseigne sur la variation du phénomène.Et c'est déjà un point important, car il permettrait, d'aprèsles quelques chiffres épars que l'on possède pour la Suisse,d'établir par extrapolation les valeurs mensuelles manquan¬
tes, si la question de la différence de climat entre Croydon et
la région des Alpes n'intervenait pas.
Mais ces chiffres, par contre, ne sauraient en aucune façonnous renseigner sur la condensation dans le sol.
Lorsqu'on cherche, d'après les formules de la diffusion des
gaz de Stefan [10, 197], à calculer la variation de la tension de
vapeur nécessaire pour produire une condensation dans un
milieu capillaire analogue à un sol poreux, par exemple,on trouve qu'avec moins de 1 /10 de mm. de différence de
LE PROBLÈME DE LA CONDENSATION 165
pression et une différence de température également de
l'ordre du 1 /10 de degré, la transformation vapeur-eau peut
déjà se produire.Les couches supérieures du sol, qui sont en continuel état
d'instabilité capillaire, jouissent de propriétés hygroscopi-ques. Si la température du sol est inférieure à celle de l'air,sans que nécessairement le point de rosée soit atteint, il
peut quand même se produire une absorption d'humidité
atmosphérique. Et pour peu que des bouffées d'air agité fas¬
sent varier la pression dans les pores, la condensation se
produira. Mais ce processus n'aura lieu que dans les couches
de l'ordre de quelques centimètres d'épaisseur, et son résultat
restera médiocre.
M. Meyerbauer [171] a démontré par des expériences de
laboratoire quelle valeur pouvait atteindre la condensation
dans des échantillons de terre de quelques décimètres cubes.
M. Reichle [172] relate l'importance de cette forme de
l'alimentation des sources captées pour la consommation.
Enfin, dernièrement, M. Henri Hitier a signalé l'utilisa¬
tion de la condensation de la vapeur d'eau dans les régionssèches et désertiques.
Voici textuellement ce qu'il nous dit dans son article inti¬
tulé : « Condensateurs de vapeurs atmosphériques dans l'An¬
tiquité ». Réf. [173].
Il existe en Crimée une ancienne ville du nom de Théodosia,
aujourd'hui privée d'eau ; dans les travaux exécutés pour remédier
à cet état, on découvrit tout un réseau de tuyaux de grès de 5 à 7 cm.
de diamètre, qui alimentaient jadis les 114 fontaines, aujourd'huitaries et délaissées, de la ville de Théodosia.
D'où pourait venir l'eau de ce pays de sécheresse aussi rigou¬reuse ?
En continuant ses recherches, M. Zibold, ingénieur chargé des
travaux constata que les tuyaux prenaient l'eau des crêtes de la
chaîne des montagnes environnantes à une hauteur de 300 à 320 m.
du niveau de la mer ; mais dans aucun de ces endroits il ne trouva de
traces de sources.
Par contre, il y trouva des monceaux formant des cônes formi-
166 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
dables de pierres calcaires concassées, difformes, à peu près de
5 à 10 cm. d'épaisseur, dont l'ensemble de l'entassement mesurait
environ 30 m. de hauteur. Il trouva ainsi sur une distance d'environ
3 km. en ces hauteurs, treize de ces appareils gigantesques qui, il y
a plus de 2000 ans, alimentèrent d'eau les fontaines de Théodosia.
Comment pouvait-on expliquer le fonctionnement de ces appa¬
reils ?
Dans son rapport fait au Ministère de l'Agriculture, M. Zibold
suppose que les vapeurs atmosphériques, en pénétrant entre les in¬
terstices des pierres dans les profondeurs fraîches de ces appareils,se refroidissaient et se transformaient en eau, qui s'écoulait vers les
fontaines de la ville par des tuyaux de grès.M. de Kvorikine se demande si dans les colonies françaises
africaines, soumises à un climat analogue à celui de la Crimée, on
n'aurait pas trouvé de condensateurs semblables.
M. Hitier donne communication d'une lettre de M. Hégly, ingé¬nieur en chef des Ponts et Chaussées, à Metz, qui relate les observa¬
tions faites en Afrique du Nord et venant à l'appui de celles observées
dans le Sud de la Russie à propos des condensations atmosphériques.Ayant été chargé, en Tunisie, du Service de l'hydraulique pen¬
dant les années 1908 à 1912, j'ai eu l'occasion d'observer des conden¬
sations de ce genre dans les dunes sableuses qui bordent la Méditerra¬
née dans le voisinage de Bizerte.
Leur formation ne semble pouvoir s'expliquer que par la con¬
densation des eaux atmosphériques dans le sable des dunes.
J'ai eu l'occasion de faire l'étude de l'adduction de sources
semblables pour l'alimentation de la ville de Tripoli de Barbarie.
Ces sources, nommée Aïn-Zarah sont situées à environ 20 km. de Tri¬
poli. Je ne sais si les ingénieurs italiens, depuis que la Tripolitaineest une colonie italienne, ont réalisé ce projet, mais, à mon avis, ces
sources ont la même origine que celles qui servent à l'alimentation
de Bizerte.
Je citerai encore l'existence d'eaux douces sur une langue de
terre sableuse qui borne une langue voisine de la frontière tuniso-
tripolitaine.L'existence de cette nappe d'eau douce à un niveau un peu supé¬
rieur à celui de la mer ne peut encore s'expliquer que par les conden¬
sations qui se forment dans les sables bordant la lagune.
M. P. Willemin [Reboisement et Hydroélectricité, l'Onde,
Toulouse, 1922), Ingénieur en chef des Services des forces
hydrauliques du SW, signale d'après Pérez une telle abon-
LE PROBLEME DE LA CONDENSATION 167
dance des condensations occultes aux îles Canaries, que le
feuillage du Garvë recueille assez d'eau pour abreuver les
habitations de l'île de Fer privée de sources.
« En Californie, où il ne pleut pas du commencement
de juin à fin septembre, les arbres ruissellent d'humidité
et les prairies restent vertes dans leur voisinage ».
A l'Observatoire de Bordeaux-Floirac, la rosée mesurée
au moyen d'un récepteur cylindrique de 30 cm. de hauteur
et revêtu d'un lainage équivaut à la tranche pluviale.'D'après des mesures faites dans les Pyrénées, par les ingé¬
nieurs des Grandes Forces hydrauliques du SW, les écoule¬
ments des bassins boisés seraient le double des bassins peu
boisés, et, au dire de M. Willemin, ce fait n'est imputablequ'aux condensations occultes dans les forêts. Mais ces
observations sont en contradiction avec les mesures d'Engler,en Suisse. Il est vrai que la différence de climat entre les
Pyrénées et la Suisse peut suffire pour donner raison aux
deux auteurs.
De toute façon, conclut M. Descombe, président de l'Asso¬
ciation des forêts, « les massifs boisés soutirent à l'atmosphèreune quantité de rosée sensiblement égale à l'eau des pluieset une quantité de brouillard cinq fois plus considérable.
L'apport des condensations occultes est supérieur à celui
des pluies dans les bassins dont le taux de boisement atteint
ou dépasse 25 % ». Nous ne partageons pas les idées de cet
auteur, dont l'optimisme semble dépasser le bon sens, lors¬
qu'il nous annonce que « l'apport des brouillards dans les
bois de montagne équivaut généralement à plusieurs fois
celui des pluies et peut, dans certains cas, atteindre la valeur
de 15 tranches pluviales ».
Comme conclusion de son analyse, M. Willemin pense que
le reboisement, l'embroussaillement et «l'enherbement » aug¬
mentent les débits des sources, partant, améliorent jusqu'à le
doubler, le rendement des usines hydro-électriques.
1 C'est-à-dire à la hauteur annuelle des précipitations.
168 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Si sous certaines latitudes la végétation favorise les con¬
densations, dans d'autres, par contre, et c'est le cas de la
Suisse, elle n'a guère d'action directe sur les écoulements
moyens annuels.
Il faut faire la juste part des choses : plus il se condense
d'eau, plus il s'en évapore, généralement. Le bilan des eaux
de mêmes espèces végétales étant à peu près invariable, entre
la Suisse et les Pyrénées, on risque, dans cette dernière ré¬
gion, en forçant la condensation pour chercher à accroître
le ruissellement, d'augmenter la perte par évaporation phy¬
siologique des eaux pluviales. Car il serait avant tout néces¬
saire de savoir si la végétation est vraiment apte à livrer
de l'eau au sol au cours de toute l'année, ou si elle ne va pas
plutôt consommer entièrement sa propre condensation plusune partie de la pluie, dont elle retient d'ailleurs partielle¬ment la chute.
Si l'habillage des versants desséchés contribue à régulariserles écoulements, à « décaler les crues partielles de divers bas¬
sins de façon à éviter leur superposition au point critique »,
nous ne pensons pas , qu'en matière d'hydrologie, ces amé¬
liorations agronomiques jouent le grand rôle qu'on veut leur
attribuer.
L'actif annuel du bilan général des eaux n'est pas accru en
Suisse, par le reboisement. Il ne saurait l'être beaucoup en
France.
Le témoignage le plus fidèle de la condensation sur le sol
est la rosée. Malheureusement à part quelques rares observa¬
tions faites à Montcherand (Vaud), on ne connaît pas de
séries régulières de notations de ce phénomène et il n'est pas
possible d'évaluer par des chiffres la valeur de cet apport
météorique dans toutes les régions de la Suisse [174].La rosée, d'ailleurs, est difficile à observer sans appareil.
Elle peut être très intense lorsque la radiation nocturne est
forte, comme aussi très faible suivant le pouvoir émissif du
sol et la couleur de la végétation. Le rayonnement changeavec chaque végétal.
LE PROBLÈME DE LA CONDENSATION 169
La météorologie agricole qui s'occupe de ces questions est,
de plus, complètement ignorée en Suisse. Seuls quelquestravaux anciens de Forel et de Dufour donnent des rensei¬
gnements.
M. Besson, directeur de l'Observatoire de Montsouris, à
Paris [175], communique, dans un article important sur la
pluviosité, que les condensations dues aux brouillards, givre,rosée et gelée blanche, n'atteignent en vingt-cinq ans que
les valeurs suivantes, en mm. :
J. F. M. A. M. .T. J. A. S. 0. N. D. s»fraefurza années.
4,7 2,5 0,7 0,3 0,2 0,4 0,0 0,9 2,6 7,2 7,5 4,3 3i,5mm.
La valeur moyenne annuelle est de 1,3 mm., soit environ le
2/1000 de la hauteur de la pluie. Mais M. Besson a hâte
d'ajouter qu'il faut être prudent en examinant ces chiffres.
Car ils dépendent de la position et du type de pluviomètreutilisé et n'ont donc pas le même caractère général. D'ailleurs
des données instrumentales ne sauraient, en aucune façon,
représenter la condensation sur le sol lui-même. Nous avons
pu discuter de la chose avec M. Dutheil, sous-chef du service,
qui nous a démontré la grande sensibilité du dispositif d'en¬
registrement, mais sans vouloir se prononcer sur la valeur
de la condensation en pleine nature.
Il serait désirable que l'on fasse à Montsouris, en parallèleavec le pluviomètre, des mesures comparatives sur le sol, par
la méthode de Hasselink et Hudig. Elles permettraient peut-être de rétablir, pour le cours de ces vingt-cinq années, la
variation et la valeur absolue de cet apport météorique.M. l'inspecteur forestier Moreillon estime, d'après des me¬
sures de l'évaporation sur lesquelles nous reviendrons au
chapitre suivant, que la valeur de la condensation atteint
2 mm. par an à l'altitude du Plateau suisse.
Revenons au sol. Grâce à Dufour, on possède une belle
série d'observations de la température du sol aux profon¬deurs de 0,25, 0,50 et 1 m., prises au Champ de l'Air, à
170 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Lausanne, 555 m. [176]. Elles vont nous permettre de faire
quelques calculs, pour trouver la valeur la plus probable de
la condensation interne.
Nous appliquerons, en principe, la méthode du point de
rosée, en écartant ou en corrigeant, grâce aux variations len¬
tes de la température à 0,50 m., les valeurs qui paraissentun peu suspectes au moment des changements brusques de
la température de l'air. Pour tenir compte de l'humidité et
de la porosité du sol, facteurs variables, la hauteur mensuelle
des pluies sera également envisagée.
Supposons un cylindre tubulaire de terre, de 25 cm. de
hauteur, dont la base ait, par exemple, 1 cm2. On sait, d'aprèsla théorie de la diffusion des gaz, que toutes les molécules
d'air et de vapeur d'eau se propagent avec une même vitesse
et une même direction dans ce milieu. L'intensité de la diffu-
„ t i.do
sion est proportionnelle au gradient de concentration — -y
au carré de la température absolue et inversement propor¬
tionnelle à la pression du milieu, dx représente ici la distance
verticale entre deux petites sections horizontales faites dans
le tube de terre et £ est la densité du gaz. Si, pour des raisons
de température, la tension de la vapeur d'eau se trouve, à
une certaine profondeur, être inférieure à la tension de la
vapeur d'eau atmosphérique, cette dernière va pénétrer au
travers des pores avec une certaine vitesse qui dépendrade la résistance du tube et du gradient. Il y aura alors inter¬
diffusion et l'apport d'eau sera sensiblement proportionnelà l'intensité du gradient. Dans le langage courant on dirait
qu'il se produit au-dessous d'une certaine distance h, de la
surface du sol, une zone de condensation dont l'épaisseurvarie suivant les conditions de tension entre la dite couche h
et la surface du sol à l'air libre.
En développant les calculs on s'aperçoit que cette zone
critique est mince et n'atteint guère plus de 5 cm. d'épaisseur.En outre, pour les sols arables tassés, les variations de
température sont faibles, et la vitesse de l'échange des mole-
LE PROBLEME DE LA CONDENSATION 171
cules de vapeur ne dépasse guère 50 cm. par jour dans la
saison froide et peut-être un peu plus dans la saison chaude.
Ce chiffre a d'ailleurs été calculé d'après des formules très
théoriques de la conduction thermique et du transport des
calories, en partant des chaleurs spécifiques respectives de la
terre et de l'air contenues dans les pores [177].D'autre part, les conditions de la température de l'air au
contact du sol viennent encore compliquer le problème. On
sait que la répartition des isothermes n'est jamais régulièreà cause de la radiation calorique reçue et rayonnée par le
sol. Ainsi, M. W. Môrikofer distingue quatre types de répar¬tition fondamentaux dans les variations de la températurede la couche d'air de 1 m. d'épaisseur sur le sol [178].
1° Insolation. Ëchauffement énergique du sol, qui cède
sa chaleur par conduction. Très près de la surface les couches
d'air sont parfois de 10° plus chaudes que dans les strates
supérieures. Condensation impossible. 2° Rayonnement. La
surface du sol est plus froide que l'air. En se rapprochant de
celle-ci, on rencontre des couches de plus en plus froides.
Il n'y a pas de convection et le refroidissement est limité
par la conductibilité de l'air. Condensation des rosées.
3° Isothermie. Équilibre entre le rayonnement reçu et
renvoyé. Condensation toujours possible. 4° La stratifica¬
tion thermique sur la neige qui n'intéresse pas le sol dé¬
couvert.
11 est difficile d'introduire la variabilité de tous ces fac¬
teurs dans une unique formule donnant la condensation de la
vapeur d'eau à l'intérieur du sol homogène. D'après la théorie
de la diffusion on peut admettre que, dans les conditions
énumérées ci-dessus, la condensation dans le sol est propor¬
tionnelle à la différence des tensions de la vapeur d'eau con¬
tenue dans les pores, pl5 et dans l'air au voisinage immédiat
de la surface, p2, c'est-à-dire à l'intensité de la diffusion quiest elle-même proportionnelle au gradient de la tension
hygrométrique le long d'une ligne verticlaie normale au sol.
Ce gradient peut aussi être exprimé, d'après la définition,
172 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
comme le quotient de la différence -~—\ où pt est la tension
hygrométrique de l'air des pores entourant le réservoir
du géothermomètre à la profondeur h, comptée depuis la
surface, et p2 est la tension hygrométrique de l'air à la sur¬
face même du sol. Toutefois, pour que la condensation puisseréellement se produire dans le sol, il faut que le point de rosée
soit atteint, c'est-à-dire que l'humidité relative de la vapeur
d'eau des pores soit 100 %. Si tel est le cas pour une pression
p{ au niveau h, le volume d'eau qui se condensera pendantun temps déterminé 6, sera égal au débit de la vapeur d'eau
qui traversera les couches du terrain pour arriver à l'état de
saturation dans la zone de condensation au niveau h et
s'y déposer, multiplié par ce temps 9. Or, ce débit est précisé¬ment proportionnel au gradient, à un facteur numérique
près, dépendant de la nature du sol et que nous écrirons k.
On aura donc comme valeur de la condensation Cv, en
volume, qui viendra théoriquement s'accumuler sur la cou¬
che étanche au niveau h, dans les conditions indiquées,
Cv = -^-j-—' k'H. Mais la couche h n'est évidemment pas
étanche ; le milieu est spongieux et l'eau de condensation,
comme nous l'avons vu plus haut, se dispersera dans une
couche d'une certaine épaisseur autour de h.
Ici le calcul se complique, car on n'a aucune donnée expé¬rimentale qui permette de rendre homogène la formule em¬
pirique ci-dessus. Pour simplifier les hypothèses, nous l'écri¬
rons alors :
c = ^^k"={pi-Pi)k, où*=/(^,e,s)C sera l'équivalent en mm. de la hauteur de la tranche d'eau
condensée pendant un mois. p2 et pi seront pris comme va¬
leurs moyennes mensuelles. A- sera déterminé à l'aide d'une
fonction contenant à la fois : 1° une constante numériquedépendant seulement de la nature du sol, réglant l'échangedes molécules de vapeur avec l'air, soit k" ; 2° le nombre
LE PROBLEME DE LA CONDENSATION 173
moyen de jours 8y pendant lesquels les conditions physiquesdu sol sont requises pour que la condensation puisse se pro¬
duire dans le voisinage de la couche située à la profondeur A,dont on connaît la température ; 3° un chiffre £ servant à
rendre la formule homogène dans le système d'unités choisi.
Voici comment seront déterminées les valeurs de p2 et
de pt. Pour extrapoler, à la surface du sol naturel, les données
de la température de l'air mesurées sous abri à 1,50 m., nous
avons utilisé les diverses hypothèses sur la thermique de la
couche d'air reposant sur le sol et sommes arrivé à la for¬
mule empirique suivante, qui semble donner les résultats
moyens les plus rapprochés de la vérité :
T T
rpxmax
xmoy \ ri-i
9 ~i moy 5
où T serait la température moyenne mensuelle au niveau
du sol, si Tmax est la moyenne mensuelle des maxima jour¬naliers de température et Tmoy, la moyenne mensuelle de
la température, mesurées sous l'abri. La tension absolue
maxima de la vapeur d'eau à cette température T, sera lue
dans les tables psychrométriques [179] et la tension réelle
sera obtenue en multipliant ce chiffre par l'humidité rela¬
tive e%, moyenne mensuelle, lue à l'hygromètre sous l'abri.
La tension maximum de la vapeur d'eau correspondantà la température des vides du sol, se lira de la même manière
dans les tables ; mais pour tenir compte des variations sai¬
sonnières de l'humidité intrinsèque au sol, nous supposerons
que l'humidité relative dans ses vides est en excès ou en
défaut sur celle de l'air, dans les limites de 0 à 10 %, ce qui
d'après diverses mesures des forestiers sur des échantillons
prélevés à 25 cm. de profondeur, est justifiable. Cette humi¬
dité intrinsèque varie d'ailleurs avec la pluviosité, dont il
est difficile de tenir compte autrement que par des valeurs
moyennes.
En supposant qu'indépendamment des échanges conti¬
nuels de vapeur entre l'intérieur du sol et l'air la condensa-
174 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
tion puisse s'opérer au moins dix jours par mois avec une
vitesse de l'air pénétrant de 30 cm., il se déposera donc pour
ces dix jours, dans la couche de condensation, une quantitéd'eau proportionnelle à p2
—
p^, et à la teneur en eau du vo¬
lume d'air qui a circulé, soit 3 m3 pour 1 m2 de surface du
sol. Or, la pression de la vapeur d'eau en mm. équivaut à
son poids en grammes d'eau, pour ce volume. La quantitéde vapeur qui se condensera sera alors simplement égaleau nombre de grammes d'eau que déposera chaque, mètre
cube d'air traversant la couche de condensation. Le coeffi¬
cient k vaudra 30, dans cette hypothèse, pour que la valeur
de C soit donnée en mm. de hauteur de la tranche d'eau con¬
densée. Mais nous avons hâte d'ajouter que ce raisonne¬
ment, très simplifié, ne tient pas compte de phénomènesauxiliaires probablement compliqués, que l'expérience seule
pourra déceler. A notre avis, le coefficient k doit varier pour
les terres arables entre 10 et 30, suivant le nombre de joursde pluie, par mois.
Nous arrivons donc pour déterminer la condensation men¬
suelle dans le sol homogène de terre arable, à la formule
suivante, qui est tout à fait empirique :'
C = [e% de (Tj^ZZll^i + Tmo^ _ [eo/o ± 0 à 10%) de T,]ftoù C est la valeur de la condensation, soit la hauteur men¬
suelle de la tranche d'eau condensée, en mm., e % est la
fraction moyenne mensuelle de la saturation de l'air, soit
l'humididité relative moyenne mensuelle en %, Tmax est
la température moyenne mensuelle des maxima journaliers,Tmoy est la température moyenne mensuelle, Ts est la tem-
1 En langage mathématique on écrirait donc cette formule :
/ m / e• e±x ,\
c = (ps_pi)fc=
^_Pi___Pljfcoù e est l'humidité relative de l'air (0 à 100), x une quantité d'humiditévariable suivant la saison, p'2 et p[ les tensions maxima de la vapeur d'eau
correspondant aux températures de l'air et du sol.
LE PROBLÈME DE LA CONDENSATION 175
pérature moyenne mensuelle à l'intérieur du sol, à 25 cm. de
profondeur, k est une constante numérique, probablement
comprise entre 10 et 30. Le terme e % de (. . . .) équivaut à
la tension réelle de la vapeur d'eau correspondant à la tem¬
pérature qu'exprime la parenthèse, c'est-à-dire la tension
de saturation de cette température, lue dans les tables,
multipliée par e %. Le terme (e % ± 10 %) exprime la va¬
riation saisonnière de l'humidité relative de l'air des pores du
sol, soit en hiver approximativement (e % — 0 %), en été
{e % + 10 %), en automne (e % — 5 %).Voici pour les trois années d'observations précitées de
Lausanne, le résumé des calculs de la condensation à l'inté¬
rieur du sol, à l'aide de la formule proposée. Les notations
des colonnes correspondent aux symboles de la formule et
les titres tension air et tension sol, s'entendent pour la ten¬
sion de la vapeur d'eau déterminée à l'aide des procédés ci-
dessus. Dans les deux colonnes de gauche des tableaux nous
avons inscrit les valeurs de la condensation en mm., calculées
en faisant k = 10 et 30, dans la formule.
ANNÉE 190) Tab. 18 a
.
Condensation 1
Mois J-moy i-max Ts e%
Tension
air
Tension
solen mm. p. mois
fc=30 | ft = 10 i
J. —0,47 2,38 0,83 85,0 4,17 4,14 0,9 0,3F. —2,84 2,03 0,60 70,2 3,12 — 0,0 0,0M. 2,73 7,13 1,87 77,4 4,33 4,20 2,2 0,7
'
A. 9,28 14,20 8,30 80,3 8,30 7,38 30,0 10,0 i
M. 14,26 21,30 13,56 64,7 9,80 8,70 33,0 11,0 i
J. 17,63 24,42 17,08 70,9 13,60 10,90 81,0 27,0 !J. 19,45 26,19 19,70 69,1 17,90 13,80 123,0 41,0 ,
A. 17,20 23,40 17,56 77,0 13,80 10,40 102,0 34,0S. 14,34 20,53 16,06 90,3 13,42 10,90 99,0 33,00. 9,34 13,42 11,33 90,2 9,05 8,50 16,5 55,0N. 2,34 5,46 4,90 85,6 5,08 5,86 0,0 0,0 iD. 1,30 3,79 1,71 91,7 5,03 4,94 0,3 0,1
176 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
ANNÉE 1902
Tab. 18 b
_
.m •
Condensation
Mois l-moy i-max Ts «%Tension lension
en mm. p. mois
s 1/c = 30 k = 10
j. 1,26 4,37 1,28 84,6 4,73 4,54 5,7 1,9F. 0,69 4,74 1,17 82,6 4,58
'
4,25 9,9 3,3M. 4,92 9,78 3,62 81,6 6,28 4,74 46,3 15,4A. 11,04 16,88 10,23 74,2 8,88 , 7,43 43,5 14,5M. 9,15 14,38 10,46 70,2 7,95 7,08 26,0 8,7J. 15,69 21,50 16,43 71,2 11,33 j 9,75 47,5 15,8J. 19,31 25,70 19,17 70,3 L4,20 1 12,40 54,0 18,0A. 17,12 22,80 18,03 83,4 14,40 11,50 87,0 29,0S. 14,17 19,60 16,04 90,4 12,90 ! 10,80 63,0 21,0
0. 8,76 12,75 10,83 95,3 9,20 8,17 30,8 10,3N. 3,40 6,58 5,64 97,2 6,35 6,12 6,9 2,3D. 0,52 2,60 2,72 97,3 4,98 5,05 0,0 0,0
ANNÉE 1903
Tab. 18 c
Mois i-moy i-max Ts e%Tension Tension
solen mm. p. mois
A-= 30 A: = 10
J. 1,19 4,57 1,73 93,4 5,22 4,90 9,1 3,0F- 3,26 8,41 1,24 79,2 5,47 4,50 29,0 9,7M. 6,26 11,10 4,70 76,4 6,42 S,45 29,0 9,7A. 5,54 10,30 6,78 69,1 5,50 5,49 9,0 3,0M. 13,54 19,45 12,83 58,2 8,16 7,72 13,2 4,4J. 15,22 20,43 16,41 59,4 9,03 8,70 9,9 3,3J. 17,51 23,03 18,80 59,6 10,60 9,70 27,0 9,0A. 17,37 23,18 18,10 62,9 11,08 9,32 53,0 17,7S. 14,75 20,32 15,82 69,3 10,30 9,40 27,0 9,00. 10,37 14,80 11,97 77,6 8,47 8,30 5,2 1,7N. 4,80 7,58 6,65 81,9 5,80 0,/0 0,1 0,0D. 0,28 1,94 2,81 86,8 4,80 5,00 0,0 0,0
LE PROB1EME DF L\ CONDENSA I ION 177
Condensation mensuelle et annuelle en millimètres.
(La valeur de k utilisée dans la formule est indiquée devant chaque colonne.)
Tab. L9
Année J. F. i M. A. M. J. J. A. S. O. N. D.Total
k=30,k 10
1901 /
fr = 30(0,9 0,0 2,2
I
jSoî5'7 9'9!46'3
30,0 33,0 81,0' 123,0
1903 )
k = 30 9,129,0 29,0
43,526,047,5' 54,0
9,9 27,0
/c = 3oy5>2;13'6
Moyenne /, „. „ , , „
fc = 10 y1.7 4>5I 8-6 9-2 8-°
9,0113,2
25,8 27,5i24.2 46,2i 67,8
15,4l 22,6
102,0,99,0 16,5
I
7,0 63,0 30,8
5,2
63,0
53,0,27,0
80,6
26,9
17,5
21,0 5,8
0,0I
6,9
0,2
2,4
0,3
0,0
0,0
0,1
0,8(0,0
488'163i
421I140
212 70
374
125
Quelqu'approximative que soit la méthode que nous
venons de proposer, il n'en reste pas moins intéressant de
constater que les résultats de nos calculs sont en discor¬
dance complète avec les observations de Latham pour des
surfaces liquides. Au cours de l'année, la condensation dans
les sols arables semble croître régulièrement avec la tempé¬rature et la végétation qui agit comme écran protecteur
contre le réchauffement dû au rayonnement solaire. Elle
serait maximum vers le milieu de l'été et atteindrait parfoisle chiffre énorme de 100 mm. par mois dans notre climat.
Même si le facteur k n'égalait que 15, on aurait encore un
bénéfice de 50 mm. à ajouter à la précipitation, pour avoir
la part réelle des eaux météoriques qui atteignent le sol.
L'année 1903 a un taux plus faible que les deux autres.
Cela s'explique par la fraction de saturation qui n'a atteint,
pour les 365 jours, que la valeur moyenne de 72,8 %, alors
qu'en 1901 elle était de 79,3, et en 1902 de 83,7 %. La
moyenne des trois périodes se rapproche donc assez bien de
la moyenne basée sur un certain nombre d'années.
178 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Signalons ici quelques expériences extrêmement impor¬
tantes, faites dernièrement par MM. E. Hesselink et J. Hudig
[180], pour déterminer la condensation dans des sols de
nature diverses, nus ou plantés d'arbrisseaux.
Les appareils étaient composés de grandes caisses de bois
de 1,5 X 1,5 m. de surface-et 1 m. de profondeur, rempliesdu matériau à éprouver et enfoncés dans des fosses de quel¬
ques centimètres plus grandes épousant leur forme. Afin que
la température fût celle du milieu ambiant, on dammait du
sable fin dans les interstices entre les parois de bois et celles
de la fosse, puis on abandonnait la caisse à elle-même. Des
lectures de température étaient faites toutes les 24 h., à
0,20 m. de profondeur.Après quelques jours, on retirait et pesait la caisse dont
le poids initial était connu. L'excès ou le défaut de poidsreprésentait alors la condensation ou l'évaporation.
Les auteurs signalent qu'au cours des journées sèches du
8 au 11 mai 1922, les caisses ont augmenté en moyenne de
7 kilogrammes, ce qui correspond à la condensation d'une
tranche d'eau de 3,1 mm. ou près de 1 mm. par jour.L'ordre de grandeur de ce chiffre est le même que celui que
nous avons trouvé au moyen de notre formule pour le mois
de mai. Ces expériences semblent donc confirmer notre mode
de calcul.
Lorsqu'on fait le bilan de la consommation annuelle en
eau, absorbée par la végétation, on s'aperçoit que nos
chiffres concordent avec un assez grand degré d'exactitude
pour les besoins physiologiques.En effet, pour les blés qui réclament 2,8 à 4 litres d'eau
par jour et par m2, soit pendant les quatre mois de forte
croissance : 4 X 2,8 X 30 = 336 mm. au minimum, les préci¬pitations ne sauraient suffire, car à cette saison une grandepart s'en évapore directement sur la végétation elle-même,ou ne pénètre pas dans le sol, souvent desséché en surface.
Par exemple, si le 50 % des quelque 350 mm. de pluietombés dans ces quatre mois, soit 175 mm., sont absorbés
LE PROBLÈME DE LA CONDENSATION 179
par la terre et alimentent le végétal, les 161 autres milli¬
mètres nécessaires seront fournis par la condensation interne.
Le surplus restera dans le sol ou s'en ira peut-être vers les
sources. Bref, ce simple raisonnement permet d'attacher une
certaine confiance à la méthode de calcul précitée.Que faut-il maintenant penser de la condensation totale sur
les grands bassins d'alimentation des cours d'eau et sa varia¬
tion avec l'altitude ? La question est fort délicate à résoudre.
Si nos hypothèses sont partiellement vérifiées pour les
terres de cultures, elles sont bien loin d'être applicablesa priori à un ensemble de régions diversement revêtues par
des forêts et des vergers, des prairies, etc. A notre avis, on
ne peut pas, dans l'état actuel de nos connaissances, calculer
la condensation en grand, comme on le fait en petit.
Puisque dans la nature il s'évapore de toute façon davan¬
tage d'eau qu'il ne s'en condense, on encourra moins de
chances d'erreurs dans les calculs du coefficient d'écoule¬
ment, en englobant les deux phénomènes en un seul. L'éva¬
poration qui aura eu lieu réellement, ne sera ainsi que le
résultat de la soustraction : évaporation absolue moins
condensation.
Pour fixer les idées, prenons le cas du Sperbelgraben, où
l'évaporation atteint 635 mm., c'est-à-dire le 40 % des
1589 mm. de pluie qui tombent annuellement. Si l'on tient
compte de la condensation dans le sol herbeux qui, d'aprèsnos calculs, vaut 350 mm. au maximum, on voit que l'évapo¬ration absolue, c'est-à-dire la quantité d'eau qui est entiè¬
rement perdue pour l'écoulement, pour être retournée à
l'atmosphère et assimilée par la végétation, est de 635 -)-
350 = 985 mm., soit environ une tranche d'eau de 1 m.
Plus haut, nous avons relevé que de très faibles variations
de la tension de la vapeur d'eau entre le sol et l'air pouvaient
provoquer la condensation. On constate, en effet, que cette
dernière est plus énergique dans le sol lorsque l'air est agité
par les vents. Ce fait est surtout remarquable sur les ver¬
sants debouts, où les courants humides et chauds peuvent
180 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
pénétrer plus profondément dans les cavités et les fissures,
pour y déposer leurs eaux. Par contre, on trouve des humus
très serrés et peu hygroscopiques, où l'échange d'air avec
l'atmosphère libre est d'une lenteur extrême, de l'ordre
de quelques mois ou même d'années : preuves en sont
certains gaz occlus des terres en putréfaction et des tour¬
bières. Il est donc probable que dans les ravins très inclinés
du Sperbelgraben, les condensations sont encore plus
importantes.La conclusion qui s'impose au terme de ce bref aperçu est
simple : le problème de la condensation sur et dans le sol
n'est pas résolu. Jl est possible cependant de combler cette
lacune dans les calculs hydrologiques, en admettant que
toute l'eau condensée retourne à l'atmosphère par les divers
processus physiques et physiologiques, et ainsi ne contribue
pas ou peu au ruissellement.
2. Le problème de l'évaporation.
Dans le premier chapitre de cette monographie, nous avons
énuméré brièvement les diverses faces du problème de l'éva¬
poration. Examinons ici de plus près, d'après la littérature
moderne, les méthodes de mesure et les formules suscep¬
tibles de contribuer à la construction de la formule hydro¬
logique générale.On peut se placer à deux points de vue en abordant ce
problème, et il s'agit de les définir clairement. Ce sont :
1° Le point de vue physique et physiologique, c'est-à-dire
l'observation et la mesure directe des phénomènes d'évapo-ration.
2° Le point de vue hydrologique, c'est-à-dire le calcul
des rapports qui existent entre le ruissellement et l'évapo¬
ration, caractérisé par la détermination de la fonction
E = / (P), (E = évaporation, P = précipitations).Cette seconde partie, qui est en somme le centre de gravité
de toute l'hydrologie appliquée, intéresse surtout l'ingénieur.
LE PKOBLÈME DE l'É V \POR ATIO-N 181
1 A. Uêvaporation physique.
Les traités de physique enseignent que l'évaporation en
tant que phénomène physique et naturel, est le changementd'état de l'eau liquide qui par diffusion se répand sous forme
de vapeur d'eau dans l'atmosphère. Des mesures journa¬lières de l'évaporation de l'eau contenue dans des récipientsou de petits bassins ont été entreprises il y a plus d'un demi-
siècle dans plusieurs observatoires de grands pays. On
connaît donc avec une exactitude suffisante la variation
annuelle de ce phénomène.Divers physiciens ont tenté d'établir des formules permet¬
tant d'évaluer l'évaporation des surfaces liquides, qui est
directement proportionnelle au déficit hygrométrique de
l'air ambiant, à la température de la surface et de l'air.
L'effet du vent fait encore le sujet de discussions intéres¬
santes, et on n'est en général pas d'accord sur ce facteur.
Ainsi M. W. Koppen, dans une mise au point du problèmeen 1917, constate que plusieurs auteurs nient son action.
En particulier M. Weilemann a pu démontrer qu'à Vienne le
terme consacré au vent dans la formule générale est toujours
égal à zéro [181].M. Brazier, le directeur très autorisé de l'Observatoire du
Parc Saint-Maur, qui a eu l'amabilité de nous communiquerses idées dans une causerie, est un ferme partisan de l'action
du vent. M. Maurer, dans ses importants travaux sur les
lacs, partage aussi ce point de vue. M. Lûtschg conclut
d'expériences au lac de Hopschen (Col du Simplon) que le
vent enlève vraisemblablement une très faible tranche d'eau.
Mais au fond l'incertitude règne encore, et la science n'est
pas en état de donner une formule précise pouvant servir au
technicien pour le calcul exact de l'évaporation des grandsbassins [Réf. : 182 à 190].
Il faut donc se contenter des indications d'évaporomètres
182 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
et de mesures hydrologiques faites sur des lacs, pour se ren¬
dre compte de la valeur réelle de l'évaporation des surfaces
liquides. Nous possédons en Suisse quelques belles séries
d'observations de MM. Louis Dufour [185 à 187], Maurer
[9, 183], Lùtschg [9, 97], Moreillon [184], A. Bùhler [189],et Amberg [190]. (Références diverses : 191-194.)
Quoiqu'il soit assez délicat de comparer ensemble des
résultats trouvés dans des conditions très différentes, on en
tire néanmoins cette conclusion que l'évaporation diminue
avec l'altitude. M. Maurer donne une explication météoro¬
logique à ce phénomène pour les lacs de Zoug, à 417 m. et
d'Aegeri, à 727 m., dont la tranche annuelle évaporée atteint
respectivement 755 mm. et 740 mm. Il dit que dans la vallée
d'Aegeri il pleut non seulement davantage qu'à Zoug, mais
la durée de la pluie y est de 20 % plus longue et que, par
conséquent, la durée de l'évaporation en est diminuée
d'autant. En outre, les températures plus basses de l'eau et
de l'air y réalisent des conditions moins favorables.
A Montcherand (Vaud), à 585 m., avec un évaporomètre
système Wild, M. Moreillon [184] trouve 592 mm. en
moyenne pour la période de 1911-1921. Au Suchet, à 1220 m.,
l'évaporation ne serait que le tiers de ce chiffre, d'après des
mesures estivales. L'auteur conclut, en comparant ses chiffres
avec ceux de M. Maurer, que les résultats des évaporomètressont identiques, à peu de chose près, aux mesures directes à
la surface des grandes nappes d'eau.
A Lausanne, à 550 m., avec un siccimètre, Louis Dufour
trouva 669 mm. pour les années 1865-1868. Au Lago Pos-
chiavo, à 960 m., au versant S des Alpes, on a observé
205 mm. pour les mois de mai à septembre. A la Bernina,2230 m., pour la même durée, 110 mm.
Au cours des mois très chauds de juillet et août 1911,M. Maurer calcula que la perte d'eau du Greifensee (Alt.439 m.), pour une température superficielle de 26 5 à 247
allait de 5,3 à 3,7 mm. par jour, et pour le lac de Zurich (Alt.410 m.), pour 26J à 24°, 5,6 à 3,5 mm. Ce sont là des maxima.
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPOKATION 183
La valeur moyenne journalière au cours de l'année 1911-
1912 est pour le lac de Zoug : 2,12 mm.En haute montagne, M. Lùtschg [9] trouve les chiffres
suivants : Lac de Mattmark (2100 m.), en juin-juillet 1915,une moyenne de 4,03 mm. par jour (maximum 6,2 ; mini¬
mum 2,7) ; en septembre, 2,0 mm. En août 1916, 2,1 mm.Au Hopschensee (Col du Simplon, 2017 m., superficie13,200 m2) pour quatre périodes alternativement humides et
sèches, de juillet à octobre 1921 : 2,2 mm. par jour, ampli¬tude des oscillations 7,7 et 0,2 mm. Sur de petits lacs,communément appelés gouilles, l'évaporation atteint le
chiffre élevé de 8,7 mm. par jour et peut-être même davan¬
tage.Comme conclusion à son beau travail, M. Lùtschg nous
dit que l'évaporation des surfaces d'eau à cette altitude
atteint 250 mm. pour l'année chaude de 1921. Ce chiffre,d'ailleurs, ne saurait beaucoup varier. A 2100 m., les bassins
de cette importance ne sont guère libérés de leurs glaces que100 à 150 jours par an, et, si l'on compte une évaporationmoyenne estivale de 2 à 2,2 mm. par jour, comme il ressort
des moyennes que l'on peut dresser avec tous les chiffres de
M. Lùtschg, le résultat des calculs reste compris entre 200
et 300 mm. Pour une moyenne de plusieurs années, le chiffre
de 250 mm. est probablement trop élevé. D'ailleurs, il varie
certainement avec le volume total des bassins. En effet, à
altitude constante, plus un lac est petit, plus il s'en dégagede vapeur, c'est une conclusion que l'on tire de divers
travaux cités. Ainsi pour le nouveau bassin d'accumulation
du Grimsel, nous pensons que l'évaporation moyenne sera
de 280 mm. Le prof. Narutowicz [195] avait prévu dans son
projet 500 mm., répartis ainsi : mai, 40 mm., juin 80 mm.,
juillet 100 mm., août 100 mm., septembre 80 mm., octobre
60 mm., novembre 40 mm., ce qui est certainement trop,d'autant plus que la température de l'air au Grimsel est
passablement plus basse que dans les régions de Mattmark
et du Simplon.
184 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
D'après les chiffres de MM. Dufour, Maurer, Liïtschg et
Moreillon, nous avons tracé la courbe (fig. 18) qui repré¬
sente, pour la Suisse, la variation de l'évaporation de l'eau à
l'air libre en fonction de l'altitude ; et enfin (fig. 19), la
courbe de sa variation annuelle à l'altitude du Plateau suisse.
Hauteurde
la
tranchedeauévaporéeen
millimètres 700 \600
EVAPORATION ANNUELLE
DES LACS SUISSES
SUIVANT L'ALTITUDE500
°\
400
\°
300
200
100\
0
500 1000 1500 2000 2500
Altitude de la surface des lacs en mètres
Fig. 18.
A notre avis, l'approximation de ces deux courbes est
sullisante pour renseigner l'ingénieur qui aurait à tenir
compte de l'évaporation dans des projets de bassins d'accu¬
mulation. Nous verrons dans la seconde partie de cet
ouvrage comment il faut les appliquer aux calculs hydrolo¬
giques. Nous avons d'ailleurs rectifié la courbe d'altitude
autant que faire se peut, avec la nouvelle formule de l'indice
d'évaporation et les observations psychrométriques ou hy¬
grométriques des stations d'altitudes intermédiaires.
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 185
Voici la quantité annuelle d'eau évaporée à Montcherand
depuis 1911, en mm. :
Tab. 20
1911 1912 1913 .1914 1915 1916 1917
803 615 581 563 527 483 450
1918 1919 1920 1921 1922 1923 1924
540 619 556 771 578 547 575
Ce tableau montre que d'une année à l'autre l'évaporationpeut varier dans la proportion de 4,5 à 8,0, c'est-à-dire du
simple au double. Mais on constate toujours que ce sont les
Fig. 19.
mois d'été qui ont le plus grand poids dans les différences,ainsi ceux très chauds de 1911 et 1921.
Au point de vue des observations dans la région alpine,cette première partie du problème est épuisée.
Mais nous serions incomplet de ne pas signaler une étude
186 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
mathématique appelée à un grand retentissement, celle du
savant polonais Dezydery Skyenkiewicz [197], qui, en par¬
tant de la base ancienne de Stefan, est arrivé à une concep¬
tion nouvelle : Vindice d?évaporation yi.
Il est caractérisé par la formule :
273 +-1 760i = (P' — p) —^-
•
5,lia D p'
où, p'~p = déficit hygrométrique, en mm. de mercure.
p' = tension de la vapeur d'eau saturée, en mm.
de mercure.
p = tension de la vapeur d'eau observée, en mm.
de mercure.
B = pression barométrique, en mm. de mercure.
t = température en degrés centigrades.
L'équation de dimension de l'indice d'évaporation corres¬
pond à une longueur, mais la formule sert à définir la
grandeur à un instant quelconque du phénomène de l'éva-
poration, c'est-à-dire que l'indice peut être assimilé à une
vitesse ou intensité de l'évaporation de l'eau dans l'air libre.
Cette intensité pourrait donc théoriquement être mesurée à
l'aide d'un instrument. Le but poursuivi par Skyenkiewiczest précisément de définir un climat non plus avec des
moyennes simples de divers éléments, mais, par l'intro¬
duction de l'indice d'évaporation, à l'aide des maxima
d'intensité d'évaporation. C'est ce qui rend ses investi¬
gations très originales.L'auteur démontre par de nombreux diagrammes et des
tables de mesures évaporométriques directes à Madrid,Pawlowsk et au Parc Saint-Maur, que les maxima journaliersde l'indice d'évaporation correspondent jour par jour à la
hauteur d'eau évaporée. Les courbes obtenues en portant ces
valeurs en ordonnées sur l'axe des abscisses pris pour les
temps, sont pratiquement parallèles. Il y a corrélation
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 187
presque parfaite entre les variations de ces deux grandeurs.C'est là d'ailleurs une conséquence même des calculs de
M. Skyenkiewicz qui a démontré que la hauteur de la tran¬
che d'eau évaporée pendant un temps S est théoriquement
proportionnelle à y.S. Cependant, il ne donne pas les
coefficients nécessaires pour rendre la formule de l'indice
adaptable au calcul praticjue de la hauteur de la tranche
d'eau évaporée, sur la base des observations de p, p', B, t.
Nous avons été contraint de les chercher nous-même en
basant notre raisonnement sur les indices moyens.
On a d'une manière générale :
-6
VI" °
où r,„, est l'indice d'évaporation moyen pendant le temps0 à 0, et d'après ce qui a été dit ci-dessus, on peut poser :
Ud9
où Ee est la hauteur de la tranche d'eau évaporée pendantun temps 0 à 6 et k le coefficient de proportionnalité constant
pour toute valeur de v, à calculer.
Il a été montré maintes fois en statistique climatologique
que la moyenne absolue journalière d'un élément à variation
journalière sinusoïdale, comme par exemple la température,est sensiblement égale à la moitié de l'amplitude de ses oscil¬
lations. L'indice d'évaporation variant justement de la
même manière que la température, on peut admettre que sa
valeur moyenne journalière pour un grand nombre de jour¬
nées, est sensiblement égale à la moitié de la moyenne
arithmétique de ses amplitudes, ce qui revient à prendre la
moitié de ses maxima journaliers.
188 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
On peut donc poser avec une approximation pratiquementsuffisante :
r,d<i.\'
où rlmax est l'indice d'évaporation maximum correspondantaussi à l'instant du maximum de température. J est ici un
jour, mais ce pourrait être un grand nombre de jours, un
mois, une année, etc., comptés en jours pour r,max moyen.
EtI est la hauteur de la tranche d'eau évaporée pendant ce
temps-là.C'est sur la base de cette dernière relation et des valeurs
expérimentales mensuelles que donne Skyenkiewicz pour les
dix années d'observations des stations précitées (1895 à
1904) que nous avons calculé le coefficient k, dont la valeur
trouvée vaut 0,796 ou dans l'expression ci-dessus 0,398, en
simplifiant par le dénominateur 2.
La hauteur de la tranche d'eau évaporée E?9.2_Ql, ou éva-
poration physique, pendant un temps quelconque Ht à %,
étant donnée par l'expression générale :
on en déduit que l'évaporation physique pour une journéeest très approximativement :
1 273 + f 760
E?iour = 0,398 — • 2 (P' - P) -i^- •
n :24 0 I/o xi
—
p'
où Eï, est en mm., et les autres facteurs sont observés et
calculés pour toutes les heures, avec les unités ordinaires.
Et finalement, pour les besoins courants de la pratique,
LI. PROBLÈMT DE l'ÉV \PORATIOA 189
l'évaporation au cours d'un mois de n jours, est donnée avec
une approximation suffisante par :
273+ £ 760ks
mois= 0,398 . n. (p - p) -
273 B — p'
où Eçp = hauteur de la tranche d'eau évaporée en mm. pour
le mois de n jours.p' = tension de la vapeur d'eau saturée correspondant à
la température moyenne mensuelle t, en mm. (se lit
dans les tables hygrométriques).p = tension moyenne mensuelle réelle en mm. de la
vapeur d'eau au moment des lectures de t (s'ob¬tient en multipliant p' par l'humidité relative en %,lue à l'hygromètre).
B = pression barométrique moyenne mensuelle en mm.
t = température moyenne mensuelle des maxima jour¬naliers, soit à défaut d'enregistrement, tempéra¬ture à l'obser\ation de 13 h. y2, en degrés centi¬
grades.
Cette formule peut être utile dans des pays où l'on n'a
aucune idée de la valeur de l'évaporation des bassins réser¬
voirs. Nous pensons en particulier au calcul des pertes dans
les projets pour l'utilisation des eaux de certains oueds
tunisiens, qui nécessitent la construction de canaux de
plusieurs dizaines de kilomètres, ou pour s'orienter sur les %de perte à admettre dans l'irrigation à grande distance.
Quelques observations de la température de l'air et de l'état
hygrométrique, suffiront la plupart du temps pour ces
calculs.
Voici, à titre d'exemple pour un pays subtropical de l'hé¬
misphère S, la République Orientale de l'Uruguay, les
valeurs obtenues par l'application de la formule. En regarddes chiffres calculés pour chaque mois avec les éléments
t, p, B, e % = humidité relative, tirés du Bulletin mensuel
de l'Observatoire de Montevideo de l'année 1917 [198],
190 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
figurent les évaporations observées directement à l'évapo-romètre de Piche, E mesuré.
Tab. 21
MoisHeure du
(°max p'mm. e%p^e%.p' „ E? mm.
ri mm. , ,,
E'f mm.111,1 M NI t mm. calcule mesuré
i
i 14 27,42 27,1 45,4 12,3 757,79 208,0 185,3ii 14 27,33 27,0 54,9 14,8 757,85 155,0 128,1m 13 24,14 22,3 52,5 11,7 761,26 146,0 119,6IV 14 20,64 18,1 65,8 11,9 760,77 81,2 76,5V 14 15,54 13,1 69,3 9,1 764,27 52,6 66,8VI 14 15,27 12,9 65,2 8,4 761,79 57,8 57,9VII 14 12,44 10,8 71,3 7,7 763,96 40,4 42,4VIII 14 13,37 11,4 62,7 7,1 763,93 56,4 69,1IX 14 16,83 14,3 59,4 8,5 761,81 74,8 83,2X 12 17,68 15,1 59,1 8,9 762,37 83,4 89,1XI 12 22,05 19,7 44,1 8,7 761,12 145,8 142,0XII 12 26,49 25,7 44,5 11,4 756,29 200,0 186,0
lïllil
Total : 11301,4mm
1246,0
Pour qui connaît la difficulté dévaluer l'évaporation avec
quelque certitude, ces résultats apparaîtront comme très
satisfaisants. Ils prouvent que la formule de l'indice déva-
poration est bien adaptable aux pays subtropicaux.
1 B. L'évaporation physiologique.
Abordons maintenant le problème de la végétation, quiest beaucoup plus difficile à résoudre mathématiquement.De nombreux travaux de physiologie expérimentale nous
renseignent sur la sudation des plantes cultivées en labora¬
toire. Mais ces résultats sont inutilisables pour évaluer
l'évaporation en grand dans la nature.
On peut se demander, comme l'ont fait d'ailleurs divers
auteurs, s'il faut considérer la consommation d'eau par le
chemin de la sève, en fonction de la quantité de précipita¬tions que reçoit le sol, ou bien si cette transformation d'état
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPOR ATION 191
est suffisamment indépendante pour être calculée isolément.
L'un et l'autre de ces points de vue se défendent.
Si l'on admet que la condensation dans le sol pourvoitclans une certaine mesure au défaut de précipitations dans
les mois très secs, il n'y a aucune raison de ne pas admettre
que l'évaporation est pratiquement indépendante de la varia¬
bilité du coefficient pluviométrique. Par contre, dans certains
climats, le rôle de l'humidité du sol est si minime que ce
processus tombe de lui-même. Tel est le cas des pays équa-loriaux où c'est bien la pluie seule qui fait la richesse de la
végétation.Dans des districts très secs, comme le Valais aux environs
de Sierre, la consommation des plantes est presque constante
pour chaque mois, pendant le stade de verdure. C'est proba¬blement le cas aussi, dans une certaine mesure, pour les
versants des Alpes et le Plateau. On pourrait, de ce fait,établir d'avance avec un bon degré d'approximation, la
quantité d'eau mensuelle qu'évapore la végétation, dans les
bassins de nos cours d'eau.
Il est d'ailleurs évident que l'intensité de la sudation
des végétaux atteint rapidement un équilibre qui n'est
jamais dépassé et qui est réglé par l'indice d'évaporation,tel qu'il a été envisagé plus haut. On peut donc dire que la
quantité d'eau, empruntée au sol et nécessaire au développe¬ment normal des végétaux pour une saison, est une cons¬
tante, augmentée ou diminuée d'une fraction proportion¬nelle à l'indice d'évaporation observé. En un mois dit
humide, cette fraction sera d'autant plus petite que la tempé¬rature sera plus basse et que la pluie aura séjourné plus
longtemps. En un mois sec, elle sera d'autant plus forte que
la chaleur aura été intense et les précipitations minimes. De
combien cette fraction peut-elle varier, c'est ce qu'il est
impossible de dire aujourd'hui. Par contre, on a évalué
grosso modo la quantité moyenne d'eau nécessaire à l'alimen¬
tation complète de diverses plantes, assimilation et sudation
comprises.
1!)2 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Ainsi M. Keilhaek signale par jour et nr de terrain
(1 mm./m2 = 1 litre), les valeurs de l'évaporation suivante
pour l'Europe, entre les latitudes de 45 et 55 degrés :
Prairies herbeuses, graminées, etc. et tréfolium 2,1 à 7,3 mm.
Avoines 3 » 5
Maïs 3 » 4
Blés 2,26» 2,8
Vignes 0,9 » 1,3Forêts de sapins 0,5 » 1,0Forêts de chênes 0,5 » 0,8
Ces chiffres sont suggestifs. Si on les applique habilement
au calcul du cycle annuel de l'eau météorique, on démontre
sans peine qu'il y a dans les bassins des cours d'eau du
Plateau et même des Préalpes, d'immenses plages inactives
où le ruissellement n'existe pas et où l'alimentation des
sources profondes est impossible dans les saisons verdoyan¬tes de l'année.
Pour fixer les idées, ne prenons que le cas de Montcherand
au pied du Jura vaudois (565 m.) où l'on a le bilan suivant
(Tab. 22), pour les champs de graminées à déclivité très
faible ou nulle.
La valeur de la condensation a été prise en faisant k = 10
dans la formule établie au § II, 1 de ce chapitre, page 174.
Il ressort de ce tableau qu'au cours d'une année, la quan¬
tité relativement faible de 105- mm. est retenue par le sol.
Ce chiffre n'a en effet rien d'étrange. Il équivaut au débit de
^œ=3^Kt/»c./kn...O,U«terburgnou..précisément montré que le débit minimum des sources dont
le bassin d'alimentation est situé dans les collines ou sur le
Plateau, avec une pente à peu près nulle, est égal à 2,7 lit. /sec. /km". Si l'on comptait avec une évaporation physiolo¬gique plus faible, par exemple de 750 mm. partagée en
400 mm. de sudation et 350 mm. d'eau d'assimilation, on
arrive encore au chiffre de 8,9 lit. /sec. /km*, qui n'est pas
excessif.
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 193
Ce calcul tend donc à démontrer que les champs horizon¬
taux sont susceptibles de fournir des eaux au collecteur d'un
grand bassin. Elles sourdent toutefois en quantités extrê¬
mement faibles. Dans la majeure partie des cas, les eaux
d'imbibition de ces terres se réunissent d'abord dans les
nappes phréatiques avant de retourner à la surface par l'in¬
termédiaire des sources.
Bilan des eaux météoriques des champs à graminées,
en millimètres. Tab. 22
Mois J. F. M. A. M. J. J. A. S. 0. N. D. Année
1
Précipitations )
mesurées \59 77 83 88 83 82 94 80 77 86 107 977
Précipitations
perdues snr ! ° 1 3 8 9 13 12 14 8 3' 2 0 73
Il végétation i i
(En 7, «tes
précipitationsmesurées)
( (0) (2) (5) (10) (10) (15) (15) (15) (10) (5) (2) (0) (7,6)
Précipitations
atteignant Ses'61 58 74 75 79 70 70 80 72 74 84 107 904
racines\
1
Condensation 2 5 9 9 8 15 23 27 21 6 1 0 126
Total.... 63 63 83 84 87 85 93 107 93 80 85 107 1030
Evaporation1
pour l'herbe
et l'humus,> 5\
5 15 90 150 180 150 120 100 75 30 5 925
calculée1
Eaui
gagnée +
perdue —
dans le sol
(+58\
+ 58 4 68 —6—63 —95—57 —13 —7 +5 + 55 + 102 +346—241
+ 105
Mais ici on est loin des chiffres énormes du débit par km2
qui figurent couramment dans les travaux d'hydrologie.Ainsi M. Brockmann [43] donne, pour la région de l'Orbe,37 lit./sec./km2. Il est évident qu'il entend par là une
LUGEON — 13
194 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
moyenne pour l'ensemble des terrains. Néanmoins ce chif¬
fre, comme nous l'avons dit au début de ces pages, ne
signifie pas grand'chose, car dans le bassin de l'Orbe moins
d'un quart de la superficie totale des versants ne ruisselle
pas, et la moitié ne fournit aux sources que tout au plus20 lit. /sec. /km2.Voyons maintenant ce que nous disent les forestiers au
sujet de l'évaporation des sols. Les résultats d'une série
d'essais intéressants, sur les six espèces de sols suisses, mais
qui ne se rapprochent malheureusement pas assez des condi¬
tions naturelles, figurent dans l'ouvrage d'Engler.Les expérimentateurs suisses ont opéré comme Mathieu et
Ebermayer [199] qui, il y a une cinquantaine d'années, ont
proposé une méthode très simple pour évaluer l'évaporationdes terres. Elle consiste à remplir du matériau en étude de
petites crèches en métal de quelques 20 X 10 cm. de surface,et 10 cm. de profondeur, à les saturer d'eau, et à les exposer
sous abri contre la pluie un temps déterminé, soit à l'air libre,soit sous les arbres, à l'endroit où l'on veut évaluer l'évapo¬ration du sol. D'après les plus récents essais de la station de
l'Adlisberg (670 m., Zurich), Engler trouva pour toutes les
six espèces de terre une évaporation moyenne journalière de
0,4 à 0,6 mm. dans l'air libre d'un jardin, alors que l'évapo-romètre indiquait 1,6 mm. Sous un hêtre de trente ans, il
obtient à peu près le tiers de ces chiffres, soit 0,2 à 0,25 mm.et 0,53 mm. pour l'eau. Il en résulte, en tenant compte des
facteurs météorologiques, la répartition annuelle suivante :
Évaporation des terres de culture non cultivées :
A l'air libre : Dans la forêt :
En été 180 60 lit. /m2 (ou mm.)En automne .
108 36 » »
Au printemps. 81 27 » »
En hiver — — » »
Année entière. 369 123 lit. /m2 (ou mm.)
Il n'est pas de notre compétence de commenter ces valeurs,
extrapolées d'expériences. Néanmoins, nous avons vu plus
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 195
haut le rôle énorme que joue la température interne du sol
dans les condensations occultes. Or, dans les conditions
d'expérience de l'Adlisberg, ce facteur échappe complè¬tement. Il ne semble donc pas erroné d'admettre que ces
chiffres sont passablement au-dessous de la valeur réelle de
l'évaporation. Grâce aux apports dus au cheminement des
eaux capillaires, on doit pouvoir élever ces 369 mm. à 400, à
même 450 mm. à l'altitude du Plateau suisse.
D'une manière générale, les terres des bassins d'alimen¬
tation des cours d'eau de la région des Alpes sont recouvertes
par des champs, des pâturages ou des forêts. Nous ne passons
ici en revue que les chiffres concernant ces catégories de
végétaux.Plusieurs méthodes se présentent à l'esprit pour déter¬
miner la consommation en eau des arbres et des herbes.
Engler relate différents travaux basés sur la méthode des
pesées à la balance. Ainsi Hôhnels [200] évalue l'évaporationpar la différence de poids des feuilles ou des aiguilles à l'état
vert et à l'état sec ; Ebermayer [201] par la productionannuelle de bois ; Hellriegel [202] par la transpiration. La
moyenne des résultats acquis par ces trois procédés donne
une évaluation assez sûre de l'évaporation.Pendant toute la période de végétation, on trouve ainsi :
Evaporation par hectare = 1/100 de km2.
Ta.b. 23
Pendant la périodede la végétation,printemps, été, au¬
tomne : . .
SAPINS PINS HÊTRES
mi mm. m1 mm. m' mm.
2264 226 2360 236 2756 276
Pendant l'année
2830 283 2950 295 2444 244
Ces chiffres ne tiennent pas compte des eaux de condensa¬
tion évaporées, ni de la sudation directe qui est vraisem-
196 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
blablement faible. La valeur moyenne de 300 mm. par an,
pour la région forestière, est donc un minimum.
Pour avoir l'évaporation totale d'une forêt, il faut ajouterà ce dernier chiffre l'évaporation du sol qui atteint 123 mm.
par an. On arrive ainsi à 423 mm., sans compter que le sol
forestier est souvent recouvert de mousses et d'herbages quirendent à l'air une couche de 50 mm. environ.
Grossièrement, on peut admettre que l'évaporation phy¬
siologique de la forêt, à l'altitude du Plateau suisse, atteint
450 mm. par an.
D'après la production annuelle de l'herbe à fourrage,
Engler arrive pour les champs au chiffre beaucoup plusmodeste de 648 m3 par hectare, soit une tranche d'eau de
64,8 mm. par an. Plus haut, nous avons vu qu'en un seul
mois de juillet, si les données de M. Keihlack sont exactes, il
peut s'évaporer jusqu'à 180 mm., évaporation de la terre
comprise, il est vrai. D'où peut provenir une telle diffé¬
rence ? C'est ce qu'il est difficile d'expliquer. Nous pensons
simplement que la seule méthode de la pesée à l'état sec
et humide n'est pas susceptible d'applications précises, pour
l'herbe. On doit pouvoir pousser le résultat d'Engler à
150 mm.
Pour la végétation des terres labourées, cet auteur nous
donne 1296 m3 par hectare, ce qui est encore un chiffre rela¬
tivement faible.
Bref, on arrive pour l'évaporation totale d'un sol herbeux
à (369+64,8) = 433,8 mm. par an, et il n'est pas exagéré de
forcer à 450 mm.
La conclusion à tirer de là est importante : l'évaporationtotale annuelle d'un bassin entièrement boisé et d'un bassin
recouvert de prairies est sensiblement la même et égale à
450 mm.
Ajoutons qu'Engler, pour ses deux bassins du Sperbel-graben et du Rappengraben, obtient 423 et 437 mm., ce quiillustre clairement ces calculs.
LE PROBLÈME DE L'ÉVAPORATION 197
* *
Dans la technique des précipitations traitée au début de
ces pages, nous avons omis de parler de la part d'entre elles
qui atteignent réellement la surface du sol. Celui-ci est, en
effet, presque partout recouvert de végétation qui retient
dans leur chute un certain volume des eaux météoriques.Quelle que soit son importance, ce volume ne participe pas
au cycle du ruissellement, et retourne directement à l'air par
l'évaporation physique. De nombreuses recherches faites
par des stations forestières et agricoles de Suisse, France,
Allemagne, Russie, etc. [203 à 205], montrent que la perte
nette par évaporation sur la végétation, en % de la quantitémesurée par un pluviomètre à ciel libre est : sous les arbres
d'une forêt de pins, 20 à 23 % ; pour l'ensemble de la forêt
environ 15 % ; sous des hêtres, 8 à 12 % et pour l'ensemble
d'une forêt de hêtres, 8 % environ ; pour l'herbe et les
céréales au moment de leur plein développement, 10 à 31 %et 10 % pour la durée de l'année.
En hiver, il est particulièrement difficile d'évaluer la
part de la neige et du givre qui parviennent au sol.
D'après des observations personnelles sur la fusion de la
neige des rameaux des arbres, nous pensons que l'évapo¬ration due à ce processus est plus faible au cours de l'hiver
qu'au cours des autres saisons.
Un apport supplémentaire au sol, sous forme de givre, non
mesurable dans le pluviomètre, n'est d'ailleurs pas exclu.
Pour cette raison encore, nous inclinons à croire que le 95 %de la somme des précipitations solides mesurées a atteint le
sol de la forêt, vers la fin de l'hiver.
*
* *
Cette courte analyse du problème extrêmement vaste de
l'évaporation physiologique serait incomplète, si on ne
198 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
cherchait pas à évaluer celle-ci, au moins approximative¬ment, à des altitudes supérieures aux vallons d'Engler,desquels sont tirés la plupart de ces chiffres. A vrai dire, on
ne possède aucune donnée au-dessus de 1000 m., mais, par
analogie, il est possible de se faire une idée suffisamment
précise de la perte annuelle en haute montagne.
Ainsi, en comparant les mesures évaporométriques,nous avons vu que l'évaporation physique diminuait en
raison inverse de l'altitude. Si la valeur du rapport
évaporation physiologique totale. ,,
—~ f-2-^ varie peu, a mesure que 1 on
évaporation physique
s'élève dans les Alpes, ce qui, pour beaucoup de raisons, pa¬
raît admissible (diminution progressive de l'indice d'évapo-ration, arrivée tardive du printemps, durée plus courte de la
végétation), on obtiendra sensiblement, pour I'évaporationphysiologique, la même courbe que pour I'évaporation des
lacs (fig. 18). Sa courbure, toutefois, sera convexe vers le ciel.
Nous compterons donc grosso modo avec les chiffres sui¬
vants, en laissant de côté I'évaporation des eaux condensées :
Altitude : Evaporation physiologique :
400 m. 600 mm.
1000 » 400 »
1500 » 300 »
2000 >» 180 »
M. Axel Wallèn [122], qui a raisonné d'une manière ana¬
logue, arrive pour la Suède aux chiffres de 360 mm. en plaineet 270 mm. en haute montagne.
Que dire maintenant de la variation annuelle de I'évapo¬ration physiologique ? Elle est régie par deux facteurs
principaux : la croissance de la végétation, qui doit infléchir
brusquement la courbe de variation au moment du bour¬
geonnement, et l'indice d'évaporation qui varie réguliè¬rement en double courbe de Gauss. L'allure de la courbe de
variation annuelle doit donc se rapprocher de celle de la
figure 19.
LE PROBLÈME DE L'ÉVAPORATION 199
Les différences essentielles qui caractérisent en grand les
évaporations annuelles physiques et physiologiques, considé¬
rées comme fonctions de la pluviosité, s'expliquent par l'ac¬
tion complexe du rayonnement et de la température de l'air,de la température de l'eau ou son support, et de la perméabi¬lité des terrains.
On sait que le pouvoir calorique des végétaux et des terres
est de beaucoup supérieur à celui de l'eau, liquide athermane
qui se réchauffe surtout par la chaleur obscure qu'emmaga¬sinent les substances formant le plafond des lacs ou les lits
des rivières. Il en résulte qu'au cours d'une journée ensoleillée
le sol s'échauffera plus rapidement que la surface d'un lac,dont l'élévation de température est parfois ralentie par le jeudes vagues ramenant vers la surface des couches plus froides.
Pendant l'insolation il se dégagera ainsi davantage de vapeur
d'un sol très humide que d'un lac. Au cours de la nuit, le
rayonnement calorique retardera l'évaporation des terres et,
suivant la saison, le phénomène sera inversé. C'est une ques¬
tion d'équilibre, réglée par le déficit hygrométrique de
l'air et les températures en présence. Mais il est facile de se
rendre compte, par un calcul élémentaire, que le bilan de
l'évaporation rompt l'équilibre en faveur de la terre. La
diffusion des gouttelettes de pluie pulvérisées sur la végéta¬tion est activée dans les éclaircies qui suivent les averses.
L'odeur caractéristique de l'herbe, après un orage d'été, se
rattache à ce phénomène. L'évaporation peut alors emporter
en quelques heures plusieurs dizaines de mm. de pluiefraîchement tombée, tandis que cette quantité ne se dégageradu lac qu'en l'espace de plusieurs jours.
L'évaporation physiologique est contrebalancée aussi par
la nature géologique des terrains. S'ils sont imperméables,
200 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
argileux, par exemple, le cycle des précipitations sera rac¬
courci ; l'eau tombée, à moins de ruisseler, retournera sans
tarder à l'atmosphère. S'ils sont perméables, sableux, l'éva-
poration globale sera diminuée et le climat de la région appa¬
raîtra comme moins humide que dans le cas des terrains
imperméables. La perméabilité du sol est donc aussi indirec¬
tement un élément climatique important.
2. Vévaporation hydrologique.
Le problème général de l'évaporation hydrologique dans
les bassins alpins est très difficile à mettre en équation. Si,en plaine, il est aisé de négliger la variation avec l'altitude
des deux éléments, précipitations et évaporation, en monta¬
gne ce n'est plus le cas. A priori, on a donc affaire à trois
paramètres et à trois axes.
Nous allons rapidement examiner les travaux de M. Cou-
tagne [33, 64, 65] qui, à notre connaissance, est le seul au¬
teur ayant jusqu'ici donné une forme mathématique com¬
mode, pour le calcul des débits des cours d'eau, en partantdes précipitations. On peut même dire qu'il a épuisé le sujet,
pour les cours d'eau de plaine ou de moyenne altitude, au
moins. Mais sa méthode très séduisante s'applique-t-elle aux
Préalpes et aux Hautes-Alpes ?
Posons les propositions suivantes avant d'entrer en dis¬
cussion : On distingue dans le temps et dans l'espace deux
fonctions principales de l'évaporation hydrologique :
1 a. La variation de l'évaporation en fonction de la hau¬
teur des précipitations moyennes mensuelles, hebdomadaires
ou journalières au cours de l'année et à l'altitude constante.
1 b. La variation de l'évaporation en fonction du module
pluviométrique et à l'altitude constante.
La deuxième de ces fonctions existe, elle est connue et ap¬
plicable aux calculs des bassins dont la dénivellation entre
le sommet et le niveau de base est faible, de l'ordre de quel-
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 201
ques centaines de mètres, ou, ce qui revient au même, à des
bassins de faible pente et de grande étendue. C'est le cas de
M. Coutagne pour le module moyen.
Ces fonctions sont inapplicables aux bassins dont la pente
est forte.
2 a. La variation de F évaporation en fonction des hauteurs
des précipitations moyennes mensuelles, hebdomadaires ou
journalières, au cours de l'année, et en fonction de l'altitude.
2 b. La variation de l'évaporation en fonction du module
pluviométrique et en fonction de l'altitude.
M. Coutagne [33, p. 16] raisonne de la manière suivante
pour construire la formule :'
« Deux facteurs antagonistesexercent leur influence sur l'évaporation. »
Lemme 1 : « La quantité d'eau qui tombe : plus il tombe
d'eau, plus il s'en évapore, parce que plus grande est la quan¬
tité d'eau susceptible d'être évaporée. »
Lemme 2 : « Les conditions qui favorisent l'évaporation,qui sont d'autant moins favorables qu'il pleut plus : plus il
tombe d'eau, moins il s'en évapore, parce que l'évaporationest d'autant moins intense que l'air et la terre sont saturés
d'eau. »
Nous n'entrerons pas dans le détail des raisonnements ma¬
thématiques qui ont amené M. Coutagne à établir sa formule.
Il a exposé cela très clairement dans un autre article de la
R. G. E. [64, 65].Voici la traduction algébrique de la courbe d'évapora-
tion, qui a l'allure d'une courbe en cloche asymptotiqueà l'axe des P (fig. 20, empruntée à l'article, Réf. : 64, 65,
p. 887).
Ex=E5,0.e-^(P-P0)2 . = 2,71..
où Ex = évaporation à calculer, Ex0 = le maximum que
peut atteindre la quantité d'eau non ruisselante, P = plu-
1 Keller et plus tard Horwitz [25, 271 avaient découvert déjà la loi que
précise mathématiquement M. Coutagne.
202 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
viosité ou module pluviométrique, P„ = valeur de la plu¬viosité correspondant au maximum Ex0.
Le paramètre "X se détermine d'après M. Coutagne par les
relations r2. P0% = K"2, et,
5iEà0
K*
Mais on peut se contenter de prendre A.P0 = 1,2. M. Cou¬
tagne a, en effet, constaté l'exactitude de cette relation pour
des régions très différentes.
Les trois paramètres E>0, X2 et P0 caractérisent donc l'éva-
poration d'un bassin et correspondent à ses conditions phy¬siques, géologiques et climatiques.
Ainsi, pour l'Europe centrale on a : E>,0 = 0,4, A2 = 2,773,
FIGURE DE COUTAGNE
8-1.-ta>
s^D*B
sjfo- Eo^s£
/ ;r P» P, F= :P*— P
Pluviosité
20.
P0 = 0,725. Pour le Massif central français : Ex0 = 0,500,i2 = 1, 42, P0 = 1,000.
Démontrons maintenant que la formule de M. Coutagne est
bien applicable à certaines régions, en examinant comment
varie l'évaporation en fonction de la pluviosité. Considérons
pour cela l'axe des pluviosités P, dans la figure :
1° La pluviosité est faible et comprise entre P, et P2.
L'évaporation croît avec la pluviosité entre A et B, confor¬
mément au lemme 1.
2° Le bassin a une forte pluviosité comprise entre P3et P4 : l'évaporation diminue avec la pluviosité, conformé¬
ment au lemme 2.
LE PROBLÈME DE i/ÉVAPORAÏION 203
3° Le bassin a sa pluviosité comprise entre P2 et P3 :
l'évaporation est d'abord croissante (lemme 1), passe par un
maximum, puis décroît, conformément au lemme 2.
Il est bien entendu que ce raisonnement ne s'applique qu'àla proposition 1 b, énoncée antérieurement, c'est-à-dire pourdes bassins dont on calcule une évaporation unique moyenneentre toutes les altitudes. Reste à savoir maintenant si le
même raisonnement s'applique à nos trois autres proposi¬tions, et si tel est le cas, comment on va le démontrer.
Proposition 1 a. La formule de M. Coutagne ne s'appliquepas.
Nous avons, en effet, exposé avec assez de preuves et de
chiffres que les évaporations physique et physiologique ne
sont pas seulement fonction des précipitations, mais dépen¬dent avant toute chose de l'indice d'évaporation t\, c'est-à-
dire des maxima de température. Or, ce facteur n'intervient
pas chez M. Coutagne. Puis on ne peut plus parler d'évapora¬tion en fonction des précipitations, sans tenir compte des
diverses capacités de rétention d'un bassin, qui, mois par
mois, sont en rapport direct avec l'évaporation. On s'en
rend compte immédiatement en portant en abscisses les pré¬cipitations moyennes mensuelles, et en ordonnées les éva¬
porations moyennes mensuelles pour la station de Monche-
rand. De là résulte la conclusion générale suivante :
Au cours des années, l'évaporation physique moyenne
mensuelle n'a aucune relation avec les précipitations moyen¬
nes tombées pendant le mois.
Ainsi la proposition 2 a, dans le cas des précipitationsliquides, tombe d'elle-même, aussi. Nous ne pourrons d'ail¬
leurs pas éviter, par la suite, de faire intervenir d'autres
facteurs, tels que la température et la nivosité, ce qui com¬
pliquera notablement les équations.Proposition 1 b. La formule de M. Coutagne est applicable
directement, dans les limites d'une dénivellation maximum
de 500 m. entre le bassin de réception le plus élevé et le ni¬
veau de base des cours d'eau du Plateau suisse, des flancs du
204 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Jura et des Préalpes, en prenant pour P, P0, Ex0 et \2, des
valeurs annuelles. En effet, on peut admettre a priori que
les écarts annuels de la température moyenne deviennent si
faibles en regard de l'indice de variabilité du module pluvio-métrique, que le facteur température devient négligeable et
par conséquent l'évaporation reste seule fonction des modules.
Mais nous verrons plus loin qu'il est indispensable d'intro¬
duire d'autres facteurs pour obtenir une meilleure précision.Proposition 2 b. La formule de M. Coutagne est inapplicable.Nous avons vu dans le paragraphe traitant de la variation
des précipitations P, avec l'altitude A, qu'en moyenne pour
un grand nombre d'années d'observations, la fonction
P = / (A) est parabolique. Or, l'évaporation physique E?d'après le graphique (fig. 18), varie apparemment aussi sui¬
vant une parabole, jusqu'à l'altitude de 2000 m., au moins.
Donc, si entre ces deux fonctions,
E, = /, (A)P = /* (A)
on élimine le facteur A, on obtient une fonction exponentiellequi traduit la variation cherchée.
Avec les données expérimentales actuelles sur l'évapora¬tion physique, il est audacieux de construire une semblable
courbe. Néanmoins, on peut l'ébaucher. Sur le graphique de
la figure 21 sont dessinées cinq courbes, pour le Valais, les
Grisons, le versant nord des Alpes et Préalpes et le Tessin. Il
est certain que la courbe d'évaporation physique absolue, quisert de base dans les quatre cas, n'est pas la même pour ces
régions bien différentes. Toutefois, de l'une à l'autre, les
écarts ne doivent pas dépasser une trentaine de mm., et l'al¬
lure générale s'en trouvera peu changée. Cet avis est partagéaussi par d'autres auteurs, comme MM. Keller [206 à 209],Horwitz [25], Wallèn [209]. Un contrôle de l'évaporationabsolue est d'ailleurs bien simple. Il suffit de voir si, entre
les ordonnées qui correspondent sur la carte isohiétique à
la pluviosité P de petits bassins de réception, la hauteur
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 205
annuelle d'écoulement H équivaut bien à la différence
H = P — E3. Ceci suppose que E0 est, à fort peu de chose
près, égal à Ex.
Avant de mettre en équation la courbe E? = / (P), fixons
les idées par quelques cas expérimentaux.Considérons, par exemple, le Rhône à Reckingen, au cours
de l'année 1918, seulement.
Il est tombé dans cette station 1297 mm. d'eau ; au totali¬
sateur du glacier du Rhône : 2100 mm. On peut admettre
Fig. 21.
ce dernier chiffre comme renseignant avec une exactitude
suffisante sur les précipitations tombées dans la plus haute
montagne. (Reckingen moyenne 1100 mm., glacier et haut
bassin du Rhône moyenne 2640 mm.)
Grossièrement, la pluviosité moyenne est pour tout le
, . ,1297 + 2100
Q ,
bassin de 7.= loyo mm. Ur, a ce cninre corres-
pond dans le diagramme une évaporation de 150 mm., soit
une hauteur annuelle d'écoulement de 1698 — 150 = 1548
millimètres, qui diffère peu des 1567 mm. publiés par le
Service fédéral des Eaux.
Ce résultat est donc satisfaisant, étant donné l'approxi¬mation très large de. notre calcul, les nombreux facteurs et
206 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
coefficients de correction négligés, et le fait que l'évapo-ration physique qui sert de base à la construction de la
courbe n'est pas nécessairement la même que l'évaporationhydrologique.Dans un autre bassin, celui du Grimsel, l'erreur est aussi
très faible.
Pour la même année on a une précipitation de 2700 mm.
4nrn , n tï2700 + 1750
sur les sommets, 175U a Lruttannen, soit P =0
= 2225 mm., également répartis sur le bassin. L'évaporation
moyenne entre les isohiètes extrêmes, d'après le graphique,350 + 180
_„
r., ,
est sensiblement : E =
r>= 2o£> mm. D ou
H = P — E = 2225 — 265 —- 1960 mm. A Innerkirchen,
non loin de Guttannen, la hauteur annuelle d'écoulement
fut 1932 mm. La différence entre ces deux derniers chif¬
fres est certainement inférieure aux erreurs d'observa¬
tions. Ce qui signifie que dans les limites d'approximationde cette méthode rapide, les résultats du calcul et de l'ex¬
périence concordent. Ils permettent aussi de conclure que
les écarts entre l'évaporation physique et hydrologique sont
petits.
Beaucoup plus critiquable, par contre, est l'applicationde ce mode de calcul au Tessin. La forme même de la courbe
indique déjà les variations énormes de l'évaporation, qui
peuvent résulter de petites variations du module. En effet,
pour l'ensemble de ce pays, il est difficile de tracer une
courbe de variation des précipitations avec l'altitude, car
d'une vallée à l'autre, ou du sud au nord, les conditions
climatiques et surtout la pluviosité changent dans des pro¬
portions considérables. En outre, tous les postes pluviomé-triques sont situés dans les thalwegs de vallées très encaissées,où la pluie, qui a souvent peine à séjourner, est contrariée
par les courants intenses du fœhn ou des vents du N.
D'une manière générale cette remarque s'applique aussi
aux stations très encaissées des Préalpes et des Alpes.
LE PROBLÈME DE l'É VAPORATION 207
Seuls les pluviomètres situés dans les lieux exposés, aérés,dont la rose des vents est bien étoilée, témoignent fidèle¬
ment de la pluviosité d'une grande région. Faido, Olivone,
Mesocco, par exemple, sont à éliminer ; Airolo, par contre,
mieux exposé et sensible aux courants d'altitude est une
excellente station.
On peut énoncer le théorème général suivant qui, à part le
Tessin, est applicable à d'autres contrées :
Dans des régions où l'indice de variabilité du module
pluviométrique est élevé, ou, ce qui revient sensiblement au
même, où la densité des précipitations est forte, la formule
H = P — E est applicable à une année, E étant calculé
par la fonction E = / (P), fixée par la moyenne d'un grandnombre d'années d'observations.
Remarquons, d'ailleurs, qu'avant d'employer cette mé¬
thode de calcul de la hauteur annuelle d'écoulement, il faut
s'assurer que la précipitation annuelle a bien varié réguliè¬rement avec l'altitude. Au cas où il y aurait inversion — ce
qui se passe souvent au Tessin — la courbe E, = / (P) telle
qu'elle est dessinée sur la figure 21 n'a évidemment plus de
signification, car à une même hauteur de pluie ne peuvent
pas correspondre deux évaporations. Par contre, l'inverse,
qui est justement le cas du Tessin, est bien conforme à l'hy¬
pothèse : à une même valeur d'évaporation peuvent corres¬
pondre deux hauteurs de pluie.
Après cette digression, revenons au calcul de la hauteur
annuelle d'écoulement H du bassin de réception du Tessin,
pour l'année 1918.
Soit Pj la pluviosité dans le bas du bassin à l'altitude du
limnigraphe, P2 la pluviosité des régions les plus élevées,
et respectivement Et et E2 les évaporations correspondantes.On a comme pour les autres cas sensiblement P — E = H,
où P et E sont la pluviosité et Févaporation moyenne entre
les deux chiffres précédents.Valeur de Pt : à l'altitude de Rodi (926 m.) où est situé
le limnigraphe, il n'y a pas de poste pluviométrique. Par
208 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
contre, deux stations encadrent Rodi dans la même vallée ;
Airolo, à 1143 m. et Faido à 759 m. L'altitude moyenne de
ces postes, 951 m. diffère peu de celle du limnigraphe, on
la considérera comme niveau de base.
Le poste pluviométrique de Faido, comme nous l'avons
dit ci-dessus, donne des valeurs trop faibles de la pluviosité
pour les deux raisons : encaissement et vent. Le facteur de
correction est au minimum + 12 % des 1590 mm. d'eau
recueillis.
Pour Airolo, on peut admettre une correction de + 8 % de
ses 1944 mm. Ce qui fait pour Pj :
1 12 8P. = - (1590 H 1590 + 1944 H 1944) = 1935 mm.
12l
T100 100
;
Pour P2 on prend sans correction les valeurs publiées
corrigées ? pour le Gothard 2249 mm. et pour le Skopi2820 mm., soit P2 = 2658 mm. La pluviosité moyenne du
1bassin est donc : - (Pj — P2) = 2287 mm.
D'après le graphique (fig. 21), l'évaporation moyenne E,
entre les deux ordonnées de E, = 700 mm. et E2 = 150 mm.
est à peu près :
1- (700 + 260 + 160 + 150) = 317 mm.
4
d'où,H = P — E = 2287 — 317 = 1960 mm.
Ce qui donne, en résumé, une différence insignifiante avec
le chiffre du Service fédéral des Eaux = 1978 mm.
Ajoutons, pour éviter la critique que pourrait suggérer le
choix de nos coefficients de correction des modules d'Airolo et
de Faido, que le résultat est identique en négligeant cette
dernière station, et en omettant de rectifier les données de
la première.Il ne faut d'ailleurs pas, pour l'instant, attacher trop d'im¬
portance à ces chiffres, la méthode sera précisée plus loin.
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 209
Mise en équation.
L'équation générale de l'évaporation moyenne en fonction
des précipitations moyennes, Emoy = f (Pmo2/) pour toutes
les régions des Alpes, et quelle qu'en soit l'altitude, équationque nous appellerons par la suite formule de transposition,doit satisfaire aux conditions suivantes :
Soit :
E «= évaporation en mm., en ordonnées,P = précipitation en mm., en abscisses,E„ = évaporation maximum d'une région considérée.
Posons :
E = E0 / (P)
Cette équation doit satisfaire aux hypothèses suivantes :
pour P = o ; E = E0, donc / (P) = 1, à condition que
P = o suppose une précipitation P0.En outre, pour P —>- oo : E —> o,
ce qui revient à donner à l'équation la forme exponentielle :
E = E0 e
— k P2> où e = 2,71828....,
et où k est un paramètre fixe à calculer.
Toutefois nous nous sommes rendu compte rapidement que
cette fonction qui traduit l'allure de la courbe d'évaporationest insuffisante pour donner une représentation exacte des
cinq cas de courbes expérimentales du graphique (fig. 21).L'application fastidieuse du théorème de Fourrier ne donne
pas de solution satisfaisante, non plus que les équations de
van der Waals.
En nous rappelant l'équation différentielle du galvano¬mètre balistique, dont la courbe d'amortissement a quelqueanalogie avec la nôtre, nous posons son intégrale générale, en
en modifiant les constantes de la manière suivante :
LUGEON' — 14
210 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Soit :
E = e— * P
. (C, t C2. P),
on peut faire une translation d'axe et poser P = (P' — P0),et remplacer l'exposant par
— <I> (P' — P0).En cherchant à calculer les valeurs de C, et C2 à l'aide de
points choisis sur les diverses courbes du graphique (fig. 21),nous nous sommes aperçu que cette formule n'était bien
adaptable à l'ensemble des régions considérées qu'à la con¬
dition de remplacer la constante d'intégration de l'équationdu galvanomètre par une expression un peu plus cohipli-quée en la multipliant par P.
L'équation générale prend alors la forme :
E = e
— * (P ~ Po). (C4 P — C2 P2)
Cherchons les valeurs des paramètres.
En éliminant C! et C2 au moyen des relations :
E, = e— * (Pi — P°)
. (C4 l\ — C2 P,*)
E8 = e-*(P»-p<').(C1Pî-CïPî*)
où El5 E2, P,, P2, sont connus par l'expérience et choisis con¬
venablement, on obtient pour l'équation en * :
«.<.-*(Pi-«)_p..-*(P«-i)-Y=0
où a, (i, y, et a et h sont déterminés.
Il résulte d'essais numériques que notre équation généraleest encore incompatible avec les conditions expérimentales.Mais on peut introduire un artifice de calcul.
En cherchant avec un certain nombre de P et E, les va¬
leurs correspondantes de <l» (Ci et C> ayant été calculés avec
•l> minimum obtenu graphiquement par une courbe d'écarts),
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 211
on trouve que <i> est variable et varie comme une exponen¬
tielle de P.
Dès lors, il est facile de dresser pour un certain nombre
de P, les valeurs de »i> correspondantes.Cette solution est la plus simple. Car en cherchant la
variation exacte de * en fonction de P, et en l'introduisant
dans l'équation générale, cette dernière devient extrêmement
compliquée. Elle ne présente plus alors qu'un intérêt pure¬
ment mathématique. «I> varie d'ailleurs dans des limites
étroites.
Voici pour le Haut-Valais, les coefficients tels que nous
les avons calculés, avec la courbe de la figure 21.
C, = 1,113
C2 = 0,00001326
P0 = 580
Valeurs de 'l> correspondant à P :
P = 650 * = 0,002338P = 700 <i> = 0,002813P = 1200 * = 0,002634P = 1500 * = 0,002272
•i. moyen = 0,002520
Nous avons voulu nous rendre compte, afin de faciliter
l'usage pratique de notre formule, des plus grands écarts de
l'évaporation E sur la valeur expérimentale que donne la
courbe, en faisant <i> constant et égal à <t> moyen. Il résulte
d'un grand nombre d'essais dans les diverses zones de la
courbe, que l'écart maximum est de -f" 8 % de la valeur
trouvée par le calcul, à retrancher de ce résultat, pour tom¬
ber sur la courbe.
En résumé, on voit que l'expression algébrique de la fonc¬
tion E = / (P) est trop compliquée pour être d'un usage
commode.
Nous pensons que dans la pratique il est beaucoup plussimple et plus expéditif de procéder graphiquement.
212 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Calcul direct de V êvaporation physique et physiologique.
Au cours d'une année d'enregistrement limnigraphique, il
se présente sur la courbe un certain nombre de phénomènesqui permettent de calculer directement la valeur de l'évapo-ration.
Soit, par exemple (fig. 22), le cas fréquent d'une périodepluvieuse de quelques jours, où P est la courbe des précipi-
Ruissetlemenl- Ruissellement
Fig. 22.
tations cumulées, A la courbe du débit des précipitations et
Q la courbe des débits du cours d'eau.
On distingue trois phases caractéristiques : La phase I,ou arrivée du mauvais temps : le limnimètre est insensible
aux premiers millimètres de pluie qui imbibent le sol. La
phase II, ou ruissellement immédiat : après une quantitéde pluie déterminée (voir tableau 6 et fig. 12), la pluie com¬
mence à ruisseler vers le collecteur et le débit atteint une
valeur Q_max, pour redescendre, généralement un peu avant
que la pluie ait cessé. Arrive alors la phase III, ou ruisselle¬
ment retardé, qui est caractérisée par la relâche des eaux
météoriques momentanément infiltrées.
LE PROBLÈME DE l'ÉVAPORATION 213
Si les débits Q, et Q.> au début et à la fin des phases sont
identiques, condition nécessaire à notre raisonnement, on en
conclut que la capacité intarissable du bassin n'a pas varié.
En outre, les autres capacités n'ont été influencées qu'unmoment, et leur équilibre est rétabli aussi, en sorte qu'à la
fin de la phase III, les eaux d'infiltration sont dans leur tota¬
lité rendues au ruissellement.
Si le temps est resté couvert pendant la pluie, et par con¬
séquent le déficit hygrométrique minime ou nul, les évapora-tions physique et physiologique n'ont pu emporter qu'unequantité très faible des précipitations tombées. Sans erreur
appréciable on admettra que l'évaporation est nulle, aussi
longtemps qu'il pleut.Dès lors si : Pv = volume des précipitations tombées dans
le bassin,
Vt = volume des eaux écoulées au cours des phases I et II,
V2 = volume des eaux écoulées au cours de la phase III,on a :
PV-V1=IV,
où Iv est la somme des volumes des eaux infiltrées pendantles phases I et II et enfin l'évaporation totale Ev :
Ev= Iv-V2.
Il suffit d'appliquer cette méthode quelquefois, à des
époques différentes de l'année, pour se rendre compte qu'unefonction unique qui lie E et P (liquides) pour chaque moment
de l'année, est impossible à mettre en équation. Toutefois on
remarque qu'aux mêmes mois d'une série d'années, et pour
les mêmes valeurs de P, l'évaporation est sensiblement con¬
stante. Ceci est d'ailleurs conforme à la variation annuelle
de l'indice d'évaporation ti.
Et l'on peut ainsi énoncer qu'à chaque mois correspondune fonction unique et bien déterminée de l'évaporationhydrologique.
214 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Précisons, pour éviter toute confusion, que ce théorème
n'est pas en contradiction avec celui énoncé plus haut, et
qu'il concerne l'évaporation hydrologique mensuelle.
Nous verrons plus loin comment on arrive à la notion
beaucoup plus générale du moment d'infiltration en par¬
tant de ces éléments.
DEUXIÈME PARTIE
Application
CHAPITRE PREMIER
§ I. Le calcul de l'écoulement en fonction
des précipitations.
1. Les divers problèmes.
Le calcul mathématique appliqué à l'hydrologie offre un
champ de recherches très vaste, à peine exploré. Les phéno¬mènes d'écoulement dans un réseau hydrographique conti¬
nental sont si nombreux et variables qu'il n'est même pas
facile de chercher à les classer avec quelque précision. Ils
varient suivant la latitude et dépendent directement du
climat.
Des auteurs qui ont essayé d'établir par le calcul les cor¬
rélations générales des principaux éléments météorologiqueset hydrologiques entrant dans le cycle des eaux, se sont
butés, soit à des incomptabilités résultant de la complexitédes éléments qui entrent en jeu, soit à l'insuffisance ou au
défaut d'expériences. D'aucuns ont traité ces spéculationshasardeuses d'absurdités, car une loi d'ensemble n'a pas de
sens pratique. Si les ressources des mathématiques sont un
inappréciable moyen d'investigation, on est obligé, en hy-
216 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
drologie, d'en restreindre l'emploi et de borner ses calculs
à de petites contrées et à des phénomènes simples.
Belgrand, puis Maillet, dans leurs études magistrales sur
le bassin de la Seine, ont été les premiers à donner un pro¬
gramme vraiment rationnel pour calculer l'effet des longues
périodes pluvieuses sur les crues qui les suivent. Keller en
Allemagne, Penck en Autriche, ont posé les bases pour la
comparaison des pertes dans les bassins de l'Europe centrale.
Et parmi les pionniers de l'hydrologie alpine, l'ingénieursuisse Robert Lauterburg [210, 211] élaborait, vers l'an 1870
déjà, la première formule du système d'écoulement préal¬
pin et glaciaire.Un long temps d'arrêt caractérise la fin du siècle passé
et les premières années du siècle présent. Mais aujourd'hui,alors que l'hydroélectricité prend une importance croissante
dans la vie commune, une série de travaux nouveaux ont
vu le jour. Il fallait attendre peut-être que les observations
devinssent plus nombreuses pour tenter d'établir des moyen¬
nes avec quelque sécurité, et attaquer maints problèmes de la
plus haute importance pour l'aménagement idéal des cours
d'eau alpestres.L'idée fondamentale, qui nous a dirigé dans ce travail,
est de chercher à établir une sorte de formule, permettant de
calculer, dans des régions restreintes, de l'ordre de quelquescentaines de kilomètres carrés, les écoulements totaux en
partant exclusivement des précipitations atmosphériques,pour suppléer au manque de mesures de débits et de jau¬geages.
Nous n'avons en aucune façon la prétention d'avoir at¬
teint un résultat définitif qui soit suffisamment probant :
seule une œuvre de longue haleine permettra d'arriver à ce
but. Les pages suivantes sont l'essai d'un plan d'investiga¬tion, coordonné sur l'ensemble de nos connaissances en
hydrologie alpine, examinées brièvement dans la premièrepartie. Cet essai doit aider au calcul des installations à
grande accumulation. Nos recherches ne s'adressent, en
LES DIVERS PROBLÈMES 217
principe, qu'à la Suisse, c'est-à-dire aux cours d'eau situés
à la hauteur de 47° de latitude.
Tous les organismes de la région des Alpes se rattachent
aux deux régimes : a) du type glaciaire ou alpin, où inter¬
viennent des calculs relatifs à la pluie, la neige et la fusion
de la glace ; b) du type pluvial, appelé aussi type préalpin,où interviennent des calculs relatifs à la pluie et la neige,seuls.
L'étude des formules des cours d'eau du type glaciairene peut trouver place ici, elle fera l'objet d'un autre travail.
Ceux-ci se traitent d'ailleurs comme les préalpins avec le
facteur température en plus. Il ne faut pas oublier que ce sont
ceux qui se prêtent le moins facilement aux calculs, à cause
du manque d'observations de la température en haute mon¬
tagne. A elles seules, les données météorologiques du Sântis,
de Zermatt, du Gothard, de Saas-Fée, du Jungfraujoch(ces dernières ne sont pas publiées pour diverses raisons scien¬
tifiques), ne peuvent suffire.
Nous nous restreignons donc pour le moment aux cours
d'eau préalpins en écartant d'emblée les problèmes trop
compliqués.Les principaux problèmes qui se posent sont :
1° Le calcul de la quantité d'eau totale disponible dans
un espace de temps déterminé, 3 mois, 6 mois, etc., en un
point quelconque du cours d'eau, mais plus spécialement :
le calcul du module ou la hauteur annuelle d'écoulement.
2° La détermination du caractère du régime, soit la courbe
de régime pour les débits moyens mensuels d'un grand nom¬
bre d'années ou pour chaque année séparément.3° Les détails de l'écoulement, soit le coefficient de débit,
ou aussi l'amplitude maximum des débits extrêmes, les dé¬
bits minimum absolu et maximum absolu, à n'importe quelmoment de l'année. Ces quantités, qui ne peuvent guèreêtre calculées sans des chiffres de repère de quelques années
d'observations limnimétriques, sont, par contre, prévisiblespour des conditions déterminées de pluviosité.
218 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
A cette dernière classe se rattache tout ce qui concerne le
calcul des crues et des pointes, en fonction de la pluviosité, à
n'importe quel moment de l'année, et avec un certain nombre
de conditions de pluviosité, d'état des capacités de rétention,de nivosité, et de température, également fixées d'avance.
Ces calculs sont surtout utiles pour la prévision des hauteurs
limnimétriques.Si les données pluviométriques sont accompagnées de
quelques jaugeages épars en temps d'étiage et de crue, il
sera aisé, au moyen de différents graphiques, dont nous
avons dit quelques mots au chapitre du ruissellement, de
reconstruire le mécanisme de l'écoulement d'une année. Les
erreurs seront toujours retrouvées au cas où l'on aura estimé
le poids du module préalablement calculé.
4° Enfin, les divers débits calculés, par l'un des moyens
préconisés, serviront à construire la courbe de fréquence des
débits, de laquelle seront tirées les caractéristiques intéres¬
sant l'aménagement hydroélectrique de l'organisme : débit
de six mois, neuf mois, etc., pour chaque année séparémentou pour une moyenne d'années.
Cette dernière courbe peut être tracée avec l'aide de la
formule du coefficient d'irrégularité de M. Coutagne. En
Suisse, il est simple d'en calculer les ordonnées pour un grandnombre d'organismes à limnigrammes connus. Comme ce
coefficient varie peu d'une région à l'autre, la sécurité qu'ilapporte dans les projets doit en généraliser l'emploi. A notre
connaissance il n'a pas encore été mis à profit en Suisse.
5° Des quatre points qui précèdent résultent le coefficientd'écoulement vrai (moyenne d'un grand nombre d'années)et le coefficient d'écoulement apparent (une année), duquel on
peut partir pour le calcul des modules inconnus, dans une
certaine mesure au moins, par la comparaison de bassins
voisins connus.
Dans une région aussi compliquée que la Suisse au pointde vue orographique et climatique, les possibilités de calcul
des cinq points énumérés sont minimes. Il faut d'abord
LES DIVERS PROBLÈMES 219
abstraire toute idée de calcul d'ensemble. Ce n'est que par
une somme de débits partiels d'affluents que l'on arrivera
à déterminer les débits des fleuves. Puis la plupart de nos
rivières importantes traversent des lacs, qui, par une série de
phénomènes purement hydrauliques, viennent troubler sin¬
gulièrement la marche vers l'aval des ondulations, descen¬
dant des bassins de réception. Il faut donc se garder aussi
de chercher à établir des corrélations entre des hauteurs
limnimétriques de bassins très distants. Ainsi une comparai¬son entre les débits moyens annuels, année par année, du
Rhône à Genève et du Rhin à Râle, soulève une série de
problèmes de répartition pluviale qui ne sont pas négli¬geables.Le principe qui domine toute recherche hydrologique al¬
pine est de restreindre les calculs dans l'espace et dans le
temps.Une fois que la tactique de l'écoulement dans des bassins
simples est connue avec sécurité, il devient possible de passer
à des dispositifs hydrographiques complexes, où les facteurs
météorologiques fondamentaux varient entre eux, et enfin,à des régimes mixtes.
Les solutions des points 1 à 5, énumérés dans leur ordre
de complexité, nécessitent la mise en équation d'une série
de fonctions de facteurs, dont les lois sont malheureusement
fort mal connues, soit par défaut d'expériences, soit par dé¬
faut d'analyses. Ainsi, malgré toute l'insécurité des chiffres
que l'on possède sur les problèmes de l'évaporation, on peutestimer que cette partie est bien acquise à la science, en face
du problème non moins vaste des multiples capacités de
rétention.
Nous avons voué toute notre attention à détacher des quel¬
ques chiffres connus sur la capacité infrasuperficielle, une re¬
lation entre la rétention et l'infiltration, en tant que fonctions
de la pluviosité et de la température d'une année à l'autre,aux fins de résoudre le problème posé sous 1. Ceci fera l'objetdu chapitre suivant.
220 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Le point 2 trouve sa solution dans les méthodes appli¬
quées au point 3.
Pour chercher à résoudre sur un même schéma de base les
nombreuses questions que comporte le point 3 (crues, etc.),on peut s'y prendre de diverses manières : soit à l'aide de la
théorie du réservoir à deux fuites (évaporation nette et in¬
filtration), soit par les diverses méthodes de rétention pré¬conisées par Boussinesq, Bazin, A. Graefï [212], Curti [213],
etc., et par les équations différentielles d'Exner, appliquéesaux fleuves [214].
Mais dans l'idée de simplifier le problème et les calculs,
nous proposons une notion nouvelle : les moments d'infiltra¬tion, dont voici le principe :
Par les calculs basés sur les données de la belle série d'ex¬
périences d'Engler et les divers tableaux reproduits dans le
chapitre du ruissellement, nous avons vu que l'humidité,la porosité et par conséquent l'infiltration des sols, varient
suivant la pluviosité et l'époque de l'année, c'est-à-dire la
température moyenne. A supposer que les pertes nettes par
évaporation physiologique soient estimables avec une ap¬
proximation suffisante pendant des espaces de temps dé¬
terminés, soit au moyen des observations de la températureou l'un des procédés hydrologiques décrits, il ne reste comme
facteur inconnu, dans la question de l'infiltration, que l'état
du sol lui-même.
Or, l'état du sol règle l'écoulement. Dès lors, si l'on peutétablir une relation qui lie l'état du sol avec l'espace de
temps séparant des périodes pluvieuses, des averses, etc., à
n'importe quel moment de l'année, c'est-à-dire à n'importequelle température de l'air, on aura tous les éléments néces¬
saires au calcul de l'écoulement immédiat — la pointe de la
crue, par exemple — et de l'écoulement retardé ; en un mot,
tous les accidents de la courbe limnigraphique. Le problèmedans l'ensemble, sera résolu. Il suffira, à titre de contrôle,de posséder les hauteurs limnigraphiques de quelques phé¬nomènes hydrologiques, seulement, pour pouvoir établir les
LES DIVEBS PROBLEMES 221
constantes spécifiques des sols et construire la courbe limni-
graphique de toute l'année.
On se servira, pour cela, avec avantage, des valeurs li¬
mites maximum et minimum de l'écoulement, si elles sont
en coïncidence avec les valeurs climatiques limites d'humi¬
dité et de sécheresse.
Pour mettre en équation les phénomènes hydrologiquesselon l'idée ci-dessus, nous allons considérer la variation de
l'infiltration et de l'écoulement à l'intérieur du sol, à l'aide
des théories et des expériences récentes de Porchet [147].A tout instant, au bout d'un espace de temps déterminé,
les éléments qui entrent dans le mécanisme hydrologiquesont équilibrés par un bilan qui répond à l'équation suivante
que nous donnons par anticipation :*
P+I' = H + E+I (1)
où, pour ledit espace de temps, P est la hauteur de pluie me¬
surée, H la hauteur d'écoulement, E la hauteur d'évapora-tion, I la hauteur des infiltrations retenues, et, I' la hauteur
des infiltrations qui sont dans le sol, à l'instant zéro, début
de la période envisagée.Dérivons, par rapport au temps Ô, ce qui donne :
dH+
db~
db+
dd+
d<i[ '
dPOr, d'après les définitions antérieures, t^ = A, densité de
la pluie, -rr- est la vitesse d'écoulement qui donne immédiate-
dFment le débit, et que nous écrivons UQ, -jt
est l'indice
d'évaporation r, que nous considérons en tant que vitesse
d'évaporation viu : L'équation devient :
". = *— + $-£) <3>
1 Le bilan hydrologique s'écrit aussi Hm = P — E,où E comprend
l'évaporation nette et les infiltrations. P "
222 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
A est connu, /i„ est facilement calculable; reste donc, pour
fixer UQ, à voir comment se comportent les termes contenus
dans la parenthèse, qui sont les débits de l'infiltration et des
sources.
Considérons d'abord le problème d'une manière tout à
fait théorique et schématique, sans nous préoccuper préala¬blement de l'ensemble compliqué des nombreuses lois du
ruissellement discutées dans la première partie de notre tra¬
vail.
Considérons pour cela un bassin à substratum imperméa¬ble, recouvert par des terrains meubles divers et perméables,
d'épaisseurs variables, où les capacités de rétention intaris¬
sable, tarissable et infrasuperficielle soient actives.
Si la capacité intarissable est suffisamment petite par
rapport aux deux autres, elle peut être négligée. Nous ad¬
mettrons, en outre, que la capacité tarissable est formée d'un
matériau grossier morainique ou alluvial, recouvert d'un
matériau fin, de la terre végétale ou des sables.
Les nappes phréatiques se trouveront donc principalementdans les matériaux grossiers, reposant sur le substratum
imperméable, et c'est de ces terrains qu'émergeront la plu¬
part des sources tarissables, alimentées par les eaux d'infil¬
tration ayant filtré à travers des terrains sablonneux ou d'hu¬
mus de la capacité infrasuperficielle. C'est donc en dernière
analyse cette capacité infrasuperficielle qui règle le débit des
nappes aquifères des sources de la capacité tarissable, comme
évidemment le débit de ses propres sources.
Isolons dans la capacité infrasuperficielle un prisme cylin¬drique vertical de matériau, dit colonne filtrante, de section
horizontale s et dont la hauteur L, est comptée entre la
surface libre horizontale du sol et le plan horizontal de con¬
tact du matériau fin de la capacité infrasuperficielle avec le
matériau grossier de la capacité tarissable. On peut appliquerla loi de Darcy à ce prisme, à condition que sous le susdit
plan de contact, l'écoulement ne soit pas gêné. Admettons
momentanément cette hypothèse.
LES DIVERS PROBLEMES 223
On sait, d'après les études expérimentales de Porchet, quiont confirmé la théorie de Boussinesq et contredit certains
passages de la théorie de Dupuit, que toute l'eau imprégnanttotalement une colonne filtrante n'entre pas en mouvement,
lorsqu'il y a écoulement, et, qu'en outre, il reste toujoursdans les pores un certain volume d'eau capillaire, après la
fin de la filtration.
Cette loi capitale est exprimée ainsi : « Lorsqu'une nappe
liquide est en mouvement dans un sol homogène, le volume
du liquide en mouvement est dans un rapport u. avec le vo¬
lume apparent du sol mouillé par lui. Ce rapport y- est infé¬
rieur au rapport p du volume des vides géométriques du sol
au volume apparent du sol» [Réf. 147, p. 314].En outre, M. Porchet a énoncé aussi la seconde loi suivante :
« Lorsque le niveau du liquide s'abaisse au-dessous du som¬
met de la colonne filtrante, la charge se trouve diminuée
d'une quantité constante égale à la hauteur ç à laquelles'élèverait par capillarité de l'eau placée à la base inférieure
de la colonne » [Réf. 147, p. 312].De là découle la définition du coefficient de perméabilité
du terrain,
que l'on peut mesurer expérimentalement ainsi : On imprè¬gne complètement d'eau la colonne de hauteur L et de sec¬
tion s, puis on la laisse s'égoutter et l'on mesure ainsi un vo¬
lume V. Lorsque cet écoulement est terminé la colonne est en¬
core entièrement imprégnée d'eau sur une hauteur ; égaleprécisément à la hauteur capillaire £, qui fait l'objet de la
deuxième loi. L'eau écoulée provenait donc d'un volume
de terrain égal à s (L — ;).Nous convenons de généraliser cette définition aux cas
des terrains qui nous préoccupent dans la nature, et ferons
intervenir les actions thermiques et physiologiques.Expérimentalement, la valeur définie y est constante.
Mais si nous la généralisons en fixant V, elle va changer dans
224 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
la nature, en ce sens que la hauteur capillaire de laquelle elle
dépend n'est pas constante, suivant l'époque de l'année.
En effet, les eaux capillaires sont assimilables directement
à ce que l'on appelle grossièrement l'humidité du sol. Or,celle-ci varie en fonction directe de la température de l'air,tel que l'ont prouvé les mesures des forestiers (voir lre partie,chap. III, § 1, 4). En outre, l'humidité du sol varie aussi,
pour des raisons physiologiques. Partout le sol est recouvert
de végétation qui emprunte justement par les racines les
eaux capillaires nécessaires à son alimentation. Ces faits
sont traduits par l'évaporation physiologique.Dès lors, à supposer, qu'après une série de fortes pluies
ayant entièrement imprégné le terrain, le prisme de terre
considéré ait égoutté un volume V, vers la nappe aquifèrede la capacité tarissable, le coefficient de perméabilité du
prisme sera exactement égal à }>., à cette condition, toutefois,
que la hauteur capillaire £ soit égale à \0. Car nous convien¬
drons d'appeler état critique, l'état général du sol à ce mo¬
ment-là, état qui sera distingué par les indices o appliquésà V et à ?, soit V0 et £0, dans l'expression algébrique de p.
Le volume V0 est donc une valeur spécifique, propre à cha¬
que sol, mais non suffisante pour définir l'état physique du
sol qui nécessite encore la connaissance de la hauteur capil¬laire £0, du coefficient de filtration de Darcy K et la porosité p.
Elargissons, comme convenu, la définition du coefficient de
perméabilité \l en faisant V = V0 = constante. Alors \>.
sera fonction directe de £, la hauteur capillaire. Montrons que
cette définition est plausible :
Soit, selon le processus ci-dessus, une précipitation ayantentièrement imprégné la colonne filtrante supposée parfaite¬ment sèche avant la pluie. Soit Vi, la valeur de cette précipi¬tation infiltrée et exactement contenue dans le prisme,on a :
V0 = \i — Vr (5)
où, Vr est le volume d'eau restant dans la colonne, après
LES DIVERS PROBLÈMES 225
qu'elle se soit égouttée. En remplaçant les volumes par leurs
valeurs, l'expression 5) devient :
p(L— ?) = ?Ls— Vr, (6)soit :
Vr=*L(p —ja) + («Ç (7)
où s L est le volume du prisme qui reste constant, s £, de mêmeun volume constant, p la porosité également constante. Le
volume Vr d'eau capillaire est donc directement fonction
de «..
Si, dans l'équation 5, on fait V0 constant, la charge ca-
Vr
pillaire qui vaut — variera en raison directe de l'infiltration,
c'est-à-dire de la pluviosité. Ces relations se détermineraient
rigoureusement par des considérations de vitesse d'infiltra¬
tion dans le sol à l'aide de la loi de Darcy.Comme la capillarité varie avec le temps 6, selon la tem¬
pérature T et la saison T, on est en droit d'écrire en abrégé,à la fin d'un espace de temps égal à 6 :
Vr=/» = /2([vT,T,Ô) ' (8)
où f-o0 sera un état initial au temps zéro, origine, et où T
et T seront liés à 6. Mais, pendant qu'il pleut, la hauteur de
charge varie aussi ; par conséquent, pour envisager le phé¬nomène complètement, il faut encore introduire A, dans
l'expression du coefficient de perméabilité, tel que nous l'a¬
vons choisi, quitte à rendre A égal à zéro, dans les périodessèches. On aura ainsi, d'une manière générale,
2 à l'instant
6j, compté dès 0 = o :
•o,_
f»e,_
(*bx
^ = hi fio0,7r-Lir\Td9
1 On peut nous critiquer cette manière symbolique de représenter le
phénomène, car il est en réalité beaucoup plus compliqué qu'à primeabord. Cette relation ne peut se résoudre que par les courbes intégrales,mais nous ne pouvons pas entrer ici dans plus de détails.
2 En réalité pg ,à l'instant 0( est fonction de la quantité (/.g ,
et de la varia-
LUGEON 15
226 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
ou, par convention, pour simplifier les écritures :
^= V-oo)^'T^^) (10>
Pour rendre plus suggestif le mécanisme complexe de
l'état physique du sol, dans la nature, nous conviendrons
de définir que cet état du sol à un instant donné ftu est re¬
présenté par l'inverse du coefficient de perméabilité jj-, tel
que nous l'avons envisagé, à cet instant 6j. Nous appelleronscette grandeur, le moment d'infiltration M>.
Y' vo
Or, la valeur [/. est déterminée pour des valeurs fixées des
variables de l'équation 10), ce qui revient à écrire :
1
(9i—l'o)
ou encore, puisque s, L, V0 sont des constantes :
L = /„ (|* , T, T, A) (13)
c'est-à-dire que le moment d'infiltration, qui est un chiffre
abstrait, peut pratiquement être mesuré à l'aide d'une lon¬
gueur, puisque \ est par définition, une hauteur de charge,exprimée par une longueur.En résumé, le moment d'infiltration à un instant 61? quel¬
conque, est dépendant du coefficient de perméabilité selon
nous, à un instant 0o, de la variation de la température T,de la variation d'une quantité T dépendante de l'époque de
tion des T, T et A, dans l'espace de temps 6,—)0- C'est pour simplifierle problème que nous avons remplacé l'effet de ces variations par leur
valeur moyenne. A un instant quelconque, la variation de (/. est :
1 En effet pour \ = L, le moment est nul, c'est-à-dire que le sol est saturé,et pour \ = lo, le moment est maximum (voir la discussion qui suit).
./ rfT dT 5A\
LES DIVERS PROBLEMES 227
l'année, et de la densité des précipitations pendant l'espacede temps compris entre les temps G, et, 0o pris comme origine.Pour appliquer ces notions à la pratique, nous simplifie¬
rons le problème en employant une équation simplifiée du
moment d'infiltration au début et à la fin de chaque inter¬
valle compris entre deux chutes de pluie successives, tout en
restant dans des conditions de calcul suffisamment rappro¬
chées des conditions théoriques. Ainsi, nous dirons que le
moment d'infiltration à l'instant où le sol est surpris par la
première goutte de pluie, est proportionnel au moment
d'infiltration '
*0 après la dernière goutte de pluie de la
chute précédente, à un coefficient T, dépendant de l'époque a.
de l'année, c'est-à-dire du stade de la végétation, soit Ta, et
est fonction de la température moyenne de l'air T de la
période de sécheresse écoulée ; ce qui s'écrit :
A la fin 62 de la pluie, le moment sera évidemment, par
analogie :
*et = '%^/T(î0et-e1/»(A)e1-oi (15)
A la fin 03 de la seconde période de la sécheresse, à l'époquede l'année (i :
et ainsi de suite.
Si sur un axe des temps 9, on reporte en ordonnées, dans le
quadrant inférieur, les valeurs successives de «Ib, on verra
que la courbe obtenue suit d'assez près la forme de la courbe
du limnigraphe (fig. 23). Toutefois, les ordonnées de cette
première courbe ne sauraient donner les valeurs vraies des
débits, à supposer que les évaporations soient connues (for¬mule I). Car les équations des Jll> ne contiennent pas les lois
d'écoulement des sources, en fonction des quantités infiltrées,ni les lois de l'infiltration en fonction de A.
1 Formule 12.
228 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Discutons la formule du moment, tel que nous l'avons
défini par la relation 11 :
.lb = i=
lLL=I>(11)
où V0, toutes choses égales d'ailleurs, serait considéré comme
constant. \ est la charge. Dès que cette charge est dans la posi¬tion critique £0, c'est-à-dire telle que toute charge nouvelle
aussi petite soit-elle, provoque un écoulement dans le sol,
nous dirons que le coefficient <j. est à l'état critique \j.0, ou, res¬
pectivement, le moment d'infiltration Ah, est à l'état critique
Âh0. Si 'i < ç0, alors ,u. < \>-0, soit le moment, à\> > Mo0, ce quirevient à dire qu'il faut qu'une certaine quantité d'eau soit
restituée au sol pour y provoquer un écoulement intérieur.
Cette quantité à restituer augmentera évidemment, au fur
et à mesure que ç diminuera, c'est-à-dire en raison directe
du temps 0 qui s'est écoulé depuis la dernière fois qu'il y a eu
écoulement dans le sol de la capacité infrasuperficielle. Pour
£ = o, le sol est desséché et le moment Jfc est maximum.
L'équation du moment étant une hyperbole équilatère, ce
maximum ne se retrouvera bien qu'une fois, ce qui est con¬
forme à l'hypothèse.Si, au contraire, ç > c0, alors il y a écoulement vers les
couches profondes du sol. Cet écoulement suit la loi de Darcy,
et son débit est égal à K -
> s, et la quantité d'eau écoulée
dans l'intervalle de temps dd, est K —y-^- s d<). 1
On voit immédiatement, que pour que ? soit plus grand
que i0, il faut qu'il y ait plu, et qu'avant que la pluie ait
1 Pendant ce même intervalle de temps la hauteur a varié de —d£ et
la quantité d'eau écoulée est —\>.sd£,. On a, en égalant ces deux valeurs:
ç t
K —;— dft = — [*c$j et en intégrant, en remarquant que \ = L, pour 0 = 0:
— = L— î + ïoLog —.
F- 5 — ç0
qui est la loi de l'approvisionnement des sources profondes de la capacitétarissable. Nous l'appelons loi de Darcy-Porchet.
LES DIVERS PROBLÈMES 229
atteint une hauteur proportionnelle à la différence positive£ — £0, il ne s'écoulera pas d'eau vers les sources, ni en sur¬
face vers le cours d'eau. Cette quantité de pluie qui va «pré¬
parer » le sol est donc essentiellement variable suivant que
la précipitation succède à une période humide ou sèche, c'est-
à-dire que le moment est rapproché ou éloigné qualitative¬ment de l'état critique. Dès l'instant où la hauteur de pluieaura atteint la valeur L, c'est-à-dire que la hauteur de
charge £ sera égale à la profondeur du sol L considéré jus¬qu'à son fond d'écoulement, la pluie commencera alors à
ruisseler sur la surface du sol lui-même et le moment sera
égal à zéro. Ce ruissellement à l'air libre sera réglé d'une part
par la densité des précipitations, c'est-à-dire leur débit, d'au¬
tre part par le débit de l'infiltration que donne la loi de
Darcy-Porchet.Il est clair, également, que si, pour une valeur de jj. quel¬
conque, le débit de la pluie A est plus grand que le débit de
l'infiltration, l'eau va derechef s'écouler superficiellementvers le lit. Ces conditions sont remplies dans la nature beau¬
coup plus fréquemment qu'on ne le pense, même au gros de
l'été, où le sol est pourtant avide d'eau. Si le sol est parfai¬tement saturé, c'est-à-dire que le moment est zéro, le débit
du cours d'eau suivra directement, en théorie, le débit A
des précipitations, évaporation déduite, bien entendu ; car
l'écoulement souterrain ne sera qu'une dérivation des eaux
météoriques, par la voie : zone d'infiltration — nappes—
sources, qui débite à la sortie la même quantité qu'elle a reçu
à l'entrée par l'infiltration. Après que la pluie ait cessé — à
l'entrée du ruissellement retardé — tout écoulement sur le sol
cesse rapidement, c'est une simple question de vitesse et
de pente. Par contre, les sources de la capacité tarissable
rendent l'eau emmagasinée dans leurs nappes alimentaires,d'abord selon la loi de Darcy-Porchet, puis, dès l'instant où
\ = ç0, c'est-à-dire dès que le volume spécifique V0 est
égoutté de la capacité infrasuperficielle : selon la loi de
230 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Maillet,'en fonction de leur volume, et de leurs coefficients
de tarissement. Cette restitution des eaux pluviales pen¬
dant la phase de l'écoulement que nous avons appelé ruissel¬
lement retardé, est donc aussi a posteriori fonction de A et
de la durée de la pluie.En résumé, la méthode des moments d'infiltration est
destinée à construire une courbe auxiliaire, dont les coor¬
données des points d'inflexion ont une signification précise(fig. 23). La courbe des débits se déduit de cette courbe
auxiliaire, en appliquant à chacun des points d'inflexion
caractéristiques, les équations qui traduisent les lois connues
de l'infiltration et de l'écoulement des nappes aquifères.
Pratiquement, on s'apercevra que la courbe auxiliaire ré¬
pond souvent avec assez d'exactitude à la courbe des débits
du limnigraphe, sans qu'il soit nécessaire de dessiner cette
dernière. On se contentera d'appliquer les équations des mo¬
ments d'infiltration à des valeurs moyennes des divers élé¬
ments. Plus les espaces de temps seront petits, plus les phé¬nomènes seront détaillés.
On peut nous objecter que toute cette représentationanalytique est théorique et n'est qu'un cas particulier ;
qu'en outre, la détermination des évaporations nettes quidoit être faite à part, est sujette à des erreurs. Des essais nous
ont prouvé que la théorie peut parfaitement se généraliserà l'ensemble des terrains d'un grand bassin. Il ne s'agit que
d'envisager les diverses grandeurs qui entrent dans la for¬
mule, comme des grandeurs moyennes. Ainsi les dimensions
du prisme élémentaire considéré, deviendront : s, la surface
du bassin recouverte de végétation et L, V0' et E0, des coeffi¬
cients spécifiques fixes, que l'on prendra comme valeurs
moyennes d'une série d'essais faits sur des bassins dont on
possède l'écoulement. Les valeurs de T, varieraient, par exem¬
ple pour chaque mois, et seraient en rapport avec les divers
pour cent de végétation arborescente, forestière, champêtre,composant la surface totale du bassin. Il n'y a pas d'incon-
' Voir première partie, page 156.
LES DIVERS PROBLÈMES 231
vénient à ce que l'on s'arrange à déterminer la fonction T, de
sorte qu'elle donne aussi les évaporations nettes, par l'intro¬
duction d'une observation supplémentaire, comme le déficit
hygrométrique de l'air, par exemple. L'évaporation serait
ainsi incorporée dans le terme infiltration I de la formule
générale 1, rappelée au début de ce paragraphe ; et le cycledes précipitations serait renfermé complètement dans la
formule du moment d'infiltration.
A la figure 23, nous avons donné un aperçu schématiquede l'application de la théorie du moment d'infiltration. Sur
chacun des systèmes d'axes (9T), (9T), (9, A, P), sont reportées
1 Voir première partie.
232 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
les diverses variables de la fonction
^=*6o7-./T(T)ei_Po./a(A)Q2_vqui en se combinant donnent la courbe auxiliaire de M>, cons¬
truite sur les axes (Gjb). De cette courbe on calcule la
courbe des écoulements (ÔQ), à des intervalles de temps
G,, G2, etc. Au bas du dessin figure le résumé des calculs, soit
le bilan au début et à la fin de chaque précipitation.Il sera facile d'imaginer des méthodes graphiques pour
résoudre les diverses équations qui entrent dans le méca¬
nisme hydrologique de l'écoulement.
Par une série de diagrammes préparés d'avance et répon¬dant à toutes les combinaisons de pluviosité, de températureet d'infiltration possibles dans la nature, on pourra ainsi
prévoir dans quelles conditions les catastrophes se produi¬ront. Notons que les erreurs commises dans les calculs de
l'évaporation physiologique peuvent être assez élevées sans
fausser de beaucoup les résultats. C'est un avantage précieux,car l'évaporation immédiate est bien ici le terme le plus diffi¬
cile à évaluer.
Nous n'entrerons pas dans d'autres détails et laisse¬
rons de côté aussi, le cas où la précipitation est neigeuse.Cette idée du moment d'infiltration représente à elle seule
le plus vaste des chapitres de l'hydrologie dynamique, et
son développement ne saurait trouver davantage place ici.
L'examen très attentif de nombreuses courbes limnigra-phiques du Service fédéral des Eaux, sur lesquelles furent
reportées les précipitations, nous a prouvé qu'il n'y a pas de
difficulté à trouver les vraies valeurs des moments. En outre,
on reconnaît que les capacités infrasuperficielles et tarissa-
bles sont si grandes, en face de la capacité intarissable, que
cette dernière peut pendant des périodes de plusieurs mois
être considérée comme constante, ce qui facilite singulière¬ment les calculs de détail. Un des points faibles de la méthode
est l'évaluation des moments initiaux. Il faut pour cela,en effet, posséder des données sur la porosité globale des
LES DIVERS PROBLÈMES 233
terres et la perméabilité du matériau meuble qui recouvre
le substratum, données qui se trouvent résumées en partiedans les diverses tables du chap. III, § 1, 4, lre partie.
*
+ *
Nous commettrions un oubli au sujet de l'application pra¬
tique de cette méthode, en ne touchant pas un mot de l'inté¬
rêt primordial qu'il y aurait à faire étudier en détail, par une
des divisions du Département de l'Intérieur, les capacitésde rétention d'un certain nombre de bassins judicieusementdisséminés. De plus, si l'on veut une fois pouvoir organiserun service d'avertissements de variations limnimétriques, il
est indispensable de créer quelques postes d'observations
continues de l'humidité des sols, postes qui surveilleraient
également les émissaires des capacités tarissables : sources
superficielles, et des capacités intarissables : sources pro¬
fondes ; c'est-à-dire un nombre déterminé de sources étalon.
Nous croyons fermement, malgré les innombrables difficultés
financières, techniques et scientifiques que l'on rencontre¬
rait, qu'un service de ce genre s'impose, et qu'il est appeléà une rentabilité excellente. Il y serait rédigé journellementun bulletin précis sur l'état des réserves souterraines, ser¬
vant à renseigner sur la dépense limite des eaux accumulées
en temps de grande sécheresse, sur les moments d'infiltration,sur les limites maxima, minima et moyennes des écoulements
probables pour les pluies futures d'un mois, par exemple,et par un service accéléré, il en émanerait la prévision des
maxima de crue. Enfin, pour les nombreuses exigences de la
conjugaison à grande distance sans accumulation, où en
temps d'étiage les moindres pertes doivent être évitées, ce
même service renseignerait sur le passage des ondes d'écou¬
lement dues aux plus petites précipitations.Dans la plupart des pays où la navigation fluviale joue un
rôle important, des services de ce genre existent depuis nom¬
bre d'années, ainsi en France, en Allemagne, en Autriche, en
234 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Tchécoslovaquie, en Italie, en Pologne, etc. Toutefois, ils
ne procèdent pas, à notre connaissance, d'une manière aussi
détaillée et ne sont d'ailleurs pas équipés pour cela. Mais dans
un pays montagneux où l'hydroélectricité est appelée à
devenir une des richesses nationales, où il y a intérêt à ne pas
gaspiller la pluie, l'hydrologie officielle doit être pousséeinsensiblement vers ces recherches nouvelles.
2. Le module des bassins du type préalpin.
Afin de donner un premier résultat pratique à ce travail,nous allons exposer en détail la méthode suivie pour trouver
la solution du problème qui offre le plus d'intérêt technique :
le calcul du module d'écoulement.
Avant de chercher à calculer toute corrélation entre les
précipitations et les écoulements d'une année, on doit classer
par ordre d'importance les nombreux facteurs qui intervien¬
nent dans les calculs, et connaître l'importance de chacun
d'eux, en vue d'éliminer les complications.
3. Élimination des facteurs et des erreurs d'estimation.
La détermination du module suppose, soit le calcul du
module moyen d'un grand nombre d'années, c'est-à-dire
la moyenne absolue du module pluviométrique moins la
moyenne absolue de l'évaporation, soit le calcul direct des
modules pour chaque année séparément.Le premier des problèmes est relativement simple à ré¬
soudre. Il a été traité par les auteurs cités. Dernièrement un
ingénieur allemand, M. Drenkhan [215], a élaboré une mé¬
thode empirique qui semble s'adapter aux cours d'eau du
genre fluvial de l'Allemagne du sud. Toute intéressante
qu'elle apparaisse, cette méthode est d'une précision assez
limitée et ne s'adapte qu'au calcul du module moyen.
ÉLIMI1SATION DES ERRELRS d'eSTIMATION 233
On sait que plus le nombre des années d'observations plu-viométriques augmente, plus sont exacts les calculs des
moyennes et plus devient rigoureuse aussi l'application de
la formule H = P — E. C'est une conséquence de la loi
des grands nombres. Car les facteurs secondaires qui agissenttemporairement s'effacent. Pour arriver à une estimation
d'un poids de 2 % dans l'application de la formule hydrolo¬gique simple, environ cinquante années d'observations con¬
tinues sont nécessaires.
Ce que l'on cherche surtout à connaître dans les projetsd'installations hydroélectriques, ce sont moins des moyennes
que des chiffres, qualifiables d'instantanés, et qui, année
après année, peuvent être facilement comparés avec les don¬
nées d'installations existantes. Autrement dit, c'est le se¬
cond problème qui est important, et dont la solution exacte
n'est possible dans l'état actuel de nos connaissances que par
une application raisonnée du calcul des erreurs. On ne peut
partir évidemment que d'une base expérimentale, toute
spéculation théorique doit être vérifiée. Une fois les équationsde corrélation trouvées sur cette base, il faudra démontrer
qu'elles s'appliquent à d'autres organismes. On cherchera
ensuite les coefficients qui sont propres à un ensemble de
régions de caractère climatique et météorologique différents.
Les facteurs principaux supposés connus, qui entrent
comme données dans la formule H = P — E, pour une
année, sont :
1. Le module pluviométrique annuel.
2. La répartition mensuelle des précipitations, la précipi¬tation estivale.
3. L'indice de nivosité, les dates de la première et de la
dernière neige dans le bassin.
4. La densité moyenne estivale et annuelle des précipi¬tations.
5. La température moyenne mensuelle et moyenne estivale
des maxima de température.
236 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
6. Les déficits hygrométriques moyens mensuels et
moyens estivaux.
7. Les infiltrations, soit les quatre capacités de rétention.
De là se calculent les termes inconnus, les diverses évapo-rations, et enfin, par soustraction, le module d'écoulement.
Dans le temps, la courbe de régime d'un cours d'eau préal¬pin a sensiblement la forme sinusoïdale. Pour éliminer le
mieux possible les défectuosités de la forme, provenant pré¬cisément de la variabilité des facteurs, on choisira comme
date de départ des calculs l'endroit de la courbe de régimequi, chaque année, se rapproche le plus possible de celui de
l'année antérieure et qui, en même temps, est le débit mi¬
nimum ; on fait appel à l'année hydrologique.Pour trouver les corrélations rigoureuses entre les facteurs
I à 7, il faudrait disposer d'un nombre d'années d'observa¬
tions considérables. (1 ! X 2 ! X 3 ! X 4 ! X 5 ! X 6 ! X 7 !).Or, on ne dispose toujours que d'un matériel très restreintrencore que la précision des observations soit mal connue.
II est heureusement un artifice qui permet de pourvoir au
défaut des chiffres, et qui consiste à choisir par tâtonnement
une série continue d'observations, dont la moyenne arithmé¬
tique pour chacun des facteurs est rigoureusement exacte.
Ceci est une condition nécessaire et suffisante. Les formules
que nous avons rappelées au chap. I, § 1, 7, donnent rapide¬ment ce résultat. Les corrélations trouvées ne seront pas né¬
cessairement identiques pour une période de même durée,décalée très loin en arrière. Mais l'écart sera fort probable¬ment si petit, qu'il s'efface même devant les erreurs systé¬matiques corrigées, de la période de base. Nous touchons
d'ailleurs ici à une question délicate, devant laquelle nous
nous abstenons, car elle dépend de la constance générale du
climat.
En résumé, on s'apercevra, en développant les calculs,tel que nous le verrons plus loin, que les facteurs 2, 4, 6 et
partiellement 5 et 7, sont éliminables, sans que le degré de
précision final en souffre.
ANNEE HYDROLOGIQUE 237
4. Année hydrologique.
L'introduction de l'année hydrologique qui remplace l'an¬
née civile, est indispensable pour éliminer certains facteurs.
Le décalage de cette année conventionnelle sur l'année astro¬
nomique, varie évidemment suivant la variation moyenne
annuelle des éléments à éliminer et suivant le climat.
On a intérêt, avant tout, à placer la date du premier jourau moment des étiages, si ceux-ci coïncident avec les mi-
nima des rétentions des diverses capacités, et les minima
des réserves de précipitations solides, qui chevauchent d'une
année sur l'autre.
Pour les cours d'eau préalpins la date initiale la plus pro¬
pice semble être au voisinage du 10 octobre. Si à ce moment-
là les étiages ne sont pas encore atteints — c'est générale¬ment un peu plus tard, vers le début de novembre — la
courbe annuelle des précipitations y passe au moins par un
minimum. Les moments d'infiltration pour la capacité infra-
superficielle sont donc, par rapport aux mois précédents et
suivants, également dans une position propice.En outre, la courbe de variation de la limite inférieure
des neiges, nous montre que jusqu'à des altitudes de 2400 m.,
il n'y a pas de réserve solide, de juin à septembre. La pre¬
mière chute de neige d'octobre peut, au point de vue effet
sur l'écoulement, être prise pour de la pluie, car même jus¬qu'en novembre, la neige nouvelle se retire fréquemmentau-dessus de 3000 m. L'action du facteur nivosité, sur le
ruissellement immédiat, c'est-à-dire sur la part du débit
des eaux provenant essentiellement des pluies tombées dans
la période estivale est donc éliminé. Mais il est évident qu'ilsubsiste quant au débit total écoulé, composé de l'apportdes sources plus celui des précipitations.
D'autres raisons encore incitent à placer le début de l'an¬
née hydrologique en octobre, comme le fait que la plupartdes totalisateurs sont relevés vers la fin septembre. Les er-
238 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
reurs commises dans les extrapolations si délicates des pré¬
cipitations mesurées par ces appareils, sont donc réduites
au minimum.
Pour éviter de morceler la somme mensuelle des précipi¬tations d'octobre, nous fixons l'année hydrologique du
1er octobre au 30 septembre, pour les cours d'eau préalpins.
5. Le bilan annuel.
D'une manière simple, et sans faire appel aux équationsdifférentielles, on peut traiter le problème du module pour
une année, au moyen d'un bilan. M. Coutagne [64, 65] l'a
écrit comme ci-dessous :
Tab. 24
M. Coutagne [64].
Passif
Apports de la période ac¬
tuelle :
a) Précipitations aqueuseset neigeuses P
C
0'
Actif
Ecoulement de la périodeactuelle H
E
0
Évaporation de la période
Apports de la période ac¬
tuelle à la période sui¬
vante :
d) Neiges et glaciers (N)j
b) Précipitations occultes
Apports de la période pré¬cédente :
c') Infiltration (F) 1
d') Neiges et glaciers (N)j
P + C + 0' = H + E + 0
Mais cette forme est encore trop compliquée. On sait queles précipitations occultes C, sont sinon indéterminables, du
moins mal connues. Elles peuvent être grandes ou petitesen présence de P, suivant les régions. Pour l'élaboration de
la formule générale du bilan, nous incorporons le terme C
dans le terme E. Ce point a été discuté, et, physiquementparlant, il est parfaitement rationnel dans les Alpes. En ou-
LE MATÉRIEL EN 1926 239
tre, le bilan de M. Coutagne supporte quelques simplifica¬tions pour les cours d'eau préalpins, dans le cas de l'année
hydrologique rapportée au 1er octobre. Nous l'écrirons ainsi :
Tab. 25
Passif
(Recettes)
Apports de la période ac¬
tuelle :
a) Précipitations aqueuses
et neigeuses
Apports de la période pré¬cédente :
Infiltration
p
r
Actif
(Dépenses)
Ecoulement de la période
Evaporation de la périodeactuelle diminuée du
passif des précipitations
Apports de la période ac¬
tuelle à la suivante.
Infiltration
(neige = zéro)
H
E
I
(neige = zéro)
p + r = H + E + I
La formule générale du module pour une année s'écrit
donc :
H= P — E + (F— I)
Dans le paragraphe suivant nous verrons comment se cal¬
culent les facteurs annuels ou moyens annuels E, I et I',en fonction de P, v (nivosité) et T (température). Pour le
H moyen d'un très grand nombre d'années, on retrouve la
formule simple H = P — E, car 1=1' rigoureusement.
6. Le matériel disponible en Suisse au début de l'an'
née 1926.
Les pays limitrophes, la France, l'Allemagne et l'Autriche,sont beaucoup plus riches que la Suisse en années d'enre¬
gistrement limnigraphique continu d'un grand nombre de
cours d'eau. Il est vrai que les surfaces y sont plus vastes.
Ce que l'on gagne dans les calculs de moyenne, en utili-
240 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
sant ces chiffres, on le perd en précision sur ceux de notre
pays, pour le calcul des modules instantanés, car les
rapports pluvionivotopographiques sont plus élevés en
Suisse.
Pour l'élaboration de la formule hydrologique, il n'y a
donc pas intérêt à puiser autre part qu'aux deux sources
suivantes : pour les précipitations et températures, aux
Ergehnisse der tàglischen Niederschlagsmessungen, que publiechaque année YInstitut central météorologique, ainsi qu'à ses
Annales, pour les écoulements, à YAnnuaire hydrographiquede la Suisse, publié par le Service des Eaux du Départementfédéral de l'Intérieur.
En feuilletant ces documents depuis leur origine, on est un
peu déconcerté de ne trouver qu'un nombre très restreint de
séries continues d'enregistrement de cours d'eau préalpinstypes, qui remplissent toutes les conditions hydrographiques,pluviométriques et météorologiques exigées pour obtenir un
maximum de précision dans la formule. Ou bien les débits
moyens mensuels ne sont publiés régulièrement que depuisquelques années ; ou bien on ne trouve que des hauteurs
limnimétriques sans la courbe limnimétrique des débits,sans les coefficients de la passe, sans compter des interrup¬tions et des ripages d'appareils, etc., si bien qu'en définitive
deux seuls organismes offrent les garanties désirables : la
Sihl et la Sitter. Encore que pour cette dernière les « Surfaces »
ne sont pas publiées au moment où nous écrivons. En prin¬cipe, un cours d'eau suffit pour faire une étude approfondie,car dans leurs grandes lignes les lois fondamentales se répè¬tent en Europe centrale. Il n'y a que certaines constantes
orographiques, qui changent d'un bassin à l'autre.
RECHERCHE DU MÉCANISME HYDROLOGIQUE GÉNÉRAL 241
§ II. Recherches des fonctions préliminaires de la formule
hydrologique générale pour les bassins préalpins.
1. Définition.
On entend par formule hydrologique générale, celle quipermet de calculer n'importe quel phénomène hydrologique,dans n'importe quel espace de temps, et pour n'importequelle surface. Cette définition suppose un certain nombre
de restrictions, parce qu'il n'y a pas un intérêt majeur à ne
construire qu'une formule qui réunisse l'ensemble compliquédes lois hydrologiques. Il faudrait pour arriver à ce résultat,
développer très en détail la théorie des moments d'infiltra¬
tion que nous avons esquissée plus haut. Et encore se four-
voirait-on dans un domaine que l'intelligence mathématiqueaurait de la peine à défricher. Tel n'est pas notre but.
Nous baptisons du nom de formule hydrologique, la rela¬
tion algébrique ou géométrique qui permet de calculer le
module d'écoulement d'une année hydrologique, en fonction
des précipitations liquides et solides, de la température et
de quelques autres facteurs, comme le vent et la nature
géologique du réseau hydrographique.
2. La recherche des fonctions indépendantes du méca¬
nisme hydrologique général.
Existe-t-il réellement des fonctions à variables indépen¬dantes dans la nature des phénomènes qui nous occupent ?
Sans hésiter, on peut assurément répondre non, et c'est re¬
grettable. Au point de vue application des mathématiques,les problèmes seraient bien facilités si deux seulement des
facteurs principaux échappaient à l'ensemble. Nous verrons
que l'on est partout obligé d'isoler de leur parenté certains
facteurs, au moyen d'additions ou de soustractions, à moins
LUGEON 16
242 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
de s'enliser dans d'interminables calculs, si on les traitait,comme cela devrait être, au moyen de multiplications et
de divisions.
Dans nos études sur les diverses formes de l'évaporation,nous avons essayé, sans succès, toutes les combinaisons de
chiffres possibles avec les précipitations, pour éviter d'intro¬
duire dans la formule le facteur température.On a donc si : P = module pluviométrique, Pé = précipi¬
tation estivale (5 mois, de mai à septembre), v = indice de
P*nivosité = r— (P* = précipitation neigeuse, P. = précipita¬
tion totale, pluie et neige), A = densité annuelle de P, Aé
= densité estivale de P, T et Tm = les températures estiva¬
les moyenne et moyenne des maxima, Y = déficit hygro¬métrique moyen estival, I1} I2, I3, I4 = les quatre capacitésde rétention, H = module d'écoulement.
H = P-/(P,P<?,v,A,Aé,T,Tm,Y,I1,I2,I3,I4),
que nous écrirons plus simplement :
H=P-/(P,T,v,I),c'est-à-dire :
Ep = /(P,T,v,I),
où ES est la perte brute, comprenant la perte nette évapora-tion physiologique et physique, et les réserves.
H étant supposé connu avec exactitude, nous en sommes
conduits à résoudre un système de fonctions à quatre va¬
riables principales. Pour trouver EB, on pourrait réduire ce
système à un certain nombre d'équations et appliquer la
méthode simple des déterminants. Mais ce mode ne permet
que difficilement d'introduire les constantes d'infiltration,qui sont chaque fois différentes suivant les bassins. Il est
donc préférable de délier E et grouper les facteurs principauxdeux à deux, en fonctions « pseudo-indépendantes ».
RECHERCHE DU MÉCANISME HYDROIOGIQUE GÉNÉRAL 243
On trouve qu'il est possible et rationnel d'écrire :
^hydrologique
= A ( ") a) >
Ephysique =/? (P) b),
^physiologique= /?'(") c) >
en outre, en faisant: EfJ = E + (F—I), d'après l'équationgénérale établie au paragraphe précédent, à l'occasion du
bilan'°na:E( = /((ï) d),Ev = /v(v) e),i' =/T(T) /;,i =/p(P) g).
Nous verrons plus loin de quelle manière on reconstruit
la fonction générale au moyen de ces fonctions préliminairesqui sont évidentes, car nous avons vu précédemment que :
a) est la base du problème, soit la définition,b) existe, comme nous allons le voir ci-dessous,c) est évident comme condition d'existence des végétaux,d) n'est autre que la combinaison de c et & en introduisant
la formule de l'indice d'évaporation (chap. III, § II, 2),e) est la loi que nous avons trouvée en discutant les
chiffres des expériences d'Engler : plus il tombe de neige,moins il s'évapore d'eau (chap. III, § I, 3, cas n° 3).
f) est la loi découverte par les forestiers : l'infiltration
diminue en raison inverse de la température et la porositéaugmente avec la température (chap. III, § I, 4),
g) est la loi également mise en évidence par les forestiers :
plus il tombe d'eau, plus l'humidité du sol augmente, etc.
(chap. III, § I, 4).
Il était naturel de chercher à résoudre le problème en
partant de la fonction b : évaporation physique et pluviosité,car il y a en effet bien des chances d'homologie entre celle-ci
et l'évaporation hydrologique, soit à altitude constante, soit
en fonction de l'altitude. Nous avons pour cela utilisé la
belle série de mesures de l'évaporation de l'eau à l'air libre,faites à Montcherand.
244 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Mais, en cours de route, nous nous sommes aperçu que
c'était une erreur d'appliquer ces résultats aux cours d'eau.
Pour éviter de retomber dans ces raisonnements faux, voici
le bref résumé de nos constatations.
Discussion des éléments du problème :1
On veut calculer l'évaporation hydrologique sur la base de
l'évaporation physique connue.
1° On connaît la variation, suivant l'altitude, de l'évapo¬ration physique moyenne pour un grand nombre d'années.
2° On constate que pour la moyenne d'un grand nombre
•d'années, l'allure de la courbe d'évaporation hydrologiquesuivant l'altitude est la même que celle de l'évaporationphysique.
3° Appelons année normale, celle qui correspond exacte¬
ment à la moyenne des éléments d'un grand nombre d'an¬
nées, soit pour la pluviosité, soit pour l'évaporation.4° Pour une année normale, on fait l'hypothèse que l'éva¬
poration hydrologique, à un facteur constant près, est égaleà l'évaporation physique.
5° On a observé en une station, donc à l'altitude con¬
stante, que l'évaporation physique varie autour de la nor¬
male, dans le sens inverse du module pluviométrique. Plus
il pleut, moins l'évaporation physique est grande, moins il
pleut, plus elle est intense. L'amplitude de ces oscillations
autour de la normale est sensiblement proportionnelle en %de la normale, à la variation de la pluviosité, également en %de sa normale. Ces oscillations sont parfaitement sinusoïda¬
les, si la pluviosité se répartit également entre tous les mois
de l'année. La déformation des sinusoïdes est donc en corré¬
lation avec le coefficient pluviométrique.6° Plus on s'élève en altitude, moins sont prononcées les
oscillations de l'évaporation physique autour de la normale.
En s'aplatissant de plus en plus elles tendent vers zéro et
Tout ce qui suit concerne l'année civile.
RECHERCHE DU MÉCANISME HYDROLOGIQUE GENERAL 245
l'enveloppe qui passe par leur maximum est rapidementasymptotique à la normale. x
7° On constate pour les cours d'eau suisses que l'évapora¬tion hydrologique varie sensiblement en sens inverse de l'éva¬
poration physique autour de sa propre normale. (Se voit en
juxtaposant les chiffres de Montcherand avec les évapora-tions calculées des cours d'eau du voisinage.)
8° On conclut que l'évaporation physique est bien fonc¬
tion de la pluviosité, d'où il découle l'hypothèse :
9° Les variations de l'évaporation physique et de l'évapo¬ration hydrologique étant antagonistes, mais l'une et l'autre
fonction d'un même variable : la pluviosité, il doit exister
une relation qui permet de calculer l'une au moyen de l'autre
et inversement.
1 Le contraste est net entre les deux stations de Montcherand et du Suchet.
Evaporation mensuelle en mm. et variabilité.
ANNÉE 1921 ANNÉE 1919
Juillet Août Septembre «loy. Em
Juillet Août Septembre "W- lm
Suchet (1220 m.)
Evaporation E, mm.... 29
Variabilité en % 6
(l£^%)
31
3
36
12
32 37
6
31
11
36
3
35
Moncherand (565 m.)
Evaporation E, mm....
Variabilité en % ...
63
26
131
54
61
28
85 147
38
118
10
56
48
107
En effet, d'après le petit tableau ci-dessus, on voit, par exemple, que le
rapport en % entre le nombre de millimètres évaporés E au cours d'un
mois, à la moyenne Em, de plusieurs mois, est beaucoup plus faible en
altitude qu'à la plaine. On a ainsi à Montcherand, à 565 m., pour le moisI /?o QC I
de juillet 1919, un rapport ou variabilité de : - —
' (%) = 26 %, alors85
i 90 oo I
qu'au Suchet, à 1220 m., ce rapport ne vaut que - —' % = 6 %.
Autrement dit, la variabilité de l'évaporation diminue avec les altitudes-
croissantes.
246 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
10° Si cette relation existe, le problème est résolu, et il
suffit dès lors de compléter les mesures pluviométriques par
quelques mesures évaporométriques, pour calculer les écou¬
lements.
Comme, malheureusement, on ne dispose pas d'un ensem¬
ble d'observations limnimétriques qui correspondent aux
mêmes années d'observations évaporométriques dans la ré¬
gion de Montcherand — l'Orbe qui en est voisine étant inuti¬
lisable à cause des lacs qu'elle traverse — nous avons été
contraint d'adapter ces chiffres à la Sihl pour arriver aux
conclusions ci-dessus. L'extrapolation entraîne des erreurs
qu'il est toutefois possible de corriger dans une assez grandemesure, au moyen des écarts connus entre les précipitationsde ces deux régions.
Essayons, maintenant, de construire la relation algébriqueentre la pluviosité et l'évaporation physique, pour la station
de Montcherand.
Si l'on reporte sur deux axes, Epjjygj^g, en ordonnée et
P en abscisse, on ne trouve aucune continuité dans la courbe
de E, et apparemment il semble qu'il n'y ait pas de loi. C'est
d'ailleurs ce que faisait entrevoir le faible poids de la moyenne
arithmétique des évaporations.L'indice de variabilité de l'évaporation est du même or¬
dre de grandeur que celui des précipitations de cette région.On obtient une meilleure représentation de la fonction
en écrivant :
poù p-
est l'ordonnée et P l'abscisse (fig. 24).
L'équation qui donne grosso modo l'évaporation physiqueen fonction de la pluviosité pour la station de Montcherand,située à l'altitude de 565 m., est alors :
P— = 0,002326 P — 0,584 (P et E3 en millimètres.)
RECHERCHE DU MÉCANISME HYDROLOGIQUE GÉNÉRAL 247
Pour appliquer ce résultat à une autre région, où la pres¬sion barométrique moyenne n'est pas trop différente, mais
où la pluviosité moyenne est plus élevée, tel est le cas de la
Sihl, ou plus basse, tel est le cas du Valais, il suffit d'ajouterou de retrancher un terme constant dans le nombre de
droite. A défaut d'autre série d'observations, nous ne pou¬
vons pas le déterminer.
Comme on le voit sur le diagramme, les années se groupentsans ordre autour de la droite qui répond à l'équation. Donc
P
2.50
VARIATION DE L'ÉVAPORATION PHYSIQUE,E.<pEN FONCTION DES PRÉCIPITATIONS ANNUELLES.P.
£00Ot7 J^£ï-
016
CJ22
100
13 0
A»
12
on
sT^fâ"
.—°sT
o=Ann< -es19ll/! 4
500 6C 0 700 300 900 1000 1100 1200
Précipitations P en millimètres
24.
pour rectifier l'inexactitude de E?, ce qui revient à calculer
les écarts autour de la droite, on peut introduire soit la
densité moyenne des précipitations, soit la moyenne des
coefficients pluviométriques des mois d'été ou de l'en¬
semble de l'année. Chacun de ces procédés a été étudié,aucun ne donne des résultats satisfaisants, c'est-à-dire qu'ilsne permettent de redresser les valeurs calculées que jus¬qu'à ± 5 % de la réalité seulement.
En faisant des essais par tâtonnement, pour rectifier les
erreurs, on s'aperçoit entre autres, des faits suivants : Plus
les P s'éloignent de la moyenne P, moins les % d'erreur sont
accentués. Il y a donc une surface enveloppe des erreurs,
qui s'enfle vers P moyen. A l'intérieur de cette surface, pluson se rapproche de P moyen, plus ce sont les densités qui
248 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
agissent, plus on s'éloigne de P moyen, plus ce sont les
maxima de température qui interviennent pour les recti¬
fications.
Ainsi pour les années 1916 et 1922, dont la pluviosité fut
forte, les écarts autour de la formule ne s'expliquent que par
les écarts des températures mensuelles autour de la normale.
Voici, par exemple, les écarts de Genève que l'on est en droit
d'appliquer à Montcherand, ces stations se trouvant dans
des conditions climatiques semblables.
Ecarts des températures autour de la moyenne mensuelle
en degrés centigrades. Tab. 26
Avril Mai Juin Juillet Août Sept. Année
1916
1922
-0,2-1,6
1,0
3,0
-1,8
1,2
-1,2
-1,5
— 0,2
-0,4
-2,2
-2,2
+ 0,1
-0,1
Ecarts des précipitations en mm. autour de la moyenne.
Avril Mai Juin Juillet Août Sept. Année
1916
1922
41
180
— 4
— 54
43
6
5
56
— 1
19
— 18
— 24
82
410
Ce petit tableau est suggestif et simple à interpréter.La température annuelle n'entre pas en corrélation avec E,
puisqu'en 1916 il fait plus chaud qu'en 1922 et il s'évaporemoins d'eau. Ce sont les extrêmes de mai et juin qui contre¬
balancent.
Parce qu'il est nécessaire, précisément, d'introduire ces
écarts mensuels, nous avons trouvé préférable d'abandonner
ce mode de calcul et de conseiller plutôt, pour le calcul de
Févaporation physique seule, l'application de la formule de
l'indice d'évaporation, établie au chapitre III, I II, 2. Elle
donne de meilleurs résultats.
RECHERCHE DU MÉCANISME HYDROLOGIQUE GENERAL 249
Si l'on voulait persister à déterminer l'évaporation hydro¬logique E>, à l'aide de l'évaporation physique, sans posséderles observations météorologiques nécessaires pour mettre à
profit la susdite formule, on pourrait s'aider des considé¬
rations suivantes.
S'il s'agit d'une région où l'indice de variabilité du module
pluviométrique est faible, comme dans certaines zones à
« climat constant », il n'est pas nécessaire d'introduire dans
les calculs les réserves I et I' qui figurent au bilan. Elles
s'éliminent d'elles-mêmes, comme étant presque semblables.
A supposer, donc, que l'on ne connaisse que la pluviosité P,
l'évaporation physique E? vaudra :
FP
qui n'est autre que la formule établie par les données de
Montcherand, où les chiffres 0,002326 et 0,584, sont respecti¬vement remplacés ici par les lettres a et b.
D'après les constatations expérimentales exposées au
point 9 ci-dessus, l'évaporation hydrologique Ex, varie
autour de sa normale ou moyenne Exm, en sens inverse de
l'évaporation physique autour de sa propre normale E0m,
pendant les mêmes années, bien entendu. Si l'on simplifieles hypothèses du problème en admettant, toutes choses
égales d'ailleurs, que ces variations antagonistes, sont du
même ordre de grandeur, en valeur absolue, ce que semble
assez bien confirmer l'expérience, on peut alors écrire
(fie- 25) :
F. F- — ?
c'est-à-dire que l'évaporation physique normale et l'évapo¬ration hydrologique normale sont égales, à un facteur con¬
stant près. En outre, la figure 25 montre que :
E? + Ex = 2k
ce qui est exprimé par l'hypothèse.
250 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Les variations Ej, Eâ, E3..., autour des valeurs normales
E?m et E>m, sont donc les mêmes.
On a alors :
Eç>m + EJ = E?
d'où l'on tire
E),m — Ej = E-A
E-A = 2 E?m — E? — £
ou, en remplaçant les termes par l'équation de Montcherand
P P
Ex = 2aP„ aP-
Cette formule serait donc valable pour déterminer l'éva-
poration hydrologique Ex, pour toute année de pluviosité
h
oa.
•a>
UJ
iE(j>E, "S
c
E' 1 E!<j>m
1\zk
"7
£...
f l
E*2 * J
El'
'EA
^k3 e* ;
*-
1921 1922 1923 | Années —
Fig. 25.
quelconque P, dans une région restreinte où la pluviosité
moyenne est Pm, à condition de connaître la constante a
et les valeurs a et b. Pour des différentes valeurs de Pm, à la
même température moyenne que Montcherand, a et b, con¬
servent les mêmes valeurs trouvées, mais e varie selon la
loi de M. Coutagne. On aurait donc d'une manière tout à fait
LE GBOUPEMENT DES ANNEES 251
générale, pour l'évaporation hydrologique, en toute année,dans une région étendue :
^--oPra-ft aP-bZtj°e
où z est un chiffre réduisant la valeur de l'évaporation
moyenne que donne la formule de Coutagne, à la valeur de t ;
les autres lettres nous sont familières.
Ainsi que nous l'avons dit plus haut, l'application de cette
méthode est malaisée. Si pour certaines années les erreurs
sont insignifiantes, pour d'autres, par contre, elles dépassentle 15 % des écoulements sans que l'on en puisse trouver les
raisons. C'est ce qui nous fait rejeter ce procédé après l'avoir
essayé sur dix cours d'eau et un total de trente années. Il
est à souhaiter que d'autres chercheurs soient plus heureux
que nous dans cette direction, car le problème du module en
serait singulièrement facilité.
3. Le groupement des années.
Maints ingénieurs qui ont eu affaire avec des problèmes
hydrologiques pour dresser les plans de premier établisse¬
ment d'installations hydroélectriques, se sont contentés, à
défaut d'observations suffisantes, de calculer les modules
extrêmes d'années dites sèches et humides, et ont basé leurs
devis sur la moyenne de ces extrêmes. Or, il arrive qu'en une
seule année très pauvre en précipitations, le module d'écou¬
lement soit égal, sinon supérieur, à celui d'une année normale
ou même humide. Et ce fait s'explique bien simplement par
le report à nouveau dans l'année en question, du compte des
réserves de l'année antérieure. Le cas inverse se présente
aussi, mais il est moins accentué. Il est donc indispensable de
grouper deux par deux les années dont on dispose, et de
ne prendre comme extrêmes, dans les deux cas de la séche¬
resse et de l'humidité, que la seconde année, si on a la chance
de trouver des successions semblables, ce qui est rare.
Tout dépend donc des capacités de rétention. Comme
252 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
l'évaporation n'emprunte que fort peu d'eau à ces réserves
souterraines, on peut classer l'année en cours au moyen de la
pluviosité seule. Par contre, l'évaporation hydrologique si
sensible à la température, précisément à cause de l'infiltra¬
tion, doit être révélée dans l'année antérieure.
On classera donc les années tout comme dans le cas des
appareils à écoulement glaciaire, en année sèche : chaude ou
froide, et année humide : chaude ou froide. Dans les Alpes,on reconnaît facilement qu'une année sèche et froide est
caractérisée par la prédominance des anticyclones et des
vents de secteurs N ; une année sèche et chaude par des
calmes ou des vents du S et SW ; une année pluvieuse et
chaude par l'activité dominante des petites dépressions et
du fœhn ; une année pluvieuse et froide, par les perturba¬tions des grands systèmes atlanto-européens, la lenteur dans
la circulation de l'hémisphère N, la stagnation des noyaux
pluvieux et vents dominants du NW, accompagnés de nom¬
breux orages.
Il ne faut pas perdre ce point de vue, parce que l'action
résultante de ces phénomènes détermine la variation de la
densité moyenne des précipitations et les coefficients de la loi
de variation avec l'altitude.
En résumé, lorsqu'on cherche à grouper entre elles les
années humides et les années sèches, pour déceler les lois
inhérentes aux modules d'écoulement dans les bassins per¬
méables à forte déclivité, il semble indispensable d'interrogerces grands facteurs dynamiques.
§ III. Établissement de la formule générale sur la base
expérimentale de la SihI.
1. Les observations.
Nous avons vu plus haut que le matériel hydrographique,météorologique et climatique est très restreint en Suisse, et
que le bassin de la Sihl offre le meilleur champ d'investiga-
LES OBSFIU ATIOÏSS 233
tion, à tous les points de vue. En outre, ce cours d'eau a fait
l'objet d'études importantes, comme le rapport extrêmement
instructif et modèle du regretté ingénieur Epper [216, 217].Puis, aujourd'hui que la question de l'Etzel est à l'ordre du
jour, il ne semble pas inutile de calculer certaines constantes
du bassin d'alimentation du futur réservoir, pour en mieux
prévoir le fonctionnement hydrologique. D'autre part, la
Sihl (fig. 26) est limitée à l'E par le bassin du Wâggital, dont
on a tant discuté la pluviosité, et qui est l'objet actuellement
Fig. 26.
d'une étude importante. La parenté géologique et climatolo-
gique de ces deux bassins permet facilement des extrapola¬tions, et par là aussi, le calcul plus précis des réserves pos¬sibles.
Nous n'écrirons pas en détail l'historique des mesures
faites dans le bassin de la Sihl. Le premier limnigraphe fut
installé en 1900 et les indications en sont publiées par le
Service fédéral des eaux. L'observation des précipitationsest beaucoup plus ancienne. Trois stations météorologiques,Zurich, Einsiedeln et Ober Iberg, renseignent avec une préci¬sion suffisante sur les autres éléments.
254 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Le rapport pluvionivotopographique était en 1914, de
7^5 = 1,7. Et si l'on introduit les pluviomètres voisins,
situés plus haut et plus bas que les niveaux extrêmes du
bassin limité au limnigraphe de Sihlbrugg, le rapport devientQ
k-qô= 2,7, chiffre qui est précisément le plus élevé existant
en Suisse.
Baser les calculs sur les vingt-cinq années, 1900 à 1925,n'est malheureusement pas possible, parce que le Service
fédéral des eaux n'a publié qu'une partie des mesures. En
outre, il est fâcheux qu'il ait interrompu la publication des
débits journaliers de Sihlbrugg après 1921, car ce poste
aurait permis d'établir la plus longue des moyennes des cours
d'eaux préalpins.Après avoir examiné très attentivement tous les postes de
la région, les conditions orographiques, climatologiques et
purement météorologiques, nous nous sommes arrêtés pour
nos calculs aux dix années 1915 à 1924, en fixant le début de
l'année hydrologique au 1er octobre.
Par un hasard heureux, l'erreur à craindre de la moyenne
arithmétique de chacun des principaux facteurs qui entrent
dans les calculs est faible et ne dépasse pas 6 %. C'est là un
fait capital qui nous assure l'exactitude maximum des
calculs.
2. Les moyens de contrôle de la formule et la prépara¬
tion des calculs.
Avant de lier les années par une formule, il faut examiner
les poids des diverses moyennes, et vérifier si elles corres¬
pondent bien aux bases du calcul, qui sont la variation
connue des modules avec l'altitude. On dispose heureusement
pour la Sihl de trois limnigraphes situés à Giesshiibel
(408,03 m.), Sihlbrugg (528,07 m.), et Untersiten (847,41m.),permettant de calculer les pertes brutes par évaporation et
infiltration en trois points d'altitudes bien différentes. La
MOYENS DE CONTROLE ET PREPARATION DES CALCULS 255
courbe de variation des pertes avec l'altitude devant tou¬
jours conserver sa même allure, ©n comprend aisément que
ces trois postes donnent trois moyens de vérification de la
formule. C'est-à-dire qu'à l'altitude a (fig. 27), le module Havaut Ha = Pa — EOJ où Pa et Ea sont la pluviosité et l'éva-
poration totales réparties sur le bassin limité au limnimè-
tre a ; à l'altitude b, H6 = Pb — Eb ; à l'altitude c, Hc =
Pc — Ec ; où Ea, E6, Ec doivent se trouver sur la même
Diagr- (E.P)aCUt quelconque (E PlaGlrconstente
Fig. 27.
courbe de variation de Févaporation avec l'altitude ; de
même que P0, P6, Pc sur la courbe de variation des précipi¬tations avec l'altitude.
Plus le nombre des limnimètres augmente, plus est grandela précision, et plus sont faciles à rectifier les discordances
provenant des sources qui empruntent leur eau hors de la
zone du bassin de leur limnimètre.
Connaissant donc par l'expérience cette courbe H=P— E,la courbe des P étant également connue, on en tirera la
courbe des E en fonction de l'altitude, qui est représentée au
dessin dans le diagramme (E, A).
256 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
A l'aide d'un certain nombre de courbes des deux dia¬
grammes (P, A) et (E, A)f pour les diverses années (l'indicei = année sèche, l'indice u = année humide), on construira
aisément par déduction le diagramme (E, P), soit la varia¬
tion de l'évaporation en fonction des précipitations, à alti¬
tude constante. On reconnaîtra immédiatement la courbe en
cloche répondant à l'équation de M. Coutagne, dont nous
n'avons dessiné que la branche ascendante. Enfin, on pourra
tracer aussi les diverses courbes E = / (P) à altitude quel¬
conque, sur les deux axes E et P, en combinant les courbes
des deux diagrammes (P, A) et (E, A), c'est-à-dire simple¬ment par la suppression de leur axe commun A. Ce sont ces
dernières courbes, que nous appellerons plus loin courbes de
la formule de transposition à portée restreinte, qui permet¬
tent de déterminer l'évaporation à toute altitude, en fonc¬
tion d'une précipitation annuelle quelconque. La courbe en
cloche, indice K, est la fréquence des précipitations, que nous
avons étudiée au chapitre II, I 1, lre partie. Elle n'est là qu'àtitre d'indication, pour donner une idée sur la zone la plus
fréquente des modules P, et pour définir par les extrémités
de ses ailes, les extrêmes P0 et P„.
Pour la détermination des diverses courbes qui caracté¬
risent la Sihl, nous avons vérifiés nos calculs principalementau limnigraphe de Sihlbrugg, qui se présente dans d'excel¬
lentes conditions. Son bassin d'alimentation a 293,11 km2,limités entre les altitudes 528 m. et 2285 m. Mais les données
du limnigraphe plus élevé d'Untersiten, et celui plus bas de
Giesshubel, nous ont permis de tracer l'allure générale de la
courbe H = P — E. Les modules H, non publiés pour ces
stations, ont pu être calculés avec soin grâce à une relation
hydrométrique déterminée à l'aide d'observations simul¬
tanées aux trois postes et par une courbe limnimétrique des
débits.
Pour préparer les valeurs exactes des évaporations brutes
Ep, pour toute altitude et pour chaque année hydrologique,nécessaires pour chercher la forme générale de la relation
MOYENS DE CONTROLE ET PRÉPARATION DES CALCULS 257
algébrique qui lie l'écoulement aux précipitations, nous
avons donc admis une courbe de variation de l'évaporationhydrologique brute avec l'altitude Ep = / (A), semblable à
la courbe de l'évaporation physique, qui a été dessinée à la
figure 18 et critiquée au chap. III, § 2, lre partie. La diffé¬
rence entre les valeurs P et Ejj à toute altitude A, doit donc
donner le module H, à cette altitude A. Pour chaque année
séparément, nous avons cherché par la méthode des approxi¬mations successives, la forme la plus exacte de Eg = / (A),en nous aidant des trois modules connus aux trois altitudes
différentes, qui vérifient respectivement les valeurs Ep=P—H,étendues à leur bassin d'alimentation. Ces opérations très
longues sont résumées aux tableaux 28 et suivants. Les
erreurs graphiques des modules calculés, sur les valeurs des
modules mesurés, sont aussi réduites que possible, ce qui
prouve que les courbes Ejj = / (A) obtenues sont très exactes.
Les diagrammes de la figure 28 correspondent pour la Sihl
à ceux représentés schématiquement sur la figure 26, soit
P = fp (A), la courbe des précipitations moyennes P, pour
1915-1924, en fonction de l'altitude A, Ex = /x (A), la
courbe de l'évaporation hydrologique moyenne pour 1915-
1924, en fonction de l'altitude A, et enfin la courbe résul¬
tante des deux précédentes E-À = / (P) à altitude quelconque,
également pour la même moyenne d'années d'observations.
Ces courbes ont été tracées avec le procédé décrit, pour les
valeurs moyennes des éléments H, P, Eg. En outre, à titre
de vérification, nous nous sommes assurés que les abscisses
de la courbe Ex = / (A) correspondaient bien à la moyenne
arithmétique de la somme de chacune des abscisses corres¬
pondantes des dix courbes annuelles E-s = / (A).Les précipitations qui servirent à construire la courbe
P = / (A), sont récapitulées au tableau 27.
L'erreur à craindre sur la moyenne arithmétique est sensi¬
blement la même pour toutes les stations qui figurent au
tableau 27, ce qui prouve a priori que les précipitations se
sont bien réparties régulièrement au cours de ces dix années,
LUGEfJN 17
258 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
entre lesdites stations. En outre, l'erreur est faible ; pour
Einsiedeln, par exemple, elle vaut :
Rc = V/~7^—ÏT = 93'4 mnl-< ou en % : 5'57 %>V n(n— 1)
alors que pour dix années, généralement, l'erreur à craindre
atteint 10 %. Ce fait s'explique, car dans cette série 1915-
PRÉCIPITATIONS ET EVAPOP.ATION EN fONCTION DE L'ALTITUDE-BASSIN DE LA SIHL
(Moyenne -19-15-H9£4 I
Fig. 28.
1924, se trouvent l'année la plus sèche, 1921, et l'année la
plus humide, 1922, des cinquante années d'observations
météorologiques que l'on possède pour la vallée de la Sihl.
Dans les tableaux suivants, 28 à 37, sont récapituléesles précipitations de l'année hydrologique, en regard de
chaque station, valeurs qui ont donc servi à construire la
courbe de variation des précipitations avec l'altitude
P = /p (A). Sur les mêmes lignes, en face des altitudes, sont
reportées les précipitations lues sur la courbe P = / (A), et
MOYENS DE CONTROLE ET PREPARATION DES CALCULS 259
les évaporations correspondantes, lues sur la courbe
E-j = / (A). Ces chiffres sont donc répétés ici, pour que l'on
puisse reconstruire lesdites courbes ou au moins se faire une
image de leur allure par des nombres. La dernière colonne
correspond au calcul des volumes d'eau écoulés sur chaquetranche de surface topographique comprise entre deux
isohypses successives, de 300 en 300 m. Ces derniers calculs
correspondent au bassin d'alimentation du limnigraphe de
Sihlbrugg, situé à 528,07 m. ; surface 293,11 km2, décom¬
posée ainsi : 1,60 km2 entre 528,07 m. et 600 m., 61,99 km2
entre 600 et 900 m., 126,44 km2 entre 900 et 1200 m.,
73,43 km2 entre 1200 et 1500 m., 22,44 km2 entre 1500 et
1800 m., 6,89 km2 entre 1800 et 2100 m., 0,32 km2 entre
2100 et 2285 m.
Précipitations (mm.).(Année hydrologique 1er octobre au 30 septembre.)
Début 1er octobre 1914, fin30septembre 1924. Tab. 27
Altitudes en mètres sous les noms des stations.
Dietikon* Zurich* Sihlwald Waldhalle Einsiedeln Euthal 0. Iberg Sântis* Clarides*Années
392 493 493 700 914 895 1090 2504 2710
1915 1026 992 1194 1480 1669 1764 1898 2976 3700
1916 1095 1141 1311 1656 1655 1719 1991 3789 4010
; 1917 1167 1134 1359 1517 1524 1709 1787 2553 3440
! 1918 1025 1008 1224 1518 1575 1684 J858 2239 3630'
1919 969 956 1347 1705 1781 1705 2017 3027 3800
,1920 1067 1018 1217 1503 1758 1941 2065 3557 3800
1921 656 637 791 867 1006 1062 1157 1735 2100
1922 1169 1203 1455 1825 1983 2178 2301 4682 4010
1923 861 940 1173 1549 1703 1665 1792 4368 3550
1924 1298 1270 1508 2007 2007 2067 2175 3705 4000
Moyenne
«1S/241033 1030 1258 1563 1666 1749 1904 3263 3604
*S tation située ho rs du b îssin.
Les volumes S. H = S. (P—E^), écoulés sur chaque surface
élémentaire S, sont déterminés par les valeurs de P et de E,
prises sur les courbes considérées ci-dessus, P = / (A) et
260 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
E3 = / (A) à la même altitude moyenne A, de chacune des
dites surfaces. Cette altitude moyenne, qui n'est pas repro¬
duite dans les tableaux, et que nous appellerons le centre de
gravité hydrologique de chaque surface S, a été déterminée
graphiquement par une méthode qui est exposée plus loin,
! IV, 2.
Aux tableaux 28 et suivants, les altitudes sont en mètres,
les précipitations P et évaporations E3 en millimètres, les
volumes écoulés en mètres cubes : Skm2 (P — E)m. 106.
A côté des modules calculés pour Sihlbrugg, qui sont donc
le quotient de la somme des volumes écoulés sur l'ensemble
des surfaces élémentaires composant le bassin, nous avons
écrit pour chaque année la valeur des modules mesurés.
Erreurs graphiques écartées, les premiers devraient être
rigoureusement semblables aux seconds. Cette question sera
discutée plus loin.
A titre de renseignements sur la répartition de la pluvio¬sité mensuelle de chaque année, la variabilité des précipi¬tations en % autour des moyennes mensuelles et annuelles
sont aussi données pour la station météorologique d'Einsie-
deln, qui répond bien aux fluctuations du climat de la con¬
trée étudiée.
ANNÉE 1915
Tab. 28
Station P mm. Altitude P mm. Ej-mm. Volume: S. (P —E;j .10»m'
'
Dietikon.
Zurich. . .
Sihlwald.
Waldhalle.
Euthal.. .
Einsiedeln
Ober IbergSântis.
. . .
Clarides. .
1026
992
1194
1480
1764
1669
1898
2976
500
600
900
1200
1500
1800
2100
2400
1210
1350
1720
1980
2210
2430
2660
2900
795
730
530
365
255
203
185
170
1,60.0,545.106= 874 000
61,99.0,909.106= 56 350 000
126,44.1,400.106= 177 000 000
73,43.1,781.106 = 130 900 000
22,44.2,085.106= 47 000 000
6,89.2,352.106= 16 190 000
0,32.2,560.106= 819 000
429 133 000
MOYENS DE CONTROLE ET PRÉPARATION DES CALCULS 261
Module calculé :
Module mesuré :
429 133 000 m3
293 110 000 m2
429 400 000 m3
293 110 000 m2
1463 mm.
= 1464 mm.
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V VI VII VIII IX Année
48 102 59 196 115 139 107 76 85 123 118 118 100%
ANNÉE 1916
Tab. 29
Station Pmm. Altitude Pmm. Ejjmm. Volume: S.(P--E|j).10» mi
Dietikon.
Zurich. . .
1095
1141
500
600
1315
1490
875
7851,60.0,601.106 =
m'
961 000
Sihlwald.
Waldhalle.
1311
165661,99.0,983.106 == 60 950 000
Euthal...
1719 900 1800 575 126,44.1,474.106 == 186 750 000Einsiedeln 1655 1200 2120 400 73,43.1,945.106 == 142 850 000Ober Iberg 1991 1500 2460 280 22,44.2,373.106 == 53 450 000Sântis.
...3789 1800 ) 2795 218
6,89.2,758.106 == 18 950 000|Clarides
..4010 2100 j 3135 190
0,32.3,112.106 = 995 0001
12400 3470 172
464 906 000
Module calculé :
Module mesuré :
464 906 000 m3
293 110 000 m2
465 100 000 m^
293 110 000 m2
= 1586 mm.
1589 mm.
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V VI VII VIII IX Année
28 8 4 144 162 146 82 123 77 123 89 94 136 99%
262 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
ANNÉE 1917Tab. 30
Station Pmm. Altitude Pmm. En mm. Volume: S.(P--EjjJ.lO6 m3
Dietikon .
Zurich. . .
1167
1134
500
600
1389
1457
1060
9251,60.0,331.106 =
m-'
529 000
Sihlwald..
Waldhalle
1359
151761,99.0,751.106 == 46 620 000
Euthal...
Einsiedeln
Ober IbergSantis....
Clarides..
1709
1524
1787
2573
3440
900
1200
1500
1800
2100
2400
1670
1883
2110
2333
2560
2780
654
445
288
222
213
202
126,44.1,210.106 =
72,43.1,618.106 =
22,44.1,960.106 =
6,89.2,224.106 =
0,32.2,456.106 =
= 153 080 000
= 118 820 000
= 44 000 000
= 15 310 000
780 000
379 139 000
Module calculé :
Module mesuré :
379 139 000 m3
293 110 000 m2
380 000 000 m3
293 110 000 m2
= 1293 mm.
= 1296 mm.
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V
133 103 155 75 27 96 112 46
VI VII VIII IX Année
97 112 113 55 92%
ANNÉE 1918Tab. 31
Station Pmm. Altitude Pmm. Egmm. Volume: S.(P—Ep) .ÎO" m'
Dietikon.
Zurich. ..
Sihlwald..
Waldhalle
Euthal...
Einsiedeln
Ober IbergSântis....
'
Clarides..
1025
1008
1224
1518
1684
1575
1858
2239
3630
500
600
900
1200
1500
1800
2100
2400
1230
1380
1680
1925
2105
2285
2470
2650
1065
940
661
449
297
247
217
210
1,60.0,148.106= 237 000
61,99.0,593.106= 36 800 000'
126,44.1,118.106= 141 200 000,
73,43.1,523.106=112 000 000'
22,44.1,856.106= 41 750 000!6,89.2,115.106= 14 570 000
0,32.2,325.106= 744 000
347 301 0001
MOYENS DE CONTROLE ET PRÉPARATION DES CALCULS 263
Module calculé :
Module mesuré :
347 301 000 m3
293 110 000 m2
347 800 000 m3
293 110 000 m2
= 1186 mm.
1187
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V VI VII VIII IX Année
190 118 47 137 60 46 87 44 127 63 90 176 95% .
ANNÉE 1919
Tab. 32
Station P mm. Altitude Pmm. Eginm. Volume: S.(P--E[j).106m3
Dietikon.
Zurich...
969
956
500
600
1345
1530
1180
10501,60.0,375.106 =
m3
600 000
Sihlwald..
Waldhalle
1347
170561,99.0,755.106 == 46 750 000i
Euthal...
Einsiedeln
Ober IbergSentis.
...
Clarides ..
1705
1781
2017
3027
3800
900
1200
1500
1800
2100
2400
1780
2130
2430
2720
3010
3300
750
500
320
240
215
205
126,44.1,330.106 =
73,43.1,870.106 =
22,44.2,295.106 =
6,89.2,635.106 =
0,32.2,940.106 =
= 168 200 000
= 137 100 000
= 51 500 000
= 18 120 000
941 000
423 211 000
Module calculé :
Module mesuré :
423 211 000 m3
293 110 000 m2
423 500 000 m3
293 110 000 m2
= 1445 mm.
1445
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V VI VII VIII IX Année
58 52 335 68 135 189 168 60 108 126 56 63 107%
264 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
ANNÉE 1920Tab. 33
Station Prnm. Altitude Pram. E|-mm. Volume: S.(P—-Ep).10«m' |
i Dietikon .
Zurich. . .
1067
1018
500
600
1225
1365
1340
12101,60.0,067.106 =
m'
107 000
Sihlwald..
Waldhalle
1217
150361,99.0,561.106 == 34 800 000
Euthal. ..
1941 900 1850 883 126,44.1,258.106 == 159 000 000Einsiedeln 1758 1200 2180 631 73,43.1,813.106 ==133 000 000Ober Iberg 2065 1500 2500 422 22,44.2,289.106 == 51 450 000Sântis.... 3557 1800 2820 320 6,89.2,674.106 == 18 400 000Clarides
..3800 2100 3130 283 0,32.3,016.106 = 964 000
2400 3450 264397 721 000[
Module calculé :
Module mesuré
397 721 000 m3
293 110 000 m2
396 100 000 m3
293 110 000 m2
1354
= 1352
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II
102 169 262 189 36
III IV V VI VII VIII IX Année
37 115 118 97 • 96 86 92 105%
ANNÉE 1921Tab. 34
Station Pmm. Altitude P mm. Er-mm. Volume: S.(P—]Ep).10e ms
Dietikon.
Zurich. . .
656
637
500
600
195
830
940
8501,60.0,000.106 = 0
Sihlwald. .
Waldhalle
791
86761,99.0,205.106 = 12 700 000
[ Euthal-.. .
Einsiedeln
Ober IbergSântis....
Clarides..
1062
1006
1157
1735
2100
900
1200
1500
1800
2100
2400
1050
1212
1370
1530
1680
1830
630
443
307
233
203
192
126,44.0,593.106 =
73,43.0,916.106 =
22,44.1,178.106 =
6,89.1,387.106 =
0,32.1,559.106 =
75 000 000
67 300 000
26 420 000
9 500 000
498 000
191 418 000
MOYENS DE CONTROLE ET PRÉPARATION DES CALCULS 265
Module calculé :
Module mesuré
191 418 000 m3
293 110 000 m2
191 047 680 m3
293 110 000 m2
= 654 mm.
= 653 mm.
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V VI VII VIII IX Année
4 13 75 116 16 40 88 56 91 28 87 89 64%
ANNÉE 1922 Tab. 35
Station Pmm. Altitude Pmm. E,- mm. Volume: S. (P—Ep) .10" mî
Dietikon.
Zurich.. .
Sihlwald..
Waldhalle
Euthal. . .
Einsiedeln
Ober IbergSantis....
Clarides..
1169
1203
1455
1825
2178
1983
2301
4682
4010
500
600
900
1200
1500
1800
2100
2400
1455
1640
2110
2430
2820
3200
3580
3960
1230
1190
840
590
426
330
280
261
1,60.0,346.106= 504 000
1
61,99.0,869.106= 53 700 000
126,44.1,557.106= 196 800 000
73,43.2,117.106=154 900 000
22,44 2,631.106 = 59 100 000
6,89.3,087.106= 21 210 000
0,32.3,505.106= 1 121 000
487 335 000
Module calculé
Module mesuré :
487 335 000 m3
293 110 000 m2
485 800 000 m3
293 110 000 m2
= 1662 mm.
1659 mm.
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V VI VII VIII IX Année
36 186 82 322110 115 198 67 109 122 150 150 119%
266 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
ANNÉE 1923Tab. 36
Station Pmm. Altitude Pmm. Epmm. Volume: S.(P—Ep).10« m»
Dietikon.
Zurich...
Sihlwald..
Waldhalle
Euthal...
Einsiedeln
Ober IbergSântis....
Clarides..
861
940
1173
1549
1665
1703
1792
4368
3550
500
600
900
1200
1500
1800
2100
2400
1200
1400
1703
1900
2230
2550
2870
3180
872
789
576
403
277
213
194
190
m3
1,60.0,535.106= 803 000
61,99.0,878.106= 54 440 000
126,44.1,301.106=164 600 000
73,43.1,725.106=126 500 000
22,44.2,145.106= 48 200 000
6,89.2,508.106= 17 240 000
0,32.2,834.106= 906 000
412 689 000,
Module calculé :
Module mesuré :
412 689 000 m3
293 110 000 m2
412 000 000 m3
293 110 000 m2
= 1409 mm.
= 1405 mm.
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V VI VII VIII IX Année
127 171 133 141 115 61 90 98 134 68 97 93 102%
ANNÉE 1924Tab. 37
Station Pmm. Altitude Pmm. En mm. Volume : S. ( P—Eg). 106 nr1
Dietikon.
Zurich...
1298
1270
500
600
1522
1770
1178
1142
m"
1,60.0,583.106= 934 000
Sihlwald..
Waldhalle
1508
200761,99.1,074.106= 66 550 000
Euthal...
Einsiedeln
Ober IbergSântis....
Clarides..
2067
2007
2175
3705
4000
900
1200
1500
1800
2100
2400
2050
2300
2620
2950
3275
3600
744
509
349
262
227
241
126,44.1,538.106=194 700 000
73,43.2,041.106=149 000 000
22,44.2,480.106= 55 750 000
6,89.2,867.106= 19 740 000
0,32.3,204.106= 1 035 000
487 709 000
MOYENS DE CONTROLE ET PRÉPARATION DES CALCULS 267
Module calculé :
Module mesuré :
487 709 000 m3
293 110 0009
m-
487 800 000 m3
293 110 000 m2
1664
= 1664 mm.
Variabilité des précipitations en % autour des moyennes
mensuelles, pour Einsiedeln :
Mois X XI XII I II III IV V VI VII VIII IX Année
114 158 239 91 57 40 128 122 147 125 159 83 120%
Récapitulation et poids des modules
pour les 10 années.
Tab. 38
A SlHLBRUGG a Untersiten
1915 = * 1464 mm. 1915 = * 1682 mm.
1916 = 1598 1916 = * 1811
1917 = 1296 1917 = * 1518
1918 = 1187 1918 = * 1411
1919 = 1445 1919 = * 1661
1920 = 1352 1920 = * 1555
1921 = 653 1921 = 788
1922 = * 1659 1922 = 1911
1923 = * 1405 1923 = 1617
1924 = * 1664 1924 = 1989
Moyenne = 1372 mm. Moyenne = 1594 mm.
Écart + 1000 Écart + 1107
Écart— 996 Écart — 1104
2je]2= 786964 Rm= 93,5 mm. 2|e|2 = 1006 787 Rm= 105,5La moyenne est exacte à La moyenne est exacte à
6,81% près. 6,62% près.
* Signifie calculé d'après les hauteurs limnimétriques du Service fédéral des
Eaux ou par comparaison avec Giesshûbel.
268 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Calcul de
Vévaporation hydrologique pour le module
de 10 années}
moyen
Tab. 39
Lutit. Station PCorrec¬
tionsAltit. P E. Volume : S
. (P — E) .10« m'
39? Dietikon. 1033 500 1268 1175m3
493 Zurich... 1030 600 1440 1050 1,60.0,273.106= 436 000
493 Sihlwald. 1258 61,99.0,702.106= 43 450 000
700 Waldhalle 1563
914 Einsiedeln 1666 -— 900 1741 742
895 Eathal.. 1749 126,44.1,277.106= 161100 000,1090 Ober Iberg 1904 +1.58X 1200 2006 503
2504 Santis... 3256 — 73,43.1,777.106= 130140 000
2710 Clarides.. 3600 1500
1800
2100
2400
2285
2561
2860
3160
312
248
220
215
22,44.2,171.106= 48 690 000
2,89.2,508.106= 17 270 000
0,32.2,800.106= 896 000
401 882 000
Ar a i il-401 882 000m3
«71Module calcule:^^-^^
=1371 mm.
mii -
401 840 00° m3Module mesure:
^lï^OOO^= 13?1 mm-
1 Ce tableau est déterminé de la même manière que les tableaux précédentsnos 28 à 37, mais à l'aide des courbes moyennes pour 10 ans de P = /p(A) et
E = /e(A). Les valeurs de E peuvent être considérées comme pertes nettes, les
réserves infiltrées, s'égalisant pour une période de 10 ans.
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULÉS 269
Untersiten.l
Altitude 847,4 m. Bassin d'alimentation 249,106 km^
(Même valeur de P et de E qu'au tableau 39.) Tab. 40
Altitude Volume: S. (P — E) .
10<s m'
600
900
1100
1500
1800
2100
2400
S (P — E) m;>
15,55.0,969.106 = 15 080 000
59,50.1,277.10e = 75 950 000
53,20 1,777.10e = 94 560 000
20,84.2,171.10e = 45 350 000
6,88.2,508,10e = 17 260 000
0,32.2,800.10e = 896 000
249 106 000
„ ,. .
.,249 106 000 m3
.„,Module calcule :
, -„ „„„ „p^ z= 1594 mm.
lob 290 000 m2
„ ,.
.
294 142 000 m".„,
Module mesure :. _» .,»» »„„—5
= lt>y4 mm.
156 290 000 m-
3. Interprétation des chiffres calculés.
Le chiffre E3 qui figure dans les tableaux précédents est la
perte brute, c'est-à-dire qu'il renferme l'évaporation ou
perte nette, plus l'infiltration, moins les condensations
occultes. Étant donné la régularité des courbes de variations
de E3 avec l'altitude, on peut se demander s'il suffit, pour
calculer le module, de connaître E3 en une seule station,c'est-à-dire à altitude constante. L'expérience montre que le
degré d'exactitude est alors trop faible. La méthode ana¬
lytique rigoureuse est représentée schématiquement à la
figure 29, dans un système à trois dimensions.
Elle consiste à calculer les évaporations brutes E3, au
moyen des fonctions E3 = /Ac (P) à altitude constante Ac,
Même remarque que pour le tableau 39.
270 PBÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Ep = fkv (P) à altitude variable A„, aussi exprimées par
P = /p (A) et Ep = / (A), soit Ep = / (P, Ep, A). C'est
ce que nous avons donc fait par tâtonnement dans les
tableaux qui précèdent. Quel est le degré d'exactitude
atteint ? Il n'est pas facile à connaître avec précision parce
qu'il dépend : 1° des erreurs du module mesuré (faibles, de
l'ordre de 1 à 2 % tout au plus) ; 2° des erreurs dans la
<
Evaporahon E
Fig. 29.
mesure des précipitations (très faibles et peut-être négli¬
geables) ; et, 3° des erreurs dans la répartition des pré¬
cipitations sur le terrain, c'est-à-dire dans le calcul de leur
volume.
Notre attention a été particulièrement attirée sur ce point.La courbe hypsographique construite d'après les données
du Service fédéral des eaux (Surfaces : Bassin de la Limmat),
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULÉS 271
par tranches de 300 en 300 m., diffère d'une quantité absolu¬
ment négligeable de celle publiée par Epper, en tranches de
100 en 100 m. Les volumes écoulés obtenus par simplemultiplication, S X (P — E), et ceux obtenus en planimé-trant la surface comprise entre la courbe hypsographique et
la ligne des P, selon la méthode ordinaire rappelée plus loin
§ IV, 2, furent trouvées les mêmes. De plus, il n'y a pas d'am¬
biguïté possible dans le tracé de la courbe de variation des
précipitations avec l'altitude. Les deux appareils du Sântis
et des Clarides, plus élevés que le sommet du bassin, sont
météorologiquement parfaitement susceptibles d'être utili¬
sées pour donner la direction exacte de la courbe depuis le
dernier des pluviomètres, situé à Ober-Iberg. Les petitesdifférences entre les précipitations des deux vallées affluentes
d'Einsiedeln et d'Ober-Iberg, réparties soigneusement au¬
tour de la courbe, ne sauraient occasionner une grandeerreur.
En fin de compte, les volumes sont estimés avec une erreur
que nous ne croyons pas supérieure à 1 à 2 % pour P et
tout au plus 3 % pour E, en admettant donc une erreur de
± 2 % sur H.
En abordant l'interprétation des valeurs de E et de P à
altitude constante, nous avons été conduit à une formule
extrêmement compliquée où interviennent en plus de tous les
facteurs cités plus haut (§ III, 1), des coefficients incalcula¬
bles sans expérience, dépendant de la nature des terrains.
Il se peut que les E soient exacts pendant quelques années,
puis soient subitement entachés d'erreurs grossières. En
outre, si l'allure de la courbe de variation des E se maintient
semblable à elle-même au cours des années, celle des P change,c'est-à-dire qu'elle se couche ou se redresse sur l'axe des
abscisses (fig. 28). De là résultent certaines erreurs dues
exclusivement à la nature des terrains, c'est-à-dire aux di¬
verses capacités de rétention.
Dès lors, il est préférable de travailler avec des valeurs
de E globales, égales à H—P, en unité de volume. En divisant
272 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
E volume par la surface topographique, on aura un E linéaire
moyen, qui représente exactement la perte brute en un point
unique du bassin. Nous avons appelé ce point le centre de
gravité hydrologique.La comparaison des évaporations nettes avec d'autres
bassins est compliquée de ce fait, mais nous verrons qu'on les
retrouvera toujours facilement au moyen de la formule de
transposition.
Les facteurs niçosité et température.
Les quatre principaux facteurs qui interviennent dans le
calcul de E sont énumérés au § II de ce chapitre. Décrire
ici toutes les raisons et les procédés de calcul qui nous ont
amené à cette sélection, nous entraînerait trop loin.
Le facteur nivosité v a été calculé de la manière sui¬
vante :
Comme dans la région on ne possède pas de mesures di¬
rectes de la neige, mais seulement le nombre de jours où il a
neigé, ou neigé et plu, et la quantité d'eau correspondante," i
2Nj i
nous nous sommes assure que le rapport -^5-= v, — de la
somme des précipitations mensuelles neigeuses N, à la somme
P pour l'année hydrologique des précipitations mensuelles
p, où N est calculé par la relation suivante :
j*
y-• p = N (millimètres),
dans laquelle J* est le nombre de jours de neige, J. le nom¬
bre de jours de pluie et neige pendant un mois où il tombe p
mm. de précipitations, -— reste constant pour chaque année,entre les deux stations de Einsiedeln (914 m.) et Ober-Iberg(1090 m.). Il a été trouvé tel de 1914 à 1924, ce qui prouvesans ambiguïté que cette méthode auxiliaire est bonne pour
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULES 273
déterminer la quantité de neige, lorsqu'on n'a d'autres indi¬
cations que celles publiées sous leur forme actuelle.
En outre, on voit aussi que l'indice de nivosité croît avec
l'altitude, mais que sa variation au cours des années en est
indépendante, entre certaines limites, évidemment. Cette
remarque importante démontre que, dans les Préalpes, les
stations des vallées comme les stations élevées, sont suscepti¬bles de servir de base pour le calcul de v. Par là même, à
défaut de station météorologique dans un bassin, on peut
sans encourir d'erreur appréciable, emprunter la nivosité
de bassins voisins ou assez distants.
Tableaux de Findice de nivosité pour Einsiedeln.
1914-1924
(Année hydrologique.)
1914 Tab.,41 1915 Tab. 42
Mois
Nombre de
jours de
RapportJ*
J.
P N
J* J.
X 5 45
XI 4 19 0,210 191 40
XII 15 18 0,834 127 106
I 7 9 0,778 142 110
II 5 7 0,715 46 33
III 17 24 0,708 260 184
IV 2 10 0,200 95 19
V 3 20 0.150 215 32
VI 3 18 0,166 153 25
VII — 21 — 316 —
VIII 16 — 227 —
IX 2 13 0,154 174 27
1 Année j 1991 576
V =
576
1991"" 0,289
LUGEON 18
Mois.
Nombre de
Jours de :
RapportJ*
J.
P N
J* J.
X 1 9 0,111 63
1
7
XI 10 12 0,830 97 81
XII 8 12 0,668 58 39
I 16 19 0,842 143 121
II 12 12 1,000 102 102
III 15 15 1,000 156 156
IV 11 17 0,648 133 86
V — 10 — 114 —
VI — 21 — 164 — i
VII — 17 — 248 — |VIII — 17 —• 227 —
IX 1 11 0,091 164 15
1669 607
V =
\
607
6693,364
274 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
1916 Tab. 43 1917 Tab. 44
Nombre de Rapport JMois jours de
J*
J.
P N 1J* J.
X 2 9 0,222 37 8
Ixi 9 14 0,642 80 51
|XII 4 19 0,211 141 30
1 7 11 0,637 118 75
II 11 15 0,734 130 95
III 11 15 0,734 92 67
IV 9 15 0,600 152 91
V 1 19 0,052 115 6
VI 2 22 0,090 238 22
VII — 20 — 181 —
VIII — 16 — 182 —
IX — 16 — 189 —
1655 445
445V
iL6550,269
"
Nombre de RapportMois jours de
J*
J.
p N
J* J.
X 3 17 0,176 174 31
XI 9 14 0,642 97 62
XII 8 16 0,500 152 76
I 10 13 0,770 55 42
II 6 7 0,857 24 21
III 17 17 1,000 107 107
IV 17 17 1,000 139 139
V — 11 — 69 —
VI — 15 — 187 -—
VII — 19 .— 226 -—
VIII — 20 — 218 —
IX j— 7 — 76 —
1524 478
478v —
"'"
— 0,31381524
1918 Tab. 45 1919 Tab. 46
Nombre de | Rapport ]Mois jours de:
J*
J.
P N |J* J.
X 11 _ 76 _
XI 3 5 0,600 49 29
XII 10 17 0,588 329 193
I 11 11 1,000 50 50
II 6 14 0,428 120 51i
III 19 23 0,825 212 174
IV 16 22 0,728 208 152
V 1 13 0,077 90 7
VI 1 15 0,066 198 13
Ivn — 21 — 254
(VIII — 10 — 108 — |
(IX — 11 — 87 — 1
Année 1781 669
1 669l
V
][781 0,375
l Nombre de | RapportMois jours de
J*
J.
P N
J* J.
X 11 19 0,578 248 144
XI 6 9 0,668 112 75
XII 8 9 0,889 46 41
I 7 11 0,637 100 64
II 6 7 0,857 53 45 1
III 6 9 0,668 52 35 [IV 4 15 0,267 108 29V — 9 —- 66 —
VI — 16 — 246 —
VII — 13 — 126 —
VIII — 15 — 174 —I
IX — 18 — 244 —
1575 433
433V
/L5750,275
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULÉS 275
1920 Tab. 47 1921 Tab. 48
Nombre de RapportMois jours de
J*
J.
P N
J* J.
'x 5 5
XI — 3 •— 12 —
XII 8 10 0,800 73 58
I 8 16 0,500 85 43
II 4 4 1,000 14 14III 4 8 0,500 45 23
IV 9 15 0,600 109 66
V 2 16 0,125 139 17
VI 1 5 0,200 175 35
VII — 8 — 57 —
VIII — 16 .— 168 —
IX
]
— 12 124 —
Année 1006 256
256V
10063,255
Nombre de JRapp0rtMois jours de
J* P N
J* J. J.
X 10 15 0,668 133 89
XI 12 20 0,600 161 97
XII 13 23 0,565 257 145
I 10 17 0,588 138 81
II 5 6 0,832 32 27
III 5 10 0,500 41 20
IV 8 18 0,444 142 63
V 2 15 0,134 178 24
VI — 17 — 188 —
VII — 13 — 194
VIII — 14 — 166
IX — 15 — 128 —
1758 546
546V
17580,311
1922 Iab. 49 1923 Tab. 50
1Nombre de Rapport
Mois jours deJ*
J.
P N
J* J
X 3 19 0,158 166 26
XI 9 16 0,561 162 91
XII 12 17 0,705 131 93
I 14 16 0,875 103 90
II 11 16 0,687 102 70
III 9 12 0,750 68 51
IV 4 14 0,286 111 32
IV 3 17 0,177 147 26
VI 3 20 0,150 259 39
IVII — 13 — 137 —
VIII •— 11 — 188 .—
IX — 13 — 129 —
1 Année 1703 518
518V
1 7030,304 1
Nombre de RapportMois jours de
J* P ÎN
J* J. J.
X 8 8 1,000 47 47
XI 9 9 1.000 177 177
XII 11 13 0,845 89 75
I 13 18 0,722 235 170 i
II 10 13 0,768 98 75
III 14 18 0,778 129 100
IV 21 27 0,778 245 191
V 2 9 0,222 100 22,
VI — 18 — 211 —
VII — 19 — 246 — i
VIII — 17 — 288 —
IX 2 18 0,111 208 23
Année 1983 880
880
l
V/
L9830,443
276 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
1924 Tab.51
Mois
Nombre de
jours de :
RapportJ*
J.
P N
J* J.
X i — 45 149
XI 9 18 0,500 160 80
XII 19 20 0,950 234 222
I 10 10 1,000 67 67
II 9 9 1,000 51 51
III 5 11 0,455 45 21
IV 6 19 0.316 159 50
V 1 19 0,053 183 10
VI — 18 284 —
VII — 19 252 —
VIII — 26 307 —
IX — 15 — 116 —
2007 501
V
501
0070,250
RÉCAPITULATION
Nivosité moyenne à Einsiedeln.
v = 0,316 Tab. 52
Année V Ecarts sui" la moyenne
1915 0,364 + 0,0431916 0,269 — 0,047
1917 0,314 — 0,0021918 0,275 — 0,0411919 0,375 + 0,0591920 0,311 — 0,0051921 0,255 — 0,0611922 0,443 + 0,1371923 0,304 — 0,0121924 0,250 — 0,066
Moyenne. .. 0,316 + 0,234 — 0,234
Ecart + 0,234 ^ |e|"2 == 36239Écart — 0,234Erreui* à craindre
, sur la moyenne : 6,36%
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULÉS 277
Comme pour la pluviosité, les moindres carrés montrent
que la moyenne des dix années 1915-1924 est d'une exacti¬
tude bien suffisante, ce qui est un argument de plus en faveur
du mode de calcul proposé ci-dessus.
Quant à l'introduction du facteur température, nous avons
été amené à n'envisager que la moyenne des maxima des
cinq mois de mai à septembre, pour plusieurs raisons.
D'abord parce que la moyenne de l'année hydrologique n'a
aucune signification et qu'il serait trop compliqué de dé¬
tailler les calculs en formules à appliquer mois après mois.
Puis, parce que les plus fortes variations de l'évaporationphysique ont lieu en été ; les écarts autour de la moyenne
sont déjà grands en avril, mais relativement petits en face
de ceux des mois de mai à septembre. Enfin, au cours de l'hi¬
ver, l'infiltration est sensiblement constante du fait des
basses températures de l'air, de l'humidité absolue élevée et
de la faible évaporation physique. Le moment d'infiltration
d'une année à l'autre est maximum en été et minimum en
hiver. La température hivernale n'a vraisemblablement pas
d'influence au point de vue des capacités de rétention sur
l'année hydrologique suivante, si ce n'est la question de
la nivosité, déjà introduite dans les calculs. On peut donc
aisément laisser de côté ce facteur et ne caractériser une
année hydrologique que par les données suivantes :
1° P = pluviosité totale en mm.
2° T = température estivale (mai à septembre en 1 /10de degrés.
3° v = indice de nivosité (nombre < 1).4° I = capacité de rétention totale en mm.
Une remarque est encore nécessaire au sujet de la tempé¬rature. Comme il n'est pas question ici de calculer séparé¬ment les évaporations physique et physiologique qui com¬
posent l'évaporation hydrologique, c'est-à-dire de faire le
calcul physique du processus, mais d'en donner le résultat,il n'est pas nécessaire d'introduire la température absolue,
278 PRÉCIPITATIO>,S ATMOSPHÉRIQUES
mais ses variations en valeur relative, seulement. Et cela
présente un gros avantage, parce qu'il est simple de connaî¬
tre ces variations, alors qu'il est très difficile d'évaluer
exactement la température réelle de l'air dans l'ensemble
d'un bassin. Et ici, comme pour la nivosité, ces variations
moyennes sont les mêmes sur des distances parfois supérieu¬res à une centaine de kilomètres. On pourra donc aussi, au
besoin, avec quelques précautions, emprunter ces moyennes
à des stations météorologiques situées hors du rayon d'un
bassin.
Précédemment nous avons vu que l'évaporation physiqueétait proportionnelle aux maxima de température journa¬liers ; il y a donc intérêt à prendre pour ce dernier facteur
l'observation de 13 % heures.
Voici les températures moyennes mensuelles estivales
d'Einsiedeln prises à l'observation de 13 % heures :
Température estivale à Einsiedeln,
en degrés centigrades. Tab. 53
Années : 1915 1916 1917 1918 1919 1920|1921 1922 1923 1924 moy. 1 -m-1915 24Î
Mai..
Juin.
Juillet
Août.
Sept..
15,618,6
17,1
16,912,9
14,5
13,4
17,316,9
12,4
17,6115,219,8)13,918,3,17,917.7 17,9
17,7 14,9
13,116,7
15,119,717,0
16,2
16,7
18,516,2
14,6
15 1
1(5,721,3
18,7
16,6
16,217,4
16,618,1
12,3
13,812,7
21,119,215,2
13,0
18,017,317,4
12,4
15,04
16,3918,0517,92
14,60
11,5
15,317,5
18,6
13,8
T Moyenne 16,22 15,0 18,22 15,97 16,32 16,48 11,69 16,11 16,4 15,63 16,40 15,32
Différence
arec la
m») «me
-0,2 -1,1 + 1,8 0,1 -0,1 + 0,1 + U -0,3 0,0 -0,8
+ 3,2
-3,2
-1,1
Dans les calculs seront donc seules envisagées les varia¬
tions de la température autour d'un point, qui sera la
moyenne, soit 16,°40.Comme il fallait s'y attendre, la moyenne de la tempéra¬
ture est, elle aussi, pour ces dix années, très rapprochée de
la moyenne absolue. L'erreur à craindre est 0,29 degré centi-
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULÉS 279
grade sur 16°4. On n'aurait pu tomber sur un meilleur champde travail, puisque la variation absolue de tous les facteurs
peut être dessinée presque exactement autour de leurs
moyennes arithmétiques absolues.
La variation de tous les éléments est représentée à la
figure 30 et au tableau 54. Les valeurs de P, E^ et les coeffi-
Fig. 30.
280 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
vfuo
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Vf UO CN ^H vf CO ^ CO vf CO CO Sh
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Module calculé mm.Vf CO CO CD UO Vf Vf CN C0 Vf ^H ï?CD 00 CO 00 Vf UO UO CD O CO C^
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INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULÉS 281
cients d'écoulement apparents, se rapportent au centre de
gravité hydrologique du bassin total arrêté au limnigraphede Sihlbrugg et les modules calculés et mesurés sont ceux de
cette station limnigraphique. Les autres facteurs se rappor¬
tent à l'ensemble du bassin, mais sont déterminés d'aprèsles observations météorologiques d'Einsiedeln. Les nivosités
v et les températures T, exprimées par les différences ± T
autour de la moyenne de ce poste, entrent dans les calculs.
Les autres facteurs P été = précipitation estivale de mai
à septembre, A été = densité estivale et A = densité an¬
nuelle des précipitations, ne sont là qu'à titre documentaire.
\Schéma du calcul.
Il s'agit maintenant de construire la formule hydrologiquegénérale sur la base des éléments de la figure 30. Plusieurs
procédés mathématiques s'y prêtent. Nous avons songé tout
d'abord à appliquer la méthode de corrélation dont il a été
parlé antérieurement, mais sans obtenir un résultat suffisam¬
ment maniable, puis aux divers procédés de l'analyse- har¬
monique, aux déterminants et aux propriétés des faisceaux
de coniques, également sans succès. La théorie élémentaire
des permutations et combinaisons montre que de dix chiffres
avec une seule combinaison (chaque année) il n'est pas possi¬ble, mathématiquement, de tirer un résultat précis. Pour
avoir une exactitude très grande, il faudrait disposer d'un
nombre d'années considérable.
La méthode de corrélation ne peut pas non plus s'appli¬
quer ici. Toutefois, nous n'avons à calculer qu'un seul des
éléments, l'écoulement, qui est un phénomène bien continu,et nous bénéficions d'une possibilité de contrôle immuable,nécessaire et suffisante : le poids de la moyenne arithmétiquedes modules calculés doit être rigoureusement le même que
celui des modules mesurés. Étant donné qu'on ne peut trou¬
ver en Suisse un meilleur matériel et une plus longue série
282 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
d'observations continues, les coefficients que nous allons dé¬
terminer sont actuellement les plus rapprochés de la réalité.
Nous avons vu plus haut qu'il était possible d'effectuer une
séparation dans les facteurs de la formule générale, et qu'enoutre on a avantage à les grouper séparément. Nous cherche¬
rons donc à déterminer l'évaporation brute annuelle E^,qui entre dans la formule H = P — E^, appliquée au centre
de gravité hydrologique du bassin de la Sihl.
Les processus connus à introduire sont :
1° La somme des évaporations physique et physiologi¬que moins les condensations occultes, soit la perte nette, quiest sensiblement en proportion avec la variation de la tempé¬rature estivale de l'air, et s'écrirait : En = fn (T).
Mais nous préférons écrire cette relation, numérotée I,par:
E* = /,(T) ou en abrégé E,(T), (I)
pour éviter des confusions d'indices, car cette première fonc¬
tion ne servira, dans la suite, qu'à mettre en valeur les va¬
riations corrélatives de la température et de l'évaporation.2° L'évaporation, en tant qu'évaporation hydrologique
E), fonction de la pluviosité P, selon la loi exponentielle de
M. Coutagne :
Ex=E0e[ m) '
(lia)
où la valeur de E0 est liée en une certaine mesure aux varia¬
tions de T dans une même station, par la relation :
e0 = e;±e,(T), (ut)•
tel qu'on le voit sur la figure 31. Cette fonction s'écrira :
Ex = /(P, T) ou en' abrégé Ex(P, T). (II)
En effet, E^ qui est un des maxima de la fonction précé¬dente 116, est l'homologue du point Em, perte nette moyenneannuelle par définition. La différence des ordonnées E^ — Emest constante. Le point E0 qui est également l'ordonnée
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULES 283
d'un maximum oscille autour de Em sur la même ordonnée
des maxima de la fonction II. Or, à pluviosité constante
ces oscillations sont fonction de la température, c'est-à-dire
fonction de I. Il en résulte que Em étant fixé par II (E0= Ex = Em, lorsqu'on fait P = Pm dans II), E0 est fixé
par I.
Afin de rendre plus claire la résolution graphique de cette
fonction de fonction, nous avons fait une translation d'axes,en faisant passer l'axe des abscisses de I, par le point Em.Les axes des ordonnées de I et de II étant parallèles et leurs
graduations étant choisies identiques, il en résulte bien la
relation II b.
3° L'infiltration, soit conformément au bilan, les varia¬
tions de la capacité totale de rétention d'une année à l'autre.
Ce facteur est exprimé essentiellement, dans la région des
Alpes, par la loi principale qui le caractérise, soit :
I = /i(T), en abrégé I(T), (III)
c'est-à-dire l'infiltration annuelle en fonction de la tempé¬rature estivale T. C'est la fonction n° III.
4° Mais les réserves infiltrées sont aussi fonction de l'in¬
dice de nivosité v, en ce sens que plus il a neigé, pour une
même quantité annuelle de précipitations P, plus il s'est in¬
filtré d'eau dans le sol, et, inversement, moins la précipita¬tion neigeuse a été forte au cours d'années à précipitationségales, moins les réserves sont grandes. Cette loi a évidem¬
ment sa répercussion sur l'évaporation hydrologique, quivarie en conséquence au cours des années, en raison inverse
de l'indice de nivosité.
Ainsi on écrira que l'évaporation hydrologique Ex est éga¬lement fonction de l'indice de nivosité, soit :
Ex = /vW. (IVa)
Mais comme il a été dit plus haut, nous décomposeronségalement cette fonction en fonctions élémentaires, et écri-
284 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
rons que la part de l'évaporation hydrologique due aux va¬
riations de la nivosité est une fonction simple de cette der¬
nière, c'est-à-dire :
Ev = /v (v) ou en abrégé Ev (v) (IV)
En définitive, la perte brute E ? sur la pluviosité, pourra
s'écrire : E^ = / (P, T, v), où les facteurs P, T, v, sont
des fonctions définies, liées les unes aux autres. Plus claire¬
ment on dirait que E^ est une fonction de fonction.
Pour faciliter l'usage de la formule hydrologique générale,donnant la perte brute E^, sur la pluviosité P, de l'année
hydrologique, nous avons ramené les axes des coordonnées
des courbes qui expriment les diverses fonctions, à un même
système d'axes rectangulaires parallèles entre eux, dont les
abscisses sont la pluviosité P, et les ordonnées, les diverses
fractions d'évaporation composant E^.Nous avons été amené à écrire la formule générale sous la
forme symbolique suivante :
Ep = [e; ± E^(T«)] e
— *2(P - P-)2— [j I(T«o) ± Ejy^\ ± Ev(v«)]
_i TiT Tv~~ iv
i Il Il i !A B
qui s'interprète comme suit :
La perte brute E^ sur une année hydrologique actuelle a
de pluviosité P, de température T*, de nivosité % succédant
à une année précédente w, de température T^, de nivosité v0),
est égale à un polynôme composé de plusieurs membres, ar¬
rangé en une différence de deux membres A et B. Les indices
« et w, signifient l'année à laquelle appartiennent les facteurs
qui les portent.Le membre A, contient les fonctions I et II, décrites ci-
dessus, soit I : Et (Ta), dont une valeur Et, correspondant à la
valeur Ta de l'année actuelle a, est ajoutée ou retranchée à
une quantité fixe E^, pour être multipliée par l'exponentiellede M. Coutagne, en composant ainsi la fonction II : Ex (P, Ta).
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULÉS 285
Cette fonction contient donc implicitement l'infiltration
au cours de l'année actuelle a, que nous ne considérerons donc
pas isolément. L'exposant 1 est constant et dépend de la na¬
ture géologique du bassin. Le facteur P^ est l'abscisse du
maximum de la fonction. Si P = Pm, la fonction se résume
à l'ordonnée [E^ ± Et (T„)] du maximum.
A la valeur obtenue du membre A, qui est l'évaporationnette additionnée de l'infiltration de l'année actuelle, sans
tenir compte de la nivosité, il faut retrancher l'infiltration
de l'année précédente et les valeurs convenables de la fonc¬
tion nivosité, pour obéir au bilan général.La valeur de l'infiltration de l'année précédente est donnée
par la fonction III, I (Tw), à laquelle il faut ajouter ou re¬
trancher l'effet de la nivosité, suivant qu'elle a été supérieureou inférieure à la normale, dans ladite année. Cela revient
donc à ajouter ou retrancher à III, la valeur correspondantede la fonction IV, Ev (vw).
Enfin, pour tenir compte du rôle joué par la nivosité de
l'année actuelle «, sur les réserves infiltrées, ou ce qui revient
au même sur la perte brute globale actuelle, on retranche ou
ajoute au polynôme la part provenant de la même fonc¬
tion IV, Ev (va), en faisant attention aux signes.Ainsi pour calculer le module d'une année hydrologique,
les facteurs suivants sont nécessaires :
La pluviosité P, de l'année précédente w et actuelle a.
La nivosité v, » » » »
La température T, » » » »
Chacun de ces facteurs entre une fois dans la formule.
Les variations de v et de T d'une année à l'autre, seront
prises autour de leur valeur moyenne absolue tirée des dix
années d'observations de la Sihl, dans notre cas particulier.La valeur moyenne est appelée comme antérieurement va¬
leur normale (année normale).La figure 31 est la représentation graphique de la formule
générale et explique le schéma du calcul.
286 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Sur un système d'axes P (abscisses), et E (ordonnées), en
mm., on trace un certain nombre de courbes exprimées par la
formule II. Les maxima se trouvent sur une même ordonnée
à chaque point de laquelle correspond une températureactuelle T, donnée par la courbe de la fonction I, écrite sur
un système d'axes T (parallèle à l'axe des abscisses P),E (parallèle à l'axe des ordonnées E). En outre, la courbe I
passe par l'origine de ce deuxième système d'axes, origine
qui est elle-même la moyenne absolue de la températureestivale, et se trouve située sur une horizontale d'ordonnée
E normal, en d'autres termes passe par le maximum E,^de II pour l'année normale.
Sur un troisième système d'axes, parallèles aux précédentsest reporté la courbe de la fonction III, I (T). Afin de sim¬
plifier le dessin, les écarts des températures annuelles autour
de la température normale, sont reportés sur les mêmes or¬
données que les précipitations P, au-dessus et au-dessous de
l'axe des abscisses de la fonction III, axe qui est précisémentchoisi passant par la température normale. Les infiltrations I
se lisent donc sur l'axe des abscisses I ou comme au dessin
sur un axe parallèle, dessiné un peu plus bas, pour plus de
clarté. Le point ïm, d'ordonnée zéro, est la caractéristiquefondamentale de la capacité de rétention globale du bassin
examiné, c'est-à-dire la valeur de la rétention moyenne an¬
nuelle pour un temps illimité.
Enfin, toujours sur les mêmes ordonnées P, sont reportéesdepuis un axe horizontal arbitraire, parallèle à P, les hau¬
teurs de neige N en mm., telles que N = v P. Par les ordon¬
nées P, des années dont l'indice de nivosité est normal, pas¬
sera évidemment une droite dont l'équation rapportée au
système d'axes (P, E), sera l'équation de la nivosité normale
correspondant à P. L'explication se lira plus loin.
Sur un quelconque des points de cette droite, on élève une
perpendiculaire, qui forme avec elle le système d'axes rectan¬
gulaires de la fonction de nivosité Ev (v). En effet, si l'extré¬
mité de chaque ordonnée N est projetée parallèlement à v
ABAQUE DELAEORMULE HYDROLOGIQUE GENERALE DRESSE AVEC LES FACTEURS DE LA SIHL
Fig. 31.
INTERPRÉTATION DES CHIFFRES CALCULÉS 287
normal (axe des abscisses), sur la perpendiculaire (axe des
ordonnées), à chacune de ces projections correspondra une
fraction d'évaporation Ev, lue sur l'axe des abscisses.
Cette fonction nivosité sera tantôt considérée comme ex¬
primant une évaporation Ev, pour l'année actuelle, ou une
valeur équivalente, sous forme d'infiltration, portée au passifou à l'actif de l'infiltration, pour l'année précédente. Nous
avons réuni volontairement les deux processus nivosité in¬
filtration et nivosité évaporation en une seule fonction, vu
que le manque d'observations ne nous permettait pas de
faire mieux.
Comme pour la température, la nivosité normale passe par
l'origine des coordonnées de IV. Elle correspond à une
évaporation Ev = zéro.
Une fois que l'on a pu tracer cette épure, le calcul d'un
module est très simple ; en voici la marche :
1° On commence par choisir la courbe d'évaporationbrute, fonction II, qui est unique et fixée par son maximum.
Celui-ci se lit sur le diagramme de la fonction I au moyen
de la température estivale donnée T.
2° Cette courbe fixée donne immédiatement l'évaporation
hydrologique provisoire Ex, par l'ordonnée élevée sur la
pluviosité P. On la mesure.
3° On retranche à ce chiffre l'apport d'infiltration Ic„ de
l'année antérieure, lue sur le diagramme III, en fonction
de la température de ladite année et corrigée par addition
ou soustraction de l'action de la nivosité, également de l'an¬
née antérieure, lue sur le diagramme IV.
4° On ajoute ou retranche au chiffre trouvé l'action de
la nivosité de l'année actuelle,'lue sur le diagramme IV.
5° On obtient ainsi l'évaporation brute définitive Ep com¬
posée de l'évaporation hydrologique et des infiltrations.
6° On soustrait ce chiffre de la pluviosité P, on a le mo¬
dule.
288 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Exemple concret.
Soit à déterminer le module de l'année 1924. On doit pos¬
séder :
Pa = 2260 mm.
Pw = 1882 mm.
va = 0,250, soit N = 501 mm.
Vw = 0,304, soit N = 518 mm.
Ta = 15°6 ou —0°8 au-dessous de la normale 16?4.
Tw = 16?4 ou 0"0 au-dessus de la normale 16°4.
On entre dans l'abaque par la fonction I. A l'abscisse
— 0°8 correspond un point zx de la courbe E( (Ta) ; de ce pointon suit la fléchette horizontale pour arriver sur le point z2, or¬
donnée du maximum de la courbe de la fonction II, qui est
par là même définie. Au droit du point Pa = 2260 mm., on
élève une ordonnée qui rencontre la courbe II en un point z3.
On mesure cette ordonnée Pa z3 qui vaut 686 mm. et qui
correspond donc au membre A de l'équation générale, soit
l'évaporation hydrologique provisoire Ex ou perte nette de
l'année actuelle a, additionnée de l'infiltration de ladite
année.
On entre ensuite dans la fonction III, pour y lire la valeur
de l'infiltration correspondant à l'année antérieure w, I (Tw).En regard de Ttl) = 16°4, on lit I,o = 110 mm. entre les
points z4 et z5. Puis on additionne ou soustrait à ce chiffre
110 mm., l'effet de la nivosité de l'année précédente, sur les
infiltrations de cette dite année. Pour cela la hauteur de la
neige Nw = 518 mm., a été reportée sur la même ligne des
ordonnées P,„, depuis le point z6, situé sur l'axe des originesde N. Le point z7, extrémité de N, est projeté parallèlementà l'axe de la nivosité normale sur l'axe v de la fonction IV,en z8. Le segment z8 z9 = Ev = 2 mm., est justement la
quantité d'eau perdue sur l'infiltration de l'année w, valeur
qu'il faut donc porter au passif du bilan général, c'est-à-dire
ajouter à Ex, ou ce qui revient au même retrancher à Iw.
DISCUSSION DES FONCTIONS ET MISE EN ÉQUATION 289
On aura ainsi 110 — 2 = 108 mm. d'eau, ayant passé de
l'année précédente <o, dans l'année actuelle a.
Enfin, la dernière opération à effectuer est d'ajouter ou
retrancher à E), provisoire, l'effet de la nivosité de l'année
actuelle, sur l'évaporation de ladite année. La marche à
suivre est la même que ci-dessus. N„ = 501 mm., est re¬
porté sur l'ordonnée de Pa = 2260 mm., en z10 zn. De zn,
qui tombe aussi dans la zone située sous l'axe des nivosités
normales, on passe à zt2. Le segment z12 z13 = 18 mm. = Eva
est à porter au passif, c'est-à-dire à ajouter à Ex provisoire.En résumé on a, d'après la formule générale :
Ej) = A — B = 686 — [(110 — 2) — 18] = 596 mm.
Fonctions :.... I, II III IV IV
Module H = P — E = P« — Ep = 2260 — 596 == 1664 mm.
4. Discussion des fonctions et mise en équation.
La mise en équation de chacune des fonctions que nous
venons d'examiner n'est pas très aisée. Si l'allure des courbes
est apparemment simple, les coefficients divers qui les ca¬
ractérisent sont des chiffres très arbitraires. C'est d'ailleurs
compliquer le problème que de le traduire algébriquement,d'autant plus que ce mode de représentation n'apporte rien
de nouveau. Il aurait le seul avantage de faciliter l'extension
de la formule en latitude et à tous les terrains que l'on
rencontre, si leurs coefficients de rétention étaient connus
d'avance. Nous avons cherché à formuler les courbes dans
cette idée.
Fonction I.
Lorsqu'on cherche à fixer les variations d'un phénomènenaturel mesuré avec une unité conventionnelle, autour de sa
moyenne absolue, il est tout indiqué de se servir de courbes
LUGEON 19
290 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
asymptotiques facilement déformables au moyen d'un ou
deux seuls paramètres. Tel est le cas, par exemple, pour les
équations des isothermes d'un gaz parfait. L'asymptote a
l'avantage de laisser de la marge pour des observations ex¬
trêmes, tels les maxima ou minima encore inconnus, alors que
des courbes fermées excluent cette possibilité. La fonction I
rapportée au système d'axes (T, E,), s'écrira :1
[(T-0+p^}[(E(-S)-»]-C=O,équation qui contient les deux variables E( et T, et quatre
constantes, dont deux à peu près invariables suivant les
climats :
E, = valeur du maximum d'évaporation hydrologique quifixe le choix de la fonction II, en mm.
± T = écart de la température autour de la moyenne
(mai-septembre) en 1 /10 de degré (valeur qui peut être tirée
de stations situées à grande distance de la région).a et h = constantes, probablement invariables suivant les
climats.
c = constante qui dépend essentiellement du climat, soit
de la position géographique de la région (maritime, continen¬
tale).t = t\ = abscisse de la première asymptote, où tt est la
température la plus froide constatée ou probablement cons-
tatable, autour de la moyenne et a un exposant entier ou
fractionnaire ne servant qu'à fixer la position de l'asymptote.Cet exposant est vraisemblablement voisin de 1 dans la
plupart des cas.
8 = 8" = ordonnée de la deuxième asymptote, où &l est
la plus forte évaporation autour de la normale, correspon¬
dant à la plus forte température observable.
1 On reconnaîtra que cette équation, ainsi que la suivante, ne sont
autres que les courbes de Van der Waals adaptées à notre cas particu¬lier. Réf. : Olivier. — Cours de Physique générale, t. IL, p. 95. Chez
Hermann. Paris, 1923.
DISCUSSION DES FONCTIONS ET MISE EN ÉQUATION 291
On peut décrire cette courbe aussi par l'expression sui¬
vante :
T• T(E*-fc)
Log.nep. -
=-ZWt,
dans un système d'axes (E„ T), confondu avec les asympto¬
tes ; ou dans le système d'axes précédents :
a
1 7 (F. 61
r-(BT=l)^-ej- (T _<)= 0 où e= 2,718...
où les coefficients conservent alors les mêmes valeurs que
ci-dessus et d'où l'on tire aisément E( en fonction de T.
Ces formules, si elles donnent une idée très rapprochée de
la réalité, sont d'un usage peu commode. On pourrait à la
rigueur se contenter de la formule plus simple :
E, = y/ T* — c — t
où T = écart de la température sur la moyenne en 1 /10 de
degré.c = constante pluviométrique essentiellement variable
dans un même climat.
t = un facteur dépendant du climat.
Dans notre cas, cette formule est exacte pour les écarts de
température négatifs, mais sitôt que les températures positi¬ves s'écartent beaucoup de la normale, elle ne donne qu'unrésultat approximatif.
Ceci est une des raisons pour lesquelles nous préféronsabandonner pour l'instant ces méthodes purement analyti¬
ques, et ne nous aider que de constructions géométriques,
parfaitement empiriques, il est vrai, mais plus simple.Les deux branches positives et négatives de la courbe,
quoique asymptotiques aux extrêmes d'évaporation et de
température, peuvent, sans erreur appréciable, être figuréescomme des arcs elliptiques raccordés, dont les grands et
petits axes représentent respectivement les extrêmes positifs
292 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
et négatifs de température, et les minima et maxima des
évaporations maxima de la fonction IL
Pour les températures il sera très simple de calculer ces
valeurs extrêmes, par exemple, pour la Suisse romande, avec
les cent années d'observations de Genève, et pour la Suisse
allemande avec la série un peu plus courte de Zurich.
Pour Einsiedeln, nous avons trouvé dans la série 1915-
1924, pour le minimum — 1°4, en 1916, et pour le maxi¬
mum 1°8, en 1917, ce qui donne comme proportions pour les
demi-axes des ellipses : Températures négatives : grand axe
= 220 mm. ; petit axe = 190 mm. Températures positives :
grand axe = 190 mm. ; petit axe = 70 mm.
Voici à titre de récapitulation de la fonction I, les va¬
leurs de T, prises autour de la moyenne 16°4 et de E„
compté en millimètres depuis l'axe des abscisses P de la
fonction IL
Fonction I. Tab. 55
T = + 1°8 + 1?3 + o°o — 0?2 — 0?4 — 0°7 —1°4
E(mm. = 940 930 860 810 760 700 640
Comme le montre ce tableau, il est important que la déter¬
mination des moyennes des variations de température soit
bien faite, de petits écarts pouvant engendrer de notables
écarts dans les évaporations.
Fonction IL
Par la fonction I nous nous sommes libéré du facteur tem¬
pérature actuelle T. La fonction II suppose donc une tem¬
pérature constante pour chacune de ses valeurs. M. Coutagnea montré pour la moyenne d'un grand nombre d'années
quelle était la forme de la courbe d'évaporation hydrologi¬que. Nous trouvons que sa formule reste à peu près la même
DISCUSSION DES FONCTIONS ET MISE EN ÉQUATION 293
dans le cas d'une année, compte tenu des infiltrations. Elle
s'écrit alors :
Ex = (Em ± E((T) )e[^ Vm)
où, E^ = Em + 8 et, Pm = Pm + +•
E>. représente donc la somme de l'évaporation hydrologi¬que de l'année considérée a et des infiltrations de ladite
année provenant essentiellement de la pluie ; les infiltrations
dues à la neige étant traitées à part.
Em, est la valeur maximum de la fonction, pour une valeur
de T normale, c'est-à-dire lorsque Et de la fonction I, TLt (T),est égal à zéro. Cette valeur Em est fixée par la perte nette
moyenne absolue Em = 567 mm., d'un grand nombre d'an¬
nées, additionnée d'un facteur & propre à chaque climat.
Pour la Sihl g vaut 860 — 567 = 293 mm.
L'exposant 1 est comme chez Coutagne, la caractéristiquegéologique du bassin, constante que nous appellerons plusloin l'indice de perméabilité.P est la précipitation de l'année actuelle considérée et
Pm = 2176 mm., l'abscisse du maximum E^, soit la précipi¬tation moyenne d'un grand nombre d'années Pm= 1938 mm.,
plus une valeur constante ty = 238 mm., dépendante, commele facteur évaporation, des conditions climatiques.
Les constantes 6 et ^, propres à chaque climat, sont peu
variables sur le versant N des Alpes. Elles s'approchentde zéro dans les climats plus chauds, où la températurenormale s'élève au-dessus de 12°.
Il est important de ne pas oublier que l'infiltration I„ de
l'année actuelle est comprise dans cette fonction, ce qui nous
a dispensé d'introduire dans le calcul d'ensemble une fonc¬
tion qui soit propre à ce facteur. Si l'application de ce mode
de calcul ne se montre pas heureux dans d'autres cas, comme
par exemple dans les bassins perméables en grand, on dé¬
composera cette fonction II en deux composantes :
I« = h (P. Ta) et Enet = U (P, T«).
294 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
la est évidemment ajouté à Eree( conformément au bilan,
car cette valeur est reportée à nouveau au bilan de l'année
suivante.
La fonction II embrasse donc la variation de *:
E actuel, I actuel, T actuel.
Reste à introduire :
I précédent, T précédent, v précédent, v actuel.
Fonction III.
Nos recherches nous ont conduit à l'importante constata¬
tion suivante, que l'on peut ériger en loi :
Dans un bassin d'un substratum presque entièrement
imperméable, de quelques centaines de km2 de surface, les
réserves des capacités de rétention des eaux d'infiltration
sont d'une année à la suivante indépendantes de la pluvio¬sité et fonction directe de la température estivale. En outre,
les infiltrations dépendent de la nivosité, mais dans une plus
faible mesure : plus l'indice de nivosité est élevé, plus les
infiltrations sont fortes, ou moins il a neigé, moins sont gran¬
des les réserves infiltrées qui passent dans l'année suivante.
Cette loi n'est pas en contradiction avec les mesures isolées
des forestiers, elle confirme leurs résultats, quoique sous un
point de vue un peu différent.
La figure 32 schématise la loi d'infiltration.
La fonction III s'écrit d'une manière générale I = / (P, T),
où I est la quantité d'eau infiltrée au cours de l'année hydro¬
logique et représente le solde actif reporté à l'écoulement
de l'année hydrologique suivante, P est la pluviosité et T,
la température estivale. Selon la loi énoncée, P n'entre donc
pas en considération pour les bassins préalpins, et la formule
s'écrit alors simplement I = ft (T).Nous avons vu plus haut que la nivosité avait une action
directe sur les infiltrations. A supposer que, pour une année
de nivosité normale, cette infiltration ne se traduise par au-
1 Pour les valeurs numériques nous nous en référons au graphique, figure31.
DISCUSSION DES FONCTIONS ET MISE EN ÉQUATION 295
cun effet positif ou négatif, on pourra tracer (fig. 32 a), sur
les deux axes I, T, une ligne grasse qui sera l'infiltrationI = /; (T) à nivosité normale. Si maintenant cette nivositévarie autour de la normale, il est clair que l'infiltration va¬
riera aussi autour de la lignegrasse. Deux courbes pointillées,l'une pour l'effet des nivosités
positives, l'autre pour l'effet des
nivosités négatives, envelopperontces variations, que nous avons re¬
présentées schématiquement par
des zigzags. Les schémas a et b,s'entendent pour des pluviosités P.
variables, c'est-à-dire pour le cas
général I = / (P, T), où la courbe
a serait celle d'une année extrême
sèche n, de pluviosité P0, la courbe
b celle d'une année extrême hu¬
mide u, de pluviosité Pu. Tous les
cas de pluviosité, peuvent alors se
présenter entre ces deux limites,ce que nous avons dessiné par les
zigzags notés au dessin : amplitu¬des P. Lorsque ces amplitudes sont
donc réduites à zéro, comme pour
la région des Alpes, tel que nous
venons de l'énoncer, la fonction
se réduit alors à sa forme simpleI — ft (T), voyez le diagramme c.
Dans les pays des calmes équa-
toriaux, où les cours d'eau ont un régime essentiellement plu¬vial, la température joue dans la fonction III, un rôle beau¬
coup moins important. Au lieu de reporter alors les courbes
d'infiltration aux axes I, T, on les reportera aux axes I, P,et le facteur T sera pris pour remplacer les amplitudes P, en¬
tre les deux courbes extrêmes <j et u, des diagrammes a et b.
Saturation
Fig. 32.
296 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
La courbe d'infiltration I = /, (T), peut être mise sous la
forme suivante :
1 = 1.-yf-G — log nép T
Y
où T sera l'écart de la température sur la normale, S une
constante dépendant des conditions géologiques du bassin,et y une constante dépendant des conditions climatiques.Cette relation est vraie, si pour I = I0, on a : log nép T = S.
La valeur de S est d'un grand intérêt, ce serait la limite sa¬
turation du bassin, soit la capacité globale de rétention.
Dans le tableau 56, sont récapitulées un certain nombre
de valeurs que prend la fonction III, I = /, (T), pour le
bassin de la Sihl (fig. 30^.
Fonction III.
Valeur des infiltrations I en millimètres, étendus à tout le bassin, en
fonction des écarts de la température estivale T, autour de sa moyenne.
Tab. 56
T = + 1?8 + 1?3 0?0 — 0°2 — 0?8 —1?1 — 1°4
I = 20 23 100 160 220 | 240 250
Fonction IV.
La fonction linéaire de la nivosité qui a été exposée plushaut est bien simple à mettre en équation :
Soit reporté sur deux axes rectangulaires (fig. 33), la
précipitation annuelle P et la hauteur de neige N, correspon¬
dant à P de la même année. On a d'après la définition :
N.
Nivosité normale = vn =—
,soit une droite passant par
l'origine dont l'équation est N = Pvn.
L'équation générale qui lie les variations de la nivosité
prises autour de la nivosité normale, avec l'évaporation de
l'année actuelle ou les infiltrations de l'année précédente,
DISCUSSION DES FONCTIONS ET MISE EN ÉQUATION 297
ce qui revient au même quant à l'équilibre du bilan de la
formule hydrologique générale, s'écrit : Ev = /v (v).Nous avons admis qu'une nivosité normale n'avait pas
d'effet sur l'évaporation actuelle (respectivement sur les
infiltrations précédentes), c'est-à-dire qu'elle vaut Ev = o.
Dès lors, si dans une année de pluviosité Pt, il tombe N,Ni
millimètres de neige et que l'indice de nivosité Vj =—-1 soit
plus grand que l'indice de nivosité normal vnJ il doit corres-
Fig. 33.
pondre au point Nt reporté sur le diagramme, une certaine
évaporation EV1, déterminée par la fonction Evl = / (v^.Cette valeur EV1 est reportée sur les axes de ladite fonction,dont l'axe des ordonnées Ev sera choisi confondu avec l'axe
de v normal, et l'axe des abscisses v, sera la perpendiculaireélevée en un point quelconque à cette droite. Il est facile de
démontrer que la ligne qui passe par les extrémités de tous
les segments Evl, EV2... reportés dès l'axe des abscisses, sur
les lignes de projection des points N1; N2..., parallèles à
l'axe des vn, est précisément la fonction Ev = / (v).Au-dessus de l'axe vn, les évaporations seront dites néga¬
tives, c'est-à-dire que la perte annuelle devra être diminuée
298 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
de la quantité Ev trouvée, tandis qu'au-dessous de l'axe
des \, les évaporations seront dites positives et devront
être ajoutée à la perte brute annuelle, ceci comme con¬
séquence des lois du ruissellement que nous avons exami¬
nées antérieurement.
Cette règle reste la même pour les infiltrations, où Ev est
remplacé par Iv.
Comme la nivosité est représentée autour de sa valeur nor¬
male, et que dans une année normale elle est théoriquementsans effet sur l'infiltration et sur l'évaporation, il est clair
qu'en cas d'excès de neige (vI > vj, l'infiltration Iv en mm.,
que donne la fonction IV, sera à ajouter à l'infiltration don¬
née par la fonction III ; en cas de défaut de neige (vt < vjà retrancher à cette valeur. Ces opérations sont dessinées sur
la figure 32 et ont été discutées.
Voici quelques valeurs de la fonction IV, tirées de la fi¬
gure 31, se rapportant à la Sihl.
Fonction IV.
Indice de nivosité v et Infiltration I ou Evaporation Ev en mm.
Tab. 57
V = 0,250 0,316 0,364 0,443
I ou Ev = -15 0 + 20 + 55
* *
Pour transposer la formule générale dans un autre bassin
nous utiliserons le point Em (fig. 31), qui est la moyenne
absolue de la perte nette pour les dix années 1915-1924 et
qui a pour coordonnées dans le diagramme de la fonction II,P = 1938 mm. et E = 567 mm. Em sera appelé point central.
Nous avons vu qu'il a son homologue E^, dans la même
BRÈVE CRITIQUE DE LA MÉTHODE 299
fonction II dont les coordonnées sont : P^ = 2176 mm. et
Em = 860 mm. ou, prises par rapport à Em :
4> = 238 mm. et 8 = 293 mm.
Ces valeurs <\> et 8 peuvent dans certaines conditions de
climat varier suivant les bassins.
En résumé, pour une année quelconque, la perte appa¬
rente E en mm. est représentée par l'équation symboliquesuivante, où les lettres majuscules sont des fonctions bien
déterminées :
VIv année précédente > v normal.
v année précédente < v normal.
v année précédente > v normal.
v année précédente •<; v normal.
IV
5. Brève critique de la méthode.
Nous ne saurions juger impartiellement la méthode pro¬
posée sans l'avoir vérifiée sur d'autres cours d'eau, dont les
dimensions et le matériel d'observation se trouvent être dans
des conditions semblables à celles de la Sihl. On sera d'ac¬
cord, toutefois, qu'au point de vue de l'interprétation des
données disponibles, de leur valeur et de leur exactitude,ainsi qu'au point de vue purement mathématique, il n'est
guère possible de pousser la simplification plus qu'il n'a été
fait. Nous avons cherché à respecter, en les isolant, les prin¬
cipaux processus hydrologiques, afin d'éviter de tomber
dans l'empirisme ou l'extrême complexité d'une seule for¬
mule, contenant à la fois toutes les fonctions et de ce fait
de multiples coefficients de réduction, dont la recherche de¬
mande toujours un travail considérable. Si la méthode pré¬conisée offre une certaine souplesse qui doit en faciliter l'ex¬
tension, elle présente aussi quelques points faibles qu'il
E = (P«.T«)—[(Tw±%c„)±
+
Fonction n° I II III IV
300 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
s'agit de bien connaître. Car il est illusoire d'en attendre plus
que l'exactitude des valeurs qu'on y met.* Résumons les
erreurs comme suit :
1° Erreurs sur les observations, soit : de mesure, d'interpo¬lation et de répartition ; sur le calcul des moyennes. Réper¬cussion : erreur globale sur E, égale à Rt. Les erreurs par¬
tielles sont désignées par R de P, R de T..., etc.
2° Erreur systématique du calcul, qui, mathématiquement,ne devrait pas exister, provient des faits : 1° que la méthode
n'est qu'approchée de la réalité et n'est, par conséquent, pas
idéale ; 2° qu'en certaines régions des fonctions, les courbures
sont faibles, en d'autres fortes, de sorte que les erreurs gra¬
phiques sont différentes suivant les variables envisagées.
Répercussion : erreur systématique de calcul, variable avec
les observations, qui se corrige ou s'exagère d'elle-même dans
la formule générale, égale à R2.
3° Erreur résultante sur le module calculé, soit aussi erreur
globale sur le principe de la méthode, égale à R. A supposer
1 Au point de vue des extrêmes de température, nivosité et pluviositéon peut encore faire les remarques suivantes:
A Einsiedeln, pour les 50 années 1876 à 1925, la plus forte pluvio¬sité a été constatée en 1922, donc au cours de la période utilisée pournos calculs. La plus faible pluviosité fut notée en 1911, avec 1194 mm.
Mais 1921 s'en rapproche tellement avec ses 1229 mm., que l'on peutadmettre, à une bonne journée pluvieuse près, que cette année, dans
notre série, est aussi la plus sèche au cours du demi-siècle. Quant à la
température estivale, c'est 1921 qui l'emporte comme maximum sur les
autres années. La nivosité passe également par un maximum dans l'hiver
1919 et par un minimum en 1921. Le hasard qui nous a fait tomber
sur ces dix années est donc une coïncidence particulièrement avanta¬
geuse.En ce qui concerne la valeur absolue des précipitations, la décennie est
un peu humide par rapport au demi-siècle, mais sans qu'il en puisserésulter, en aucune façon, une erreur sur les valeurs de la formule générale.
Voici les erreurs à craindre sur les moyennes arithmétiques de la plu¬viosité à Einsiedeln (années civiles) :
Moyenne de 50 années (1876 à 1925) : 1617,3 mm. Erreur± 32,4 mm., soit 2,05 %Moyenne de 25 années (1901 à 1925) : 1637 mm. Erreur ± 46,2 mm., soit 2,82 %Moyenne de 10 années (1915 à 1924) : 1671 mm. Erreur± 93,4 mm., soit 5,57 %Moyenne de 2 années (1921 à 1922) : 1724 mm. Erreur± 50,6 mm., soit 29,4%.
BRÈVE CHITIQUE DE LA MÉTHODE 301
que ces erreurs soient exprimées en %, on pourra écrire la
formule générale de la manière suivante :
h±hï^=(p±p^)-(e±e!;)Dans le cas de la Sihl, qui a servi à construire la formule
générale, l'erreur globale apparente R n'excède pas 1 à 1,5 %de la valeur calculée de H., pour les dix années 1915-1924.
Cette exactitude semble paradoxale, étant donné que les
modules eux-mêmes ne peuvent certainement pas être me¬
surés avec cette approximation. Mais ce n'est pas là un fait
de pur hasard, nous avons pu nous en assurer en évaluant
approximativement les erreurs maxima i? H, RP, RT, et Rv
de chaque année, qui se détruisent ou se compensent mutuel¬
lement dans la formule. D'ailleurs six points, soit six années,eussent suffi à obtenir le même résultat. En ignorant, par
exemple, quatre modules mesurés, pour la construction de la
formule, on obtient une erreur globale de 3 %, sur les années
situées hors de la série choisie. En outre, pour des années
prises au hasard, le plus grand écart trouvé pour H n'a pas
dépassé le 5 % du H mesuré, comme le montre le tableau
ci-dessous, excepté 1925. Toutefois l'estimation de cet écart
est sujette à critique, car avant 1915, le Service fédéral des
Eaux n'a publié aucun des débits de la Sihl. Ces derniers
modules ont été calculés ici à l'aide des hauteurs limnimétri-
ques moyennes pour l'année civile, grâce à une courbe qu'ila été facile de tracer. Ce procédé donne lieu à des erreurs
pouvant atteindre ± 3 %, à notre avis. Une autre source
d'inexactitudes pour les dits modules vient de ce que, nous
adressant non pas à l'année hydrologique, mais à l'année
civile, la nivosité a dû être partiellement négligée. Puis dans
ce cas aussi, l'estimation des précipitations n'est exacte qu'à± 5 % près, les données du totalisateur des Clarides ne
datant que de 1916.
La formule donne apparemment les meilleurs résultats
pour les années d'extrême sécheresse ou d'extrême pluviosité
302 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
(1911 et 1910). Au tableau 58 sont résumés les calculs
d'application de la formule, à des années situées en dehors
de la série 1915-1924, ce qui forme ainsi un contrôle sur la
valeur de la méthode préconisée.
Contrôle grossier de la formule hydrologique générale pour
l'année civile, excepté 1925, sans tenir compte de la nivosité.
Estimation des erreurs : R,, Hh 4% pour les fortes pluviosités.-H 7% pour les faibles pluviosités.
R2, zh 6% quelle que soit la nivosité.
Erreur sur les infiltrations, dues à l'emploi de l'année civile, 5%.
Exactitude à attendre + ou 10% du module.
Tab. 58
Année
civilermoy
mm.
Température T par rapportà la moyenne 1915/24a = année actuelle
•<) = année précédentemm.
Module
calculé
mm.
Module
mesuré
mm.
Erreur
relative
%
1903 1770«o = _ 1,3« = — 0,7
390 1380 1320 + 4,5
1904 1860co = — 0,7a = + 0,5
560 1300 1368 — 5,0
1910 2400w = — 1,2a = — 1,4
350 2050 2040 < 1,0
1911 1390<0 = — 1,4a = + 2,1
380 1010 1002 < 1,0
1912 2030co = + 2,1a = — 1,6
560 1470 1530 — 3,9
1913 1880co = — 1,6a = — 1,1
480 1400 1348 + 3,9
*1925 1612«o = — 0,8a = — 0,6
430 1182 1098 + 7,7
*
* *
Quoi qu'on en dise, il ne faut pas attacher à la questiondes erreurs trop d'importance. Soit avec la méthode préco-
BRÈVE CRITIQUE DE LA METHODE 303
nisée ici, soit par tout autre moyen, l'exactitude parfaitedans les calculs ne sera jamais atteinte, tant que l'on ne saura
pas dire rigoureusement le degré de précision de la mesure
des facteurs introduits. Notre formule est tirée de l'expé¬rience, on connaît le degré d'exactitude des résultats qu'ellepeut donner, puisqu'ils sont eux-mêmes vérifiables par l'ex¬
périence. Or, comme ces résultats sont en définitive très
rapprochés de la réalité, qu'importent alors les erreurs inter¬
médiaires dans les calculs ?
Tout nous porte à croire que ces erreurs intermédiaires
existent, qu'elles peuvent être importantes, mais qu'ellessont certainement constantes et se répètent toujours les mê¬
mes, pour des mêmes valeurs de pluviosité, nivosité, tem¬
pérature, à altitude variable ou fixe. Or, comme la formule
embrasse simultanément toutes ces différentes valeurs, il
est clair que les résultats qu'elle donne, ont toujours la même
sécurité.
Pour l'année hydrologique 1925, l'écart s'explique diffici¬
lement. Il est probable que la fonction II subit une altération
pour les pluviosités comprises entre la moyenne et l'extrême
sécheresse. Mais provisoirement on ne saurait tenir comptede cette seule année pour modifier le schéma général de
calcul, ce qui entraînerait le partage de la précipitationannuelle en tranches mensuelles ou trimestrielles et l'éva¬
luation séparée des évaporations correspondantes.Une bonne part des erreurs provient aussi de la manière
grossière dont a été introduite la température. Dans un cas
comme 1925, il eut été nécessaire de calculer séparément les
évaporations mensuelles estivales et d'éviter la méthode
approximative de la moyenne.
Voici à peu près les erreurs maxima tolérables en % dans la
composition des moyennes des facteurs, pour que l'erreur
globale R n'excède pas 2 % de H dans les années normales,comme dans les années à extrêmes.
Pour P total, réduit au centre de gravité du bassin : 2 %.(Parfaitement admissible comme il l'a été démontré au début
304 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
de cette monographie ; dans les conditions les plus défavo¬
rables, ce chiffre correspondrait à une erreur de 15 millions
de m3 sur 480 millions de m3 écoulés.) L'évaluation de T
doit être faite à 2 /10 de degrés. Cette exactitude est presque
toujours dépassée, étant donné le grand nombre de chiffres
exacts à 1/10 près, servant à calculer la moyenne. L'évalua¬
tion de v à 5 % n'entraîne pas d'erreur appréciable.La formule hydrologique générale pour le calcul du module
instantané semble donc remplir les conditions de précisionsuffisantes qu'exige la technique des installations hydroélec¬triques.Au cas où l'on ne désire qu'une valeur moyenne de l'écou¬
lement, pour un certain nombre d'années, il est évident que
le calcul ne subit pas de modification : ce n'est pas la valeur
moyenne des éléments qu'il faut introduire, mais le calcul
complet pour chaque année séparément est nécessaire. La
moyenne ne se calcule qu'ensuite.
On nous objectera que dans bien des cas cette formule est
inutilisable, en particulier si l'on ne peut bénéficier des
données de température et de nivosité de la région même et
surtout si le coefficient pluvionivotopographique est très
petit. Nous pensons qu'il ne faut pas exagérer ces divergen¬ces, car il est presque toujours possible, dans la région des
Alpes, au moins, de s'en rapporter à des extrapolationsfaciles quant à la loi de variation des précipitations avec
l'altitude, les variations de température et la nivosité. Seule
est délicate l'estimation des infiltrations, partant, la positiondes axes de coordonnées des diverses fonctions, qui dépen¬dent des capacités de rétention. D'une manière générale,on s'aidera des tableaux et des diverses règles traitées au
cours des chapitres précédents, en ayant sous les yeux le
schéma de la Sihl.
Pour reconstruire la formule hydrologique d'un bassin, il
semble que dix années consécutives soient suffisantes. S'il
IDENTIFICATION DES FACTEURS, CENTRE DE GRAVITÉ 305
s'agissait d'obtenir des résultats rigoureusement exacts avec
la méthode préconisée, 60 années d'enregistrement limni-
graphique et pluviométrique seraient un minimum.
§ IV. Extension de la formule générale
à des bassins quelconques.
1. Identification des facteurs ; centre de gravité hydro¬
logique.
La recherche de la formule générale dans un cas déterminé
ne servirait à rien, si elle n'était pas accompagnée d'une
seconde formule permettant de l'adapter à d'autres cours
d'eau. Mais avant d'examiner la forme de celle-ci, il faut
pouvoir identifier entre eux les valeurs des facteurs des
bassins, au moyen d'une commune échelle de comparaison,et au besoin effectuer des réductions à la même altitude.
Pour chaque bassin, on rapportera donc les volumes d'eau
précipitée, infiltrée et évaporée, à des tranches d'eau répan¬dues sur toute la surface et de hauteur moyenne P, E, I, en
mm. Ces hauteurs seront à leur tour rapportées à un seul
point, le centre de gravité hydrologique du bassin, que l'on
définit ainsi : c'est le point situé sur l'isohypse, ou l'isohiète
dont l'altitude est donnée par la densité moyenne ou hau¬
teur moyenne des précipitations réparties naturellement sur
tout le bassin. Ce point est souvent situé près du centre de
gravité topographique, ou altitude moyenne des isohypses.Pour la plupart des bassins étendus des Préalpes, le centre
de gravité topographique et le centre de gravité hydrolo¬gique sont très voisins ou confondus. Ce fait se comprendaisément, puisque c'est la forme même des profils du terrain
qui détermine la forme de la courbe des densités des précipi¬tations. Donc dans certains cas où les données de la pluvio¬sité dans les hautes régions font défaut, on encourra le
LUGEON 20
306 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
minimum de chances d'erreurs en rapportant tous les calculs
au centre de gravité topographique, voisin du centre de
gravité hydrologique indéterminable.
En outre, dans les régions inexplorées dont on veut étu¬
dier la pluviosité, il y a un intérêt primordial à placer les
nouveaux pluviomètres le plus près possible du centre topo¬
graphique. Les mesures de l'évaporation physique devront
également se faire dans cette zone. En principe, les données
d'un pluviomètre au limnigraphe ou au niveau de base, d'un
autre au centre, d'un troisième au sommet, doivent suffire
pour construire en quelques années tout le mécanisme hydro¬
logique d'un bassin de quelques centaines de km2 de super¬
ficie, ainsi que nous le montrent les cours d'eau suisses du
type préalpin. Si les erreurs dans les calculs de la Sihl sont
très petites, c'est que nous avons précisément attaché une
très grande importance aux données des pluviomètres situés
vers le centre de gravité hydrologique et, année après année,
corrigé avec grande précaution les écarts dans la répartitiondes volumes des deux vallées d'Einsiedeln et d'Ober Iberg.
Ajoutons que si la courbe de variation des précipitationsavec l'altitude restait toujours semblable à elle-même et ne
se déformait pas par rapport à la courbe moyenne d'un grandnombre d'années, il suffirait d'observer la pluie avec un seul
pluviomètre situé au centre de gravité, pour avoir d'un
coup le volume total précipité. Ce cas se présente si l'indice
de variabilité des précipitations est petit. Tout autre pointde comparaison ne donnerait pas la même précision. Dans
les Alpes, on ne peut malheureusement pas simplifier ainsi
les choses.
2. Détermination graphique du centre de gravité hydro¬
logique.
La représentation graphique usuelle des précipitations
(fig. 34) que l'on trouve dans les traités d'hydrologie a un
grave défaut, qui consiste en ce que la courbe des précipi¬tations suivant l'altitude est déformée et ne représente plus
DÉTERMINATION GRAPHIQUE DU CENTRE DE GRAVITÉ 307
le sens physique du phénomène. Il n'est donc pas aisé d'éta¬
blir des comparaisons rapides entre les bassins, non plus que
d'année à année.
L'emploi de la méthode théorique énoncée au début de cet
ouvrage, permettant cle calculer exactement la densité
comme le débit des précipitations en n'importe quel pointdu bassin, est trop compliquée pour le calcul du module,
Fig. 34.
les précipitations, d'ailleurs, n'étant pas exprimées en den¬
sité, mais en mm. de hauteur.
Nous proposons la méthode suivante (fig. 35), qui pré¬sente l'avantage d'être entièrement graphique.
Les surfaces planimétrées entre les isohypses de 300 en
300 m. (Publications du Service fédéral des Eaux) sont
reportées horizontalement sur l'axe des altitudes, qui forme
l'axe des ordonnées d'un système de coordonnées rectangu¬laires. Le centre de gravité topographique G est obtenu
simplement au moyen d'un polygone funiculaire construit
sur les lignes de rappel passant par les centres de gravité des
tranches de surfaces.
Le degré d'exactitude avec lequel est déterminée l'alti¬
tude du centre de gravité topographique, que l'on peut aussi
appeler Yaltitude moyenne des surfaces du bassin, dépend du
nombre de sections par lequel est partagé le bassin. Plus le
308 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
nombre des tranches augmente, meilleur en est le résultat.
Dans les Préalpes, il n'y a pas d'intérêt à descendre au-des¬
sous de tranches de 100 m. de hauteur.
La courbe hypsographique se trace en reportant les tran¬
ches en ordonnée, sur les abscisses. Les abscisses sont les
surfaces cumulées depuis le niveau de base ou limnigraphe,jusqu'au sommet.
Notre méthode consiste maintenant à diviser le bassin en
éléments de surfaces s, tous égaux entre eux et à élever sur
eux-mêmes les hauteurs Px, P2, P3... Pn des précipitationscorrespondant à leurs altitudes respectives.Dès lors, si le bassin est divisé en n parties égales s, le
volume total des précipitations est :
PV=*(P1 + P8 + PS+....PB)
ce qui s'obtient par un graphique fort simple, qui supprimel'obligation d'utiliser un planimètre, ou d'effectuer un grandnombre de multiplications.On divise l'axe des abscisses de la courbe hypsographique
en parties égales (par exemple de 10 km2). Sur chacune de ces
divisions on élève des ordonnées qui rencontrent ladite
DÉTERMINATION GRAPHIQUE DU CENTRE DE GRAVITE 309
courbe en n points, projetés ensuite parallèlement aux
abscisses sur l'axe des altitudes. Ainsi, surfaces et altitudes
sont confondues sur une même droite. A chaque segment
limité entre deux des points projetés correspond une tranche
de même surface s. En outre, à chacun des points de ces
segments correspond une hauteur de précipitation unique,
reportée perpendiculairement à l'axe des altitudes. La courbe
de la variation des précipitations P avec l'altitude A n'est
ainsi pas déformée, puisqu'elle est construite sur un systèmed'axes rectangulaires, PA, et que l'on peut choisir comme
unité de P n'importe quelle valeur.
Dès lors, pour avoir l'altitude du centre de gravité hydro¬
logique ;?, c'est-à-dire l'altitude exacte de la moyenne des P,il suffit de déterminer la position sur l'axe A du moment
fléchissant maximum des poids de chacun des trapèzes de
surface : sPt, sP2, ... sP^, ce que Von obtient immédiatement
par un polygone funiculaire.
L'altitude du centre de gravité hydrologique Z est par
définition le point d'application de la précipitation moyennePm. Pm n'est autre que la valeur de la résultante des poids
On a :
Pm4=^±M:^jj(pf+p.+ pj
où, en résumé, Vm est la longueur de la somme des P mesurés
sur le polygone des forces, divisée par le nombre de sections n.
Si le nombre des sections est très grand et la variation des
précipitations avec l'altitude très régulière, on pourrait se
dispenser de construire le polygone des forces, en mesurant
simplement dans le diagramme PA l'ordonnée de la ligne de
rappel du moment fléchissant maximum. Celui-ci peut,dans bien des cas, être considéré comme confondu avec la
ligne d'action de la résultante des «P. Le problème est ainsi
simplifié.Remarque : Si la surface n'est pas exactement divisible et
310 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
que la n'time division est une fraction de s, on n'aura sim¬
plement dans le polygone des P, qu'à réduire d'autant le
dernier des produits sP, et la formule s'écrira :
PV = S(P1 + P2 + P„_1 + rP„)
où r est le coefficient de réduction de surface, toujours
constant et égal à -~-- La moyenne Pm sera dans ce cas égaleP
à -g-, où Pv est calculé avec la relation ci-dessus.
L'avantage de ce procédé de calcul de la précipitation
moyenne est notable. Il permet de voir clairement quels sont
les accidents secondaires, qui, d'une année à l'autre, défor¬
ment la courbe de variation des précipitations avec l'alti¬
tude, et en même temps de les enregistrer dans le calcul.
On sait que la densité des précipitations varie non seule¬
ment avec l'altitude, mais aussi avec le vent dominant.
Dans un climat compliqué comme celui du versant N des
Alpes, régi par deux courants de perturbations, l'un océa¬
nien, W~^E, l'autre méditerranéen E-^W, il n'est pas tou¬
jours simple de dire, pour une année hydrologique, quel est
l'effet du vent dominant sur la variation de la densité des
précipitations. Toutefois, nous avons constaté qu'en des an¬
nées humides où domine le courant W~>E, les précipitationscroissent beaucoup moins rapidement avec l'altitude qu'endes années sèches et fraîches où soufflent les vents du sec¬
teur NE. Les inclinaisons des courbes sont différentes. Ce
phénomène est représenté schématiquement à la figure 36.
Il résulte de là, que le centre de gravité hydrologique n'est
pas nécessairement fixe, mais qu'il oscille entre certaines
altitudes limites aisément déterminables d'avance. Toute¬
fois ces oscillations sont très faibles dans les bassins des
Préalpes ; quelque dix mètres pour la Sihl. On peut 'donc
admettre que le centre de gravité hydrologique est prati¬
quement fixe.
Pour le bassin de la Sihl, arrêté au limnigraphe de Sihl-
brugg, le centre de gravité hydrologique déterminé au moyen
DÉTERMINATION GRAPHIQUE DU CENTRE DE GRAVITÉ 311
de la courbe des précipitations moyennes de dix années et de
la courbe hypsographique d'Epper (tranches de 100 en
100 m.) est situé à l'altitude de 1140 m., très voisin du centre
topographique à 1130 m.
La pluviosité moyenne correspondante, donnée par le
diagramme, est exactement celle de la figure 28, p. 258, soit
1938 mm. L'évaporation à cette altitude valant 567 mm., le
module moyen est : 1938 — 567 = 1371 mm. Ce calcul
vérifie donc rigoureusement les chiffres que nous avions
obtenus antérieurement.
INFLUENCE DU RÉGIME DES VENTS SUR LA
RÉPARTITION DES PRÉCIPITATIONS SUIVANT L'ALTITUDE
N .011: N
wp /;E
c
Gnnée humidePc]d Pcp.
Qnnée sèche
Fig. 36.
Pour calculer le module d'écoulement de chaque cours
d'eau, on commencera donc par déterminer exactement :
1° Le centre de gravité topographique S.
2° Le centre de gravité hydrologique %, en s'aidant du
point précédent ou d'analogies, pour la pluviosité.
3° La pluviosité moyenne du bassin ou pluviosité au
centre de gravité hydrologique.
4° La perte nette par évaporation au centre de gravitéhydrologique, que l'on calculera au moyen de la formule de
transposition.
312 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
3. La formule de transposition.
Le principe de cette formule et son analyse mathématiquea été exposée en détail au chap. troisième, I II, 2, IL Elle a
été basée sur la variation de l'évaporation physique avec
l'altitude, analogue à celle de l'évaporation hydrologique,mais ne saurait remplir les conditions du problème, puis¬
qu'elle ne comprend pas la somme des évaporations physi¬
ques et physiologiques moins la condensation.
Nous entendons plus précisément, sous formule de trans¬
position, la relation algébrique qui permet de calculer à une
altitude moyenne quelconque la perte nette moyenne, sur la
moyenne des précipitations d'un grand nombre d'années
hydrologiques.
Cette fonction qui s'écrit :
i-'X.mo}]. J\* "*^i/«j \]t. quelconque
doit servir à transposer la formule hydrologique généraleétablie expérimentalement dans un bassin dont le centre de
gravité hydrologique est d'altitude A, en un bassin d'altitude
A', dont on ne possède aucune indication sur l'écoulement,
situé, cela s'entend, dans un climat semblable dans ses
grandes lignes.Autrement dit la formule de transposition donne le point
central Em de la formule générale, moyenne absolue des
pertes (fig. 31), point à partir duquel on reconstruit l'épure.Il est difficile d'écrire une formule de transposition pour
tout le versant nord des Alpes à cause de l'insuffisance du
matériel d'observations. En effet, la perte nette E hydrolo¬gique, ou évaporation tout court, n'est pas seulement dépen¬dante des facteurs envisagés, pluviosité, température et
nivosité, mais est une fonction directe de la perméabilité des
bassins. Or ce facteur n'est justement pas facile à mesurer.
Une loi géologique connue dit que la perméabilité est en
LA FORMULE DE TRANSPOSITION 313
raison inverse de la densité du chevelu hydrographique,c'est-à-dire que plus le nombre de cours d'eau augmente
pour une même surface, plus le sous-sol est imperméable.Cette loi joue un rôle considérable dans le mécanisme
hydrologique. Ainsi on reconnaîtra d'après la carte topo¬
graphique, que dans les régions où la densité des cours d'eau
est grande, l'évaporation est toujours plus intense, à pluvio¬sité, température et altitude égales, que dans les régions où
cette densité est faible.
Parmi les phénomènes qui concourent à activer les éva-
porations dans les bassins imperméables, il faut citer le
processus même du ruissellement et l'action prépondérantede l'évaporation purement physique. Alors que dans les
bassins perméables en grand, les pluies fraîchement tombées
sont presque aussitôt protégées contre les évaporations dues
aux agents extérieurs au sol, du fait qu'elles s'infiltrent sans
difficulté, dans les terrains imperméables, par contre, elles
séjournent plus longtemps à l'air libre puisque l'infiltration
y est lente et difficile et, par conséquent, s'en évaporent
davantage.Cette règle s'étend, cela va sans dire, à la majeure partie
des précipitations courantes d'une année, et non pas aux
rares pluies catastrophales qui, grâce à leur forte densité,ruissellent sur les plus faibles pentes, souvent sans avoir le
temps de s'évaporer.Dans les bassins imperméables, c'est donc surtout la
capacité infrasuperficielle, l'humus, qui joue le rôle prin¬
cipal. Les plages mortes, les grandes surfaces qu'occupentles nombreux lits d'écoulement, y favorisent d'autant plus
l'évaporation physique et physiologique, qu'elles sont
inexistantes dans les bassins perméables.Les rapports entre les écoulements moyens annuels ou
modules d'années de crue et d'années d'étiage, viennent en
une certaine mesure justifier ces assertions : dans les bassins
imperméables ces rapports sont petits, dans les bassins
perméables ils sont grands, comme le prouve le tableau 59.
314 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Rapport entre les modules de crue et d'étiage (1922 sur 1921) l
ïab. 59.
Bassins perméablesen grand
Bassins peu j Bassins quasiperméables ! imperméables
(Alt.: 1100 m.)
(Alt. : 700 m.)
Venoge , , 10,1
(Alt. : 650 m )
Sihl 2,54(Alt. : 1140 m.)
Grande Emme 3,15(Alt.: 1005 m.)
Birse 2,75(Alt. : 900 m.)
(Alt. : 900 m.)
Petite Emme 2,48
(Alt.: 1118 m.)
En effet, soient deux bassins voisins, l'un perméable en
grand ir, l'autre imperméable i, recevant au cours de deux
années des mêmes quantités de pluie Pu pour une année très
humide u et Pa pour une année très sèche a. On a par l'expé¬
rience, comme le montre le tableau 59, H- et Hj, étant les
modules :
H~ H*,
H H„
Et si, d'une manière générale, on remplace les modules H
par leurs valeurs équivalentes H = P — (E + I), P = plu¬
viosité, E = évaporation nette, I = infiltration, les indices
étant conservés, l'inégalité s'écrit :
P„ ~ (Esu + l,u) P„ - (EtJ + Iiu)
Ps — (Em + I*») P, — (E£, + I;,)
1 La perméabilité est établie d'après le degré de perméabilité i (voir plusloin) et la carte géologique de la Suisse [218]. Nous attirons l'attention
sur le fait que le bassin de la Broyé et celui de la Venoge, partiellement,appartiennent géologiquement à la catégorie des bassins, peu perméables.La roche-mère est même imperméable dans la Broyé. Mais la capacitéinfrasuperficielle, formée de terrains quaternaires, est, par contre, très
perméable. La notion du degré de perméabilité, au point de vue du mé¬
canisme hydrologique est donc un peu différente de celle qu'en ont donnée
les géologues. Il faut aussi noter que les rapports des modules diminuent
à mesure que l'on s'élève.
LA FORMULE DE TRANSPOSITION 315
Il est facile de démontrer que cette inégalité est satisfaite
si :
(E + I) < (Et{1 + liu) (1)
{Em + Iw) > (E,0 + ha) (2)
Pour que Févaporation E, soit dans les deux cas, d'année
humide et d'année sèche, plus grande que E„, il suffit que
dans la relation 1, on fasse I = I;j, et dans la relation 2,
I;a < lus, sous certaines conditions.
Les infiltrations totales I, de l'année hydrologique, dépen¬dent avant tout des diverses capacités de rétention des
deux bassins. Or il est un fait certain, c'est que dans les
années humides, ces capacités atteignent leur maximum,c'est-à-dire que les sources ont leur plus fort débit dans l'un
et l'autre des bassins. Relativement à la position des volumes
capables d'être emmagasinés, les infiltrations peuvent donc
être considérées comme équivalentes, dans les deux bassins,en cas d'années humides. La relation 1 serait ainsi démon¬
trée.
Au cours d'une année sèche, par contre, les infiltrations
«ont nettement plus grandes dans les bassins perméables,tel que le prouvent les études géologiques de nombreux
auteurs. Mais les difïérences avec les bassins imperméablesne sauraient être grandes, car nous avons vu en analysant la
fonction III, I = / (T), de la formule générale, — dans
laquelle la pluviosité est comprise implicitement puisquesous notre climat les années sèches coïncident avec les tempé¬ratures chaudes et inversement — que les infiltrations glo¬bales ne dépassent guère 50 mm. pour des températures de
0°5 au-dessus de la normale.
La différence IOT — 1^ est donc positive, mais petite
par rapport aux évaporations. Il en résulte qu'en écrivant la
relation 2 :
Ei? > Etks + (Ij:o — lh), que,
E'iq ^> VaT.I1,
316 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
puisque la quantité positive entre parenthèses est de toute
façon plus petite que Ena. Ainsi, dans les années sèches,
l'évaporation des bassins imperméables serait aussi plus
grande que celle des bassins perméables en grand. Cette
condition étant réalisée pour les extrêmes de tempéra¬ture et de pluviosité, l'est aussi pour la moyenne, a
priori.Un autre phénomène peut diminuer considérablement la
perte apparente E, telle qu'elle a été définie par E réel
moins C. l Ce sont les condensations occultes C pouvant
atteindre 100 à 300 mm. par an, dans les bassins perméablesen grand. Car, en effet, dans les cavités et les grottes, il se
condense avec facilité de grandes masses d'air humide, fait
qui explique, qu'à égalité d'altitude et de précipitation, il
peut y avoir entre les bassins perméables et imperméablesdes évaporations physique et physiologique égales, mais
des évaporations hydrologiques très différentes. Pour être
dans la vérité, il faudrait pouvoir ajouter C à P, C étant
essentiellement fonction de la perméabilité. On verrait qu'àpluviosité égale, la perte réelle est sensiblement constante
en toute région.Une analyse détaillée des conditions d'écoulement de
l'Areuse, connue pour traverser des terrains types perméa¬bles en grand et être alimentée par de nombreuses résur¬
gences, nous a conduit à admettre qu'en certaines années les
condensations sont si fortes que l'écoulement est supérieur à
la quantité d'eau tombée sous forme de pluie ou de neige.Tel est le cas pour l'année 1924.
Pour des cours d'eau de ce genre, la méthode généralen'est guère susceptible de donner de bons résultats. En
majorant P moyen de 200 mm., valeur probable des conden¬
sations, les calculs concordent.
Une méthode qui est certainement appelée à rendre des
services à l'hydrologie, est dans ce cas la notion de moment
1 Voir le bilan, tableau 25, chap. I, | 1', 6, page 238.
LA FORMULE DE TRANSPOSITION 317
d'infiltration, définie plus haut. Si l'on peut un jour établir
par l'expérience des tables de moments d'infiltration
moyens, pour tous les genres de bassins, il sera possible avec
quelques mesures éparses et de courte durée des débits, des
précipitations, et de la température d'une région, de réta¬
blir par le calcul les oscillations maxima et minima des débits
correspondants aux plus fortes précipitations et aux pluslongues sécheresses et par là les rétentions. Ainsi les observa¬
tions d'un mois d'été et d'un mois d'hiver suffiront pour choi¬
sir sur un abaque, la courbe générale des moments d'infiltra¬
tion de la région, tirée des moments trouvés expérimentale¬ment.
Puisque pour des conditions météorologiques et des alti¬
tudes identiques, les évaporations ne sont pas les mêmes, il
est important d'en connaître les différences pour pouvoirintroduire le facteur, perméabilité dans la formule de trans¬
position. Ici, malheureusement, les chiffres précis font encore
défaut, et il faut s'en tenir à des approximations.Un moyen simple permet de se rendre compte du degré
de perméabilité i des bassins, et facilite les comparaisonsdes uns aux autres. Il consiste à former le rapport :
. longueur totale des lits d'écoulement en km.
surface totale du bassin en km2
i augmente en raison de l'imperméabilité et diminue en rai¬
son de la perméabilité.Les plus grands écarts de l'évaporation E à pluviosité et
altitude constantes correspondant aux extrêmes i, soit E
imperméabilité moins E perméabilité en grand, sont aux
altitudes moyennes des cours d'eau préalpins de l'ordre de
380 mm.
Dès lors, les erreurs maxima sur le module moyen qui
pourraient résulter de l'évaluation assez aléatoire de i, va¬
rient de 10 à 20 %. Ces erreurs diminuent inversement à
l'altitude.
318 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
La formule de transposition s'écrit :
EB = F(P,A,I)> (1)
On a, en outre : E„ = /(A, I), (2)
et P =/P(A). (3)
Si l'on remplace A dans 2, tiré de 3, on a :
En = h (P, I)
qui n'est autre que la relation générale établie précédem¬ment, c'est-à-dire :
E„=E0.e
où E0 est déterminé à l'aide de I.
Dans une région restreinte, où les terrains sont semblables
et la pluviosité peu différente, cette formule s'adapte à tous
les cours d'eau, quelle qu'en soit l'altitude. Elle doit se vé¬
rifier à tous les limnimètres échelonnés sur un même orga¬
nisme. On peut l'appeler la formule de transposition à portéerestreinte.
La combinaison graphique des courbes E)m0J/ = /> (A) et
Pm03/ = fp (A), pour les dix années de la Sihl, nous a donné
une telle formule, Ire partie, chap. III, § II, 2. Du petit nom¬bre de ces courbes dont on dispose en Suisse, nous avons
essayé de construire la formule de transposition généraleembrassant le Jura, le Plateau, les Préalpes et les Grisons.
Elle répond au schéma (fig. 37), représentant la variation
des écoulements dans les trois dimensions.
L'abaque général de la formule de transposition : E„ = F
(P, A, I) (fig. 38j, qui donne donc la perte nette moyenne
E„, est construit à l'aide des fonctions EH = f2 (P) à altitude
constante, E„ = /3 (P) à altitude variable, E„ = fi (P) à
perméabilité I variable, En = f5 (A) à altitude, à perméa¬bilité I et à pluviosité variables. Il a été tenu compte aussi
du fait que la perméabilité I varie suivant l'altitude, c'est-
à-dire qu'en Suisse, à partir d'un niveau situé entre 1000
LA FORMULE DE TRANSPOSITION 319
et 1400 m., l'effet des variations des capacités de rétention
diminue progressivement avec l'altitude. C'est une consé¬
quence, d'ailleurs, des lois du ruissellement étudiées dans la
première partie, et aussi des oscillations de l'évaporationautour de la normale. A 2000 m., par exemple, à pluviosité
égale, la différence entre les évaporations d'un bassin im-
Fig. 37.
perméable et d'un autre perméable en grand, sera deux fois
plus petite qu'à 1200 m.
L'abaque, tel que nous l'avons construit, semble exact
pour les bassins dont le centre de gravité hydrologique est
situé entre 750 et 2000 m. avec des précipitations moyen¬
nes entre 1000 et 2000 mm.Nous ne saurions répondre de son
exactitude en dehors de ces limites, faute d'expérience.La lecture en est simple. On entre avec la pluviosité
moyenne P en mm. et l'altitude du centre de gravité hydro¬
logique A en mètres, par les deux axes rectangulaires plu¬viosité et altitude. Du point obtenu on trace une parallèleà l'axe des P. Elle rencontre l'axe des perméabilités en (3.
320 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Suivant que le bassin est perméable ou imperméable, on suit
respectivement à gauche ou à droite de l'axe des perméabilitésla courbe de perméabilité des maxima. On arrive, par exem¬
ple, sur un point y. La parallèle à l'axe P qui passe par y
rencontre l'ordonnée P en &. On suit la courbe d'égale éva¬
poration passant par S. Sur la courbe en cloche (courbe
d'évaporation du genre de celle de Coutagne) se trouve au
droit du point g situé sur l'axe P la perte cherchée En. Le
choix de la courbe en cloche est déterminée par le point y,
en suivant yt y2 y3. Des fléchettes indiquent sur la figure la
manière de suivre les courbes.
Pour la construction de l'épure de la formule hydrologiquegénérale (module pour une année), on cherche sur le dia¬
gramme (fig. 38), la valeur du E moyen = Em, en fonction
de P, A, I, puis on effectue simplement une translation des
axes principaux du diagramme établi pour la Sihl (fig. 31).Ainsi pour l'axe des P (fonction II) la pluviosité moyenne
est placée au droit du point Em, et l'ordonnée Vmoy Em,diminuée ou augmentée de la différence en mm. de Eft donné
par le diagramme (fig. 38), moins le Em de la Sihl. Pour la
fonction III, l'axe des T est aussi déplacé par translation
d'une valeur variable suivant le degré d'infiltration et égaleà I„ = 200 mm. en cas de perméabilité en grand et lm= 50 mm. en cas d'imperméabilité.
Ces valeurs Im se lisent autour de l'axe des perméabilitésnormales, dans le diagramme (fig. 38).
4. Vérification générale sommaire de la méthode de
calcul proposée.
Dans les tableaux qui suivent on verra qu'il y a souvent
d'assez grands écarts sur la formule de la Sihl. Malgré cela
ces premiers résultats démontrent que le principe de la mé¬
thode proposée est exact. Il ne s'agirait, pour arriver à un
résultat plus précis, que de calculer laborieusement tous les
facteurs et coefficients de chacun des bassins, avec les pro-
ABAQUE GENERAL DE LA FORValable pour le vers;
(Construit avec les modules moyens de
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ILE DE TRANSPOSITION 0(p,aj)nord des Qlpesours d'eau du type pluvial préalpin)
Vérificationd
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formuled
e
transpositionsur
à"autrescours
d'eau.
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b
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Bassin
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du
limnimètre
m.
Alt.
du
sommet
m.
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0
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1430,02
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4
0
458,0
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0
381,0
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8
3
Superficie
du
bassin
km2
Altitude
des
centres
de
gravité
enm.
%=
hydrologique
S=
topographique
Rapport
Pluvionivo- topograph
ique
Pau
centre
hydrologique
mm.
U
tiré
delà
formule
mm.
H
mesuré
Hcalculê()
mm.
Erreur
apparente
deH
enmm.
1.371
(1371)
790
2
(790)
1
4
0
0
(1400)
1
0
1
0
(1020)
-f
10
1
1
5
4
(1154)
1
1
2
6
(926)
—
200
579
(575)
—4
1
6
1
0
(1610)
526
(540)
+14
1
0
0
0
(970)
—30
537
(530)
—7
Nombre
d'années
S
i
h
l
à
Sihlbrugg.E
m
m
e
à
Emmenmat.
E
m
m
e
à
Schangau.PetiteE
m
m
e
à
Wertenstein.Plessur
à
Liziruti.
Areuse
à Champ-du-Moulin.Broyé
à
Paverne.
Jogne
à
Broc-Cailler.*Birse
à
Moutier.
"Sitter
à
Bischoffszell.*Venogeà
Echandens.
293,11
443,14
86,8
354,8
55,1
359,7
391,8
177,5
183,09
339,00
235,0
Z S Z Z S Z S Z S Z G Z G Z
1
1
4
0
1
1
3
0
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0
0
5
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1
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600
862
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800
340
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610
550
10
1
9
1
5
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1
9
2
4
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1
9
1
8
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9
2
5
3
1
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1
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9
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1
9
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1
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1
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1
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1
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1
9
2
5
*
Chiffrest
r
è
s
approximatifs,ob
tenuss
a
n
s
la
courbe
hypsographique,
les
«Surfaces»n'étant
pas
publiéesp
o
u
r
ces
régions.
1
D'aprèsl
a
carte
pluviométrique
de
la
Suisse
P=
1735.
P
o
u
r
1918-1924,P
=
1650.
2La
moyenne
des
modulesmesurésp
o
u
r
1918-1925
est
7
5
9
.
M
a
i
s
ce
chiffre
est
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réalitétr
o
p
faible
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u
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aux
captages
des
e
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u
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de
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ville
de
Berne
etde
la
dérivationd
e
l'Ilfis.D'aprèsl
a
relationpubliéed
a
n
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l'annuaire,n
o
u
s
avons
trouvé
Hau
moinségal
à
7
9
0
.
n > H M O z B M F > S m-H a o a m u M o > n a 1-1
to
322 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
cédés employés antérieurement. Il est clair aussi que les
meilleurs résultats seront atteints dans les bassins dont l'al¬
titude du centre de gravité hydrologique sera voisin de celui
de la Sihl.
Vérification de la formule générale sur
d'autres cours d'eau, sans tenir compte de l'indice de nivosité.
(Module H, pour l'aimé civile.) Tab. Cl
Bassin Année P. moy.E 1H = P-E H Erreur apparente
calculé 1 calculé mesuréen mm. en % de H
Emme 1918
1919
1650
1715
843
783
807
932
813
941
— 6
— 9
<— 1
<— 1
1920 1440 793 647 629 + 18 + 2,91921 1140 753 387 348 + 39 +111922 2130 1073 1057 1093 — 36 -2,31923 1640 823 817 ?737 ?+ 80 +10,81924 1490 653 837 828 + 9 + 1,1
Petite Emme....
1918 1907 930 977 954 + 23 2,41919 2060 770 1290 1294 — 4 <— 1,01920 1488 580 908 967 — 59 -6,11921 1462 830 632 592 + 40 + 6,71922 2590 1040 1558 1454 + 104 + 7,11923 1910 900 1010 949 + 61 + 6,51921 1710 660 1050 1034 + 16 + 1,5
Plessur 1918
1919
1600
1820
560
580
1040
1240
1064
1243
— 24
— 3
-2,2<— 1
Areuse 1918 1445 407 1038 1061 — 23 -2,31919 1686 387 1299 1362 — 63 -4,61920 1182 237 945 923 + 22 + 2,41921 1008 398 610 468 + 142 +30,01922 1860 490 1370 1476 —106 - 7,21923 1670 410 1260 1306 — 46 -3,4
1920 985 590 395 430 — 35 -8,11921 830 660 170 170 0 0,01922 1947 900 1047 909 + 138 + 15,21923 1668 810 858 847 + 11 + 1,31924 1372 720 652 679 — 27 -4,0
1918 2062 510 1552 1511 + 41 + 2,71919 2225 425 1800 1845 — 45 -2,51920 1578 198 1380 1470 — 90 -6,1
MODIFICATION HYDROLOGIQUE DES BASSINS AMENAGES 323
Il ne faut pas attacher une trop grande importance aux
erreurs sur les années extrêmes 1921 et 1922. On sait que les
mesures des débits élevés comme ceux des basses eaux, sont
moins exacts que pour les eaux moyennes. Ces faits ont leur
répercussion sur les modules des années très humides ou
très sèches. D'autre part, les coefficients sur lesquels nous
nous sommes basé étant semblables à ceux de la Sihl, il en
résulte certainement une erreur, exagérée encore, du fait
d'avoir négligé la nivosité et remplacé l'année hydrologiquepar l'année civile.
5. Modification hydrologique des bassins aménagés.
S'il est possible de déterminer avec exactitude le volume
des eaux écoulées de bassins d'une certaine étendue, il est
indispensable aussi, lors de la création de grands réservoirs,de prévoir les modifications que ceux-ci sont susceptiblesd'apporter dans le mécanisme hydrologique d'une région.Dans la zone alpine, pour de petits réservoirs dont le
rapport de la surface au bassin de réception n'excède pas
5 à 100, aucune cause ne vient contrarier l'application de la
méthode de calcul hydrologique préconisée. Par contre, dès
que ce rapport augmente et que le volume annuel à retenir
devient voisin de celui qui s'écoule, il est nécessaire de calcu¬
ler la tranche d'eau qui s'évapore par évaporation physiqueE? et de la comparer à la perte nette par évaporation hydrolo¬gique E),, avant la construction. Car, en effet, une fois le
bassin construit, le jeu des capacités ne fonctionne plus dans
toute la zone immergée. La formule se réduit pour la nouvelle
surface à E physique = / (P).Les calculs suivants supposent un certain nombre de con¬
ditions remplies, telles que l'étanchéité de l'ouvrage et du
bassin artificiel, comme l'indépendance absolue du bassin
d'alimentation au point de vue des apports étrangers par
écoulement, où la perte de ses propres eaux en dehors de ses
limites.
324 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Soit L la surface du lac en km2, B la surface du bassin
d'alimentation du lac, S = L + B la surface totale arrêtée
au limnigraphe, emplacement supposé du barrage. P = hau¬
teur des précipitations annuelles, H = hauteur annuelle de
l'écoulement ou module, E? = hauteur de la tranche d'eau
évaporée du lac, soit l'évaporation physique, E>, = hauteur
de l'évaporation hydrologique (infiltrations comprises) con¬
nue comme étant égale à P — H ; H^, = hauteur annuelle
d'écoulement dès la mise en exploitation de la retenue.
Hj, — H est alors la hauteur d'eau perdue ou gagnée par
suite de la création du barrage.Si l'emplacement du barrage se trouve près de l'altitude
du centre de gravité hydrologique du bassin, on a les rela¬
tions suivantes :
Avant la construction :
P.S —E,.S=-H.S.
Après la construction :
P.S — (E?.L + EX.B) = H*. S,
d'où l'on tire la relation simple :
S. H — (Eç.L — E).L) = S.Ha!,ou bien :
Ey. L — Ex. L = S. H — S. H;,.,
ce qui signifie que la perte ou le gain d'eau est simplement
égal à la différence des évaporations physique et hydrologi¬
que de la surface immergée. E, est connu, Es. L est calculable.
Trois cas se présentent, ou bien E0 < E-A, alors le nou¬
veau lac favorise l'installation hydroélectrique : il s'écoulera
davantage d'eau qu'il n'en a été prévu, ou bien Ea = E>, :
il n'y a pas de modification, enfin E? > E>, et il se perd d'au¬
tant plus d'eau que le lac est grand.Ces pertes supplémentaires qui varient d'une année à
l'autre, à peu près en sens inverse de l'évaporation hydrolo¬
gique, peuvent être accrues pour des causes purement géo¬
logiques et par conséquent locales. Ainsi les différences de
pression hydrostatique dans les versants et les changements
MODIFICATION HYDBOLOGIQUE DES BASSINS AMÉNAGÉS 325
du niveau piézométrique, la naissance de nouvelles nappes
phréatiques, la surpression exercée sur des sources submer¬
gées, la perméabilité, etc., tous facteurs dont les effets
sont souvent impossibles à calculer.
Abstraction faite de ces pertes, la création de très grandsbassins dans la plupart des basses vallées suisses (rapport de
la surface immergée à celle du bassin > 20 %) est défavora¬
ble à l'économie des précipitations dans les années froides
et favorable dans les années chaudes. La perte nette quivarie avec l'altitude suivant la courbe de la figure 27, est
en moyenne à peu de chose près la même que l'évaporation
hydrologique, dès qu'on s'élève à partir de 700 m. Il en est
autrement au-dessous de ce niveau où apparemment I'éva-
poration physique l'emporte de quelques dizaines de mm.
En Suisse, de 300 à 700 m., il n'y a guère de bassins étendus
entièrement à créer pour les besoins de l'hydroélectricité.Et même si tel était le cas, la perte supplémentaire sur l'écou¬
lement serait faible.
Pour le réservoir de l'Etzel, projeté sur la Sihl, à 892 m.,
par exemple (surface noyée = 6,06 km2, surface du bassin
de réception = 156 242 km2, rapport des surfaces 7,43 %)on aurait à compter avec les pertes ou les gains suivants
en millions de m3:
Modification hydrologique du bassin de l'Etzel,
en millions de m3. Tab. 62
Années 1915 1916 1917 1918 1919 1920 1921 1922 1923 1924 Moyenne
Perte nette
après la cons¬
truction (E?)(5,4 4,9 4,6 5,5 6,3 5,7 7,9 5,9 5,6 5,9 5,77
Perte nette
avant la cons¬
truction (E-A)( 5,0 3,6 7,0 8,2 8,9 11,0 6,5 7,1 6,3 5,0 6,86
Différence
-0,4après la cons¬
truction :
gain d'eau +
perte d'eau —
-1,3 + 2,4 + 2,7 + 2,6 + 5,3 -1,4 + 1,2 + 0,7 -0,9 + 1,09
326 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Quoiqu'on ne puisse pas avoir une grande confiance dans
l'extrapolation des chiffres de l'évaporation physique établis
d'après les mesures de Montcherand, situé à plus de 200 km.,
on peut cependant conclure à un gain d'eau certain du fait
de la construction d'un barrage. Ce gain d'environ 1,09 mil¬
lion de m3 par an, en moyenne, est évidemment faible en
regard du volume moyen annuel, qui est au limnigraphcd'Untersiten 50 m. plus bas, de 249 millions de m3.
Remarque au sujet des pays chauds.
Il n'est pas sans intérêt de s'arrêter un instant sur ce
problème, beaucoup plus important qu'on ne le croit d'habi¬
tude. En effet, lorsqu'il s'agit de créer un bassin dans les
régions à climat chaud, les conditions hydrologiques se
trouveront modifiées beaucoup plus profondément que dans
les climats froids, continentaux ou tempérés comme la
Suisse, à cause des pertes intenses par évaporation physiqueintroduites du fait de la submersion des terrains.
La détermination de la perte nette par évaporation phy¬sique de la surface du bassin, n'est souvent pas de premièresimplicité, vu le manque d'observations météorologiquesprécises. Dans beaucoup de régions, on devra faire appel à
l'extrapolation sur des distances considérables.
Dans les colonies africaines, par exemple, on possèded'excellents renseignements sur le climat des bords de
l'Océan ou de la Méditerranée. Mais presque toujours les
grands réservoirs ne peuvent être construits qu'à l'intérieur
des terres. Le même problème d'extrapolation se répéterafréquemment, et il nous a paru utile de l'examiner avec les
données de diverses stations météorologiques situées à la
hauteur 30° à 35° de latitude S et N. (Afrique du S et du N et
Amérique du S.)On constate souvent une croissance simultanée des préci¬
pitations et de la température lorsqu'on s'éloigne de la mer.
MODIFICATION HYDROLOGIQUE DES BASSINS AMÉNAGÉS 327
Ainsi dans les bassins d'alimentation où la précipitationmoyenne est d'environ 200 mm. plus élevée que sur la côte,on pourrait penser, d'après notre formule, établie sur les
données de Montcherand, que l'évaporation physiquemoyenne sera abaissée de quelques dizaines de mm. Mais la
densité des précipitations à l'intérieur des terres est plusforte à cause du voisinage des montagnes et pour d'autres
causes dynamiques. Il en ressort que l'évaporation physiquedépend moins de cette augmentation de la pluviosité que de
la différence de température moyenne annuelle entre le rivageet le bassin. Or, cette différence est en faveur du bassin,puisqu'il y fait plus chaud. On en conclut sans ambiguité quesi l'évaporation dans les terres n'est pas de beaucoup supé¬rieure à celle du bord de la mer, elle n'y est en tout cas pas
inférieure. L'emploi combiné de la formule de Montcherand
et de celle de l'indice d'évaporation confirme ce raison¬
nement.
En discutant la modification hydrologique d'un grandbassin de l'Afrique du Sud, nous avons pu énoncer la loi
suivante :
La perte supplémentaire due à la construction de la rete¬
nue croit en progression géométrique, lorsque la pluviositédécroit en progression arithmétique, et ceci bien que les
années humides soient chaudes et que les années sèches
soient froides.
La discussion du pourcentage de perte sur les modules
mesurés est en outre fort instructive. Dans les années très
humides, la perte est faible et ne nuit en aucune façon à
l'usinage intégral des débits maxima pour toutes les hypo¬thèses de charges d'un vaste réseau. Mais lorsque la pluvio¬sité diminue et se rapproche de la normale, la perte com¬
mence à augmenter. Pour une certaine valeur, l'évaporationsupplémentaire due à l'immersion équivaut l'évaporation de
la terre quelle que soit la position du niveau des eaux.
Aussitôt que la pluie passe au-dessous de la normale, l'éva¬
poration emprunte des tranches de plus en plus fortes qui
328 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
sont en rapport direct avec la grandeur de la surface liquide.Ainsi dans les années très sèches, la perte nette dépasse les
apports antérieurs à la construction, c'est-à-dire que le bilan
des eaux est négatif. Tout ce qu'il pleut est perdu, plusencore une partie des eaux emmagasinées de l'année précé¬dente. Or, comme la perte augmente précisément avec le
volume accumulé, ce qui revient à dire l'étendue inondée,on en arrive à ce paradoxe flagrant, que plus il fait sec, moins
il faut accumuler. Et dans cette hypothèse il y a donc intérêt
à baisser le niveau du lac pour le protéger en quelque sorte
contre l'avidité de l'évaporation physique.Il est avéré qu'en période d'extrême sécheresse, on ne
devra pas chercher à accumuler, mais à turbiner immédia¬
tement les précipitations.Nous n'insisterons pas sur les divers problèmes purement
hydrauliques et économiques qu'entraîne cet état de choses.
De toute façon une surveillance très attentive du caractère
de l'année s'impose, avec des observations régulières de
l'évaporation physique, de la température, etc. La connais¬
sance des moments d'infiltration peut être d'un grand se¬
cours pour la prévision des écoulements immédiats possibles.Il nous semble indispensable, lors d'un projet dans les
régions subtropicales, de s'orienter sur le mécanisme hydro¬
logique aussitôt que le rapport entre la surface immergée et
le bassin d'alimentation total de l'usine dépasse 1 à 100.
Sur le 35me degré de latitude, par une température
moyenne de 18°, nous avons trouvé, pour un lac artificiel
dont la surface est dans le rapport 3 à 100 au bassin d'ali¬
mentation, que la perte moyenne calculée sur dix années est
de 3,5 % de la quantité d'eau s'écoulant avant la construc¬
tion. Si le lac n'est toujours qu'à moitié rempli, cette pertes'abaisse à 2,8 %. Toutefois au cours d'une série d'années,elle peut passer de 0,5 % en année humide à 120 % en année
extrêmement froide et sèche. Ces chiffres parlent suffisam¬
ment en faveur de nos thèses, sans qu'il soit utile d'in¬
sister.
EXTENSION EN LATITUDE 329
6. Extension en latitude.
La formule de transposition établie inductivement sur des
bases géologiques et physiques et contrôlée par l'expériencesur le versant N des Alpes, ne saurait telle quelle être utilisée
avec succès dans d'autres parties du continent, si l'on n'yintroduisait pas le facteur température moyenne. Nos
recherches ne nous permettent pas pour l'instant de nous
prononcer sur ce point fondamental de l'extension en lati¬
tude. Toutefois, il semble d'ores et déjà acquis, d'après un
examen rapide d'organismes algériens, tunisiens, espagnols,français, autrichiens, tchèques, allemands et suédois, x
qu'enrattachant dans l'abaque des Alpes, les points de l'axe des
altitudes à une fonction altitude-température moyenne, ou
plus simplement en négligeant les altitudes et en confondant
leur axe avec un axe de température moyenne, on obtient
ainsi un premier résultat de ce problème. Au point de vue
purement physique, cette manière d'attaquer la questionest d'ailleurs tout à fait rationnelle. Car l'évaporation hydro¬logique est incontestablement en corrélation intime avec la
température d'un lieu considéré. Pour l'extension empiriquede l'abaque des Alpes, il suffira de remplacer les altitudes par
les températures suivantes :
Tab. 63
Altitudes en m. 400 500 600 700 800 900 1000 1100 1200 1300 1400 1500 1750 2000
Tempéra¬tures en
degrés
9°4 8°5 1°9 7°2 £-°5 £°0 5°7 5°4 5°1 4°8 4°3 3°7 2°1 0°3
' D'après quelques chiffres que nous a aimablement communiquésM. Villars, Ingénieur en chef à Bruxelles, pour un des grands fleuves du
territoire du haut Katanga, au Congo Belge, il ressort qu'on peut classer
les phénomènes hydrologiques de cette région dans la même formule des
Alpes. Il en est de même pour l'Amérique du Sud, d'après des renseigne¬ments très précis communiqués par M. l'Ingénieur en chef de Kalber-
matten, à Paris.
330 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Pour l'extrapolation en-dessus de 8°5 on pourra se servir,
pour la construction des isohydates Eiso de l'abaque (fig. 38),de la formule suivante :
F — F&-(T — T0)
dans le système d'axes T, abscisses, confondu avec l'axe des
altitudes et E, ordonnées, confondu avec l'axe des pluvio¬sités, où E0 est l'ordonnée du maximum de la fonction,et T0 l'abscisse de ce point, T et T0 les températures, h une
constante qui est propre à chaque isohydate. Il est alors
évident que l'axe des P, qui passe dans le cas de la figure par
le point d'altutide 500 m., sera déplacé parallèlement à
lui-même, et dans sa nouvelle position passera par le pointcorrespondant sur l'axe des T, à la température choisie pour
l'extrapolation. L'exponentielle / (E, P) r constantne subit pas
de changement dans sa forme. Il se peut cependant que
son maximum soit plus accusé dans les régions où la tempé¬rature dépasse 20°, comme aussi dans celles où la pluviositédes basses altitudes s'élève au-dessus de 3000 mm. Quant aux
courbes de la fonction infiltration, a priori, elles s'aplatissentau fur et à mesure que la température croit.
Il nous a été donné d'étudier en détail l'hydrologie de
certains fleuves de l'Amérique du Sud, faisant l'objet de
concessions hydroélectriques très importantes. Quoique nous
ne puissions pas ici entrer dans tous les détails, voici un
résumé bref de constatations d'ordre tout à fait général.Pour des fleuves à vaste bassin d'alimentation, où la
température moyenne atteint 18°, la formule de transpo¬sition extrapolée est parfaitement applicable. Ainsi pour
un fleuve traversant des terrains perméables en grand,composés en majeure partie de sables, où la pluviositémoyenne vaut 1150 mm., l'évaporation hydrologique mesu¬
rée pendant dix années consécutives fut trouvée égale à
740 mm. alors que notre abaque donnait 750 mm. Ce n'est
pas là un effet de pur hasard. La température moyenne du
Plateau suisse oscille autour de 9° à 500 m. et sa différence de
EXTENSION EN LATITUDE 331
quelque 8° avec ces régions suffit à expliquer, à pluviositéégale, une évaporation de 150 mm. supérieure.
Dans les pays orientaux de la Cordillère des Andes, par
exemple, la formule hydrologique générale s'applique fort
bien aussi, malgré l'opposition des températures qui est la
caractéristique de ces régions. Les années humides y sont
chaudes, les années sèches, froides.
Pour établir empiriquement les divers coefficients de la
formule générale, il faut tenir compte des remarques sui¬
vantes :
Infiltrations : Dans les terrains sablonneux, perméablesen petit, il est évident que les effets de la température et de
l'insolation seront beaucoup plus faibles que dans des ter¬
rains de même structure, mais dont le substratum est
rocheux, calcaire par exemple. Les eaux pluviales immédia¬
tement infiltrées, sont protégées sans retard contre les agentsextérieurs succédant à la période humide. Il n'y a qu'unemince partie superficielle qui se dessèche, tandis que l'inté¬
rieur du sable peut rester très longtemps saturé. Les terrains
sablonneux ou steppiques sont avides d'eau et leur porosité,dans ces contrées, varie de 20 à 60 %, suivant les années
sèches et humides. Les amplitudes des fonctions II et III
seront donc beaucoup moins accusées que dans les cours
d'eau d'Europe centrale.
Evaporation : Les effets de la température agiront donc
surtout sur l'évaporation hydrologique au cours de l'année,mais les eaux portées à l'actif de l'année suivante, c'est-à-dire
les réserves infiltrées, seront probablement entièrement indé¬
pendantes de ce facteur. Il en ressort que la fonction III,I = /; (T) à P quelconque, sera modifiée et s'écrira selon sa
forme générale : I = /2 (P, T), ou en négligeant T devant P :
i = MP).La formule générale est simplifiée et s'écrit :
E* = /(P,T,I)
332 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
où I est comme pour la Sihl :
P ayant pris la place de T, et I0 étant la limite de saturation.
Pour cette fonction III, nous avons trouvé presque les
mêmes coefficients que pour la Sihl. Pour la saturation
P0 = 245 mm. et pour le dessèchement 50 mm. au lieu de
20 mm.
Voici quelques chiffres de repère, valables sous le 35° de
latitude, et évitant de recalculer la fonction III.
Fonction III, 1 = /3(P). Tab. 64
P en mm. 500 | 750 1000 1500 1750 2000
I en mm. 50 62 73 100 177 245
La plus grande différence entre les ordonnées des courbes
d'évaporation de la fonction II — entre les années très
froides et très chaudes -— est de 80 mm., ce qui illustre les
arguments précédents. Ce chiffre peut aussi être calculé
d'avance, au moyen de la formule de l'indice d'évaporation,en choisissant des années de même pluviosité, bien entendu.
On verra qu'il confirme parfaitement les diagrammes de la
variation au cours des années de l'évaporation physique et
de la pluviosité annuelles. Les demi-axes des ellipses de la
fonction I (fig. 30) valent de ce fait : températures néga¬tives : 50 et 100 mm. ; températures positives : 100 et
30 mm. La courbe de la fonction II est à peu de chose près la
même que celle de la Sihl et répond au tableau suivant :
Fonction II. Ex = /(P) à T normal. Tab. 65
P en mm. 500 750 1000 1150 1250 1500 1750 2000
E>. en mm. 620 790 865 885 890 885 880 855
LE BILAN HYDRAULIQUE DU WÀGGITAL 333
Nous attirons encore l'attention sur le fait que les fleuves
situés près des calmes équatoriaux ont un indice de varia¬
bilité très grand. Leur module peut osciller entre 1 et 60
d'une année à l'autre, alors que les précipitations ne passent
que de 1 à 3. Notre formule confirme la mesure expérimen¬tale de ces oscillations en tous points.
7. Le bilan hydraulique du Wàggital.1
A titre d'application des deux méthodes proposées, nous
donnons ici le résultat de calculs relatifs au bassin du
Wàggital.Cette puissante installation hydroélectrique qui comprend
un lac artificiel susceptible d'accumuler 140 millions de m3
d'eau, a été ces deux dernières années le sujet de contro¬
verses à propos de la quantité d'eau dont elle peut réellement
disposer.Un résumé de l'étude hydrologique faite par M. l'Ingénieur
en chef Gugler, figure dans un ouvrage publié en 1925 par
la Société zurichoise des Sciences Naturelles [219].La détermination de l'écoulement moyen annuel était
difficile, car les mesures directes ne s'étendaient que sur
quatre années non consécutives.
Des comparaisons avec les débits moyens de la Limmat à
Baden et du Rhin à Bâle permirent, en une certaine mesure,
de parer au manque d'observations directes, quoique ces
cours d'eau du type glaciaire aient un régime différent de la
1 Au moment où notre travail était terminé, nous avons appris queM. l'Ingénieur en chef Dr Otto Lùtschg avait entrepris une impor¬tante étude expérimentale pour déterminer le régime hydrologique du
bassin du Wàggital. Il sera intéressant de voir, lorsqu'il aura pu¬blié son mémoire, si les données qu'il obtient coïncident avec nos cal¬
culs.
334 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Wàggitaler-Aa, essentiellement préalpine. Des étés chauds
peuvent causer la crue des cours d'eau glaciaires et l'étiagede ceux du type préalpin. Mais, sur un grand nombre d'an¬
nées, ces différences s'atténuent parfois suffisamment pour
que l'évaluation des modules moyens soit possible par ana¬
logies.Par contre, l'extension des données pluviométriques d'une
station est très délicate, en montagne. Au delà d'un rayon de
quelques kilomètres, les données d'un appareil sont sujettesà varier dans des proportions importantes. Il en résulte que
la variation de la pluviosité d'une année, en % de la moyenne
absolue, n'est point la même entre le Wâggital et les bassins
voisins. La variation annuelle entre les précipitations d'Ein¬
siedeln et de la vallée du Wâggital, autour de leurs moyennes
établies pour les années 1915 à 1924, sont aussi différentes,comme le prouve le tableau 66 ci-dessous :
Tab. 66
Années 1918 1919 1920 1921 1922 Moyenne
Einsiedeln
Wâggital
9Ï,6%
102,1%
107,0%105,3%
105,5%98,7%
60,4%
65,8%
119,1%
1.17,4%
100%100%
Les précipitations du Wâggital ne peuvent par conséquent
pas être comparées année par année avec celles d'Einsiedeln.
On verrait aussi, en juxtaposant les pluviosités moyennes du
Wâggital et de la Sihl, que leurs variations au cours des
années ne sont pas tout à fait synchrones. Il résulte de ce fait
que les écoulements annuels diffèrent entre ces deux régions,a priori dans les limites de la différence de leurs pluviositésrespectives.
Par contre, la variabilité de la moyenne d'un certain
nombre d'années, par rapport à la moyenne absolue d'un
très grand nombre d'années, peut être la même sur des
étendues très vastes. C'est là un théorème bien établi par le
calcul des probabilités et une loi de la climatologie. Par
LE BILAN HYDRAULIQUE DU WAGGITAL 335
exemple le rapport de la moyenne de 1915-1924 à 1871-1920
d'Einsiedeln, soit Tp^r.100 = 103,8 %, vaut à quelques
millièmes près pour le Wâggital, ces régions étant très voi¬
sines.
Voici le calcul des modules, en partant exclusivement des
précipitations mesurées à Lachen, Vordertal et aux Clarides.
Ces trois postes suffisent pleinement, à notre avis, pour
donner une indication précise de la pluviosité moyenne de la
région, tel qu'il en ressort d'un examen consciencieux de
la variation des précipitations avec l'altitude dans d'au¬
tres vallées de même orientation et de même climat. La va¬
riation est régulière.l Les valeurs annuelles obtenues par
la méthode graphique décrite, ont été admises sans correc¬
tions.
Les calculs se rapportent : 1° au bassin d'alimentation
total, compris le Trepsenbach, arrêté au barrage de Rempen,d'une superficie de 82,15 km2, et 2° au bassin de réceptionalimentant la retenue dite d'Innertal et arrêté au grandbarrage de Schrâh ; superficie 42,7 km2.
Altitude du centre de gravité topographique pour le bassin
total arrêté à Rempen = 1227 m.
Altitude du centre de gravité topographique pour le
bassin d'Innertal, arrêté à Schrâh = 1307 m.'
Précipitation moyenne 1915/24, Bassin total = 2378 mm.,
appliquée au centre de gravité hydrologique situé à l'altitude
de 1215 m.
Précipitation moyenne 1915/24, Bassin d'Innertal =
2378 mm., appliqué au centre de gravité hydrologique situé
à l'altitude de 1308 m.
Ces chiffres sont obtenus graphiquement à l'aide d'une
courbe moyenne, établie avec les moyennes du tableau
suivant, sous-entendu pour l'année hydrologique.
Voyez première partie, chap. II, § I, 5.
336 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Précipitations en millimètres à Lachen et Vordertal.
Tab. 67
Années 1915 1916 1917 1918|1919 1920 1921 1922 1923 1924 Moyenne
Lachen
ait. 410 m.1315 1349 1270 1321 1368 1448 849 1603 1280 1645 1345
Vordertal
ait. 740 m.2023 2009 1775 1932 2019 1835 1272 2345 1862 2120 1919
Clarides, voir calciils de IaSih1.
Les bassins étant considérés comme semblables au bassin
de la Sihl, et dans l'ensemble imperméables,* on obtient,
d'après la formule de transposition E = F (P, A, I) (abaquegénéral pour le versant N des Alpes) (fig. 38), les modules
moyens H suivants, pour la moyenne des années 1915 /24 :
Bassin total, 82,15 km2 : P = 2378 mm.
E = 375 mm.
H = 2003 mm.
soit un cube moyen annuel écoulé de 2003 X 82,15 = 164,2millions de m3. (M. Gugler trouve 152 millions de m3.)
Bassin d'Innertal, 42,7 km2 : P = 2456 mm.
E = 365 mm.
H = 2091 mnu
soit un cube moyen annuel de 2091 X 42,7 = 89,25 millions
de m3. (M. Gugler trouve un module de 2030 mm., soit
86,75 millions de m3.)Nous avons toutefois voulu vérifier l'exactitude de ces
chiffres, en formant les moyennes des modules obtenus par
la formule hydrologique générale, appliquée à la série d'an¬
nées 1915 /24. Pour la variation de température, l'indice de
nivosité et les coefficients relatifs aux capacités de rétention,
1 D'après des renseignements géologiques de M. le Prof. Alber Heim,les % du bassin total sont parfaitement imperméables et % seulementest perméable.
LE BILAN HYDRAULIQUE DU WAGGITAL 337
nous avons adopté les mêmes valeurs que pour la Sihl, ce quiest tout à fait admissible.
Les calculs sont résumés dans le tableau ci-dessous :
Bassin <ïInnertal, modules d'écoulement pour 1915-1924.
Tab. 68.
Précipitations Évaporation hydrologique Module
P mm. E mm. H mm.
1915 2576 323 2253
1916 2610 278 2332
1917 2324 320 2004
1918 2506 513 1993
1919 J 2581 413 2168
1920 » 2420 397 2023
1921 1612 258 1354
1922 2880 491 2389
1923 2333 250 2083
1924 2721 418 2303
Moyenne 2456 366 2090
Comme on le voit, à 1 mm. près, les résultats du calcul
des moyennes concordent (2090 et 2091 mm.). En outre,
l'erreur sur la moyenne arithmétique des précipitations est
très faible (somme des écarts: + 1138, —1135; 2|s|2= 1 052 427 et Rm = 108 mm., soit 4,4 %).
D'après ce calcul, il y aurait donc un profit sur les chiffres
de M. Gugler.Mais, il n'en est pas tout à fait ainsi si, au lieu de rapporter
les calculs à la décade 1915-1924, on les base sur un demi-
siècle, par exemple de 1871 à 1920.
1 Nos chiffres ne concordent pas exactement avec les modules mesurés
par les soins de l'entreprise au cours de ces deux années 1919 et 1920.
Nous pensons qu'il doit y avoir une erreur dans la courbe limnigraphiquedes débits ou des erreurs accidentelles de lecture. Nos chiffres suivent
exactement la variation des écoulements de la Sihl, plus faible en 1920
qu'en 1919, alors que les mesures la Waggitaler-Aa donnent le contraire,ce qui semble douteux.
LUGEON 22
338 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Si, après cinquante années d'observations, l'exactitude
de la moyenne arithmétique des précipitations, tel que le
montre le calcul des probabilités, n'est que de 1,5 % dans la
région d'Einsiedeln-Wâggital, la variabilité, par contre, de
l'une par rapport à l'autre des précipitations moyennes de
ces deux régions est certainement inférieure à l'ordre du
millième, pour le même laps de temps.
Comme pour la décade 1915-1924, les moyennes arithmé¬
tiques ont le même poids dans chacune de ces deux régions,on peut aussi admettre, sans introduire d'erreur beaucoup
supérieure à 1/1000, que le rapport des précipitations
moyennes pour ces décades, à leurs moyennes respectivesde cinquante ans, est très sensiblement, sinon le même.
Le rapport d'Einsiedeln valant :
Vmoy de 1915 à 1924_
1666 mm.
Pm02, de 1871 à 1920~
1604 mm.
X iUU ~ W'^ /o '
il en résulte pour le Wâggital une précipitation moyenne de :
^|| X 100 = 2294 mm.,
pour le bassin total arrêté à Rempen, et
2456
103,8X 100 = 2368 mm.,
pour le bassin total d'Innertal, arrêté à Schràh.
Finalement, pour les cinquante années 1871-1920, nous
trouvons en appliquant la formule de transposition aux chif¬
fres ci-dessus, les valeurs des écoulements moyens suivants :
Bassin total arrêté à Rempen :
Pmoy = 2294 mm.
Emoy= 411mm.
H_ = 1880 mm.moy
3soit un cube de 1,88 m. X 82,15 km2 = 154,3 millions de m
ou 59,6 lit. /sec. /km2 (M. Gugler trouve 152 millions de m3
LE BILAN HYDRAULIQUE DU WAGGITAL 339
Bassin d'Innertal, arrêté au grand barrage de Schrah :
Pmoy = 2368 mm.
Em0IJ = 378 mm.
Hmoy = 1990 mm.
soit un cube de 1,99 m. X 42,7 km2 = 85,0 millions de
m3 ou 63,1 lit. /sec. /km2. (M. Gugler trouve 86,75 millions
de m3, soit un module de 2030 mm.).
Modification hydrologique du bassin après la construction
de la retenue.
Nous ne traiterons pas les pertes annuelles, on peut s'en
rapporter aux chiffres de l'Etzel. Pour la moyenne de cin¬
quante années, la perte est donnée grossièrement par la for¬
mule suivante, telle qu'elle est établie au même chap. § IV, 4 :
S.H — (E?.L — EX.L) = S.HX .
D'après le graphique de la variation de l'évaporation phy¬
sique avec l'altitude, on a à 870 m. (altitude du bassin),une évaporation moyenne de 480 mm. L'évaporation hydro¬
logique Ex est évidemment plus grande que celle du centre
de gravité hydrologique, la retenue se trouvant à une altitude
inférieure. Par comparaison avec la formule de transpositionde la Sihl, elle vaut 650 mm. à la cote de 870 m. Il y a donc
un notable gain d'eau du fait de la création de la retenue.
En effet :1
85,0.106 — 4,14.106(0,480 — 0,650) = 85,7 millions de m3,
ce qui équivaut à un gain moyen annuel de 85,7 — 85,0= 0,7 millions de m3. Le module qui en résulte est 2006 mm.,
* Le chiffre 4,14 = L est la superficie du lac supposé maintenu con¬
stamment à son niveau supérieur, soit à 900 m.
340 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
inférieur de 24 mm. à celui calculé par M. l'Ingénieur en
chef Gugler.Pour parer aux effets des évaporations, il y a donc intérêt,
en moyenne, de maintenir le lac non pas à son niveau infé¬
rieur, mais au contraire, au niveau le plus élevé. Cette règle,néanmoins, n'est pas immuable, nous avons vu à propos de
l'Etzel que Févaporation physique peut en certaines années
surpasser l'évaporation hydrologique, à quoi correspondalors une perte et non pas un gain, perte d'ailleurs proportion¬nelle à la hauteur de la surface libre du lac.
CHAPITRE DEUXIÈME
§ I. Quelques problèmes à résoudre.
Les matériaux d'observations suisses, les quelques ta¬
bleaux et formules énumérés au cours de ces pages doivent
suffire pour aborder bon nombre de problèmes parmi les¬
quels nous ne citerons que les plus importants.
1. La formule hydrologique des cours d'eau glaciaires.
En rappelant en quelques mots les principales caractéris¬
tiques de l'écoulement des cours d'eau alimentés par des
glaciers, nous avons introduit la notion de capacité glaciaired'écoulement. Si on appelle G ce facteur, la formule générale
pour le calcul du module s'écrira :
H= [P' —E'] + G
où P' sera la pluviosité appliquée au centre de gravité hydro-
logique du bassin essentiellement pluvial, c'est-à-dire limité
à l'altitude du glacier et E' l'évaporation correspondante,donnée par la formule hydrologique des cours d'eau pré¬
alpins.Le terme G, très difficile à déterminer avec précision dans
l'état actuel de nos connaissances, pourra s'écrire :
G= Pw—/(P2, PZ„va,v„„T«,T(0)
où P" est la pluviosité appliquée au centre de gravité hydrolo-
342 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
gigue glaciaire, déterminé de la même manière que pour le
cas d'un bassin pluvial. Les indices ont les significations :
a = année actuelle, w = année précédente, et v = indice de
nivosité, T = température estivale.
Il est, en effet, indispensable d'introduire l'année précé¬dente, car la glaciologie nous enseigne que les réserves sous
forme de neige ou de glace jeune peuvent chevaucher sur
deux années consécutives. En haute altitude, au-dessus du
niveau limite donné par la courbe de variation de la limite
inférieure des neiges, les précipitations d'une année peuventd'ailleurs séjourner un temps beaucoup plus long, ce quicomplique singulièrement le problème. A première vue, il
semble que la question complexe des avances et reculs des
organismes glaciaires, comme celle aussi de leur alimenta¬
tion, peut être laissée de côté dans le calcul des modules suc¬
cessifs d'un petit nombre d'années.
2. Les diverses courbes caractérisant les cours d'eau
préalpins.
La méthode simple des analogies permet dans bien des cas
de calculer avec une approximation suffisante les diverses
caractéristiques des cours d'eau de la région des Alpes. Mais
cette méthode empirique est insuffisante lorsqu'on demande
de la précision dans les calculs. Divers essais nous ont mon¬
tré qu'il est possible de partir des précipitations seules, pour
le calcul des modules instantanés et moyens. L'emploi ra¬
tionnel de la théorie des moments d'infiltration permet de
pousser les calculs beaucoup plus loin.
Au cas où le nombre et la qualité des observations météo¬
rologiques est suffisant, il est en efïet simple d'appliquer les
équations des moments d'infiltration à chaque chute de
pluie, et de déterminer ainsi la valeur journalière moyennedes écoulements, c'est-à-dire la courbe de régime. La somme
LES CONJUGAISONS PERMANENTES RATIONNELLES 343
de ces débits devra égaler le module donné par la formule
hydrologique générale, ce qui est aussi un moyen de contrôle
sûr. De la courbe de régime on tire évidemment toutes les
caractéristiques de l'écoulement rappelées au chap. I, § II, 2.
Mais ces calculs sont très longs.Pour les installations hydroélectriques sur rivière, sans
bassin de retenue, la courbe des débits classés — la plus
importante — peut être construite avec la formule du
coefficient d'irrégularité de M. Coutagne [58]. Toutefois nous
avons trouvé qu'il est possible de construire cette courbe avec
une précision bien supérieure, en partant de la densité
moyenne des précipitations et en appliquant quatre fois pour
chaque saison seulement, les équations des moments d'in¬
filtration : par exemple pour les précipitations journalièresles plus denses des mois les plus pluvieux et pour les précipi¬tations les moins denses des mois les plus secs. Pour la
moyenne des années 1915 à 1924, l'erreur sur la courbe dres¬
sée avec les débits quotidiens de la Sihl ne dépasse pas quel¬
ques litres seconde.
3. Sur les conjugaisons permanentes rationnelles. La
prévision des écoulements.
Comme nous l'avons dit au début de ces pages, il serait du
plus haut intérêt, au point de vue de l'économie nationale, de
développer ces recherches hydrologiques.La création d'un Institut hydrologique central en liaison
télégraphique permanente, d'une part avec un nombre
suffisant de stations pluviométriques, d'autre part, avec
quelques postes pour l'observation de « sources étalons » et
des capacités de rétention des sols est justifiée. Et, si l'État
s'y refuse aujourd'hui, l'initiative privée — les grands cartels
de l'industrie hydroélectrique — ne sauraient se désintéresser
de financer un tel service.
344 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
Les intérêts, communs et particuliers, des diverses compa¬
gnies débitant la houille blanche, sont dans la conjugaisonidéale des installations existantes. Le mécanisme compliquéde la distribution de la force se verrait amélioré dans de
larges limites, avec la collaboration étroite d'un service
d'avertissements hydrauliques.L'état des capacités de rétention qui joue un rôle énorme
dans l'écoulement immédiat des précipitations, peut se cal¬
culer d'avance, et par là se détermineraient aussi les débits
limites maximum et minimum, correspondants aux « préci¬pitations capables » d'une période future.
Ainsi, dans une certaine mesure, on pourra parler de pré¬vision : le calcul des probabilités ou plus simplement la
statistique donnant les hauteurs extrêmes des précipitationsà n'importe quel moment de l'année et pour chaque mois, par
exemple.La détermination de ces limites d'écoulement, qui n'offre
aucune difficulté, se trouvera précisée encore par des pro¬
nostics météorologiques à brève échéance.
L'écoulement moyen journalier des cours d'eau est d'ail¬
leurs doué d'une certaine inertie par rapport aux fluctuations
plus rapides du temps, en sorte que pendant au moins 300
jours par an, il est possible de prévoir les écoulements une
semaine à l'avance avec un bon degré de précision.En période troublée par l'instabilité atmosphérique, la
précision de ces pronostics hydrauliques à longue échéance
diminue évidemment au delà de quelques jours. Mais il
n'en reste pas moins vrai qu'ils sont fort intéressants, puis¬
que leur approximation est connue, les écoulements ne pou¬
vant osciller qu'entre des limites maximum et minimum
déterminées.
Si la prévision de l'état du ciel est aujourd'hui encore très
aléatoire dans une région aussi compliquée que les Alpes,le diagnostic du caractère d'ensemble — température, humi¬
dité ou sécheresse — d'une courte période, est par contre
assez facile à faire. Des diagnostics de cette espèce suffiront
LES CONJUGAISONS PERMANENTES RATIONNELLES 345
dans la plupart des cas pour le calcul de la position probabledes écoulements, entre les limites dont nous venons de parler.C'est là déjà une belle partie gagnée.
.Dans la pratique, tous ces calculs seront simplifiés à l'aide
d'abaques construits par l'expérience et correspondant à
chaque situation qui se présente dans la nature.
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96. Forel, F.-A. — Le Léman. Voir aussi : Ilandbuch der Seenkunde.
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97. Lutschg, O. — Der Mârjelensee und seine Abflussverhàltnisse.Annalen der Schweiz. Landeshydrographie. Band I. Bern, 1915.
98. Collet, L.-W. — Les Lacs.
99. Lutschg, O. — Wasserstand und Wassertemperatur der Visp in
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354 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
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428. Wien 1894. (Réf. : Liitschg.)101. Merz, A. — Die Oberflàchentemperatur der Gewâsser. Veroffentli-
ehungen des Instiluls ftir Meereskunde an der Universitàt
Berlin. Neue Folge. A. Geogr.-naturwiss. Reihe, Heft 5. Berlin,Februar 1920. (Réf. : Liitschg).
102. Bruckner, Ed. — Zur Thermik der Alpenseen und einiger Seen
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103. Bruckner, Ed.- IJber die Temperaturverhàltnisse der Flusseen,insbesondere der Alpen. Comptes rendus des travaux du
IXe Congrès international de géographie 1908, T. II, 1910.
104. Collet, L.-W. et Mellet, \\. — La thermique des eaux dans II
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10."). Forkl, F.-A. - La congélation des lacs suisses et savoyards dans
Phiver 1891. Extrait des Archives des Sciences physiques et
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Penck, Band IV. Wien, 1890.
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360 PRÉCIPITAIIONS MMOSPHÉRIQUES
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waltungsrat der B. K. W. A.-G. erstattet durch die Direktion.
Verbandsdruckerei A. G. Bern, L92I.
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Svenska vetenskapsakademien. Band XIX, A. Nr. 20. Stock¬
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202. Hellriegel. — Beitrâge zu den naturwissenschafilichen Grund-
lagen des Ackerbaues, p. 622. Braunschweig, 1883.
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wissenschaftliehe Zeitschrift, VI Jahrgang, p. 283. 1897.
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(Réf. : Engler, 11).205. Huffel. — Économie forestière. T. I, p. 101. 1910.
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Sitzungsberichten der Akademie der wissenschaften in Wien.
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Verlag, G. M. B. H. Berlin SW 19, 1926.
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werk-Projekles, erstattet an die Etzelwerk- Kommission. Zurich,
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217. Peter. — Wasserwirtschaftsplan der Linth-Limmat. Schweizeri¬
schen Wasserwirtschaftverbandes. Zurich, 1925.
218. Geologische Karte der Schweiz, 1 : 500.000. Herausbegeben von
der Schw. geolog. Kommission. Bearbeitet von Alb. Heim und
C. Schmidt. II Auflage. Commissionverlag A. Francke. Bern,
1911.
219. Kruck, G. — Das Kraftwerk Wâggital. Neujahrsblatt, Natur-
forschende Gesellschaft. Zurich, 1925.
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TABLE DES MATIÈRES
Pages
Introduction 7
PREMIÈRE PARTIE
CHAPITRE PREMIER
Considérations générales et définitions.
Notations 11
| I. Eaux météoriques.
1. Instruments 13
2. Répartition 14
3. Grandeur et nature 15
4. Rapports 16
5. Représentation graphique 17
6. Densité et débit des précipitations 17
7. Facteur de corrélation 18
8. Calcul des probabilités et des erreurs 20
9. Évaporation 23
10. Condensation 25
§ II. Écoulement des eaux.
1. Jaugeages 26
2. Courbes et graphiques caractérisant les cours d'eau.. .
28
| III. Précipitations atmosphériques et écoulement.
1. Définition 32
364 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
Recherches.
CHAPITRE DEUXIÈME
| I. Les eaux météoriques.Pagei
1. Les erreurs dans les observations pluviométriques. . .34
2. Extension des données pluviométriques 43
3. La loi de variation des précipitations avec l'altitude. .
44
4. Densité des précipitations et méthode rapide pour leur re¬
présentation graphique 58
5. Quelques faits fondamentaux intéressant la dynamique des
précipitations et leur représentation dans les régions mon¬
tagneuses 66
Remarques sur le tracé des isohiètes et le relief montagneuxde la Suisse 70
6. Classification des pluies pour la Suisse 82
| II. L'enneigement et la glace.
1. La neige 87
Une méthode thermique pour évaluer l'altitude de la limite
inférieure des neiges 98
2. La glace 99
3. Les glaciers 102
CHAPITRE TROISIÈME
| I. Le sol et les précipitations.
1. Généralités 112
2. Le partage des eaux météoriques 114
3. Le ruissellement 115
4. Sur quelques points concernant l'infiltration et les eaux
dans le sol 149
| IL Condensation et évaporation.
1. Le problème de la condensation 163
2. Le problème de l'évaporation 180
1 A. L'évaporation physique 181
i R. L'évaporation physiologique 190
2. L'évaporation hydrologique 200
TABLE DES MATIERES 365
DEUXIÈME PARTIE
Applications
CHAPITRE PREMIER
| I. Le calcul de l'écoulement en fonction
des précipitations.Pages
1. Les divers problèmes 215
2. Le module des bassins du type préalpin 234
3. Elimination des facteurs et des erreurs d'estimation. .
234
4. Année hydrologique 237
5. Le bilan annuel 238
6. Le matériel disponible en Suisse au début de l'année 1926 239
| II. Recherche des
fonctions préliminaires de la formule hydrologique générale
pour les bassins préalpins.
1. Définition 241
2. La recherche des fonctions indépendantes du mécanisme
hydrologique général 241
3. Le groupement des années 251
| III. Établissement de la formule générale sur la base
expérimentale de la Sihl.
1. Les observations 252
2. Les moyens de contrôle de la formule et la préparation des
calculs 254
3. Interprétation des chiffres calculés 269
Les facteurs nivosité et température 272
Schéma du calcul 281
4. Discussion des fonctions et mise en équation .... 289
5. Brève critique de la méthode 299
366 PRECIPITATIONS ATMOSPHERIQUES
§ IV. Extension de la formule générale
à des bassins quelconques.Pages
i. Identification des facteurs ; centre de gravité hydrologique 305
2. Détermination graphique du centre de gravité hydrologique 306
3. La formule de transposition 312
4. Vérification générale sommaire de la méthode de calcul pro¬
posée 320
5. Modification hydrologique des bassins aménagés . . .323
Remarque au sujet des pays chauds 326
6. Extension en latitude 329
7. Le bilan hydraulique du Wâggital 333
Modification hydrologique du bassin après la construction de
la retenue 339
CHAPITRE DEUXIÈME
% I. Quelques problèmes à résoudre.
1. La formule hydrologique des cours d'eau glaciaires . .341
2. Les diverses courbes caractérisant les cours d'eau préalpins 3 2
3. Sur les conjugaisons permanentes rationnelles. La prévisiondes écoulements.
. . . , 343
Bibliographie sommaire 347
Table des matières 363
CURRICULUM VIT/E
Jean Lugeon, né le 4 août 1898, à Lausanne. Originaire de Chevilly,canton de Vaud (Suisse). Fils de Maurice Lugeon, Professeur de
Géologie à l'Université et à l'Ecole d'Ingénieurs de l'Université de
.Lausanne.
Etudes faites à Lausanne. Certificat de maturité : baccalauréat
es sciences (mathématiques spéciales) du Gymnase scientifique can¬
tonal à Lausanne, juillet 1918. (Lauréat du Gymnase en 1917).Prix de faculté (Sciences), de l'Université de Lausanne en 1922.
Ingénieur constructeur diplômé de l'École d'Ingénieurs en 1922.
De J923 à 1924, Ingénieur au Service des Chutes de la Société géné¬rale d'Entreprises, à Paris.
Dès le printemps 1924, Assistant scientifique (fonctionnaire fédéral)à l'Institut central météorologique, à Zurich.
En 1925-1926, deux semestres d'inscription à l'École polytechniquefédérale, à Zurich.
En 1922, Membre de la Commission spéciale de T. S. F. (temporaire)de la Direction générale des Télégraphes du Département fédéral
des Postes.
En 1927, Membre de la Commission d'Électricité atmosphériquede la Société helvétique des Sciences naturelles.
Voyages d'études et stages : Angleterre, Au1 riche, Afrique du Nord,France, Espagne et Baléares, Tchécoslovaquie, Italie, Hollande,Belgique et dans lous les cantons suisses. En 1918 et 1919, volontaire
chez M. l'Ingénieur-Conseil II.-E. Gruner, aux chantiers de construc¬
tion du mur-barrage sur la Jogne, en Gruyère.
Travaux scientifiques :
1916-1919. Diverses communications et travaux de géophysique et
météorologie à la Société d'Études scientifiques à Lausanne.
(Compte rendus aulographiés.)1920. Contribution à l'étude des phénomènes d'écoulement des cours
d'eau. Ext. du Bull. Société vaudoise des Sciences naturelles.
Vol. 53, n° 199.
1920. Variation de la transparence de l'atmosphère dans la région du
lac Léman. Extrait des procès-verbaux de la Société vaudoise des
Sciences naturelles. Séance du 15 décembre 1920. Vol. 135, p. 94.
368 PRÉCIPITATIONS ATMOSPHÉRIQUES
1921. Recherches sur la condensation de la vapeur d'eau, d'après la
variation de la transparence de l'air dans la région du Léman.
(Travail non publié. Prix de 350 fr. Université de Lausanne.
Séance publique du Sénat, 15 février 1922).1925. Relations entre diverses discontinuités météorologiques et les
oscillations hertziennes parasites au voisinage des chaînes de mon¬
tagnes. Extrait des Compte rendus des séances de l'Académie des
Sciences. T. 180, p. 594. Paris, 1925.
1925. Les idées françaises sur la dynamique des parasites de la
T. S. F. et leur extension en Suisse.
1925. Sur un nouveau procédé expérimental pour l'exploration des
parasites atmosphériques.1925. A propos de prévision du temps. Extrait du Compte rendu de
la séance de la Société suisse de Géophysique, Météorologie et Astro¬
nomie. Archives des Sciences physiques et naturelles. 5e période.Vol. 7, p. 408 et suivantes. Genève, novembre 1925.
1926. La solution du problème anti-parasite à l'Institut central
météorologique. Radio-Zeitung, n° 27, Jahrgang 2, Zurich, 1926.
1927. Gewitterbeobachtungen im Jahre 1925.
1927. Brèves remarques concernant le mécanisme des orages de
l'année 1925.
Annalen der Schw. Meteorologischen Zentralanstalt, 1925. Zurich
1927.
1927. Mesure des ébranlements du sol normalement à une voie ferrée.
Jahresbericht 1925 des Erdbebendienstes der Schw. Meteorolo¬
gischen Zentralanstalt, 1925. Zurich, 1927.
1927. Les atmosphériques des fronts quasi-stationnaires sur le ver¬
sant Nord des Alpes. Verhandlungen der S. N. G. (S. H. S. N.),108. Jahresversammlung. Basel, 1927. — Archives des Sciences
physiques et naturelles, 5e période. Vol. 10, janvier-février. Genève,1928.
En terminant cet ouvrage, je tiens à adresser l'expression de mes
sentiments de profonde gratitude à M. l'Ingénieur E. Meyer-Peter,Professeur de Constructions hydrauliques à l'École polytechniquefédérale, qui m'a fait l'honneur de bien vouloir accepter de dirigermes recherches et qui m'a donné un grand nombre de sages conseils
pour la rédaction de plusieurs chapitres. Qu'il reçoive mes vifs remer¬
ciements, ainsi que M. le Dr F. Machatschek, Professeur de Géographieà l'Université de Vienne, ancien professeur à l'Ecole polytechnique,qui a aimablement revu mon manuscrit.
Jean Lugeon.
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