les formes poÉtiques
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LES FORMES POÉTIQUES
La poésie est un travail sur les mots qui explore toutes les ressources du langage. Depuis l’Antiquité,
jusqu’à l’époque classique, la poésie s’affirme à travers le respect d’un certain nombre de règles qui
définissent les types de textes poétiques. On distingue ainsi plusieurs formes de poèmes.
I- LES FORMES FIXES
Un poème de forme fixe respecte des codes de composition qui sont parfois
immuables. Il y a notamment :
1- La ballade
Née au Moyen Âge, el le se compose de trois strophes de même longueur qui se
terminent chacune par un refrain (sur un vers, souvent) ; le décasyllabe y est le vers le plus
souvent choisi. La dernière strophe, nommée l'envoi , est plus courte, et apostrophe
généralement le destinataire du poème. Elle est traditionnellement associée à l'expression du
lyrisme courtois. Le terme vient de la « balle » (danse).
2- Le rondeau
Né au Moyen Âge, il se compose de treize (13) ou quatorze (14) vers et contient trois
strophes ; le premier hémistiche est repris à la fin de la deuxième et de la troisième strophe,
composant un refrain. On l'emploie souvent à propos de sujets galants.
3- Le sonnet
Emprunté à la poésie italienne, il se répand en France dès la Renaissance. Il contient
deux quatrains et deux tercets. Les vers sont le plus souvent en alexandrins. Les quatrains
formulent souvent une opposition avec les tercets et le dernier vers qui est la chute propose souvent la
conclusion du poète.
4- L'ode
Née dans l’Antiquité, c'est un poème lyrique accompagné de musique, de genre élevé.
Elle contient plusieurs groupes de trois strophes de même longueur. Originellement, elle
célèbre un personnage ou évoque un sujet philosophique voire religieux.
5- Le pantoum
D'origine malaise, il contient des quatrains d'octosyllabes ou de décasyllabes ; le
deuxième et le quatrième vers de chaque strophe se répètent respectivement au premier et au
troisième vers de la strophe suivante. Ce principe de répétition en fait une forme très musicale.
II- LES FORMES LIBRES
1- Le calligramme
Poème disposé de façon graphique, formant souvent le dessin de ce qui est évoqué par le
texte. Il a une forte dimension visuelle. Guillaume Apollinaire est l'un de ses plus grands
représentants.
2- La fable
Elle raconte une petite histoire, souvent à travers des animaux, avec une portée morale. De longueur
variable, elle autorise le changement de la mesure du vers pour animer le récit.
3- L'élégie
Chant de mort dans l'Antiquité ; originellement codifiée, elle pleure sur un ton plaintif la
disparition d'un proche ou d'un amour. « Une promenade au Jardin des Plantes » de MUSSET.
4- Le madrigal
Ce court poème galant qui trousse le compliment à la femme aimée. C’est le cas de « Si c’est aimer »
de RONSARD.
5- L'hymne
Né dans l’Antiquité, il célèbre un personnage illustre, un dieu, souvent de façon chantée
; il aborde généralement des sujets religieux ou historiques. Ex : La Congolaise.
6- Le poème en prose
Né au début du XIXe siècle avec Aloysius Bertrand, il contient des paragraphes de prose
(aussi nommés « versets ») et met en œuvre un langage poétique et musical (échos phoniques,
rythmes, images).
7- Le poème en vers libres
Il conteste les règles de la versification à la fin du XIXè siècle et s’affirme au XXè siècle en
abandonnant la strophe, la rime et la métrique classique : le nombre de syllabes de chaque vers n’est plus
régulier ; ils ont des longueurs différentes. NB : Tous les textes poétiques ne se rangent pas dans les formes indiquées. Toutefois, si on retrouve
dans un texte poétique les éléments de la versification classique comme la mesure, les rimes, les strophes ;
on peut alors penser à un poème classique.
EXERCICE I : Précisez la nature de chaque texte poétique proposé puis justifiez votre réponse.
Texte 1 :
Le temps du Martyre
Le Blanc a tué mon père
Car mon père était fier
Le Blanc a violé ma mère
Car ma mère était belle
Le Blanc a courbé mon frère sous le soleil des routes
Car mon frère était fort
Puis le Blanc a tourné vers moi
Ses mains rouges de sang
Noir
M’a craché son mépris au visage
Et de sa voix de maître :
« Hé boy, un Berger, une serviette, de l’eau ! »
David DIOP, Coups de pilon, 1956 – 1973.
Texte 2 : Nevermore
Souvenir, souvenir, que me veux-tu ? L’automne
Faisait voler le givre à travers l’air atone(1),
Et le soleil dardait au rayon monotone
Sur le bois jaunissant où la bise détone(2).
Nous étions seul à seul et marchions en rêvant,
Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
Soudain, tournant vers moi son regard émouvant :
« Quel fut ton plus beau jour ? » fit sa voix d’or vivant,
Sa voix douce et sonore, au frais timbre angélique.
Un sourire discret lui donna la réplique,
Et je baisai sa main blanche, dévotement(3).
- Ah ! les premières fleurs, qu’elles sont parfumées !
Et qu’il bruit(4) avec un murmure charmant
Le premier oui qui sort de lèvres bien-aimées !
Paul VERLAINE, Poèmes saturniens, 1866.
Vocabulaire
(1) Atone : sans vigueur, sans vitalité
(2) Détone : être le siège d’une détonation
(3) Dévotement : avec dévotion (attachement fervent)
(4) Bruire : faire entendre un son, un murmure confus
Texte 3 : Au bon vieux temps
Dedans Paris, ville jolie,
Un jour, passant mélacolie,
Je pris alliance nouvelle
A la plus gaie damoiselle
Qui soit d’ici en Italie.
D’honnêteté elle est saisie,
Et crois, selon ma fantaisie
Qu’il n’en est guère de plus belle
Dedans Paris.
Je ne vous la nommerai mie,
Sinon que c’est ma grand amie ;
Car alliance se fit telle
Par un doux baiser que j’eus d’elle,
Sans penser aucune infamie.
Clément MAROT
Texte 4 : Harmonie du soir
Voici venir le temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir,
Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir,
Valse mélancolique et langoureux vertige !
Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;
Le violon frémit comme un cœur qu’on afflige ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.
Le violon frémit comme un cœur qu’on afflige ;
Un cœur tendre, qui hait le néant vaste et noir !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir ;
Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige.
Un cœur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige !
Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige…
Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir !
Charles BAUDELAIRE, Les Fleurs du mal, 1857.
Texte 5 : Le Désespoir de la vieille
La petite vieille ratatinée se sentit toute réjouie en voyant ce joli enfant à qui chacun faisait fête, à
qui tout le monde voulait plaire ; ce joli être, si fragile comme elle, la petite vieille, et, comme elle aussi,
sans dents et sans cheveux.
Et elle s’approcha de lui, voulant lui faire des risettes et des mines agréables.
Mais l’enfant épouvanté se débattait sous les caresses de la bonne femme décrépite, et remplissait la
maison de ses glapissements.
Alors la bonne vieille se retira dans sa solitude éternelle, et elle pleurait dans un coin, se disant :
– « Ah ! pour nous, malheureuses vieilles femelles, l’âge est passé de plaire, même aux innocents ;
et nous faisons horreur aux petits enfants que nous voulons aimer ! »
Charles BAUDELAIRE, Le Spleen de Paris, 1868.
EXERCICE II : Après avoir lu ces deux poèmes, précisez leur nature.
Texte 1 :
P
eti
Te
bou
Teille
Où mons
ieur Ba
Ty cons
erve l’
antique
NECTAR
Guillaume APOLLINAIRE, Poèmes retrouvés, 1965.
Texte 2 : Mon bras pressait ta taille
Mon bras pressait ta taille frêle
Et souple comme le roseau ;
Ton sein palpitait comme l'aile
D'un jeune oiseau.
Longtemps muets, nous contemplâmes
Le ciel où s'éteignait le jour.
Que se passait-il dans nos âmes ?
Amour ! Amour !
Comme un ange qui se dévoile,
Tu me regardais, dans ma nuit,
Avec ton beau regard d'étoile,
Qui m'éblouit.
Victor HUGO, (1802-1885), Les Contemplations, 1856.
LES FIGURES DE STYLE
Niveau d’études : Première A
Objectif : Savoir identifier et interpréter une image de rhétorique dans un texte littéraire
Définition
Une figure de style est un procédé d’écriture, une façon de s’exprimer, qui modifie le langage ordinaire
pour le rendre expressif, en créant des images, des sons, des associations de mots qui ont un sens.
Il faut savoir les reconnaître, mais surtout les interpréter, dire quel effet elles produisent. Il s’agit de
comprendre ce que chacune d’elles met en valeur.
Les figures de style peuvent être classées en plusieurs catégories :
I- Les figures d’analogie (qui rapprochent deux éléments) :
1- La Comparaison : Rapprochement de deux termes, appelés comparé et comparant lesquels sont
liés par un mot-outil. Ces outils comparatifs sont : comme, ainsi, tel, pareil à, semblable à, etc.
Exemples : « Elle a passé, la jeune fille/Vive et preste comme un oiseau » (Nerval) ; « Quand
d’occident, comme une étoile vive, /Je vis sortir …une Nymphe en rient[en riant]. (Du Bellay).
2- La Métaphore : La métaphore est une comparaison incomplète. Elle rapproche un terme d’un autre
mais sans un mot-outil. Seulement, le comparé peut aussi être absent.
Exemples : «La vie est un éclair, une fable, un mensonge » (Pierre Mathieu, Tablette de la vie et de la
mort) →Vie : comparé, éclair : comparant.
« Déjà la nuit en son parc amassait/Un grand troupeau d’étoiles vagabondes » (Du Bellay,
Sonnet LXXXIII) →La nuit : comparé ; comparant non-explicite ; par analogie l’image du troupeau
assimile la nuit à une bergère, les étoiles à des moutons.
« Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage » (Baudelaire, « L’Ennemi »).
3- La personnification : Elle consiste à présenter une chose, une idée comme une personne. Cette
figure de style est fréquente en poésie.
Exemple : « Nature, berce-le chaudement, il a froid » (Rimbaud).
4- L’allégorie : Elle permet de rendre concrètes des données abstraites.
Exemple : « …et l’angoisse atroce, despotique/Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir »
(Baudelaire, Les Fleurs du mal).
II- Les figures de substitution
1- La métonymie : Elle désigne un élément par un autre élément ayant avec le premier une relation
logique.
Exemple : « Fer qui causes ma peine, /M’es-tu donné pour venger mon honneur ?/ M’es-tu donné pour
perdre ma Chimène » (Le Cid, Acte I, 6, v. 291-350). →Fer désigne l’épée.
N.B : La métonymie remplace le tout par la partie et inversement, le contenant par le contenu, la
fonction par le lieu, l’œuvre par son auteur.
2- La synecdoque : Elle remplace un mot par un autre, qui entretient avec le premier un lien
d’inclusion pose sur un rapport d’inclusion (la partie pour le tout, la matière pour l’objet).
Exemples : Une voile, au lieu de : Un navire ;
« Je vous envoie un bouquet que ma main
Vient de trier… ». → main représente le poète lui-même.
III- Les figures d’opposition :
1- L’antiphrase : Elle consiste à dire le contraire de ce que l’on pense, tout en faisant comprendre ce
que l’on pense réellement.
Exemples : « Rien n’était plus si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armées »
(Voltaire, Candide).
Hitler, ce grand démocrate.
2- L’antithèse : Elle consiste à opposer deux termes en exprimant le caractère conflictuel, paradoxal,
monstrueux d’une situation.
Exemples : - « Courez au feu brûler : le feu vous gèlera » (Agrippa d’Aubigné, Jugement, v. 991-
1022 ; « Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie » (L. Labé, Sonnets)
3- L’oxymore ou l’oxymoron : Il met en relation deux termes de sens contraire dans la même phrase.
Il attire l’attention, frappe la sensibilité.
Exemple: « Le soleil noir de la Mélancolie» (Nerval, El Desdichado)
4- Le chiasme : Il consiste à faire suivre deux expressions contenant les mêmes éléments mais dans
un ordre différent.
Exemples : « Plaisir n’est plus mais vis en déconfort » (Marot) ;
« Apaisé d’un rayon et d’un souffle agité » (Hugo, Les contemplations).
IV- Les figures d’amplification et d’insistance
1- L’anaphore : Cette figure se caractérise par une répétition insistante du ou des mêmes termes, au
début d’un vers, d’une phrase ou d’un paragraphe.
Exemple : « Si je parle des dieux, c’est qu’ils hantent les airs,
Si je parle des dieux, c’est qu’ils sont perpétuels » (Queneau, Les Ziaux).
2- Le parallélisme : Il consiste à reprendre la même construction syntaxique ou rythmique dans deux
parties d’un énoncé lesquelles sont construites de la même façon.
Exemples : « Il faut venger un père, et perdre une maîtresse, /L’un m’anime le cœur, l’autre retient
mon bras. » (Le Cid, Corneille) ; « Je meurs si je vous perds ; mais je meurs si j’attends » (Andromaque,
Racine, Acte III, scène 7). 3- La gradation : Elle est la succession de termes d’intensité croissante ou décroissante.
Exemples : « Va, cours, vole et nous venge » (Le Cid) ;
« Tant de villes rasées, tant de nations exterminées, tant de millions de peuples passées
au fil de l’épée…» (Essais, La Fontaine).
4- L’accumulation : Elle consiste à enchaîner des termes de même nature et de même fonction et ce,
de façon indéfinie.
Exemple : « Jamais on ne vit chevalier si preux, si noble, si habiles à pied comme à cheval, si
vigoureux, si vifs et maniant si bien toutes les armes, que ceux qui se trouvaient là » (Rabelais, Gargantua).
5- La répétition : Elle consiste à reprendre le même mot ou groupe de mots.
Exemples : « Le temps s’en va, le temps s’en va, ma Dame » (Ronsard, Continuation des Amours) ;
Il y a une armoire à peine luisante qui a entendu les voix de mes grand-tantes, qui a
entendu la voix de mon grand-père, qui a entendu la voix de mon père.
6- L’énumération : Elle consiste en la juxtaposition d’une série de mots, ordonnés d’une manière
progressive.
Exemple : Il y a une armoire à peine luisante qui a entendu les voix de mes grand-tantes, qui a entendu
la voix de mon grand-père, qui a entendu la voix de mon père.
7- Le pléonasme : Elle renvoie à l’utilisation d’un terme superflu.
Exemple : Monter en haut, Sortir dehors
V- Les figures d’atténuation
1- L’hyperbole : Elle consiste à présenter un fait, exprimer une idée de façon exagérée. L’emploie des
termes excessifs, amplifiés, vise à faire ressentir la grandeur, l’importance de l’énoncé.
Exemples : « Les spectateurs étaient comme en délire, et des tonnerres d’applaudissement frénétiques
ponctuaient chaque phrase du merveilleux Méphistophélès. » (Gautier, Récits fantastiques)
2- La litote : Elle renforce l’expression en feignant l’atténuation c’est-à-dire dire moins pour faire
entendre plus.
Exemple : « Va, je ne te hais point » Corneille, le Cid →Je t’aime passionnément.
3- L’euphémisme : L’euphémisme emploie des termes adoucis pour désigner une réalité cruelle,
désagréable, inconvenante. On le trouve souvent dans les textes ayant comme sujet la maladie ou la mort.
Exemples : « … nous nous en allons/Et tôt serons étendus sous la lame ; » (Pierre de Ronsard), le
poète parle de la mort.
Le troisième âge pour les vieux, demandeurs d’emploi pour les chômeurs.
Exercice N°1 : Dites si les phrases suivantes contiennent des hyperboles, des litotes, des euphémismes ou
des antiphrases.
1- Ce n’est pas sérieux.
2- Je te l’ai répété mille fois.
3- Les demandeurs d’emploi.
4- C’est du joli.
5- Verser des torrents de larmes.
6- Les pays en voie de développement.
7- Vous n’avez pas tort.
8- Le charmant animal planta ses crocs dans mon mollet.
Exercice N°2 : Relevez les images dans les phrases suivantes et dites s’il s’agit de comparaisons, de
métaphores, d’analogies, d’allégories ou de personnifications.
1- Tout se tait. L’air flamboie et brûle sans haleine ; / La terre est assoupie dans sa robe de feu. (Leconte
de Lisle ).
2- Tout homme qui vieillit est ce roc solitaire… (Victor HUGO).
3- Chaque fleur s’évapore ainsi qu’encensoir. / Le violon frémit comme un cœur qu’on afflige
(Baudelaire)
4- Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage. / Traversé çà et là par de brillants soleils (Baudelaire)
5- L’aurore grelottante en robe rose et verte/ S’avançait lentement sur la Seine déserte, / Et le sombre
Paris, en se frottant les yeux, / Empoignait ses outils, vieillard laborieux. (Baudelaire).
6- Il faut aller voir de bon matin, du haut de la colline du Sacré-Cœur, à Paris, la ville se dégager
lentement de ses voiles splendides, avant d’étendre les bras. (A. Breton)
7- Son regard est pareil au regard des statues. (Verlaine)
Exercice N°3 : Retrouvez dans les phrases suivantes une hyperbole, un euphémisme, une paronomase,
une métonymie, une périphrase.
1- Au volant, c’est la vie.
2- Car ces derniers soldats de la dernière guerre / Furent grands. Ils avaient vaincu toute la terre. /
Chassé vingt rois… (Victor HUGO)
3- Tout le village connaît la nouvelle et chuchote.
4- Ce roman n’est pas le meilleur de ses ouvrages.
CORRIGÉS DES EXERCICES SUR LES FIGURES DE STYLE
EXERCICE 1 :
1-« Ce n’est pas sérieux » : litote
2-« Je te l’ai répété mille fois » : hyperbole
3-« Les demandeurs d’emploi » : Euphémisme.
4-« C’est du joli » : Antiphrase
5-« Verser des torrents de larmes » : Hyperbole
6-« Les pays en voie de développement » : Euphémisme
7-« Vous n’avez pas tort » : litote
8-« Le charmant animal planta ses crocs dans mon mollet » : Hyperbole (Cette phrase est aussi une
métaphore ; elle indique que l’animal sort ses dents pour dévorer l’homme)
LA VERSIFICATION FRANÇAISE
Niveau d’études : Première A
Objectif : Connaître les notions de versification pour mieux commenter un texte littéraire.
DÉFINITION
La versification est l’ensemble des règles et techniques qui régissent l’écriture ou la composition
des poèmes. Les éléments fondamentaux de la versification française sont : la mesure, le rythme et les
sonorités.
I- LA MESURE
La mesure d’un vers est le nombre de syllabes prononcées dans ce vers. Pour repérer et comptabiliser
les syllabes, on les sépare graphiquement à l’aide d’un tiret oblique (/) ; cette opération se nomme « scander
un vers » :
« A/ccro/chant/ fo/lle/ment/ au/x h/er/bes/ des/ hai/llons » (12 syllabes)
« E/t sou/ple/ com/me/ le/ ro/seau » (8 syllabes)
« A/mour/ ! A/mour ! » (4 syllabes)
1- Le vers est un énoncé identifiable par le retour à la ligne avec majuscule à l’initiale d’un ensemble
de mots comportant un nombre déterminé de syllabes. On distingue plusieurs types de vers :
- 1 syllabe ou monosyllabe
- 2 syllabes ou dissyllabes
- 3 syllabes ou trisyllabes : « Et je pleure », (Paul Verlaine, « Chanson d’automne », Poèmes
saturniens, 1866).
- 4 syllabes ou quadrisyllabes : « Au vent mauvais », (Paul Verlaine, « Chanson d’automne »,
Poèmes saturniens, 1866).
- 5 syllabes ou pentasyllabes : «Des soleils couchants », (Paul Verlaine, « Soleils
couchants », Poèmes saturniens, 1866).
- 6 syllabes ou hexasyllabes : « Sans amour et sans haine », (Paul VERLAINE, Romances
sans paroles, 1866).
- 7 syllabes ou heptasyllabes : « Trop bête pour être inconstant » (Alfred de Musset, « A
Madame 6 », Poésies nouvelles, 1850).
- 8 syllabes ou octosyllabes : « Le bonheur passait, - il a fui ! » (Gérard De NERVAL, « Une
allée du Luxembourg », Odelettes, 1833).
- 9 syllabes ou ennéasyllabes
- 10 syllabes ou décasyllabes : « », (Paul Verlaine, « Promenade sentimentale », Poèmes
saturniens, 1866).
- 11 syllabes ou hendécasyllabes : « Que ta robe de fil de fer barbelé », (Benjamin Peret,
« Le Carré de l’hypothèse », Je sublime, 1936).
- 12 syllabes ou alexandrin : « Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage »,
(Charles Baudelaire, « L’Ennemi », Les Fleurs du mal, 1857).
2- La syllabe est un groupe formé de consonnes et de voyelles qui se prononce d’une seule émission
de voix.
Exemple : dormeur a deux syllabes : dor + meur, et « palpitait » a trois syllabes : pal + pi + tait.
3- La diphtongue : c’est la succession de deux voyelles ; ces deux voyelles peuvent être prononcées
d’une seule émission de voix et constituer ainsi une seule syllabe ou d’une double émission de voix pour
constituer deux syllabes.
- La prononciation de ces deux voyelles en une seule syllabe se nomme synérèse.
Exemple : oi/seau ; so/leil.
- La prononciation de ces deux voyelles en deux syllabes se nomme diérèse.
Exemple : li-on ; éblou-it.
4- Le « e » muet se prononce lorsqu’il est placé entre deux consonnes, à l’intérieur d’un mot, ou
lorsque le mot suivant commence par une consonne ou par un « h » aspiré.
Exemple : Et/ sou/ple/ com/me/ le/ ro/seau (Victor Hugo, Les Contemplations)
Pâ/le/ dans/ son/ lit/ vert/ où/ la/ lu/miè/re/ pleut (Arthur Rimbaud, Poésies)
Il ne se prononce pas :
- En fin de vers : Qui ce matin avait déclose, Pierre de Ronsard, Odes, 1584.
- Lorsque le mot suivant débute par une voyelle ou un « h » muet :
Une aube affaiblie (Paul VERLAINE, Poèmes saturniens, 1866).
Remarques : Pour bien mesurer un vers, il faut tenir compte des liaisons. La consonne finale d’un
mot qui sert de liaison avec le mot suivant, fait partie de la syllabe du mot suivant.
Exemple : au/x her/bes/ des/ hai/llons » ; « no/s â/mes ».
II- LE RYTHME
1- La pause
En poésie, le rythme du vers dépend de ses accents toniques. Chaque accent est suivi d’une pause,
qui délimite une mesure.
1-1 : La pause centrale s’appelle césure.
Exemple : «Sur la face des mers //, sur la face des monts », (Victor HUGO, Feuilles d’automne,
1831.).
Dans ce vers, la césure se situe au niveau de la sixième syllabe. Chaque partie de la césure est
appelée hémistiche.
1-2 : Les pauses secondaires sont des coupes
Exemple : « L’horreur des bois, / l’horreur des mers, / l’horreur des cieux » (Hugo). Dans ce vers, on relève trois coupes.
C’est donc le rapport entre ces mesures qui crée l’unité rythmique du vers. Dans le cas de
l’alexandrin, on distingue le rythme binaire et le rythme ternaire.
2- La pause rythmique
Elle correspond en général à une pause grammaticale (fin de phrase ou de vers). Toutefois, entre
rythme et syntaxe peuvent apparaître des discordances, notamment lorsque la limite fixée par le mètre est
dépassée. On distingue alors l’enjambement, le rejet et le contre-rejet.
2-1 : Enjambement : il y a enjambement quand un vers se prolonge au vers suivant.
« C'est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons », (Arthur Rimbaud)
2-2 : Rejet : il y a rejet quand le dépassement ne concerne qu’un mot ou groupe court (pas
plus de deux mots en général) rejeté au début du vers suivant.
« D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons », (Arthur Rimbaud)
« Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue, » (Arthur Rimbaud)
2-3 Contre-rejet : on parle de contre-rejet quand le vers suivant commence à la fin du vers
précédent.
« Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme », (Arthur Rimbaud)
III- LES SONORITÉS
1- La rime
Elle est la répétition d’un même son à la fin de deux ou plusieurs vers. Elle se définit en fonction de sa
qualité, de son genre et de sa disposition.
1-1 La qualité : la rime peut être :
- Pauvre : un seul son commun : « haillons/rayons ».
- Suffisante : deux sons communs : « froid/droit (r+oi) » ; « roseau/oiseau (s+eau) ».
- Riche : trois sons ou plus : « rivière/fière (i+è+r) » ; « narine/poitrine (r-i-n) ».
1-2 : Le genre : la rime peut être :
- Féminine lorsque le mot se termine par un « e » muet ou « es » ou « ent »: « somme/comme» ;
« frêle/aile »
- Masculine lorsque le mot se termine sans « e » muet : « jour/amour» ; « bleu/pleut »/
1-3 : La disposition : on distingue :
- La rime plate ou suivie (aabb) ;
- La rime croisée ou alternée (abab)
- La rime embrassée (abba)
2- Les assonances et les allitérations 2-1 : L’assonance : elle est la répétition d’une voyelle ou d’un son vocalique.
« C'est un trou de verdure où chante une rivière » ; assonance en ‘e’ ou en ‘ou’.
« Ton sein palpitait comme l'aile », assonance en ‘è’.
2-2 : L’allitération : C’est la répétition d’une consonne et d’un son consonantique.
« Pâle dans son lit vert où la lumière pleut », allitération en ‘l’.
« Mon bras pressait ta taille frêle », allitération en ‘r’.
NB : Lors d’un commentaire littéraire, les assonances et les allitérations peuvent être interprétées par
rapport à la sensibilité de l’auteur.
IV- LA STROPHE
C’est un ensemble de vers réunis selon une disposition particulière des rimes. On distingue les types
de strophes suivants :
- Le distique : 2 vers
- Le tercet : 3 vers
- Le quatrain : 4 vers
- Le quintil : 5 vers
- Le sizain : 6 vers
- Le septain : 7 vers
- Le huitain : 8 vers
- Le neuvain : 9 vers
- Le dizain : 10 vers
NB : Il existe aussi des strophes moins utilisées comme le monostiche (1 vers), le onzain (11 vers) et
le douzain (12 vers).
EXERCICE I : Comptez le nombre de syllabes contenues dans chacun des vers suivants :
1- Je parlais des fleurs, des arbres. (V. Hugo)
2- Je vois se dérouler des visages heureux. (Charles Baudelaire)
3- Il était un roi de Bohème. (Klingsor)
4- Il n’est plus de nuit, il n’est plus de jour. (T. Corbière)
5- Vous viendrez rêvant. (M. Desbordes-Valmore)
6- Beau chevalier qui partez pour la guerre
Qu’allez-vous faire
Si loin d’ici ? (A. de Musset)
EXERCICE II : Après avoir mis entre parenthèses les « e » muets, comptez la mesure des vers suivants :
1- Elle a passé la jeune fille
Vive et preste comme un oiseau. (G. de Nerval)
2- Sur l’onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys. (Rimbaud)
3- O Meuse inaltérable et douce à toute enfance. (Péguy)
EXERCICE III : Dans les vers suivants, retrouvez les rejets, les contre-rejets et les enjambements.
Précisez à chaque fois l’effet obtenu.
1- Le ciel verse un repos immense ; pour l’oreille
Tout bruit a cessé. L’âme entend en ce moment. (V. Hugo)
2- Il partit comme un trait, mais les élans qu’il fit
furent vains : la tortue arriva la première. (La Fontaine)
3- Les pétales tombés des cerisiers de mai
Sont les ongles de celle que j’ai tant aimée. (Apollinaire)
EXERCICE IV : Voici une liste de mots. Rapprochez ceux qui peuvent rimer : veste – promesse – pièce
– anglaise – cacatoès – tiède – plaise – fraise – espèce – oued – agreste- vétuste – caste – ouest – robuste –
vaste – astre – contraste – désastre – conirostre.
EXERCICE V : Indiquez la disposition des rimes dans ces vers.
1- J’offre des violettes,
Ces lis et ces fleurettes
Ces merveilleuses roses
Tout fraîchement écloses. (Du Bellay)
2- Par les soirs bleus d’été, j’irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l’herbe menue.
Rêveur, j’en sentirai la fraîcheur à mes pieds
Je laisserai le vent baigner ma tête nue. (Rimbaud)
3- Dans l’interminable
Ennui de la plaine
La neige incertaine
Luit comme du sable. (Verlaine)
EXERCICE VI : Indiquez si les rimes des poésies ci-dessus sont :
1- masculines ou féminines
2- pauvres, suffisantes ou riches.
EXERCICE VII : Relevez les allitérations et les assonances dans les vers suivants. Indiquez quel est l’effet
recherché.
1- Dans son sommeil glissant l’eau se suscite en songe
Un chuchotis de joncs de roseaux d’herbes lentes. (C. Roy)
2- A dos de mule
A dos d’oiseau
A dos de libellule hulot
A dos de rat mulot
A pas de campanule
A bras de mélicot
S’en va la pluie à bulles
S’en va la pluie sur l’eau. (M. Fombeure)
LES TONALITÉS D’UN TEXTE
Niveau d’étude : Première A
Objectif : Connaitre les tonalités pour mieux analyser un texte littéraire.
I- DÉFINITION
Le terme tonalité ou registre désigne les différentes manières de ressentir et de percevoir le réel dans
un texte littéraire. Certains textes cherchent à produire des émotions qui donnent au texte une couleur
particulière qu’on appelle tonalité. Il y a plusieurs types de tonalités. Toutefois, deux ou trois tonalités
peuvent s’imbriquer à l’intérieur d’un même texte.
II- LES TYPES DE TONALITÉS
1- La tonalité réaliste
C’est l’expression la plus proche possible de la réalité. Elle vise à donner l’illusion du vrai. Cette
tonalité se manifeste à travers une description minutieuse des indices spatio-temporels (lieux et époques),
des références à l’histoire (chronologie et exactitude des faits), l’emploi du discours direct et d’un
vocabulaire précis.
2- La tonalité fantastique
Elle fait intervenir des éléments surnaturels dans un univers réaliste. C’est l’expression qui provoque
un sentiment de peur, d’angoisse. Elle se manifeste à travers le registre de l’étrange (images surprenantes,
vocabulaire fort frisant le mystère). Elle traduit aussi le doute et l’incertitude.
3- La tonalité épique
Cette tonalité confère à des personnages ou à des événements une stature exceptionnelle. Elle se
manifeste à travers les figures d’insistance et d’exagération et surtout le lexique merveilleux (allégories,
personnages).
4- La tonalité lyrique
Elle exalte les émotions et les sentiments personnels ou universels (amour, mélancolie, plénitude).
Elle s’exprime à travers les pronoms je et nous, des phrases exclamatives et interrogatives, un lexique
affectif.
5- La tonalité élégiaque
C’est l’expression de la plainte, de la tristesse, du regret. Elle utilise les mêmes procédés que la
tonalité lyrique. Elle exprime surtout les peines liées à l’amour.
6- La tonalité tragique
Elle est l’expression de la fatalité qui éveille terreur et pitié chez le lecteur et chez le spectateur. Elle
se manifeste à travers le lexique de la souffrance, de la mort, les figures d’insistance (hyperbole, gradation),
les exclamations et les interjections.
7- La tonalité pathétique
Elle traduit l’expression violente de la souffrance dans le but d’émouvoir le lecteur et d’éveiller sa
pitié. Le registre pathétique utilise le lexique de la souffrance. Il emploie souvent des hyperboles, des
apostrophes, des interjections et des phrases exclamatives.
8- La tonalité comique
La tonalité comique vise à provoquer le rire ou le sourire. Elle se manifeste à travers des figures
d’exagération ou d’atténuation (hyperbole, litote, euphémisme), des répétitions mécaniques de mots ou de
situations, des jeux de mots.
NB : Il existe aussi d’autres tonalités comme la tonalité polémique, didactique, épidictique,
humoristique, …
Exercice I : Relevez les deux tonalités présentes dans ce texte de Rimbaud.
Texte : Ma bohème
Je m’en allais, les points dans mes poches crevées ;
Mon paletot aussi était idéal,
J’allais sous le ciel, Muse ! et j’étais ton féal ;
Oh ! là ! là ! que d’amours splendides j’ai rêvés !
Mon unique culotte avait un large trou.
-Petit Poucet rêveur, j’égrenais dans ma course
Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse.
-Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou.
Et je les écoutais, assis au bord des routes,
Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes
De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ;
Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,
Comme des lyres, je tirais les élastiques
De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur !
Arthur Rimbaud, Poésie, 1870.
Exercice II : Ce texte affiche deux tonalités : lyrique et tragique. Relevez les indices qui les justifient.
Texte : Demain, dès l’aube
Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la compagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au-dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur.
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
Victor Hugo, Les Contemplations, 1856.
LES GRANDS MOUVEMENTS LITTERAIRES FRANÇAIS DU XIXe ET XXe SIECLE
La littérature française a connu plusieurs grands mouvements littéraires ayant marqué à la fois son histoire
politique et littéraire. Par siècle et mouvements, ils se présentent comme suit :
Au Moyen-Age
Mouvements littéraires Ecrivains représentatifs Genres littéraires dominants
Littérature aristocratique François VILLON
Charles d’ORLEANS
Poésie
Littérature bourgeoise
populaire
Chrétiens de TROYES
Pierre de SAINT-CLOUD
Roman : De SAINT-CLOUD, Le
roman de Renard ; De TROYES,
Yvain ou Le Chevalier au lion
Au XVIe siècle
Mouvements littéraires Ecrivains représentatifs Genres littéraires dominants
L’humanisme RABELAIS, MONTAIGNE -Prose narrative : les récits de
RABELAIS (Pantagruel,
Gargantua)
-Prose d’idées: les Essais de
MONTAIGNE
La pléiade RONSARD, Du BELLAY -Poésie lyrique : RONSARD, Les
Amours, Du BELLAY, Les
Regrets
Au XVIIe siècle
Mouvements littéraires Ecrivains représentatifs Genres littéraires dominants
Le baroque Agrippa d’AUBIGNE
Théophile de VIAU
SPONDE
François de MALHERBE
-Poésie lyrique
-Poésie épique
-Théâtre
Le classicisme CORNEILLE
RACINE
MOLIERE
LA FONTAINE
LA BRUYERE
BOILEAU
PASCAL
BOSSUET
Madame de La FAYETTE
François FENELON
Madame de SEVIGNE
-Théâtre tragique
-Théâtre comique
-Poésie
-Prose d’idées : LA BRUYERE,
Les Caractères ; PASCAL,
Pensées
Au XVIIIe siècle
Mouvements littéraires Ecrivains représentatifs Genres littéraires dominants
Les Lumières MONTESQUIEU
VOLTAIRE
ROUSSEAU
DIDEROT
MARIVAUX
BEAUMARCHAIS
Pierre Choderlos de LACLOS
-Prose d’idées : MONTESQUIEU,
L’Esprit des lois ; ROUSSEAU,
Du contrat social.
-Prose narrative : VOLTAIRE,
Candide ; DIDEROT, Jacques le
fataliste
-Théâtre : BEAUMARCHAIS, Le
Mariage de Figaro
Le Naturalisme ROUSSEAU
BUFFON
-Prose narrative : Les rêveries
d’un promeneur solitaire
Au XIXe siècle
Mouvements littéraires Ecrivains représentatifs Genres littéraires dominants
Le romantisme CHATEAUBRIAND
LAMARTINE
VIGNY
MUSSET
NERVAL
HUGO
-Poésie : LAMARTINE, Les
Méditations, VIGNY, Les
Destinées -Théâtre : HUGO, Hernani ;
MUSSET, Lorenzaccio
-Roman : chateaubriand, René ;
HUGO, Notre-Dame de Paris
Le parnasse Théophile GAUTIER
LECONTE De LISLES
Sully PRUD’HOMME
José Maria de HEREDIA
Théodore de BANVILLE
Poésie
Le réalisme STENDHAL
BALZAC
FLAUBERT
Jules GONCOURT et Edmond
GONCOURT
Roman
Le naturalisme ZOLA
MAUPASSANT
HUYSMANS
-Roman : ZOLA, L’Assommoir,
Germinal
-Recueil de nouvelles :
MAUPASSANT, Boule de suif,
Une vie
Le symbolisme BAUDELAIRE
VERLAINE
RIMBAUD
MALLARME
Poésie
Au XXe siècle
Mouvements littéraires Ecrivains représentatifs Genres littéraires dominants
Le symbolisme (poursuite) APOLLINAIRE
Max JACOB
Blaise CENDARS
Pierre REVERDY
Poésie
L’existentialisme ou absurde Jean Paul Sartre
Albert CAMUS
Roman philosophique :
L’Etranger, Le Mythe de
Sisyphe de CAMUS ; L’Être est,
le non être n’est pas de Sartre…
Le surréalisme André BRETON
Paul ELUARD
Louis ARAGON
Robert DESNOS
-Poésie lyrique : ELUARD,
Capitale de la douleur ;
DESNOS, Corps et Biens
-Récit : ARAGON, Le Paysan
de Paris ; BRETON, Nadja
Le Nouveau Roman Nathalie SARRAUTE
Claude SIMON
Alain ROBBE-GRILLET
Michel BUTOR
Roman
L’humanisme Paul VALERY
André GIDE
-Roman : GIDE, Les faux
monnayeurs -Poésie : VALERY, Charmes
-Essai : VALERY, Variété
COURS SUR L’ETRANGER D’ALBERT CAMUS
LE PERSONNAGE PRINCIPAL
MEURSAULT PERSONNAGE NARRATEUR DU RECIT
Le statut du narrateur apparait clairement dans le roman : c’est un narrateur homodiégétique car il est
présent dans le récit qu’il raconte, il en est le héros, et alors le récit est mené à la première personne. Ce qui
fait que le roman soit un texte du « je » et que le récit se présente sous forme d’un journal des faits et gestes
de la vie quotidienne du personnage principal, Meursault : »Aujourd’hui, maman est morte, peut-être hier
(…) je prendrai l’autobus…je rentrerai demain soir… » (p.9)
MEURSAULT : UN PERSONNAGE SOLITAIRE OU SOLIDAIRE ?
Dans son œuvre littéraire intitulée L’Etranger, l’écrivain français, Albert CAMUS, met en scène
un personnage vide, sans personnalité marquée, sans même de prénom qui préciserait son identité :
Meursault. Dans le récit, tout se lit à travers le regard, les commentaires de ce narrateur-personnage. Par
rapport à sa manière d’être, Meursault paraît ambivalent : parfois il est proche des autres personnages,
parfois il s’écarte d’eux. Ainsi, nous nous demandons si Meursault est un personnage solidaire ou un
personnage solitaire.
I- MEURSAULT : UN PERSONNAGE SOLITAIRE
Comme l’indique le titre du roman, L’Etranger, Meursault est un étranger. Il est plein de solitude
et d’unicité. D’ailleurs, CAMUS dira de ce personnage : « Le héros du livre est condamné parce qu’il ne
joue pas le jeu. En ce sens, il est étranger à la société où il vit, il erre, en marge, dans les faubourgs de sa
vie privée, solitaire, sensuelle », (Préface à l’édition américaine, 1955). Meursault est un personnage qui
raconte et qui se raconte, il est solitaire du fait qu’il refuse d’entrer dans le jeu de la société, mais en tant
qu’observateur étranger à ce jeu, il admet fort bien que celui-ci ait ses règles. Il refuse d’avoir une apparence
et, en particulier, un langage qui trahiraient son être profond.
Son caractère solitaire s’expliquera surtout grâce aux jugements que d’autres personnages du roman
ont de lui : son indifférence devant son avenir surprend son patron (p. 69), son indifférence devant le
mariage surprend Marie (pp. 69-70) et son comportement déconcerte son avocat… Par-là, nous pouvons
dire que Meursault dit ce qu’il est, il refuse de masquer ses sentiments et la société du coup se sent menacée
et le rejette. Par exemple, quand on lui demande de dire qu’il regrette son crime, selon la formule consacrée,
il répond qu’il éprouve à cet égard plus d’ennui que de regret véritable. Et cette nuance le condamne. La
conscience de Meursault démasque la comédie de la vie, en particulier lors du procès, où les acteurs
deviennent eux aussi des « pantins ».
Meursault est aussi un personnage qui s’écarte du monde. Il est nonchalant. Il accorde plus
d’importance au sommeil : il s’assoupit dans l’autobus qui le conduit à l’asile, puis devant le cercueil de sa
mère, il se réjouit à la perspective de dormir « pendant 12 heures » (p. 31). Quand Raymond vient frapper
à sa porte à trois heures de l’après-midi, il le trouve couché (p. 62). Dans sa cellule, il dort de 16 heures à
18 heures par jour. Par-là, nous pouvons dire que sa nonchalance se traduit par une extraordinaire
propension au sommeil. Dormir avec autant d’obstination, c’est une manière de se retirer du monde. Ce
narrateur-personnage est étranger aux conventions sociales, aux règles de la justice. Il dira lui-même,
parlant du procurant : « Il a déclaré que je n’avais rien à faire avec une société dont je méconnaissais les
règles les plus essentielles », (p. 157). Il va même refuser l’aide de l’aumônier dans sa cellule car sa
présence le dérange : « sa présence me pesait et m’agaçait », (p. 181). Il refuse donc de croire en Dieu.
II- MEURSAULT : UN PERSONNAGE SOLIDAIRE
Meursault est sensible au monde, c’est-à-dire vulnérable à l’ombre et à la lumière, il est attentif
aux réactions de son entourage et sensuel dans ses relations amoureuses. C’est un personnage solidaire, car
plus le récit évolue, plus il compte des nouveaux amis. Il ne se pose pas le problème des rapports humains :
il les vit et il est étonné (mais disponible) quand Raymond lui offre son amitié ou Marie son amour.
Meursault est un personnage qui n’oblige pas les autres à penser comme lui, qui ne pose pas des
questions sur leur caractère et sur ce qu’ils font ou pensent. Souvent, il est disponible quand les autres ont
besoin, il est disponible pour aider Raymond à rédiger la lettre : « J’ai fait la lettre. Je l’ai écrite un peu au
hasard, mais je me suis appliqué à contenter Raymond (…) », (p. 54). Il ne rejette pas ceux qui viennent
vers lui pour se consoler. C’est le cas de Salamano qui, après avoir perdu son chien, se rend auprès de
Meursault : « Sur le pas de ma porte, j’ai trouvé le vieux Salamano. Je l’ai fait entrer et il m’a appris que
son chien était perdu », (p. 73). Meursault aime la compagnie des autres personnages. Lors de la veillée, il
accepte que la concierge vienne s’asseoir auprès de lui : « Le concierge est venu alors de mon côté. Il est
assis près de moi », (p. 20).
Son caractère solidaire va le plonger même dans une vie obscure où la mort, peut-être, sera la seule
issue. C’est son amitié avec Raymond par exemple qui changera toute sa vie. Il a tué l’Arabe du fait qu’il
voulait se protéger et protéger son ami Raymond (p. 95). Meursault est donc solidaire dans la mesure où il
est souvent en compagnie des autres personnages. Il les accepte avec leurs défauts. Il semble trouver des
solutions à leurs angoisses en s’efforçant de les comprendre. C’est pourquoi, lors du procès, ces derniers
viendront témoigner pour sa culpabilité. Céleste dira même au procès de lui : « C’est un homme », (p. 141).
III- MEURSAULT: PERSONNAGE ABSURDE
L’absurde sur ce point se justifie par l’insensibilité ou l’indifférence de Meursault au mariage ou à la
proposition de mariages faits par Marie Cardona, une ancienne dactylo de son bureau qu’il retrouve par
hasard. Cette insensibilité est claire et nette lorsque Marie lui demande s’il veut l’épouser. Sa réaction ne
s’est pas attendre, voici ce qu’il répond : «Que cela m’était égal ». Cette réponse donnée par Meursault
nous amène à comprendre que pour lui, l’amour n’a pas de sens, on ne change pas de vie d’avenir. Et
pourtant c’est une femme qui l’attirait, réveillait toutes ses sensations, prouesses sexuelles puisqu’ils se
sont baignés ensemble tout en faisant des jeux dans l’eau qui finiront par se transforment en jeux d’amour
ou pornographique, vont même passer une nuit agitée ensemble après avoir regardé un film de Fernandel.
Sur le plan familial, Meursault est un héros qui vit dans l’absurde. Ici, il manque de sensibilité suite au
décès de sa mère déjà au début du récit : «Aujourd’hui maman est morte ou peut-être hier, je ne sais pas».
Non seulement qu’il est insensible, il affiche aussi un comportement qui suscite le gêne ou le trouble quand
il refuse, sans raison, de voir le corps de sa mère. La scène de la cigarette est significatif car fumer devant
le corps d’une mère est inconvénient, c’est une joie qui ne peut exister en même temps avec la douleur que
l’on doit éprouver. Mais, il bafoue et s’en fout des principes funéraires lorsqu’il déclare : « J’ai eu alors
envie de fumer. Mais j’ai hésité parce que je ne savais si je pouvais le faire devant maman. J’ai réfléchi,
cela n’avait aucune importance» (page, 7). C’est même ce désordre qui fait que Meursault n’a jamais eu
l’intention de chercher pas son père inconnu. Sur le plan professionnel, Cette indifférence a traversé toutes
les différentes étapes de sa vie. Par conséquent, Meursault reste impassible devant la promotion que lui
propose son patron, celui de créer une nouvelle agence à paris. La vie absurde également visible toujours
avec son patron en ces termes : «Il (mon patron) m’a demandé alors si je n’étais intéressé par un
changement de vie. J’ai dit qu’on ne changeait jamais de vie, qu’en tout cas toutes se valaient et que la
mienne ici ne me déplaisait pas du tout ». Partie I, chapitre 5, Page, 61. Sur le plan personnel, Meursault
vit cette absurdité sur ce plan personnel parce qu’il est dépourvu de compassion à l’égard des autres c’est-
à-dire des êtres et des amitiés. A ce sujet, voici ce qu’il déclare : «…il m’a demandé encore si je voulais
être son copain. J’ai dit que ça m’était égal» Page, 49. Et face à ce même Raymond Sintès, son voisin de
palier, Meursault peut dire sans crainte : «il l’avait battue jusqu’au sang ». Cet acte ne signifiant rien à ses
yeux est un trait de caractère de cet étranger. Voilà ce qu’il dit après échange : « il m’a demandé si ça ne
me dégoûtait pas et j’ai répondu que non» page, 48. Egalement, il tue l’arabe pour une raison peu évidente
: le reflet du soleil sur le couteau de l’Arabe ; il ne ressent aucun regret suite à ce crime puisqu’il crible de
cartouches le cadavre de l’Arabe plus d’une fois. Ce comportement continue même en prison lorsque les
anciens prisonniers Arabes lui demandent le motif de son emprisonnement, il répond : « J’avais tué un
Arabe et ils sont restés silencieux», page, 114. A cette vie absurde de Meursault peut se lire aussi son ennui
de vivre. Le roman le confirme au chapitre 1, pages 36-41 : «Après le déjeuner, je me suis ennuyé un peu
et j’ai erré dans l’appartement.(…) j’ai pensé que c’était toujours un dimanche férié, que maman était
enterrée, que j’allais reprendre mon travail et que, somme toute, il n’y avait rien de changé». De même,
on peut lire ce propos de meursault : «A part ces ennuis, je n’étais pas trop malheureux. Toute la question,
encore une fois, était de tuer le temps». Partie I, chapitre 2, p.22. Sur le plan religieux, Vivant dans l’ennui,
Meursault va recevoir la visite de L’aumônier, un homme de Dieu, qu’il finira par rejeter. A cela, le dialogue
qui s’engage avec l’aumônier est un débat pied à pied, où chaque argument est refusé par Meursault. Pour
lui, la question de Dieu n’existe pas, puisque le sujet ne l’intéresse pas. Résolument incroyant, résolument
«attaché à cette terre », page, 181, sûr d’une mort entière, définitivement seul, Meursault éclate de colère
au «Je prierai pour vous », page, 182, de l’aumônier. Cette colère balaie d’un souffle les incertitudes, les
choix, les espoirs. L’aumônier tente de le réconforter en disant : « Dieu vous aiderait alors, a-t-il remarqué.
Tous ceux que j’ai connus dans votre cas se retournaient vers lui». Le héros continuait à rejeter cette option
de Dieu, et à regarder les choses à sa manière. De surcroît, ces réponses rendaient l’aumônier triste c’est-à-
dire que ses ‘’yeux pleins de larmes’’, page, 184, sont sa seule réponse. Meursault retrouve alors le seul
accord qui vaille, dans «la tendre indifférence du monde », page, 186. Sans doute est-ce de cette fierté que
naît le vœu qui clôt le livre c’est-à-dire mourir pour ne rencontrer sur son chemin l’absurdité de la vie. Sur
le plan de l’incommunicabilité, L’incommunicabilité est effectivement une caractéristique de la vie
absurde. Elle est apparente dans les rapports entre Meursault et sa mère. Le narrateur qui n’est autre
Meursault affirme : «D’ailleurs, ai-je ajouté, il y avait longtemps qu’elle c’est-à-dire maman n’avait rien
à me dire et qu’elle s’ennuyait toute seule », page, 75. De même qu’avec Marie, lorsque Meursault sera en
prison. Voici ce qui est écrit : «Déjà collée contre la grille, Marie me souriait de toutes ses forces. Je l’ai
trouvée très belle, mais je n’ai pas su le lui dire. (…). Elle a crié de nouveau : «Tu sortiras et on se mariera
! ». J’ai répondu : «Tu crois ? » « Mais c’était surtout pour dire quelque chose », chapitre, 2, pages 116-
117. Il en va de même qu’avec le président du tribunal lors de son procès : «Le président a répondu (…)
qu’il serait heureux (…) de faire préciser les motifs de mon acte. J’ai dit rapidement, en mêlant un peu les
mots et en me rendant compte de mon ridicule, dans la salle », chapitre, 4, page, 158.Sur le plan de la
justice, Meursault est un spectateur de son procès. On le juge pour meurtre. Mais voici la première
impression qu’il nous livre à son arrivée : «(…) tout remue-ménage qui m’a fait penser à ces fêtes du
quartier (…) », page, 128. On lui demande s’il a le trac : «j’ai répondu que non », page, 128. On est en
droit de penser que Meursault se désintéresse du procès. Meursault n’est pas aux assises. Il se sent «de trop,
un peu comme intrus», page, 130. Mais, il n’est pas absent, il est au contraire spectateur de ce théâtre
judiciaire qu’est son procès, voici ce qu’il dit : «(…) cela m’intéressait de voir un procès », page, 128. Bref,
le procès l’intéressait lorsqu’il voyait comment le juge, l’avocat et le procureur débattaient sur sa situation.
Par ailleurs, l’absurde peut se lire à travers le couple Salamano et son chien. Sur ce, écoutons Camus en
souligner la monotonie : «deux fois par jour », «depuis huit ans», «c’est ainsi tous les jours », « il y a huit
ans que ça dure ».
IV- MEURSAULT : PERSONNAGE INDIFFERENT
L’indifférence face au décès de sa mère ou sa famille, Meursault vient d’apprendre le décès de sa mère et
ne manifeste nullement aucun chagrin, remord par la disparition d’un être aussi cher que la mère. La preuve
est qu’il ne sait pas la date exacte de sa mère. A propos, il dit : «Aujourd’hui maman est morte ou peut-être
hier, je ne sais pas » (p.9). On peut trouver dans ces paroles l’étrangeté c’est-à-dire un caractère étranger
dans l’attitude de Meursault. Nous avons l’impression que celle qui vient de mourir n’est pas sa mère mais
une autre personne qui est loin d’être une personne qui donne la vie. A cela aussi sa propension (mensonge)
au sommeil car il s’assoupit dans l’autobus qui le conduit à l’asile. De même, devant le cercueil, il s’est
rendu dans un état voisin du somnambulisme car il se réjouit à la perspective de dormir pendant douze (12)
heures (p.31) et heureux de vite rentrer après les funérailles pour vaquer à ses occupations ; c’est donc son
fantôme qui a assisté aux obsèques. Son insensibilité se manifeste également dans son refus de voir pour la
dernière fois le corps de sa mère. Cette précipitation prouve le caractère de Meursault, un être sans cœur et
sans sentiment. L’indifférence face au patron, Tout juste après l’enterrement de sa mère, il propose à
Meursault d’aller travailler à Paris car il était sur d’ouvrir une autre agence. Ce dernier rejette la proposition
de son patron. Autrement dit, l’attitude de Meursault est aussi restituée grâce aux impressions des autres
personnages du roman notamment son indifférence devant son avenir surprend son patron. L’indifférence
face à Marie Cardona, Cette attitude insensible s’est aussi manifestée dans l’amour, dans sa liaison avec
Marie. Son indifférence devant le mariage surprend Marie et son comportement déconcerte son avocat. A
propos de cette attitude vis-à-vis du mariage, on peut apprécier sa réponse à la question de Marie « le soir,
Marie était venue me chercher et m’a demandé si je voulais me marier avec elle. J’ai dit que cela m’était
égal et que nous pourrions le faire si elle le voulait. Elle a voulu savoir alors si je l’aimais. J’ai répondu
comme je l’avais dit une fois, que ne signifiait rien mais que sans doute je ne l’aimais pas ».
V- MEURSAULT : PERSONNAGE CRIMINEL
La mort criminelle, Elle se caractérise dans L’Etranger par le meurtre de l’Arabe. En effet, Meursault tue
un arabe, à la plage, qui n’avait apparemment aucun antécédent avec lui. C’est donc sans raison qu’il pose
cet acte délictueux. Au départ de l’action, il sied de préciser que c’est lui qui empêche la première
catastrophe en retirant le revolver de Raymond. Malheureusement, il se trouve être l’exécuteur sans raison
de l’homicide. La mort, expression de la violence, vengeance, l’absurde, Cette mort est corollaire de la
violence, du désir, de l’absurde. Elle peut traduire aussi le malaise profondément vécu par une société dont
les différentes couches se présentent en antagonistes et ont du mal à s’harmoniser véritablement. Meursault
ne saisit pas lui-même les réelles motivations qui ont présidé à cet acte répréhensible. On a l’impression
qu’il trouve judicieux l’assassinat d’un Arabe. Ce qui peut alors traduire un sentiment de racisme. Car
lorsque ses co-prisonniers de la première cellule en majorité arabe lui demandent les motifs de son
incarcération, il répond avec un courage déroutant « j’ai dit que j’avais tué un Arabe et ils sont restés
silencieux » (p.73). On peut lire à travers cette réponse la banalité de la mort, de surcroit d’un Arabe.
Meursault ne craint pas une réaction de la part des Arabes codétenus avec lui et qui viennent d’apprendre
l’assassinat de l’un des leurs. En condamnant Meursault sur un autre fait que l’homicide de l’Arabe, la
justice renforce ce sentiment de banalité de la mort. Il est tout a fait absurde que l’on admette la raison
évoquée par Meursault la présente en ces termes « …j’aurais la tête tranchée sur une place publique au nom
du peuple français ». Cette phrase renvoie à la peine capitale. Donc Meursault doit être tué pour meurtre
commis sur l’Arabe.
VI- MEURSAULT : PERSONNAGE COMEDIEN
La comédie vestimentaire des avocats, L’aspect comique peut se lire par les habits de l’avocat, du procureur
et des jurés : « Mon avocat est arrivé en robe » : le procureur « vêtu de rouge, portant lorgnon, qui s’asseyait
en pliant sa robe avec soin » (p.132). Dans cette arène s’affrontent le procureur et l’avocat : il s’agit de
gagner les jurés ; les moyens employés sont ceux de la comédie.
VII- MEURSAULT : CRITIQUE LA JUSTICE DE SON PAYS
La plaidoirie, La satire de la justice peut se lire à travers la plaidoirie de l’avocat. En premier lieu, le regard
de Meursault, nous découvrons une comédie sociale principalement dans la seconde partie du roman,
chapitre IV (P.p.158, 161) : « L’après-midi, les grands ventilateurs brassaient toujours l’air épais de la salle,
et les petits éventails multicolores des jurés s’agitaient tous dans le même sens ». Cette phrase dévalorise
la scène : les jurés sont rapprochés ironiquement avec les ventilateurs, avec l’opposition « grands » et «
petits ». Les éventails nous donnent une impression d’automatisme des jurés : «s’agitaient tous dans le
même sens » et aussi l’idée que les jurés forment un groupe homogène ayant le même point de vue. L’ironie
est une arme ou un moyen efficace pour tourner en ridicule et dénoncer le scandale ou un comportement.
De plus, on a l’impression que leur bien-être l’emporte sur la gravité de la situation, ils ont une attitude
critique sur l’accusé : ils représentent la société. « Brassaient…l’air » : on a l’impression que cela est
superficiel et que c’est un peu du vent, que c’est une comédie. Ceci est également apparent dans le sens où
ceci intéresse assez peu Meursault et apparait aussi dans l’attitude des collègues de son avocat à la fin de la
plaidoirie. Ils répondent à un rituel et disent des paroles convenues qui virent dans la caricature et cela à
quelque chose de cruel pour Meursault que de lui demander son impression sur les discours de son avocat
: on s’adresse à lui sans retenue comme s’il n’était pas concerné par le jugement : « …ses collègues sont
venus vers lui pour lui serrer la main ». J’ai entendu : « Magnifique mon cher ». L’un deux m’a même pris
à témoin, « hein ? M’a-t-il dit. J’ai acquiescé, mais mon compliment n’était pas sincère… » La satire de la
justice à travers le discours de l’avocat, Elle se peut se lire aussi dans le discours de l’avocat. Il s’agit des
excès ridicules de l’éloquence judiciaire. Ses paroles sont constituées de formules toutes faites : « mon
affaire était délicate », « entrons dans le vif du sujet ». Son discours a quelque chose de pénible « ces
longues phrases, de toutes ces journées et ces heures interminables (…) où je trouvais le vertige ». (p.160).
La satire de la péroraison ou conclusion judiciaire, A la fin du discours, l’avocat fait une péroraison ; la
péroraison est souvent un moment de bravoure des avocats : « s’écrier », il tente de faire plaindre Meursault
en attirant la pitié des jurés, au fond, il leur souffle l’attitude qu’il faut adopter. L’avocat utilise un langage
stéréotypé : « honnête homme », « Travailleur régulier, infatigable, fidèle à la maison qui l’employait… »
et il fait usage d’une hyperbole ou exagération souvent présente dans ce genre de discours « remords
éternels ». Ce vocabulaire caricature la péroraison. La satire de la condamnation judiciaire, Eu égard à cette
défense éminente, le procureur fait lecture de la sentence ou condamnation : Meursault aura « la tête
tranchée sur une place publique au nom du peuple français ». Meursault est condamné pour un autre crime.
Autrement dit, au lieu que la condamnation porte sur l’assassinat de l’Arabe, elle va finalement porter sur
l’abandon de sa mère, le refus de pleurer lors du décès de sa mère… Dans L’Etranger, Camus veut dénoncer
l’amalgame (confusion) judiciaire. On ne peut qu’être frappé par l’étrangeté (singularité, anomalie) de ce
justiciable placé paradoxalement face à une justice qui ne parle pas de lui, mais qui va le tuer.
Meursault personnage solitaire La solitude comportementale ou communicationnelle, Dans L’Etranger, la
solitude s’exprime à travers l’attitude de Meursault. Celui-ci refuse délibérément de communiquer, de
dialoguer avec autrui. Dans le bus, par exemple, où les gens enclenchent de façon naturelle des
conversations sur divers sujets, Meursault veut garder un mutisme dont lui seul maitrise les motifs, « j’étais
tassé contre un militaire qui m’a souri et qui m’a demandé si je venais de loin. J’ai dit ‘’oui’’ pour n’avoir
plus à parler » (p.10). La solitude de Meursault envers les autres personnages, De même, Meursault
entreprend ne plus déjeuner chez Céleste pour se soustraire d’un éventuel questionnement sur le
déroulement des funérailles de sa mère. Il brise ainsi toute possibilité de communication et de contact dès
lors qu’il prend tous ses repas chez Céleste. Ce restaurant qui se présente comme un espace de contact, de
frottement, de dialogue devient, pour Meursault, un espace où la solitude se brise : « je ne voulais pas
déjeuner chez Céleste comme d’habitude parce que certainement, ils m’auraient posé des questions et je
n’aime pas cela ». Dans cette même perspective, il sied de noter que Meursault trouve fastidieux son
entretien avec le Directeur de l’Asile. Il va très rapidement s’installer dans la petite morgue, sans aucune
conviction précise. Dans cette morgue, Meursault semble être absent tout en y étant. Plongé dans une
profonde réflexion, il jette à peine un regard fugitif sur les assistants. La solitude des personnages proches
de Meursault, La solitude se traduit également à travers les personnages très proches de Meursault.
Salamano ne vit qu’avec son chien, Raymond Sintès vit seul dans « sa petite chambre ». Meursault vit
également seul. L’isolement de tous ces personnages imprime à l’œuvre un sentiment de parfaite solitude.
Camus place ses personnages dans la solitude pour que ceux-ci assument probablement seul leur destin. On
comprend dès lors que l’homme doit forger seul son avenir, réaliser et garantir sa propre existence. Cette
démarche solitaire semble répondre à l’existentialisme sartrien qui stipule que l’homme doit lui-même tracé
le chemin à parcourir pour mieux se réaliser. La solitude expression de réalisation du crime ou de la mort,
Par ailleurs, il va s’en dire que le crime se réalise dans des circonstances tout à fait particulières de solitude.
Les arabes étaient à deux lors de la première rencontre ou séquence de la bagarre ; curieusement un seul
revient, on ne sait pas trop pourquoi, à la plage. De même, après avoir accompagné Masson et Raymond
Sintès blessé au cabanon, Meursault repart discrètement en solitaire à la plage. Fait de hasard ou jeu de
destin, les deux protagonistes veulent s’abriter à la source (situé non loin de la plage) pour se soustraire de
la cruauté du soleil. Et là Meursault tire sur l’arabe « je pensais à la source fraiche derrière le rocher. J’avais
envie de retrouver le murmure de son eau, envie de fuir le soleil (…) envie enfin de retrouver l’ombre et le
repos. Mais quand j’ai été plus près, j’ai vu que le type de Raymond était venu (…) pour moi, c’était une
affaire finie et j’étais venu là sans y penser. La gâchette a cédé, j’ai touché le ventre poli… » (pp.60-61-62)
La solitude lors du procès, Le déroulement du procès offre aussi la possibilité de lire la solitude dans
L’Etranger. En effet, Meursault refuse de recevoir l’aumônier et de discuter avec son avocat. Indifférent
aux plaidoiries de son avocat, Meursault préfère se défendre seul. Toutefois, l’incarcération le plonge dans
une solitude irréversible car l’univers carcéral l’éloigne parfaitement des siens, de sa société. De la solitude
souhaitée, Meursault entre, par le truchement du crime, dans une solitude que lui impose la société. Comme
on peut le lire dans ses propos : « on m’a isolé dans une cellule où je couchais sur un bat-flanc de bois.
J’avais un baquet d’aisances et une cuvette en fer ». (p.74).
VIII- MEURSAULT : PERSONNAGE A LA FOIS MODELE ET SOLIDAIRE
Le héros du roman L’Étranger de CAMUS demeure modèle en véhiculant des valeurs. D’abord, Meursault
est généreux du fait qu’il est attentif et soucieux aux difficultés des autres. Exemple : Il accueillera
amicalement Salamano qui, après avoir perdu son chien, se rendra auprès de lui : « Sur le pas de ma porte,
j’ai trouvé le vieux Salamano. Je l’ai fait entrer et il m’a appris que son chien était perdu ». Ensuite, le
personnage principal de ce roman est solidaire car il aime la compagnie de son entourage. D’ailleurs, il a
des amis. Exemple : Meursault aime la compagnie de Marie Cardona, de Céleste, de Raymond Sintès et
des autres. Il est disponible pour aider Raymond à rédiger la lettre. Il a tué l’Arabe du fait qu’il voulait se
protéger et surtout protéger son ami Raymond. Enfin, Meursault aime souvent dire la vérité ; il n’est pas
hypocrite. Exemple : Quand son patron lui propose d’aller à Paris, il lui dira tout simplement que « Paris
est sale » ; il avouera même son crime devant le procureur. Ainsi, Toutefois, à la fin de l’œuvre, Meursault
tente de briser cette solitude, en souhaitant « qu’il y ait beaucoup de spectateur le jour de « son » exécution
et qu’ « ils » l’accueillent avec des cris de « haine ». (p.122).Meursault comprend ici que la solitude est une
expérience à ne pas encourager. Son appel à une assistance traduit non seulement le sentiment d’absurdité
mais souligne aussi le fait que l’homme ne peut se réaliser pleinement sans les autres. Chacun a besoin de
l’autre pour mieux gérer son destin. Ainsi « l’homme n’est rien sans les autres » pouvons-nous lire dans
Sous l’orage de Seydou BADIAN
En conclusion, le personnage-narrateur du roman L’Étranger est ambivalent. D’une part, il est
positif car il véhicule des vertus ; mais d’autre part, il est vicieux parce qu’il fait preuve des comportements
négatifs. Ce qui est sûr c’est que Meursault n’est pas davantage « un exemple à suivre », cependant il
représente un type de comportement possible devant le silence du monde, devant les situations hostiles de
la vie. Du moins, il nous permet de réfléchir profondément sur la vie de l’homme et sur les lois sociales :
Meursault peut se retrouver en chacun de nous.
L’ABSURDE Ce thème dans le roman tourne autour de Meursault car il est le personnage principale, le narrateur, le témoin
privilégié de l’histoire portant sur l’absurdité de la vie. Donc chapitre après chapitre se dessine l’absurde dans
L’Etranger. Cette œuvre présente une double direction : le premier est que Meursault est un homme vivait
d’abord dans l’absurde dans la première partie. Peu après il accède dans la deuxième partie à la prise de
conscience et à la révolte qui lui fait refuser l’existence d’un Être suprême, Dieu. Après la révolte vient la
période du sérieux surtout dans le dernier chapitre. En résumé, la mort de Meursault devient une libération ‘’la
mort heureuse’’. Après voir analyser l’absurde dans le roman, nous allons maintenant étudier ses manifestations
dans l’œuvre et surtout dans la vie de Meursault qui constitue la sève nourricière ou la base de notre travail.
Dans la vie de Meursault : elle se manifeste de la manière suivante dans le roman L’Etranger d’Albert CAMUS
:
Sur le plan sentimental :
L’absurde sur ce point se justifie par l’insensibilité ou l’indifférence de Meursault au mariage à la
proposition de mariage faite par Marie Cardona, une ancienne dactylo de son bureau qu’il retrouve par
hasard. Cette insensibilité est claire et nette lorsque Marie lui demande s’il veut l’épouser. Sa réaction ne
s’est pas attendre, voici ce qu’il répond : «Que cela m’était égal ». Cette réponse donnée par Meursault
nous amène à comprendre que pour lui, l’amour n’a pas de sens, on ne change pas de vie d’avenir. Et
pourtant c’est une femme qui l’attirait, réveillait toutes ses sensations, prouesses sexuelles puisqu’ils se
sont baignés ensemble tout en faisant des jeux dans l’eau qui finiront par se transforment en jeux d’amour
ou pornographique, vont même passer une nuit agitée ensemble après avoir regardé un film de Fernandel.
Sur le plan affectif :
Meursault est un héros qui vit dans l’absurde. Ici, il manque de sensibilité suite au décès de sa mère déjà au
début du récit : «Aujourd’hui maman est morte ou peut-être hier, je ne sais pas». Non seulement qu’il est
insensible, il affiche aussi un comportement qui suscite le gêne ou le trouble quand il refuse, sans raison,
de voir le corps de sa mère. La scène de la cigarette est significatif car fumer devant le corps d’une mère
est inconvénient, c’est une joie qui ne peut exister en même temps avec la douleur que l’on doit éprouver.
Mais, il bafoue et s’en fout des principes funéraires lorsqu’il déclare : « J’ai eu alors envie de fumer. Mais
j’ai hésité parce que je ne savais si je pouvais le faire devant maman. J’ai réfléchi, cela n’avait aucune
importance» (page, 7). C’est même ce désordre qui fait que Meursault n’a jamais eu l’intention de chercher
pas son père inconnu.
Sur le plan professionnel :
Cette indifférence a traversé toutes les différentes étapes de sa vie. Par conséquent, Meursault reste
impassible devant la promotion que lui propose son patron, celui de créer une nouvelle agence à paris. La
vie absurde également visible toujours avec son patron en ces termes : «Il (mon patron) m’a demandé alors
si je n’étais intéressé par un changement de vie. J’ai dit qu’on ne changeait jamais de vie, qu’en tout cas
toutes se valaient et que la mienne ici ne me déplaisait pas du tout ». Partie I, chapitre 5, Page, 61.
Sur le plan personnel :
Meursault vit cette absurdité sur ce plan personnel parce qu’il est dépourvu de compassion à l’égard des
autres c’est-à-dire des êtres et des amitiés. A ce sujet, voici ce qu’il déclare : «…il m’a demandé encore si
je voulais être son copain. J’ai dit que ça m’était égal» Page, 49. Et face à ce même Raymond Sintès, son
voisin de palier, Meursault peut dire sans crainte : «il l’avait battue jusqu’au sang ». Cet acte ne signifiant
rien à ses yeux est un trait de caractère de cet étranger. Voilà ce qu’il dit après échange : « il m’a demandé
si ça ne me dégoûtait pas et j’ai répondu que non» page, 48. Egalement, il tue l’arabe pour une raison peu
évidente : le reflet du soleil sur le couteau de l’Arabe ; il ne ressent aucun regret suite à ce crime puisqu’il
crible de cartouches le cadavre de l’Arabe plus d’une fois. Ce comportement continue même en prison
lorsque les anciens prisonniers Arabes lui demandent le motif de son emprisonnement, il répond : « J’avais
tué un Arabe et ils sont restés silencieux», page, 114. A cette vie absurde de Meursault peut se lire aussi
son ennui de vivre. Le roman le confirme au chapitre 1, pages 36-41 : «Après le déjeuner, je me suis ennuyé
un peu et j’ai erré dans l’appartement. (…) j’ai pensé que c’était toujours un dimanche férié, que maman
était enterrée, que j’allais reprendre mon travail et que, somme toute, il n’y avait rien de changé». De
même, on peut lire ce propos de meursault : «A part ces ennuis, je n’étais pas trop malheureux. Toute la
question, encore une fois, était de tuer le temps». Partie I, chapitre 2, p.22.
Sur le plan religieux :
Vivant dans l’ennui, Meursault va recevoir la visite de L’aumônier, un homme de Dieu, qu’il finira par
rejeter. A cela, le dialogue qui s’engage avec l’aumônier est un débat pied à pied, où chaque argument est
refusé par Meursault. Pour lui, la question de Dieu n’existe pas, puisque le sujet ne l’intéresse pas.
Résolument incroyant, résolument «attaché à cette terre », page, 181, sûr d’une mort entière,
définitivement seul, Meursault éclate de colère au «Je prierai pour vous », page, 182, de l’aumônier. Cette
colère balaie d’un souffle les incertitudes, les choix, les espoirs. L’aumônier tente de le réconforter en disant
: « Dieu vous aiderait alors, a-t-il remarqué. Tous ceux que j’ai connus dans votre cas se retournaient vers
lui». Le héros continuait à rejeter cette option de Dieu, et à regarder les choses à sa manière. De surcroît,
ces réponses rendaient l’aumônier triste c’est-à-dire que ses ‘’yeux pleins de larmes’’, page, 184, sont sa
seule réponse. Meursault retrouve alors le seul accord qui vaille, dans «la tendre indifférence du monde »,
page, 186. Sans doute est-ce de cette fierté que naît le vœu qui clôt le livre c’est-à-dire mourir pour ne
rencontrer sur son chemin l’absurdité de la vie.
Sur le plan de l’incommunicabilité : L’incommunicabilité est effectivement une caractéristique de la vie absurde. Elle est apparente dans les
rapports entre Meursault et sa mère. Le narrateur qui n’est autre Meursault affirme : «D’ailleurs, ai-je
ajouté, il y avait longtemps qu’elle c’est-à-dire maman n’avait rien à me dire et qu’elle s’ennuyait toute
seule », page, 75. De même qu’avec Marie, lorsque Meursault sera en prison. Voici ce qui est écrit : «Déjà
collée contre la grille, Marie me souriait de toutes ses forces. Je l’ai trouvée très belle, mais je n’ai pas su
le lui dire. (…). Elle a crié de nouveau : «Tu sortiras et on se mariera ! ». J’ai répondu : «Tu crois ? » «
Mais c’était surtout pour dire quelque chose », chapitre, 2, pages 116-117. Il en va de même qu’avec le
président du tribunal lors de son procès : «Le président a répondu (…) qu’il serait heureux (…) de faire
préciser les motifs de mon acte. J’ai dit rapidement, en mêlant un peu les mots et en me rendant compte de
mon ridicule, dans la salle », chapitre, 4, page, 158.
Sur le plan de la justice : Meursault est un spectateur de son procès. On le juge pour meurtre. Mais voici la première impression qu’il
nous livre à son arrivée : «(…) tout remue-ménage qui m’a fait penser à ces fêtes du quartier (…) », page,
128. On lui demande s’il a le trac : «j’ai répondu que non », page, 128. On est en droit de penser que
Meursault se désintéresse du procès. Meursault n’est pas aux assises. Il se sent «de trop, un peu comme
intrus», page, 130. Mais, il n’est pas absent, il est au contraire spectateur de ce théâtre judiciaire qu’est son
procès, voici ce qu’il dit : «(…) cela m’intéressait de voir un procès », page, 128. Bref, le procès l’intéressait
lorsqu’il voyait comment le juge, l’avocat et le procureur débattaient sur sa situation. Par ailleurs, l’absurde
peut se lire à travers le couple Salamano et son chien. Sur ce, écoutons Camus en souligner la monotonie :
«deux fois par jour », «depuis huit ans», «c’est ainsi tous les jours », « il y a huit ans que ça dure ».
2- L’indifférence :
L’indifférence, selon le Dictionnaire encyclopédique de la langue française, est un état tranquille d’une
personne qui désire ou ne repousse une chose. C’est aussi l’insensibilité ou la froideur ayant une chose qui
n’a pas d’importance.
Après la lecture du roman, on peut dire que l’indifférence dans L’Etranger est une attitude insensible du
personnage principal devant certaines réalités ou certains faits. En effet, le roman de Camus est caractérisé
par une indifférence totale. Cette indifférence se manifeste dans l’amour, la mort, justice et dans s’autres
contextes.
L’indifférence face au décès de sa mère ou sa famille : Meursault vient d’apprendre le décès de sa mère et ne manifeste nullement aucun chagrin, remord par la
disparition d’un être aussi cher que la mère. La preuve est qu’il ne sait pas la date exacte de sa mère. A
propos, il dit : «Aujourd’hui maman est morte ou peut-être hier, je ne sais pas » (p.9). On peut trouver dans
ces paroles l’étrangeté c’est-à-dire un caractère étranger dans l’attitude de Meursault. Nous avons
l’impression que celle qui vient de mourir n’est pas sa mère mais une autre personne qui est loin d’être une
personne qui donne la vie. A cela aussi sa propension (mensonge) au sommeil car il s’assoupit dans
l’autobus qui le conduit à l’asile. De même, devant le cercueil, il s’est rendu dans un état voisin du
somnambulisme car il se réjouit à la perspective de dormir pendant douze (12) heures (p.31) et heureux de
vite rentrer après les funérailles pour vaquer à ses occupations ; c’est donc son fantôme qui a assisté aux
obsèques. Son insensibilité se manifeste également dans son refus de voir pour la dernière fois le corps de
sa mère. Cette précipitation prouve le caractère de Meursault, un être sans cœur et sans sentiment.
L’indifférence face au patron :
Tout juste après l’enterrement de sa mère, il propose à Meursault d’aller travailler à Paris car il était sur
d’ouvrir une autre agence. Ce dernier rejette la proposition de son patron. Autrement dit, l’attitude de
Meursault est aussi restituée grâce aux impressions des autres personnages du roman notamment son
indifférence devant son avenir surprend son patron.
L’indifférence face à Marie Cardona :
Cette attitude insensible s’est aussi manifestée dans l’amour, dans sa liaison avec Marie. Son indifférence
devant le mariage surprend Marie et son comportement déconcerte son avocat. A propos de cette attitude
vis-à-vis du mariage, on peut apprécier sa réponse à la question de Marie « le soir, Marie était venue me
chercher et m’a demandé si je voulais me marier avec elle. J’ai dit que cela m’était égal et que nous
pourrions le faire si elle le voulait. Elle a voulu savoir alors si je l’aimais. J’ai répondu comme je l’avais dit
une fois, que ne signifiait rien mais que sans doute je ne l’aimais pas ».
3-La mort La mort est définie selon Le Micro Robert comme la « fin corporelle de la vie, cessation définitive de toutes
les fonctions corporelles ». En cela, elle marque un arrêt complet et définitif de la vie, une destruction, une
disparition. Phénomène social, la mort est ressentie chez l’homme comme une fatalité et, à ce titre, il en
prend conscience, contrairement à l’animal qui développe des moyens spécifiques pour se protéger contre
les dangers de mort.
La mort et l’œuvre
L’Etranger est particulier marqué par la mort. D’ores et déjà, il convient de signaler que sur le plan formel,
l’œuvre adopte une structure sous-tendue par la mort : le récit s’ouvre par la mort de la mère de Meursault
à l’asile de Marengo ; la première partie du roman s’achève par la mort de l’Arabe et le livre se ferme sur
la mort probable de Meursault, à la guillotine. Ainsi, il s’affiche dans l’œuvre trois types de mort : la mort
naturelle, la mort criminelle, la mort inhérente à la sentence de la justice.
La mort naturelle
La mort naturelle c’est-à-dire celle de la mère de Meursault est annoncée par le narrateur dès l’incipit «
Aujourd’hui, maman est morte » (p.7). Cette phrase annonce la fin d’une existence. La maman de Meursault
connait une mort naturelle à la sénescence. Elle est vieille. Toutefois, Meursault pense que «cela ne veut
rien dire » (p.7). A travers cette réaction, se profile en filigrane la conception que Meursault a de ce
phénomène. En effet, il trouve normale la mort de sa mère, car toute existence est appelée à s’arrêter un
jour. L’homme nait, grandi, vieillit et meurt. Aucun homme ne jouit d’une éternité sur terre. C’est pourquoi
Meursault ne traduit aucun sentiment de chagrin, de tristesse. Il n’est nullement ébranlé par cette
douloureuse épreuve qu’il supporte avec courage, bravoure. La preuve est qu’il ne comprend pas pourquoi
les gens doivent pleurer un mort : « La femme pleurait toujours. J’étais étonné parce que je ne la connaissais
pas. J’aurais voulu ne plus l’entendre. Pourtant je n’osais pas le lui dire. » (p.16). Au-delà d’un simple
dérangement, Meursault veut insister d’abord sur le caractère implacable de la mort, ensuite sur l’inutilité
de tergiverser quand la mort arrive. Ainsi, tout homme doit se résigner à cette fatalité dans la méditation, le
recueillement. Ce sentiment de profonde méditation se traduit dans l’œuvre à travers le courage (stoïcisme)
de Meursault.
La mort criminelle
Elle se caractérise dans L’Etranger par le meurtre de l’Arabe. En effet, Meursault tue un arabe, à la plage,
qui n’avait apparemment aucun antécédent avec lui. C’est donc sans raison qu’il pose cet acte délictueux.
Au départ de l’action, il sied de préciser que c’est lui qui empêche la première catastrophe en retirant le
revolver de Raymond. Malheureusement, il se trouve être l’exécuteur sans raison de l’homicide.
La mort, expression de la violence, vengeance, l’absurde Cette mort est corollaire de la violence, du désir, de l’absurde. Elle peut traduire aussi le malaise
profondément vécu par une société dont les différentes couches se présentent en antagonistes et ont du mal
à s’harmoniser véritablement. Meursault ne saisit pas lui-même les réelles motivations qui ont présidé à cet
acte répréhensible. On a l’impression qu’il trouve judicieux l’assassinat d’un Arabe. Ce qui peut alors
traduire un sentiment de racisme. Car lorsque ses Co-prisonniers de la première cellule en majorité arabe
lui demandent les motifs de son incarcération, il répond avec un courage déroutant « j’ai dit que j’avais tué
un Arabe et ils sont restés silencieux » (p.73). On peut lire à travers cette réponse la banalité de la mort, de
surcroit d’un Arabe. Meursault ne craint pas une réaction de la part des Arabes codétenus avec lui et qui
viennent d’apprendre l’assassinat de l’un des leurs. En condamnant Meursault sur un autre fait que
l’homicide de l’Arabe, la justice renforce ce sentiment de banalité de la mort. Il est tout à fait absurde que
l’on admette la raison évoquée par Meursault la présente en ces termes « …j’aurais la tête tranchée sur une
place publique au nom du peuple français ». Cette phrase renvoie à la peine capitale. Donc Meursault doit
être tué pour meurtre commis sur l’Arabe.
La mort expression de l’indignation de Meursault
En souhaitant que les gens assistent à sa pendaison, mort, Meursault exprime ainsi son indignation (colère,
fureur, révolte, scandale) face à une justice qui supprime injustement la vie. Toutefois, comme à la mort de
sa mère, Meursault ne laisse transparaitre aucun sentiment d’angoisse, de tristesse, de panique devant cette
sentence annoncée, qui n’est qu’autre la mort. On a l’impression que pour lui la mort est une libération, un
moment de bonheur, « une mort heureuse », « devant cette nuit chargée de signes et d’étoiles, je m’ouvrais
pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l’éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j’ai
senti que j’avais été heureux, et que je l’étais encore » (p.122).
La mort expression de certaines valeurs sociales
Dans le texte romanesque, la mort se donne à lire également comme un marchepied, plongeoir (tremplin)
en ce qui concerne la mise en lumière de certaines valeurs ou certains mérites culturels ; même si cette
démarche est d’avance récusée, rejetée, refusée par Meursault. Il trouve par exemple, absurde les pleurs des
femmes rassemblées autour de la bière de sa mère. Toutefois, il va sans dire qu’ici se manifeste la solidarité.
Tout l’asile se sent concerné.
En définitive, la mort tout en dévoilant la conception de Meursault sur ce phénomène naturel, selon lui,
semble soutenir la trame (le squelette, l’ossature, le scénario) narrative de l’œuvre.
La Justice
La comédie judiciaire et la satire ou critique de la justice On appelle satire un texte qui use de la raillerie, plaisanterie, moquerie ou de l’indignation (colère, fureur,
révolte, scandale) pour dénoncer des scandales et impostures. L’Etranger, c’est aussi l’histoire d’un procès.
Notons d’abord que Camus a suivi pour le compte «d’Alger Républicain » plusieurs procès importants et
constaté par lui-même le fonctionnement de l’appareil judiciaire. Alors Camus donne une place importante
à la satire de la justice.
Camus et la justice : la comédie judiciaire Camus a eu recours à son talent de journaliste dans l’œuvre pour peindre comme sur un tableau l’image
réelle de la justice. La peinture qu’il fait de cette institution donne l’impression qu’il y était ou qu’il incarne
ce jeune homme « habillé en flanelle grise avec une cravate bleue » que Meursault remarque sur le banc
des journalistes. En le voyant, il dit « j’ai l’impression bizarre d’être regardé par moi-même » (II, chap. III.
P.132). On peut donc oser de dire que Meursault assiste, à son procès : en simple observateur et son récit
des débats se présente comme une parodie de chronique judiciaire.
Le mensonge de la justice L’univers de la loi judiciaire n’est qu’un mensonge. Lorsque Meursault se met en contact avec son avocat,
ce dernier lui indique qu’il s’agit d’une affaire délicate qui exige une collaboration étroite entre défenseur
et accusé. Il n’est pas question pour lui de reconstituer la vérité, mais, au contraire de créer une apparente
cohérence entre les éléments retenus par l’instruction, fût-ce au prix du mensonge. L’avocat d’ailleurs en
formule l’exigence : « sans doute, j’aimais bien maman, mais cela ne voulait rien dire. Tous les êtres sains
avaient plus ou moins souhaité la mort de ceux qu’ils aimaient. Ici, l’avocat m’a coupé et a paru très agité.
Il m’a fait promettre de ne pas dire cela à l’audience » (p.102). Camus veut nous révéler qu’un procès
s’organise autour d’une réalité émaillée de vérités mauvaises à dire. Pire, l’avocat lui demande
l’autorisation de mentir : « il m’a demandé s’il pouvait dire que ce jour-là, j’avais dominé mes sentiments
naturels, « non, parce que c’est faux ». Il m’a regardé d’une façon bizarre, comme si je lui inspirais un peu
de dégoût. Il m’a dit presque méchamment (..) que cela pouvait jouer un très sale tour » (p.103). Ainsi, la
justice, fondée sur le mensonge et la dissimulation, ne saurait faire éclater la vérité.
La comédie à l’instruction L’instruction judiciaire est aussi un lieu de comédie. A propos du juge d’instruction, voici la remarque que
Meursault fait à son endroit : « au début, je ne l’ai pas pris au sérieux » (p.100). Il y a comme une mise en
scène qui établit les rapports sur un mode théâtral et factice (imité, affecté) : « il avait sur son bureau une
lampe qui éclairait le fauteuil où il m’a fait asseoir pendant que lui-même restait dans l’ombre. J’avais déjà
lu une description semblable dans les livres et cela m’a paru un jeu » (p.100). C’est un jeu, cependant, où
Meursault a pour rôle celui du criminel, rôle qu’il assure très mal d’ailleurs.
La comédie à l’entretien Au deuxième entretien ou à la deuxième conversation, audience, le juge d’instruction passe à une scène. A
la page 105, un parole incongru tort (porte atteinte à) cette procédure judiciaire. 3après un silence, il s’est
levé et m’a dit qu’il voulait m’aider que je l’intéressais et qu’avec l’aide de Dieu, il ferait quelque chose
pour moi ».
Ensuite son exaltation croit et la confusion est totale lorsqu’avec un geste théâtral de prêtre illuminé, il
brandit devant Meursault un crucifix d’argent (p.106). L’interrogatoire donne une autre coloration.
L’homme de la justice se transforme en un homme religieux. Autrement dit, le juge devient rédempteur et
se mue en fin de compte confesseur : « j’ai à peu près compris qu’à son avis il n’y avait qu’un point obscur
dans ma confusion ». L’accusé devient pécheur qui doit se repentir pour le salut de son âme : « …aucun
homme n’était assez coupable pour que Dieu ne lui pardonnât pas, mais (…) il fallait pour cela que l’homme
par son repentir devint un enfant (p.107). On remarque au cours de cette scène qu’l y a alternance entre la
prêche et les préoccupations de Meursault. Cela provoque une bouffonnerie.
La comédie aux assises
Aux assises, le regard de Meursault nous révèle que la salle est un lieu de théâtre ou théâtral et comique.
Par le comique Meursault veut tourner en dérision l’appareil judiciaire. « J’ai aperçu une rangée de visages
devant moi (…) c’étaient les jurés (…) je n’ai eu qu’une impression : « j’étais devant une banquette de
tramway et tous ces voyageurs anonymes épiaient (observaient) le nouvel arrivage pour en apercevoir les
ridicules » (p.129). Dans cette salle, où l’agitation, les rires et conversations lui font penser à un club,
Meursault a l’impression d’être en trop.
La comédie vestimentaire des avocats
L’aspect comique peut se lire par les habits de l’avocat, du procureur et des jurés : « Mon avocat est arrivé
en robe » : le procureur « vêtu de rouge, portant lorgnon, qui s’asseyait en pliant sa robe avec soin » (p.132).
Dans cette arène s’affrontent le procureur et l’avocat : il s’agit de gagner les jurés ; les moyens employés
sont ceux de la comédie.
B- La satire de la justice
La plaidoirie La satire de la justice peut se lire à travers la plaidoirie de l’avocat. En premier lieu, le regard de Meursault,
nous découvrons une comédie sociale principalement dans la seconde partie du roman, chapitre IV (P.p.158,
161) : « L’après-midi, les grands ventilateurs brassaient toujours l’air épais de la salle, et les petits éventails
multicolores des jurés s’agitaient tous dans le même sens ». Cette phrase dévalorise la scène : les jurés sont
rapprochés ironiquement avec les ventilateurs, avec l’opposition « grands » et « petits ». Les éventails nous
donnent une impression d’automatisme des jurés : «s’agitaient tous dans le même sens » et aussi l’idée que
les jurés forment un groupe homogène ayant le même point de vue. L’ironie est une arme ou un moyen
efficace pour tourner en ridicule et dénoncer le scandale ou un comportement. De plus, on a l’impression
que leur bien-être l’emporte sur la gravité de la situation, ils ont une attitude critique sur l’accusé : ils
représentent la société. « Brassaient…l’air » : on a l’impression que cela est superficiel et que c’est un peu
du vent, que c’est une comédie. Ceci est également apparent dans le sens où ceci intéresse assez peu
Meursault et apparait aussi dans l’attitude des collègues de son avocat à la fin de la plaidoirie. Ils répondent
à un rituel et disent des paroles convenues qui virent dans la caricature et cela à quelque chose de cruel pour
Meursault que de lui demander son impression sur les discours de son avocat : on s’adresse à lui sans
retenue comme s’il n’était pas concerné par le jugement : « …ses collègues sont venus vers lui pour lui
serrer la main ». J’ai entendu : « Magnifique mon cher ». L’un deux m’a même pris à témoin, « hein ? M’a-
t-il dit. J’ai acquiescé, mais mon compliment n’était pas sincère… »
La satire de la justice à travers le discours de l’avocat Elle se peut se lire aussi dans le discours de l’avocat. Il s’agit des excès ridicules de l’éloquence judiciaire.
Ses paroles sont constituées de formules toutes faites : « mon affaire était délicate », « entrons dans le vif
du sujet ». Son discours a quelque chose de pénible « ces longues phrases, de toutes ces journées et ces
heures interminables (…) où je trouvais le vertige ». (p.160).
La satire de la péroraison ou conclusion judiciaire A la fin du discours, l’avocat fait une péroraison ; la péroraison est souvent un moment de bravoure des
avocats : « s’écrier », il tente de faire plaindre Meursault en attirant la pitié des jurés, au fond, il leur souffle
l’attitude qu’il faut adopter. L’avocat utilise un langage stéréotypé : « honnête homme », « Travailleur
régulier, infatigable, fidèle à la maison qui l’employait… » Et il fait usage d’une hyperbole ou exagération
souvent présente dans ce genre de discours « remords éternels ». Ce vocabulaire caricature la péroraison.
La satire de la condamnation judiciaire Eu égard à cette défense éminente, le procureur fait lecture de la sentence ou condamnation : Meursault
aura « la tête tranchée sur une place publique au nom du peuple français ». Meursault est condamné pour
un autre crime. Autrement dit, au lieu que la condamnation porte sur l’assassinat de l’Arabe, elle va
finalement porter sur l’abandon de sa mère, le refus de pleurer lors du décès de sa mère… Dans L’Etranger,
Camus veut dénoncer l’amalgame (confusion) judiciaire. On ne peut qu’être frappé par l’étrangeté
(singularité, anomalie) de ce justiciable placé paradoxalement face à une justice qui ne parle pas de lui,
mais qui va le tuer.
5-La solitude « La solitude » selon Le Micro Robert est défini comme étant une « situation d’une personne qui est seule,
de façon momentanée ou durable » ; elle est aussi la « situation d’une personne qui vit habituellement seule,
qui a peu de contacts avec autrui ». Elle s’entend alors comme un repli sur soi, un enfermement souhaité
sur soi-même ; l’individu se marginalise des autres membres de la société, crée un univers qui lui est
singulier, brise son rapport avec autrui, ignore tout de l’univers des autres que le sien leur est fermé.
La solitude existentielle
Par ailleurs, en définissant la solitude existentielle, Gaston Berger conclut que la solitude renvoie à cette
impossibilité de compatir véritablement avec l’autre. Il déclare à ce sujet que « quand mon ami souffre, je
puis sans doute l’aider par des gestes efficaces, je peux le réconforter par mes paroles, essayé de compenser
par la douceur de ma tendresse la douleur qui la déchire. Celle-ci pourtant me demeure toujours extérieure.
Son épreuve lui reste strictement personnelle ». (pp.88-89)
La solitude dans le contexte de L’Etranger La solitude se présente dans cette œuvre comme un refus de communiquer avec les autres, autrui, une
volonté d’assumer seul le destin. Mais elle se donne à lire aussi comme une absurdité car l’homme ne peut
se réaliser que dans la société et non en dehors de celle-ci.
La solitude comportementale ou communicationnelle Dans L’Etranger, la solitude s’exprime à travers l’attitude de Meursault. Celui-ci refuse délibérément de
communiquer, de dialoguer avec autrui. Dans le bus, par exemple, où les gens enclenchent de façon
naturelle des conversations sur divers sujets, Meursault veut garder un mutisme dont lui seul maitrise les
motifs, « j’étais tassé contre un militaire qui m’a souri et qui m’a demandé si je venais de loin. J’ai dit
‘’oui’’ pour n’avoir plus à parler » (p.10).
La solitude de Meursault envers les autres personnages De même, Meursault entreprend ne plus déjeuner chez Céleste pour se soustraire d’un éventuel
questionnement sur le déroulement des funérailles de sa mère. Il brise ainsi toute possibilité de
communication et de contact dès lors qu’il prend tous ses repas chez Céleste. Ce restaurant qui se présente
comme un espace de contact, de frottement, de dialogue devient, pour Meursault, un espace où la solitude
se brise : « je ne voulais pas déjeuner chez Céleste comme d’habitude parce que certainement, ils m’auraient
posé des questions et je n’aime pas cela ». Dans cette même perspective, il sied de noter que Meursault
trouve fastidieux son entretien avec le Directeur de l’Asile. Il va très rapidement s’installer dans la petite
morgue, sans aucune conviction précise. Dans cette morgue, Meursault semble être absent tout en y étant.
Plongé dans une profonde réflexion, il jette à peine un regard fugitif sur les assistants.
La solitude des personnages proches de Meursault La solitude se traduit également à travers les personnages très proches de Meursault. Salamano ne vit
qu’avec son chien, Raymond Sintès vit seul dans « sa petite chambre ». Meursault vit également seul.
L’isolement de tous ces personnages imprime à l’œuvre un sentiment de parfaite solitude. Camus place ses
personnages dans la solitude pour que ceux-ci assument probablement seul leur destin. On comprend dès
lors que l’homme doit forger seul son avenir, réaliser et garantir sa propre existence. Cette démarche
solitaire semble répondre à l’existentialisme sartrien qui stipule que l’homme doit lui-même tracer le
chemin à parcourir pour mieux se réaliser.
La solitude expression de réalisation du crime ou de la mort Par ailleurs, il va s’en dire que le crime se réalise dans des circonstances tout à fait particulières de solitude.
Les arabes étaient à deux lors de la première rencontre ou séquence de la bagarre ; curieusement un seul
revient, on ne sait pas trop pourquoi, à la plage. De même, après avoir accompagné Masson et Raymond
Sintès blessé au cabanon, Meursault repart discrètement en solitaire à la plage. Fait de hasard ou jeu de
destin, les deux protagonistes veulent s’abriter à la source (situé non loin de la plage) pour se soustraire de
la cruauté du soleil. Et là Meursault tire sur l’arabe « je pensais à la source fraiche derrière le rocher. J’avais
envie de retrouver le murmure de son eau, envie de fuir le soleil (…) envie enfin de retrouver l’ombre et le
repos. Mais quand j’ai été plus près, j’ai vu que le type de Raymond était venu (…) pour moi, c’était une
affaire finie et j’étais venu là sans y penser. La gâchette a cédé, j’ai touché le ventre poli… » (pp.60-61-62)
La solitude lors du procès Le déroulement du procès offre aussi la possibilité de lire la solitude dans L’Etranger. En effet, Meursault
refuse de recevoir l’aumônier et de discuter avec son avocat. Indifférent aux plaidoiries de son avocat,
Meursault préfère se défendre seul. Toutefois, l’incarcération le plonge dans une solitude irréversible car
l’univers carcéral l’éloigne parfaitement des siens, de sa société. De la solitude souhaitée, Meursault entre,
par le truchement du crime, dans une solitude que lui impose la société. Comme on peut le lire dans ses
propos : « on m’a isolé dans une cellule où je couchais sur un bat-flanc de bois. J’avais un baquet d’aisances
et une cuvette en fer ». (p.74).
La tentative d’ouverture par Meursault Toutefois, à la fin de l’œuvre, Meursault tente de briser cette solitude, en souhaitant « qu’il y ait beaucoup
de spectateur le jour de « son » exécution et qu’ « ils » l’accueillent avec des cris de « haine ».
(p.122).Meursault comprend ici que la solitude est une expérience à ne pas encourager. Son appel à une
assistance traduit non seulement le sentiment d’absurdité mais souligne aussi le fait que l’homme ne peut
se réaliser pleinement sans les autres. Chacun a besoin de l’autre pour mieux gérer son destin. Ainsi «
l’homme n’est rien sans les autres » pouvons-nous lire dans Sous l’orage de Seydou BADIAN.
DISSERTATION SUR L’ETRANGER DE CAMUS
Sujet1 : Après lecture et analyse du roman L’Etranger d’Albert CAMUS, le collège des professeurs de
Français du Lycée Chaminade estime que : «Meursault est à la fois un héros décevant et modèle ».
Expliquez cette assertion.
PLAN DU DÉVELOPPEMENT
Un héros est celui qui pose des actes de bravoure et comme le disent les existentialistes, Jean Paul SARTRE
et Albert CAMUS : «Un homme se définit à travers les actes qu’il pose ». Or, Meursault incarne
l’ambivalence : l’attitude décevante et exemplaire.
Thèse : Meursault, personnage principal de L’Etranger véhicule une attitude décevante.
Argument 1 : Premièrement, il est étrange dans la mesure où il est le plus souvent indifférent aux autres.
Exemple : Meursault aime s’écarter du monde ; il est plein de solitude et d’unicité : son indifférence devant
son avenir surprend son patron (P. 69), devant le mariage surprend Marie (PP. 69-70) et son comportement
déconcerte son avocat…
Argument 2 : Deuxièmement, Meursault est un criminel. C’est pourquoi il est condamné à mort. Exemple :
Il tue sans regret l’Arabe. Il tire même sur son cadavre avec toute son énergie : « Alors, j’ai tiré encore
quatre fois sur un corps inerte » (P. 95). Et devant les prisonniers arabes, après son arrestation, il dira
fièrement : « J’ai dit que j’avais tué un Arabe et ils sont resté silencieux » (P. 114).
Argument 3 : Troisièmement, Meursault est un personnage trop infantile par la manière dont il mène sa
vie. Exemple : Il est souvent insouciant; lors de son procès il ne s’inquiète de rien, sinon de retourner
rapidement dans sa cellule. Il aime dormir : il dort devant le cercueil de sa mère, dans sa cellule il dort de
16 à 18 heures par jour. Et il pense que tout ce qu’il fait est normal : fumer devant le cercueil de sa mère,
ne pas pleurer le jour de l’enterrement, aider Raymond à taper sa copine, tuer l’Arabe…
Phrase transitoire : Certes, le héros de CAMUS présente des vices, une attitude décevante ; mais véhicule
aussi l’héroïsme à travers son caractère vertueux faisant de lui un modèle.
Antithèse : Le héros du roman L’Étranger de CAMUS demeure modèle en véhiculant des valeurs.
Argument 1: D’abord, Meursault est généreux du fait qu’il est attentif et soucieux aux difficultés des
autres. Exemple : Il accueillera amicalement Salamano qui, après avoir perdu son chien, se rendra auprès
de lui : « Sur le pas de ma porte, j’ai trouvé le vieux Salamano. Je l’ai fait entrer et il m’a appris que son
chien était perdu ».
Argument 2 : Ensuite, le personnage principal de ce roman est solidaire car il aime la compagnie de son
entourage. D’ailleurs, il a des amis. Exemple : Meursault aime la compagnie de Marie Cardona, de Céleste,
de Raymond Sintès et des autres. Il est disponible pour aider Raymond à rédiger la lettre. Il a tué l’Arabe
du fait qu’il voulait se protéger et surtout protéger son ami Raymond.
Argument 3 : Enfin, Meursault aime souvent dire la vérité ; il n’est pas hypocrite. Exemple : Quand son
patron lui propose d’aller à Paris, il lui dira tout simplement que « Paris est sale » ; il avouera même son
crime devant le procureur.
En conclusion, le personnage-narrateur du roman L’Étranger est ambivalent. D’une part, il est positif car
il véhicule des vertus ; mais d’autre part, il est vicieux parce qu’il fait preuve des comportements négatifs.
Ce qui est sûr c’est que Meursault n’est pas davantage « un exemple à suivre », cependant il représente un
type de comportement possible devant le silence du monde, devant les situations hostiles de la vie. Du
moins, il nous permet de réfléchir profondément sur la vie de l’homme et sur les lois sociales : Meursault
peut se retrouver en chacun de nous.
Sujet 2 : Après avoir décodé et levé le voile de certains personnages d’Albert CAMUS dans L’Etranger,
montrez que leurs visions et comportements relèvent de l’absurdité.
Sujet n°3 : Après avoir lu et étudié le roman L’Etranger d’Albert CAMUS, il a été constaté que : « Le
personnage étrange de Meursault est marqué par une immense indifférence à l’égard de la mort, l’amour,
les valeurs sociales et la justice ». Expliquez ce constat en vous référant à votre lecture et votre exposé de
l’œuvre.
Sujet n°4 : Montrez, partant de votre lecture du roman L’Etranger d’Albert CAMUS, l’étrangéité du
comportement de Meursault.
COURS SUR LE COMMENTAIRE LITTERAIRE ET INITIATION A LA REDACTION DE
L’INTRODUCTION
I. Qu’est-ce que le commentaire?
L'épreuve de commentaire est l 'une des trois épreuves que le candidat au Baccalauréat
peut choisir, outre les épreuves de dissertation et de l’Etude du Texte Argumentatif. Le
commentaire porte sur un texte figurant sur le sujet .
Le commentaire consiste à rédiger l'étude personnelle d’un texte de façon structurée et
argumentée. À partir de l 'analyse personnelle du texte donné à commenter, vous devez
proposer une explication ordonnée des enjeux du texte, des intentions de son auteur, des effets
produits sur le lecteur. Il faut donc expliquer ce que l’auteur dit dans son texte, comment il le dit
et pourquoi il le dit : donc, n’oubliez jamais les questions clés qui pourront vous guider lors
de votre étude : quoi ? Comment ? Pourquoi ?
C'est un projet personnel de lecture reposant sur des relevés analysés ; autrement dit, vous
devez faire un va-et-vient incessant entre ce que vous lisez, le texte, sa formulation, ses procédés, et ce
que vous pouvez en dire, l’analyse des effets produits sur le lecteur, l'interprétation des objectifs de l’auteur.
II. Comment votre commentaire se compose-t-il à l'écrit?
Introduction : 3 ou 4 étapes, en un seul paragraphe selon
Présentez l'auteur, son époque, son mouvement littéraire et culturel, l'œuvre dont est issu
le texte à étudier.
Présentez le texte, établissez « sa carte d'identité » : à quel genre littéraire appartient-
il ? De quel type de texte s'agit-il ? À quel moment de l'œuvre correspond-il ? Quel est son thème?
Que s'y passe-t-il ? Quelle est la particularité de ce texte? Quel est son intérêt?
Posez la question de problématique qui va permettre de cerner les enjeux du texte et de
formuler le fil rouge guidant tout le commentaire. (Présentation du contenu du texte : on donne le thème du
texte, les idées ou sentiments essentiels qui le parcourent, son mouvement, s’il est très visible et important.)
Annoncez le plan que votre commentaire va suivre.
III- Comment élaborer l’introduction ?
La rédaction rend visible l’organisation logique des idées en distinguant clairement les différentes parties
et en soulignant leurs articulations.
1- Rédaction de l’introduction
Elle se rédige en fonction de ses différents éléments et en un seul paragraphe :
1- Le texte :
Titre :
Nature :
Tonalité :
Idée générale :
2- L’auteur :
Nom :
Nationalité :
Epoque :
Courant littéraire :
3-Ouvrage :
Titre :
Edition :
Année de publication :
4-Annonce du plan ou Centres d’intérêt :
EXERCICES D’APPLICATION
SUJET N°1 : Commentaire littéraire
Texte : Beauté
Je suis belle, ô mortels ! Comme un rêve de pierre
Et mon sein, où chacun s’est meurtri tour à tour,
Est fait pour inspirer au poète un amour
Eternel et muet ainsi que la matière.
Je trône dans l’azur comme un sphinx incompris ;
J’unis un cœur de neige à la blancheur des cygnes ;
Je hais le mouvement qui déplace les lignes,
Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris.
Les poètes, devant mes grandes attitudes,
Que j’ai l’air d’emprunter aux plus fiers monuments,
Consumeront leurs jours en d’austères études ;
Car j’ai, pour fasciner ces dociles amants,
De purs miroirs qui font toutes choses plus belles :
Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles.
Charles Baudelaire (1821-1867), Les Fleurs du mal, 1857.
I-Questions :
1-Baudelaire est un poète de nationalité : (1pt)
a-Congolaise ; b-Française ; c-Belge
2-Baudelaire est un poète du : (1pt)
a)-XXe siècle ; b)-XVIIIe siècle ; c)-XIXe siècle
3-Le courant littéraire de Baudelaire est : (1pt)
a)-Le symbolisme ; b)-Le romantisme ; c)-Le réalisme
4-D’où est extrait ce poème ? Quelle est la nature de ce texte ? Justifie ta réponse. (1,5pts)
5-Quelle est la tonalité de ce texte ? Justifie ta réponse. (1pt)
6-Quelle est l’idée générale de ce texte ? (1pts)
7-Relève au moins deux mots du champ lexical de la beauté et de celui de la poésie. (1pt)
8-Détermine la mesure du (5e) cinquième vers et nomme-le. (1pt)
9-Etudie la disposition, la qualité et le genre des rimes de la première (1ere) strophe. (3pts)
10-Quel est le son répété au vers 8 ? Nomme-le. (1pt)
12-Dans ce texte relève : une comparaison ; une métaphore ; une anaphore. (3pts)
II-Travail d’écriture : Commentaire composé. (3,5pts)
Rédige une introduction normative d’un commentaire composé en fonction des thèmes ci-après :
l’expression de la beauté et l’inspiration poétique.
SUJET N°2 : COMMENTAIRE LITTERAIRE
« A une passante. »
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d’une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston1 et le hourlet2 ;
5. Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans mon œil, ciel livide où germe l’ouragan,
La douleur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair…puis la nuit !-Fugitive beauté
10. Dont le regard m’a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l’éternité ?
Ailleurs, bien loin d’ici !trop tard !jamais peut-être !
Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais !
Charles BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal 1857.
1. Broderie d’un vêtement.
2. Bord d’un tissu.
I-Questions (16 points)
1- Quelle est la nature de ce texte ? justifiez votre réponse. (1,5pt)
2- Quelle est la tonalité de ce texte ? Justifiez votre réponse. (1,5pts)
3- Mesurez le huitième vers et donnez son appellation. (1pt)
4- Donnez la disposition, la qualité et le genre des rimes de la 2e strophe (3pts)
5- Qui parle dans ce texte ? A qui s’adresse-t-il ? Justifiez vos réponses. (1point).
6- Relevez dans ce texte un contre-rejet. (1pts)
7- Dans ce texte, relevez : -une comparaison
(1 pt) - une métaphore (1 pt)
8- Le poète connait-il sa destinataire ? Justifiez chacune de vos réponses. (1,5pts)
9- Relevez au moins deux mots des champs lexicaux ci-après : le portrait de la femme et celui de la
mélancolie du poète. (2pts)
10-Quelle est la consonne la plus répétée dans le quatrième vers, comment appelle-t-on cette sonorité ?
(1,5pt)
11-Quelle est l’idée générale de ce poème ? (1pt)
II-Travail d’écriture (4pts)
Rédigez une introduction normative d’un commentaire littéraire, à partir des centres d’intérêt suivants : le
portrait de la femme et celui de la mélancolie du poète.
Sujet 2 : Commentaire littéraire
Texte :
J'ai pensé que je n'avais qu'un demi-tour à faire et ce serait fini. Mais toute une plage vibrante de soleil
se pressait derrière moi. J'ai fait quelques pas vers la source. L'Arabe n'a pas bougé. Malgré tout, il était
encore assez loin. Peut-être à cause des ombres sur son visage, il avait l'air de rire. J'ai attendu. La brûlure
du soleil gagnait mes joues et j'ai senti des gouttes de sueur s'amasser dans mes sourcils. C'était le même
soleil que le jour où j'avais enterré maman et, comme alors, le front surtout me faisait mal et toutes ses
veines battaient ensemble sous la peau. À cause de cette brûlure que je ne pouvais plus supporter, j'ai fait
un mouvement en avant. Je savais que c'était stupide, que je ne me débarrasserais pas du soleil en me
déplaçant d'un pas. Mais j'ai fait un pas, un seul pas en avant. Et cette fois, sans se soulever, l'Arabe a tiré
son couteau qu'il m'a présenté dans le soleil. La lumière a giclé sur l'acier et c'était comme une longue lame
étincelante qui m'atteignait au front. Au même instant, la sueur amassée dans mes sourcils a coulé d'un coup
sur les paupières et les a recouvertes d'un voile tiède et épais. Mes yeux étaient aveuglés derrière ce rideau
de larmes et de sel. Je ne sentais plus que les cymbales du soleil sur mon front et, indistinctement, la glaive
éclatant jailli du couteau toujours en face de moi. Cette épée brûlante rongeait mes cils et fouillait mes yeux
douloureux. C'est alors que tout a vacillé. La mer a charrié un souffle épais et ardent. Il m'a semblé que le
ciel s'ouvrait sur toute son étendue pour laisser pleuvoir du feu. Tout mon être s'est tendu et j'ai crispé ma
main sur le revolver. La gâchette a cédé, j'ai touché le ventre poli de la crosse et c'est là, dans le bruit à la
fois sec et assourdissant, que tout a commencé. J'ai secoué la sueur et le soleil. J'ai compris que j'avais
détruit l'équilibre du jour, le silence exceptionnel d'une plage où j'avais été heureux. Alors, j'ai tiré encore
quatre fois sur un corps inerte où les balles s'enfonçaient sans qu'il y parût. Et c'était comme quatre coups
brefs que je frappais sur la porte du malheur.
Albert CAMUS, L’Étranger, Première Partie, Chapitre 6, 1942.
I-Questions : (16 pts)
1- Précise la nature de ce texte. Justifiez votre réponse (2pts)
2- De quoi parle-t-on dans ce texte ? (2pts)
3- Montre que le soleil joue un rôle négatif dans ce passage. (2pts)
4- Relève au moins quatre (4) mots du champ lexical de la nature. (2pts)
5- Albert CAMUS est un : (1pt)
a-Congolais
b-Algérien
c-Français
6- A quel mouvement littéraire appartient-il ? :
a-Existentialisme ou absurde ; b-Symbolisme ; c-Surréalisme (1pt)
7- D’où est extrait ce texte ? Et en quelle année a-t-il été publié ? (2pts)
8- Quel pronom personnel utilise-t-il ? Justifiez votre réponse. (2pts)
9- Exprime-t-il une tonalité à la fois : a- lyrique et tragique, b-pathétique et comique, c-Satirique et
fantastique ? Justifiez votre réponse (2pts)
II-Travail d’écriture : (4pts)
1- Rédige une introduction à partir de ces deux thèmes principaux : l’aspect tragique et dramatique de
la scène, puis la portée absurde de l’acte de Meursault. (4pts)
CORRIGE DES EXERCICES
Sujet n°1 : Texte de Beauté I-Réponses aux questions
1-Baudelaire est un poète de nationalité : b-Française (1pt) ;
2-Baudelaire est un poète du : c-XIXe siècle (1pt) ;
3-Le courant littéraire de Baudelaire est : a-Le symbolisme (1pt);
4- Ce poème est extrait de Les Fleurs du Mal. Ce poème est un sonnet parce qu’il contient 14 vers répartis en
deux quatrains et deux tercets. (1,5pts)
5-La tonalité de ce texte est lyrique
6-L’idée générale de ce texte est : « l’éloge de la beauté féminine » (1pts)
7-Relèvons au moins deux mots du champ lexical de :
-La beauté de la femme : « belle » (v1), « belles » (v13) ; mon sein (v2), « l’azur », « sphinx » (v5), « cœur de
neige » (v6), « Mes yeux, larges yeux aux clartés éternelles » (v14). (1pt)
-La poésie : « poète » (v3) ; « poètes » (v9) ; « fiers monuments » (v10) ; « austères études » (v11) ; « dociles
amants » (v12). (1pt)
8-Déterminons la mesure du (5e) cinquième vers et nommons-le.
Je/ trô/ ne /dans/ l’a/ zur/ com/ me un/ sphin/x in/ com/ pris .C’est un alexandrin (1pt)
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
9-Etudions la disposition, la qualité, le genre des rimes de la première (1ere) strophe:
-La disposition : les rimes de cette strophe sont embrassées « A-B-B-A) (1pt)
-La qualité : les vers 1 et 4 sont riches et les vers 2 et 3 sont suffisantes (1pt)
-Le genre : le vers 1 et 4 présente des rimes féminines et les vers 2 et 3 sont masculines. (1pt)
10-Relevons une allitération contenue dans ce texte :
« Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris » : il y a allitération en « j » (1pt)
12-Dans ce texte relevons :
-Une comparaison : « Je suis belle, ô mortels ! Comme un rêve de pierre » vers1 ; « Je trône dans l’azur comme
un sphinx incompris » vers 5 (1pt)
-Une métaphore : « J’ai de purs miroirs » vers 12/13 ; «Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles » vers
14 (1pt)
-Une anaphore : «Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris » vers 8 en ‘’jamais’’ qui revient deux fois. (1pt)
II-Travail d’écriture : Commentaire composé. (3,5pts)
Rédigeons une introduction normative d’un commentaire composé a partir des centres d 'intérêt suivants
l’expression de la beauté et l’inspiration du poète.
II-Commentaire composé
A- Les éléments de l’introduction [3points]
3- Le texte :
Titre : Beauté
Nature : sonnet
Tonalité : Lyrique
Idée générale : L’éloge de la beauté féminine
4- L’auteur :
Nom : Charles BAUDELAIRE
Nationalité : Française
Epoque : XIXème siècle
Courant littéraire : Symbolisme
3-Ouvrage :
Titre : Les Fleurs du Mal
Edition : Babel
Année de publication : 1857
4-Centres d’intérêt :
L’expression de la beauté
L’inspiration du poète.
1-Charles Baudelaire est un poète Français du XIXe siècle, membre du mouvement littéraire le symbolisme. Il est
l’auteur du sonnet intitulé « Beauté ». Ce poème est extrait de l’ouvrage Les Fleurs du mal, publié en 1857. Avec
une tonalité lyrique le poète fait l’éloge de la beauté féminine. De ce fait, en premier lieu nous étudierons la beauté
de la femme, et en second lieu nous mettrons en valeur l’impact de cette beauté sur la poésie.
2-« Beauté » est un sonnet du symboliste français du XIXe siècle, Charles Baudelaire. Il est tiré de son ouvrage ou
recueil de poèmes Les Fleurs du mal publié en 1857. Dans ce poème à tonalité lyrique, le poète met en exergue ou
en lumière la beauté élogieuse d’une femme ou l’éloge de la beauté féminine. Sur ce, nous analyserons dans un
premier élan la beauté de la femme et dans un deuxième l’impact de cette beauté sur la poésie.
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