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Volume 95, numéro 5 Le mardi 18 octobre 2005 www.delitfrancais.com Merci Madame Robinson depuis 1977. Le seul journal francophone de l’Université McGill.

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Le seul journal francophone de l’Université McGill. Volume 95, numéro 5 Le mardi 18 octobre 2005 www.delitfrancais.com Merci Madame Robinson depuis 1977.

Le Parti Éléphant

blanc s’attaque à

la mairiepage 10

02 xLe Délit • 18 octobre 2005

L’Europe a réalisé des progrès considérables depuis la fin de la Deuxième Guerre

mondiale. Elle compte maintenant 450 millions d’habitants vivant dans la paix et est politiquement plus unie que jamais. Toutefois, même si on a su aller au-delà des vieilles divisions, on aurait tort de faire preuve d’un optimisme exagéré. Un fossé demeure entre la perception qu’ont les Européens de leur continent et le projet européen

tel qu’il se dessine d’un point de vue institutionnel. C’est du moins ce que croit Laurent Fabius, ancien premier ministre français, qui était de passage fin septembre à Montréal.

Le référendum français: un rejet de la Constitution, pas de l’Europe

Il ne faudrait surtout pas voir le rejet de la Constitution européenne par la France comme un rejet de

l’Europe, dit d’entrée de jeu celui qui fut premier ministre sous François Mitterrand entre 1984 et 1986. Il n’y a pas «identité» entre être favorable à l’Europe et être favorable au projet de constitution avorté, ajoute-t-il, indiquant que s’il y avait eu des référendums populaires en Belgique et en Allemagne, là où le projet a reçu l’approbation des parlementaires et non celle des citoyens, la constitution proposée y aurait aussi été rejetée.

Si les Français sont majoritairement favorables à l’Europe, pourquoi donc ont-ils voté contre le projet de constitution? Parce que les citoyens –ces «hommes et femmes qui [réfléchissent]»– ne veulent pas l’Europe telle qu’elle est, c’est-à-dire une Europe qu’ils trouvent trop «distante», «économique», «bureaucratique» et pas assez «humaine». Il lui faut donc réorienter ses politiques, plaide celui qui fut aussi ministre de l’Économie et des Finances dans le gouvernement Jospin. Il ajoute que l’approbation de la constitution aurait eu pour effet d’amplifier certains des défauts qu’on reproche à l’Europe.

Une Europe en trois cerclesPour avancer, et pour éviter

le piège de la «dilution» du projet européen au profit d’une plus grande «cohésion», il faut «abandonner l’idée que tout le monde peut avancer au même rythme». Il faut que des projets tangibles soient mis sur la table, projets auxquels seuls ceux qui le voudront vraiment prendront part. Ainsi, un premier cercle formé des douze pays ayant adopté l’euro comme monnaie unique pourrait nouer des liens politiques et commerciaux très étroits et créer des solidarités concrètes. Un deuxième cercle englobant les vingt-cinq membres actuels de l’Union européenne pourrait maintenir des liens politiques, et une structure de projet plus «lâche». Finalement, un troisième cercle pourrait s’étendre à la périphérie et inclure des pays avec lesquels l’Europe pourrait coopérer, sans pour autant que ces derniers fassent partie «des mécanismes de décision de l’Union».

Interrogé à savoir si cette vision n’aurait pas pour effet de ramener l’Union européenne à ce qu’elle était avant la vague d’adhésions récente, en excluant

ces nouveaux adhérents des projets plus importants, Laurent Fabius admet que son approche n’est pas très «cartésienne», mais il indique du même souffle qu’elle n’est pas pour autant discriminatoire, car il ne s’agirait pas de cercles fermés définitivement.

Au-delà de ces considérations, Laurent Fabius croit que l’Europe devra aussi consacrer ses énergies à relever les défis que sont ceux de la prospérité, de la solidarité –particulièrement sur les plans de l’aide au développement et de l’environnement– et du pouvoir politique, estimant que l’Europe, bien qu’elle influence la politique internationale, ne joue pas un rôle à la mesure de ses ambitions dans la résolution des conflits mondiaux. «L’Europe est un élément dans une conception multipolaire du monde dont on a besoin. […]. C’est une nécessité absolue», plaide l’homme, dont l’ascension professionnelle fut des plus rapides et que plusieurs pressentent comme un candidat sérieux à l’élection présidentielle de 2007. x

Diviser pour mieux unifierLaurent Fabius propose de séparer l’Europe en trois cerclesHUGO LAVALLÉE

nouvellesinternational

03xLe Délit • 18 octobre 2005

Les politiques à McGill

Le Festival du nouveau cinéma

Controverse avec le fleurdelisé

Wittgenstein s’expose

129

Lorsque McGill fait la loi

Pour une deuxième année consécutive, McGill a majoré les droits de

scolarité des étudiants étrangers de 8%, allant encore une fois à l’encontre des règles établies par le Ministère de l’éducation (MEQ). Désormais, un étudiant étranger débourse annuellement environ 20% de plus que le montant plafond fixé par le gouvernement dans sa Politique relative aux droits de scolarité exigés des étudiants étrangers par les universités du Québec, soit un surplus d’approximativement 2000$.

Cet accroc aux règles gouvernementales relève du secret de polichinelle. Le MEQ ainsi que l’Université McGill le reconnaissent ouvertement. La principale de McGill, Heather Monroe-Blum, a elle-même déclaré en 2004 devant la Commission de l’éducation à Québec: «Nous en sommes venus à penser que la qualité et l’accessibilité sont plus importants que les règles». Reste à définir si l’accessibilité aux études passe par une augmentation de la charge financière de certains étudiants.

Le principe de redistribution

Que l’étudiant soit québécois ou étranger ne devrait théoriquement pas créer de différence financière pour les universités et ce, malgré le fait que les étudiants étrangers payent six fois plus en droits de scolarité que les Québécois. Les universités, selon les règles en place, perçoivent les droits de scolarité, mais doivent reverser la presque totalité de la différence au MEQ qui s’occupe ensuite de la redistribuer à travers tout le réseau universitaire québécois par soucis d’équité.

Le problème de la règle gouvernementale appliquée à McGill, selon Jennifer Robinson, vice-principale aux communications, réside dans ses effets pervers sur les finances de l’institution. Cette formule de redistribution ne tient pas compte de la spécificité de McGill, dont le quart de la population estudiantine est étranger. La réalité pour McGill, prétend Mme Robinson, est qu’un étudiant étranger coûte plus cher que son équivalent québécois en terme de recrutement, de support et d’intégration.

La responsabilité de l’institution

L’octroi d’une subvention gouvernementale est toujours assujetti à des règles que les institutions ne devraient pas pouvoir enfreindre impunément. Ainsi, même si McGill est une institution privée, elle ne peut en principe fixer à sa guise les frais de scolarité en raison des fortes subventions qu’elle reçoit de l’État. Celui-ci finance l’institution et en retour l’université laisse à l’État la liberté d’établir le montant des droits de scolarité, cela dans une optique d’accessibilité à l’éducation.

Mme Robinson reconnaît que l’administration a un devoir envers la population canadienne mais est d’avis que c’est le marché qui devrait dicter les frais pour les étudiants étrangers. Il ne revient pas aux contribuables canadiens d’assumer les coûts inhérents à l’éducation d’étrangers, plaide-t-elle. McGill souhaite éventuellement une déréglementation totale des frais chargés à cette catégorie d’étudiants. En attendant, elle impose sa propre vision de ce

que devrait être la politique gouvernementale concernant les droits des étrangers.

Un laxisme complice du MEQ

Ainsi, puisque les subventions du gouvernement du Québec ne couvraient pas tous les frais supplémentaires liés à la présence de tant d’étudiants étrangers, l’Université a décidé depuis août 2004 de facturer davantage. L’Université exige aujourd’hui un supplément d’environ 2000 $ de plus par an qu’elle ne remet pas au MEQ. Que McGill se croie ou non autorisée à procéder ainsi ne constitue pas le véritable problème. Il s’agit plutôt d’un problème éthique et même légal de s’arroger un droit qu’elle ne détient aucunement pour l’instant.

Devant une situation dont il est pleinement conscient, le gouvernement ne devrait-il pas réagir pour faire respecter ses propres règles? Après avoir été informé des intentions de McGill à l’hiver 2003, le MEQ, par l’intermédiaire d’un sous-ministre, a officiellement sommé l’administration de McGill de se conformer à la politique gouvernementale. Tout cela est resté lettre morte et aucune sanction n’a été prise. Interrogé récemment par Le Délit, Johanne Méthot, porte-parole au MEQ, affirme que des discussions se poursuivent avec McGill à ce sujet, tout en admettant que les parties ont abordé la possibilité d’une éventuelle déréglementation des droits de scolarité des étudiants étrangers.

Cherchez l’erreur. x

DAVID DROUIN-LÊ

éditorial

7

Le Délit est toujours à la recherche de collaborateurs. Rendez-vous les mardis dès 16h30 au Shatner B•24.

Ces étudiants étrangers condamnés à payer des droits de scolarité d’une légalité douteuse.

rédaction3480 rue McTavish, bureau B•24Montréal (Québec) H3A 1X9Téléphone : (514) 398-6784Télécopieur: (514) 398-8318redaction@delitfrancais.com

bureau publicitaire3480 rue McTavish, bureau B•26Montréal (Québec) H3A 1X9Téléphone: (514) 398-6790Télécopieur: (514) 398-8318daily@ssmu.mcgill.ca

rédacteur en chefdavid.drouinle@delitfrancais.comDavid Drouin-Lê

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chef de pupitre-cultureartsculture@delitfrancais.comAgnès Beaudry

rédacteur-reporterMarc-André Séguin

coordonnateur de la productionproduction@delitfrancais.comAlexandre de Lorimier

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coordonnateur de la correctionPierre-Olivier Brodeur

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collaborationFranco Fiori, Ahmed Jaber, Hilary Johnson, Karin Lang, Hugo Lavallée, Jean-Michel Martin, Mathieu Ménard, Maysa Pharès, Thomas Pokoïk, David Pufahl, Clémence Repoux, Anaïs Suchail

couverturePhilippe G. LopezPierre Mégarbane gérancePierre Bouillon

publicitéBoris Shedov

photocomposition et publicitéNathalie Fortune

the mcgill dailyeditors@mcgilldaily.comJoshua Ginsberg

conseil d’administration de la société de publication du dailyJulia Barnes, David Drouin-Lê, Joshua Ginsberg, Rebecca Haber, Mimi Luse, Rachel Marcuse, Jeffrey Wachsmuth

Le seul journal francophone de

l’université McGill

Volume 95Numéro 5

L’usage du masculin dans les pages du Délit français vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire.

Le Délit français est publié la plupart des mardis par la Société de publications du Daily. Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et illustrations dont les droits avaient été auparavant réservés, incluant les articles de la CUP). Les opinions exprimées dans ces pages ne reflètent pas nécessairement celles de l’Université McGill. L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal. Imprimé par Imprimerie Quebecor, St-Jean-sur-Richelieu, Québec.Le Délit est membre fondateur de la Canadian University Press (CUP) et de la Presse universitaire indépendante du Québec (PUIQ).Imprimé sur du papier recyclé.ISSN 1192-4608

Le Délitx

15

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L’habit fait l’abbesse

xNous avons finalement nettoyé les logements sociaux de

la Nouvelle-Orléans. Nous ne pouvions pas le faire, mais Dieu l’a fait.»

Cette admirable preuve de franchise nous vient d’un représentant républicain au Congrès américain pour la Louisiane, Richard Baker, s’exprimant avec pertinence quelque temps après le passage dévastateur de l’ouragan Katrina. (The Wall Street Journal)

La citation conne de la semaine

En trois vitesses

Que le revampage capillaire d’Angela Merkel –passée du look Jeanne d’Arc en tailleur ringard au look platine d’Hillary Clinton– ait été une bonne chose pour son image, je n’en

disconviens pas. Que deux designers se crêpent le chignon pour revendiquer la paternité du look de personnes essentiellement ornementales (genre Jennifer Lopez, Mariah Carey ou n’importe laquelle de ces starlettes chez qui l’art dramatique consiste à bien remplir un chandail), je le conçois. Mais je trouve passablement frivole que les journaux allemands publient à pleines pages la bataille de Martina Acht, qui prétend que c’est à elle qu’on a demandé conseil pour débarrasser Merkel de cette coupe champignon qui faisait les gorges chaudes, et d’Udo Walz (par ailleurs coiffeur attitré de Gerhard Schröder) qui répond «Acht a peut-être fait un brushing à mes clients, mais elle ne leur a pas coupé les cheveux». Allô? Ce n’est pas Miss Germany qu’on élit.

Évidemment, on peut retourner la question: pourrait-on élire une Claudette Ryan? Qu’aurait été l’affaire Stronach (autre preuve qu’on préfère le jeunisme à la nouveauté, pour reprendre l’expression de Patrick Beauduin) si elle avait pu être le modèle d’Yves Thériault pour La fille laide? Ou encore, loin de moi l’idée de sous-estimer l’engouement que peut susciter chez certains la vêture inaugurale de Michaëlle Jean (surtout, qu’après Lise «Star Trek» Thibault et le tapis de bain Big Bird d’Adrienne Clarkson on pouvait s’attendre à tout: PowerRanger, garde suisse, académicien, Shéhérazade pour rallier les communautés culturelles), mais était-il nécessaire de faire de la commande de robes signées Yves-Jean Lacasse un secret de banque suisse?

Notre paysage politique entier offre des exemples de cette guerre d’image des femmes. Bien sûr, contrairement à Angela Merkel, la candidate à la mairie Louise O’Sullivan, ex-brune et ex-Louise Boyne n’aura pas de poupée à son effigie, mais il n’empêche que sa cote de popularité a augmenté depuis qu’elle est blonde et qu’elle a troqué les foulards bohèmes pour l’austère veston-noir-et-chemise-blanche. Mais pourquoi cela devrait-il avoir plus d’importance que les cravates –hideuses– de Pierre Bourque (auquel j’aimerais appliquer les propos que Jean Yanne tenait sur Lionel Jospin: «Ça ne peut pas être sa femme qui a si mauvais goût. Il doit y avoir des types qui, mourant dans la misère, lèguent leurs cravates au parti et c’est [lui] qui les récupère»)?

Similairement, on a reproché à Pauline Marois son image trop sophistiquée, trop «madame», ses perles et ses bagues à faire rougir Ali G, en un mot, son image de «bourgeoise». Et puis après? Que je sache, quand elle a déposé son budget lorsqu’elle était ministre des finances, c’est une paire de chaussures qu’elle s’est achetée, pas douze. Et comme elle l’a bien affirmé, ce n’est pas son style qui mettra le poing sur la table lorsque viendra le temps de prendre des décisions.

Quoi qu’il en soit, après avoir été croquée en Castafiore par Serge Chapleau, Marois semble avoir trouvé plus sage de faire comme Margaret Thatcher ou Andrée Boucher en adoptant un genre plus masculin: «la nouvelle Marois» arbore des redingotes sobres et des coupes plus carrées, que dis-je, au débat présenté à TVA dimanche midi, Marois et Boisclair portaient le pin-stripe suit (probablement à 2000$ dans les deux cas, d’ailleurs)!

Pour Josée Boileau, éditorialiste au Devoir, c’est la «[p]reuve que l’ambition et le pouvoir sont de genre masculin et que les partis en font toujours bien peu pour insérer les femmes dans la joute politique. […] à compétence supérieure, pourriez-vous prendre la femme, s’il vous plaît?» Il y a un je-ne-sais-quoi d’avilissant dans cette discrimination positive. C’est Germaine Greer qui doit se retourner dans sa tombe, elle qui, dans La femme eunuque, reprochait à Barbara Castle, chien de garde du gouvernement Wilson d’être «le «bon Noir» de l’homme blanc, [de] s’entend[re] mieux avec les hommes parce qu’elle est habituée à ruser avec leurs susceptibilités; [une] femme exceptionnelle qui vaut les hommes tout en étant plus décorative.»

nouvellesinsolite

Le voleur le plus conLa Belgique vient d’appréhender

le voleur le plus idiot de son histoire, à Louvain très précisément. Non content de transporter du speed, à peine dissimulé sur la banquette arrière de son véhicule, l’homme avait également une arme antichar sagement rangée dans son coffre d’auto, évidemment sans permis (ce que la police a pris la peine de préciser dans son communiqué). Ce qui a mis la puce à l’oreille des policiers qui l’ont arrêté? «Il conduisait anormalement lentement». Sur une piste cyclable à sens unique. Dans le mauvais sens. Ivre mort. (Radio-Canada/DH.net)

Digne de la nuit des morts-vivants

Digne d’un film d’horreur: même morte, elle est revenue se venger. Qui ça elle? Une oie sauvage voyons! Abattu en plein vol, le volatile s’est écrasé sur la tête d’Uf Ilback, le chasseur qui avait si bien su viser. Il a immédiatement perdu connaissance, mais l’homme s’en est tout de même bien tiré: avec une chute de plus de vingt mètres, il aurait pu avoir le coup brisé. «L’histoire a fait beaucoup rire au boulot [et p]eut-être porterai-je un casque durant la chasse à l’élan qui s’ouvrira bientôt». (Matin.qc.ca/PC)

Et si elle l’avait simplement ôté?

Une femme aura appris à ses dépens l’allégance de la compagnie aérienne Southwest. En effet, lors de son embarquement, on lui aurait demandé de couvrir son t-shirt, lequel portait les mots [attention, âmes sensibles s’abstenir] «Fuck George W. Bush Dick Cheney and Condoleezza Rice». Lorrie Heasly, vendeuse de bois originaire de Washington, a gentiment accepté de se couvrir d’un coton ouaté. Elle s’est cependant endormie et la couverture improvisée a glissé, révélant ainsi le t-shirt. Devant les plaintes des autres passagers, on lui a dit de porter son chandail à l’envers ou de partir. Elle est partie. (Canoë/CTV)

Laver son linge sale sur l’autoroute

Ce que JBS voulait le plus au monde? Un divorce. Et rien n’allait l’empêcher de sensibiliser la moitié de l’Angleterre au bien-fondé de sa requête. L’homme a en effet accroché à un viaduc au-dessus de l’autoroute A-27 une immense banderole marquée «Wendy, I want a divorce. –JBS.» On aurait presque pu croire à une plaisanterie. Sauf que quelques jours après les mêmes automobilistes pouvaient lire «No way. You are the cheat! –Wendy.» (AP/SF Gate)

Brèves mais ô combien insolites

En hausse

Les Annales de la recherche improbable et leurs Ig Nobels

À chaque année, les Annales de la recherche improbable (HotAIR) décernent à l’automne les fameux et très convoités «Ig Nobels», des prix visant à récompenser des recherches «qui ne peuvent pas et qui ne doivent pas être reproduites». La cérémonie se déroule en présence de récipiendaires de véritables prix Nobel, qui remettent leur prix aux heureux gagnants, souvent présents. L’objectif d’une telle rencontre? «Faire rire les gens, et ensuite les faire penser».

Au neutreViscosité accrue

Edward Cussler de l’Université du Minnesota et Brian Gettelfinger des université du Minnesota et du Wisconsin, se sont mérité l’Ig Nobel 2005 de chimie pour avoir répondu à une question cruciale: l’être humain nage-t-il plus vite dans l’eau ou dans un bassin rempli de sirop?

Prix collectifLes e-entrepreneurs du Nigeria

se sont collectivement mérité l’insigne honneur du Ig Nobel 2005 de littérature. Leur exploit? Diffuser à travers le monde une série de nouvelles par lesquelles ils racontent les mésaventures de personnages riches et hauts en couleurs, disposant tous de fortunes cachées qu’ils ne peuvent débloquer qu’avec une avance minime d’argent de notre part…

En baisseLes testicules artificiels pour chiens

Gregg A. Miller de Oak Grove, Missouri, a reçu l’Ig Nobel 2005 de médecine pour son invention des testicules artificielles

pour chiens. Sans commentaire.

Repas équilibrésLe Dr Yoshiro Nakamata de Tokyo,

au Japon, a photographié, répertorié et analysé tous les repas qu’il a pris au cours des trente-quatre dernières années. Cela lui aura au moins permis de se mériter l’Ig Nobel 2005 de nutrition.

04 xLe Délit • 18 octobre 2005

LAURENCE BICH-CARRIÈRE

Sans commentaire

Tenir tête

x

courrierdeslecteursÀ la française

Je vous écris pour vous signaler la création d’un nouveau club ici à McGill: l’Association des étudiants français (AÉF) soit le French Student Community (FSC)… Notre but est la promotion et le partage de la culture française, ainsi que le rapprochement des français de McGill avec la communauté au sens large ...

Depuis notre première Activities Night cette année, nous comptons plus de 120 membres payants (3$ la carte) de nationalités diverses et nous avons négocié un rabais de 15% au restaurant La vache fait meuh (sur St-Denis).

Pour vous divertir cette année, nous avons crée une troupe de théâtre qui vous présentera «Le voyageur sans bagages» de Jean Anouilh en février et nous préparons un Festival de cinéma français pour les mois qui viennent.

Pour les amateurs de nourriture française, nous organisons des soirées vin-fromage, des cours de cuisine, des ventes de croissants, de crêpes, et de vin chaud (quand il fera froid!) ainsi que des grands bons repas à la française – le premier aura lieu dans une ou deux semaines.

Et pour les sportifs, il y a une équipe de foot, et bien évidemment des soirées entre fans, scotchés à la télé pour les matches de l’équipe de France (n’oublions pas que l’on vient de se qualifier pour la Coupe du Monde 2006).

Notre première fête de l’année, ce 1er octobre, fut un grand succès, rassemblant au moins 150 personnes, malgré la fin prématurée de la soirée, ordonnée par la police… Nous vous attendons tous – amateurs de la culture française – à nos prochaines fêtes et à nos divers événements cette année.

Pour être sur notre liste de

distribution ou pour devenir membre, envoyez un courriel à l’adresse fsc.mcgill@gmail.com.

- Benoît LamairesseVP publicité et communication,

AEF/FSC

Je protesteJe suis étudiant de littérature.

Cela devrait suffire à vous faire comprendre que je n’ai pas apprécié la chronique littéraire de votre dernier numéro, intitulée «Perchaude pourrissante». Car quiconque s’y connaît ne peut que répudier les élucubrations de votre chroniqueur pourfendant le magnifique Poisson soluble de Breton avec quelques décennies de retard. Comment tolérer pareil massacre, pareille incompréhension d’une des plus grandes oeuvres de la littérature?

Votre chroniqueur s’attaquera-t-il à la Bible, tant qu’à y être? Je ne saurais trop vous conseiller de freiner vos élans bilieux, M. Brodeur.

- Guillaume de Boisjoli

Réponse du Coordonateur de la correction, l’auteur des Rêveries du lecteur solitaire.

Très cher Guillaume de Boisjoli,Comme bien des étudiants en

littérature, vous vous croyez cultivé alors que vous ne faites que vomir la matière avec laquelle vos professeurs vous gavent. Le jour où vous comprendrez qu’on peut posséder un doctorat et être un parfait imbécile, qu’une oeuvre n’en est pas moins médiocre parce qu’elle est encensée par la critique, peut-être commencerez-vous à comprendre les études littéraires.

Sans la moindre trace de cordialité factice,

-Pierre-Olivier Brodeur

Envoyez-nous vos réactions, commentaires et suggestions à redaction@delitfrancais.com. Limitez vos lettres à 300 mots et n’oubliez pas d’inclure votre nom et votre programme d’études.

Lettres françaises

«Quel gouvernement [fait face] aux syndicats? Un seul gouvernement est capable de le faire. Il faut du courage

pour régler les finances de l’État.» C’est ce qu’affirmait dimanche dernier le premier ministre Jean Charest devant 1 200 militants libéraux réunis lors d’un souper bénéfice.

Il semble difficile de contester que le Parti libéral du Québec ne prétend pas avoir pour clientèle électorale principale les militants syndicaux. Les événements de l’automne 2003 peuvent nous en convaincre. Alors que la popularité du gouvernement Charest plongeait dans les sondages, celui-ci menait tout de même à leur terme les réformes au Code du travail visant à faciliter la sous-traitance. Du même coup, le gouvernement du Québec réorganisait les unités d’accréditation syndicale dans les hôpitaux. M. Charest s’en vantait d’ailleurs dimanche dernier: « Est-ce qu’il y a un Québécois qui pense sérieusement que le Parti québécois [...] serait capable de faire face à ces changements-là, à les mettre en place, à dire au partenaire syndical: c’est assez! on va aujourd’hui changer ce système-là?»

Il serait aussi ardu de contester que le Parti québécois entretient des liens privilégiés avec certains individus issus des rangs syndicaux. Monique Richard, la nouvelle présidente du PQ, n’est-elle pas l’ancienne présidente de la Centrale des syndicats du Québec? L’ancien président de la Confédération des syndicats nationaux, Marc Laviolette, n’est-il pas le président du courant de gauche –le SPQ-Libre– au sein du Parti québécois?

On peut cependant se demander s’il y a véritablement une alliance systémique et historique entre le Parti québécois et les syndicats. Plusieurs fonctionnaires tiennent encore rigueur au PQ pour les réductions salariales drastiques imposées au milieu des années 1980 afin de résoudre la crise des finances publiques. Cette rancœur est un des facteurs qui expliquent les difficultés vécues par le parti dans la région de la capitale québécoise d’élection en élection. De plus, le PQ n’a pas manqué de mettre fin à plusieurs conflits de travail par le biais de lois spéciales lors de ses quatre mandats à la barre de l’État. On n’a qu’à penser aux lourdes pénalités qui ont été imposées aux infirmières lors de leur débrayage illégal de l’été 1999.

Si le PQ a pu sembler si près des syndicats par le passé, on peut penser que c’est en bonne partie parce qu’il a eu tendance à essayer d’appuyer ses actions sur de vastes consensus sociaux. Ce fut notamment le cas dans le cadre de l’épisode du déficit zéro.

Force est tout de même de constater que la tendance sociale-démocrate réaffirmée du Parti québécois donne une certaine légitimité aux propos de M. Charest. S’il veut convaincre les Québécois qu’il est en mesure de gérer de façon responsable les finances publiques lors des prochaines élections, le PQ devra être doublement vigilant et éviter les apparences de conflits d’intérêts.

Même si les fonctionnaires provinciaux sont moins bien payés que leurs homologues

fédéraux et municipaux, Jean Charest marque clairement des points au sein de l’opinion publique en brandissant les difficultés budgétaires du gouvernement comme un frein aux revendications syndicales. Cet argument apparaît fondé sur une logique évidente: on ne dépense pas plus lorsqu’on n’en a pas les moyens... De plus, le «chaos social» annoncé par certains leaders syndicaux à l’approche de l’automne ne semble pas

être en train de se matérialiser, faute d’appui dans la population. Même de la part d’un gouvernement impopulaire, le discours de la responsabilité paraît porter ses fruits. Cette image de pragmatisme risque d’être payante à terme. Surtout lorsque le principal parti d’opposition ne propose, pour régler une crise des finances publiques dont il ne conteste pas l’existence, que la réalisation d’un événement lointain et incertain.

05xLe Délit • 18 octobre 2005

de la raison

La voix

JEAN-PHILIPPE DALLAIRE

06 xLe Délit • 18 octobre 2005

Il y a quelques temps, le groupe STAND (Students Taking Action Now: Darfur) de McGill organisait une journée de

sensibilisation à la situation au Darfour, dans le cadre d’une action concertée du groupe sur tous les campus du pays. Un des événements de cette journée était le STANDfast, qui appelait les gens à jeûner pendant une journée ou à renoncer à un élément matériel afin de montrer leur soutien aux victimes des crimes contre l‘humanité commis au Darfour. Par ailleurs, les membres du groupe se trouvaient sur le campus pour informer les gens des réalités quotidiennes du Darfour. De plus, ils demandaient aux sympathisants de signer la pétition qu’ils comptent envoyer aux dirigeants des pays développés pour leur

demander d’agir et de mettre fin aux atrocités qui y sont commises.

Le Darfour est une région de l’ouest du Soudan. Tout commence début 2003 quand deux groupes rebelles, le Mouvement de libération du Soudan et le Mouvement pour la justice et l’égalité, s’attaquent à des installations militaires gouvernementales. Le gouvernement autorise alors les milices Janjaweed (qu’on pourrait traduire par «cavaliers armés») à s’attaquer aux civils vivant dans les régions considérées comme rebelles Ces attaques comportent des déplacements massifs de populations, des viols, de la tortures et des tueries, des gestes qui vont à l’encontre de la prohibition de s’attaquer aux civils qu’on retrouve dans la Convention de Genève. Ce

conflit, comme c’est souvent le cas dans la région, est d’origine ethnique, et n’a toujours pas été résolu à ce jour.

De récents rapports de l’ONU font état de 2,5 millions de déportés, 400 000 morts et 3,5 millions de personnes touchées par la faim. La Chambre des représentants des États-Unis a approuvé en septembre 2004 une loi qualifiant les événements du Darfour de «génocide». Le rapport de la Commission d’enquête de l’ONU, publié en janvier 2005, ne conclut pas que le gouvernement du Soudan aurait eu des intentions génocidaires, mais soutient que «les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis au Darfour ne sont pas moins sérieux ni moins abominables qu’un génocide».

Ceux qui ont visionné le film Hôtel Rwanda, projeté gratuitement pour clore cette journée STAND du 6 octobre à McGill, disent avoir ressenti quelque chose de très fort, que ce soit de la frustration, de l’indignation, de la culpabilité, voire un sentiment d’impuissance. Le Darfour, c’est le Rwanda d’aujourd’hui. C’est pour cette raison qu’existent des groupes comme STAND et Save Darfur, pour éviter qu’on ne reproduise aujourd’hui les erreurs d’hier. x

Pour plus d’informations, consultez www.savedarfur.org ou contactez STAND McGill, qui se réunit tous les mardis à 18h au Shatner Lounge, à l’adresse suivante: standmcgill@yahoogroups.com

CLÉMENCE REPOUX

Agir pour le DarfourDes étudiants veulent faire prendre conscience de la situation au Darfour.

nouvellescampus

La ministre fédérale des Affaires intergouvernementales, Lucienne Robillard, était de passage à McGill

le 12 octobre dernier à l’occasion d’une consultation pré-budgétaire avec les universitaires, organisée par les jeunes libéraux de Westmount/Ville-Marie. Une soixantaine d’étudiants se sont présentés à cet événement public afin d’exprimer leurs volontés et critiques à l’égard d’un futur budget du gouvernement de Paul Martin.

Allant du développement d’énergies vertes à l’investissement en éducation, en passant par une critique de l’intrusion du gouvernement fédéral dans des champs de compétence provinciale, les intérêts des étudiants sur les questions budgétaires se sont avérées beaucoup plus variées que ce qu’anticipait Mme Robillard. «J’ai été vraiment impressionnée dans le sens que je m’attendais à ce qu’on parle beaucoup d’investissement en éducation […]. [J]’ai été même surprise qu’on soulève [certaines questions] et heureuse d’entendre les préoccupations des jeunes. Par exemple, […] sur l’importance d’investir davantage dans l’aide internationale [et] dans l’environnement. Ensuite, ce qu’on doit investir dans les jeunes familles et les jeunes entrepreneurs». Elle confirme que les préoccupations exprimées lors de séances du genre seront entendues dans les plus hauts paliers de son gouvernement. «Moi je vais avoir le point de vue des jeunes qui étudient à McGill ou à Concordia sur certaines idées qui ont été avancées et je me propose bien

de les partager avec mes collègues. […] Vous participez au processus décisionnel du gouvernement canadien dans un certain sens».

En fin d’entrevue, Mme Robillard a nié catégoriquement qu’il y ait un lien à faire entre ce genre de consultations publiques et les travaux de la commission Gomery, qui ont fait état du favoritisme du parti libéral pour un cercle particulier d’hommes d’affaires aux dépens de l’intérêt public.

Du côté de Louis Bernard…Le 6 octobre dernier, M. Louis Bernard

est lui aussi venu s’adresser aux étudiants dans le cadre de la course au leadership du Parti québécois. Placé au quatrième rang dans les sondages –derrière André Boisclair, Pauline Marois et Richard Legendre– M. Bernard est venu à McGill afin d’exposer les raisons pour lesquelles il devrait être le prochain chef du parti. «Je ne me préoccupe aucunement des sondages et je vais continuer ma campagne, rencontrer les membres, parler aux médias le plus possible pour faire connaître mon message».

Il a répondu à des questions concernant notamment les moyens à prendre pour accéder à la souveraineté. Il a aussi affirmé l’importance que prendrait la communauté anglophone dans un Québec souverain: «C’est important d’avoir des institutions pour que les anglophones se sentent chez eux au Québec. Et s’ils ont des institutions qui les valorisent et dont ils sont fiers, c’est une raison de plus

d’être fier du Québec». Candidat ayant appuyé les accords du

lac Meech, il a aussi parlé de sa stratégie de négociation avec Ottawa advenant un référendum gagnant, qui mise davantage sur le dialogue plutôt que sur des gestes unilatéraux de rupture. «Nous voulons garder avec le Canada une union douanière, une union monétaire. C’est dans l’intérêt des deux de garder ça. On veut avoir une relation d’amitié avec le Canada, et qu’ils reconnaissent que dans certains cas on doit être distincts et que dans d’autres cas on a des intérêts communs».

En entrevue, M. Bernard a dit croire que le Parti québécois a encore beaucoup à faire s’il souhaite réaliser la souveraineté. «[Le PQ] devrait se retrousser les manches, travailler sur le terrain, convaincre les Québécois qu’il faut l’indépendance. […] Un parti, c’est un instrument politique. Tu recrutes des membres, tu leur donnes de la formation, tu leur demandes d’être actifs sur le terrain pour convaincre leurs voisins, leurs amis, leurs parents de la cause de l’indépendance. C’est ça le travail que le PQ doit faire. Il l’a déjà fait, il le fait moins, il devrait le faire davantage », conclut-il. x

Deux politiciens en visite à McGillLouis Bernard et Lucienne Robillard visitent le campus à une semaine d’intervalle.MARC-ANDRÉ SÉGUIN

nouvellescampus

07xLe Délit • 18 octobre 2005

À l’initiative de Max Reed, vice-président aux affaires universitaires de l’Association des étudiants (AÉUM), un

rassemblement a eu lieu le 30 septembre dernier. Le nom donné à l’événement, dont la traduction littérale se trouve en titre de cet article, témoigne de l’atmosphère détendue dans laquelle s’est déroulée cette soirée. Divisés en petits groupes, les participants avaient pour mission d’arriver à une liste de suggestions à faire au Groupe d’étude de la Principale.

À l’issue de cette réunion et en se référant au document rendu public plus tard, trois lignes directrices se dégagent des propositions de l’AÉUM au Groupe d’étude.

Une nouvelle approche pour l’appui pédagogique

Dans un souci de réduire les files d’attente et d’améliorer la qualité de l’appui pédagogique, plusieurs solutions ont été envisagées. En s’inspirant du travail accompli dans les départements de biologie et de psychologie, on a proposé la création de postes permanents

de conseillers au sein de chaque unité. Cela permettrait de limiter l’afflux d’étudiants vers des professeurs qui n’ont souvent que très peu d’intérêt ou de motivation (financière ou autre) pour accomplir cette tâche.

Une autre initiative prometteuse serait l’attribution d’un conseiller à chaque étudiant, et ce dès la confirmation d’inscription à l’Université. Une telle mesure devrait aider à réduire la confusion régnant chez beaucoup de nouveaux élèves.

Enfin, il a été question de l’instauration d’un site Internet réunissant l’ensemble des informations nécessaires en matière académique.

Une bureaucratie étouffantePlusieurs étudiants se sont plaints de la

qualité du service qui leur est offert en matière administrative. La position des étudiants est que l’Université a le devoir de les accommoder convenablement, tout en évitant de les qualifier de «clients». Il a également été question du besoin pressant pour un centre d’information. En effet, il n’existe présentement aucun organe-ressource

se chargeant de répondre à des questions aussi diverses que «Où aller pour payer mes droits de scolarité?» ou «Comment faire pour utiliser le réseau sans fil sur le campus?».

Activités parascolairesDe nombreuses idées ont été formulées pour

améliorer la vie étudiante en dehors du contexte purement académique.

Cette discussion s’est axée sur un thème primordial: le prix exorbitant de la réservation de salles, en particulier en fin de semaine. Pour ne citer qu’un exemple, réserver le local Leacock 132 un dimanche coûterait aux alentours de 500$. Un tel montant décourage considérablement la tenue d’activités qui seraient pourtant très enrichissantes pour les étudiants. Afin de remédier à ce problème, l’AÉUM proposera au Groupe d’étude de réviser sa grille de prix à la baisse.

Pour finir, de nombreux étudiants ont voulu souligner la quasi-inexistence d’espaces consacrés aux besoins spirituels et religieux, ou, plus généralement, au repos. x

Avez-vous un «boeuf» avec McGill?Ne craignez rien: le Groupe d’étude de la principale est là pour répondre à vos soucis.AHMED JABER

nouvellescampusNUMÉRO SPÉCIAL RÉFÉRENDUML’édition du 25 octobre sera dédiée à l’anniversaire des dix ans du référendum de 1995. Pour l’occasion, la Rédaction lance un concours à deux volets.• ÉcritureVous voici à la veille du référendum de 1995. Vous avez 500 mots pour convaincre du bien-fondé de la position de votre choix. • Création graphiqueCréez la meilleure affiche référendaire pour le oui ou pour le non.

Vous avez jusqu’à dimanche midi pour envoyer vos créations à redaction@delitfrancais.com. Les meilleures soumissions seront publiées et le gagnant recevra un prix mystère. Oooooooohhhhhhh...

Lucienne Robillard et Louis Bernard. Miroir, miroir...

Que penser du remodelage du plus haut organe décisionnel de l’Université?

ANAÏS SUCHAIL

Cela faisait deux ans que l’on discutait de la possible restructuration du conseil

d’administration (le fameux Board of Governors) de McGill: la réforme est entrée en vigueur le 1er janvier dernier. La composition du nouveau conseil se trouve profondément changée, mais ses fonctions n’en ont pas été altérées pour autant.

Il a fallu du temps pour arriver à moderniser le conseil, et la tâche n’est pas finie. En effet, la question fondamentale de la représentation des élèves de premier cycle n’est pas réglée. Au-delà de la bienveillante volonté de changement pour un meilleur conseil d’administration, une question se pose: «À quand un conseil d’administration pleinement fonctionnel?»

Vous avez bien dit «conseil d’administration»?

Le conseil d’administration est la plus haute assemblée de McGill. Elle décide de l’avenir de l’Université en abordant tous les sujets non académiques et en approuvant les demandes du Sénat relatives aux programmes d’études. Tous les deux mois, le conseil d’administration se réunit pour décider principalement de questions de financement et d’allocation du budget. D’autres sujets viennent ensuite à l’ordre du jour, comme l’embauche de professeurs, les rencontres sportives et les plans d’actions pour les édifices. Les séances durent en moyenne trois heures et sont ouvertes au public.

Des gouverneurs hors du commun

Le travail des membres du conseil d’administration est volontaire et non rémunéré. La première motivation des gouverneurs est de contribuer au développement de l’Université. Il suffit de se pencher sur le passé des gouverneurs pour remarquer des liens forts avec McGill. En effet, on y retrouve des anciens étudiants de McGill, des doyens, des professeurs, etc…

Tous sont des acteurs proéminents des scènes montréalaise, québécoise, canadienne et internationale et leur feuille de route est impressionnante. Pour ne donner qu’un exemple, le chancelier du conseil, Richard W. Pound, qui travaille en ce moment pour le cabinet d’avocats Stikeman Elliott, a gagné une médaille d’or, deux d’argent et une de bronze aux jeux du Commonwealth de 1962. Quatre fois champion canadien pendant sa carrière sportive, il a étudié les sciences humaines, la

comptabilité, le droit, le commerce et le sport. En plus d’avoir publié deux livres, il a siégé au Comité international olympique et préside actuellement l’Agence mondiale antidopage.

Une profonde restructuration

En 2003, la rectrice Heather Munroe-Blum et le président du conseil Robert Rabinovitch ont jugé que le fonctionnement du conseil d’administration était ralenti par une composition archaïque et quarante-cinq membres. Il était selon eux grand temps d’adopter la structure de la majorité des universités, qui fonctionnent avec des conseils d’administration d’une vingtaine de membres (vingt-quatre gouverneurs à l’Université de Montréal et à l’UQÀM).

Après plusieurs réunions, il a été convenu que vingt-cinq serait un nombre de membres adéquat. Le changement est pourtant apparu comme brutal, puisqu’il s’agissait d’une réduction de 45%. Le conseil compte maintenant un chancelier, un principal et vice-chancelier, douze membres, trois représentants de l’Association des anciens étudiants, deux représentants du personnel académique, deux représentants du personnel administratif, deux représentants du Sénat et deux représentants des étudiants.

Le nouveau conseil d’administration serait ainsi devenu plus efficace: les échanges entre les membres seraient plus constructifs, les débats avanceraient plus vite et les décisions seraient prises plus rapidement.

Toutefois, le nombre plus élevé de membres assurait auparavant au conseil une variété de points de vue, afin de pouvoir examiner toutes les facettes d’un problème et proposer un maximum de solutions. En réduisant son effectif, le conseil a perdu l’opinion de vingt personnes. Le nombre restreint de membres laisse craindre à certains que quelques membres fassent pression et imposent leur norme de pensée. Il faut aussi se demander s’il est sage de concentrer plus de pouvoir entre les mains de moins de gens. Les gouverneurs n’ont pas plus de responsabilités, mais ils sont moins nombreux à prendre les décisions.

La question à réglerLa question fondamentale

de la représentation des étudiants est toujours d’actualité. Avec la restructuration du conseil d’administration, ceux-ci ont perdu des voix. En effet, ils ne comptent

plus que pour 8% du conseil d’administration. Désormais, il leur est plus difficile de se faire entendre. «Les étudiants sont sous-représentés, [ceux de premier cycle] en particulier!» s’exclame Adam Conter, président de l’AÉUM. «Comment peut-on avoir le même nombre de représentants de premier et de deuxième cycle alors qu’il y a deux fois plus d’étudiants de premier cycle?» s’indigne-t-il.

Le statut même du président de l’AÉUM au sein du conseil d’administration a été longuement débattu. Le président représentait auparavant les étudiants de premier cycle en siégeant au conseil et avait pour ce faire un droit de parole, mais ne pouvait voter. Dans le nouveau conseil, le représentant des étudiants de premier cycle a le droit de vote. Faut-il s’en réjouir pour autant?

Depuis sa restructuration, le conseil d’administration exige que ce représentant prenne au

moins dix-huit crédits par année. Adam Conter n’a qu’un seul cours ce semestre: il n’est donc plus qualifié pour siéger au conseil. «Je comprends les conditions, mais elles sont en conflit avec la vraie volonté de McGill, affirme-t-il. McGill souhaite que les étudiants soient représentés par un étudiant. Or il faut être inscrit à un cours pour être considéré [comme un] étudiant. Je suis inscrit à un cours, donc je suis un étudiant, qui devrait alors pouvoir représenter les autres étudiants.» De plus, Conter souligne qu’il est impossible d’assurer ses

fonctions de président de l’AÉUM en prenant trois cours: «Je travaille neuf heures par jour pour l’AÉUM, comment puis-je trouver le temps d’étudier pour trois cours?»

Le siège du représentant des étudiants de premier cycle était vide lors de la dernière réunion du conseil d’administration, mais il ne le sera pas lors de la prochaine assemblée, le 31 octobre. D’ici là, le conseil exécutif de l’AÉUM recommandera un étudiant satisfaisant aux exigences du conseil d’administration. x

La représentation des étudiants de premier cycle fait toujours l’objet d’une controverse

nouvellescampus

08 xLe Délit • 18 octobre 2005

Quand vous vous sentez mal, un seul remèdedelitfrancais.com

Le drapeau du Québec vandalisé à McGillMARC-ANDRÉ SÉGUIN

Les autorités du campus n’ont aucune piste.

Le drapeau du Québec de l’entrée principale du campus de l’Université McGill a été

l’objet d’actes de vandalisme il y a deux semaines. C’est en marchant sur le campus le mardi 4 octobre dernier qu’un membre de l’équipe du Délit a trouvé en début d’après-midi le fleurdelisé en lambeaux, au pied du mât. Le drapeau avait été déchiré et on en avait apparemment enlevé plusieurs morceaux. C’est à ce moment que notre journaliste a pris en photo ce qui en restait. Moins de vingt-quatre heures plus tard, il semblerait que le drapeau ait été décroché du mât et il est maintenant porté disparu.

Mme Jennifer Robinson, vice-principale associée aux communications de l’Université, n’avait pas encore été mise au courant de la chose lorsque Le Délit l’a jointe pour recueillir ses

commentaires. Tout en précisant que les actes de vandalisme sur le campus «arrivent tout le temps», elle a néanmoins tenu à dénoncer le geste: «Je ne sais pas quoi commenter. C’est horrible». Après vérification, elle a ajouté que «la

sécurité a reçu un appel comme de quoi [sic] le drapeau a disparu. Tout ce qui s’est passé par la suite, c’est vous qui le savez». Même si le drapeau du Canada situé au même endroit est resté intact, Mme Robinson éloigne la thèse d’un

geste politique, en indiquant que les actes de vandalisme sur le campus sont chose du commun.

M. Pierre Barbarie, assistant-gérant du service de sécurité de McGill, n’avait lui non plus pas eu connaissance de l’acte de vandalisme en question lorsqu’il a été interviewé par Le Délit, une semaine après l’incident. Il a toutefois précisé que la sécurité avait rempli un rapport. Cependant, ce dernier ne fait pas état du fait que le drapeau a été déchiqueté. En effet, le garde de sécurité l’ayant écrit a seulement constaté la disparition du drapeau et non les actes de vandalisme qui ont été commis sur ce dernier. «L’information que j’ai eue est d’abord bien sûr le fait que le drapeau n’est plus là. Mais il n’y avait pas de traces ou quoi que ce soit. Ce n’est pas comme s’il y avait des morceaux de drapeau

qui restaient. […] On a vu que le drapeau manquait, on a fait un rapport d’incident là-dessus, mais on n’a pas de pistes à suivre par rapport à qui aurait pu faire cela». Il ajoute aussi qu’étant donné qu’aucune caméra de sécurité ne permet de vérifier les activités près des mâts, il est fort peu probable qu’on en vienne à déterminer l’identité du ou des vandales. «Je sais que ça ne te donne pas beaucoup d’informations en terme de storyline, mais je n’ai pas d’autre information à te donner. Tu as l’air d’en avoir plus que moi», conclut-il.

Au moment de mettre sous presse, le drapeau avait été remplacé. Le geste n’avait toutefois pas été revendiqué. À la demande de M. Barbarie, des copies des photos prises par Le Délit ont été partagées avec la sécurité dans le cadre de leur enquête. x

nouvellescampus

Le 4 octobre dernier, le McGill Tribune publiait «Sixty-five percent alcohol free, guaranteed», un article où

Jacqui Wilson s’attaquait à un règlement de l’Association des étudiants de la Faculté des arts de McGill (AÉFA). Ce règlement concerne un aspect fondamental de la vie étudiante universitaire: l’alcool.

En effet, l’article 10.11 des règlements financiers de l’AÉFA stipule que toute association étudiante de l’AÉFA disposant d’un budget supérieur à 500$ ne peut en allouer plus de 35% à l’alcool. Cette règle vise à assurer l’intégrité de l’AÉFA, c’est-à-dire à éviter que l’association ne devienne «un organisateur de fêtes», selon Téo Leroux-Blackburn, vice-présidente aux finances.

Un article écrit à la sauvette?L’article publié dans le Tribune n’a pas

été bien reçu par l’AÉFA. Selon elle, l’article présentait mal les faits. D’après une réplique de l’association, l’article crée une histoire où il n’y en a pas. Estimant qu’il s’agit de pur sensationnalisme, l’AÉFA ajoute aussi que le règlement est en vigueur depuis longtemps, et que la responsable des finances ne fait qu’appliquer ce qui est lui est dicté par la constitution de l’AÉFA. L’association juge que l’article du Tribune présentait le règlement comme nouveau, alors que cela fait plus d’un an qu’il figure dans la constitution.

Alors pourquoi est-ce à l’automne 2005 que ce règlement est l’objet de controverse dans un journal de McGill? La vice-présidente aux finances avance l’hypothèse que, par le

passé, plusieurs clubs respectaient la règle sans s’en rendre compte et que ceux qui enfreignaient le règlement n’étaient pas avertis de leur manquement à la constitution. Par conséquent, Leroux-Blackburn adopte une approche différente: les clubs ont été avisés dès le début de l’année que les dépenses en alcool seraient limitées afin que le règlement, écrit en toutes lettres mais ignoré les années antérieures, soit dorénavant appliqué.

Un faux scandaleLa vice-présidente estime que la

controverse découle du fait que certains ont peut-être l’impression qu’un nouveau règlement a été instauré, alors qu’il existe en réalité depuis plus d’un an (l’article 10.11 a été ratifié le 12 octobre 2004). Leroux-Blackburn a affirmé que «Le scandale naît du fait que les gens [des associations] n’étaient pas bien informés.» Elle ajoute qu’elle a appris par l’article du Tribune que certaines associations étaient mécontentes du règlement: «Personne n’est jamais venu voir l’AÉFA pour exprimer son insatisfaction».

La question est donc: pourquoi ce règlement n’a pas été appliqué auparavant? Est-ce un oubli des conseils exécutifs des années antérieures de s’informer ou un échec à faire suivre le règlement? «Cela demanderait qu’on fasse de la recherche sur les budgets des années antérieures, mais une telle vérification ne fait pas partie de mes responsabilités. Si les étudiants sont opposés au règlement, ils n’ont qu’à venir me voir et des mesures seront prises, si nécessaire». x

Boivent-ils en arts?Règlement du 35% d’alcool: sensationnalisme du Tribune ou échec de l’AÉFA?

HILARY JOHNSON

nouvellescampus

09xLe Délit • 18 octobre 2005

À quand son tour?

L’alcool et l’université: toujours un sujet de controverse...

vasy.gouv.qc.ca

Philippe G. Lopez

Michel Bédard, candidat à la mairie et chef du Parti de l’éléphant blanc de Montréal (PÉBM), est de

ceux qui ne se contentent pas de croire ce que l’administration veut bien laisser paraître. Depuis sa fondation en 1989, le PÉBM, «parti des insoumis, des non-alignés», se donne pour mission de dévoiler l’envers du décor politique municipal. Aujourd’hui, fort de quatorze candidats d’arrondissement et d’un candidat à la mairie de Montréal, l’Éléphant s’arme pour dénoncer le pouvoir en place qui, selon lui, néglige les intérêts des citoyens. À défaut d’avoir des élus, le parti veut attirer l’attention de l’opinion publique sur ce qui se trame dans les coulisses de l’Hôtel de Ville.

«On est le plus vieux parti municipal sur l’île de Montréal, le troisième plus vieux parti municipal au Québec, et on n’a pas d’élu», nous livre M. Bédard. «Mais si on est là, c’est pour la cause, pour défendre les intérêts des gens entre deux élections». L’Éléphant blanc se définit comme «un parti humoristique, mais dont le message est toujours sérieux. On se moque de ce qui est là parce que ce n’est qu’image et illusion. On en rigole parce qu’on est conscients qu’il faut aller gratter l’image pour constater que derrière c’est pourri, mais le citoyen se fait jeter de la poudre aux yeux».

Information menottée, opinion manipulée

Les libertés d’expression et d’opinion sont au cœur des préoccupations de l’Éléphant blanc, pour qui l’appareil démocratique permet en réalité aux intérêts de «s’acoquiner» pour biaiser l’information. M. Bédard soulève la question du financement des médias: «il faut que le citoyen puisse voter de la façon la plus éclairée possible. Or, c’est l’argent qui mène tout. Les gros médias forment le quatrième pouvoir qui, lui aussi, a des intérêts. Et ces intérêts ne sont pas toujours ceux des citoyens». Il souligne que les médias n’accordent de visibilité qu’aux gros partis. Ils orientent le vote des gens, au lieu de valoriser également les positions de chacun.

«Même la presse a les mains liées», insiste-t-il. Certains journalistes auraient, selon M. Bédard, reçu la consigne de ne rien écrire sur le PÉBM. La presse appartient au privé, et le privé ne privilégie que ceux qui «charrient ses intérêts». L’information qui parvient à l’opinion publique passe donc par ce filtre, ce qui amène l’Éléphant à contester jusqu’au caractère démocratique dont se targuent les institutions.

Pour ce qui est des petits partis, Michel Bédard affirme qu’ «on a voulu [les] étouffer». Le PÉBM dit avoir contribué à la modification de certaines lois mettant en péril leur existence. Une de ces lois exigeait un minimum de vingt-cinq candidats, de sorte qu’à la dernière élection, il fallait avoir des représentants dans le tiers des districts. Les petits partis étaient voués à disparaître, ce qui portait atteinte à la liberté d’expression. De plus, le dernier gouvernement provincial avait fait en sorte que seuls les partis ayant au moins un élu soient subventionnés. L’Éléphant a

entamé des poursuites, et se félicite qu’avant d’aller en cour le gouvernement ait modifié les lois, permettant ainsi d’assurer la survie politique et financière des partis «marginaux». M. Bédard interprète cela ainsi: «Quand un parti sans élu réussit à faire changer des lois, même sans la volonté du gouvernement, ça c’est du pouvoir».

Corruption légalisée: le pouvoir n’est pas là où l’on croit

Plus sensible encore est la question du financement des partis politiques, qui relève, selon M. Bédard «ni plus ni moins du chantage et de la corruption déguisée». Il ajoute qu’«il y a mille et une façons de financer de façon immorale, mais légale, un parti politique. Il y a des trous dans la loi qui permettent cela». Ainsi, «le PÉBM, qui propose des alternatives audacieuses et novatrices, ne sera jamais accepté. L’administration est menottée, elle

a perdu le pouvoir politique, aux mains de ses créanciers». L’Éléphant blanc dénonce un système où les élus se font dicter la ligne à suivre par les promoteurs, les développeurs, les firmes, «qui n’ont pas le droit de contribuer mais qui le font parce que les dons anonymes sont autorisés par la loi!»

Michel Bédard déclare même avoir reçu le témoignage d’un conseiller municipal qui voulait faire revoir les critères d’attribution de contrats pour la disposition des déchets et le recyclage. Cet homme aurait été menacé par un entrepreneur qui finançait le parti du maire. Il s’indigne: «C’est très grave! C’est la mafia! Et on ne dit rien, ça veut dire qu’on accepte ça. On accepte l’inacceptable!» L’Éléphant blanc se bat pour attirer l’attention sur de tels dérapages, mais déplore que son propos soit étouffé, car «ce dont le pouvoir a le plus peur, c’est que les choses soient dénoncées et que les médias le rapportent».

C’est pourquoi, jusqu’au 6 novembre, les

médias seront la cible première du PÉBM, qui dit garder espoir et refuse de laisser abdiquer les gens qui ne votent plus, car cela fait le jeu du pouvoir: «quand les gens n’ont plus confiance et ne vont plus voter, tout est biaisé.» Fidèle à sa politique de dérision, privilégiant la plume et la parole, l’Éléphant blanc compte multiplier les entrevues, les coups médiatiques télévisés, l’envoi de communiqués (qui ne passeront sans doute pas, admet-on). Michel Bédard est conscient que gagner requiert d’être «apprivoisé» par l’électorat. Le parti tentera donc de se faire le plus présent possible. Le véritable obstacle dans sa course demeure le côté dérangeant du parti. «Nous avons été boycottés sauvagement, parce que si on est un parti novateur, qui veut changer les choses, ça ne passe pas.»

Mais, comme le dit le chef, «le pouvoir ne se trouve pas toujours à l’Hôtel de Ville, il peut être ailleurs», alors gardons les yeux ouverts. x

L’Éléphant blanc de Montréal contre la tromperie politicienneUn parti rebelle s’en prend à la «démocratie de façade».MAYSA PHARÈS

nouvelleslocal

10 xLe Délit • 18 octobre 2005

11xLe Délit • 18 octobre 2005

Temps de chien à l’Usine C L’Usine C, le Centre de création et de diffusion pluridisciplinaire, présente la dernière création de Sylvain Émard : Temps de chien.

Sylvain Émard est un grand chorégraphe qui contribue à donner à la danse moderne

canadienne ses lettres de noblesse sur la scène internationale. Ses créations «distillent un vocabulaire chorégraphique complexe et raffiné dont le langage gestuel touche d’abord les sens tout en interpellant l’intelligence du corps tout entier». En 2004 il nous offre un nouveau cycle de création, «Climatologie des corps», dans lequel il emploie la métaphore du climat pour représenter les éléments extérieurs qui affectent la vie de chacun d’entre nous. Le premier épisode, Pluie, a connu un grand succès l’année dernière. C’est le deuxième volet, Temps de chien, que je vous invite à aller voir à l’Usine C jusqu’au 22 octobre. Il fera aussi partie du Festival Danse Canada du Centre national des Arts d’Ottawa au mois de juin 2006.

Au début, je dois dire qu’on est sceptique: il y a tant de spectacles modernes de qualité médiocre où la musique est dissonante et la chorégraphie indéchiffrable pour un public amateur. Heureusement, il existe des perles rares, ces créations qui nous illuminent, nous enchantent, nous retournent,

et nous font oublier l’horreur du «moderne» mauvais. Alors on s’amollit, on redevient naïf, on y retourne. Mais on finit par ne pas oublier la leçon. Avant même le lever du rideau, on est sceptique, on sort notre sens critique, bien taillé comme une mine de crayon prête à clamer notre indignation au premier signe de médiocrité.

L’autre jour, j’étais sceptique. Je commençais même à regretter de m’être assise à l’avant, même pas au bord, ce qui voulait dire que quoi qu’il arrive, je serais coincée jusqu’à la fin, jusqu’à ce que les lumières se rallument, migraine ou pas. La musique, comme prévu, c’était du bruit, la danse, c’était plutôt des gestes, sans queue ni tête. Alors qu’on aurait pu être tranquille chez soi, surtout par ce magnifique temps de pluie... Et puis j’ai commencé à remarquer certaines choses. Des détails. Des marques de talent, comme ces pétales d’or disséminés parfois dans le chocolat ou le parfum, comme s’il fallait rendre ces produits encore plus luxueux. L’éclairage était absolument saisissant. À couper le souffle. L’interprétation des danseurs, de cette chorégraphie qui paraissait n’avoir pas de sens,

était véritablement remarquable. Au fur et à mesure que le spectacle avançait, et qu’on commençait à discerner les bons danseurs des très bons, on pouvait reconnaître leur talent prodigieux. Et cet éclairage qui dramatisait chacun de leur geste. La musique, qui au début dérangeait presque, finit par se fondre dans le spectacle, pour donner un sens à cette «histoire» tracée par les mouvements des interprètes. On s’était pris au jeu. Je m’étais prise au jeu.

Et avant même qu’on s’en rende compte, c’était fini. On avait aimé. Une fois de plus, on s’était fait séduire. Encore une fois, on assistait à la victoire du talent sur l’habitude, le bon sens et le cynisme. On va devoir assister à neuf spectacles abominables avant de voir de nouveau quelque chose de comparable. Mais, en même temps, et malgré soi: merci. On n’a pas tout compris, mais on a aimé. x

Temps de chien sera présenté jusqu’au 22 octobre à l’Usine C située au 1345, rue Lalonde (métro Beaudry). Pour la billetterie: (514) 521-4493. Pour plus d’information, visitez le www.usine-c.com

CLÉMENCE REPOUX

Une mise en scène sans accroc, des acteurs au ton globalement juste,

un texte aux idées riches: voici comment se résume la pièce Filles de guerres lasses, jouée au Théâtre d’Aujourd’hui.

La dramaturge Dominick Parenteau-Lebeuf, qui avait signé la pièce la Petite Scrap présentée en février dernier à Montréal, en est l’auteur. Son œuvre est divisée en quatre tableaux. Chacun éclaire une facette de la condition féminine, et plus largement de la condition humaine (et oui, rien que ça !). Passons-les rapidement en revue. Dans le premier d’entre eux, «Vive la Canadienne !», Marie-Paule, fille de féministe, erre dans une forêt des Laurentides; progressivement, nous découvrons les raisons de sa présence en ces lieux. Le tableau le plus réussi, «Vices cachés», nous montre Maribel perchée sur sa table de cuisine, tentant d’échapper à un rat menaçant. Le volet «Nacre C» relate les doutes de Marie-Paule,

poétesse devenue la muse d’un peintre. Enfin, «Catwalk», sept voix pour sept voiles, nous transporte dans un défilé de mode donné en Galilée (Palestine). Salomé, jeune mannequin palestinienne, chute sur le podium; qu’adviendra-t-il lorsqu’elle se relèvera ?

On peut deviner que le spectateur s’attachera plus ou moins à chacun de ces tableaux polyphoniques. En effet, principale originalité rhétorique de Filles de guerres lasses, les textes sont parfois récités par plusieurs acteurs à la fois. Si ce procédé fonctionne à

merveille pour le second volet de la pièce, son utilisation est moins réussie pour le dernier. Tout au long de la pièce, on appréciera le rythme soutenu du texte. La langue est parfois totalement déconstruite (dans le volet «Nacre C»), la perception du temps l’est aussi. Parmi les acteurs, on appréciera particulièrement le jeu de Marie-Ève Desroches (actrice, entre autres, de «Vive la Canadienne !») et de Paule Baillargeon (qui revient sur les planches après quinze ans d’absence). D’autres acteurs, en revanche, ont tendance à surjouer légèrement.

Quant à la mise en scène de Caroline Binet, elle est efficace, mais donne un sentiment de déjà vu. Elle repose notamment sur le recours à des tables de tailles différentes, dont l’emplacement est modifié pour chacun des tableaux. On notera aussi l’emploi réussi d’effets sonores et de micros.

Filles de guerres lasses apparaît donc comme une pièce réussie, aux

thèmes fort intéressants, abordés avec fraîcheur. Certains passages ne manqueront pas de faire rire (notamment, le personnage du DJ animant le défilé palestinien). Le dernier tableau, «Catwalk», sept voix pour sept voiles, nous offre une approche totalement inattendue du conflit israélo-palestinien. En effet, le grand mérite de Dominick Parenteau-Lebeuf est d’avoir subtilement évité une approche politiquement correcte de thèmes classiques. À la lumière des destinées de ces quatre filles, on comprend que le féminisme est loin d’avoir gagné toutes les femmes à sa cause. Qui plus est, ces quatre combats amers illustrent les paradoxes d’une femme moderne en crise. x

Filles de guerres lasses, jouée jusqu’au 29 octobre à la salle Jean-Claude Germain du Théâtre d’Aujourd’hui, 3900, rue Saint-Denis. Pour plus d’information, consultez le www.theatredaujourdhui.qc.ca

Le contre-pied du féminismeLa pièce Filles de guerres lasses nous présente quatre portraits féminins atypiques.THOMAS POKOÏK

Filles de guerres lasses est une pièce en quatre temps qui se questionne sur la condition féminine.

La nouvelle création de Sylvain Émard est une perle rare qui cherche à exprimer la mondialisation des sentiments...

culturethéâtre

culturedanse

Robert Etcheverry

Yanick Macdonald

12 xLe Délit • 18 octobre 2005

cultureartsvisuels

La semaine dernière, vingt-deux experts se sont rassemblés à Montréal

pour discuter de la philosophie de Wittgenstein en relation avec l’art, en particulier de sa vision de l’architecture. Le colloque Wittgenstein, l’art, l’architecture, produit des efforts de Mme Céline Poisson, professeur à l’UQÀM, et parrainé par l’Institut de recherche en histoire de l’architecture au CCA (Centre canadien d’architecture), fut aussi l’occasion du vernissage de l’exposition l’Architecture de Wittgenstein/la Maison Margaret.

Assez pour l’énumération sur un ton plus qu’officiel: à moi maintenant la liberté de partager avec vous, ce que je pense être l’essentiel de mon sujet-matière. Wittgenstein, philosophe autrichien du vingtième siècle, connu surtout pour sa philosophie du langage et son projet de clarification de la pensée (je cite ce dernier : « what can be said at all can be said clearly, and what we cannot talk about we must pass over in silence. »), est aussi architecte. Entre 1926 et 1928, il construit une maison pour sa sœur, Margaret Stonborough-Wittgenstein, à Vienne qui exprime sa philosophie : austérité, simplicité, harmonie, mais surtout

clarté. Tout dans la conception du bâtiment est minutieusement planifié. La famille Wittgenstein, de noblesse autrichienne, peut se permettre la dépense. Rien n’est donc omis dans la conception: la maison Wittgenstein est l’un des rares exemples architecturaux dans lesquels le plan est presqu’identique au résultat.

La maison ne résulte pas d’une théorie de proportions idéales. Elle est plutôt un exemple de la

pensée du philosophe selon laquelle l’individu participe activement à son expression: l’important est que le tout soit parfait pour l’œil humain, la perfection ne pouvant être constatée que par celui-ci.

La maison sera transformée en écurie par les armées nazies durant la seconde guerre mondiale, achetée en 1970 par le gouvernement de Bulgarie et sauvée de justesse, en grande partie par les efforts de Bernhard Leitner, en tant que

monument historique. Ce dernier, professeur à l’Université des arts appliqués de Vienne, a donné une présentation extraordinaire sur la conception de l’œuvre d’art architecturale qu’est la maison Wittgenstein. Auteur de The Wittgenstein House publié en l’an 2000, il étudie depuis plus de trente ans la maison. Lors de sa présentation, il souligne qu’elle incorpore la «densité des matériaux à l’intensité de la perception esthétique», qu’elle présente «équilibre et harmonie, pour l’œil et pour le corps.» La maison Wittgenstein est une tentative de clarification de la pensée à travers un médium différent de l’écriture, l’architecture.

En entrant dans la Galerie Monopoli, j’ai tout de suite été frappée par le calme qui émane de l’exposition, comme si l’on se retrouvait seul dans la maison Wittgenstein. L’exposition est composée de photographies, d’extraits de textes du philosophe, de maquettes et d’un vidéo. Les photographies sont magnifiques: la résolution est parfaite, les pigments fins en dépit de la grandeur et les sujets planifiés à merveille (la maison est sûrement un sujet de choix en tant que bijou esthétique, mais la mise en abîme de l’œuvre aurait pu

être ratée). Deux dessins originaux de l’architecte sont incorporés au montage, petites curiosités. Le film présenté, créé par Angela Grauerholz et Réjean Myette, m’a semblé de mauvais goût et un peu déplacé au sein des travaux de Wittgenstein. L’assemblage d’images n’a rien éveillé chez moi et m’a fait l’effet d’un amalgame d’obscurité juxtaposé à l’effort de clarté du philosophe si bien rendu par le reste de l’exposition. Je tiens à souligner un détail, un petit livret créé par Dan Ursachi et l’organisatrice rassemblant des citations et des commentaires du philosophe: sûrement ce que j’ai préféré, car sans sa pensée, la maison Wittgenstein ne serait pas ce qu’elle est.

Si le philosophe, qui selon moi est le plus inspirant de tous, vous est familier, l’exposition est une opportunité pour voir son projet sous un angle différent. Sinon, elle est une occasion parfaite pour rencontrer Wittgenstein, pour sentir le calme et l’honnêteté qui rend sa philosophie unique et magnifique.x

L’Architecture de Wittgenstein/la Maison Margaret sera présenté à la Galerie Monopoli, 181, rue St-Antoine O., jusqu’au 19 novembre.

Wittgenstein architecte cultureartsvisuelsVingt-deux experts internationaux se rassemblent pour discuter de Wittgenstein, l’art, l’architecture.AGNÈS BEAUDRY

Depuis quelques semaines déjà, le Musée d’art contemporain de

Montréal a effectué un remodelage afin d’héberger trois nouvelles expositions. En explorant une certaine variété de médiums, les artistes offrent des réflexions sur différentes thématiques. Dans une réalité citadine constamment immergée dans les images, ces propositions invitent à l’introspection.

De prime abord, Alexandre Castonguay recueille une panoplie respectable de projecteurs, d’instruments optiques et de circuits imprimés pour leur donner une seconde vie dans Éléments, une installation multimédia interactive. Une qualité dynamique se dégage de l’ensemble, d’autant plus que le visiteur doit explorer l’espace et inspecter les bidules pour déclencher les projections.

À l’aide de caméras, les projecteurs récupèrent la présence du spectateur et l’incorporent de diverses façons dans l’image projetée. Les transformations visuelles (en collaboration avec

Mathieu Bouchard) témoignent autant d’une exploration des moyens numériques que d’une esthétique «naturelle»: les passants deviennent liquides, fragmentés, etc. On peut aussi se questionner sur l’omniprésence, sinon l’importance, des lentilles qui surveillent nos faits et gestes.

Dans un autre ordre d’idées, la peintre Sylvie Bouchard, avec la rétrospective Distractions, cherche à perturber le spectateur par-delà la tranquillité que dégagent ses huiles sur toiles et autres créations. L’élément central est souvent une présence humaine, qui en bout de ligne est surtout un indice permettant de lire l’image entière.

Le modelé limité et la raideur des poses contribuent à aplatir les personnages et à démontrer l’incohérence des décors dans lesquels ils sont situés. Les perspectives se multiplient, se déforment, les espaces pleins deviennent momentanément vides. Soudainement, les intérieurs se transforment en compositions géométriques abstraites. Ce jeu est soutenu par un travail de couleur

accompli, riche et subtil. Finalement, l’exposition

collective Territoires urbains rassemble les travaux de six aficionados de la lentille, que ce soit par photographie ou par vidéo. Isabelle Hayeur présente des photographies de grand format rapprochées où l’expansion urbaine est solitaire et enveloppée d’un brouillard tristounet. Emmanuelle Léonard offre une installation de cinq projections vidéo sur la thématique de la sécurité et de la caméra, ainsi que des photographies explorant la marche selon deux perspectives. Pavel Pavlov exhibe quelques photographies cabotines, mais surtout une installation avec quatre projections vidéos, où la progression du temps se marque autant par les numéros de poteaux indicateurs dans un stationnement que par d’habiles fondus entre les clichés.

Myriam Yates, avec une double projection accompagnée d’une troisième, vidéo, joue avec la répétition imparfaite, la symétrie, les perspectives multiples et la distorsion. Un examen des détails (réflexions) trahit l’imperfection

des doubles. Christian Barré utilise des procédés propres à la publicité pour donner une qualité digne à ses sujets, mais une certaine dissonance persiste. Finalement, Martin Désilets croque sur le vif des situations citadines. Souvent, ces scènes spontanées ont un je-ne-sais-quoi rappelant plutôt la nature que l’urbanité.

En bout de ligne, même si certaines propositions sont

nettement plus intéressantes que d’autres, la visite demeure fructueuse, ne serait-ce que pour se laisser aller aux inspections ludiques et au travail de détective. x

Les expositions Éléments,

Distractions et Territoires urbains sont présentées jusqu’au 8 janvier au Musée d’art contemporain de Montréal (185, rue Ste-Catherine O.).

TransformationsLe multimédia déforme l’image du visiteur, les perspectives se multiplient et se brisent, la ville croît sous divers regards... Trois manifestations de l’art contemporain manipulent les images pour leurs propres fins.MATHIEU MÉNARD

Un trio d’expositions accompagne l’arrivée de l’automne au Musée d’art contemporain.

Mathieu M

énard

La Maison Wittgenstein synthétise philosophie et architecture.

Margherita Krishantiz / The Paper Press

Jonas Tomalty: le feu dans les yeuxJEAN-MICHEL MARTIN

Un p’tit gars de chez nous s’impose dans l’univers rock.

Pour lui c’est rock, sexe et drogues. Le blues est ses racines, le rock son cadeau.

À dix ans, il compose sa première chanson sur le riff neilyoungnien «Rockin’ in the Free World». À treize ans, il forme son premier groupe, Rumble Fish. Un an plus tard il joue déjà dans les bars. La Terre n’a pas le temps d’effectuer une autre rotation autour du Soleil qu’il forme Rubberman, le groupe qui lui permettra de gagner le premier prix du concours «l’Esprit de CHOM-FM», en 1999, avec «More than I Can Chew». Pendant ce temps, il se produit avec une formation blues sous le nom de Jonas & The Blues Blooded. Puis, récipiendaire du prix LYS Blues, en tournée avec la légende du rock, Eddie Van Halen, il refuse de participer au INXS’s TV Reality Show pour succéder au chanteur défunt. Disque d’or avec son premier album éponyme, Jonas Tomalty a le feu autant dans les yeux qu’aux fesses!

L’entrevue se déroule au Carlos & Pepes, en compagnie du directeur des communications de l’endroit, Felipe del Pozo, un chic type qui ne gênera pas du tout le déroulement de l’entrevue. Les talents musicaux et de bête de scène de Jonas lui ont valu les éloges de tous. Steven Tyler et Joe Perry d’Aerosmith lui ont même fait parvenir un démo qu’il a inséré sur son nouvel album: «Je comprends qu’ils ne l’ont pas enregistré plus sérieusement. When the Rain Stops a été toute une

histoire à produire sur compact. Il y a de ces chansons où les prises s’agencent difficilement. Puis il y avait la difficulté de s’approprier une chanson qui ne démordait pas de sonner comme Aerosmith …»

C’est que Jonas tient mordicus à garder son intégrité artistique. Il ne saurait chanter une chanson qu’il ne se serait pas complètement appropriée. C’est pourquoi les multiples comparaisons avec Jim Morrison, Robert Plant ou Eddie Vedder ne l’emballent pas du tout.

Ceci dit, Jonas reconnaît l’importance de bien gérer les affaires dans un milieu comme la musique. Avec la nouvelle réalité du téléchargement et les quelques cents de redevances par diffusion de ses chansons à la radio, il résume de son franc-parler sa vision du show-business. Toutefois, il importe aussi de garder le prix des billets aussi bas que possible, de sorte qu’il réalise ses profits seulement sur les dernières centaines de billets vendus…

Issu du milieu montréalais anglophone, il a appris le français avec les médias et après ses spectacles avec ses fans francophones. La division linguistique québécoise ne l’affecte guère: il apprécie «la langue du cœur» et la culture francophone. Finalement, il accepterait volontiers de participer à la Saint-Jean-Baptiste.

Sa séparation avec Rubberman est contestée. Le groupe se composait d’amis intimes de longue date. C’est alors que le fameux distributeur

Donald K. Donald impose au groupe un co-writer afin de produire leur second album. C’est à prendre ou à laisser. Le groupe refuse, Jonas accepte et sa carrière solo débute. Un certain froid semble s’être installé entre les Rubberboys et lui, mais il tente de faire taire la rumeur en affirmant qu’il est à une étape où il doit sacrifier beaucoup de sa vie personnelle. Difficile de garder une relation sérieuse avec une fille ou encore d’entretenir ses vieilles amitiés, son entourage se résume plutôt au monde avec lequel il travaille: «But cry me a river. I get to do what I love.»

La musique de Jonas mélange un romantisme cru et une agressivité tranchante. Pourtant, le stéréotype du rocker à l’enfance malheureuse ne s’applique pas. C’est plutôt sa perception de la détresse des autres et quelques histoires personnelles qui le poussent dans de tels états. Mais comprenez bien, le chanteur de 26 ans se considère très heureux, conscient qu’il a de la chance: «Les joies éphémères aident à la gratification personnelle, mais le

vrai bonheur se trouve au long terme. Je ne veux pas changer le monde, mais j’aimerais apporter ma part. Les spectacles bénéfices, Doctors Beyond Borders, Amnistie internationale, me tiennent à cœur. C’est dans les petites choses que je me retrouve. Je ne crains pas de me voir plus tard comme un vieux monsieur ridé, tant que j’y laisse un certain héritage…»

Finalement, Jonas est à l’étape de préparer son prochain album. Sa tournée avec Van Halen lui a permis de tâter le pouls en sol américain et, bien entendu, de s’imprégner de l’expérience de légendes. Encore plus important, Jonas et sa troupe peaufinent présentement leurs

nouvelles chansons en spectacles et leur donnent ainsi une teneur de spontanéité.

Jonas est charismatique, spontané et se montre disponible. Encore jeune, son curriculum musical professionnel se bâtit depuis déjà treize ans. Les spécialistes voient la coqueluche montréalaise comme une future grande vedette internationale. Un défi que le principal intéressé ne craint pas de relever. x

Le 29 novembre, sortira le DVD Jonas Live… As We Roll. L’artiste sera en spectacle au Spectrum le 6 décembre. Pour plus d’information, visitez le www.jonaslive.com

culturemusique

La musique de Jonas mélange un romantisme cru et une agressivité tranchante.

13xLe Délit • 18 octobre 2005

La culture, c’est vraiment génial. Partagez votre sens critique:articlesculture@delitfrancais.com

Jean-Claude Lussier

14xLe Délit • 18 octobre 2005

x

Calendrier

Théâtre• Hands Around – pièce d’Arthur

Schnitzler – mis en scène par Trevor Koob – du 19 au 22 octobre et du 26 au 29 octobre – 20h – TNC Theatre (3485, rue McTavish) – 8$/6$ étudiants – (514) 398-6600 – tnc_theatre@hotmail.com

• London Suite – pièce de Neil Simon – mis en scène par Julia Csillag – du 20 au 22 octobre à 20h et le 23 octobre à 2h – Players’ Theatre (3480, rue McTavish, 3e étage du Pavillon Shatner) – 8$/6$ étudiant – (514) 398-6813 – katie.

snetsinger@mail.mcgill.ca

Opéra• Évangeline Revisited de Julian

Wachner – libretto d’Alexis Nouss à partir d’un texte de Longfellow – mis en scène par Jean-François Boucher – présenté par le Festival Black Box Lisl Wirth – Salle Polack (555, rue Sherbrooke O.) – du 19 au 22 octobre – 19h30 – 10$/ 5$ étudiant/aîné – (514) 398-5530 - marie.pothier@mcgill.ca

Lectures publiques• Indian Muslim Women’s Activism

in the Apartheid Year par Fatima Seedat – Brown Bag Lecture Series, Institut d’études islamiques – mardi 18 octobre – 12h à 13h – Morrice Hall, salle 321 (3485, rue McTavish)

Musique• Music for Chairs – concert

présenté par QPIRG McGill – avec DJ Tashish (hip hop) et Jiva Productions & DJ Blaze (bhangra et bollywood) – jeudi 20 octobre – 20h – El Salon (4388 St-Laurent) – 5$ – (514) 398-7432 – qpirg@ssmu.mcgill.ca

• Orchestre de chambre de McGill – Jens Lindeman (trompette) – œuvres de Bruch, Gilliland, Debussy, Hertel, Gershwin et Britten – lundi 24 octobre – 19h30 – Salle Polack – 38$/30$/25$ – (514) 487-5190 – marie.pothier@mcgill.ca

• Solistes étudiants de McGill – coordonnés par Marina Mdivani – lundi 24 octobre – 20h – Salle Redpath (entrée sur McTavish) – entrée libre – (514) 398-4547 – marie.pothier@mcgill.ca

SEMAINE DU 17 AU 24 OCTOBRE

« C’est pas mal ce que tu fais, mais tu pourrais pas travailler sur quelque chose de plus récent la prochaine fois? » Oui, Agnès, oui

chef de pupitre vénérée, je sais bien que plus un livre est vieux, moins ça intéresse le monde. Mais moi, l’attrait de la nouveauté ça me laisse froid et j’éprouve toujours beaucoup de difficulté à m’asseoir devant une médiocrité contemporaine alors qu’il y a tellement de chef d’œuvres à lire. Mais je vais essayer.

Je commence ma quête par une visite au Renaud-Bray: tant qu’à sombrer dans le populisme, aussi bien y aller à fond. Des enfants zigzaguent entre les décorations d’Halloween sur un arrière-plan musical oscillant entre musique

d’ascenseur et trame sonore d’un bleu nuit des années 80. Combattant un mal de cœur croissant, je me dirige vers la section «palmarès».

« Populisme », ai-je avancé : trois Dan Brown (plus deux livres «dévoilant les mystères du DaVinci Code»), quatre Marc Lévy (étonnement, aucun Marie Laberge), deux Vigneault (le fils de l’autre, ça se vend bien), le premier livre de Lance Armstrong (il sait peut-être pas écrire, mais il pédale vite, ça compense). Pour compléter le tout, une pléthore de guides de vie, de sexualité (j’en ai compté quatre, cinq si on y ajoute Nelly Arcand qui, une main dans les culottes, revendique toujours aussi fièrement son statut de prostituée), de psycho-pop (l’Art du bonheur, le Bonheur c’est si simple, Vivre content, Être bien dans sa peau, vous voyez le genre) et même de cuisine (tiens, ça ferait un bon article ça: «l’épaule de bœuf échappera-t-elle à l’horrible sort qui l’attend?»). Ce sont à peu près tous des «coups de cœur Renaud-Bray».

La libraire que j’accroche m’avoue sans difficulté que la qualité des œuvres n’entre pas en ligne de compte lors du choix des coups de cœur. «On choisit ce qui vend. T’sais, la poésie québécoise c’est dans la section du fond pis ça risque pas de bouger de d’là. C’est ça le marché. » Elle sait de quoi elle parle, elle qui gagne huit dollars de l’heure avec une maîtrise.

Je sors de chez Renaud-Bray les mains vides. Tant qu’à parler du nouveau Coelho, je préfère me taire. Les mots « Wal-Mart de la littérature » se forment d’eux-mêmes dans ma tête tandis que je jette un dernier regard à l’immense affiche jaune et criarde. J’ai essayé Agnès, j’ai vraiment essayé.

PIERRE-OLIVIER BRODEUR

Le palmarès de la médiocrité

Les rêveries du lecteur solitaire

Le dossier «Dérives II» insiste d’abord sur la nature multiple de son sujet.

Parmi toutes ces approches, le point commun entre les différents articles est l’investissement que fait l’artiste dans son environnement. Le land art, où l’artiste est prospecteur, arpenteur géomètre ou constructeur, transforme de façon temporaire ou permanente un endroit précis. L’intervention, de nature essentiellement sculpturale, accentue ou transforme certaines caractéristiques du lieu pour attirer l’attention du spectateur, évoquer certains sentiments. Difficile d’accès, l’œuvre se retrouve habituellement dans les musées sous forme de cartes et de photographies, comme une invitation à l’aventure.

Par la dérive, l’artiste veut sortir l’art des musées, ou du moins changer les attentes du visiteur vis-à-vis de l’organisation du musée. Dans cet esprit, quelques artistes transforment les espaces d’exposition en véritables labyrinthes pour laisser s’exprimer le flâneur qui sommeille en chaque spectateur. L’organisation logique entre les différentes œuvres

(soit par courant ou par artiste) est escamotée au profit d’un arrangement chaotique où le visiteur peut lui-même organiser des associations, comme autant de fils d’Ariane lui permettant de sortir

du labyrinthe.Le flâneur, individu

essentiellement invisible, laisse quand même une trace indubitable de son passage. Certains artistes exploitent cette idée en laissant

traîner des objets un peu partout dans une grande ville, tandis que d’autres répertorient clairement leurs trajets. Dans ce même ordre d’idées, d’autres artistes reprennent les pratiques des graffiteurs. Un mot est tagué un peu partout comme une obsession, ou encore les lignes de la rue se font découper par un immense ciseau. Voilà autant d’interventions qui, tout en ravissant les passants, valent souvent à leur créateur (anonymes par obligation) des démêlés avec les forces de l’ordre.

Toutefois, qu’en est-il de la femme vis-à-vis du personnage du flâneur? Encore aujourd’hui, la femme solitaire s’expose à des dangers si elle déambule çà et là dans la ville. Les plus braves transforment la marche erratique en une filature bien définie: quelques-unes jouent sur le stéréotype de la femme accompagnée, soit en changeant la présence du compagnon en une performance théâtrale, soit en modifiant totalement la nature de l’accompagnateur.

Autrement, la dérive demeure toujours associée à un geste précis:

la marche, tranquille et légèrement aléatoire, dans une optique de découverte. Ainsi, certains artistes transforment le mouvement en faisant intervenir des composantes mécaniques, tandis que d’autres capturent le geste, l’aseptisent et changent complètement l’échelle, pour donner une qualité microscopique assez intrigante.

La revue explore toutes ces idées en décortiquant les travaux de différents artistes: le tout est accompagné de photographies à la fois descriptives et évocatrices, dans une mise en page élégante. La publication est rondement complétée par une poignée d’articles sur des créateurs actuels, sans compter les quelques textes d’opinions un tantinet acides. Malgré les quelques envolées lyriques, l’ensemble demeure assez accessible. Une excellente lecture pour élargir ses horizons artistiques. x

Pour plus de détails (distribution, abonnement, etc.), le site Internet officiel de la publication peut être consulté via l’adresse suivante : www.

Investir le milieuLa plus récente publication de la revue esse arts + opinions continue sa réflexion sur la dérive dans un contexte artistique. Flâneur baudelairien, graffiteur et opérateur de pelle mécanique se côtoient.MATHIEU MÉNARD

La dérive artistique se manifeste dans la «flâneuse», accomplissant une performance au fil de ses déambulations.

Diane Borsato / A

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14xLe Délit • 18 octobre 2005

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Calendrier

Théâtre• Hands Around – pièce d’Arthur

Schnitzler – mis en scène par Trevor Koob – du 19 au 22 octobre et du 26 au 29 octobre – 20h – TNC Theatre (3485, rue McTavish) – 8$/6$ étudiants – (514) 398-6600 – tnc_theatre@hotmail.com

• London Suite – pièce de Neil Simon – mis en scène par Julia Csillag – du 20 au 22 octobre à 20h et le 23 octobre à 2h – Players’ Theatre (3480, rue McTavish, 3e étage du Pavillon Shatner) – 8$/6$ étudiant – (514) 398-6813 – katie.

snetsinger@mail.mcgill.ca

Opéra• Évangeline Revisited de Julian

Wachner – libretto d’Alexis Nouss à partir d’un texte de Longfellow – mis en scène par Jean-François Boucher – présenté par le Festival Black Box Lisl Wirth – Salle Polack (555, rue Sherbrooke O.) – du 19 au 22 octobre – 19h30 – 10$/ 5$ étudiant/aîné – (514) 398-5530 - marie.pothier@mcgill.ca

Lectures publiques• Indian Muslim Women’s Activism

in the Apartheid Year par Fatima Seedat – Brown Bag Lecture Series, Institut d’études islamiques – mardi 18 octobre – 12h à 13h – Morrice Hall, salle 321 (3485, rue McTavish)

Musique• Music for Chairs – concert

présenté par QPIRG McGill – avec DJ Tashish (hip hop) et Jiva Productions & DJ Blaze (bhangra et bollywood) – jeudi 20 octobre – 20h – El Salon (4388 St-Laurent) – 5$ – (514) 398-7432 – qpirg@ssmu.mcgill.ca

• Orchestre de chambre de McGill – Jens Lindeman (trompette) – œuvres de Bruch, Gilliland, Debussy, Hertel, Gershwin et Britten – lundi 24 octobre – 19h30 – Salle Polack – 38$/30$/25$ – (514) 487-5190 – marie.pothier@mcgill.ca

• Solistes étudiants de McGill – coordonnés par Marina Mdivani – lundi 24 octobre – 20h – Salle Redpath (entrée sur McTavish) – entrée libre – (514) 398-4547 – marie.pothier@mcgill.ca

SEMAINE DU 17 AU 24 OCTOBRE

« C’est pas mal ce que tu fais, mais tu pourrais pas travailler sur quelque chose de plus récent la prochaine fois? » Oui, Agnès, oui

chef de pupitre vénérée, je sais bien que plus un livre est vieux, moins ça intéresse le monde. Mais moi, l’attrait de la nouveauté ça me laisse froid et j’éprouve toujours beaucoup de difficulté à m’asseoir devant une médiocrité contemporaine alors qu’il y a tellement de chef d’œuvres à lire. Mais je vais essayer.

Je commence ma quête par une visite au Renaud-Bray: tant qu’à sombrer dans le populisme, aussi bien y aller à fond. Des enfants zigzaguent entre les décorations d’Halloween sur un arrière-plan musical oscillant entre musique

d’ascenseur et trame sonore d’un bleu nuit des années 80. Combattant un mal de cœur croissant, je me dirige vers la section «palmarès».

« Populisme », ai-je avancé : trois Dan Brown (plus deux livres «dévoilant les mystères du DaVinci Code»), quatre Marc Lévy (étonnement, aucun Marie Laberge), deux Vigneault (le fils de l’autre, ça se vend bien), le premier livre de Lance Armstrong (il sait peut-être pas écrire, mais il pédale vite, ça compense). Pour compléter le tout, une pléthore de guides de vie, de sexualité (j’en ai compté quatre, cinq si on y ajoute Nelly Arcand qui, une main dans les culottes, revendique toujours aussi fièrement son statut de prostituée), de psycho-pop (l’Art du bonheur, le Bonheur c’est si simple, Vivre content, Être bien dans sa peau, vous voyez le genre) et même de cuisine (tiens, ça ferait un bon article ça: «l’épaule de bœuf échappera-t-elle à l’horrible sort qui l’attend?»). Ce sont à peu près tous des «coups de cœur Renaud-Bray».

La libraire que j’accroche m’avoue sans difficulté que la qualité des œuvres n’entre pas en ligne de compte lors du choix des coups de cœur. «On choisit ce qui vend. T’sais, la poésie québécoise c’est dans la section du fond pis ça risque pas de bouger de d’là. C’est ça le marché. » Elle sait de quoi elle parle, elle qui gagne huit dollars de l’heure avec une maîtrise.

Je sors de chez Renaud-Bray les mains vides. Tant qu’à parler du nouveau Coelho, je préfère me taire. Les mots « Wal-Mart de la littérature » se forment d’eux-mêmes dans ma tête tandis que je jette un dernier regard à l’immense affiche jaune et criarde. J’ai essayé Agnès, j’ai vraiment essayé.

PIERRE-OLIVIER BRODEUR

Le palmarès de la médiocrité

Les rêveries du lecteur solitaire

Le dossier «Dérives II» insiste d’abord sur la nature multiple de son sujet.

Parmi toutes ces approches, le point commun entre les différents articles est l’investissement que fait l’artiste dans son environnement. Le land art, où l’artiste est prospecteur, arpenteur géomètre ou constructeur, transforme de façon temporaire ou permanente un endroit précis. L’intervention, de nature essentiellement sculpturale, accentue ou transforme certaines caractéristiques du lieu pour attirer l’attention du spectateur, évoquer certains sentiments. Difficile d’accès, l’œuvre se retrouve habituellement dans les musées sous forme de cartes et de photographies, comme une invitation à l’aventure.

Par la dérive, l’artiste veut sortir l’art des musées, ou du moins changer les attentes du visiteur vis-à-vis de l’organisation du musée. Dans cet esprit, quelques artistes transforment les espaces d’exposition en véritables labyrinthes pour laisser s’exprimer le flâneur qui sommeille en chaque spectateur. L’organisation logique entre les différentes œuvres

(soit par courant ou par artiste) est escamotée au profit d’un arrangement chaotique où le visiteur peut lui-même organiser des associations, comme autant de fils d’Ariane lui permettant de sortir

du labyrinthe.Le flâneur, individu

essentiellement invisible, laisse quand même une trace indubitable de son passage. Certains artistes exploitent cette idée en laissant

traîner des objets un peu partout dans une grande ville, tandis que d’autres répertorient clairement leurs trajets. Dans ce même ordre d’idées, d’autres artistes reprennent les pratiques des graffiteurs. Un mot est tagué un peu partout comme une obsession, ou encore les lignes de la rue se font découper par un immense ciseau. Voilà autant d’interventions qui, tout en ravissant les passants, valent souvent à leur créateur (anonymes par obligation) des démêlés avec les forces de l’ordre.

Toutefois, qu’en est-il de la femme vis-à-vis du personnage du flâneur? Encore aujourd’hui, la femme solitaire s’expose à des dangers si elle déambule çà et là dans la ville. Les plus braves transforment la marche erratique en une filature bien définie: quelques-unes jouent sur le stéréotype de la femme accompagnée, soit en changeant la présence du compagnon en une performance théâtrale, soit en modifiant totalement la nature de l’accompagnateur.

Autrement, la dérive demeure toujours associée à un geste précis:

la marche, tranquille et légèrement aléatoire, dans une optique de découverte. Ainsi, certains artistes transforment le mouvement en faisant intervenir des composantes mécaniques, tandis que d’autres capturent le geste, l’aseptisent et changent complètement l’échelle, pour donner une qualité microscopique assez intrigante.

La revue explore toutes ces idées en décortiquant les travaux de différents artistes: le tout est accompagné de photographies à la fois descriptives et évocatrices, dans une mise en page élégante. La publication est rondement complétée par une poignée d’articles sur des créateurs actuels, sans compter les quelques textes d’opinions un tantinet acides. Malgré certaines envolées lyriques, l’ensemble demeure assez accessible. Une excellente lecture pour élargir ses horizons artistiques. x

Pour plus de détails (distribution, abonnement, etc.), le site Internet officiel de la publication peut être consulté via l’adresse suivante : www.esse.ca.

Investir le milieuLa plus récente publication de la revue esse arts + opinions continue sa réflexion sur la dérive dans un contexte artistique. Flâneur baudelairien, graffiteur et opérateur de pelle mécanique se côtoient.MATHIEU MÉNARD

La dérive artistique se manifeste dans la «flâneuse», accomplissant une performance au fil de ses déambulations.

Diane Borsato / A

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culturemagazine

15xLe Délit • 18 octobre 2005

Made in Hong-KongDAVID PUFAHL

Pang Ho Cheung nous propose AV, un American Pie de bon goût.

Dans un festival de films, nous avons généralement affaire à deux types de

présentations: les grosses pointures que tout le monde connaît et les productions méconnues qui ne demandent qu’à trouver un public. AV, de Pang Ho Cheung, un jeune réalisateur hongkongais, entre dans la deuxième catégorie. Il est présenté dans la section «Temps 0: cinémas en mutation» du Festival du nouveau cinéma et aussi dans le cadre de l’événement «Code 1520», portant sur l’univers de la jeunesse actuelle. Effectivement, AV est un film conçu par des jeunes, pour des jeunes.

Quatre adolescents (You-Nam Wong, Lawrence Chou, Derek Tsang et Jeffrey Chow) sont assis autour d’une table et parlent d’un sujet incontournable chez les jeunes: le sexe. Plusieurs autres viennent se joindre à eux et leur apprennent qu’un camarade de classe vient de se faire renvoyer de leur école. Apparemment, il aurait fait croire à une fille qu’il tournait un film et qu’il voulait d’elle comme actrice

alors qu’en fait, ce n’était qu’un prétexte pour la peloter devant une caméra. Entendant cela, nos comparses veulent pousser l’idée plus loin et engager leur actrice de films pornos préférée (Amamiya Manami, jouant son propre rôle) avec eux comme acteurs principaux. Le plan a ses mérites, mais ils devront user de leur astuce et de bien d’autres choses pour parvenir à leurs fins.

En lisant le paragraphe précédent, on pourrait penser avoir affaire à un simple American Pie asiatique. Heureusement, on ne se contente pas de scènes de sexe racoleuses et de blagues vulgaires. Celles-ci sont laissées en filigrane pour laisser place à un discours décalé et plutôt absurde. Par exemple, afin de financer leur projet, les quatre adolescents doivent convaincre un responsable

des prêts dans une banque de leur prêter l’argent nécessaire. Comment font-ils? Je préfère vous laisser le découvrir par vous-même, mais je peux vous assurer que c’est hilarant, tout en restant de bon goût.

Le réalisateur tente même de faire passer la quête de nos héros pour quelque chose de noble et grandiose. Il ose en faire la comparaison avec d’autres étudiants hongkongais activistes qui, dans les années 70, ont accompli, eux aussi, quelque chose de grandiose. Si on considère cela au premier degré, on pourrait croire que le réalisateur est prétentieux et qu’il essaie de justifier un scénario somme toute enfantin. De mon côté, je l’ai pris avec un grain de sel et mis sur le compte de l’atmosphère décalée que j’ai mentionnée plus tôt.

Si vous recherchez des performances d’acteurs époustouflantes, vous avez frappé à la mauvaise porte. Il est vrai que, dans ce cas-ci, le scénario ne requiert pas aux acteurs de connaître Shakespeare. Ils s’acquittent bien de leur travail, mais on ne les remarque

pas vraiment. D’un autre côté, il est surprenant de constater à quel point Manami, une vraie vedette de films pornos, a un réel talent pour le jeu d’acteur légitime. C’est à se demander si les créateurs de films pornos asiatiques mettent la barre plus haute pour les actrices et acteurs que chez nous.

Une comédie, peut importe qu’elle soit inoffensive, grivoise ou carrément vulgaire, fonctionne uniquement si le spectateur est réceptif à rire et à passer du bon temps. Je l’ai été et grâce à cela, j’ai beaucoup apprécié ce film. Il faut garder un esprit ouvert, mais vous ne le regretterez pas. AV est véritablement quelque chose à découvrir. x

Au moment d’écrire ces lignes, AV n’a qu’une seule représentation prévue au FNC, le samedi 22 octobre à 15h30 au cinéma Impérial, au 1430, rue de Bleury. Pour plus de renseignements concernant les points de vente de billets et les prix, veuillez consulter le site web du Festival au www.nouveaucinema.ca.

De l’émotion à l’incompréhensionKARIN LANG

Gabrielle: un long métrage magnifique en comparaison à des courts métrages incompréhensifs

Vaut-il mieux commencer par la bonne nouvelle ou la mauvaise ? Commençons par la bonne…

Alors la voilà: la projection du film Gabrielle de Patrice Chéreau. Ce film présenté au Festival du nouveau cinéma est un vrai petit bijou. Peut-être avez-vous déjà vu ou lu la pièce une Maison de poupée de l’auteur norvégien Henrik Ibsen. Vous saurez alors que Nora, le personnage principal, ne supportant plus la soumission que son mari lui impose, finit par quitter son domicile, son mari et son enfant pour ne plus revenir. À l’époque (début du XXe), cette pièce a été à l’origine d’un terrible scandale, ouvrant de nouvelles perspectives à un mouvement qui allait devenir celui du féminisme.

Le film Gabrielle débute avec une magnifique présentation auditive et visuelle de la bonne société parisienne du début du siècle. Gabrielle, femme charmante et «immuable», comme son mari aime penser, est la figure même de la bienséance. Puis voilà qu’un jour, son mari, se rendant dans leur chambre à coucher, trouve une lettre devant le miroir. Elle le quitte. La vie s’effondre, n’a plus de sens. Et aussi rapidement qu’elle était partie, Gabrielle revient. Comment vivre

de nouveau ensemble ? Pourquoi est-elle revenue ?

Non seulement le film est poétique et émouvant, mais il est surtout beau et artistiquement percutant. Le spectateur a l’impression de se trouver dans une pièce de théâtre où les deux acteurs principaux s’animent alternativement. Isabelle Huppert

et Pascal Greggory interprètent leur rôle à merveille en créant une émotion d’intimité particulière entre elle et les spectateurs.

L’utilisation des techniques des films muets est également présente, ce qui envoûte par la puissance de ses silences et de ses monologues captivants. C’est un film que je vous recommande vivement.

Au tour de la mauvaise nouvelle maintenant. J’ai eu la «chance» de pouvoir assister en avant-première à certains courts métrages qui seront proposés durant la période du festival. Je dois avouer qu’avec toute la bonne volonté que j’y ai mise, je n’ai strictement rien compris… J’ai essayé, je vous le jure. Je questionnais chaque signe, chaque message caché entre les sons et les images qui défilaient. Mais en vain. Peut-être que je n’ai pas les qualités nécessaires pour apprécier.

Pour cette raison, je vous fais la proposition suivante: je propose aux lecteurs du Délit qui le désirent d’aller voir les courts-métrages et d’en écrire une interprétation qui pourra ensuite être envoyée au Courrier des lecteurs du journal. J’espère vraiment que vous répondrez à ma demande, parce que, très sincèrement, je souhaite comprendre!

La balle est dans votre camp ! x

Gabrielle sera présenté au Cinéma Impérial le dimanche 23 octobre à 21h30. Envoyez-nous vos commentaires sur les courts-métrages du Festival du nouveau cinéma à redaction@delitfrancais.com. Ils seront publiés dans la section Courrier des lecteurs. N’oubliez pas d’inclure votre nom et votre programme d’études.

Amamiya Manami va leur en mettre plein la vue.

Le départ suivi du retour impromptu de Gabrielle est source de mystère pour son mari.

gracieuseté du Festival du nouveau cinéma

gracieuseté du Festival du nouveau cinéma

Festival du nouveau

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16 xLe Délit • 18 octobre 2005

Avec Metamorpheus, Steve Hackett, ex-guitariste de Genesis, nous revient avec un mélange de

guitare et d’instruments classiques. Il est accompagné par huit musiciens qui composent l’Underworld Orchestra. Depuis son départ de Genesis en 1977, Hackett s’est concentré sur sa carrière solo, bien qu’il ait fait partie du supergroupe avorté GTR avec Steve Howe (Yes, Asia) dans les années 80.

L’album raconte l’histoire d’Orphée, un héros de la mythologie grecque qui pouvait charmer tous les êtres vivants grâce à sa lyre. Sa femme Eurydice est morte, mordue par un serpent, et s’est retrouvée dans les Enfers. Notre héros a dû traverser les ténèbres, d’où le nom de l’orchestre qui accompagne le guitariste. Il est parvenu à émouvoir Hadès à tel point que ce dernier l’a laissé ramener Eurydice au royaume des vivants, mais à condition qu’il ne la regarde pas pendant le

trajet. Malheureusement, la tentation a été trop forte. Orphée s’est retourné et Eurydice est disparue à tout jamais.

Pendant près d’une heure, Hackett explore ce conte mythologique de façon plutôt traditionnelle. Les mouvements sont parsemés de séquences qui rappellent certainement la tradition romantique des compositeurs classiques anglais de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Metamorpheus est la suite logique de A Midsummer Night’s Dream, paru en 1997. La guitare acoustique, qui reste la marque de commerce de Hackett, est bien moins présente que sur Midsummer et l’ex-rockeur laisse beaucoup de place à des mouvements grandioses dirigés par les cordes.

En tant qu’œuvre classique à part entière, Metamorpheus apporte un grand plaisir d’écoute. La production est parfaite. Les instruments de l’Underworld et la guitare de Hackett sont bien représentés et se marient harmonieusement. Cependant, on peut déplorer le conservatisme de l’album qui reste pris dans des influences quelque peu dépassées. On aurait apprécié retrouver l’avant-gardisme d’un des grands guitaristes du rock progressif des années 70. x

ALEXANDRE DE LORIMIER

L’album Oh No, de la formation Ok Go, offre un son très rythmé et joyeux pour l’époque actuelle. Des accents

rapides et insistants permettent une énergie qui contraste assez avec les autres groupes du style punk alternatif. Un son très british caractérise la formation suédoise, qui réussit à susciter un bon divertissement, mais sans plus. Les musiciens ne parviennent pas à trouver la succession d’accords accrocheurs, essentielle à la popularisation d’un band. Des paroles insipides, pour ne pas dire purement vides, diminuent également l’intérêt naissant qu’on peut leur porter. On se dit que s’ils avaient chanté en langue vernaculaire, leur musique aurait obtenu un mysticisme

embellissant, ce que la version anglaise, et compréhensible à l’oreille québécoise, vient achever. Tout de même, les mordus du punk trouveront chez ces Suédois le genre de rythme qui leur permettrait de danser (ou plutôt de sauter sur place), sans ressentir la honte, qui intimide si souvent le mâle occidental. La rythmique répétitive et bien appuyée facilite grandement la danse simple et joyeuse, l’abandon à l’alcool festif. Ils ne réinventent rien, donnent parfois l’impression de se chercher, ne sont probablement pas beaucoup plus imaginatifs que votre meilleur ami «gratteux de guit», mais semblent prometteurs. S’il a pris quatre albums à Radiohead et deux albums à Muse avant qu’ils n’atteignent une signature musique propre, la qualité de Ok Go laisse présager de bonnes possibilités. Une bonne voix, aucune chanson-remplissage et une bonne qualité d’instruments bien enregistrés…sans plus. x

FRANCO FIORI

Steve HackettMetamorpheus(InsideOut)

Ok GoOh No(Label)

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