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1

Chapitre 2. l’utilité espérée et le comportement vis-à-vis du risque

1. Principes et axiomatique de l’espérance d’utilité

2. La prime de risque

3. Les indices d’aversion au risque

4. Les mesures de risque

5. Remises en causes et critiques du critère d’EUPhilip Kaufman (1983), L’étoffe des héros (The Right Stuff)

2

1) L’espérance d’utilité (Von Neumann et Morgenstern)

a) principes

∑=j

ijji GUpEU )(

3

100= 1/2 (50) +1/2 (150)

50 150

U(50)

U(150)

gain

Utilité

½ U(50) +½ U(150)

U{½ (50)+½ (150)}= u(100)

70=EC

Primede risque

Prime de risque = 100 – 70 = 30

Soit une loterie A {(50€;150€),(1/2;1/2)}

=U(70)

La fonction d’utilité concave (utilité marginaledécroissante) indique l’aversion au risque

4

Prime de risque et préférence vis–à-vis du risque

• Si PR>0, alors UE > EU et l’agent est risquophobe(averse au risque)

• Si PR<0, alors UE < EU et l’agent est risquophile (goût pour le risque)

• Si PR=0, alors UE = EU et l’agent est neutre vis-à-vis du risque

5

L’espérance d’utilité

• Si Pr (X=x) = {0,2 ; 0,5 ; 0,3} et U =ln(x)

• Alors EU (A) = 0,2ln(100) +0,5 ln50 + 0,3 ln 30 = 3,9

• EMG (B) = 4.1

• EMG (C) = 3.8

• D’où B > A > C

6

Comparaison des loteries et comparaison des distributions de probabilités

• Une décision di est en fait une loterie, ie une distribution de conséquences attachée àune distribution de probabilités :

• De même pour di’ :

• Comme les conséquences peuvent en général être ordonnées, alors il est possible de regrouper toutes les conséquences et de différencier les loteries par leur distribution de probabilités :

( )iiiiii d

n

ddd

n

dd

i pppcccLd ,...,,;,...,, 2121=

( )''''''

,...,,;,...,, 2121

'iiiiii d

n

ddd

n

dd

i pppcccLd =

( )'''

,...,,,,...,,;,...,, 2121221iiiiii d

n

ddd

n

dd

n ppppppcccLD =

7

exemple

504535C

Bus articulé en site protégé

407065B

Bus guidé

3050100A

Tramway

Faible

(0.3)

Moyenne

(0.5)

Élevée

(0.2)

Demande

projet

8

exemple

• L’ensemble des conséquences sur ces 3 loteries est :

• Si on l’ordonne :

• Chaque décision (loterie) peut alors être comparée par sa distribution de probabilité sur l’ensemble des conséquences C

{ }50,45,35,40,70,65,30,50,100=C

{ }100;70;65;50;45;40;35;30=C

{ }100;70;65;50;45;40;35;30=C

( ) { }2.0;0;0;5.0;0;0;0;3.0=AP

{ }100;70;65;50;45;40;35;30=C

( ) { }0;5.0;2.0;0;0;3.0;0;0=BP

{ }100;70;65;50;45;40;35;30=C

( ) { }0;0;0;3.0;5.0;0;2.0;0=CP

9

b) Axiomatique de Von Neumann-Morgenstern

• Par conséquent, si on prend le cardinal des conséquences des toutes les loteries, chaque loterie ne diffère que par sa distribution de probabilités,

• Si on suppose que l’agent dispose d’un préordre completsur les conséquences (relation de préférence et d’indifférence sur les conséquences), alors la définition d’une relation de préférence sur les loteries suffit àcaractériser le comportement vis-à-vis du risque d’un agent,

�Cette relation de préférence doit respecter les axiomes suivants pour que la fonction d’utilité VNM existe :

10

Axiomes d’existence de l’espérance d’utilité

• Axiome 1 de comparabilité. soit p et q 2 distributions de probabilités appartenant à l’espace P, on a :

• Cela implique que toute distribution de probabilités peut être comparée à une autre.

qpqpqpPqp ~soit;soit;soit, pf∈∀

11

Axiomes d’existence de l’espérance d’utilité

• Axiome 2 de transitivité. Soit 3 distributions de probabilité, p, q et z. L’hypothèse de transitivitéimplique que :

• Cette hypothèse correspond à une hypothèse de rationalité parfaite.

zpalorszqetqpsiPzqp fff∈∀ ,,

12

Axiomes d’existence de l’espérance d’utilité

• Axiome 3 d’indépendance. Soit 3 distributions de probabilité, p, q et z et un réel α compris entre 0 et 1. L’hypothèse d’indépendance implique que :

• Cet axiome peut également s’interpréter de la manière suivante :

[ ]

( ) ( )zqzpalors

qpsi

Pzqp

αααα

α

−+−+

∈∀∈∀

1.1.

1,0,,,

f

f

( ) ( ))1(,;,)1(,;, αααα −− zqLzpLalors

qpsi

f

f

13

Axiomes d’existence de l’espérance d’utilité

• Axiome 4 de continuité. Soit 3 distributions de probabilité, p, q et z. L’hypothèse de continuité implique que :

[ ]

( ) ( )zqqzp

tels que :

alors

zqpsi

Pzqp

ββαα

βα

−+−+

∈∃

∈∀

1.1.

1,0,

,,,

ff

ff

14

Axiomes d’existence de l’espérance d’utilité

• Axiome 5 de réduction des loteries composées.

• Un agent doit être indifférent entre une loterie A qui lui donne une probabilitép de gagner x$ et (1-p) de gagner 0$ et une loterie qui lui donne une probabilitéq de gagner une loterie B (x$,0$); (z, (1-z)) et une probabilité (1-q) de gagner 0$ ssi :

• Exemple : un agent doit être indifférent entre une loterie A qui lui donne 25% de chances de gagner 100$ et une loterie qui lui donne 50% de chances de gagner une loterie B qui lui donne 50% de chances de gagner 100$

( ) ( ) ( )( ) ( )pzqzqzq

pzq

−=−−+−+−⇔=×

11111

15

Théorème de VNM

• Si les 5 axiomes précédents sont respectés, alors il existe une fonction u tq :

( ) ( )CuECuEqp

Pqp

qp >∈∀

siseulement et si

,,

f

16

Implication de la concavité des fonctions d’utilité

• Si la dérivée seconde de la fonction d’utilité est négative, alors la fonction est concave, ce qui signifie que plus le niveau de richesse d’un individu est important, moins il est averse au risque,

• Un agent infiniment riche est donc neutre vis-à-vis du risque

17

2. La prime de risque : définition formelle (1)

• Soit U(x) la fonction d’utilité d’un individu

• soit une loterie :

• On a l’espérance mathématique de la loterie :

• Soit l’espérance d’Utilité (VNM) de la loterie :

( ) j j

j

e x p x=∑%

( ) ( )j j

j

e U x p U x= ∑%

( ) ( )1 1,...., ; ,....,J Jx x x p p= %

(1)

(2)

18

La prime de risque : définition formelle (2)

• Soit l’utilité de l’espérance mathématique des gains afférents à la loterie :

• Par définition de l’EU, on peut avoir :

• On appelle Equivalent-Certain d’une loterie :

• étant la prime de risque afférente à cette loterie.

( ) ( )U e x e U x≥< % %

( ) ( ) xec x e x ρ= −%

% %

xρ%

(3)( ) j j

j

U e x U p x

= ∑%

(4)

19

La prime de risque : définition formelle (3)

• Par définition de l’EC, on a forcément :

• Par conséquent, on peut écrire :

• Où est la fonction réciproque de U(x)

[ ] ( ) ( )( ) j j

j

U ec x e U x p U x= = ∑% %

( )1( ) j j

j

ec x U p U x− =

∑%

( )yU 1−

(5)

(6)

20

La prime de risque : définition formelle (4)

• En croisant (4) et (6), on peut écrire la valeur de la prime de risque :

( ) ( )1

x j j

j

e x U p U xρ − = −

∑%

%

21

Un exemple

• Exemple : dans le cas d’une loterie [(50$ ; 150$)(1/2 ; 1/2)] et d’une fonction d’utilité bernoullienne U(x) = ln(x)

• L’équivalent certain est calculé comme suit :

1 1( ) exp (50) (150) 86.6

2 2ec x U U

= + = %

22

Graphique : l’utilité de la loterie pour U(x) = ln(x)

50 60 70 80 90 100 110 120 130 140 150

4.0

4.2

4.4

4.6

4.8

5.0

x

y

23

L’approximation d’Arrow-Pratt (1964) (1)

• On sait que :

• Par définition de l’équivalent-certain de la loterie, on a :

• Supposons une VA :

• Sa moyenne est et sa variance suffisamment petite

• Supposons que la fonction U(.) soit 2 fois différentiable, concave et strictement croissante,

• La prime de risque sur cette loterie s’écrit :

ε~~ += xx

[ ] ( ) ( )( ) j j

j

U ec x e U x p U x= = ∑% %

( )[ ] ( )[ ] ( )[ ]ερε ~,~~ xxUxUexUe −=+=

x2

εσ

( )[ ] ( )[ ]xUexeU x~~

~ =− ρ

24

L’approximation d’Arrow-Pratt (1964) (2)

• Un utilisant la formule des DL d’ordre 2 (expansion de Taylor), on peut écrire, ce pour toute valeur prise par

• Soit compte tenu du fait que est lui-même un paramètre aléatoire :

• Application : supposons que et

que

• Question : en supposant une distribution uniforme de probabilités, montrez que l’équation (2) s’applique en partant de l’équation

(1)

ε~( ) ( ) ( ) ( )xUxUxUxU ''

2'

2

εεε ++≈+ε

ε~ ( )[ ] ( ) ( )xUxUxUe ''2

2

εσε +≈+

{ }1;1~ +−=ε

(1)

(2)

0=x

25

Démonstration par l’exemple

( )[ ] ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( )

( )[ ] ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( )

( )[ ] ( ) ( )xUxUxUe

xUxU

xUxUxU

xUxUe

xUxUxUxUxUxUxUe

''2

1

''4

1

2

'

2

1''

4

1

2

'

2

1

''2

1'1

2

1''

2

1'1

2

122

+≈+⇔

+++

+−≈+⇔

+++

−+−+≈+

ε

ε

ε

12 =εσComme la variance de la loterie est égale à , on a bien :

( )[ ] ( ) ( )xUxUxUe ''2

2

εσε +≈+

26

L’approximation d’Arrow-Pratt (1964) (3)

• Si on reprend l’eqn (2) :

• Comme on suppose queest suffisamment petit, alors la prime de

risque sera également petite, d’où (voir exemple*) :

• Par définition de l’équivalent-certain, on peut écrire que (2)=(1), soit :

• On extrait alors la prime de risque

ε~

( )[ ] ( ) ( )xUxUxUe ''2

2

εσε +≈+

( )[ ] ( ) ( ) ( )xUxxUxxU '~,~, ερερ −≈−

( ) ( )( ) 2'

''~,2

εσερ ×−≈xU

xUx

( ) ( ) ( ) ( ) ( )xUxxUxUxU '~,2

''2

ερσ ε −=+

27

(*) Exemple avec U(x)=ln(x)

• Exemple : dans le cas d’une loterie [(50$ ; 150$)(1/2 ; 1/2)] et d’une fonction d’utilité bernoullienne U(x) = ln(x)

• L’équivalent certain était de 86.6$

• On a bien approximativement :

[ ] ( ) ( )

( ) ( )

144.0605.4461.4

100

14.14100ln6.86ln

100'4.141004.14100

−≈⇔

−≈⇔

−≈− UUU

28

3. Indices d’aversion au risque : Le niveau absolu et relatif d’aversion au risque

• Pour une fonction d’utilitédu type lnx ou racine carrée de x, le principe est que l’utilité marginale de la richesse est décroissante (D. Bernoulli, 1738),

• Par ailleurs, si l’aversion au risque correspond au rapport de la dérivée seconde sur la dérivée première, celle-ci décroit en raison de x

-1

0

1

2

3

4

5

6

0 20 40 60 80 100 120 140

xU

(x) lnx

x 0̂.5

29

Aversion au risque et utilité marginale de la richesse

• Plus généralement, pour des fonctions de type puissance d’une puissance inférieure ou égale à 1 (aversion au risque), l’utilité marginale va être d’autant plus faible que la puissance est faible,

• Si r représente l’indice relatif d’aversion au risque, alors on a :

0

20

40

60

80

100

120

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 80 85 90 95 100

x

x^(1

-r)

r=0

r=0.2

r=0.4

r=0.6

r=0.8

( ) rxxU −= 1

30

Fonctions CARA et fonctions CRRA

• CARA : Constant Absolute Risk Aversion

• CRRA : Constant Relative Risk Aversion

• L’indice Absolu d’Aversion au Risque (IAAR) est une des composantes de la prime de risque :

( )( )

wxX

xU

xU wx

~avec

2'

''

0

2~

0

0

+=

×−= σρIAAR

31

Fonctions CARA et fonctions CRRA

• L’indice Relatif d’Aversion au Risque (IRAR) s’écrit :

• Une fonction d’utilité dont l’IAAR est constant (ne dépend pas de x) est dite CARA

• Une fonction dont l’IAAR est variable et dont l’IRAR est constant est dite CRRA.

( )( ) xxU

xUIRARx ×−=

'

''

32

Exemples de fonction CARA et CRRA

• La fonction U(x) = ln (x) est une fonction CRRA car l’IAAR est égal à 1/x

• La fonction ln(x) est donc une fonction DARA (DecreasingAbsolute Risk Aversion) et une fonction CRRA (l’IRAR est égal à1)

• La fonction exp(x) est CARA car l’IAAR est égal à -1.

• La fonction U(x)=exp(-rx) est une fonction CARA car l’IAAR est égal à r (concrètement fonction type U(x)=cste – exp(-rx)) r>0

• Pour une fonction générique de type , cette fonction est CRRA (IAAR=r/x), l’indice relatif d’aversion au risque étant égal à r

( ) rxxU −= 1

33

L’estimation de la fonction d’utilité du décideur : un exemple

Option A Option B

% de

chanc

e

gain % de

chance

gain %de

chance

gain % de

chance

gain Diff. Gain

espérés

10% 2 euros 90% 1,6 euros 10% 3,85 euros 90% 0,10 euros 1,17 euros 1

20% 2 euros 80% 1,6 euros 20% 3,85 euros 80% 0,10 euros 0,83 euros 2

30% 2 euros 70% 1,6 euros 30% 3,85 euros 70% 0,10 euros 3

0,50 euros

40% 2 euros 60% 1,6 euros 40% 3,85 euros 60% 0,10 euros 4

0,16 euros

50% 2 euros 50% 1,6 euros 50% 3,85 euros 50% 0,10 euros 5

-0,18 euros

60°% 2 euros 40% 1,6 euros 60°% 3,85 euros 40% 0,10 euros 6

-0,51 euros

70% 2 euros 30% 1,6 euros 70% 3,85 euros 30% 0,10 euros 7

-0,85 euros

80% 2 euros 20% 1,6 euros 80% 3,85 euros 20% 0,10 euros 8

-1,18 euros

90% 2 euros 10% 1,6 euros 90% 3,85 euros 10% 0,10 euros 9

-1,52 euros

10 100% 2 euros 0% 1,6 euros 100% 3,85 euros 0% 0,10 euros -1,85 euros

34

Estimation des préférences vis-à-vis du risque : une méthode

• Si on suppose que la fonction d’utilité est de type puissance, alors sur la base des loteries précédentes, on peut faire les calculs suivants– Calculer l’utilité des paiements de chaque loterie avec une fonction de type x^(1-r)

– Calculer les utilités espérées des loteries en pondérant par les probabilités respectives

• La règle est que l’individu choisit A tant que U(A)>U(B) et « switche » sur B quand l’inégalités’inverse…

• Voir loterie.xls

35

Classification des types d’individus

Source : Holt and Laury (2002), AER.

36

Application : questionnaire distribué en cours en décembre 2006, master 2

• Questionnaire 1 = 4 choix A et 6 choix B, donc sujet « neutre vis-à-vis du risque » (r compris entre -0.15 et +0.15 soit 0 en moyenne),

• Questionnaire 2 (2005) = 6 choix A et 4 choix B, donc sujet « averse au risque » (r compris entre +0.41 et +0.68 soit 0.55 en moyenne).

• ….

37

2 4 6 8 10

5

10

15

20

25

30

7,01)(

7,01

+=

+xxU2 choix A

38

2 4 6 8 10

2

4

6

8

85,01)(

85,01

−=

−xxU7 choix A

39

Préférence « moyenne » de la classe (n=10, 6/12/2006)

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

1

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

numéro de la décision

fréq

uenc

e de

cho

ix A

neutre

fréquence observée

3,4 choix A : r = -0.3 « risk loving » à

« risk neutral »

40

Masclet, Colombier, Denant-Boemont & Loheac, 2008, JEBO

72 students + 36 salaries+ 36 self employed

144Choice

(endogeneous, strangers design)

10 periods, sequential, random

order

(3)

72 students + 36 salaries+ 36 self employed

144Groups

(strangers design)10 periods,

sequential, random order

(2)

72 students + 36 salaries+ 36 self employed

144Individuals10 periods, sequential, random

order

(1)

PopulationParticipants number

Who choose?Set of lottery choicesTreatments

41

Proportion of safe choices, sessions 1-4

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Decision

Per

cent

age

choo

sing

A

Individual treat. Group treat. after individual treat. Choice treat Risk neutrality

Groups

become

less risk

averse

42

Importance des gains et aversion au risque (Colombier, Denant-Boemont, Loheac & Masclet, 2007)

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

1

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

décision

Fré

quen

ce d

u ch

oix

A

trait 1 trait2 trait 3 trait4 trait5 neutre au risque

P

P X 20

43

4. Mesures de risque

• Supposons qu’il existe 2 alternatives d’investissement, F et G, avec un résultat stochastique x, x étant compris entre [a,b].

• Si on définit F(x) et G(x) comme étant les distributions de probabilités cumulées respectivement de F et G

• Il est alors possible de classer ces alternatives avec les critères de dominance stochastique de 1er ordre et de 2d ordre.

44

Dominance stochastique de 1er ordre

• La distribution de probabilités F domine stochastiquementla distribution de probabilités G si la probabilité cumulée que la variable prenne une valeur inférieure à x est plus importante dans le cas de la distribution G que dans le cas de la distribution F, càd si :

• Et si pour au moins une valeur de x, l’équation (1) est une inégalité stricte.

• Si F domine stochastiquement G, alors tous les investisseurs avec une

fonction d’utilité non décroissante préféreront F à G.

( ) ( )xGxF ≤ (1)

45

Exemple : DS 1 (Levy & Levy, 2001)

• Soit deux loteries F et G

• F domine stochastiquementau 1er ordre G :

½+25002/3+2500

½-5001/3-500

probaGain /perte

probagains/pertes

GF

46

Dominance stochastique de 2d ordre

• La distribution F domine stochastiquement au 2d ordre la distribution G si l’aire comprise sous la distribution de probabilité cumulée de G jusqu’à G(x) est plus grande que l’aire comprise sous la distribution de probabilité cumulée sous F jusqu’à G(x), ce pour toutes les fonctions d’utilité non décroissantes (DS1) càd si pour tout x :

• Et si, pour au moins une valeur de x, l’équation (2) est une inégalité stricte.

• De manière équivalente, F domine G si pour toute fonction U, U étant une fonction d’utilité non décroissante (DS1) et croissante concave (DS2), on a :

( ) ( ) ( ) ( )[ ]∫∫∫∞−∞−∞−

≥−⇔≤xxx

dyyFyGdyyGdyyF 0 (2)

( ) ( ) ( ) ( )∫∫+∞

∞−

+∞

∞−

≤ xdGxUxdFxU

47

Exemple : DS 2 (Levy & Levy, 2001)

• Soit deux loteries F et G

• G domine stochastiquement au 2d ordre F (G en dessous de F pour au moins 1 x) :

¼+500

½+1500¼+1000

¼+2000

½0¼-500

probaGain /perte

probagains/pertes

GF

48

Implication des critères de DS

• Ainsi un pari F est préféré à un pari G par tous les parieurs si F Domine Stochastiquement G à l’ordre 1

• Si F domine stochastiquement G à l’ordre 2, alors F sera préféré à G par tous les parieurs averses au risque

• Si F domine stochastiquement G à l’ordre 1, F domine stochastiquement nécessairement G à l’ordre 2, mais l’inverse n’est pas vrai.

49

Résultats des expériences de Levy & Levy, 2001

50

5. limites du critère d’UE et résultats expérimentaux

a) Axiome d’indépendance : le paradoxe d’Allaisb) Axiome de transitivité : le renversement des

préférencesc) L’unicité de la fonction d’utilité et l’aversion aux

pertesd) L’aversion à l’ambiguïté et le paradoxe de Ellsberg

51

a) l’axiome d’indépendance et le paradoxe d’Allais

• M. Allais, Prix Nobel d’économie 1989

• Soit deux billets de loterie A et B, lequel choisiriez vous ?

A

15 000 €

0 €

0.09

0.91B

10 000 €

0 €

0.1

0.9

A préféré à B en majorité !

52

Le paradoxe d’Allais

• Soit deux billets de loterie C et D, lequel choisiriez vous ?

C

15 000 €

0 €

0.9

0.1D

10 000 €

0 €

1

0

D préféré à C en majorité !

53

Analyse des choix

• Si A préféré à B et D préféré à C, alors incohérence des choix !

• En effet, supposons que je propose des « loteries de loteries » (loteries composées E et F) de ce type aux individus :

E

D

0 €

0.1

0.9F

C

0 €

0.1

0.9

54

Analyse des choix

• E est une composée de la loterie D et F est une composée de la loterie C

• Les loteries « composées » ne divergent que par la différence entre C et D puisque les probabilités d’obtenir C ou D sont de 0.1 et la probabilité contraire d’obtenir 0€ est de 0.9

• Par conséquent, comme D préféré à C, E devrait être préférée àF… (axiome d’indépendance)

E

D

0 €

0.1

0.9F

C

0 €

0.1

0.9

55

Si on réduit E…

E

0 €

0.1

0.9

10 000

0 €

1

0

E

10 000 €

0 €

0.1

0.9 B !

56

Si on réduit F…

F

0 €

0.1

0.9

15 000

0 €

0.9

0.1

F

15 000 €

0 €

0.1 x 0.9 = 0.09

0.9

A !0 €0.1 x 0.1 = 0.01

F

15 000 €

0 €

0.09

0.01+0.9=0.91

57

Conclusion

• Comme D est préféré à C, E devrait être préféré à F (car E est une composée de D et d’une autre loterie et F est une composée de C et d’une autre loterie identique)…

• … Mais E est en réalité équivalent à B et F est en réalitééquivalent à A.

• Donc si les sujets sont cohérents avec la théorie de l’UE ils auraient dûchoisir B en 1ère étape s’ils ont choisi D en 2de étape (ou choisir A s’ils ont choisi C)

• Si A est préféré à B alors nécessairement C préféré à D ou inversement si B préféré à A alors nécessairement D préféré àC…

• … Mais il est impossible dans la théorie de l’utilité espérée d’observer le résultat A préféré à B ET D préféré à C

• Conclusion : l’utilité espérée ne reflète qu’imparfaitement les mécanismes de choix des individus !

58

b) l’axiome de transitivité et le renversement des préférences

• Q1. Choisissez entre :– A. 18 € avec proba de 30%, 0€ avec proba de 70%– B. 4€ avec proba 100%

• Q2. Choisissez entre :– C. 8 € avec proba de 60%, 0€ avec proba de 40%– B. 4€ avec proba 100%

• Q3. Choisissez entre :– C. 8 € avec proba de 60%, 0€ avec proba de 40%– A. 18€ avec proba 30%, 0€ avec proba 70%

• Une majorité de sujets préfèrent A à B (Q1), puis préfèrent B à C (Q2), et enfin préfèrent C à A (Q3), ce qui est une violation de l’axiome de transivité ( Si A préféré à B et B préféré à C, alors A préfèré à C).

59

Le renversement des préfèrences

• Phénomène dit de « preference reversal »

• Toutefois, explication relativement simple à ce paradoxe :

• Si les sujets réalisent que les loteries diffèrent sur les gains ET sur les probabilités, leurs choix peuvent être fonction d’une combinaison des deux dimensions :– Quand les gains des loteries sont proches, ils vont privilégier la différence de probabilités (Q2 : B préféré à C car gains proches mais certitude pour B ; Q3 : C préféré à A car proba de gain 2 fois supérieure, pour un gain 2.25 fois supérieur)

– Quand les gains des loteries sont éloignés, la différence de gain va compenser la différence de probabilités (Q1 : choix A préféré au choix B car gain 4.5 fois plus grand pour proba 3.33 fois plus faible)

60

c) L’unicité de la fonction d’utilité et l’aversion aux pertes (Kahneman et Tversky)

• … problèmes d’aversion aux pertes et de biais des choix en faveur du statu quo (Kahneman, Knetsch and Thaler, 1991) : les sujets expérimentaux ne valorisent pas les euros de la même manière selon qu’ils sont perdus ou gagnés…,

• Càd que la fonction d’utilité n’est pas forcément la même dans l’espace des pertes ou dans l’espace des gains !

61

Tversky et Kahneman, 1986

• Q1. supposez que vous soyez de 300 $ plus riche qu’aujourd’hui. Que

choisissez-vous ?

– A. un gain certain de 100$ (72%)

– B. 50% de chances de gagner 200$ et 50% de chances de gagner 0$ (28%)

• Q2. supposez que vous soyez de 500 $ plus riche qu’aujourd’hui. Que

choisissez-vous ?

– A. une perte certaine de 100$ (36%)

– B. 50% de chances de perdre 200$ et 50% de chances de ne rien perdre (64%)

• La différence de fréquence dans les réponses aux questions (en gras, en comparant les réponses A et les réponses B pour chaque question), traduit le phénomène d’aversion aux pertes des individus (Voir Eber et Willinger, 2005)

62

La théorie des perspectives (« prospect theory », Kahneman, Tversky, 1979, 1992)

• Hypothèses :1. Dépendance à un point de référence : les individus évaluent leurs

perspectives en termes de gains ou pertes par rapport à un point de référence (statu quo) plutôt qu’en termes de résultat net final,

2. Sensibilité décroissante : la valeur marginale perçue d’un gain ou d’une perte est décroissante,

3. Aversion aux pertes : une perte a davantage d’impact psychologique qu’un gain de même montant.

63

La théorie des perspectives (Prospect Theory) de Kahneman et Tversky (1)

• La théorie des perspectives peut formellement s’écrire :

• Où la fonction transforme les probabilités en poids décisionnels compris entre 0 et 1.

( ) ( )in

i

xvp∑=1

π

( )( )ixpπ

64

Un exemple de fonction de transformation des probabilités

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

1

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1

proba

pie(

p)

65

La théorie des perspectives (2)

• Fonction de pondération des probabilités ̟(p) + fonction de valeurs v(x),• Pour w(p) :

1. ̟(0)=0 et ̟(1)=1 (ie les agents ne déforment pas la certitude),2. Pour de faibles probabilités, ̟(p) > p, mais ̟(p)+ ̟(1-p) ≤ 1 (les agents

surestiment les faibles probas et sous estiment les fortes probas mais le second effet est plus faible que le premier),

3. ̟(pr)/ ̟(p) > ̟(prq)/ ̟(pq) (pour tout ratio de probabilité q, le ratio est plus proche de 1 quand les probas sont faibles que quand les probas sont fortes –exemple : ̟(0.1/ ̟(0.2) > ̟(0.4/ ̟(0.8)

• Pour v(x) :1. V(x) change d’allure à partir du point de référence2. V(x) est concave pour les gains (risquophobie pour les gains) et convexe pour les

pertes (risquophilie pour les pertes), càd v’’(x)<0 qd x>0 et v’’(x)>0 qd x<0 3. V(x) est plus pentue pour les pertes que pour les gains (aversion aux pertes), càd

v(x) < - v(-x) pour x > 0

66

Kahneman, Knetsch and Thaler, 1991

GainsPertes

valeur

67

Quelques problèmes de la TP

• Ne respecte par le principe de dominance stochastique (un agent préfère plus de gain à moins de gain)

• Exemple : soit une VA x+yi avec 3 états équiprobables, x positif et important, yi positif et suffisamment petit

• Si x =1000€ et yi={50€ ; 100€ ; 150€}• Supposons que ̟(p) = {0.34 ; 0.32 ; 0.33} et que v(x)=x1-r avecr=0.5

• Alors v(x) < v(x+yi), ce qui viole la DS puisque yi est strictement positif !

• En effet ̟(1)* v(1000)= 1.(1000)0.5=100• Et ̟(p1)*v(1050) + ̟(p2)*v(1100) + ̟(p3)*v(1150) =• 0.34*(1050)0.5 + 0.32 * (1100)0.5 + 0.33(1150)0.5= 99.5• Ce qui implique que x est préférée à x+yi (une somme certaine est préférée à cette somme certaine + une variable aléatoire dont les réalisations sont strictement positives..

68

d) l’aversion à l’ambiguïté et le paradoxe d’Ellsberg

• Dans une urne, 90 boules

• 30 boules sont rouges, 60 sont blanches ou noires

• Les individus doivent choisir des billets de loteries de manière binaire : on leur propose d’abord de choisir entre E et F, puis entre G et H

• Les gains monétaires sont fonction de leurs choix et du tirage au sort (on tire à l’issue de leur choix une boule dans l’urne dont on leur annonce la couleur, ce qui détermine leur gain)

69

Le paradoxe d’Ellsberg

0 €

100 €

0 €

100 €

Boule blanche

100 €

100 €

100 €

0 €

G

H

0 €

0 €

100 €

0 €

E

F

Boule noireBoule rougeEtats

Décisions

70

Le paradoxe de Ellsberg

• Mis dans cette situation, la majorité des sujets préfèrent E à F et H à G.• Cette réponse n’est pas cohérente avec la théorie de l’utilité espérée (aversion

à l’ambiguïté)• En effet si E préféré à F alors Pr(B) < 1/3☺ Car Pr(R)*100+Pr(B)*0+Pr(N)*0 > Pr(R)*0+Pr(B)*100+Pr(N)*0

↔ Pr (R) > Pr(B)• … mais si H préféré à G alors Pr(B) > 1/3…☺ Car Pr(R)*0+Pr(B)*100+Pr(N)*100 > Pr(R)*100+Pr(B)*0+Pr(N)*100 ↔ Pr

(B) + Pr(N) > Pr(R) + Pr(N)↔ Pr(B) > Pr(R)

• …ce qui est incohérent (la probabilité d’un état ne doit pas dépendre du choix de l’individu, car les probabilités des états sont indépendantes des choix dans le calcul de l’utilité espérée !!!

71

Conclusion

• Remises en causes nombreuses et nourries de la théorie de l’espérance d’utilité,

• Certains économistes ou expérimentalistes ont déjà appelé àl’abandon de cette théorie pour décrire le comportement des individus face au risque au profit de la théorie des perspectives (Camerer, Starmer)

• Toutefois, cette théorie reste de loin la théorie dominante utilisée en économie, la justification étant essentiellement normative (les sujets devraient choisir conformément à l’EU pour maximiser leur BE),

• Par ailleurs, aucune théorie alternative à l’EU ne parvient àintégrer tous les paradoxes expérimentaux, ce qui signifie que l’on sait qu’elles sont également déficientes (même si moins que l’EU)

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