action de groupe et convention d'arbitrage

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  • Master 2 Droit des Contrats

    Action de groupe et convention darbitrage Sous la direction de Monsieur le Professeur Christophe Seraglini

    Maxime Alcina Anne Universitaire 2013-2014 Universit Paris XI Jean Monet

  • 2

    Sommaire

    Partie 1- La convention darbitrage vecteur de remise en cause de la protection des intrts du consommateur ? ............................................................................................ 12

    1- Lutilisation dloyale de la convention darbitrage : lexemple nord-amricain ......... 12 2- La relative protection des consommateurs en droit franais face larbitrage .......... 18

    Partie 2- la convention darbitrage vecteur damlioration de la protection des intrts des consommateurs ? ............................................................................................................. 26

    1- Lopportunit incertaine de larbitrage collectif ........................................................ 27 2- Les obstacles linstauration dune procdure darbitrage de groupe en droit franais ........................................................................................................................................ 31

    Conclusion ....................................................................................................................... 35

    Bibliographie ................................................................................................................... 36

  • 3

    Introduction

    Il ny a ni justice ni libert possible lorsque largent est toujours roi .

    Albert Camus, in Camus Combat, 2002.

    Tout semble les opposer. Dun cot, laction de groupe, fer de lance des rgles

    consumristes labores au soutien du faible. De lautre, la convention darbitrage,

    instrumentum dune justice contractuelle prive au service des possdants. Pourtant, lun et

    lautre de ces mcanismes entretiennent des rapports intenses, troits et ambigus. Tantt

    conflictuelles, tantt fusionnelles, les relations que partagent consommation et arbitrage

    sont un terrain fertile au dveloppement de divers contentieux, larges rflexions et

    processus innovants.

    La justice arbitrale est-elle la mieux mme de trancher les litiges qui opposeraient

    professionnels et consommateurs ? Droit de la consommation et droit de larbitrage

    peuvent-ils tre concilis tout en prservant les garanties de protection des

    consommateurs ?

    Cest par raction plus que par action que le droit de la consommation sest dvelopp et

    affirm comme une figure indispensable la protection des consommateurs tout en

    participant au bon fonctionnement du march. Ainsi, il est propre sappliquer aux relations

    qui existent actuellement ou potentiellement entre professionnels et consommateurs. Sil

    nexistait, jusqu peu, pas de vritable dfinition du consommateur ou du professionnel au

    sein du mme du code de la consommation et que cette question fut lobjet de long et

    sulfureux dbats1, des dfinitions ont nanmoins t proposes. Cest majoritairement sur le

    niveau de comptence de chacun de ces deux protagonistes quelles se construisent. Partant,

    il faut comprendre que le professionnel est avant tout celui qui est comptent, linverse du

    1 J.P. Chazal, Le consommateur existe t-il ? D. 1997 p. 260.

  • 4

    consommateur, lui disposant par nature dun niveau de comptences beaucoup moins lev

    que son oppos2.

    En droit franais, le professionnel peut se dfinir comme la personne physique ou morale

    qui agit dans le cadre d'une activit habituelle et organise de production, de distribution ou

    de prestation de services3 . La notion de consommateur doit tre entendue ngativement,

    en tant que non professionnel, qui conclue des actes qui ne sont pas ncessaires une

    activit professionnelle4. Depuis la loi du 17 mars 2014, le consommateur est dfini comme

    toute personne physique qui agit des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activit

    commerciale, industrielle, artisanale ou librale 5.

    Schmatiquement, le droit de la consommation est construit dune manire duale. Dabord,

    il renferme de nombreuses rgles qui ont pour vocation de protger les intrts des

    contractants faibles en amont de leurs engagements, par llaboration dobligations

    prventives propres leur donner les moyens, thoriques, de sengager en pleine

    connaissance de cause et de chose. En la matire, cest lobligation gnrale dinformation

    est reine6. Ensuite, ses dispositions peuvent aussi trouver sappliquer aprs que le

    consommateur se soit engag, dans une dimension curative, par lapplication de

    mcanismes lui fournissant des armes propres contraindre, en justice sil le faut, le

    professionnel de rtablir un quilibre quil aurait rompu par ses manuvres malicieuses.

    Cest cette seconde nature, plus sanctionnatrice, qui est reste longtemps contestable. En

    effet, si lon peut, dans une certaine mesure, se satisfaire des rgles de protection garanties

    par le Code de la consommation, leffectivit des moyens judiciaires offerts aux

    consommateurs afin de faire entendre et respecter leurs droits en justice est en revanche

    beaucoup plus contestable. Majoritairement, le litige de consommation est par nature petit

    et ne met en jeu que de faibles sommes cot consommateur. Cot professionnel, en

    revanche, cest un tout autre calcul qui doit soprer.

    2 G. Raymond, Contrats de consommation, JCP Conc. Cons, 15 mai 2009. 3 J. Calais-Auloy, J. Steinmetz, Droit de la consommation, Dalloz, 7e d., 2006. 4 P. Malaurie, L. Ayns et P. Stoffel-Munck Droit civil, Les obligations, Defrnois 2008, n 421. 5 Art. prliminaire du Code de la consommation. 6 Art. L 111-1 al. 1 du Code de la consommation : Tout professionnel vendeur de biens doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connatre les caractristiques essentielles du bien.

  • 5

    Partant, le lgislateur franais a tent de prendre en compte la ralit conomique du litige

    de consommation en ouvrant la voie dune forme de recours collectif indirect avec laction

    en reprsentation conjointe7. Cette procdure innovante se solda par un chec cuisant

    puisquelle ne fut actionne qu 5 reprises depuis sa cration en 1992 et dcrie comme

    une vritable action mort ne 8, participant au renforcement la franaise du dficit

    chronique de moyens juridiques. Il tait crit que lefficacit des dispositions protectrices du

    Code de la consommation ne passerait que par la voie du vritable recours collectif,

    permettant aux consommateurs de se regrouper pour unir leurs forces et restaurer un

    quilibre port disparu depuis trop longtemps.

    De nombreux Etats, forts de la prise de conscience des ncessits de dvelopper des modes

    de recours collectifs, ont dcid de franchir le cap de lintroduction dactions collectives dans

    leurs systmes juridiques. Si ce mcanisme trouve sa source dans une pratique de

    lAngleterre mdivale9, cest aux Etats-Unis10, au milieu du XXme sicle, quelle fut

    popularis sous le terme de class action. Sil nexiste pas de forme commune de class action,

    elle peut toucher de nombreux domaines11 tout en sadaptant aux nombreuses spcificits

    juridiques des Etats, elle peut tre dfinie communment comme une action introduite par

    une personne pour le compte de toute une srie de personne ayant des droits identiques, qui

    aboutit au prononc dun jugement ayant autorit de force juge lgard de tous les

    membres de la classe (groupe) 12 . Lessor de cette procdure outre-Atlantique tient

    notamment au fait quelle est souvent accompagne dune hypermdiatisation pour se

    transformer, parfois, en vritable luttes des classes, combats conomiques ou cologique

    entre pots de terre et pot de fer. En 1993, la Pacific Gas Company fut contrainte verser plus

    de 333 millions de dollars dindemnits aux victimes de sa pollution des eaux

    californiennes13, plus rcemment, la socit Ferrero fut contrainte verser 4 dollars de

    7 Art. L. 422-1 L. 422-3 du Code de la consommation. 8 L. Bor, Laction en reprsentation conjointe : class action franaise ou action mort ne ? D. 1995 p. 267. 9 S.C Yeazell, From medieval group litigation to the modern class action, Yale University Press, 1987. 10 Art. 23 Federal Rules Of Civil Procedure (FRCP). 11 Le Brsil a par exemple opt pour une class action ouverte au droit de la consommation alors quIsral la tendue aux valeurs mobilires. 12 S. Piedelivre, Droit de la consommation, Economica. Pour une autre dfinition, voir G. Jahan, Doit-on importer les class action en France pour mieux dfendre le consommateur ? Gaz. Pal. 19 octobre 2008, n292, p.20. 13 Erin Brokovich, seule contre tous, ralis par Steven Soderbergh, 2000.

  • 6

    ddommagement par amricain ayant achet un pot de Nutella entre 2008 et 2012 pour

    un cot total de plus de 3 millions de dollars14.

    Lintroduction, ou non, en France dun mcanisme de class action, fut lobjet dun long et

    sulfureux dbat. Si les organismes de dfense des consommateurs, politiques, auteurs ont

    rclam lintroduction dun mcanisme quivalent dans le systme juridique franais depuis

    plus de 30 ans15, ce projet fut un temps oubli. Cest en 2005 lors des vux du Prsident de

    la Rpublique aux forces vives de la nation que le projet repris vie alors quil fut demand au

    gouvernement de proposer une modification de la lgislation pour permettre des groupes

    de consommateurs et leurs associations dintenter des actions collectives contre les

    pratiques abusives observes sur certains marchs. En parallle, la Commission europenne

    affirma a plusieurs reprises sa faveur ladmission dactions de groupe au sein des Etats

    membres de lUnion Europenne 16 , y soulignant la fois des ncessits dordre

    concurrentiel tenant la lutte contre les ententes et les abus de position dominante17, et

    des ncessits quant leffectivit de la protection des consommateurs18.

    Malgr les avantages indniables de la procdure de class action en terme deffectivit des

    garanties accordes aux consommateurs19, les diffrents travers rencontrs aux Etats-Unis

    furent des obstacles majeurs lentre en vigueur dune action de groupe en France. Parmi

    ceux-ci, on peut relever la multiplication des procdures envers les socits les plus riches20,

    le chantage exerc leur gard pour les contraindre transiger, les risques trop levs de

    dstabilisation du march ou lincitation des clients par les avocats grassement rmunrs21.

    Par la mme, les rticences taient justifies par les atteintes potentielles certains aspects

    14 Top 10 Class-Actions Lawsuits, http://www.cnbc.com/id/35988343. 15 Rapport de la commission de refonte du droit de la consommation, prside par Jean Calais-Auloy, Proposition pour un nouveau droit de la consommation, Doc. Fr, 1985 ; S. Guinchard, Une class action la franaise ? D. 2005, p. 2180. 16 Recommandation Commission Europenne - IP/13/524, 11 juin 2013. 17 Livre blanc du 2 avril 2008 sur les actions en dommages et intrts pour infraction aux rgles communautaires sur les ententes et les abus de position dominante, COM(2008)165 . 18 Livre vert du 27 novembre 2008 sur les recours collectifs pour les consommateurs, COM(2008) 794. 19 C. Habibi, C. Philibert, Lintrt des class actions dans le traitement judiciaire des dommages de masse, LPA 25 mars 2014 n60 p. 18. 20 Pratique du deep-pocket. 21 Rapport d'information de MM. Laurent BTEILLE et Richard YUNG, fait au nom de la commission des lois n 499 (2009-2010) - 26 mai 2010.

  • 7

    de la tradition juridique franaise dont notamment le heurt du principe selon lequel nul ne

    plaide par procureur 22.

    La voie de la raison semble lavoir finalement emport puisque la loi Hamon n2014-344 du

    17 mars 2014 est venue introduire dans notre droit une vritable action de groupe la

    franaise insre aux articles L.423-1 L. 423-26 du Code de la consommation23. Petit pas

    ou pas de gant pour certains 24 , dsormais, une association de dfense des

    consommateurs, reprsentative au niveau national () peut agir devant une juridiction civile

    afin dobtenir la rparation des prjudices individuels subis par des consommateurs placs

    dans une situation similaire et ayant pour origine commune un manquement dun ou des

    mmes professionnels ses obligations lgales ou contractuelles 25.

    Il sagit dune vritable action de groupe la franaise assortie de ses propres spcificits26.

    Outre le monopole daction des associations de consommateurs agres27, elle est reste

    cantonne au seul droit de la consommation pour les prjudices patrimoniaux 28 . Sa

    procdure se dcompose en trois tapes successives. La premire concerne le jugement, qui

    va permettre au juge du Tribunal de grande instance de statuer sur la responsabilit du

    professionnel et de dfinir le groupe de consommateurs concern tout en y fixant les

    critres de rattachement ainsi que les prjudices susceptibles dtre rpars et les lments

    permettant lvaluation de ce prjudice29.

    La deuxime tape concerne ladhsion au groupe par les consommateurs, selon les rgles

    de lopt-in, induisant que seuls ceux ayant manifest leur volont seront considrs comme

    appartenant au groupe. Ce mcanisme a par ailleurs t confirm par le Conseil

    22 Cons. Cons, 25 juillet 1989 DC n89-257. 23 G. Raymond, Actualit : impact de la loi n2014-344 du 17 mars 2014 sur le droit de la consommation, JCP. Conc., Conso, 17 avril 2014. 24 J-P. Grandjean, action de groupe : petit pas ou pas de gant ? JCP. G n40, 30 sept. 2013, 1007. 25 Art. L. 423-1 al 1 du Code de la consommation. 26 K. Haeri, B. Javaux, Laction de groupe la franaise, une curiosit. JCP G n13 31 mars 2014, 375 ; M. Bacache, Introduction de laction de groupe en droit franais propos de la loi n2014-344 du 17 mars 2014, JCP G n13 31 mars 2004, 377. 27 J-D Bretzner, Ombres et lumires autour de la qualit pour agir dans laction de groupe, Gaz. Pal, 16 mai 2013 n136, p. 31. 28 Art. L. 423-1 du Code de la consommation. 29 Art. L. 423-3 du Code de la consommation.

  • 8

    constitutionnel dans sa dcision du 13 mars 201430 dans laquelle il a soulign que cela

    prservait la possibilit quont les consommateurs de poursuivre la rparation individuelle

    de leur prjudice. Cest le juge qui dterminera les mesures ncessaires la publicit propre

    permettre aux consommateur dtre informs de laction, elle seront la charge du

    professionnel et ne pourront tre mises en uvres quune fois les voies de recours

    puises31, il fixe les modalits dadhsion au groupe et le dlai pour y adhrer, compris

    entre 2 et 6 mois aprs la fin des mesures de publicit32.

    Enfin, la troisime et dernire tape consiste la mise en uvre du jugement et permettre

    aux consommateurs ayant adhr au groupe dtre indemniss individuellement par le

    professionnel33.

    Il est important de noter que le lgislateur a instaur la possibilit pour lassociation de

    consommateur dengager une procdure de mdiation avec le professionnel dont lventuel

    accord devra faire lobjet dune homologation judicaire34. Enfin, toujours dans un souci de

    favoriser le rglement rapide des litiges, il est possible de procder par la voie de laction de

    groupe simplifie dans lhypothse o l'identit et le nombre des consommateurs lss sont

    connus et quils ont subi un prjudice d'un mme montant. Le juge, aprs avoir statu sur la

    responsabilit du professionnel, pourra condamner ce dernier les indemniser directement

    et individuellement, dans un dlai et selon des modalits qu'il fixera35.

    Linstauration de laction de groupe dans le systme juridique franais reprsente donc une

    avance considrable en matire de protection et de garantie des droits des consommateurs

    afin que les dispositions protectrices ne restent pas lettre morte, elle leur permet dsormais

    denvisager sereinement de parvenir faire valoir efficacement leurs intrts, mmes

    minimes, devant un juge.

    30 Cons. Cons, 13 mars 2014 DC n2014-690. 31 Art. L 423-4 du Code de la consommation. 32 Art. L 423-5 du Code de la consommation. 33 Art. L 423-11 du Code de la consommation. 34 Art. L 423-15 du Code de la consommation. 35 Art. L 423-10 du Code de la consommation.

  • 9

    Ce qui nous amne sur le terrain de larbitrage, cest la question de savoir si les dispositions

    protectrices du droit de la consommation ne pourraient pas ventuellement voir leur

    applicabilit remise en cause. Une convention darbitrage, en ce quelle a pour effet de

    soumettre ses parties une procdurale arbitrale, ne risque t-elle pas de remettre en

    question lordre public protecteur instaur par le lgislateur pour protger le

    consommateur?

    La convention darbitrage peut tre dfinie comme la convention par laquelle les parties

    dcident de faire trancher par un ou plusieurs arbitres les litiges dj ns ou naitre en

    elles 36. Elle est par ailleurs assortie dune double nature puisquelle peut prendre la forme

    la fois dune clause compromissoire ou dun compromis darbitrage et la distinction

    formelle entre les deux tient un critre temporel, savoir si le litige est dj n ou pas.

    Ainsi la clause compromissoire est la convention par laquelle les parties un ou plusieurs

    contrats s'engagent soumettre l'arbitrage les litiges qui pourraient natre relativement

    ce ou ces contrats , alors que le compromis est la convention par laquelle les parties

    un litige n soumettent celui-ci l'arbitrage 37.

    Trs tt dj, dans larrt Prunier de 184338, la nature conflictuelle des rapports entre

    arbitrage et protection de la partie faible se manifesta. La Cour de cassation dcida de priver

    deffet la clause compromissoire insre dans un contrat conclu entre un assureur et un

    assur dans le cadre de ce qui serait aujourdhui un contrat dadhsion. Elle y voyait pour les

    parties faibles un risque de se faire imposer une procdure arbitrale dans des contrats dont

    elles ntaient pas en mesure de ngocier les termes et refusa quune telle clause ne se

    gnralise au pril des intrts des parties faibles. Dj, il apparaissait que la justice

    arbitrale ntait pas la mieux adapte lorsquun dsquilibre dcoulait de la relation

    contractuelle. Pourtant, comme le relve Philippe Delebecque, il existe un vritable dcalage

    entre droit de larbitrage interne et droit de larbitrage international en matire de clauses

    compromissoires insres dans des contrats de consommation internationaux, consacrant

    36 J. Ortscheid, C. Seraglini, Droit de larbitrage interne et international, Montchestien, p. 79. 37 Art. 1442 du Code de procdure civile. 38 Cass. Civ., 10 juillet 1843, S.1843, 1, p. 561 ; Rev.arb. 1992, 399 et 259.

  • 10

    ainsi un droit de la consommation deux vitesses 39. En effet, si Le droit interne reconnat,

    au contraire du compromis darbitrage, linvalidit de la clause compromissoire insre dans

    un contrat de consommation puisquelle aurait pour effet de mettre en jeu des droits

    indisponibles, il en va autrement en droit international o il est reconnu que la clause

    compromissoire insre dans un contrat de consommation est efficace.

    Larbitrage, lorigine mode de rsolution alternatif des litiges, est devenu si vertueux pour

    les acteurs du commerce international que certains auteurs en sont amens se demander

    sil est encore vritablement un mode alternatif de rglement des diffrends40. Son essor

    tient au fait quil est loutil de rsolution des litiges qui sadapte le mieux aux exigences des

    professionnels en terme de confidentialit et de clrit, et permet en mme temps de

    prserver un bon fonctionnement du march en rduisant les temps de procdure,

    favorisant la mdiation ainsi que par les dcisions mesures, parfois rendues en quit.

    Malgr des cots certains, larbitrage reprsente une vritable alternative la justice

    tatique41 et son succs dans le monde des affaires nest plus dmontrer. On voit toute la

    contradiction entre une justice arbitrale payante qui tend se librer des modalits dune

    procdure tatique qui ne rpond plus efficacement aux besoins dun commerce libralis et

    la nature mme du litige de consommation qui par ses faibles cots ne justifierait presque

    jamais la saisine dun juge tatique, encore moins celle dun tribunal arbitral, ainsi, pour

    Charles Jarrosson, en matire de litige de la consommation, le jeu n'en vaut pas la

    chandelle 42.

    La puissance de laction de groupe est telle qucomporte de nombreux risques juridiques et

    conomiques que les socits qui en feraient lobjet ne peuvent pas ignorer43. Ainsi il est

    dans leur intrt dlaborer des stratgies visant rduire au maximum les risques encourus

    par un ventuel recours collectif, notamment par lusage de la convention darbitrage, qui

    est cense carter la comptence des tribunaux tatiques au profit des tribunaux arbitraux.

    39 P. Delebecque, Arbitrage et droit de la consommation, Rev. Droit et Patrimoine 2002 p. 104. 40 I. Beyneix, L-C Lemmet, Larbitrage international est-il encore vritablement un mode alternatif de rglement des diffrends ? RTD Com. 2012 p. 225. 41 D. Vidal, Droit franais de larbitrage commercial international, d bilingue franais/anglais, Gualino 2004. 42 C. Jarrosson, Rev.arb., 1996,781 43 Les recours collectifs et stratgie juridique internationale, les stratgies de rduction du risque de class action dans un cadre international, Centre europen de droit et dconomie de lESSEC, 28 avril 2011, Revue Lamy de la Concurrence 2011.

  • 11

    Lensemble de ces considrations nous amne constater quaction de groupe et

    convention darbitrage entretiennent des relations complexes. Ds lors, la question

    laquelle nous tenterons de rpondre au long de ce travail est savoir quelle influence exerce

    la convention darbitrage sur les nouvelles dispositions protectrices qui permettent aux

    consommateurs dintenter une action de groupe devant le juge tatique.

    Nous analyserons dune part le rapport conflictuel quiil existe entre laction de groupe et la

    convention darbitrage (1re partie), avant de nous consacrer au rapport fusionnel

    quentretiennent action de groupe et convention darbitrage (2me partie).

  • 12

    Partie 1- La convention darbitrage vecteur de remise en cause de la

    protection des intrts du consommateur ?

    Lentre en vigueur de dispositions protectrices nest pas sans remettre en cause les intrts

    conomiques de certains acteurs sur le march. Laction de groupe nayant jamais encore

    t utilise en droit franais, il est indispensable de sinspirer et danalyser les

    problmatiques souleves par la confrontation entre les actions collectives et le recours

    larbitrage en Amrique du nord (1), avant deffectuer un travail prospectif en se

    demandant si et comment les mmes problmatiques destructrices des protections

    accordes aux consommateurs peuvent tre rencontres en France, ce qui nous poussera

    nous demander si une clause darbitrage insre dans un contrat de consommation est

    efficace alors quelle est susceptible de porter atteinte une matire dordre public, en

    somme, lexercice dun recours collectif (2).

    1- Lutilisation dloyale de la convention darbitrage : lexemple nord-

    amricain

    Il sagira dune part de mettre en exergue les problmatiques (A), avant denvisager les

    rponses apportes par les juridictions. (B).

    A- le constat

    Le droit de la consommation nest pas une matire relevant de la comptence rationae

    materiae exclusive des juges tatiques nord-amricains. Les arbitres ne sont donc pas privs

    du pouvoir de trancher un litige qui opposerait un professionnel un consommateur. Nous

    pourrions voir dans cet lment, coupl lexistence de la procdure de class action, une

    faveur opportune la garantie daccs la justice des consommateurs pour faire valoir leurs

    droits. Cependant, comme indiqu prcdemment44, les class actions prsentant des enjeux

    conomiques colossaux pour les entreprises, certaines dentre elles, pour se protger des

    44 Les recours collectifs et stratgie juridique internationale, les stratgies de rduction du risque de class action dans un cadre international, Centre europen de droit et dconomie de lESSEC, 28 avril 2011, Revue Lamy de la Concurrence 2011.

  • 13

    risques lis aux recours collectifs, ont eu recours un usage dloyal des clauses darbitrage

    en les dtournant de leur finalit afin dempcher les consommateurs dintenter des recours

    collectifs. Cela nous ramne lessence mme de la justification lintroduction de laction de

    groupe en France, savoir que les demandes potentielles tant trop faibles pour tre juge

    individuellement, en soumettant obligatoirement un arbitrage, les professionnels excluent

    la possibilit quun groupe de consommateurs puisse se constituer pour obtenir ce que seuls,

    les consommateurs nauraient jamais obtenu. De surcroit et de manire plus surprenante, il

    serait envisageable que des professionnels, malgr des lgislations interdisant les clauses

    darbitrage obligatoire dans les contrats de consommation, introduisent diffrentes clauses

    de rglement pralable des litiges afin ou dvincer une class action, ou tout du moins den

    retarder au plus son dclenchement.

    Lexemple le plus parlant dune telle manuvre se retrouve dans laffaire Dell, dans laquelle

    la Cour suprme du Canada avait considr que la clause compromissoire ne permettait pas

    aux consommateurs dintenter un recours collectif45. En lespce, la socit Dell, spcialise

    dans la vente de matriel informatique, avait par erreur affich des prix de vente

    exceptionnellement bas sur son site internet de vente en ligne. Se rendant compte de cette

    bvue, la socit informa ses acheteurs de son refus de donner suite aux commandes

    effectues pour ces produits. En raction, lun des acheteurs, soutenu par lUnion des

    Consommateurs, dposa une requte auprs dune Cour suprieure en autorisation

    dexercer un recours collectif contre la socit Dell au nom de tous les consommateurs qui

    avaient vu leurs commandes refuses. La dfenderesse leur opposa que les juges tatiques

    ntaient pas comptents pour connatre de ce litige puisque les contrats de vente taient

    assortis dune clause compromissoire et que par consquent, le litige devait tre renvoy

    larbitrage. La Cour suprieure puis la Cour dappel considrrent que la clause darbitrage

    tait inopposable au requrant. La Cour suprme du Canada va, linverse de ces dcisions,

    considrer que lexistence dune clause compromissoire dans un contrat de consommation

    peut potentiellement neutraliser le recours aux tribunaux tatiques, notamment en matire

    de recours collectifs46.

    45 Dell Computer Corp. c/ Union des Consommateurs, 2007 CSC 34. 46 D. Buisson, En qute de larbitrage collectif : La jurisprudence qubcoise aurait-elle donn naissance une nouvelle procdure hybride ? in La justice en marche : du recours collectif larbitrage collectif, Les journes Maximilien-Caron, d. Thmis 2006 p. 79 ; M. De Fontmichel, Arbitrage et actions de groupe les leons Nord-Amricaines, Rev. Arb., 2008 n4 P.

  • 14

    Certains auteurs47 ont sembl apercevoir une attnuation de la rigueur de cette position

    dans la dcision Dell depuis que la Cour suprme du Canada stait positionne plus

    modrment dans laffaire Seidel de 201148, en considrant que les clause compromissoire

    et de renonciation expresse tout droit dintenter un recours collectif ou dy participer

    contenues dans un contrat dadhsion taient nulles en ce quelles privaient le

    consommateur de la possibilit dintenter un recours collectif devant une juridiction

    tatique. Il faut prciser que cette affaire reposait sur des circonstances despce trs

    particulires. Une dcision divergente Kerry Murphy49 de 2013 semble stre range dans le

    sens de la dcision Dell50.

    A linstar des pratiques observes au Canada, les professionnels amricains ont eux aussi pris

    linitiative dinsrer des clauses darbitrage dans les contrats conclus avec leur clientle,

    notamment dans les contrats dadhsion et certaines sont mme alles jusqu introduire

    des clauses interdisant expressment dintenter un recours collectif, aussi connues sous le

    nom de class action waivers.

    Cette analyse fait donc ressortir que les protections accordes aux consommateurs sont

    incertaines en ce quelles peuvent tre contournes par la voie de larbitrage. Il est difficile

    de se satisfaire dune telle situation et ce problme na pas manqu dtre pris en compte

    par les tribunaux.

    648 ; S. Bachand, L.Y. Fortier, La nouvelle loi franaise sur larbitrage : vues dOutre-Atlantique, Cah. de larbitrage, 1 janvier 2013 n1, P. 9. 47 P. Bienvenu, M. Valasek, La Cour suprme du Canada a t-elle chang de cap en matire darbitrage ? Commentaire sur larrt Seidel v. Telus Communications Inc., Cah. de larbitrage, 1 juillet 2011, n3, P. 799. 48 Seidel c. TELUS Communications Inc., 2011 CSC 15, [2011] 1 R.C.S. 531. 49 Murphy v. Amway Canada Corporation, 2013 FCA 38 (CanLII). 50 Clauses darbitrage priv, renonciations aux recours collectifs et Loi sur la concurrence du Canada, Actualit juridique : http://www.nortonrosefulbright.com/files/clauses-darbitrage-prive-renonciations-aux-recours-collectifs-et-loi-sur-la-concurrence-du-canada-pdf-288kb-77940.pdf.

  • 15

    B- la raction

    A priori, ces constatations nous amneraient penser qu choisir entre limprativit de

    larbitrage et limprativit des dispositions protectrices des consommateurs, cest la faveur

    larbitrage qui semble lemporter.

    Cependant, certaines dcisions semblent aller contre courant cette lopinion majoritaire en

    reconnaissant clairement le caractre abusif, ingal et inquitable de linsertion de telles

    clauses. Ainsi, au dbut des annes 80, dans une affaire Keating v. Superiour Court51, la Cour

    suprme californienne avait considr quen cas de silence de la clause darbitrage, il est

    possible de concilier larbitrage et le recours collectif. Sont ainsi poses les prmices de la

    procdure darbitrage de groupe, la class action arbitration. Les juges, soucieux de garantir

    la protection des consommateurs, vont faire le choix astucieux de donner effet la clause

    darbitrage sans pour autant priver les consommateurs de la force dont ils disposent

    lorsquils se regroupent. Par la mme, cette solution tend naller ni lencontre des rgles

    impratives de protection des consommateurs, ni lencontre des rgles impratives

    garantes de la primaut de larbitrage sur les juridictions tatiques.

    Sans rentrer dans le dtail de ltude du mcanisme de la class arbitration sur lequel nous

    reviendrons dans la suite de notre travail, il convient nanmoins de prciser que la

    procdure de class arbitration consiste, comme en matire de class action, permettre un

    groupe de demandeur de se constituer pour intenter une action devant une juridiction

    arbitrale plutt que de le faire devant une juridiction tatique.

    Plus rcemment, laffaire Bazzle v. Green Tree Financial Corp.52 est venue apporter des

    prcisions sur les relations quentretiennent procdure de class action et la convention

    darbitrage. Lespce portait sur des contrats de prts assortis dune clause compromissoire

    51 Keating v. Superior Court, 645 P. 2d 1192 (Cal. 1982), Larbitrage collectif : Une solution pour les consommateurs ? , Etude prsente au Bureau de la consommation dIndustrie Canda par Option consommateurs, juin 2007, p 12 ; M. De Fontmichel, Arbitrage et actions de groupe les leons Nord-Amricaines, Rev. Arb., 2008 n4 P. 648. 52 Green Tree Financial Corp. V. Bazzle 123 S.Ct 2402 (2003) ; E. Ordway, B. Derains, Gaz. Pal. Arbitrage, 8 novembre 2003 n312, P. 49 ; M. De Fontmichel, Le faible et larbitrage, sous la direction de Th. Clay Universit de Versailles Saint-Quentin, 2011, cop. 2013, Economica. P. 132.

  • 16

    base sur le Federal Arbitration Act. Les juridictions de Caroline du Sud saisies considrrent

    que le recours collectif demand par les requrants tait possible, mais quil devait se

    drouler sous la forme dun arbitrage. Devant la Cour suprme des Etats-Unis, la socit

    Green Tree, organisme de crdit, soutenait en somme quen application de la clause

    darbitrage, le litige ne pouvait tre soumis une procdure de class action. La Cour refusa

    ce moyen et considra, en se fondant sur le principe de comptence-comptence, quil

    appartenait larbitre et non aux juridictions tatiques ou fdrales de se prononcer sur la

    possibilit dintenter un recours collectif dans le cadre mme dune procdure darbitrage.

    Mme si la Cour suprme ne se prononce pas totalement sur la validit de la class action

    arbitration, il nen demeure pas moins que la possibilit de cumuler la procdure arbitrale

    avec le recours collectif semble tre admise et la dcision relve de la comptence arbitrale.

    Malgr cette solution qui, du point de vue de la protection du consommateur, semble tre

    satisfaisante, une dcision de la Cour suprme des Etats-Unis est venue remettre en

    question ces avances. Dans laffaire AT&T v. Conception53, les poux Conception taient

    opposs la socit AT&T, ils reprochaient cette dernire de leur avoir factur un prix

    pour des tlphone mobile annoncs gratuits dans la publicit de la socit. Il sagissait en

    lespce dun contrat dadhsion assorti dune clause compromissoire qui interdisait

    expressment le recours collectif et devant les juges tatiques et devant les juridictions

    arbitrales. Un recours collectif fut nanmoins intent, ce quoi la socit AT&T opposa les

    termes de la clause compromissoire. Les juges californiens saisis donnrent raison aux

    requrants qui soutenaient que la clause compromissoire ne pouvait tre applicable en ce

    quelle inquitable compte tenu des dispositions lgislatives californiennes protectrices du

    consommateurs.

    A linverse, la Cour Suprme considra que dans des contrats de consommation, une clause

    darbitrage prvoyant expressment une interdiction tout recours collectif tait valable.

    Elle fait directement prvaloir les dispositions du Federal Arbitration Act sur la lgislation

    53 AT&T Mobility LCC v. Conception USC 09-883 (2011) ; M. Rezzouk, Les class actions lamricaine en question Les recours collectifs, quels enjeux stratgiques et conomiques ? Centre europen de droit et dconomie de lESSEC, 28 avril 2011, Revue Lamy de la Concurrence 2011 ; C. Anadon, La class action amricaine est-elle en danger ? Revue Lamy Droit des affaires 2010, P. 55. P. Pietrois-Chabassier, AT&T Mobility LLC v. Concepcion: lvolution Outre-Atlantique face au conservatisme franais, soumis le 24/04/2012, Universit Paris Ouest Nanterre La Dfense, Arbitrage International, Master dtudes bilingues des droits de lEurope.

  • 17

    protectrice californienne. Cest une solution qui peut certes paratre abrupte en matire de

    protection des consommateurs et trs favorable aux professionnels, mais comme le relve

    Monsieur De Fontmichel dans ses travaux, la socit proposait un arbitrage individuel gratuit

    pour le consommateur proximit de son domicile. Ainsi, les professionnels peuvent, en

    fonction des termes de la clause compromissoire et en offrant la partie rpute faible une

    action individuelle quitable, se protger contre toute demande collective son encontre54 .

    Dans cette dcision, les juges justifirent leur position en soutenant que le recours la class

    action arbitration ne concorderait pas avec les avantages mme de larbitrage. Notamment

    dans le fait que qu linverse de la class arbitration qui implique une procdure lourde,

    publique et fastidieuse, larbitrage est une justice de vitesse qui doit sappuyer sur une

    procdure peu formelle55.

    Ce raisonnement a par ailleurs t raffirm rcemment dans laffaire Compucredit Corp et

    al. v. Greenwood et al. de 201256 , puisque la Cour suprme amricaine a considr que le

    Federal Arbitration Act devait primer sur le Credit Repair Organization Act, texte assurant

    des protections des consommateurs en matire de crdit et sur lequel ils staient fonds

    pour intenter une class action, et quainsi, une clause compromissoire insre dans un

    contrat conclu entre un professionnel et un consommateur devait recevoir application en

    dpit de lexistence de ces dispositions protectrices.

    Dans le dbat qui oppose la prminence de lautonomie de la volont, fondement mme

    de la convention darbitrage, celle de la prservation des dispositions consumristes, la

    tendance semble donc dfinitivement se tourner dans le sens de larbitrage.

    Si certains peuvent se montrer sceptiques quant cette dcision pour le moins svre

    lgard des consommateurs, il nen demeure pas moins que larbitrage collectif est un mode

    alternatif de rglement des litiges en expansion. Des institutions darbitrage telles que

    lAmerican Arbitration Association ou le Judicial Arbitration and Mediation Services ont 54 M. De Fontmichel, Le faible et larbitrage, sous la direction de Th. Clay Universit de Versailles Saint-Quentin, 2011, cop. 2013, Economica. P. 135. 55 P. Billiet, Class Action in the European Union, Maklu, 2013, P. 8. 56 Compucredit Corp et al. v. Greenwood et al No. 10948. Argued October 11, 2011Decided January 10, 2012 ; C.L.G, Clause compromissoire et consommateur : cest possible, Revue Lamy de Droit Civil, 2013 p. 100.

  • 18

    adopt des rglements spcifiques la procdure de class arbitration et le nombre

    darbitrages collectifs na cess daugmenter aux Etats-Unis, dune centaine administrs par

    lAAA en 2006 prs de 300 en 201157.

    Laction de groupe tant devenue un recours effectif en droit franais, il convient dsormais

    de sinterroger sur une ventuelle transposition des problmatiques observes en Amrique

    du nord en France qui seraient de nature remettre en cause les protections accordes aux

    consommateurs franais.

    2- La relative protection des consommateurs en droit franais face

    larbitrage

    A titre liminaire, il convient de prciser quen matire darbitrage, au contraire des

    lgislations trs librales rencontres en Amrique du Nord notamment, mais aussi, plus

    proches, en Espagne et au Portugal, qui admettent larbitrabilit des litiges de

    consommation, le champ de comptence rationae materiae laiss aux tribunaux arbitraux

    franais savre beaucoup moins tendu. Au sein mme des rgles franaises, il existe une

    disparit en la matire entre le droit de larbitrage interne et le droit de larbitrage

    international. A laune de ces lments, nous envisagerons dabord si une convention

    darbitrage interne pourrait tre de nature remettre en cause lexercice de laction de

    groupe (A), avant de nous tourner vers la mme situation mais dans le cas dune convention

    darbitrage internationale impliquant un consommateur international (B).

    A- Limprobable remise en cause de lexercice dune action de groupe au

    regard du droit de larbitrage interne

    Le droit de la consommation franais est une matire trs fortement teinte de

    considrations dordre public dans le sens o il vise prserver les intrts dindividus

    57 B. Le Bars, R. Kaminsky, Class arbitration : une solution alternative la class action franaise ?, Dcideurs Stratgie Droit Finance, 4 fvrier 2014 ; G. Born, The U.S. Supreme Court and Class Arbitration: A Tragedy of Errors, Kluwer Arbitration Blog, 1 juillet 2011.

  • 19

    considrs en situation de faiblesse lgard de leur cocontractant58, lalina 4 de larticle L

    132-1 du Code de la consommation relatif aux clauses abusives affirme expressment que

    les dispositions du prsent article sont d'ordre public . Cest la nature profondment

    dsquilibre du rapport contractuel entre ces deux acteurs qui doit guider le raisonnement

    qui permettra de savoir si, comme en Amrique du nord, le caractre impratif de larbitrage

    pourrait ventuellement tre mme de porter atteinte une protection anime par lordre

    public.

    Partant, il est difficile dimaginer que larticle L 423-1 du Code de la consommation qui fonde

    lexercice dune action de groupe par une association de consommateurs agre

    reprsentative au niveau national pourrait trouver ne pas tre appliqu ds lors quil

    existerait une convention darbitrage liant les consommateurs reprsents par lassociation

    un professionnel. Deux hypothses sont nanmoins envisager, le droit franais

    subdivisant la convention darbitrage entre la clause compromissoire et le compromis

    darbitrage.

    La clause compromissoire, tout dabord, se dfinit comme la convention par laquelle les

    parties un ou plusieurs contrats sengagent soumettre l'arbitrage les litiges qui

    pourraient natre relativement ce ou ces contrats 59, nest valable que dans les contrats

    conclus raison dune activit professionnelle, sous rserve des dispositions lgislatives

    particulires60, a contrario, elle ne lest pas dans les contrats conclus entre professionnels et

    consommateurs. Par ailleurs, elle nest valable que si toutes les parties exercent une activit

    professionnelle la date de sa signature61. On peut donc constater ici a faveur accorde la

    prservation des intrts de la partie faible qui pourraient tre atteints en cas dimposition

    dun arbitrage, laissant toute place lexercice dune action de groupe dans le cas o les

    conditions seraient runies. Certains pourraient en revanche voir dans larticle L 132-1 du

    Code de la consommation une attnuation du principe dinvalidit des clauses

    compromissoires. Ce texte prvoit quune clause est abusive ds lors quelle a pour effet de

    crer un dsquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au dtriment du 58 J. Hauser et J.-J. Lemouland, Ordre public et bonnes murs, Rpertoire de droit civil, Dalloz, mars 2004 (MAJ 2014), n82. 59 Art. 1442, al 2, du Code de procdure civile. 60 Art. 2061 du Code civil, L. n2001-420, 15 mai 2001, JO 16 mai ; Ch. Jarrosson, Le nouvel essor de la clause compromissoire, JCP G 2001, I, 333. 61 Cass. 1re civ. 29 fvr. 2012, n11-12.782.

  • 20

    non professionnel ou du consommateur. Le texte renvoie en outre une liste indicative de

    clauses, dont notamment celle qui aurait pour objet ou effet de supprimer ou dentraver

    lexercice dactions en justice ou de voies de recours par le consommateur, notamment en

    lobligeant saisir exclusivement une juridiction darbitrage non couverte par des

    dispositions lgales 62. Ds lors, la clause compromissoire ne serait pas, comme lexprime a

    contrario larticle 2061 du Code civil, invalide ds lors quelle est insre dans un contrat de

    consommation, mais simplement rpute abusive au sens de larticle L 132-1 du Code de la

    consommation, laissant la possibilit au professionnel de dmontrer quelle ne cre pas de

    dsquilibre significatif au dtriment du consommateur63.

    Nous pourrions tre tents daffirmer que ce raisonnement nest que thorique et lon voit

    mal, en pratique, comment une telle situation pourrait ne pas tre abusive puisquelle

    conduirait clairement obstruer la voie laction de groupe au bnfice dun arbitrage

    individuel. Mais de surcroit, dsormais, cette protection vient se coupler avec le nouvel

    article L 423-25 du Code de la consommation qui, au titre des dispositions diverses sur

    laction de groupe, indique quest rpute non crite toute clause ayant pour objet ou effet

    d'interdire un consommateur de participer une action de groupe . Ds lors, il reviendra

    au professionnel de dmontrer que la clause darbitrage est valable et ne remet pas en

    cause la possibilit pour un consommateur de participer une action de groupe. Alors si

    thoriquement, une telle dmonstration reste possible, encore une fois en pratique, on voit

    mal comment la clause compromissoire naurait pas pour effet de limiter la possibilit pour

    un consommateur dadhrer une action de groupe. On peut donc affirmer que la remise en

    cause de lexercice futur dune action de groupe par linsertion dune clause compromissoire

    au sein dun contrat de consommation est un exercice impossible, ce qui constitue une

    confirmation dans la tendance daugmentation de la protection des consommateurs.

    Pour Philippe Delebecque, larbitrage ne saurait pntrer le droit de la consommation, du

    moins sur le fondement dune clause compromissoire, le compromis restant concevable dans

    les conditions du droit commun 64. En effet, linverse de la clause compromissoire, la

    62 C. Seraglini, Les parties faibles face l'arbitrage international : la recherche d'un quilibre, Cah. arb. vol. IV, Pedone, d. 2008, p. 49. 63 Art. R 132-2 Code de la consommation. 64 P. Delebecque, Arbitrage et droit de la consommation, Rev. Droit et Patrimoine 2002, op cit.

  • 21

    validit du compromis darbitrage nest pas remise en cause. Rappelons que le compromis

    darbitrage est la convention par laquelle des parties en litige dcident de faire trancher

    celui-ci par un ou plusieurs arbitres65. Larticle 2059 du Civil dispose ce titre que toutes

    personnes peuvent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition , entendu

    donc que le consommateur peut valablement compromettre une fois le litige n, puisque les

    droits protgs par lordre public sont devenus disponibles. Dans ses travaux, M. De

    Fontmichel remarque que le droit franais de larbitrage ne considre pas utile de protger

    la partie faible dans un compromis darbitrage puisquelle nest plus considre comme ayant

    accept le recours larbitrage par crainte de ne pas conclure le contrat convoit 66. Le

    compromis apparat donc comme linstrument ultime de manifestation de volont des

    parties de se soumettre une procdure arbitrale. Il ne peut pas, par nature, se rapprocher

    des formes dun contrat dadhsion puisquil requiert un consentement exprs des parties.

    Pour M. Ousmane Diallo, conclu aprs la survenance du litige, il exprime une relle

    prfrence pour ce mode de rglement 67.

    A ce titre, dans un arrt du 25 fvrier 201068, la premire Chambre civile de la Cour de

    cassation a considr que les stipulations dun compromis darbitrage conclu entre un

    professionnel et un consommateur ne pouvaient tre remises en cause en application des

    dispositions relatives aux clauses abusives de larticle L 132-1 du Code de la consommation.

    En effet, les juges distinguent entre le fond et la forme en soutenant que le compromis

    darbitrage nest pas une clause figurant dans un contrat conclu entre un consommateur et

    un professionnel mais bien un contrat part entire et que par consquent il ne pouvait tre

    dclar abusif. En parallle, le nouvel article L 423-25 du Code de la consommation semble

    se placer dans la ligne de cette dcision puisque il nvoque que le cas de la clause. Lacte de

    volont que constitue le compromis sera prserver. Implicitement, cela se montre en

    adquation avec les rgles de lopt-in qui laissent la possibilit aux consommateurs de rester

    silencieux sils nentendent pas adhrer laction de groupe. Hypothtiquement, le

    consommateur qui prfrerait passer individuellement par la voie de larbitrage plutt que 65 J. Calais-Auloy, H. Temple, Droit de la consommation, Dalloz, 8me dition. 66 M. De Fontmichel, Le faible et larbitrage, sous la direction de Th. Clay Universit de Versailles Saint-Quentin, 2011, cop. 2013, Economica. P. 281. 67 O. Diallo, Le consentement des parties larbitrage international, PUF 2010. 68 Civ. 1re, 25 fvr. 2010, Guichard c/ Association gnrale de prvoyance militaire vie, RTD. Com. 2012 p. 520, note E. Loquin ; A. Plissier, Le compromis d'arbitrage n'est pas une clause abusive, JCP G n 24, 14 Juin 2010, p. 659.

  • 22

    par le recours collectif ne serait pas susceptible de voir la sentence arbitrale rendue en effet

    du compromis darbitrage remise en cause.

    Bien que la dcision de 2010 fragilise la position du consommateur en rejetant la primaut

    de la police des clauses abusives, il nen demeure pas moins que sa porte ne semble pas

    exercer une forte influence sur le domaine de laction de groupe. En effet, lhypothse

    consisterait envisager que le professionnel convainque lensemble des consommateurs

    placs dans une situation similaire ou identique en leur qualit de victime de conclure un

    compromis darbitrage, ce qui impliquerait des moyens logistiques colossaux, ne serait-ce

    que pour se mettre en contact avec leurs clients. A linstar du raisonnement adopt en

    matire de clause compromissoire, la protection accorde au consommateur en lui

    reconnaissant la possibilit dintenter une action de groupe ne semble pas rellement

    pouvoir tre remise en cause. Il sagira dsormais de se poser les mmes questions en

    matire internationale.

    B- La remise en question thorique de lexercice dune action de groupe au

    regard du droit de larbitrage international

    Sil est clair que larticle 2061 du Code civil prohibe indirectement linsertion dune clause

    compromissoire dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur, et

    par la mme rend difficile, voir impossible, que lexercice dun recours collectif puisse tre

    entrav par le jeu dune convention darbitrage, il en va bien autrement lorsque la relation

    entre ces deux parties implique des ordres juridiques nationaux distincts.

    Larticle 150469 du Code de procdure dfinit larbitrage international comme celui qui met

    en cause des intrts du commerce international. La jurisprudence est cependant venue

    prciser que la commercialit ne constituait pas une condition pour que larbitrage soit

    international. La 1re Chambre civile de la Cour de cassation na pas manqu de raffirmer ce

    principe dj solidement consacr 70 en rappelant que linternationalit de larbitrage

    69 Ancien article 1492 du Code de procdure civile. 70 C. Seraglini, Les parties faibles face l'arbitrage international : la recherche d'un quilibre, Cah. arb., vol. IV, Pedone, d. 2008, p. 52.

  • 23

    sapprcie au travers dune dfinition conomique selon laquelle il suffit que le litige soumis

    larbitre porte sur une opration qui ne se dnoue pas conomiquement dans un seul

    Etat71. En consquence, il faut retenir que les litiges de consommation internationaux et

    larbitrage international ne sont pas des notions incompatibles. Cette dcision, couple un

    arrt Zanzi du 15 janvier 1999 qui avait consolid les distorsions entre droits interne et

    international de larbitrage en affirmant que la prohibition de la clause d'arbitrage en

    matire civile, dicte par l'article 2061 du Code civil, est sans application nest une rgle de

    droit interne, non applicable dans l'ordre international72.

    Partant, priorit est donc donne la procdure arbitrale et il est devient tout fait

    envisageable quune multiplicit de contrats de consommations internationaux chacun

    assortis dune clause darbitrage puissent entrer dans le champ dapplication dun arbitrage

    international. Concrtement, des consommateurs pourraient se retrouver parties un

    arbitrage qui ne leur serait en tout et pour tout pas dans leurs intrts. Cela nous amne

    donc nous interroger sur la question de la validit dune telle clause et de ses

    consquences quant lventualit dune entrave lapplication des dispositions

    protectrices relevant de lordre public interne.

    A ce titre, un parallle indispensable avec laffaire Rado73 doit tre fait. Lespce portait sur

    un consommateur franais, Madame Rado, qui, suite un dmarchage domicile, avait

    conclu une convention douverture de compte auprs dune socit amricaine New-

    yorkaise en lui donnant mandant pour grer les fonds et cest ainsi plus de 400 000 dollars

    qui avaient t investis. Quatre mois plus tard, le solde du compte tait devenu dbiteur et

    le consommateur avait saisi le Tribunal de grande instance de Paris afin de rcuprer ses

    fonds. La socit sopposa la comptence du TGI en invoquant la clause compromissoire

    contenue dans la convention qui prvoyait un arbitrage aux Etats-Unis sous lgide de la

    National Futures Association, alors que le consommateur soutenait la nullit manifeste de la 71 Civ. 1re, 26 janv. 2011, n 09-10.198, B. Moreau Rpertoire de droit commercial, Dalloz 2009 (MAJ janv. 2014). 72 Cass. civ. 1re, 15 janvier 1999, Zanzi, Bull. civ. I, no 2, C. Seraglini, Les parties faibles face l'arbitrage international : la recherche d'un quilibre, op. cit ; J. P. Ancel, L'attractivit du droit franais pour l'arbitrage international dans L'arbitrage des conflits commerciaux en France et aux Etats-Unis , LPA 13 dcembre 2007 n 249, p. 21. 73 Cass. 1re civ. 30 mars 2004, Rado c/ Painewebber, E. Loquin, RTD Com. 2004 p. 447 ; I. Najjar, Clause compromissoire et consommation de produits financiers, D. 2004 p. 2458 ; Th. Clay, Arbitrage et modes alternatifs de rglement des litiges : panorama 2005, D. 2005, p. 3050.

  • 24

    clause. Cette affaire a t loccasion pour les juges de confirmer le raisonnement adopt

    dans laffaire Jaguar de 1997 74 . En effet, la Cour, aprs avoir retenu le caractre

    international de lopration litigieuse, considra quen labsence de nullit manifeste, la

    clause compromissoire devait recevoir application en vertu de lindpendance dune telle

    clause en droit international sous la seule rserve de lordre public international quil

    appartiendra aux arbitres de mettre en uvre sous le contrle du juge de lannulation pour

    vrifier leur propre comptence, spcialement en ce qui concerne larbitrabilit du litige .

    Force est donc donne larbitre, en vertu du principe de comptence-comptence, de

    rpondre lui mme la question de larbitrabilit du litige de consommation qui lui est

    soumis.

    Rapportes la question du respect des dispositions impratives internes qui permettraient

    dintenter une action de groupe, ces considrations ne semblent pas vraiment sorienter

    vers la protection des consommateurs. En effet, comme le relvent Messieurs Eric Loquin et

    Christophe Seraglini dans leurs travaux, en outre des nombreux obstacles matriels et

    logistiques qui se dresseraient sur la route du consommateur qui entreprendrait de remettre

    en cause la sentence arbitrale, notamment la participation un arbitrage tranger,

    linconvnient majeur rside dans lillusoire contrle du juge de lannulation. Ds lors, le

    non respect des dispositions impratives franaises pourrait ventuellement inciter le juge

    de lannulation intervenir seulement dans le cas o la dcision trouverait tre excute

    en France, ce qui ntait pas le cas en lespce. A linverse, si lexquatur dune sentence

    arbitrale dans laquelle larbitre serait suppos avoir respect les rgles impratives internes

    tait demande, alors le juge tatique pourrait procder un contrle du respect de ces

    dispositions par la sentence, encore que la violation devra tre flagrante, effective et

    concrte.

    Quid de larticle L. 423-25 du Code de la consommation ? La clause compromissoire insre

    dans un contrat de consommation international doit-elle tre rpute non crite lorsquelle

    a pour effet dinterdire au consommateur de participer une action de groupe ? A priori, au

    regard de ces dveloppements, notre position serait de dire quil reviendrait larbitre, en 74 Cass, 1re civ 21 mai 1997, Rev. arb. 1997.537, note E. Gaillard.

  • 25

    vertu du principe de comptence-comptence dappliquer lui mme cette rgle. En

    revanche, le critre de la nullit manifeste aperu dans laffaire Rado pourrait trouver

    sappliquer plus facilement.

    Mme sil est pour le moment encore difficile dimaginer la concrtisation de telles

    hypothses qui remettraient en cause lexercice dune action de groupe tout juste ne en

    droit interne, alors que nous nous trouvons sur le terrain du droit international, cette

    problmatique mritait dtre tudie car leuropanisation du droit de la consommation ne

    saurait faire abstraction longtemps de la dfense collective des consommateurs une

    chelle europenne. Ainsi, la possibilit pour les professionnels dinsrer des clauses

    compromissoires dans les contrats de consommations deviendrait, linstar des exemples

    amricains, un moyen de se prmunir contre les risques judiciaires dune action de groupe

    intente par des consommateurs ressortissants dEtats membres de lUnion Europenne

    contre un professionnel lui aussi ressortissant 75 et il deviendrait alors indispensable

    dinnover afin de garantir leffectivit de toute la lgislation consumriste europenne.

    La convention darbitrage peut donc potentiellement apparatre comme un vecteur de

    remise en cause de la protection du consommateur. Mais il serait rducteur de sarrter

    cette conclusion. Partant, il convient de se demander si, linverse, la convention darbitrage

    ne pourrait pas tre un vecteur damlioration de la protection du consommateur.

    75 C. Pietro, Cohrence europenne des recours collectifs, rponse la consultation publique de la Commission europenne, Collection Trans Europe Expert vol. 2, UMR Droit compar de Paris.

  • 26

    Partie 2- la convention darbitrage vecteur damlioration de la protection

    des intrts des consommateurs ?

    Le presque mode de juridiction de droit commun quest devenu larbitrage en matire de

    commerce international ne fait aujourdhui plus aucun doute. La nature informelle, rapide et

    confidentielle fait de larbitrage un mode aim et reconnu de rglement des litiges entre les

    divers acteurs du commerce international. Cependant, cette justice prive, mais payante,

    implique la mise uvres de cots certains, parfois colossaux pour que la procdure arbitrale

    prenne vie et que les commerants puissent songer voir leur litige tranch. Une tude

    comparative des cots dun arbitrage devant les plus importantes institutions darbitrage

    mene en 2010 par messieurs Louis Flannery et Benjamin Garell publie par la Global

    arbitration Review76, fait ressortir que les cots prominents de larbitrage ne sont pas une

    lgende. Par exemple, devant la Chambre de commerce international, pour un litige mettant

    en jeu 10 millions de dollars, le cout de larbitrage slverait en moyenne plus de 400 000

    dollars, pour plus de 800 000 dollars lorsque le litige implique met en jeu plus de 100

    millions de dollars.

    Partant, il nest pas insens de se montrer sceptique quant considrer que la justice

    arbitrale, en tant que mode de rsolution privilgi des litiges entre possdants, na pas sa

    place sur le terrain du droit de la consommation. Pourtant, force est de constater qu

    linstar de lessence du mcanisme tatique de la class action, la fois garant des intrts

    des consommateurs et rgulateur du march, le modle innovant aperu aux Etats-Unis de

    procdure de class action arbitration, aussi arbitrage de groupe, pourrait bien redistribuer

    les cartes. Cette procdure nous amne cette fois placer notre au niveau des effets de la

    convention darbitrage. Ainsi, il sera ncessaire denvisager la dsirabilit et lopportunit

    dun tel mcanisme pour garantir les intrts des consommateurs (1) avant de sattacher

    aux considrations pratiques dune ventuelle intgration en France (2).

    76 L. Flannery et B. Garell, Arbitration costs compared: the sequel, Global Arbitration Review, 15 janvier 2013, disponible ladresse suivante : http://www.shlegal.com/Asp/uploadedFiles/File/Newsletters/2013_newsletters/Arbitration_costs_compared-GAR 15_January_2013.pdf.

  • 27

    1- Lopportunit incertaine de larbitrage collectif

    Avant denvisager les consquences de larbitrage de groupe (B), ce mcanisme mrite que

    nous nous attachions au pralable le caractriser (A).

    A- Les caractristiques de larbitrage collectif

    Dans une premire partie, nous avions constat que lutilisation dloyale de la convention

    darbitrage par les professionnels qui la dtournaient de sa finalit conduisait assurment,

    tout du moins aux Etats-Unis, porter srieusement atteinte aux intrts des

    consommateurs qui pouvaient alors tre privs dexercer un recours collectif devant un juge

    tatique contre une socit peu vertueuse.

    Ainsi, dans des affaires Keating v. Superiour Court77 et Bazzle v. Green Tree Financial Corp.78,

    les juges tatiques amricains avaient considr quune convention darbitrage et lexercice

    dune class action ntaient pas incompatibles au sein mme de la seule procdure arbitrale,

    laissant le soin larbitre, en vertu du principe de comptence-comptence, de se prononcer

    sur lopportunit dune telle alliance. Par ailleurs, mme si cette conciliation nest pas sans

    susciter quelques critiques, lunion entre larbitrage et le recours collectif procdure semble

    aujourdhui admise, plusieurs grandes institutions darbitrage comme lAmerican Arbitration

    Association (AAA) ou le Judicial Arbitration and Mediation Services (JAMS) ont dailleurs

    adopt des rgles propres rgir une telle procdure79. A ce titre, on peut noter une

    sentence arbitrale rendue en 2007 en lapplication des rgles de lAmerican Arbitration

    Association dans laquelle le tribunal arbitral a considr que la clause darbitrage en cause

    tait de nature couvrir larbitrage dune action de groupe. En lespce, la socit

    dfenderesse navait identifi aucune norme ou principe connu en arbitrage international

    invalidant larbitrage des class actions. Un bmol doit cependant tre appos quant la 77 Keating v. Superior Court, 645 P. 2d 1192 (Cal. 1982), Larbitrage collectif : Une solution pour les consommateurs ? , Etude prsente au Bureau de la consommation dIndustrie Canda par Option consommateurs, op. cit. ; M. De Fontmichel, Arbitrage et actions de groupe les leons Nord-Amricaines, op. cit. 78 Green Tree Financial Corp. V. Bazzle 123 S.Ct 2402 (2003) ; E. Ordway, B. Derains, op.cit. ; M. De Fontmichel, Le faible et larbitrage, op. cit. 79 P. Billiet, Class arbitration in the European Union, Maklu ; G. Born, The U.S. Supreme Court and Class Arbitration: A Tragedy of Errors, Kluwer Arbitration Blog, 1 juillet 2011.

  • 28

    porte de cette sentence en matire de protection des consommateurs, puisquelle

    concernait le domaine boursier80. Dans le mme sens, lAllemagne, pionner europen, a elle

    aussi rejoint le rang des Etats qui se sont dots dune procdure darbitrage collectif

    cependant limite au domaine boursier dans le cadre des litiges impliquant des actionnaires

    ou des dirigeants en application des DIS Supplmentary Rules for Corporate Law Dispute81.

    Ce corps de rgles prvoit en somme une exclusion explicite tout recours devant une Cour

    de droit tatique. Enfin, la class arbitration semble aussi tre admise dans le cadre dun litige

    opposant un Etat des plusieurs investisseurs, en effet, dans laffaire Ambiente Ufficio S.P.A

    and Others v. The Argentine Republic82, un tribunal arbitral avait retenu sa comptence dans

    une procdure entame par plus dune centaine de demandeurs.

    Larbitrage de groupe peut revtir plusieurs dnominations, ainsi les qualificatifs darbitrage

    collectif, de class arbitration, class action arbitration, classwide arbitration ou encore

    arbitrage des actions de groupe renvoient tous la mme notion83. Daprs Philippe Billiet,

    lorsque lon parle de class arbitration, il sagit tout simplement dune class action intente

    devant le for arbitral84, pour Bernard Hanotiau, il sagit de larbitrage initi par un groupe

    dindividus.

    On peut donc dire que larbitrage collectif est un mode hybride de rsolution alternatif des

    litiges qui permet un groupe de consommateurs victimes dun prjudice commun dagir

    devant une juridiction arbitrale contre un mme dfendeur pour obtenir rparation de ce

    prjudice.

    Concrtement, la procdure darbitrage collectif qui apporte le plus grand nombre de

    prcisions sur la manire dont un groupe consommateurs pourrait exercer un recours est

    80 L. Mitrovic, Arbitrage des actions de groupe : un metteur averti en vaut deux, Les Echos n20117, 25 fvrier 2008, p.15. 81 Introduction and arbitration clause for the supplementary rules for corporate law disputes, http://www.dis-arb.de/de/16/regeln/dis-supplementary-rules-for-corporate-law-disputes-09-srcold-id15. 82 Ambiente Ufficio S.P.A and Others v. The Argentine Republic, ICSID Case nARB/08/9, 8 fvr. 2013, note B. Remy, JDI Clunet n1, Janvier 2014. 83 B. Hanotiau, Complex Arbitrations, Multiparty, Multicontract, Multi-issue and class actions, Kluwer Law International. 84 Class arbitration, which is a class action taking place in the arbitration forum , P. Billiet, Class arbitration in the European Union, Maklu, p. 11.

  • 29

    celle prvue par lAAA85, adopte peu aprs la dcision Green Tree. Il est intressant de

    noter les trois tapes caractristiques de la procdure de lAAA en la matire86. Larbitre

    devra dabord analyser la clause darbitrage afin de savoir si elle permet ou non denvisager

    un recours collectif dans le cadre de la procdure arbitrale et rendra une premire sentence.

    Si la rponse est positive, larbitre devra ensuite procder la class certification , et ainsi

    dterminer si tous les membres supposs de la class sont bien dans une situation similaire,

    tant au niveau du prjudice que de la convention darbitrage. La class arbitration ne sera

    admise uniquement sil apparat quelle est plus efficace que toute autre mthode pour un

    traitement quitable et efficace du litige. Aprs notification de la dcision de larbitre aux

    membres de la class potentiellement identifis, ces derniers disposeront dun dlai de 30

    jours pour contester la position de larbitre devant un juge tatique87. Cette lgislation a fait

    le choix de application du systme de lopt-out, en vertu duquel seuls les membres qui en

    ont fait demande expresse seront exclus de la classe. Cest uniquement lexpiration de

    cette procdure que larbitre pourra statuer sur le fond du litige.

    B- Lopportunit controverse de larbitrage collectif

    Dans lesprit, reconnatre la possibilit dun arbitrage de groupe revient accorder un

    maximum defficacit la convention darbitrage, sans pour autant remettre en cause les

    garanties de protection qui sont reconnues aux consommateurs par les dispositions

    lgislatives.

    Si lon ne voit pas bien les avantages que pourrait retirer un consommateur dune procdure

    arbitrale, larbitrage de groupe, en revanche, serait alors un moyen, linstar du recours

    collectif exerc par la voie tatique, de corriger le dsquilibre qui pourrait exister entre les

    parties si le consommateur devait se dfendre seul devant un tribunal arbitral, ce qui lui

    confre un effet positif certain. Group, le consommateur incarne une vritable puissance

    propre affirmer fermement ses intrts. Ds lors, le groupe, pris en cette qualit dagent

    85 Supplementary Rules for Class Arbitrations, disponible ladresse suivante : https://www.adr.org/aaa/faces/rules/searchrules/rulesdetail?doc=ADRSTG_004129&_afrLoop=303313977902713. 86 B. Hanotiau, Complex Arbitrations, Multiparty, Multicontract, Multi-issue and class actions, op. cit. ; M. De Fontmichel, Le faible et larbitrage, op. cit. ; G. Nater-BassNA, Class Action Arbitration : A New Challenge ?, Kluwer Law International 2009, vol. 27 Issue 4. 87 Les rgles du JAMS noffrent pas un tel dlai.

  • 30

    conomique puissant, devient un vritable acteur du fonctionnement du march interne et

    international, et sera surtout en mesure de rivaliser avec les professionnels puisque le

    dsquilibre financier originel sera corrig. Larbitrage de groupe serait alors exerc entre

    deux parties aux forces gales et permettrait leur permettrait, chacune de bnficier des

    avantages dune procdure arbitrale.

    Larbitrage de groupe reste avant tout un arbitrage. Ds lors, mme si la procdure serait

    alourdie par rapport un arbitrage classique, les traits caractristiques de la procdure

    arbitrale continueront jouer. Ainsi, linstar des arbitrages collectifs observs aux Etats-

    Unis, il pourra sagir dune action plus rapide que laction de groupe tatique, bnficiant de

    lexpertise des arbitres et des institutions qui ont labor leurs propres rgles pour encadrer

    le droulement de la procdure, pouvant favoriser plus rapidement le rglement amiable du

    litiges par la voie de la mdiation.

    Au contraire de cet avantage certain, une partie de la doctrine prfre retenir de ce

    mcanisme latteinte quil porte lessence mme de la procdure arbitrale qui doit rester,

    pour ne pas tre dnature conforme aux caractristiques qui ont fait son succs, une

    procdure rapide, confidentielle et informelle, linverse dune procdure de recours

    collectif qui repose sur une procdure trs formelle ainsi que des exigences leves de

    publicit, notamment lors de la phase qui permettra tous les consommateurs qui

    rpondent aux critres dintgrer le groupe.

    Au del de ces critiques procdurales, la libert de choix laisse larbitre pour savoir si

    lexercice dun recours collectif est ou non possible et opportun va crer une certaine

    inscurit juridique que les dfenseurs des socits commerciales ne manqueront pas de

    relever. Nous lavons dj remarqu, mais tout recours collectif intent contre une socit,

    mme non aboutissant, lui fera supporter des cots importants. Ainsi, ces dernires

    cherchent adopter des stratgies pour se prmunir de tels risques, comme la cration dun

    service aprs vente, une campagne de communication cible, des offres compensatoire, voir

    mme cr leur propre systme de rsolution des conflits avec leur clientle. Le simple fait

    de rester soumis un choix incertain cre donc un climat qui ne garantit pas un

    fonctionnement sain du march.

  • 31

    En outre, mme si la nature protectrice de larbitrage collectif nest pas remise en cause, on

    peut se demander si et pourquoi il faudrait, pour assurer la protection des consommateurs,

    remettre en cause la nature mme de lInstitution arbitrale. A cela, certains rpondront

    quau contraire, cest la force de lautonomie de larbitrage qui lui permet de fusionner avec

    une voie de recours dorigine tatique.

    2- Les obstacles linstauration dune procdure darbitrage de groupe en

    droit franais

    Mme sil existe de nombreux obstacles linstauration dune procdure darbitrage de

    groupe en France, nous tenterons denvisager comment, laune de la rcente procdure

    daction de groupe, ils pourraient tre surmonts. Ces contraintes manent dune part des

    questions darbitrabilit (A) et dautre part des principes fondamentaux de procdure (B)

    A- La question de larbitrabilit

    Mme si lintroduction de laction de groupe marque une avance dans le respect des

    garanties protectrices accordes au consommateur, en ltat actuel du droit franais, le juge

    tatique reste pour linstant le seul comptent pour juger des litiges mettant en cause la

    relation tablie entre un professionnel et un consommateur. Alors que la procdure hybride

    darbitrage collectif a pu se dvelopper aux Etats-Unis puisque les litiges de consommation y

    sont arbitrables, lincomptence rationae materiae des tribunaux arbitraux en matire

    interne pour les litiges de consommation constitue un obstacle important lintroduction

    dun arbitrage de groupe en France. Nous relverons que le compromis darbitrage, la

    diffrence de la clause compromissoire, constitue une exception ce principe, puisquun

    consommateur peut y tre valablement partie. Dans le mme temps, il apparat presque

    impossible denvisager le dveloppement dune procdure darbitrage de groupe sur le

    fondement dun compromis darbitrage.

  • 32

    Cependant, si lon prend en compte les caractres spcifiques les contrats internationaux

    assortis dune clause compromissoire, lincomptence rationae materiae des tribunaux

    arbitraux ne constituerait plus un obstacle lapplication dun arbitrage de groupe. Alors

    pourquoi serait-il irrel de penser quune multiplicit de consommateurs internationaux

    tenus par une convention darbitrage et lss de la mme manire par un professionnel ne

    pourrait pas valablement se regrouper devant un for arbitral pour faire valoir efficacement

    leur droit rparation ? Le droit international, marqu par une plus grande souplesse que le

    droit interne, semblerait donc mieux mme de constituer un terrain favorable laccueil

    de la procdure darbitrage de groupe. Peut tre faudrait-il prciser qu limage de la

    dcision Green Tree de la Cour suprme amricaine, la question de savoir si la convention

    darbitrage permet ou non lexercice dun recours collectif dans le cadre dune instance

    arbitrale devrait relever de la comptence unique de larbitre.

    B- Les questions de procdure

    Avant tout, il faut observer que laction de groupe franaise permet de la constitution du

    groupe selon la technique de lopt-in qui implique que les consommateurs qui souhaitent

    faire partie du groupe doivent manifester expressment une telle volont. Dans le cadre

    dun arbitrage de groupe, lapplication de la technique de lopt-in viendrait prserver la

    nature consensuelle de larbitrage. Les rgles de laction de groupe en France ne permettent

    qu une association de consommateur agre de mettre en uvre cette procdure. Ainsi,

    on pourrait imaginer que le recours collectif devant le tribunal arbitral serait non pas exerc

    directement par les consommateurs, mais bien par une seule et mme entit, charge par

    les consommateurs dagir en leur nom. Cela aurait en outre comme avantage de permettre

    aux consommateurs qui souhaitent intgrer le groupe de rejoindre lassociation au cours de

    linstance.

    Un autre obstacle tient la constitution du tribunal arbitral et la nomination des arbitres

    ainsi que le soulve par M. Billiet dans ses travaux88. Il constate que daprs le systme de

    larbitrage collectif amricain, les membres de la class absents nont pas la possibilit de

    88 P. Billiet, Class arbitration in the European Union, Maklu, p. 40.

  • 33

    participer au choix dun arbitre puisque les arbitres sont nomms par les reprsentants de la

    class pour le compte des membres actuels et futurs de la class, qui ne pourraient pas

    participer la nomination des arbitres. En parallle, le dfendeur se retrouverait lui dans

    une situation o il ne serait pas en mesure de nommer les arbitres comme il aurait pu le

    faire en cas darbitrages individuels. Or cette pratique pourrait ventuellement aller

    lencontre de la rgle consacre dans larrt Dutco du 7 janvier 1992 selon laquelle le

    principe dgalit entre les parties dans la dsignation des arbitres est dordre public89. Le

    non respect de ce principe aurait pour effet de remettre en cause la validit de la

    constitution du tribunal arbitral.

    Face cela, on pourrait penser que le fait que ce soit une association de consommateur

    unique qui reprsente le groupe rsolve ce problme en ce quelle est reprsentative dun

    ensemble de consommateurs devant le tribunal arbitral. Ainsi, le processus de nomination

    des arbitres aurait lieu uniquement entre la socit dfenderesse et lassociation requrante

    ce qui permettrait que le principe dgalit entre les parties soit respect.

    Larbitrage pourrait aussi potentiellement prsenter un avantage srieux en terme de

    tribunal comptent compte tenu de lautonomie du for arbitral par rapport tout loi

    tatique. Cette autonomie permettrait en effet de prvenir tous les risques de forum

    shopping qui pourrait favoriser lun ou lautre des acteurs au litige.

    Pour le moment, en droit franais, les limites thoriques lemportent clairement sur les

    avantages pratiques dont dispose larbitrage de groupe. Mme sil est vident quadmettre

    larbitrage de groupe aurait des effets bnfiques en matire de protection des

    consommateurs mais aussi sur le fonctionnement du march, il est encore trop tt pour

    lenvisager. La question nest pas encore de savoir si la possibilit dexercer un recours

    collectif peut tre admise devant un tribunal arbitral, mais plutt de savoir comment va

    rellement sappliquer la toute jeune procdure daction de groupe. Ces considrations ne

    sont pour autant pas dnues dintrts si lon place dans une optique de trouver les

    dispositions les plus efficaces pour protger les consommateurs. A terme, nous pourrions

    89 Civ. 1re 7 janvier 1992, Socits BKMI et Siemens v. Socit Dutco, n 89-18708.

  • 34

    esprer que le droit franais sinspire de la pratique arbitrale nord-amricaine en matire de

    recours collectifs, tout en tentant dviter ses drives.

  • 35

    Conclusion

    Ne serait-ce quen France, peu avant lentre en vigueur de la loi Hamon, plusieurs acteurs

    du paysage juridique franais se sont regroups autour dun site internet, spcialis dans la

    saisine dmatrialise des tribunaux. Cest cette initiative bien pense qui leur a permis de

    lancer deux actions runissant chacune plus de 600 plaignants contre des sites de vente en

    ligne qui il tait reproch de ne pas avoir rempli convenablement certaines de leurs

    obligations contractuelles lgard de leurs clients. Lobjectif tait limpide : permettre des

    consommateurs lss par un mme professionnel et pour un litige similaire, de regrouper

    leurs plaintes et tenter, voir forcer, une mdiation. Car en cas dchec, loutil informatique

    amnera autant de saisines quil y aura dinscrits laction collective90. Sous la menace dun

    raz de mare, les professionnels auront tout intrt trouver un terrain dentente, sous

    peine de grer quantit de demandes individuelle. Mme si cette class action new age

    ou action de groupe 2.0 91 ne peut tre exempte dun certain regard critique92, il nen

    demeure pas moins quelle reflte une tendance de plus en plus affirme : celle de se

    regrouper pour restaurer un quilibre port disparu depuis trop longtemps.

    Alors peine intgre dans le systme juridique franais, laction de groupe serait-elle dj

    une procdure dsute ou simplement une premire tape dans la voie de la collectivisation

    des recours pour garantir le respect du droit ? Comme la russi laction de groupe,

    larbitrage collectif russira t-il surmonter les obstacles juridiques qui ne lui permettent pas

    encore dexister en France ?

    90 Explication de la procdure sur le site : http://www.actioncivile.com/how_to. 91 V. Clavires, Laffaire qui risque de coter 16 milliards aux banques, Paris Match 5 fvrier 2014. 92 Critiques tenant notamment au fait que la socit puisse faire le choix dtudier profondment chaque dossier, en exclure une grande partie en raison de lhtrognit des saisines, et de sengager pleinement dans la procdure judiciaire, alors que la plateforme ne tend pas accompagner les plaignants au cours de lventuelle procdure judiciaire, J. Mucchielli, Laction de groupe 2.0 bouscule dj la profession, Dalloz actualit 17 fv. 2014.

  • 36

    Bibliographie MANUELS

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    RACINE (J-B), Larbitrage commercial international et lordre public, LGDJ 1999. ARTICLES DE PRIODIQUES

    ABID (C), le renouveau de larbitra