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    SolutionsDTECTEURS DE GAZ TOXIQUES H 2S

    Quatorze dtecteurs dhydrogne sulfur passs au banc dessaiUne campagne dessais, ralise par lIneris en collaboration avec lExera, rvle les forces et les faiblesses des dtecteurs dhydrogne sulfur (H2S), lun des gaz toxiques les plus surveills dans lindustrie. Objectifs de cette campagne : appr-hender lefficacit et le temps de rponse des dtecteurs dans diffrents contextes dutilisation. 14 dtecteurs ont ainsi rpondu chacun leur manire la batterie de tests. Selon les paramtres, des carts importants ont t rvls entre les dif-frents appareils mais aucun nest compltement mauvais ou compltement bon. Ceci souligne limportance de choisir son dtecteur en fonction des contraintes de lapplication. La plus grande difficult rencontre lors de cette tude rside dans les notices des fournisseurs qui restent trs incompltes.

    Ce gaz peut tre mortel et il nest plus accept sur les sites indus-triels. Plus personne ne veut de traces dhydrogne sulfur (H2S), mme dans les fuites fugitives. Aucun bruit de fond nest tolr. Tout doit tre canalis, trait. Les organismes de contrle (comme les Dreal) sont de plus en plus svres et les industriels de plus en plus vigilants. Cest dans ce contexte que la demande dune

    campagne dessais de dtecteurs H2S a man la fois des utilisateurs et des inspecteurs. Ainsi, un partenariat a t tabli entre le MEEDDAT (ministre de lEcologie, de lEnergie, du Dveloppement durable et de lAmnagement du t e r r i t o i re) , lExera (Association dexploitants dquipements de mesure, de rgulation et dautoma-tisme) et lIneris (Institut national de lenvironnement industriel et des risques) au sein duquel les

    essais ont t effectus. Cette campagne qui a dur environ six mois entre 2007 et 2008 sinscrit dans la continuit de deux autres ralises par lIneris (en partenariat avec lExera), sur des dtecteurs dammoniac (NH3) en 2004 et des cellules lectrochi-miques pour le chlore (Cl2) en 2007. Pour les dtecteurs H2S, nous avons rencontr un cho tout fait favorable de la part des construc-teurs , indique Sbastien Bouchet, responsa-ble du laboratoire capteurs et quipements de scurit (direction des risques accidentels - unit barrires techniques et systmes de scurit). Ainsi, 8 constructeurs ont accept de participer cette campagne et ont prsent au total 14 modles de dtecteurs (un record : la campagne dessais pour les dtecteurs de Cl2 avait t ralise sur 5 capteurs). Et nous avons rassembl une belle reprsentation du march international avec 6 constructeurs europens et 2 Amricains , poursuit Sbastien Bouchet.De surcrot, comparativement aux cellules NH3 et Cl2, les rsultats globaux de la cam-pagne ont t meilleurs pour les dtecteurs H2S. Pour Sbastien Bouchet, ceci sexplique par le fait que 4 constructeurs, sur les 8 qui ont particip cette tude, fabriquent eux-mmes leurs cellules : Ils ont un meilleur

    retour dexprience et ont dj amlior leurs produits, prcise Sbastien Bouchet, et de plus, ils sont tout fait intresss par notre tude. Cette situation sexplique par lenjeu strat-gique de ce march qui se divise globale-ment en deux. En effet, lhydrogne sulfur se retrouve principalement dans deux grands domaines dactivits industrielles. Le pre-mier est celui de la ptrochimie - chimie, bien videmment sur les procds de pro-duction dH2S ou, encore, toutes les units de dsulfurisation Lautre domaine est celui du traitement des eaux. LH2S est pro-duit dans les bassins de traitement biologi-que, au cours de la dcomposition des matires soufres par des bactries. Des d-tecteurs sont ainsi installs proximit de ces bassins mais galement distance, en priphrie des sites. De la chimie leau, les ambiances de travail ne sont pas du tout les mmes et les dtecteurs ne doivent pas tous supporter les mmes conditions en temp-rature, humidit, corrosion, vibrationMais, dans tous les cas pratiquement, ils sont ddis la scurit et doivent ainsi faire preuve defficacit. Cette notion, dans le cadre rglementaire des installations classes (IC), signifie que lquipement doit tre en adquation avec les vnements matriser. En dautres termes, il faut non seulement que lappareil fonctionne mais quen plus il soit adapt au risque. Par exemple, si on a une fuite qui dure 1 minute et un dtecteur qui a un temps de rponse de 70 secondes, on comprend bien que celui-ci est inad-quat. Ainsi, le protocole dessai, tabli par lIneris en collaboration avec les industriels, a t labor selon les besoins exprims, pre-nant en compte les diffrentes contraintes, en termes de scurit ou de conditions dambiance.

    Principales conclusions de ltude ralise sur les dtecteurs de H2S :

    Ractions diffrentes de chaque capteur en termes de temps de rponse, dendormissement, rponse aux autres gaz, temprature

    Tous les capteurs sont influencs par lhumidit et une dpression.

    Les notices des constructeurs sont souvent incompltes et optimistes.

    Lessentiel

    MESURES 815 - MAI 2009 - www.mesures.com

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    SolutionsLes alas de la mise en routeLes deux technologies prsentes sur le march ont pu tre testes. Sur les quatorze dtec-teurs tests, onze intgrent une cellule lec-trochimique trois lectrodes et trois, un capteur semi-conducteur.Surprises lorsque les cartons sont dballs : un appareil livr en panne, quatre dtecteurs dfectueux pendant la campagne, interf-rence avec deux tlcommandes pour deux appareils. Cela peut arriver, relativise Sbastien Bouchet. Il ne sagit pas de faire des statistiques ou de tirer des conclusions trop htives, mais cest tout de mme une indication. Ce qui parat encore plus ennuyeux cest que, dune manire globale, 44 % des rsul-tats obtenus au cours de cette campagne sont non conformes aux donnes fournies par le constructeur ou, pris dans lautre sens, 56 % des donnes de ces essais correspondent aux spcifications techniques du fabricant.On peut y voir une lgre amlioration par rapport une tude ralise par lExera il y a une dizaine dannes qui donnait environ 50 % le nombre de donnes conformes ou non conformes. Lamlioration nest pas encore suffisante, reconnat Sbastien Bouchet, et ce quil faut voir galement cest que seulement 34 % des donnes apportes par nos essais taient rperto-ries par le fournisseur. Ce qui signifie que les notices fournies sont gnralement trs incompltes.Autre indication, lorsque les essais, que ce soit pour des tests en temprature, ou en humidit, sont raliss en dehors des spci-fications fournies par le constructeur, trs vite la rponse se dgrade, le dtecteur peut mme tomber en panne. Et il ne sagissait pas de conditions extrmes, tout au plus 10 % des con-ditions maximales prconises par le constructeur , prcise Sbastien Bouchet. Sil y a donc

    Lhydrogne sulfur (H2S) est traqu principalement dans deux domaines industriels : la ptrochimie (production dH2S, units de dsulfurisation). Lautre domaine est le traitement des eaux (bassins biologiques). De la chimie leau, les ambiances de travail ne sont pas les mmes. Mais, dans tous les cas, les dtecteurs sont ddis la scurit et doivent ainsi faire preuve defficacit.

    Valeurs limites dexposition professionnelle VLCT (VLE) = valeur limite dexposition- Prvention des effets immdiats ou court terme- Mesures dexposition sur 15 minutes VL8 h (VME) = valeur limite de moyenne dexposition- Prvention des risques des effets long terme- Peut tre dpasse sur une courte priode- Mesures dexposition sur 8 heures(Exprimes en ppm pour les vapeurs et en mg/m3 pour les arosols)Valeurs limites rglementaires ou indicatives VL rglementaires contraignantes

    - Fixes dans le cadre du code du travail : 61 substances (fixes par dcret)- Fixes dans dautres cadres (poussires, amiantes) VL indicatives : objectifs de prvention- Rglementaires : fixes dans le cadre du code de travail : arrt du 30 juin 2004 modifi : 41 substances- Non rglementaire : publies par circulaires entre 1982 et 1997 plusieurs centaines de VLClassement de lhydrogne sulfurR12 : extrmement inflammableR26 : trs toxique par inhalationR50 : trs toxique pour les organismes

    aquatiquesStatut indicatif par circulaire 1995 (pour la France)VLE : 10 ppm ou 14 mg/m3

    VME (8 h) : 5 ppm ou 7 mg/m3

    Dans dautres paysAllemagne : VLE : 10 ppm VME (8 h) : 5 ppmEspagne : VLE : 5 ppm VME (8 h) : 1 ppmDanemark : VLE : 20 ppm VME (8 h) : 10 ppmJapon : VLE : VME (8 h) : 10 ppmUSA : VLE : 10 ppm VME (8 h) : 5 ppmSource base europenne de VLEP :http://www.hvbg.de/e/bia/gestis/limit_values/index.html

    Dfinition des valeurs limites, leurs classements en France et ltranger

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    Solutions

    Onze dtecteurs avec cellules lectrochimiques trois lectrodes

    Le fonctionnement dune cellule lectrochimique est quivalent celui dune pile. Lanode constitue llectrode de travail, et la cathode reprsente llectrode auxiliaire (ou de comparaison). Un courant est cr suite une raction lectrochimique lorsque les deux lectrodes sont relies. Pour viter des drives dans la mesure, dues la cration de barrires de charges despace (dfaut de mobilit des ions en particulier), une troisime lectrode de rfrence peut tre ajoute. Lutilisation dun montage lectronique appel potentiostat oblige llectrode de travail garder un potentiel constant par rapport cette lectrode de rfrence.

    Trois dtecteurs semi-conducteurs

    Les capteurs semi-conducteurs mesurent la variation de la rsistance lectrique du matriau en fonction de la quantit de molcules dH2S. Celles-ci sont absorbes sur une couche sensible, dope dune manire spcifique. Contrairement au principe des cellules lectro-chimiques, la rponse de mesure nest pas linaire et oblige un traite-ment du signal plus complexe.

    Deux technologies de dtecteurs H2S

    Synthse des rsultatsParamtres tudis Trois capteurs semi-conducteur (A, B, C) Onze cellules lectrochimiques (D N)

    Entreposage hors tension Aucun capteur ne prsente danomalies

    Temps de rponse (T90, temps de rponse gaz talon 12 ppm)

    A : 29 s B : 65 sC : 82 s

    D : 52 s ; E : 16 s ; F : 31 s ; G : 35 s ; H : 13 s ; I : 8 s ; J : 18 s ; K : 49 s ; L : 19 s ; M : 76 s ; N : 58 s

    Courbe de rponse (gaz dessais 2, 8, 12 et 18 ppm)

    A, B : non juste et non linaireC : juste et linaire

    K : non juste et non linaireTous les autres : juste et linaire

    Endormissement (fonctionnement en continue pendant six mois dans lair ambiant puis exposition au gaz de rfrence)

    A, C : perte complte de sensibilitB : aucune perte de sensibilit

    D, G, H, J, N : aucune perte de sensibilit E, F, I, K, L M : perte plus ou moins complte de sensibilit

    Temprature (de - 10 50 C) Tous influencs D : en panne ; E : influenc basse temprature ; K, M : influencs

    Humidit (0 et 50 % HR 20 C, 83 % HR 35 C) Tous sont plus ou moins influencs par une variation dhumidit relative

    Faible hygromtrie (10 % HR 20 C pendant 15 jours)

    A, B : pas influencs C : perte totale de sensibilit

    D : - 50 % ; E : - 17 % L : - 14 % ; N : - 19 % F, G, H, I, J, K, M : pas influenc

    Pression (essais raliss 80 et 100 kPa dans lair et le gaz dessai) Tous les capteurs sont influencs par une dpression

    Rponse aux autres gaz(exposition pendant 5 minutes H2 (50 ppm), CO (50 ppm), mthanol (200 ppm), SO2 (25 ppm), NO2 (25 ppm), NO (25 ppm), ethylmercaptan (1 ppm), thylmercaptan (1 ppm), sulfure de carbone (10 ppm)

    A : pas de rponse B : mthylmercaptan C : mthanol

    D : en panneE, I, L : SO2 G : SO2 et NO M : mthanol, SO2, CO, NOF, H, J, K, N : pas de rponse

    Utilisation prolonge (fonctionne 3 jours raison de 8 heures par jour sous gaz dessai de rfrence) Tous les capteurs montrent une altration des performances

    Fortes teneurs(exposition 200 ppm dH2S pendant 2 minutes)

    Temps de rcupration jusqu 36 fois suprieures entre deux appareils. Pas de drive de sensibilit suite cet essai

    un conseil impratif retenir : ne jamais scarter des conditions fixes.

    De 8 82 secondesEn entrant plus dans le dtail de cette cam-pagne dessais, il est trs difficile de prten-

    dre que tel dtecteur est meilleur quun autre. Chacun a ses qualits et ses dfauts. Ainsi, ltude dun des paramtres les plus importants pour un dtecteur de gaz toxi-que, savoir le temps de rponse, montre un cart dun facteur suprieur 10 entre lap-

    pareil le plus lent et lappareil le plus rapide. En effet, sur un gaz dessai 12 ppm, le temps de rponse (T90) varie de 8 82 se-condes. Evidemment 82 secondes, cest trs long quand il y a un risque important din-toxication. Il ne faut cependant pas conclure

    RactionsH2S + 4H2O -------- H2SO4 + 8H

    + 8e-

    2O2 + 8H+ 8e- ----- 4H2O

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    Solutions

    Pour en savoir plusLes rsultats prsents ici sont partiels. Le rapport complet de cette campagne dessais ainsi que tous les dtails du protocole dvaluation sont disponibles auprs de lIneris (www.ineris.fr). Et pour les rapports dtaills, auprs de lExera (www.exera.com).

    trop vite. Ce nest pas forcment un mauvais capteur pour dautres spcifications et il peut se rvler un bon choix pour certaines appli-cations non critiques. Ainsi le capteur le plus lent (82 secondes) offre une bonne linarit et une bonne justesse. Tandis que le plus rapide (8 secondes) perd trs rapidement sa sensibilit sil nest pas mis rgulirement en prsence de gaz.A noter galement que la plupart des appa-reils (onze sur quatorze) deviennent de moins en moins ractifs avec le temps. Ainsi, aprs six mois dessais, seuls trois appareils ont gard un temps de rponse identique celui du premier jour. Les autres ont perdu plusieurs secondes. Il est vrai que les dtecteurs ont vu passer beaucoup de gaz et subi quelques preu-ves, mais dans leur vraie vie, cest--dire en condi-tions relles, cest peut-tre encore pire , indique Sbastien Bouchet.

    LendormissementAutre paramtre tudi : lendormissement. Il sagit dun phnomne de plus en plus critique. Puisque lon cherche supprimer toute mission du gaz l o ils sont installs,

    les dtecteurs prennent lhabitude de ne plus travailler. Alors ils sendorment (ce phno-mne peut se rencontrer pour les dtecteurs de tout type de gaz toxiques). Ainsi, pour lH2S, certains dtecteurs qui nont pas vu de gaz pendant un mois, ne rpondent plus du tout. Certains, qui nont pas vu passer un seul nuage dH2S pendant six mois, fonc-tionnent toujours.Ltude de linfluence des paramtres ext-rieurs comme la temprature ou lhygrom-trie a montr galement des grandes diff-rences entre les dtecteurs. Ainsi, sur des essais en temprature mens entre - 10 et 50 C, certains sont influencs par la temp-rature, dautres pas du tout. Par exemple, un dtecteur a perdu 50 % de sa rponse entre 5 et 20 C. La cause nest pas lie la technolo-gie, elle peut tre due un dfaut non lucid comme une mauvaise compensation en temprature , pr-cise Sbastien Bouchet. Il ny a pas de rgle gnrale. Pour lhumidit, les capteurs sont tous plus ou moins influencs par une va-riation dhumidit relative (HR) mme rai-sonnable (entre 0 et 50 % 20 C). Et dans des conditions plus svres, cest encore pire.

    Ainsi, 83 % dHR et 35 C, plusieurs dtecteurs ont vu leurs rponses divises par cinq. Ce quil y a de plus alarmant, rpte Sbastien Bouchet, cest, une fois encore, la non-correspondance de nos rsultats par rapport ceux avancs par le constructeur. LIneris a galement ralis des essais faibles hygromtries, assez frquentes particulirement en hiver dans des locaux chauffs. Ainsi, dans une am-biance 10 % dHR et 20 C pendant 15 jours, un dtecteur sur quatorze perd toute sa sensibilit, un autre en perd 50 % et trois autres entre 15 et 20 %. Un cart modr nest pas grave en soi, sil est connu et sil peut tre pris en compte, souligne Sbastien Bouchet, mais ce paramtre-l, comme bien dautres, est gn-ralement peu tudi et on ne le rencontre pratiquement jamais dans les notices.

    Marie-Pierre Vivarat-Perrin