7. la spectroscopie de résonance paramagnétique électroniquedans le cas d'une charge...
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Spectroscopie chapitre 7 ! 161
7. La spectroscopie de résonance paramagnétique électronique 7.1. Introduction
La spectroscopie de résonance paramagnétique électronique (RPE) également appelée
spectroscopie de résonance de spin électronique (ESR pour electron spin resonance) est une
extension de l'expérience effectuée par Otto Stern et Walther Gerlach en 1922 et qui a conduit
à la mise en évidence du spin de l'électron. Comme le montre la Figure 5.1, Stern et Gerlach
ont fait passé un faisceau d'atomes d'argent dans une champ magnétique inhomogène et ont
vu que ce faisceau est dévié dans deux directions. Ces deux directions sont dues aux deux
orientations du moment magnétique de spin par rapport au champ magnétique, autrement dit à
la quantification spatiale du spin, avec ms=1/2 et ms=-1/2.
! Figure 7.1: plaque commémorative sur le bâtiment de Francfort où Stern et Gerlach ont effectué leur expérience en 1922.
La configuration électronique des atomes d'Ag à l'état fondamental est [Kr]4d105s1 et l'état
associé est 2S1/2. Il s'agit d'un état doublement dégénéré (état doublet). Toutefois en présence
d'un champ magnétique, cette dégénérescence est levée et l'écart entre les deux sous états est
d'autant plus grand que le champ magnétique est élevé. Nous verrons qu'avec un champ
magnétique de l'ordre de 1 T, l'écart d'énergie est de l'ordre de 0.18 meV. Pour une onde
électromagnétique, cette énergie correspond à une fréquence de 44 GHz, donc au domaine des
micro-ondes. Des transitions entre ces états sont possibles par absorption ou émission de
micro-ondes. Cependant, l'interaction radiation-matière se fait entre le moment magnétique de
spin et la partie magnétique du champ de radiation. La fréquence de transition dépend de
l'environnement de l'électron célibataire (du spin). Le principe de la spectroscopie RPE
consiste donc a placer un composé avec spin électronique total non-nul, comme par exemple
Spectroscopie chapitre 7 ! 162
un radical, dans un champ magnétique externe et à mesurer les fréquences de transition entre
les niveaux éclatés. On obtient ainsi des informations structurales importantes sur le composé.
7.2. Petit rappel sur la quantification du moment cinétique
Nous avons vu dans les chapitres précédents que l'électron est caractérisé par deux moments
cinétiques, le moment cinétique orbital , avec les nombres quantiques l et ml, et le moment
cinétique de spin , avec les nombres quantiques s et ms. Le premier nombre quantique est associé à la grandeur (au module) du moment cinétique
(pour le spin ! ) et le second à la grandeur de sa projection sur un axe (en
général on choisit z, et pour le spin on a ! ). La quantification du moment cinétique
peut être illustrée à l'aide du modèle vectoriel. Par exemple, le spin est représenté par un
vecteur de longueur ! situé quelque part sur un cône autour de l'axe z (Figure 7.2). La
composante z du spin électronique est !
avec ! . Par conséquent, l'angle
d'ouverture du cône est de 54.7o et ce cône est
orienté soit vers le haut (spin ! , ! ) soit
vers le bas (spin ! , ! ). Le fait qu'on
ne peut connaître simultanément toutes les
composantes cartésiennes de ces deux moments est dû au principe d'incertitude d'Heisenberg.
Par conséquent, les fonctions d'onde électroniques vont dépendre de ces nombres quantiques.
Module du moment cinétique:
Par exemple, si on veut calculer le module du spin, ! il faut calculer la valeur d'expectation
suivante en utilisant l'opérateur ! :
carré du module du spin:
(7.1)
Comme ! , on a :
!
et donc le module du spin est ! . Pour un seul électron, s=1/2 et
! .
!
L
!
S
!S = s s +1( )⎡⎣ ⎤⎦
1 2"
S z = ms!
3! 2
ms!
ms = 1 2,−1 2
α ms = 1 2
β ms = −1 2
!S
S2
!S
2= ϕe s, ms( ) S2 ϕe s, ms( )
S2 ϕe s, ms( ) = s s +1( )!2 ϕe s, ms( )
ϕe s, ms( ) S2 ϕe s, ms( ) = s s +1( )!2 ϕe s, ms( ) ϕe s, ms( ) = s s +1( )!2
!S = s s +1( )⎡⎣ ⎤⎦
1 2"
!S = 3" 2
Figure 7.2: états de spin et représentés à l ' a i d e d u m o d è l e vectoriel.
α β
Spectroscopie chapitre 7 ! 163
On peut faire exactement la même démarche avec le moment cinétique orbital et on obtient:
! .
Composante z du moment cinétique
Si on veut maintenant calculer la composante z du moment cinétique (par exemple celle du
spin, ! ), il faut calculer la valeur d'expectation associée à l'opérateur ! (désigné également
! ):
composante z du spin: ! . (7.2a)
Comme ! , on a :
! . Dans le cas du spin électronique, s= 1/2 et ms=1/2, -1/2, et il en résulte donc les deux états de
spin suivants:
! , (7.3a)
! , (7.3b)
et donc et
(7.2b,c)
Dans le cas du moment cinétique orbitale, on a ! .
Composantes x et y du moment cinétique
Les différentes composantes du moment cinétique sont reliées de la façon suivante:
! , (7.4)
où seuls ! et ! peuvent être déterminés simultanément. En ce qui concerne les
composantes x et y, on peut définir les opérateurs d'échelle suivants:
! , (7.5a)
! . (7.6a) Ces deux opérateurs sont aussi appelé opérateurs de création et d'annihilation.
L'effet de ces opérateurs d'échelle est le suivant:
! . (7.6)
Par exemple: ! . (7.7a)
De même, on peut voir que:
!L = l l +1( )⎡⎣ ⎤⎦
1 2"
S z SzMS
S z = ϕe s, ms( ) Sz ϕe s, ms( )
Sz ϕe s, ms( ) = ms! ϕe s, ms( ) S z = ϕe s, ms( ) Sz ϕe s, ms( ) = ms! ϕe s, ms( ) ϕe s, ms( ) = ms!
s,ms = 12, 12
= α
s,ms = 12,− 12
= β
Sz α = 1
2! α
Sz β = −
12! β
Lz = ϕe s, ms( ) Lz ϕe s, ms( ) = ml!
!S
2= S 2 = S x
2 +S y2 +S z
2
S2
S z
S+ = Sx + iSyS− = Sx − iSy
S± s,ms = s s +1( ) − ms ms ±1( )⎡⎣ ⎤⎦
1 2! s, ms ±1
S+ β = S+ 1
2,− 12
= 1212+1⎛
⎝⎜⎞⎠⎟ +
12
− 12+1⎛
⎝⎜⎞⎠⎟
⎡⎣⎢
⎤⎦⎥
1/2
!12, 12
= ! α
Spectroscopie chapitre 7 ! 164
! , (7.7b)
! , (7.7c)
! . (7.7d)
On peut utiliser ces opérateurs d'échelle pour exprimer les opérateurs ! et ! :
! , (7.8a)
! . (7.8b)
Pour le moment cinétique orbital, on utilise les opérateurs d'échelle correspondants, ! et ! .
7.3. Dipôle magnétique dans un champ magnétique
Nous avons vu dans les chapitres précédents qu'une charge électrique avec un moment
cinétique est également caractérisée par un moment magnétique, ! . Dans le cas d'une
charge négative, ! est dirigé dans la direction opposée au moment cinétique. Il faut
distinguer le moment magnétique orbital et le moment magnétique de spin:
! , (7.9a)
! , (7.9b) où ! est un coefficient de proportionnalité entre le moment magnétique et le moment
cinétique appelé rapport gyromagnétique électronique. Le moment magnétique est le plus
souvent exprimé à l'aide du magnéton de Bohr électronique, ! , qui correspond au moment
magnétique associé à un électron avec un moment cinétique de grandeur ! :
! . (7.10)
Il faut encore multiplier par un facteur, ge, le facteur de Landé (ge=g0=2.0023 pour un électron
libre) pour obtenir la relation suivante:
! . (7.11)
Dans une molécule, le moment cinétique orbital total ! est en général inhibé. Ceci est dû à la forme complexe des différentes orbitales moléculaires. D'autre part, un moment cinétique de
spin total ! non nul requiert la présence d'électrons non appariés. Parmi les systèmes moléculaires possédant un ou plusieurs électrons non appariés, on peut citer:
- Les radicaux libres caractérisés par la présence d'un électron non apparié. Par exemple: le
radical méthyl (.CH3), le monoxyde d'azote (NO.) ou le radical hydroxyle (.OH).
- Les biradicaux qui contiennent 2 électrons non appariés suffisamment éloignés l'un de
l'autre pour ne presque pas interagir (Figure 7.3).
S− β = 0
S+ α = 0
S− α = ! β
Sx Sy
Sx =12S+ + S−( )
Sy =12iS+ − S−( )
L+ L−
!µM
!µM
!µMl = −γ e l l +1( )⎡⎣ ⎤⎦
1 2"
!µMs = −γ e s s +1( )⎡⎣ ⎤⎦
1 2"
γ e
βe
!
βe = − e
2me
!
geβe = γ e!
!
L
!
S
Spectroscopie chapitre 7 ! 165
! Figure 7.3 : exemple de biradical.
- Les molécules à l'état triplet. Il peut s'agir de molécules dont l'état fondamental est un état
triplet (l'oxygène, O2) ou de molécules dans un état électronique excité, en général T1. Dans
ce dernier cas, l'état est peuplé soit optiquement (après CIS), soit thermiquement.
- La plupart des composés avec des métaux de transition ou des terres rares.
Etant donné cette inhibition du moment cinétique orbital, le seul moment cinétique restant est
celui relié au spin avec un moment magnétique associé:
! , (7.12)
où S est le nombre quantique de spin total.
L'énergie d'un dipôle magnétique dans un champ magnétique ! est donnée par:
(7.13)
où ! est l'angle entre le moment magnétique et ! (Figure 7.4). L'orientation la plus stable
d'un dipôle magnétique classique est donc celle où il est parallèle au champ magnétique
( ! ).
D'autre part, l'orientation d'un dipôle quantique est déterminée par la quantification spatiale
du moment cinétique (cf. section 7.2 et Figure 7.2). Le cas du spin d'un électron, il y a deux
orientations, ! avec ! , et ! avec ! . En l'absence de champ magnétique
externe, les états associés à ces deux orientations sont dégénérés. Cette
dégénérescence est toutefois levée en présence d'un champ magnétique. Si
ce champ est orienté le long de l'axe z, l'orientation du spin la plus basse en
énergie est celle avec le spin ! ( ! ), car dans ce cas, le moment
magnétique associé, ! , a une composante parallèle à ! (Figure 7.5).
Cl
Cl
Cl
Cl
!µMs = −γ e
!S = ge
e2me
S S +1( )⎡⎣ ⎤⎦1 2" = −geβe S S +1( )⎡⎣ ⎤⎦
1 2
!B
E = −!µM ⋅!B = −µM Bcos θ( )
θ !B
θ = 0
α ms = 1 2 β ms = −1 2
β ms = −1 2
!µMs
!B
Figure 7.4
Spectroscopie chapitre 7 ! 166
! Figure 7.5: orientations possibles du moment dipolaire magnétique de spin électronique et illustration de l'effet Zeeman électronique.
Le nombre quantique de spin total associé à un radical libre (1 électron non-apparié) est
simplement S=1/2 et donc la situation est la même que pour un seul électron. Par conséquent,
la composante z du spin total est avec MS= 1/2, -1/2.
Les moments magnétiques associés à ces composantes z du spin total sont :
! , (7.14)
il en découle que l'énergie de ces dipôles magnétiques dans un champ magnétique orienté le
long de z est (cf. 7.12):
! . (7.15)
Par conséquent, dans un champ magnétique, les deux niveaux d'énergie associés au spin ont
une énergie de:
! et ! , (7.16)
où le niveau le plus bas a l'orientation ! ( ! ) et le niveau plus élevé l'orientation !
( ! ). Cette levée de dégénérescence des niveaux de spin par un champ magnétique est
appelé Effet Zeeman électronique (Figure 7.5).
L'écart d'énergie entre ces deux niveaux est:
! . (7.17)
Par exemple, si on considère un électron libre dans un champ magnétique de 1T, l'écart
d'énergie ! est égal à ! .
Cette énergie correspond à celle d'une onde électromagnétique à une fréquence de 29.4 GHz.
Cette fréquence coïncide avec le domaine des micro-ondes ( ! ). Par conséquent, une
transition entre les niveaux ! et ! peut avoir lieu par absorption de radiation
électromagnétique de cette fréquence.
MS!
µM ,zs = −geβeMS = −γ eMS!
E = −µM ,zs ⋅ B = γ eMS!B
E β = −
12γ e!B
Eα =
12γ e!B
β Ms = −1 2 α
Ms = 1 2
ΔEαβ = γ e!B = geβeB
ΔEαβ ΔEαβ = 2.002 ⋅9.724 ⋅10−24 JT−1 ⋅1T=1.947 ⋅10−23 J=1.215 ⋅10−4 eV
λ ≈1 cm
β α
Spectroscopie chapitre 7 ! 167
7.4. Transition entre niveaux de spin par absorption
Comme nous l'avons déjà mentionné au Chapitre 5, les moments
magnétiques formant un angle de 54.7o avec le champ
magnétique ! effectuent un mouvement de précession autour de
l'axe défini par ! (Figure 7.6). Ceci est une image classique, car
il ne faut pas oublier que l'on ne peut par déterminer la direction
exacte d'un moment magnétique quantique (principe d'incertitude
d'Heisenberg). La fréquence de précession de ! autour de ! est
appelée fréquence de Larmor et est égale à:
et . (7.18)
En comparant (7.18) et (7.17) on remarque que:
! . (7.19)
Contrairement à tous les processus d'absorption dont nous avons parlé jusqu'à maintenant, une
transition entre les niveaux ! et ! dépend de la partie magnétique de l'onde
électromagnétique. Dans les chapitres 1 à 5, l'interaction a lieu entre le champ électrique et un
dipôle électrique de transition. Dans le cas présent, l'interaction a lieu entre le champ
magnétique et un dipôle magnétique de transition:
! , (7.20)
où ! est l'opérateur dipolaire magnétique: ! . Considérons l'interaction entre ce dipôle magnétique de transition et un champ magnétique
oscillant: ! . Selon (7.13), l'énergie d'interaction est:
! . (7.21a) En utilisant la distributivité on obtient:
! , (7.21b)
et on sait que (7.2b):
donc
(7.22a)
et ! , (7.22b)
! . (7.22c)
Par conséquent:
!µMs
!B
!B
!µMs
!B
ω L = γ eB =
geβe
!B νL =
ω L
2π
ΔEαβ = !ω L = hνL
β α
!µαβ = α µM β
µM µM = −γ eS
!B1 t( ) =
!B1 cos ωt( )
E int = −!µαβ ⋅
!B1 cos ωt( ) = γ e α S β ⋅
!B1 cos ωt( )
E int = γ e cos ωt( ) α Sx β ⋅ B1x + α Sy β ⋅ B1y + α Sz β ⋅ B1z⎡⎣ ⎤⎦
Sz β = − 1
2! β
α Sz β = − 1
2! α β = 0
α Sx β =
12α S+ + S− β =
12α S+ β +
12α S− β =
!2α α =
!2
α Sy β =
12i
α S+ − S− β =12i
α S+ β −12i
α S− β =!2i
α α =!2i
Figure 7.6
Spectroscopie chapitre 7 ! 168
! . (7.21c)
Les équations (7.22) montrent que le moment dipolaire magnétique de transition n'a pas de
composante z. On le comprend en considérant le modèle vectoriel où le moment magnétique
effectue un mouvement de précession autour de l'axe z défini par la direction du champ
magnétique statique ! . On voit que la composante z du moment magnétique reste
constante alors que les composantes x et y oscillent à la fréquence de Larmor (Figure 7.7):
! , (7.23a)
! . (7.23b)
Ces composantes oscillantes ! et ! interagissent avec le champ magnétique
oscillant et agissent comme dipôle magnétique de transition. La situation est semblable à la
spectroscopie d'absorption rotationnelle où l'absorption est due à la rotation du dipôle
électrique permanent.
! Figure 7.7: illustration de la variation des composantes x et y du moment magnétique sous l'influence d'un champ magnétique statique orienté le long de z.
L'interaction entre le champ magnétique oscillant et le moment dipolaire magnétique de
transition se donc fait avec les composantes x et y du champ magnétique. Par conséquent,
pour qu'une transition de ! et ! ait lieu il faut deux conditions:
1) le champ magnétique oscillant, ! , doit être polarisé dans une direction perpendiculaire
au champ magnétique statique ! ;
2) la fréquence du champ magnétique ! doit être égale à la fréquence de Larmor, ! , qui
elle-même dépend de ! (7.18).
E int =
12γ e!B1x cos ωt( ) + 1
2iγ e!B1y cos ωt( )
!B =!B0
µM ,xs t( ) = µM ,x
s 0( )cos ω Lt( )µM ,ys t( ) = µM ,y
s 0( )sin ω Lt( )µM ,xs t( ) µM ,y
s t( )
β α
!B1 t( )
!B0
!B1 t( ) ω L
!B0
Spectroscopie chapitre 7 ! 169
7.5. Spectre RPE
7.5.1. Le facteur de Landé, ge
Si on considère (7.18), on voit que la fréquence de transition entre les états ! et ! ne dépend
que de la grandeur du champ magnétique statique ! . En fait, la valeur du facteur de Landé
ge=g0=2.0023 n'est valable que pour un électron libre. Dans le cas d'une molécule, le moment
magnétique résulte du moment orbital total et de spin total . Dans ce cas, la valeur de ge est donnée par:
! , (7.24)
où J=L+S. Cette équation est basée sur l'approximation de Russell-Saunders (Chapitre 4).
Si on prend un électron libre, L=l=0 et S=s=1/2 et donc ge=2. La valeur de g0=2.0023 est due
à des corrections relativistes.
Pour un radical avec S=1/2, la contribution orbitale n'est pas totalement nulle et par
conséquent la valeur expérimental de ge diffère souvent de g0. Comme ,
on voit que:
! . (7.25)
Par conséquent, la fréquence de transition ! mesurée avec un champ magnétique
donné reflète la valeur de ge. La valeur expérimentale de ge est donc une caractéristique de la
molécule paramagnétique et permet d'obtenir des informations importantes sur sa structure
électronique.
La valeur de ! est d'autant plus élevée que les moments magnétiques orbitaux et
de spin sont couplés. Nous avons vu au Chapitre 4 que cette interaction entre ! et ! dépend de la grandeur du couplage spin-orbite. La grandeur de ce couplage dépend 1) de la distance
entre l'électron et le noyau, et 2) de la charge du noyau (Ze). L'énergie d'interaction associée
se calcule avec l'opérateur d'Hamilton suivant:
! . (7.26a) On peut également définir une constante de couplage spin-orbite pour chaque atome
constituant le radical, ! :
! . (7.26b) Le Tableau 7.1 énumère la valeur de ! de quelques atomes. L'augmentation de ! avec le
numéro atomique Z est bien visible.
β α
!B0
!
L !
S
ge = 1+J J +1( ) + S S +1( ) − L L +1( )
2J J +1( )
ΔEαβ = !ω L = geβeB0
ge =
!ω L
βeB0νL =ω L 2π( )
Δge = ge − g0
!
L !
S
HSO = ξ r( )L ⋅ S
λSO
HSO = λSOL ⋅ SλSO λSO
Spectroscopie chapitre 7 ! 170
Table 7.1: valeurs de la constante de couplage spin-orbite de quelques atomes
Dans le cas d'un radical organique, la grandeur de ! reflète donc la contribution orbitale.
Cette dernière est d'autant plus élevée que l'électron célibataire est délocalisé sur un atome
lourd (Z élevé).
La contribution orbitale dépend de l'orientation du moment magnétique orbital de l'électron
non-apparié, ! , par rapport au champ magnétique externe ! (Figure 7.8).
! Figure 7.8: orientations relatives du champ magnétique externe et du moment magnétique orbital dans le cas d'un radical aminé, R2N..
Si ! est perpendiculaire à ! ( ! ||k), la contribution orbitale au moment magnétique total
sera nulle et ainsi gk=g0 et . D'autre part, si a une composante parallèle à ,
! , le moment magnétique orbital contribue au moment magnétique total. C'est le cas
lorsque ! est orienté le long des axes i et j (Figure 7.8). Dans ces cas, ! et ! .
La valeur de ge dépend donc de l'orientation de la molécule dans le champ magnétique
statique . Cela signifie que ge n'est pas une constante mais doit être exprimé sous la forme
d'un tenseur d'ordre 2, comme par exemple la polarisabilité (cf. 1.18):
Dans un repère i'j'k' arbitraire ce tenseur ! a la forme suivante:
! . (7.27a)
On peut toutefois définir un repère ijk tel que seuls les éléments diagonaux du tenseur soient
non nuls:
Atome (Z) Atome (Z)
N (7) 76 S (16) 382
O (8) 151 As (33) 1550
P (15) 299 Se (34) 1688
(cm-1)λSO (cm-1)λSO
Δge
!µMl
!B0
!µMl
!B0 !B0
Δgk = 0 !µMl
!B0
Δge ≠ 0
!B0 Δgi ≠ 0 Δgj ≠ 0
!B0
!ge
!ge =
gi ' i ' gi ' j ' gi ' k 'gj ' i ' gj ' j ' gj ' k 'gk ' i ' gk ' j ' gk ' k '
⎛
⎝
⎜⎜⎜⎜
⎞
⎠
⎟⎟⎟⎟
Spectroscopie chapitre 7 ! 171
! . (7.27b)
Ce nouveau repère est défini par rapport à la structure de la molécule. Dans le cas du radical
R2N. (Figure 7.8), l'axe k est aligné avec l'axe principal de l'orbitale 2p contenant l'électron
non-apparié, alors que l'axe j est aligné le long de l'axe principale l'orbitale contenant la paire
d'électrons libre.
! Figure 7.9: localisation de l'électron non apparié du radical R2N. à l'état électronique fondamental et dans le premier état excité.
Les valeurs de gii, gjj et gkk sont d'autant plus éloignées de g0 que l'électron célibataire est
partiellement localisé sur un atome avec une constante de couplage spin-orbite élevée.
Exemples:
R2P: gii=2.009 gjj=2.003 gkk=2.0021 g0
R2As: gii=2.052 gjj=2.012 gkk=1.999
Il faut noter que les éléments tensoriels de ! ne peuvent être mesurés que si les molécules
paramagnétiques ont la même orientation dans le champ magnétique. En solutions, les
molécules ont une orientation aléatoire, et par conséquent, on mesure expérimentalement la
valeur moyenne de ge:
(7.28)
Il faut également noter que la distribution électronique change lorsque la molécule est dans un
état électronique excité. Dans le cas de R2N., le premier état excité est du type (Figure
7.9). on remarque que l'état électronique fondamental ainsi que le premier état électronique
d'un radical sont des états doublet, D0 et D1, respectivement.
!ge =gii 0 00 gjj 0
0 0 gkk
⎛
⎝
⎜⎜⎜
⎞
⎠
⎟⎟⎟
N
ED1
D0
N
≈
!ge
ge =
13Tr !ge[ ] = 13 gxx + gyy + gzz( )
lπ *
Spectroscopie chapitre 7 ! 172
Si les états électroniques sont proches, ils peuvent se mélanger et cet effet va se refléter dans
les valeurs des éléments tensoriels de ! .
7.5.2. Le couplage hyperfin
Selon la discussion ci-dessus, on s'attendrait à ce que le spectre RPE d'un radical ne consiste
qu'en une seule raie d'absorption à la fréquence de Larmor ! . Toutefois, le
spectre RPE expérimental est en général plus complexe et consiste en un ensemble de lignes
comme le montre la Figure 7.10.
Nous discuterons plus loin de la façon dont on mesure un tel spectre. Pour le moment, nous
allons discuter de l'origine de ces multiples lignes. Cet ensemble de raies RPE est appelé
structure hyperfine. Comme son nom l'indique, cet effet est dû à l'interaction hyperfine qui est
une interaction entre le moment magnétique électronique, ! , dû principalement au spin
électronique, avec les moments magnétiques associés aux noyaux présents dans le radical,
! . Ces derniers sont directement reliés aux spins nucléaires. Par
conséquent, si on veut expliquer le comportement d'un radical dans
un champ magnétique, il faut également considérer l'effet de ce
champ quand le radical contient des atomes avec un spin nucléaire
non nul.
De même qu'il y a l'effet Zeeman électronique dû au moment
magnétique associé au spin électronique, l'existence d'un moment
magnétique dû au spin nucléaire, ! , est à l'origine de l'effet Zeeman nucléaire.
Le moment cinétique de spin nucléaire ! est calculé à l'aide de
l'opérateur de spin ! :
! .
(7.29)
Comme ! ,
on a: ! . (7.30)
De même, pour la composante z du moment cinétique de spin nucléaire:
! . (7.31)
avec ! ,
!ge
ω L = geβeB0 !
!µMe
!µMn
!µMn
!
I
I
!
I2= ϕn I , MI( ) I2 ϕn I , MI( )
I2 ϕn I , MI( ) = I I +1( )!2 ϕn I , MI( )
!
I = I I +1( )⎡⎣ ⎤⎦1 2"
I z = ϕn I , M I( ) Iz ϕn I , M I( ) Iz ϕn I , MI( ) = MI! ϕn I , MI( )
Figure 7.10: spectre RPE du radical anion du benzène.
Spectroscopie chapitre 7 ! 173
on a: ! , (7.32)
où I est le nombre quantique de spin nucléaire (équivalent de S pour le spin électronique). La
valeur de I dépend de la composition du noyau l'atome. Le nombre quantique de spin du
proton et du neutron est 1/2. Par conséquent, on observe en règle générale que les noyaux
avec un nombre de masse pair (autant de neutrons que de protons) ont un spin nul alors que
les autres ont un spin de I=1/2. Il y a toutefois des exceptions et par conséquent I peut être
plus grand que 1/2. Nous en discuterons plus en détail au chapitre 8.
I = 1/2 pour 1H, 13C, 19F, 31P, …
I = 1 pour 2H, 14N, …
I = 3/2 pour 11B, 33S, 35Cl, 37Cl, …
D'autre part, MI = I, I-1, …, -I est est associé à la quantification spatiale du spin nucléaire.
Pour 1H, il y a deux orientations possibles du spin nucléaire, (MI=1/2) et (MI=-1/2),
comme pour le spin électronique.
Le moment magnétique associé au moment cinétique de spin nucléaire est:
! , (7.33)
où est le rapport gyromagnétique du noyaux, gn est le facteur de Landé nucléaire. La
valeur de gn dépend du noyau:
gn(1H)=5.586, gn(2H)=0.857, gn(13C)=1.405, gn(14N)=0.404.
Finalement: ! (7.34)
est le magnéton nucléaire, avec la masse du proton mp. La valeur de est 5.051.10-27 JT-1
alors que pour l'électron ! ! . On voit donc que ! et
que, comme ces deux valeurs sont positives, le moment magnétique nucléaire est parallèle au
spin ! alors que le moment magnétique électronique est antiparallèle au spin ! . Cette différence est due aux charges opposées de l'électron et du noyau. En plus de cette différence
de direction, ! . Par conséquent, l'effet Zeeman nucléaire est beaucoup plus faible que l'effet Zeeman électronique.
L'énergie d'interaction d'un noyau possédant un moment magnétique avec un champ
magnétique statique externe est donnée par l'équation (7.13). Si le champ ! est orienté le
long de l'axe z, cette énergie est:
! . (7.35)
Si on considère un noyaux avec I=1/2, l'énergie associée au deux orientations possibles de !
et donc de ! est:
I z = MI!
α β
!µMn = γ n
!I =
gnβn
"
!I
γ n
βn = − e
2mp
!
βn
βe = 9.27 ⋅10−24 JT−1 βe βn = 1835( ) γ n << γ e
!
I !
S
!µMn <<
!µMe
!B0
E = −µM ,zn ⋅B0 = −γ nI zB0 = −γ nM I!B0
!
I
!µMn
Spectroscopie chapitre 7 ! 174
! et ! . (7.36)
Contrairement au cas de l'électron, l'état de spin le plus bas est l'état ! , alors que l'état le plus
haut en énergie est l'état ! (Figure 7.11).
! Figure 7.11: orientations possibles du moment magnétique du spin nucléaire et illustration de l'effet Zeeman nucléaire.
Par conséquent, l'écart d'énergie entre les niveaux de spin nucléaire ! et ! dans un champ
magnétique externe dû à l'effet Zeeman nucléaire est:
! (7.37)
Etant donné que ! , l'effet Zeeman nucléaire est beaucoup plus faible que l'effet
Zeeman électronique.
! Figure 7.12: éclatement des niveaux d'énergie dû aux effets Zeeman électroniques et nucléaires (l'effet Zeeman
nucléaire est exagéré).
A cause de ces deux effets, la fonction d'onde associée à un radical contenant des noyaux avec
un spin nucléaire non nul est spécifiée par les nombres quantiques MS et MI. Par exemple,
avec MS=1/2 et MI=1/2, on a un état du type . La Figure 7.12 illustre les effets Zeeman
électroniques et nucléaires combinés en supposant une totale absence de couplage entre les
moments magnétiques électroniques et nucléaires.
Eα = − 1
2γ n!B0
E β =
12γ n!B0
α
β
α β
ΔEαβ = γ n!B0 = gnβnB0βn << βe
α eαn
Spectroscopie chapitre 7 ! 175
! Figure 7.13: éclatement des niveaux d'énergie dû aux effets Zeeman électroniques et nucléaires avec
l'interaction hyperfine.
Le schéma de niveaux d'énergie illustré dans la Figure 7.12 suppose que les moments
magnétiques électroniques et nucléaires sont parfaitement isolés l'un par rapport à l'autre.
Comme mentionné plus haut, ce n'est pas le cas car ! et ! couplent via l'interaction
hyperfine magnétique. L'énergie d'interaction ! est proportionnelle à la composante z de
! et ! et par conséquent:
(7.37)
où T est une constante de proportionnalité. Par conséquent, en tenant compte de l'interaction
hyperfine, l'énergie des états ! est:
! , (7.38a)
! , (7.38b)
! , (7.38c)
! . (7.38d)
La Figure 7.13 illustre l'effet de l'interaction hyperfine sur les niveaux d'énergie ! .
Il faut noter que dans les Figures 7.12 et 7.13 l'effet Zeeman nucléaire a été fortement
exagéré. En fait, on peut le considérer comme quasiment négligeable par rapport à l'effet
Zeeman électronique. De même, l'énergie d'interaction hyperfine, ! , est beaucoup plus
élevée que l'éclatement , et ne dépend pas du champ magnétique B0 mais
seulement du radical. Par conséquent, on remarque que l'écart d'énergie entre les états ! ,
! et les états ! , ! , augmente avec le champ magnétique, alors que l'écart
!µMe
!µMn
E hf
!µMe
!µMn
E hf ∝ µM ,ze µM ,z
n = −γ eMSγ nM I!2 ,
E hf =T MSMI .
MSMI
α eαn : Eαα = 1
2geβeB0 −
12gnβnB0 +
14T
α eβn : Eαβ =
12geβeB0 +
12gnβnB0 −
14T
βeβn : E ββ = −
12geβeB0 +
12gnβnB0 +
14T
βeαn : E βα = − 1
2geβeB0 −
12gnβnB0 −
14T
MSMI
E hf
ΔEαβ = γ n!B0α eαn
α eβn βeαn βeβn
Spectroscopie chapitre 7 ! 176
d'énergie entre les états ! et ! et entre les états ! et ! reste constant
(Figure 7.14).
! Figure 7.14: éclatement des niveaux d'énergie dû à l'effet Zeeman électronique et à l'interaction hyperfine en
fonction du champ magnétique externe B0. Les flèches verticales représentent 2 transitions à la même fréquence mais à des valeurs de B0 différentes.
Nous verrons plus tard qu'en spectroscopie RPE, on travaille en général avec une fréquence
micro-onde constante, , et que l'on varie le champ magnétique B0. Par conséquent, lorsque
le champ magnétique est tel que l'éclatement entre les niveaux de spin est égal à ! , une
transition peut avoir lieu. Les deux transitions qui apparaissent dans la Figure 7.14 sont les
transitions ! et ! . On voit qu'elles sont associées à un
changement de MS de -1/2 à 1/2, mais qu'elles laissent MI constant. Cette règle de sélection se
comprend en considérant l'interaction entre le dipôle pour une transition entre deux états de
spin électroniques (7.20) avec la composante magnétique de la radiation à ! donnée par
(7.21b).
Si on considère par exemple la transition ! :
(7.39)
Comme l'opérateur de spin électronique n'agit pas sur les fonctions de spin nucléaires:
! . (7.40a)
La dernière inégalité a été démontrée dans (7.22b). On obtient le même résultat pour
! (cf. 7.22c). En ce qui concerne la composante z (cf. 7.22a):
(7.40b)
α eαn α eβn βeαn βeβn
νµ
hνµ
α eαn ← βeαn α eβn ← βeβn
νµ
α eαn ← βeαn
E int = γ e cos ωµt( ) α eαn Sx βeαn ⋅ B1x + α eαn Sy βeαn ⋅ B1y + α eαn Sz βeαn ⋅ B1z⎡⎣ ⎤⎦.
α eαn Sx βeαn = α e Sx βe αn αn = 12α e S
+ + S− βe ≠ 0
α eαn Sy βeαn
α eαn Sz βeαn = α e Sz βe αn αn = α e Sz βe = −
12! α e βe = 0
Spectroscopie chapitre 7 ! 177
L'énergie d'interaction entre le dipôle de transition magnétique et le champ magnétique
oscillant est non nulle et par conséquent, cette interaction a bien lieu et la transition est
permise.
Considérons maintenant une transition qui modifie le spin nucléaire, ! :
! ,
(7.41)
où
! , (7.42a)
! , (7.42b)
! . (7.42c) L'énergie d'interaction entre le dipôle de transition magnétique et le champ magnétique
oscillant est nulle et par conséquent, la transition est interdite.
On en déduit les règles de sélection suivantes:
! , (7.43a)
! . (7.43.b)
Le spectre RPE d'un système avec une interaction hyperfine due à un noyau de spin 1/2
comprend donc deux transitions:
1) ! avec une énergie,
! ,
(7.44a)
2) ! avec une énergie,
! .
(7.44b)
Comme on travaille avec une fréquence micro-onde fixe, ! , et on balaie le champ
magnétique statique B0, on a pour la transition 1:
! ,
et ! , (7.45a)
où ! est exprimé en Tesla.
α eαn ← βeβn
E int = γ e cos ωµt( ) α eαn Sx βeβn ⋅B1x + α eαn Sy βeβn ⋅B1y + α eαn Sz βeβn ⋅B1z⎡⎣ ⎤⎦
α eαn Sx βeβn = α e Sx βe αn βn = 0
α eαn Sy βeβn = α e Sy βe αn βn = 0
α eαn Sz βeβn = α e Sz βe αn βn = 0
ΔMS = ±1
ΔMI = 0
α eαn ← βeαn
Eαα −E βα =
12geβeB0 −
12gnβnB0 +
14T +
12geβeB0 +
12gnβnB0 +
14T = geβeB0 +
12T
α eβn ← βeβn
Eαβ −E ββ =
12geβeB0 +
12gnβnB0 −
14T +
12geβeB0 −
12gnβnB0 −
14T = geβeB0 −
12T
νµ
geβeB0 +
12T = hνµ
B0 =
hνµ
geβe
−T2geβe
=hνµ
geβe
−T'2
T' =
Tgeβe
Spectroscopie chapitre 7 ! 178
On définit le champ magnétique de résonance en absence d'interaction hyperfine:
! et on voit que la transition 1 a lieu avec le champ de résonance:
! . (7.45b)
De même, le champ de résonance pour la transition 2 est:
(7.45c)
Le spectre RPE correspondant consiste donc en deux lignes séparées par T' (Figure 7.15).
! Figure 7.15: représentation schématique du spectre RPE d'un centre radicalaire avec un noyau de spin 1/2.
En général, l'interaction hyperfine est exprimée en unité de fréquence (MHz) et non en unité
de champ magnétique (T') ou d'énergie (T ). On effectue la transformation suivante:
! , (7.46)
avec ! , on a ! où T' est exprimé en Tesla.
Si par contre le spectre est mesuré en Gauss (1T=104G) on a: .
La présence de 7 lignes sur le spectre RPE du radical anion du benzène (Figure 7.10) peut
être expliquée par un couplage hyperfin dans un système avec 6 protons équivalents. On note
d'abord que ce spectre consiste en lignes positives et négatives. Comme nous en parlerons en
détail plus loin, ce spectre RPE représente la dérivée de l'intensité absorbée par rapport au
champ magnétique. Par conséquent, le pic d'absorption est localisé à la valeur du champ où
l'intensité change de signe.
B0 = hνµ geβe( )
B0 1( ) = hνµ
geβe
−T'2
=B0 −T'2
B0 2( ) =B0 +
T'2
ν =
geβe
hT'
ge ≈ 2 ν = 2.8 ⋅1010T'
T MHz = 2.8 ⋅T Gauss
Spectroscopie chapitre 7 ! 179
! Figure 7.16: éclatement des niveaux de spin électronique dû au couplage hyperfin avec deux noyaux équivalents et spectre RPE correspondant.
Pour comprendre la présence de 7 lignes, nous considérons un cas plus simple avec 2 protons
équivalents (Figure 7.16). L'interaction hyperfine avec un des protons conduit d'abord à un
éclatement en deux de chacun des niveaux de spin électronique avec un écart d'énergie de T/
2. Chacun des 4 niveaux résultants est lui-même éclaté en deux à cause de l'interaction
hyperfine avec le second proton. Ceci résulte en 8 niveaux, mais deux paires de ces niveaux
ont la même énergie, on obtient finalement 6 niveaux avec des énergies distinctes.
La Figure 7.16 montre qu'il n'y a que 4 transitions permises entre les 6 niveaux:
1) ! 2a) !
2b) ! 3) ! .
Comme les transitions 2a et 2b sont à même énergie, le spectre RPE ne contient que 3 lignes.
Comme la ligne centrale est due à 2 transitions (2a et 2b), son intensité est deux fois plus
élevée que celles des lignes latérales associées aux transitions 1 et 3.
On peut généraliser ce raisonnement pour un couplage avec
N protons équivalents. Dans ce cas, le nombre de lignes est
égal à N+1 et leur intensité est donnée par les coefficients du
triangle de Pascal (Figure 7.17).
La Figure 7.18 montre une série de spectres RPE avec un
éclatement des lignes dû à l'interaction hyperfine avec un
nombre de protons équivalents allant de 1 à 8. On remarque
que l'intensité des lignes est bien décrite par les coefficients
du triangle de Pascal.
α eαnαn ← βeαnαn α eβnαn ← βeβnαn
α eαnβn ← βeαnβn α eβnβn ← βeβnβn
Figure 7.17: triangle de Pascal.
Spectroscopie chapitre 7 ! 180
! Finalement, la Figure 7.19 montre le spectre RPE
mesuré avec le radical HOC.HCOOH. Dans ce cas, on
observe deux paires de lignes. Cet effet est dû au
couplage du spin électronique avec deux protons non-
équivalents. Lorsque deux noyaux ne sont pas
équivalents, les états ! ainsi que les
états ! ne sont pas dégénérés comme
le montre la Figure 7.20. Par conséquent, le spectre
RPE consiste en quatre lignes à partir desquelles on
peut déterminer les valeurs de T. Dans le cas du radical
HOC.HCOOH, l'éclatement principal est dû au
couplage avec le proton CH alors que l'éclatement plus
faible provient du couplage avec le proton OH.
! Figure 7.20: éclatement des niveaux de spin électronique dû au couplage hyperfin avec deux noyaux non-équivalents et spectre RPE correspondant.
α eβnαn et α eαnβn
βeβnαn et βeαnβn
Figure 7.18: spectres RPE de systèmes radicalaires couplés avec (a) 1 à (h) 8 protons équivalents.
Figure 7.19: spectre RPE du radical HOC.HCOOH (De 'Electron Spin Resonance' J. E. Wertz, J. R. Bolton, Chapman and Hall, NY, 1986)
Spectroscopie chapitre 7 ! 181
7.6. Origine de l'interaction hyperfine
Deux effets contribuent à l'interaction hyperfine. Il s'agit de l'interaction de contact de Fermi
et de l'interaction dipolaire. La différence principale entre ces deux contributions est que la
première est isotrope, c'est-à-dire ne dépend que de la distance entre l'électron et le noyau
alors que la seconde est anisotrope et dépend de l'orientation relative des dipôles magnétiques
électroniques et nucléaires.
7.6.1. Interaction de contact de Fermi
Il s'agit d'un effet dû à l'interaction magnétique entre l'électron et le noyau (si son spin est non
nul) lorsque l'électron est au contact avec le noyau, c'est-à-dire lorsque que la distance
électron-noyau est nulle. C'est un effet purement quantique dû à la nature ondulatoire des
particules, car deux particules 'classiques' ne peuvent pas être au même endroit. Cet effet a été
prédit théoriquement par Fermi en 1930. L'énergie d'interaction de contact de Fermi est
proportionnelle aux modules des spins électroniques et nucléaires:
! (7.47a)
où est la densité de probabilité de trouver l'électron au contact du noyau et aiso est la constante de couplage isotrope, qui est elle-même donnée par:
! . (7.48)
En principe, cette interaction a lieu entre l'électron célibataire et tous les noyaux sur lesquels
il réside et donc:
! . (7.47b)
La constante isotrope est une caractéristique du noyau. D'autre part, ! caractérise l'orbitale de l'atome n dans laquelle l'électron non apparié réside.
Si on considère les orbitales atomiques (Figure 7.21), on constate que seules les orbitales s
ont une amplitude non-nulle à r=0. Toutes les autres orbitales (p, d, f, …) ont un noeud à
l'origine. Si on prend le cas d'un électron dans l'orbitale 1s d'un atome d'hydrogène, la
distribution radiale est:
! (7.49)
E Fermi ∝ −µMe µM
n ,
E Fermi =2µ03
γ eS γ nI ϕ 0( ) 2 = 2µ03
geβe
!gnβn
!SI ϕ 0( ) 2 = aiso
!2SI ,
ϕn 0( ) 2
aiso =2µ03geβegnβn ϕ 0( ) 2
E Fermi =
aiso,n!2
SI nn∑
ϕ 0( ) 2
ϕ1s r( ) = 1πr0
3
⎛⎝⎜
⎞⎠⎟
1 2
exp −rr0
⎛⎝⎜
⎞⎠⎟
Spectroscopie chapitre 7 ! 182
où r0 est le rayon de Bohr (r0=52.9 pm).
! Figure 7.21: dépendance radiale des fonctions d'onde 1s, 2p et 3d de l'hydrogène.
Par conséquent, l'interaction hyperfine de contact de Fermi n'a lieu que si l'électron célibataire
réside dans une orbitale s. Dans tous les autres cas, ! . La constante de couplage isotrope est donc proportionnelle au caractère s de l'orbitale qui contient l'électron non-
apparié.
On peut définir une constante de couplage isotrope atomique, A*iso, qui quantifie le couplage
d'un électron dans une orbitale s de l'atome considéré. Quelques valeurs de A*iso sont
énumérées dans la Table 7.2.
Table 7.2: valeurs de la constante isotrope de différents atomes
7.6.2. Interaction dipolaire
Il s'agit d'une interaction dipôle-dipôle classique entre ! et ! . L'équation décrivant
l'énergie de cette interaction est quasiment identique à celle que nous avons décrite pour
l'interaction en deux dipôles électriques (5.19). Dans le cas présent, il s'agit de dipôles
magnétiques:
! , (7.50a)
ϕ 0( ) 2 = 0
Atome A*iso (MHz) Atome A*iso (MHz)
1H 1420 19F 47910
13C 3110 31P 10178
14N 1540 75As 9582
!µMe
!µMn
E dip =
µ0!µMe ⋅!µMn
4πd 3−3µ0
!µMe ⋅!d( ) !µM
n ⋅!d( )
4πd 5
Spectroscopie chapitre 7 ! 183
où ! est le vecteur reliant le centre des deux dipôles et d est son
module (Figure 7.22). Si on suppose que les deux moments
magnétiques s'alignent le long du champ magnétique externe, on
voit que ces deux dipôles sont parallèles et que le seul angle qui
peut varier est l'angle ! entre la direction du champ magnétique
et ! . Ainsi (7.50a) peut être exprimé sous la forme:
! , (7.50b)
! , (7.50c)
avec la constante de couplage anisotrope: ! . (7.51)
L'interaction dipolaire dépend donc de la position relative de
l'électron célibataire par rapport au noyau. Cependant, la position
de l'électron est décrite par la fonction d'onde électronique. Il faut
donc déterminer la valeur de moyenne de ! , en intégrant sur toute la région occupée par l'électron. Pour ce faire,
on exprime la position de l'électron en coordonnées sphériques
(Figure 7.23) et on intègre sur tout l'espace, c'est-à-dire sur ! , !
et r (équivalent à d).
Exemple: électron non-apparié dans une orbitale s.
On calcule d'abord la valeur moyenne de ! , ! , sur une sphère. Les limites d'intégration sont donc: ! et ! .
! , (7.52a)
avec le volume élémentaire: ! . Comme seule l'orientation intervient:
! et donc:
!d
θ
!d
E dip =
µ0µMe µM
n
4πd 3−3µ0 µM
e d cosθ( ) µMn d cosθ( )
4πd 5=µ0µM
e µMn
4πd 31− 3cos2θ( )
E dip = −
µ0geβegnβn
4π!2d 31− 3cos2θ( )SI =
aani!2
SI
aani = −µ0geβegnβn
4πd 31− 3cos2θ( )
1− 3cos2θ( ) d 3
θ φ
cos2θ cos2θ0 ≤θ ≤ π 0 ≤ φ ≤ 2π
cos2θ =cos2θ dv
sphère∫
dvsphère∫
dv = r2dr sinθ dθ dφdv = sinθ dθ dφ
Figure 7.22
Figure 7.23
Spectroscopie chapitre 7 ! 184
! , (7.52b)
où on a utilisé la relation: ! .
On remarque que la valeur moyenne ! est nulle et donc que ! est également égal à zéro. On en déduit que l'interaction dipolaire pour un électron célibataire
dans une orbitale s est nulle.
On peut répéter la même procédure pour un électron non-apparié dans une orbitale p. Les
valeurs de ! et ! sont énumérées dans la Table 7.3. Table 7.3
On voit que la valeur de ! dépend de l'orientation relative de l'orbitale p et du champ magnétique. La constante de couplage anisotrope est également désignée par ! et !
selon que le champ magnétique est parallèle ou perpendiculaire à l'orbitale p. La valeur de 2b0
est équivalente à aani mais pour un atome. Elle correspond à la constante atomique de
couplage hyperfin dipolaire. Les valeurs de b0 de quelques atomes sont énumérées dans la
Table 7.4.
Expérimentalement, la détermination de ! et ! requiert une orientation fixe de la molécule
paramagnétique par rapport au champ magnétique B0. Si le radical est en solution, il se
réoriente rapidement et par conséquent le couplage dipolaire effectif est donné par
! et, comme ! , le couplage dipolaire s'annule.
cos2θ =cos2θ sinθ dθ ⋅ dφ
0
2π
∫0
π
∫
sinθ dθ ⋅ dφ0
2π
∫0
π
∫=− cos3θ
3 0
π
⋅φ 02π
− cosθ 0π ⋅φ 0
2π =13
cosn x sin x dx =∫ −cosn+1 xn +1
1− 3cos2θ 1− 3cos2θ ⋅ r−3
1− 3cos2θ 1− 3cos2θ ⋅ r−3
Orientation
4/5
-2/5
-2/5
!τ⊥ = −b0
! 4 / 5 ⋅ r−3
!
!τ⊥ = −b0
!−µ0geβegnβn
4πd 31− 3cos2θ( )! 1− 3cos2θ
!−2 / 5 ⋅ r−3
!
!τ || = 2b0
!−2 / 5 ⋅ r−3
!
! 1− 3cos2θ r−3
1− 3cos2θ
τ ! τ⊥
τ || τ⊥
τ || + 2τ⊥( ) 3 τ || = −2τ⊥
Spectroscopie chapitre 7 ! 185
Par conséquent, en solution, la seule contribution à l'interaction hyperfine est l'interaction de
contact de Fermi. Table 7.4
7.6.3. Interprétation du couplage hyperfin
Nous avons vu que l'interaction hyperfine totale est donnée par:
! , (7.53)
et qu'elle dépend de l'orientation du radical dans le champ magnétique. Par conséquent, le
facteur de proportionnalité, T, est une grandeur tensorielle:
! , (7.54a)
où XYZ est un repère arbitraire. On peut toutefois trouver un repère xyz adapté à la symétrie de
du radical tel que:
! . (7.54b)
Ce tenseur peut-être séparé en deux tenseurs décrivant l'interaction de contact de Fermi et
l'interaction dipolaire:
! . (7.54c)
Etant donné que ! , on voit que:
! ,
! , (7.55)
Atome 2b0 (Gauss) -b0 (Gauss)
14N (2p) 3.5 34 -17
31P (3p) 4.2 206 -103
75As (4p) 9.2 183 -91.5
121Sb (5p) 12.3 449 -224.5
(bohr-3)r−3
E hf =T MSMI
!T =
T XX T XY T XZ
T YX T YY T YZ
T ZX T ZY T ZZ
⎛
⎝
⎜⎜⎜
⎞
⎠
⎟⎟⎟
!T =
T xx 0 00 T yy 0
0 0 T zz
⎛
⎝
⎜⎜⎜⎜
⎞
⎠
⎟⎟⎟⎟
!T =
T xx 0 00 T yy 0
0 0 T zz
⎛
⎝
⎜⎜⎜⎜
⎞
⎠
⎟⎟⎟⎟
=aiso 0 00 aiso 00 0 aiso
⎛
⎝
⎜⎜⎜
⎞
⎠
⎟⎟⎟+
τ xx 0 00 τ yy 0
0 0 τ zz
⎛
⎝
⎜⎜⎜
⎞
⎠
⎟⎟⎟
τ xx + τ yy + τ zz = 0
T xx +T yy +T zz = 3aiso + τ xx + τ yy + τ zz = 3aiso
aiso =
T xx +T yy +T zz
3
Spectroscopie chapitre 7 ! 186
et donc que:
! , (7.56a)
! , (7.56b)
! . (7.56c)
La détermination des valeurs de ! nécessite la mesure de la dépendance angulaire de l'interaction hyperfine avec un radical piégé dans un cristal.
La connaissance de aiso et des valeurs de permet de déduire la densité de spin sur un atome
donné. En effet, A*iso est la constante de couplage isotrope pour un électron non apparié
totalement localisé dans l'orbitale s d'un atome donné. De même 2b0 représente le couplage
dipolaire d'un électron localisé uniquement dans l'orbitale p d'un atome.
Par conséquent, en comparant ces valeurs avec celles de aiso et déterminées
expérimentalement:
! et ! , (7.57)
on obtient la densité de spin dans l'orbitale s et dans l'orbitale p d'un atome donné du radical.
On peut ainsi décrire la délocalisation de l'électron non apparié dans les différentes orbitales
atomiques participant à la SOMO (Singly Occupied Molecular Orbital).
7.7. Aspects pratiques de la spectroscopie RPE
Même si l'effet Zeeman électronique est connu depuis longtemps, il a fallu attendre 1945 pour
la première démonstration d'une expérience de RPE par Zavoisky. La raison principale est que
la spectroscopie RPE nécessite une source de radiation micro-onde relativement intense ainsi
qu'un détecteur de micro-onde sensible. Or une telle technologie n'est devenue disponible
qu'après le seconde guerre mondiale et le développement des radars.
A priori, la façon la plus évidente de mesurer un spectre RPE serait de placer l'échantillon
dans un champ magnétique externe constant, B0, et de varier la fréquence du champ
magnétique oscillant, B1. Ce procédé nécessite toutefois de disposer d'une source de radiation
micro-onde accordable. Une telle source n'est pas disponible. En effet, les micro-ondes sont
générées par un dispositif électronique appelé klystron. Un klystron est un circuit oscillant qui
génère et amplifie une onde électromagnétique de fréquence fixe dans les micro-ondes.
τ xx =T xx − aiso
τ yy =T yy − aiso
τ zz =T zz − aiso
!
T
τ
τ ||
aisoAiso*
τ !2b0
Spectroscopie chapitre 7 ! 187
! Figure 7.24: principe d'une mesure RPE. Le champ B0 est balayé alors que la fréquence du champ oscillant est fixe. Lorsque l'éclatement Zeeman est égal à ! , il y a absorption.
Par conséquent, dans un spectromètre RPE conventionnel, on utilise le champ magnétique
oscillant B1 à une fréquence fixe et on varie le champ magnétique 'statique' B0 (Figure
7.24). Dès que le champ B0 est tel que l'éclatement Zeeman est égale à , il y a absorption.
La valeur de B0 à laquelle la transition a lieu est appelée champ de résonance, Bres. Lorsque B0
dépasse la valeur de Bres, l'éclatement Zeeman est plus grand que et donc la transition
entre les deux niveaux de spin n'est plus possible par absorption.
Une représentation schématique d'un spectromètre RPE est illustrée dans la Figure 7.25. Le
champ B0 est généré par un électro-aimant et
l'échantillon est placé entre ses deux pôles.
Les micro-ondes générées par un klystron
sont amenées vers l'échantillon via un guide
d'onde. L'endroit où l'échantillon est
localisé agit également comme une cavité
micro-onde. Cette cavité agit comme un
caisse de résonance pour la micro-onde, et
l'intensité de cette dernière est maximale à
cet endroit. Les solvants très polaires
comme l'eau absorbent fortement les micro-
ondes et pour minimiser cet effet, ce type
d'échantillon est placé dans un capillaire.
Historiquement, on détectait l'intensité micro-onde transmise par l'échantillon. Actuellement,
on détecte plutôt l'intensité réfléchie, ce qui donne un résultat qualitativement équivalent.
hν µhν µ
νµ
hνµ
hνµ
Figure 7.25: représentation schématique d'un spectromètre RPE.
Spectroscopie chapitre 7 ! 188
Finalement, afin d'obtenir un gain de sensibilité, on utilise un mode de détection dit
'synchrone' ('phase-sensitive'). En fait, l'intensité du champ B0 est modulée en fréquence, c'est-
à-dire que B0 varie de façon périodique avec une fréquence typique de quelques kHz. Par
conséquent, lorsque B0 est proche de Bres, on observe une forte variation du signal micro-onde
réfléchi avec la modulation de B0. Le détecteur synchrone mesure cette variation de signal
durant la modulation. Comme le montre la Figure 7.26, cette variation de signal est
proportionnelle à la pente de la ligne RPE. Par conséquent, le signal généré par le détecteur
est proportionnel à la dérivée de la ligne RPE. Cette détection synchrone est à l'origine de
l'allure particulière des spectres RPE. Cette détection permet d'augmenter le rapport signal/
bruit de plusieurs ordres de grandeur.
! Figure 7.26: illustration de l'effet de la modulation du champ magnétique B0 sur la forme d'une ligne RPE.
On distingue différents types de spectromètres RPE selon la fréquence micro-onde utilisée,
! . Par exemple, un spectromètre RPE à bande Q utilise un klystron générant une micro-onde
à 34.0 GHz. Par conséquent, si on considère un facteur ge=2 et l'équation (7.17), le champ de
résonance est:
!
La Table 7.5 énumère les bandes micro-ondes utilisées en RPE ainsi que les champs
magnétiques de résonance.
νµ
B0 =hνµ
2βe
=6.626 ⋅10−34 Js ⋅ 34 ⋅109 s−1
2 ⋅9.27 ⋅10−24 JT−1 = 1.2 T
Spectroscopie chapitre 7 ! 189
Table 7.5
7.8. Intensité et largeur des lignes RPE
Pour qu'une transition RPE soit possible, il faut que l'échantillon présente une aimantation qui
est un moment magnétique macroscopique:
! , (7.58)
où ! est le moment magnétique associé au spin électronique et N est le nombre de spins par
unité de volume. A l'équilibre thermique, et avec un champ magnétique nul, les populations
des deux états sont identiques et l'aimantation est nulle. Sous l'influence d'un champ
magnétique statique, la population relative des deux états est donnée par une distribution de
Boltzmann:
! . (7.59)
Par exemple, avec B0=1 T, ge=2 et T=300 K, .
Ce rapport est très faible, mais il résulte toutefois en une aimantation non nulle. Si
l'aimantation était nulle, il ne pourrait pas y avoir d'interaction avec un champ magnétique
oscillant, B1(t). Autrement dit, si les populations des deux niveaux était identiques, la
probabilité de la transition ! par absorption serait identique à la probabilité de la
transition ! par émission stimulée et par conséquent l'échantillon serait transparent
à la micro-onde.
La probabilité d'une transition ! est proportionnelle à la différence des populations
des niveaux ! et ! . A 300 K, cette différence est très petite et par conséquent les lignes
RPE sont très peu intenses. L'interaction avec la radiation micro-onde conduit la population
Bande micro-onde
Bres (G) Bres (T)
L 1.1 392 0.039
S 3 1070 0.107
X 9.75 3480 0.348
Q 34 12000 1.2
W 94 34000 3.4
! GHzνµ
!M =
!µM ,ie
i=1
N
∑
!µMe
nαnβ
= exp −ΔEαβ
kBT⎛⎝⎜
⎞⎠⎟= exp −
geβeB0kBT
⎛⎝⎜
⎞⎠⎟
nα nβ = 0.996
α e ← βe
α e → βe
α e ← βe
α e βe
Spectroscopie chapitre 7 ! 190
du niveau de spin supérieur et donc à une diminution de la différence de populations. On
pourrait donc à priori s'attendre à ce qu'une irradiation micro-onde continue conduise à une
diminution de cette différence jusqu'à une valeur de zéro. Heureusement pour la spectroscopie
RPE ce n'est pas le cas, car la population de l'état supérieur se relaxe rapidement vers l'état
! . En effet, des transitions entre les états de spin sont possibles même en absence
d'irradiation micro-onde. Ces processus sont appelés transitions induites par le milieu. Elles
ont lieu parce le système quantique en question est couplé avec le reste de l'échantillon, le
milieu, qui agit comme un réservoir thermique, fournissant de l'énergie pour une transition
! et absorbant l'énergie dissipée lors d'une transition ! .
Considérons maintenant la variation de population des différents niveaux de spin juste après
une irradiation micro-onde. Nous définissons d'abord:
! , (7.60a)
! , (7.60b)
! à l'équilibre, (7.60c)
et donc ! et ! .
Les transitions induites par le milieu sont essentiellement
intramoléculaires et par conséquent la vitesse de changement de
D suit une cinétique de premier ordre:
! (7.61)
où ! et ! sont les constantes de vitesse pour les transitions
induites par le milieu vers le haut ( ! ) et vers le bas
( ! ) (Figure 7.27) et le facteur 2 rend compte du fait
qu'une transition change D de 2. L'équation (7.61) peut être
réécrite:
! (7.61b)
A l'équilibre thermique, D est constant. Par conséquent: ! et:
! . (7.62)
βe
α e ← βe α e → βe
S = nβ + nαD = nβ − nαD0 = nβ − nα
nα =12S − D( ) nβ =
12S + D( )
dDdt
= −2nβk↑ + 2nαk↓
k↑ k↓α e ← βe
α e → βe
dDdt
= − S + D( )k↑ + S − D( )k↓ = S k↓ − k↑( ) − D k↓ + k↑( ) = k↓ + k↑( ) k↓ − k↑( )k↓ + k↑( ) S − D
⎡
⎣⎢⎢
⎤
⎦⎥⎥
dD dt = 0
D0 = Sk↓ − k↑( )k↓ + k↑( )
Figure 7.27
Spectroscopie chapitre 7 ! 191
On peut réécrire (7.61b):
! . (7.61c)
On définit le temps de relaxation spin-milieu, T1:
! , (7.63)
et ! . (7.61d)
Comme l'aimantation le long de l'axe z, Mz, est proportionnelle à , on peut
réécrire (7.61) sous la forme suivante:
! . (7.64)
La solution de cette équation, développée par Félix Bloch en 1946, est:
! , (7.65)
où ! est la valeur de l'aimantation juste après l'irradiation micro-onde.
Par conséquent, on voit que T1 peut être considéré comme la durée de vie d'un état de spin. Sa
signification est équivalente à celle du temps de vie de population discuté aux chapitres 1 et 4.
En spectroscopie de résonance magnétique, T1 est également appelé temps de relaxation
longitudinal car il est relié à la variation de la composante de l'aimantation parallèle au champ
magnétique externe (Figure 7.28, A ! B). Cette illustration montre qu'une relaxation de la
population de l'état de spin ! vers l'état ! conduit à une augmentation de la composante
z de l'aimantation, mais laisse les composantes transversales inchangées. En fait, étant donné
que l'aimantation effectue un mouvement de précession autour de l'axe z, les composantes x et
y oscillent périodiquement (cf. 7.23) mais la somme des vecteurs ! est constante.
Il faut noter que si l'intensité de l'irradiation micro-onde est trop élevée, ce processus de
relaxation spin-milieu n'est pas suffisamment efficace pour maintenir ! différent
de zéro et, par conséquent, l'intensité de la ligne RPE diminue et disparait. Il s'agit du
phénomène de saturation.
Au chapitres 1 et 4, nous avons vu que la largeur d'une ligne d'absorption résultant d'une
interaction entre un dipôle de transition électrique et le champ électrique de la lumière dépend
de T2, le temps de déphasage. Nous venons de voir qu'on peut également définir un T1 pour
dDdt
= k↓ + k↑( ) D0 − D( )
T1 =1
k↓ + k↑dDdt
= −D − D0
T1D = nβ − nα
dMz
dt= −
Mz − Mz0
T1
Mz t( ) = Mz0 + Mz* − Mz0( )exp −
tT1
⎛⎝⎜
⎞⎠⎟
Mz*
→
α e βe
!Mx +
!My
D = nβ − nα
Spectroscopie chapitre 7 ! 192
les populations d'états de spin. De même, il existe également un T2 qui est dans ce cas appelé
temps de relaxation spin-spin ou temps de relaxation transversal.
! Figure 7.28: représentation schématique du déclin de l'aimantation. La relaxation de la population de l'état de spin supérieur (A ! B) conduit à une variation de la composante z (longitudinale) de l'aimantation avec la constante de temps T1. Le déphasage de la fonction d'onde de spin (A C) conduit à une diminution des composantes transversales de l'aimantation avec la constante de temps T2,
Alors que T1 est associé à une variation de Mz, c'est-à-dire à un changement des populations
des niveaux et , T2 est dû à une variation de la composante transversale, ,
de l'aimantation. Un tel effet est illustré par la Figure 7.28 (A ! C). Avant l'irradiation,
l'aimantation due à la différence des populations, D, est orientée le long de z. L'irradiation
micro-onde résulte en une diminution de D et donc de l'aimantation le long de z. En fait, les
spins qui ont interagi avec la radiation sont parfaitement en phase et par conséquent, une
composante transversale non-nulle de l'aimantation est crée (Figure 7.28A). Ces deux effets
sont équivalents à un basculement partiel de l'aimantation de l'axe z vers le plan xy. Cette
aimantation transversale décroît par une perte progressive de la phase relative des
mouvements de précession de chacun des moments magnétiques qui composent l'aimantation
transversale. Ce processus suit une cinétique exponentielle avec une constante de temps T2
(Figure 7.28C).
→→
α e βe !Mx +
!My
→
Spectroscopie chapitre 7 ! 193
La largeur d'une ligne RPE homogène est donc de forme Lorentzienne avec une largeur à mi-
hauteur:
! (7.66)
où cette relation est obtenue à partir de l'équation suivante:
! . (7.67)
Une ligne RPE peut être également élargie de façon inhomogène. Un élargissement
inhomogène est dû au fait que tous les radicaux libres de l'échantillon ne ressentent pas
exactement le même champ magnétique B0. Le champ de résonance Bres n'est pas le même
pour tous les spins. Un tel phénomène peut être causé par exemple par un champ magnétique
externe inhomogène, ou par des environnements différents. Une ligne RPE inhomogène est en
général de forme Gaussienne car elle consiste en une distribution Gaussienne de lignes
homogènes comme illustré dans la Figure 7.29.
! Figure 7.29: largeurs homogènes et inhomogènes d'une ligne RPE.
ΔBres =hgeβe
1πT2
Δν =geβe
hΔBres =
1πT2