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Infections bactériennes Évaluer le risque global : rechercher les facteurs favorisants : co-morbidités (diabète, diverticulites, affections respiratoires, plaies chroniques), la présence de matériel étranger (prothèses, cathéter à demeure), l’utilisation de traitements immuno-suppresseurs ou corticoïdes actuels ou antérieurs ; rechercher par l’interrogatoire et l’examen physique tout foyer infectieux patent ou latent. Contrôler les vaccinations : chez tous les patients vérifier que les vaccinations sont à jour. Il est recommandé d’envisager la vaccination anti-pneumococcique si possible au moins 2 semaines avant de débuter le tocilizumab, comme pour les autres biothérapies indiquées dans la Polyarthrite Rhumatoïde. Éliminer toute contre-indication à la prescription du tocilizumab : le tocilizumab est contre- indiqué chez les patients présentant des infections sévères et non contrôlées (septicémies, infections opportunistes), en cas de situations à haut risque d’infection bactérienne (infection prothétique récente, cathéter à demeure) (1) . En cas de diverticulite : voir en particulier la fiche « Que faire en cas d’antécédent ou d’apparition de pathologie iléo-colique ». Dépister une tuberculose latente si cela n’a pas été effectué dans les 2 ans précédents : comme pour les autres traitements biologiques, un dépistage de la tuberculose doit être effectué avant de débuter le traitement (RCP), conformément aux recommandations de l’AFSSAPS (2) : Tubertest ® à 5 unités ou test in vitro Quantiféron Gold ® ou T-Spot-TB ® actuellement en cours d’évaluation en France, radiographie pulmonaire. En cas de tuberculose latente, traiter par antibioprophylaxie anti-tuberculeuse (isoniazide (INH) 9 mois, ou association INH et rifampicine 3 mois) et ne débuter le traitement par tocilizumab qu’après au moins 3 semaines de traitement anti-tuberculeux. Infections virales Les résultats des sérologies VHB, VHC et VIH doivent être connus avant de débuter le traitement. En cas de sérologie hépatite C positive : en dehors de l’existence d’une fibrose pré-existante associée à l’infection chronique, il n’y a pas a priori de contre-indication formelle à l’utilisation du tocilizumab. En cas de sérologie hépatite B positive : la positivité de l’antigène HBs, et d’autant plus si l’évaluation hépatique ne suggère pas de fibrose significative, ne constitue pas une contre- indication à l’utilisation du tocilizumab ; mais, comme avec les autres traitements immuno- suppresseurs, elle devra conduire à un traitement dit « préemptif » par des analogues nucléosidiques (lamivudine, entécavir) ou nucléotidiques (ténofovir) (voir fiche « Que faire en cas d’antécédent ou d’apparition d’anomalies hépatiques ? »). Que faire avant d’initier un traitement par tocilizumab pour prévenir le risque infectieux ? 1 Que faire en cas d’antécédent ou d’apparition d’infections bactériennes et virales Evidence Based Medicine Recommandations officielles Avis des experts

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Évaluer le risque global : rechercher les facteurs favorisants : co-morbidités (diabète, diverticulites, affections respiratoires, plaies chroniques), la présence de matériel étranger (prothèses, cathéter à demeure), l’utilisation de traitements immuno-suppresseurs ou corticoïdes actuels ou antérieurs ; rechercher par l’interrogatoire et l’examen physique tout foyer infectieux patent ou latent. d’apparition de pathologie iléo-colique ». 1

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• Infections bactériennes

! Évaluer le risque global : rechercher les facteurs favorisants : co-morbidités (diabète, diverticulites, affections respiratoires, plaies chroniques), la présence de matériel étranger(prothèses, cathéter à demeure), l’utilisation de traitements immuno-suppresseurs ou corticoïdes actuels ou antérieurs ; rechercher par l’interrogatoire et l’examen physiquetout foyer infectieux patent ou latent.

! Contrôler les vaccinations : chez tous les patients vérifier que les vaccinations sont à jour.Il est recommandé d’envisager la vaccination anti-pneumococcique si possible au moins2 semaines avant de débuter le tocilizumab, comme pour les autres biothérapies indiquées dans la Polyarthrite Rhumatoïde.

! Éliminer toute contre-indication à la prescription du tocilizumab : le tocilizumab est contre-indiqué chez les patients présentant des infections sévères et non contrôlées (septicémies,infections opportunistes), en cas de situations à haut risque d’infection bactérienne (infection prothétique récente, cathéter à demeure) (1).

! En cas de diverticulite : voir en particulier la fiche « Que faire en cas d’antécédent ou d’apparition de pathologie iléo-colique ».

! Dépister une tuberculose latente si cela n’a pas été effectué dans les 2 ans précédents :comme pour les autres traitements biologiques, un dépistage de la tuberculose doit êtreeffectué avant de débuter le traitement (RCP), conformément aux recommandations del’AFSSAPS (2) : Tubertest® à 5 unités ou test in vitro Quantiféron Gold® ou T-Spot-TB®

actuellement en cours d’évaluation en France, radiographie pulmonaire. En cas de tuberculose latente, traiter par antibioprophylaxie anti-tuberculeuse (isoniazide (INH) 9 mois, ou association INH et rifampicine 3 mois) et ne débuter le traitement par tocilizumabqu’après au moins 3 semaines de traitement anti-tuberculeux.

• Infections virales

Les résultats des sérologies VHB, VHC et VIH doivent être connus avant de débuter le traitement.

En cas de sérologie hépatite C positive : en dehors de l’existence d’une fibrose pré-existanteassociée à l’infection chronique, il n’y a pas a priori de contre-indication formelle à l’utilisationdu tocilizumab.

En cas de sérologie hépatite B positive : la positivité de l’antigène HBs, et d’autant plus sil’évaluation hépatique ne suggère pas de fibrose significative, ne constitue pas une contre-indication à l’utilisation du tocilizumab ; mais, comme avec les autres traitements immuno-suppresseurs, elle devra conduire à un traitement dit « préemptif » par des analoguesnucléosidiques (lamivudine, entécavir) ou nucléotidiques (ténofovir) (voir fiche « Que faire encas d’antécédent ou d’apparition d’anomalies hépatiques ? »).

Que faire avant d’initier un traitement par tocilizumab pour prévenir le risque infectieux ?

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Que faire en cas d’antécédent ou d’apparition

d’infections bactériennes et viralesEvidence Based Medicine Recommandations officielles Avis des experts

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En cas de sérologie VIH positive : un traitement par tocilizumab peut être envisagé en cas dePolyarthrite Rhumatoïde très réfractaire et invalidante avec surveillance étroite de l’évolutionde la charge virale plasmatique sous traitement.

Un avis spécialisé (hépatologue, infectiologue) sera requis avant toute décision thérapeutique.

Sous tocilizumab, de nombreux signes d’appels peuvent apparaître :! fièvre! frissons! asthénie! douleurs abdominales! toux! dyspnée! éruption cutanée! brûlures mictionnelles! réapparition brutales de douleurs articulaires, mono ou oligo-arthrite très fluxionnaire! en fonction de la localisation du sepsis : douleur lombaire dans une pyélonéphrite ou une

spondylodiscite, douleur abdominale dans une diverticulite…! réaccentuation d’un syndrome inflammatoire biologique! hyperleucocytose! augmentation considérable de la protéine C réactive (CRP)

Une vigilance particulière est à apporter au risque infectieux sous tocilizumab carl’inhibition de l’IL-6, comme celle du TNF, peut atténuer les signes et symptômes del’inflammation aigue associée à l’infection : la température, la leucocytose, les tauxde CRP (et d’autres protéines de la phase aigue de l’inflammation) peuvent ne pasaugmenter du fait de l’inhibition de l’IL-6.

Comme pour toute biothérapie, la survenue d’une infection sous traitement par tocilizumabimpose la suspension de ce dernier, l’évaluation de la sévérité de l’infection, les prélèvementsmicrobiologiques chaque fois que possible et, sans en attendre les résultats, la mise en routerapide d’un traitement anti-infectieux, en surveillant et évaluant son efficacité.

Une vigilance particulière est à apporter au risque infectieux sous tocilizumab car l’inhibitionde l’IL-6, comme celle du TNF, peut atténuer les signes et symptômes de l’inflammationaigue associée à l’infection : la température, la leucocytose, les taux de CRP (et d’autresprotéines de la phase aigue de l’inflammation) peuvent ne pas augmenter du fait de l’inhibitionde l’IL-6. Dans cette situation, d’autres marqueurs biologiques pourraient être utiles, commepar exemple le CD 64 (3).

Au moindre doute, l’administration de tocilizumab doit être interrompue jusqu’àl’élimination du diagnostic d’infection, ou à son contrôle et à sa guérison si celle-cin’est pas sévère. En cas d’infection sévère, le tocilizumab est contre-indiqué (cf supra) (1).

Quelle conduite à tenir en cas d’infection sous tocilizumab ?

Quels sont les signes d’appel d’infections sous tocilizumab ?

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Toute infection sévère (c’est-à-dire nécessitant une hospitalisation ou une antibiothérapieintra-veineuse) fera l’objet d’une déclaration à la pharmacovigilance.

A la suite d’un épisode infectieux sévère, le tocilizumab ne sera repris qu’après guérisoncomplète, et vérification de l’absence de réapparition des signes infectieux après au moins8 jours d’arrêt du traitement anti-infectieux.

La reprise du traitement se fera sous étroite surveillance. La réapparition rapide de la symp-tomatologie infectieuse posant alors la question de l’arrêt définitif du traitement.

• Rôle de l’IL-6 dans les défenses anti-infectieuses

L’IL-6 exerce un rôle activateur sur le macrophage et le polynucléaire, l’expression des molécules d’adhésion, le profil de chimiokines et la production d’anticorps, et de ce fait estimpliquée dans les défenses anti-infectieuses. L’IL-6 diminue la réplication du VHB (2) et, acontrario, les souris déficientes en IL-6 sont plus susceptibles à certaines infections (listériose,toxoplasmose, candidose) (4). L’inhibition de l’IL-6 par le tocilizumab est donc susceptibled’interférer avec ces capacités de défense anti-bactérienne et de favoriser la survenue/réactivation de pathologies infectieuses. Le rôle de l’IL-6 dans les défenses anti-mycobactériennesest probablement secondaire mais cette cytokine participe à l’activation des macrophages.

Les précautions vis-à-vis des risques infectieux sont les mêmes que pour toute biothérapie.

• Risques d’infections bactériennes et virales sous tocilizumab

Au cours des études contrôlées, le taux d’infections rapporté avec le tocilizumab (8 mg/kg)+ DMARD a été de 127/100 patients-années, contre 112/100 patients-années dans lesgroupes placebo + DMARD. Lors des études d’extension en ouvert à long terme, le tauxd’infection avec tocilizumab + DMARD a été de 116 évènements / 100 patients-années (1).

Infections graves

Lors des études contrôlées (LITHE, OPTION, TOWARD, RADIATE), le taux d’infections sé-vères avec tocilizumab 8 mg/kg + DMARD (n = 1582 patients) a été de 5,2 évènements pour100 patients-années [IC95 = 3,7-7,1], comparé à 3,8/100 patients-années [IC95=2,3-5,9]dans le groupe placebo + DMARD (n = 1170 patients) (5). En monothérapie (étude AMBITION),le taux d’infections graves a été de 2,9/100 patients-années dans le groupe tocilizumab [IC95 = 0,8-7,3] et 1,5/100 patients-années [IC95 = 0,2-5,4] dans le groupe méthotrexate (6).

Les infections graves rapportées ont consisté en : pneumonie, cellulite, zona, gastro-entérite,diverticulite, septicémie et arthrite bactérienne.

Van Vollenhoven (7) rapporte dans les études prolongées (n = 4009 patients, durée moyennede suivi = 2,4 ans) un taux d'infections sévères de 4,7/100 patients-années, sans augmen-tation de celui ci avec la durée d'exposition.

L’analyse groupée des phases d’extension de 4 études de phase III (AMBITION, OPTION,TOWARD, RADIATE) menées dans la PR sur 2562 patients exposés au tocilizumab, avec

Pour en savoir plus sur l’état des connaissances

Quand reprendre le traitement par tocilizumab ?

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une durée moyenne de 1,5 ans, rapporte une incidence d’infections sévères de 3,9 pour100 patients-années [IC95 = 3,3-4,6]. Le risque est statistiquement associé à la présenced’un diabète, un âge supérieur à 65 ans, un antécédent d’infection, la corticothérapie générale,mais n’est pas associé à la neutropénie (8).

Au Japon, l’extension en ouvert à 5 ans, d’une étude de phase II (étude STREAM), a concerné143 patients, dont 66% ont été exposés durant 5 ans au tocilizumab. Le taux d’infection sévèresur ces 612 patients-années en monothérapie est de 5,7/100 patients-années (9).

La tuberculose apparaît rare (10) : 6 cas sur 10 552 patients-années de traitement par tocilizumab, dont 2 n’avaient pas bénéficié du dépistage.

Il convient de signaler la possibilité d’exacerbation d’une infection EBV active chronique sousanticorps anti-IL-6 (11) et un cas d’hépatite chronique B traitée durant 5 ans par tocilizumaben association à un antiviral, sans aggravation de l’hépatite (12).

D’exceptionnels cas d’infections aiguës liées à la réactivation du virus du groupe Herpes(EBV, CMV), compliqués de syndrome d’activation macrophagique, ont été observés (13, 14).

1. Résumé des Caractéristiques du produit tocilizumab.2. AFSSAPS. Prévention et prise en charge des tuberculoses survenant sous anti-TNF.

http://www.agmed.sante;gouv.fr/htm/10/tnf/reco.pdf.3. Matsui T, Komiya A,. Nakayama H et al. Neutrophil CD 64 as an infection marker for RA patients treated with

tocilizumab. Ann Rheum Dis 2009;68(suppl3):570 (Résumé SAT 0090).4. Gabay C. Interleukin 6 and chronic inflammation. Arthritis Res Ther 2006;8 (Suppl. 2):53.5. Smolen J, Baulieu AD, Dikranian A et al. Safety of Tocilizumab in patients with rheumatoid arthritis: pooled

analysis of five phase 3 clinical trials. Arthritis Rheum 2008;58 (Suppl): S-784 (Résumé 1669).6. Jones G, Sebba A, Gu J et al. Comparison of tocilizumab monotherapy versus methotrexate monotherapy

in patients with moderate to severe rheumatoid arthritis: The AMBITION study. Ann Rheum Dis 2009 [Epubahead of print].

7. Van Vollenhoven RF, Keystone E, Furle R et al. Gastrointestinal safety in patients with rheumatoid arthritis (RA)treated with tocilizumab in the Roche clinical trials database. ACR 2009, 16-21 Octobre, Philadelphia, Pennsylvania.Pres. 1613.

8. Kremer J, van Vollenhoven R, Ridley DJ et al. Relationship between patient characteristics and the developmentof serious infections in patients receiving tocilizumab: results from long-term extension studies with a follow-upduration of 1.5 years. Arthritis Rheum 2008;58(Suppl):S-783 (Résumé 1668).

9. Nishimoto N, Miyasaka N, Yamamoto K et al. Long-term safety and efficacy of tocilizumab, an anti-interleukin-6receptor monoclonal antibody, in monotherapy, in patients with rheumatoid arthritis (the STREAM study): evidence of safety and efficacy in a 5-year extension study. Ann Rheum Dis. 2009;68:1580-4.

10. van Vollenhoven R, Nishimoto N, Yamanaka H et al. Experience with mycobacterium tuberculosis infectionreported in the tocilizumab worldwide RA safety database. Ann Rheum Dis 2009;68(suppl3):567 (RésuméSAT0081).

11. Ogawa J, Harigai M, Akashi T et al. Exacerbation of chronic active Epstein-Barr virus infection in a patientwith rheumatoid arthritis receiving humanised anti-interleukin-6 receptor monoclonal antibody. Ann RheumDis 2006;65:1667-9.

12. Nagashima T, Minota S. Long-term tocilizumab therapy in a patient with rheumatoid arthritis and chronichepatitis B. Rheumatology 2008;47:1838-40.

13. Nishimoto N, Yoshizaki K, Miyasaka N et al. Treatment of rheumatoid arthritis with humanized anti-interleukin-6receptor antibody: a multicenter, double-blind, placebo-controlled trial. Arthritis Rheum. 2004;50:1761-9.

14. De Bandt M, Saint-Marcoux B. Tocilizumab for multirefractory adult-onset Still's disease. Ann Rheum Dis2009;68:153-4.

Bibliographie

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