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« Délocalisations et inégalités entre TQ et TNQ dans les pays du Nord Evaluation à l’aide d’un MEGC pour le cas de la France-PECO » Radouane RAOUF Enseignant-chercheur en sciences économiques : FSJES, université Mohammed V, Souisssi, Rabat, Maroc. Tel : 002126 67 42 57 65, [email protected] , [email protected] Résumé: Dans ce papier, nous tacherons à analyser l’impact des délocalisations sur l’emploi en France. Dans l’analyse économique, on associe souvent le phénomène de délocalisations au problème de chômage. Il s’agit ici de simuler, à l’aide d’un modèle d’équilibre général calculable (MEGC), les liens entre les délocalisations vers les PECO et le creusement des inégalités entre les travailleurs qualifiés (TQ) et les travailleurs non qualifiés (TNQ) en France. Pour ce faire, nous aborderons dans un premier temps les apports théoriques et empiriques dans l’explication de la relation délocalisation- emploi. Dans un deuxième temps, nous élaborerons un MEGC pour le cas de la France afin de tester l’impact des délocalisations, vers les PECO, sur la rémunération et le taux de chômage des travailleurs TQ et des TNQ. La simulation dans ce modèle, dans une logique prospective, passe par l’augmentation des IDE sortants à destination des PECO qui sont considérés comme des délocalisations. Mots-clefs : Délocalisation, IDE, TQ-TNQ, inégalités, MEGC. Abstract: In this paper, we will try to analyze the impact of offshoring on employment in France. In economic analysis, is often associated the phenomenon of relocation to the problem of unemployment. Using a computable general equilibrium model (CGE), we simulate the relationship between offshoring to the CEECs and the rising inequality between skilled and unskilled workers in France.

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« Délocalisations et inégalités entre TQ et TNQ dans les pays du NordEvaluation à l’aide d’un MEGC pour le cas de la France-PECO »

Radouane RAOUF

Enseignant-chercheur en sciences économiques : FSJES, université Mohammed V, Souisssi, Rabat, Maroc.Tel : 002126 67 42 57 65, [email protected] , [email protected]

Résumé: Dans ce papier, nous tacherons à analyser l’impact des délocalisations sur l’emploi en France. Dans l’analyse économique, on associe souvent le phénomène de délocalisations au problème de chômage. Il s’agit ici de simuler, à l’aide d’un modèle d’équilibre général calculable (MEGC), les liens entre les délocalisations vers les PECO et le creusement des inégalités entre les travailleurs qualifiés (TQ) et les travailleurs non qualifiés (TNQ) en France.

Pour ce faire, nous aborderons dans un premier temps les apports théoriques et empiriques dans l’explication de la relation délocalisation-emploi. Dans un deuxième temps, nous élaborerons un MEGC pour le cas de la France afin de tester l’impact des délocalisations, vers les PECO, sur la rémunération et le taux de chômage des travailleurs TQ et des TNQ. La simulation dans ce modèle, dans une logique prospective, passe par l’augmentation des IDE sortants à destination des PECO qui sont considérés comme des délocalisations.

Mots-clefs : Délocalisation, IDE, TQ-TNQ, inégalités, MEGC.

Abstract: In this paper, we will try to analyze the impact of offshoring on employment in France. In economic analysis, is often associated the phenomenon of relocation to the problem of unemployment. Using a computable general equilibrium model (CGE), we simulate the relationship between offshoring to the CEECs and the rising inequality between skilled and unskilled workers in France.

In order to study this impact, we will initially talk about theoretical and empirical contributions explaining the relation “relocation-employment”. In a second step, we will develop a CGE model for the case of France to test the impact of offshoring to the CEECs, on wage and unemployment rate for skilled and unskilled workers. The simulation in this model, in a prospective sense, through the increase in outward FDI destination in the CEECs that are considered as relocation.

Keywords: Relocation, FDI, Skilled and Unskilled workers, inequality, CGEM. JEL: F12, F16, F21

Introduction

L’ampleur des inégalités salariales ou du chômage que connaissent de nombreux pays industrialisés, notamment la France, a fait resurgir l’inquiétude qui régnait dans les années 90, liée à la concurrence menée par les pays en développement ou pays à bas salaires (PBS). Cette menace se conjugue en deux séries de phénomènes qui ont, a priori, des effets négatifs sur l’emploi. Il s’agit, d’une part, de la montée en puissance de nouveaux pays émergents (Chine, Inde…) et l’élargissement de l’Europe avec l’adhésion des pays de l’Europe Centrale et Orientale (PECO) qui constituent une ressource inépuisable en main-d’œuvre non qualifiée et qualifiée qui peut se substituer à celle de la France et des autres pays industrialisés. D’autre part, le second phénomène est la multiplication des transferts des capitaux et surtout des unités de production à travers les délocalisations1.

Ces mouvements ne passent pas sans effet. L'ampleur de l'impact du commerce international et des délocalisations des activités productives sur le marché du travail, sur l’augmentation du niveau de chômage et des inégalités, alimente une controverse dans les pays industrialisés et au sein même de la discipline de l'économie internationale que chez les économistes. En France comme dans de nombreux autres pays développés, la question des délocalisations suscite un vif débat. Les pays émergents et les PECO2 constituent les pays qui reçoivent le plus de délocalisations au sens strict.

En ce qui concerne l’impact sur l’emploi, les points de vue et les résultats divergent entre les économistes, même sur le plan empirique. Pour beaucoup d’économistes, les délocalisations ne sont pas un problème pour les pays industrialisés : le jeu du marché permet d’atteindre une situation optimale ; toute mesure interventionniste de protection porte une atteinte à l’équilibre du marché et à la croissance des pays en développement. D’autres pensent, cependant, que la question des délocalisations soulève des problèmes de croissance et d’emplois dans les pays d’origines.

Les faits révèlent une distorsion et un écart qui se creuse en termes de salaire et des inégalités entre TQ et TNQ. On assiste à une forme de désindustrialisation des pays riches et une monté en puissance des exportations de biens manufacturés de la part des pays en voie de développement (PVD) et des pays émergents. Or, depuis un certain 1Les délocalisations concernent toute fermeture partielle ou générale d’unités de production dans le territoire national et la réouverture concomitante d’une unité productive à l’étranger, ou le recours à la sous-traitance sans changer la destination des produits ou les services. En revanche, toute création de nouvelles entités (ex-nihilo ou greenfield) à l'étranger ne peut être considérée comme une délocalisation lorsque ni l’emploi ni les exportations ne sont touchés. Il s’agit ici plutôt d’une logique d'IDE. 2 Pour la France, Les PECO bénéficient d’un avantage en termes de proximité géographique auquel s’ajoute, avec l’entrée dans l’UE, un avantage institutionnel en termes de sécurité juridique, ainsi qu’une stabilité politique et sociale. Ces avantages constituent des déterminants importants pour attirer les délocalisations et les IDE.

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temps, les délocalisations concernent aussi des secteurs qui sont technologiquement plus intensifs [Artus (2006)], comme l’automobile et l’électronique. Elles concernent aussi de plus en plus les services aux entreprises via le développement des NTIC (centres d’appels, services de comptabilité, informatique).

Nous essayerons dans ce papier de savoir quelles sont les parts de responsabilité des délocalisations dans l’accroissement du chômage et des inégalités salariales en France. Il ne s’agit pas de faire un modèle de prévision, mais plutôt un modèle de simulation de l’impact des délocalisations sur l’emploi. Nous nous intéressons plus aux interactions entre les sorties d’IDE, l’augmentation des importations et l’emploi en France. Précisément, Il s’agit ici de simuler, à l’aide d’un modèle d’équilibre général calculable (MEGC), l’impact des délocalisations vers les PECO sur le TQ et le TNQ en France, pour évaluer un éventuel creusement des inégalités entre les deux facteurs selon l’effet « Stolper-Samuelson ». Le choix de la France et des PECO répond à l’exigence de travailler sur les délocalisations de type Nord-Sud. Les PECO considérés comme des PBS.

Pour ce faire, nous aborderons dans un premier temps les apports théoriques et empiriques dans l’explication de la relation délocalisation-emploi. Dans un deuxième temps, nous élaborerons un MEGC pour le cas de la France afin de tester l’impact des délocalisations vers les PECO sur la rémunération et le taux de chômage des TQ et des TNQ. La simulation dans ce modèle, dans une logique prospective, passe par l’augmentation des IDE sortants à destination des PECO qui sont considérés comme des délocalisations3.

I- Les analyses théoriques et les résultats empiriques de la relation délocalisation-emploi.

I.1- Délocalisation-emploi : l’absence d’un consensus théorique 

La délocalisation est le résultat d’interaction entre les IDE, la sous-traitance à l’étranger et le commerce international. Elle résulte de la relation de substitution entre les IDE sortants et le commerce (les exportations). La dynamique de ces interactions peut engendrer des effets positifs ou négatifs sur l’emploi de manière directe ou indirecte. Les effets peuvent changer de nature selon qu’on se place à court terme ou à long terme. En général, on accorde une relation étroite entre délocalisation et emploi, délocalisation et chômage. Dans ce sens, les délocalisations sont considérées comme un redoutable facteur de destruction de l'emploi dans les pays du Nord.

34 Markusen (1995) considère que les mouvements des IDE de type Nord-Sud peuvent être considérés comme des délocalisations. Point de vue soutenue par d’autres économistes comme Brainard.

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Jusqu’à présent, il n’y a aucune base théorique solide qui traite d’une manière directe la question de l’impact des délocalisations sur l’emploi dans les pays d’origines. La majorité des études a examiné la relation délocalisation-emploi en se référant indirectement à la relation entre les IDE et les échanges. Elles partent de l’idée selon laquelle une relation de substitution entre les IDE et les échanges agit négativement sur l’emploi, alors qu’une relation de complémentarité agit positivement sur l’emploi. La littérature a communément traité la relation IDE-emploi comme une résultante des relations substitution-complémentarité entre les IDE et le commerce.

Même si l'impact des délocalisations reste modeste, voire négligeable au niveau national du fait du processus de création/destruction, l'impact local sur un bassin d'emplois touché par les délocalisations peut être important. Cela nécessite des mécanismes de redistribution entre ceux qui bénéficient des implantations à l'étranger, et ceux qui en souffrent [Mucchielli et alii (2005)].

C'est la délocalisation des entreprises au sens large qui peut avoir un impact négatif sur l'emploi. La délocalisation peut revêtir les deux formes d'investissements: les IDE verticaux et les IDE horizontaux. Dans le cas d'un IDE vertical, on parle d'une relation de complémentarité, ce qui veut dire que l'effet sur l'emploi doit être positif. En revanche, si l'IDE est considéré comme une stratégie de délocalisation qui permet d'exploiter les avantages comparatifs du pays hôte en terme de coût de main d'ouvre, l'IDE peut avoir un effet négatif sur l'emploi du pays investisseur.

Les effets des délocalisations sur l’emploi peuvent être : des effets directs (positifs ou négatifs) et/ou des effets indirects (positifs ou négatifs).

I.1.1- Les effets directs Effets directs négatifs : Les effets directs négatifs apparaissent dans le

cas où l’entreprise qui délocalise partiellement ou totalement ses activités à l’étranger importe les produits ou les services délocalisés de cette nouvelle implantation pour satisfaire le marché local. L’impact sur l’emploi est direct, et peut être ressenti de manière très forte au niveau régional et local. On assiste alors à une parfaite substitution entre la main d’œuvre locale et étrangère. La même chose se produit lorsqu’une entreprise décide d’arrêter son activité et a recours à la sous-traitance internationale.

Effets directs positifs : La délocalisation peut être considérée comme bénéfique, lorsqu’elle est utilisée comme une stratégie de redressement ou de restructuration et qu’elle permet de sauver une partie de l’emploi menacé (l’entreprise garde par exemple des commerciaux, les équipes de R&D). Elle peut être la seule

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issue pour sauvegarder la pérennité de l’entreprise en termes de rentabilité. Il s’agit alors de répondre à la question : que passerait-il si les entreprises ne délocalisaient pas ? Pour répondre à cette question, une série d’études menées sur le cas de l’Italie apportent des résultats intéressants. Il s’agit des travaux de Navaretti, Bruno, Castellani et Flazoni (2002) ; de Navaretti et Castellani (2003)4. Au cours de la période 1994-1998, ces auteurs constatent que les firmes qui investissent à l’étranger sont celles qui emploient le plus sur le marché domestique. La délocalisation peut être perçue comme une solution pour les entreprises menacées de faillites et de licenciements.

I.1.2- Les effets indirects Effets indirects négatifs : Il s’agit des effets de la délocalisation sur

l’emploi des autres secteurs ou autres entreprises qui ont des liens avec les secteurs ou les entreprises qui délocalisent. Cette situation est souvent présente dans le cas des sous-traitants qui se retrouvent obligés à leur tour de délocaliser leurs activités pour accompagner leurs donneurs d’ordre (exemple du secteur de l’automobile et ses équipementiers).

Un autre effet indirect qui pourrait être néfaste pour l’industrie du pays d’origine réside dans le fait que les entreprises qui délocalisent (par IDE) participent d’une manière importante au transfert des technologies à l’étranger. Ce transfert de technologie peut se transformer en menace de concurrence des PBS, surtout s’il prend la forme de délocalisation des centres de recherche et développement.

Effets indirects positifs : C’est le côté qui est rarement traité des délocalisations. L’ensemble des analyses effectuées sur ce sujet ignorent les avantages et le côté bénéfique des délocalisations. Il s’agit des emplois créés d’une manière indirecte par la délocalisation. Lorsqu’un secteur délocalise très fortement, comme dans le cas du textile, de la métallurgie et de l’automobile, d’autres secteurs tirent profit de cette situation. Les emplois détruits directement dans un secteur sont créés d’une manière indirecte dans d’autres secteurs. Cela correspond au concept schumpétérien de la destruction-créatrice. Lorsque les entreprises du textile délocalisent, d’autres entreprises se développent pour exporter des biens d’équipements, des services aux entreprises comme l’expertise et des biens intermédiaires.

Théoriquement, la délocalisation profite aux TQ, car les entreprises qui délocalisent se concentrent sur l’activité à haute valeur ajoutée, ce qui permet d’embaucher plus de

4 Barba Navaretti .G et D. Castellani (2003), « Investments Abroad and Performance at Home evidence from Italian Multinationals », Centro studi Luca D’Aglino Development Studies working paper N° 180.

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main-d’œuvre qualifié. Cette tendance s’accélère lorsque le pays industrialisé est contraint d’adopter la stratégie de la sortie par le haut5 afin de faire face à la concurrence des pays émergents.

Un autre avantage que procure la délocalisation se trouve au niveau du bien-être du consommateur. En effet ce dernier bénéficie grâce à la délocalisation d’une baisse sensible des prix de certains produits importés. Les produits délocalisés sont moins onéreux que les mêmes produits fabriqués dans le pays d’origine. Ainsi la compétitivité des entreprises augmente quand il s’agit d’importations des biens intermédiaires.

L'accroissement des inégalités entre les TQ et TNQ dans les pays du Nord se traduit par une augmentation du différentiel de salaire réel dans les économies où le salaire est relativement flexible comme dans le cas des Etats-Unis, et par une augmentation du chômage du TNQ dans les pays où il y a un salaire minimum (France). Plusieurs explications théoriques tentent de déterminer les causes de ces constats :

- Le modèle classique standard basé sur la théorie HOS et sur le théorème de Stolper-Samuelson reste en effet un passage presque obligé de la relation commerce international-emploi.

- Le progrès technique comme source de déséquilibre sur le marché du travail selon Krugman et Stolper.

- La désindustrialisation et la théorie du cycle de vie d'un produit- Impact des délocalisations de type Nord-Sud.

Les débats sont multiples. On parle des ambiguïtés du débat sur les délocalisations. De nombreux économistes éminents se sont intéressés à cette question. Parmi eux il est utile de mentionner les thèses de Samuelson (2004)6 sur ce sujet qui est plus pessimiste et de J.Bhagwati et alii (2004)7 qui ont établit plusieurs scénarios tantôt positifs tantôt négatifs, ainsi que d’autres économistes dans ce domaine.

Cependant, dans les faits, les délocalisations comme les échanges avec les PBS et le progrès technique participent de l’augmentation des déséquilibres. C’est un phénomène normal de transformation de l’outil productif qui engendre une sorte de nouvelle division internationale du travail. Nous pouvons qualifier ce phénomène comme étant le résultat de la mondialisation et de la concurrence internationale. Cette idée

5 Cette stratégie correspond aux objectifs définis par le traité de Lisbonne, qui consiste à inciter les pays de l’UE à s’orienter vers l’innovation, la recherche et le haut-de-gamme. Il s’agit de concurrencer les Etats-Unis et non pas la Chine.6 Paul A. Samuelson (2004), «Where Ricardo and Mill Rebut and Confirm Arguments of Mainstream Economists Supporting Globalization», Journal of Economic Perspectives- Volume 18, N° 3.7 J.Bhagwati, A. Panagariya et T. Srinivasan (2004), « The Muddles over Outsourcing », Journal of Economic Perspectives- Volume 18, N° 4.

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rejoint le point de vue des libéraux, selon qui la délocalisation est un processus lié à l’évolution des économies et elle relève du choix de localisation des firmes.

I.2- Les estimations empiriques de l’impact des délocalisations sur l’emploi

Plusieurs travaux et rapports8 ont essayé d’évaluer l’ampleur des délocalisations. La majorité conclut à une faible ampleur de ce phénomène et le replace dans une logique plus large d’ouverture économique. En effet, tous les rapports et les études soulignent une des faiblesses importantes de ces analyses, à savoir l’absence de mesure précise du phénomène, surtout lorsqu’il s’agit d’évaluer son impact sur l’emploi. Parmi les méthodes ou les approches les plus utilisées par les économistes pour cerner ce phénomène, nous retenons les cinq principales:

- L’approche macroéconomique fondée sur les données du commerce international : le contenu en emplois des échanges ;

- Approche basée sur les IDE et les restructurations des entreprises ; - Approche microéconomique ;- Approche économétrique ;

Et l’approche par les modèles d’équilibre général que nous appliquerons dans ce travail.

L’approche macroéconomique, qui repose sur des données de la comptabilité nationale et de la balance commerciale, consiste dans un sens large à parler de délocalisation lorsqu’il y a substitution d’une production étrangère à une production domestique pour satisfaire une même demande. Ce critère conduit à considérer que tout flux d’importation cache une forme de délocalisation. Suivant cette analyse, les emplois délocalisés correspondaient à l’ensemble d’emplois qu’il faudrait pour produire les mêmes biens importés. C’est l’approche retenue dans le rapport Arthuis (1993) et de l’OCDE (2007).

L’équivalent des emplois directs contenus dans les importations correspond au nombre d’emplois nécessaires si l’on produisait sur le territoire national les biens et services importés. Compte tenu de la faible part des pays émergents (à bas salaires) dans les échanges des pays industrialisés, l’approche du contenu en emplois conduit souvent à un effet limité des délocalisations sur l’emploi dans les pays développés.

Dans le cas de la France, Fontagné et Lorenzi (2005) estiment un solde comptable des emplois incorporés aux flux de commerce avec ces pays de l’ordre de 1% de l’emploi industriel. Avec une méthodologie similaire, Boulhol (2004) évalue le nombre d’emplois

8 Des rapports récents : rapport Grignon du sénat et Fontagné-Lorenzi du conseil d’analyse économique (2005).

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perdus dans l’industrie française du fait des échanges avec les PBS entre 1978 et 2002, à environ 250 000 emplois soit environ 15% de la diminution des emplois industriels. Résultat qui ne reflète pas nécessairement l’impact des délocalisations tout simplement, mais l’ensemble des échanges.

L’approche par l’IDE est en général appliquée dans le cadre des échanges de type Nord-Sud, où on peut calculer la part des IDE destinés aux pays émergents. Selon les diverses estimations [Grignon (2004), Drumetz (2004), Lorenzi-Fontagné (2005)], l’impact du phénomène de délocalisation vers les PBS reste limité. Les IDE sortants de la France vers ces pays ne dépassent pas 10% du total des IDE français.

En prenant appui sur des données individuelles des entreprises, l’approche microéconomique est initiée par des études de l'INSEE et de l'OCDE. Elle concerne les délocalisations au sens strict et au sens large avec une réduction de la production et des effectifs de la firme qui délocalise. La croissance des IDE des firmes vers l’étranger peut être considérée comme une présomption de délocalisation. Cette approche se base aussi sur la diminution des exportations et la croissance des importations des firmes mères ou sur la réduction de la production nationale compensée par la sous-traitance internationale.

L’application de l’approche microéconomique nécessite l’accès aux données individuelles des firmes du pays qui délocalise ainsi que des informations sur la nature et la destination des investissements. Cette démarche permet de donner une évaluation précise de l’ampleur des délocalisations ainsi que leurs impacts sur l’emploi. Mais la collecte d’informations nécessite des enquêtes très détaillées et suppose aussi une collaboration des entreprises, ce qui reste une tâche très difficile.

En retenant cette approche, Aubert et Sillard (2005)9 estiment qu’environ 95000 emplois industriels auraient été supprimés en France et délocalisés à l’étranger entre 1995 et 2001, soit en moyenne 13500 chaque année. C’est très difficile d’établir un lien entre les délocalisations et l’emploi à partir de cette approche, car il faut aussi voir les effets indirects des délocalisations sur l’emploi. Ils pourraient être négatifs dans la plupart des cas, mais également positifs.

L’approche économétrique consiste à mesurer d’une manière indirecte l’impact des délocalisations sur l’emploi à travers une estimation économétrique de la demande de travail. Elle part du principe qu’une délocalisation implique des pertes d’emplois dans le pays d’origine.

9 Patrick Aubert et Patrick Sillard (2005) « Délocalisations et réductions d’effectifs dans l’industrie française » ; Working paper, Direction des études et synthèses économiques, INSEE.

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Parmi les études utilisant cette approche, nous trouvons l’étude de Strauss-Kahn (2003)10 qui s’intéresse aux effets de la spécialisation internationale verticale du travail (ou DIPP) sur la demande de travail peu qualifié en France entre 1977 et 1993. Elle conclut que cette spécialisation explique entre 11 et 15% du déclin de la part de l’emploi peu qualifié entre 1977 et 1985, et 25% de celle-ci entre 1985 et 1993. Boulhol (2004a), dans une étude sur 16 pays de l’OCDE entre 1970-2002, conclut que le commerce avec les pays émergents explique 10% de la baisse de la part de l’emploi total pour la France et de 15% en moyenne pour l’OCDE.

La méthode de contenu en emplois (dite aussi de la balance en emplois), [Wood (1994 et 1995), Sachs et Shatz (1994)], comme celle fondée sur l’IDE ne permettent pas d’élucider d’une manière rigoureuse la relation qui existe entre les délocalisations des entreprises et le déclin de l’emploi dans les pays industrialisés. En revanche, l’approche par l’équilibre général permet de formaliser les causes de la redistribution du capital et de corriger la mesure des délocalisations des phénomènes extérieurs à la redistribution du capital. Les modèles d’équilibre général donnent la possibilité de tester empiriquement tout ce qui a été décrit supra, notamment la rémunération des facteurs de production, le travail qualifié et non qualifié, l’évolution des termes de l’échange, la croissance des exportations et des importations, etc. Ils permettent aussi de mesurer les bénéfices tirés en termes de bien-être social.

L’approche par les MEGC n’est pas épargnée des critiques. Elle a des inconvénients et des limites (souvent liés à la complexité de la construction de ces modèles), mais elle nous permet de combiner et de concilier les différentes approches et d’essayer, dans une logique prospective, de savoir quels seront les effets des délocalisations vers les PBS (ici les PECO), sur l’emploi, sur les prix et sur le bien-être en France. Le point fort d’une telle méthode est la solidité de ses fondements microéconomiques. Le MEGC décrit le comportement de tous les agents économiques.

A partir de notre MEGC en statique comparative, que nous présenterons dans la deuxième section, nous effectuons deux chocs exogènes liés à ce phénomène : le premier consiste à un doublement des IDE sortant (FDIO) vers ces pays, qui est un indicateur d’accroissement des délocalisations; le deuxième est effectué par le biais d’un accroissement de 20% du niveau des importations en provenance des PECO avec une augmentation simultanée de l’élasticité de substitution d’Armington. L’accroissement de l’élasticité de substitution (augmentation de 50%) entre les intrants intermédiaires locaux et importés nous permet de simuler une augmentation des importations des biens intermédiaires qui est considérer aussi comme un indicateur des délocalisations11.10 Strauss-Kahn V (2003), « The role of globalization in the within-industry shift away from unskilled workers in France », NBER Working papers, N° 9716, 2003. 11 Voir Feenstra et Hanson (1995) et Cardebat (2000).

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II- Construction d’un MEGC statique pour le cas de la France

La dimension temporelle a commencé à être prise en compte dans les MEGC en raison des besoins de prévoir les impacts des changements des politiques économiques (notamment en termes de fiscalité) sur l’économie en général. Les MEGC traditionnels, relatifs aux études de Shoven et Walley (1973), de Dervis, De Melo et Robinson (1982) et récemment celles de Robinson et alii (1993) et de Rutherford et Tarr (2002), ne se sont pas trop intéressés à la dynamique des ajustements, ni aux aspects inter-temporels des comportements des agents économiques en ce qui concerne leurs décisions.

En effet, selon ces auteurs, les résultats obtenus à partir des simulations statiques, telques les effets des chocs exogènes sur les variables endogènes dans une seule période, peuvent être parfois interprétés d’une façon dynamique. Dans ce contexte, la simulation statique peut servir pour faire une analyse dynamique et par voie de conséquence pour prévoir les effets des politiques économiques à long terme.

Tout MEGC est calibré avec une seule base de données, généralement une année, donc statique. Le passage à un modèle dynamique suppose que cette base de référence représente une trajectoire de croissance équilibrée. Par exemple, le stock de capital est calibré, de sorte qu’il s’ajuste par rapport à un taux de rendement constant12, ce qui permet de garder le modèle cohérent avec l’hypothèse de trajectoire d’équilibre. Donc les chocs et les simulations sur les variables exogènes sont exprimés d’une manière statique, mais l’interprétation se fait d’une manière dynamique.

Rutherford et Tarr (2002) soutiennent formellement la performance suffisante de la modélisation statique. En établissant deux modèles, un dynamique et l’autre statique pour une économie ouverte, ils confirment que leur modèle dynamique ne donne pas de résultats significativement différents de ceux obtenus à partir de leur modèle en statique comparatif.

A l’issue de cette comparaison entre l’analyse en statique comparative et en dynamique, pour ce qui concerne notre modèle appliqué à l’économie française, nous opterons pour une analyse en statique comparative, comme souligné par Rutherford et Tarr (2002), (2003). Ce choix peut être expliqué au moins pour deux raisons :

- D’abord, nous soutenons l’idée développée par ces auteurs concernant la suffisance de la modélisation statique dans les MEGC. L’introduction du temps dans les fonctions du modèle se fait par l’utilisation des facteurs d’ajustement qui

12 Pour plus de détails, voir par exemple Harrison, Rutherford et Tarr (1994).

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permettent d’assurer une trajectoire d’équilibre. L’analyse dynamique part donc de la situation de référence (une année), et à l’aide des facteurs d’ajustement, le modélisateur peut voir quelles seront les tendances des variables endogènes.

- Dans notre modèle, nous ne cherchons pas à faire des prévisions à long terme de l’impact des sorties des IDE (indirectement des délocalisations) sur l’emploi. Une analyse en statique comparative est suffisante dans la mesure où elle nous permet de voir quelles sont les ajustements au sein de l’économie qui peuvent avoir lieu dans le cas où il y a un doublement, par exemple, des IDE vers les PBS. A partir des résultats statiques, nous pourrons éventuellement faire une analyse dynamique.

II.1- La construction d’un MEGC statique

L’originalité de ce modèle réside dans le fait que nous introduisons les flux de capitaux, en particulier les IDE dans le modèle, car plusieurs études ont conclu que les mouvements de capitaux vers les PBS et les délocalisations sont complémentaires13 [Markusen (1997)]. Nous désagrégeons le travail en TQ et TNQ pour pouvoir évaluer l’impact sur les non qualifiés et par voie de conséquences, évaluer le degré d’inégalité.

Afin de tenir compte des sorties des IDE vers les PECO ainsi que les importations et les exportations, nous avons distingué le reste du monde en deux régions. La première représente les PECO comme étant des PBS où les IDE sortants sont en majorité des délocalisations et les importations en provenance de ces pays sont des substituts des produits intérieurs (biens intermédiaires), la deuxième région est représentée par les pays du reste du monde.

Le modèle que nous présentons dans ce qui suit est un modèle réel qui s’inscrit dans la lignée de ceux développés par Devis et alii (1982), DE Melo et Tarr (1992) et Rutherford et Tarr (2003). Ce modèle ce rapproche plus des modèles développés par Décreux et alii (2003), Bontout et Jean (1998), Jean (1999) et Bchir et alii (2002). Notre modèle se différencie par la prise en compte des mouvements des capitaux et de son application pour le cas de la France.

Pour ce faire, nous construisons d’abord la MCS de la France pour l’année 2006. Le choix de l’année 2006 s’explique par deux raisons : premièrement, il s’agit d’une année récente alors que peu de travaux utilisent des données récentes. Cette année coïncide aussi avec une montée très sensible des mouvements de délocalisations vers les PBS, une période qui rappelle celle de 1993. Deuxièmement, nous ne voudrions pas travailler

13 Les mouvements de capitaux amplifient les délocalisations vers les pays du Sud, Pierre Villa (1995).

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sur une année de base plus récente, 2007 ou 2008, pour une simple raison, éviter les effets de la crise financière et économique qui a commencé depuis l’été 2007, période pendant laquelle le niveau de chômage a augmenté sans tenir compte des effets des délocalisations.

Le choix des formes fonctionnelles (Annexe 2) sera alors exposé en détail. Suivant les étapes de construction d’un MEGC, nous préciserons ensuite le processus de fermeture macroéconomique du modèle et celui du calibrage des paramètres. Nous obtiendrons ainsi la situation d’équilibre de référence, c’est-à-dire sans choc exogène. Une fois la situation de référence établie, nous effectuerons les différentes simulations que nous avons susmentionnées. Fondé sur les résultats de ces simulations, tout en restant modeste, nous discuterons finalement les impacts des mouvements de capitaux sur le marché de l’emploi en France ainsi que sur les grands variables macroéconomiques du pays.

II.1.1- La MCS de la France

Nous avons utilisé principalement trois sources de données dans la construction de cette matrice, à savoir le TEE, le TES et les enquêtes emploi de l’INSSE concernant l’utilisation du travail qualifié et non qualifié dans les différentes branches d’activités.

La MCS contient tous les flux de l’économie réelle. Nous avons désagrégé l’activité économique en deux secteurs principaux, le secteur des biens manufacturiers (SEC1) qui produit les biens 1 (B1) et le secteur des services (Sec2) qui produit les biens 2 (B2). Nous avons regroupé les activités agricoles dans le premier secteur. Cette distinction simpliste et très agrégée des activités (deux secteurs et deux biens, où chaque secteur produit un bien) est due essentiellement au manque de données au niveau très désagrégé des comptes TQ et du TNQ pour chaque secteur ainsi qu’à l’indisponibilité des données liées aux IDE au niveau sectoriel. La matrice que nous utilisons pour la France est donc composée de vingt et un (21) comptes (voir Annexe 1) :

- Aux comptes 1 et 2 sont représentés les biens B1 et B2, qui correspondent successivement aux biens manufacturiers et aux services ;

- Aux comptes 3 et 4 figurent les deux secteurs d’activités, représentés chacun par une firme représentative produisant un bien, le secteur manufacturier (3) et le secteur tertiaire (4) ;

- Au compte 5, on trouve le premier facteur de production, à savoir, le capital ;- Aux comptes 6 et 7, il y a le facteur travail, désagrégé en travail qualifié (TQ, 7) et

travail non qualifié (TNQ, 6) ;- Au compte 8, on trouve les ménages, avec un ménage représentatif;

12

- Au compte 9, il y a l’Etat qui représente les administrations publiques ;- Du compte 10 au compte 15 sont représentés les différentes taxes et impôts : TRC

(10) sont les impôts sur les produits, TRK (11) représente les impôts sur le capital, TRLQ (12) et TRLNQ (13) sont successivement les impôts sur le TQ et sur le TNQ. TRM (14) représente les revenus des impôts et taxes sur les importations et enfin TRY (15) qui est l’impôt sur le revenu ;

- Au compte 16, on trouve la région des PECO ;- Le reste du monde (RDM) est dans le compte (17) ;- Au compte 18, figure l’épargne ;- Au compte 19, il y a les IDE entrants (ligne) ou sortants (en colonne) des PECO;- Au compte 20, il y a les IDE sortants (en colonne) et les IDE entrants (en ligne) du

RDM ; - Au compte 21, c’est le Total.

II.1.2- La structure algébrique du modèle

Nous insistons sur le fait que cette démarche d’analyse à l’aide d’un MEGC est une tentative d’évaluation. La mobilisation de cette méthodologie dans le cas de la France et très particulièrement en ce qui concerne les flux d’IDE est une première tentative. Nous ne prétendons en aucun cas de la validité théorique des résultats que nous développerons par la suite.

Dans ce modèle, l’économie est ouverte en introduisant les importations (M i) et les exportations (Ei). On distingue les produits selon leurs destinations (produits destinés au marché domestique ou à l’export) et selon leurs origines via l’hypothèse d’Armington (1969), produits d’origine locale ou importés. Les prix diffèrent aussi ; les produits locaux sont en monnaie locale, les importations sont en $ US et en prix C.I.F (Cost, Insurance, Freight) et les exportations en $ US et en prix F.O.B (Free OnBoard). Pour transformer la monnaie nationale en monnaie du marché mondial ($US) nous utilisons le taux de change.

La cohérence interne de la MCS et les trois équilibres [Décaluwé, Martens et Savar (2001)], à savoir : l’équilibre sur le marché des biens et services, l’égalité entre l’épargne et l’investissement et l’équilibre de la balance commercial, sont assurés.

Nous considérons l’économie française avec les caractéristiques suivantes :

Les ménages : Un ménage représentatif qui maximise sa fonction d’utilité LES (Linear Expenditure System) sous la contrainte de son revenu.

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Il existe deux biens dans l’économie, utilisés pour la consommation finale et pour la production sous forme de consommation intermédiaire. Une partie de ces biens est importée de l’étranger.

Les facteurs de production sont : le capital, le travail qualifié (TQ) et le travail non qualifié (TNQ) et les biens intermédiaires (qui sont les deux biens de l’économie).

Il existe deux secteurs d’activités où chaque secteur est représenté par une firme qui produit un bien. Chaque secteur exporte une partie de sa production à l’étranger (au RDM et aux PECO). Les secteurs accueillent des IDE du RDM (les IDE entrants) et effectuent en même temps des investissements à l’étranger (IDE sortants).

La production des biens est gouvernée par une fonction CES (imparfaite substituabilité entre les facteurs de production). La fonction de production est modélisée de façon classique par une série d’emboîtement à deux niveaux :

- Le premier niveau décrit d’une part, la distribution de la production entre les facteurs de production, qui est la valeur ajoutée (VA) et les consommations intermédiaires (CI) par le biais d’une fonction Leontief.

D’autre part, et pour chaque secteur, la production est vendue en partie sur le marché local et une partie à l’étranger (exportations) et décrite par une fonction à élasticité de transformation constante (CET).

- Le deuxième niveau met en évidence l’imparfaite substituabilité entre les facteurs de production (capital et travail) par le biais d’une fonction CES (Constant Elasticity of Substitution).

La demande est modélisée aussi avec un emboîtement à deux niveaux :

- Au premier niveau, on trouve la consommation finale et la consommation intermédiaire du deux biens (biens manufacturiers et les services) qui sont deux biens peu substituables.

- Au second niveau, en tenant compte du goût pour la variété des consommateurs, les demandes des biens sont différenciées selon leur pays d’origine : biens produits localement ou biens importés, ce qu’on appelle un bien composite. La fonction de demande des biens composites est définie par une fonction CES selon l’hypothèse d’Armington. Cela suppose une substituabilité imparfaite entre la production nationale et les importations, hypothèse plus réaliste par rapport aux considérations de la théorie classique.

Le travail et le capital sont mobiles entre les secteurs et sont fixés d’une manière exogène. La mobilité du capital à l’international est caractérisée par les mouvements et les flux d’IDE.

L’épargne et l’investissement sont endogènes. Le chômage est endogène, il se détermine à l’équilibre.

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IDE entrants 1,2

IDE sortants 1,2

TQ + TNQ

X11 X21

K1 L1

Leontief CES

CI secteur 1 VA secteur 1 VA secteur 2

XD1 XD2

CET CET

L2 K2

CES

X12 X22

Leontief

CI secteur 2

Leontief Leontief

M1 XDD1 E1 M2 XDD2 E2

Armington Armington

X2 X1

C°.Inter C° .Finale C° .Finale C°.Inter

X11 X22 X12 C1 CG1

I1 C2 CG2

I2 X21

TQ + TNQ

L’Etat maximise une fonction d’utilité Cobb-Douglass sous sa contrainte de revenu et les taxes et les impôts sont endogènes.

L’économie est ouverte, on importe et en exporte les deux biens vers le RDM et bien évidemment vers les PECO.

Le taux de change est flexible avec le RDM et nul avec les PECO. Le capital et le travail sont des facteurs non négociables.

Nous présenterons (figure 1) d’une manière schématique, la structure de la production et de la demande domestique de notre modèle.

Figure   1: Structure de la demande et de la production

15

Le choix des formes fonctionnelles et de la fermeture macroéconomique sont présentés en Annexe 2.

II.2- Simulation des chocs, interprétation des résultats et analyse de sensibilités

II.2.1- Première simulation : Choc de croissance des IDE sortants

Nous avons procédé à une augmentation de 50% des IDE à destination du RDM et à un doublement des IDE sortants vers les PECO, car un simple choc sur les IDE sortants vers les PECO n’a presque pas d’effet sur le reste des variables. Cela est dû à la faible part des IDE à destination des PECO qui ne représente que 3,6% de l’ensemble des flux d’IDE sortants de France. En même temps, les flux d’IDE sortants de France ne représentent que 3,5% de la production nationale pour l’année 2006. Pour bien identifier les mouvements de délocalisation, nous sommes contraints, dans une logique prospective du modèle, à augmenter simultanément les IDE sortants vers le reste du monde et ceux vers les PECO.

Dans ce premier scénario, nous avons fixé l’offre du travail et l’offre du capital ainsi que les IDE entrants pour éviter une compensation directe par le biais des IDE. Nous avons choisi aussi le prix du capital comme numéraire. Le reste des prix sont flexibles y compris la rémunération du TQ et du TNQ. Les résultats des simulations sont présentés dans le tableau 1, ils sont exprimés en pourcentage par rapport à l’état initial, en gardant aussi les valeurs de l’état de référence.

Suite à un accroissement rapide des IDE sortants vers les PECO accompagné d’une augmentation de 50% des IDE sortants vers le reste du monde et en gardant l’offre d’emplois fixe pour les deux catégories de travailleurs, nous remarquons, d’une manière générale, l’existence d’un effet négatif relativement faible sur l’ensemble des variables macroéconomiques, sauf pour le marché de l’emploi.

En ce qui concerne le marché de l’emploi, deux éléments essentiels ressortent dans ce scénario qui retrace une accélération des mouvements de délocalisations. Premièrement, les résultats sont significatifs et montrent une augmentation du niveau de chômage pour les deux catégories de travailleurs (UNEMPQ et UNEMPNQ) après le choc. En revanche, l’augmentation du chômage des TNQ est plus importante que celle des TQ. Le chômage des TNQ augmente de 11,02% alors que le chômage du TQ augmente de 2,8%.

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Deuxièmement, selon les résultats de la simulation pour la rémunération du travail, le salaire des TNQ (PLNQ) diminue de 1,45% et le salaire des TQ (PLQ) augmente de 0,47%. Selon ces résultats, les TQ bénéficient des sorties des IDE en termes de rémunération, tandis que les TNQ en perdent.

Ces résultats semblent indiquer que les délocalisations ont plutôt un effet négatif sur la situation des TNQ et un effet positif pour les TQ en termes de rémunération. L’augmentation du taux de chômage des TQ après le choc est relativement faible (2,8%) par rapport à l’ampleur du choc. Cette disparité de l’effet des délocalisations, entre un effet négatif sur le TNQ et un effet positif sur le TQ, explique, en partie, les inégalités qui existent entre les TQ et les TNQ dans la plupart des pays industrialisés.

Dans ce cadre d’analyse, l’effet des délocalisations sur l’emploi est très proche de l’effet du commerce international avec les PBS développé par la théorie néoclassique, connu sous l’effet Stolper-Samuelson. A partir de ces analyses nous pouvons dire qu’avec une accélération des mouvements des délocalisations, ce sont les TNQ qui sont les plus touchés, situation qui se traduit par une augmentation du chômage des TNQ.

Comme nous l’avons détaillé dans les fonctions du modèle dans le bloc de production, les IDE constituent une partie de la production nationale. Avec ce choc, les résultats du modèle montrent que la production nationale diminue de 0,87% dans le premier secteur et de 0,73% dans le deuxième secteur. Cette diminution de la production est compensée par une forte augmentation des importations de l’ordre de 4.63% dans le deuxième secteur. L’augmentation des importations est due à la substituabilité entre les biens domestiques et les biens importés (hypothèse d’Armington). De plus, on assiste à une augmentation des exportations de l’ordre de 0,086% pour le bien 1 et de 3,2% en ce concerne le bien 2. Ce résultat peut s’expliquer par le fait que le secteur 2 utilise plus de TQ que de TNQ et par la forte substituabilité qui existe entre le facteur composite et le facteur TNQ.

Malgré une diminution du revenu des ménages (-0.21), le bien-être mesuré par l’utilité des consommateurs a sensiblement augmenté de 0,69%. Cette stabilité, et voire une augmentation faible du bien-être, est due essentiellement à une diminution de l’épargne (-4,02%).Il faut souligner que le choc d’augmentation des sorties des IDE ou des délocalisations est effectué dans un cadre statique en gardant les IDE entrants fixes, ce qui peut surestimer l’impact négatif des délocalisations sur l’emploi.

En termes généraux et au niveau macroéconomique, nous avons assisté à une diminution du chômage en France et dans la plupart des pays industrialisés entre 1995 et 2006. Pour la France, ce taux est passé de 11,6% en 1995 à 9,5% en 2006, cette

17

diminution est accompagnée d’une augmentation forte du stock d’IDE sortant, qui est passée de 19% à 41% du PIB pour la France pendant la même période, d’après les sources de l’OCDE 2006. Sans oublier aussi que le chômage des TNQ est deux fois plus grand que celui des TQ.

En effet, les résultats de cette simulation sont à prendre avec précaution, car elle est faite dans une logique d’analyse prospective, qui consiste à savoir quels seront les effets d’une éventuelle accélération des mouvements de délocalisation sans qu’il y ait des changements au niveau des IDE entrants.

Les résultats concernant l’impact des délocalisations sur l’emploi sont compatibles, de manière générale, avec ce que prévoit la théorie générale du commerce. Mais il faut la compléter par la prise en compte des IDE entrants, des effets d’ajustements et d’entraînements et de l’impact du progrès technique. Ce dernier peut être aussi responsable de la détérioration de la situation des TNQ dans les pays industrialisés et notamment en France.

L’effet du progrès technique sur l’emploi [Krugman (1995), Jean et ali (1999)], est comparable à celui des délocalisations. Dans ce modèle nous n’avons pas pris en compte l’impact du progrès technique sur l’emploi, ce qui peut aussi surestimer l’impact des délocalisations sur l’emploi.

Tableaux 1   : Les résultats du premier choc Les variables Description Niveau initial Variation en %

Y_index Revenu des ménages 1849,8 -0,215S_index Epargne total 381,7 -4,022CBUD_index Budget de ménages 1098,96 1,39KS_index Total capital 507,3 0LSQ_index Total TQ 557,262 0LSNQ_index Total TNQ 666,436 0UNEMPQ_index Chômage des TQ 51 2,886UNEMPNQ_index Chômage des TNQ 110 11,02PK_index Rémunération du K 1 0PCF_index Rémunération du facteur composite 2 -3,791PLQ_index Rémunération du TQ 1 0,474PLNQ_index Rémunération du TNQ 1 -1,456U_index Utilité du consommateur 424,78 0,693

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Les variables Description Niveau initial Sec 1 Sec2

Sec 1 en %

Sec 2 en %

P_index Le prix du bien composite 1 1 0,234 1,315

PD_index Le prix de l'output national 1 1 -0,504 0

PDD_index Le prix de l'output destiné au marché domestique 1 1 0,345 1,399

PE_index Le prix des exportations 1 1 0,016 0,016

PM_index Le prix des importations 1,255 1,305 0,016 0,016

X_index La demande du bien composite 1602,7 1736,4 -0,892-

0,634

XD_index Production totale 1465,1 1780,9 -0,871-

0,734

XDD_index production destinée au marché domestique 1064,8 1633,7 -1,22-

0,963

K_index Capital 170,3 290 -0,569 0,202

I_index Investissement 291,59 90,1 -4,246-

5,268

LQ_index Le TQ 240,38 139,08 -0,757-

0,082

LNQ_index Le TNQ 132,59 398,33 -2,089-

2,495

E_index Exportations 389,1 95,39 0,086 3,205

M_index Importations 428,6 78,69 -0,242 4,632

FDIO_PECO IDE sortants vers les PECO 2 1,1 100 100

FDIO_index IDE sortants ver le RDM 12,33 69,82 50 50

FDII_index IDE entrants 11,12 51,88 0 0

II.2.2- Deuxième simulation : Choc de croissance des importations

Le but de ce deuxième scénario est de tester toujours l’impact des délocalisations sur l’emploi en France, en jouant sur un autre indicateur qui peut expliquer une augmentation des délocalisations. Il s’agit d’augmenter les importations en général et celles en provenance des PECO de 20% en doublant en même temps l’élasticité de substitution d’Armington. Ce scénario reflète d’une manière indirecte l’augmentation de l’importation des biens intermédiaires en provenance des PBS qui sont généralement à l’origine des délocalisations. Nous comparons les résultats de ce choc avec la première simulation.

Les résultats de cette simulation sont présentés dans le tableau 2. Ils sont organisés de la même façon que la première simulation.

De manière globale, dans ce deuxième scénario, les résultats sont relativement semblables aux résultats du premier scénario. Il n’en reste pas moins, sans surprise, que les salaires des TQ et des TNQ ont augmenté successivement de 0.86% et de 0,41% contrairement au premier choc. Concernant le volume d’emplois, la logique néoclassique est maintenue avec une augmentation du chômage des TNQ et une diminution du chômage des TQ, mais avec une amplitude très faible. Le chômage augmente de 1,44% pour les TNQ et diminue de 1.63 pour les TQ.

Ces résultats sont compatibles avec les résultats empiriques liés à l’impact du commerce international avec les PBS sur l’emploi dans les pays industrialisés, Jean et Bontout (1998), Cortes et Jean (1997a). Ils trouvent qu’une augmentation de un point du taux de pénétration des importations induit une hausse de 0,4% du ratio TQ/TNQ dans l’industrie considérée.

Tableaux II.14   : Les résultats du deuxième choc

Les variables Description Niveau initial

Variation en %

Y_index Revenu des ménages 1849,8 0,0021S_index Epargne total 381,7 2,575CBUD_index Budget de ménages 1098,96 1,196KS_index Total capital 507,3 0LSQ_index Total TQ 557,262 0LSNQ_index Total TNQ 666,436 0UNEMPQ_index Chômage des TQ 51 -1,63UNEMPNQ_index Chômage des TNQ 110 1,44PK_index Rémunération du K 1 1,54PCF_index Rémunération du facteur composite 2 0

19

PLQ_index Rémunération du TQ 1 0,864PLNQ_index Rémunération du TNQ 1 0,41U_index Utilité du consommateur 424,78 0,545

Les variables

Description Niveau initial Sec 1 Sec2

Sec 1 en %

Sec 2 en %

P_index Le prix du bien composite 1 1 1,354 0,022PD_index Le prix de l'output national 1 1 1,146 0

PDD_indexLe prix de l'output destiné au marché domestique 1 1 4,71 0,332

PE_index Le prix des exportations 1 1 -4,43 -4,43PM_index Le prix des importations 1,255 1,305 -4,43 -4,43X_index La demande du bien composite 1602,7 1736 0,583 -0,012XD_index Production totale 1465,1 1781 1,631 -0,401

XDD_indexproduction destinée au marché domestique 1064,8 1634 -8,781 -1,239

K_index Capital 170,3 290 1,519 -0,371I_index Investissement 291,59 90,1 1,205 2,55LQ_index Le TQ 240,38 139,1 1,79 0,028LNQ_index Le TNQ 132,59 398,3 1,41 -0,733E_index Exportations 389,1 95,39 31 14M_index Importations 428,6 78,69 20 20FDIO_index IDE sortants 14,32 70,91 0 0FDII_index IDE entrants 11,12 51,88 0 0

IV.3- Analyse de sensibilité

L’utilisation d’un MEGC appelle évidemment des analyses de sensibilité aux valeurs des principaux paramètres utilisés, en l’occurrence les élasticités, pour tester la solidité du modèle et évaluer les marges d’erreur correspondantes. De ce fait, nous avons testé la sensibilité des résultats à un changement des valeurs des élasticités de substitution entre les facteurs et entre les produits, en choisissant des valeurs faibles (la moitié de la valeur initiale) et des valeurs fortes (le double de la valeur initiale) par rapport aux valeurs initiales et fait « tourner le modèle » avec les nouvelles élasticités.

Nous simulons les mêmes chocs pour différentes valeurs d’élasticité de substitution entre les facteurs σ F i et de l’élasticité de substitution entre les deux biensσ Ai.

Les résultats obtenus sont très proches des résultats initiaux. Aucun changement au niveau du signe de la variation des variables, mais c’est plutôt l’ampleur de la

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variation qui a changé pour quelques variables comme la production destinée au marché national qui diminue beaucoup plus dans le deuxième choc à cause de l’augmentation de l’élasticité de substitution entre les biens locaux et les biens importés.

La sensibilité des résultats est cependant beaucoup moins élevée pour le choc lié aux IDE. En revanche, nous estimons que le niveau élevé d’agrégation utilisé dans le modèle (deux secteurs) peut être trompeur, ce qui constitue une limite de notre modèle. C’est la raison pour laquelle nous restons modestes quant à l’importance et la crédibilité des résultats obtenus, qui restent discutables. Faute de données au niveau des branches, une désagrégation plus fine permettra d’avoir des résultats plus réalistes.

Conclusion 

Hormis l’augmentation sensible du chômage des TNQ dans le premier choc (+11,02%), les impacts simulés dans ce modèle ont donné des résultats modestes (au niveau de la variation des variables par rapport à l’état de référence). Ce bémol s’explique par le fait que nous avons travaillé sur des prix de travail (salaires) flexibles. Si nous introduisons la rigidité des prix des facteurs ou au moins celle des TNQ, à cause d’un salaire minimum en France14, le chômage des TNQ augmentera plus que dans le cas d’un salaire flexible.

Ces résultats sont à prendre avec précaution, comme nous l’avons signalé supra, car le problème de l’emploi est une question très complexe où plusieurs facteurs peuvent intervenir simultanément. Les délocalisations participent sans doute à la détérioration de la situation des non qualifiés dans des régions ou des sites bien précis, mais elles ne sont pas responsables du chômage qui est plutôt structurel. Elles peuvent être même à l’origine de la création des emplois ou au moins de la préservation des postes d’emplois sur le territoire nationale.

Le MEGC utilisé, comme étant une approche alternative, nous a permis d’évaluer, d’une manière indirecte en utilisant les IDE, l’impact des délocalisations sur l’emploi en France. Le but n’était pas de donner une réponse définitive, mais plutôt de proposer une estimation quantitative indicative. Il s’agissait plus particulièrement de tester l’impact des sorties des IDE vers ces pays sur les salaires relatifs des TQ et des TNQ, ainsi que sur le niveau de chômage pour les deux catégories de travailleurs.

Selon nos résultats, les sorties des IDE ont un impact faible sur l’économie en général, mais relativement élevé sur le marché de l’emploi. Ces résultats montrent que

14 Selon les données de l’INSEE et notamment les enquêtes relatifs à la situation de l’emploi en France, nous pouvons considérer que la rémunération des TNQ correspond au SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance : le SMIC horaire brut pour 2010 est de 8,86 euros).

21

pour les deux chocs, l’effet Stolper-Samuelson (la baisse de la rémunération réelle du facteur rare) est maintenu avec une détérioration de la situation des TNQ et une amélioration de la situation des TQ. Néanmoins, les effets négatifs sur l’emploi non qualifié restent faibles par rapport à l’ampleur du choc (augmentation de 50% des IDE sortants avec un doublement des IDE vers les PECO) et aux différentes inquiétudes émanant du débat public.

Nous avons soutenu l’idée selon laquelle le problème des inégalités entre TQ et TNQ en France et dans plusieurs pays industrialisés, trouve son explication dans un ensemble complexe de facteurs d’ordre structurels, institutionnels et conjoncturels. Il serait bien imprudent d’imputer la responsabilité du chômage et de la détérioration des TNQ au seul phénomène de délocalisations. Il est évident d’accepter l’idée que les délocalisations peuvent être responsables du chômage et du creusement des inégalités au niveau local, lorsque des entreprises et des sous-traitants dans un bassin industriel bien précis délocalisent. En revanche, si on raisonne au niveau macroéconomique, par le biais des effets d’entraînement et de destruction-création des activités productives, les délocalisations peuvent jouer aussi un rôle positif dans la préservation des emplois.

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Annexe 1 : La MCS de la France pour l’année 2006(En Milliards d’euros).

24

25

B1B2

Sec1Sec2

KTNQ

TQ

12

34

56

7B1

1612,225

167,738B2

2149,164

556,425Sec1

31064,88

Sec24

1633,72K

5170,3

290TNQ

6132,596

398,334TQ

7240,385

139,083M

énages8

407,2556,436

516,262Etat

9TR

C10

107,767

TRK

1154,3

27,4TR

LQ12

2015

TRNQ

1316,8

24,3TR

M14

109,2524

TRY

15PECO

1614,8

3,6RD

M17

413,875,1

100,118

5591,8

IDE_S vers les PECO19

21,1

2012,33

69,8221

1710,431803,42

1465,11781

507,3556,436

516,262

Biens et servicesFirm

esFacteurs de production

Biens et Services

Firmes

Facteurs de production

Agents économiques

Epargne

IDE_S vers le RDM

Total

Annexe2 : L’écriture algébrique des fonctions du modèle

Le programme du consommateur :

- Un consommateur représentatif qui dispose d’un revenu (Y). Il a le choix entre deux biens C1 et C2 avec des prix respectivement P1 et P2. Y, P1 et P2 sont exogènes.

- Calibrage des paramètres  αHLES et μH i (le niveau minimum de consommation ou de subsistance):

AvecФ est le paramètre Frisch qui représente l’élasticité de l’utilité marginale par rapport à la dépense, égal à :

Le revenu des ménages se compose des

U=(C ¿¿1−μH 1)αHLES∗(C¿¿2−μH 2)

(1−αHLES )¿¿

CBUD=( 1+ tc1 ). P1 .C1+(1+tc2)P2 .C2

CBUD= (1−ty ) . Y−SH−cothAvec, tc(sec) est le taux de la taxe sur la consommation finale,ty est le taux d’imposition sur le revenu, SH représente l’épargne des ménages où :

SH=mps .Y

Avec mps la propension marginale à épargner

26

IDE_E PECO

Ménages

EtatTRC

TRKTRLQ

TRNQTRM

TRYPECO

RDM

89

1011

1213

1415

1617

1819

2021

551,58887,284

291,5951710,43

532,212475,514

90,1051803,42

16373,1

11,121465,1

590,4

51,881781

47507,3

25,506556,436

136,794516,262

319,80254,1

1853,8349

174,781,7

3541,1

133,25243,4

58,051116,2174,781,73541,1

133,25243,4

243,418,4

3,119,15

611,25177,6

24,3-2,6

35,6381,73,182,15

1853,81116,2

174,781,7

3541,1

133,25243,4

18,4611,25

381,73,1

82,1513115,698

Agents économiques

INVTTotal

IDE_E RDM

revenus du capital, du travail et des transferts

- UNEMP: le chômage total des qualifiés et des non qualifiés dans l’économie ;

- UNEMPQ: le chômage des qualifiés ;- UNEMPNQ: le chômage des non

qualifiés ;- PLQ, PLNQ et PK sont

successivement le prix du TQ, le prix du TNQ (qui correspond au salaire) et le prix du capital ;

- LSQ, LSNQ et KS représentent l’offre totale du TQ, l’offre totale du TNQ et le capital total disponible ;

- TKRDM : transferts des revenus de capital au RDM ;

- TRF et TRDM sont successivement les transferts de l’Etat aux ménages et les transferts du RDM aux ménages.

et coth les cotisations des ménages versées aux administrations publiques.

αHLES=(1+ tc1 ) . PD1

0 .C1o− (1+ tc1 ) .PD1

0 . μH 1

CBUD0−(1+tc1 ) . PD10 . μH 1−(1+ tc2 ) .PD2

0 . μH 2

μH 1=C1o+αHLES .¿

μH 2=C2o+(1−αHLES). ¿

Ф= dλdCBUD

. CBUDλ

= −CBUD(CBUD− (1+ tc1 ) .PD1 . μH 1−(1+tc2 ) . PD2 . μH 2)

Y=PK . KS−TKRDM +PL. (LS−UNEMP )+TRF+TRDM

LS=LSQ+LSNQ

PL. (LS−UNEMP )=PLQ . (LSQ−UNEMPQ )+PLNQ .(LSNQ−UNEMPNQ )

La demande d’investissement pour les deux biens est donnée par la fonction d’utilité :

U=I 1αI . I 2

(1−αI)

Sous la contrainte : S=PD1 . I 1+PD2 . I2

Avec :

S=SH+PCINDEX . SG+ER. SF+SE (sec 1 )+SE (sec 2)

La courbe de Phillips (le chômage) ( PL1/PCINDEX 1

PL0 /PCINDEX 0 −1)=phillips .(UNEMP1/LS1

UNEMP0/LS0 −1)L’offre- Les biens intermédiaires Avec : io11 est la part du bien intermédiaire

XD11 dans la production du bien XD1. io21 est

la part du bien intermédiaire XD21 dans la

production du bienXD1. Il ne s’agit pas d’autre chose que des coefficients techniques de production.- Le calibrage des coefficients techniques est donné par les relations suivantes :

XD i=f (FCi , LNQi , XD ii , XD ji )

XD i=g i(VAi , IOi)

VA1=g11(FC1 , LNQ1)Et

IO1=g12(XD11 , XD21)

VAi=[ γ F i∗FCi−ρF i+ (1−γ Fi )∗LNQi

−ρF i ]−1 /ρFi

XD i=aF i∗VA i

27

io11=XD11

0

XD10

Et

io21=XD21

0

XD10

- Les firmes : programme du producteur

- Les élasticités de substitution des deux fonctions CES,σ F i(élasticité de substitution

entre le facteur composite et le TNQ) et σ C i (élasticité de substitution entre le capital et le TQ) égalent :

- Le calibrage des paramètres :

Avec : FDIOi est l’IDE sortant, qui englobe les IDE sortants vers le RDM et les IDE sortant vers les PECO. PFDIOi est le prix de l’IDE sortant.

SEi représente l’épargne des entreprises.

XD i=aF i∗[ γ F i∗FCi−ρ Fi+ (1−γ Fi )∗LNQi

−ρF i ]−1 /ρ Fi

FCi=aCi∗[β i∗K i−ρC i+ (1−β i )∗LQi

−ρC i ]−1 /ρCi

Avec l’intervention de l’Etat, la contrainte du producteur s’écrit :

(1+tfc).PFC.FCi+ (1+tl).PLNQ.LNQ i

où : (1+tfc).PFC.

FC i= (1+tk ) .PK .K i+ (1+ tl ) .PLQ. LQ i

σ F i=1

1+ ρF i

σ C i=1

1+ ρC i

γ F i=(1+tfc)PFC 0/(1+tl)PLNQ0

(1+ tfc)PFC0 /(1+tl)PLNQ0+( FCi0

LNQi0 )

−1/σ Fi= 1

1+(1+ tl)PLNQ0

(1+tfc)PFC0 +( FCi0

LNQ i0 )

−1 /σ F i

β i=(1+tk)PK 0/(1+tl)PLQ0

(1+tk)PK 0/(1+tl)PLQ0+( K i0

LQi0 )

−1/σC i= 1

1+ (1+tl)PLQ0

(1+ tk)PK 0 +( K i0

LQi0 )

−1/σ C i

L’ouverture de l’économieLe produit national (XDi) peut se vendre sur le marché local (XDDi) comme sur le marché extérieur sous forme d’exportation (Ei). La transformation de la production nationale est modélisée à l’aide d’une fonction CET (Constant Elasticité of Transformation).

XDD i=(1−γ T i)σT i∗PDDi

−σ T i∗[ γ T iσT i∗P Ei

1−σT i+( 1−γ T i )σ T i∗PDD i

1−σT i ]σT i /(1−σT i)∗(

XD i

aT i)

Ei=γ T iσT i∗PEi

−σ T i∗[ γ T iσT i∗PE i

1−σT i+(1−γ T i )σ T i∗PDD i

1−σ T i ]σ T i /(1−σ T i)∗(

XD i

aT i)

28

La demande- La demande nationale peut être satisfaite de deux façons (les origines des produits) : soit de la production nationale (XDDi) soit de l’importation (Mi) ou des deux en même temps, ce qu’on appelle le bien composite (X i) selon l’Hypothèse d’Armington. Ce bien composite est utilisé pour la consommation finale (en consommation finale privée (Ci), consommation finale de l’Etat (CGi) et pour l’investissement (Ii)) comme pour la consommation intermédiaire (Xij) dans le processus de production.

- PM i=(1+tmi ) .ER . PWMZ i où PWMZ i est le prix mondial du bien i, ER est le taux de change et tmiest le tarif douanier ;

- PEi=ER .PWEZ i ou PWEZi est le prix mondial du bien exporté.

M i=γ A iσ A i∗PM i

−σ A i∗[ γ A iσ Ai∗PM i

1−σ Ai+(1−γ Ai )σ Ai∗PDDi

1−σ A i ]σ A i/(1−σ A i)∗(

XDi

aAi)

XDD i=(1−γ A i)σ Ai∗PDD i

−σ A i∗[ γ A iσ Ai∗PM i

1−σ Ai+(1−γ Ai )σ A i∗PDDi

1−σ A i ]σ A i/(1−σ A i)∗(

XDi

aAi)

Pi . X i=PM i . Mi+PDDi . XDDi

X i=a A i . [ γ Ai . M i−ρ Ai+(1−γ Ai ) . XDD i

−ρ A i]−1/ ρ A i

L’Etat- L’Etat reçoit les cotisations sociales (COTH) et effectue aussi des transferts (TRF) (pour les chômeurs) et autres transferts (TRO) (ex : pensions).

- trep est le taux de remplacement, il correspond au pourcentage des salaires réels versés aux chômeurs. Sur la base des statistiques des transferts des allocations de chômage, nous retenons une valeur de 70% pour le paramètre trep. −PCINDEX est l’indice des prix de Laspeyres

- Calibrage des paramètres 

TAXR=∑i=1

2

( tci .C i . PD i+tk i .K i .¿PK+tli . LQi .PLQ+tli . LNQ i .PLNQ+tm i . ER .PWMZ i .M i)+ ty .Y +coth+TRDM ¿

TRF=trep . (PLQ .UNEMPQ+PLNQ .UNEMPNQ )+PCINDEX .TRO

PCINDEX t=∑i=1

2

(1+tcit ) .PD i

t .Ci0

∑i=1

2

(1+tc i0 ) .PD i

0 .C i0

t =0,1

GBUD= TAXR−TRF−PCINDEX .SG Où SG est l’épargne de l’Etat.

L’Etat maximise sa fonction d’utilité Cobb-Douglas :

U (CG1 ,CG2, KG, LG )=CG1α CG1 .CG2

α CG2. KGαKG . LGQαLGQ . LQGNQαLGNQ Avec

αCG1+αCG2+αKG+αLGQ+αLGNQ=1

29

αCG i=Pi0 .CGi

0 /(TAXR0−TRF0−PCINDEX 0 . SG0)

αKG=PK 0 . KG0/(TAXR0−TRF0−PCINDEX 0 . SG0)

αLGQ=PLQ0 . LGQ0/(TAXR0−TRF 0−PCINDEX 0 . SG 0)

αLGNQ=PLNQ0 . LGNQ0/(TAXR0−TRF 0−PCINDEX0 . SG0)

L’équilibre des marchés K1+K2+KG=KS

LQ1+LQ2+LGQ=LSQ−UNEMPQ

LNQ1+LNQ2+ LGNQ=LSNQ−UNEMPNQ

X1=io11 . XD1+io12 . XD2+C1+CG1+ I 1

X2=io22 . XD2+io21 . XD1+C2+CG2+ I2

L’équilibre de la balance commercialeAvec : SF représentant l’épargne étrangère (Foreign Savings). TKRDM ce sont les revenus du capital versés au RDM. TRDMH ce sont les transferts du RDM aux ménages et TRDM sont les transferts du RDM aux administrations publiques.-Nous adoptons la règle classique de bouclage du modèle où l’investissement n’est pas exogène, il s’ajuste à l’épargne totale disponible selon la relation suivante :

∑i=1

2

PWMZ i . Mi+TKRDM +FDIO=∑i=1

2

PWEZi .E i+TRDMH+TRDM+FDII+SF

S=SH+PCINDEX . SG+ER. SF+SE (sec 1 )+SE (sec 2)

Les élasticités Bien 1 : C1

Bien 2 : C2

Elasticité revenu LES-

CES : σ C i/Y

0.75 1.25

Elasticité CES : σ F i0.7 1.1

Elasticité CES : σ C i0.4 0.6

Elasticité CET : σ T i4 3

Elasticité

d’Armington : σ Ai

3 4

30

Source : Yapaudjian et ali (2003), Decreux et ali (2003)

31