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Pierre JACQUET, Rajendra K. PACHAURI et Laurence TUBIANA (dir.) Développement, alimentation, environnement : changer l’agriculture ? 2012 Dossier

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  • Regards sur la Terre décrypte la complexité des processus qui composent le développe-ment durable et en révèle toute la richesse.

    La première partie dresse le bilan de l’année 2011 : retour sur les dates qui ont marqué l’avancée des connaissances et la construction de l’action dans les domaines du climat, de la biodiversité, des ressources naturelles, de la gouvernance, de l’énergie, de la santé ou du développement ; analyse des événements clés et des tendances émergentes, identifi cation des acteurs majeurs, des enjeux et des perspectives.

    Le Dossier 2012 interroge l’un des enjeux majeurs de nos sociétés contemporaines : l’agri-culture. Longtemps restée écartée des politiques de développement, celle-ci fait un retour en force sur le devant de la scène internationale. Mais si l’évidence d’un besoin d’investissements massifs dans le secteur agricole est aujourd’hui reconnue, d’im-portantes controverses demeurent. L’agriculture peut-elle être un moteur du déve-loppement ? Peut-elle assurer la sécurité alimentaire d’une population mondiale qui vient de franchir le cap des 7 milliards d’individus ? Comment concilier la produc-tion agricole avec les exigences du développement durable ? Un nouveau modèle doit-il être inventé ? Entre intérêt récent des investisseurs, débat sur les modèles de productions inscrits dans des réalités physiques, climatiques, environnementales et sociales et réflexion sur nos modes de consommation et d’alimentation, l’agri-culture, qui cristallise tant les espoirs que les résistances à la mondialisation, est aujourd’hui plus que jamais un enjeu de gouvernance mondiale.

    Fruit d’une coopération entre l’AFD (Agence française de développement), l’Iddri (Institut du développement durable et des relations internationales) et le TERI (The Energy and Resources Institute), Regards sur la Terre constitue un outil d’information et de compréhension indispensable.

    Pierre JACQUET, Rajendra K. PACHAURI et Laurence TUBIANA (dir.)

    Développement, alimentation, environnement : changer l’agriculture ?

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    25,40 € Prix TTC France6951305ISBN : 978-2-200-27528-0

    Établissement public, l’Agence française de développe-ment (AFD) agit depuis soixante-dix ans pour combattre la pauvreté et favoriser le développement dans les pays du Sud et dans l’outre-mer. Elle met en œuvre la politique définie par le gouvernement français. Présente

    sur le terrain dans plus de 50 pays et dans 9 départements et collectivités d’outre-mer, l’AFD finance et accompagne des projets qui améliorent les conditions de vie des populations, soutiennent la croissance économique et protègent la planète : scolarisation, santé maternelle, appui aux agri-culteurs et aux petites entreprises, adduction d’eau, préservation de la forêt tropicale, lutte contre le réchauffement climatique… En 2010, l’AFD a consacré plus de 6,8 milliards d’euros au financement d’actions dans les pays en développement et en faveur de l’outre-mer. Ils contribueront notamment à la scolarisation de 13 millions d’enfants, l’amélioration de l’approvisionnement en eau potable pour 33 millions de personnes et l’octroi de microcrédits bénéficiant à un peu plus de 700 000 personnes. Les projets d’efficacité énergétique sur la même année permettront d’économiser près de 5 millions de tonnes de CO2 par an. www.afd.fr

    Institut de recherche sur les politiques, l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) a pour objectif d’élaborer et de partager des clés d’analyse et de compréhension des enjeux stratégiques

    du développement durable dans une perspective mondiale. Face aux défis majeurs que représentent le changement climatique et l’érosion de la biodiversité, l’Iddri accompagne les différents acteurs dans la réflexion sur la gouvernance mondiale et participe aux travaux sur la redéfinition des trajectoires de développement. Ses travaux sont structurés transver-salement autour de cinq programmes thématiques : gouvernance, climat, biodiversité, fabrique urbaine et agriculture. www.iddri.org

    The Energy and Resources Institute (TERI) est une organisation non gouvernementale indienne créée en 1974 pour développer des solutions innovantes afin de traiter les enjeux du développement durable, de

    l’environnement, de l’efficacité énergétique et de la gestion des ressources naturelles. Ses diverses activités vont de la formulation de stratégies locales et nationales jusqu’à la proposition de politiques globales sur les enjeux énergétiques et environnementaux. Basé à Delhi, l’Institut est doté de plusieurs antennes régionales sur le territoire indien. www.teriin.org

    Pierre JACQUET, ingénieur des Ponts, des eaux et forêts et membre du Cercle des économistes, est chef écono-miste de l’Agence française de développement (AFD). Il est aussi président du département d’économie, gestion, finances et professeur d’économie internatio-nale à l’École des Ponts-ParisTech. Il est notamment administrateur de l’Institut français des relations inter-

    nationales (IFRI), de l’Institut de la gestion déléguée (IGD) et de Proparco. Il a appartenu entre 1997 et 2006 au Conseil d’analyse économique auprès du Premier ministre. Il écrit une chronique mensuelle sur les acteurs du développement dans Le Monde de l’économie.

    Laurence TUBIANA, économiste, a fondé et dirige l’Ins-titut du développement durable et des relations inter-nationales (Iddri) et la chaire Développement durable de Sciences Po. Elle est professeur au sein de l’École des affaires internationales de Sciences Po. Chargée de mission puis conseillère auprès du Premier ministre sur les questions de l’environnement de 1997 à 2002, elle a

    été directrice des biens publics mondiaux au ministère des Affaires étran-gères et européennes. Elle est membre de divers conseils d’universités et de centres de recherches internationaux (Coopération internationale en recherche agronomique pour le développement – Cirad, Earth Institute at Columbia University, Oxford Martin School). Elle est également membre de l’India Council for Sustainable Development et du China Council for International Cooperation on Environment and Development et du Conseil d’orientation stratégique de l’Institute for Advanced Sustainability Studies e.V. (Potsdam, Allemagne).

    Rajendra Kumar PACHAURI est docteur en génie industriel et en économie. Il est actuellement le directeur général de The Energy and Resources Institute (TERI) basé à Delhi (Inde). Depuis 2002, il préside le Groupe intergou-vernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec) qui a obtenu le prix Nobel de la paix en 2007.

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    après la révolution verteEntretien avec Dr. Seema PURUSHOTHAMAN, Ashoka Trust for Research in Ecology and the Environment, Inde

    Dr. Seema Purushothaman est une scientifique indienne travaillant pour le Fonds Ashoka pour la recherche en écologie et environnement (ATREE), à Bangalore. Ses domaines de recherche portent sur les services écosystémiques et leurs liens avec la crise alimentaire et agricole.

    La révolution verte indienne sert de référence dans les débats sur l’opportunité d’une nouvelle révolution verte, notamment en Afrique subsaharienne. Mais comment évalue-t-on en Inde le bilan de la révolution verte ? Est-il question dans le futur d’adapter ce modèle ou bien de changer de modèle agricole ?Dans l’abondante littérature consacrée à l’évaluation de la révolution verte en Inde, trois aspects positifs font consensus. Premièrement, il est généralement admis que la révolution verte a joué un rôle important dans la pré-vention des famines dans les années 1970 et 1980, même si elle n’a pas eu pour conséquence la complète éradica-tion de la faim. Deuxièmement, la révolution verte a per-mis d’améliorer les infrastructures (irrigation, commer-cialisation, transport) dans de nombreuses zones rurales (même si les améliorations n’ont pas été uniformes). Troisièmement, elle a entraîné une augmentation de l’in-vestissement dans l’éducation et la recherche agricoles dans la plupart des régions.

    Cependant, on y trouve aussi de nombreuses critiques. La première porte sur les disparités (rural/urbain, agricole/non agricole) qui ont été exacerbées par la répartition inégale des progrès technologiques en Inde. La deuxième critique concerne le choix de cibler un nombre limité de cultures, créant ainsi un déséquilibre de l’offre en céréales alimentaires qui par la suite a eu pour conséquence un déséquilibre nutritionnel en milieu

    rural, avec une diminution spectaculaire de la quantité d’aliments riches en calories, protéines et vitamines. Le troisième problème est la focalisation sur un petit nombre de technologies, à savoir les engrais chimiques, les pesticides et l’irrigation. Cette approche centrée sur un nombre limité de cultures et de technologies n’est pas, selon M.S. Swaminathan 1, l’approche défendue dans les recherches ayant lancé cette révolution, mais pourrait être une conséquence involontaire de la diffusion des changements technologiques. Même si la révolution verte s’est axée sur la technologie, son impact et ses objectifs ont été affectés par de nombreux autres facteurs comme les infrastructures, la disponibilité en intrants et les autres mesures politiques.

    Pour atteindre le niveau de progrès technologique exigé par la révolution verte, il a fallu créer des incita-tions, c’est-à-dire que les technologies nécessaires ont été subventionnées, donnant naissance à un quatrième problème : les subventions des intrants et de la produc-tion sont devenues partie intégrante de l’agriculture indienne. Les subventions ne sont pas seulement une charge budgétaire, mais elles avantagent également les industries agroalimentaires et les grandes exploitations de manière disproportionnée et, comme elles sont désé-quilibrées, leurs impacts sont négatifs sur la durabilité des systèmes agricoles.

    L’évaluation de la révolution verte est-elle consensuelle ou controversée ?Pendant les années 1970 et 1980, la majorité de la littéra-ture scientifique mettait en avant les réussites de la révo-lution verte : adoption de nouvelles variétés, augmenta-tion de la production et diminution de la pauvreté rurale. Dans les années 1990, de plus en plus d’articles sur les

    1. Un des pères de la révolution verte indienne.

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    impacts négatifs ont été publiés, ouvrant le débat entre quatre groupes d’acteurs : (i) les agriculteurs, (ii) les ONG, (iii) les chercheurs et (iv) les décideurs politiques.

    En ce qui concerne le premier groupe d’acteurs, 60 % de la population agricole indienne est constituée de petits agriculteurs disposant de moins de 2 hectares, pour qui l’importance de l’agriculture est liée à la fois à leur statut de consommateurs et de producteurs. Toutefois, les orga-nisations d’agriculteurs les plus influentes défendent des cultures spécifiques (canne à sucre, oignon, etc.) et comme les petits agriculteurs ont tendance à produire plus d’une culture, leurs voix ne sont généralement pas entendues dans ces organisations, au profit des lobbies puissants des plus gros agriculteurs. Ainsi, les paysans ne sont pas suffisamment représentés dans les débats agricoles nationaux. Par ailleurs, dans de nombreuses régions agroclimatiques de l’Inde, les petits agriculteurs continuent d’utiliser des technologies traditionnelles. Même s’ils ne sont pas strictement certifiés biologiques ou agro-écologiques, ils n’adoptent pas de pratiques à forte intensité d’intrants et utilisent les techniques de l’agriculture biologique en fonction de leurs besoins.

    Le second groupe d’acteurs est celui des ONG, qui sont toutes très critiques envers les modèles et les politiques agricoles actuels, principalement en raison de leur coût très élevé. Sur cette question, les ONG sociales et envi-ronnementales se recoupent souvent. Les organismes bénévoles jouent un rôle important dans les débats agri-coles dans les médias, mais moins dans les universités ou dans les couloirs politiques où ils ne sont pas entendus.

    Le troisième groupe est celui des chercheurs, que l’on peut subdiviser entre les chercheurs gouvernemen-taux (qui travaillent principalement dans les universités agricoles), les chercheurs d’entreprises et les chercheurs indépendants, notamment les membres d’ATREE ou de la fondation M.S. Swaminathan. Le travail des chercheurs gouvernementaux s’est de plus en plus rapproché de celui des chercheurs d’entreprises, et ils publient plus ou moins dans les mêmes revues. Les équipes de recherche indépendantes, bien que toujours minoritaires, essaient généralement d’intégrer dans leurs travaux des perspec-tives intersectorielles et interdisciplinaires.

    Le quatrième groupe d’acteurs est celui des décideurs politiques. Alors que les politiques des États (ou pro-vinces) tentent de s’éloigner des méthodes de la révo-lution verte, les politiques décidées au niveau fédéral n’évoluent pas et maintiennent les mêmes subventions pour les engrais et l’irrigation que dans les années 1960.

    Constitutionnellement, l’agriculture est une affaire gérée par les différents États. Ces derniers peuvent éla-borer des politiques agricoles et allouer des budgets, mais leur action entre en conflit avec les politiques cen-tralisées, notamment celles des subventions des engrais. Ainsi, dans les États comme Karnataka, Andhra, Pradesh ou Kerala, qui investissent dans l’agriculture durable, on assiste à la coexistence et la concurrence entre des poli-tiques aux objectifs opposés. Il n’est pas possible pour un État de s’exclure des politiques d’engrais, car tous les points de vente fournissent des engrais à un prix sub-ventionné. Aussi, la seule solution pour les États est de subventionner les engrais biologiques et les intrants durables, ce qui se fait de plus en plus.

    Ces quatre groupes d’acteurs ont donc des approches différentes et défendent des trajectoires de développe-ment distinctes pour l’agriculture indienne, même si leurs positions évoluent progressivement. Par exemple, la commission nationale des agriculteurs a appelé à une nouvelle révolution verte, nuançant son objectif en affir-mant qu’il fallait tirer des leçons des erreurs de la pré-cédente révolution. Cela représente un véritable change-ment conceptuel.

    Comment se présente le débat entre agriculture conventionnelle et agriculture écologique en Inde ? De quelle manière est-il associé aux questions sur l’emploi ?En Inde, l’approche conventionnelle de l’agriculture est largement dominante car elle reçoit un soutien fédéral et commercial, tandis que le courant agro-écologique implique principalement le secteur bénévole et les cher-cheurs indépendants.

    Dans les zones rurales indiennes, les possibilités d’em-ploi sont limitées en dehors des fermes. L’agriculture est souvent l’unique source d’emploi, ce qui favorise les pra-tiques agricoles à forte intensité de main-d’œuvre dans un contexte de faible coût d’opportunité. Inversement, la productivité des petites exploitations agricoles est consi-dérée en termes de productivité par unité de travail, et non par hectare. Cela ne signifie pas que les petits agri-culteurs sont opposés à la technologie, mais qu’ils ont besoin de technologies appropriées qui prennent en compte leur situation.

    Par ailleurs, l’Inde ne peut pas se permettre d’écar-ter de l’agriculture des millions de petits exploitants et leurs familles. Les villes indiennes ne peuvent plus faire face à l’afflux de travailleurs non qualifiés, car le

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    développement urbain se fait à un rythme progressif. Les travailleurs non qualifiés ne trouveront pas d’emploi stable dans les secteurs des services ou de l’industrie.

    Pour avancer, que faudrait-il faire en termes de réglementation et de législation ?En tant qu’universitaire, je ne peux pas faire de recom-mandations, mais seulement des suggestions fondées sur des extrapolations à partir de mes travaux de recherche. L’Inde a la possibilité de relever le défi de la durabilité agri-cole et alimentaire, mais doit pour cela disposer de poli-tiques axées sur les millions de petits agriculteurs qui veulent s’engager en tant que consommateurs et produc-teurs d’aliments. Ils ne vont pas à l’encontre du dévelop-pement. Ils souhaitent que leurs enfants soient éduqués et qu’ils puissent, s’ils le veulent, s’éloigner de ce secteur. Tou-tefois, cette ambition ne doit pas résulter de la détresse, mais naître en temps opportun dans le prolongement de l’acquisition de nouvelles compétences non agricoles.

    Les politiques ne devraient pas ignorer les compé-tences traditionnelles et les particularités culturelles de ces petits agriculteurs. Par ailleurs, l’agriculture à petite échelle a la plus faible empreinte écologique. Par consé-quent, une trajectoire de développement alternative pour le secteur agricole pourrait représenter une oppor-tunité pour l’Inde de réduire ses émissions de carbone.

    Alors comment mieux concevoir les politiques agri-coles pour tenir compte des petits exploitants ? Au moins trois domaines doivent être pris en considéra-tion. Les deux premiers concernent la commercialisation de la production et des intrants. Les petits agriculteurs sont constamment dans une situation défavorable s’ils dépendent entièrement des marchés car ils sont soumis à de nombreuses incertitudes, en particulier concernant leur production. L’enjeu est aussi d’obtenir de bons prix. Autrefois, le seul risque pour les agriculteurs indiens était lié à la mousson, maintenant ils doivent aussi parier sur les marchés mondiaux. Par ailleurs, comme les petits agriculteurs manquent d’infrastructures de stoc-kage et de commercialisation, ils ne peuvent pas béné-ficier de prix intéressants sur les marchés d’exporta-tion et ne peuvent donc pas en dépendre. Cette question doit être abordée par les politiques, en particulier parce

    que le marché intérieur indien est vaste. Si le gouverne-ment pouvait atténuer le risque lié à la dépendance aux marchés locaux, cela contribuerait fortement à la dura-bilité du secteur des petites exploitations. Le deuxième point à traiter est la réduction de la dépendance à l’égard des intrants dont les prix varient selon le marché, afin de limiter les risques d’escalade des coûts. Le troisième point est la nécessité de gérer les risques climatiques, en proposant aux petits agriculteurs une assurance contre les variations climatiques.

    Ce n’est que si ces trois points peuvent être traités avec succès qu’un quatrième facteur pourra être amélioré, à savoir la capacité à mobiliser des crédits et des prêts. L’ex-tension des facilités de crédits est nécessaire pour faire des petites exploitations des entreprises durables, mais cela doit s’accompagner d’un bon marché pour la pro-duction et d’assurances climatiques suffisantes. Sinon, l’extension des facilités de crédits, sans plafonds, mène-rait droit au désastre, comme en témoigne le grand nombre d’agriculteurs qui se suicident en Inde. Même s’il convient de souligner que les suicides d’agriculteurs ne sont pas toujours liés aux activités agricoles et aux prêts.

    L’indispensable ensemble de mesures politiques doit donc être plus qu’une simple liste de mesures, mais doit être conçu de manière stratégique. Par ailleurs, la façon dont les politiques sont élaborées est aussi un enjeu essen-tiel. Le courant agro-écologique de gestion agricole a une vision très décentralisée de la mise en œuvre et de la for-mulation des politiques, et même du programme de recherche. Dans de nombreux cas, les priorités décidées au niveau central ne cadrent pas avec les réalités locales. Par exemple, la révolution verte a largement développé l’irrigation sur les terres agricoles sans évaluer les coûts et avantages par écosystème spécifique, conduisant parfois à une surirrigation, entre autres problèmes. C’est le résultat d’une démarche descendante qui consiste à imposer des technologies, sans que le processus d’extension ne prenne en compte les aspects locaux spécifiques, qui peuvent être essentiels pour la viabilité d’une technologie, ou tout au moins pour que son impact soit neutre. Ainsi, pour résu-mer, les politiques devraient cibler les petits exploitants, donner la priorité à l’atténuation des trois types de risques et fonctionner de manière décentralisée. ■

  • Regards sur la Terre décrypte la complexité des processus qui composent le développe-ment durable et en révèle toute la richesse.

    La première partie dresse le bilan de l’année 2011 : retour sur les dates qui ont marqué l’avancée des connaissances et la construction de l’action dans les domaines du climat, de la biodiversité, des ressources naturelles, de la gouvernance, de l’énergie, de la santé ou du développement ; analyse des événements clés et des tendances émergentes, identifi cation des acteurs majeurs, des enjeux et des perspectives.

    Le Dossier 2012 interroge l’un des enjeux majeurs de nos sociétés contemporaines : l’agri-culture. Longtemps restée écartée des politiques de développement, celle-ci fait un retour en force sur le devant de la scène internationale. Mais si l’évidence d’un besoin d’investissements massifs dans le secteur agricole est aujourd’hui reconnue, d’im-portantes controverses demeurent. L’agriculture peut-elle être un moteur du déve-loppement ? Peut-elle assurer la sécurité alimentaire d’une population mondiale qui vient de franchir le cap des 7 milliards d’individus ? Comment concilier la produc-tion agricole avec les exigences du développement durable ? Un nouveau modèle doit-il être inventé ? Entre intérêt récent des investisseurs, débat sur les modèles de productions inscrits dans des réalités physiques, climatiques, environnementales et sociales et réflexion sur nos modes de consommation et d’alimentation, l’agri-culture, qui cristallise tant les espoirs que les résistances à la mondialisation, est aujourd’hui plus que jamais un enjeu de gouvernance mondiale.

    Fruit d’une coopération entre l’AFD (Agence française de développement), l’Iddri (Institut du développement durable et des relations internationales) et le TERI (The Energy and Resources Institute), Regards sur la Terre constitue un outil d’information et de compréhension indispensable.

    Pierre JACQUET, Rajendra K. PACHAURI et Laurence TUBIANA (dir.)

    Développement, alimentation, environnement : changer l’agriculture ?

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    25,40 € Prix TTC France6951305ISBN : 978-2-200-27528-0

    Établissement public, l’Agence française de développe-ment (AFD) agit depuis soixante-dix ans pour combattre la pauvreté et favoriser le développement dans les pays du Sud et dans l’outre-mer. Elle met en œuvre la politique définie par le gouvernement français. Présente

    sur le terrain dans plus de 50 pays et dans 9 départements et collectivités d’outre-mer, l’AFD finance et accompagne des projets qui améliorent les conditions de vie des populations, soutiennent la croissance économique et protègent la planète : scolarisation, santé maternelle, appui aux agri-culteurs et aux petites entreprises, adduction d’eau, préservation de la forêt tropicale, lutte contre le réchauffement climatique… En 2010, l’AFD a consacré plus de 6,8 milliards d’euros au financement d’actions dans les pays en développement et en faveur de l’outre-mer. Ils contribueront notamment à la scolarisation de 13 millions d’enfants, l’amélioration de l’approvisionnement en eau potable pour 33 millions de personnes et l’octroi de microcrédits bénéficiant à un peu plus de 700 000 personnes. Les projets d’efficacité énergétique sur la même année permettront d’économiser près de 5 millions de tonnes de CO2 par an. www.afd.fr

    Institut de recherche sur les politiques, l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) a pour objectif d’élaborer et de partager des clés d’analyse et de compréhension des enjeux stratégiques

    du développement durable dans une perspective mondiale. Face aux défis majeurs que représentent le changement climatique et l’érosion de la biodiversité, l’Iddri accompagne les différents acteurs dans la réflexion sur la gouvernance mondiale et participe aux travaux sur la redéfinition des trajectoires de développement. Ses travaux sont structurés transver-salement autour de cinq programmes thématiques : gouvernance, climat, biodiversité, fabrique urbaine et agriculture. www.iddri.org

    The Energy and Resources Institute (TERI) est une organisation non gouvernementale indienne créée en 1974 pour développer des solutions innovantes afin de traiter les enjeux du développement durable, de

    l’environnement, de l’efficacité énergétique et de la gestion des ressources naturelles. Ses diverses activités vont de la formulation de stratégies locales et nationales jusqu’à la proposition de politiques globales sur les enjeux énergétiques et environnementaux. Basé à Delhi, l’Institut est doté de plusieurs antennes régionales sur le territoire indien. www.teriin.org

    Pierre JACQUET, ingénieur des Ponts, des eaux et forêts et membre du Cercle des économistes, est chef écono-miste de l’Agence française de développement (AFD). Il est aussi président du département d’économie, gestion, finances et professeur d’économie internatio-nale à l’École des Ponts-ParisTech. Il est notamment administrateur de l’Institut français des relations inter-

    nationales (IFRI), de l’Institut de la gestion déléguée (IGD) et de Proparco. Il a appartenu entre 1997 et 2006 au Conseil d’analyse économique auprès du Premier ministre. Il écrit une chronique mensuelle sur les acteurs du développement dans Le Monde de l’économie.

    Laurence TUBIANA, économiste, a fondé et dirige l’Ins-titut du développement durable et des relations inter-nationales (Iddri) et la chaire Développement durable de Sciences Po. Elle est professeur au sein de l’École des affaires internationales de Sciences Po. Chargée de mission puis conseillère auprès du Premier ministre sur les questions de l’environnement de 1997 à 2002, elle a

    été directrice des biens publics mondiaux au ministère des Affaires étran-gères et européennes. Elle est membre de divers conseils d’universités et de centres de recherches internationaux (Coopération internationale en recherche agronomique pour le développement – Cirad, Earth Institute at Columbia University, Oxford Martin School). Elle est également membre de l’India Council for Sustainable Development et du China Council for International Cooperation on Environment and Development et du Conseil d’orientation stratégique de l’Institute for Advanced Sustainability Studies e.V. (Potsdam, Allemagne).

    Rajendra Kumar PACHAURI est docteur en génie industriel et en économie. Il est actuellement le directeur général de The Energy and Resources Institute (TERI) basé à Delhi (Inde). Depuis 2002, il préside le Groupe intergou-vernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec) qui a obtenu le prix Nobel de la paix en 2007.

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