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1,50 € Numéros précédents 3,00 € L’O SSERVATORE ROMANO EDITION HEBDOMADAIRE EN LANGUE FRANÇAISE Unicuique suum Non praevalebunt LXXII e année, numéro 3 (3.667) mardi 19 janvier 2021 Cité du Vatican Ouverture de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens L’unité est toujours supérieure au conflit «Demain — a dit le Pape François à l’issue de l’An- gelus du 17 janvier — est une journée importante: c'est le début de la Semaine de prière pour l'unité des chrétiens. Cette année, le thème reprend l'aver- tissement de Jésus: «Demeurez dans mon amour et vous porterez du fruit en abondance» (cf. Jn 15, 5- 9). Lundi 25 janvier, nous conclurons la semaine par la célébration des vêpres dans la basilique Saint- Paul-hors-les-Murs, avec les représentants des au- tres communautés chrétiennes présents. Prions de manière unanime au cours de ces journées afin que s'accomplisse le désir de Jésus: "Que tous soient un" (Jn 17, 21). L’unité, qui est toujours supérieure au conflit». C'est par ces paroles que le Pape François a évoqué la Semaine de prière pour l’unité des chré- tiens, grand rendez-vous de prière pour l’œcumé- nisme dans le monde qui a lieu du lundi 18 janvier au lundi 25 janvier 2021. Cette date traditionnelle a été proposée en 1908 par le pasteur épiscopalien américain Paul Wattson, fondateur de la congréga- tion des Frères franciscains de l'Atonement, parce que comprise entre la fête de la Chaire de saint Pier- re (aujourd'hui 22 février mais autrefois le 18 jan- vier) et celle de la conversion de saint Paul (25 jan- vier). Cette année, le thème est décliné en méditations proposées quotidiennement toute la semaine. Elles ont été préparées par les religieuses de la commu- nauté monastique de Grandchamp, en Suisse, réu- nissant des sœurs de différentes Eglises et nationa- lités, fondée dans les années 1930. Aujourd'hui, la communauté compte une cinquantaine de sœurs engagées dans la recherche de la réconciliation entre chrétiens, dans la famille humaine et dans le respect de la création. C'est cette vocation à la prière, à la réconciliation et à l’unité dans l’Eglise et la famille humaine qui a été exprimée dans le matériel pour la semaine de prière, préparé sur indication de la Commission internationale constituée par l'Eglise catholique (Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens) et par le Conseil œcuménique des Eglises (Commission Foi et Constitution). Le thème choisi cette année: «Demeurez dans mon amour et vous porterez du fruit en abondance» est tiré de l'Evangile de Jean (Jn 15, 5-9). Un thème, lit- on dans le matériel préparé, «qui a permis aux sœurs de partager l’expérience et la sagesse de leur vie contemplative dans l’amour de Dieu et de parler du fruit de cette prière: une communion plus étroite avec leurs frères et sœurs en Christ et une plus gran- de solidarité avec l’ensemble de la création». L'itinéraire de prière proposé par les religieuses cette année se décline dans les huit méditations quotidiennes suivantes: Appelés par Dieu; Mûrir intérieurement; Former un corps uni; Prier ensem- ble; Se laisser transformer par la Parole; Accueillir l’autre; Grandir dans l’unité; Se réconcilier avec toute la création. La ville de Qaraqosh en Irak sous la protection bienveillante de la Vierge Marie DANS CE NUMÉRO Audience générale du 13 janvier. Créances de l’Uruguay PAGE 2 Angelus du 17 janvier. Présentation du messa- ge des évêques de Centrafrique PAGE 3 Lettre du Pape au cardinal Ladaria PAGE 4 Entretien du Pape avec le journal télévisé ita- lien TG5. PAGE 5 Présentation de la Note de la Commission va- ticane Covid-19 et de l’Académie pour la vie. Portes ouvertes: la persécution des chrétiens PAGE 6 Informations. Décès des cardinaux Schwery et Scheid PAGE 7 «Fratelli tutti», réflexion du cardinal Filoni. Note de la Congrégation pour le culte divin sur le Mercredi des cendres PAGE 8 Le premier concile œcuménique de Nicée représenté dans une fresque byzantine dans l'église Saint-Nicolas à Demre près de l'antique Myre en Turquie Une statue de la Vierge a été inaugurée sur le clocher de la cathédrale Al-Tahira de Qaraqosh, une ville de la plaine de Ninive, dont le patrimoine chrétien avait été ciblé par les exactions de l’organisation de l’Etat islamique entre 2014 et 2016. Cette œuvre por- teuse d'espérance a été réalisée par un artiste local, Thabit Michael. Le symbole est fort. Depuis mardi 12 janvier, la cathédrale syro-catholique Al-Tahira de Qaraqosh, principale ville chrétienne de la plaine de Ninive dans le nord de l’Irak, vit désormais sous le regard de Marie. La population locale a célébré la pose de la statue, indique l’agence d’information AsiaNews.it. Ce lieu de culte, encore en travaux ac- tuellement, est cher à la communauté chrétienne de la région, éprouvée par les exactions des djihadistes lorsqu’ils occupaient ce territoire après leur offensi- ve de l'été 2014. Durant l'été 2014, l'EI a envahi Qara- qosh, détruisant les maisons, dévastant les églises, la bibliothèque et d'autres monuments de la ville. Des dizaines de milliers de familles ont dû abandonner précipitamment leurs maisons dans ce qui a long- temps été le centre chrétien le plus important de la plaine de Ninive. La ville a été libérée du joug djiha- diste deux ans plus tard, en 2016. La ville de Qara- qosh fait partie des étapes prévues lors de la visite du Pape François en Irak, du 5 au 8 mars prochains.

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  • 1,50 € Numéros précédents 3,00 €

    L’OSSERVATORE ROMANOEDITION HEBDOMADAIRE EN LANGUE FRANÇAISE

    Unicuique suum Non praevalebunt

    LXXIIe année, numéro 3 (3.667) mardi 19 janvier 2021Cité du Vatican

    Ouverture de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens

    L’unité est toujours supérieureau conflit

    «Demain — a dit le Pape François à l’issue de l’An-gelus du 17 janvier — est une journée importante:c'est le début de la Semaine de prière pour l'unitédes chrétiens. Cette année, le thème reprend l'aver-tissement de Jésus: «Demeurez dans mon amour etvous porterez du fruit en abondance» (cf. Jn 15, 5-9). Lundi 25 janvier, nous conclurons la semaine parla célébration des vêpres dans la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs, avec les représentants des au-tres communautés chrétiennes présents. Prions demanière unanime au cours de ces journées afin ques'accomplisse le désir de Jésus: "Que tous soient un"(Jn 17, 21). L’unité, qui est toujours supérieure auconflit».

    C'est par ces paroles que le Pape François aévoqué la Semaine de prière pour l’unité des chré-tiens, grand rendez-vous de prière pour l’œcumé-nisme dans le monde qui a lieu du lundi 18 janvierau lundi 25 janvier 2021. Cette date traditionnelle aété proposée en 1908 par le pasteur épiscopalienaméricain Paul Wattson, fondateur de la congréga-tion des Frères franciscains de l'Atonement, parceque comprise entre la fête de la Chaire de saint Pier-re (aujourd'hui 22 février mais autrefois le 18 jan-vier) et celle de la conversion de saint Paul (25 jan-vier).

    Cette année, le thème est décliné en méditationsproposées quotidiennement toute la semaine. Ellesont été préparées par les religieuses de la commu-nauté monastique de Grandchamp, en Suisse, réu-nissant des sœurs de différentes Eglises et nationa-lités, fondée dans les années 1930. Aujourd'hui, lacommunauté compte une cinquantaine de sœursengagées dans la recherche de la réconciliation entrechrétiens, dans la famille humaine et dans le respectde la création. C'est cette vocation à la prière, à laréconciliation et à l’unité dans l’Eglise et la famillehumaine qui a été exprimée dans le matériel pour lasemaine de prière, préparé sur indication de laCommission internationale constituée par l'Eglisecatholique (Conseil pontifical pour la promotion del'unité des chrétiens) et par le Conseil œcuméniquedes Eglises (Commission Foi et Constitution). Lethème choisi cette année: «Demeurez dans monamour et vous porterez du fruit en abondance» esttiré de l'Evangile de Jean (Jn 15, 5-9). Un thème, lit-on dans le matériel préparé, «qui a permis auxsœurs de partager l’expérience et la sagesse de leurvie contemplative dans l’amour de Dieu et de parlerdu fruit de cette prière: une communion plus étroiteavec leurs frères et sœurs en Christ et une plus gran-de solidarité avec l’ensemble de la création».

    L'itinéraire de prière proposé par les religieusescette année se décline dans les huit méditationsquotidiennes suivantes: Appelés par Dieu; Mûririntérieurement; Former un corps uni; Prier ensem-ble; Se laisser transformer par la Parole; Accueillirl’autre; Grandir dans l’unité; Se réconcilier avectoute la création.

    La ville de Qaraqosh en Iraksous la protection bienveillante de la Vierge Marie

    DANS CE NUMÉRO

    Audience générale du 13 janvier. Créances del’U ru g u a y

    PAGE 2

    Angelus du 17 janvier. Présentation du messa-ge des évêques de Centrafrique

    PAGE 3

    Lettre du Pape au cardinal Ladaria

    PAGE 4

    Entretien du Pape avec le journal télévisé ita-lien TG5.

    PAGE 5

    Présentation de la Note de la Commission va-ticane Covid-19 et de l’Académie pour la vie.Portes ouvertes: la persécution des chrétiens

    PAGE 6

    Informations. Décès des cardinaux Schweryet Scheid

    PAGE 7

    «Fratelli tutti», réflexion du cardinal Filoni.Note de la Congrégation pour le culte divinsur le Mercredi des cendres

    PAGE 8

    Le premier concile œcuménique de Nicée représenté dans une fresque byzantine dans l'église Saint-Nicolas à Demreprès de l'antique Myre en Turquie

    Une statue de la Vierge a été inaugurée sur le clocherde la cathédrale Al-Tahira de Qaraqosh, une ville dela plaine de Ninive, dont le patrimoine chrétienavait été ciblé par les exactions de l’organisation del’Etat islamique entre 2014 et 2016. Cette œuvre por-teuse d'espérance a été réalisée par un artiste local,Thabit Michael. Le symbole est fort. Depuis mardi12 janvier, la cathédrale syro-catholique Al-Tahira deQaraqosh, principale ville chrétienne de la plaine deNinive dans le nord de l’Irak, vit désormais sous leregard de Marie. La population locale a célébré lapose de la statue, indique l’agence d’informationAsiaNews.it. Ce lieu de culte, encore en travaux ac-

    tuellement, est cher à la communauté chrétienne dela région, éprouvée par les exactions des djihadisteslorsqu’ils occupaient ce territoire après leur offensi-ve de l'été 2014. Durant l'été 2014, l'EI a envahi Qara-qosh, détruisant les maisons, dévastant les églises, labibliothèque et d'autres monuments de la ville. Desdizaines de milliers de familles ont dû abandonnerprécipitamment leurs maisons dans ce qui a long-temps été le centre chrétien le plus important de laplaine de Ninive. La ville a été libérée du joug djiha-diste deux ans plus tard, en 2016. La ville de Qara-qosh fait partie des étapes prévues lors de la visite duPape François en Irak, du 5 au 8 mars prochains.

  • L’OSSERVATORE ROMANOpage 2 mardi 19 janvier 2021, numéro 3

    Même les moments sombressont un temps pour la louange

    Lettres de Créancede l’ambassadeur d’U ru g u a y

    Chers frères et sœurs, bonjour!Nous poursuivons notre catéchèsesur la prière, et nous nous consacronsa u j o u rd ’hui à la dimension de lalouange.

    Nous partons d’un passage cri-tique de la vie de Jésus. Après lespremiers miracles et la participationdes disciples à l’annonce du Royau-me de Dieu, la mission du Messietraverse une crise. Jean-Baptiste estpris d’un doute et lui fait parvenir cemessage — Jean est en prison: «Es-tucelui qui doit venir ou devons-nousen attendre un autre?» (Mt 11, 3); Ilsent cette angoisse de ne pas savoirs’il s’est trompé dans son annonce. Ily a toujours dans la vie des momentssombres, des moments de nuit spiri-tuelle, et Jean traverse l’un de cesmoments. Il règne une certaine hosti-lité dans les villages sur le lac, où Jé-sus avait accompli de nombreux si-gnes prodigieux (cf. 11,20-24). A pré-sent, précisément en ce moment de

    déception, Matthieu rapporte un faitvéritablement surprenant: Jésusn’élève pas une lamentation vers lePère, mais un hymne de jubilation:«Je te bénis, Père, Seigneur du ciel etde la terre, d’avoir caché cela aux sa-ges et aux intelligents et de l’avoir ré-vélé aux tout-petits» (Mt 11, 25).C’est-à-dire en pleine crise, en pleineobscurité dans l’âme de tant de per-sonnes, comme Jean-Baptiste, Jésusbénit le Père, Jésus loue le Père. Maisp ourquoi ?

    Avant tout il le loue pour ce qu’il est:«Père, Seigneur du ciel et de la ter-re». Jésus se réjouit dans son espritparce qu’il sait et il sent que son Pèreest le Dieu de l’univers, et inverse-ment, le Seigneur de tout ce qui exis-te est le Père, «mon Père». C’est decette expérience de se sentir «fils duTrès-Haut» que jaillit la louange. Jé-sus se sent fils du Très-Haut.

    Puis Jésus loue le Père parce qu’ilprivilégie les petits. C’est ce dont il fait

    lui-même l’expérience, en prêchantdans les villages: les «sages» et les«intelligents» sont suspicieux et fer-més, font des calculs; tandis que les«petits» s’ouvrent et accueillent lemessage. Cela ne peut qu’être la vo-lonté du Père, et Jésus s’en réjouit.Nous aussi nous devons nous réjouiret louer Dieu parce que les personneshumbles et simples accueillentl’Evangile. Je me réjouis quand jevois ces gens simples, ces gens hum-bles qui vont en pèlerinage, qui vontprier, qui chantent, qui louent, desgens auxquels il manque peut-êtrebeaucoup de choses, mais l’humilitéles conduit à louer Dieu. Dans l’ave-nir du monde et dans les espérancesdes Eglises, il y a toujours les «pe-tits»: ceux qui ne se considèrent pasmeilleurs que les autres, qui sontconscients de leurs limites et de leurspéchés, qui ne veulent pas dominerles autres, qui, en Dieu le Père, se re-connaissent tous frères.

    Donc, en ce mo-ment d’échec appa-rent, où tout est obs-cur, Jésus prie en lou-ant le Père. Et sa priè-re nous conduit aussi,nous lecteurs del’Evangile, à juger demanière différentenos échecs person-nels, les situations oùnous ne voyons pasclairement la présenceet l’action de Dieu,quand il semble queprévaut le mal et qu’iln’existe aucune façonde l’arrêter. Jésus, quia pourtant tant re-commandé la prièrede demande, précisé-ment au moment où ilaurait eu un motif dedemander des expli-cations au Père, semet en revanche à lelouer. Cela semble une contradiction,mais c’est là, la vérité.

    A qui sert la louange? A nous ou àDieu? Un texte de la liturgie eucha-ristique nous invite à prier Dieu decette manière, il dit: «Tu n’as pas be-soin de notre louange, et pourtantc’est toi qui nous inspires de te ren-dre grâce: nos chants n’ajoutent rienà ce que tu es, mais ils nous rappro-chent de toi, par le Christ notre Sei-gneur» (Missel romain, préface com-mune IV). En louant, nous sommessauvés.

    La prière de louange nous sert ànous aussi. Le Catéchisme la définitainsi: «Elle participe à la béatitudedes cœurs purs qui l’aiment dans lafoi avant de le voir dans la Gloire»(n. 2639). Paradoxalement, elle doitêtre pratiquée non seulement quandla vie nous remplit de bonheur, maissurtout dans les moments difficiles,dans les moments sombres quand lechemin grimpe. Cela aussi est letemps de la louange, comme Jésus,qui dans les moments sombres, louele Père. Parce que nous apprenonsqu’à travers cette montée, ce sentierdifficile, ce sentier fatigant, ces passa-ges difficiles, on arrive à voir un pa-norama nouveau, un horizon plusouvert. Louer est comme respirer de

    l’oxygène pur: cela purifie ton âme,porte ton regard au loin, ne te laissepas prisonnier dans les moments dif-ficiles et sombres des difficultés.

    Il y a un grand enseignement dansla prière qui depuis huit siècles, n’ajamais cessé de vibrer, et que saintFrançois composa vers la fin de savie: le «Cantique de frère soleil» ou«des créatures». Le «Poverello» ne lacomposa pas dans un moment dejoie, de bien-être, mais au contraireau milieu des difficultés. François estdésormais presque aveugle, et il res-sent dans son âme le poids d’une so-litude qu’il n’avait jamais éprouvéeauparavant: le monde n’a pas changédepuis le début de sa prédication,certains se laissent encore déchirerpar les querelles, et de plus, il perçoitles pas de la mort qui se font plusproches. Ce pourrait être le momentde la déception de cette déceptionextrême, et de la perception de sonéchec. Mais à cet instant de tristesse,en cet instant sombre, François prie:«Loué sois-tu, mon Seigneur...». Ilprie en louant. François loue Dieupour tout, pour tous les dons de lacréation, et aussi pour la mort, qu’ilappelle avec courage «sœur», «sœurmort». Ces exemples des saints, deschrétiens, et aussi de Jésus, de louerDieu dans les moments difficiles,nous ouvrent les portes d’un chemintrès grand vers le Seigneur et nouspurifient toujours. La louange purifietoujours.

    Les saints et les saintes nous mon-trent que l’on peut toujours louer,dans le bien et dans le mal, parce queDieu est l’Ami fidèle. Tel est le fon-dement de la louange: Dieu est l’Amifidèle, et son amour ne fait jamais dé-faut. Il est toujours à nos côtés, Ilnous attend toujours. Quelqu’un di-sait: «C’est la sentinelle qui est à tescôtés et qui te fait aller de l’avantdans la sécurité». Dans les momentsdifficiles et obscurs, trouvons le cou-rage de dire: «Béni sois-tu, ô Sei-gneur». Louer le Seigneur, cela nousfera beaucoup de bien.

    A l'issue de l'audience générale, le Saint-Pèrea adressé le salut suivant aux fidèles franco-phones:

    Je suis heureux de saluer les person-nes de langue française! En cette an-née consacrée à saint Joseph, qu’aumilieu de nos joies et de nos crises,nos cœurs soient toujours habités parl’esprit de louange. A tous, je donnema bénédiction!

    Dans la matinée du samedi 9 janvier, le Pa-pe François a reçu en audience S.E. M.Guzmán Miguel Carriquiry Lecour, nouvelambassadeur d'Uruguay près le Saint-Siège,à l'occasion de la présentation de ses Lettresde Créance.

    Né à Montevideo le 20 avril 1944, il estmarié et a 4 enfants. Titulaire d'un doctoraten droit et en sciences sociales de l'Univer-sidad de la República à Montevideo en 1970et d'un certificat d'aptitude à la professiond'avocat en 1971, il a successivement exercéles fonctions suivantes: directeur du Centronacional de medios de comunicación socialde l'Eglise en Uruguay (1967-1970); expertscientifique au Consilium de laicis (1971-1974); employé (1974-1977), puis chef de bu-reau (1977-1982) et enfin sous-secrétaire duConseil pontifical pour les laïcs (1982-2011);secrétaire (2011-2014) puis secrétaire chargéde la vice-présidence de la Commissionpontificale pour l'Amérique latine (2014-2019).

    Audience générale du 13 janvier

  • L’OSSERVATORE ROMANOnuméro 3, mardi 19 janvier 2021 page 3

    Le désir de l’unité

    Retrouver l’amour de la patriePrésentation du message des évêques de République centrafricaine sur la crise que traverse le pays

    Chers frères et sœurs, bonjour!L’Evangile de ce deuxième diman-che du Temps Ordinaire (cf. Jn1,35-42) présente la rencontre deJésus avec ses premiers disciples.La scène se déroule au bord dufleuve du Jourdain, au lendemaindu baptême de Jésus. C’est Jean-Baptiste lui-même qui indique leMessie à deux d’entre eux, par cesparoles: «Voici l’Agneau de Dieu!»(v. 36). Et tous deux, faisant con-fiance au témoignage de Jean-Bap-tiste, suivent Jésus. Il s’en aperçoitet leur demande: «Que cherchez-vous?», et ces derniers lui deman-dent: «Maître, où demeures-tu?»(v. 38).

    Jésus ne répond pas: «J’habite àCapharnaüm ou à Nazareth», maisil dit: «Venez, et vous verrez» (v.39). Pas de carte de visite, maisune invitation à une rencontre.Tous les deux le suivent et restentavec Lui cet après-midi là. Il n’estpas difficile de les imaginer assisen train de Lui poser des questionset surtout de l’écouter, en sentantque leur cœur se réchauffe toujoursplus au fur et à mesure que parlele Maître. Ils ressentent la beautéde paroles qui répondent à leurplus grande espérance. Et ils dé-couvrent soudainement que, tandisque le soir descend, en eux, dansleur cœur, jaillit la lumière queseul Dieu peut donner. Quelquechose attire l’attention: l’un d’eux,soixante ans plus tard, ou peut-êtredavantage, écrit dans l’Evangile:«C’était vers la dixième heure (en-viron quatre heures de l’a p r è s - m i-di)» (Jn 1, 39), il écrivit l’h e u re .Cela nous fait réfléchir: toute ren-contre authentique avec Jésus restevivante dans la mémoire, on nel’oublie pas. Tu peux oublier denombreuses rencontres, mais lavraie rencontre avec Jésus restetoujours présente. Et ceux-là, aprèstant d’années, se souvenaient mê-me de l’heure, ils n’avaient pas puoublier cette rencontre si heureuse,si pleine, qui avait changé leur vie.Ensuite, lorsqu’ils sortent de cetterencontre et retournent auprès deleurs frères, cette joie, cette lumièredéborde de leurs cœurs comme unfleuve en crue. L’un des deux, An-dré, dit à son frère Simon – que Jé-sus appellera Pierre quand il lerencontrera –: «Nous avons trouvéle Messie» (v. 41). Ils sont sortiscertains que Jésus était le Messie,certains.

    Arrêtons-nous un moment surcette expérience de la rencontreavec le Christ qui appelle à demeu-rer avec Lui. Chaque appel deDieu est une initiative de sonamour. C’est toujours Lui quiprend l’initiative, Il t’appelle. Dieuappelle à la vie, il appelle à la foi, etil appelle à un état de vie particulier:«Je veux que tu sois ici». Le pre-mier appel de Dieu est l’appel à lavie, par lequel il nous constituecomme personnes; c’est un appelindividuel, parce que Dieu ne faitpas les choses en série. Ensuite,Dieu nous appelle à la foi et à fairepartie de sa famille, comme enfantsde Dieu. Enfin, Dieu appelle à unétat de vie particulier: à nous donnernous-mêmes dans la voie du maria-ge, dans celle du sacerdoce ou dela vie consacrée. Ce sont différen-tes manières de réaliser le projet deDieu, celui qu’Il a sur chacun denous, qui est toujours un desseind’amour. Dieu appelle toujours. Etla plus grande joie pour chaquecroyant est de répondre à cet ap-pel, de s’offrir lui-même entière-

    ment au service de Dieu et de sesf r è re s .

    Frères et sœurs, face à cet appeldu Seigneur, qui peut nous parve-nir de mille façons même à traversdes personnes, des événements jo-yeux et tristes, nous pouvons par-fois avoir une attitude de refus –«Non… J’ai peur… » –, un refusparce qu’il nous semble en contra-diction avec nos aspirations; etégalement de la peur, parce quenous le trouvons trop exigeant etdérangeant: «Oh je n’y arriveraipas, il ne vaut mieux pas, il vautmieux une vie plus tranquille…Dieu là, moi ici». Mais l’appel deDieu est amour, nous devons cher-cher à trouver l’amour qui est der-rière chaque appel, et l’on ne ré-pond à celui-ci que par l’a m o u r.Voilà quel est le langage: la répo-nse à un appel qui vient del’amour est seulement l’amour. Audébut il y a une rencontre, oumieux, il y a la rencontre avec Jésus,qui nous parle du Père, qui nousfait connaître son amour. Et alorssurgit aussi en nous, spontané-ment, le désir de le communiqueraux personnes que nous aimons:«J’ai rencontré l’Amour», «J’airencontré le Messie», «J’ai rencon-tré Dieu», «J’ai rencontré Jésus»,«J’ai trouvé le sens de ma vie». Enun mot: «J’ai trouvé Dieu ».

    Que la Vierge Marie nous aide àfaire de notre vie un chant de lo-

    uange à Dieu, en réponse à sonappel et dans l’accomplissementhumble et joyeux de sa volonté.Mais souvenons-nous de cela: pourchacun de nous, dans la vie, il y aeu un moment où Dieu s’est faitprésent avec plus de force, commeun appel. Souvenons-nous de cetappel. Remontons à ce moment,pour que la mémoire de ce mo-ment nous renouvelle toujoursdans la rencontre avec Jésus.

    A l’issue de l’Angelus, le Pape a ajouté lesparoles suivantes:

    Chers frères et sœurs, j’exprime maproximité aux populations de l’îlede Sulawesi, en Indonésie, frappéepar un fort tremblement de terre.Je prie pour les défunts, pour lesblessés et pour ceux qui ont perduleur maison et leur travail. Que leSeigneur les console et soutienneles efforts de ceux qui se sont en-gagés pour leur porter secours.Prions ensemble pour nos frères deSulawesi, et également pour lesvictimes de l’accident d’avion qui aeu lieu samedi dernier, toujours enIndonésie. Je vous salue, Marie…

    On célèbre aujourd’hui en Italiela Journée pour l’a p p ro f o n d i s s e-ment et le développement du dia-logue entre catholiques et juifs. Jeme réjouis de cette initiative qui sepoursuit depuis désormais plus detrente ans et je souhaite qu’elle

    porte des fruits abondants de fra-ternité et de collaboration.

    Demain est une journée impor-tante: c’est le début de la Semaine deprière pour l’unité des chrétiens. Cetteannée, le thème reprend l’a d m o-nestation de Jésus: «Demeurezdans mon amour et vous porterezdu fruit en abondance» (cf. Jn 15,5-9). Lundi 25 janvier, nous con-clurons la semaine par la célébra-tion des vêpres dans la basiliqueSaint-Paul-hors-les-Murs, avec lesreprésentants des autres commu-

    nautés chrétiennes présentes à Ro-me. Prions de manière unanime aucours de ces journées, afin ques’accomplisse le désir de Jésus:«Que tous soient un» (Jn 17, 21).L’unité, qui est toujours supérieureau conflit.

    J’adresse mon salut cordial àvous qui êtes reliés à travers lesmoyens de communication sociale.Je souhaite à tous un bon diman-che. Et s’il vous plaît, n’oubliezpas de prier pour moi. Bon déjeu-ner et au revoir!

    GI O VA N N I ZAVAT TA

    «D es alliances contre nature en-tre les ennemis d’hier au prixdu sang des innocents ont se-mé le chaos et la désolation.Oui, il faut le reconnaître, nous sommes lespremiers fossoyeurs de notre propre pays.Nous avons besoin d’une franche solidarité na-tionale et internationale multiforme pour réta-blir l’autorité de l’Etat et consolider toutes lesinstitutions». Le message que la conférenceépiscopale centrafricaine a diffusé le 17 janvier,au terme de l’assemblée plénière, ne laisse pasla place à des interprétations: les responsabili-

    tés de la énième crise politique et sociale qui afrappé le pays se trouvent à l’extérieur et à l’in-térieur de son territoire. La République centra-fricaine «a souffert de trop de complots exté-rieurs avec des complicités locales» et «nuln’ignore que notre pays regorge de richesses,de minerais et de matières premières qui fontl’objet de toutes formes de convoitise», mais

    tout cela a été facilité par «le manque de pa-triotisme qualitatif et de l’amour de notre pa-trie, tel est peut-être le mal le plus profond quenotre pays traîne plusieurs décennies depuisson accession à l’indépendance. Le tribalisme,le népotisme, notre incapacité à voir en l’a u t reun frère à aimer, nos inimitiés, la cupidité et lavolonté de conquérir le pouvoir à tout prix mê-me par la force, tout cela nous a conduit à jeternotre pays en pâture à des mercenaires et desbandits».

    Le fait est que, encore une fois, la popula-tion «est confrontée à une situation de paraly-sie imposée par des groupes armés coalisés etleurs alliés politiques avec l’appui multiforme

    de leurs parrains etmarraines», et par-tout «nous consta-tons la dégradationde la situation sécu-ritaire, les déplace-ments massifs de lapopulation, l’as-phyxie et la paraly-sie des activités éco-nomiques et agrico-les ainsi que des tra-nsports. Cette entra-ve à la libre circula-tion des personneset des biens aggravela situation alimen-taire et sanitaire dela population déjàtrès affectée par lesmultiples crises. Ladéchirure du tissusocial est très per-

    ceptible. La chasse aux sorcières constatée iciet là fait réveiller le spectre du tribalisme, me-naçant ainsi l’unité nationale». La division exa-cerbée de la classe politique et le manque depatriotisme «laissent le pays à la merci des pré-dateurs et des mercenaires de tous bords, sub-ventionnés en armes et en équipements. Laguerre qui nous est aujourd’hui imposée vise à

    anéantir les aspirations profondes du peuplecentrafricain. Ce peuple est fatigué et déçu pardes interminables calculs, conflits et déchire-ments politiciens».

    Les évêques comparent la République cen-trafricaine au paralytique de l’Evangile de Luc(5, 17-26): «Ce paralytique vit encore. Mais ilressemble à un mourant ou un comateux quin’existe plus par lui-même. Il est immobile etne peut pas se déplacer tout seul, ni subvenir àses besoins essentiels». De la même manière lemal (luxure, colère, envie, méchanceté, me-nsonge, manipulation, trahisons, destructions,pillages, incendies, agressions, violences, homi-cides, guerres) «nous paralyse et nous empêchede promouvoir les grandes valeurs de fraterni-té, de justice et de paix». Mais «Dieu ne tolèrepas que les hommes retiennent les autres cap-tifs» et «il s’engage à aider celui que la maladieet les péchés paralysent à retrouver sa libertéde mouvement, à se remettre debout, à se pren-dre en charge et à servir Dieu et les hom-mes».

    Précisément parce que «la crise actuelle n’estpas une fatalité», conclut l’épiscopat, la solu-tion «ne peut être qu’endogène». La nation«doit aujourd’hui plus que jamais faire montred’un véritable sursaut patriotique au sens nobledu terme», elle doit pouvoir choisir librement(c’est l’un de ses «droits souverains») ses par-tenaires et «réviser, voire mettre fin aux ac-cords conclus avec certains Etats lorsque sasouveraineté est menacée». Il faut en particu-lier revenir aux origines, aux symboles d’unenation, comme sa devise qui exprime l’esp éran-ce et le rêve des pères fondateurs. Les évêquesrappellent que, au cours de son voyage en Ré-publique centrafricaine, le Pape François, dansson discours du 29 novembre 2015 à la classedirigeante et au corps diplomatique, «nous in-vitait à revenir aux fondamentaux qui consti-tuent le socle de notre identité en tant que na-tion, à savoir notre devise nationale “Unité–D i-gnité –Tr a v a i l ” et le principe du “Zo Kwe Zo”(tout être humain est une personne) de notrepère fondateur Barthélemy Boganda».

    Angelus du 17 janvier

  • L’OSSERVATORE ROMANOpage 4 mardi 19 janvier 2021, numéro 3

    Lettre du Pape au préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi

    La précieuse contributiondes femmes et des hommes à la mission de l’Eglise

    La publication du Motu Proprio SpiritusD omini établissant l’ouverture aux femmesdes ministères du lectorat et de l’acolytat (cf.notre édition du 12 janvier, page 1), était ac-compagné d'une lettre que le Pape François aadressée au cardinal Luis F. Ladaria, préfetde la Congrégation pour la doctrine de la foi,dans laquelle il explique les raisons théologi-ques de son choix. Nous publions ci-dessous letexte de la Lettre:

    A MON VÉNÉRÉ FRÈRE,LE CARDINAL LUIS F. LADARIA S.J.,

    PRÉFET DE LA CO N G R É G AT I O NPOUR LA D O CTRINE DE LA FOI

    L’ Esprit Saint, relationd’Amour entre le Père et leFils, construit et donne sa vi-talité à la communion de tout le peu-ple de Dieu, suscitant en lui des donset des charismes multiples et divers(cf. François, exhortation aposto-lique Evangelii gaudium, n. 117). A tra-vers les sacrements du Baptême, de laConfirmation et de l’Eucharistie, lesmembres du Corps du Christ reçoi-vent de l’Esprit du Ressuscité, à desdegrés variables et avec une diversitéd’expressions, les dons qui leur per-mettent d’apporter leur contributionnécessaire à l’édification de l’Eglise età l’annonce de l’Evangile à toutes lesc r é a t u re s .

    L’apôtre Paul distingue, à ce sujet,les dons de grâce-charismes («charisma-ta») et les services («diakoniai» – «mi-nisteria» [cf. Rm 12, 4 sq et 1 Co 12,12sq]). Dans la tradition de l’Eglise,on appelle m i n i s t è re s les différentesformes que revêtent les charismes lor-squ’ils sont publiquement reconnuset mis à la disposition de la commu-nauté et de sa mission sous une for-me stable.

    Dans certains cas, le ministère tireson origine d’un sacrement spéci-fique, l’Ordre sacré: il s’agit des mi-nistères «ordonnés» de l’évêque, duprêtre, du diacre. Dans d’autres cas,le ministère est confié, à travers unacte liturgique de l’évêque, à une per-sonne qui a reçu le Baptême et laConfirmation et chez laquelle sontreconnus des charismes spécifiques,

    après un chemin de préparationadapté: on parle alors de ministères«institués». Beaucoup d’autres servi-ces ecclésiaux ou de charges sontexercés, de fait, par un grand nombrede membres de la communauté, pourle bien de l’Eglise, souvent pour unelongue durée et avec une grande effi-cacité, sans que ne soit prévu de riteparticulier pour confier cette charge.

    Au cours de l’histoire, avec leschangements des situations ecclésia-les, sociales et culturel-les, l’exercice des minis-tères dans l’Eglise ca-tholique a assumé desformes différentes, enconservant intacte ladistinction, pas seule-ment de degré, entre lesministères «institués»(ou «laïcs») et les mi-nistères «ordonnés».Les premiers sont desexpressions particuliè-res de la condition sa-cerdotale et royale pro-pre à chaque baptisé(cf. 1 P 2, 9); les se-conds sont propres àquelques-uns des mem-bres du peuple de Dieuqui, en tant qu’évêqueset prêtres, «reçoivent lamission et la facultéd’agir en la personnedu Christ Tête» ou, entant que diacres, «sonthabilités à servir le peu-ple de Dieu dans la dia-conie de la liturgie, dela parole et de la chari-té» (Benoît XVI, lettre apostoliquesous forme de Motu Proprio Omniumin mentem, 26 octobre 2009). Pour in-diquer cette distinction, on emploieégalement des expressions telles quesacerdoce baptismal et sacerdoce ordonné(ou ministériel). En tout état de cause,il est bon de rappeler, avec la consti-tution dogmatique Lumen gentium duConcile Vatican II, qu’ils «sont or-donnés l’un à l’autre; l’un et l’a u t reen effet, selon son mode propre, par-ticipent de l’unique sacerdoce du

    Christ» (LG, n. 10). La vie ecclésialese nourrit de cette référence réci-proque et est alimentée par la tensionféconde de ces deux pôles du sacer-doce, ministériel et baptismal, quis’enracinent dans l’unique sacerdocedu Christ, tout en étant distincts.

    Dans la ligne du Concile VaticanII, le souverain pontife saint Paul VI avoulu revoir la pratique relative auxministères non ordonnés dans l’Egli-se latine — appelés jusque-là «ordres

    mineurs» — l’adaptant aux exigencesdes temps. Une telle adaptation, tou-tefois, ne doit pas être interprétéecomme si la doctrine précédente étaitdépassée, mais comme une actualisa-tion du dynamisme qui caractérise lanature de l’Eglise, toujours appelée,avec l’aide de l’Esprit de vérité, à ré-pondre aux défis de chaque époque,dans l’obéissance à la Révélation. Lalettre apostolique sous forme de mo-tu proprio Ministeria quaedam (15 août1972) configure deux charges (tâ-

    ches), celle du lectorat et celle del’acolytat, la première étroitementliée au ministère de la Parole, la se-conde au ministère de l’autel, sansexclure que d’autres «charges» puis-sent être instituées par le Saint-Siègeà la demande des Conférences épis-copales.

    En outre, la variation des formesd’exercice des ministères non ordon-nés n’est pas la simple conséquence,sur le plan sociologique, du désir de

    s’adapter à la sensibilité ou à la cultu-re des époques et des lieux, mais elleest déterminée par la nécessité depermettre à chaque Eglise locale/par-ticulière, en communion avec toutesles autres et ayant au centre de leurunité l’Eglise qui est à Rome, de vivrel’action liturgique, le service des pau-vres et l’annonce de l’Evangile dansla fidélité au mandat du Seigneur Jé-sus Christ. C’est la tâche des pasteursde l’Eglise de reconnaître les dons dechaque baptisé, de les orienter égale-ment vers des ministères spécifiques,de les promouvoir et de les coordon-ner, pour faire en sorte qu’ils partici-pent au bien des communautés et à lamission confiée à tous les disciples.

    L’engagement des fidèles laïcs, qui«sont simplement l’immense majori-té du peuple de Dieu» (François, ex-hortation apostolique Evangelii gau-dium, n. 102), ne peut et ne doit certai-nement pas s’épuiser dans l’e x e rc i c edes ministères non ordonnés (cf.François, exhortation apostoliqueEvangelii gaudium, n. 102); toutefois,une meilleure configuration de ceux-ci et une référence plus précise à la

    responsabilité qui découle,pour tout chrétien, du Bap-tême et de la Confirmation,pourra aider l’Eglise à redé-couvrir le sens de la com-munion qui la caractérise età initier un engagement re-nouvelé dans la catéchèse etdans la célébration de la foi(cf. François, exhortationapostolique Evangelii gau-dium, n. 102). Et c’est préci-sément dans cette redécou-verte que peut mieux se tra-duire la synergie fécondequi naît du fait que sont or-

    donnés l’un à l’autre le sacerdoce or-donné et le sacerdoce baptismal. Cet-te réciprocité, du service au sacre-ment de l’autel, est appelée à rejaillir,dans la distinction des tâches, dansce service qui consiste à «faire duChrist le cœur du monde» et qui estla mission propre de toute l’Eglise.

    C’est justement ce service unique,bien que distinct, en faveur du mon-de, qui élargit les horizons de la mis-sion ecclésiale, l’empêchant de serenfermer dans des logiques stérilesdestinées surtout à revendiquer desespaces de pouvoir et l’aidant à fairel’expérience d’être une communautéspirituelle qui «fait route avec toutel’humanité et partage avec le sort ter-restre du monde» (GS, n. 40). C’estdans cette dynamique que l’on peutvraiment comprendre la significationde l’expression «Eglise en sortie».

    Dans l’horizon du renouveau tracépar le Concile Vatican II, on sent deplus en plus l’urgence, aujourd’hui,de redécouvrir la coresponsabilité detous les baptisés dans l’Eglise, et enparticulier la mission du laïcat. L’as-semblée spéciale du synode des évê-ques pour la région pan-amazonien-ne (6-27 octobre 2019) a signalé, aucinquième chapitre du document fi-nal, la nécessité de penser à «de nou-veaux chemins pour la ministérialitéecclésiale». Non seulement pourl’Eglise amazonienne, mais pour tou-te l’Eglise, dans la diversité des situa-tions, «il est urgent de promouvoir etde conférer des ministères à des hom-mes et des femmes... C’est l’Eglisedes hommes et des femmes baptisésque nous devons consolider en en-courageant la ministérialité et, sur-tout, la conscience de la dignité bap-tismale» (Document final, n. 95).

    A ce propos, l’on sait que le motuproprio Ministeria quaedam réserve auxseuls hommes l’institution des minis-tères de lectorat et de l’acolytat et éta-blit par conséquent le can. 230 § 1 duCIC. Toutefois, ces derniers temps etdans de nombreux contextes ecclé-siaux, il a été noté que la levée d’unetelle réserve pourrait contribuer àmanifester davantage la dignité bap-tismale commune des membres dupeuple de Dieu. A l’occasion de laXIIe assemblée générale ordinaire dusynode des évêques sur La Parole deDieu dans la vie et dans la mission de l’Egli-se (5-26 octobre 2008), les pères syno-daux avaient déjà souhaité «que leministère du lectorat soit ouvert éga-lement aux femmes» (cf. Propositionn. 17); et dans l’exhortation aposto-lique post-synodale Verbum Domini (30septembre 2010), Benoît XVI a préciséque l’exercice du munus de lecteurdans la célébration liturgique, et enparticulier le ministère du lectorat entant que tel, est un ministère laïcdans le rite latin (cf. n. 58).

    Pendant des siècles, la «vénérabletradition de l’Eglise» a considéré ceque l’on appelait les «ordres mi-neurs» — parmi lesquels, précisé-ment, le lectorat et l’acolytat — com-me les étapes d’un parcours qui de-vait conduire aux «ordres majeurs»(sous-diaconat, diaconat et sacerdo-ce). Le sacrement de l’Ordre étant ré-servé aux seuls hommes, on avaitégalement fait valoir ceci pour les or-dres mineurs.

    Une distinction plus claire entreles attributions de ce que l’on appellea u j o u rd ’hui les «ministères non-or-donnés (ou laïcs)» et les «ministèresordonnés» permet de lever la réservedes premiers aux seuls hommes. Si,en ce qui concerne les ministères or-donnés, l’Eglise «n’a en aucune sortela faculté de conférer aux femmesl’ordination sacerdotale» (cf. Jean-Paul II, lettre apostolique Ordinatio sa-c e rd o t a l i s , 22 mai 1994), pour les minis-tres non ordonnés, il est possible, eta u j o u rd ’hui cela paraît opportun, dedépasser une telle réserve. Cette ré-serve a eu un sens dans un contextedéterminé, mais elle peut être repen-

    Communiqué de l’UISG

    Les remerciements des supérieures généralesDes remerciements sincères au Pape François et à ceux quiont contribué par l'«étude et la recherche» à la réalisationde «ce nouveau pas qui voit la participation ministérielledes femmes dans l'Eglise». C'est ce qu'exprime l'Unioninternationale des supérieures générales (UISG) dans uncommuniqué rendu public mardi 12 janvier, au lendemainde la publication du motu proprio Spiritus Domini.

    Dans leur texte les religieuses, se félicitent duchoix du titre du document et, en faisant référenceaux paroles du Pape contenues dans la lettre en-voyée à cette occasion au cardinal Luis FranciscoLadaria Ferrer, préfet de la Congrégation pour ladoctrine de la foi, elles soulignent que la décisiond'ouvrir également aux femmes le ministère instituéde lecteurs ou d'acolytes est «un signe et une répo-nse au dynamisme qui caractérise la nature del'Eglise». Un dynamisme, lit-on dans le commu-niqué, qui est «propre à l'Esprit Saint», qui «inter-pelle constamment l'Eglise dans l'obéissance à laRévélation et à la réalité». Ce document, souligne-t-on, a été remis à la communauté ecclésiale en lasolennité du Baptême du Seigneur, «le jour oùDieu se révèle dans la communion avec Jésus qui sefait serviteur». En effet, en regardant le Christ, «nous re-nouvelons notre dignité baptismale commune de fils et defilles en Lui, de frères et de sœurs». A partir des «fontsbaptismaux et ensuite de l'onction chrismale — poursuit letexte — nous tous/tes, baptisés et baptisées, nous sommesrendu/es participants de la vie et de la mission du Christet nous sommes rendus/es capables du service à la com-munauté». Pouvoir contribuer à la mission de l'Eglise en

    partageant les ministères, assurent les supérieures généra-les, «aidera à comprendre, comme dit le Saint-Père dansla lettre, que dans cette mission «nous sommes ordonnésl'un à l'autre», ministres ordonnés et non ordonnés, hom-mes et femmes, dans un rapport réciproque». Et tout celarenforce le témoignage évangélique de la communion.Aujourd'hui déjà, «en de nombreux lieux», lit-on dans le

    communiqué, les femmes, en particulier les femmes co-nsacrées, «selon les orientations des évêques, exercent di-vers ministères pastoraux en répondant aux nécessités del'évangélisation». Le motu proprio, concluent les supé-rieures générales, «par son caractère universel, est uneconfirmation du chemin de l'Eglise pour reconnaître leservice de tant de femmes qui ont pris soin et qui prennentsoin du service de la Parole et à l'Autel». SUITE À LA PAGE 5

  • L’OSSERVATORE ROMANOnuméro 3, mardi 19 janvier 2021 page 5

    Entretien du Pape avec le journal télévisé italien TG5

    Le monde a besoin d’unitéet de fraternité

    S e redécouvrir plus unis, plusproches de ceux qui souffrent,se sentir frères pour surmonterensemble la crise mondiale provoquéepar la pandémie. Au début de l'entre-tien avec le TG5 le 10 janvier dernier(Chaîne de télévision du groupe Me-diaset, Italie), François souligne que«nous ne sortons jamais d'une crisecomme avant, jamais. Nous en sor-tons mieux ou nous en sortons pires».Pour le Pape, «il faut opérer une révi-sion de tout. Les grandes valeurs sonttoujours présentes dans la vie, mais el-les doivent être traduites dans le pré-sent». François énumère une série desituations dramatiques allant des en-fants souffrant de la faim et privésd'école, aux guerres qui bouleversentde nombreuses régions de la planète.«Les statistiques des Nations uniessont effrayantes à ce sujet», relève-t-ilen prévenant que si nous sortons de lacrise «sans voir ces choses, la sortie se-

    ra une autre défaite. Et ce sera pire en-core. Pensons seulement à ces deuxproblèmes: les enfants et les guerres».

    La vaccination est une actionéthique

    «Je crois que, d'un point de vueéthique, tout le monde doit se fairevacciner», dit le Saint-Père en rép onseà la question du journaliste FabioMarchese Ragona sur les vaccins. «Cen'est pas une option, c'est une actionéthique. Parce que vous jouez votresanté, vous jouez votre vie, mais aussila vie des autres». Il ajoute que dansles prochains jours, les vaccinationscommenceront au Vatican et qu'il s’estlui aussi «inscrit» pour être vacciné.«Oui, il faut le faire», répète-t-il, «siles médecins le présentent commequelque chose qui fonctionne et qu’iln’y a pas de dangers particuliers,pourquoi ne pas le faire? Il y a là unnégationnisme suicidaire que je ne

    peux pas expliquer». Pour le Souve-rain Pontife, c'est le moment de «pen-ser au nous et d'effacer le je pendantun certain temps, de le mettre entreparenthèses. Soit nous nous sauvonstous avec le nous, soit personne n'estsauvé». Il s'exprime longuement à cesujet en proposant sa réflexion sur unthème cher: la fraternité. «C'est cela ledéfi: me rendre proche de l'autre, pro-che de sa situation, proche de ses pro-blèmes, me rendre proche des gens».L'ennemi de la proximité est «la cultu-re de l'indifférence». Il dit entendreparler «d'une saine indifférence auxproblèmes», puis immédiatement ilaffirme que «l'indifférence n'est passaine. La culture de l'indifférence dé-truit, parce qu'elle m'éloigne».

    C'est le moment du «nous» poursurmonter la crise

    «L'indifférence nous tue, car ellenous éloigne. Le mot-clé pour trouverdes moyens de sortir de la crise est plu-tôt le mot "proximité"». S'il n'y a pasd'unité, pas de proximité, prévient lePape, «des tensions sociales peuventsurvenir même à l'intérieur des Etats».Il parle ainsi de la «classe dirigeante»dans l'Eglise comme dans la vie poli-tique. En ce moment de crise, ex-plique-t-il, «toute la classe dirigeanten'a pas le droit de dire "je"... elle doitdire "nous" et rechercher l'unité face àla crise». En ce moment, affirme-t-ilavec force, «un homme politique, unpasteur, un chrétien, un catholique,voire un évêque, un prêtre, qui n'a pasla capacité de dire "nous" au lieu de"je" n'est pas à la hauteur de la situa-tion». Puis il ajoute que «les conflitsdans la vie sont nécessaires, mais en cemoment, il faut les envoyer en vacan-ces», pour céder la place à l'unité «dupays, de l'Eglise, de la société».

    L'avortement est une questionhumaine avant d’être religieuse

    François constate que la crise liée àla pandémie a encore exacerbé la«culture du rejet» des plus faibles,

    qu'ils soient pauvres, migrants ou qu'ils'agisse des personnes âgées. Il s'attar-de surtout sur le drame de l'avorte-ment qui écarte les enfants non dési-rés. «Le problème de l'avortement»,prévient-il, «n'est pas un problème re-ligieux, c'est un problème humain,pré-religieux, c'est un problèmed'éthique humaine» et ensuite reli-gieux. «C'est un problème que mêmeun athée doit résoudre en conscien-ce». «Est-il juste», demande le Souve-rain Pontife, «d'effacer une vie humai-ne pour résoudre un problème, n'im-porte quel problème? Est-il juste d'en-gager un tueur à gages pour résoudreun problème?».

    Le Capitole, apprendre del'histoire: jamais de violence

    Le Pape ne manque pas de com-menter les événements dramatiquesqui se sont déroulés au Capitole (Was-hington D.C., USA) le 6 janvier. Il aconfié avoir été «étonné», compte te-nu de la discipline du peuple améri-cain et de la maturité de sa démocra-tie. Cependant, il note que mêmedans les réalités les plus mûres, il y atoujours quelque chose qui ne va paslorsque «des individus empruntent unchemin qui va à l’encontre de la com-munauté, de la démocratie, du biencommun». Maintenant que cela s’estproduit, François note qu’il a été pos-sible de «bien voir» le phénomène etdonc «d’apporter un remède». LeSaint-Père condamne les violences:«Nous devons bien réfléchir, com-prendre, et pour que cela ne se répètepas, apprendre de l'histoire». Les

    groupes «qui ne sont pas bien insérésdans la société, tôt ou tard créeront cessituations de violence».

    La foi, un don à demander auSeigneur

    Vers la fin de l’entretien, le Pape ré-pond sur les restrictions mises en pla-ce pour lutter contre la propagationdu virus. En évoquant sa perceptionpersonnelle de ces limitations, Fran-çois confie se sentir «enfermé». Il s'at-tarde sur les voyages annulés pour évi-ter le rassemblement des foules et par-le de son espoir de visiter l'Irak aumois de mars prochain. Il explique co-nsacrer plus de temps à la prière, auxconversations téléphoniques et rap-pelle combien certains moments ontété importants pour lui, comme laStatio Orbis le 27 mars dernier sur laplace Saint-Pierre, «une expressiond'amour envers tous les peuples» etqui fait que l'on «voit de nouvelles fa-çons de s'entraider». Il propose aussiune réflexion sur la foi dans le Sei-gneur, qui est d'abord et avant tout«un don», dit-il. «Pour moi, la foi estun don, ni vous, ni moi, ni personnene peut avoir la foi par sa propre force:c'est un don que le Seigneur vousfait», qui ne peut être acheté. Repre-nant un passage du Deutéronome, lePape exhorte à invoquer la «proximi-té de Dieu». Cette proximité «dans lafoi est un don que nous devons de-mander». L'entretien se termine parl’espérance qu'en 2021 «il n'y ait pasde gaspillage, pas d'attitudes égoïs-tes» et que l'unité puisse prévaloir surle conflit.

    sée dans des contextes nouveaux,en ayant toujours cependant com-me critère la fidélité au mandat duChrist et la volonté de vivre et d’an-noncer l’Evangile transmis par lesapôtres et confié à l’Eglise pourqu’il soit religieusement écouté,saintement gardé et fidèlement an-noncé.

    Ce n’est pas sans motif que saintPaul VI se réfère à une tradition ve-n e ra b i l i s (vénérable, ndr), non à unetradition v e n e ra n d a , au sens strict (àsavoir qui «doit» être observée): onpeut la reconnaître comme valable,et elle l’a été pendant longtemps;mais elle n’a pas de caractère con-traignant, puisque la réserve auxseuls hommes n’appartient pas à lanature propre des ministères du lec-torat et de l’acolytat. Offrir auxlaïcs des deux sexes la possibilitéd’accéder au ministère de l’acolytatet du lectorat, en vertu de leur par-ticipation au sacerdoce baptismal,augmentera la reconnaissance, ycompris à travers un acte liturgique(l’institution), de la précieuse con-tribution que, depuis longtemps, detrès nombreux laïcs, notammentdes femmes, apportent à la vie et àla mission de l’Eglise.

    Pour ces motifs, j’ai considérécomme opportun d’établir quepuissent être institués lecteurs ouacolytes non seulement des hom-mes mais aussi des femmes chez les-quels, à travers le discernement despasteurs et après une préparationadéquate, l’Eglise reconnaît «la fer-me volonté de servir fidèlementDieu et le peuple chrétien», commeil est écrit dans le motu proprio Mi-nisteria quaedam, en vertu du sacre-ment du Baptême et de la Confir-mation.

    Le choix de conférer égalementaux femmes ces charges, qui impli-quent une stabilité, une reconnais-sance publique et le mandat donnépar l’évêque, rend plus effectivedans l’Eglise la participation detous à l’œuvre d’évangélisation.«Cela donne lieu aussi à ce que lesfemmes aient un impact réel et ef-fectif dans l’organisation, dans lesdécisions les plus importantes etdans la conduite des communautés,mais sans cesser de le faire avec lestyle propre de leur empreinte fémi-nine» (François, exhortation apos-tolique Querida Amazonia, n. 103). Le

    «sacerdoce baptismal» et le «servi-ce rendu à la communauté» repré-sentent ainsi les deux piliers sur les-quels se fonde l’institution des mi-n i s t è re s .

    De cette façon, cela répond à cequi est demandé pour la missiondans le temps présent et accueille letémoignage donné par de très nom-breuses femmes qui ont pris soin etqui prennent soin du service de laParole et de l’autel; en outre, il seraplus évident — y compris pour ceuxqui s’orientent vers le ministère or-donné — que les ministères du lec-torat et de l’acolytat s’enracinentdans le sacrement du Baptême et dela Confirmation. Ainsi, sur le che-min qui conduit à l’ordination dia-conale et sacerdotale, ceux qui sontinstitués lecteurs et acolytes com-prendront mieux qu’ils participentà une ministérialité commune avecd'autres baptisés, hommes et fem-mes. De sorte que le sacerdoce pro-pre de chaque fidèle (commune sacer-dotium) et le sacerdoce des ministresordonnés (sacerdotium ministeriale seuh i e ra rc h i c u m ) se montrent encore plusclairement ordonnés l’un à l’a u t re(cf. LG, n. 10), pour l’édification del’Eglise et pour le témoignage del’Evangile.

    Il reviendra aux conférencesépiscopales d’établir des critèresadéquats pour le discernement et lapréparation des candidats et descandidates aux ministères du lecto-rat ou de l’acolytat, ou à d’a u t re sministères qu’ils estimeront devoirinstituer, selon ce qui est déjà prévudans le motu proprio Ministeria quae-dam, après approbation du Saint-Siège et selon les besoins de l’évan-gélisation sur leur territoire.

    La Congrégation pour le cultedivin et la discipline des sacrementspourvoira à la mise en œuvre decette réforme avec la modificationde l’Editio typica du Pontificale roma-num, c'est-à-dire du «De InstitutioneLectorum et Acolythorum».

    En vous renouvelant l'assurancede ma prière, j’accorde de toutcœur la Bénédiction apostolique àVotre Eminence, et je l’étends àtous les membres et collaborateursde la Congrégation pour la doctri-ne de la foi.

    Du Vatican, le 10 janvier 2021,fête du Baptême du Seigneur

    FRANÇOIS

    Lettre du Pape au cardinal LadariaSUITE DE LA PAGE 4

    Journée du dialogue entre catholiques et juifs

    Frères unis par le même DieuAprès l’Angelus du 17 janvier 2021, le Pape François s’estréjoui de la tenue dimanche 17 janvier en Italie de la Jour-née pour l'approfondissement et le développement dudialogue entre catholiques et juifs, en ce jour anniversairedes cinq ans de sa venue à la grande synagogue de Ro-me.

    «Aujourd'hui, en Italie, nous célébrons la Journéepour l'approfondissement et le développement du dialo-gue entre catholiques et juifs. Je me réjouis de cette initia-tive, qui dure depuis plus de trente ans, et j'espère qu'elleportera d'abondants fruits de fraternité et de coopéra-tion», a déclaré à ce sujet le Saint-Père après l’Angelus,.

    La 32e Journée pour l'approfondissement et le dévelop-pement du dialogue entre catholiques et juifs, célébrée enItalie, l’est aussi en Pologne, en Autriche et aux Pays-Bas;elle s’ouvre la veille de la Semaine de prière pour l’Unitédes chrétiens. Et cette année, la Journée revêt un caractè-re particulier, car elle marque le 5e anniversaire de la visitedu Pape François à la grande synagogue de Rome.

    C’était le dimanche 17 janvier 2016. Le Pape s’étaitalors rendu pour la première fois au «Temple majeur», lagrande synagogue de la capitale italienne, située dans lequartier du ghetto, au bord du Tibre. Il était le troisièmeSouverain Pontife à s'y être rendu après Jean-Paul II en1986 et Benoît XVI en 2010.

    François s’était recueilli devant deux plaques commé-moratives: l'une rappelant la grande rafle d'octobre 1943,dans laquelle 1.024 juifs avaient été déportés à Auschwitz.L'autre un attentat palestinien qui avait blessé 37 juifs ro-mains en 1982.

    Lors de cette journée, le Saint-Père avait aussi rencon-tré plusieurs survivants des camps d’exterminationnazis.

    Les juifs sont «nos frères aînés dans la foi, avait-il rap-pelé, nous appartenons tous à une unique famille humai-ne», celle de Dieu. Ensemble, juifs et catholiques qui ont«des liens si particuliers», «inséparables», «en raison desracines juives du christianisme doivent se sentir frères,unis par le même Dieu, dotés d’un riche patrimoine spi-rituel commun». 50 ans après la déclaration de Nostra ae-tate, qui a rendu possible un dialogue systématique entrel’Eglise catholique et l’hébraïsme, le Pape réaffirmait ain-si les racines juives du christianisme et sa condamnationde toute forme d’antisémitisme.

    Au fil de son pontificat, le Pape François a d’ailleurssouvent observé qu'un chrétien par nature ne pouvait êtreantisémite «parce que le christianisme a des racines jui-ves». «Si un chrétien était antisémite, il couperait la bran-che sur laquelle il est assis, renoncerait à son identité ori-ginelle, se déracinerait et flotterait dans un espace in-défini...»

    «La dimension théologique du dialogue catholique-juif mérite d’être toujours plus approfondie», assurait lePape ce jour-là à la grande synagogue de Rome.

    Rendant hommage aux six millions de victimes de laShoah, «une inhumaine barbarie», et de la rafle de 1943 àRome, le Pape soulignait aussi que le passé devait nousservir de leçon pour le présent et le futur. «La Shoahnous enseigne qu’il faut toujours rester extrêmement vigi-lant pour pouvoir intervenir immédiatement pour défen-dre la dignité humaine et la paix».

    «Nous devons prier Dieu avec insistance afin qu’ilnous aide en Europe, en Terre sainte, au Moyen-Orienten Afrique et dans toutes les autres parties du monde àmettre en pratique une logique de la paix, de la réconci-liation, du pardon et de la vie», concluait-il.

  • L’OSSERVATORE ROMANOpage 6 mardi 19 janvier 2021, numéro 3

    Présentation de la note de la Commission Covid-19 et de l’Académie pontificale pour la vie

    Des vaccins accessibles à tousUne question de justice

    La Commission Covid-19, créée parle Pape François au printemps der-nier afin de répondre aux défis poséspar la pandémie, a rendu publiquemardi 29 décembre une note en 20points sur les enjeux éthiques poséspar le vaccin.

    «Le Covid-19 est en train d’in-tensifier une triple menace de crisessimultanées et interconnectées au ni-veau sanitaire, économique et écolo-gico-sociale, avec de graves répercus-sions sur les plus pauvres et les plusvulnérables», indique en préambulecette commission qui fait partie dudicastère pour le service du dévelop-pement humain intégral. Ce docu-ment, rédigé en collaboration avecl’Académie pontificale pour la vie,rappelle qu’entreprendre «les actionsimmédiatement nécessaires pour ré-pondre à la pandémie» impliqued’avoir à l’esprit «aussi ses effets surle long terme». Ce texte rappelle queles vaccins sont un outil essentielpour vaincre la pandémie.

    Une autre note, rendue publiquele lundi 21 décembre, par la Congré-gation pour la doctrine de la foi avaitdémontré la licéité morale du recoursaux vaccins, même quand ils sont is-sus de recherches ayant impliqué desfœtus avortés, s’il n’existe pas d’alter-natives. Cet autre document s’a t t a rd eplutôt sur la dimension sociale descampagnes de vaccination qui ontdébuté voilà déjà deux semaines ausein de l’Union européenne, et quiavaient déjà été amorcées auparavantdans d’autres pays comme les Etats-Unis, la Chine, la Russie et le Royau-me-Uni.

    Ce texte fait écho au récent Messa-ge de Noël Urbi et Orbi du Pape Fran-çois. Les leaders mondiaux sont ap-pelés à résister à la tentation d'adhé-rer à un «nationalisme des vaccins»,et les Etats nationaux sont appelés àcoopérer. «Aujourd'hui, en cette pé-riode d'obscurité et d'incertitude dueà la pandémie, plusieurs lueurs d'es-poir apparaissent, comme les décou-vertes de vaccins. Mais pour que ceslumières illuminent et apportent del'espoir au monde entier, elles doi-vent être accessibles à tous», avaitsouligné le Pape.

    Le premier point abordé, confor-mément au souhait exprimé par lePape lors de l’audience générale du19 août dernier, est la diffusion de«vaccins disponibles et accessiblespour tous». Cette logique entre encohérence avec les principes fonda-mentaux de la Doctrine sociale del’Eglise, comme la dignité humaine,l’option préférentielle pour les pau-vres, la solidarité, la subsidiarité, lebien commun, le soin de la maisoncommune, la justice et la destinationuniverselle des biens. Cela s’inscritégalement dans les principes de santépublique, comme la lutte contre lasouffrance.

    Une attention est portée égale-ment au «cycle de vie» du vaccin,c’est-à-dire à sa production, sa vali-dation par les autorités compétentes,sa distribution et son administrationaux patients. Toutes ces étapes impli-quent des arbitrages politiques quidoivent être assumés dans une lo-gique d’accès équitable et universelde tous aux vaccins.

    Le troisième point concerne les«matériaux biologiques» employéspour le développement des vaccins.

    Certains vaccins sont issus de lignéescellulaires provenant de fœtus avor-tés, alors que d’autres en ont fait unusage limité à des phases de test enlab oratoire.

    Le caractère licite ou non de l’uti-lisation de ces vaccins revient dans le4e paragraphe, qui reprend les argu-ments de la Congrégation pour ladoctrine de la foi dans sa note pu-bliée le 21 décembre. «La finalité dela santé publique ne peut pas justifierl’avortement volontaire pour en tirerdes lignes cellulaires pour la produc-tion de vaccins», mais, comme lesoulignait déjà l’instruction Dignitasp e rs o n a e en 2008, «à l’intérieur de cecadre général existent différents de-grés de responsabilité. De graves rai-sons peuvent être moralement pro-portionnées pour justifier l’usaged’un tel matériel biologique». Dansle contexte de la lutte contre la pan-démie de coronavirus, la protectionpotentielle de millions de vies fait na-turellement partie de ces «graves rai-sons».

    Le cinquième point, qui reprenddes notes publiées par l’Académiepontificale pour la vie en 2005 et en2017, précise que les catholiques peu-vent utiliser ces vaccins «avec uneconscience sûre» de ne pas avoir coo-péré à un avortement. Par ailleurs, lesorganisateurs de ces campagnes devaccination ont la responsabilité mo-rale de «ne pas faire courir de gravesrisques de santé aux enfants et à lapopulation en général».

    Le sixième point concerne les«mécanismes de production et d’ac-tion» du vaccin qui peuvent avoir desconséquences sur son efficacité. Leseptième point concerne les brevets,qui sont une notion légitime du pointde vue économique. La rétributiondes dépenses de la recherche et desrisques assumés par les entreprises estnormale, mais le vaccin mérite d’ê t reconsidéré comme un «bien com-mun», ou un «bien public», selon laterminologie de la présidente de laCommission européenne Ursula vonder Leyen. Les Etats ont donc la res-ponsabilité de le rendre accessible àtous et non seulement à une élite.

    Le huitième point rappelle que «leseul objectif de l’exploitation com-merciale n’est pas acceptable, d’unpoint de vue éthique, dans le domai-ne de la médecine et des soins de san-té». Les investissements doivent tou-jours se faire à la lumière de la «soli-darité humaine», en évitant donctoute logique de «nationalisme vacci-nal». Des accords internationaux surles brevets peuvent être nécessairespour maintenir des prix abordableset éviter «de possibles courts-circuitscommerciaux». Comme le Papel'avait également souligné dans sonmessage de Noël, «nous ne pouvonspas non plus laisser le virus de l'indi-vidualisme nous vaincre et nous ren-dre indifférents à la souffrance d'au-

    tres frères et sœurs, en mettant leslois du marché et des brevets d'inven-tion au-dessus des lois de l'amour etde la santé de l'humanité».

    Le neuvième point invite donc àune collaboration entre les Etats, lesentreprises pharmaceutiques et autresorganisations pour organiser une dis-tribution équitable des vaccins, aussien décentralisant la production. Ledixième paragraphe de la note rap-pelle la nécessité d’harmoniser et derèglementer les conditions d’a p p ro -bation des vaccins de la part des au-torités de régulation qui existent ausein des Etats, qui devraient se recon-naître et coopérer entre elles.

    Le onzième point concerne «l’ad-ministration et l’accès au vaccin». Ilest naturel de commencer par vacci-ner des groupes prioritaires commeles membres des personnels de santéet des services en contact avec le pu-blic, ainsi que les sujets les plus vul-nérables, mais il faut des critères dediscernement précis et explicites (parexemple il peut être légitime de vac-ciner en priorité les habitants des zo-nes à forte densité de population)afin d’éviter que des personnes sou-haitant se faire vacciner ne restentbloquées dans une «zone grise», et seretrouvent sans accès au vaccin enraison de critères trop approximatifs.

    Le douzième aspect abordé estdonc celui de l’ordre d’administra-tion du vaccin sur le plan internatio-nal, avec là encore l’enjeu de son «ac-cessibilité universelle». Il faut doncdes instruments concrets pour en ga-rantir une distribution juste et équi-table. La note précise que l’O rganisa-tion mondiale de la santé «demeureun point de référence important àrenforcer et à améliorer pour les as-pects qui sont en train de se révélerinsuffisants et problématiques».

    Le treizième paragraphe aborde laquestion de la «responsabilité mora-le» dans le fait de se soumettre ounon à la vaccination. Cette notionimplique une interdépendance entre«santé personnelle» et «santé pu-blique». Le refus du vaccin ne peutpas être considéré comme une «posi-tion prophétique», même sur l’a rg u -ment des recherches issues de fœtusavortés, car «un tel refus pourraitaugmenter sérieusement les risquespour la santé publique».

    «Le fait de tomber malade déter-mine une augmentation des hospita-lisations avec une surcharge consé-quente pour les systèmes sanitaires,jusqu'à un possible effondrement,comme cela est en train d'arriver dansdifférents pays durant cette pandé-mie, en faisant obstacle à l'assistancesanitaire, encore une fois aux dépensde ceux qui ont le moins de ressour-ces». La vaccination est donc un en-jeu de solidarité, et non seulement depréservation de la santé personnelle.Les personnes ne souhaitant pas sefaire vacciner devront redoubler de

    prudence dans leurs interactions so-ciales.

    Face aux nombreuses réticences, lequatorzième point souligne que «latransparence et une communicationcorrecte sont fondamentales pour fa-voriser la confiance et l’adhésion à latotalité du processus des vaccina-tions».

    Les derniers points de la note rap-pellent six objectifs précis de la com-mission Covid. Tout d’abord, celuide la «validation éthique et scienti-fique», qui nécessite une bonne co-opération avec les organisations im-pliquées dans la distribution du vac-cin afin de bien évaluer l’efficacitédes stratégies publiques. Ledeuxième aspect aborde la notion de«soin global avec une saveur locale»,qui implique notamment un travailde suivi avec les communautés loca-les et les diocèses, afin de bien pren-dre en compte la diversité des con-textes linguistiques et culturels et deproposer une information correctesur les implications éthiques des vac-cins.

    Le troisième objectif concerne «lespartenariats et la participation», quiimpliquent une coopération efficaceavec les organisations internationa-les, les ONG ou encore les associationsde donateurs. Le quatrième objectifest l’union des forces au sein desstructures d’Eglise, à la lumière desencycliques Laudato si’ et Fratelli tutti.Le cinquième objectif est le «leader-ship» de l’Eglise sur ces sujets quiimpliquent «la famille humaine glo-bale». «L’Eglise peut assumer un rô-le de catalyseur pour affronter ce défid’une façon qui reflète la conscienceet le respect de la dignité de tous.»

    Enfin le sixième objectif, qui estaussi le vingtième et dernier point dela note, souligne que l’Eglise est «auservice de la guérison du monde».«L’Eglise peut aider de différentesfaçons, à travers les conférences épis-copales, les réseaux sanitaires et édu-catifs (écoles et universités), les mul-tiples organisations ecclésiales quis’adressent aux pauvres, les commu-nautés religieuses, etc...», toujoursdans l’optique de l’accès de tous auxsoins et aux vaccins.

    Le préfet du dicastère pour le ser-vice du développement humain inté-gral, le cardinal Peter Kodwo Turk-son, a exprimé sa gratitude «à lacommunauté scientifique pour avoirdéveloppé le vaccin dans des tempsrecords». «Il nous appartient mainte-nant de garantir qu'il soit disponiblepour tous, spécialement pour les plusvulnérables. C'est une question dejustice», a-t-il ajouté. «Nous devonsdémontrer, une fois pour toutes, quenous sommes une unique famille hu-maine».

    Mgr Vincenzo Paglia, président del'Académie pontificale pour la vie,souligne que la pandémie a mis enévidence la condition d'intercon-nexion qui relie l'humanité. «Ensem-ble avec la commission, nous sommesen train de travailler avec de nom-breux partenaires pour révéler les le-çons que la famille humaine peut ap-prendre et pour développer uneéthique du risque et de la solidaritépour protéger les plus vulnérablesdans la société».

    La phase qui vient de s'ouvrir estcruciale, explique Mgr Bruno-MarieDuffé, secrétaire du dicastère pour leservice du développement humainintégral. «Nous sommes à un tour-nant dans la pandémie de Covid-19et nous avons l'opportunité de com-mencer à définir le monde que nousvoulons voir après la pandémie».«La façon dont les vaccins sont dis-tribués est le premier pas que les lea-ders mondiaux doivent accomplirdans l'engagement pour l'équité et lajustice comme principes pour cons-truire un monde post-Covid meil-leur», insiste enfin le père AugustoZampini, secrétaire-adjoint de ce mê-me dicastère

    Selon l’index mondial de l’ONG Portes Ouvertes

    Les chrétiens toujours pluspersécutés dans le monde

    Comme chaque année, l’ONG Portes Ouvertes publie son index mondialsur la persécution des chrétiens dans le monde, et l’année 2020 fut unenouvelle année difficile pour nombre d’entre eux. 340 millions de chré-tiens sont fortement discriminés ou persécutés sur la planète, relève PortesOuvertes. Parmi les pays où les chrétiens souffrent le plus: la Corée duNord, le Pakistan, le Yémen ou encore le Nigeria. Les chiffres sont pour lemoins inquiétants: le nombre de chrétiens tués en un an est passé de 2.983à 4.761, soit une augmentation de 60% par rapport à l'année précédente.

    Si d'autres tendances sont moins négatives, comme un nombre en bais-se d'églises ciblées ou une légère diminution du nombre de chrétiens dé-tenus, la persécution «en étau» est en hausse. Il s'agit d'une forme de per-sécution non directe (physique) mais relative à des discriminations gran-dissantes, administratives ou autres, qui touche à la vie sociale ou civile.C'est le cas par exemple dans des pays comme les Comores ou la Colom-bie selon Portes Ouvertes.

    Selon cet index 2021, 13 chrétiens ont été tués en 2020 chaque jour, et91% d'entre eux l'ont été sur le continent africain. La fragilisation du Sa-hel par les groupes terroristes pèse largement dans ce bilan. Les djihadis-tes ont en effet multiplié les attaques contre les civils dans cette Afriquesubsaharienne, en particulier au Burkina Faso, au Mali ou au Niger. Por-tes Ouvertes note aussi une augmentation sensible des persécutions dansun pays comme le Mozambique, où le Nord est contrôlé par des terroris-tes.

    Mais l’une des caractéristiques de ce rapport est l’impact de la pandé-mie de Covid-19 qui a aggravé la condition de certains de ces chrétiens.«La pandémie de Covid-19 a été exploitée par les persécuteurs pour ac-centuer leur exactions et pressions sur les minorités chrétiennes», notel'ONG. Parfois désignés comme bouc-émissaire dans des pays comme l'Ou-ganda ou la Somalie, les chrétiens ont été victimes de discours de haine.Un phénomène inquiétant également relevé par Portes Ouvertes est ladiscrimination notable des aides humanitaires gouvernementales dans cer-tains pays comme en Inde au au Bangladesh. Dans ces pays, à la pauvretéchronique des communautés chrétiennes, s'est donc ajoutée une politiquede rejet entretenue par les autorités. (olivier bonnel)

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    L’OSSERVATORE ROMANOnuméro 3, mardi 19 janvier 2021 page 7

    IN F O R M AT I O N SAudiences

    p ontificales

    Le Saint-Père a reçu en audience:

    8 janvierS.Exc. Mgr ORNELAS CA R VA L H O,évêque de Setúbal (Portugal), prési-dent de la conférence épiscopale por-tugaise, avec S.Exc. Mgr VIRGÍLIOD O NASCIMENTO ANTUNES, évêquede Coimbra, vice-président; et le pèreMANUEL JOAQUIM GOMES BARBOSA,S.C.J., secrétaire général.

    Leurs Excellences:— M. NICOLA ZINGARETTI, prési-

    dent de la région du Latium;— Mme VIRGINIA RAGGI, maire de

    Rome.

    9 janvierS.Em. le cardinal MARC OU E L L E T,préfet de la Congrégation pour lesévêques.

    S.E. M. GUZMÁN MIGUEL CARRI-QUIRY LECOUR, ambassadeur d'Uru-guay près le Saint-Siège, à l'occasionde la présentation de ses Lettres deCréance.

    S.Exc. Mgr ST E FA N O RU S S O, évêqueémérite de Fabriano-Matelica, secré-taire général de la conférence épisco-pale italienne.

    S.E. M. MIODRAG VLAHOVIĆ, am-bassadeur du Monténégro près leSaint-Siège.

    11 janvierLeurs Eminences MM. les cardi-naux:

    — LEONARD O SANDRI, préfet de laCongrégation pour les Eglises orien-tales;

    — ANGELO COMASTRI, archiprêtrede la basilique papale de Saint-Pier-re au Vatican; vicaire général de SaSainteté pour la Cité du Vatican;

    Leurs Excellences NN.SS.:— GABRIELE GIORDANO CACCIA,

    archevêque titulaire de Sepino, ob-servateur permanent auprès de l'Or-ganisation des Nations unies à NewYork (O.N.U.);

    — FABIO FABENE, évêque titulairede Montefiascone, sous-secrétaire dusynode des évêques.

    S.E. Mme GRACE R. PRINCESA, am-bassadrice des Philippes, en visite decongé.

    Collège épiscopalNominations

    Le Saint-Père a nommé:

    5 janvierS.Exc. Mgr MICHAEL MIABESUE BI-BI, jusqu'à présent évêque titulaired'Amudarsa et auxiliaire de l'archi-diocèse métropolitain de Bamenda(Cameroun): évêque de Buéa (Came-ro u n ) .

    8 janvierLe Saint-Père, accueillant la deman-de formulée par l'évêque d'Almería(Espagne), S.Exc. Mgr Adolfo Gon-zález Montes, d'avoir un évêquecoadjuteur, a nommé S.Exc. MgrANTONIO GÓMEZ CA N T E R O, jusqu'àprésent évêque de Teruel y Albarra-cín (Espagne).

    Né le 31 mai 1956 à Quijas, provin-

    ce de Cantabria et diocèse de Santan-der (Espagne), il a été ordonné prêtreà Palencia le 17 mai 1981. Le 17 no-vembre 2016 il a été nommé évêquede Teruel y Albarracín et a reçu l'or-dination épiscopale le 21 janvier 2017.Au sein de la conférence épiscopaleespagnole, il a été membre de la com-mission pour l'apostolat des laïcs(2017-2020) et depuis mars 2020 de lacommission pour les communica-tions sociales.

    9 janvierS.Exc. Mgr DOMINIQUE BL A N C H E T,jusqu'à présent évêque de Belfort-Montbéliard (France): évêque deCréteil (France).

    Né le 15 février 1966 à Cholet,Maine-et-Loire, diocèse d'Angers(France), il a été ordonné prêtre le 27juin 1999 pour le diocèse d'Angers.Le 21 mai 2015 il a été nommé évêquede Belfort-Montbéliard et a reçu l’or-dination épiscopale le 12 juillet sui-vant. Depuis 2019 il est vice-prési-dent de la conférence épiscopalefrançaise.

    le père LIZARD O ESTRADA HERRERA,O.S.A., jusqu'à présent vicaire épisco-pal pour la vie consacrée dans l'archi-diocèse métropolitain de Trujillo(Pérou) et président de la fédérationdes augustins des vicariats du Pérou:évêque titulaire d'Ausuccura et auxi-liaire de l'archidiocèse métropolitainde Cuzco (Pérou).

    Né le 23 septembre 1973 dans laprovince de Cotabambas, archidiocè-se métropolitain de Cuzco (Pérou), ila émis sa profession solennelle dansl'ordre de Saint-Augustin le 27 mai2001 et a été ordonné prêtre le 7 août2005.

    11 janvierS.Exc. Mgr BERNABÉ DE JESÚS SA-GASTUME LEMUS, O.F.M. Cap.: évêquede San Marcos (Guatémala) le trans-férant du diocèse de Santa Rosa deLima (Guatémala).

    Né le 20 mai 1961 à San Esteban,Chiquimula, diocèse de Zacapa(Guatémala), il a prononcé ses vœuxperpétuels chez les Frères mineurscapucins le 28 décembre 1985, et a re-çu l'ordination sacerdotale le 31 jan-vier 1987. Elu évêque de Santa Rosade Lima le 28 juillet 2007, il a reçul'ordination épiscopale le 6 octobresuivant.

    Démissions

    Le Saint-Père a accepté la démission de:

    9 janvierS.Exc. Mgr MICHEL SANTIER, quiavait demandé à être relevé de lacharge pastorale du diocèse de Cré-teil (France).

    11 janvierS.Exc. Mgr JEAN-PIERRE CAT T E N O Z ,qui avait demandé à être relevé de lacharge pastorale de l'archidiocèsemétropolitain d'Avignon (France).

    Curie romaineNominations

    8 janvierLe Saint-Père a nommé président dela Commission disciplinaire de laCurie romaine M. VINCENZO BUO-N O M O, recteur magnifique de l'uni-versité pontificale du Latran.

    Le Saint-Père a nommé membresde la Commission disciplinaire de laCurie romaine Mgr ALEJANDRO W.BUNGE, président du Bureau du tra-vail du Siège apostolique et M.MAXIMINO CABALLERO LED O, secré-taire général du Secrétariat pourl'économie.

    C i rc o n s c r i p t i o necclésiastique

    8 janvierLe Saint-Père, après avoir changé lenom de la circonscription d'Ispahandes Latins à Téhéran - Ispahan desLatins (Iran), a nommé archevêquele père DOMINIQUE MAT H I E U, de lacustodie provinciale d’Orient et deTerre Sainte des frères mineurs con-ventuels, jusqu'à présent définiteurgénéral de son ordre.

    Né le 13 juin 1963 à Arlon, en Bel-gique, il a émis sa profession solen-nelle chez les frères mineurs conven-tuels en 1987 et a été ordonné prêtrele 24 septembre 1989. Depuis 2013 ilest incardiné dans la custodie provin-ciale d’Orient et de Terre Sainte.

    Représentationp ontificale

    Nomination

    Le Saint-Père a nommé:

    7 janvierS.Ec. Mgr EUGENE MARTIN NU-G E N T, archevêque titulaire de Dom-nach Sechnaill, jusqu'à présent nonceapostolique en Haïti: nonce aposto-lique au Koweit et au Qatar.

    Décès du cardinal brésilienEusébio Oscar Scheid

    Décès du cardinal suisseHenry Schwery

    Le cardinal suisse Henri Schwery, évêque émérite de Sion, est décédé dans lamatinée du jeudi 7 janvier à Saint-Léonard, dans le diocèse de Sion, où ilétait né le 14 juin 1932. Ordonné prêtre le 7 juillet 1957, il avait été nomméévêque de Sion le 22 juillet 1977 et avait reçu l'ordination épiscopale le 17 sep-tembre de la même année. Président de la conférence épiscopale suisse de 1983à 1988, il avait été créé cardinal au cours du consistoire du 28 juin 1991 etpublié sous le titre des Santi Protomartiri a Via Aurelia Antica. Le 1er avril1995 il avait renoncé à la charge pastorale du diocèse. Ayant appris la nou-velle de sa mort, le Pape a fait parvenir le télégramme suivant à l'évêque deSion, S.Exc. Mgr Jean-Marie Lovey.

    Le cardinal brésilien Eusébio Oscar Scheid, déhonien, ar-chevêque émérite de São Sebastião do Rio de Janeiro, estdécédé le mercredi 13 janvier à São José dos Campos suiteà des complications pulmonaires après avoir contracté levirus du covid-19. Le défunt cardinal était né le 8 décem-bre 1932 à Bom Retiro, dans le diocèse de Joaçaba. Ilavait été ordonné prêtre le 3 juillet 1960 dans l'ordre desprêtres du Sacré-Cœur de Jésus (Déhoniens). Nommépremier évêque de São José dos Campos le 11 février 1981,il avait reçu l'ordination épiscopale le 1er mai suivant. Le23 janvier 1991, il avait été promu archevêque de Floria-nópolis et le 25 juillet 2001, il avait été transféré au siègemétropolitain de São Sebastião do Rio de Janeiro, rece-vant également la charge d'ordinaire pour les fidèles orien-taux résidant au Brésil et dépourvus de hiérarchie pourleur propre Eglise «sui iuris». Au cours du consistoire du21 octobre 2003 il avait été créé cardinal et publié sous letitre des saints Bonifacio et Alessio. Le 27 février 2009, ilavait renoncé à la charge pastorale de l'archidiocèse deRio de Janeiro et le 28 juillet 2010, il avait renoncé àl'ordinariat pour les fidèles de rite oriental. Ayant apprisla nouvelle de sa mort, le Pape a envoyé le télégrammesuivant au successeur du cardinal Scheid à Rio de Janei-ro, le cardinal cistercien Orani João Tempesta:

    J'ai appris avec une profonde douleur la nouvelle du décès du cardinal Eusébio Oscar Scheid et je désire,en ce moment de deuil, vous assurer de ma solidarité dans la prière avec tous les fidèles qui ont trouvé enlui un pasteur zélé. Sa devise épiscopale, «Dieu est bon», nous rappelait la bonté de Dieu envers sonEglise, et ce souvenir est véritablement consolateur quand nous faisons mémoire du bien-aimé père Eu-sebio, qui a servi avec tant de courage le peuple de Dieu, en étant le premier évêque de São José dosCampos et ayant guidé avec un égal zèle l'archidiocèse de Florianópolis et le siège métropolitain de SãoSebastião do Rio de Janeiro. Tandis que je rends grâce au Très Haut d'avoir donné à l'Eglise qui est auBrésil un pasteur si généreux, j'élève de ferventes prières afin qu'il l'accueille dans son bonheur éternel etqu'il apporte le réconfort de l'espérance de la résurrection à tous ceux qui pleurent la perte de leur bien-aimé pasteur, en leur envoyant la Bénédiction apostolique, en signe de faveurs célestes réconfortantes.

    FRANÇOIS P P.

    Ayant appris avec tristesse le décès du cardinal Henri Schwery,évêque émérite de Sion, je vous adresse mes vives condoléancesainsi qu’à sa famille, à l’évêque émérite Mgr Norbert Brunner etaux fidèles du diocèse de Sion. Je demande au Père de toute mi-séricorde d’accueillir dans sa paix et dans sa lumière cet hommede sciences et ce pasteur intensément dévoué à la conduite deson diocèse. Attentif aux besoins pastoraux des fidèles, il s’estinvesti dans les vocations sacerdotales et la formation des prê-tres. Il s’est aussi impliqué dans la recherche de l’unité de l’Egli-se en différentes occasions. En gage de réconfort, je vous adressela Bénédiction apostolique, ainsi qu’à l’évêque émérite MgrNorbert Brunner, aux prêtres, aux personnes consacrées, à la fa-mille du cardinal défunt et à ses proches, aux diocésains de Sionet à toutes les personnes qui prendront part à la célébration desobsèques.

    FRANÇOIS P P.

  • L’OSSERVATORE ROMANOpage 8 mardi 19 janvier 2021, numéro 3

    Les défisà relever

    FERNAND O FILONI

    «L’ affirmation selonlaquelle tous entant qu’êtres hu-mains nous som-mes frères et sœurs n’est pas seule-ment une abstraction (...) mais nousmet face à une série de défis» (Fra -telli tutti [FT] n. 128). Le premier deces défis est de comprendre si etpourquoi nous sommes tous frères etsœurs. Face aux guerres quotidien-nes, aux haines de tout genre, pas-sées et présentes, au terrorisme, auxméchancetés personnelles et collecti-ves, on se demande si et commenton peut parler de fraternité; un ter-me qui a même donné lieu à des ma-lentendus idéologiques et politiqueset la Révolution française du XVIIIesiècle elle-même en fit l'un des pi-vots de la «nouvelle» ère; une ère oùl'on ne dédaigna pas la violence, laségrégation raciale, le colonialisme,la guerre et, par la suite, l'exploita-tion du travail, la naissance d'idéolo-gies complexes de domination et desuprématie (nazisme, communismeet dictatures de diverses inspira-tions).

    Pour le Christ et pour la culturequi trouve son origine en lui, la fra-ternité possède une autre histoire —celle biblique — profondément hu-maine et existentielle, qui n'ignorepas l'assertion de l’homo homini lupus(maxime découlant de l'As i n a r i a dePlautus, II, 4, 88), qui visait à expli-quer l'égoïsme humain et à désignerla condition dans laquelle les hom-mes se combattent les uns les autrespour survivre.

    La vision — en tant que véritablenouveauté — que Jésus trace est «au-tre». Et c'est dans cette optique quedoit être comprise l'expression tirédes Admonitiones attribuées à saintFrançois, qui demandait à ses frèresde regarder le Christ pour saisir lesens de la fraternité qu'il voulait en-tre eux.

    D'un point de vue biblique, l'idée

    de fraternité (antécédente à touteforme de «lien fraternel» dont l'ac-ception est quelque peu réductrice etsemble s'apparenter à la camarade-rie) ne naît pas simplement du par-tage de la maternité/paternité biolo-gique elles-mêmes, mais du dépasse-ment de l'aspect biologique bien ex-primé de façon existentielle par lepsaume 51, qui confesse: «pécheurma mère m'a conçu» (v. 7); c'est-à-dire que pour le psaume même,l'être humain est conscient que dansla vie, il devient le compagnon devoleurs et d'adultères, de ceux quitrament la tromperie, et il arrive mê-me à tuer son semblable dans le plusgrand mépris également de Dieu (cf.Ps 50, v. 16 et ss). La mauvaise cons-cience porte presque Caïn à mentir àl'Eternel, en cherchant à nier la fra-ternité d'Abel; cette histoire conti-nue dans l'humanité. Mais nous por-tons avec nous le péché originel (dé-sormais pratiquement abandonnédans la théologie et dans la prédica-tion contemporaine); de plus, sanslui n'existerait pas non plus un bap-tême venu d'en haut (cf. Jn 3, 3-8),selon l'enseignement de Jésus à Ni-codème: celui-ci voulait comprendrequelle était la «nouveauté» prêchéepar le Christ; et il n'y aurait pas nonplus eu de rôle pour cet «Agneau deDieu qui enlève le péché du mon-de» (Jn 1, 29), Jésus, que Jean- Bap-tiste indiquait en le voyant arriververs lui.

    De quelle nouveauté s'agit-il? Jé-sus enseignait aux foules et aux dis-ciples le cœur de la relation avecDieu, avec la société (également re-ligieuse) et avec les autres; puis il af-firme de façon résolue: «Tous vousêtes des frères» (Mt 23, 8). Il n'étaitpas question ici simplement de l'ap-partenance au peuple juif; Il élargis-sait le regard, car de père «vous n'enavez qu'un, le Père céleste» (Mt 23,9). La question avec Jésus devientainsi transcendante. La fraternité —dit Jésus — trouve son origine dansle Père céleste et, pour cela, elle dé-

    passe toute discrimination relative àla couleur de la peau, à la culture ouaux traditions. Une «origine» qui,même dans le milieu ecclésial, sem-ble être déclassée ou ignorée. Si l'ap-pel à la transcendance disparaissait,la fraternité se briserait; l'égalité nerésisterait pas aux diverses pressions,y compris celles économiques et so-ciales, et la liberté se replierait de fa-çon égoïste sur elle-même. La frater-nité possède une portée transcen-dante. C'est ce que rappelle l'ency-clique du Pape, en citant Centesimusannus de Jean-Paul II (cf. FT n.273).

    Un autre défi apparaît: si la trans-cendance était vraie, de quel Dieuparlons-nous? La question me futposée de façon simple, mais profon-de, par un chrétien qui vivait enIran à l'époque de mon service dansce pays et qui devait constammentse confronter au «Dieu de l'islam»:«Le Dieu de Jésus Christ — disait-ilnon sans perplexité — est-il le mêmeque le Dieu prêché par les musul-mans?». La question n'était pas sanspertinence. Les contradictions con-crètes, le fait de se sentir appelé«mécréant» (kāfir), étaient/sont réel-les. Abou Dhabi, pour les relationsentre chrétiens et musulmans, (Docu-ment sur la fraternité humaine pour la paixmondiale et la coexistence commune, du 4février 2019), est un pas nouveau,tout au moins pour ne pas se faire laguerre et ne pas créer des crises hu-manitaires supplémentaires. Le ter-rorisme et l'extrémisme sont contreAbou Dhabi. Mais l'espérance quela racine abrahamique des trois reli-gions monothéistes, dont parle leConcile Vatican II (cf. Lumen gentium16), puisse apporter des fruits, n'apas disparu. Dans ce climat, il n'estdonc pas hasardeux de penser que lePacte d'Abraham (entre Emirats arabes,Bahrein, et Israël, avec un possibleélargissement à d'autres pays), soitune initiative qui aurait des consé-quences, outre diplomatiques, égale-ment économiques, culturelles et re-ligieuses auparavant impensables.Sortir de la logique du conflit signi-fie penser autrement et plus haut.

    Quand Jésus parle du «Père cé-leste», il se réfère certainement auDieu de la révélation abrahamique.Il ne parlait pas d'un Dieu abstraitou philosophique; à la samaritaine(on se rappellera qu'il régnait unecertaine hostilité entre samaritains etjuifs!) qui lui demandait quel Dieuon devait adorer, Jésus répond en al-lant au-delà du proche mont de Ga-rizim sur lequel les samaritains ado-raient «leur» Dieu, mais également

    de la montagne de Jérusalem, sur la-quelle les juifs adoraient le Très-Haut. Jésus parle, en revanche, d'un«Père» qui veut être adoré «en es-prit et en vérité, car tels sont lesadorateurs que cherche le Père. Dieuest esprit, et ceux qui adorent, c'esten esprit et en vérité qu'ils doiventadorer» (Jn 4, 23-24). Ce Dieu estensuite révélé par/dans Jésus Christ,le Messie, dont on ne peut plus faireabstraction. Sans Lui, on retourneau panthéisme ou aux divisions iré-niques et théosophiques d'un Dieuau ton platonique ou ésotérique. LeDieu de Jésus Christ a les caractèresdu Père qui dans le Fils illumine, ra-chète, nous réconcilie et sur la croix,ouvre à la fraternité. Laquelle?

    Pour ôter tout doute au docteurde la Loi qui lui demandait des ex-plications, Jésus raconte la splendideparabole du bon Samaritain (cf. Lc10, 25-37); il n'utilise pas de théorie,mais une illustration, et surtout cepuissant: «Va, et toi aussi, fais demême» (Lc 10, 37); l'encyclique duPape François illustre avec une clar-té indubitable cette parabole qui re-présente le cœur théologique del'enseignement de Jésus sur la frater-nité et est au centre du documentpontifical (cf. nn. 56 et sq). Dans laparabole — explique le Pap