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ECOLE DU LOUVRE INSTITUTO VENETO DI SCIENZE, LETTERE ED ARTI XVIe SEMINAIRE D’HISTOIRE DE L’ART VENITIEN LE TABLEAU D’AUTEL A VENICE ENTRE MOYEN AGE ET RENAISSANCE Bartolomeo Vivarini Le polyptyque de la Vierge à l’Enfant Cristiana Tătaru Université de Bucarest

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ECOLE DU LOUVRE

INSTITUTO VENETO DI SCIENZE, LETTERE ED ARTI

XVIe SEMINAIRE D’HISTOIRE DE L’ART VENITIEN

LE TABLEAU D’AUTEL A VENICE ENTRE MOYEN AGE ET RENAISSANCE

Bartolomeo Vivarini

Le polyptyque de la Vierge à l’Enfant

Cristiana Tătaru

Université de Bucarest

Bartolomeo Vivarini (1432-1499) est un peintre vénitien, qui s’est fait remarqué à la fin

du quattrocento. Il est né dans une ancienne famille des verriers, de Murano. Bartolomeo a eu la

chance de travailler avec son frère Antonio Vivarini, dans l’atelier de famille, où il a été initié

dans la peinture du gothique tardif, mélangé avec l’héritage byzantino-vénitien, pratiqué par son

frère. Il semble qu’il ait fait son apprentissage dans l’atelier de Francesco Squarcione, de Padoue,

probablement à la fin des années 1440,1 période dans laquelle il a été influencé par l’œuvre

d’Andrea Mantegna.

Son œuvre des années 1450-1462 a été ombragée par le travail de son frère Antonio

Vivarini. Avec celui-ci il a peint plusieurs polyptyques: pour l’église Certosa di Bologna (1450),

pour le grand autel de l’église des franciscains de Padoue (1451) et d’autres polyptyques pour les

églises d’Osimo, de Corridonia ou du couvent de Sant’Eufemia, d’Arbe.2 Sant Giovanni

Capistrano (1459) est le premier travail indépendant de Bartolomeo Vivarini. Dans la prochaine

décennie il a peint exclusivement dans l’espace vénitien.3 Dans cette étape de l’évolution de son

carrière on peut placer la réalisation du polyptyque étudié, de la Vierge à l’Enfant. Il a travaillé

pour la clientèle conservatrice de Vénice, ainsi, il n’a pas pu développer son style, dans la

minière de Bellini, mais il développe un style unique avec des personnages plus réalistes, dont la

psychologie profonde peut être observée sur les visages. À la fin de sa vie il a peint dans la

région de Bergamo. Cette période de son activité a été caractérisée par une décadence, au

niveau de la ligne, les œuvres étant plus linéaires et schématiques.4

Le tableau d’autel est dénommé conventionnellement „Le polyptyque de Ca’Morosini”,

parce que il a été peint par Bartolomeo Vivarini pour la chapelle Ca’Morsini de l’église

vénitienne Sant’Andrea alla Certosa. Cet ouvrage a été fait sous le patronage de la famille

Morosini, une ancienne famille vénitienne qui a donné de nombreux doges de Vénice, ducs de

Candie, gouverneurs et clercs. Depuis 1812, le polyptyque se trouve dans les Galléries

dell’Accademia, de Vénice.5

1 The Dictionary of Art, Edited by Jane Turner, vol. 32, New York, Ed. Grove, 1996, p. 655.

2 Dizionario universale dell’arte e degli artisti, vol. IV, Milano, Ed. Il Saggiatore, 1970, p. 386.

3 The Dictionary of Art, Edited by Jane Turner, vol. 32, New York, Ed. Grove, 1996, p. 655

4 Ibidem, p. 656.

5 Giovanna Scirè Nepi, I Capolavori Dell’Arte Veneziana. Le Gallerie Dell’Accademia, Venice, Ed. Arsenale, 1991,

p. 60.

Le polyptyque ouvert se compose de cinq panneaux de bois. Le panneau central

représentant „La Vierge à l’Enfant” est plus haut (132 x 41 cm) que les autres quatre panneaux

(109 x 33cm) qui le flanquent. Sur les panneaux latéraux sont représentés: Saint André, Saint

Jean le Baptiste, Saint Dominique et Saint Pierre. Le polyptyque est peint à tempera sur bois.

Son cadre a été perdu. Il présentait un crucifix sculpté flanqué par des figures des prophètes7.

Le principal sujet de ce polyptyque est l’Adoration de Christ. Le thème central de

l’œuvre parle à première vue de la relation entre la Vierge mère et l’Enfant Jésus Christ, mais le

sens plus profond est lié des prochaines souffrances de Jésus Christ. On va voir que tous les

personnages sont tristes, parce qu’ils connaissent le future chemin de l’Enfant. Ainsi, les quatre

saints sont orientés vers le panneau central où la Vierge reste assise sur un trône de marbre blanc.

Elle tient à genoux l’Enfant endormi. Il est couché sur un coussin blanc, symbole du deuil, porté

6 La source de l’image - http://www.wga.hu/frames-e.html?/html/v/vivarini/bartolom/index.html.

7 Giovanna Scirè Nepi, I Capolavori Dell’Arte Veneziana. Le Gallerie Dell’Accademia, Venice, Ed. Arsenale, 1991,

p. 60.

Bartolomeo Vivarini, Le polyptyque de la Vierge à l’Enfant6

après la crucifixion par la Vierge. On voit que par ce genre de peintures sont anticipés les

souffrances de Christ, son mission, le motif de son incarnation. La Vierge est assise sur un trône

de marbre, qui semble avec un sarcophage ou avec un autel pour les sacrifices. Le dossier du

trône est couvert avec un tissu rouge, qui peut être un symbole du sang de Christ. Le trône est

élevé sur un podium, qui comporte une inscription en latin: OPVS/ BATOLOMEI/VIARINI/ DE

MURANO/MCCCCLXIIII, qui signifie: Œuvre de Bartolomeo Vivarini de Murano 1464. Cette

inscription aide à la datation exacte de l’œuvre.

En ce qui concerne la posture de la Vierge on peut observer qu’elle a une figure triste. La

tête est penchée un peu à droit, elle regard vers un point indéfini. Son visage a aucune pli du

front et elle a le peau blanc comme l’Enfant. La Vierge a les deux mains jointes comme dans une

prière. En comparaison avec les autres personnages la mère de Christ a un corps massif. Elle est

plus grande que les saints et on peut penser que le rapport de la grandeur marque l’importance du

personnage. La Vierge est vêtue avec une chemise très longue rouge et avec un manteau bleu à

l’extérieur et vert à l’intérieur. Aussi, ce manteau couvre la tête de la Vierge. Dans la part

inférieur du corps s’observe une disproportion au niveau des genoux, où se trouve l’Enfant

endormi. Il est nu, il a seulement autour de la taille un tissu transparente, diaphane. L’Enfant

s’appui la tête dans la main droite et la main gauche est tendue au long du corps.

Sur le panneau de l’extrémité gauche est représenté Saint André, le patron de l’église. Il

tient dans la main droite la croix de bois de son martyre et dans la main gauche un livre fermé.

Le saint est barbu et il porte un vêtement long noir et un tissu vert comme un pallium. Son barbe

est très long et ses cheveux sont gris. Son visage comporte beaucoup de plis. Son regard est

orienté, comme celui de la Vierge, vers un point situé sur la terre. Après l’Évangile selon Jean,

Saint André a été au début le disciple de Jean Baptiste (Jean, III: 408). Ainsi, on peut fait une

relation avec le prochain personnage représenté, qui est Saint Jean Baptiste. Le petit Christ a les

cheveux châtains et ondulés, sa bouche est entrouverte, en révélant deux petites dents. Tous les

personnages du polyptyque semblent accablés par la douleur du sacrifice de l’Enfant, seul le

visage de Christ est calme.

8 Bible, traduite par Louis Segond, Genève-Paris, Ed. La Société Biblique de Genève, 1975, p. 1185 : „André, frère

de Simon Pierre, était l’un des deux qui avaient entendu les paroles de Jean. Et qui avaient suivi Jésus ”.

Saint Jean Baptiste peut être reconnu après ses vêtements d’ermite, avec lesquels a été

habillé pendent son vie d’ascèse. Du point de vue iconographique, les vêtements ne sont pas

identiques avec la description de Matthieu10

. Saint Jean porte un pallium au-dessus des poils de

chameau et nous ne voyons pas la ceinture de cuir. Dans la main droite il tient une croix au

milieu de laquelle se trouve un tissu ou sont écrits les mots: ECCE AGNUSED… qui signifie

„Voici l’Agneau”, parce Jean Baptiste est celui qui a nommé Jésus Christ, l’Agneau de Dieu. La

main gauche est élevée et avec le doigt index il montre le ciel. Ses cheveux et sa barbe sont

châtain et ondulés, et son corps est très décharné. Saint Jean regarde vers un point indéfini sur le

ciel. Le panneau de Saint Jean Baptiste est le seul qui présent un fond. Dans ce cas il est un

arrière-plan rocheux, qui décrit l’environnement dans lequel Saint Jean

a vécu. Les autres panneaux présentent un sorte de plancher de marbre,

qui entame la perspective. Saint Jean Baptiste est représenté a cote de

la Vierge, parce qu’il est le personnage qui a annoncé la naissance de

Christ et parce qu’il est le précurseur de Jésus Christ.

À la côté gauche de la Vierge se trouve un panneau sur lequel

est représenté Saint Dominique de Guzmán. Saint Dominique est

habillé avec un costume de moine dominicain. Il porte un habit de

couleur blanche, composé par une tunique longue blanche et un

scapulaire, qui est la pièce de tissu sans manches, reposant sur les

épaules et des chaussures noires. Aussi il porte sur l’habit un manteau

noir, composé d’une chape avec des manches longues et d’un capuce.

9 La source de l’image - http://www.wga.hu/frames-e.html?/html/v/vivarini/bartolom/index.html.

10 Bible, traduite par Louis Segond, Genève-Paris, Ed. La Société Biblique de Genève, 1975, Matthieu III: 4, p.

1054: „Jean avait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins. Il se nourrissait de

sauterelles et de miel sauvage ”.

Saint Dominique,

Bartolomeo Vivarini, Le

triptyque des Saints

Dominique, Augustin et

Laurent, 14739

Saint Dominique est le seule personnage qui est chaussé. Dans la main

droite le saint tient une tige avec deux fleurs de lys et deux boutons de

lys. La fleur de lys représente le symbole de la chasteté du saint.

Aussi, dans la main gauche il tient un livre fermé. Dans la Legenda

Aurea, de Jacobus de Voragine, on peut lire que Saint Dominique a

reçu ce livre de Saint Paul.12

De plus, conformément à la Legenda

Aurea, traduit par William Caxton, en 1483, le livre de Saint

Dominique a un caractère miraculeux parce que le livre n’a pas été

brûlé, quand il a été jeté dans le feu avec les autres livres des

hérétiques chatares.13

Le visage de saint est triste et il regarde, comme

Saint Jean Baptiste, vers un point qui se trouve en quelque part sur le

ciel. La même image de Saint Dominque va être reprise par

Bartolomeo Vivarini dans le triptyque de Saint Augustin (1473,

Basilica dei Santi Giovanni e Paolo, Vénice) auquel on peut observer

les mêmes attributs, la même posture, les mêmes vêtements. L’unique

différence est faite par la carnation du visage, qui est plus réaliste.

Sur le panneau de l’extrémité droite est représenté Saint Pierre.

Il a été placé symétriquement par rapport à son frère, Saint André. Il

est habillé presque de la même manière que celui-là, avec une tunique

bleu avec des manches longues et avec un pallium jaune, qui couvre

11

La source de l’image - http://www.wga.hu/frames-e.html?/html/v/vivarini/bartolom/index.html. 12

Jacobus de Voragine, La légende dorée , Saint Dominique, Tome 3, sur le site http://www.abbaye-saint-

benoit.ch/voragine/tome02/114.htm: „Comme saint Dominique priait à Rome dans une église de saint Pierre, pour

la dilatation de son ordre, il vit venir à lui les glorieux princes des apôtres Pierre et Paul ; le premier, c’est-à-dire

saint Pierre, semblait lui donner un bâton, et saint Paul un livre, en lui disant : « Va prêcher, parce que tu as été

choisi de Dieu pour remplir ce ministère » ” 13

Jacobus de Voragine, Legenda Aurea, The Life of Saint Dominic, vol. 4, sur le site

http://www.fordham.edu/halsall/basis/goldenlegend/GL-vol4-dominic.asp, : „That a disputation was ordained

against the heretics, like as the malady of the heresy grew in the parties of Albigenses, that disputation solemn was

at the temple of Jupiter, and were ordained judges on both parties. To whom the affirmation of the faith that every

each should enseign, should be written in a book. And the book of S. Dominic was chosen and presented among the

others, upon the which the judges strove against them, howbeit, it was ordained that the books of one part and that

other should be cast into the fire. And they that burned not should be holden without doubt for the very faith. And so

the books were thrown into a great fire burning, and anon the book of the heresies was burnt, and the book of S.

Dominic was saved and not burnt, but sprang out of the fire without hurting, and it was cast in the second time, and

it leapt out without burning.”

Saint Pierre, Bartolomeo

Vivarini, Triptyque de la

Vierge à l’Enfant avec

Saints, 148711

ses épaules. Saint Pierre tient dans ses mains un livre fermé et une paire de clés, donnée par Jésus

Christ14

. Il port son barbe court et gris. Aussi, ses cheveux sont courts, gris et ondulés.

Bartolomeo Vivarini va utiliser l’image de Saint Pierre dans le tableau d’autel de la Chapel de

Saint Bernard de l’église de Santa Maria Gloriosa de la Frari, Vénice (1487), changeant

seulement la physionomie du saint.

Tous les personnages, sauf l’Enfant Jésus Christ, ont les têtes entourées d’une auréole

soigneusement réalisés.

Le polyptyque de la Vierge à l’Enfant est une œuvre placée au début de la carrière

indépendante de Bartolomeo Vivarini. Dans cet œuvre sont tracées les premières caractéristiques

de la Renaissance exprimés par Bartolomeo. D’abord ses personnages ont une attitude

contemplative, ils comportent des sentiments humains, de tristesse, contrairement à l’attitude des

personnages des icones byzantines, qu’il faut relever les qualités spirituelles ou a l’attitude des

personnages des tableaux du gothique tardive, qui sont plates est dépourvus de vie. Aussi,

Bartolomeo Vivarini confère un certain dynamisme à son œuvre, par les plis des vêtements,

soigneusement traités et par les gestes et la carnation des personnages, qui sont véridiques. Les

corps sont très bien proportionnés, avec une anatomie réaliste. En ce qui concerne la perspective,

elle est schématique. L’artiste a utilisé dans ses tableaux d’autel aussi, des éléments

d’architecture, conformes avec la conception de l’espace gothique. À l’égard du fond, il est

entièrement doré, réminiscence de la tradition byzantine de l’espace vénitienne. Plus tard ce fond

sera remplacé par des éléments naturalistes comme le ciel avec des nuages.

14

Bible, traduite par Louis Segond, Genève-Paris, Ed. La Société Biblique de Genève, 1975, p. 1082, Matthieu

XVI : 18-19: „Et moi, je te dis que tu es Pierre et que sur ce roc je bâtirai mon Eglise, et que les portes du séjour

des morts ne prévaudront point contre elle. Je te donnerai les clés du royaume des cieux: ce que tu lieras sur la

terre sera délié dans les cieux”.

Bibliographie

Bible, traduite par Louis Segond, Genève-Paris, Ed. La Société Biblique de Genève,

1975.

Dizionario universale dell’arte e degli artisti, Milano, Ed. Il Saggiatore, 1970, vol IV.

Giovanna Scirè Nepi, I Capolavori Dell’Arte Veneziana. Le Gallerie Dell’Accademia,

Venice, Ed. Arsenale, 1991.

Jacobus de Voragine, La légende dorée, Saint Dominique, Tome 3, sur le site

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/voragine/tome02/114.htm.

Jacobus de Voragine, Legenda Aurea, The Life of Saint Dominic, vol. 4, sur le site

http://www.fordham.edu/halsall/basis/goldenlegend/GL-vol4-dominic.asp.

The Dictionary of Art, Edited by Jane Turner, New York, Ed. Grove, 1996, vol. 32.

Venice: art and architecture, Editeur Giandomenico Romanelli, Postam, Ed. H. F.

Ullman, 2007.