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Les jeunes et les élections Les jeunes et les élections www.elections.ca VOL. 5 • N o 2 • JUILLET 2003 Pourquoi sont-ils moins nombreux à voter? Comment peut-on les mobiliser? Pourquoi sont-ils moins nombreux à voter? Comment peut-on les mobiliser? ÉLECTORALES ÉLECTORALES Perspectives Perspectives

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Page 1: 11940 EC Insight Vol5 no2 fv8 - Elections in Canada · en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni 31 L’art de vendre la participation électorale à la génération MusiquePlus

Les jeunes et les électionsLes jeunes et les élections

www.elections.ca

VOL. 5 • No 2 • JUILLET 2003

Pourquoi sont-ils moins nombreux à voter?Comment peut-on les mobiliser?

Pourquoi sont-ils moins nombreux à voter?Comment peut-on les mobiliser?

ÉLECTORALES ÉLECTORALES PerspectivesPerspectives

Page 2: 11940 EC Insight Vol5 no2 fv8 - Elections in Canada · en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni 31 L’art de vendre la participation électorale à la génération MusiquePlus

Juillet 2003 1

Rédacteur en chefF. Leslie Seidle

Gestionnaire, Services de publicationFrancine Dalphond

Directeur de la rédactionWayne Brown

Pour plus de renseignements, veuillezcommuniquer avec Élections Canada :Téléphone : 1 800 463-6868

www.elections.ca

© ÉLECTIONS CANADA 2003ISSN 1488-3538EC 91827

TOUS DROITS RÉSERVÉSIMPRIMÉ AU CANADA

La démocratie est fondée sur le droit des citoyens de

participer à la prise des décisions qui les concernent

et à la formulation des règles sociales auxquelles ils se

soumettent. Ces droits fondamentaux ne prennent tout leur

sens que lorsque les citoyens participent, le plus activement

possible, à la vie publique. Le vote est une manifestation

essentielle d’un tel engagement.

Le présent numéro spécial de Perspectives électorales est consacré

à l’un des grands défis confrontant la démocratie canadienne

contemporaine : le déclin de la participation électorale depuis

dix ans, plus particulièrement chez le plus jeune groupe d’électeurs admissibles. Bien que

cette tendance ne soit pas entièrement nouvelle, ni propre au Canada, elle pourrait

s’accentuer si aucune mesure n’est prise pour l’arrêter.

La participation aux élections fédérales au Canada, qui était en moyenne de 75 % de la Deuxième Guerre mondiale à 1988,a chuté en 1993, puis en 1997. À la dernière élection générale en 2000, la participation électorale est tombée à tout justeplus de 64 % des électeurs inscrits. On trouve particulièrement inquiétantes les constatations d’une importante étudemenée par les professeurs Jon Pammett (Université Carleton) et Lawrence LeDuc (Université de Toronto) selon lesquellesà peine environ le quart (25,4 %) des Canadiens admissibles de 18 à 24 ans ont voté à l’élection générale de 2000.

Je suis heureux que les auteurs de tous les articles publiés dans le présent numéro aient accepté de partager leurs rechercheset leurs analyses sur le déclin de la participation électorale chez les jeunes. Dans leur ensemble, les articles nous apprennentque les raisons pour lesquelles les jeunes Canadiens n’exerçaient pas leur droit de vote autant que leurs aînés étaient deplus faibles connaissances politiques, un sentiment d’apathie, la baisse du sentiment que le vote est une obligation civique,ainsi que le contact limité avec les partis politiques et les candidats.

Comme je l’ai mentionné dans mon discours lors du Symposium sur la participation électorale au Canada à l’UniversitéCarleton le 21 mars 2003, Élections Canada est déterminé à régler le problème de la baisse de participation électoralechez les jeunes électeurs canadiens. Des mesures seront mises en œuvre d’ici à la prochaine élection fédérale, tandis qued’autres seront lancées à la suite de consultations et, dans certains cas, de projets pilotes.

Les jeunes et les élections

Jean-Pierre KingsleyDirecteur général des élections du Canada

Message du directeur général des élections

Eleanor Milne, Chris Fairbrotheret Marcel JoanisseLe Vote (1979-1980)Calcaire de l’Indiana, 121,9 x 182,8 cm,Chambre des communes, Ottawa

Le Vote est une sculpture qui orne lemur est de la Chambre des communes.Les quatre têtes aux longs cheveux qui forment la base de cette sculptureentonnent les premières syllabes del’hymne national : « O-Ca-na-da ».

Photo de la page couverture : Getty Images

Table des matières VOL. 5 • No 2 • JUILLET 2003

1 Message du directeur général des élections3 Les jeunes et les élections

3 La problématique du déclin de la participation électorale chezles jeunesJon H. Pammett et Lawrence LeDucUne nouvelle étude sur les raisons de la baisse de la participation des jeunes

9 La politique électorale : où sont passés les jeunes?Elisabeth Gidengil, André Blais, Neil Nevitte et Richard NadeauL’intérêt envers la politique est un facteur déterminant dans le vote des jeunes

15 Examen du déclin de la participation électorale chez les jeunesdu CanadaBrenda O’Neill Les jeunes Canadiens sont plus susceptibles que leurs aînés de croire que levote n’est pas important, mais ils ne sont pas plus désabusés de la démocratie

20 La participation électorale et le manque de connaissancesPaul Howe Le niveau des connaissances en politique aide à expliquer pourquoi lesgroupes plus jeunes votent moins

26 Augmentation de l’inscription des jeunes électeurs :de meilleures pratiques pour toucher les jeunes électeursKeith ArcherUne étude des démarches visant à favoriser l’inscription des jeunesen Australie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni

31 L’art de vendre la participation électorale à la générationMusiquePlus Phillip Haid Quelques idées d’une perspective de marketing social pour redonner un sensà la politique pour les jeunes

36 À quel âge est-on prêt à voter? La participation des jeunes à lavie collectiveRaymond Hudon et Bernard FournierDes enquêtes menées auprès des élèves du Québec suggèrent qu’il est plusimportant de les préparer au vote que d’abaisser l’âge du vote

42 Abaisser l’âge de voter : le débat et les expériences européennes Kees Aarts et Charlotte van HeesNouveaux débats sur l’octroi du droit de vote à partir de 16 ans

47 « Rush the Vote »Wayne BrownDes artistes font la promotion du vote auprès des jeunes

Élections Canada est l’organismenon partisan chargé de la conduite desélections et des référendums fédéraux

Perspectives électorales est une publicationpréparée par Élections Canada. Elle est publiéetrois fois par année. Cette publication s’adresseaux personnes qui s’intéressent aux dossiers liésaux élections : les universitaires, les parlemen-taires, le personnel d’organismes électoraux auCanada et à l’étranger, les directeurs du scrutinet leurs adjoints ainsi que les employésd’Élections Canada. Les opinions expriméespar les auteurs ne reflètent pas nécessairement

celles du directeur général des électionsdu Canada.

Nous acceptons les articles et les photos sus-ceptibles d’intéresser les lecteurs de Perspectivesélectorales, mais nous ne nous engageons pas àles publier. Lorsque nous les retenons, nousnous réservons le droit de les modifier, aubesoin, pour des raisons d’espace ou de clarté.

Veuillez faire parvenir lettres et propositionsd’articles et de photos à l’adresse suivante :Wayne Brown, directeur de la rédaction,Perspectives électorales, Élections Canada,257, rue Slater, Ottawa (Canada) K1A 0M6([email protected]).

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Juillet 2003 1

Rédacteur en chefF. Leslie Seidle

Gestionnaire, Services de publicationFrancine Dalphond

Directeur de la rédactionWayne Brown

Pour plus de renseignements, veuillezcommuniquer avec Élections Canada :Téléphone : 1 800 463-6868

www.elections.ca

© ÉLECTIONS CANADA 2003ISSN 1488-3538EC 91827

TOUS DROITS RÉSERVÉSIMPRIMÉ AU CANADA

La démocratie est fondée sur le droit des citoyens de

participer à la prise des décisions qui les concernent

et à la formulation des règles sociales auxquelles ils se

soumettent. Ces droits fondamentaux ne prennent tout leur

sens que lorsque les citoyens participent, le plus activement

possible, à la vie publique. Le vote est une manifestation

essentielle d’un tel engagement.

Le présent numéro spécial de Perspectives électorales est consacré

à l’un des grands défis confrontant la démocratie canadienne

contemporaine : le déclin de la participation électorale depuis

dix ans, plus particulièrement chez le plus jeune groupe d’électeurs admissibles. Bien que

cette tendance ne soit pas entièrement nouvelle, ni propre au Canada, elle pourrait

s’accentuer si aucune mesure n’est prise pour l’arrêter.

La participation aux élections fédérales au Canada, qui était en moyenne de 75 % de la Deuxième Guerre mondiale à 1988,a chuté en 1993, puis en 1997. À la dernière élection générale en 2000, la participation électorale est tombée à tout justeplus de 64 % des électeurs inscrits. On trouve particulièrement inquiétantes les constatations d’une importante étudemenée par les professeurs Jon Pammett (Université Carleton) et Lawrence LeDuc (Université de Toronto) selon lesquellesà peine environ le quart (25,4 %) des Canadiens admissibles de 18 à 24 ans ont voté à l’élection générale de 2000.

Je suis heureux que les auteurs de tous les articles publiés dans le présent numéro aient accepté de partager leurs rechercheset leurs analyses sur le déclin de la participation électorale chez les jeunes. Dans leur ensemble, les articles nous apprennentque les raisons pour lesquelles les jeunes Canadiens n’exerçaient pas leur droit de vote autant que leurs aînés étaient deplus faibles connaissances politiques, un sentiment d’apathie, la baisse du sentiment que le vote est une obligation civique,ainsi que le contact limité avec les partis politiques et les candidats.

Comme je l’ai mentionné dans mon discours lors du Symposium sur la participation électorale au Canada à l’UniversitéCarleton le 21 mars 2003, Élections Canada est déterminé à régler le problème de la baisse de participation électoralechez les jeunes électeurs canadiens. Des mesures seront mises en œuvre d’ici à la prochaine élection fédérale, tandis qued’autres seront lancées à la suite de consultations et, dans certains cas, de projets pilotes.

Les jeunes et les élections

Jean-Pierre KingsleyDirecteur général des élections du Canada

Message du directeur général des élections

Eleanor Milne, Chris Fairbrotheret Marcel JoanisseLe Vote (1979-1980)Calcaire de l’Indiana, 121,9 x 182,8 cm,Chambre des communes, Ottawa

Le Vote est une sculpture qui orne lemur est de la Chambre des communes.Les quatre têtes aux longs cheveux qui forment la base de cette sculptureentonnent les premières syllabes del’hymne national : « O-Ca-na-da ».

Photo de la page couverture : Getty Images

Table des matières VOL. 5 • No 2 • JUILLET 2003

1 Message du directeur général des élections3 Les jeunes et les élections

3 La problématique du déclin de la participation électorale chezles jeunesJon H. Pammett et Lawrence LeDucUne nouvelle étude sur les raisons de la baisse de la participation des jeunes

9 La politique électorale : où sont passés les jeunes?Elisabeth Gidengil, André Blais, Neil Nevitte et Richard NadeauL’intérêt envers la politique est un facteur déterminant dans le vote des jeunes

15 Examen du déclin de la participation électorale chez les jeunesdu CanadaBrenda O’Neill Les jeunes Canadiens sont plus susceptibles que leurs aînés de croire que levote n’est pas important, mais ils ne sont pas plus désabusés de la démocratie

20 La participation électorale et le manque de connaissancesPaul Howe Le niveau des connaissances en politique aide à expliquer pourquoi lesgroupes plus jeunes votent moins

26 Augmentation de l’inscription des jeunes électeurs :de meilleures pratiques pour toucher les jeunes électeursKeith ArcherUne étude des démarches visant à favoriser l’inscription des jeunesen Australie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni

31 L’art de vendre la participation électorale à la générationMusiquePlus Phillip Haid Quelques idées d’une perspective de marketing social pour redonner un sensà la politique pour les jeunes

36 À quel âge est-on prêt à voter? La participation des jeunes à lavie collectiveRaymond Hudon et Bernard FournierDes enquêtes menées auprès des élèves du Québec suggèrent qu’il est plusimportant de les préparer au vote que d’abaisser l’âge du vote

42 Abaisser l’âge de voter : le débat et les expériences européennes Kees Aarts et Charlotte van HeesNouveaux débats sur l’octroi du droit de vote à partir de 16 ans

47 « Rush the Vote »Wayne BrownDes artistes font la promotion du vote auprès des jeunes

Élections Canada est l’organismenon partisan chargé de la conduite desélections et des référendums fédéraux

Perspectives électorales est une publicationpréparée par Élections Canada. Elle est publiéetrois fois par année. Cette publication s’adresseaux personnes qui s’intéressent aux dossiers liésaux élections : les universitaires, les parlemen-taires, le personnel d’organismes électoraux auCanada et à l’étranger, les directeurs du scrutinet leurs adjoints ainsi que les employésd’Élections Canada. Les opinions expriméespar les auteurs ne reflètent pas nécessairement

celles du directeur général des électionsdu Canada.

Nous acceptons les articles et les photos sus-ceptibles d’intéresser les lecteurs de Perspectivesélectorales, mais nous ne nous engageons pas àles publier. Lorsque nous les retenons, nousnous réservons le droit de les modifier, aubesoin, pour des raisons d’espace ou de clarté.

Veuillez faire parvenir lettres et propositionsd’articles et de photos à l’adresse suivante :Wayne Brown, directeur de la rédaction,Perspectives électorales, Élections Canada,257, rue Slater, Ottawa (Canada) K1A 0M6([email protected]).

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Juillet 2003 3

La participation électorale au Canada est descendue à uncreux historique à l’élection générale fédérale de novembre2000, ce qui a suscité l’inquiétude des universitaires, desmédias et d’un public averti. Bien que les universitairess’intéressant à la vie politique étudient depuis longtemps laparticipation électorale, les raisons de son brusque déclindemeurent obscures. Il est cependant évident qu’il n’est pasuniquement lié à la plus récente élection générale fédérale,puisque le taux de participation a baissé à chacune des troisdernières élections générales. Il n’est pas non plus nécessaire-ment lié aux enjeux et événements politiques propres auCanada. En effet, la participation électorale décroît aussidans plusieurs autres pays industrialisés; par exemple, auxdernières élections législatives en France, elle a atteint unniveau aussi bas que celui du Canada. Au Royaume-Uni,elle est descendue encore plus bas.

Répercussions de la baisse de participation

La question de la participation électorale prend davantaged’importance dans les discussions publiques au Canada et àl’étranger, à la fois en raison de l’amplitude de son récentdéclin et des conclusions que l’on en tire. Des observateursrelient de plus en plus la baisse de participation aux électionsà certains des problèmes fondamentaux de la démocratiemoderne. Ainsi, le manque d’enthousiasme du public faceà l’un des exercices démocratiques les plus fondamentauxrelèverait d’un « déficit démocratique » plus large et pourraitavoir de graves conséquences pour la santé du système poli-tique démocratique. En outre, si l’effet des facteurs politiqueset sociaux à l’origine de la baisse de la participation électorale

se prolonge, le problème pourrait accabler le systèmepolitique pendant de longues années. À titre d’exemple,si la tendance à la baisse se maintient d’une génération àl’autre, on peut prévoir que la participation électoralecontinuera de diminuer encore longtemps, simplement parsuite du processus normal de renouvellement de la popula-tion. Une telle interprétation a déjà été suggérée par leprofesseur Blais et ses collègues dans leur analyse de lafaible participation électorale à l’élection de 20001.

Étude des votants et des non-votants

Afin d’examiner plus systématiquement les causes etconséquences possibles d’un prolongement du déclin dela participation électorale auCanada, nous avons conçuet mené un nouveausondage en collaborationavec Élections Canada enavril 20022. Le pland’échantillonnagecomportait une courteentrevue préliminaireavec un grand nombrede Canadiens (5 637),ainsi qu’une entrevueplus longue avec960 personnes ayantdéclaré avoir voté àl’élection généralefédérale de 2000 et

Les jeunes et les élections

La problématique du déclinde la participation électoralechez les jeunes

Jon H. PammettProfesseur en science politique, Université Carleton

Lawrence LeDucProfesseur de science politique, Université de Toronto

Les résultats du sondage se trouventsous la rubrique Lois et politiquesélectorales du site Web d’ÉlectionsCanada (www.elections.ca).

2 Perspectives électorales

Élections Canada s’efforcera de favoriser la compréhension du processus électoral chez les jeunes Canadiens par le biais decampagnes d’information et d’initiatives conjointes avec des organismes que l’éducation civique intéresse. Par exemple,l’organisme, en partenariat avec La câblo-éducation, élabore un nouveau programme d’éducation des électeurs à l’intentiondes étudiants. Lors d’un concours qui sera organisé cet automne dans chaque province et territoire, les jeunes de 16 à 18 ansseront invités à créer pour leurs pairs des communiqués vidéo d’intérêt public de 30 secondes sur l’importance du processusdémocratique et du vote.

Nous veillerons aussi à simplifier le plus possible l’accès au processus électoral, tant pour les jeunes que pour l’ensemblede l’électorat. Durant la prochaine élection générale, Élections Canada lancera des initiatives d’inscription visant parti-culièrement les résidences et les quartiers d’étudiants. En outre, nous placerons un nombre accru de bureaux de vote à desendroits auxquels les jeunes ont facilement accès. Nous prévoyons également envoyer aux citoyens canadiens, à la suitede leur 18e anniversaire, une carte présentant un message du directeur général des élections les félicitant d’avoir atteintl’âge de voter et leur rappelant de s’inscrire.

Comme nous reconnaissons la nécessité d’un effort concerté pour remédier à la baisse de participation électorale chezles jeunes, Élections Canada organisera un forum national sur la participation électorale des jeunes à Calgary, les 30 et31 octobre. Ce forum réunira des représentants des groupes de jeunes, d’Autochtones, d’entreprises, de syndicats, de partispolitiques et d’organismes privés, ainsi que des universitaires, des chercheurs et les médias. Les participants échangerontdes renseignements sur les activités permettant de remédier à cette baisse et feront des suggestions sur d’autres mesures.

J’invite les parlementaires et les partis politiques, ainsi que les dirigeants d’entreprise et civils, les représentants des jeuneset les médias à prendre part à un dialogue national sur la recherche de façons d’encourager plus de jeunes Canadiens àvoter. Sans efforts concertés, il est probable que la participation électorale continuera de décroître. Il nous faut réagir.

Jean-Pierre Kingsley

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Juillet 2003 3

La participation électorale au Canada est descendue à uncreux historique à l’élection générale fédérale de novembre2000, ce qui a suscité l’inquiétude des universitaires, desmédias et d’un public averti. Bien que les universitairess’intéressant à la vie politique étudient depuis longtemps laparticipation électorale, les raisons de son brusque déclindemeurent obscures. Il est cependant évident qu’il n’est pasuniquement lié à la plus récente élection générale fédérale,puisque le taux de participation a baissé à chacune des troisdernières élections générales. Il n’est pas non plus nécessaire-ment lié aux enjeux et événements politiques propres auCanada. En effet, la participation électorale décroît aussidans plusieurs autres pays industrialisés; par exemple, auxdernières élections législatives en France, elle a atteint unniveau aussi bas que celui du Canada. Au Royaume-Uni,elle est descendue encore plus bas.

Répercussions de la baisse de participation

La question de la participation électorale prend davantaged’importance dans les discussions publiques au Canada et àl’étranger, à la fois en raison de l’amplitude de son récentdéclin et des conclusions que l’on en tire. Des observateursrelient de plus en plus la baisse de participation aux électionsà certains des problèmes fondamentaux de la démocratiemoderne. Ainsi, le manque d’enthousiasme du public faceà l’un des exercices démocratiques les plus fondamentauxrelèverait d’un « déficit démocratique » plus large et pourraitavoir de graves conséquences pour la santé du système poli-tique démocratique. En outre, si l’effet des facteurs politiqueset sociaux à l’origine de la baisse de la participation électorale

se prolonge, le problème pourrait accabler le systèmepolitique pendant de longues années. À titre d’exemple,si la tendance à la baisse se maintient d’une génération àl’autre, on peut prévoir que la participation électoralecontinuera de diminuer encore longtemps, simplement parsuite du processus normal de renouvellement de la popula-tion. Une telle interprétation a déjà été suggérée par leprofesseur Blais et ses collègues dans leur analyse de lafaible participation électorale à l’élection de 20001.

Étude des votants et des non-votants

Afin d’examiner plus systématiquement les causes etconséquences possibles d’un prolongement du déclin dela participation électorale auCanada, nous avons conçuet mené un nouveausondage en collaborationavec Élections Canada enavril 20022. Le pland’échantillonnagecomportait une courteentrevue préliminaireavec un grand nombrede Canadiens (5 637),ainsi qu’une entrevueplus longue avec960 personnes ayantdéclaré avoir voté àl’élection généralefédérale de 2000 et

Les jeunes et les élections

La problématique du déclinde la participation électoralechez les jeunes

Jon H. PammettProfesseur en science politique, Université Carleton

Lawrence LeDucProfesseur de science politique, Université de Toronto

Les résultats du sondage se trouventsous la rubrique Lois et politiquesélectorales du site Web d’ÉlectionsCanada (www.elections.ca).

2 Perspectives électorales

Élections Canada s’efforcera de favoriser la compréhension du processus électoral chez les jeunes Canadiens par le biais decampagnes d’information et d’initiatives conjointes avec des organismes que l’éducation civique intéresse. Par exemple,l’organisme, en partenariat avec La câblo-éducation, élabore un nouveau programme d’éducation des électeurs à l’intentiondes étudiants. Lors d’un concours qui sera organisé cet automne dans chaque province et territoire, les jeunes de 16 à 18 ansseront invités à créer pour leurs pairs des communiqués vidéo d’intérêt public de 30 secondes sur l’importance du processusdémocratique et du vote.

Nous veillerons aussi à simplifier le plus possible l’accès au processus électoral, tant pour les jeunes que pour l’ensemblede l’électorat. Durant la prochaine élection générale, Élections Canada lancera des initiatives d’inscription visant parti-culièrement les résidences et les quartiers d’étudiants. En outre, nous placerons un nombre accru de bureaux de vote à desendroits auxquels les jeunes ont facilement accès. Nous prévoyons également envoyer aux citoyens canadiens, à la suitede leur 18e anniversaire, une carte présentant un message du directeur général des élections les félicitant d’avoir atteintl’âge de voter et leur rappelant de s’inscrire.

Comme nous reconnaissons la nécessité d’un effort concerté pour remédier à la baisse de participation électorale chezles jeunes, Élections Canada organisera un forum national sur la participation électorale des jeunes à Calgary, les 30 et31 octobre. Ce forum réunira des représentants des groupes de jeunes, d’Autochtones, d’entreprises, de syndicats, de partispolitiques et d’organismes privés, ainsi que des universitaires, des chercheurs et les médias. Les participants échangerontdes renseignements sur les activités permettant de remédier à cette baisse et feront des suggestions sur d’autres mesures.

J’invite les parlementaires et les partis politiques, ainsi que les dirigeants d’entreprise et civils, les représentants des jeuneset les médias à prendre part à un dialogue national sur la recherche de façons d’encourager plus de jeunes Canadiens àvoter. Sans efforts concertés, il est probable que la participation électorale continuera de décroître. Il nous faut réagir.

Jean-Pierre Kingsley

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Juillet 2003 54 Perspectives électorales

Motifs d’abstention

Un grand nombre des questions dusondage étaient ouvertes et permettaientaux répondants de donner plus d’uneréponse, dans leurs propres mots. Decette façon, nous avons pu examineren profondeur certains des sentimentset attitudes à la source du déclin de laparticipation électorale au Canada. Lapossibilité de comparer les réponses desrépondants plus âgés et plus jeunes, ainsique des votants et des non-votants, nouséclaire sur le problème de l’abstentiondu vote chez les jeunes. Nous avonsdemandé aux répondants qui ont déclaréne pas avoir voté à l’élection généralefédérale de 2000 les raisons de leurabstention, que nous avons regroupéesen trois grandes catégories indiquéesau tableau 2 :désintérêt, néga-tivisme et raisonspersonnelles /administratives6. Letableau 2 montredes écarts intéres-sants concernantles motifs d’absten-tion des différentsgroupes d’âge.Notamment, lesrépondants les plusjeunes, ceux âgésde 18 à 24 ans en2000, exprimaientmoins souvent dessentiments négatifsenvers les candi-dats, les partis etles chefs que ceuxdes groupes plusâgés. Toutefois,ils invoquaientbeaucoup plus desraisons personnellesou administratives,en particulierqu’ils étaient tropoccupés. Ils étaientaussi plus suscepti-bles de rencontrerdes problèmes

d’inscription. En outre,le niveau de désintérêtétait plus élevé dansles deux groupes d’âgeles plus jeunes.

Les répondants les plusâgés étaient les plustouchés par des pro-blèmes de santé et parl’absence de leurcirconscription aumoment de l’élection.Il est cependant à noterqu’il y avait beaucoupmoins de non-votantsdans l’ensemble descohortes de répondantsplus âgés. Les groupesd’âge de la mi-trentaine

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Tableau 2Principaux motifs d’abstention à l’élection de 2000(question ouverte; réponses multiples; % des répondants)

Âge en 2000

55+ 45-54 35-44 25-34 18-24 Total

Désintérêt 32 30 34 41 39 37

Non intéressé; ne s’en souciait pas; apathie 23 18 20 27 28 25

Vote inutile; ne compte pas; issue connue d’avance 8 10 10 11 7 9

Oublié; ne savait pas 2 0 1 2 4 2

Trop compliqué; confusion 0 2 3 1 0 1

Négativisme 30 50 46 32 27 34

N’aimait aucun des candidats / partis / enjeux 12 23 21 14 14 16

Manque de confiance envers les candidats / partis / chefs 15 21 17 14 6 13

Manque d’information sur les candidats / partis / enjeux 1 3 5 3 6 4

Mécontentement régional 2 3 3 1 1 1

Raisons personnelles / administratives 46 33 28 35 43 37

Trop occupé par le travail / l’école / la famille 4 3 12 14 23 14

Hors de la circonscription / province / pays 22 9 8 11 8 10

Problèmes d’inscription 3 7 3 5 7 6

Maladie, problèmes de santé 12 8 2 2 * 3

Ne savait pas où ni quand; problèmes avecle bureau de scrutin; transport 5 3 3 2 4 3

Déménagement 0 3 1 1 1 1

Autre 5 3 5 3 5 4

Motifs religieux 4 2 2 1 1 2

Autre; inclassable; vague; aucun 1 1 3 2 4 2

N = 101 109 171 331 347 1 059

*moins de 1 %

Selon l’étude, on estime que seulement le quart des électeursadmissibles de 18 à 24 ans ont voté à la plus récente électiongénérale du Canada, en 2000.

960 personnes ayant déclaré ne pas avoirvoté à cette élection. Nous avons ainsiobtenu des entrevues avec un groupebeaucoup plus grand de non-votants quelors des sondages électoraux générale-ment menés au Canada. Le sondage aété conçu afin d’analyser une grandevariété d’explications concernantl’abstention en général, et plus parti-culièrement la montée de l’abstentionaux trois dernières élections fédérales.Le présent article examine trois des plusimportantes conclusions du sondage :les tendances générationnelles del’abstention du vote, leurs raisons et lesperceptions des électeurs plus jeuneset plus âgés concernant les solutionspossibles au problème.

Le tableau 1 illustre une tendanceclaire au déclin de la participationélectorale d’une génération deCanadiens à l’autre depuis au moinsles dix dernières années3. Les tauxd’abstention des trois cohortes denouveaux électeurs à chacune destrois dernières élections fédérales estfrappant4. À peine plus d’une personnesur cinq admissibles à voter pour lapremière fois en 2000 ont choisid’exercer leur droit de vote. Leschiffres sont légèrement plus positifspour les cohortes d’électeurs quiétaient admissibles à voter pour lapremière fois en 1997 et en 1993.Même ceux qui ont acquis le droitde vote à la fin de la période Trudeau(1974 à 1980) ont voté en 2000 à untaux inférieur à celui des cohortes plusâgées. Les électeurs devenus admissiblesdurant la période Mulroney (âgés de

30 à 37 ans en 2000) n’ont voté qu’à54 % en 2000.

Bien entendu, il n’est pas inhabitueld’enregistrer de faibles taux de partici-pation électorale chez les jeunes. Cettetendance est étudiée en profondeur dansles articles sur l’abstention du vote auCanada et à l’étranger. Cependant, lestaux plus faibles chez les jeunes étaientgénéralement associés à des caractéris-tiques de comportement relatives aucycle de vie. À mesure que la popula-tion vieillit, elle devient plus conscientede la politique et s’engage davantage.Il est donc naturel que les taux departicipation électorale augmententavec l’âge selon les changementsnormaux liés au cycle de vie.

Le taux de participation devrait égale-ment augmenter par suite du relèvement

du niveau de scolarité. Toutefois, selonnos données, cette augmentation estbeaucoup plus lente que par le passé etde nombreux jeunes électeurs commen-cent le cas échéant à exercer leur droitde vote à un âge moyen beaucoup plusavancé5. Si cette tendance se maintient,le taux de participation continuera dediminuer avec le renouvellement dela population, chaque génération denouveaux électeurs étant moins portéeà voter et s’intégrant à l’électorat plustard. Comme rien n’indique encore unralentissement de cette baisse progres-sive, la participation aux électionsultérieures à celle de 2000 pourrait êtreencore plus faible. Une telle tendancepourrait avoir des répercussions gravespour la démocratie du Canada – pour lecaractère démocratique du mandat desgouvernements, le type de candidats éluset même le type d’enjeux examinés.

Tableau 1Vote et abstention en 2000, par cohorte d’âge

Âge en 2000(première admissibilité)

68+ 58-67 48-57 38-47 30-37 25-29 21-24 18-20(-1953) (1957-1963) (1968-1972) (1974-1980) (1984-1988) (1993) (1997) (2000)

Oui 83 80 76 66 54 38 28 22 61

Non 17 20 24 34 46 62 73 78 39

N = 2 467 (pondéré)

Total(%)

Vote en 2000

(%)

Les participants au Symposium sur la participation électorale au Canada (21 mars 2003, àOttawa) ont discuté des moyens de favoriser le vote des jeunes électeurs.

Phot

o : Él

ection

s C

anada

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Juillet 2003 54 Perspectives électorales

Motifs d’abstention

Un grand nombre des questions dusondage étaient ouvertes et permettaientaux répondants de donner plus d’uneréponse, dans leurs propres mots. Decette façon, nous avons pu examineren profondeur certains des sentimentset attitudes à la source du déclin de laparticipation électorale au Canada. Lapossibilité de comparer les réponses desrépondants plus âgés et plus jeunes, ainsique des votants et des non-votants, nouséclaire sur le problème de l’abstentiondu vote chez les jeunes. Nous avonsdemandé aux répondants qui ont déclaréne pas avoir voté à l’élection généralefédérale de 2000 les raisons de leurabstention, que nous avons regroupéesen trois grandes catégories indiquéesau tableau 2 :désintérêt, néga-tivisme et raisonspersonnelles /administratives6. Letableau 2 montredes écarts intéres-sants concernantles motifs d’absten-tion des différentsgroupes d’âge.Notamment, lesrépondants les plusjeunes, ceux âgésde 18 à 24 ans en2000, exprimaientmoins souvent dessentiments négatifsenvers les candi-dats, les partis etles chefs que ceuxdes groupes plusâgés. Toutefois,ils invoquaientbeaucoup plus desraisons personnellesou administratives,en particulierqu’ils étaient tropoccupés. Ils étaientaussi plus suscepti-bles de rencontrerdes problèmes

d’inscription. En outre,le niveau de désintérêtétait plus élevé dansles deux groupes d’âgeles plus jeunes.

Les répondants les plusâgés étaient les plustouchés par des pro-blèmes de santé et parl’absence de leurcirconscription aumoment de l’élection.Il est cependant à noterqu’il y avait beaucoupmoins de non-votantsdans l’ensemble descohortes de répondantsplus âgés. Les groupesd’âge de la mi-trentaine

Phot

o : W

ayn

e Bro

wn

Tableau 2Principaux motifs d’abstention à l’élection de 2000(question ouverte; réponses multiples; % des répondants)

Âge en 2000

55+ 45-54 35-44 25-34 18-24 Total

Désintérêt 32 30 34 41 39 37

Non intéressé; ne s’en souciait pas; apathie 23 18 20 27 28 25

Vote inutile; ne compte pas; issue connue d’avance 8 10 10 11 7 9

Oublié; ne savait pas 2 0 1 2 4 2

Trop compliqué; confusion 0 2 3 1 0 1

Négativisme 30 50 46 32 27 34

N’aimait aucun des candidats / partis / enjeux 12 23 21 14 14 16

Manque de confiance envers les candidats / partis / chefs 15 21 17 14 6 13

Manque d’information sur les candidats / partis / enjeux 1 3 5 3 6 4

Mécontentement régional 2 3 3 1 1 1

Raisons personnelles / administratives 46 33 28 35 43 37

Trop occupé par le travail / l’école / la famille 4 3 12 14 23 14

Hors de la circonscription / province / pays 22 9 8 11 8 10

Problèmes d’inscription 3 7 3 5 7 6

Maladie, problèmes de santé 12 8 2 2 * 3

Ne savait pas où ni quand; problèmes avecle bureau de scrutin; transport 5 3 3 2 4 3

Déménagement 0 3 1 1 1 1

Autre 5 3 5 3 5 4

Motifs religieux 4 2 2 1 1 2

Autre; inclassable; vague; aucun 1 1 3 2 4 2

N = 101 109 171 331 347 1 059

*moins de 1 %

Selon l’étude, on estime que seulement le quart des électeursadmissibles de 18 à 24 ans ont voté à la plus récente électiongénérale du Canada, en 2000.

960 personnes ayant déclaré ne pas avoirvoté à cette élection. Nous avons ainsiobtenu des entrevues avec un groupebeaucoup plus grand de non-votants quelors des sondages électoraux générale-ment menés au Canada. Le sondage aété conçu afin d’analyser une grandevariété d’explications concernantl’abstention en général, et plus parti-culièrement la montée de l’abstentionaux trois dernières élections fédérales.Le présent article examine trois des plusimportantes conclusions du sondage :les tendances générationnelles del’abstention du vote, leurs raisons et lesperceptions des électeurs plus jeuneset plus âgés concernant les solutionspossibles au problème.

Le tableau 1 illustre une tendanceclaire au déclin de la participationélectorale d’une génération deCanadiens à l’autre depuis au moinsles dix dernières années3. Les tauxd’abstention des trois cohortes denouveaux électeurs à chacune destrois dernières élections fédérales estfrappant4. À peine plus d’une personnesur cinq admissibles à voter pour lapremière fois en 2000 ont choisid’exercer leur droit de vote. Leschiffres sont légèrement plus positifspour les cohortes d’électeurs quiétaient admissibles à voter pour lapremière fois en 1997 et en 1993.Même ceux qui ont acquis le droitde vote à la fin de la période Trudeau(1974 à 1980) ont voté en 2000 à untaux inférieur à celui des cohortes plusâgées. Les électeurs devenus admissiblesdurant la période Mulroney (âgés de

30 à 37 ans en 2000) n’ont voté qu’à54 % en 2000.

Bien entendu, il n’est pas inhabitueld’enregistrer de faibles taux de partici-pation électorale chez les jeunes. Cettetendance est étudiée en profondeur dansles articles sur l’abstention du vote auCanada et à l’étranger. Cependant, lestaux plus faibles chez les jeunes étaientgénéralement associés à des caractéris-tiques de comportement relatives aucycle de vie. À mesure que la popula-tion vieillit, elle devient plus conscientede la politique et s’engage davantage.Il est donc naturel que les taux departicipation électorale augmententavec l’âge selon les changementsnormaux liés au cycle de vie.

Le taux de participation devrait égale-ment augmenter par suite du relèvement

du niveau de scolarité. Toutefois, selonnos données, cette augmentation estbeaucoup plus lente que par le passé etde nombreux jeunes électeurs commen-cent le cas échéant à exercer leur droitde vote à un âge moyen beaucoup plusavancé5. Si cette tendance se maintient,le taux de participation continuera dediminuer avec le renouvellement dela population, chaque génération denouveaux électeurs étant moins portéeà voter et s’intégrant à l’électorat plustard. Comme rien n’indique encore unralentissement de cette baisse progres-sive, la participation aux électionsultérieures à celle de 2000 pourrait êtreencore plus faible. Une telle tendancepourrait avoir des répercussions gravespour la démocratie du Canada – pour lecaractère démocratique du mandat desgouvernements, le type de candidats éluset même le type d’enjeux examinés.

Tableau 1Vote et abstention en 2000, par cohorte d’âge

Âge en 2000(première admissibilité)

68+ 58-67 48-57 38-47 30-37 25-29 21-24 18-20(-1953) (1957-1963) (1968-1972) (1974-1980) (1984-1988) (1993) (1997) (2000)

Oui 83 80 76 66 54 38 28 22 61

Non 17 20 24 34 46 62 73 78 39

N = 2 467 (pondéré)

Total(%)

Vote en 2000

(%)

Les participants au Symposium sur la participation électorale au Canada (21 mars 2003, àOttawa) ont discuté des moyens de favoriser le vote des jeunes électeurs.

Phot

o : Él

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Juillet 2003 76 Perspectives électorales

réponses sont présentées par grouped’âge au tableau 4. La majorité desrépondants ont mentionné « unemeilleure éducation ou information ».Toutefois, les réponses sous cettecatégorie étaient assez diversifiées,traitant de la nécessité de promouvoirl’éducation non seulement dans lesécoles, mais aussi à la maison et dansles médias. Certains répondants ontaussi remarqué que les programmesd’information ou d’éducation devaientrefléter les intérêts et les situationspersonnelles des jeunes afin de lesintéresser davantage.

La notion de pertinence pour lesjeunes apparaît aussi dans la catégoriesuivante de réponses, portant sur leschangements systémiques qui pour-raient être apportés pour encouragerl’engagement des jeunes. D’après letableau 4, 27 % des répondants demoins de 25 ans ont l’impression queceux qui déterminent l’ordre du jourpolitique devraient tenir comptedavantage des enjeux touchant lesjeunes, comme l’emploi, l’éducationet l’avenir des jeunes. Ce pourcentageest presque deux fois plus élevé quechez les répondants de 25 ans et plus.

D’autres changements suggérés danscette catégorie portaient sur lesaméliorations qui pourraient encou-rager plus de jeunes à s’engager dansla politique, par exemple comme chefs,politiciens ou candidats. Peu de répon-dants ont mentionné le système électoralcomme cible d’un changement potentiel.En fait, dans une série distincte dequestions fermées à ce sujet, plus destrois quarts des répondants dans lesgroupes plus jeunes et plus âgés ontexprimé leur satisfaction généraleconcernant le fonctionnement dusystème électoral actuel7. Cependant,en réponse à une autre question, prèsdes deux tiers des répondants ontdéclaré être « passablement d’accord »pour que l’on introduise des réformesfavorisant la représentation propor-tionnelle dans le système électoral8. Il

n’en reste pas moins que la majoritédes répondants s’oppose très claire-ment au vote obligatoire. Alors que legroupe de répondants les plus âgés sedivise assez également sur la question,les répondants les plus jeunes sont lesplus nombreux à s’opposer au voteobligatoire.

La question de la « pertinence » de lapolitique pour les jeunes revient dansla troisième catégorie du tableau 4 –celle des changements dans les actionsou la conduite des politiciens. Selonles répondants, les jeunes pourraients’intéresser davantage à la politique si legouvernement essayait de les rejoindreet les comprendre, afin qu’ils aient voixau chapitre dans les affaires publiques.Les autres répondants dans cette

catégorie parlaient davantage de lanécessité d’accroître l’honnêteté, laresponsabilité et l’obligation de rendredes comptes chez les politiciens. Enréponse à une série de questionsdistincte, de nombreux répondantsont convenu que les nouveautés tech-nologiques, telles que la possibilité duvote sur Internet, pourraient accroîtrela participation électorale des jeunes9.

Les conclusions du sondage nous aidentà saisir l’ampleur du problème, sansnous indiquer clairement les solutionspossibles. Il est évident que le déclinde la participation aux récentes élec-tions est principalement attribuableaux jeunes et que selon la tendancedémographique, ce déclin se poursuivralongtemps. Il en ressort de graves

Tableau 4Que devrait-on faire pour intéresser davantage les jeunesà la politique?(question ouverte; réponses multiples; % des répondants)

Moins de 25 ans 25 ans et plus

Meilleure éducation; information 47 53

Davantage de sensibilisation dans les écoles 23 24

Davantage de dialogue / de contact direct / d’éducation (en général) 9 13

Plus d’accent sur la pertinence au niveauindividuel, avantages, emplois 8 10

Plus de publicité, de présence médiatique 8 4

Plus d’éducation à la maison 0 2

Changements au système politique; engagement 43 39

Enjeux plus pertinents pour les jeunes 27 15

Recrutement, engagement des jeunes 7 11

Candidats, politiciens, chefs plus jeunes 5 7

Meilleurs politiciens, chefs, partis 2 4

Réforme électorale; réforme démocratique 2 2

Changements de conduite politique 25 30

Gouvernement qui a de meilleurs rapports avec les jeunes, qui les comprend 11 14

Plus d’honnêteté, de responsabilité, d’obligation de rendre des comptes 6 11

Rendre la politique moins compliquée,plus intéressante, plaisante 8 5

Autre 2 2

Rien, ne sait pas 3 3

N = 332 1 184

à la mi-cinquantaine mentionnaientplus souvent des raisons liées auxsentiments négatifs à l’égard despoliticiens que les groupes les plusâgés et les plus jeunes.

Dans le sondage, nous avonsdemandé aux répondants de donnerdes explications possibles au manquede participation électorale des jeunes.Les réponses (tableau 3) formaientdeux grandes catégories : celles reliéesau manque d’intégration des jeunesdans le système politique, et cellessuggérant que le problème découle del’apathie ou de la méfiance des jeunesenvers la politique. Manifestement, lamajorité des Canadiens pensent queles jeunes ne votent pas parce qu’ils sesentent à l’écart des rouages du systèmepolitique ou parce qu’ils manquentd’information à son sujet. La premièreexplication, le sentiment d’éloignementde la politique, comprend des réponsescomme celles-ci :• les jeunes ne croient pas que le

gouvernement les représente ou sesoucie de leurs idées, de leurs besoinset de leurs problèmes;

• la différence d’âge éloigne les jeunes duprocessus politique et des politiciens;

• les partis ne font pas d’efforts pourles rejoindre ou ne sont pas à leurécoute;

• les jeunes sentent que la politique neles touche pas, peut-être parce qu’ilsn’assument pas encore les responsa-bilités qui sont au cœur des débatspolitiques;

• personne n’écoute les jeunes; ilsn’ont pas voix au chapitre.

Il y a donc un fort sentiment que lesjeunes n’ont pas de lien avec le systèmepolitique actuel et que, par ailleurs, ilsne sont pas assez informés sur les diversaspects de la politique : les candidats,les partis et les enjeux. Ils manquent

aussi de connaissances sur la façondont la politique peut influencer leurvie. Ce sont d’ailleurs des facteurs que34 % des jeunes mentionnent eux-mêmes. Dans l’ensemble, près des troisquarts des répondants au sondage,dont 80 % des répondants de moins de25 ans, ont donné une réponse classéedans la catégorie « Non intégrés ».

Les explications de l’abstention chezles jeunes comportaient aussi souventdes raisons classées dans la catégorie« Désengagement ». Des raisons de cetordre ont été invoquées par 59 % desrépondants de plus de 25 ans et 52 %des jeunes. La plus grande partie deces réponses décrivent simplementles jeunes comme désintéressés ouapathiques face au vote. Certainsrépondants attribuent cependant auxjeunes une attitude plus volontaire-ment et activement négative face à lapolitique ou aux élections. En effet, lesrépondants plus âgés estiment davantageque les jeunes sont moins enclins à voterparce qu’ils sont cyniques ou désen-chantés de la politique, dégoûtés « desfausses promesses, de la malhonnêteté,

de l’hypocrisie, dela corruption et dunégativisme » quisemblent parfoiscaractériser la viepolitique, et réfrac-taires à participerà un exercice« inutile ». Pourcertains répondants,

les jeunes manquent de confianceenvers les candidats, les partis ou legouvernement ou n’aiment simplementpas ce qui se fait (ou ne se fait pas)en politique.

Comment stimuler l’intérêtdes jeunes pour la politique?

Nous avons fait suivre la question surles raisons du faible taux de participa-tion chez les jeunes par une questionsur les solutions possibles pour intéresserdavantage les jeunes à la politique. Les

Manifestement, la majorité des Canadienspensent que les jeunes ne votent pas parcequ’ils se sentent à l’écart des rouages dusystème politique ou parce qu’ils manquentd’information à son sujet.

Tableau 3Raisons perçues de la faible participation des jeunes(question ouverte; réponses multiples; % des répondants)

Moins de 25 ans25 ans et plus

Non intégrés 79 71

Éloignés de la politique en raison de l’âge; ne se sentent pas représentés, liés 40 37

Manque d’information, de compréhension, de connaissances 34 27

Manque d’encouragements 2 4

Trop occupés, trop mobiles 3 3

Désengagement 51 59

Désintérêt, apathie 31 30

Négativisme, cynisme, désillusion 9 14

Méfiance envers le système / les politiciens 7 9

Irresponsabilité, rébellion, paresse 4 6

Autre 2 4

Ne sait pas 0 *

N = 386 1 420

*moins de 1 %

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Juillet 2003 76 Perspectives électorales

réponses sont présentées par grouped’âge au tableau 4. La majorité desrépondants ont mentionné « unemeilleure éducation ou information ».Toutefois, les réponses sous cettecatégorie étaient assez diversifiées,traitant de la nécessité de promouvoirl’éducation non seulement dans lesécoles, mais aussi à la maison et dansles médias. Certains répondants ontaussi remarqué que les programmesd’information ou d’éducation devaientrefléter les intérêts et les situationspersonnelles des jeunes afin de lesintéresser davantage.

La notion de pertinence pour lesjeunes apparaît aussi dans la catégoriesuivante de réponses, portant sur leschangements systémiques qui pour-raient être apportés pour encouragerl’engagement des jeunes. D’après letableau 4, 27 % des répondants demoins de 25 ans ont l’impression queceux qui déterminent l’ordre du jourpolitique devraient tenir comptedavantage des enjeux touchant lesjeunes, comme l’emploi, l’éducationet l’avenir des jeunes. Ce pourcentageest presque deux fois plus élevé quechez les répondants de 25 ans et plus.

D’autres changements suggérés danscette catégorie portaient sur lesaméliorations qui pourraient encou-rager plus de jeunes à s’engager dansla politique, par exemple comme chefs,politiciens ou candidats. Peu de répon-dants ont mentionné le système électoralcomme cible d’un changement potentiel.En fait, dans une série distincte dequestions fermées à ce sujet, plus destrois quarts des répondants dans lesgroupes plus jeunes et plus âgés ontexprimé leur satisfaction généraleconcernant le fonctionnement dusystème électoral actuel7. Cependant,en réponse à une autre question, prèsdes deux tiers des répondants ontdéclaré être « passablement d’accord »pour que l’on introduise des réformesfavorisant la représentation propor-tionnelle dans le système électoral8. Il

n’en reste pas moins que la majoritédes répondants s’oppose très claire-ment au vote obligatoire. Alors que legroupe de répondants les plus âgés sedivise assez également sur la question,les répondants les plus jeunes sont lesplus nombreux à s’opposer au voteobligatoire.

La question de la « pertinence » de lapolitique pour les jeunes revient dansla troisième catégorie du tableau 4 –celle des changements dans les actionsou la conduite des politiciens. Selonles répondants, les jeunes pourraients’intéresser davantage à la politique si legouvernement essayait de les rejoindreet les comprendre, afin qu’ils aient voixau chapitre dans les affaires publiques.Les autres répondants dans cette

catégorie parlaient davantage de lanécessité d’accroître l’honnêteté, laresponsabilité et l’obligation de rendredes comptes chez les politiciens. Enréponse à une série de questionsdistincte, de nombreux répondantsont convenu que les nouveautés tech-nologiques, telles que la possibilité duvote sur Internet, pourraient accroîtrela participation électorale des jeunes9.

Les conclusions du sondage nous aidentà saisir l’ampleur du problème, sansnous indiquer clairement les solutionspossibles. Il est évident que le déclinde la participation aux récentes élec-tions est principalement attribuableaux jeunes et que selon la tendancedémographique, ce déclin se poursuivralongtemps. Il en ressort de graves

Tableau 4Que devrait-on faire pour intéresser davantage les jeunesà la politique?(question ouverte; réponses multiples; % des répondants)

Moins de 25 ans 25 ans et plus

Meilleure éducation; information 47 53

Davantage de sensibilisation dans les écoles 23 24

Davantage de dialogue / de contact direct / d’éducation (en général) 9 13

Plus d’accent sur la pertinence au niveauindividuel, avantages, emplois 8 10

Plus de publicité, de présence médiatique 8 4

Plus d’éducation à la maison 0 2

Changements au système politique; engagement 43 39

Enjeux plus pertinents pour les jeunes 27 15

Recrutement, engagement des jeunes 7 11

Candidats, politiciens, chefs plus jeunes 5 7

Meilleurs politiciens, chefs, partis 2 4

Réforme électorale; réforme démocratique 2 2

Changements de conduite politique 25 30

Gouvernement qui a de meilleurs rapports avec les jeunes, qui les comprend 11 14

Plus d’honnêteté, de responsabilité, d’obligation de rendre des comptes 6 11

Rendre la politique moins compliquée,plus intéressante, plaisante 8 5

Autre 2 2

Rien, ne sait pas 3 3

N = 332 1 184

à la mi-cinquantaine mentionnaientplus souvent des raisons liées auxsentiments négatifs à l’égard despoliticiens que les groupes les plusâgés et les plus jeunes.

Dans le sondage, nous avonsdemandé aux répondants de donnerdes explications possibles au manquede participation électorale des jeunes.Les réponses (tableau 3) formaientdeux grandes catégories : celles reliéesau manque d’intégration des jeunesdans le système politique, et cellessuggérant que le problème découle del’apathie ou de la méfiance des jeunesenvers la politique. Manifestement, lamajorité des Canadiens pensent queles jeunes ne votent pas parce qu’ils sesentent à l’écart des rouages du systèmepolitique ou parce qu’ils manquentd’information à son sujet. La premièreexplication, le sentiment d’éloignementde la politique, comprend des réponsescomme celles-ci :• les jeunes ne croient pas que le

gouvernement les représente ou sesoucie de leurs idées, de leurs besoinset de leurs problèmes;

• la différence d’âge éloigne les jeunes duprocessus politique et des politiciens;

• les partis ne font pas d’efforts pourles rejoindre ou ne sont pas à leurécoute;

• les jeunes sentent que la politique neles touche pas, peut-être parce qu’ilsn’assument pas encore les responsa-bilités qui sont au cœur des débatspolitiques;

• personne n’écoute les jeunes; ilsn’ont pas voix au chapitre.

Il y a donc un fort sentiment que lesjeunes n’ont pas de lien avec le systèmepolitique actuel et que, par ailleurs, ilsne sont pas assez informés sur les diversaspects de la politique : les candidats,les partis et les enjeux. Ils manquent

aussi de connaissances sur la façondont la politique peut influencer leurvie. Ce sont d’ailleurs des facteurs que34 % des jeunes mentionnent eux-mêmes. Dans l’ensemble, près des troisquarts des répondants au sondage,dont 80 % des répondants de moins de25 ans, ont donné une réponse classéedans la catégorie « Non intégrés ».

Les explications de l’abstention chezles jeunes comportaient aussi souventdes raisons classées dans la catégorie« Désengagement ». Des raisons de cetordre ont été invoquées par 59 % desrépondants de plus de 25 ans et 52 %des jeunes. La plus grande partie deces réponses décrivent simplementles jeunes comme désintéressés ouapathiques face au vote. Certainsrépondants attribuent cependant auxjeunes une attitude plus volontaire-ment et activement négative face à lapolitique ou aux élections. En effet, lesrépondants plus âgés estiment davantageque les jeunes sont moins enclins à voterparce qu’ils sont cyniques ou désen-chantés de la politique, dégoûtés « desfausses promesses, de la malhonnêteté,

de l’hypocrisie, dela corruption et dunégativisme » quisemblent parfoiscaractériser la viepolitique, et réfrac-taires à participerà un exercice« inutile ». Pourcertains répondants,

les jeunes manquent de confianceenvers les candidats, les partis ou legouvernement ou n’aiment simplementpas ce qui se fait (ou ne se fait pas)en politique.

Comment stimuler l’intérêtdes jeunes pour la politique?

Nous avons fait suivre la question surles raisons du faible taux de participa-tion chez les jeunes par une questionsur les solutions possibles pour intéresserdavantage les jeunes à la politique. Les

Manifestement, la majorité des Canadienspensent que les jeunes ne votent pas parcequ’ils se sentent à l’écart des rouages dusystème politique ou parce qu’ils manquentd’information à son sujet.

Tableau 3Raisons perçues de la faible participation des jeunes(question ouverte; réponses multiples; % des répondants)

Moins de 25 ans25 ans et plus

Non intégrés 79 71

Éloignés de la politique en raison de l’âge; ne se sentent pas représentés, liés 40 37

Manque d’information, de compréhension, de connaissances 34 27

Manque d’encouragements 2 4

Trop occupés, trop mobiles 3 3

Désengagement 51 59

Désintérêt, apathie 31 30

Négativisme, cynisme, désillusion 9 14

Méfiance envers le système / les politiciens 7 9

Irresponsabilité, rébellion, paresse 4 6

Autre 2 4

Ne sait pas 0 *

N = 386 1 420

*moins de 1 %

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Juillet 2003 98 Perspectives électorales

La politique électorale où sont passés les jeunes?

Elisabeth Gidengil Neil Nevitte Professeur, Département de science politique Professeur, Département de science politiqueUniversité McGill Université de Toronto

André Blais Richard NadeauProfesseur, Département de science politique Professeur, Département de science politiqueUniversité de Montréal Université de Montréal

Un nombre sans précédent de jeunes Canadiens tournentle dos à la politique électorale. Les optimistes veulent croirequ’ils optent pour d’autres formes d’engagement politique,notamment en raison du fait que de nos jours, plus dejeunes Canadiens ont une formation universitaire que lesgénérations de leurs parents et de leurs grands-parents.Cette supposition est d’ailleurs renforcéepar les médias qui diffusent des images dejeunes protestant contre la mondialisationou la guerre en Iraq. Selon cet argument,la nouvelle génération de jeunes Canadienstrès instruits est insatisfaite de la politiqueélectorale traditionnelle et préfère desformes plus autonomes d’action politique.Cependant, comme le démontre le présentarticle, cette perception optimiste de lasituation ne résiste pas nécessairement àl’examen des faits.

Un fossé qui s’élargit

Ce n’est pas d’hier que les taux de partici-pation électorale des jeunes sont faibles.D’après les études détaillées de la partici-pation aux élections fédérales depuis1968, la propension au vote augmentegénéralement de sept ou huit pointsentre 20 et 30 ans, et d’environ 15 pointsentre 20 et 50 ans1. Les jeunes ont moinstendance à voter justement parce qu’ilssont jeunes. La plupart d’entre eux ne se

soucient pas particulièrement de l’impôt, des taux hypothé-caires ou de l’accès aux services; le débat politique qui entoureces questions peut leur paraître lointain et abstrait.

Par contre, l’élargissement du fossé entre les générations estun phénomène récent. Quelque chose réduit la propension

Les jeunes et les élections

Figure 1Tendances de vote par groupe d'âge

1988 1993 1997 2000

Remarque : Le taux de participation électorale du groupe le plus âgé en 1988 sert de point de référence.Seules les personnes nées en 1970 ou plus tôt étaient admissibles au vote en 1988; c'est pourquoi la courbede la nouvelle génération commence en 1993.

Source : Études sur les élections canadiennes de 1988, 1993, 1997 et 2000

Nés depuis 1970Nés dans les années 1960Nés entre 1945 et 1959Nés avant 1945

0 %

–5 %

–10 %

–15 %

–20 %

–25 %

–30 %

–35 %

1. André Blais et coll., Anatomy of a LiberalVictory: Making Sense of the 2000 CanadianElection, Peterborough (Ontario),Broadview Press, 2002, p. 45-63.

2. Le rapport « Nouveau sondage auprès denon-votants pour expliquer le déclin de laparticipation électorale aux élections fédéralescanadiennes », effectué par le Centre derecherche Décima, peut être consulté enentier à www.elections.ca, sous la rubriqueLois et politiques électorales. Pour obtenir desprécisions techniques, communiquer avec leCentre de recherche Décima ou ÉlectionsCanada.

3. Nous avons employé dans le calcul dutableau une pondération corrective pourrétablir les proportions totales de votantset de non-votants dans l’échantillon. On aattribué une pondération de 1 pour chaquenon-votant de l’échantillon et de 0,34 pourchaque votant afin de simuler un échantillonde 2 467 répondants et un taux de votede 61,3 %.

4. Les cohortes figurant au tableau 1 sontformées selon l’élection au cours de laquelleles répondants sont devenus admissibles auvote pour la première fois. Par exemple,pour avoir eu qualité d’électeur à l’électiongénérale de 1988, un répondant devaitavoir au moins 30 ans en 2000.

5. Une analyse des études sur les électionscanadiennes au cours des 30 dernièresannées, qui a également été menée par lesauteurs pour le compte d’Élections Canada,montre clairement que chaque générationsuccessive de personnes obtenant la qualitéd’électeur comptait un taux de participationplus bas et commençait à prendre part auxélections à un âge moyen plus avancé.Jon H. Pammett et coll., La participationélectorale au Canada dans une perspectivecomparée, rapport non publié rédigé pourÉlections Canada, 2001, p. 71-74, 78-79.

6. Dans les tableaux 2, 3 et 4, les totaux dechaque catégorie doivent être considéréscomme approximatifs puisque les répondantspouvaient donner plus d’une réponse parcatégorie.

7. La question était la suivante : « De façongénérale, dans quelle mesure êtes-vous satis-fait du système électoral fédéral canadien? »Parmi l’ensemble des répondants, 28 %ont déclaré être « très satisfaits », alors que50 % ont déclaré être « assez satisfaits ».

8. La question sur le système de représentationproportionnelle était la suivante : « Dansquelle mesure seriez-vous d’accord à ce qu’untel système d’élections fédérales soit intro-duit au Canada? » Parmi les répondants,22 % ont indiqué être « entièrementd’accord » et 44 % ont indiqué être« passablement d’accord ». Les différencesd’opinion entre les groupes d’âge sur cettequestion étaient négligeables.

9. La majorité des répondants au sondage ontdéclaré qu’ils étaient « très susceptibles »ou « assez susceptibles » d’opter eux-mêmespour le vote par Internet. La proportion desréponses positives était plus élevée chez lesrépondants jeunes, mieux instruits, à revenuplus élevé et résidant en milieu urbain, ainsique chez les répondants n’ayant pas votéen 2000.

répercussions sur les types d’enjeuxsoulevés dans l’arène politique, lestypes de candidats qui se présententaux élections, les positions des partisainsi que le fonctionnement même dela démocratie. Ce problème ne sera pasfacile à résoudre et il mérite qu’on s’yattarde. La piste de solution est claire :faciliter le vote et le rendre plus signi-ficatif pour les nouveaux électeurs;accentuer la pertinence de la politiquepour les jeunes; fournir à ceux-ci lesoutils dont ils ont besoin pour com-prendre l’importance de la politiquedans leur vie; et leur faire prendre partau processus politique de façon plus

directe. Si l’on n’apporte aucunchangement profond à la conduite dela politique au Canada, ces objectifspourraient rester hors d’atteinte encorelongtemps.

NOTES

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Juillet 2003 98 Perspectives électorales

La politique électorale où sont passés les jeunes?

Elisabeth Gidengil Neil Nevitte Professeur, Département de science politique Professeur, Département de science politiqueUniversité McGill Université de Toronto

André Blais Richard NadeauProfesseur, Département de science politique Professeur, Département de science politiqueUniversité de Montréal Université de Montréal

Un nombre sans précédent de jeunes Canadiens tournentle dos à la politique électorale. Les optimistes veulent croirequ’ils optent pour d’autres formes d’engagement politique,notamment en raison du fait que de nos jours, plus dejeunes Canadiens ont une formation universitaire que lesgénérations de leurs parents et de leurs grands-parents.Cette supposition est d’ailleurs renforcéepar les médias qui diffusent des images dejeunes protestant contre la mondialisationou la guerre en Iraq. Selon cet argument,la nouvelle génération de jeunes Canadienstrès instruits est insatisfaite de la politiqueélectorale traditionnelle et préfère desformes plus autonomes d’action politique.Cependant, comme le démontre le présentarticle, cette perception optimiste de lasituation ne résiste pas nécessairement àl’examen des faits.

Un fossé qui s’élargit

Ce n’est pas d’hier que les taux de partici-pation électorale des jeunes sont faibles.D’après les études détaillées de la partici-pation aux élections fédérales depuis1968, la propension au vote augmentegénéralement de sept ou huit pointsentre 20 et 30 ans, et d’environ 15 pointsentre 20 et 50 ans1. Les jeunes ont moinstendance à voter justement parce qu’ilssont jeunes. La plupart d’entre eux ne se

soucient pas particulièrement de l’impôt, des taux hypothé-caires ou de l’accès aux services; le débat politique qui entoureces questions peut leur paraître lointain et abstrait.

Par contre, l’élargissement du fossé entre les générations estun phénomène récent. Quelque chose réduit la propension

Les jeunes et les élections

Figure 1Tendances de vote par groupe d'âge

1988 1993 1997 2000

Remarque : Le taux de participation électorale du groupe le plus âgé en 1988 sert de point de référence.Seules les personnes nées en 1970 ou plus tôt étaient admissibles au vote en 1988; c'est pourquoi la courbede la nouvelle génération commence en 1993.

Source : Études sur les élections canadiennes de 1988, 1993, 1997 et 2000

Nés depuis 1970Nés dans les années 1960Nés entre 1945 et 1959Nés avant 1945

0 %

–5 %

–10 %

–15 %

–20 %

–25 %

–30 %

–35 %

1. André Blais et coll., Anatomy of a LiberalVictory: Making Sense of the 2000 CanadianElection, Peterborough (Ontario),Broadview Press, 2002, p. 45-63.

2. Le rapport « Nouveau sondage auprès denon-votants pour expliquer le déclin de laparticipation électorale aux élections fédéralescanadiennes », effectué par le Centre derecherche Décima, peut être consulté enentier à www.elections.ca, sous la rubriqueLois et politiques électorales. Pour obtenir desprécisions techniques, communiquer avec leCentre de recherche Décima ou ÉlectionsCanada.

3. Nous avons employé dans le calcul dutableau une pondération corrective pourrétablir les proportions totales de votantset de non-votants dans l’échantillon. On aattribué une pondération de 1 pour chaquenon-votant de l’échantillon et de 0,34 pourchaque votant afin de simuler un échantillonde 2 467 répondants et un taux de votede 61,3 %.

4. Les cohortes figurant au tableau 1 sontformées selon l’élection au cours de laquelleles répondants sont devenus admissibles auvote pour la première fois. Par exemple,pour avoir eu qualité d’électeur à l’électiongénérale de 1988, un répondant devaitavoir au moins 30 ans en 2000.

5. Une analyse des études sur les électionscanadiennes au cours des 30 dernièresannées, qui a également été menée par lesauteurs pour le compte d’Élections Canada,montre clairement que chaque générationsuccessive de personnes obtenant la qualitéd’électeur comptait un taux de participationplus bas et commençait à prendre part auxélections à un âge moyen plus avancé.Jon H. Pammett et coll., La participationélectorale au Canada dans une perspectivecomparée, rapport non publié rédigé pourÉlections Canada, 2001, p. 71-74, 78-79.

6. Dans les tableaux 2, 3 et 4, les totaux dechaque catégorie doivent être considéréscomme approximatifs puisque les répondantspouvaient donner plus d’une réponse parcatégorie.

7. La question était la suivante : « De façongénérale, dans quelle mesure êtes-vous satis-fait du système électoral fédéral canadien? »Parmi l’ensemble des répondants, 28 %ont déclaré être « très satisfaits », alors que50 % ont déclaré être « assez satisfaits ».

8. La question sur le système de représentationproportionnelle était la suivante : « Dansquelle mesure seriez-vous d’accord à ce qu’untel système d’élections fédérales soit intro-duit au Canada? » Parmi les répondants,22 % ont indiqué être « entièrementd’accord » et 44 % ont indiqué être« passablement d’accord ». Les différencesd’opinion entre les groupes d’âge sur cettequestion étaient négligeables.

9. La majorité des répondants au sondage ontdéclaré qu’ils étaient « très susceptibles »ou « assez susceptibles » d’opter eux-mêmespour le vote par Internet. La proportion desréponses positives était plus élevée chez lesrépondants jeunes, mieux instruits, à revenuplus élevé et résidant en milieu urbain, ainsique chez les répondants n’ayant pas votéen 2000.

répercussions sur les types d’enjeuxsoulevés dans l’arène politique, lestypes de candidats qui se présententaux élections, les positions des partisainsi que le fonctionnement même dela démocratie. Ce problème ne sera pasfacile à résoudre et il mérite qu’on s’yattarde. La piste de solution est claire :faciliter le vote et le rendre plus signi-ficatif pour les nouveaux électeurs;accentuer la pertinence de la politiquepour les jeunes; fournir à ceux-ci lesoutils dont ils ont besoin pour com-prendre l’importance de la politiquedans leur vie; et leur faire prendre partau processus politique de façon plus

directe. Si l’on n’apporte aucunchangement profond à la conduite dela politique au Canada, ces objectifspourraient rester hors d’atteinte encorelongtemps.

NOTES

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Juillet 2003 1110 Perspectives électorales

face à la politique n’est pas un très bonindicateur du manque de participationélectorale. Nombreux sont ceux quivont exprimer leur frustration envotant contre le parti au pouvoir3.

Le problème n’est pas tant l’insatisfac-tion des jeunes Canadiens que leurdésaffection. En général, ils s’intéressentà la politique et savent ce qui s’y passebeaucoup moins que leurs aînés. L’intérêtpour la politique et les connaissancesen politique sont deux des meilleursindicateurs permettant de déterminerqui va voter et qui va s’abstenir. Si lesjeunes Canadiens connaissaient lapolitique et s’y intéressaient autant queles Canadiens plus âgés, le taux de leurparticipation à l’élection fédérale de2000 aurait été de 14 points plus élevé.

Parmi les jeunes Canadiens qui ontparticipé à un sondage immédiatementaprès l’élection fédérale de 2000, prèsd’un répondant sur cinq ne savait pasque Jean Chrétien était chef du Partilibéral et un répondant sur deux, queJoe Clark était chef du Parti progressiste-conservateur (voir la figure 3). Lessceptiques pourront répliquer que cetest de connaissances défavorise lesjeunes : étant donné la longue présencede ces deux hommes en politique

fédérale, les Canadiens plus âgés ontsimplement eu plus de temps pour lesconnaître. Toutefois, les répondantsplus jeunes étaient aussi beaucoupmoins susceptibles de connaître le nomdes nouveaux chefs de partis : un jeunesur trois ne savait pas que Stockwell Dayétait chef de l’Alliance canadienne, et

plus de la moitiéne savait pasqu’AlexaMcDonoughétait chef duNouveau PartiDémocratique. Cesquestions ne sontpas sans impor-tance. Après tout,le chef du parti quiremporte uneélection devientpremier ministredu Canada. Enoutre, seulementdeux répondantssur cinq ont punommer le ministredes Finances

fédéral et seulement deux sur troisont pu nommer leur premier ministreprovincial. Les jeunes Canadiens avaientencore moins de connaissances queleurs aînés sur les positions des partis.Seulement un répondant sur quatre arépondu que l’Alliance canadienne étaitun parti de droite, et une proportionencore plus faible situait le NPD àgauche. L’unique question de fait àlaquelle les jeunes Canadiens ont aussibien répondu que les groupes plus âgésconsistait à nommer la capitale desÉtats-Unis.

Selon le scénario des optimistes,cependant, ces faibles connaissancesseraient prévisibles si les jeunesCanadiens se désintéressent de lapolitique électorale traditionnelle. Sibeaucoup d’entre eux trouvent que lapolitique électorale ne répond pas àleurs vraies préoccupations, il n’estguère surprenant qu’ils en sachent aussipeu à ce sujet. Mais si ce raisonnementétait exact, les jeunes Canadiensdevraient en savoir beaucoup plus surles enjeux qui semblent les intéresser,

Figure 3Connaissance des chefs de partis et des autrespersonnalités politiques

0 % 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 %100 %

Source : Étude sur l'élection canadienne de 2000

Nés depuis 1970Nés dans les années 1960Nés entre 1945 et 1959Nés avant 1945

Chef duParti libéral

Chef du BlocQuébécois(Québec)

Chef del’Alliance

canadienne

Chef du Partiprogressiste-conservateur

Chef duNouveau PartiDémocratique

Ministre desFinances fédéral

Premierministre

provincial

Les chefs de cinq partis politiques ont pris part à des débats télévisés(en anglais et en français) durant l’élection générale de 2000 :(de gauche à droite) Jean Chrétien (Libéral), Gilles Duceppe(Bloc Québécois), Joe Clark (Progressiste-Conservateur), AlexaMcDonough (N.P.D.) et Stockwell Day (Alliance Canadienne).

Phot

o : C

P Im

age

s

à voter des jeunes Canadiens de lanouvelle génération par rapport àcelle de leurs parents et de leursgrands-parents lorsqu’ils étaient dansla vingtaine. La participation électoraleà cet âge était supérieure de 10 pointschez les personnes nées dans les années1960 et de 20 points chez les enfantsdu baby-boom. Lorsque l’on compareles tendances de vote des différentesgénérations, le résultat est frappant(voir la figure 1). Le taux de participa-tion électorale est resté plus ou moinsstable chez les trois générations plusâgées; seule la nouvelle générationaffiche une baisse. Cela veut dire quele déclin de la participation électoraledepuis 1988 est en grande partieattribuable au renouvellement de lapopulation. Si les quatre générationsavaient représenté les mêmes propor-tions de l’électorat en 2000 qu’en 1988,la participation à l’élection fédérale de2000 aurait été de 10 points plus élevée.

Le mythe de l’instruction

Le déclin de la participation électoralechez la nouvelle génération est décon-certant puisqu’il survient à une période

où un nombre record de jeunesCanadiens entreprennent des étudespostsecondaires. Si davantage de jeunesse dirigent vers l’université, pourquoisont-ils moins nombreux à voter queleurs parents ou leurs grands-parents?La première réponse qui vient à l’espritrepose justement sur leur instructionplus poussée. On a avancé l’hypothèseque ces jeunes Canadiens tournent ledos à la politique électorale en quêtede formes plus actives d’engagementpolitique. Parce qu’ils sont plus instruits,ils cherchent un moyen d’expressionplus significatif qu’un vote occasionnel.

Cependant, il est faux de supposer quece sont les jeunes très instruits quin’exercent pas leur droit de vote.Bien au contraire, plus un jeune estinstruit, plus il aura tendance à voter.Le niveau d’instruction demeure lemeilleur indicateur prévisionnel duvote parce que les études développentles aptitudes cognitives nécessairespour comprendre les subtilités de lapolitique et qu’elles semblent favoriserdes normes d’engagement civique.L’instruction est un facteur déterminantdans le choix des jeunes Canadiensde voter ou de s’abstenir. L’Étude surl’élection canadienne 2000 révèle que laparticipation électorale chez la nouvellegénération était supérieure de près de50 points chez les diplômés d’uneuniversité que chez les jeunes n’ayantpas obtenu leur diplôme d’étudessecondaires2. En outre, le déclin de laparticipation se limite aux jeunes quin’ont pas fait d’études universitaires.Depuis l’élection générale de 1993, laparticipation a diminué de plus de30 points parmi les jeunes sans diplômed’études secondaires et de 15 points ouplus parmi les jeunes qui ont terminédes études secondaires ou fait des étudescollégiales (voir la figure 2). Par contre,la participation des diplômés universi-taires est restée stable.

Moins on en sait, moins onveut en savoir

Une deuxième fausse croyance est queles jeunes Canadiens sont démoraliséspar la politique électorale traditionnelle.Il est vrai qu’ils sont insatisfaits de lapolitique et des politiciens. Trois surcinq pensent que le gouvernement nese soucie pas de l’opinion des jeunescomme eux et deux sur cinq pensent queles partis politiques tiennent rarementleurs promesses. L’insatisfaction desjeunes n’est toutefois pas plus marquéeque celle des Canadiens plus âgés. Enréalité, les jeunes sont même un peumoins désabusés de la politique queleurs parents et leurs grands-parents.Quoi qu’il en soit, le mécontentement

Phot

o : G

etty

Im

age

s

Figure 2Tendances de vote chez les jeunes Canadiens

1993 1997 2000

Remarque : La participation en 1993 des jeunes ayant fait des études collégiales sert de point de référence.

Source : Études sur les élections canadiennes de 1993, 1997 et 2000

UniversitéCollègeSecondaireDécrochage

0 %

–10 %

–20 %

–30 %

–40 %

–50 %

–60 %

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Juillet 2003 1110 Perspectives électorales

face à la politique n’est pas un très bonindicateur du manque de participationélectorale. Nombreux sont ceux quivont exprimer leur frustration envotant contre le parti au pouvoir3.

Le problème n’est pas tant l’insatisfac-tion des jeunes Canadiens que leurdésaffection. En général, ils s’intéressentà la politique et savent ce qui s’y passebeaucoup moins que leurs aînés. L’intérêtpour la politique et les connaissancesen politique sont deux des meilleursindicateurs permettant de déterminerqui va voter et qui va s’abstenir. Si lesjeunes Canadiens connaissaient lapolitique et s’y intéressaient autant queles Canadiens plus âgés, le taux de leurparticipation à l’élection fédérale de2000 aurait été de 14 points plus élevé.

Parmi les jeunes Canadiens qui ontparticipé à un sondage immédiatementaprès l’élection fédérale de 2000, prèsd’un répondant sur cinq ne savait pasque Jean Chrétien était chef du Partilibéral et un répondant sur deux, queJoe Clark était chef du Parti progressiste-conservateur (voir la figure 3). Lessceptiques pourront répliquer que cetest de connaissances défavorise lesjeunes : étant donné la longue présencede ces deux hommes en politique

fédérale, les Canadiens plus âgés ontsimplement eu plus de temps pour lesconnaître. Toutefois, les répondantsplus jeunes étaient aussi beaucoupmoins susceptibles de connaître le nomdes nouveaux chefs de partis : un jeunesur trois ne savait pas que Stockwell Dayétait chef de l’Alliance canadienne, et

plus de la moitiéne savait pasqu’AlexaMcDonoughétait chef duNouveau PartiDémocratique. Cesquestions ne sontpas sans impor-tance. Après tout,le chef du parti quiremporte uneélection devientpremier ministredu Canada. Enoutre, seulementdeux répondantssur cinq ont punommer le ministredes Finances

fédéral et seulement deux sur troisont pu nommer leur premier ministreprovincial. Les jeunes Canadiens avaientencore moins de connaissances queleurs aînés sur les positions des partis.Seulement un répondant sur quatre arépondu que l’Alliance canadienne étaitun parti de droite, et une proportionencore plus faible situait le NPD àgauche. L’unique question de fait àlaquelle les jeunes Canadiens ont aussibien répondu que les groupes plus âgésconsistait à nommer la capitale desÉtats-Unis.

Selon le scénario des optimistes,cependant, ces faibles connaissancesseraient prévisibles si les jeunesCanadiens se désintéressent de lapolitique électorale traditionnelle. Sibeaucoup d’entre eux trouvent que lapolitique électorale ne répond pas àleurs vraies préoccupations, il n’estguère surprenant qu’ils en sachent aussipeu à ce sujet. Mais si ce raisonnementétait exact, les jeunes Canadiensdevraient en savoir beaucoup plus surles enjeux qui semblent les intéresser,

Figure 3Connaissance des chefs de partis et des autrespersonnalités politiques

0 % 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 %100 %

Source : Étude sur l'élection canadienne de 2000

Nés depuis 1970Nés dans les années 1960Nés entre 1945 et 1959Nés avant 1945

Chef duParti libéral

Chef du BlocQuébécois(Québec)

Chef del’Alliance

canadienne

Chef du Partiprogressiste-conservateur

Chef duNouveau PartiDémocratique

Ministre desFinances fédéral

Premierministre

provincial

Les chefs de cinq partis politiques ont pris part à des débats télévisés(en anglais et en français) durant l’élection générale de 2000 :(de gauche à droite) Jean Chrétien (Libéral), Gilles Duceppe(Bloc Québécois), Joe Clark (Progressiste-Conservateur), AlexaMcDonough (N.P.D.) et Stockwell Day (Alliance Canadienne).

Phot

o : C

P Im

age

s

à voter des jeunes Canadiens de lanouvelle génération par rapport àcelle de leurs parents et de leursgrands-parents lorsqu’ils étaient dansla vingtaine. La participation électoraleà cet âge était supérieure de 10 pointschez les personnes nées dans les années1960 et de 20 points chez les enfantsdu baby-boom. Lorsque l’on compareles tendances de vote des différentesgénérations, le résultat est frappant(voir la figure 1). Le taux de participa-tion électorale est resté plus ou moinsstable chez les trois générations plusâgées; seule la nouvelle générationaffiche une baisse. Cela veut dire quele déclin de la participation électoraledepuis 1988 est en grande partieattribuable au renouvellement de lapopulation. Si les quatre générationsavaient représenté les mêmes propor-tions de l’électorat en 2000 qu’en 1988,la participation à l’élection fédérale de2000 aurait été de 10 points plus élevée.

Le mythe de l’instruction

Le déclin de la participation électoralechez la nouvelle génération est décon-certant puisqu’il survient à une période

où un nombre record de jeunesCanadiens entreprennent des étudespostsecondaires. Si davantage de jeunesse dirigent vers l’université, pourquoisont-ils moins nombreux à voter queleurs parents ou leurs grands-parents?La première réponse qui vient à l’espritrepose justement sur leur instructionplus poussée. On a avancé l’hypothèseque ces jeunes Canadiens tournent ledos à la politique électorale en quêtede formes plus actives d’engagementpolitique. Parce qu’ils sont plus instruits,ils cherchent un moyen d’expressionplus significatif qu’un vote occasionnel.

Cependant, il est faux de supposer quece sont les jeunes très instruits quin’exercent pas leur droit de vote.Bien au contraire, plus un jeune estinstruit, plus il aura tendance à voter.Le niveau d’instruction demeure lemeilleur indicateur prévisionnel duvote parce que les études développentles aptitudes cognitives nécessairespour comprendre les subtilités de lapolitique et qu’elles semblent favoriserdes normes d’engagement civique.L’instruction est un facteur déterminantdans le choix des jeunes Canadiensde voter ou de s’abstenir. L’Étude surl’élection canadienne 2000 révèle que laparticipation électorale chez la nouvellegénération était supérieure de près de50 points chez les diplômés d’uneuniversité que chez les jeunes n’ayantpas obtenu leur diplôme d’étudessecondaires2. En outre, le déclin de laparticipation se limite aux jeunes quin’ont pas fait d’études universitaires.Depuis l’élection générale de 1993, laparticipation a diminué de plus de30 points parmi les jeunes sans diplômed’études secondaires et de 15 points ouplus parmi les jeunes qui ont terminédes études secondaires ou fait des étudescollégiales (voir la figure 2). Par contre,la participation des diplômés universi-taires est restée stable.

Moins on en sait, moins onveut en savoir

Une deuxième fausse croyance est queles jeunes Canadiens sont démoraliséspar la politique électorale traditionnelle.Il est vrai qu’ils sont insatisfaits de lapolitique et des politiciens. Trois surcinq pensent que le gouvernement nese soucie pas de l’opinion des jeunescomme eux et deux sur cinq pensent queles partis politiques tiennent rarementleurs promesses. L’insatisfaction desjeunes n’est toutefois pas plus marquéeque celle des Canadiens plus âgés. Enréalité, les jeunes sont même un peumoins désabusés de la politique queleurs parents et leurs grands-parents.Quoi qu’il en soit, le mécontentement

Phot

o : G

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Im

age

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Figure 2Tendances de vote chez les jeunes Canadiens

1993 1997 2000

Remarque : La participation en 1993 des jeunes ayant fait des études collégiales sert de point de référence.

Source : Études sur les élections canadiennes de 1993, 1997 et 2000

UniversitéCollègeSecondaireDécrochage

0 %

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–20 %

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–50 %

–60 %

Page 14: 11940 EC Insight Vol5 no2 fv8 - Elections in Canada · en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni 31 L’art de vendre la participation électorale à la génération MusiquePlus

Juillet 2003 1312 Perspectives électorales

Canadiens sont les plus susceptibles dechercher de l’information en ligne surla politique. Cependant, les chiffres nesont pas très impressionnants. Aumoment de l’élection fédérale de 2000,moins du quart des jeunes Canadiensdéclaraient avoir utilisé Internet aumoins une fois pour trouver des ren-seignements de nature politique.L’instruction avait un lien évident :plus les jeunes étaient instruits, plus ilsétaient susceptibles d’utiliser Internet àcette fin (voir la figure 4). Près dedeux diplômés universitaires sur cinqavaient fait des recherches en ligne surla politique, comparativement à undiplômé du secondaire sur dix. Encoreplus pertinent, les jeunes qui avaientutilisé Internet pour trouver desrenseignements de nature politiqueétaient aussi les plus susceptibles desuivre l’évolution de la politique parles médias traditionnels. Ces utilisa-teurs d’Internet ont obtenu en moyennedeux points de plus que les autres (surune échelle de 0 à 10) en ce qui a traitau degré d’attention qu’ils portaientaux nouvelles diffusées à la télévisionet dans les journaux.

Comment encourager lesjeunes Canadiens à voter?

La clé pour encourager les jeunesCanadiens à s’investir dans la politiqueconsiste d’abord à les y intéresser.L’engagement politique présuppose unintérêt pour la politique : si les jeunesCanadiens ne s’y intéressent pas, ils neperdront ni temps, ni énergie à se tenirau courant des affaires publiques, etencore moins à s’engager dans la viedémocratique du pays. Nous devonscependant reconnaître que la questionde l’intérêt se pose dans les deux sens.Par exemple, les travailleurs de cam-pagne électorale et les candidats quirencontrent les électeurs à domiciledémontrent un intérêt tangible enversles électeurs; les personnes ayant déclaréavoir été contactées par au moins unparti durant la campagne de 2000étaient plus susceptibles de voter. Les

jeunes Canadiens n’échappaient pas àcette règle, mais ils ont été les moinsnombreux à déclarer avoir été contac-tés. Ces chiffres suggèrent qu’un effort

concerté des partis politiques pour fairesortir le vote pourrait aider à arrêter ledéclin de la participation électoralechez les jeunes. Une récente étudeaux États-Unis montre l’importanced’amener les jeunes citoyens à voterune première fois : une fois le « seuil »franchi, les jeunes ont tendance àcontinuer de voter6.

À plus long terme, la mesure la plusimportante consisterait à trouver desmoyens d’inciter les jeunes à poursuivreleurs études. Plus un jeune est instruit,plus il s’intéresse à la politique et plusil aura tendance à voter, à se joindre à

des groupes axés sur le changement età participer à la vie de sa collectivité.Les taux de décrochage au Canada nesont peut-être pas disproportionnés

par rapport à ceuxdes autres pays del’OCDE, mais leniveau d’alphabétisa-tion des décrocheurscanadiens est souventtrès bas par rapportà celui de ces autres

pays puisque les Canadiens décrochentgénéralement beaucoup plus jeunes deleurs études secondaires7.

L’instruction ne fournit pas seulementaux citoyens les aptitudes cognitivesnécessaires à l’engagement actif; ellesemble aussi leur inculquer un sensdu devoir civique. C’est là un desplus puissants stimulants à voter8.Cependant, ce sentiment semblediminuer : moins d’un jeune Canadiensur cinq a exprimé un fort sens dudevoir de voter à l’élection de 2000,comparativement à un Canadien surtrois nés avant 1945.

La clé pour encourager les jeunesCanadiens à s’investir dans la politiqueconsiste d’abord à les y intéresser.

Figure 4Recherche d'information en ligne sur la politique par lesjeunes Canadiens(% ayant déjà utilisé Internet à cette fin)

Université Collège Secondaire Décrochage

Source : Étude sur l'élection canadienne de 2000

45 %

40 %

35 %

30 %

25 %

20 %

15 %

10 %

5 %

0 %

alors que ce n’est pas le cas. L’imaged’une manifestation de jeunes Canadiensà un sommet économique donne àpenser que la mondialisation estexactement le type d’enjeu qui leurtient à cœur. En réalité, les jeunes nesemblent pas en connaître davantagesur cette question. Selon un sondageeffectué en mars 2001 pour le Centrede recherche et d’information sur leCanada, à peine 57 % des Canadiensnés depuis 1970 avaient entendu parlerde la mondialisation, 53 % étaient aucourant des manifestations contrel’Organisation mondiale du commerceorganisées l’année précédente à Seattleet 40 % avaient entendu parler duSommet des Amériques qui allait avoirlieu dans la ville de Québec4. Pour cestrois questions, le degré de sensibilisa-tion était le plus faible chez les jeunes.

Qui sont les activistes?

La troisième fausse croyance est que lesjeunes Canadiens qui abandonnent lapolitique électorale s’impliquent d’uneautre manière. En fait, selon l’Étudesur l’élection canadienne 2000, lesjeunes Canadiens étaient les moinsnombreux à avoir fait partie d’uneassociation bénévole ou d’un groupecommunautaire au cours des cinqannées précédentes. Dans 40 % descas, les associations auxquelles les

jeunes Canadiens adhéraient étaientdes associations sportives. Si les jeunesCanadiens se tournaient vraiment versd’autres formes d’engagement plus per-tinentes, on devrait voir un plus grandnombre d’adhésions à des groupesenvironnementalistes. En effet, l’envi-ronnement est un sujet important pourles jeunes qui n’est cependant pas unepriorité dans le programme politiquedu pays. La participation aux activitésd’un groupe environnementalistesemble pourtant représenter un moyenplus efficace d’améliorer la situation.Toutefois, les jeunes Canadiens nesont pas plus susceptibles (9 %) quel’ensemble des Canadiens d’avoir étémembres d’un groupe environnemen-taliste. Voilà qui remet en questionl’hypothèse optimiste selon laquelle ledéclin de la participation à la politiqueélectorale traditionnelle est contre-balancé par une participation plusengagée à des activités populaires.

Le même scénario s’applique à la par-ticipation aux activités de protestation.Souvent, les activistes sont en fait despersonnes d’âge mûr, ici comme àl’étranger5. Les jeunes sont les Canadiensles moins susceptibles d’avoir fait cegenre d’activité; plus d’un jeune sur cinqn’a jamais participé à une protestationquelle qu’elle soit, ne serait-ce qu’unepétition ou un boycottage. Bien sûr, il

existe un noyau de jeunes qui cherchentà faire bouger les choses en participantà des activités de protestation. En effet,cette génération arrive en seconde placederrière celle du baby-boom quant àl’engagement dans trois différentesactivités de protestation ou plus.Cependant, loin de tourner le dos auxmoyens plus conventionnels de se faireentendre, ces activistes sont plus nom-breux que les autres jeunes de leur âgeà être membre d’un parti politique oud’un groupe d’intérêt, et à voter.

Il n’est pas vraiment surprenant queplusieurs des jeunes qui ne votent pasne s’engagent pas non plus dans desmouvements populaires ou activitésde protestation. L’engagement supposeun certain degré de connaissance del’actualité mondiale. Les gens quin’accordent pas un minimum d’atten-tion aux nouvelles peuvent demeurerinconscients de sujets tels que lamondialisation et l’environnement.

Le mythe de la politiqueen ligne

Cela nous amène à la dernière faussecroyance, selon laquelle Internet aideà compenser la tendance des jeunesCanadiens à se désintéresser de lapolitique. Il est vrai que les jeunes

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Des jeunes étaient parmi les manifestants au Sommet des Amériques de 2001, à Québec.

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Juillet 2003 1312 Perspectives électorales

Canadiens sont les plus susceptibles dechercher de l’information en ligne surla politique. Cependant, les chiffres nesont pas très impressionnants. Aumoment de l’élection fédérale de 2000,moins du quart des jeunes Canadiensdéclaraient avoir utilisé Internet aumoins une fois pour trouver des ren-seignements de nature politique.L’instruction avait un lien évident :plus les jeunes étaient instruits, plus ilsétaient susceptibles d’utiliser Internet àcette fin (voir la figure 4). Près dedeux diplômés universitaires sur cinqavaient fait des recherches en ligne surla politique, comparativement à undiplômé du secondaire sur dix. Encoreplus pertinent, les jeunes qui avaientutilisé Internet pour trouver desrenseignements de nature politiqueétaient aussi les plus susceptibles desuivre l’évolution de la politique parles médias traditionnels. Ces utilisa-teurs d’Internet ont obtenu en moyennedeux points de plus que les autres (surune échelle de 0 à 10) en ce qui a traitau degré d’attention qu’ils portaientaux nouvelles diffusées à la télévisionet dans les journaux.

Comment encourager lesjeunes Canadiens à voter?

La clé pour encourager les jeunesCanadiens à s’investir dans la politiqueconsiste d’abord à les y intéresser.L’engagement politique présuppose unintérêt pour la politique : si les jeunesCanadiens ne s’y intéressent pas, ils neperdront ni temps, ni énergie à se tenirau courant des affaires publiques, etencore moins à s’engager dans la viedémocratique du pays. Nous devonscependant reconnaître que la questionde l’intérêt se pose dans les deux sens.Par exemple, les travailleurs de cam-pagne électorale et les candidats quirencontrent les électeurs à domiciledémontrent un intérêt tangible enversles électeurs; les personnes ayant déclaréavoir été contactées par au moins unparti durant la campagne de 2000étaient plus susceptibles de voter. Les

jeunes Canadiens n’échappaient pas àcette règle, mais ils ont été les moinsnombreux à déclarer avoir été contac-tés. Ces chiffres suggèrent qu’un effort

concerté des partis politiques pour fairesortir le vote pourrait aider à arrêter ledéclin de la participation électoralechez les jeunes. Une récente étudeaux États-Unis montre l’importanced’amener les jeunes citoyens à voterune première fois : une fois le « seuil »franchi, les jeunes ont tendance àcontinuer de voter6.

À plus long terme, la mesure la plusimportante consisterait à trouver desmoyens d’inciter les jeunes à poursuivreleurs études. Plus un jeune est instruit,plus il s’intéresse à la politique et plusil aura tendance à voter, à se joindre à

des groupes axés sur le changement età participer à la vie de sa collectivité.Les taux de décrochage au Canada nesont peut-être pas disproportionnés

par rapport à ceuxdes autres pays del’OCDE, mais leniveau d’alphabétisa-tion des décrocheurscanadiens est souventtrès bas par rapportà celui de ces autres

pays puisque les Canadiens décrochentgénéralement beaucoup plus jeunes deleurs études secondaires7.

L’instruction ne fournit pas seulementaux citoyens les aptitudes cognitivesnécessaires à l’engagement actif; ellesemble aussi leur inculquer un sensdu devoir civique. C’est là un desplus puissants stimulants à voter8.Cependant, ce sentiment semblediminuer : moins d’un jeune Canadiensur cinq a exprimé un fort sens dudevoir de voter à l’élection de 2000,comparativement à un Canadien surtrois nés avant 1945.

La clé pour encourager les jeunesCanadiens à s’investir dans la politiqueconsiste d’abord à les y intéresser.

Figure 4Recherche d'information en ligne sur la politique par lesjeunes Canadiens(% ayant déjà utilisé Internet à cette fin)

Université Collège Secondaire Décrochage

Source : Étude sur l'élection canadienne de 2000

45 %

40 %

35 %

30 %

25 %

20 %

15 %

10 %

5 %

0 %

alors que ce n’est pas le cas. L’imaged’une manifestation de jeunes Canadiensà un sommet économique donne àpenser que la mondialisation estexactement le type d’enjeu qui leurtient à cœur. En réalité, les jeunes nesemblent pas en connaître davantagesur cette question. Selon un sondageeffectué en mars 2001 pour le Centrede recherche et d’information sur leCanada, à peine 57 % des Canadiensnés depuis 1970 avaient entendu parlerde la mondialisation, 53 % étaient aucourant des manifestations contrel’Organisation mondiale du commerceorganisées l’année précédente à Seattleet 40 % avaient entendu parler duSommet des Amériques qui allait avoirlieu dans la ville de Québec4. Pour cestrois questions, le degré de sensibilisa-tion était le plus faible chez les jeunes.

Qui sont les activistes?

La troisième fausse croyance est que lesjeunes Canadiens qui abandonnent lapolitique électorale s’impliquent d’uneautre manière. En fait, selon l’Étudesur l’élection canadienne 2000, lesjeunes Canadiens étaient les moinsnombreux à avoir fait partie d’uneassociation bénévole ou d’un groupecommunautaire au cours des cinqannées précédentes. Dans 40 % descas, les associations auxquelles les

jeunes Canadiens adhéraient étaientdes associations sportives. Si les jeunesCanadiens se tournaient vraiment versd’autres formes d’engagement plus per-tinentes, on devrait voir un plus grandnombre d’adhésions à des groupesenvironnementalistes. En effet, l’envi-ronnement est un sujet important pourles jeunes qui n’est cependant pas unepriorité dans le programme politiquedu pays. La participation aux activitésd’un groupe environnementalistesemble pourtant représenter un moyenplus efficace d’améliorer la situation.Toutefois, les jeunes Canadiens nesont pas plus susceptibles (9 %) quel’ensemble des Canadiens d’avoir étémembres d’un groupe environnemen-taliste. Voilà qui remet en questionl’hypothèse optimiste selon laquelle ledéclin de la participation à la politiqueélectorale traditionnelle est contre-balancé par une participation plusengagée à des activités populaires.

Le même scénario s’applique à la par-ticipation aux activités de protestation.Souvent, les activistes sont en fait despersonnes d’âge mûr, ici comme àl’étranger5. Les jeunes sont les Canadiensles moins susceptibles d’avoir fait cegenre d’activité; plus d’un jeune sur cinqn’a jamais participé à une protestationquelle qu’elle soit, ne serait-ce qu’unepétition ou un boycottage. Bien sûr, il

existe un noyau de jeunes qui cherchentà faire bouger les choses en participantà des activités de protestation. En effet,cette génération arrive en seconde placederrière celle du baby-boom quant àl’engagement dans trois différentesactivités de protestation ou plus.Cependant, loin de tourner le dos auxmoyens plus conventionnels de se faireentendre, ces activistes sont plus nom-breux que les autres jeunes de leur âgeà être membre d’un parti politique oud’un groupe d’intérêt, et à voter.

Il n’est pas vraiment surprenant queplusieurs des jeunes qui ne votent pasne s’engagent pas non plus dans desmouvements populaires ou activitésde protestation. L’engagement supposeun certain degré de connaissance del’actualité mondiale. Les gens quin’accordent pas un minimum d’atten-tion aux nouvelles peuvent demeurerinconscients de sujets tels que lamondialisation et l’environnement.

Le mythe de la politiqueen ligne

Cela nous amène à la dernière faussecroyance, selon laquelle Internet aideà compenser la tendance des jeunesCanadiens à se désintéresser de lapolitique. Il est vrai que les jeunes

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Des jeunes étaient parmi les manifestants au Sommet des Amériques de 2001, à Québec.

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Juillet 2003 1514 Perspectives électorales

Sans aucun doute, les jeunes ne participent pas autant àla vie politique que les générations précédentes1. Cettetendance a d’importantes répercussions sur la politique eten aura dans l’avenir pour l’ensemble de la société et pourla génération des plus jeunes en particulier. Il est primor-dial d’examiner les causes de ce désintérêt et de proposerdes solutions pour y remédier. C’est justement ce que nousnous proposons de faire dans le présent article.

L’analyse d’un sondage mené par l’Institut de recherche enpolitiques publiques (IRPP) en 20002 révèle un écart de25 % dans le taux de participation à l’élection de 1997entre les jeunes de 18 à 27 ans et les électeurs de plus de57 ans (voir le tableau 1). En outre, la recherche laisseentendre que la baisse importante du taux de participationdes électeurs au Canada peut être largement attribuée auxjeunes. Selon Blais et ses collègues, le suivi des non-votantspour les trois dernières élections générales canadiennes(1993, 1997 et 2000) révèle que l’abstention a augmentéchez les personnes nées après 1970, et dans une proportionsignificative de 14 points3.

Les différences dans les attitudes politiques et la participationselon les groupes d’âge sont habituellement attribuables àdeux phénomènes distincts : les effets du cycle de vie et leseffets générationnels. Les premiers relèvent de la réalitéque la politique atteint une plus grande importance auxstades intermédiaires et ultérieurs de la vie, en raison d’unintérêt personnel (les décisions politiques prennent plusd’importance lorsque le risque associé au résultat augmente),ou en raison d’un sens accru de responsabilité envers lacollectivité. Les effets générationnels représentent deschangements entre les générations attribuables aux expé-riences communes et particulières que vivent les jeunes et

les jeunes adultes. Les expériences de formation ou laprésence ou l’absence d’une guerre, par exemple, peuventconduire à des attitudes et à des comportements uniqueschez ceux qui les vivent.

Le sondage de l’IRPP a révélé que les effets du cycle de viesont évidents dans les attitudes et les taux de participationdes Canadiens (voir le tableau 1). Si l’on compare le tauxde participation électorale de 1997 au taux de participationmesuré par un sondage de 1990, une tendance semblable sedégage : pour les deux périodes, les Canadiens plus jeunessont moins susceptibles de voter que les Canadiens plusâgés4. Mais la comparaison des résultats de 1990 à ceux de

Les jeunes et les élections

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Une étude réalisée par l’Institut de recherche en politiques publiquesen 2000 a révélé qu’à peine plus de 40 % des Canadiens de 18 à27 ans s’intéressent à la politique.

1. André Blais et coll., « The Evolving Natureof Non-Voting: Evidence from Canada »,European Journal of Political Research(prochain numéro). Pour plus de détailssur les sujets abordés dans cet article, voirAndré Blais et coll., Anatomy of a LiberalVictory: Making Sense of the 2000 CanadianElection, Peterborough (Ontario), BroadviewPress, 2002, chapitre 3, ainsi qu’ElisabethGidengil et coll., Democratic Citizenship inCanada, University of British ColumbiaPress, (à venir).

2. L’Étude sur l’élection canadienne 2000comprenait un sondage à volets multiplesauprès d’un échantillon représentatif de3 651 Canadiens pendant la périodeélectorale, un sondage postélectoral auprèsde 2 862 des répondants au sondage de lapériode électorale et un questionnaire àretourner par la poste rempli par 1 535 desrépondants au sondage postélectoral. Letaux de réponse au sondage de campagneétait de 62 %. Le sondage a été effectué parl’Institute for Social Research de l’UniversitéYork et par Jolicœur et Associés. Il a étéfinancé par le Conseil de recherches ensciences humaines du Canada, ainsi que parÉlections Canada et l’Institut de rechercheen politiques publiques.

3. Elisabeth Gidengil et coll., « The Correlatesand Consequences of Anti-Partyism in the1997 Canadian Election », Party Politics,vol. 7, no 4, 2001, p. 491-513.

4. Pour plus de détails, consulter le CanadianOpinion Research Archive (CORA) del’Université Queen’s sous la rubrique CROPPolitical Survey (mars 2001), CROP, Inc.,Montréal, Québec (CRIC0103). La sourcedes données recueillies, CORA, et lesorganismes ayant fourni un financement nesont aucunement responsables de l’utilisa-tion des données dans le présent article.Une analyse des résultats du sondage esteffectuée dans « Échanges commerciaux,mondialisation et valeurs canadiennes »,Les cahiers du CRIC, vol. 1, avril 2001,disponible à l’adresse suivante : www.cric.ca/pdf/cahiers/cahierscric_avril2001.pdf.

5. Pippa Norris, The Democratic Phoenix:Reinventing Political Activism, New York,Cambridge University Press, 2002.

6. Eric Plutzer, « Becoming a Habitual Voter:Inertia, Resources, and Growth in YoungAdulthood », American Political ScienceReview, vol. 96, 2002, p. 41-56.

7. Développement des ressources humainesCanada, Direction générale de la rechercheappliquée, Le décrochage scolaire : définitionet coûts, R-01-1F, Ottawa, Développementdes ressources humaines Canada, 2000.

8. André Blais, To Vote or Not to Vote: TheMerits and Limits of Rational Choice Theory,Pittsburgh, University of Pittsburgh Press,2000.

NOTES

L’origine de ce manque chez les jeunesCanadiens reste obscure, mais elle pour-rait bien être liée au fait qu’ils ontatteint la majorité à une période demécontentement croissant contre lapolitique. Ce sentiment était notammentdû à une attitude néo-conservatriceen faveur d’une diminution du pouvoirde l’État, à la perception que le gou-vernement ne pouvait rien contre lesforces économiques mondiales ainsiqu’à une série de crises constitution-nelles et d’accords non ratifiés. Tousces facteurs pourraient ensemble avoirproduit une génération décalée sedétachant souvent complètement dela politique. Mais la situation est en

train de changer. Le mécontentementpolitique a plafonné au milieu desannées 1990 et semble être en déclin.De plus, les préoccupations concernantla sécurité au pays et à l’étranger ontfait ressortir le rôle joué par l’État. Ilpourrait notamment en résulter unsentiment renouvelé de l’importancede la politique.

Examen du déclin de laparticipation électoralechez les jeunes du Canada

Brenda O’NeillProfesseure adjointe, Département des études politiques, Université du Manitoba

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Juillet 2003 1514 Perspectives électorales

Sans aucun doute, les jeunes ne participent pas autant àla vie politique que les générations précédentes1. Cettetendance a d’importantes répercussions sur la politique eten aura dans l’avenir pour l’ensemble de la société et pourla génération des plus jeunes en particulier. Il est primor-dial d’examiner les causes de ce désintérêt et de proposerdes solutions pour y remédier. C’est justement ce que nousnous proposons de faire dans le présent article.

L’analyse d’un sondage mené par l’Institut de recherche enpolitiques publiques (IRPP) en 20002 révèle un écart de25 % dans le taux de participation à l’élection de 1997entre les jeunes de 18 à 27 ans et les électeurs de plus de57 ans (voir le tableau 1). En outre, la recherche laisseentendre que la baisse importante du taux de participationdes électeurs au Canada peut être largement attribuée auxjeunes. Selon Blais et ses collègues, le suivi des non-votantspour les trois dernières élections générales canadiennes(1993, 1997 et 2000) révèle que l’abstention a augmentéchez les personnes nées après 1970, et dans une proportionsignificative de 14 points3.

Les différences dans les attitudes politiques et la participationselon les groupes d’âge sont habituellement attribuables àdeux phénomènes distincts : les effets du cycle de vie et leseffets générationnels. Les premiers relèvent de la réalitéque la politique atteint une plus grande importance auxstades intermédiaires et ultérieurs de la vie, en raison d’unintérêt personnel (les décisions politiques prennent plusd’importance lorsque le risque associé au résultat augmente),ou en raison d’un sens accru de responsabilité envers lacollectivité. Les effets générationnels représentent deschangements entre les générations attribuables aux expé-riences communes et particulières que vivent les jeunes et

les jeunes adultes. Les expériences de formation ou laprésence ou l’absence d’une guerre, par exemple, peuventconduire à des attitudes et à des comportements uniqueschez ceux qui les vivent.

Le sondage de l’IRPP a révélé que les effets du cycle de viesont évidents dans les attitudes et les taux de participationdes Canadiens (voir le tableau 1). Si l’on compare le tauxde participation électorale de 1997 au taux de participationmesuré par un sondage de 1990, une tendance semblable sedégage : pour les deux périodes, les Canadiens plus jeunessont moins susceptibles de voter que les Canadiens plusâgés4. Mais la comparaison des résultats de 1990 à ceux de

Les jeunes et les élections

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Une étude réalisée par l’Institut de recherche en politiques publiquesen 2000 a révélé qu’à peine plus de 40 % des Canadiens de 18 à27 ans s’intéressent à la politique.

1. André Blais et coll., « The Evolving Natureof Non-Voting: Evidence from Canada »,European Journal of Political Research(prochain numéro). Pour plus de détailssur les sujets abordés dans cet article, voirAndré Blais et coll., Anatomy of a LiberalVictory: Making Sense of the 2000 CanadianElection, Peterborough (Ontario), BroadviewPress, 2002, chapitre 3, ainsi qu’ElisabethGidengil et coll., Democratic Citizenship inCanada, University of British ColumbiaPress, (à venir).

2. L’Étude sur l’élection canadienne 2000comprenait un sondage à volets multiplesauprès d’un échantillon représentatif de3 651 Canadiens pendant la périodeélectorale, un sondage postélectoral auprèsde 2 862 des répondants au sondage de lapériode électorale et un questionnaire àretourner par la poste rempli par 1 535 desrépondants au sondage postélectoral. Letaux de réponse au sondage de campagneétait de 62 %. Le sondage a été effectué parl’Institute for Social Research de l’UniversitéYork et par Jolicœur et Associés. Il a étéfinancé par le Conseil de recherches ensciences humaines du Canada, ainsi que parÉlections Canada et l’Institut de rechercheen politiques publiques.

3. Elisabeth Gidengil et coll., « The Correlatesand Consequences of Anti-Partyism in the1997 Canadian Election », Party Politics,vol. 7, no 4, 2001, p. 491-513.

4. Pour plus de détails, consulter le CanadianOpinion Research Archive (CORA) del’Université Queen’s sous la rubrique CROPPolitical Survey (mars 2001), CROP, Inc.,Montréal, Québec (CRIC0103). La sourcedes données recueillies, CORA, et lesorganismes ayant fourni un financement nesont aucunement responsables de l’utilisa-tion des données dans le présent article.Une analyse des résultats du sondage esteffectuée dans « Échanges commerciaux,mondialisation et valeurs canadiennes »,Les cahiers du CRIC, vol. 1, avril 2001,disponible à l’adresse suivante : www.cric.ca/pdf/cahiers/cahierscric_avril2001.pdf.

5. Pippa Norris, The Democratic Phoenix:Reinventing Political Activism, New York,Cambridge University Press, 2002.

6. Eric Plutzer, « Becoming a Habitual Voter:Inertia, Resources, and Growth in YoungAdulthood », American Political ScienceReview, vol. 96, 2002, p. 41-56.

7. Développement des ressources humainesCanada, Direction générale de la rechercheappliquée, Le décrochage scolaire : définitionet coûts, R-01-1F, Ottawa, Développementdes ressources humaines Canada, 2000.

8. André Blais, To Vote or Not to Vote: TheMerits and Limits of Rational Choice Theory,Pittsburgh, University of Pittsburgh Press,2000.

NOTES

L’origine de ce manque chez les jeunesCanadiens reste obscure, mais elle pour-rait bien être liée au fait qu’ils ontatteint la majorité à une période demécontentement croissant contre lapolitique. Ce sentiment était notammentdû à une attitude néo-conservatriceen faveur d’une diminution du pouvoirde l’État, à la perception que le gou-vernement ne pouvait rien contre lesforces économiques mondiales ainsiqu’à une série de crises constitution-nelles et d’accords non ratifiés. Tousces facteurs pourraient ensemble avoirproduit une génération décalée sedétachant souvent complètement dela politique. Mais la situation est en

train de changer. Le mécontentementpolitique a plafonné au milieu desannées 1990 et semble être en déclin.De plus, les préoccupations concernantla sécurité au pays et à l’étranger ontfait ressortir le rôle joué par l’État. Ilpourrait notamment en résulter unsentiment renouvelé de l’importancede la politique.

Examen du déclin de laparticipation électoralechez les jeunes du Canada

Brenda O’NeillProfesseure adjointe, Département des études politiques, Université du Manitoba

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Juillet 2003 1716 Perspectives électorales

partie à l’attention limitée portée àcette question dans la recherchecanadienne8.

Les jeunes Canadiens sont égalementplus susceptibles de croire que le voten’est tout simplement pas important :seulement 75 % des répondants lesplus jeunes au sondage de l’IRPP ontindiqué que le vote est essentiel ou trèsimportant (tableau 2). Il est clair queces attitudes influent directement surla probabilité de la participation à lavie politique, mais on ne sait toujourspas pourquoi les générations précé-dentes avaient moins tendance àbanaliser les élections au même stadede la vie.

Pourtant, la participation politique,c’est plus que simplement voter. Laparticipation aux partis politiques aconnu une baisse semblable chez lesjeunes Canadiens, tendance qui estégalement susceptible de se poursuivreavec le temps. Seulement 2 % desrépondants âgés de 18 à 27 ans dansle sondage de l’IRPP de 2000 ontindiqué avoir été membres d’un partipolitique, une diminution de 8 % parrapport aux répondants du mêmegroupe d’âge du sondage de 19909. Ilest intéressant de noter que le rapportentre la participation à un grouped’intérêt et la participation à un partipolitique chez les jeunes Canadiens est

beaucoup plus élevé que pour les autresCanadiens. Chez les répondants de18 à 27 ans au sondage de l’IRPP, pourchaque répondant ayant indiqué avoirété membre d’un parti politique, 4,5 ontindiqué être membres d’un grouped’intérêt. Comparativement, le rapportentre membre d’un groupe d’intérêt etmembre d’un parti chez les répondantsde plus de 57 ans n’était que de 0,3 à 1.Ainsi, bien que le taux de participation

politique puisse être à la baisse chez lesjeunes Canadiens, il y a des raisons decroire que la politique partisane tradi-tionnelle a également été touchée.

Variation des taux departicipation électoralechez les jeunes

Un examen du taux de participationdéclaré dans l’ensemble des groupes

Tableau 3Variation des taux de participation électorale chez les jeunesCanadiens de 22 à 37 ans, 2000

% ayant voté à l’élection de 1997

Études

Études secondaires ou moins 60 (118)

Études postsecondaires 71 (322)

Sexe

Femmes 65 (241)

Hommes 71 (203)

Revenu du ménage

Moins de 30 000 $ 64 (91)

30 000 à 49 000 $ 74 (100)

50 000 à 79 000 $ 79 (95)

Plus de 80 000 $ 67 (90)

Intérêt politique

Suit la politique de très près ou d’assez près 81 (225)

Ne la suit pas de près ou ne la suit pas du tout 55 (214)

Connaissance de la politique

Peut identifier le premier ministre 72 (385)

Ne peut pas identifier le premier ministre 47 (58)

Cynisme politique : Les représentants élus au Parlement perdent vite contact avec la population

D’accord 69 (307)

En désaccord 72 (106)

Importance du vote

Essentiel 88 (153)

Très important 64 (207)

Un peu important ou pas du tout 44 (78)

Membre d’un groupe d’intérêt

Oui 82 (49)

Non 66 (395)

Moyen le plus efficace de travailler pour le changement

Se joindre à un parti politique 71 (79)

Se joindre à un groupe d’intérêt 70 (285)

Note : Les chiffres représentent le pourcentage des répondants; le nombre de répondants est indiqué entre

parenthèses. Les données proviennent du sondage de l’IRPP [Howe et Northrup, 2000 (voir la note 2)].

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s2000 révèle que les changementsgénérationnels sont forts et qu’un voteaccru chez les jeunes d’aujourd’hui nepermettra pas que le taux de participa-tion « rattrape » les taux enregistrésantérieurement au Canada5. Enmajeure partie, la baisse constatée surla période de 10 ans est attribuable autaux de participation inférieur chezceux qui sont devenus admissibles ausuffrage entre les deux sondages (de74 % en 1990 à 66 % en 2000) et àla chute du taux de participation dansla cohorte 1963-1972 (de 74 % en1990 à 69 % en 2000). Ainsi, leseffets générationnels dépassent leseffets du cycle de vie.

Explication du faible tauxde participation électoralechez les jeunes

La baisse du taux de participation chezles jeunes au Canada reflète la tendancedans d’autres démocraties évoluées6.Certains n’ont pas attendu pour con-clure que c’est symptomatique d’undegré de cynisme accru. Les jeunes duCanada ont décroché, insistent-ils,parce qu’ils ont peu confiance en ceuxà qui sont confiés les intérêts de lasociété. Des protestations très visibles,apparemment dominées par de jeunesactivistes, sembleraient appuyer unetelle conclusion. Mais bien que lesniveaux de cynisme politique aientaugmenté, une image plus exacte sedégage quand on y regarde de plus près.

Les jeunesdu Canada nesont pas pluscyniques queles autresCanadiensau sujet de ladémocratie etde la politiqueet, danscertains cas,ils sont de faitplus satisfaitsdu fonction-nement durégime poli-tique canadienque les membresdes générationsprécédentes. Tel qu’illustré dans letableau 2, lorsqu’on leur demande siles représentants élus « perdent vitecontact avec la population », lesCanadiens plus jeunes ne se révèlentpas les plus cyniques parmi lesCanadiens. De plus, si on leur demandejusqu’à quel point ils sont satisfaitsdes élections, le groupe d’âge le plusjeune montre le degré de satisfactionle plus élevé de tous les groupes d’âge,soit 81 %7.

Les différences entre les groupes d’âgesont apparentes, mais quant à l’intérêtpolitique et à la connaissance (voirle tableau 2), seulement 41 % des18-27 ans indiquent un intérêt pourla politique; ce pourcentage augmente

avec l’âge jusqu’à 68 % chez les 57 anset plus. Même si la capacité d’identifierle premier ministre ne diffère quelégèrement entre les groupes d’âge,plus de 40 points séparent les groupesles plus jeunes et les plus âgés quandil s’agit d’identifier le ministre desFinances, soit 22 % et 65 % respective-ment. Les degrés plus faibles d’intérêtet de connaissance de la politique ontété associés à la participation électoraleà la baisse et contribuent à expliquer lesniveaux accrus d’abstention électoralechez les jeunes Canadiens. Toutefois,on ne peut pas dire clairement pourquoice manque de connaissance et cetintérêt limité sont plus prononcésaujourd’hui que dans les générationsprécédentes, ce qui est attribuable en

Tableau 2Intérêt politique, connaissances, importance du vote et cynisme, par groupe d’âge, 2000

Groupe d’âge % 18-27 % 28-37 % 38-47 % 48-57 % plus de 57

Suit la politique de très près ou d’assez près 41 59 58 64 68

Identifie correctement le premier ministre 84 89 93 93 89

Identifie correctement le ministre des Finances 22 46 46 61 65

Vote essentiel ou très important 75 85 89 86 91

Les représentants élus perdent vite contact avec la population 71 75 81 70 67

Très ou assez satisfait des élections 81 79 68 66 72

Note : Les chiffres représentent le pourcentage de répondants dans la catégorie identifiée. À l’avant-dernière ligne, il s’agit des répondants qui sont fortement ou

quelque peu d’accord avec l’énoncé. Les données proviennent du sondage de l’IRPP [Howe et Northrup, 2000 (voir la note 2)].

Tableau 1Différences générationnelles du tauxde participation électorale, 1990-2000

Vote

% 1990 % 2000

1973-1982 – 66

1963-1972 74 69

1953-1962 85 85

1943-1952 93 92

Avant 1943 93 91

Total 88 81

Note : Les chiffres représentent le pourcentage de répondants. La cohorte de

naissance des plus jeunes dans les deux sondages ne comprend que les répon-

dants ayant le droit de vote au moment de l’élection. Les données pour 1990

proviennent du sondage Lortie [Blais et Gidengil, 2000 (voir la note 5)] et celles

de 2000, du sondage de l’IRPP [Howe et Northrup, 2000 (voir la note 2)].

Cohorte de naissance

Les Canadiens plus âgés sont beaucoupplus susceptibles que les jeunes de suivrerégulièrement la politique.

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Juillet 2003 1716 Perspectives électorales

partie à l’attention limitée portée àcette question dans la recherchecanadienne8.

Les jeunes Canadiens sont égalementplus susceptibles de croire que le voten’est tout simplement pas important :seulement 75 % des répondants lesplus jeunes au sondage de l’IRPP ontindiqué que le vote est essentiel ou trèsimportant (tableau 2). Il est clair queces attitudes influent directement surla probabilité de la participation à lavie politique, mais on ne sait toujourspas pourquoi les générations précé-dentes avaient moins tendance àbanaliser les élections au même stadede la vie.

Pourtant, la participation politique,c’est plus que simplement voter. Laparticipation aux partis politiques aconnu une baisse semblable chez lesjeunes Canadiens, tendance qui estégalement susceptible de se poursuivreavec le temps. Seulement 2 % desrépondants âgés de 18 à 27 ans dansle sondage de l’IRPP de 2000 ontindiqué avoir été membres d’un partipolitique, une diminution de 8 % parrapport aux répondants du mêmegroupe d’âge du sondage de 19909. Ilest intéressant de noter que le rapportentre la participation à un grouped’intérêt et la participation à un partipolitique chez les jeunes Canadiens est

beaucoup plus élevé que pour les autresCanadiens. Chez les répondants de18 à 27 ans au sondage de l’IRPP, pourchaque répondant ayant indiqué avoirété membre d’un parti politique, 4,5 ontindiqué être membres d’un grouped’intérêt. Comparativement, le rapportentre membre d’un groupe d’intérêt etmembre d’un parti chez les répondantsde plus de 57 ans n’était que de 0,3 à 1.Ainsi, bien que le taux de participation

politique puisse être à la baisse chez lesjeunes Canadiens, il y a des raisons decroire que la politique partisane tradi-tionnelle a également été touchée.

Variation des taux departicipation électoralechez les jeunes

Un examen du taux de participationdéclaré dans l’ensemble des groupes

Tableau 3Variation des taux de participation électorale chez les jeunesCanadiens de 22 à 37 ans, 2000

% ayant voté à l’élection de 1997

Études

Études secondaires ou moins 60 (118)

Études postsecondaires 71 (322)

Sexe

Femmes 65 (241)

Hommes 71 (203)

Revenu du ménage

Moins de 30 000 $ 64 (91)

30 000 à 49 000 $ 74 (100)

50 000 à 79 000 $ 79 (95)

Plus de 80 000 $ 67 (90)

Intérêt politique

Suit la politique de très près ou d’assez près 81 (225)

Ne la suit pas de près ou ne la suit pas du tout 55 (214)

Connaissance de la politique

Peut identifier le premier ministre 72 (385)

Ne peut pas identifier le premier ministre 47 (58)

Cynisme politique : Les représentants élus au Parlement perdent vite contact avec la population

D’accord 69 (307)

En désaccord 72 (106)

Importance du vote

Essentiel 88 (153)

Très important 64 (207)

Un peu important ou pas du tout 44 (78)

Membre d’un groupe d’intérêt

Oui 82 (49)

Non 66 (395)

Moyen le plus efficace de travailler pour le changement

Se joindre à un parti politique 71 (79)

Se joindre à un groupe d’intérêt 70 (285)

Note : Les chiffres représentent le pourcentage des répondants; le nombre de répondants est indiqué entre

parenthèses. Les données proviennent du sondage de l’IRPP [Howe et Northrup, 2000 (voir la note 2)].

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age

s2000 révèle que les changementsgénérationnels sont forts et qu’un voteaccru chez les jeunes d’aujourd’hui nepermettra pas que le taux de participa-tion « rattrape » les taux enregistrésantérieurement au Canada5. Enmajeure partie, la baisse constatée surla période de 10 ans est attribuable autaux de participation inférieur chezceux qui sont devenus admissibles ausuffrage entre les deux sondages (de74 % en 1990 à 66 % en 2000) et àla chute du taux de participation dansla cohorte 1963-1972 (de 74 % en1990 à 69 % en 2000). Ainsi, leseffets générationnels dépassent leseffets du cycle de vie.

Explication du faible tauxde participation électoralechez les jeunes

La baisse du taux de participation chezles jeunes au Canada reflète la tendancedans d’autres démocraties évoluées6.Certains n’ont pas attendu pour con-clure que c’est symptomatique d’undegré de cynisme accru. Les jeunes duCanada ont décroché, insistent-ils,parce qu’ils ont peu confiance en ceuxà qui sont confiés les intérêts de lasociété. Des protestations très visibles,apparemment dominées par de jeunesactivistes, sembleraient appuyer unetelle conclusion. Mais bien que lesniveaux de cynisme politique aientaugmenté, une image plus exacte sedégage quand on y regarde de plus près.

Les jeunesdu Canada nesont pas pluscyniques queles autresCanadiensau sujet de ladémocratie etde la politiqueet, danscertains cas,ils sont de faitplus satisfaitsdu fonction-nement durégime poli-tique canadienque les membresdes générationsprécédentes. Tel qu’illustré dans letableau 2, lorsqu’on leur demande siles représentants élus « perdent vitecontact avec la population », lesCanadiens plus jeunes ne se révèlentpas les plus cyniques parmi lesCanadiens. De plus, si on leur demandejusqu’à quel point ils sont satisfaitsdes élections, le groupe d’âge le plusjeune montre le degré de satisfactionle plus élevé de tous les groupes d’âge,soit 81 %7.

Les différences entre les groupes d’âgesont apparentes, mais quant à l’intérêtpolitique et à la connaissance (voirle tableau 2), seulement 41 % des18-27 ans indiquent un intérêt pourla politique; ce pourcentage augmente

avec l’âge jusqu’à 68 % chez les 57 anset plus. Même si la capacité d’identifierle premier ministre ne diffère quelégèrement entre les groupes d’âge,plus de 40 points séparent les groupesles plus jeunes et les plus âgés quandil s’agit d’identifier le ministre desFinances, soit 22 % et 65 % respective-ment. Les degrés plus faibles d’intérêtet de connaissance de la politique ontété associés à la participation électoraleà la baisse et contribuent à expliquer lesniveaux accrus d’abstention électoralechez les jeunes Canadiens. Toutefois,on ne peut pas dire clairement pourquoice manque de connaissance et cetintérêt limité sont plus prononcésaujourd’hui que dans les générationsprécédentes, ce qui est attribuable en

Tableau 2Intérêt politique, connaissances, importance du vote et cynisme, par groupe d’âge, 2000

Groupe d’âge % 18-27 % 28-37 % 38-47 % 48-57 % plus de 57

Suit la politique de très près ou d’assez près 41 59 58 64 68

Identifie correctement le premier ministre 84 89 93 93 89

Identifie correctement le ministre des Finances 22 46 46 61 65

Vote essentiel ou très important 75 85 89 86 91

Les représentants élus perdent vite contact avec la population 71 75 81 70 67

Très ou assez satisfait des élections 81 79 68 66 72

Note : Les chiffres représentent le pourcentage de répondants dans la catégorie identifiée. À l’avant-dernière ligne, il s’agit des répondants qui sont fortement ou

quelque peu d’accord avec l’énoncé. Les données proviennent du sondage de l’IRPP [Howe et Northrup, 2000 (voir la note 2)].

Tableau 1Différences générationnelles du tauxde participation électorale, 1990-2000

Vote

% 1990 % 2000

1973-1982 – 66

1963-1972 74 69

1953-1962 85 85

1943-1952 93 92

Avant 1943 93 91

Total 88 81

Note : Les chiffres représentent le pourcentage de répondants. La cohorte de

naissance des plus jeunes dans les deux sondages ne comprend que les répon-

dants ayant le droit de vote au moment de l’élection. Les données pour 1990

proviennent du sondage Lortie [Blais et Gidengil, 2000 (voir la note 5)] et celles

de 2000, du sondage de l’IRPP [Howe et Northrup, 2000 (voir la note 2)].

Cohorte de naissance

Les Canadiens plus âgés sont beaucoupplus susceptibles que les jeunes de suivrerégulièrement la politique.

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temps et d’énergie, quoique limités –pourrait expliquer en partie les taux departicipation à la baisse. André Blais asoutenu qu’une importante motivationpour voter est le sens du devoir14. Lesens du devoir peut être considérécomme un aspect d’une relationréciproque : les citoyens acceptent devoter en échange des avantages offertspar les gouvernements. Toutefois, plusd’une décennie de gouvernementscanadiens insistant sur la nécessité decompressions financières et de budgetséquilibrés pourrait avoir laissé denombreux jeunes Canadiens avec unsens moins développé de ce que lesgouvernements font exactement pourqu’ils méritent leur vote en retour. La

réponse au paradoxe de la baisse destaux de participation électorale chezles jeunes peut ainsi se trouver endehors des facteurs évalués historique-ment comme explications du taux departicipation électorale. La réponsepeut plutôt reposer sur le succès que lesgouvernements ont eu en réduisantleur responsabilité envers les citoyens.

En fin de compte, ce qui est clair, c’estque de nombreux jeunes Canadiens,sinon la plupart, évitent les bureauxde scrutin par apathie politique plutôtque par cynisme. Ils choisissent de nepas voter parce qu’ils considèrent lapolitique et les élections sans impor-tance, plutôt que parce qu’ils sont très

convaincus que les politiciens et lapolitique ne s’occupent pas des questionsqui leur importent. Cette conclusionest renforcée par le fait que de nombreuxjeunes Canadiens qui considèrent queles groupes d’intérêt sont les vecteursles plus efficaces de changement poli-tique votent à des taux semblables àceux qui considèrent que les partispolitiques sont les plus efficaces. Ledéfi est ainsi à deux volets : développerun intérêt pour la politique et lesélections dans la génération actuellede jeunes électeurs, d’une part, ets’engager à encourager un tel intérêtdans la prochaine génération d’électeurspour freiner la baisse des taux de par-ticipation électorale, d’autre part.

1. En voici des exemples : André Blais,Elisabeth Gidengil, Richard Nadeau etNeil Nevitte, Anatomy of a Liberal Victory:Making Sense of the 2000 Canadian Election,Peterborough (Ontario), Broadview Press,2002; Henry Milner, « Civic Drop-outs?What Young Citizens Know and Don’tKnow About Politics », exposé présentéà l’assemblée annuelle de l’AmericanPolitical Science Association, Boston(Massachusetts), du 26 août au 1er septembre2002; et mon exposé, « GenerationalPatterns in the Political Opinions andBehaviour of Canadians », Policy Matters,vol. 2, no 5 (octobre 2001).

2. L’Institute for Social Research del’Université York a interviewé 1 278Canadiens pour ce sondage. Les détailscomplets se trouvent à l’annexe 1 de PaulHowe et David Northrup, « StrengtheningCanadian Democracy: The Views ofCanadians », Policy Matters, vol. 1, no 5(juillet 2000).

3. Blais et coll., Anatomy of a Liberal Victory,p. 46.

4. O’Neill, « Generational Patterns », p. 34-35.

5. Ce sondage a été mené par la Commissionroyale sur la réforme électorale et le finance-ment des partis (Commission Lortie). VoirAndré Blais et Elisabeth Gidengil, MakingRepresentative Democracy Work: The Viewsof Canadians, Toronto, Dundurn Press, 1991.

6. Voir Russell J. Dalton, Citizen Politics:Public Opinion and Political Parties inAdvanced Western Democracies, 2e éd.,Chatham (New Jersey), Chatham HousePublishers, 1996.

7. Il est toutefois à noter qu’une part impor-tante des répondants du groupe d’âge leplus jeune, 43 %, ont répondu « Ne saitpas » à cette question. Comparativement,seulement 21 % des répondants de 48 à57 ans ont répondu de même.

8. Une exception est Paul Howe, « Namethe Premier: The Political Knowledge ofCanadians, Past and Present », exposéprésenté à l’assemblée annuelle del’Association canadienne de sciencepolitique, Toronto, 29-31 mai 2002.

9. Le tableau 13 dans O’Neill,« Generational Patterns », p. 35.

10. Le tableau 3 présente les taux de participa-tion de 1997 pour les répondants de 22 à37 ans selon diverses catégories du sondagede l’IRPP (N = 448). Les taux de partici-pation entre le groupe des 22 à 27 ans et legroupe des 28 à 37 ans étaient de 66 % et69 % respectivement.

11. Cet examen présente des différences depremier ordre du taux de participationélectorale. Une analyse plus rigoureusepermettrait de contrôler l’impact de diversfacteurs sur ces relations et pourrait donner

des conclusions différentes. Par exemple,les femmes signalent des degrés inférieursd’intérêt politique que les hommes et lecontrôle de cette différence pourrait con-duire à la disparition de l’écart entre lessexes dans le taux de participation.

12. Voir Patrick Fournier, « The UninformedCanadian Voter » dans Joanna Everitt etBrenda O’Neill, Citizen Politics: Researchand Theory in Canadian Political Behaviour,Don Mills (Ontario), Oxford, 2003,p. 92-109.

13. Le directeur général des élections aannoncé que des mesures visant à rendreles bureaux de scrutin et l’information surle vote anticipé et le bulletin de votepostal plus accessibles ont été adoptéesprécisément pour accroître la participationdes plus jeunes électeurs du Canada. Voirle communiqué d’Élections Canada du21 mars 2003, à www.elections.ca.

14. André Blais, To Vote or Not to Vote: TheMerits and Limits of Rational Choice Theory,Pittsburgh, University of Pittsburgh Press,2000.

NOTES

démographiques et autres (voir letableau 3)10 révèle que ce ne sont pastous les jeunes Canadiens qui ne vontpas voter. Un faible taux de participa-tion est plus répandu chez ceux quin’ont pas fait d’études postsecondaires,chez ceux qui ont des revenus familiauxfaibles et élevés et, dans une certainemesure, chez les femmes11. La variationdes taux de participation selon le degréde connaissance et d’intérêt pour lapolitique est toutefois nettement plusélevée. Alors que 81 % des jeunesrépondants ayant un certain intérêtpolitique ont déclaré avoir voté en1997, le taux chute à 55 % chez ceuxqui signalent peu ou pas d’intérêt. Demême, moins de la moitié des répon-dants qui ne pouvaient pas identifier lepremier ministre ont déclaré avoir votéen 1997. Comparativement, plus de70 % de ceux qui pouvaient l’identifierse sont présentés au bureau de vote. Ilest également révélateur de constaterque 88 % de ceux qui estimaient quele vote est essentiel ont déclaré avoirvoté en 1997; chez ceux qui accordaientpeu d’importance au vote, le taux departicipation tombe à 44 %.

Par contre, le cynisme est peu utilepour expliquer le faible taux de partici-pation chez les jeunes Canadiens. Telqu’illustré au tableau 2, il y a peu dedifférence entre le taux de participa-tion des répondants qui conviennent

que les représentants élus au Parlementperdent vite contact avec la population(69 %) et ceux qui sont en désaccordavec l’énoncé (72 %). De même, lestaux de participation réduits ne sontpas le résultat de l’éloignement desjeunes de la politique électorale etpartisane en faveur d’un groupe

d’intérêt et de la politique sociale.En fait, le taux de participation estsupérieur chez ceux qui indiquentavoir été membres d’un grouped’intérêt. Ceux qui croient que lesgroupes d’intérêt sont le moyen le plusefficace de travailler pour le change-ment sont aussi susceptibles de voterque ceux qui croient que les partispolitiques sont les mécanismes dechangement les plus efficaces.

Conclusion

Alors que doit-on conclure de cettenouvelle tendance chez les jeunes duCanada quant à la participation auxélections? Les jeunes sont moins suscep-

tibles de voter parcequ’ils sont moinsintéressés à la poli-tique, connaissentmoins la politiqueet sont moinsconvaincus quevoter est essentiel.Cette explication

ne nous avance toutefois pas beaucoup,car on ignore pourquoi il en est ainsi.On y gagnerait à envisager que la par-ticipation politique dépend directementdes capacités, des possibilités et de lamotivation12. Nous avons vu que lesjeunes qui n’ont pas les outils offertspar l’éducation votent à des taux

inférieurs, peut-être à cause du fait quele régime politique semble lointain etcomplexe. Mais on ne peut pas direclairement pourquoi les jeunesCanadiens d’aujourd’hui trouvent lerégime plus complexe que les jeunesCanadiens d’il y a dix ans.

Les possibilités limitées de participerà la vie politique, comme en témoignela tendance du système électoral àdéformer les choix des électeurs dansla répartition des sièges entre les partis,pourraient aussi expliquer la participa-tion accrue à des organisations politiquesnon traditionnelles comme les groupesd’intérêt et les mouvements sociaux.Mais cela explique peu la baisse de laparticipation électorale des jeunes dansle temps, puisqu’il n’y a pas moins depossibilités de participation aujour-d’hui que dans le passé. Toutefois, sile temps dont disposent les jeunes estplus limité dans le monde d’aujourd’hui,peut-être les taux de participationaugmenteraient-ils s’il était plus facilede voter13.

De plus, il serait peut-être utile demettre l’accent sur la motivation – ouson absence – pour expliquer les tauxde participation plus faibles chez lesjeunes. Le manque de motivation pourvoter – c’est-à-dire l’absence de raisonou de stimulus justifiant la dépense de

… les taux de participation réduits ne sontpas le résultat de l’éloignement des jeunes dela politique électorale et partisane en faveurd’un groupe d’intérêt et de la politique sociale.

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Juillet 2003 1918 Perspectives électorales

temps et d’énergie, quoique limités –pourrait expliquer en partie les taux departicipation à la baisse. André Blais asoutenu qu’une importante motivationpour voter est le sens du devoir14. Lesens du devoir peut être considérécomme un aspect d’une relationréciproque : les citoyens acceptent devoter en échange des avantages offertspar les gouvernements. Toutefois, plusd’une décennie de gouvernementscanadiens insistant sur la nécessité decompressions financières et de budgetséquilibrés pourrait avoir laissé denombreux jeunes Canadiens avec unsens moins développé de ce que lesgouvernements font exactement pourqu’ils méritent leur vote en retour. La

réponse au paradoxe de la baisse destaux de participation électorale chezles jeunes peut ainsi se trouver endehors des facteurs évalués historique-ment comme explications du taux departicipation électorale. La réponsepeut plutôt reposer sur le succès que lesgouvernements ont eu en réduisantleur responsabilité envers les citoyens.

En fin de compte, ce qui est clair, c’estque de nombreux jeunes Canadiens,sinon la plupart, évitent les bureauxde scrutin par apathie politique plutôtque par cynisme. Ils choisissent de nepas voter parce qu’ils considèrent lapolitique et les élections sans impor-tance, plutôt que parce qu’ils sont très

convaincus que les politiciens et lapolitique ne s’occupent pas des questionsqui leur importent. Cette conclusionest renforcée par le fait que de nombreuxjeunes Canadiens qui considèrent queles groupes d’intérêt sont les vecteursles plus efficaces de changement poli-tique votent à des taux semblables àceux qui considèrent que les partispolitiques sont les plus efficaces. Ledéfi est ainsi à deux volets : développerun intérêt pour la politique et lesélections dans la génération actuellede jeunes électeurs, d’une part, ets’engager à encourager un tel intérêtdans la prochaine génération d’électeurspour freiner la baisse des taux de par-ticipation électorale, d’autre part.

1. En voici des exemples : André Blais,Elisabeth Gidengil, Richard Nadeau etNeil Nevitte, Anatomy of a Liberal Victory:Making Sense of the 2000 Canadian Election,Peterborough (Ontario), Broadview Press,2002; Henry Milner, « Civic Drop-outs?What Young Citizens Know and Don’tKnow About Politics », exposé présentéà l’assemblée annuelle de l’AmericanPolitical Science Association, Boston(Massachusetts), du 26 août au 1er septembre2002; et mon exposé, « GenerationalPatterns in the Political Opinions andBehaviour of Canadians », Policy Matters,vol. 2, no 5 (octobre 2001).

2. L’Institute for Social Research del’Université York a interviewé 1 278Canadiens pour ce sondage. Les détailscomplets se trouvent à l’annexe 1 de PaulHowe et David Northrup, « StrengtheningCanadian Democracy: The Views ofCanadians », Policy Matters, vol. 1, no 5(juillet 2000).

3. Blais et coll., Anatomy of a Liberal Victory,p. 46.

4. O’Neill, « Generational Patterns », p. 34-35.

5. Ce sondage a été mené par la Commissionroyale sur la réforme électorale et le finance-ment des partis (Commission Lortie). VoirAndré Blais et Elisabeth Gidengil, MakingRepresentative Democracy Work: The Viewsof Canadians, Toronto, Dundurn Press, 1991.

6. Voir Russell J. Dalton, Citizen Politics:Public Opinion and Political Parties inAdvanced Western Democracies, 2e éd.,Chatham (New Jersey), Chatham HousePublishers, 1996.

7. Il est toutefois à noter qu’une part impor-tante des répondants du groupe d’âge leplus jeune, 43 %, ont répondu « Ne saitpas » à cette question. Comparativement,seulement 21 % des répondants de 48 à57 ans ont répondu de même.

8. Une exception est Paul Howe, « Namethe Premier: The Political Knowledge ofCanadians, Past and Present », exposéprésenté à l’assemblée annuelle del’Association canadienne de sciencepolitique, Toronto, 29-31 mai 2002.

9. Le tableau 13 dans O’Neill,« Generational Patterns », p. 35.

10. Le tableau 3 présente les taux de participa-tion de 1997 pour les répondants de 22 à37 ans selon diverses catégories du sondagede l’IRPP (N = 448). Les taux de partici-pation entre le groupe des 22 à 27 ans et legroupe des 28 à 37 ans étaient de 66 % et69 % respectivement.

11. Cet examen présente des différences depremier ordre du taux de participationélectorale. Une analyse plus rigoureusepermettrait de contrôler l’impact de diversfacteurs sur ces relations et pourrait donner

des conclusions différentes. Par exemple,les femmes signalent des degrés inférieursd’intérêt politique que les hommes et lecontrôle de cette différence pourrait con-duire à la disparition de l’écart entre lessexes dans le taux de participation.

12. Voir Patrick Fournier, « The UninformedCanadian Voter » dans Joanna Everitt etBrenda O’Neill, Citizen Politics: Researchand Theory in Canadian Political Behaviour,Don Mills (Ontario), Oxford, 2003,p. 92-109.

13. Le directeur général des élections aannoncé que des mesures visant à rendreles bureaux de scrutin et l’information surle vote anticipé et le bulletin de votepostal plus accessibles ont été adoptéesprécisément pour accroître la participationdes plus jeunes électeurs du Canada. Voirle communiqué d’Élections Canada du21 mars 2003, à www.elections.ca.

14. André Blais, To Vote or Not to Vote: TheMerits and Limits of Rational Choice Theory,Pittsburgh, University of Pittsburgh Press,2000.

NOTES

démographiques et autres (voir letableau 3)10 révèle que ce ne sont pastous les jeunes Canadiens qui ne vontpas voter. Un faible taux de participa-tion est plus répandu chez ceux quin’ont pas fait d’études postsecondaires,chez ceux qui ont des revenus familiauxfaibles et élevés et, dans une certainemesure, chez les femmes11. La variationdes taux de participation selon le degréde connaissance et d’intérêt pour lapolitique est toutefois nettement plusélevée. Alors que 81 % des jeunesrépondants ayant un certain intérêtpolitique ont déclaré avoir voté en1997, le taux chute à 55 % chez ceuxqui signalent peu ou pas d’intérêt. Demême, moins de la moitié des répon-dants qui ne pouvaient pas identifier lepremier ministre ont déclaré avoir votéen 1997. Comparativement, plus de70 % de ceux qui pouvaient l’identifierse sont présentés au bureau de vote. Ilest également révélateur de constaterque 88 % de ceux qui estimaient quele vote est essentiel ont déclaré avoirvoté en 1997; chez ceux qui accordaientpeu d’importance au vote, le taux departicipation tombe à 44 %.

Par contre, le cynisme est peu utilepour expliquer le faible taux de partici-pation chez les jeunes Canadiens. Telqu’illustré au tableau 2, il y a peu dedifférence entre le taux de participa-tion des répondants qui conviennent

que les représentants élus au Parlementperdent vite contact avec la population(69 %) et ceux qui sont en désaccordavec l’énoncé (72 %). De même, lestaux de participation réduits ne sontpas le résultat de l’éloignement desjeunes de la politique électorale etpartisane en faveur d’un groupe

d’intérêt et de la politique sociale.En fait, le taux de participation estsupérieur chez ceux qui indiquentavoir été membres d’un grouped’intérêt. Ceux qui croient que lesgroupes d’intérêt sont le moyen le plusefficace de travailler pour le change-ment sont aussi susceptibles de voterque ceux qui croient que les partispolitiques sont les mécanismes dechangement les plus efficaces.

Conclusion

Alors que doit-on conclure de cettenouvelle tendance chez les jeunes duCanada quant à la participation auxélections? Les jeunes sont moins suscep-

tibles de voter parcequ’ils sont moinsintéressés à la poli-tique, connaissentmoins la politiqueet sont moinsconvaincus quevoter est essentiel.Cette explication

ne nous avance toutefois pas beaucoup,car on ignore pourquoi il en est ainsi.On y gagnerait à envisager que la par-ticipation politique dépend directementdes capacités, des possibilités et de lamotivation12. Nous avons vu que lesjeunes qui n’ont pas les outils offertspar l’éducation votent à des taux

inférieurs, peut-être à cause du fait quele régime politique semble lointain etcomplexe. Mais on ne peut pas direclairement pourquoi les jeunesCanadiens d’aujourd’hui trouvent lerégime plus complexe que les jeunesCanadiens d’il y a dix ans.

Les possibilités limitées de participerà la vie politique, comme en témoignela tendance du système électoral àdéformer les choix des électeurs dansla répartition des sièges entre les partis,pourraient aussi expliquer la participa-tion accrue à des organisations politiquesnon traditionnelles comme les groupesd’intérêt et les mouvements sociaux.Mais cela explique peu la baisse de laparticipation électorale des jeunes dansle temps, puisqu’il n’y a pas moins depossibilités de participation aujour-d’hui que dans le passé. Toutefois, sile temps dont disposent les jeunes estplus limité dans le monde d’aujourd’hui,peut-être les taux de participationaugmenteraient-ils s’il était plus facilede voter13.

De plus, il serait peut-être utile demettre l’accent sur la motivation – ouson absence – pour expliquer les tauxde participation plus faibles chez lesjeunes. Le manque de motivation pourvoter – c’est-à-dire l’absence de raisonou de stimulus justifiant la dépense de

… les taux de participation réduits ne sontpas le résultat de l’éloignement des jeunes dela politique électorale et partisane en faveurd’un groupe d’intérêt et de la politique sociale.

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Juillet 2003 2120 Perspectives électorales

répondants de chaque sondage par rap-port aux autres répondants du mêmesondage. À partir de ces résultats nor-malisés, le tableau 1 illustre le niveaude connaissances en politique au fil dutemps et révèle l’écart entre les cohorteset un groupe de référence, plus âgé(soit les personnes nées entre 1926 et1938). Deux points ressortent : d’abord,il y a de grandes différences en matièrede connaissances politiques entre lescohortes plus jeunes et le groupe deréférence, et le fossé tend à s’élargir àchaque nouvelle cohorte; puis, ce fosséne se referme que légèrement avec letemps, même avec la progression enâge des cohortes plus jeunes (une légèreamélioration apparaît lorsque les

cohortes sont relativement jeunes,puis le fossé se stabilise plus ou moinspar la suite). Étant donné les écartsconsidérables qui persistent entre lespersonnes nées à des périodes précises,la tendance suggère un effet de cohorteplutôt que celui d’un modèle de cyclede vie où les connaissances augmententau fur et à mesure que les électeursavancent en âge.

Ce n’est cependant qu’une desmanières dont les connaissances enpolitique se mêlent aux effets decohorte ayant entraîné le déclin de laparticipation électorale au cours desdernières élections. Un autre aspectconcerne l’effet accru des connaissances

en politique sur la participation élec-torale des personnes qui viennent dejoindre les rangs de l’électorat. Letableau 2 découpe les données desdiverses cohortes de naissance4 etillustre le fossé de la participationélectorale entre les personnes quipossèdent un niveau élevé de connais-sances en politique et ceux qui enpossèdent moins. Il semble que ce fossésoit sensiblement plus grand chez lescohortes de jeunes que chez leursaînés. Prenons par exemple le taux departicipation de la cohorte de 1976 à1982 aux élections de 2000. Il y avaitune différence de 46,9 points entre lesrépondants le moins renseignés et lemieux renseignés (taux de participationde 41,3 % pour le premier groupe et de88,2 % pour le deuxième groupe). Bref,deux forces dynamiques travaillentensemble pour faire baisser la partici-pation des cohortes de jeunes, à savoirle niveau inférieur de connaissances, dontles effets sont aggravés par l’impactcroissant des connaissances sur la partici-pation électorale. Par conséquent, lesconnaissances en politique sont unfacteur critique, sinon le facteur cri-tique, sous-jacent à la différence departicipation entre les cohortes.

On pourrait s’opposer à cette conclu-sion en faisant valoir que le problèmeest en fait plus grave et que le manquede connaissances en politique desCanadiens est plutôt symptomatiqued’un malaise plus profond, à savoir ledésengagement généralisé des jeunesCanadiens face à la politique. Danscette optique, le problème est d’abordet avant tout une question de motiva-tion, à savoir que les jeunes Canadiensne votent pas (et ne sont pas aucourant de la politique) simplementparce qu’ils ne s’y intéressent pas.Cependant, une analyse semblableportant sur l’intérêt pour la politique descohortes de naissance au fil du tempsmine cette hypothèse. Quand il s’agitd’intérêt pour la politique, les effets decohorte sont plutôt négligeables.L’intérêt pour la politique se manifeste

Tableau 1Un manque de connaissances grandissant, 1984 à 2000

1984 1990 1993 1997 2000

1939-1954 –4,6 –4,6 –4,5 –4,7 –2,6

1955-1966 –15,4 –11,7 –8,9 –11,2 –10,7

1967-1971 –23,7 –16,2 –14,4 –16,1

1972-1975 –26,2 –19,1 –23,3

1976-1979 –24,0 –26,7

1980-1982 –33,3

Les entrées représentent l’écart entre le niveau moyen de connaissances de chaque cohorte et la cohorte

de référence (1926-1938), les connaissances en politique étant mesurées sur une échelle de 0 à 100.

Sources : Études sur les élections canadiennes de 1984, 1993, 1997 et 2000 et Survey of Attitudes

About Electoral Reform (1990). Voir la section Remerciements pour de plus amples renseignements.

Tableau 2L’impact croissant des connaissances sur la participationélectorale, 1984 à 2000

Cohorte 1984 1990 1993 1997 2000

Avant 1926 10,6 9,1 11,9 15,6 4,2

1926-1938 12,5 7,7 9,1 12,3 20,4

1939-1954 8,3 8,4 10,5 12,6 17,6

1955-1966 27,7 19,6 21,4 21,6 24,2

1967-1975 10,5* 31,1 33,8 31,9

1976-1982 35,8* 46,9

Total 18,2 13,8 21,4 23,3 32,3

*N < 20 pour la catégorie de connaissances élevées

Les entrées représentent le fossé de la participation électorale entre les personnes qui connaissent peu la

politique et ceux qui la connaissent bien; chaque groupe représente environ un tiers de l’ensemble des

répondants. Certaines cellules sont vides en raison du manque de répondants dans ces cohortes pour

ces années.

Sources : Études sur les élections canadiennes de 1984, 1993, 1997 et 2000 et Survey of Attitudes

About Electoral Reform (1990)

Depuis l’élection générale fédérale de novembre 2000, ledéclin de la participation des jeunes électeurs aux électionscanadiennes a suscité énormément d’attention. Dans le casde l’élection de 2000, on estime que 25 % des jeunes de18 à 24 ans se seraient rendus aux urnes – après correctionde la tendance des sondages à produire des estimationsgonflées – alors que le taux de participation générale esttombé à 64 %1, soit le taux le plus bas depuis la DeuxièmeGuerre mondiale. Le déclin de la participation des jeunesdoit donc occuper une place de choix dans toute étude surl’abstention des électeurs et les stratégies visant à y remédier.

Les chercheurs qui se sont penchés sur ce phénomèneconstatent qu’il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau,contrairement à ce que l’on puisse penser. En effet, lessondages menés lors des élections générales fédérales de1968 à 2000 révèlent que les Canadiens ont une tendanceprofonde à moins voter pendant leur jeunesse que plus tarddans leur vie. Le taux de participation électorale augmenteen effet d’environ 15 points entre les âges de 20 et 50 ans.Cependant, ces effets du cycle de vie sur la participationélectorale ne sont pas particulièrement critiques à l’heure

actuelle puisqu’ils ne sont pas en cause dans le déclingénéralisé de la participation électorale2. Les différencesapparues entre les générations au cours des 20 dernièresannées, soit entre les Canadiens nés dans les années 1960et 1970 et ceux qui sont nés auparavant, sont plus impor-tantes. Le taux de participation des cohortes nées dans lesannées 1970, donc des personnes ayant commencé à voterdans les années 1990, est d’environ 20 points inférieur àcelui des membres des générations d’avant le baby-boom(nés avant 1945) lorsque ceux-ci étaient de jeunes adultes.À une époque où les cohortes de jeunes représentent uneproportion plus importante de l’électorat, leur abstention lejour d’élection commence à se faire sentir et représente unebonne partie du déclin global de la participation électoraleau cours des dernières élections3.

Connaissances en politique

Il est urgent d’examiner les divers facteurs relatifs aux dif-férences d’âge ayant une incidence sur la participationélectorale dans le but de déterminer lesquels sont sous-jacents aux importants effets de cohorte et lesquels sontresponsables du modèle du cycle de vie. Un effet de cohortequi ressort clairement est l’important écart en matière deconnaissances politiques qui existe entre les cohortes dejeunes et leurs aînés. Dans les sondages menés au cours desélections générales de 1984, 1993, 1997 et 2000, ainsi quedans une étude séparée réalisée en 1990, on a posé auxCanadiens un grand nombre de questions de fait touchantleurs connaissances de la politique du pays, notamment lesnoms des chefs des partis politiques et les promesses élec-torales des divers partis. Chaque sondage comprenait unesérie différente de questions. Il fallait donc trouver unmoyen de normaliser le tout aux fins de comparaison. Uneméthode simple consistait à attribuer, selon leur niveau deconnaissances, une cote de 0 à 100 (un rang centile) aux

Les jeunes et les élections

La participation électorale etle manque de connaissances

Paul HoweProfesseur adjoint, Département de science politique, Université du Nouveau-Brunswick

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Juillet 2003 2120 Perspectives électorales

répondants de chaque sondage par rap-port aux autres répondants du mêmesondage. À partir de ces résultats nor-malisés, le tableau 1 illustre le niveaude connaissances en politique au fil dutemps et révèle l’écart entre les cohorteset un groupe de référence, plus âgé(soit les personnes nées entre 1926 et1938). Deux points ressortent : d’abord,il y a de grandes différences en matièrede connaissances politiques entre lescohortes plus jeunes et le groupe deréférence, et le fossé tend à s’élargir àchaque nouvelle cohorte; puis, ce fosséne se referme que légèrement avec letemps, même avec la progression enâge des cohortes plus jeunes (une légèreamélioration apparaît lorsque les

cohortes sont relativement jeunes,puis le fossé se stabilise plus ou moinspar la suite). Étant donné les écartsconsidérables qui persistent entre lespersonnes nées à des périodes précises,la tendance suggère un effet de cohorteplutôt que celui d’un modèle de cyclede vie où les connaissances augmententau fur et à mesure que les électeursavancent en âge.

Ce n’est cependant qu’une desmanières dont les connaissances enpolitique se mêlent aux effets decohorte ayant entraîné le déclin de laparticipation électorale au cours desdernières élections. Un autre aspectconcerne l’effet accru des connaissances

en politique sur la participation élec-torale des personnes qui viennent dejoindre les rangs de l’électorat. Letableau 2 découpe les données desdiverses cohortes de naissance4 etillustre le fossé de la participationélectorale entre les personnes quipossèdent un niveau élevé de connais-sances en politique et ceux qui enpossèdent moins. Il semble que ce fossésoit sensiblement plus grand chez lescohortes de jeunes que chez leursaînés. Prenons par exemple le taux departicipation de la cohorte de 1976 à1982 aux élections de 2000. Il y avaitune différence de 46,9 points entre lesrépondants le moins renseignés et lemieux renseignés (taux de participationde 41,3 % pour le premier groupe et de88,2 % pour le deuxième groupe). Bref,deux forces dynamiques travaillentensemble pour faire baisser la partici-pation des cohortes de jeunes, à savoirle niveau inférieur de connaissances, dontles effets sont aggravés par l’impactcroissant des connaissances sur la partici-pation électorale. Par conséquent, lesconnaissances en politique sont unfacteur critique, sinon le facteur cri-tique, sous-jacent à la différence departicipation entre les cohortes.

On pourrait s’opposer à cette conclu-sion en faisant valoir que le problèmeest en fait plus grave et que le manquede connaissances en politique desCanadiens est plutôt symptomatiqued’un malaise plus profond, à savoir ledésengagement généralisé des jeunesCanadiens face à la politique. Danscette optique, le problème est d’abordet avant tout une question de motiva-tion, à savoir que les jeunes Canadiensne votent pas (et ne sont pas aucourant de la politique) simplementparce qu’ils ne s’y intéressent pas.Cependant, une analyse semblableportant sur l’intérêt pour la politique descohortes de naissance au fil du tempsmine cette hypothèse. Quand il s’agitd’intérêt pour la politique, les effets decohorte sont plutôt négligeables.L’intérêt pour la politique se manifeste

Tableau 1Un manque de connaissances grandissant, 1984 à 2000

1984 1990 1993 1997 2000

1939-1954 –4,6 –4,6 –4,5 –4,7 –2,6

1955-1966 –15,4 –11,7 –8,9 –11,2 –10,7

1967-1971 –23,7 –16,2 –14,4 –16,1

1972-1975 –26,2 –19,1 –23,3

1976-1979 –24,0 –26,7

1980-1982 –33,3

Les entrées représentent l’écart entre le niveau moyen de connaissances de chaque cohorte et la cohorte

de référence (1926-1938), les connaissances en politique étant mesurées sur une échelle de 0 à 100.

Sources : Études sur les élections canadiennes de 1984, 1993, 1997 et 2000 et Survey of Attitudes

About Electoral Reform (1990). Voir la section Remerciements pour de plus amples renseignements.

Tableau 2L’impact croissant des connaissances sur la participationélectorale, 1984 à 2000

Cohorte 1984 1990 1993 1997 2000

Avant 1926 10,6 9,1 11,9 15,6 4,2

1926-1938 12,5 7,7 9,1 12,3 20,4

1939-1954 8,3 8,4 10,5 12,6 17,6

1955-1966 27,7 19,6 21,4 21,6 24,2

1967-1975 10,5* 31,1 33,8 31,9

1976-1982 35,8* 46,9

Total 18,2 13,8 21,4 23,3 32,3

*N < 20 pour la catégorie de connaissances élevées

Les entrées représentent le fossé de la participation électorale entre les personnes qui connaissent peu la

politique et ceux qui la connaissent bien; chaque groupe représente environ un tiers de l’ensemble des

répondants. Certaines cellules sont vides en raison du manque de répondants dans ces cohortes pour

ces années.

Sources : Études sur les élections canadiennes de 1984, 1993, 1997 et 2000 et Survey of Attitudes

About Electoral Reform (1990)

Depuis l’élection générale fédérale de novembre 2000, ledéclin de la participation des jeunes électeurs aux électionscanadiennes a suscité énormément d’attention. Dans le casde l’élection de 2000, on estime que 25 % des jeunes de18 à 24 ans se seraient rendus aux urnes – après correctionde la tendance des sondages à produire des estimationsgonflées – alors que le taux de participation générale esttombé à 64 %1, soit le taux le plus bas depuis la DeuxièmeGuerre mondiale. Le déclin de la participation des jeunesdoit donc occuper une place de choix dans toute étude surl’abstention des électeurs et les stratégies visant à y remédier.

Les chercheurs qui se sont penchés sur ce phénomèneconstatent qu’il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau,contrairement à ce que l’on puisse penser. En effet, lessondages menés lors des élections générales fédérales de1968 à 2000 révèlent que les Canadiens ont une tendanceprofonde à moins voter pendant leur jeunesse que plus tarddans leur vie. Le taux de participation électorale augmenteen effet d’environ 15 points entre les âges de 20 et 50 ans.Cependant, ces effets du cycle de vie sur la participationélectorale ne sont pas particulièrement critiques à l’heure

actuelle puisqu’ils ne sont pas en cause dans le déclingénéralisé de la participation électorale2. Les différencesapparues entre les générations au cours des 20 dernièresannées, soit entre les Canadiens nés dans les années 1960et 1970 et ceux qui sont nés auparavant, sont plus impor-tantes. Le taux de participation des cohortes nées dans lesannées 1970, donc des personnes ayant commencé à voterdans les années 1990, est d’environ 20 points inférieur àcelui des membres des générations d’avant le baby-boom(nés avant 1945) lorsque ceux-ci étaient de jeunes adultes.À une époque où les cohortes de jeunes représentent uneproportion plus importante de l’électorat, leur abstention lejour d’élection commence à se faire sentir et représente unebonne partie du déclin global de la participation électoraleau cours des dernières élections3.

Connaissances en politique

Il est urgent d’examiner les divers facteurs relatifs aux dif-férences d’âge ayant une incidence sur la participationélectorale dans le but de déterminer lesquels sont sous-jacents aux importants effets de cohorte et lesquels sontresponsables du modèle du cycle de vie. Un effet de cohortequi ressort clairement est l’important écart en matière deconnaissances politiques qui existe entre les cohortes dejeunes et leurs aînés. Dans les sondages menés au cours desélections générales de 1984, 1993, 1997 et 2000, ainsi quedans une étude séparée réalisée en 1990, on a posé auxCanadiens un grand nombre de questions de fait touchantleurs connaissances de la politique du pays, notamment lesnoms des chefs des partis politiques et les promesses élec-torales des divers partis. Chaque sondage comprenait unesérie différente de questions. Il fallait donc trouver unmoyen de normaliser le tout aux fins de comparaison. Uneméthode simple consistait à attribuer, selon leur niveau deconnaissances, une cote de 0 à 100 (un rang centile) aux

Les jeunes et les élections

La participation électorale etle manque de connaissances

Paul HoweProfesseur adjoint, Département de science politique, Université du Nouveau-Brunswick

Phot

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Page 24: 11940 EC Insight Vol5 no2 fv8 - Elections in Canada · en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni 31 L’art de vendre la participation électorale à la génération MusiquePlus

Juillet 2003 2322 Perspectives électorales

il faut tenir compte des nombreuxcanaux d’influence. Comme d’autresl’ont déjà fait remarquer, l’éducationcivique suppose bien plus que debourrer les crânes des élèves avec desfaits. Il est tout aussi important de leurinculquer des compétences et despréférences qui soutiennent l’appren-tissage continu après les études. SelonHenry Milner, l’objectif devrait êtred’inculquer une « culture citoyenne »faisant que l’on se tienne spontanémentau courant de la politique9.

Un des aspects de cette culturecitoyenne dont on parle souvent estla lecture du journal. Les journauxreprésentent une source importanted’information politique, mais lesjeunes générations sont moins portéesà les acheter. Il y a aussi d’autresstratégies qui méritent tout autantd’être soulignées. La télévision sembleêtre le moyen de prédilection des jeunesCanadiens pour acquérir de l’informa-tion politique. Le tableau 3, basé surl’Étude sur l’élection canadienne 2000,illustre le niveau de connaissances en

politique des divers groupes d’âge rela-tivement à l’attention accordée à lacampagne électorale fédérale à latélévision; les connaissances en poli-tique sont mesurées sur une échellede 0 à 100. Dans le cas des personnesayant moins de 30 ans, l’effet de latélévision était certes remarquable :une différence de 33 points en con-naissances politiques distinguait lacatégorie qui l’écoutait peu de cellequi l’écoutait beaucoup. L’effet de latélévision était aussi considérable pourla catégorie adjacente (30 à 39 ans),mais diminuait considérablement pourles groupes plus âgés. La lecture desjournaux est également importantepour s’informer sur la politique et ce,pour tous les groupes, mais chez lesjeunes de 18 à 39 ans, c’est la télévi-sion qui affiche le plus grand effet,surtout si les variables sont soumises àdes contrôles par analyse multivariable10.

Une stratégie générale visant à rehausserle niveau de connaissances en politiquechez les jeunes Canadiens devrait doncviser notamment à modifier les habi-

tudes d’écoutedes jeunes demanière à cequ’ils accordentplus d’attentionà la politique.L’école estsans doute lemeilleur pointde départ. Envue de dévelop-per une culturecitoyenne, onpourrait inclureau programmed’éducationcivique l’écouted’émissionsaxées sur lapolitique. Toutcomme lesélèves doiventparfois lire lejournal tous lesjours pour ce

cours, ils pourraient aussi devoir suivreles actualités à la télévision tous lessoirs (ce qui risquerait d’ailleurs d’êtreplus productif). Les actualités pour-raient aussi être écoutées en classe etservir de base de discussions et dedébats. Pour ceux qui jurent par lapresse écrite, cette stratégie peutsembler une forme de capitulation,mais elle peut s’avérer le moyen le plusefficace de maintenir un niveau debase de connaissances en politiquepour les générations élevées à l’ère dela presse électronique.

On pourrait aussi encourager l’utilisationd’Internet comme source d’informationpolitique. Même si, à l’heure actuelle,on connaît peu les effets d’Internet surle niveau des connaissances en poli-tique11, la consultation régulière desites médiatiques fiables sur le Webpeut finir par valoir la lecture régulièredes journaux pour ce qui est d’accroîtreses connaissances en politique. Inculquerde bonnes habitudes dès le jeune âgedans le cadre d’un programme enrichid’éducation civique serait sans douteun moyen efficace de profiter d’unetendance déjà bien ancrée chez lesjeunes générations, soit l’usage extensifd’Internet.

Ces suggestions visant à redresser laparticipation électorale sont axéessur une seule dimension : le niveauinférieur de connaissances des jeunesCanadiens. Or le second aspect, soitl’effet accru des connaissances sur levote chez les jeunes générations, esttout aussi important et, sans doute, ilprésente le plus grand défi à relever.

Il est tout à fait raisonnable de penserque les connaissances en politiqueauraient un effet sur la participationélectorale. Si les électeurs votent pourexercer leur influence sur la politiquepublique et ceux qui la formulent, ilsemble tout aussi naturel que ceux quisont moins renseignés sur ces questionset sur les acteurs politiques soient moinsenclins à se rendre aux urnes. Ce qui

Tableau 3Attention accordée à la politique à la télévisionet connaissances en politique

Âge Attention accordée Connaissancesà la politique en politiqueà la télévision (échelle de 0 à 100)

18-29 Peu 21

Moyennement 35

Beaucoup 54

30-39 Peu 38

Moyennement 45

Beaucoup 64

40-49 Peu 43

Moyennement 51

Beaucoup 61

50 Peu 51

et plus Moyennement 58

Beaucoup 65

L’attention accordée à la politique, mesurée à partir de l’attention accordée à

la campagne électorale fédérale à la télévision pendant les derniers jours de

la campagne (échelle de 0 à 10, 0 à 3 étant considéré « Peu », 4 à 6

« Moyennement » et 7 à 10 « Beaucoup »).

Source : Étude sur l’élection canadienne 2000

en revanche de façon plus marquéedans un modèle de cycle de vie. Lesjeunes adultes qui manifestent un peud’intérêt pour la politique sont plusenclins à s’y intéresser davantage aufur et à mesure qu’ils avancent en âge.Lorsque les divers éléments sont réunisdans un seul modèle de participationélectorale, les conclusions sont renfor-cées : l’intérêt pour la politique produitle plus grand effet dans le cas du modèlede cycle de vie de la participation élec-torale alors que les différences entre lescohortes s’expliquent essentiellementpar les connaissances en politique5.

Une certaine réflexion sur les liensdéterminants entre les connaissances etl’intérêt mine également la notion quela motivation est le principal élémentd’influence en ce qui concerne ledésengagement politique. S’il estraisonnable de suggérer que l’intérêtpuisse inciter quelqu’un à acquérir desconnaissances en politique, il est toutaussi raisonnable de supposer quel’éducation rend la politique plusintelligible et par conséquent plusintéressante. Ces deux aspects sont sansdoute liés dans un cercle vertueux,l’intérêt engendrant les connaissanceset les connaissances piquant la curiosité.Il suffirait d’un élan d’un côté ou del’autre du cercle pour déclencher lemouvement. Le simple bon sens

voudrait qu’une augmentation desconnaissances à l’adolescence, parexemple, soit très efficace puisque àcet âge, les intérêts sont relativementfluides et malléables. Des considéra-tions pratiques portent aussi à croireque le fait de souligner l’importance desconnaissances en politique représentela stratégie la plus sensée. Il semble en

effet moins difficiled’enseigner la politiqueaux jeunes que de lesamener à s’intéresser àune matière qu’ilsestiment tout à faitennuyeuse.

Éducation civique

Le raisonnement décritplus haut nous amèneà la question del’éducation civique.Les jeunes étudient-ilssuffisamment la poli-tique à l’école? Si nousen faisions plus, celaaurait-il un effet bénéfique sur lesconnaissances en politique et la parti-cipation électorale? La littérature dansce domaine est quelque peu ambiguë.Certains suggèrent que les effets à longterme de l’éducation civique soientmoins concluants, surtout si celle-ciest donnée trop tôt dans le cycle del’éducation6. Les grandes conclusionspeuvent toutefois masquer des dif-férences subtiles. Nous devons enapprendre davantage sur les incidenceséventuelles d’une éducation civique àgrand déploiement dans un pays oùl’on n’a jamais insisté sur le sujet et quisemble se classer après d’autres nationsà cet égard7.

Heureusement,nous disposonsd’une étude decas toute prête, àsavoir le nouveauprogrammed’éducation civiqueintroduit dans les

écoles secondaires de l’Ontario. Depuis2000, tous les élèves de la 10e annéedoivent prendre un cours d’éducationcivique dans le cadre du programmed’études canadiennes et mondiales8.Le caractère obligatoire du cours rendl’initiative encore plus intéressante etce, pour plusieurs raisons. D’abord, tousles élèves, y compris ceux qui autrement

n’auraient pas assisté à ce cours,reçoivent des rudiments d’éducationcivique. Par ailleurs, ce fait même estun avantage pour les chercheurs quidésirent évaluer les résultats de cenouveau programme. Si le coursd’éducation civique était facultatif,il soulèverait la problématique del’autosélection, c’est-à-dire que lesélèves ayant déjà des connaissancesen politique et un certain intérêt àcet égard seraient plus enclins à lesuivre. Il serait alors difficile d’évaluerle véritable impact du cours. Cettepossibilité n’existant pas, il devrait êtrepossible d’évaluer l’éducation civiquede manière plus définitive quant à sesincidences sur le niveau de connais-sances, l’engagement et la participa-tion politique. On pourra d’ailleurs leconstater très bientôt, puisque certainsfinissants pourront voter à la prochaineélection fédérale ou provinciale. Étudierces questions et diffuser les résultats desorte que les autres provinces puissentbénéficier de l’expérience de l’Ontarioserait une mesure concrète possible faceau problème du déclin de la participa-tion électorale des jeunes Canadiens.

Journaux, télévision et Internet

Lorsqu’on étudie le rôle éventuel del’éducation civique dans le rehaussementdes connaissances et de la participation,

Le simple bon sens voudrait qu’une augmentationdes connaissances à l’adolescence, par exemple,soit très efficace puisque à cet âge, les intérêtssont relativement fluides et malléables.

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Juillet 2003 2322 Perspectives électorales

il faut tenir compte des nombreuxcanaux d’influence. Comme d’autresl’ont déjà fait remarquer, l’éducationcivique suppose bien plus que debourrer les crânes des élèves avec desfaits. Il est tout aussi important de leurinculquer des compétences et despréférences qui soutiennent l’appren-tissage continu après les études. SelonHenry Milner, l’objectif devrait êtred’inculquer une « culture citoyenne »faisant que l’on se tienne spontanémentau courant de la politique9.

Un des aspects de cette culturecitoyenne dont on parle souvent estla lecture du journal. Les journauxreprésentent une source importanted’information politique, mais lesjeunes générations sont moins portéesà les acheter. Il y a aussi d’autresstratégies qui méritent tout autantd’être soulignées. La télévision sembleêtre le moyen de prédilection des jeunesCanadiens pour acquérir de l’informa-tion politique. Le tableau 3, basé surl’Étude sur l’élection canadienne 2000,illustre le niveau de connaissances en

politique des divers groupes d’âge rela-tivement à l’attention accordée à lacampagne électorale fédérale à latélévision; les connaissances en poli-tique sont mesurées sur une échellede 0 à 100. Dans le cas des personnesayant moins de 30 ans, l’effet de latélévision était certes remarquable :une différence de 33 points en con-naissances politiques distinguait lacatégorie qui l’écoutait peu de cellequi l’écoutait beaucoup. L’effet de latélévision était aussi considérable pourla catégorie adjacente (30 à 39 ans),mais diminuait considérablement pourles groupes plus âgés. La lecture desjournaux est également importantepour s’informer sur la politique et ce,pour tous les groupes, mais chez lesjeunes de 18 à 39 ans, c’est la télévi-sion qui affiche le plus grand effet,surtout si les variables sont soumises àdes contrôles par analyse multivariable10.

Une stratégie générale visant à rehausserle niveau de connaissances en politiquechez les jeunes Canadiens devrait doncviser notamment à modifier les habi-

tudes d’écoutedes jeunes demanière à cequ’ils accordentplus d’attentionà la politique.L’école estsans doute lemeilleur pointde départ. Envue de dévelop-per une culturecitoyenne, onpourrait inclureau programmed’éducationcivique l’écouted’émissionsaxées sur lapolitique. Toutcomme lesélèves doiventparfois lire lejournal tous lesjours pour ce

cours, ils pourraient aussi devoir suivreles actualités à la télévision tous lessoirs (ce qui risquerait d’ailleurs d’êtreplus productif). Les actualités pour-raient aussi être écoutées en classe etservir de base de discussions et dedébats. Pour ceux qui jurent par lapresse écrite, cette stratégie peutsembler une forme de capitulation,mais elle peut s’avérer le moyen le plusefficace de maintenir un niveau debase de connaissances en politiquepour les générations élevées à l’ère dela presse électronique.

On pourrait aussi encourager l’utilisationd’Internet comme source d’informationpolitique. Même si, à l’heure actuelle,on connaît peu les effets d’Internet surle niveau des connaissances en poli-tique11, la consultation régulière desites médiatiques fiables sur le Webpeut finir par valoir la lecture régulièredes journaux pour ce qui est d’accroîtreses connaissances en politique. Inculquerde bonnes habitudes dès le jeune âgedans le cadre d’un programme enrichid’éducation civique serait sans douteun moyen efficace de profiter d’unetendance déjà bien ancrée chez lesjeunes générations, soit l’usage extensifd’Internet.

Ces suggestions visant à redresser laparticipation électorale sont axéessur une seule dimension : le niveauinférieur de connaissances des jeunesCanadiens. Or le second aspect, soitl’effet accru des connaissances sur levote chez les jeunes générations, esttout aussi important et, sans doute, ilprésente le plus grand défi à relever.

Il est tout à fait raisonnable de penserque les connaissances en politiqueauraient un effet sur la participationélectorale. Si les électeurs votent pourexercer leur influence sur la politiquepublique et ceux qui la formulent, ilsemble tout aussi naturel que ceux quisont moins renseignés sur ces questionset sur les acteurs politiques soient moinsenclins à se rendre aux urnes. Ce qui

Tableau 3Attention accordée à la politique à la télévisionet connaissances en politique

Âge Attention accordée Connaissancesà la politique en politiqueà la télévision (échelle de 0 à 100)

18-29 Peu 21

Moyennement 35

Beaucoup 54

30-39 Peu 38

Moyennement 45

Beaucoup 64

40-49 Peu 43

Moyennement 51

Beaucoup 61

50 Peu 51

et plus Moyennement 58

Beaucoup 65

L’attention accordée à la politique, mesurée à partir de l’attention accordée à

la campagne électorale fédérale à la télévision pendant les derniers jours de

la campagne (échelle de 0 à 10, 0 à 3 étant considéré « Peu », 4 à 6

« Moyennement » et 7 à 10 « Beaucoup »).

Source : Étude sur l’élection canadienne 2000

en revanche de façon plus marquéedans un modèle de cycle de vie. Lesjeunes adultes qui manifestent un peud’intérêt pour la politique sont plusenclins à s’y intéresser davantage aufur et à mesure qu’ils avancent en âge.Lorsque les divers éléments sont réunisdans un seul modèle de participationélectorale, les conclusions sont renfor-cées : l’intérêt pour la politique produitle plus grand effet dans le cas du modèlede cycle de vie de la participation élec-torale alors que les différences entre lescohortes s’expliquent essentiellementpar les connaissances en politique5.

Une certaine réflexion sur les liensdéterminants entre les connaissances etl’intérêt mine également la notion quela motivation est le principal élémentd’influence en ce qui concerne ledésengagement politique. S’il estraisonnable de suggérer que l’intérêtpuisse inciter quelqu’un à acquérir desconnaissances en politique, il est toutaussi raisonnable de supposer quel’éducation rend la politique plusintelligible et par conséquent plusintéressante. Ces deux aspects sont sansdoute liés dans un cercle vertueux,l’intérêt engendrant les connaissanceset les connaissances piquant la curiosité.Il suffirait d’un élan d’un côté ou del’autre du cercle pour déclencher lemouvement. Le simple bon sens

voudrait qu’une augmentation desconnaissances à l’adolescence, parexemple, soit très efficace puisque àcet âge, les intérêts sont relativementfluides et malléables. Des considéra-tions pratiques portent aussi à croireque le fait de souligner l’importance desconnaissances en politique représentela stratégie la plus sensée. Il semble en

effet moins difficiled’enseigner la politiqueaux jeunes que de lesamener à s’intéresser àune matière qu’ilsestiment tout à faitennuyeuse.

Éducation civique

Le raisonnement décritplus haut nous amèneà la question del’éducation civique.Les jeunes étudient-ilssuffisamment la poli-tique à l’école? Si nousen faisions plus, celaaurait-il un effet bénéfique sur lesconnaissances en politique et la parti-cipation électorale? La littérature dansce domaine est quelque peu ambiguë.Certains suggèrent que les effets à longterme de l’éducation civique soientmoins concluants, surtout si celle-ciest donnée trop tôt dans le cycle del’éducation6. Les grandes conclusionspeuvent toutefois masquer des dif-férences subtiles. Nous devons enapprendre davantage sur les incidenceséventuelles d’une éducation civique àgrand déploiement dans un pays oùl’on n’a jamais insisté sur le sujet et quisemble se classer après d’autres nationsà cet égard7.

Heureusement,nous disposonsd’une étude decas toute prête, àsavoir le nouveauprogrammed’éducation civiqueintroduit dans les

écoles secondaires de l’Ontario. Depuis2000, tous les élèves de la 10e annéedoivent prendre un cours d’éducationcivique dans le cadre du programmed’études canadiennes et mondiales8.Le caractère obligatoire du cours rendl’initiative encore plus intéressante etce, pour plusieurs raisons. D’abord, tousles élèves, y compris ceux qui autrement

n’auraient pas assisté à ce cours,reçoivent des rudiments d’éducationcivique. Par ailleurs, ce fait même estun avantage pour les chercheurs quidésirent évaluer les résultats de cenouveau programme. Si le coursd’éducation civique était facultatif,il soulèverait la problématique del’autosélection, c’est-à-dire que lesélèves ayant déjà des connaissancesen politique et un certain intérêt àcet égard seraient plus enclins à lesuivre. Il serait alors difficile d’évaluerle véritable impact du cours. Cettepossibilité n’existant pas, il devrait êtrepossible d’évaluer l’éducation civiquede manière plus définitive quant à sesincidences sur le niveau de connais-sances, l’engagement et la participa-tion politique. On pourra d’ailleurs leconstater très bientôt, puisque certainsfinissants pourront voter à la prochaineélection fédérale ou provinciale. Étudierces questions et diffuser les résultats desorte que les autres provinces puissentbénéficier de l’expérience de l’Ontarioserait une mesure concrète possible faceau problème du déclin de la participa-tion électorale des jeunes Canadiens.

Journaux, télévision et Internet

Lorsqu’on étudie le rôle éventuel del’éducation civique dans le rehaussementdes connaissances et de la participation,

Le simple bon sens voudrait qu’une augmentationdes connaissances à l’adolescence, par exemple,soit très efficace puisque à cet âge, les intérêtssont relativement fluides et malléables.

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Juillet 2003 2524 Perspectives électorales

la Commission royale sur la réformeélectorale et le financement des partis.Les principaux chercheurs participantà ces études étaient : R. D. Lambert,S. D. Brown, J. E. Curtis, B. J. Kay etJ. M. Wilson pour l’étude sur l’électioncanadienne de 1984; André Blais etElisabeth Gidengil pour le Survey ofAttitudes About Electoral Reform(1990); Richard Johnston, AndréBlais, Henry Brady, Elisabeth Gidengilet Neil Nevitte pour l’étude sur l’élec-tion canadienne de 1993; André Blais,

Elisabeth Gidengil, Richard Nadeau etNeil Nevitte pour l’Étude sur l’électioncanadienne 1997; André Blais, ElisabethGidengil, Richard Nadeau et NeilNevitte pour l’Étude sur l’électioncanadienne 2000. Les chercheursoriginaux, les commanditaires desétudes et l’ISR n’assument aucuneresponsabilité pour les analyses etinterprétations dans le présentdocument.

1. Jon H. Pammett et Lawrence LeDuc,« Pourquoi la participation décline auxélections fédérales canadiennes : un nou-veau sondage des non-votants » [rapportaffiché en ligne], Élections Canada (mars2003), www.elections.ca sous la rubriqueLois et politiques électorales. Le taux departicipation générale de 64 % est le tauxcorrigé par Élections Canada après l’élec-tion de 2000, après que le Registre nationaldes électeurs a été purgé des doublons (lepremier taux était d’un peu plus de 61 %).

2. La logique étant que les effets du cycle devie peuvent diminuer la participationgénérale seulement si les jeunes représententla plus grande proportion de l’électorat.Toutefois, la répartition de l’électorat selonl’âge demeure plus ou moins constante aufil du temps.

3. André Blais et coll., « The Evolving Natureof Non-Voting: Evidence from Canada »,communication présentée lors de l’assembléeannuelle de l’American Political ScienceAssociation tenue à San Francisco du30 août au 2 septembre 2001.

4. Les cohortes du tableau 1 sont intégréesà des bandes plus larges des années denaissance du tableau 2 pour augmenterles tailles des échantillons et donner desestimations plus fiables.

5. Cette analyse a été faite au moyen des don-nées des études sur les élections canadiennesde 1984, 1988, 1993, 1997 et 2000. Cesrésultats ainsi que l’analyse des cohortes surl’intérêt pour la politique seront revus endétail par l’auteur dans un prochain article.

6. Voir Henry Milner, Civic Literacy: HowInformed Citizens Make Democracy Work,Hanover, New Hampshire, University Pressof New England, 2002, p. 118-121.

7. Les résultats du sondage international deconnaissances géopolitiques chez les jeunesde 18 à 24 ans placent le Canada en troisièmeavant-dernière place d’un groupe de neufpays, avant le Mexique et les États-Unis.Voir l’article intitulé « Geography QuizStumps College-Age Canadians » du Globeand Mail, le 21 novembre 2002, p. A14.

8. Détails provenant du ministère de l’Éducationde l’Ontario, « Le curriculum de l’Ontario,9e et 10e années, Études canadiennes etmondiales », p. 46-53, en ligne àhttp://www.edu.gov.on.ca/fre/document/curricul/secondary/canadian/canascf.pdf

9. Milner, Civic Literacy., surtout les chapitres7, 8 et 9.

10. Ces résultats sont présentés en détail dans« Name That Premier: The PoliticalKnowledge of Canadians Past and Present »,communication présentée par Paul Howeà l’assemblée annuelle de l’Associationcanadienne de science politique tenue àToronto du 29 au 31 mai 2002, p. 17-19.

11. L’utilisation d’Internet est comprise dansl’analyse multivariable de Paul Howe dans« Name That Premier », au tableau 4 enpage 31. Internet a un effet positif, bien queses effets sur les connaissances politiquessoient moindres que le fait de lire le journalou de regarder la télévision. La mesured’Internet du sondage servant à cette

analyse est relativement imprécise en cesens que l’on a simplement demandé auxgens s’ils se servaient d’Internet pour s’in-former de la politique. Une mesure plusprécise, à savoir quels sites Web étaientconsultés et combien de fois, aurait sansdoute donné de meilleurs résultats.

12. André Blais, To Vote or Not to Vote: TheMerits and Limits of Rational Choice Theory,Pittsburgh, University of Pittsburgh Press,2000, p. 92-114.

13. Blais, To Vote or Not to Vote, p. 97.

14. Voir Neil Nevitte, The Decline of Deference:Canadian Value Change in Cross-NationalPerspective Peterborough, Ontario, BroadviewPress, 1996 et Russell Dalton, Citizen Politics:Public Opinion and Political Parties inAdvanced Industrial Democracies, London,Chatham House Publishers, 2002, surtoutles chapitres 1 à 6.

NOTES

par ailleurs est le plus frappant dans leshabitudes de voter ou de ne pas voterdes cohortes est la différence que faitl’éducation dans la participation desjeunes cohortes, alors qu’elle fait sipeu de différence chez les cohortes plusâgées. Chez les cohortes plus âgées,l’écart entre la participation des per-sonnes les plus éduquées et les moinséduquées en la matière représentaitnormalement 10 points lors des récentesélections (voir le tableau 2), ce quisignifie qu’environ 80 % à 85 % descitoyens âgés mal informés votentmalgré ce manque évident.

Devoir civique

On peut supposer que la participationélectorale des générations plus âgées semaintient par autre chose que le désirde faire valoir son opinion sur les ques-tions de l’heure et les leaders qui lesgèreront. Certains ont suggéré qu’ils’agissait d’un sens profond du devoircivique12. Il incombe à chaque citoyen,qu’il soit immergé dans les questionsde l’heure ou non, de se présenteraux urnes le jour d’élection. Pour lesélecteurs qui sont de cet avis, le faitde voter relève plutôt d’un réflexe qued’une décision délibérée.

Les chercheurs qui lient l’importancedu devoir civique au fait de voter ont

en même tempsétabli que lesgroupes de jeunesavaient un sens dudevoir moinsprononcé13. Cephénomène cadreparfaitement avec lesgrandes tendancesqui ressortent deplusieurs études. Lesjeunes générationssont moins portées àemboîter le pas et àsuivre la ligne tracéepar les autres autourd’eux. Ces jeunessont plus autodéter-

minés, plus autonomes dans leurs prisesde décisions et moins enclins à s’enremettre à une autorité externe14. Ence qui concerne le fait de voter ounon, les jeunes sont davantage portés àse laisser guider par leurs propres idéesque par les pressions sociales.

C’est dans ce contexte que lesconnaissances politiques se manifestent.Les citoyens autodéterminés voteronts’ils estiment qu’il s’agit d’un geste

personnellement utile. Ce n’est sansdoute pas le cas des personnes qui nesont pas au courant de la politique.Le fait de cocher une case ou uneautre avec peu d’information pour lesorienter serait un geste vide, voirecontre-productif. Il est certes toujourspossible de s’informer au momentd’une élection, mais il est difficile detout commencer à zéro. La courbed’apprentissage serait extrêmementraide. C’est ainsi que les connaissances,en l’absence d’un grand sens du devoir

civique, influencent fortement ladécision de voter.

Conclusion

L’analyse de cet article est certesconjecturale, mais semble plausiblepour expliquer l’importance croissantedes connaissances dans la participationpolitique. Elle comporte aussi uneincidence de taille, à savoir que ledéclin de la participation électoralechez les jeunes Canadiens provient enpartie d’un mouvement culturel intensequi a modifié la base des actions socialeset politiques des nouvelles générations.Le comportement autodéterminé estdevenu une norme qui ne sera pasfacile à changer. Sans doute devra-t-onsimplement accepter les nouvellesmotivations relatives au fait de voterou non.

Or, si on ne peut changer cette partiede l’équation, on peut au moins s’enservir à notre avantage. Puisque lesconnaissances influencent fortement laparticipation électorale des cohortes dejeunes, on pourrait la faire augmentersensiblement grâce à une éducation

politique accrue. Enexaminant les diversfacteurs qui ontcontribué au déclinde la participationdes jeunes électeurs,on sera mieux enmesure de déterminerquelles approchespeuvent produire de

l’effet, et ainsi cerner les forces àmobiliser pour en profiter au maximum.

RemerciementsLes ensembles de données proviennentde l’Institute for Social Research (ISR)de l’Université York. Les études sur lesélections canadiennes de 1984, 1993,1997 et 2000 ont été financées par leConseil de recherche en scienceshumaines du Canada (CRSH). LeSurvey of Attitudes About ElectoralReform (1990) a été commandé par

Puisque les connaissances influencentfortement la participation électorale descohortes de jeunes, on pourrait la faireaugmenter sensiblement grâce à uneéducation politique accrue.

Le manque de connaissance des enjeux et des acteurs politiques estnettement moins susceptible de dissuader les Canadiens plus âgésde voter que les jeunes.

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Juillet 2003 2524 Perspectives électorales

la Commission royale sur la réformeélectorale et le financement des partis.Les principaux chercheurs participantà ces études étaient : R. D. Lambert,S. D. Brown, J. E. Curtis, B. J. Kay etJ. M. Wilson pour l’étude sur l’électioncanadienne de 1984; André Blais etElisabeth Gidengil pour le Survey ofAttitudes About Electoral Reform(1990); Richard Johnston, AndréBlais, Henry Brady, Elisabeth Gidengilet Neil Nevitte pour l’étude sur l’élec-tion canadienne de 1993; André Blais,

Elisabeth Gidengil, Richard Nadeau etNeil Nevitte pour l’Étude sur l’électioncanadienne 1997; André Blais, ElisabethGidengil, Richard Nadeau et NeilNevitte pour l’Étude sur l’électioncanadienne 2000. Les chercheursoriginaux, les commanditaires desétudes et l’ISR n’assument aucuneresponsabilité pour les analyses etinterprétations dans le présentdocument.

1. Jon H. Pammett et Lawrence LeDuc,« Pourquoi la participation décline auxélections fédérales canadiennes : un nou-veau sondage des non-votants » [rapportaffiché en ligne], Élections Canada (mars2003), www.elections.ca sous la rubriqueLois et politiques électorales. Le taux departicipation générale de 64 % est le tauxcorrigé par Élections Canada après l’élec-tion de 2000, après que le Registre nationaldes électeurs a été purgé des doublons (lepremier taux était d’un peu plus de 61 %).

2. La logique étant que les effets du cycle devie peuvent diminuer la participationgénérale seulement si les jeunes représententla plus grande proportion de l’électorat.Toutefois, la répartition de l’électorat selonl’âge demeure plus ou moins constante aufil du temps.

3. André Blais et coll., « The Evolving Natureof Non-Voting: Evidence from Canada »,communication présentée lors de l’assembléeannuelle de l’American Political ScienceAssociation tenue à San Francisco du30 août au 2 septembre 2001.

4. Les cohortes du tableau 1 sont intégréesà des bandes plus larges des années denaissance du tableau 2 pour augmenterles tailles des échantillons et donner desestimations plus fiables.

5. Cette analyse a été faite au moyen des don-nées des études sur les élections canadiennesde 1984, 1988, 1993, 1997 et 2000. Cesrésultats ainsi que l’analyse des cohortes surl’intérêt pour la politique seront revus endétail par l’auteur dans un prochain article.

6. Voir Henry Milner, Civic Literacy: HowInformed Citizens Make Democracy Work,Hanover, New Hampshire, University Pressof New England, 2002, p. 118-121.

7. Les résultats du sondage international deconnaissances géopolitiques chez les jeunesde 18 à 24 ans placent le Canada en troisièmeavant-dernière place d’un groupe de neufpays, avant le Mexique et les États-Unis.Voir l’article intitulé « Geography QuizStumps College-Age Canadians » du Globeand Mail, le 21 novembre 2002, p. A14.

8. Détails provenant du ministère de l’Éducationde l’Ontario, « Le curriculum de l’Ontario,9e et 10e années, Études canadiennes etmondiales », p. 46-53, en ligne àhttp://www.edu.gov.on.ca/fre/document/curricul/secondary/canadian/canascf.pdf

9. Milner, Civic Literacy., surtout les chapitres7, 8 et 9.

10. Ces résultats sont présentés en détail dans« Name That Premier: The PoliticalKnowledge of Canadians Past and Present »,communication présentée par Paul Howeà l’assemblée annuelle de l’Associationcanadienne de science politique tenue àToronto du 29 au 31 mai 2002, p. 17-19.

11. L’utilisation d’Internet est comprise dansl’analyse multivariable de Paul Howe dans« Name That Premier », au tableau 4 enpage 31. Internet a un effet positif, bien queses effets sur les connaissances politiquessoient moindres que le fait de lire le journalou de regarder la télévision. La mesured’Internet du sondage servant à cette

analyse est relativement imprécise en cesens que l’on a simplement demandé auxgens s’ils se servaient d’Internet pour s’in-former de la politique. Une mesure plusprécise, à savoir quels sites Web étaientconsultés et combien de fois, aurait sansdoute donné de meilleurs résultats.

12. André Blais, To Vote or Not to Vote: TheMerits and Limits of Rational Choice Theory,Pittsburgh, University of Pittsburgh Press,2000, p. 92-114.

13. Blais, To Vote or Not to Vote, p. 97.

14. Voir Neil Nevitte, The Decline of Deference:Canadian Value Change in Cross-NationalPerspective Peterborough, Ontario, BroadviewPress, 1996 et Russell Dalton, Citizen Politics:Public Opinion and Political Parties inAdvanced Industrial Democracies, London,Chatham House Publishers, 2002, surtoutles chapitres 1 à 6.

NOTES

par ailleurs est le plus frappant dans leshabitudes de voter ou de ne pas voterdes cohortes est la différence que faitl’éducation dans la participation desjeunes cohortes, alors qu’elle fait sipeu de différence chez les cohortes plusâgées. Chez les cohortes plus âgées,l’écart entre la participation des per-sonnes les plus éduquées et les moinséduquées en la matière représentaitnormalement 10 points lors des récentesélections (voir le tableau 2), ce quisignifie qu’environ 80 % à 85 % descitoyens âgés mal informés votentmalgré ce manque évident.

Devoir civique

On peut supposer que la participationélectorale des générations plus âgées semaintient par autre chose que le désirde faire valoir son opinion sur les ques-tions de l’heure et les leaders qui lesgèreront. Certains ont suggéré qu’ils’agissait d’un sens profond du devoircivique12. Il incombe à chaque citoyen,qu’il soit immergé dans les questionsde l’heure ou non, de se présenteraux urnes le jour d’élection. Pour lesélecteurs qui sont de cet avis, le faitde voter relève plutôt d’un réflexe qued’une décision délibérée.

Les chercheurs qui lient l’importancedu devoir civique au fait de voter ont

en même tempsétabli que lesgroupes de jeunesavaient un sens dudevoir moinsprononcé13. Cephénomène cadreparfaitement avec lesgrandes tendancesqui ressortent deplusieurs études. Lesjeunes générationssont moins portées àemboîter le pas et àsuivre la ligne tracéepar les autres autourd’eux. Ces jeunessont plus autodéter-

minés, plus autonomes dans leurs prisesde décisions et moins enclins à s’enremettre à une autorité externe14. Ence qui concerne le fait de voter ounon, les jeunes sont davantage portés àse laisser guider par leurs propres idéesque par les pressions sociales.

C’est dans ce contexte que lesconnaissances politiques se manifestent.Les citoyens autodéterminés voteronts’ils estiment qu’il s’agit d’un geste

personnellement utile. Ce n’est sansdoute pas le cas des personnes qui nesont pas au courant de la politique.Le fait de cocher une case ou uneautre avec peu d’information pour lesorienter serait un geste vide, voirecontre-productif. Il est certes toujourspossible de s’informer au momentd’une élection, mais il est difficile detout commencer à zéro. La courbed’apprentissage serait extrêmementraide. C’est ainsi que les connaissances,en l’absence d’un grand sens du devoir

civique, influencent fortement ladécision de voter.

Conclusion

L’analyse de cet article est certesconjecturale, mais semble plausiblepour expliquer l’importance croissantedes connaissances dans la participationpolitique. Elle comporte aussi uneincidence de taille, à savoir que ledéclin de la participation électoralechez les jeunes Canadiens provient enpartie d’un mouvement culturel intensequi a modifié la base des actions socialeset politiques des nouvelles générations.Le comportement autodéterminé estdevenu une norme qui ne sera pasfacile à changer. Sans doute devra-t-onsimplement accepter les nouvellesmotivations relatives au fait de voterou non.

Or, si on ne peut changer cette partiede l’équation, on peut au moins s’enservir à notre avantage. Puisque lesconnaissances influencent fortement laparticipation électorale des cohortes dejeunes, on pourrait la faire augmentersensiblement grâce à une éducation

politique accrue. Enexaminant les diversfacteurs qui ontcontribué au déclinde la participationdes jeunes électeurs,on sera mieux enmesure de déterminerquelles approchespeuvent produire de

l’effet, et ainsi cerner les forces àmobiliser pour en profiter au maximum.

RemerciementsLes ensembles de données proviennentde l’Institute for Social Research (ISR)de l’Université York. Les études sur lesélections canadiennes de 1984, 1993,1997 et 2000 ont été financées par leConseil de recherche en scienceshumaines du Canada (CRSH). LeSurvey of Attitudes About ElectoralReform (1990) a été commandé par

Puisque les connaissances influencentfortement la participation électorale descohortes de jeunes, on pourrait la faireaugmenter sensiblement grâce à uneéducation politique accrue.

Le manque de connaissance des enjeux et des acteurs politiques estnettement moins susceptible de dissuader les Canadiens plus âgésde voter que les jeunes.

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Juillet 2003 2726 Perspectives électorales

groupe ne sont pas enclins à s’inscrire,même l’effort d’inscription le plusambitieux produira des taux d’inscrip-tion inférieurs chez ce groupe parrapport à l’ensemble de l’électorat. Enconséquence, il est courant que l’inscrip-tion ciblée vise à inclure une certaineéducation politique pour réduire cetteréticence et offrir des raisons positivespour amener l’électorat à choisir des’inscrire. Ces campagnes font souventappel à des symboles et à des imagesqui sont considérés de façon positivepar le groupe visé, invoquent l’impor-tance du processus démocratique oumettent en lumière le pouvoir quidécoule de l’expression d’une préférencepolitique (par exemple, avec des sloganscomme « Ayez du poids », ou « Faites-vous entendre », qui ont été utiliséspar plusieurs autorités électorales).

De meilleures pratiques pourl’inscription des jeunes

L’une des stratégies d’inscription cibléeles plus souvent mises en œuvre par lesautorités électorales consiste à s’efforcerd’accroître l’inscription des jeunesélecteurs. Les jeunes sont souventconsidérés comme l’un des segmentsles plus importants de l’électorat àcibler, pour plusieurs raisons.• Les jeunes comptent en général l’un

des taux les plus faibles d’inscriptiondes électeurs.

• Les jeunes sont parmi les segmentsles plus mobiles de la population :ils déménagent souvent pour fairedes études ou simplement dans lecadre d’un mode de vie qui reposesur le désir de voyager, de changerd’emploi, etc.

• Souvent, ils ne se perçoivent pasvraiment comme membres à partentière d’une communauté politiqueou n’ont pas d’intérêt important dansleur collectivité (par opposition, parexemple, aux propriétaires ou auxparents d’enfants dans le systèmescolaire).

• Souvent, ils n’ont pas formé deshabitudes de participation politique.

• Comme ils représentent, dans unelarge mesure, les futurs citoyens d’unedémocratie, leur participation activeest liée au succès même du régimepolitique.

C’est notamment pour cela que l’aug-mentation de la participation politiqueet de l’inscription des jeunes électeursest souhaitable. C’est dans ce contexteque le directeur général des électionsdu Canada a annoncé récemment desinitiatives visant à augmenter l’inscrip-tion des électeurs chez les jeunes duCanada1. Il existe divers moyens demettre sur pied une initiative d’inscrip-tion ciblée des jeunes : certains ont étéadoptés au Canada et d’autres valentla peine d’être examinés par l’autoritéélectorale du Canada. La section sui-vante décrit un certain nombre detelles stratégies de ciblage.

Inscription provisoire

Une méthodeévidente pour aug-menter l’inscriptiondes électeurs quiarrivent à l’âge devoter serait de pro-longer la périoded’inscription enoffrant aux futursélecteurs la possibilitéde figurer sur uneliste électoraleprovisoire un an àl’avance. Grâce àcette méthode, quiest appliquée enAustralie et enNouvelle-Zélande ainsique dans certains États américains, lesjeunes remplissent un formulaire d’ins-cription à 17 ans. L’autorité électoraleles fait passer automatiquement de laliste provisoire à la liste électoralelorsqu’ils atteignent l’âge de lamajorité (ou l’âge de voter).

Le registre provisoire comporte uncertain nombre d’avantages non

négligeables. D’abord l’autorité élec-torale et les personnes qui approchentde l’âge de voter disposent d’une périodeplus longue pour communiquer entreelles. On estime qu’environ 2 % del’électorat atteint l’âge de voter chaqueannée. Il est raisonnable de supposerque, pour un scrutin donné, une trèsgrande proportion des personnes quideviennent admissibles au vote dansles trois mois (par exemple) de l’élec-tion ne figureraient pas dans le registredes électeurs. Par conséquent, environ0,5 % de l’électorat (c’est-à-dire ceuxqui arrivent à 18 ans dans ces trois mois)devrait s’inscrire pendant la périodede révision ou le jour du scrutin. Unregistre provisoire permettrait à cesmêmes nouveaux électeurs de disposerd’une année complète pour s’inscrireau registre, ce qui diminuerait proba-blement l’activité d’inscription pendantla période de révision. De plus, larépartition du travail sur une pluslongue période réduirait l’activité

accrue de l’autorité électorale pendantla période de révision et faciliteraitdu coup la gestion du personnel. Lesdonnées fournies par l’AustralianElectoral Commission (AEC) indiquentqu’environ 16 % des personnes de17 ans figurent sur la liste provisoireet, dans l’État de Victoria, 27 % despersonnes de 17 ans y figurent2. Il estrévélateur que la Victoria Electoral

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Le directeur général des élections du Canada, Jean-Pierre Kingsley,a dévoilé des mesures visant à s’attaquer à la baisse du taux departicipation électorale chez les jeunes lors d’un symposium sur laparticipation électorale au Canada, qui a eu lieu à l’UniversitéCarleton à Ottawa, le 21 mars 2003.

Augmentation de l’inscriptiondes jeunes électeurs de meilleures pratiques pourtoucher les jeunes électeurs

Keith ArcherProfesseur, Département des sciences politiques, Université de Calgary

Ce qui ressort le plus souvent des recherches qui se pour-suivent depuis deux générations sur le comportementpolitique dans un vaste éventail de milieux est que certainscitoyens sont plus susceptibles que d’autres de participer àla vie politique. Si les écarts dans l’activité politique étaiententièrement aléatoires, cet écart particulier pourrait êtreinterprété comme une caractéristique intéressante mais nonsignificative de la vie politique démocratique. En fait, lesécarts dans l’activité politique sont tout sauf aléatoires.Certains groupes d’électeurs sont moins susceptibles qued’autres groupes de participer à la vie politique et le sontdans un vaste éventail de régimes politiques. Parmi lesgroupes présentant les plus faibles taux de participation,on retrouve ceux qui ont les moyens économiques lesplus faibles, les jeunes, les membres des communautésautochtones et les nouveaux électeurs.

Le fait que les taux de participation varient systématiquementet qu’ils soient beaucoup plus faibles chez certains groupessoulève des questions importantes dans une démocratie. Onsuppose dans les régimes politiques démocratiques que laparticipation politique est importante tant pour le régimepolitique que pour la personne. Quant au régime, les citoyensqui y participent font un choix parmi des candidats rivaux etdes idées politiques concurrentes. Ils influent ainsi sur les typesde politiques et d’enjeux que le gouvernement met de l’avantet promeut. Les groupes dont la participation est plus faibleinflueront moins sur les politiques visées ou les idées défenduespar le gouvernement. En conséquence, les réalisations du

gouvernement refléteront probablement moins les préférenceset les priorités collectives de ces groupes d’électeurs.

Pour la personne, la participation politique est une expres-sion de l’appartenance à une communauté politique, dela volonté d’avoir son mot à dire quant à la façon d’êtregouverné. En participant à la vie politique, on peut avoirun meilleur sens du soutien de la communauté politique etdes élites au pouvoir. Les citoyens comprennent ainsi mieuxle processus électoral et leur rôle en tant que membres dela communauté politique.

En plus du fait que certains électeurs sont moins susceptiblesde participer à la vie politique, les études montrent queces mêmes segments de l’électorat sont moins enclins às’inscrire pour voter. Pour remédier à la situation, denombreuses autorités électorales ont voulu encourager às’inscrire les citoyens des groupes ayant historiquement destaux de participation inférieurs. Les autorités électoralescherchent généralement à augmenter l’inscription de cesélecteurs grâce à des campagnes d’inscription ciblées, quipeuvent varier considérablement selon les moyens créatifsgrâce auxquels les autorités tentent d’atteindre ces groupesdifficiles à rejoindre. Mais même les campagnes ciblées lesplus dynamiques ne parviennent guère à faire en sorte quetous les électeurs soient inscrits.

Il faut aussi examiner le désir de l’électorat difficile àrejoindre de s’inscrire pour voter. Si des membres d’un

Les jeunes et les élections

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Juillet 2003 2726 Perspectives électorales

groupe ne sont pas enclins à s’inscrire,même l’effort d’inscription le plusambitieux produira des taux d’inscrip-tion inférieurs chez ce groupe parrapport à l’ensemble de l’électorat. Enconséquence, il est courant que l’inscrip-tion ciblée vise à inclure une certaineéducation politique pour réduire cetteréticence et offrir des raisons positivespour amener l’électorat à choisir des’inscrire. Ces campagnes font souventappel à des symboles et à des imagesqui sont considérés de façon positivepar le groupe visé, invoquent l’impor-tance du processus démocratique oumettent en lumière le pouvoir quidécoule de l’expression d’une préférencepolitique (par exemple, avec des sloganscomme « Ayez du poids », ou « Faites-vous entendre », qui ont été utiliséspar plusieurs autorités électorales).

De meilleures pratiques pourl’inscription des jeunes

L’une des stratégies d’inscription cibléeles plus souvent mises en œuvre par lesautorités électorales consiste à s’efforcerd’accroître l’inscription des jeunesélecteurs. Les jeunes sont souventconsidérés comme l’un des segmentsles plus importants de l’électorat àcibler, pour plusieurs raisons.• Les jeunes comptent en général l’un

des taux les plus faibles d’inscriptiondes électeurs.

• Les jeunes sont parmi les segmentsles plus mobiles de la population :ils déménagent souvent pour fairedes études ou simplement dans lecadre d’un mode de vie qui reposesur le désir de voyager, de changerd’emploi, etc.

• Souvent, ils ne se perçoivent pasvraiment comme membres à partentière d’une communauté politiqueou n’ont pas d’intérêt important dansleur collectivité (par opposition, parexemple, aux propriétaires ou auxparents d’enfants dans le systèmescolaire).

• Souvent, ils n’ont pas formé deshabitudes de participation politique.

• Comme ils représentent, dans unelarge mesure, les futurs citoyens d’unedémocratie, leur participation activeest liée au succès même du régimepolitique.

C’est notamment pour cela que l’aug-mentation de la participation politiqueet de l’inscription des jeunes électeursest souhaitable. C’est dans ce contexteque le directeur général des électionsdu Canada a annoncé récemment desinitiatives visant à augmenter l’inscrip-tion des électeurs chez les jeunes duCanada1. Il existe divers moyens demettre sur pied une initiative d’inscrip-tion ciblée des jeunes : certains ont étéadoptés au Canada et d’autres valentla peine d’être examinés par l’autoritéélectorale du Canada. La section sui-vante décrit un certain nombre detelles stratégies de ciblage.

Inscription provisoire

Une méthodeévidente pour aug-menter l’inscriptiondes électeurs quiarrivent à l’âge devoter serait de pro-longer la périoded’inscription enoffrant aux futursélecteurs la possibilitéde figurer sur uneliste électoraleprovisoire un an àl’avance. Grâce àcette méthode, quiest appliquée enAustralie et enNouvelle-Zélande ainsique dans certains États américains, lesjeunes remplissent un formulaire d’ins-cription à 17 ans. L’autorité électoraleles fait passer automatiquement de laliste provisoire à la liste électoralelorsqu’ils atteignent l’âge de lamajorité (ou l’âge de voter).

Le registre provisoire comporte uncertain nombre d’avantages non

négligeables. D’abord l’autorité élec-torale et les personnes qui approchentde l’âge de voter disposent d’une périodeplus longue pour communiquer entreelles. On estime qu’environ 2 % del’électorat atteint l’âge de voter chaqueannée. Il est raisonnable de supposerque, pour un scrutin donné, une trèsgrande proportion des personnes quideviennent admissibles au vote dansles trois mois (par exemple) de l’élec-tion ne figureraient pas dans le registredes électeurs. Par conséquent, environ0,5 % de l’électorat (c’est-à-dire ceuxqui arrivent à 18 ans dans ces trois mois)devrait s’inscrire pendant la périodede révision ou le jour du scrutin. Unregistre provisoire permettrait à cesmêmes nouveaux électeurs de disposerd’une année complète pour s’inscrireau registre, ce qui diminuerait proba-blement l’activité d’inscription pendantla période de révision. De plus, larépartition du travail sur une pluslongue période réduirait l’activité

accrue de l’autorité électorale pendantla période de révision et faciliteraitdu coup la gestion du personnel. Lesdonnées fournies par l’AustralianElectoral Commission (AEC) indiquentqu’environ 16 % des personnes de17 ans figurent sur la liste provisoireet, dans l’État de Victoria, 27 % despersonnes de 17 ans y figurent2. Il estrévélateur que la Victoria Electoral

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Le directeur général des élections du Canada, Jean-Pierre Kingsley,a dévoilé des mesures visant à s’attaquer à la baisse du taux departicipation électorale chez les jeunes lors d’un symposium sur laparticipation électorale au Canada, qui a eu lieu à l’UniversitéCarleton à Ottawa, le 21 mars 2003.

Augmentation de l’inscriptiondes jeunes électeurs de meilleures pratiques pourtoucher les jeunes électeurs

Keith ArcherProfesseur, Département des sciences politiques, Université de Calgary

Ce qui ressort le plus souvent des recherches qui se pour-suivent depuis deux générations sur le comportementpolitique dans un vaste éventail de milieux est que certainscitoyens sont plus susceptibles que d’autres de participer àla vie politique. Si les écarts dans l’activité politique étaiententièrement aléatoires, cet écart particulier pourrait êtreinterprété comme une caractéristique intéressante mais nonsignificative de la vie politique démocratique. En fait, lesécarts dans l’activité politique sont tout sauf aléatoires.Certains groupes d’électeurs sont moins susceptibles qued’autres groupes de participer à la vie politique et le sontdans un vaste éventail de régimes politiques. Parmi lesgroupes présentant les plus faibles taux de participation,on retrouve ceux qui ont les moyens économiques lesplus faibles, les jeunes, les membres des communautésautochtones et les nouveaux électeurs.

Le fait que les taux de participation varient systématiquementet qu’ils soient beaucoup plus faibles chez certains groupessoulève des questions importantes dans une démocratie. Onsuppose dans les régimes politiques démocratiques que laparticipation politique est importante tant pour le régimepolitique que pour la personne. Quant au régime, les citoyensqui y participent font un choix parmi des candidats rivaux etdes idées politiques concurrentes. Ils influent ainsi sur les typesde politiques et d’enjeux que le gouvernement met de l’avantet promeut. Les groupes dont la participation est plus faibleinflueront moins sur les politiques visées ou les idées défenduespar le gouvernement. En conséquence, les réalisations du

gouvernement refléteront probablement moins les préférenceset les priorités collectives de ces groupes d’électeurs.

Pour la personne, la participation politique est une expres-sion de l’appartenance à une communauté politique, dela volonté d’avoir son mot à dire quant à la façon d’êtregouverné. En participant à la vie politique, on peut avoirun meilleur sens du soutien de la communauté politique etdes élites au pouvoir. Les citoyens comprennent ainsi mieuxle processus électoral et leur rôle en tant que membres dela communauté politique.

En plus du fait que certains électeurs sont moins susceptiblesde participer à la vie politique, les études montrent queces mêmes segments de l’électorat sont moins enclins às’inscrire pour voter. Pour remédier à la situation, denombreuses autorités électorales ont voulu encourager às’inscrire les citoyens des groupes ayant historiquement destaux de participation inférieurs. Les autorités électoralescherchent généralement à augmenter l’inscription de cesélecteurs grâce à des campagnes d’inscription ciblées, quipeuvent varier considérablement selon les moyens créatifsgrâce auxquels les autorités tentent d’atteindre ces groupesdifficiles à rejoindre. Mais même les campagnes ciblées lesplus dynamiques ne parviennent guère à faire en sorte quetous les électeurs soient inscrits.

Il faut aussi examiner le désir de l’électorat difficile àrejoindre de s’inscrire pour voter. Si des membres d’un

Les jeunes et les élections

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Juillet 2003 2928 Perspectives électorales

en Australie figuraient sur la listeprovisoire, comparativement à 27 %à Victoria. À l’échelle nationale,56 % des Australiens de 18 ans étaientinscrits, comparativement à 68 % deceux de l’État de Victoria. Par con-séquent, cette initiative semble avoirentraîné une augmentation del’inscription d’environ 10 % despersonnes admissibles5.

Inscription en ligne desélecteurs

La disponibilité d’ordinateurs personnelsayant une très grande capacité demémoire, jumelée à des liens de réseaude plus en plus fiables à très largebande de transmission de données, etl’accessibilité accrue aux ordinateursà la maison, à l’école et dans de nom-breux lieux publics (cafés Internet,bureaux des gouvernements, etc.)signifient qu’on peut maintenant avoirun système d’inscription électroniquedes électeurs, ou les éléments clés d’untel système, alors qu’on ne le pouvait pasil n’y a que dix ans. Le Canada compteparmi les pays les plus « branchés »du monde quant à l’usage des ordina-teurs, ce qui en fait un des endroits lesplus indiqués pour introduire l’inscrip-tion en ligne des électeurs. Commeles jeunes citoyens ont tendance àutiliser Internet davantage, les systèmesd’inscription en ligne des électeursdevraient nous permettre d’augmentersensiblement l’inscription chez lesjeunes.

Divers pays offrent une gammed’options pour l’inscription en lignedes électeurs. À une extrémité,Elections New Zealand offre le systèmed’inscription électronique le plus directet interactif, à www.elections.org.nz.L’électeur peut recevoir de l’informa-tion sur le processus d’inscription,vérifier et modifier ses renseignementspour l’inscription, s’inscrire pour lapremière fois ou s’inscrire de nouveauaprès avoir quitté le registre pendantune certaine période.

En Australie, bien que les formulairesd’inscription de tous les États soientaccessibles sur le site Web de l’AEC6,l’électeur doit d’abord imprimer etremplir le formulaire, puis l’envoyerau bureau d’inscription de l’État ou dudistrict par la poste ou par télécopieur,ou présenter le formulaire en personne.En plus de l’étape supplémentaire quiconsiste à imprimer le formulaire et àl’envoyer par la poste, il faut d’aprèsles formulaires d’inscription australiensqu’un électeur admissible à s’inscrirefasse attester le formulaire rempli parun témoin. Cette dernière exigence

alourdit énormément l’inscription enligne, en particulier parce que c’est lasignature du témoin qui tient lieu degarantie. Par ailleurs, contrairement aucas de la Nouvelle-Zélande, l’AEC nepermet pas aux électeurs de vérifierleur inscription en ligne. Bien que laliste électorale soit considérée commeun document public, elle n’est pasaccessible en ligne, mais plutôt aubureau principal de l’État ou dans lesbureaux divisionnaires de l’AEC. Enoutre, pour vérifier s’il est inscrit, c’estl’électeur lui-même qui doit présenterune demande, par écrit et sous sasignature. En Australie, l’importanceattachée à la sécurité de la liste élec-torale et l’application de procéduresstrictes visant à dissuader les fraudeurséventuels ont limité l’exploitation del’inscription en ligne.

Dans une de ses premières initiatives,la nouvelle Electoral Commission duRoyaume-Uni a également versé lesformulaires d’inscription des électeurssur Internet7. Comme dans le cas del’Australie, le formulaire doit être

imprimé et rempli, puis signé parl’électeur – mais non par un témoin –et envoyé au bureau d’inscription dudistrict. Il n’existe aucune dispositionpermettant à l’électeur de vérifier enligne l’information relative à soninscription. En outre, le temps detraitement des renseignements pourl’inscription est relativement long(sept semaines). Une des principalesraisons pour lesquelles l’inscription enligne n’est pas complètement interac-tive est que le registre électoral estéminemment décentralisé. Si laproposition de l’Electoral Commission

relative à un registreélectronique nationalest retenue, onreconsidérera proba-blement le systèmed’inscription enligne qui se limiteà rendre les formu-laires accessiblesplutôt que d’offrir

l’inscription interactive complète.L’annonce récente de l’initiatived’inscription ciblée des jeunes parÉlections Canada laisse entrevoir unprocessus échelonné. La premièrephase, semblable au cas australien etau cas britannique, consistera à offrirdes formulaires téléchargeables surle site Web d’Élections Canada. Deplus, Élections Canada s’est engagé àtrouver les moyens de mettre en œuvrel’inscription en ligne complète. Onpeut s’attendre à ce que cette dernièreinitiative contribue le plus à l’augmenta-tion de l’inscription des jeunes.

Événements spéciaux

Une approche particulièrementnouvelle pour rejoindre les jeunesélecteurs consiste à organiser desévénements qui attirent ce grouped’âge et à y intégrer des activitésd’inscription même si les jeunes yparticipent pour d’autres raisons. Onprocède ainsi en Nouvelle-Zélande.L’autorité électorale parraine desconcerts et des festivals lors desquels

Le Canada compte parmi les pays les plus« branchés » du monde quant à l’usagedes ordinateurs, ce qui en fait un desendroits les plus indiqués pour introduirel’inscription en ligne des électeurs.

Commission envoie une carted’anniversaire et un formulaired’inscription aux personnes pour leur17e anniversaire, aspect sur lequel nousreviendrons plus loin3.

Incitations à l’inscriptionscolaire

On inclut de plus en plus dans le cadredes activités ciblées d’inscription desjeunes une campagne pour les campusuniversitaires et collégiaux. Une nou-velle méthode utilisée en Australiequi s’appuie sur la liste provisoire desélecteurs de 17 ans consiste à concluredes ententes avec les écoles secondairespour les activités d’inscription. L’autoritéélectorale verse un petit montant parétudiant à l’école, d’après le nombred’étudiants de l’école qui figurent surla liste électorale. L’avantage de cetarrangement, jumelé à l’existenced’une liste électorale provisoire, estque l’effort d’inscription peut avoir lieudans les écoles secondaires, en plus desuniversités et des collèges. L’écolesecondaire est plus avantageuse parceque la fréquentation de l’école secon-daire est nettement supérieure àcelle des écoles postsecondaires et,par conséquent, la campagne ciblée aune portée plus large. De plus, il estpossible dans les écoles secondairesd’intégrer une campagne d’éducation

politique à un programme d’éducationcivique offert à tous les étudiants, cequi ne peut tout simplement pas se fairedans les établissements d’enseignementpostsecondaire. Sans l’existence d’uneliste électorale provisoire pour lespersonnes de 17 ans, l’incitation às’inscrire dans les écoles secondairesserait beaucoup moins efficace,

puisque dans une grande proportion,les étudiants ne seraient pas en âgede voter.

Un certain nombre d’autoritésélectorales ont élaboré du matérield’éducation politique expressémentpour accroître l’inscription chez lesjeunes. Dans son examen des pratiquesde l’AEC, l’Australian National AuditOffice a recommandé que l’AECcollabore avec les autorités scolairespour élaborer du matériel didactiquevisant à augmenter la proportion desjeunes électeurs inscrits4. ÉlectionsCanada a conclu récemment unpartenariat avec l’initiative La câblo-éducation pour encourager les jeunes àpréparer des messages d’intérêt publicqui font la promotion de la participa-tion de leurs pairs.

Même avant l’établissement d’une listeélectorale provisoire et l’intégrationd’activités d’inscription dans les écolessecondaires, de nombreuses autoritésélectorales avaient entrepris des acti-vités d’inscription dans les campusuniversitaires et collégiaux. Commela plupart des universités ont des clubspolitiques et proposent également une« semaine des clubs » chaque année(habituellement au début de l’automne),on pourrait par exemple solliciter laparticipation de ces clubs aux efforts

de publicité des ini-tiatives d’inscriptiondes électeurs. Bienque cela s’inscriveavantageusementdans le cadre d’uneactivité déjà prévue,le problème est queles efforts déployés

par un club particulier pourraient êtreinspirés autant par le désir d’un avan-tage partisan que par un sens d’espritcivique garant de possibilités égales des’inscrire pour tous les jeunes qui ysont admissibles. Une autre solution,qui est probablement meilleure, con-siste à tenir ces événements séparémentdes clubs politiques, chaque année ou

au cours de la période de révisionprécédant une élection. Bien que cettestratégie ait des conséquences évidentesen matière de dotation en personnelpour l’autorité électorale, certainesautorités électorales l’ont trouvéesuffisamment efficace pour en justifierla dépense supplémentaire.

Cartes d’anniversaire

L’autorité électorale peut apprendrede diverses façons quand un électeuratteint l’âge de voter – au moyen parexemple de fichiers de donnéespartagés avec une administration destransports en commun, une autoritéfiscale ou une autre autorité publique.Dans certains cas, on utilise l’informa-tion pour produire un envoi postalaux électeurs arrivant à l’âge de voter,envoi qui peut aussi comprendre dumatériel d’éducation politique et,probablement, un formulaire d’inscrip-tion de l’électeur. Cette approchepersonnalise la communication avecl’électeur, lui offre de l’informationimportante à titre de citoyen et facilitele processus d’inscription. Commepremier contact avec un nouvelélecteur admissible, cette stratégie esttrès rentable et pourrait être utiliséeavec une liste électorale provisoire(une carte est envoyée aux électeursà leur 17e anniversaire) ou une listerégulière (une carte est envoyée à18 ans). Le directeur général des élec-tions du Canada a annoncé en mars2003 qu’il enverra une carte de vœuxou un certificat aux électeurs à la suitede leur 18e anniversaire. Il les féliciterad’avoir atteint l’âge de voter et lesencouragera à s’inscrire.

La Victoria Electoral Commissionenvoie une carte d’anniversaire auxélecteurs à leur 17e anniversaire, lesfélicitant d’avoir le droit de s’inscriresur la liste électorale provisoire et leurmentionnant qu’ils seront placésautomatiquement sur la liste électoralelorsqu’ils atteindront 18 ans. Le 30 juin2002, 16 % des personnes de 17 ans

Un certain nombre d’autorités électoralesont élaboré du matériel d’éducationpolitique expressément pour accroîtrel’inscription chez les jeunes.

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Juillet 2003 2928 Perspectives électorales

en Australie figuraient sur la listeprovisoire, comparativement à 27 %à Victoria. À l’échelle nationale,56 % des Australiens de 18 ans étaientinscrits, comparativement à 68 % deceux de l’État de Victoria. Par con-séquent, cette initiative semble avoirentraîné une augmentation del’inscription d’environ 10 % despersonnes admissibles5.

Inscription en ligne desélecteurs

La disponibilité d’ordinateurs personnelsayant une très grande capacité demémoire, jumelée à des liens de réseaude plus en plus fiables à très largebande de transmission de données, etl’accessibilité accrue aux ordinateursà la maison, à l’école et dans de nom-breux lieux publics (cafés Internet,bureaux des gouvernements, etc.)signifient qu’on peut maintenant avoirun système d’inscription électroniquedes électeurs, ou les éléments clés d’untel système, alors qu’on ne le pouvait pasil n’y a que dix ans. Le Canada compteparmi les pays les plus « branchés »du monde quant à l’usage des ordina-teurs, ce qui en fait un des endroits lesplus indiqués pour introduire l’inscrip-tion en ligne des électeurs. Commeles jeunes citoyens ont tendance àutiliser Internet davantage, les systèmesd’inscription en ligne des électeursdevraient nous permettre d’augmentersensiblement l’inscription chez lesjeunes.

Divers pays offrent une gammed’options pour l’inscription en lignedes électeurs. À une extrémité,Elections New Zealand offre le systèmed’inscription électronique le plus directet interactif, à www.elections.org.nz.L’électeur peut recevoir de l’informa-tion sur le processus d’inscription,vérifier et modifier ses renseignementspour l’inscription, s’inscrire pour lapremière fois ou s’inscrire de nouveauaprès avoir quitté le registre pendantune certaine période.

En Australie, bien que les formulairesd’inscription de tous les États soientaccessibles sur le site Web de l’AEC6,l’électeur doit d’abord imprimer etremplir le formulaire, puis l’envoyerau bureau d’inscription de l’État ou dudistrict par la poste ou par télécopieur,ou présenter le formulaire en personne.En plus de l’étape supplémentaire quiconsiste à imprimer le formulaire et àl’envoyer par la poste, il faut d’aprèsles formulaires d’inscription australiensqu’un électeur admissible à s’inscrirefasse attester le formulaire rempli parun témoin. Cette dernière exigence

alourdit énormément l’inscription enligne, en particulier parce que c’est lasignature du témoin qui tient lieu degarantie. Par ailleurs, contrairement aucas de la Nouvelle-Zélande, l’AEC nepermet pas aux électeurs de vérifierleur inscription en ligne. Bien que laliste électorale soit considérée commeun document public, elle n’est pasaccessible en ligne, mais plutôt aubureau principal de l’État ou dans lesbureaux divisionnaires de l’AEC. Enoutre, pour vérifier s’il est inscrit, c’estl’électeur lui-même qui doit présenterune demande, par écrit et sous sasignature. En Australie, l’importanceattachée à la sécurité de la liste élec-torale et l’application de procéduresstrictes visant à dissuader les fraudeurséventuels ont limité l’exploitation del’inscription en ligne.

Dans une de ses premières initiatives,la nouvelle Electoral Commission duRoyaume-Uni a également versé lesformulaires d’inscription des électeurssur Internet7. Comme dans le cas del’Australie, le formulaire doit être

imprimé et rempli, puis signé parl’électeur – mais non par un témoin –et envoyé au bureau d’inscription dudistrict. Il n’existe aucune dispositionpermettant à l’électeur de vérifier enligne l’information relative à soninscription. En outre, le temps detraitement des renseignements pourl’inscription est relativement long(sept semaines). Une des principalesraisons pour lesquelles l’inscription enligne n’est pas complètement interac-tive est que le registre électoral estéminemment décentralisé. Si laproposition de l’Electoral Commission

relative à un registreélectronique nationalest retenue, onreconsidérera proba-blement le systèmed’inscription enligne qui se limiteà rendre les formu-laires accessiblesplutôt que d’offrir

l’inscription interactive complète.L’annonce récente de l’initiatived’inscription ciblée des jeunes parÉlections Canada laisse entrevoir unprocessus échelonné. La premièrephase, semblable au cas australien etau cas britannique, consistera à offrirdes formulaires téléchargeables surle site Web d’Élections Canada. Deplus, Élections Canada s’est engagé àtrouver les moyens de mettre en œuvrel’inscription en ligne complète. Onpeut s’attendre à ce que cette dernièreinitiative contribue le plus à l’augmenta-tion de l’inscription des jeunes.

Événements spéciaux

Une approche particulièrementnouvelle pour rejoindre les jeunesélecteurs consiste à organiser desévénements qui attirent ce grouped’âge et à y intégrer des activitésd’inscription même si les jeunes yparticipent pour d’autres raisons. Onprocède ainsi en Nouvelle-Zélande.L’autorité électorale parraine desconcerts et des festivals lors desquels

Le Canada compte parmi les pays les plus« branchés » du monde quant à l’usagedes ordinateurs, ce qui en fait un desendroits les plus indiqués pour introduirel’inscription en ligne des électeurs.

Commission envoie une carted’anniversaire et un formulaired’inscription aux personnes pour leur17e anniversaire, aspect sur lequel nousreviendrons plus loin3.

Incitations à l’inscriptionscolaire

On inclut de plus en plus dans le cadredes activités ciblées d’inscription desjeunes une campagne pour les campusuniversitaires et collégiaux. Une nou-velle méthode utilisée en Australiequi s’appuie sur la liste provisoire desélecteurs de 17 ans consiste à concluredes ententes avec les écoles secondairespour les activités d’inscription. L’autoritéélectorale verse un petit montant parétudiant à l’école, d’après le nombred’étudiants de l’école qui figurent surla liste électorale. L’avantage de cetarrangement, jumelé à l’existenced’une liste électorale provisoire, estque l’effort d’inscription peut avoir lieudans les écoles secondaires, en plus desuniversités et des collèges. L’écolesecondaire est plus avantageuse parceque la fréquentation de l’école secon-daire est nettement supérieure àcelle des écoles postsecondaires et,par conséquent, la campagne ciblée aune portée plus large. De plus, il estpossible dans les écoles secondairesd’intégrer une campagne d’éducation

politique à un programme d’éducationcivique offert à tous les étudiants, cequi ne peut tout simplement pas se fairedans les établissements d’enseignementpostsecondaire. Sans l’existence d’uneliste électorale provisoire pour lespersonnes de 17 ans, l’incitation às’inscrire dans les écoles secondairesserait beaucoup moins efficace,

puisque dans une grande proportion,les étudiants ne seraient pas en âgede voter.

Un certain nombre d’autoritésélectorales ont élaboré du matérield’éducation politique expressémentpour accroître l’inscription chez lesjeunes. Dans son examen des pratiquesde l’AEC, l’Australian National AuditOffice a recommandé que l’AECcollabore avec les autorités scolairespour élaborer du matériel didactiquevisant à augmenter la proportion desjeunes électeurs inscrits4. ÉlectionsCanada a conclu récemment unpartenariat avec l’initiative La câblo-éducation pour encourager les jeunes àpréparer des messages d’intérêt publicqui font la promotion de la participa-tion de leurs pairs.

Même avant l’établissement d’une listeélectorale provisoire et l’intégrationd’activités d’inscription dans les écolessecondaires, de nombreuses autoritésélectorales avaient entrepris des acti-vités d’inscription dans les campusuniversitaires et collégiaux. Commela plupart des universités ont des clubspolitiques et proposent également une« semaine des clubs » chaque année(habituellement au début de l’automne),on pourrait par exemple solliciter laparticipation de ces clubs aux efforts

de publicité des ini-tiatives d’inscriptiondes électeurs. Bienque cela s’inscriveavantageusementdans le cadre d’uneactivité déjà prévue,le problème est queles efforts déployés

par un club particulier pourraient êtreinspirés autant par le désir d’un avan-tage partisan que par un sens d’espritcivique garant de possibilités égales des’inscrire pour tous les jeunes qui ysont admissibles. Une autre solution,qui est probablement meilleure, con-siste à tenir ces événements séparémentdes clubs politiques, chaque année ou

au cours de la période de révisionprécédant une élection. Bien que cettestratégie ait des conséquences évidentesen matière de dotation en personnelpour l’autorité électorale, certainesautorités électorales l’ont trouvéesuffisamment efficace pour en justifierla dépense supplémentaire.

Cartes d’anniversaire

L’autorité électorale peut apprendrede diverses façons quand un électeuratteint l’âge de voter – au moyen parexemple de fichiers de donnéespartagés avec une administration destransports en commun, une autoritéfiscale ou une autre autorité publique.Dans certains cas, on utilise l’informa-tion pour produire un envoi postalaux électeurs arrivant à l’âge de voter,envoi qui peut aussi comprendre dumatériel d’éducation politique et,probablement, un formulaire d’inscrip-tion de l’électeur. Cette approchepersonnalise la communication avecl’électeur, lui offre de l’informationimportante à titre de citoyen et facilitele processus d’inscription. Commepremier contact avec un nouvelélecteur admissible, cette stratégie esttrès rentable et pourrait être utiliséeavec une liste électorale provisoire(une carte est envoyée aux électeursà leur 17e anniversaire) ou une listerégulière (une carte est envoyée à18 ans). Le directeur général des élec-tions du Canada a annoncé en mars2003 qu’il enverra une carte de vœuxou un certificat aux électeurs à la suitede leur 18e anniversaire. Il les féliciterad’avoir atteint l’âge de voter et lesencouragera à s’inscrire.

La Victoria Electoral Commissionenvoie une carte d’anniversaire auxélecteurs à leur 17e anniversaire, lesfélicitant d’avoir le droit de s’inscriresur la liste électorale provisoire et leurmentionnant qu’ils seront placésautomatiquement sur la liste électoralelorsqu’ils atteindront 18 ans. Le 30 juin2002, 16 % des personnes de 17 ans

Un certain nombre d’autorités électoralesont élaboré du matériel d’éducationpolitique expressément pour accroîtrel’inscription chez les jeunes.

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Juillet 2003 3130 Perspectives électorales

L’art de vendre la participationélectorale à la générationMusiquePlus

Phillip HaidDirecteur de comptes, Manifest Communications

Lors d’un récent voyage en avion à Winnipeg, j’avais pourvoisin un jeune homme de 22 ans qui venait d’une petiteville de l’Ontario et travaillait pour un fabricant de matérielagricole. C’était la première fois qu’il prenait un avion deligne et cela le rendait un peu nerveux. Après les plaisanteriesd’usage sur le temps, les voyages en avion et les moustiquesde Winnipeg, nous avons commencé à parler de choses pluscaptivantes comme la guerre en Irak, le SRAS et la politiquecanadienne.

J’ai alors demandé à mon voisin ce qu’il pensait des politicienscanadiens, et s’il avait voté aux dernières élections fédéralesou provinciales. Il m’a répondu que non (en ajoutantd’ailleurs qu’aucun de ses amis ne pensait jamais à voter)et m’a proposé le conseil suivant : « Nous devons retournerà l’époque de la Grèce antique, parce que les Grecs avaientcompris ce qu’était une démocratie. Ils avaient compris qu’ilfallait parler aux citoyens et faire en sorte que la politiques’adresse à monsieur-tout-le-monde ».

Sa réflexion a mis le doigt sur un facteur important de lafaible participation électorale chez les jeunes : la pertinence.Pour les jeunes Canadiens, le fait de se rendre aux urnesn’est pas particulièrement attrayant. Même s’il est vrai qu’unegrande majorité des jeunes n’a pas d’éducation politique oucivique, cela ne devrait pas servir d’excuse pour ne pasessayer de les intéresser davantage à la politique. Au con-traire, il incombe aux gouvernements, aux organismes sansbut lucratif et aux entreprises d’aider à raviver l’intérêt desjeunes pour les systèmes politiques, de sorte que le votesoit vraiment une expression de leurs croyances et gestesdémocratiques. Il faut réapprendre à exercer le droit de vote,du moins dans le sens où il s’agit d’une forme reconnue departicipation démocratique. Tous les jeunes Canadiensdoivent prendre l’habitude de voter.

Le but de cet article consiste à donner quelques idées per-mettant de rétablir une pertinence politique et de ramenerles jeunes Canadiens aux urnes. Il porte sur trois grandesquestions : Pourquoi les jeunes ne votent-ils pas? Que peut-onfaire pour renverser cette tendance? De quelle manière faut-ils’y prendre?

Ni intéressés et ni motivés : Pourquoiles jeunes ne votent pas

La grande majorité des jeunes Canadiens (entre 18 et24 ans) ne votent pas. À la dernière élection fédérale, àpeine 25,4 % des jeunes votants admissibles se sont présentésaux urnes, soit le taux de participation le plus faible dansl’histoire du Canada1. L’explication que donnent le plussouvent les journalistes, les experts et les jeunes eux-mêmesest le cynisme, c’est-à-dire la méfiance à l’égard des politicienset la croyance que le fait de voter ne changera rien. Il estvrai que le cynisme joue un rôle dans la baisse de la partici-pation des jeunes, mais il n’en est pas l’élément moteur.D’ailleurs, des recherches indiquent que les jeunes ne sontpas plus cyniques à l’égard du gouvernement ou de lapolitique que leurs aînés2.

Les jeunes et les élections

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l’animateur et les artistes encouragentles participants à remplir les formu-laires d’inscription des électeurs quisont fournis par l’autorité électorale àdes kiosques ou tables. On n’a pasd’information sur le coût par inscrip-tion de cette initiative, mais lors d’unecommunication personnelle, un fonc-tionnaire de la Nouvelle-Zélande aestimé qu’elle est « très efficace ».L’autorité électorale pourrait pour varieroffrir de parrainer en partie l’organisa-tion de spectacles visant les jeunes, enéchange d’une reconnaissance de sacontribution et de la possibilité que lesorganisateurs, l’animateur et les artistesfassent la promotion de l’activitéd’inscription.

Conclusion

Les jeunes de nombreux pays manifestentdepuis longtemps des taux inférieurs departicipation aux activités politiquesconventionnelles de soutien du régimepolitique comme l’élection. Cettetendance s’explique de nombreusesfaçons – la plus grande mobilité

résidentielle, l’absence d’habitudesélectorales établies et un attachementplus faible à la collectivité, entre autres.Il est probable que cette tendancepersistera, ce qui ne signifie toutefoispas qu’on doive être complaisant. Desarrangements administratifs adaptésqui réduiraient les écarts de l’inscriptiondes électeurs et de la participationpolitique bénéficient tant à l’électeur

qu’au régime politique. Même sil’autorité électorale ne peut paséliminer les écarts dans les taux departicipation des différents groupesde la société, elle pourrait lesatténuer en appliquant de meilleurespratiques.

1. Voir « Le directeur général des électionsdu Canada annonce des mesures pourredresser le déclin de la participationélectorale des jeunes » [communiqué enligne], Élections Canada (21 mars 2003),www.elections.ca.

2. Données fournies par l’AustralianElectoral Commission, « YouthEnrolment Statistics: Enrolment byAge as a Percentage of Population »,le 30 juin 2002.

3. Données fournies par l’AustralianElectoral Commission, « YouthEnrolment » (aucune date).

4. « Australian Electoral Commission:Integrity of the Electoral Roll », [rapporten ligne], Australian National AuditOffice, Canberra, 2002, www.anao.gov.au.

5. Données fournies par l’AustralianElectoral Commission, « YouthEnrolment Statistics, 2002 ».

6. Formulaire d’inscription en ligne :www.aec.gov.au/_content/what/enrolment/forms.htm.

7. Voir www.electoralcommission.gov.uk/your-vote/rollingreg.cfm.

NOTES

Le 6 avril 2003, plusieurs milliers de jeunes ont assisté à l’activité « Rush the Vote », à Ottawa,mettant en vedette de nombreux artistes, groupes et intervenants qui les ont encouragés às’engager dans des causes politiques et sociales.

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Juillet 2003 3130 Perspectives électorales

L’art de vendre la participationélectorale à la générationMusiquePlus

Phillip HaidDirecteur de comptes, Manifest Communications

Lors d’un récent voyage en avion à Winnipeg, j’avais pourvoisin un jeune homme de 22 ans qui venait d’une petiteville de l’Ontario et travaillait pour un fabricant de matérielagricole. C’était la première fois qu’il prenait un avion deligne et cela le rendait un peu nerveux. Après les plaisanteriesd’usage sur le temps, les voyages en avion et les moustiquesde Winnipeg, nous avons commencé à parler de choses pluscaptivantes comme la guerre en Irak, le SRAS et la politiquecanadienne.

J’ai alors demandé à mon voisin ce qu’il pensait des politicienscanadiens, et s’il avait voté aux dernières élections fédéralesou provinciales. Il m’a répondu que non (en ajoutantd’ailleurs qu’aucun de ses amis ne pensait jamais à voter)et m’a proposé le conseil suivant : « Nous devons retournerà l’époque de la Grèce antique, parce que les Grecs avaientcompris ce qu’était une démocratie. Ils avaient compris qu’ilfallait parler aux citoyens et faire en sorte que la politiques’adresse à monsieur-tout-le-monde ».

Sa réflexion a mis le doigt sur un facteur important de lafaible participation électorale chez les jeunes : la pertinence.Pour les jeunes Canadiens, le fait de se rendre aux urnesn’est pas particulièrement attrayant. Même s’il est vrai qu’unegrande majorité des jeunes n’a pas d’éducation politique oucivique, cela ne devrait pas servir d’excuse pour ne pasessayer de les intéresser davantage à la politique. Au con-traire, il incombe aux gouvernements, aux organismes sansbut lucratif et aux entreprises d’aider à raviver l’intérêt desjeunes pour les systèmes politiques, de sorte que le votesoit vraiment une expression de leurs croyances et gestesdémocratiques. Il faut réapprendre à exercer le droit de vote,du moins dans le sens où il s’agit d’une forme reconnue departicipation démocratique. Tous les jeunes Canadiensdoivent prendre l’habitude de voter.

Le but de cet article consiste à donner quelques idées per-mettant de rétablir une pertinence politique et de ramenerles jeunes Canadiens aux urnes. Il porte sur trois grandesquestions : Pourquoi les jeunes ne votent-ils pas? Que peut-onfaire pour renverser cette tendance? De quelle manière faut-ils’y prendre?

Ni intéressés et ni motivés : Pourquoiles jeunes ne votent pas

La grande majorité des jeunes Canadiens (entre 18 et24 ans) ne votent pas. À la dernière élection fédérale, àpeine 25,4 % des jeunes votants admissibles se sont présentésaux urnes, soit le taux de participation le plus faible dansl’histoire du Canada1. L’explication que donnent le plussouvent les journalistes, les experts et les jeunes eux-mêmesest le cynisme, c’est-à-dire la méfiance à l’égard des politicienset la croyance que le fait de voter ne changera rien. Il estvrai que le cynisme joue un rôle dans la baisse de la partici-pation des jeunes, mais il n’en est pas l’élément moteur.D’ailleurs, des recherches indiquent que les jeunes ne sontpas plus cyniques à l’égard du gouvernement ou de lapolitique que leurs aînés2.

Les jeunes et les élections

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l’animateur et les artistes encouragentles participants à remplir les formu-laires d’inscription des électeurs quisont fournis par l’autorité électorale àdes kiosques ou tables. On n’a pasd’information sur le coût par inscrip-tion de cette initiative, mais lors d’unecommunication personnelle, un fonc-tionnaire de la Nouvelle-Zélande aestimé qu’elle est « très efficace ».L’autorité électorale pourrait pour varieroffrir de parrainer en partie l’organisa-tion de spectacles visant les jeunes, enéchange d’une reconnaissance de sacontribution et de la possibilité que lesorganisateurs, l’animateur et les artistesfassent la promotion de l’activitéd’inscription.

Conclusion

Les jeunes de nombreux pays manifestentdepuis longtemps des taux inférieurs departicipation aux activités politiquesconventionnelles de soutien du régimepolitique comme l’élection. Cettetendance s’explique de nombreusesfaçons – la plus grande mobilité

résidentielle, l’absence d’habitudesélectorales établies et un attachementplus faible à la collectivité, entre autres.Il est probable que cette tendancepersistera, ce qui ne signifie toutefoispas qu’on doive être complaisant. Desarrangements administratifs adaptésqui réduiraient les écarts de l’inscriptiondes électeurs et de la participationpolitique bénéficient tant à l’électeur

qu’au régime politique. Même sil’autorité électorale ne peut paséliminer les écarts dans les taux departicipation des différents groupesde la société, elle pourrait lesatténuer en appliquant de meilleurespratiques.

1. Voir « Le directeur général des électionsdu Canada annonce des mesures pourredresser le déclin de la participationélectorale des jeunes » [communiqué enligne], Élections Canada (21 mars 2003),www.elections.ca.

2. Données fournies par l’AustralianElectoral Commission, « YouthEnrolment Statistics: Enrolment byAge as a Percentage of Population »,le 30 juin 2002.

3. Données fournies par l’AustralianElectoral Commission, « YouthEnrolment » (aucune date).

4. « Australian Electoral Commission:Integrity of the Electoral Roll », [rapporten ligne], Australian National AuditOffice, Canberra, 2002, www.anao.gov.au.

5. Données fournies par l’AustralianElectoral Commission, « YouthEnrolment Statistics, 2002 ».

6. Formulaire d’inscription en ligne :www.aec.gov.au/_content/what/enrolment/forms.htm.

7. Voir www.electoralcommission.gov.uk/your-vote/rollingreg.cfm.

NOTES

Le 6 avril 2003, plusieurs milliers de jeunes ont assisté à l’activité « Rush the Vote », à Ottawa,mettant en vedette de nombreux artistes, groupes et intervenants qui les ont encouragés às’engager dans des causes politiques et sociales.

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Juillet 2003 3332 Perspectives électorales

inquiétant que l’on peut appeler « degénération ». De nos jours, les jeunesadultes ne manifestent pas les signesindiquant qu’ils s’intéresseront proba-blement au vote au fur et à mesure qu’ilsavanceront en âge. De fait, ils votentmoins que leurs grands-parents à leurâge. Dans ce cas, le manque d’intérêtqui existe aujourd’hui aura des con-séquences sur la démocratie canadiennepour les générations à venir.

Renverser la tendance

La solution pour renverser cet « effetde génération » consiste à souleverl’intérêt de mon voisin de siège d’AirCanada et d’autres comme lui. Pourvendre la participation électorale àdes jeunes, il faut un autre cadre deréférence. C’est plutôt une affaire decœur que de raison. Il faut une nou-velle façon d’aborder le problème. Lespetites étapes progressives ne suffisentpas. Il faut changer le comportement àgrande échelle. L’argument rationnelsoulignant l’importance d’exercer sesdroits démocratiques n’aura pas lemême poids que les arguments quireposent sur des valeurs et des initia-tives rejoignant directement le sens desoi et d’identité des jeunes. La démo-cratie participative doit devenir unstyle de vie, et le fait de voter doitfaire partie de ce style de vie.

Les changements de comportement seproduisent non pas parce que les genscomprennent soudainement mieux lesenjeux, mais plutôt parce qu’ils sevoient différemment dans leur relationavec ces enjeux. Les Canadiens n’ontpas commencé à recycler à la fin desannées 1980 et au début des années1990 parce qu’ils avaient soudaine-ment mieux compris les effets desdéchets sur l’environnement. Ils ontcommencé à recycler en raison de ladynamique sociale qui avait été crééeet dans laquelle la Boîte bleue deve-nait une étiquette visible d’un citoyenbien-pensant. On était content decontribuer de manière positive à

l’environnement et personne ne voulaitêtre la seule personne du voisinage àne pas participer à l’effort de recyclage.

La participation électorale exige lacréation d’une nouvelle norme socialedans laquelle les jeunes verraient de lavaleur dans le fait de voter et affiche-raient cette participation au processuspolitique comme une marqued’identité.

Il ne sera pas facile de créer cette nou-velle norme civique, compte tenu dufait que les Canadiens ne forment pasun groupe homogène et que les effortsdéployés pour hausser la participationsemblent se manifester uniquement enpériode électorale. Les efforts mis enœuvre en période électorale ne motiventque ceux qui sont déjà intéressés etpeuvent provoquer du cynisme chez lesautres. La période électorale est tropcourte pour persuader les jeunesCanadiens qu’il vaut la peine de voter.C’est pour cette raison que la périodeentre les élections compte le plus.C’est à ce moment-là que les partispolitiques, les ministères et les orga-nismes gouvernementaux, les organismessans but lucratif et les entreprisesdevraient mobiliser leurs ressources etleurs talents pour créer une nouvellenorme de participation civique.

En raison de l’hiatus entre la perceptionque les jeunes ont de l’exercice du voteet des autres activités civiques, la créa-tion d’une telle norme doit être reliéeà la valeur sous-jacente au fait de voter.Le vote n’est pas considéré au mêmetitre que le bénévolat, que le fait demanifester, de donner de l’argent à desœuvres de bienfaisance ou de signerdes pétitions. Les jeunes ne considèrentpas le vote comme une occasion ou unoutil pour s’exprimer ou confirmer leurvoix. La personne pour qui l’on voteou l’élection de son candidat préféréest secondaire au fait de s’exprimer, dela même façon que l’action de manifesterest au moins aussi importante que lesrésultats.

Il manque aussi une dimensionhumaine au fait de voter parce que laplupart des jeunes Canadiens ne con-naissent pas et n’ont jamais rencontréla personne qui les représente auxniveaux municipal, provincial oufédéral. Les élus sont un mystère pourles jeunes. On ne comprend pas trèsbien ce qu’ils font et comment le gou-vernement fonctionne. Cette situationest en partie attribuable au fait que,dans une grande mesure, les élus nerejoignent pas les jeunes et que s’ils lefont, c’est en période électorale, gestetrès transparent du point de vue dujeune électorat.

Si, en tant que société, nous voulonsencourager une plus grande participa-tion électorale chez les jeunesCanadiens, alors tous les secteursdoivent y contribuer et ce, d’unemanière pertinente pour les jeunes.Il faut les encourager, leur montrer enmatière d’engagement civique unedémarche différente où ils connaî-traient les outils à leur disposition etseraient convaincus qu’en les utilisant,ils pourraient changer les choses.

Quelques idées pour engagerles jeunes votants : uneperspective de marketing social

Hausser la participation électorale desjeunes relève d’un désir conscient etdélibéré d’instaurer un changementsocial. D’un point de vue de marketingsocial, un programme de sensibilisationdes électeurs devrait inclure quatreéléments : des moyens d’augmenter lesconnaissances et la compréhension; desactivités visant à instaurer un climatsocial; de l’éducation et de la sensibilisa-tion; et des initiatives stratégiques.

Augmenter les connaissanceset la compréhensionPour joindre les jeunes Canadiens, ilfaut bien comprendre leurs attitudes etleurs comportements. Comme ils neforment pas un groupe homogène, ilest important de segmenter. Ce qui

Manque d’éducation politiqueet civiqueUn des grands responsables de la faibleparticipation des jeunes est l’absenced’éducation politique et civique.Plusieurs études ont attiré l’attentionsur le fait que les jeunes connaissentmal le gouvernement, la politique,l’histoire et l’actualité3. Un sondagefait en 2000 par l’Institut de rechercheen politiques publiques a révélé que50 % des jeunes adultes ne suivaientpas la politique de près4.

Qu’est-ce qui a donné lieu à cetteabsence d’éducation civique chez les

jeunes? Les écoles n’ont pas accordésuffisamment d’attention et d’impor-tance à l’éducation civique dans leurprogramme. Les ministères et lesorganismes gouvernementaux n’ontpas eu les moyens financiers de livrerdes campagnes multimédias à grandeéchelle entre les élections dans le butde promouvoir l’importance du vote etde l’engagement civique. Les partispolitiques et les élus n’ont pas fait degrands efforts pour engager les jeunesdans un dialogue utile et permanent.Les parents ne discutent pas de poli-tique ou d’engagement civique autantqu’il serait peut-être nécessaire. Etenfin, les jeunes ne cherchent pas àconnaître le système politique. En con-séquence, les jeunes adultes ne sontessentiellement « pas intéressés » à lapolitique ni au gouvernement. Dansun tel contexte, il est difficile de fairecomprendre la pertinence du vote.

Manque de confianceLes autres raisons de la faible participa-tion reflètent « le manque de motiva-tion » dont la presse parle souvent. Onprétend que les jeunes ne sont pas

intéressés à la politique ni au gouverne-ment parce qu’ils ne font pas confianceaux politiciens ni au système politiqueet qu’ils ne croient pas que le fait devoter changera quoi que ce soit. Parexemple, dans le cadre des groupes dediscussion menés pour CommunicationCanada en 2001, les jeunes Canadiensse plaignaient principalement dumanque de leadership politique néces-saire à les inspirer et à les aider à croirequ’il y a effectivement une personne etune cause pour laquelle il est importantde voter. Les récents scandales qui onteu lieu dans les rangs du gouvernementau sujet de l’attribution irrégulière de

contrats et de l’abusfinancier ont aidé àrenforcer cette per-ception. Le manqued’intérêt provientaussi de la percep-tion que le gouverne-ment ne comprend

pas les besoins et les intérêts des jeunes,comme le confirme d’ailleurs le rapportde Communication Canada intitulé Àl’écoute des Canadiens : Regard sur lesjeunes adultes (2002) : 70 % des jeunesadultes ne croient pas que le gouverne-ment fédéral comprenne ce qu’ilsrecherchent.

MondialisationLa mondialisation a aussi élargi l’écartentre les jeunes et les institutionspolitiques, entraînant une incidencenégative sur la participation électorale.Dans un univers multimédia où l’infor-mation est omniprésente, les jeunesadultes sont en train de devenir « sur-informés et sous-engagés ». La multi-plicité des enjeux, des préoccupationset des causes crée une forme deparalysie, amenant les jeunes à penserqu’il y a trop de problèmes à régler etpas assez de temps pour faire ce quicompte vraiment5.

La mondialisation a aussi créé ununivers dans lequel les grandes marqueset les styles de vie mis en valeur surle marché ont tendance à dominer

l’esprit des jeunes adultes. Les entre-prises dépensent plus d’argent pourfaçonner les attitudes et les comporte-ments que les gouvernements. Ainsi,les jeunes ont grandi dans une culturede marché et de consommation où lapertinence du gouvernement est mar-ginalisée. Molson, Labatt, Roots, TimHorton et Canadian Tire sont toutesdes entreprises qui contribuent àdéfinir la notion de « Canadien ». Sicette situation ne change pas, pourquoiles jeunes adultes se donneraient-ils lapeine de voter alors que ce sont lesconsommateurs qui définissent lesvaleurs? Nous n’en sommes peut-êtrepas là, mais les gouvernements doiventmieux se vendre auprès des jeunes etmieux communiquer avec eux. Desrecherches récentes révèlent que 62 %des jeunes adultes ne croient pas que legouvernement fédéral communiquebien avec eux6.

Étape de transition de la vieLes jeunes adultes sont naturellementmoins enclins à voter pendant l’étapede transition de leur vie qui se situeentre 18 et 24 ans. Ils sont occupés àtrouver un emploi, à s’inscrire dans uneuniversité ou un collège, à quitter lamaison de leurs parents, à voyager, à semarier, à acheter leur première maisonet à fonder une famille. Ils sont dansune phase très mobile et turbulentedans laquelle ils ont déjà assez de malà exprimer leur personnalité tout enessayant de s’intégrer dans le milieu etde s’y conformer. La politique et levote sont loin sur la liste des « chosesà faire » en priorités.

Effet de générationLe manque d’intérêt et de motivationdes jeunes Canadiens n’est peut-êtrepas simplement lié à une étape de leurvie et il ne s’améliorera peut-être pasen vieillissant, en payant de l’impôt eten s’installant dans une communauté.Des universitaires de renommée (JonPammett et Lawrence LeDuc, BrendaO’Neill, André Blais et autres) ontfait remarquer qu’il existait un effet

Les partis politiques et les élus n’ont pas faitde grands efforts pour engager les jeunesdans un dialogue utile et permanent.

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Juillet 2003 3332 Perspectives électorales

inquiétant que l’on peut appeler « degénération ». De nos jours, les jeunesadultes ne manifestent pas les signesindiquant qu’ils s’intéresseront proba-blement au vote au fur et à mesure qu’ilsavanceront en âge. De fait, ils votentmoins que leurs grands-parents à leurâge. Dans ce cas, le manque d’intérêtqui existe aujourd’hui aura des con-séquences sur la démocratie canadiennepour les générations à venir.

Renverser la tendance

La solution pour renverser cet « effetde génération » consiste à souleverl’intérêt de mon voisin de siège d’AirCanada et d’autres comme lui. Pourvendre la participation électorale àdes jeunes, il faut un autre cadre deréférence. C’est plutôt une affaire decœur que de raison. Il faut une nou-velle façon d’aborder le problème. Lespetites étapes progressives ne suffisentpas. Il faut changer le comportement àgrande échelle. L’argument rationnelsoulignant l’importance d’exercer sesdroits démocratiques n’aura pas lemême poids que les arguments quireposent sur des valeurs et des initia-tives rejoignant directement le sens desoi et d’identité des jeunes. La démo-cratie participative doit devenir unstyle de vie, et le fait de voter doitfaire partie de ce style de vie.

Les changements de comportement seproduisent non pas parce que les genscomprennent soudainement mieux lesenjeux, mais plutôt parce qu’ils sevoient différemment dans leur relationavec ces enjeux. Les Canadiens n’ontpas commencé à recycler à la fin desannées 1980 et au début des années1990 parce qu’ils avaient soudaine-ment mieux compris les effets desdéchets sur l’environnement. Ils ontcommencé à recycler en raison de ladynamique sociale qui avait été crééeet dans laquelle la Boîte bleue deve-nait une étiquette visible d’un citoyenbien-pensant. On était content decontribuer de manière positive à

l’environnement et personne ne voulaitêtre la seule personne du voisinage àne pas participer à l’effort de recyclage.

La participation électorale exige lacréation d’une nouvelle norme socialedans laquelle les jeunes verraient de lavaleur dans le fait de voter et affiche-raient cette participation au processuspolitique comme une marqued’identité.

Il ne sera pas facile de créer cette nou-velle norme civique, compte tenu dufait que les Canadiens ne forment pasun groupe homogène et que les effortsdéployés pour hausser la participationsemblent se manifester uniquement enpériode électorale. Les efforts mis enœuvre en période électorale ne motiventque ceux qui sont déjà intéressés etpeuvent provoquer du cynisme chez lesautres. La période électorale est tropcourte pour persuader les jeunesCanadiens qu’il vaut la peine de voter.C’est pour cette raison que la périodeentre les élections compte le plus.C’est à ce moment-là que les partispolitiques, les ministères et les orga-nismes gouvernementaux, les organismessans but lucratif et les entreprisesdevraient mobiliser leurs ressources etleurs talents pour créer une nouvellenorme de participation civique.

En raison de l’hiatus entre la perceptionque les jeunes ont de l’exercice du voteet des autres activités civiques, la créa-tion d’une telle norme doit être reliéeà la valeur sous-jacente au fait de voter.Le vote n’est pas considéré au mêmetitre que le bénévolat, que le fait demanifester, de donner de l’argent à desœuvres de bienfaisance ou de signerdes pétitions. Les jeunes ne considèrentpas le vote comme une occasion ou unoutil pour s’exprimer ou confirmer leurvoix. La personne pour qui l’on voteou l’élection de son candidat préféréest secondaire au fait de s’exprimer, dela même façon que l’action de manifesterest au moins aussi importante que lesrésultats.

Il manque aussi une dimensionhumaine au fait de voter parce que laplupart des jeunes Canadiens ne con-naissent pas et n’ont jamais rencontréla personne qui les représente auxniveaux municipal, provincial oufédéral. Les élus sont un mystère pourles jeunes. On ne comprend pas trèsbien ce qu’ils font et comment le gou-vernement fonctionne. Cette situationest en partie attribuable au fait que,dans une grande mesure, les élus nerejoignent pas les jeunes et que s’ils lefont, c’est en période électorale, gestetrès transparent du point de vue dujeune électorat.

Si, en tant que société, nous voulonsencourager une plus grande participa-tion électorale chez les jeunesCanadiens, alors tous les secteursdoivent y contribuer et ce, d’unemanière pertinente pour les jeunes.Il faut les encourager, leur montrer enmatière d’engagement civique unedémarche différente où ils connaî-traient les outils à leur disposition etseraient convaincus qu’en les utilisant,ils pourraient changer les choses.

Quelques idées pour engagerles jeunes votants : uneperspective de marketing social

Hausser la participation électorale desjeunes relève d’un désir conscient etdélibéré d’instaurer un changementsocial. D’un point de vue de marketingsocial, un programme de sensibilisationdes électeurs devrait inclure quatreéléments : des moyens d’augmenter lesconnaissances et la compréhension; desactivités visant à instaurer un climatsocial; de l’éducation et de la sensibilisa-tion; et des initiatives stratégiques.

Augmenter les connaissanceset la compréhensionPour joindre les jeunes Canadiens, ilfaut bien comprendre leurs attitudes etleurs comportements. Comme ils neforment pas un groupe homogène, ilest important de segmenter. Ce qui

Manque d’éducation politiqueet civiqueUn des grands responsables de la faibleparticipation des jeunes est l’absenced’éducation politique et civique.Plusieurs études ont attiré l’attentionsur le fait que les jeunes connaissentmal le gouvernement, la politique,l’histoire et l’actualité3. Un sondagefait en 2000 par l’Institut de rechercheen politiques publiques a révélé que50 % des jeunes adultes ne suivaientpas la politique de près4.

Qu’est-ce qui a donné lieu à cetteabsence d’éducation civique chez les

jeunes? Les écoles n’ont pas accordésuffisamment d’attention et d’impor-tance à l’éducation civique dans leurprogramme. Les ministères et lesorganismes gouvernementaux n’ontpas eu les moyens financiers de livrerdes campagnes multimédias à grandeéchelle entre les élections dans le butde promouvoir l’importance du vote etde l’engagement civique. Les partispolitiques et les élus n’ont pas fait degrands efforts pour engager les jeunesdans un dialogue utile et permanent.Les parents ne discutent pas de poli-tique ou d’engagement civique autantqu’il serait peut-être nécessaire. Etenfin, les jeunes ne cherchent pas àconnaître le système politique. En con-séquence, les jeunes adultes ne sontessentiellement « pas intéressés » à lapolitique ni au gouvernement. Dansun tel contexte, il est difficile de fairecomprendre la pertinence du vote.

Manque de confianceLes autres raisons de la faible participa-tion reflètent « le manque de motiva-tion » dont la presse parle souvent. Onprétend que les jeunes ne sont pas

intéressés à la politique ni au gouverne-ment parce qu’ils ne font pas confianceaux politiciens ni au système politiqueet qu’ils ne croient pas que le fait devoter changera quoi que ce soit. Parexemple, dans le cadre des groupes dediscussion menés pour CommunicationCanada en 2001, les jeunes Canadiensse plaignaient principalement dumanque de leadership politique néces-saire à les inspirer et à les aider à croirequ’il y a effectivement une personne etune cause pour laquelle il est importantde voter. Les récents scandales qui onteu lieu dans les rangs du gouvernementau sujet de l’attribution irrégulière de

contrats et de l’abusfinancier ont aidé àrenforcer cette per-ception. Le manqued’intérêt provientaussi de la percep-tion que le gouverne-ment ne comprend

pas les besoins et les intérêts des jeunes,comme le confirme d’ailleurs le rapportde Communication Canada intitulé Àl’écoute des Canadiens : Regard sur lesjeunes adultes (2002) : 70 % des jeunesadultes ne croient pas que le gouverne-ment fédéral comprenne ce qu’ilsrecherchent.

MondialisationLa mondialisation a aussi élargi l’écartentre les jeunes et les institutionspolitiques, entraînant une incidencenégative sur la participation électorale.Dans un univers multimédia où l’infor-mation est omniprésente, les jeunesadultes sont en train de devenir « sur-informés et sous-engagés ». La multi-plicité des enjeux, des préoccupationset des causes crée une forme deparalysie, amenant les jeunes à penserqu’il y a trop de problèmes à régler etpas assez de temps pour faire ce quicompte vraiment5.

La mondialisation a aussi créé ununivers dans lequel les grandes marqueset les styles de vie mis en valeur surle marché ont tendance à dominer

l’esprit des jeunes adultes. Les entre-prises dépensent plus d’argent pourfaçonner les attitudes et les comporte-ments que les gouvernements. Ainsi,les jeunes ont grandi dans une culturede marché et de consommation où lapertinence du gouvernement est mar-ginalisée. Molson, Labatt, Roots, TimHorton et Canadian Tire sont toutesdes entreprises qui contribuent àdéfinir la notion de « Canadien ». Sicette situation ne change pas, pourquoiles jeunes adultes se donneraient-ils lapeine de voter alors que ce sont lesconsommateurs qui définissent lesvaleurs? Nous n’en sommes peut-êtrepas là, mais les gouvernements doiventmieux se vendre auprès des jeunes etmieux communiquer avec eux. Desrecherches récentes révèlent que 62 %des jeunes adultes ne croient pas que legouvernement fédéral communiquebien avec eux6.

Étape de transition de la vieLes jeunes adultes sont naturellementmoins enclins à voter pendant l’étapede transition de leur vie qui se situeentre 18 et 24 ans. Ils sont occupés àtrouver un emploi, à s’inscrire dans uneuniversité ou un collège, à quitter lamaison de leurs parents, à voyager, à semarier, à acheter leur première maisonet à fonder une famille. Ils sont dansune phase très mobile et turbulentedans laquelle ils ont déjà assez de malà exprimer leur personnalité tout enessayant de s’intégrer dans le milieu etde s’y conformer. La politique et levote sont loin sur la liste des « chosesà faire » en priorités.

Effet de générationLe manque d’intérêt et de motivationdes jeunes Canadiens n’est peut-êtrepas simplement lié à une étape de leurvie et il ne s’améliorera peut-être pasen vieillissant, en payant de l’impôt eten s’installant dans une communauté.Des universitaires de renommée (JonPammett et Lawrence LeDuc, BrendaO’Neill, André Blais et autres) ontfait remarquer qu’il existait un effet

Les partis politiques et les élus n’ont pas faitde grands efforts pour engager les jeunesdans un dialogue utile et permanent.

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Juillet 2003 3534 Perspectives électorales

leur démarche de sensibilisation desjeunes. Ils doivent comprendre qu’ilpeut être très utile d’engager les jeunessur des questions d’intérêt réciproque(violence, abus d’alcool et d’autresdrogues, perfectionnement professionnel,etc.) au moment de préparer des pro-grammes et des stratégies qui aurontune incidence sur leur vie. Les entre-prises canadiennes ont aussi un rôleimportant à jouer compte tenu desrelations qu’ils cultivent avec lesjeunes. Labatt, VIA Rail, Roots et Bellne sont que quelques-unes des entre-prises canadiennes qui ciblent lesjeunes adultes et dont les initiativescommunautaires peuvent aider à pro-mouvoir la participation électorale etengendrer un mouvement de plusgrande envergure.

Les salles de cours constituent un autreendroit évident où on peut engager lesjeunes. Cependant, il faut pour celadu matériel d’éducation civique pro-mouvant un apprentissage interactif,intéressant et expérientiel. Le faitd’inviter des conférenciers, les excursionsscolaires, les jeux de simulation, lesfilms, les débats et les projets pratiquesexposant les jeunes aux enjeux et auxstratégies à grande échelle aideront lesjeunes à se sensibiliser au monde et àla communauté et les amèneront à

participer aux élections municipales,provinciales et fédérales.

Initiatives stratégiquesPour hausser la participation électoraledes jeunes, il faut aussi modifier lesstratégies visant à amener le change-ment social désiré. Il est questiondepuis 20 ans de réduire l’âge du voteà 16 ans pour encourager les jeunesCanadiens à s’engager dans le proces-sus politique. De nombreux observa-teurs ont fait valoir que si les jeunesétaient suffisamment responsables à16 ans pour conduire une voiture, ilsdevraient pouvoir voter. Il serait bond’explorer cette question ainsi qued’autres questions relatives à l’inscrip-tion des électeurs et au vote en ligne.Ce sont tous des sujets qui susciterontle dialogue et le débat chez les jeunes.

Conclusion

Pour augmenter la participation élec-torale des jeunes, les quatre élémentsde la dynamique du changement socialdécrits plus haut doivent être mis enœuvre de manière intégrée et intégrante.Il est cependant essentiel de créer lebon climat social pour que les autresactivités soient bien appuyées et qu’unélan soit donné. Pour que l’éventail etle niveau d’activités soient suffisants, il

faut que le leadership soit assumé parun organisme, désirant élaborer unplan coordonné qui incorpore les idéeset les ressources des secteurs public,privé et bénévole. Pour arriver àobtenir un plus grand engagementcivique et politique des jeunes, il fautune orientation de marketing social,du moins si nous voulons vraimentrenverser l’effet de génération et forgerune démocratie participative danslaquelle le vote fera partie des habi-tudes de vie des petits-enfants de lagénération MusiquePlus.

1. Jean-Pierre Kingsley, conférencier princi-pal lors du Symposium sur la participationélectorale au Canada, Université Carleton,Ottawa, 21 mars 2003. Le texte intégralest affiché à www.elections.ca sous larubrique Médias : Activités spéciales etconférences.

2. Voir Jon H. Pammett et Lawrence LeDuc,« Pourquoi la participation décline auxélections fédérales canadiennes : un nou-veau sondage des non-votants » [rapportde recherche en ligne], Élections Canada(mars 2003), affiché à www.elections.casous la rubrique Lois et politiques électorales;Brenda O’Neill, « Generational Patternsin the Political Opinions and Behaviours

of Canadians », Policy Matters, vol. 2, no 5(octobre 2001); et André Blais, ElisabethGidengil, Richard Nadeau et Neil Nevitte,Anatomy of a Liberal Victory: Making Senseof the 2000 Canadian Election, Peterborough(Ontario), Broadview Press, 2002,chapitre 3.

3. Voir Blais, Gidengil, Nadeau et Nevitte(2002); Paul Howe, « Where have allthe voters gone? » Inroads, vol. 12 (hiver-printemps 2003); et Centre de recherched’information sur le Canada (CRIC),« La participation électorale au Canada :la démocratie canadienne est-elle en crise? »,Cahier 3 du CRIC, octobre 2001.

4. Paul Howe et David Northrup,« Strenghtening Canadian Democracy:The Views of Canadians », Institut derecherche en politiques publiques, 2000.

5. D-Code et le Canadian Centre for SocialEntrepreneurship, « Social Vision: YoungAdult Perspectives on Social and CivicResponsibility », avril 2001.

6. Communication Canada, « À l’écoutedes Canadiens : Regard sur les jeunesadultes », janvier 2002.

NOTES

motive un jeune Autochtone vivantdans la campagne de la Saskatchewanne ressemble en rien à ce qui motiveun jeune de classe moyenne vivant àToronto. Il est nécessaire de compren-dre ces différences si on veut que lesefforts de sensibilisation portent fruitdans les différentes régions du pays.

Il est également important de prendredes risques pour mieux comprendre cequi peut marcher avec les jeunes. Il ya eu beaucoup d’études sur les taux departicipation électorale et les raisonspour lesquelles ces taux sont faibles, maispeu de choses ont été réalisées dans ledomaine des techniques novatricesvisant à améliorer cette participation.L’inscription en ligne et le vote élec-tronique facilitent la participation etpeuvent certes aider à la hausser.L’installation de bureaux de vote auxendroits ou aux événements où setrouvent les jeunes, soit les universités,les centres commerciaux, les YMCA,les centres communautaires et lesconcerts, peut en outre contribuer àaugmenter la participation électorale.Les partis politiques devraient aussicommuniquer avec les jeunes votantsau moyen de messagerie texte, de cam-pagnes par courriel et de rencontrespersonnelles. Aucune de ces initiativesne sera peut-être un vrai succès endéfinitive, mais il est impossible de lesavoir, à moins que les gouvernementset les partis politiques ne soient prêts àprendre certains risques.

Instaurer un climat socialLa campagne « Rock the Vote » auxÉtats-Unis est un bon exemple de lafaçon de créer un bon climat socialautour de la participation des jeunesvotants. En s’inspirant de musique etde la culture pop, la campagne a puengendrer un climat où le vote étaitperçu comme quelque chose que lesgens « cool » faisaient. La campagneParticipaction est un autre bon exempled’une initiative qui a réussi à instaurerun climat social en sensibilisant lesCanadiens à l’importance d’être plusactif.

Il nous faut une campagne du calibrede Participaction pour hausser la partici-pation électorale des jeunes. Pour créerle bon climat, où les jeunes Canadiensaccorderont une valeur au vote, il fautcréer une nouvelle norme sociale. Lamanière d’y arriver est critique. Lesprofessions de foi sur l’importance duvote ne suffisent pas. Il faut plutôt unepublicité et des programmes révolution-naires pour créer une énergie et unélan auxquels les divers segments desjeunes peuvent s’associer. Le messagedoit être diffusé à l’année longue, etpendant les années où il n’y a pasd’élection. Le message devrait aussivenir d’une entité indépendante dugouvernement. Les jeunes doiventcroire en les auteurs du message.Actuellement les organismes sans butlucratif sont mieux acceptés pour cegenre de message social que les gou-

vernements ou lesentreprises. Commeaucun organismenational sans butlucratif n’existe àl’heure actuelleuniquement pourpromouvoir laparticipation élec-torale des jeunes, ilfaudrait en créer un.

Il y a cependant deslimites au climatsocial que l’on peut

instaurer. Il ne peut à lui seul soutenirdes changements d’attitudes et de com-portement sans des programmes locauxet communautaires qui donneront vieet valeur à ces idées. La campagneParticipaction a fini par échouer à causede l’absence de programmes connexesappropriés.

Éducation et sensibilisationLes jeunes eux-mêmes représentent laplus grande ressource inexploitée pource qui est d’engager les jeunes dans lapolitique. Des milliers d’organismes dejeunes existent partout au pays dansle but de susciter le changement auxniveaux local, provincial et fédéral.Chacun de ces organismes regroupedes jeunes Canadiens qu’il rejoint etavec lesquels il interagit fréquemment.Et pourtant, les ministères et les orga-nismes gouvernementaux ont fait peud’efforts pour faire appel à ces groupesafin de diffuser de l’information et desressources visant à promouvoir la par-ticipation électorale. Il faudrait créerdes tables rondes pour jeunes afind’explorer de meilleures manières dehausser cette participation. Il fautpréparer du matériel d’éducation desélecteurs dont les organismes pourjeunes peuvent se servir à l’occasionde conférences et dans le cadre deleurs programmes.

Les élus et leurs partis politiquesdoivent aussi être plus proactifs dans

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L’installation d’isoloirs dans des endroits fréquentés par les jeuneset à des activités qui les rassemblent, comme les universités, lescentres commerciaux, les YMCA, les centres communautaireset les concerts, pourrait accroître la participation électorale.

Le site Web de l’organisation « Rock the Vote »(aux États-Unis) peut être consulté àwww.rockthevote.org/index2.html.

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Les jeunes qui ont l’âge d’obtenir unpermis de conduire sont-ils assez âgéspour voter?

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Juillet 2003 3534 Perspectives électorales

leur démarche de sensibilisation desjeunes. Ils doivent comprendre qu’ilpeut être très utile d’engager les jeunessur des questions d’intérêt réciproque(violence, abus d’alcool et d’autresdrogues, perfectionnement professionnel,etc.) au moment de préparer des pro-grammes et des stratégies qui aurontune incidence sur leur vie. Les entre-prises canadiennes ont aussi un rôleimportant à jouer compte tenu desrelations qu’ils cultivent avec lesjeunes. Labatt, VIA Rail, Roots et Bellne sont que quelques-unes des entre-prises canadiennes qui ciblent lesjeunes adultes et dont les initiativescommunautaires peuvent aider à pro-mouvoir la participation électorale etengendrer un mouvement de plusgrande envergure.

Les salles de cours constituent un autreendroit évident où on peut engager lesjeunes. Cependant, il faut pour celadu matériel d’éducation civique pro-mouvant un apprentissage interactif,intéressant et expérientiel. Le faitd’inviter des conférenciers, les excursionsscolaires, les jeux de simulation, lesfilms, les débats et les projets pratiquesexposant les jeunes aux enjeux et auxstratégies à grande échelle aideront lesjeunes à se sensibiliser au monde et àla communauté et les amèneront à

participer aux élections municipales,provinciales et fédérales.

Initiatives stratégiquesPour hausser la participation électoraledes jeunes, il faut aussi modifier lesstratégies visant à amener le change-ment social désiré. Il est questiondepuis 20 ans de réduire l’âge du voteà 16 ans pour encourager les jeunesCanadiens à s’engager dans le proces-sus politique. De nombreux observa-teurs ont fait valoir que si les jeunesétaient suffisamment responsables à16 ans pour conduire une voiture, ilsdevraient pouvoir voter. Il serait bond’explorer cette question ainsi qued’autres questions relatives à l’inscrip-tion des électeurs et au vote en ligne.Ce sont tous des sujets qui susciterontle dialogue et le débat chez les jeunes.

Conclusion

Pour augmenter la participation élec-torale des jeunes, les quatre élémentsde la dynamique du changement socialdécrits plus haut doivent être mis enœuvre de manière intégrée et intégrante.Il est cependant essentiel de créer lebon climat social pour que les autresactivités soient bien appuyées et qu’unélan soit donné. Pour que l’éventail etle niveau d’activités soient suffisants, il

faut que le leadership soit assumé parun organisme, désirant élaborer unplan coordonné qui incorpore les idéeset les ressources des secteurs public,privé et bénévole. Pour arriver àobtenir un plus grand engagementcivique et politique des jeunes, il fautune orientation de marketing social,du moins si nous voulons vraimentrenverser l’effet de génération et forgerune démocratie participative danslaquelle le vote fera partie des habi-tudes de vie des petits-enfants de lagénération MusiquePlus.

1. Jean-Pierre Kingsley, conférencier princi-pal lors du Symposium sur la participationélectorale au Canada, Université Carleton,Ottawa, 21 mars 2003. Le texte intégralest affiché à www.elections.ca sous larubrique Médias : Activités spéciales etconférences.

2. Voir Jon H. Pammett et Lawrence LeDuc,« Pourquoi la participation décline auxélections fédérales canadiennes : un nou-veau sondage des non-votants » [rapportde recherche en ligne], Élections Canada(mars 2003), affiché à www.elections.casous la rubrique Lois et politiques électorales;Brenda O’Neill, « Generational Patternsin the Political Opinions and Behaviours

of Canadians », Policy Matters, vol. 2, no 5(octobre 2001); et André Blais, ElisabethGidengil, Richard Nadeau et Neil Nevitte,Anatomy of a Liberal Victory: Making Senseof the 2000 Canadian Election, Peterborough(Ontario), Broadview Press, 2002,chapitre 3.

3. Voir Blais, Gidengil, Nadeau et Nevitte(2002); Paul Howe, « Where have allthe voters gone? » Inroads, vol. 12 (hiver-printemps 2003); et Centre de recherched’information sur le Canada (CRIC),« La participation électorale au Canada :la démocratie canadienne est-elle en crise? »,Cahier 3 du CRIC, octobre 2001.

4. Paul Howe et David Northrup,« Strenghtening Canadian Democracy:The Views of Canadians », Institut derecherche en politiques publiques, 2000.

5. D-Code et le Canadian Centre for SocialEntrepreneurship, « Social Vision: YoungAdult Perspectives on Social and CivicResponsibility », avril 2001.

6. Communication Canada, « À l’écoutedes Canadiens : Regard sur les jeunesadultes », janvier 2002.

NOTES

motive un jeune Autochtone vivantdans la campagne de la Saskatchewanne ressemble en rien à ce qui motiveun jeune de classe moyenne vivant àToronto. Il est nécessaire de compren-dre ces différences si on veut que lesefforts de sensibilisation portent fruitdans les différentes régions du pays.

Il est également important de prendredes risques pour mieux comprendre cequi peut marcher avec les jeunes. Il ya eu beaucoup d’études sur les taux departicipation électorale et les raisonspour lesquelles ces taux sont faibles, maispeu de choses ont été réalisées dans ledomaine des techniques novatricesvisant à améliorer cette participation.L’inscription en ligne et le vote élec-tronique facilitent la participation etpeuvent certes aider à la hausser.L’installation de bureaux de vote auxendroits ou aux événements où setrouvent les jeunes, soit les universités,les centres commerciaux, les YMCA,les centres communautaires et lesconcerts, peut en outre contribuer àaugmenter la participation électorale.Les partis politiques devraient aussicommuniquer avec les jeunes votantsau moyen de messagerie texte, de cam-pagnes par courriel et de rencontrespersonnelles. Aucune de ces initiativesne sera peut-être un vrai succès endéfinitive, mais il est impossible de lesavoir, à moins que les gouvernementset les partis politiques ne soient prêts àprendre certains risques.

Instaurer un climat socialLa campagne « Rock the Vote » auxÉtats-Unis est un bon exemple de lafaçon de créer un bon climat socialautour de la participation des jeunesvotants. En s’inspirant de musique etde la culture pop, la campagne a puengendrer un climat où le vote étaitperçu comme quelque chose que lesgens « cool » faisaient. La campagneParticipaction est un autre bon exempled’une initiative qui a réussi à instaurerun climat social en sensibilisant lesCanadiens à l’importance d’être plusactif.

Il nous faut une campagne du calibrede Participaction pour hausser la partici-pation électorale des jeunes. Pour créerle bon climat, où les jeunes Canadiensaccorderont une valeur au vote, il fautcréer une nouvelle norme sociale. Lamanière d’y arriver est critique. Lesprofessions de foi sur l’importance duvote ne suffisent pas. Il faut plutôt unepublicité et des programmes révolution-naires pour créer une énergie et unélan auxquels les divers segments desjeunes peuvent s’associer. Le messagedoit être diffusé à l’année longue, etpendant les années où il n’y a pasd’élection. Le message devrait aussivenir d’une entité indépendante dugouvernement. Les jeunes doiventcroire en les auteurs du message.Actuellement les organismes sans butlucratif sont mieux acceptés pour cegenre de message social que les gou-

vernements ou lesentreprises. Commeaucun organismenational sans butlucratif n’existe àl’heure actuelleuniquement pourpromouvoir laparticipation élec-torale des jeunes, ilfaudrait en créer un.

Il y a cependant deslimites au climatsocial que l’on peut

instaurer. Il ne peut à lui seul soutenirdes changements d’attitudes et de com-portement sans des programmes locauxet communautaires qui donneront vieet valeur à ces idées. La campagneParticipaction a fini par échouer à causede l’absence de programmes connexesappropriés.

Éducation et sensibilisationLes jeunes eux-mêmes représentent laplus grande ressource inexploitée pource qui est d’engager les jeunes dans lapolitique. Des milliers d’organismes dejeunes existent partout au pays dansle but de susciter le changement auxniveaux local, provincial et fédéral.Chacun de ces organismes regroupedes jeunes Canadiens qu’il rejoint etavec lesquels il interagit fréquemment.Et pourtant, les ministères et les orga-nismes gouvernementaux ont fait peud’efforts pour faire appel à ces groupesafin de diffuser de l’information et desressources visant à promouvoir la par-ticipation électorale. Il faudrait créerdes tables rondes pour jeunes afind’explorer de meilleures manières dehausser cette participation. Il fautpréparer du matériel d’éducation desélecteurs dont les organismes pourjeunes peuvent se servir à l’occasionde conférences et dans le cadre deleurs programmes.

Les élus et leurs partis politiquesdoivent aussi être plus proactifs dans

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o : N

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L’installation d’isoloirs dans des endroits fréquentés par les jeuneset à des activités qui les rassemblent, comme les universités, lescentres commerciaux, les YMCA, les centres communautaireset les concerts, pourrait accroître la participation électorale.

Le site Web de l’organisation « Rock the Vote »(aux États-Unis) peut être consulté àwww.rockthevote.org/index2.html.

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Les jeunes qui ont l’âge d’obtenir unpermis de conduire sont-ils assez âgéspour voter?

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Juillet 2003 3736 Perspectives électorales

L’évolution se fait-elle de façonrationnelle, par exemple en procédantd’un changement du droit positif denature civile ou pénale appelant unerévision du droit électoral? Pourprendre un cas, l’étude des débats par-lementaires français6 montre à la foisune récurrence des arguments utilisés,

mais aussi leur grande réversibilité,tantôt en appui tantôt en opposition àl’abaissement de la majorité électorale.En fin de compte, l’analyse historiquerévèle que les modifications observéesrésultent surtout d’une volonté politique,le plus souvent d’origine parlementaireet sans réel débat au sein de la société.

Cette ambivalence se retrace aujour-d’hui dans les textes des journaux, lessites Internet sur la démocratie et auParlement7. Ainsi, l’enthousiasme etle zèle des « jeunes » justifieraient unabaissement de la majorité électoraleprofitable à l’ensemble de la société;d’autres, au contraire, associent le zèlede la jeunesse à une fougue excessiveet à une inexpérience qui commandentla plus grande prudence. Les jeunes neseraient tout simplement « pas prêts »à voter! La réversibilité des argumentstend à montrer la nature proprementpolitique – non réduite à une dimensionpartisane8 – des décisions relatives àl’abaissement de la majorité électorale.Non pas que la politique soit typique-ment irrationnelle, mais elle supposedes choix parfois décidés plus ou moinsindépendamment de l’opinion publique.

Les raisons objectives d’un abaissementne manqueraient pas aujourd’hui.Voyons ce qu’en pensent les principauxintéressés.

« Suis-je prêt à voter? »

Même si la question n’épousait pasexactement cette forme, c’est à toutesfins utiles ce que devaient se demanderdes élèves de deux villes québécoisesinterrogés en 1990 et 1998 (voir lanote méthodologique). Leurs réponsessuivent, croisées à un certain nombred’éléments qui les éclairent de diversangles. Nous les commenterons briève-ment avant de conclure avec quelquesconsidérations générales sur la partici-pation politique des jeunes.

Selon le tableau 1, en 1990 comme en1998, les élèves interrogés sont majori-tairement opposés à ce que le droit devote soit accordé dès 16 ans. En accordavec les idées reçues sur le rapport plusdistant des jeunes filles à la politique, lerefus apparaît nettement plus prononcéchez elles que chez leurs confrères,l’écart s’accroissant même de 1990 à1998 – les opinions favorables devien-nent en effet majoritaires chez les

Tableau 4 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon l’importance reconnue au vote (pourcentages)1

Il faut voter pour que la politique soit conforme à ses idées

Tout à fait / Plutôt /plutôt d’accord pas du tout d’accord

D’accord 45,5 41,5

N 726 82

1 Cette question a été posée seulement en 1990.

Tableau 3 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon le degré d’intérêt pour la politique (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Beaucoup / Peu / Beaucoup / Peu /assez pas du tout assez pas du tout

D’accord 46,5 43,9 51,3 41,5

N 355 456 343 491

Tableau 1 : Opinions sur le droit de vote à 16 ans(pourcentages)1

Enquête 1990 Enquête 1998

D’accord 44,0 45,5

Pas d’accord 53,6 54,5

N 832 847

1 Pour l’enquête de 1990, le total n’égale pas 100 %, 2,4 % des sujets de l’enquête n’ayant pas répondu

à cette question. Dans l’ensemble des autres tableaux, cependant, les distributions sont faites à partir

du nombre de réponses effectivement enregistrées. Seuls y sont présentés les résultats se rapportant

aux répondants qui se sont déclarés d’accord avec la question posée ou l’énoncé formulé.

Droit de vote à 16 ans

Droit de vote à 16 ans

Tableau 2 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon le niveau scolaire (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Secondaire IV Secondaire V Secondaire IV Secondaire V

D’accord 49,7 40,9 47,3 43,4

N 384 428 427 410

Droit de vote à 16 ans

Droit de vote à 16 ans

À quel âge est-on prêt à voter?La participation des jeunesà la vie collective

Raymond HudonProfesseur, Département de science politique, Université Laval

Bernard FournierProfesseur adjoint, Département de science politique, Université Memorial de Terre-Neuve

Selon une conception réductrice, une société démocratiques’entend d’une société qui fait participer les citoyens à ladéfinition des grandes orientations collectives par l’octroidu droit de vote. Dans cette perspective, les jeunes électeurs,réputés moins enclins à se présenter aux bureaux de scrutin,ont régulièrement suscité des interrogations aussi diversifiéesque multiples. Nous nous intéressons ici à un aspect parti-culier de la problématique générale : la question du droit devote à 16 ans.

Depuis un peu plus d’une décennie, le sujet refait surfaceépisodiquement, sans toutefois aboutir à une modificationdes règles. Ainsi, en 1990, les membres de la Commissionroyale sur la réforme électorale et le financement des partis(commission Lortie) avaient examiné la question et com-mandé des études spécifiques1. À l’étape de la rédactionfinale de leur rapport, ils ont renoncé à proposer unabaissement de l’âge où on est habilité à voter. Dans lesannées suivantes, la question a encore été évoquée, alimen-tant parfois un débat plus ou moins limité2. Tout récemment,les états généraux sur la réforme des institutions démocra-tiques au Québec ont envisagé l’option de l’abaissement del’âge électoral, sans la retenir : 58 % des participants s’y sontopposés. Pourtant, lors de son dernier congrès d’orientationde mars 2003, le Parti Québécois (PQ) a intégré dans sonprogramme la tenue d’un référendum sur « l’opportunité dedonner le droit de vote aux jeunes de 16 et 17 ans ».

Certes, notre sujet n’est pas le plus chaud de l’heure; iln’est pas non plus totalement hors de l’actualité. Dans ces

conditions, il est pertinent de mettre notre objet en pers-pective en rappelant quelques-uns des grands jalons qui ontmarqué les débats et les changements successivementapportés à l’âge auquel on est habilité à exercer ses droitsciviques sous la forme du vote. Après avoir souligné que lesdécisions prises ne répondent pas à des critères absolus etpurement rationnels, nous convions à la discussion les toutpremiers intéressés, les jeunes de 16 à 18 ans. Pour ce faire,nous utilisons les résultats de deux enquêtes menées en1990 et 19983. Si elles ne permettent pas d’imposer despositions définitives, les observations relatées fournissentun éclairage pour le moins intéressant et elles contribuentau minimum à enrichir la réflexion.

L’âge, une construction sociale-historique

L’âge est une construction sociale-historique dont les varia-tions sont fonction des époques et des contextes sociaux.L’évolution du droit de vote en fonction de l’âge l’illustre bien.

Au Canada, les droits électoraux ont beaucoup évoluédepuis l’établissement du premier régime électoral moderne4.Les progrès paraissent moins évidents dans le cas du seuilde la majorité électorale : établi à 21 ans au début de laConfédération, il n’a été modifié qu’une fois au palierfédéral, en 19705. La disparition du cens, l’abolition de ladiscrimination fondée sur le sexe ou l’appartenance racialeet l’abaissement de la majorité électorale traduisent tousune même volonté d’élargir la reconnaissance de lacompétence citoyenne.

Les jeunes et les élections

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Juillet 2003 3736 Perspectives électorales

L’évolution se fait-elle de façonrationnelle, par exemple en procédantd’un changement du droit positif denature civile ou pénale appelant unerévision du droit électoral? Pourprendre un cas, l’étude des débats par-lementaires français6 montre à la foisune récurrence des arguments utilisés,

mais aussi leur grande réversibilité,tantôt en appui tantôt en opposition àl’abaissement de la majorité électorale.En fin de compte, l’analyse historiquerévèle que les modifications observéesrésultent surtout d’une volonté politique,le plus souvent d’origine parlementaireet sans réel débat au sein de la société.

Cette ambivalence se retrace aujour-d’hui dans les textes des journaux, lessites Internet sur la démocratie et auParlement7. Ainsi, l’enthousiasme etle zèle des « jeunes » justifieraient unabaissement de la majorité électoraleprofitable à l’ensemble de la société;d’autres, au contraire, associent le zèlede la jeunesse à une fougue excessiveet à une inexpérience qui commandentla plus grande prudence. Les jeunes neseraient tout simplement « pas prêts »à voter! La réversibilité des argumentstend à montrer la nature proprementpolitique – non réduite à une dimensionpartisane8 – des décisions relatives àl’abaissement de la majorité électorale.Non pas que la politique soit typique-ment irrationnelle, mais elle supposedes choix parfois décidés plus ou moinsindépendamment de l’opinion publique.

Les raisons objectives d’un abaissementne manqueraient pas aujourd’hui.Voyons ce qu’en pensent les principauxintéressés.

« Suis-je prêt à voter? »

Même si la question n’épousait pasexactement cette forme, c’est à toutesfins utiles ce que devaient se demanderdes élèves de deux villes québécoisesinterrogés en 1990 et 1998 (voir lanote méthodologique). Leurs réponsessuivent, croisées à un certain nombred’éléments qui les éclairent de diversangles. Nous les commenterons briève-ment avant de conclure avec quelquesconsidérations générales sur la partici-pation politique des jeunes.

Selon le tableau 1, en 1990 comme en1998, les élèves interrogés sont majori-tairement opposés à ce que le droit devote soit accordé dès 16 ans. En accordavec les idées reçues sur le rapport plusdistant des jeunes filles à la politique, lerefus apparaît nettement plus prononcéchez elles que chez leurs confrères,l’écart s’accroissant même de 1990 à1998 – les opinions favorables devien-nent en effet majoritaires chez les

Tableau 4 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon l’importance reconnue au vote (pourcentages)1

Il faut voter pour que la politique soit conforme à ses idées

Tout à fait / Plutôt /plutôt d’accord pas du tout d’accord

D’accord 45,5 41,5

N 726 82

1 Cette question a été posée seulement en 1990.

Tableau 3 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon le degré d’intérêt pour la politique (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Beaucoup / Peu / Beaucoup / Peu /assez pas du tout assez pas du tout

D’accord 46,5 43,9 51,3 41,5

N 355 456 343 491

Tableau 1 : Opinions sur le droit de vote à 16 ans(pourcentages)1

Enquête 1990 Enquête 1998

D’accord 44,0 45,5

Pas d’accord 53,6 54,5

N 832 847

1 Pour l’enquête de 1990, le total n’égale pas 100 %, 2,4 % des sujets de l’enquête n’ayant pas répondu

à cette question. Dans l’ensemble des autres tableaux, cependant, les distributions sont faites à partir

du nombre de réponses effectivement enregistrées. Seuls y sont présentés les résultats se rapportant

aux répondants qui se sont déclarés d’accord avec la question posée ou l’énoncé formulé.

Droit de vote à 16 ans

Droit de vote à 16 ans

Tableau 2 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon le niveau scolaire (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Secondaire IV Secondaire V Secondaire IV Secondaire V

D’accord 49,7 40,9 47,3 43,4

N 384 428 427 410

Droit de vote à 16 ans

Droit de vote à 16 ans

À quel âge est-on prêt à voter?La participation des jeunesà la vie collective

Raymond HudonProfesseur, Département de science politique, Université Laval

Bernard FournierProfesseur adjoint, Département de science politique, Université Memorial de Terre-Neuve

Selon une conception réductrice, une société démocratiques’entend d’une société qui fait participer les citoyens à ladéfinition des grandes orientations collectives par l’octroidu droit de vote. Dans cette perspective, les jeunes électeurs,réputés moins enclins à se présenter aux bureaux de scrutin,ont régulièrement suscité des interrogations aussi diversifiéesque multiples. Nous nous intéressons ici à un aspect parti-culier de la problématique générale : la question du droit devote à 16 ans.

Depuis un peu plus d’une décennie, le sujet refait surfaceépisodiquement, sans toutefois aboutir à une modificationdes règles. Ainsi, en 1990, les membres de la Commissionroyale sur la réforme électorale et le financement des partis(commission Lortie) avaient examiné la question et com-mandé des études spécifiques1. À l’étape de la rédactionfinale de leur rapport, ils ont renoncé à proposer unabaissement de l’âge où on est habilité à voter. Dans lesannées suivantes, la question a encore été évoquée, alimen-tant parfois un débat plus ou moins limité2. Tout récemment,les états généraux sur la réforme des institutions démocra-tiques au Québec ont envisagé l’option de l’abaissement del’âge électoral, sans la retenir : 58 % des participants s’y sontopposés. Pourtant, lors de son dernier congrès d’orientationde mars 2003, le Parti Québécois (PQ) a intégré dans sonprogramme la tenue d’un référendum sur « l’opportunité dedonner le droit de vote aux jeunes de 16 et 17 ans ».

Certes, notre sujet n’est pas le plus chaud de l’heure; iln’est pas non plus totalement hors de l’actualité. Dans ces

conditions, il est pertinent de mettre notre objet en pers-pective en rappelant quelques-uns des grands jalons qui ontmarqué les débats et les changements successivementapportés à l’âge auquel on est habilité à exercer ses droitsciviques sous la forme du vote. Après avoir souligné que lesdécisions prises ne répondent pas à des critères absolus etpurement rationnels, nous convions à la discussion les toutpremiers intéressés, les jeunes de 16 à 18 ans. Pour ce faire,nous utilisons les résultats de deux enquêtes menées en1990 et 19983. Si elles ne permettent pas d’imposer despositions définitives, les observations relatées fournissentun éclairage pour le moins intéressant et elles contribuentau minimum à enrichir la réflexion.

L’âge, une construction sociale-historique

L’âge est une construction sociale-historique dont les varia-tions sont fonction des époques et des contextes sociaux.L’évolution du droit de vote en fonction de l’âge l’illustre bien.

Au Canada, les droits électoraux ont beaucoup évoluédepuis l’établissement du premier régime électoral moderne4.Les progrès paraissent moins évidents dans le cas du seuilde la majorité électorale : établi à 21 ans au début de laConfédération, il n’a été modifié qu’une fois au palierfédéral, en 19705. La disparition du cens, l’abolition de ladiscrimination fondée sur le sexe ou l’appartenance racialeet l’abaissement de la majorité électorale traduisent tousune même volonté d’élargir la reconnaissance de lacompétence citoyenne.

Les jeunes et les élections

Page 40: 11940 EC Insight Vol5 no2 fv8 - Elections in Canada · en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni 31 L’art de vendre la participation électorale à la génération MusiquePlus

Juillet 2003 3938 Perspectives électorales

L’ouverture à un droit de vote dès16 ans apparaît aussi fonction desreprésentations du « bon citoyen ».Ainsi, selon que l’on pense le citoyenidéal comme quelqu’un qui « s’occupede ses affaires sans faire d’histoire » ou,plutôt, comme quelqu’un qui « estprêt à s’engager et à manifester pourdéfendre ses idées », l’idée d’abaisserl’âge électoral est accueillie assez dif-féremment (tableau 6). Les mêmestendances se remarquent quand lesopinions sont rapportées aux visionscontrastées d’un citoyen qui estime

plus important de faire respecter sesdroits ou de remplir ses devoirs(tableau 7). Finalement, les partisansde l’ordre, qui veulent qu’un boncitoyen « respecte la loi en toute cir-constance », sont proportionnellementplus réfractaires au droit de vote à16 ans; cette position particulière estmise d’autant plus en évidence quel’octroi de ce droit recueille un appuimajoritaire chez ceux qui estimentque le bon citoyen n’a pas à respecterla loi lorsqu’elle lui paraît injuste(tableau 8).

Dans la foulée et sur un simple planlogique, on imagine assez facilementque les partisans du statu quo général(« Notre société n’a pas besoin dechangements majeurs ») s’opposentdans des proportions importantes àl’octroi du droit de vote à 16 ans(tableau 9). Il se révèle toutefois plussurprenant que les partisans déclarésdu changement, nettement plus nom-breux, résistent encore majoritaire-ment – quoique plus faiblement – àpareille décision.

Pour terminer, deux résultats para-doxaux ne peuvent être passés soussilence. En 1990, la participation àau moins une association contribue àréduire l’opposition à l’abaissementde l’âge électoral (tableau 10). Il étaitquand même inattendu qu’en 1998l’opposition ait été plus élevée chezceux qui participent! Autre source desurprise : les personnes qui font moinsconfiance à une série d’« institutions »choisies (école, Église, administration,élus et médias) se montrent propor-tionnellement plus nombreuses –majoritairement même dans quelquescas) à retenir l’idée du droit de vote à16 ans. Seule exception notable : lecas des partis politiques dans l’enquêtede 1990 (tableau 11).

Conclusion

En bref, les résultats présentés ali-menteront sans doute l’opposition àl’octroi du droit de vote à 16 ans.

Tableau 9 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon l’attitude face au changement (pourcentages)1

Enquête 1990 Enquête 1998

Notre société n’a pas besoin Notre société n’a pas besoin de changements majeurs de changements majeurs

D’accord Pas d’accord Tout à fait / Plutôt / pas duplutôt d’accord tout d’accord

D’accord 34,3 46,3 40,2 46,8

N 108 697 169 666

1 Il faut noter que le choix des réponses est différent en 1990 (d’accord et pas d’accord) et en 1998

(tout à fait / plutôt d’accord et plutôt pas d’accord / pas du tout d’accord).

Tableau 10 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon participation ou pas à une association (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Ne participe Participe à au Ne participe Participe à auà aucune … moins une … à aucune … moins une …

D’accord 40,5 47,8 47,7 44,4

N 304 508 258 579

Droit devote à16 ans

Droit de voteà 16 ans

Tableau 11 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon la confiance accordée à… (pourcentages)1

École Église Administration Médias Élus Partis

Plutôt Pas Plutôt Pas Plutôt Pas Plutôt Pas Plutôt Pas Plutôt Pas

1990 D’accord 41,6 61,6 41,8 49,7 42,4 50,6 44,9 45,2 41,7 47,2 45,9 44,6

N 671 138 488 320 536 269 483 325 345 458 283 522

1998 D’accord 41,2 60,1 37,8 50,7 41,6 48,8 44,9 45,8 44,4 46,0 41,0 53,6

N 638 193 341 491 387 443 356 476 243 589 144 690

1 Les options offertes aux répondants étaient précisément : plutôt confiance ou plutôt pas confiance.

Enquête

garçons (passant de 47,0 % à 51,9 %)alors que l’opposition des filles gagnequelques points (de 57,3 % à 59,3 %).On peut encore noter que l’oppositioncroît avec l’âge (tableau 2), bien quel’écart semble s’atténuer avec le temps :

tandis que l’idée reçoit, parmi lesélèves du secondaire IV, un appui de2,4 % moins élevé en 1998, elle reçoitun appui augmenté de 2,5 % parmi lesélèves du secondaire V. D’une portéepolitique relativement limitée, il est

raisonnable de croire que ces premiersrésultats gagnent en signification si lesopinions sont mises en relation avecd’autres éléments.

Ainsi est-il logique de croire qu’unintérêt plus prononcé pour la politiqueou le fait de se sentir plus souventconcerné par les décisions gouverne-mentales rend plus réceptif à laproposition de reconnaître le droitde voter dès 16 ans. Effectivement,toujours majoritairement opposés àpareille proposition, ceux qui s’in-téressent beaucoup ou assez à lapolitique le sont cependant moins queceux qui s’y intéressent peu ou pas dutout (tableau 3). Cependant, entre1990 et 1998, la différence s’accentue :les plus intéressés accordent un appuifaiblement majoritaire à la propositionalors que les moins intéressés s’ydéclarent encore un petit peu plusopposés. Les partisans et opposantsau vote à 16 ans se répartissent encoredans des proportions tout à fait compa-rables selon qu’ils se sentent concernés(très souvent ou souvent) ou pas (pastrès souvent ou jamais) par les décisionsgouvernementales.

On mesure encore la résistance audroit de vote à 16 ans en notantqu’elle demeure majoritaire mêmeparmi ceux qui croient que le voteest important pour « rendre lapolitique conforme à ses idées »(tableau 4). En réalité, le facteur quidétermine le plus l’appui ou l’opposi-tion à l’abaissement de l’âge du voteest le fait de se sentir proche ou pasd’un parti. Il faut toutefois noter quecet effet tend à s’atténuer entre 1990et 1998 (tableau 5). Cette dernièreobservation est sans doute à rapprocherd’autres données rapportées dans letableau 11 : la confiance accordée àcertaines « institutions », notammentl’Église et les partis politiques, a légère-ment reculé entre 1990 et 1998; parcontre, il est intéressant de noter quela confiance accordée aux élus aaugmenté de 2,7 %.

Tableau 5 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon affinité partisane (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Proche Non proche Proche Non proched’un parti d’un parti d’un parti d’un parti

D’accord 56,3 41,1 52,5 42,5

N 213 599 238 598

Tableau 6 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon conception du bon citoyen (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Un bon citoyen… Un bon citoyen…

voit à manifeste pour voit à manifeste pourses affaires ses idées ses affaires ses idées

D’accord 38,3 47,4 35,4 47,7

N 214 597 161 673

Droit de vote à 16 ans

Droit devote à16 ans

Tableau 7 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon le rapport droits-devoirs chez le bon citoyen (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Un bon citoyen… Un bon citoyen…

fait respecter remplit fait respecter remplit ses droits ses devoirs ses droits ses devoirs

D’accord 46,8 41,8 47,4 39,0

N 547 263 620 210

Tableau 8 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon l’attitude face à la loi (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Un bon citoyen… Un bon citoyen…

respecte n’a pas à respecter respecte n’a pas à respecterla loi une loi injuste la loi une loi injuste

D’accord 43,0 53,4 38,9 52,0

N 646 163 422 415

Droit devote à16 ans

Droit devote à16 ans

Droitde voteà 16 ans

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Juillet 2003 3938 Perspectives électorales

L’ouverture à un droit de vote dès16 ans apparaît aussi fonction desreprésentations du « bon citoyen ».Ainsi, selon que l’on pense le citoyenidéal comme quelqu’un qui « s’occupede ses affaires sans faire d’histoire » ou,plutôt, comme quelqu’un qui « estprêt à s’engager et à manifester pourdéfendre ses idées », l’idée d’abaisserl’âge électoral est accueillie assez dif-féremment (tableau 6). Les mêmestendances se remarquent quand lesopinions sont rapportées aux visionscontrastées d’un citoyen qui estime

plus important de faire respecter sesdroits ou de remplir ses devoirs(tableau 7). Finalement, les partisansde l’ordre, qui veulent qu’un boncitoyen « respecte la loi en toute cir-constance », sont proportionnellementplus réfractaires au droit de vote à16 ans; cette position particulière estmise d’autant plus en évidence quel’octroi de ce droit recueille un appuimajoritaire chez ceux qui estimentque le bon citoyen n’a pas à respecterla loi lorsqu’elle lui paraît injuste(tableau 8).

Dans la foulée et sur un simple planlogique, on imagine assez facilementque les partisans du statu quo général(« Notre société n’a pas besoin dechangements majeurs ») s’opposentdans des proportions importantes àl’octroi du droit de vote à 16 ans(tableau 9). Il se révèle toutefois plussurprenant que les partisans déclarésdu changement, nettement plus nom-breux, résistent encore majoritaire-ment – quoique plus faiblement – àpareille décision.

Pour terminer, deux résultats para-doxaux ne peuvent être passés soussilence. En 1990, la participation àau moins une association contribue àréduire l’opposition à l’abaissementde l’âge électoral (tableau 10). Il étaitquand même inattendu qu’en 1998l’opposition ait été plus élevée chezceux qui participent! Autre source desurprise : les personnes qui font moinsconfiance à une série d’« institutions »choisies (école, Église, administration,élus et médias) se montrent propor-tionnellement plus nombreuses –majoritairement même dans quelquescas) à retenir l’idée du droit de vote à16 ans. Seule exception notable : lecas des partis politiques dans l’enquêtede 1990 (tableau 11).

Conclusion

En bref, les résultats présentés ali-menteront sans doute l’opposition àl’octroi du droit de vote à 16 ans.

Tableau 9 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon l’attitude face au changement (pourcentages)1

Enquête 1990 Enquête 1998

Notre société n’a pas besoin Notre société n’a pas besoin de changements majeurs de changements majeurs

D’accord Pas d’accord Tout à fait / Plutôt / pas duplutôt d’accord tout d’accord

D’accord 34,3 46,3 40,2 46,8

N 108 697 169 666

1 Il faut noter que le choix des réponses est différent en 1990 (d’accord et pas d’accord) et en 1998

(tout à fait / plutôt d’accord et plutôt pas d’accord / pas du tout d’accord).

Tableau 10 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon participation ou pas à une association (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Ne participe Participe à au Ne participe Participe à auà aucune … moins une … à aucune … moins une …

D’accord 40,5 47,8 47,7 44,4

N 304 508 258 579

Droit devote à16 ans

Droit de voteà 16 ans

Tableau 11 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon la confiance accordée à… (pourcentages)1

École Église Administration Médias Élus Partis

Plutôt Pas Plutôt Pas Plutôt Pas Plutôt Pas Plutôt Pas Plutôt Pas

1990 D’accord 41,6 61,6 41,8 49,7 42,4 50,6 44,9 45,2 41,7 47,2 45,9 44,6

N 671 138 488 320 536 269 483 325 345 458 283 522

1998 D’accord 41,2 60,1 37,8 50,7 41,6 48,8 44,9 45,8 44,4 46,0 41,0 53,6

N 638 193 341 491 387 443 356 476 243 589 144 690

1 Les options offertes aux répondants étaient précisément : plutôt confiance ou plutôt pas confiance.

Enquête

garçons (passant de 47,0 % à 51,9 %)alors que l’opposition des filles gagnequelques points (de 57,3 % à 59,3 %).On peut encore noter que l’oppositioncroît avec l’âge (tableau 2), bien quel’écart semble s’atténuer avec le temps :

tandis que l’idée reçoit, parmi lesélèves du secondaire IV, un appui de2,4 % moins élevé en 1998, elle reçoitun appui augmenté de 2,5 % parmi lesélèves du secondaire V. D’une portéepolitique relativement limitée, il est

raisonnable de croire que ces premiersrésultats gagnent en signification si lesopinions sont mises en relation avecd’autres éléments.

Ainsi est-il logique de croire qu’unintérêt plus prononcé pour la politiqueou le fait de se sentir plus souventconcerné par les décisions gouverne-mentales rend plus réceptif à laproposition de reconnaître le droitde voter dès 16 ans. Effectivement,toujours majoritairement opposés àpareille proposition, ceux qui s’in-téressent beaucoup ou assez à lapolitique le sont cependant moins queceux qui s’y intéressent peu ou pas dutout (tableau 3). Cependant, entre1990 et 1998, la différence s’accentue :les plus intéressés accordent un appuifaiblement majoritaire à la propositionalors que les moins intéressés s’ydéclarent encore un petit peu plusopposés. Les partisans et opposantsau vote à 16 ans se répartissent encoredans des proportions tout à fait compa-rables selon qu’ils se sentent concernés(très souvent ou souvent) ou pas (pastrès souvent ou jamais) par les décisionsgouvernementales.

On mesure encore la résistance audroit de vote à 16 ans en notantqu’elle demeure majoritaire mêmeparmi ceux qui croient que le voteest important pour « rendre lapolitique conforme à ses idées »(tableau 4). En réalité, le facteur quidétermine le plus l’appui ou l’opposi-tion à l’abaissement de l’âge du voteest le fait de se sentir proche ou pasd’un parti. Il faut toutefois noter quecet effet tend à s’atténuer entre 1990et 1998 (tableau 5). Cette dernièreobservation est sans doute à rapprocherd’autres données rapportées dans letableau 11 : la confiance accordée àcertaines « institutions », notammentl’Église et les partis politiques, a légère-ment reculé entre 1990 et 1998; parcontre, il est intéressant de noter quela confiance accordée aux élus aaugmenté de 2,7 %.

Tableau 5 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon affinité partisane (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Proche Non proche Proche Non proched’un parti d’un parti d’un parti d’un parti

D’accord 56,3 41,1 52,5 42,5

N 213 599 238 598

Tableau 6 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon conception du bon citoyen (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Un bon citoyen… Un bon citoyen…

voit à manifeste pour voit à manifeste pourses affaires ses idées ses affaires ses idées

D’accord 38,3 47,4 35,4 47,7

N 214 597 161 673

Droit de vote à 16 ans

Droit devote à16 ans

Tableau 7 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon le rapport droits-devoirs chez le bon citoyen (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Un bon citoyen… Un bon citoyen…

fait respecter remplit fait respecter remplit ses droits ses devoirs ses droits ses devoirs

D’accord 46,8 41,8 47,4 39,0

N 547 263 620 210

Tableau 8 : Droit de vote à 16 ansOpinions selon l’attitude face à la loi (pourcentages)

Enquête 1990 Enquête 1998

Un bon citoyen… Un bon citoyen…

respecte n’a pas à respecter respecte n’a pas à respecterla loi une loi injuste la loi une loi injuste

D’accord 43,0 53,4 38,9 52,0

N 646 163 422 415

Droit devote à16 ans

Droit devote à16 ans

Droitde voteà 16 ans

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Juillet 2003 4140 Perspectives électorales

1. Voir Kathy Megyery (dir.), Les jeunes et lavie politique au Canada. Engagement et par-ticipation, Études de la Commission royalesur la réforme électorale et le financementdes partis, vol. 8, Approvisionnements etServices Canada, Toronto/Montréal,Dundurn Press/Wilson & Lafleur, 1991.

2. Par exemple, voir Raymond Hudon,« Le droit de vote à 16 ans. Une décisionpurement politique », Le Soleil, 31 mai1996; ou encore, « Evaluating the Pros andCons. Are 16-Year-Olds Ready to Vote? »,Elections Today, vol. 6, no 3, automne 1996.

3. Pour des précisions méthodologiques, voirl’encart à cet effet.

4. À ce propos, voir J. Patrick Boyer, PoliticalRights. The Legal Framework of Electionsin Canada, Toronto, Butterworths, 1981,p. 129-137.

5. Le droit de vote à 18 ans a été accordé en1963 au Québec et en 1971 en Ontario.Par ailleurs, le Military Voters Act de 1917,qui précisait les modalités de vote du per-sonnel militaire canadien au cours duconflit, octroyait le droit de vote à tousles militaires en service actif (http://www.archives.ca/05/0518/05180204/051802040102_f.html). Cependant, en 1993, la loiC-114 retira ce droit aux militaires demoins de 18 ans.

6. Avant l’adoption de la majorité actuelle à18 ans en 1974, pas moins d’une douzainede constitutions ou lois ont modifié lamajorité électorale et l’éligibilité entre1791 et 1875, dans le sens de l’abaissementcomme dans celui du relèvement.

7. Peter Adams, député libéral ontarien dePeterborough, a récemment présenté unprojet de loi privé proposant d’abaisser ledroit de vote à 16 ans (Roy MacGregor,« At 16, teens are considered matureenough to drive, marry and work — sowhy not vote? », The Globe and Mail,4 mars 2003).

8. Notons tout de même avec Patrick Boyer(Political Rights, p. 132), que de tellesintentions peuvent se manifester. Ainsi,l’attribution du droit de vote à de nou-velles catégories d’électeurs en 1917, enpleine guerre, aurait eu essentiellementpour objectif de faire réélire le gouverne-ment conservateur de l’époque. À l’opposé,le retrait du droit de vote des militaires demoins de 18 ans se voulait seulement unefaçon d’uniformiser les droits électoraux detous les citoyens.

NOTESAinsi, il est loisible de mettre l’accentsur l’opposition majoritaire des 16 à18 ans eux-mêmes à l’obtention dudroit de vote avant 18 ans. Par ailleurs,il faut noter qu’une certaine proximitédu monde partisan et certaines con-ceptions de la citoyenneté entraînentun meilleur accueil à pareilleproposition.

Sur cette base, il apparaît approprié desonger à mieux préparer les jeunes àl’exercice de leurs droits civiques,

que la possibilité de voter leur soitreconnue à 16 ou 18 ans. Cettepréoccupation s’impose d’autant plusque la politique semble, depuis quelquetemps, l’objet d’un désenchantement.Ceci dit, on ne doit pas en réduire laportée au seul déclin observé dans laparticipation électorale au cours des

12 à 15 dernières années. Cette lecturedéformante résulterait en bonne partied’une conception étroite de l’engage-ment citoyen, qui n’emprunte plus laseule voie électorale.

Par contre, malgré que les activitéscitoyennes ne se résument plusaux activités électorales, celles-cidemeurent cruciales dans la conduitedémocratique des affaires de la Cité.

L’apprentissage de la pratique démocra-tique est bien sûr une affaire de terrain,mais il ne souffrirait évidemmentpas de s’appuyer sur des principesphilosophiques et des connaissances« théoriques » pensés dans une optiquede formation de meilleurs citoyenspour demain.

En mai et juin 1990, 832 élèves ont été interrogés dans septécoles des actuelles villes de Québec et Lévis. L’échantillonest composé à peu près également de garçons et de filles(52 % et 48 %), presque tous âgés de 16 à 18 ans (96 %).Un peu moins du tiers (31 %) des répondants ont fait latotalité ou la plus grande partie de leurs études dans uneécole du secteur privé.

En 1998, à la même période de l’année scolaire qu’en 1990,les mêmes écoles ont participé à l’enquête – sauf une dusecteur privé, remplacée par une autre. L’enquête a étémenée auprès de 847 élèves qui, de nouveau, comptent justeun peu plus de garçons que de filles (53 % et 47 %), pourla plupart âgés de 16 à 18 ans (97 %). Comparé à celui de1990, ce nouvel échantillon comprend un peu moins d’élèvesfréquentant une école du secteur privé (28 %).

La composition des échantillons n’est pas aléatoire, mais lechoix des établissements a été fait en fonction de la diversitésociale et culturelle de la région d’étude choisie. L’enquête s’estdéroulée pendant la période réservée à un cours (générale-ment d’éducation civique ou d’histoire / géographie) et parfoisen présence de l’enseignant responsable; il en découle unfaible taux de refus de répondre.

Ces enquêtes ont été financées de diverses sources, notam-ment la Commission royale sur la réforme électorale et lefinancement des partis politiques (commission Lortie), pourl’enquête de 1990, et le Fonds Gérard-Dion de l’UniversitéLaval, pour la relance de 1998.

Note méthodologique

… il apparaît approprié desonger à mieux préparer lesjeunes à l’exercice de leursdroits civiques, que lapossibilité de voter leur soitreconnue à 16 ou 18 ans.

Chaque année, le directeur général des élections Jean-Pierre Kingsley rencontre les élèves quiassistent au Forum pour jeunes Canadiens, à Ottawa, pour leur parler du processus électoral.

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Juillet 2003 4140 Perspectives électorales

1. Voir Kathy Megyery (dir.), Les jeunes et lavie politique au Canada. Engagement et par-ticipation, Études de la Commission royalesur la réforme électorale et le financementdes partis, vol. 8, Approvisionnements etServices Canada, Toronto/Montréal,Dundurn Press/Wilson & Lafleur, 1991.

2. Par exemple, voir Raymond Hudon,« Le droit de vote à 16 ans. Une décisionpurement politique », Le Soleil, 31 mai1996; ou encore, « Evaluating the Pros andCons. Are 16-Year-Olds Ready to Vote? »,Elections Today, vol. 6, no 3, automne 1996.

3. Pour des précisions méthodologiques, voirl’encart à cet effet.

4. À ce propos, voir J. Patrick Boyer, PoliticalRights. The Legal Framework of Electionsin Canada, Toronto, Butterworths, 1981,p. 129-137.

5. Le droit de vote à 18 ans a été accordé en1963 au Québec et en 1971 en Ontario.Par ailleurs, le Military Voters Act de 1917,qui précisait les modalités de vote du per-sonnel militaire canadien au cours duconflit, octroyait le droit de vote à tousles militaires en service actif (http://www.archives.ca/05/0518/05180204/051802040102_f.html). Cependant, en 1993, la loiC-114 retira ce droit aux militaires demoins de 18 ans.

6. Avant l’adoption de la majorité actuelle à18 ans en 1974, pas moins d’une douzainede constitutions ou lois ont modifié lamajorité électorale et l’éligibilité entre1791 et 1875, dans le sens de l’abaissementcomme dans celui du relèvement.

7. Peter Adams, député libéral ontarien dePeterborough, a récemment présenté unprojet de loi privé proposant d’abaisser ledroit de vote à 16 ans (Roy MacGregor,« At 16, teens are considered matureenough to drive, marry and work — sowhy not vote? », The Globe and Mail,4 mars 2003).

8. Notons tout de même avec Patrick Boyer(Political Rights, p. 132), que de tellesintentions peuvent se manifester. Ainsi,l’attribution du droit de vote à de nou-velles catégories d’électeurs en 1917, enpleine guerre, aurait eu essentiellementpour objectif de faire réélire le gouverne-ment conservateur de l’époque. À l’opposé,le retrait du droit de vote des militaires demoins de 18 ans se voulait seulement unefaçon d’uniformiser les droits électoraux detous les citoyens.

NOTESAinsi, il est loisible de mettre l’accentsur l’opposition majoritaire des 16 à18 ans eux-mêmes à l’obtention dudroit de vote avant 18 ans. Par ailleurs,il faut noter qu’une certaine proximitédu monde partisan et certaines con-ceptions de la citoyenneté entraînentun meilleur accueil à pareilleproposition.

Sur cette base, il apparaît approprié desonger à mieux préparer les jeunes àl’exercice de leurs droits civiques,

que la possibilité de voter leur soitreconnue à 16 ou 18 ans. Cettepréoccupation s’impose d’autant plusque la politique semble, depuis quelquetemps, l’objet d’un désenchantement.Ceci dit, on ne doit pas en réduire laportée au seul déclin observé dans laparticipation électorale au cours des

12 à 15 dernières années. Cette lecturedéformante résulterait en bonne partied’une conception étroite de l’engage-ment citoyen, qui n’emprunte plus laseule voie électorale.

Par contre, malgré que les activitéscitoyennes ne se résument plusaux activités électorales, celles-cidemeurent cruciales dans la conduitedémocratique des affaires de la Cité.

L’apprentissage de la pratique démocra-tique est bien sûr une affaire de terrain,mais il ne souffrirait évidemmentpas de s’appuyer sur des principesphilosophiques et des connaissances« théoriques » pensés dans une optiquede formation de meilleurs citoyenspour demain.

En mai et juin 1990, 832 élèves ont été interrogés dans septécoles des actuelles villes de Québec et Lévis. L’échantillonest composé à peu près également de garçons et de filles(52 % et 48 %), presque tous âgés de 16 à 18 ans (96 %).Un peu moins du tiers (31 %) des répondants ont fait latotalité ou la plus grande partie de leurs études dans uneécole du secteur privé.

En 1998, à la même période de l’année scolaire qu’en 1990,les mêmes écoles ont participé à l’enquête – sauf une dusecteur privé, remplacée par une autre. L’enquête a étémenée auprès de 847 élèves qui, de nouveau, comptent justeun peu plus de garçons que de filles (53 % et 47 %), pourla plupart âgés de 16 à 18 ans (97 %). Comparé à celui de1990, ce nouvel échantillon comprend un peu moins d’élèvesfréquentant une école du secteur privé (28 %).

La composition des échantillons n’est pas aléatoire, mais lechoix des établissements a été fait en fonction de la diversitésociale et culturelle de la région d’étude choisie. L’enquête s’estdéroulée pendant la période réservée à un cours (générale-ment d’éducation civique ou d’histoire / géographie) et parfoisen présence de l’enseignant responsable; il en découle unfaible taux de refus de répondre.

Ces enquêtes ont été financées de diverses sources, notam-ment la Commission royale sur la réforme électorale et lefinancement des partis politiques (commission Lortie), pourl’enquête de 1990, et le Fonds Gérard-Dion de l’UniversitéLaval, pour la relance de 1998.

Note méthodologique

… il apparaît approprié desonger à mieux préparer lesjeunes à l’exercice de leursdroits civiques, que lapossibilité de voter leur soitreconnue à 16 ou 18 ans.

Chaque année, le directeur général des élections Jean-Pierre Kingsley rencontre les élèves quiassistent au Forum pour jeunes Canadiens, à Ottawa, pour leur parler du processus électoral.

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Juillet 2003 4342 Perspectives électorales

Bien que cette question ne fasse pasencore les manchettes, certains payseuropéens voudraient abaisser à 16 ansl’âge de voter. D’ailleurs, au cours dessept dernières années, six des 16 Étatsallemands5 ont ramené à 16 ans l’âgede participation aux élections locales.Dans d’autres pays, le droit de vote à16 ans a uniquement fait l’objet dedébats.

Il y a une dimension politique claireau fait d’abaisser l’âge de voter. Lessix États allemands susmentionnésétaient régis à l’époque du changementpar une coalition du parti social-démocrate (SozialdemokratischePartei Deutschland) et des Verts(Die Grünen)6. Dans la plupart despays européens, il existe un certainsoutien à cet égard chez les libéraux etla gauche progressiste. Le chef du Partisocialiste français (PS) (Lionel Jospin)et le chef du parti équivalent desPays-Bas (Ad Melkert du Partij van deArbeid [PvdA]) ont, à un moment ouà un autre pendant leurs campagnes

électorales de 2002, appuyé l’idéed’abaisser l’âge de voter, bien qu’il n’enfût pas question dans le programmeofficiel des partis. En Grande-Bretagneet en Flandre (Belgique), la question aété mise à l’ordre du jour par le ministreresponsable des affaires de la jeunesse.

En Flandre, le parti libéral VLD(Vlaamse Liberale Partij), le partiVert Agalev (Anders Gaan Leven) etle parti progressiste fragmentaire Spirit(Sociaal-Progressief-Internationaal-Regionalistisch-Integraal-democratisch-Toekomstgericht) appuient le change-ment7. Le VLD, deuxième parti enimportance en Flandre, a lié la

question à son désir d’éliminer lavotation obligatoire. À l’heureactuelle, il n’existe aucune majoritépolitique en faveur de l’éliminationdu vote obligatoire. De plus, pourabaisser l’âge de voter aux élections

régionales oufédérales, il faut unamendement cons-titutionnel et, parconséquent, lesoutien politique desprovinces wallonnes.Tout cela est encoreloin, mais compte

tenu des changements qui ont eu lieuen Allemagne, des changements auxélections locales pourraient être plusproches.

En Grande-Bretagne, la commissionélectorale est à revoir l’âge minimumdu vote et présentera un rapport auParlement au début de 2004. La com-mission électorale se demande si laréduction de l’âge de voter favoriseraitle réengagement des jeunes dans leprocessus politique; elle étudie aussi lesarguments en faveur du maintien dustatu quo. Entre-temps, un grandnombre d’organismes sociaux et poli-tiques, y compris plusieurs partis, ont

lancé une campagne intitulée « Voterà 16 ans » dans le but d’influencerl’opinion publique et d’encouragerles députés à se prononcer ouverte-ment pour ce changement8. Parmiceux qui sont en faveur, il y a lespartis nationalistes écossais et gallois(Scottish National Party et Party ofWales) ainsi que le Parti libéral-démocrate dont le chef, CharlesKennedy, a publiquement revendiquécette mesure en février 20029. Desmembres des partis travailliste etconservateur ont aussi manifesté leursoutien personnel. Au niveau local, lacommission sur l’administration locale(Commission on Local Governance)vient de conclure dans un importantrapport sur l’avenir de la démocratielocale10 qu’il fallait abaisser l’âge devoter à 16 ans.

Pourquoi voter à 16 ans?Pourquoi pas?

Les motifs de ceux qui sont en faveuret de ceux qui sont opposés à la baissede l’âge du vote sont très semblablesdans les divers pays. On peut grossomodo répartir leurs arguments en troiscatégories : juridiques, politiques etéducatifs.

Phot

o : G

etty

Im

age

s

Westminster, où se trouve le Parlement du Royaume-Uni, à Londres.

En Grande-Bretagne, la commissionélectorale est à revoir l’âge minimum duvote et présentera un rapport au Parlementau début de 2004.

Abaisser l’âge de voter le débat et les expérienceseuropéennes

Kees AartsUniversité de Twente (Pays-Bas)

Charlotte van HeesCentre néerlandais pour la participation politique (Pays-Bas)

La démocratie évolue au gré des contradictions dont uneconcerne la façon de déterminer qui exactement fait partiedu démo de « démocratie ». D’une part, le suffrage universelest considéré comme la caractéristique déterminante de ladémocratie. D’autre part, le suffrage ne s’étend jamais àtous ceux qui sont gouvernés. En fixant les limites, onsoulève le problème de l’inclusivité.

Qui devrait-on exclure de la participation électorale? C’estune des questions les plus difficiles de la théorie démocra-tique. Il y a longtemps, l’économiste autrichien Schumpetera fait valoir que, comme justement il n’y a pas de réponsesimple à cette question, ne faudrait-il pas laisser chaquesociété se définir elle-même1? Ce point de vue radical n’estcependant pas largement accepté. Il est plus fréquentd’essayer de déterminer des critères d’inclusion plus oumoins universels. De prime abord, ces critères sont néces-sairement abstraits; par exemple, un électeur devraitpouvoir « raisonner » en matière de politique et avoirdes préférences politiques.

En politique, il semble qu’un grand nombre de critères serventà l’exclusion. Un de ces critères est un âge minimum pourdevenir électeur. Le raisonnement est qu’à défaut de meilleursindicateurs, l’âge minimum représente en quelque sorte uneindication de maturité civique et, par conséquent, unequalité de citoyenneté à part entière. Certes, il s’agit d’uncercle vicieux puisque la citoyenneté à part entière déter-mine l’âge minimum. Mais la circularité est monnaiecourante en politique2.

Y a-t-il consensus au sujet de l’âge minimumdu vote?

Le problème de l’inclusivité se règle en partie, du moins dansla pratique, par des critères qui diffèrent habituellementd’un pays à l’autre. Selon les études publiées récemment,deux critères semblent faire l’unanimité. Un de ceux-ciest 18 ans comme âge minimum du vote3.

Mais y a-t-il vraiment consensus? Le cas échéant, il estrelativement récent. L’âge minimum du vote a progressive-ment baissé depuis le développement du suffrage dansles démocraties plus anciennes au cours des premièresdécennies du XXe siècle. À titre d’exemple, prenons lecas néerlandais. Lors de l’introduction du système électoralmoderne des Pays-Bas en 1917, l’âge minimum du voteétait de 25 ans. En 1946, il a été fixé à 23 ans. En 1965,le droit de vote a été accordé aux personnes de 21 ans,puis en 1972, il a été baissé à 18 ans. Il semble que lamême chose se soit produite dans de nombreusesdémocraties occidentales.

De plus, ce supposé consensus est fragile. Pour lemoment et sous réserve de quelques exceptions4, il vauttoujours pour les élections présidentielles et celles desdéputés aux assemblées nationales. Depuis quelques annéestoutefois, le débat à ce sujet s’est rouvert dans plusieurspays et dans certains cas, les failles sont déjà visibles,notamment dans le cas des règles régissant les électionslocales.

Les jeunes et les élections

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Juillet 2003 4342 Perspectives électorales

Bien que cette question ne fasse pasencore les manchettes, certains payseuropéens voudraient abaisser à 16 ansl’âge de voter. D’ailleurs, au cours dessept dernières années, six des 16 Étatsallemands5 ont ramené à 16 ans l’âgede participation aux élections locales.Dans d’autres pays, le droit de vote à16 ans a uniquement fait l’objet dedébats.

Il y a une dimension politique claireau fait d’abaisser l’âge de voter. Lessix États allemands susmentionnésétaient régis à l’époque du changementpar une coalition du parti social-démocrate (SozialdemokratischePartei Deutschland) et des Verts(Die Grünen)6. Dans la plupart despays européens, il existe un certainsoutien à cet égard chez les libéraux etla gauche progressiste. Le chef du Partisocialiste français (PS) (Lionel Jospin)et le chef du parti équivalent desPays-Bas (Ad Melkert du Partij van deArbeid [PvdA]) ont, à un moment ouà un autre pendant leurs campagnes

électorales de 2002, appuyé l’idéed’abaisser l’âge de voter, bien qu’il n’enfût pas question dans le programmeofficiel des partis. En Grande-Bretagneet en Flandre (Belgique), la question aété mise à l’ordre du jour par le ministreresponsable des affaires de la jeunesse.

En Flandre, le parti libéral VLD(Vlaamse Liberale Partij), le partiVert Agalev (Anders Gaan Leven) etle parti progressiste fragmentaire Spirit(Sociaal-Progressief-Internationaal-Regionalistisch-Integraal-democratisch-Toekomstgericht) appuient le change-ment7. Le VLD, deuxième parti enimportance en Flandre, a lié la

question à son désir d’éliminer lavotation obligatoire. À l’heureactuelle, il n’existe aucune majoritépolitique en faveur de l’éliminationdu vote obligatoire. De plus, pourabaisser l’âge de voter aux élections

régionales oufédérales, il faut unamendement cons-titutionnel et, parconséquent, lesoutien politique desprovinces wallonnes.Tout cela est encoreloin, mais compte

tenu des changements qui ont eu lieuen Allemagne, des changements auxélections locales pourraient être plusproches.

En Grande-Bretagne, la commissionélectorale est à revoir l’âge minimumdu vote et présentera un rapport auParlement au début de 2004. La com-mission électorale se demande si laréduction de l’âge de voter favoriseraitle réengagement des jeunes dans leprocessus politique; elle étudie aussi lesarguments en faveur du maintien dustatu quo. Entre-temps, un grandnombre d’organismes sociaux et poli-tiques, y compris plusieurs partis, ont

lancé une campagne intitulée « Voterà 16 ans » dans le but d’influencerl’opinion publique et d’encouragerles députés à se prononcer ouverte-ment pour ce changement8. Parmiceux qui sont en faveur, il y a lespartis nationalistes écossais et gallois(Scottish National Party et Party ofWales) ainsi que le Parti libéral-démocrate dont le chef, CharlesKennedy, a publiquement revendiquécette mesure en février 20029. Desmembres des partis travailliste etconservateur ont aussi manifesté leursoutien personnel. Au niveau local, lacommission sur l’administration locale(Commission on Local Governance)vient de conclure dans un importantrapport sur l’avenir de la démocratielocale10 qu’il fallait abaisser l’âge devoter à 16 ans.

Pourquoi voter à 16 ans?Pourquoi pas?

Les motifs de ceux qui sont en faveuret de ceux qui sont opposés à la baissede l’âge du vote sont très semblablesdans les divers pays. On peut grossomodo répartir leurs arguments en troiscatégories : juridiques, politiques etéducatifs.

Phot

o : G

etty

Im

age

s

Westminster, où se trouve le Parlement du Royaume-Uni, à Londres.

En Grande-Bretagne, la commissionélectorale est à revoir l’âge minimum duvote et présentera un rapport au Parlementau début de 2004.

Abaisser l’âge de voter le débat et les expérienceseuropéennes

Kees AartsUniversité de Twente (Pays-Bas)

Charlotte van HeesCentre néerlandais pour la participation politique (Pays-Bas)

La démocratie évolue au gré des contradictions dont uneconcerne la façon de déterminer qui exactement fait partiedu démo de « démocratie ». D’une part, le suffrage universelest considéré comme la caractéristique déterminante de ladémocratie. D’autre part, le suffrage ne s’étend jamais àtous ceux qui sont gouvernés. En fixant les limites, onsoulève le problème de l’inclusivité.

Qui devrait-on exclure de la participation électorale? C’estune des questions les plus difficiles de la théorie démocra-tique. Il y a longtemps, l’économiste autrichien Schumpetera fait valoir que, comme justement il n’y a pas de réponsesimple à cette question, ne faudrait-il pas laisser chaquesociété se définir elle-même1? Ce point de vue radical n’estcependant pas largement accepté. Il est plus fréquentd’essayer de déterminer des critères d’inclusion plus oumoins universels. De prime abord, ces critères sont néces-sairement abstraits; par exemple, un électeur devraitpouvoir « raisonner » en matière de politique et avoirdes préférences politiques.

En politique, il semble qu’un grand nombre de critères serventà l’exclusion. Un de ces critères est un âge minimum pourdevenir électeur. Le raisonnement est qu’à défaut de meilleursindicateurs, l’âge minimum représente en quelque sorte uneindication de maturité civique et, par conséquent, unequalité de citoyenneté à part entière. Certes, il s’agit d’uncercle vicieux puisque la citoyenneté à part entière déter-mine l’âge minimum. Mais la circularité est monnaiecourante en politique2.

Y a-t-il consensus au sujet de l’âge minimumdu vote?

Le problème de l’inclusivité se règle en partie, du moins dansla pratique, par des critères qui diffèrent habituellementd’un pays à l’autre. Selon les études publiées récemment,deux critères semblent faire l’unanimité. Un de ceux-ciest 18 ans comme âge minimum du vote3.

Mais y a-t-il vraiment consensus? Le cas échéant, il estrelativement récent. L’âge minimum du vote a progressive-ment baissé depuis le développement du suffrage dansles démocraties plus anciennes au cours des premièresdécennies du XXe siècle. À titre d’exemple, prenons lecas néerlandais. Lors de l’introduction du système électoralmoderne des Pays-Bas en 1917, l’âge minimum du voteétait de 25 ans. En 1946, il a été fixé à 23 ans. En 1965,le droit de vote a été accordé aux personnes de 21 ans,puis en 1972, il a été baissé à 18 ans. Il semble que lamême chose se soit produite dans de nombreusesdémocraties occidentales.

De plus, ce supposé consensus est fragile. Pour lemoment et sous réserve de quelques exceptions4, il vauttoujours pour les élections présidentielles et celles desdéputés aux assemblées nationales. Depuis quelques annéestoutefois, le débat à ce sujet s’est rouvert dans plusieurspays et dans certains cas, les failles sont déjà visibles,notamment dans le cas des règles régissant les électionslocales.

Les jeunes et les élections

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Juillet 2003 4544 Perspectives électorales

nouveaux électeurs votent différemmentde leurs aînés, sans toutefois manifesterdes tendances uniformes15. Les statis-tiques des élections locales de 1999dans l’État de Rhénanie-du-Nord-Westphalie indiquent que les Verts etles libéraux FDP (Freie demokratischePartei) sont plus populaires chez lesjeunes au détriment des partis SPD(Sozialdemokratische ParteiDeutschlands) et CDU (Christlichdemokratischen Union Deutschlands).Mais lors des élections locales de 1996en Basse-Saxe, les sondages faits àHanovre et à Braunschweig ont révéléque plus de jeunes avaient voté pour laCDU et les Verts. Enfin, lors des élec-tions locales de 1999 en Saxe-Anhalt,on a à peine remarqué de différenceentre les préférences pour les partis. Il

est important de noter que dans aucunde ces États, les jeunes n’étaient parti-culièrement enclins à voter pour despartis d’extrême gauche ou d’extrêmedroite.

Que nous dit la recherche?

Traditionnellement, on considère lefait de voter comme un moyen plus oumoins utile d’exprimer ses préférencespolitiques. Ce moyen est utilisé plusfacilement par ceux qui disposent desressources pertinentes (notammentl’éducation).

Bien qu’on ne puisse contester l’impor-tance de cette explication axée sur lesressources dans la décision de voter ounon, à elle seule elle n’explique qu’unefaible fraction de la décision de voterou non (habituellement moins de 10 %).En quête de meilleures explications,une seule variable semblait s’appliqueruniformément. Il s’agit de l’âge du

votant. Les recherches indiquent queles gens ont tendance à voter en plusgrand nombre à mesure qu’ils avancenten âge, mais que le rapport est inversédans le cas des aînés. Outre ces effetsdu cycle de vie, on a aussi souventinvoqué des différences entre généra-tions pour expliquer la participationélectorale : les générations plus jeunesvotent moins que les générations plusâgées, même en vieillissant.

De récentes publications invoquentd’autres facteurs liés à l’âge pour expli-quer la participation électorale. Plutzer(2002) présente et met à l’essai une« théorie du développement de laparticipation » qui met en valeurl’habitude du vote et le rôle crucialde la socialisation pendant l’enfance16.

Le fait que lesnouveaux électeursvotent ou nondépend dans unegrande mesure desressources socialeset politiques de leursparents. Ce n’est que

plus tard dans la vie que les habitudesacquises viennent remplacer cesressources.

Cette analyse du vote fondée sur ledéveloppement de la personnalitépourrait très bien renforcer les argumentséducatifs en faveur de l’abaissementde l’âge de voter dont on a parlé plushaut. À 16 ans, la plupart des jeunesfréquentent encore l’école. Les coursd’éducation civique, qui sonthabituellement requis avant 18 ans,peuvent – en même temps qu’uneélection chaudement contestée –favoriser l’acquisition d’habitudesde voter17.

La recherche faite dans trois États alle-mands sur la participation électoralechez les jeunes de 16 à 18 ans sembleappuyer cette hypothèse. Dans l’Étatde Rhénanie-du-Nord-Westphalie,la participation des jeunes de 16 à21 ans18 était légèrement inférieure à

la moyenne calculée pour l’ensemblede l’électorat, mais clairementsupérieure, d’environ 5 % à 8 %, àcelle des 21 à 30 ans. Pareillement, enBasse-Saxe, les jeunes de 16 à 18 ansvotent dans une même proportion queles électeurs de 35 à 45 ans. Enfin, onpeut tirer des conclusions semblablesdes élections locales de 1999 en Saxe-Anhalt.

Si la théorie du développement de laparticipation électorale est valable,cette génération de jeunes Allemandsde 16 à 18 ans est plus susceptibled’acquérir l’habitude de voter que lesgénérations précédentes, qui ont com-mencé à voter à 18 ans. C’est peut-êtrede bon augure pour l’avenir de ladémocratie électorale.

L’avenir

D’autres pays européens suivront-ilsl’exemple de l’Allemagne? Probablementpas à court terme. Dans la plupart despays, l’abaissement de l’âge de voterpasse par un amendement constitu-tionnel, ce qui ne peut pas se fairerapidement. Il est plus facile deprévoir des essais au niveau local, cequi semble faisable en Flandre et enGrande-Bretagne. De plus, le fait dechanger les règles du processus élec-toral est en soi déjà un geste politique.Ainsi, après que les élections de l’Étatde Hesse en 1999 sont venues rem-placer la coalition SPD-Verts par unemajorité CDU-FDP, le gouvernementest revenu sur sa décision de 1998d’abaisser l’âge de voter à 16 ans.Tout comme dans les années 1970, peuimporte l’orientation que prendront lesréformes, il est peu probable qu’elless’arrêtent aux frontières nationales.

Dans la plupart des pays, l’abaissement del’âge de voter passe par un amendementconstitutionnel, ce qui ne peut pas se fairerapidement.

Arguments juridiquesSur le plan juridique, on atteint samajorité à 18 ans. Si l’on fait abstrac-tion des petites différences juridiquesqui existent dans les pays d’Europe,cela signifie qu’à 18 ans, on peut êtreconsidéré pleinement responsable deses gestes, à savoir que l’on peut subirun procès devant un tribunal pouradultes, que l’on peut se marier sans leconsentement de ses parents et lancersa propre entreprise. Voilà un argu-ment contre le fait de voter à 16 ans.À l’opposé, on prétend que plusieursautres droits et devoirs juridiquessont accordés à 16 ans, comme le faitde pouvoir s’enrôler dans l’armée,d’acheter de l’alcool, de ne plusfréquenter l’école et de payer del’impôt. Ceux qui sont en faveurd’abaisser l’âge de voter ont soulignéce manque de cohérence à l’égard desdroits et des responsabilités des jeunesà des âges différents. Dans certains Étatsallemands, par exemple en Basse-Saxe,cela a été l’argument déterminant pourabaisser l’âge de voter au niveau local.

Le droit de participation est implicitedans l’article 12 de la Conventionrelative aux droits de l’enfant desNations Unies qu’appuient tous lespays d’Europe de l’Ouest. L’article 12stipule que chaque enfant capablede se faire une opinion a le droit des’exprimer librement sur tous les sujetsle concernant, et que l’opinion de cetenfant sera prise en considération con-formément à son âge et à son niveaude maturité. Bien qu’il ne s’agisse pasvraiment d’un « droit de participation »aux questions concernant l’enfant, onl’interprète souvent comme tel. Parconséquent, on peut faire valoir quece traité fournit les motifs d’ordrejuridique en faveur de la réductionde l’âge de voter.

Arguments politiquesOn prétend souvent que les politicienset les jeunes vivent dans des mondesdifférents et qu’ils parlent des languesdifférentes. Nombre de politiciens

considèrent les jeunes comme desobjets de politique. Traditionnellement,les politiques pour les jeunes visentceux qui ont un comportement déviant(et qui sont relativement peu nom-breux). Il n’est donc pas surprenantque les jeunes se sentent exclus duprocessus démocratique11.

On prétend que donner aux jeunes de16 et 17 ans le droit de voter motiverales partis politiques à rajeunir la poli-tique et utiliser un langage que lesjeunes comprennent. Les sceptiquesestiment que les politiciens créent ledésir du droit de vote plutôt que d’ydonner suite. La gent politique estattirée par les avantages d’un nouvelélectorat éventuel. Il est vrai que ceuxqui sont en faveur d’abaisser l’âge duvote sont plutôt gauchistes, verts oulibéraux, et qu’en Europe, ils représen-tent un électorat relativement jeune.

Arguments éducatifsLes deux arguments le plus souventinvoqués contre l’abaissement de l’âgede voter sont le fait que cette mesureaura des incidencesnégatives sur laparticipationélectorale et queles jeunes onttendance à voterpour des partis extrémistes. Ces deuxarguments reposent sur l’hypothèseque pour voter, il faut avoir atteintune maturité civique que les jeunesde 16 ans ne possèdent pashabituellement.

Ce raisonnement a cependant étérenversé. Le taux de participationchez les jeunes a toujours été relative-ment faible. Or, dernièrement, on afait remarquer que la participationn’augmentait plus au fur et à mesureque les jeunes générations avançaienten âge12. Les jeunes ne sont pas attiréspar les activités électorales et unnombre de plus en plus grand ne s’yintéressera pas davantage en vieillis-sant. Schizzerotto et Gasperoni

décrivent ce phénomène comme étantune menace pour la démocratie :

La participation politique limitée,à savoir le vote, l’adhésion à despartis politiques, à des associationset organismes de jeunes et lareprésentation dans un organe dedécision, est reconnue commeétant un important problème chezles jeunes de la plupart des paysd’Europe occidentale … Le déclinde l’engagement politique et de laparticipation sociétale tradition-nelle des jeunes est perçu commeune menace pour l’avenir de ladémocratie représentative13...[traduction libre]

C’est pour cette raison qu’on a soutenuque les jeunes devaient s’engager plustôt dans le processus électoral, et lefait de leur accorder le droit de votepourrait aider à y parvenir.

Dans l’intervalle, il est intéressant denoter que dans le cadre de sondages,beaucoup de jeunes s’opposent à

l’abaissement de l’âge de voter14. Ilsestiment ne pas avoir assez de connais-sances pour le faire. Abaisser l’âge devoter à 16 ans leur sourirait davantages’ils avaient de meilleures connaissancespolitiques. En Grande-Bretagne, depuisseptembre 2002, l’éducation civiquefait partie du programme nationald’études secondaires. La campagne« Voter à 16 ans » a utilisé le lance-ment de cette matière pour apporterde l’eau à son moulin.

Que faut-il penser du vote pour lespartis extrémistes ou les partis qui sontcontre le système? Des rechercheseffectuées dans trois États allemands quiont récemment abaissé l’âge de voterde 18 à 16 ans confirment que les

Six États allemands ont récemment abaissél’âge de voter de 18 à 16 ans.

Page 47: 11940 EC Insight Vol5 no2 fv8 - Elections in Canada · en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni 31 L’art de vendre la participation électorale à la génération MusiquePlus

Juillet 2003 4544 Perspectives électorales

nouveaux électeurs votent différemmentde leurs aînés, sans toutefois manifesterdes tendances uniformes15. Les statis-tiques des élections locales de 1999dans l’État de Rhénanie-du-Nord-Westphalie indiquent que les Verts etles libéraux FDP (Freie demokratischePartei) sont plus populaires chez lesjeunes au détriment des partis SPD(Sozialdemokratische ParteiDeutschlands) et CDU (Christlichdemokratischen Union Deutschlands).Mais lors des élections locales de 1996en Basse-Saxe, les sondages faits àHanovre et à Braunschweig ont révéléque plus de jeunes avaient voté pour laCDU et les Verts. Enfin, lors des élec-tions locales de 1999 en Saxe-Anhalt,on a à peine remarqué de différenceentre les préférences pour les partis. Il

est important de noter que dans aucunde ces États, les jeunes n’étaient parti-culièrement enclins à voter pour despartis d’extrême gauche ou d’extrêmedroite.

Que nous dit la recherche?

Traditionnellement, on considère lefait de voter comme un moyen plus oumoins utile d’exprimer ses préférencespolitiques. Ce moyen est utilisé plusfacilement par ceux qui disposent desressources pertinentes (notammentl’éducation).

Bien qu’on ne puisse contester l’impor-tance de cette explication axée sur lesressources dans la décision de voter ounon, à elle seule elle n’explique qu’unefaible fraction de la décision de voterou non (habituellement moins de 10 %).En quête de meilleures explications,une seule variable semblait s’appliqueruniformément. Il s’agit de l’âge du

votant. Les recherches indiquent queles gens ont tendance à voter en plusgrand nombre à mesure qu’ils avancenten âge, mais que le rapport est inversédans le cas des aînés. Outre ces effetsdu cycle de vie, on a aussi souventinvoqué des différences entre généra-tions pour expliquer la participationélectorale : les générations plus jeunesvotent moins que les générations plusâgées, même en vieillissant.

De récentes publications invoquentd’autres facteurs liés à l’âge pour expli-quer la participation électorale. Plutzer(2002) présente et met à l’essai une« théorie du développement de laparticipation » qui met en valeurl’habitude du vote et le rôle crucialde la socialisation pendant l’enfance16.

Le fait que lesnouveaux électeursvotent ou nondépend dans unegrande mesure desressources socialeset politiques de leursparents. Ce n’est que

plus tard dans la vie que les habitudesacquises viennent remplacer cesressources.

Cette analyse du vote fondée sur ledéveloppement de la personnalitépourrait très bien renforcer les argumentséducatifs en faveur de l’abaissementde l’âge de voter dont on a parlé plushaut. À 16 ans, la plupart des jeunesfréquentent encore l’école. Les coursd’éducation civique, qui sonthabituellement requis avant 18 ans,peuvent – en même temps qu’uneélection chaudement contestée –favoriser l’acquisition d’habitudesde voter17.

La recherche faite dans trois États alle-mands sur la participation électoralechez les jeunes de 16 à 18 ans sembleappuyer cette hypothèse. Dans l’Étatde Rhénanie-du-Nord-Westphalie,la participation des jeunes de 16 à21 ans18 était légèrement inférieure à

la moyenne calculée pour l’ensemblede l’électorat, mais clairementsupérieure, d’environ 5 % à 8 %, àcelle des 21 à 30 ans. Pareillement, enBasse-Saxe, les jeunes de 16 à 18 ansvotent dans une même proportion queles électeurs de 35 à 45 ans. Enfin, onpeut tirer des conclusions semblablesdes élections locales de 1999 en Saxe-Anhalt.

Si la théorie du développement de laparticipation électorale est valable,cette génération de jeunes Allemandsde 16 à 18 ans est plus susceptibled’acquérir l’habitude de voter que lesgénérations précédentes, qui ont com-mencé à voter à 18 ans. C’est peut-êtrede bon augure pour l’avenir de ladémocratie électorale.

L’avenir

D’autres pays européens suivront-ilsl’exemple de l’Allemagne? Probablementpas à court terme. Dans la plupart despays, l’abaissement de l’âge de voterpasse par un amendement constitu-tionnel, ce qui ne peut pas se fairerapidement. Il est plus facile deprévoir des essais au niveau local, cequi semble faisable en Flandre et enGrande-Bretagne. De plus, le fait dechanger les règles du processus élec-toral est en soi déjà un geste politique.Ainsi, après que les élections de l’Étatde Hesse en 1999 sont venues rem-placer la coalition SPD-Verts par unemajorité CDU-FDP, le gouvernementest revenu sur sa décision de 1998d’abaisser l’âge de voter à 16 ans.Tout comme dans les années 1970, peuimporte l’orientation que prendront lesréformes, il est peu probable qu’elless’arrêtent aux frontières nationales.

Dans la plupart des pays, l’abaissement del’âge de voter passe par un amendementconstitutionnel, ce qui ne peut pas se fairerapidement.

Arguments juridiquesSur le plan juridique, on atteint samajorité à 18 ans. Si l’on fait abstrac-tion des petites différences juridiquesqui existent dans les pays d’Europe,cela signifie qu’à 18 ans, on peut êtreconsidéré pleinement responsable deses gestes, à savoir que l’on peut subirun procès devant un tribunal pouradultes, que l’on peut se marier sans leconsentement de ses parents et lancersa propre entreprise. Voilà un argu-ment contre le fait de voter à 16 ans.À l’opposé, on prétend que plusieursautres droits et devoirs juridiquessont accordés à 16 ans, comme le faitde pouvoir s’enrôler dans l’armée,d’acheter de l’alcool, de ne plusfréquenter l’école et de payer del’impôt. Ceux qui sont en faveurd’abaisser l’âge de voter ont soulignéce manque de cohérence à l’égard desdroits et des responsabilités des jeunesà des âges différents. Dans certains Étatsallemands, par exemple en Basse-Saxe,cela a été l’argument déterminant pourabaisser l’âge de voter au niveau local.

Le droit de participation est implicitedans l’article 12 de la Conventionrelative aux droits de l’enfant desNations Unies qu’appuient tous lespays d’Europe de l’Ouest. L’article 12stipule que chaque enfant capablede se faire une opinion a le droit des’exprimer librement sur tous les sujetsle concernant, et que l’opinion de cetenfant sera prise en considération con-formément à son âge et à son niveaude maturité. Bien qu’il ne s’agisse pasvraiment d’un « droit de participation »aux questions concernant l’enfant, onl’interprète souvent comme tel. Parconséquent, on peut faire valoir quece traité fournit les motifs d’ordrejuridique en faveur de la réductionde l’âge de voter.

Arguments politiquesOn prétend souvent que les politicienset les jeunes vivent dans des mondesdifférents et qu’ils parlent des languesdifférentes. Nombre de politiciens

considèrent les jeunes comme desobjets de politique. Traditionnellement,les politiques pour les jeunes visentceux qui ont un comportement déviant(et qui sont relativement peu nom-breux). Il n’est donc pas surprenantque les jeunes se sentent exclus duprocessus démocratique11.

On prétend que donner aux jeunes de16 et 17 ans le droit de voter motiverales partis politiques à rajeunir la poli-tique et utiliser un langage que lesjeunes comprennent. Les sceptiquesestiment que les politiciens créent ledésir du droit de vote plutôt que d’ydonner suite. La gent politique estattirée par les avantages d’un nouvelélectorat éventuel. Il est vrai que ceuxqui sont en faveur d’abaisser l’âge duvote sont plutôt gauchistes, verts oulibéraux, et qu’en Europe, ils représen-tent un électorat relativement jeune.

Arguments éducatifsLes deux arguments le plus souventinvoqués contre l’abaissement de l’âgede voter sont le fait que cette mesureaura des incidencesnégatives sur laparticipationélectorale et queles jeunes onttendance à voterpour des partis extrémistes. Ces deuxarguments reposent sur l’hypothèseque pour voter, il faut avoir atteintune maturité civique que les jeunesde 16 ans ne possèdent pashabituellement.

Ce raisonnement a cependant étérenversé. Le taux de participationchez les jeunes a toujours été relative-ment faible. Or, dernièrement, on afait remarquer que la participationn’augmentait plus au fur et à mesureque les jeunes générations avançaienten âge12. Les jeunes ne sont pas attiréspar les activités électorales et unnombre de plus en plus grand ne s’yintéressera pas davantage en vieillis-sant. Schizzerotto et Gasperoni

décrivent ce phénomène comme étantune menace pour la démocratie :

La participation politique limitée,à savoir le vote, l’adhésion à despartis politiques, à des associationset organismes de jeunes et lareprésentation dans un organe dedécision, est reconnue commeétant un important problème chezles jeunes de la plupart des paysd’Europe occidentale … Le déclinde l’engagement politique et de laparticipation sociétale tradition-nelle des jeunes est perçu commeune menace pour l’avenir de ladémocratie représentative13...[traduction libre]

C’est pour cette raison qu’on a soutenuque les jeunes devaient s’engager plustôt dans le processus électoral, et lefait de leur accorder le droit de votepourrait aider à y parvenir.

Dans l’intervalle, il est intéressant denoter que dans le cadre de sondages,beaucoup de jeunes s’opposent à

l’abaissement de l’âge de voter14. Ilsestiment ne pas avoir assez de connais-sances pour le faire. Abaisser l’âge devoter à 16 ans leur sourirait davantages’ils avaient de meilleures connaissancespolitiques. En Grande-Bretagne, depuisseptembre 2002, l’éducation civiquefait partie du programme nationald’études secondaires. La campagne« Voter à 16 ans » a utilisé le lance-ment de cette matière pour apporterde l’eau à son moulin.

Que faut-il penser du vote pour lespartis extrémistes ou les partis qui sontcontre le système? Des rechercheseffectuées dans trois États allemands quiont récemment abaissé l’âge de voterde 18 à 16 ans confirment que les

Six États allemands ont récemment abaissél’âge de voter de 18 à 16 ans.

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Juillet 2003 4746 Perspectives électorales

Un groupe de jeunes de l’Ontario, « Rush the Vote », utilise lamusique et les artistes pour encourager les jeunes à « participerau processus démocratique et à mieux s’informer des questionsde société ».

La campagne nationale « Rush the Vote » a été lancéele 6 avril 2003 lors d’une fête de quartier au centre-villed’Ottawa. Le lancement a coïncidé avec la remise annuelle desprix Juno; 17 artistes et groupes ont donné un spectacle gratuitsur une scène montée au milieu de ce qui est habituellementune rue achalandée de la capitale nationale. « Si vous voulezattirer une foule, mettez-y de la musique », a déclaré PaulGreen, directeur exécutif de « Rush the Vote ». « C’est ce queles jeunes utilisent pour vraiment comprendre leur monde.Qu’on trouve ça bon ou mauvais, c’est un fait. Ils suiventl’exemple des vedettes du monde du spectacle, pas des chefspolitiques et sociaux. Les jeunes se reconnaissent dans lamusique. » Le rassemblement était également appuyé par lachaîne de télévision nationale MuchMusic, la Commissionde la capitale nationale et trois stations de radio locales.

Plusieurs intervenants ont encouragé la foule à s’engager dansdes causes politiques et sociales et à exercer son droit de vote.Les participants ont voté à un référendum factice où l’ondemandait si le droit de vote devrait être accordé à partir del’âge de 16 ans au lieu de 18 ans. Ils ont appuyé ce change-ment dans une proportion de presque deux pour un (304à 171)

« Rush the Vote » s’efforce non seulement d’inciter plus dejeunes à voter, mais de simplifier l’information, de la rendreplus facile à comprendre, selon M. Green. « De nombreuxjeunes ne voient pas de différence entre les divers partis etcandidats et ce qu’ils défendent. Les partis ne leur ont pasdit clairement. »

M. Green demande aussi l’établissement d’un nouvel organismenational disposant d’une stratégie visant à informer à tempsplein les jeunes Canadiens de l’importance de voter et à lesencourager à le faire.

Fondé en 1997, « Rush the Vote » s’inspire des campagnes« Rock the Vote » menées aux États-Unis. Il est égalementissu de la Universal Black Student Association (fondée enraison du fait que 50 % des jeunes Noirs étaient des décrocheursen Ontario) et du B.L.O.C.K Headz (Building Links onCommunity Korners). Selon des sondages, seulement 25 %des jeunes Canadiens âgés de 18 à 24 ans ont voté à ladernière élection générale fédérale en 2000, mais M. Greencroit que la proportion de jeunes électeurs noirs qui ont exercéleur droit de vote était probablement beaucoup plus faible.« Ils sont nombreux à se dire qu’ils ont d’autres préoccupationsquotidiennes, y compris l’école, le travail, la carrière, le systèmejudiciaire. Voter ne fait pas partie de leurs priorités. Nous nousefforçons de leur montrer que tout est lié. »

Le groupe « Rush the Vote » prévoit tenir un événement simi-laire lors de la prochaine élection provinciale en Ontario, pourtenter d’augmenter la participation des jeunes électeurs. Sonpremier rassemblement important a eu lieu lors de l’électionontarienne de 1999. Par ailleurs, « Dunk the Vote », uneactivité à laquelle participaient des personnalités du monde dubasketball, s’est tenue en 2000 à l’Université de Toronto pourencourager plus de gens à voter aux élections municipales.

Lors de l’activité « Rush the Vote » tenue le 6 avril 2003 à Ottawa,des jeunes ont voté à un référendum simulé sur la réduction de l’âgedu vote à 16 ans.

1. Joseph Schumpeter, Capitalism, Socialism,and Democracy (London: Allen & Unwin,1943, 1976 ed.), p. 245.

2. Robert A. Dahl, Democracy and Its Critics(New Haven: Yale U.P., 1989), p. 127.

3. L’autre est l’exclusion des droits de votedes personnes ayant une déficience men-tale. Voir André Blais, Louis Massicotte,Antoine Yoshinaka, « Deciding WhoHas the Right to Vote: A ComparativeAnalysis of Election Laws », ElectoralStudies, vol. 20 (2001), p. 41-62.

4. Le Brésil représente l’exception la plusconnue où les jeunes de 16 à 18 ans ontle droit de vote non obligatoire (le voteest obligatoire pour les électeurs de 18 à70 ans). Dans plusieurs pays asiatiques,l’âge de voter est supérieur à 18 ans. VoirBlais, Massicotte et Yoshinaka, « DecidingWho Has The Right to Vote ».

5. Ces six États allemands sont : Hesse, Saxe-Anhalt, Schleswig-Holstein, Basse-Saxe,Rhénanie-du-Nord-Westphalie,Mecklembourg-Poméranie occidentale.

6. Manfred Schwarzmeier, « Kommunalwahlab 16 Jahren: Mehr als nur einPartizipationsplacebo? », BJR-Jugendnachrichten (janvier-février 2002).

7. Joël de Ceulaer, « Een verjongingskuurvoor de stem,” Knack, vol. 32 (27 novembre2002), p. 20-25.

8. Voir www.votesat16.org.uk.

9. Discours de Kennedy à Westminster Dayle 5 février 2002, transmis aux nouvellesde la BBC sur BBCi. Voir news.bbc.co.uk/1/hi/uk_politics/1801693.stm.

10. Traité dans un document d’information dela National Youth Agency, Spotlight,numéro 11 (janvier 2003); Commissionon Local Governance, Free to Differ:The Future for Local Democracy (LocalGovernment Information Unit, 2002).

11. Marije Cornelissen, « De jongere bestaatniet. Negatieve gevolgen van de beeldvormingover jongeren (Utrecht: Landelijk Bureauter bestrijding van Rassendiscriminatie,2000), p. 54; p. ex. Children’s RightsAlliance for England, The REALDemocratic Deficit: Why 16 and 17 Year-Olds Should Be Allowed to Vote (London:CRAE, 2000), p. 20.

12. Pour un aperçu des arguments et despreuves, voir Mark N. Franklin, TheDynamics of Voter Turnout in EstablishedDemocracies since 1945 (Cambridge :Cambridge University Press, à venir).

13. A. Schizzerotto et G. Gasperoni (super-viseurs), Study on the State of Young Peopleand Youth Policy in Europe (Milan : IARD,2001), p. 1-17.

14. Charlotte Van Hees et Heleen Snijders,Drank, Brommer en dus ook stemmen!:Een onderzoek naar de haalbaarheid enwenselijkheid van het stemrecht voorzestienjarigen (Amsterdam : Instituutvoor Publiek en Politiek, 2002); pour laGrande-Bretagne, voir aussi Spotlight, ledocument d’information de la NationalYouth Agency, à www.nya.org.uk/download-PDF/spotlight-5.pdf.

15. Les sources sont : Statistisches Landesamt,Nordrhein-Westfalen; StatistischesLandesamt, Sachsen-Anhalt; UniversitätHannover, Arbeitsgruppe InterdisziplinäreSozialstrukturforschung.

16. Eric Plutzer, « Becoming a Habitual Voter:Inertia, Resources and Growth in YoungAdulthood », American Political ScienceReview, vol. 96 (2002), p. 41-56.

17. Franklin démontre que le contexte dela première élection peut laisser une« marque » pour les taux de participationde la génération de nouveaux votantspendant de nombreuses années. Mark N.Franklin, « Electoral Competitiveness andTurnout: How Voters React to theChanging Character of Elections »,communication présentée au JointSessions of Workshops of the EuropeanConsortium for Political Research àEdinbourg du 28 mars au 3 avril 2003.

18. La catégorisation des âges est le résultatdes règles administratives.

NOTES

Les jeunes et les élections

« Rush the Vote » Wayne BrownDirecteur de la rédaction, Perspectives électorales, Élections Canada

Phot

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ayn

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Juillet 2003 4746 Perspectives électorales

Un groupe de jeunes de l’Ontario, « Rush the Vote », utilise lamusique et les artistes pour encourager les jeunes à « participerau processus démocratique et à mieux s’informer des questionsde société ».

La campagne nationale « Rush the Vote » a été lancéele 6 avril 2003 lors d’une fête de quartier au centre-villed’Ottawa. Le lancement a coïncidé avec la remise annuelle desprix Juno; 17 artistes et groupes ont donné un spectacle gratuitsur une scène montée au milieu de ce qui est habituellementune rue achalandée de la capitale nationale. « Si vous voulezattirer une foule, mettez-y de la musique », a déclaré PaulGreen, directeur exécutif de « Rush the Vote ». « C’est ce queles jeunes utilisent pour vraiment comprendre leur monde.Qu’on trouve ça bon ou mauvais, c’est un fait. Ils suiventl’exemple des vedettes du monde du spectacle, pas des chefspolitiques et sociaux. Les jeunes se reconnaissent dans lamusique. » Le rassemblement était également appuyé par lachaîne de télévision nationale MuchMusic, la Commissionde la capitale nationale et trois stations de radio locales.

Plusieurs intervenants ont encouragé la foule à s’engager dansdes causes politiques et sociales et à exercer son droit de vote.Les participants ont voté à un référendum factice où l’ondemandait si le droit de vote devrait être accordé à partir del’âge de 16 ans au lieu de 18 ans. Ils ont appuyé ce change-ment dans une proportion de presque deux pour un (304à 171)

« Rush the Vote » s’efforce non seulement d’inciter plus dejeunes à voter, mais de simplifier l’information, de la rendreplus facile à comprendre, selon M. Green. « De nombreuxjeunes ne voient pas de différence entre les divers partis etcandidats et ce qu’ils défendent. Les partis ne leur ont pasdit clairement. »

M. Green demande aussi l’établissement d’un nouvel organismenational disposant d’une stratégie visant à informer à tempsplein les jeunes Canadiens de l’importance de voter et à lesencourager à le faire.

Fondé en 1997, « Rush the Vote » s’inspire des campagnes« Rock the Vote » menées aux États-Unis. Il est égalementissu de la Universal Black Student Association (fondée enraison du fait que 50 % des jeunes Noirs étaient des décrocheursen Ontario) et du B.L.O.C.K Headz (Building Links onCommunity Korners). Selon des sondages, seulement 25 %des jeunes Canadiens âgés de 18 à 24 ans ont voté à ladernière élection générale fédérale en 2000, mais M. Greencroit que la proportion de jeunes électeurs noirs qui ont exercéleur droit de vote était probablement beaucoup plus faible.« Ils sont nombreux à se dire qu’ils ont d’autres préoccupationsquotidiennes, y compris l’école, le travail, la carrière, le systèmejudiciaire. Voter ne fait pas partie de leurs priorités. Nous nousefforçons de leur montrer que tout est lié. »

Le groupe « Rush the Vote » prévoit tenir un événement simi-laire lors de la prochaine élection provinciale en Ontario, pourtenter d’augmenter la participation des jeunes électeurs. Sonpremier rassemblement important a eu lieu lors de l’électionontarienne de 1999. Par ailleurs, « Dunk the Vote », uneactivité à laquelle participaient des personnalités du monde dubasketball, s’est tenue en 2000 à l’Université de Toronto pourencourager plus de gens à voter aux élections municipales.

Lors de l’activité « Rush the Vote » tenue le 6 avril 2003 à Ottawa,des jeunes ont voté à un référendum simulé sur la réduction de l’âgedu vote à 16 ans.

1. Joseph Schumpeter, Capitalism, Socialism,and Democracy (London: Allen & Unwin,1943, 1976 ed.), p. 245.

2. Robert A. Dahl, Democracy and Its Critics(New Haven: Yale U.P., 1989), p. 127.

3. L’autre est l’exclusion des droits de votedes personnes ayant une déficience men-tale. Voir André Blais, Louis Massicotte,Antoine Yoshinaka, « Deciding WhoHas the Right to Vote: A ComparativeAnalysis of Election Laws », ElectoralStudies, vol. 20 (2001), p. 41-62.

4. Le Brésil représente l’exception la plusconnue où les jeunes de 16 à 18 ans ontle droit de vote non obligatoire (le voteest obligatoire pour les électeurs de 18 à70 ans). Dans plusieurs pays asiatiques,l’âge de voter est supérieur à 18 ans. VoirBlais, Massicotte et Yoshinaka, « DecidingWho Has The Right to Vote ».

5. Ces six États allemands sont : Hesse, Saxe-Anhalt, Schleswig-Holstein, Basse-Saxe,Rhénanie-du-Nord-Westphalie,Mecklembourg-Poméranie occidentale.

6. Manfred Schwarzmeier, « Kommunalwahlab 16 Jahren: Mehr als nur einPartizipationsplacebo? », BJR-Jugendnachrichten (janvier-février 2002).

7. Joël de Ceulaer, « Een verjongingskuurvoor de stem,” Knack, vol. 32 (27 novembre2002), p. 20-25.

8. Voir www.votesat16.org.uk.

9. Discours de Kennedy à Westminster Dayle 5 février 2002, transmis aux nouvellesde la BBC sur BBCi. Voir news.bbc.co.uk/1/hi/uk_politics/1801693.stm.

10. Traité dans un document d’information dela National Youth Agency, Spotlight,numéro 11 (janvier 2003); Commissionon Local Governance, Free to Differ:The Future for Local Democracy (LocalGovernment Information Unit, 2002).

11. Marije Cornelissen, « De jongere bestaatniet. Negatieve gevolgen van de beeldvormingover jongeren (Utrecht: Landelijk Bureauter bestrijding van Rassendiscriminatie,2000), p. 54; p. ex. Children’s RightsAlliance for England, The REALDemocratic Deficit: Why 16 and 17 Year-Olds Should Be Allowed to Vote (London:CRAE, 2000), p. 20.

12. Pour un aperçu des arguments et despreuves, voir Mark N. Franklin, TheDynamics of Voter Turnout in EstablishedDemocracies since 1945 (Cambridge :Cambridge University Press, à venir).

13. A. Schizzerotto et G. Gasperoni (super-viseurs), Study on the State of Young Peopleand Youth Policy in Europe (Milan : IARD,2001), p. 1-17.

14. Charlotte Van Hees et Heleen Snijders,Drank, Brommer en dus ook stemmen!:Een onderzoek naar de haalbaarheid enwenselijkheid van het stemrecht voorzestienjarigen (Amsterdam : Instituutvoor Publiek en Politiek, 2002); pour laGrande-Bretagne, voir aussi Spotlight, ledocument d’information de la NationalYouth Agency, à www.nya.org.uk/download-PDF/spotlight-5.pdf.

15. Les sources sont : Statistisches Landesamt,Nordrhein-Westfalen; StatistischesLandesamt, Sachsen-Anhalt; UniversitätHannover, Arbeitsgruppe InterdisziplinäreSozialstrukturforschung.

16. Eric Plutzer, « Becoming a Habitual Voter:Inertia, Resources and Growth in YoungAdulthood », American Political ScienceReview, vol. 96 (2002), p. 41-56.

17. Franklin démontre que le contexte dela première élection peut laisser une« marque » pour les taux de participationde la génération de nouveaux votantspendant de nombreuses années. Mark N.Franklin, « Electoral Competitiveness andTurnout: How Voters React to theChanging Character of Elections »,communication présentée au JointSessions of Workshops of the EuropeanConsortium for Political Research àEdinbourg du 28 mars au 3 avril 2003.

18. La catégorisation des âges est le résultatdes règles administratives.

NOTES

Les jeunes et les élections

« Rush the Vote » Wayne BrownDirecteur de la rédaction, Perspectives électorales, Élections Canada

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48 Perspectives électorales

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