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1,00 € Numéros précédents 2,00 € L’O S S E RVATORE ROMANO EDITION HEBDOMADAIRE Unicuique suum EN LANGUE FRANÇAISE Non praevalebunt LXXI e année, numéro 15 (3.628) Cité du Vatican mardi 14 avril 2020 La contagion de l’espérance Avec la foi du Ressuscité ANDREA TORNIELLI Dans l’homélie de la veillée pasca- le, célébrée la nuit du Samedi Saint dans une basilique Saint- Pierre vide, plongée dans une at- mosphère irréelle, le Pape a cité la phrase que beaucoup de person- nes ont répétée, en particulier pendant les premières semaines de la pandémie, et accrochée à leurs fenêtres et balcons: «Tutto andrà bene», «tout ira bien». Ce n’est pas une phrase facile à prononcer pour ceux qui ont perdu un pro- che. C’est encore plus difficile de l’accepter pour ceux qui ont vu leur famille détruite par le virus. Entendre répéter ce leitmotiv n’est certainement pas agréable pour ceux qui, en raison de l’urgence et de la crise, n’ont plus de travail et ne savent pas comment nourrir leurs enfants Ou pour ceux qui ressentent comme un poids terri- ble l’incertitude de l’après, de l’avenir qui nous attend et qui, nous le savons, sera difficile. Tout ira bien? «Cette nuit — a dit François — nous conquerrons un droit fonda- mental, qui ne nous sera pas enle- vé: le droit à l’espérance. C’est une espérance nouvelle, vivante, qui vient de Dieu. Ce n’est pas un simple optimisme, ce n’est pas une tape sur l’épaule ou un encourage- ment de circonstance. C’est un don du Ciel que nous ne pouvons pas nous procurer tout seuls». «Tout ira bien, disons-nous avec té- nacité en ces semaines — a pour- suivi François —, nous agrippant à la beauté de notre humanité et fai- sant monter du cœur des paroles d’encouragement. Mais, avec les jours qui passent et les peurs qui grandissent, même l’espérance la plus audacieuse peut s’évaporer. L’espérance de Jésus est autre. El- le introduit dans le cœur la certi- tude que Dieu sait tout tourner en bien, parce que, même de la tom- be, il fait sortir la vie». Tout n’ira donc pas bien, mais nous avons la certitude que le Ressuscité qui est sorti vivant du tombeau est le même Crucifié dont nous avons contemplé le corps, déchiré par le fouet et im- molé dans le plus infâmant des supplices, le Vendredi Saint. Dieu a répondu à la question du «pour- quoi?» de la douleur et de la mort, de la souffrance innocente, en la faisant expérimenter à son Message de Pâques Urbi et Orbi page 3 DANS CE NUMÉRO Page 2: Audience générale du 8 avril. Page 4: Messe du Jeudi Saint. Page 5: Vendredi de la Passion du Seigneur. Page 6: Veillée du Samedi Saint. Page 7: Regina caeli du Lundi de l’Ange. Exposition du Saint-Suai- re à Turin. Page 8: Entretien avec le secrétaire d’Etat. Page 9: Entretien avec le secrétaire général de Caritas Internationalis. Page 10: Message pour la fête de Vesakh. Page 11: In- formations. Page 12: Les persécu- tions des chrétiens dans le monde. SUITE À LA PAGE 2

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L’O S S E RVATOR E ROMANOEDITION HEBDOMADAIRE

Unicuique suum

EN LANGUE FRANÇAISENon praevalebunt

LXXIe année, numéro 15 (3.628) Cité du Vatican mardi 14 avril 2020

La contagion de l’esp éranceAvec la foi

du Ressuscité

ANDREA TORNIELLI

Dans l’homélie de la veillée pasca-le, célébrée la nuit du SamediSaint dans une basilique Saint-Pierre vide, plongée dans une at-mosphère irréelle, le Pape a cité laphrase que beaucoup de person-nes ont répétée, en particulierpendant les premières semaines dela pandémie, et accrochée à leursfenêtres et balcons: «Tu t t o andràbene», «tout ira bien». Ce n’estpas une phrase facile à prononcerpour ceux qui ont perdu un pro-che. C’est encore plus difficile del’accepter pour ceux qui ont vuleur famille détruite par le virus.Entendre répéter ce leitmotiv n’estcertainement pas agréable pourceux qui, en raison de l’urgence etde la crise, n’ont plus de travail etne savent pas comment nourrirleurs enfants Ou pour ceux quiressentent comme un poids terri-ble l’incertitude de l’après, del’avenir qui nous attend et qui,nous le savons, sera difficile. Toutira bien?

«Cette nuit — a dit François —nous conquerrons un droit fonda-mental, qui ne nous sera pas enle-vé: le droit à l’espérance. C’estune espérance nouvelle, vivante,qui vient de Dieu. Ce n’est pas unsimple optimisme, ce n’est pas unetape sur l’épaule ou un encourage-ment de circonstance. C’est undon du Ciel que nous ne pouvonspas nous procurer tout seuls».«To u t ira bien, disons-nous avec té-nacité en ces semaines — a pour-suivi François —, nous agrippant àla beauté de notre humanité et fai-sant monter du cœur des parolesd’encouragement. Mais, avec lesjours qui passent et les peurs quigrandissent, même l’espérance laplus audacieuse peut s’évap orer.L’espérance de Jésus est autre. El-le introduit dans le cœur la certi-tude que Dieu sait tout tourner enbien, parce que, même de la tom-be, il fait sortir la vie».

Tout n’ira donc pas bien, maisnous avons la certitude que leRessuscité qui est sorti vivant dutombeau est le même Crucifiédont nous avons contemplé lecorps, déchiré par le fouet et im-molé dans le plus infâmant dessupplices, le Vendredi Saint. Dieua répondu à la question du «pour-quoi?» de la douleur et de lamort, de la souffrance innocente,en la faisant expérimenter à son

Message de Pâques Urbi et Orbipage 3

DANS CE NUMÉROPage 2: Audience générale du 8avril. Page 4: Messe du Jeudi Saint.Page 5: Vendredi de la Passion duSeigneur. Page 6: Veillée du SamediSaint. Page 7: Regina caeli du Lundide l’Ange. Exposition du Saint-Suai-re à Turin. Page 8: Entretien avec lesecrétaire d’Etat. Page 9: E n t re t i e navec le secrétaire général de CaritasInternationalis. Page 10: Messagepour la fête de Vesakh. Page 11: In-formations. Page 12: Les persécu-tions des chrétiens dans le monde.

SUITE À LA PA G E 2

Page 2: 1,00 € Numéros précédents 2,00 € OL’ S S E RVATOR E ROMANO · (Mt 27, 23). Ceux qui le suivaient, confus et effra-yés, l’abandonnent. Ils pe-nsaient: si tel est le sort

page 2 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 14 avril 2020, numéro 15

Audience générale du 8 avril

Avec le crucifixet l’Evangile

Chers frères et sœurs, bonjour!Durant ces semaines d’appréhension pour lapandémie qui cause tant de souffrances dansle monde, parmi les nombreuses questionsque nous nous posons, il peut y en avoir éga-lement certaines sur Dieu: que fait-il face ànotre douleur? Où est-il quand tout va mal?Pourquoi ne nous résoud-il pas rapidementles problèmes? Ce sont des interrogations quenous nous posons sur Dieu.

Le récit de la Passion de Jésus, qui nous ac-compagne au cours de ces jours saints, peutnous aider. Là aussi, en effet, tant d’i n t e r ro g a -tions s’accumulent. Les gens, après avoirécouté Jésus triomphalement à Jérusalem, sedemandent s’il aurait finalement libéré le peu-ple de ses ennemis (cf. Lc 24, 21). Ils s’atten-daient pour leur part à un Messie puissant et

triomphant, avec l’ép ée.Au contraire, arrive undoux et humble de cœu r,qui appelle à la conversionet à la miséricorde. Et c’estprécisément la foule, quil’avait d’abord glorifié, quicrie: «Qu’il soit crucifié»(Mt 27, 23). Ceux qui lesuivaient, confus et effra-yés, l’abandonnent. Ils pe-nsaient: si tel est le sort deJésus, ce n’est pas lui leMessie, parce que Dieu estfort, et Dieu est invincible.

Mais, si nous conti-nuons à lire le récit de laPassion, nous trouvons unfait surprenant. Quand Jé-sus meurt, le centurion ro-main qui n’était pascroyant, qui n’était pas juif, mais qui étaitpaïen, qui l’avait vu souffrir sur la croix, etl’avait entendu pardonner chacun, qui avaittouché du doigt son amour sans mesure, con-fesse: «Vraiment cet homme était fils deDieu!» (Mc 15, 39). Il dit précisément le con-traire des autres. Il dit que c’est Dieu qui estlà, que c’est véritablement D ieu.

Nous pouvons nous demander aujourd’hui:quel est le véritable visage de Dieu? D’habitu-de, nous projetons en Lui ce que nous som-mes, au plus haut degré: notre succès, notresens de la justice, et aussi notre indignation.Mais l’Evangile nous dit que Dieu n’est pasainsi. Il est différent et nous ne pouvions pasle connaître avec nos seules forces. C’est pour-quoi il s’est fait proche, il est venu à notrerencontre et précisément à Pâque, il s’est révé-lé complètement. Et où s’est-il s’est révélécomplètement? Sur la croix. C’est là que nousdécouvrons les traits du visage de Dieu. N’ou-blions pas, frères et sœurs, que la croix est lachaire de Dieu. Il nous fera du bien de regar-der le Crucifix en silence et de voir qui estnotre Seigneur: c’est Celui qui ne pointe ledoigt contre personne, ni même contre ceuxqui le crucifient, mais qui ouvre tout grandsses bras à tous; qui ne nous écrase pas par sagloire, mais qui se laisse dépouiller pour nous;qui ne nous aime pas en paroles, mais quinous donne la vie en silence; qui ne nous con-traint pas, mais qui nous libère; qui ne noustraite pas en étrangers, mais qui prend sur luinotre mal, qui prend sur lui nos péchés. Ainsi,pour nous libérer des préjugés sur Dieu, re-gardons le Crucifix. Puis, ouvrons l’Evangile.En ces jours, tous en quarantaine et à la mai-son, enfermés, prenons ces deux choses enmain: le Crucifix, regardons-le; et ouvronsl’Evangile. Ce sera pour nous — disons-le ain-si — comme une grande liturgie domestique,parce que ces jours-ci, nous ne pouvons pasaller à l’église. Crucifix et Evangile!

Dans l’Evangile, nous lisons que, quand lesgens vont voir Jésus pour le faire roi, parexemple après la multiplication des pains, Ils’en va (cf. Jn 6, 15). Et quand les diablesveulent lui révéler sa majesté divine, Il les ré-duit au silence (cf. Mc 1, 24-25). Pourquoi?Parce que Jésus ne veut pas être mal compris,il ne veut pas que les gens confondent le vraiDieu, qui est amour humble, avec un dieufaux, un dieu mondain qui se donne en spec-tacle et qui s’impose par la force. Ce n’est pasune idole. C’est Dieu qui s’est fait homme,comme chacun de nous, et qui s’exprime com-me un homme mais avec la force de sa divini-té. En revanche, quand l’identité de Jésus est-elle proclamée de façon solennelle dansl’Evangile? Quand le centurion dit: «Vra i m e n tcet homme était Fils de Dieu!». On le dit là,

dès qu’il a donné sa vie sur la croix, parce quel’on ne peut plus se tromper: on voit queDieu est tout-puissant dans l’a m o u r, et pasd’une autre manière. C’est sa nature, parcequ’il est fait ainsi. Il est l’A m o u r.

On pourrait objecter: «Qu’ai-je à faire d’unDieu si faible, qui meurt? Je préférerais undieu fort, et un Dieu puissant!». Mais, voussavez, le pouvoir passe en ce monde, tandisque l’amour reste. Seul l’amour protège la vieque nous avons, parce qu’il embrasse nos fra-gilités et les transforme. C’est l’amour deDieu qui à Pâque a guéri notre péché avecson pardon, qui a fait de la mort un passagede vie, qui a changé notre peur en confiance,notre angoisse en espérance. Pâque nous ditque Dieu peut transformer tout en bien.Qu’avec Lui, nous pouvons véritablement êtresûrs que tout ira bien. Et cela n’est pas une il-lusion, parce que la mort et la résurrection deJésus ne sont pas une illusion: c’est une véri-té! Voilà pourquoi, le matin de Pâque, onnous dit: «N’ayez pas peur!» (cf. Mt 28, 5).Et les interrogations angoissantes sur le malne disparaissent pas d’un coup, mais trouventdans le Ressuscité le fondement solide quinous permet de ne pas faire naufrage.

Chers frères et sœurs, Jésus a changé l’his-toire en se faisant proche de nous et en a faitune histoire de salut, bien qu’encore marquéepar le mal. En offrant sa vie sur la croix, Jésusa également vaincu la mort. Du cœur ouvertdu Crucifié, l’amour de Dieu atteint chacunde nous. Nous pouvons changer nos histoiresen nous approchant de lui, en accueillant lesalut qu’il nous offre. Frères et sœurs, ou-vrons-lui tout notre cœur dans la prière, cettesemaine, en ces jours: avec le Crucifix et avecl’Evangile. N’oubliez pas: Crucifix et Evangi-le. La liturgie domestique sera celle-ci. Ou-vrons-lui tout notre cœur dans la prière, lais-sons son regard se poser sur nous, et nouscomprendrons que nous ne sommes pas seuls,mais aimés, parce que le Seigneur ne nousabandonne pas et ne nous oublie pas, jamais.Et avec ces pensées, je vous souhaite uneSainte Semaine et une Sainte Pâque.

Au terme de l’audience générale, le Saint-Père aadressé le salut suivant aux fidèles francophones:

Frères et sœurs, Jésus a changé l’histoire mar-quée par le mal en une histoire de salut. Avecson cœur ouvert de Crucifié, il rejoint chacunde nous dans ces moments d’angoisses, de dif-ficultés et de souffrance. En cette SemaineSainte, qu’au milieu des drames et des épreu-ves que nous vivons, nos cœurs s’établissentfermement dans le Christ mort et ressuscité.Que Dieu vous bénisse!

Fils pour que nous ne soyons plus jamaisseuls. «Le Christ, mon espérance, est ressusci-té! — a dit le Pape dans son message Urbi etOrbi —. Il ne s’agit pas d’une formule ma-gique, qui fait s’évanouir les problèmes. Non,la résurrection du Christ n’est pas cela. Elleest au contraire la victoire de l’amour sur laracine du mal, une victoire qui “n’enjamb epas” la souffrance et la mort, mais les traverseen ouvrant une route dans l’abîme, transfor-mant le mal en bien: marque exclusive de lapuissance de Dieu».

Mais le message de Pâques de Françoisnous appelle avec réalisme à la responsabilité,parce que «ce temps n’est pas le temps del’indifférence, parce que tout le monde souffreet tous doivent se retrouver unis pour affron-ter la pandémie». Il nous appelle tous à met-tre à disposition ces cinq pains et ces deuxpoissons qui ont servi, grâce au miracle de lamultiplication et du partage, à nourrir la fou-le. Parce que «ce temps n’est pas le temps deségoïsmes, parce que le défi que nous affron-tons nous unit tous et ne fait pas de différen-ce entre les personnes». Parce que cette pan-démie nous appelle à être courageux, et à direoui à la vie, comme l’a répété le Pape lors dela Veillée: «Faisons taire le cri de mort, ça suf-fit les guerres! Que s’arrête la production et lecommerce des armes, parce que c’est de painet non de fusils dont nous avons besoin. Quecessent les avortements, qui tuent la vie inno-cente. Que s’ouvrent les cœurs de ceux quiont, pour remplir les mains vides de ceux quisont privés du nécessaire».

Dans ce contexte, le Pape a également lan-cé un appel à l’Europe, afin qu’en cette heuresombre les rivalités ne reprennent pas vigueur,mais que tous «se reconnaissent membresd’une unique famille et se soutiennent récipro-quement». Aujourd’hui, a averti le Pape,«l’Union européenne fait face au défi du mo-ment dont dépendra, non seulement son ave-nir, mais celui du monde entier. Que ne sesoit pas perdue l’occasion de donner une nou-velle preuve de solidarité, même en recourantà des solutions innovatrices. L’alternative estseulement l’égoïsme des intérêts particuliers etla tentation d’un retour au passé, avec le ris-que de mettre à dure épreuve la cohabitationpacifique et le développement des prochainesgénérations».

Avec la foidu Ressuscité

SUITE DE LA PA G E 1

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numéro 15, mardi 14 avril 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 3

Message de Pâques Urbi et Orbi

La contagion de l’esp éranceDans la matinée du 12 avril, dimanche de Pâques, le Pape François a présidé àl’autel de la chaire de la basilique Saint-Pierre, la solennelle célébration de la Messedu jour, au terme de laquelle il s’est rendu à l’autel de la Confession pour adresserle traditionnel message «Urbi et Orbi» aux fidèles qui l’écoutaient à travers latélévision et internet.

Chers frères et sœurs, bonne fête de Pâques!A u j o u rd ’hui retentit dans le monde entier l’an-

nonce de l’Eglise: «Jésus Christ est ressuscité!» —«Il est vraiment ressuscité!».

Comme une nouvelle flamme, cette BonneNouvelle s’est allumée dans la nuit: la nuit d’unmonde déjà aux prises avec des défis du momentet maintenant opprimé par la pandémie, qui metà dure épreuve notre grande famille humaine. Encette nuit la voix de l’Eglise a résonné: «LeChrist, mon espérance, est ressuscité!» (Séquencepascale).

C’est une autre «contagion», qui se transmetde cœur à cœur — parce que tout cœur humainattend cette Bonne Nouvelle. C’est la contagionde l’espérance: «Le Christ, mon espérance, estressuscité!». Il ne s’agit pas d’une formule ma-gique, qui fait s’évanouir les problèmes. Non, larésurrection du Christ n’est pas cela. Elle est aucontraire la victoire de l’amour sur la racine dumal, une victoire qui «n’enjambe pas» la souf-france et la mort, mais les traverse en ouvrant uneroute dans l’abîme, transformant le mal en bien:marque exclusive de la puissance de Dieu.

Le Ressuscité est le Crucifié, pas un autre.Dans son corps glorieux il porte, indélébiles, lesplaies: blessures devenues fissures d’esp érance.Nous tournons notre regard vers lui pour qu’ilguérisse les blessures de l’humanité accablée.

A u j o u rd ’hui ma pensée va surtout à tous ceuxqui ont été directement touchés par le coronavi-rus: aux malades, à ceux qui sont morts et aux fa-milles qui pleurent la disparition de leurs proches,auxquels parfois elles n’ont même pas pu dire undernier au revoir. Que le Seigneur de la vie ac-cueille avec lui dans son royaume les défunts etqu’il donne réconfort et espérance à ceux qui sontencore dans l’épreuve, spécialement aux person-nes âgées et aux personnes seules. Que sa conso-lation ne manque pas, ni les aides nécessaires àceux qui se trouvent dans des conditions de vul-nérabilité particulière, comme ceux qui travaillentdans les maisons de santé, ou qui vivent dans lescasernes et dans les prisons. Pour beaucoup, c’estune Pâques de solitude, vécue dans les deuils etles nombreuses difficultés que la pandémie pro-voque, des souffrances physiques aux problèmeséconomiques.

Cette maladie ne nous a pas privés seulementdes affections, mais aussi de la possibilité d’avoirrecours en personne à la consolation qui jaillit desSacrements, spécialement de l’Eucharistie et de laRéconciliation. Dans de nombreux pays il n’a pasété possible de s’en approcher, mais le Seigneurne nous a pas laissés seuls! Restant unis dans laprière, nous sommes certains qu’il a mis sa mainsur nous (cf. Ps 138, 5), nous répétant avec force:ne crains pas, «je suis ressuscité et je suis toujoursavec toi» (cf. Missel romain)!

Que Jésus, notre Pâque, donne force et espé-rance aux médecins et aux infirmiers, qui partoutoffrent au prochain un témoignage d’attention etd’amour jusqu’à l’extrême de leurs forces et sou-vent au sacrifice de leur propre santé. A eux,comme aussi à ceux qui travaillent assidûmentpour garantir les services essentiels nécessaires àla cohabitation civile, aux forces de l’ordre et auxmilitaires qui en de nombreux pays ont contribuéà alléger les difficultés et les souffrances de la po-pulation, va notre pensée affectueuse, avec notregratitude.

Au cours de ces semaines, la vie de millions depersonnes a changé à l’improviste. Pour beau-

coup, rester à la maison aété une occasion pour ré-fléchir, pour arrêter lesrythmes frénétiques de lavie, pour être avec sesproches et jouir de leurcompagnie. Pour beau-coup cependant c’est aus-si un temps de préoccu-pation pour l’avenir quise présente incertain, pourle travail que l’on risquede perdre et pour les au-tres conséquences que lacrise actuelle porte avecelle. J’encourage tousceux qui ont des respon-sabilités politiques à s’em-ployer activement en fa-veur du bien commun descitoyens, fournissant lesmoyens et les instrumentsnécessaires pour permettre à tous de mener unevie digne et pour favoriser, quand les circonstan-ces le permettront, la reprise des activités quoti-diennes habituelles.

Ce temps n’est pas le temps de l’i n d i f f é re n c e ,parce que tout le monde souffre et tous doiventse retrouver unis pour affronter la pandémie. Jé-sus ressuscité donne espérance à tous les pauvres,à tous ceux qui vivent dans les périphéries, auxréfugiés et aux sans-abri. Que ces frères et sœursplus faibles, qui peuplent les villes et les périphé-ries de toutes les parties du monde, ne soient paslaissés seuls. Ne les laissons pas manquer desbiens de première nécessité, plus difficiles à trou-ver maintenant alors que beaucoup d’activitéssont arrêtées, ainsi que les médicaments et, sur-tout, la possibilité d’une assistance sanitaire con-venable. Vu les circonstances, que soient relâchéesaussi les sanctions internationales qui empêchentaux pays qui en sont l’objet de fournir un soutienconvenable à leurs citoyens, et que tous les Etatsse mettent en condition d’affronter les besoinsmajeurs du moment, en réduisant, si non carré-ment en remettant, la dette qui pèse sur les bud-gets des Etats les plus pauvres.

Ce temps n’est pas le temps des égoïsmes, par-ce que le défi que nous affrontons nous unit touset ne fait pas de différence entre les personnes.Parmi les nombreuses régions du monde frappéespar le coronavirus, j’adresse une pensée spéciale àl’Europe. Après la deuxième guerre mondiale, cecontinent a pu renaître grâce à un esprit concretde solidarité qui lui a permis de dépasser les riva-lités du passé. Il est plus que jamais urgent, sur-tout dans les circonstances actuelles, que ces riva-lités ne reprennent pas vigueur, mais que tous sereconnaissent membres d’une unique famille et sesoutiennent réciproquement. Aujourd’hui, l’Unioneuropéenne fait face au défi du moment dont dé-pendra, non seulement son avenir, mais celui dumonde entier. Que ne se soit pas perdue l’o cca-sion de donner une nouvelle preuve de solidarité,même en recourant à des solutions innovatrices.L’alternative est seulement l’égoïsme des intérêtsparticuliers et la tentation d’un retour au passé,avec le risque de mettre à dure épreuve la cohabi-tation pacifique et le développement des prochai-nes générations.

Ce temps n’est pas le temps des divisions. Quele Christ notre paix éclaire tous ceux qui ont desresponsabilités dans les conflits, pour qu’ils aientle courage d’adhérer à l’appel pour un cessez le

feu mondial et immédiat dans toutes les régionsdu monde. Ce n’est pas le temps de continuer àfabriquer et à faire du traffic d’armes, dépensantdes capitaux énormes qui devraient être utiliséspour soigner les personnes et sauver des vies.Que ce soit au contraire le temps de mettre finale-ment un terme à la longue guerre qui a ensan-glanté la Syrie bien-aimée, au conflit au Yémen etaux tensions en Irak, comme aussi au Liban. Quece temps soit le temps où Israéliens et Palesti-niens reprennent le dialogue, pour trouver une so-lution stable et durable qui permette à tous deuxde vivre en paix. Que cessent les souffrances de lapopulation qui vit dans les régions orientales del’Ukraine. Que soit mis fin aux attaques terroris-tes perpétrées contre tant de personnes innocentesen divers pays de l’Afrique.

Ce temps n’est pas le temps de l’oubli. Que lacrise que nous affrontons ne nous fasse pas ou-blier tant d’autres urgences qui portent avec ellesles souffrances de nombreuses personnes. Que leSeigneur de la vie se montre proche des popula-tions en Asie et en Afrique qui traversent de gra-ves crises humanitaires, comme dans la région deCabo Delgado, au nord du Mozambique. Qu’ilréchauffe le cœur des nombreuses personnes réfu-giées et déplacées, à cause de guerres, de séche-resse et de famine. Qu’il donne protection auxnombreux migrants et réfugiés, beaucoup d’e n t reeux sont des enfants, qui vivent dans des condi-tions insupportables, spécialement en Libye etaux frontières entre la Grèce et la Turquie. Et jene veux pas oublier l’île de Lesbos. Qu’il permet-te au Vénézuéla d’arriver à des solutions concrèteset immédiates pour accorder l’aide internationaleà la population qui souffre à cause de la graveconjoncture politique, socio-économique et sani-t a i re .

Chers frères et sœurs, indifférence, égoïsme, di-vision, oubli ne sont pas vraiment les paroles quenous voulons entendre en ce temps. Nous vou-lons les bannir en tout temps! Elles semblent pré-valoir quand la peur et la mort sont victorieusesen nous, c’est-à-dire lorsque nous ne laissons pasle Seigneur Jésus vaincre dans notre cœur et dansnotre vie. Lui, qui a déjà détruit la mort nous ou-vrant le chemin du salut éternel, qu’il disperse lesténèbres de notre pauvre humanité et nous intro-duise dans son jour glorieux qui ne connaît pasde déclin.

Par ces réflexions, je voudrais souhaiter à voustous une bonne fête de Pâques.

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page 4 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 14 avril 2020, numéro 15

Messe in Cena Domini du Jeudi Saint

La prière du Papepour tous les prêtres

L’Eucharistie, le service, l’onction.

La réalité que nous vivons aujourd’hui danscette célébration: le Seigneur qui veut resteravec nous dans l’Eucharistie. Et nous devenonstoujours tabernacles du Seigneur, nous por-tons le Seigneur avec nous; au point que Lui-même nous dit que si nous ne mangeons passon corps et si nous ne buvons pas son sang,nous n’entrerons pas dans le Royaume descieux. Mystère que celui du pain et du vin,du Seigneur avec nous, en nous, à l’intérieurde nous.

Le service. Ce geste qui est une conditionpour entrer dans le Royaume des cieux. Ser-vir, oui, tous. Mais le Seigneur, dans cetéchange de paroles qu’il a eu avec Pierre (cf.Jn 13, 6-9), lui fait comprendre que pour en-trer dans le Royaume des cieux, nous devonslaisser le Seigneur nous servir, nous devonslaisser le serviteur de Dieu être notre serviteur.Et cela est difficile à comprendre. Si je nelaisse pas le Seigneur être mon serviteur, si jene le laisse pas me laver, me faire grandir, mepardonner, je n’entrerai pas dans le Royaumedes cieux.

C’est dans le silence impressionnant d’une basilique Saint-Pierre presqueentièrement vide, en raison des mesures de confinement imposées par la pandémiedu covid-19, que le Pape François a célébré, en fin d’après-midi du 9 avril, Jeudisaint, la Messe «in cena Domini», qui marque le début du triduum pascal.N’ayant pas pu présider dans la matinée la Messe chrismale qui fait mémoire del’institution du sacerdoce — et espérant pouvoir le faire avant la solennité de laPentecôte, le 31 mai — c’est lors de la célébration de l’après-midi, qui fait mémoirede la «Cène du Seigneur» que le Pape a manifesté sa proximité à tous les prêtresdu monde. Dans son homélie improvisée, que nous publions ci-dessous, il a renduun hommage passionné aux prêtres «morts en ces jours de pandémie» — lesdéfinissant «saints de la porte à côté», comme les médecins et les infirmiers — et àceux «insultés» à cause du drame des abus sexuels sur les mineurs. Le Pape leura demandé d’être «courageux pour pardonner», les assurant les porter tous aveclui à l’autel au cours d’une liturgie qui a été dépouillée, essentielle, et privée desnombreux signes forts qui la caractérisent d’ordinaire, à commencer par le lieu dela célébration: en effet, depuis son élection, comme il le faisait au cours de sonministère à Buenos Aires, l’Evêque de Rome s’est toujours rendu dans un lieu desouffrance, en particulier les prisons, pour la célébration dont le point culminant estle rite du lavement des pieds. Cette année, le Pape n’a pas pu sortir du Vatican etn’a pas pu s’agenouiller devant les détenus ou les migrants pour répéter l’humblegeste de service accompli par Jésus à l’égard des douze apôtres le soir de la Cène.Il a donc célébré la Messe — retransmise en direct radiotélévisée et sur les médiassociaux — dans la splendeur d’une basilique vaticane illuminée par la lumière dujour, à l’autel de la chaire, auquel il s’est rendu vêtu des parements blancs aprèsune brève procession.

qu’il faisait quand il arri-vait sur ces lieux de mis-sion, était d’aller au cime-tière, sur la tombe des prê-tres qui ont donné leur vielà, jeunes, à cause des pes-tes de la région [les mala-dies locales], ils n’étaientpas préparés, ils n’avaientpas d’anticorps. Personnene connaît leur nom: desprêtres anonymes. Les cu-rés de campagne qui sontcurés de quatre, cinq, septvillages de montagne, etqui vont de l’un à l’a u t re .Ils connaissent les habi-tants... Un jour, l’un d’euxme disait qu’il connaissaitles noms de tous les habi-tants des villages. «Vrai-ment?» lui ai-je dit. Et luim’a répondu: «Même lenom des chiens». Ils con-

Et le s a c e rd o c e . Aujourd’hui je voudrais êtreproche des prêtres, de tous les prêtres, du der-nier ordonné jusqu’au Pape. Nous sommestous prêtres. Les évêques, tous... Nous som-mes oints, oints par le Seigneur; oints pourcélébrer l’Eucharistie, oints pour servir.

A u j o u rd ’hui il n’y a pas de Messe chrismale— j’espère que nous pourrons la célébrer avantla Pentecôte, sinon nous devrons la reporter àl’an prochain — mais je ne peux pas laisserpasser cette Messe sans rappeler les prêtres.Les prêtres qui offrent leur vie pour le Sei-gneur. Les prêtres qui sont serviteurs. Cesjours-ci, plus de soixante prêtres sont mortsici en Italie, en prenant soin des malades àl’hôpital, et également des médecins des infir-miers, des infirmières... Ce sont «les saints dela porte à côté». Des prêtres qui ont donnéleur vie en servant. Et je pense à ceux quisont loin: aujourd’hui, j’ai reçu une lettre d’unprêtre aumônier de prison, loin, qui racontecomment il vit cette Semaine Sainte avec lesdétenus. Un franciscain. Des prêtres qui vontloin pour apporter l’Evangile et qui meurentlà-bas. Un évêque disait que la première chose

naissent tout le monde. La proximité sacerdo-tale. De bons, bons prêtres.

A u j o u rd ’hui je vous porte dans mon cœuret je vous apporte à l’autel. Les prêtres calom-niés. Cela arrive souvent aujourd’hui, ils nepeuvent pas sortir dans la rue parce qu’on lesinsulte, à cause du drame que nous avons vé-cu dans la découverte des prêtres qui ontcommis de mauvaises choses. Certains me di-saient qu’ils ne peuvent pas sortir de chez euxen clergyman, car on les insulte; mais euxcontinuent. Des prêtres pécheurs, qui avec lesévêques et le Pape pécheur, n’oublient pas dedemander pardon, et apprennent à pardonner,car ils savent qu’ils ont besoin de demanderpardon et de pardonner. Nous sommes touspécheurs. Des prêtres qui sont en crise, qui nesavent pas quoi faire, ils sont dans l’obs-curité...

A u j o u rd ’hui vous tous, frères prêtres, vousêtes avec moi à l’autel, vous consacrés. Jevous dis seulement une chose: ne soyez pastêtus comme Pierre, laissez-vous laver lespieds. Le Seigneur est votre serviteur, Il estproche de vous pour vous donner la force,pour vous laver les pieds.

Et ainsi, dans la conscience d’avoir besoind’être lavés, soyez de grands «pardonneurs»!Pardonnez! Un cœur grand de générositédans le pardon. C’est la mesure avec laquellenous serons mesurés. Comme tu as pardonné,tu seras pardonné: la même mesure. N’ayezpas peur de pardonner. Parfois des doutesnous viennent... Regardez le Christ [Le Papemontre le crucifix]. Il y a là le pardon detous. Soyez courageux; même pour prendredes risques, pour pardonner, pour consoler. Etsi vous ne pouvez pas donner un pardon sa-cramentel à ce moment-là, au moins apportezla consolation d’un frère qui accompagne etqui laisse la porte ouverte, afin que [cette per-sonne] revienne.

Je rends grâce à Dieu pour la grâce du sa-cerdoce, nous tous [rendons grâce]. Je rendsgrâce à Dieu pour vous, prêtres. Jésus vousaime! Il demande seulement que vous vouslaissiez laver les pieds.

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numéro 15, mardi 14 avril 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 5

Via Crucis du Vendredi saint

Que le Christ libère le mondedes souffrances du mal

Extraits de l’homélie du prédicateur de la Maison pontificale

Un cri s’élève de toute la terre

RANIERO CA N TA L A M E S S A , OFM.C A P.

Saint Grégoire le Grand disait que l'Ecriture cumlegentibus crescit, c’est-à-dire grandit avec ceux quila lisent. Elle continue de révéler de nouvelles si-gnifications à l’homme selon les questions qu’ilporte dans son cœur quand il la lit. Et cette an-née, nous lisons le récit de la Passion avec unequestion — ou plutôt avec un cri — dans le cœu r,qui s'élève de toute la terre. Nous devons cher-cher à saisir la réponse que la Parole de Dieu yapp orte.

Ce que nous venons d'entendre est le récit dumal objectivement le plus grand jamais commissur la terre. Et nous pouvons le regarder sousdeux angles différents, soit en face, soit à l’arriè-re, c'est-à-dire sous l’angle de ses causes ou de seseffets. Si nous nous arrêtons aux causes histori-ques de la mort du Christ, nous sommes troubléset chacun serait tenté de dire comme Pilate: «Jesuis innocent du sang de cet homme». On com-prend mieux la croix à ses effets qu’à ses causes.Et quels ont été les effets de la mort du Christ?Nous avons été justifiés par la foi en lui, réconci-liés et en paix avec Dieu, remplis de l'espérancede la vie éternelle! (cf. Rm 5, 1-5)

Mais il y a un effet que la situation actuellenous aide à saisir de manière particulière. Lacroix du Christ a donné un nouveau sens à ladouleur et à la souffrance humaines. A toutesouffrance, physique et morale. Ce n'est plus unepunition, une malédiction. Car elle a été rachetéeà la racine depuis que le Fils de Dieu l'a prise surlui. Quelle est la preuve la plus sûre que la bois-son que l'on te tend n'est pas empoisonnée? Quel’on boit à la même coupe devant toi. Ainsi, surla croix, Dieu a bu, aux yeux de tous, le calice dedouleur jusqu’à la lie. Il a montré par là qu'il

n'est pas empoisonné, mais qu'au fond, on ytrouve une perle.

Et pas seulement la douleur de ceux qui ont lafoi, mais toute douleur humaine. Il est mort pourtous. « Et moi, quand j'aurai été élevé de terre,avait-il dit, j'attirerai à moi tous les hommes».Tous les hommes, pas seulement quelques-uns!« Souffrir — écrivait saint Jean-Paul II de son litd'hôpital après son attentat — signifie devenirparticulièrement réceptif, particulièrement ouvertà l'action des forces salvifiques de Dieu offertes àl'humanité dans le Christ». Grâce à la croix duChrist, la souffrance est devenue elle aussi, à samanière, une sorte de «sacrement universel de sa-lut» pour le genre humain.

François remercie les détenus de Padoue

Dieu parle derrière les histoires

«J’ai pris demeure dans les plis de vos mots et je mesuis senti accueilli, à la maison». C’est ce qu’a assuréle Pape François dans un message audio deremerciement et d’encouragement adressé à lacommunauté de la prison Due Palazzi de Padoue, quia préparé les méditations du Chemin de croix placeSaint-Pierre dans la soirée du Vendredi saint.

Chers amis de la «paroisse» Due Palazzi dePa d o u e ,J’ai lu les méditations [de la Via Crucis] dont vousavez fait don tous ensemble. J’ai pris demeure dansles plis de vos mots et je me suis senti accueilli, à lamaison. Merci d’avoir partagé avec moi un morceaude votre histoire. Dieu parle de lui et il nous parle àtravers une histoire, il nous invite à l’écoute attenti-ve et miséricordieuse. Je désire également vous re-mercier parce que vous n’avez pas dispersé vosnoms non dans la mer de l’anonymat, mais dans cel-le des nombreuses personnes liées au monde desprisons. Ainsi, dans la Via Crucis, vous prêterez vo-tre histoire à tous ceux qui, dans le monde, parta-gent la même situation. Il est réconfortant de lireune histoire dans laquelle se trouvent les histoiresnon seulement des personnes détenues, mais de tousceux qui se passionnent pour le monde des prisons.Ensemble, c’est possible. Je vous embrasse fort. Mê-me si je suis certain que don Marco vous le rappelletoujours, je vous le demande: priez pour moi. Jevous porte toujours dans mon cœur. Merci.

Vendredi saint: le Pape François est entrédans le silence de la basilique et s’estprosterné par terre devant le Crucifixplacé en face de l’autel de la Chaire. C’estle rite de l’après-midi du Venderdi saint 10avril, qui était célébré dans une basiliqueSaint-Pierre vide: le moment de l’actionliturgique où l’Eglise invoque et prie, enfaisant mémoire de la Passion, l’heure desténèbres et du triomphe éphémère du mal,personnifié de nos jours par un virusmicroscopique. L’Evangile de Jean aretenti, faisant revivre les derniers instantsde la vie terrestre de Jésus; il était suivipar les paroles du prédicateur de laMaison pontificale, le capucin RanieroCantalamessa. Pour la première fois,l’intention consacrée explicitement àl’urgence sanitaire en cours a été inséréedans la liturgie. Aux dix prièresuniverselles traditionnelles — pour l’Eglise,pour le Pape, pour tous les ordres sacréset pour tous les fidèles, pour lescatéchumènes, pour l’unité des chrétiens,pour les juifs, pour les non-chrétiens,pour ceux qui ne croient pas en Dieu,pour les gouvernants, pour ceux quisubissent des épreuves — s’est ajoutée celle«pour ceux qui souffrent en temps depandémie» : «Prions, très chers frères,Dieu le Père tout-puissant, pour qu’illibère le monde des souffrances du tempsprésent: qu’il éloigne la pandémie, qu’ilchasse la faim, qu’il donne la paix, qu’ilétouffe la haine et la violence, qu’il donnela santé aux malades, force et soutien auxagents de santé, espérance et réconfortaux familles, le salut éternel à ceux quisont morts». Ensuite, a eu lieu ledévoilement et le baiser de la Croix,uniquement réservé au Pape en ce tempsd’urgence sanitaire.Dans la soirée, les réflexions lors duparcours de la Via Crucis sur la placeSaint-Pierre ont raconté l’expérience del’aumônerie de la maison de détention «Due Palazzi » de Padoue: un groupe depersonnes a médité sur la Passion deJésus, la rendant actuelle dans leurexistence. La vie les a placées dans dessituations difficiles qu’ils ont présentéeslors de la Via Crucis: cinq détenus, unefamille victime d’un meurtre, la fille d’unhomme condamné à la détention àperpétuité, une éducatrice de la prison, unmagistrat de surveillance, la mère d’unepersonne détenue, une catéchiste, unagent de police pénitentiaire et un prêtreaccusé et ensuite acquitté définitivementpar la justice, après huit ans de procès.Les textes ont été écrits par les personneselles-mêmes, avec des accents poignants.Le Pape François a lu les prières entreune station et l’autre. Des mots qui sontune main tendue vers celui qui a commis

une faute et cherche une occasion derenaissance. Des paroles qui sont unencouragement pour celui qui accomplitun service pour les autres. «O Dieu, nenous laisse pas dans les ténèbres et dansl’ombre de la mort», a-t-on entendu lorsde la septième station. «O Dieu, quin’abandonne pas tes enfants dans lesépreuves de la vie», a renchéri lahuitième. «Donne-nous de persévérer aucours de la nuit sombre de l’épreuve», arelancé la onzième station. A l’issue duChemin de Croix, l’Evêque de Rome ascellé les méditations, véritablestémoignages de vie, par sa bénédiction.Dans l’après-midi il avait posé son frontsur le bois de la croix qui recueille lessouffrances et les espérances de tous.Comme pour dire: personne n’est seul.

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page 6 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 14 avril 2020, numéro 15

Veillée pascale du Samedi Saint

Annonciateurs de vieen temps de mort

A 21h00 dans la soirée du 11 avril, SamediSaint, le Pape François a présidé à l’autel de laChaire de la basilique Saint-Pierre la solennelleVeillée pascale de la Nuit sainte. Nous publionsci-dessous l’homélie que le Pape a prononcéeaprès la proclamation de l’Evangile.

«Après le sabbat» (Mt 28, 1) les femmesallèrent au tombeau. C’est ainsi qu’a commen-cé l’Evangile de cette Veillée sainte, avec lesabbat. C’est le jour du Triduum pascal quenous négligeons le plus, pris par la frémissan-te attente de passer de la Croix du vendredi àl’alleluia du dimanche. Cette année, cepen-dant, nous percevons plus que jamais le same-di saint, le jour du grand silence. Nous pou-vons nous retrouver dans les sentiments desfemmes en ce jour. Comme nous, elles avaientdans les yeux le drame de la souffrance, d’unetragédie inattendue arrivée trop vite. Ellesavaient vu la mort et avaient la mort dans leurcœur. A la souffrance s’ajoutait la peur: leursera-t-il réservé, à elles aussi, le même sortqu’à leur Maître? Et puis les craintes pourl’avenir, tout à reconstruire. La mémoire bles-sée, l’espérance étouffée. Pour elles c’étaitl’heure la plus sombre, comme pour nous.

Mais dans cette situation les femmes ne selaissent pas paralyser. Elles ne cèdent pas auxforces obscures de la lamentation et du regret,elles ne se renferment pas dans le pessimisme,elles ne fuient pas la réalité. Elles font quel-que chose de simple et d’extraordinaire: dansleurs maisons elles préparent les parfums pourle corps de Jésus. Elles ne renoncent pas à

vie… Et ensuite elles rencontrent Jésus, l’au-teur de l’espérance, qui confirme l’annonce etdit: «Soyez sans crainte» (v. 10). N’ayez paspeur, soyez sans crainte: voici l’annonce d’e s p é ra n -ce. Elle est pour nous, aujourd’hui. Au-j o u rd ’hui! Ce sont les paroles que Dieu nousrépète dans la nuit que nous traversons.

Cette nuit nous conquerrons un droit fon-damental, qui ne nous sera pas enlevé: le droità l’espérance. C’est une espérance nouvelle, vi-vante, qui vient de Dieu. Ce n’est pas un sim-ple optimisme, ce n’est pas une tape surl’épaule ou un encouragement de circonstan-ce, avec un sourire fuyant. Non! C’est un dondu Ciel que nous ne pouvons pas nous procu-rer tout seuls. Tout ira bien, disons-nous avecténacité en ces semaines, nous agrippant à labeauté de notre humanité et faisant monterdu cœur des paroles d’encouragement. Mais,avec les jours qui passent et les peurs quigrandissent, même l’espérance la plus auda-cieuse peut s’évaporer. L’espérance de Jésusest autre. Elle introduit dans le cœur la certi-tude que Dieu sait tout tourner en bien, parceque, même de la tombe, il fait sortir la vie.

La tombe est le lieu d’où celui qui rentre nesort pas. Mais Jésus est sorti pour nous, il estressuscité pour nous, pour apporter la vie làoù il y avait la mort, pour commencer unehistoire nouvelle là où on avait mis une pierredessus. Lui, qui a renversé le rocher à l’entréede la tombe, peut déplacer les rochers quiscellent notre cœur. Par conséquent, ne cé-dons pas à la résignation, ne mettons pas unepierre sur l’espérance. Nous pouvons et nousdevons espérer, parce que Dieu est fidèle. Ilne nous a pas laissé seuls, il nous a visité: ilest venu dans chacune de nos situations, dansla souffrance, dans l’angoisse, dans la mort.Sa lumière a illuminé l’obscurité du sépulcre:a u j o u rd ’hui il veut rejoindre les coins les plusobscures de la vie. Sœur, frère, même si danston cœur tu as enseveli l’espérance, ne terends pas: Dieu est plus grand. L’obscurité etla mort n’ont pas le dernier mot. Confiance,avec Dieu rien n’est perdu.

Confiance: C’est une parole qui dans l’Evan-gile sort toujours de la bouche de Jésus. Uneseule fois d’autres la prononcent, pour dire àune personne dans le besoin: «Confiance!Lève-toi, [Jésus] t’appelle» (Mc 10, 49). C’estlui, le Ressuscité, qui nous relève nous quisommes dans le besoin. Si tu es faible et fra-gile sur le chemin, si tu tombes, ne crains pas,Dieu te tend la main et te dit: «Confiance».Mais tu pourrais dire, comme don Abbondio:«La confiance, personne ne peut se la don-ner» (I Promessi Sposi - Les fiancés, XXV). Tune peux pas te la donner, mais tu peux la re-cevoir, comme un don. Il suffit d’ouvrir toncœur dans la prière, il suffit de soulever unpeu cette pierre mise à l’entrée de ton cœurpour laisser entrer la lumière de Jésus. Il suffitde l’inviter: «Viens, Jésus, dans mes peurs etdis-moi aussi: Confiance». Avec toi, Seigneur,nous serons éprouvés mais non ébranlés. Et,quelle que soit la tristesse qui habite en nous,nous sentirons devoir espérer, parce qu’avectoi la croix débouche sur la résurrection, parceque tu es avec nous dans l’obscurité de nosnuits: tu es certitude dans nos incertitudes,Parole dans nos silences, et rien ne pourra ja-mais nous voler l’amour que tu nourris pournous.

Voilà l’annonce pascale, une annonce d’es-pérance. Elle contient une deuxième partie,l’envoi. «Allez annoncer à mes frères qu’ilsdoivent se rendre en Galilée» (Mt 28, 10), ditJésus. «Il vous précède en Galilée» (v. 7), ditl’ange. Le Seigneur nous précède, il nous pré-

cède toujours. Il est beau de savoir qu’il mar-che devant nous, qu’il a visité notre vie et no-tre mort pour nous précéder en Galilée, c’est-à-dire dans le lieu qui pour lui et pour sesdisciples rappelait la vie quotidienne, la famil-le, le travail. Jésus désire que nous portionsl’espérance là, dans la vie de chaque jour.Mais la Galilée, pour les disciples, c’était aussile lieu des souvenirs, surtout du premier ap-pel. Retourner en Galilée c’est se souvenird’avoir été aimés et appelés par Dieu. Chacund’entre nous a sa propre Galilée. Nous avonsbesoin de reprendre le chemin, en nous rap-pelant que nous naissons et renaissons d’unappel gratuit d’amour, là, dans ma Galilée.Cela est le point d’où repartir toujours, sur-tout dans les crises, dans les temps d’é p re u v e ,en me souvenant de ma Galilée.

Mais il y a plus. La Galilée était la régionla plus éloignée d’où ils se trouvaient, de Jé-rusalem. Et pas seulement géographiquement:la Galilée était le lieu le plus distant de la sa-cralité de la Ville sainte. C’était une régionpeuplée de gens divers qui pratiquaient descultes variés: c’était la «Galilée des nations»(Mt 4, 15). Jésus envoie là, il demande de re-partir de là. Qu’est-ce que cela nous dit? Quel’annonce de l’espérance ne doit pas être con-finée dans nos enceintes sacrées, mais doitêtre portée à tous. Parce que tous ont besoind’être encouragés et, si nous ne le faisons pasnous, qui avons touché de la main «le Verbede Vie» (1 Jn 1, 1), qui le fera? Qu’il est beaud’être des chrétiens qui consolent, qui portentles poids des autres, qui encouragent: annon-ciateurs de vie en temps de mort! En chaqueGalilée, en chaque région de cette humanité àlaquelle nous appartenons et qui nous appar-tient, parce que nous sommes tous frères etsœurs, portons le chant de la vie! Faisons tai-re le cri de mort, ça suffit les guerres! Ques’arrête la production et le commerce des ar-mes, parce que c’est de pain et non de fusilsdont nous avons besoin. Que cessent les avor-tements, qui tuent la vie innocente. Que s’ou-vrent les cœurs de ceux qui ont, pour remplirles mains vides de ceux qui sont privés du né-c e s s a i re .

Les femmes, à la fin, «embrassèrent lespieds» de Jésus (Mt 28, 9), ces pieds qui pourvenir à leur rencontre avaient fait un longchemin, jusqu’à entrer et sortir de la tombe.Elles embrassèrent les pieds qui avaient piéti-né la mort et ouvert le chemin de l’esp érance.Nous, pèlerins en recherche d’espérance, au-j o u rd ’hui nous nous serrons contre toi, JésusRessuscité. Nous tournons le dos à la mort etnous t’ouvrons nos cœurs, toi qui es la Vie.

l’amour: dans l’obscurité du cœur, elles allu-ment la miséricorde. La Vierge, le samedi,jour qui lui sera dédié, prie et espère. Dans ledéfi de la souffrance, elle a confiance dans leSeigneur. Ces femmes, sans le savoir, prépa-raient dans l’obscurité de ce samedi «l’aub edu premier jour de la semaine», le jour quiaurait changé l’histoire. Jésus, comme une se-mence dans la terre, allait faire germer dans lemonde une vie nouvelle; et les femmes, par laprière et l’amour, aidaient l’espérance à éclore.Combien de personnes, dans les jours tristesque nous vivons, ont fait et font comme cesfemmes, en semant des germes d’esp érance!Avec de petits gestes d’attention, d’affection,de prière.

A l’aube, les femmes vont au sépulcre. Làl’ange leur dit: «Vous, soyez sans crainte. Iln’est pas ici, il est ressuscité» (vv.5-6). Devantune tombe, elles entendent des paroles de

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numéro 15, mardi 14 avril 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 7

Regina cæli du 13 avril, Lundi de l’Ange

Avec le courage des femmesChers frères et sœurs, bonjour!A u j o u rd ’hui, lundi de l’Ange, retentit l’annon-ce joyeuse de la Résurrection du Christ. Lapage évangélique (cf. Mt 28, 8-15) raconte queles femmes, effrayées, abandonnent en hâte letombeau de Jésus qu’elles ont trouvé vide;mais Jésus lui-même leur apparaît sur le che-min en disant: «Ne craignez point; allez an-noncer à mes frères qu’ils doivent partir pourla Galilée: et là, ils me verront» (v. 10). Parces paroles, le Seigneur ressuscité confie auxfemmes un mandat missionnaire à l’égard desapôtres. En effet, celles-ci ont donné unexemple admirable de fidélité, de dévouementet d’amour pour le Christ au temps de sa viepublique, ainsi que pendant sa passion; ellessont à présent récompensées par lui à traversce geste d’attention et de prédilection. Lesfemmes, toujours au début: Marie au début;les femmes, au début.

Tout d’abord les femmes, puis les discipleset Pierre en particulier, constatent la réalité dela résurrection. Jésus leur avait déjà annoncé àplusieurs reprises que, après la passion et lacroix, il ressusciterait, mais les disciplesn’avaient pas compris, parce qu’ils n’étaientpas encore prêts. Leur foi devait accomplir unsaut de qualité que seul l’Esprit Saint, don duRessuscité, pouvait provoquer.

Au début du livre des Actes des apôtres,nous entendons Pierre déclarer avec franchise,avec courage, avec franchise: «Dieu l’a ressus-cité, ce Jésus, nous en sommes tous témoins»(Ac 2, 32). Comme pour dire: «Je m’engagepubliquement pour Lui. Je donne ma viepour lui». Et ensuite, il donnera sa vie pourlui. A partir de ce moment-là, l’annonce quele Christ est ressuscité se répand partout et at-teint tous les lieux de la terre, devenant lemessage d’espérance pour tous. La résurrec-

tion de Jésus nous dit que le dernier mot nerevient pas à la mort, mais à la vie. En ressus-citant son Fils unique, Dieu le Père a manifes-té en plénitude son amour et sa miséricordepour l’humanité de tous les temps.

Si le Christ est ressuscité, il est possible deregarder avec confiance chaque événement denotre existence, même les plus difficiles etchargés d’angoisse et d’incertitude. Voilà lemessage pascal que nous sommes appelés àproclamer, à travers les paroles et surtout àtravers le témoignage de notre vie. Que cettenouvelle puisse retentir dans nos cœurs etdans nos maisons: «Le Christ, mon espérance,est ressuscité!» (Séquence de Pâques). Que cet-te certitude renforce la foi de tout baptisé etencourage surtout ceux qui affrontent le plusde souffrances et de difficultés.

Que la Vierge Marie, témoin silencieux dela mort et de la résurrection de son fils Jésus,nous aide à croire fermement à ce mystère dusalut: accueilli avec foi, il peut changer la vie.Tel est le vœu de Pâques que je renouvellepour vous tous. Je le confie à Elle, notreMère, que nous invoquons maintenant par laprière du Regina cæli.

A l’issue du Regina cæli, le Pape a ajouté lesparoles suivantes:

Chers frères et sœurs, nous avons entenduque les femmes ont annoncé aux disciplesl’annonce de la résurrection de Jésus. Au-j o u rd ’hui, je voudrais rappeler avec vous ceque beaucoup de femmes font, même en cettepériode d’urgence sanitaire, pour prendre soindes autres: les femmes médecins, les infir-mières, les agents des forces de l’ordre et desprisons, les employées des magasins de biensde première nécessité…, et les si nombreusesmères, sœurs et grands-mères qui se retrou-vent enfermées à la maison avec toute la fa-mille, avec les enfants, les personnes âgées etles personnes porteuses de handicaps. Ellesrisquent parfois de subir des violences, du faitd’une coexistence dont elles portent le poidstrop lourd. Prions pour elles, afin que le Sei-gneur leur donne de la force et que nos com-munautés puissent les soutenir ainsi que leursfamilles. Que le Seigneur nous donne le cou-rage des femmes, d’aller toujours de l’avant.

En cette semaine de Pâques, je voudraisrappeler avec proximité et affection tous lespays fortement touchés par le coronavirus,certains avec un grand nombre de personnescontaminées et décédées, en particulier l’Italie,les Etats-Unis d’Amérique, l’Espagne, la Fran-ce… la liste est longue. Je prie pour chacund’eux. Et n’oubliez pas que le Pape prie pourvous, qu’il est proche de vous.

Je renouvelle à tous et de tout cœur mesvœux de Pâques. Restons unis dans la prièreet dans l’engagement à nous entraider les unsles autres comme des frères. Bon déjeuner etau revoir.

Lettre à l’archevêque de Turin

Les visages de nos frères et sœurs maladessur le visage de l’homme du Saint-Suaire

«Sur le visage de l’Homme du Saint-Saire, nous voyons également le visage de tant de nos frères etsœurs malades, en particulier de ceux qui sont les plus seuls et dont on prend le moins soin; maiségalement toutes les victimes des guerres et des violences, de l’esclavage et des persécutions». C’est cequ’a écrit le Pape dans une lettre à l’archevêque de Turin et de Susa, la veille du rendez-vous deprière que le prélat a guidée devant la toile vénérée dans l’après-midi du Samedi Saint, dans lachapelle de la cathédrale.

A S.Exc. Mgr CESARE NOSIGLIAArchevêque de Turin et évêque de Susa

J’ai appris, cher frère, que Samedi Saint pro-chain vous présiderez une célébration dans lachapelle où est conservé le Saint-Suaire, qui,de manière exceptionnelle, sera présenté àtous ceux qui participeront à la prière à tra-vers les moyens de communication sociale.

Je désire vous exprimer ma vive satisfactionpour ce geste, qui répond à la demande dupeuple fidèle de Dieu, durement éprouvé parla pandémie du coronavirus.

Je m’unis moi aussi à votre supplique, entournant le regard vers l’Homme du Saint-Suaire, dans lequel nous reconnaissons lestraits du Serviteur du Seigneur, que Jésus aréalisé dans sa Passion: «Homme de douleurset connu de la souffrance […]. C’étaient nossouffrances qu’il supportait et nos douleursdont il était accablé […]. Il a été transpercé àcause de nos péchés, écrasé à cause de noscrimes. Le châtiment qui nous rend la paix est

nous remettons à Lui, nous plaçons notreconfiance en Lui. Jésus nous donne la forced’affronter chaque épreuve avec foi, avec espé-rance et avec amour, dans la certitude que lePère écoute toujours ses enfants qui élèventleur cri vers Lui, et qu’il les sauve.

Cher confrère, et vous tous, chers frères etsœurs qui participerez à travers les médias àla prière face au Saint-Suaire, vivons ces jour-nées en intime communion avec la Passion duChrist, pour faire l’expérience de la grâce etde la joie de sa Résurrection. Je bénis VotreExcellence, l’Eglise de Turin et vous tous, enparticulier les malades et les personnes quisouffrent et celles qui en prennent soin. Quele Seigneur donne à tous la paix et la miséri-corde. Bonne Pâques!

Fr a t e r n e l l e m e n t ,

Rome, Saint-Jean-de-Latran, 9 avril 2020

Un moment de la prière de l’archevêque de Turin retransmise le Samedi Saint

sur lui et c’est grâce à sesplaies que nous sommes gué-ris» (Is 53, 3.4-5).

Sur le visage de l’Hommedu Saint-Suaire, nous voyonségalement le visage de tant denos frères et sœurs malades,en particulier de ceux quisont les plus seuls et dont onprend le moins soin; maiségalement toutes les victimesdes guerres et des violences,de l’esclavage et des persécu-tions.

En tant que chrétiens, à lalumière des Ecritures, nouscontemplons sur ce Lingel’icône du Seigneur Jésus cru-cifié, mort et ressuscité. Nous

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page 8 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 14 avril 2020, numéro 15

Entretien avec le secrétaire d’Etat Pietro Parolin

Malgré la peur ne nous refermons pas sur nous-mêmesANDRA TORNIELLI

«L’Eglise veille sur chacun de nous. Elle estproche de tous ceux qui souffrent et qui sontdans le besoin». Le secrétaire d’Etat PietroParolin exprime ainsi la proximité de l’Egliseen cette période dramatique que vit l’humani-té à cause de la pandémie. Le cardinal, danscette interview donné aux médias du Vaticanà la veille de la solennité de Pâques, nous in-vite à ne jamais perdre la «solidarité interna-tionale»: malgré l’urgence et la peur, «il esttemps de ne pas se renfermer sur soi-même».

Comment le Pape et la Curie romaine vivent-ilsce moment d’u rg e n c e ?

Nous partageons un moment difficile avectout le monde. Pour beaucoup, c’est un mo-ment dramatique. Je pense aux malades, auxpersonnes âgées avant tout, aux mourants, àleurs familles. Nous sommes dans le temps dela Veillée pascale. L’Eglise veille sur tout le

invisible, pour nous faire souffrir, nous rendregravement malades, nous faire mourir. Nousnous retrouvons petits, dans l’insécurité, sansdéfense, ayant besoin d’aide. Nous sommeségalement confrontés à l’essentiel, à ce quicompte vraiment. On nous offre la possibilitéde redécouvrir la valeur de la famille, del’amitié, des relations interpersonnelles, desrelations que nous négligeons habituellement,de la solidarité, de la générosité, du partage,de la proximité dans le concret des petiteschoses. Nous avons besoin les uns des autreset nous avons besoin que les communautés etles sociétés nous aident à prendre soin les unsdes autres. Enfin, je crois que c’est un mo-ment opportun pour revenir à Dieu de toutnotre cœur, comme nous l’a rappelé le PapeFrançois lors du temps de prière extraordinai-re du 27 mars et quelques jours plus tôt dansle Notre-Père «œcuménique», prié avec tousles chrétiens du monde.

Comment la foi chrétienne nous aide-t-elle à re-

demment, comme en Italie et dans tous lespays du monde, nous suivons la situation jouraprès jour, heure après heure, grâce à l’enga-gement de nos médecins et de nos infir-mier(e)s.

Que fait concrètement le Saint-Siège en ce mo-ment pour aider les Eglises du monde?

Le Saint-Siège, à travers ses dicastères, s’en-gage à maintenir le contact avec les Eglisesparticulières, en essayant d’aider, dans la me-sure du possible, les populations particulière-ment touchées par la propagation du corona-virus, indépendamment de leur appartenancereligieuse ou nationale, comme il l’a toujoursfait. Depuis le début de l’urgence sanitairemondiale, le Saint-Père lui-même a voulu ex-primer sa proximité et sa solidarité avec la po-pulation chinoise, en envoyant un don à l’or-ganisation caritative Jinde Charities et au dio-cèse de Hong Kong, et plus tard également àl’Iran, à l’Italie et à l’Espagne. Et diverses ini-tiatives sont à l’étude pour concrétiser la soli-darité et témoigner de la charité.

Les Messes et autres célébrations — y compris lesfunérailles — sont suspendues, mais les églisessont presque partout encore ouvertes. Qu’est-ceque cela signifie? Qu’avez-vous envie de dire auxcroyants qui ne peuvent pas recevoir les sacre-ments?

La suspension des célébrations a été néces-saire pour éviter les rassemblements de masse.Mais dans presque toutes les villes, les églisesrestent ouvertes et j’espère que celles qui ontpu être fermées rouvriront dès que possible: ily a la présence de Jésus Eucharistie, les prê-tres continuent à prier et à célébrer la Messepour les fidèles qui ne peuvent pas y assister.Il est agréable de penser que la porte de lamaison de Dieu reste ouverte, tout comme lesportes de nos maisons sont ouvertes, même sil’on nous conseille vivement de ne pas sortir,sauf pour des raisons de force majeure. La fa-mille est une Eglise domestique, nous pou-vons prier et nous préparer à Pâques en sui-vant les liturgies et les prières à la télévision.Aux nombreux croyants qui souffrent de nepas pouvoir recevoir les sacrements, je vou-drais dire que je partage leur peine, mais jevoudrais rappeler, par exemple, la possibilitéd’une communion spirituelle. De plus, le Pa-pe François, par l’intermédiaire de la Péniten-cerie apostolique, a accordé le don d’indul-gences spéciales aux fidèles, non seulementaux personnes touchées par covid-19, maisaussi aux travailleurs de la santé, aux mem-bres de la famille et à tous ceux qui, de diver-ses manières, y compris par la prière, s’o ccu-pent d’eux. Mais il y a aussi un autre aspectqui, dans une période de veille comme celle-ci, doit être mis en évidence et renforcé. Etc’est possible pour tout le monde. Prier avecla Parole de Dieu. Lire, contempler, accueillirla Parole qui vient. Dieu a rempli de sa Parolele vide qui nous effraie en ces heures. En Jé-sus, Dieu s’est communiqué, Parole pleine etdéfinitive. Nous ne devons pas simplementremplir le temps, mais nous remplir de laPa ro l e .

L’un des drames de ces jours est la solitude.Dans les salles d’hôpitaux destinées au Covid-19,on meurt seul, sans le confort de ses proches quine peuvent pas entrer dans les salles de soins in-tensifs. Comment l’Eglise peut-elle manifester saproximité avec les gens?

C’est une des conséquences de l’épidémiequi, dans un certain sens, me bouleverse. J’ai

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monde. Elle est proche de tous ceux qui souf-frent et qui sont dans le besoin. Nous devonsêtre libérés de l’emprisonnement du temps vé-cu dans la frustration, de la menace de la ma-ladie et de la mort. «Lazare, sors de là!» (Jn11, 43), est le cri qui résonne dans le temps, enparticulier en ce moment, afin que ce soit unnouveau temps de vie et d’esprit. Le Saint-Père François cherche tous les moyens possi-bles pour être proche des gens, dans le mon-de entier. Pour lui, le contact avec les gens atoujours été fondamental et, même si c’estd’une manière nouvelle et sans précédent, ilentend le maintenir. La diffusion quotidienneen direct de la Messe à Sainte-Marthe en estun signe concret. La prière constante pour lesvictimes, leurs familles, le personnel de santé,les bénévoles, les prêtres, les travailleurs, lesfamilles est un autre signe concret. Nous essa-yons tous de l’aider à maintenir le contactavec les Eglises de tous les pays du monde.

Que nous apprend cet événement dramatique, quitouche les familles, change la vie des gens et a degraves répercussions également sur le système éco-nomique?

Nous vivons une tragédie qui aura forcé-ment des conséquences importantes sur nosvies. Tout d’abord, nous sommes confrontés ànotre fragilité et à notre vulnérabilité. Nousnous rendons compte que nous ne sommespas des créateurs, mais que nous sommes depauvres créatures, qui existent parce que quel-qu’un leur donne vie à chaque instant. Nousne sommes pas les maîtres absolus. Il suffitd’un simple rien, d’un ennemi mystérieux et

garder la réalité d’a u j o u rd ’hui?

La foi chrétienne est l’ir-ruption de Dieu dans l’his-toire humaine. Dieu qui sefait chair, Dieu qui vient par-tager tout dans notre existen-ce sauf le péché, et qui estprêt à souffrir et à mourirpour nous sauver. Nous nouspréparons à célébrer Pâquesen ce carême très particulier:Jésus se lève, vainc la mort,donne la vie. Le regard de lafoi, en ces temps difficiles,nous aide à nous abandonnerde plus en plus à Dieu, àfrapper à sa porte avec notreprière incessante pour qu’ilraccourcisse ce tempsd’épreuve. Cela nous aide àvoir le bien qui nous entoureet dont beaucoup de genssont témoins. Il est réconfor-

tant de toucher à la créativité pastorale, déjàmentionnée par le Pape François, des évêques,des prêtres, des religieux et religieuses et àl’engagement de nombreux laïcs. Ils sont la«voix» de l’Evangile. Comme tous ceux (desmédecins aux infirmier(e)s en passant par lesbénévoles) qui luttent contre la maladie. Jepense qu’il est bon de voir comment l’Eglise,qui vit immergée dans la réalité de son peu-ple, cherche et trouve mille façons, en utili-sant tous les moyens possibles, de faire ensorte que les gens ne soient pas seuls, qu’ilspuissent prier, recevoir une parole de récon-fort. J’ai été frappé par le fait que, même dansle drame actuel, il y a une façon de s’exprimer— par exemple à travers la musique et la cha-nson — pour être ensemble. J’aimerais que ce-la puisse également se produire d’une manièreou d’une autre pour les paroisses. Il seraitbon que toutes les églises, au même moment,par exemple à midi, sonnent les cloches pen-dant une minute; et que ce soit un appel àprier ensemble, même si elles sont physique-ment éloignées...

Que pouvez-vous nous dire sur la situation desanté des employés du Saint-Siège?

Comme vous le savez à l’heure actuelle, il ya sept cas de positivité au covid-19. Débutmars, il y a eu le cas d’une personne qui estpassée par les cliniques de notre service desanté pour des examens médicaux en vued’un emploi à la Curie. A cette première affai-re, six autres se sont ajoutées ces dernières se-maines. Tous ont passé la phase critique etconnaissent à présent une amélioration. Evi-

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numéro 15, mardi 14 avril 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 9

Entretien avec le secrétaire général de Caritas Internationalis

Ouvrir les cœurs à une fraternité mondialeFRANCESCO RICUPERO

«Dans cette situation d’urgence sanitaire, CaritasInternationalis est en première ligne pour mettreen œuvre un plan contre la diffusion de la pandé-mie, mais la coopération mondiale est essentiel-le»: tel est l’appel lancé, à travers L’O sservatoreRomano, par le secrétaire général de Caritas In-ternationalis, Aloysius John, qui craint que la cri-se pandémique puisse «conduire à la stigmatisa-tion des patients atteints du covid-19, ainsi qu’à ladiscrimination des groupes vulnérables de la so-ciété, tels que les migrants et les réfugiés». Face àl’augmentation du nombre de personnes contami-nées ou décédées aux quatre coins de la planète,Aloysius John appelle donc à des efforts concertésimpliquant «non seulement les gouvernements lo-caux et les agences internationales, mais aussi lasociété civile et les groupes religieux».

Comment les organisations liées à Caritas essaient-elles de garantir le plus de services possible aux per-sonnes dans le besoin?

En cette période de forte crise grave et mêmede tragédie, Caritas Internationalis continue à tra-vailler pour accueillir, accompagner et aider lespersonnes directement ou indirectement touchées.Pour mieux affronter le covid-19, la collecte d’in-formations et la sensibilisation sont un objectifclé. Les personnes, en particulier les plus vulnéra-bles, doivent avoir le droit à l’information et rece-voir l’orientation juste pour éviter d’être contami-nées. Cela à lieu à travers l’utilisation de médias,tels que la radio et les journaux gérés par l’Eglisecatholique. Au Rwanda, par exemple, Caritas tra-nsmet des messages de sensibilisation de l’Egliseaux communautés pour leur faire prendre cons-cience du risque. A Singapour, la Caritas locale amis en place un service de vigilance, rappelant àchacun la nécessité de prendre les mesures essen-tielles pour une bonne hygiène personnelle. EnItalie, notre organisation caritative poursuit samission auprès des pauvres à travers des servicesde cantine, la distribution de repas chauds et desdortoirs. En outre, elle offre un service «à distan-ce» aux personnes âgées grâce à l’aide de jeunesvolontaires. Au sein de Caritas Internationalis,nous avons mis en place une cellule de crise co-vid-19 et institué une task-force pour surveiller,suivre et fournir des informations et une assistan-ce à notre réseau. Le service aux pauvres ne peutpas être arrêté par le virus. En essayant d’ê t recréatifs et en prenant toutes les précautions néces-saires, nous continuerons à aider les plus vulnéra-bles.

Pensez-vous que le moment est venu de construire unréseau de responsabilité dans lequel chacun puisse in-tervenir pour aider les autres?

Nous sommes interconnectés et également fra-giles; la lutte contre la propagation du virus estavant tout une responsabilité collective. En mêmetemps, nous devons répondre aux besoins de ceuxqui ne sont pas contaminés, mais qui sont des vic-times collatérales de cette crise. Je me demandecomment les milliers de citoyens du Bangladeshqui travaillent sur les marchés ouverts gèrent cemoment particulier. A Caritas Internationalis,nous sommes également préoccupés par les tra-vailleurs des pays les plus pauvres qui risquent dene plus recevoir de salaire parce qu’ils ne peuventpas continuer leur activité. Et que dire ensuite destravailleurs précaires qui n’ont aucune sécurité so-ciale. Je pense qu’il est temps de faire preuve desolidarité, d’amour et d’attention. Vendredi 27mars, le Pape François nous a dit que le coronavi-rus doit aussi faire ressortir le meilleur de nous-mêmes; en effet, il doit faire ressortir l’humanitéparce que nous sommes tous des êtres humains etque nous devons vivre en solidarité comme uneseule communauté humaine. Cela pourrait êtrepossible à travers le partage des moyens, en ai-dant ceux qui ont besoin d’un soutien, comme lefont les Caritas du Sud du monde. Cet esprit serad’autant plus nécessaire lorsque nous sortirons de

cette tragédie. En outre, j’espère que ce qui sepasse en Europe ne nous empêchera pas de nousoccuper et de partager de loin les problèmes etles difficultés des autres.

Que fait Caritas pour aider les populations d’Afriqueet d’As i e ?

Heureusement, à l’heure actuelle, la pandémien’a pas encore atteint de manière aussi importantel’Afrique, où l’on réfléchit à la manière de faireparticiper l’Eglise locale et ses organismes, y com-pris Caritas, pour affronter cette crise. En Asie, jepense à l’Inde et au Sri Lanka, les gouvernementsont pris des mesures drastiques. Caritas, en colla-boration avec l’Eglise, contribue à une prise deconscience, en informant les populations sur labonne attitude à adopter pour empêcher la pro-pagation du virus. Au niveau de la confédération,nous évaluons les outils médiatiques dont disposel’Eglise afin de pouvoir agir rapidement en casd’apparition d’un foyer épidémique. C’est un mo-ment où nous avons besoin de coordination etd’imagination. L’une des spécificités du réseauCaritas est d’offrir des services de prière. Nousdevons avoir le courage et l’humilité de croire queDieu peut faire l’impossible. D’ailleurs, au SriLanka, aux Philippines et en Inde des services deprière ont été organisés.

Les bénévoles sont-ils disponibles pour intervenir encette période particulière?

Ils sont de bonne volonté et veulent continuerà travailler. Mais nous devons imposer le principede précaution à tous et inventer d’autres moyenspour pouvoir continuer à servir, mais nous devonsfaire très attention. Caritas Internationalis a don-né des instructions strictes sur son site web à pro-pos du covid-19 et a prévu des mesures de pré-caution pour tout le monde.

La crise pandémique mondiale peut-elle entraîner unediscrimination à l’encontre des groupes vulnérables,tels que les migrants et les réfugiés?

Le covid-19 nous a donné une leçon: l’humani-té n’a pas de frontières, pas d’ethnie, pas de caste,pas de religion ou de statut économique. Le PapeFrançois nous exhorte à vivre le meilleur qui esten nous, en faisant ressortir l’humanité qui est enchacun de nous. Nous devons être conscients dufait que nous ne sommes pas immortels et le coro-navirus nous a montré comment, en trois mois, laplanète entière a été prise de panique: bloquée etisolée. Le temps est venu d’ouvrir nos cœurs dansune fraternité mondiale d’esprit pour recevoir etaccueillir l’autre. Le covid-19 nous a montré àquel point nous sommes vulnérables. Il nous afait prendre conscience du fait que nous avonsbesoin les uns des autres pour combattre un en-nemi commun.

Comment Caritas Internationalis compte-t-elle attein-dre tous les groupes sociaux les moins favorisés de laplanète?

Quand nous disons Caritas, nous entendonsimplicitement l’Eglise locale. Caritas, qui est au

service de l’Eglise locale, est présente de manièreramifiée et elle est en contact direct avec les com-munautés paroissiales. En outre, elle collaboreavec toutes les communautés religieuses. En Mau-ritanie, par exemple, l’évêque de Nouakchott apublié un communiqué pour soutenir les déci-sions du gouvernement et demander à la popula-tion de les respecter. C’est une façon de dialogueravec la société locale et Caritas continue à le sou-tenir. Lorsque nous parlons de Caritas Internatio-nalis, nous parlons des 165 membres qui, tous enchœur, peuvent agir de manière efficace et effi-ciente.

La pandémie peut-elle détourner l’attention d’a u t re sproblèmes critiques tels que la pauvreté, la violence etla persécution ?

Cette pandémie doit être un temps de k a i ro s .Le monde ne pourra plus fonctionner comme il lefaisait auparavant. A l’avenir, nous devrons orien-ter nos réflexions pour essayer d’être plus créatifset maintenir l’élan de solidarité que nous avonsconnu lors du covid-19. Nous devons rechercherun nouvel ordre, économique et écologique, quidoit être intégral. Le virus de la pauvreté est en-core plus grave que le covid-19. Nous devons voircomment la dette internationale des pays pauvresou en développement peut être annulée et com-ment l’argent peut être utilisé localement pour ai-der les pauvres à réaliser des micro-projets et àsortir de la situation de pauvreté. L’Eglise peutêtre un acteur important aux côtés de Caritas, carelle dispose des infrastructures, des capacités etdes moyens pour le faire. Mais tout cela doit êtreaffronté de toute urgence. La peur de la mort,provoquée par Covid-19, et tout ce que nousavons fait pour sauver des vies humaines, doitnous convaincre de cesser de tuer à travers laguerre et la violence. D’une part, nous voulonsnous protéger de la mort, mais d’autre part, nouspoursuivons la guerre qui fait plus de victimesque le virus. Jusqu’à quel point sommes-nous in-cohérents et égoïstes ? Lorsque tout sera terminé,nous devrons immédiatement programmer uneconférence internationale pour mettre fin à la vio-lence, et les dirigeants du monde entier devrontassumer leurs responsabilités. C’est un aspect im-portant que nous devons cultiver car tout le mon-de sait ce que signifie vivre dans la peur de lamort, de perdre un membre de sa famille, et lemoment est venu d’arrêter les guerres.

Les aides seront-t-elles accessibles à tous? Commentéviter les injustices?

Le Saint-Père a dit que nous avons besoin d’unnouvel ordre, d’un nouveau paradigme de déve-loppement. Alors que Sean Callaghan, présidentdu Catholic Relief Services, a déclaré que «nousdevons demander à nos chefs de gouvernementde consulter le réseau catholique pour promou-voir les activités de microdéveloppement et de dé-veloppement humain intégral». C’est à travers cesoutils de protection et d’acquisition des moyensque nous pouvons continuer à servir et à combat-tre le virus de l’injustice.

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SUITE DE LA PA G E 8

lu et entendu des histoires dramatiques etémouvantes. Lorsque malheureusement la pré-sence du prêtre auprès du lit de ceux qui sontsur le point de mourir n’est pas possible, toutbaptisé peut prier et apporter du réconfort, envertu du sacerdoce commun reçu avec le sa-crement du baptême. Il est beau et évangé-lique d’imaginer en ces temps difficiles, qued’une certaine manière, même les mains desmédecins, des infirmier(e)s, des travailleurs dela santé, qui chaque jour consolent, guérissentou accompagnent ces malades dans leur der-nier moment de vie, deviennent les mains etles paroles de nous tous, de l’Eglise, de la fa-mille qui bénit, salue, pardonne et console.C’est la caresse de Dieu qui guérit et donne lavie, même la vie éternelle.

La crise devient mondiale et commence à impli-quer les pays du Sud. Comment l’Eglise peut-ellecontribuer à un esprit d’entraide entre les diverspays et les continents ayant des problèmes diffé-rents, afin que l’esprit de solidarité et de collabo-ration multilatérale ne soit pas perdu?

Malheureusement, nous sommes confrontésà une pandémie et la contagion se répandcomme une traînée de poudre. D’une part,nous voyons combien d’efforts extraordinairesont été déployés par les pays développés, avecnon moins de sacrifices dans la vie ordinairedes familles individuelles et de l’économie na-tionale, pour s’attaquer efficacement à la crisesanitaire et éradiquer la propagation du virus.D’autre part, je dois cependant avouer que je

suis encore plus préoccupé par la situationdans les pays moins développés, où les éta-blissements de santé ne seront pas en mesured’assurer les soins nécessaires et adéquats à lapopulation en cas de propagation plus impor-tante du covid-19. Par vocation, le Saint-Siègecherche à avoir le monde entier comme hori-zon, il cherche à ne pas oublier ceux qui sontles plus éloignés, ceux qui souffrent le plus,ceux qui luttent peut-être pour être éclairéspar les projecteurs des médias internationaux.Ce n’est pas seulement une préoccupation liéeà l’urgence pandémique actuelle: combien deguerres, combien d’épidémies, combien de fa-mines flagellent tant de nos frères et sœurs! Ily a un réel besoin de prier et de s’e n g a g e r,tous ensemble, pour que la solidarité interna-tionale ne fasse jamais défaut. Malgré l’u rg e n -ce, malgré la peur, il est temps de ne pas serefermer sur nous-mêmes. Nous nous en ren-dons malheureusement compte ces jours-ci:des problèmes et des drames que nous consi-dérions loin de nos vies ont frappé à notreporte. C’est une occasion de se sentir plusunis et de faire grandir l’esprit de solidarité etde partage entre tous les pays, entre tous lespeuples, entre tous les hommes et toutes lesfemmes de notre monde. Cette urgence va en-gendrer des difficultés et de profonds change-ments. Nous avons besoin que ceux qui ontdes responsabilités politiques les exercent au-delà de l’égoïsme de leurs intérêts personnels,collectifs et nationaux, mais qu’ils soient capa-bles de regarder avec sagesse et responsabilité,selon les valeurs de liberté et de justice, lebien commun.

Entretien avec le cardinal Parolin

Message aux bouddhistes pour la fête de Vesakh

Pour une culture de la compassion et de la fraternité«Bouddhistes et chrétiens: construire une culturede compassion et de fraternité». Tel est le titre dumessage du Conseil pontifical pour le dialogue in-terreligieux — signé par le cardinal-président Mi-guel Angel Ayuso Guixot et par le secrétaire, MgrIndunil Janakaratne Kodithuwakku Kankana-malage — à l’occasion de la fête de Vesakh/Ha-namatsuri 2020, au cours de laquelle sont com-mémorés les principaux événements de la vie deBouddha. La fête est célébrée à des dates différen-tes, selon les différences traditions. Cette année, el-le sera célébrée dans la majorité des pays de tra-dition bouddhiste, le 6 mai. Nous publions ci-des-sous le texte du message.

Chers amis bouddhistes,1. Au nom du Conseil pontifical pour le

dialogue interreligieux, nous vous adressonsnos salutations les plus sincères et nos meil-leurs vœux, à vous ainsi qu’à toutes les com-munautés bouddhistes du monde entier, alorsque vous célébrez la fête de Ve s a k h / H a n a m a t -suri. Depuis vingt-quatre ans, le Conseil pon-tifical pour le dialogue interreligieux vousdestine ses salutations en cette heureuse occa-sion. Et puisque cette année marque le vingt-cinquième anniversaire de ce message tradi-tionnel, nous souhaitons renouveler notre liend’amitié et de collaboration avec les différen-tes traditions que vous représentez.

2. Cette année, nous aimerions réfléchiravec vous sur le thème: «Bouddhistes et chré-tiens: construire une culture de compassion etde fraternité». Nous sommes conscients de lagrande valeur que nos traditions religieusesrespectives accordent à la compassion et à lafraternité dans notre quête spirituelle, dansnotre témoignage et notre service à une huma-nité et à une terre, toutes deux blessées.

3. Le Document sur la fraternité humainepour la paix mondiale et la coexistence parta-gée déclare: «les vrais enseignements des reli-gions invitent à demeurer ancrés dans les va-leurs de la paix; à soutenir les valeurs de laconnaissance réciproque, de la fraternité hu-maine et de la coexistence commune». Lorsde sa rencontre avec le patriarche suprême desbouddhistes, en Thaïlande au mois de novem-bre dernier, Sa Sainteté le Pape François a ditque «nous pourrons grandir dans la pratiquedu “bon voisinage”». Nous pouvons stimulerentre les fidèles de nos religions l’élab orationde nouvelles initiatives de charité, «capablesde générer et de multiplier des projets con-crets sur le chemin de la fraternité, spéciale-ment envers les plus pauvres, et pour notremaison commune si maltraitée. Nous contri-buerons ainsi à la construction d’une culturede la compassion, de la fraternité et de la ren-contre, ici comme ailleurs dans le monde»(cf. Visite au patriarche suprême bouddhiste,Bangkok, 21 novembre 2019).

4. La fête de Ve s a k h / H a n a m a t s u r i nous invi-te à rappeler que le prince Siddhârta est partià la recherche de la sagesse en se rasant la têteet en renonçant à son statut princier. Il échan-gea ses vêtements de soie de Bénarès contre lasimple robe d’un moine. Son noble gestenous rappelle saint François d’Assise: il s’estcoupé les cheveux et a échangé ses beaux vê-tements contre la simple robe d’un mendiantparce qu’il voulait suivre Jésus, qui «s’estanéanti, prenant la condition de serviteur»(Philippiens 2, 7) et n’avait «pas d’endroit oùreposer la tête» (Matthieu 8, 20). Leur exem-ple, et celui de ceux qui les suivent, nous ins-pirent une vie de détachement au regard de cequi est le plus important. Ainsi, nous pouvons

en conséquence nous consacrer plus librementà la promotion d’une culture de compassionet de fraternité pour le soulagement des souf-frances humaines et écologiques.

5. Tout est lié. L’interdépendance nous ra-mène au thème de la compassion et de la fra-ternité. Dans un esprit de gratitude pour vo-tre amitié, nous vous demandons humblementd’accompagner et de soutenir vos amis chré-tiens dans la promotion de la bonté et de lafraternité dans le monde d’a u j o u rd ’hui. Alorsque nous, bouddhistes et chrétiens, apprenonsles uns des autres comment devenir toujoursplus conscients et compatissants, puissions-nous continuer à chercher des moyens de tra-vailler ensemble pour faire de notre intercon-nexion une source de bénédiction pour toutêtre sensible et pour la planète, notre maisoncommune.

6. Nous pensons que pour garantir la conti-nuité de notre solidarité universelle, notre che-minement partagé nécessite un processus édu-catif. A cette fin, un événement mondial auralieu le 15 octobre 2020 sur le thème «Recons-truire le pacte éducatif mondial». «Cette ren-contre ravivera l’engagement pour et avec lesjeunes générations, en renouvelant la passiond’une éducation plus ouverte et plus inclusive,capable d’une écoute patiente, d’un dialogueconstructif et d’une compréhension mutuelle»(Pape François, Message à l’occasion du Pacteéducatif mondial, 12 septembre 2019). Nousvous invitons à travailler tous ensemble pourpromouvoir cette initiative, individuellementet au sein de vos communautés, pour contri-buer à un nouvel humanisme. Nous sommeségalement heureux de voir que les bouddhis-tes et les chrétiens s’appuient sur des valeursprofondément ancrées et œuvrent ensemblepour éradiquer les causes des maux sociauxdans diverses parties du monde.

7. Prions pour tous ceux qui sont affectéspar la pandémie du coronavirus et pour ceuxqui dispensent leurs soins. Encourageons noscroyants respectifs à vivre ce moment difficileavec espérance, compassion et charité.

8. Chers amis bouddhistes, dans cet espritd’amitié et de collaboration, nous vous sou-haitons encore une fois une fête paisible etjoyeuse de Ve s a k h / H a n a m a t s u r i .

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numéro 15, mardi 14 avril 2020 L’OSSERVATORE ROMANO page 11

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Collège épiscopalNominations

Le Saint-Père a nommé:

31 mars

S.Exc. Mgr MAREK MENDYK:évêque de Swidnica (Pologne), letransférant du siège titulaire de Ru-succuru et de la charge d’a u x i l i a i redu diocèse de Legnica (Pologne).

Né le 18 mars 1961 à Głuszyca,a u j o u rd ’hui diocèse de Swidnica(Pologne), il a été ordonné prêtre le23 mai 1987 pour le clergé deWro cław. Le 24 décembre 2008, il aété nommé évêque titulaire de Ru-succuru et auxiliaire de Legnica. Ausein de la conférence épiscopale, ilest membre du conseil permanent etdu conseil pour la pastorale des jeu-nes. Il préside la commission pourl’éducation catholique.

1er avril

S.Exc. Mgr ZOLILE PETER MPA M B A -NI, S.C.J., jusqu’à présent évêque deKokstad (Afrique du Sud): arche-vêque de Bloemfontein (Afrique duSud).

Né le 20 février 1957, à Umlamli,diocèse d’Aliwal (Afrique du Sud),il a émis sa profession religieusedans la congrégation du Sacré-Cœurde Jésus (déhoniens) le 28 janvier1982 et a été ordonné prêtre le 25

avril 1987. Nommé évêque de Koks-tad le 6 mai 2013, il a reçu l’o rd i n a -tion épiscopale le 3 août suivant. Ausein de la conférence des évêquesd’Afrique méridionale, il est en char-ge du bureau pour la formation, lavie et l’apostolat des laïcs.

2 avril

le père CRISTÓBAL BERNARD O ME-JÍA CORRAL, du clergé du diocèse deLurín (Pérou), curé de la paroisse«Cristo el Salvador»: évêque deChulucanas (Pérou).

Né le 4 décembre 1954 dans laprovince civile de Carhuaz, Ancash,alors territoire de l’archidiocèse deLima (Pérou), il a été ordonné prê-tre pour le clergé de Lima, le 18 dé-cembre 1989 .

3 avril

le père MICHAEL G. MCGOVERN,du clergé de l’archidiocèse de Chica-go (Etats-Unis d’Amérique), jusqu’àprésent vicaire épiscopal «ad inte-rim» du vicariat I, doyen du Deane-ry I-C et curé de la Saint Raphaelthe Archangel Parish à Old MillCreek: évêque de Belleville (Etats-Unis d’Amérique).

Né le 1er juillet 1964 à Chicago(Etats-Unis d’Amérique), il a étéordonné prêtre pour le clergé deChicago le 21 mai 1994.

le père KRZYSZTOF CH U D Z I O, duclergé de l’archidiocèse de Przemyśldes Latins (Pologne), jusqu’à pré-sent curé de Jasienica Rosielna:évêque auxiliaire de Przemyśl desLatins (Pologne), lui assignant lesiège titulaire de Marazane.

Né le 25 juin 1963 à Przemyśl(Pologne), il a été ordonné prêtre le14 juin 1988.

4 avril

le père FRANCISCO CASTRO LALUPÚ,du clergé de l’archidiocèse de Trujil-lo (Pérou), vicaire épiscopal pour lesaffaires économiques et administrati-ves et vicaire paroissial de la parois-se «Santo Toribio de Mogrovejo»de la cathédrale: évêque titulaire de

Puzia de Bizacena et auxiliaire del’archidiocèse de Trujillo (Pérou).

Né le 13 août 1973 dans le districtde Bellavista-Sullana, archidiocèsede Piura (Pérou), il a été ordonnéprêtre le 6 juin 2004 pour le clergéde Trujillo.

Démissions

Le Saint-Père a accepté la démissionde:

31 mars

S.Exc. Mgr IGNACY DEC, qui avaitdemandé à être relevé de la chargepastorale du diocèse de Świdnica(Pologne).

1er avril

S.Exc. Mgr JABULANI AD AT U S NXU-M A L O, O.M.I., qui avait demandé àêtre relevé de la charge pastorale del’archidiocèse de Bloemfontein(Afrique du Sud).

2 avril

S.Exc. Mgr Daniel Thomas TurleyMurphy, o.s.a., qui avait demandé àêtre relevé de la charge pastorale dudiocèse de Chulucanas (Pérou).

3 avril

S.Exc. Mgr ED WA R D K. BRAXTON,qui avait demandé à être relevé de lacharge pastorale du diocèse de Bel-leville (Etats-Unis d’Amérique).Audiences

p ontificalesLe Saint-Père a reçu en audience:

4 avril

Leurs Eminences MM. les cardi-naux:

— MARC OU E L L E T, préfet de laCongrégation pour les évêques;

— LUIS ANTONIO G. TAGLE,préfet de la Congrégation pourl’évangélisation des peuples;

M. ALOYSIUS JOHN, secrétaire gé-néral de «Caritas Internationa-lis», avec Mgr PIERRE NTA KO B A -JIRA CI B A M B O, assistant ecclésias-tique;S.Exc. Mgr GIACOMO MORANDI,archevêque titulaire de Cerveteri,secrétaire de la Congrégationpour la doctrine de la foi.

6 avril

S.Em. le cardinal PETER KODWOAPPIAH TU R KSON, préfet du di-castère pour le service du déve-loppement humain intégral, avecsa suite.

Elévation au rangde diocèse

2 avril

Le Saint-Père a élevé le vicariatapostolique de Kontagora (Nigé-ria) au rang de diocèse, avec lamême dénomination et configura-tion territoriale, le rendant suffra-gant du siège métropolitain deKaduna. Dans le même temps, ila nommé premier évêque du dio-cèse de Kontagora (Nigéria)S.Exc. Mgr BULUS DAU WA YO-HANNA, jusqu’à présent vicaireapostolique du même siège etévêque titulaire de Scebaziana.

Né le 15 décembre 1970 à Vuro-ro, dans le vicariat apostolique deKontagora (Nigéria), il a été or-donné prêtre le 10 janvier 1998.Elu au siège titulaire de Scebazia-na et nommé dans le mêmetemps vicaire apostolique de Ko-tangora le 2 février 2012, il a reçul’ordination épiscopale le 3 maisuivant.

Curie romaine

Le Saint-Père a nommé:

31 mars

le père MAREK ANDRZEJ IN G L O T, S.J.(Pologne), doyen de la faculté d’his-toire et des biens culturels de l’Egli-se de l’université pontificale grégo-rienne de Rome: membre du Comitépontifical pour les sciences histori-ques.

Représentationp ontificale

Nomination

Le Saint-Père a nommé:

31 mars

Mgr LUÍS MIGUEL MUÑOZ CÁR-DABA, conseiller de nonciature:nonce apostolique au Soudan eten Erythrée, l’élevant dans le mê-me temps au siège titulaire de Na-sai, avec dignité d’a rc h e v ê q u e .

Né à Vallelado, Espagne, le 25août 1965, il a été ordonné prêtrele 28 juin 1992. Entré au servicediplomatique du Saint-Siège le 1er

avril 2001, il a prêté service dansles représentations pontificales enGrèce, Mexique, Belgique, Italie,Australie, France et Turquie.

Vi c a i reap ostolique

Le Saint-Père a nommé:

4 avril

le père CHARLIE M. INZON, O.M.I.,jusqu’à présent supérieur des mis-sionnaires oblats de Marie Imma-culée aux Philippines: vicaireapostolique du vicariat de Jolo(Philippines).

Né le 24 novembre 1965 à Pu-tiao, dans le diocèse de Sorsogon(Philippines), il est entré dans lacongrégation des missionnairesoblats de Marie Immaculée (OMI)en 1982, et a émis sa professionperpétuelle le 8 septembre 1990. Ila été ordonné prêtre le 24 avril1993 à Coloocan City.

Préfet apostolique

Le Saint-Père a nommé:

2 avril

le père GIORGIO MA R E N G O, I.M.C,jusqu’à présent conseiller régionalpour l’Asie, supérieur pour laMongolie et curé de Marie Mèrede la Miséricorde à Arvaiheer(Mongolie): préfet apostoliqued’Oulan-Bator (Mongolie), aveccharge épiscopale, lui assignant lesiège titulaire de Castra Severiana.

Né le 7 juin 1974 à Cuneo (Ita-lie), il a émis sa profession perpé-tuelle le 24 juin 2000 commemembre de l’institut missionnairede la Consolata, et a été ordonnéprêtre le 26 mai 2001.

Page 12: 1,00 € Numéros précédents 2,00 € OL’ S S E RVATOR E ROMANO · (Mt 27, 23). Ceux qui le suivaient, confus et effra-yés, l’abandonnent. Ils pe-nsaient: si tel est le sort

page 12 L’OSSERVATORE ROMANO mardi 14 avril 2020, numéro 15

Dans le monde 300 millions de chrétiens sont persécutés à cause de leur foi

Faim de justiceFRANCESCO RICUPERO

«Environ 300 millions de chrétiens viventdans des pays où ont lieu des persécutions enhaine de la foi. Ces pays sont souvent égale-ment frappés par la pauvreté. Aujourd’hui,aux deux premiers “P”, persécution et pauvre-té, s’en est ajouté un troisième: le “P” de pan-démie. C’est pour cette raison que l’Aide àl’Eglise en détresse (AED) vient d’allouer 5millions d’euros pour des financements d’ur-gence en faveur des prêtres et des religieuxengagés dans le soin des communautés chré-tiennes les plus exposées au coronavirus»:c’est ce que déclare à «L’Osservatore Roma-no», le directeur de l’AED Italie, AlessandroMonteduro, plus que jamais convaincu qu’ence temps de pandémie, la Semaine Sainte, eten particulier le Vendredi Saint, prennent unesignification particulière. Dans le monde, eneffet, un chrétien sur 7 vit dans un pays mar-qué par la persécution et la violence. La déci-sion d’allouer des fonds — explique-t-il à no-tre journal — a été prise il y a quelques heurespar AED qui, de cette manière, entend ainsicontribuer à alléger l’impact du covid-19.

«C’est une goutte d’eau dans la mer parrapport à ce qui sera et qui est nécessaire — aaffirmé Thomas Heine-Geldern, présidentexécutif de AED International — mais l’Egliserevêt un rôle spirituel et pastoral particulière-ment vital dans la vie quotidienne des com-munautés chrétiennes les plus pauvres dumonde, et nous devons contribuer à renforcerle réseau de protection qu’elle assure. Je suisreconnaissant à nos bienfaiteurs qui, souventmalgré leurs propre souffrances et difficultés,sont en train d’aider leurs frères dans la foi».

La somme allouée garantit une interventionà large spectre d’action, au Moyen-Orient, enEurope centrale et de l’Est, en Amérique lati-ne, en Asie et en Afrique. Grâce à cette initia-tive, les ministres de Dieu pourront se consa-crer avec une plus grande efficacité aux activi-tés pastorales et de soutien aux malades, enparticulier à ceux qui sont également victimesde la pauvreté.

Face à la pandémie du covid-19, nous re-viennent les paroles de Jésus sur le point demourir: «Mon Dieu pourquoi m’as-tu aban-donné?». Ainsi, ce temps de pandémie pourraêtre pour tous une occasion importante pourapprendre à juger et à comprendre les erreurscommises jusqu’à aujourd’hui; ce que nousdevons faire pour pouvoir nous convertir,comment changer pour éviter de vivre dansl’égoïsme et dans une totale indifférence àl’égard de ceux qui souffrent et qui ont besoind’aide et de réconfort.

«Malheureusement, comme déjà en Europe,également dans presque tous les pays où leschrétiens souffrent d’oppression et de discri-mination — ajoute le directeur de la sectionitalienne de la fondation de droit pontifical —les célébrations publiques sont momentané-ment suspendues. La décision de la sus-pension des Messes publiques n’est pas tou-jours compréhensible pour nos frères qui ontvécu des expériences de foi dramatiques, quices dernières années ont participé aux Messes,dans des pays comme l’Egypte, le Pakistan, leNigéria, en ne sachant pas s’ils seraient reve-nus vivants dans leurs propres familles, qui té-moignent quotidiennement de leur foi et deleur courage avec héroïsme malgré let e r ro r i s m e » .

«Seuls ceux qui ne connaissent pas la forcede la foi qui les nourrit sont surpris par la fa-çon dont les chrétiens persécutés témoignentde leur solidarité pour les souffrances de payscomme l’Italie et l’Espagne. En effet, les mes-sages de proximité dans la prière — rappelle ledirecteur d’AED Italie — qui parviennent decommunautés chrétiennes qui font l’exp érien-ce depuis toujours de la peur et de l’isole-ment, sont innombrables. Les prières que laSyrie martyrisée nous consacre, nous ses frèresprivilégiés, sont constantes. Et bien que de-puis presque dix ans ils cohabitent avec laguerre, les bombes, l’embargo, ils continuentà prier pour nous».

Selon AED, 61% de la population mondialevit dans des pays où la liberté religieuse n’estpas respectée; dans 9% des pays du monde ladiscrimination est présente; et dans 11% desEtats la persécution existe. Il ne faut absolu-ment pas taire le voile de superficialité et d’in-différence derrière lequel les communautés defoi vulnérables continuent à souffrir, alors queleur situation est également ignorée par lacommunauté internationale.

AED a identifié 38 pays dans lesquels onenregistre des violations graves ou extrêmesde la liberté religieuse. Vingt-et-un d’e n t reeux sont classés comme des lieux de persécu-tion. Dix-sept, en revanche, sont classés com-me des lieux de discrimination.

Parmi les pays africains où l’intolérance reli-gieuse a récemment pris des aspects dramati-ques se trouvent le Nigéria, la Républiquecentrafricaine et la République démocratiquedu Congo, à la suite de nombreuses attaquesde la part de groupe islamistes ou djihadistes.Au Nigéria, l’aggravation a essentiellement étécausée par trois facteurs: la terreur que fait ré-gner l’organisation Boko Haram, les affronte-ments entre pasteurs nomades islamiques etles agriculteurs, ainsi que l’échec des autoritésqui n’ont pas su enquêter sur les violations de

la liberté religieuse, comme cela est en revan-che établi dans la Constitution du pays. EnRépublique centrafricaine, bien que d’imp or-tants responsables religieux aient constam-ment souligné que le conflit n’a pas un carac-tère religieux, de nombreux actes de violenceont été commis lors desquels les individus etles communautés, en particulier les chrétiens,ont été frappés à cause de leur religion. EnRépublique démocratique du Congo, des cen-taines d’Eglises ont été profanées et détruitespar des groupes intégralistes et de nombreuxchrétiens ont perdu la vie.

La situation est également difficile auMoyen-Orient, en particulier en Irak, en Syrieet en Terre Sainte.

En Irak, la population chrétienne a presqueété éliminée, alors que celle qui est restée, grâ-ce au soutien de l’Eglise, cherche avec beau-coup de difficultés à reconstruire sa vie. EnSyrie, presque dix années de guerre ont prati-quement effacé la communauté chrétiennesoutenue au prix de grands efforts par l’Egliseet par les ONG.

Dans 17 des 38 Etats dans lesquels on enre-gistre des violations de la liberté religieuse —à savoir dans presque la moitié du total despays comptant des cas de persécution et dediscrimination — la situation a empiré ces der-nières années. Une tendance préoccupante estl’augmentation du nationalisme agressif audétriment des minorités, qui a dégénéré à telpoint qu’on le définit comme un ultra-natio-nalisme. Ce phénomène s’est développé demanière différente selon les pays. Le cas del’Inde est significatif, on y enregistre toujoursdavantage d’actes de violence au détrimentdes minorités religieuses. L’ultra-nationalismene s’identifie pas nécessairement avec une reli-gion. Très souvent, il se manifeste par unehostilité générale de l’Etat à l’égard de toutesles confessions et il se traduit par des mesuresrestrictives qui limitent fortement la liberté re-ligieuse. Des enlèvements et des conversionsforcées à l’islam d’adolescents, de jeunes filleset de femmes chrétiennes, et également hin-doues, sont très souvent enregistrés au Pakis-tan.

Malgré leurs immenses souffrances «nosfrères opprimés, et en particulier les prêtrespersécutés, nous aident de manière efficace etnous aussi les soutenons. L’Aide à l’Eglise endétresse — conclut le président de AED Italie,Alfredo Mantovano — grâce à cette subven-tion de 5 millions d’euros renouvelle sa proxi-mité aux communautés chrétiennes dans despays où être une minorité religieuse, en cestemps dramatiques, est, encore plus qu’h i e r,un motif de marginalisation et de souffrance».