1 2 3 4 Élevage bovin, déforestation 5 j. b. veiga6 7 et ...bft.cirad.fr/cd/bft_280_5-16.pdf ·...

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J.-F. Tourrand 1 M.-G. Piketty 2 J. R. D. Oliveira 3 M. C. Thales 4 A. M. Alves 5 J. B. Veiga 6 R. Poccard-Chapuis 7 1 Vétérinaire Cirad-tera/UnB-CDS Brasília-DF Brésil 2 Economiste Cirad-amis/USP-FEA São Paulo Brésil 3 Avocat Sciences politique OAB Avenida Brasil Redenção-PA Brésil 4 Géographe Museu Paraense Emílio Goeldi CEP 66000-000 Belém-PA Brésil 5 Sociologue Folha 28, Quadra 2 Lote 20, Nova Marabá Marabá-PA Brésil 6 Agronome Embrapa Amazônia Oriental Tv Eneas Pinheiro CEP 60095-100 Belém-PA Brésil 7 Géographe Cirad-emvt Campus Baillarguet Montpellier France Élevage bovin, déforestation et développement régional : le cas du Sud du Pará, Amazonie brésilienne BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2004, N° 280 (2) 5 DÉVELOPPEMENT, BRÉSIL FORÊTS AMAZONIENNES Photo 1. Redenção, Sud du Pará, Pará, Brésil, 2002. Redenção, southern Pará, Pará, Brazil, 2002. Photo J.-F. Tourrand. À la lumière d’une analyse fine de la trajectoire du front pionnier du Sud de l’État du Pará, est revue la pertinence d’un certain nombre de relations de cause à effet entre déforestation, élevage bovin et dynamiques de développement régional en Amazonie.

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J.-F. Tourrand1

M.-G. Piketty2

J. R. D. Oliveira3

M. C. Thales4

A. M. Alves5

J. B. Veiga6

R. Poccard-Chapuis7

1 Vétérinaire Cirad-tera/UnB-CDS Brasília-DF Brésil

2 Economiste Cirad-amis/USP-FEA São PauloBrésil

3 Avocat Sciences politiqueOAB Avenida Brasil Redenção-PABrésil

4 GéographeMuseu Paraense Emílio Goeldi CEP 66000-000Belém-PABrésil

5 SociologueFolha 28, Quadra 2Lote 20, Nova Marabá Marabá-PABrésil

6 AgronomeEmbrapa Amazônia OrientalTv Eneas Pinheiro CEP 60095-100Belém-PABrésil

7 GéographeCirad-emvtCampus BaillarguetMontpellierFrance

Élevage bovin, déforestationet développement régional :

le cas du Sud du Pará,Amazonie brésilienne

B O I S E T F O R Ê T S D E S T R O P I Q U E S , 2 0 0 4 , N ° 2 8 0 ( 2 ) 5DÉVELOPPEMENT, BRÉSIL

FORÊTS AMAZONIENNES

Photo 1.Redenção, Sud du Pará, Pará, Brésil, 2002.Redenção, southern Pará, Pará, Brazil, 2002.Photo J.-F. Tourrand.

À la lumière d’une analyse fine de la trajectoire du front pionnier du Sudde l’État du Pará, est revue la pertinence d’un certain nombre de relations de cause à effetentre déforestation, élevage bovin et dynamiques de développement régional en Amazonie.

RÉSUMÉ

ÉLEVAGE BOVIN, DÉFORESTATIONET DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL : LECAS DU SUD DU PARÁ, AMAZONIEBRÉSILIENNE

Plus grand massif forestier tropical,l’Amazonie constitue une réserved’espace et de ressources au centred’une Amérique latine peuplée et pre-neuse de ces richesses pour appuyerson développement économique. Lesprocessus de colonisation se sontintensifiés depuis quelques décen-nies, en particulier au Brésil, pourrépondre à différents objectifs poli-tiques, économiques et sociaux.Quarante ans après, le bilan décritcumule de nombreux mauvais points.Le scénario classique souvent consi-déré comme typique de toutes lesrégions colonisées se caractérise parles étapes suivantes : constructiond’une route, arrivée des migrants,déforestation, implantation de pâtu-rages pour l’élevage bovin, dégrada-tion des sols, concentration foncière,conflits fonciers, abandon des terreset migration vers de nouvellesrégions forestières. Cependant, lestravaux analysant la situation àl’échelle locale montrent que ce scé-nario varie considérablement d’unerégion à l’autre, et selon les époques.Cet article se propose d’analyser fine-ment la trajectoire du front pionnierdu Sud de l’État du Pará et de revoir,à la lumière de ce cas, la pertinenced’un certain nombre de relations decause à effet entre la déforestation,l’élevage bovin et les dynamiques dedéveloppement régional en Amazo-nie. La conclusion sera centrée surquelques grandes questions qui seposent encore aujourd’hui et quisous-tendent les différents projets denotre réseau de recherche.

Mots-clés : déforestation, dévelop-pement régional, élevage bovin,Brésil, Amazonie.

ABSTRACT

CATTLE FARMING, DEFORESTATIONAND REGIONAL DEVELOPMENT: ACASE STUDY IN SOUTHERN PARÁ,BRAZILIAN AMAZON

With the world’s largest area of tropi-cal forest, the Amazon is a reserve ofland and resources within a densely-populated Latin America, relyingheavily on its natural resources tofuel its development. Settlement hasintensified in recent decades, espe-cially in Brazil, in response to differ-ent political, economic and socialobjectives. Forty years on, the manyadverse consequences of the settlerinflux have frequently beendescribed. The classic scenario,which is generally considered to betypical of all settlement regions, pro-ceeds as follows: construction of aroad, arrival of migrants, deforesta-tion, establishment of grazing landfor cattle, soil degradation, landtenure concentration, conflicts overland tenure, land abandon and migra-tion to other forest areas. However,analyses of the situation at localscale show that the scenario actuallyvaries considerably from one regionto another as well as over time. Thisarticle makes a detailed analysis ofthe progress of the pioneer front inthe southern Pará State, in order toreview the relevance of various linksbetween deforestation, cattle farmingand the dynamics of regional devel-opment in the Amazon. Our conclu-sions bring out a number of funda-mental questions that are still beingraised today, underlying the variousprojects undertaken by our researchnetwork.

Keywords: Brazil, Amazon, deforesta-tion, regional development, cattlefarming.

RESUMEN

GANADERÍA BOVINA,DEFORESTACIÓN Y DESARROLLOREGIONAL: EL CASO DEL SUR DEPARÁ, AMAZONIA BRASILEÑA

La Amazonia, el mayor bosque tropi-cal, constituye una reserva de espacioy de recursos en el corazón de un sub-continente densamente poblado quequiere emplear dichas riquezas parasostener su desarrollo económico.Los procesos de colonización se hanintensificado desde hace algunasdécadas, en particular en Brasil, pararesponder a distintos objetivos políti-cos, económicos y sociales. Cuarentaaños después, el balance contienemuchos puntos negros. El escenarioque se suele considerar típico detodas las regiones colonizadas secaracteriza por las siguientes etapas:construcción de una carretera, llegadade los emigrantes, deforestación, cre-aciones de pastos para el ganadovacuno, degradación de los suelos,concentración de la tierra, conflictospor la propiedad de la tierra, aban-dono de las tierras y migracioneshacia nuevas regiones forestales. Sinembargo, los trabajos que analizan lasituación a escala local muestran quedicho escenario varía considerable-mente según las regiones y épocas.Este artículo se propone analizar endetalle la evolución del frente pionerodel sur del Estado de Pará y revisar, através de este caso, la pertinencia deuna serie de relaciones de causa yefecto entre la deforestación, la gana-dería bovina y las dinámicas de desar-rollo regional en la Amazonia. La con-clusión se centrará en algunascuestiones importantes que aún sesiguen planteando y en las que sebasan los distintos proyectos de nues-tra red de investigación.

Palabras clave: deforestación, desar-rollo regional, ganadería bovina,Brasil, Amazonia.

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J.-F. Tourrand, M.-G. Piketty, J. R. D. Oliveira, M. C. Thales, A. M. Alves, J. B. Veiga, R. Poccard-Chapuis

Introduction

L’Amazonie s’étend sur près de7,5 millions de km2, de part et d’autrede l’équateur. Elle constitue uneréserve d’espaces pour chaque nationdu bassin amazonien et a ainsi vécuplusieurs vagues de colonisationdepuis le XVIe siècle, avec une intensitéaccrue à partir du milieu du XXe siècle.Cette dernière phase est marquée parl’avancée rapide des fronts pionniers,où les écosystèmes forestiers sonttransformés en espaces ruraux.L’ensemble des fronts pionniers consti-tue l’Arc de déforestation (figure 1). AuBrésil, au début des années 1960, lesgénéraux brésiliens dépassent les ini-tiatives des présidents Vargas, puisKubitschek, et lancent une série deprogrammes d’envergure, qui visent àcontrôler ce territoire immense contretoute prétention étrangère, développerla région à travers l’exploitation de sesressources naturelles et l’agriculture,et permettre l’accès à la terre aux pay-sans du Sud et du Nord-Est, exclus dela croissance économique.

Quarante ans après, on parlebeaucoup du massacre de l’Amazoniebrésilienne, du fait notamment des tauxde déforestation élevés (une moyenneannuelle approchant les 2 millionsd’hectares) pour des mises en valeurque l’on estime faibles ou inadéquates.Sur le plan économique, les deux princi-pales activités rencontrées sont la pro-duction de bois et l’élevage bovin. Lapremière est accusée d’être respon-sable de cycles locaux de « boom andbust » (SCHNEIDER et al., 2000). Laseconde (80 % des terres déforestéessont convertis en pâturage [photos 1 et2]) est jugée peu rentable et peu créa-trice de richesses. On entend aussibeaucoup parler de dégradation irréver-sible du pâturage, qui explique l’aban-don massif des terres (20 % des terresdéforestées en Amazonie seraient« abandonnées » [MMA, 2001]). Enfin,on parle de l’échec social des pro-grammes mis en œuvre car l’Amazonieserait caractérisée par des processus deconcentration foncière inévitables, àl’origine de conflits et d’invasions deterres sans cesse renouvelés.

Cependant, la plupart des argu-ments généraux et des relations decause à effet qui sous-tendent cesaffirmations sont souvent peu étayés.Des études plus locales montrentqu’il existe de grandes variationsd’une région à l’autre, et selon lesépoques (WALKER et al., 2000 ; MERTENS

et al., 2002). Cela est assez logiquecar les processus de développementrégional ne sont ni uniformes dansl’espace, ni linéaires dans le temps(FUJITA, THISSE, 1997). Cet article se pro-pose, à partir d’une étude de cas duSud de l’État du Pará, d’illustrer unetrajectoire possible de développe-ment et de revoir, à la lumière de cecas, les arguments présentés précé-demment. Cette analyse est fondéesur les informations bibliographiquesdisponibles, sur l’analyse d’imagessatellitaires et sur des données d’en-quêtes réalisées au cours des cinqdernières années dans le cadre deplusieurs projets de recherche dansla région1. La conclusion sera centréesur quelques grandes questions quise posent encore aujourd’hui et quisous-tendent les différents projets denotre réseau de recherche.

Un front pionniermarqué par unesuccession de

cycles économiques

Avec près d’un demi-siècled’existence, le Sud du Pará, localiséentre les rios Araguaia et Xingú(figure 2), est un des plus anciensfronts pionniers de la colonisationofficielle de l’Amazonie brésilienne. Ily a 40 ans, la région était quasi exclu-sivement couverte de forêt primaireen dehors des quelques savanesarborées (cerrados).

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1 Citons : Uso da terra, dinâmica da paisagem e construçãodo espaço na Amazônia brasileira : análise comparativa emetodologia de monitoramento em áreas de fronteiraagrícola , financé par le programme pilote pour laconservation des forêts tropicales du Brésil (PPG7) ;Cattle ranching and deforestation in Amazon Region,financé par la National science foundation (Nsf ) vial’Institut interaméricain (Iai) ; Dynamiques de frontières etconstruction régionale en Amazonie brésilienne, financépar le programme franco-brésilien Capes-Cofecub ;Développement régional et déforestation : Quellesalternatives pour un développement durable en Amazoniebrésilienne ?, financé par la Fapesp (Brésil) et le Mae(France).

Photo 2. Une scierie au milieu des pâturages. Transamazonienne, Brésil, 2001. A sawmill among the pastures. Trans-Amazonian highway, Brazil, 2001. Photo J.-F. Tourrand.

Le peuplement avant la colonisation

Hormis les rares installations dereligieux et la naissance de quelquesvillages au long de fleuves Araguaia etXingú, jusqu’à la fin du XIXe siècle, leSud du Pará était peuplé essentielle-ment d’Indiens des groupes Karajá etKayapó. Le boom du caoutchouc (findu XIXe et début du XXe siècle) attira enAmazonie toutes sortes de migrants,les seringueiros, à la recherche dulatex. Dans le Sud du Pará, on rencon-trait peu d’Hevea brasilensis et le latexétait tiré principalement du caucho(Castilla ulei, moracée) en coupantl’arbre, entraînant ainsi sa mort. Lesseringueiros devaient donc aller tou-jours plus en avant à la recherched’arbres à couper pour en prélever lelatex. Ainsi, à la différence d’autresrégions d’Amazonie, un peuplementde colons ne s’est pas mis en place endehors de villages riverains des fleuves

par lesquels circulaient le latex et lesdivers intrants : Conceição do Ara-guaia, Santana do Araguaia, SantaMaria da Barreira, Paú d’Arco, São Felixdo Xingú, São Geraldo. En 1920, peu detemps après la fin de l’époque ducaoutchouc, le municipe de Conceiçãodo Araguaia comptait 11 000 habitants(IANNI, 1978)2. Vingt ans plus tard, lecaoutchouc amazonien n’étant plus unproduit d’exportation de premier plan,la population avait baissé de moitié.

Cette région a donc d’abord étémarquée, comme l’ensemble du bas-sin amazonien, par les aléas de laconjoncture internationale du caout-chouc, qui subissait les lois de lademande internationale. Cette phasen’a eu que peu d’impact écologiquesur les massifs forestiers si ce n’est ladisparition du caucho dans la régiondu Sud du Pará. Sur le plan social, lesystème des aviamento qui liaient lesnégociants aux seringueiros était par-ticulièrement contraignant et peu

équitable pour ces derniers (IANNI,1978). Sur le plan économique, lesretombées régionales sont restéesfaibles, le latex étant directementexporté par les voies fluviales à partirdes villes riveraines. Sur le plan fon-cier, l’époque du caucho est à l’ori-gine de la constitution d’immensesdomaines, entérinant déjà une maillefoncière très large qui sera la matièrepremière des futurs découpagesdurant la phase de colonisation.

À partir de la Seconde Guerremondiale, la population du Sud duPará augmentera régulièrement,d’abord avec le regain d’intérêt desAlliés pour le caoutchouc amazonien,puis, dans la décennie 1950, avec l’ar-rivée des précurseurs de la colonisa-tion officielle. En 1960, la populationretrouve son niveau de 1920. Elle avaitpresque triplé en 1970, le Sud du Parácomptant environ 40 000 habitants,avec 80 % de ruraux.

Figure 1. L’Amazonie et son Arc de déforestation.The Amazon and its deforestation arc.

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DEVELOPMENT, BRAZILAMAZONIAN FORESTS

2 Rappelons que, à cette époque, le Sud du Pará était constitué des deux seulsmunicipes de Conceição do Araguaia et Santana do Araguaia, à partir desquelss’émanciperont ultérieurement tous les autres municipes actuels de la région.

La naissance du frontpionnier dans la seconde

moitié du XXe siècle

Une des particularités du Sud duPará, par rapport à d’autres frontspionniers comme ceux de laTransamazonienne, est d’avoir étécolonisé sur un modèle latifundiaire.Le plan de colonisation de la secondepartie des années 1960 réalise undécoupage de la région compriseentre les rios Araguaia et Xingú enlots unitaires d’environ 4 300 ha(photo 3). Parallèlement, le pro-gramme de défiscalisation attribue leslots à diverses entreprises privées etpubliques des États brésiliens du Sudet du Sud-Est, en échange d’un inves-tissement dans la région, favorisé parailleurs par les prêts des banquespubliques créées à cet effet. La figure3, établie en 1972, montre la situationfoncière issue de la colonisation.Environ 150 entreprises se répartis-sent les 5-6 millions d’hectares de larégion, soit une moyenne de 30 000 à40 000 ha par exploitation. Onconstate qu’une vingtaine d’exploita-tions possède plus de 100 000 ha. Ilest clair que le plan de colonisation neprévoyait aucun espace pour l’agricul-ture familiale et ne tenait pas comptedes populations déjà implantées dansla région. Aux conflits issus de la nou-velle situation foncière se sont ajou-tés ceux résultant de l’implantationspontanée des nombreux migrantsarrivant dans la région à la recherchede nouvelles terres (IAN N I, 1978 ;SCHMINK, WOOD, 1992).

Le boom du bois et de l’or

L’exploitation du bois arrivejuste après la première vague decolonisation du début des années1970 et le nombre de scieries aug-mente rapidement. Il devient, aucours du temps, difficile de distinguerles exploitants forestiers ou madeirei-ros des propriétaires de ranchs oufazendeiros car un grand nombre demadeireiros investissent égalementdans la mise en place de pâturagepour l’élevage bovin. Actuellement,l’interdiction d’exploiter le mogno(acajou ou Swietenia macrophylla) etla raréfaction de bois de forte valeurajoutée entraînent la fermeture d’uncertain nombre de scieries (PIKETTY etal., 2002).

L’exploitation aurifère, impré-vue, commence dans les années 1960par la découverte de gisements,notamment à l’est de Redenção, dansle municipe actuel de Cumaru doNorte, puis plus au nord dans lesannées 1980 (mine de la SerraPelada). L’or est un moteur puissantde migration depuis l’ensemble dupays : ce sont donc des milliers dechercheurs d’or, les garimpeiros, quise ruent vers les nouveaux gise-ments. Au dire des habitants, laphase de l’or marque l’apogée de larégion. L’or reste une ressource épui-sable : la mine de Cumaru do Norteest fermée au début des années 1990,laissant sans emploi un nombreimportant de migrants.

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Photo 3. La situation foncière du Sud duPará, Brésil, en 1968. Land tenure in southern Pará,Brazil, in 1968. Photo J.-F. Tourrand.

Figure 2. Localisation et municipes du Sud du Pará en Amazonie orientale brésilienne.Location and municipalities of southern Pará in Brazil’s eastern Amazon region.

Des invasions successivespour des motifs variés

Dans le Sud du Pará, les inva-sions de terres existent depuis ledébut de la colonisation et sont tou-jours d’actualité (IANNI, 1978 ; SCHMINK,WOOD, 1992 ; TRECCANI, 2001). Cepen-dant, les motifs d’invasion des terrespeuvent être multiples, ils changentau cours du temps et ne sont pas sys-tématiquement liés à la dégradationdes terres ou au processus progressifde concentration foncière3, ni tou-jours révélateurs de véritables« conflits » fonciers. Ainsi, au momentdu boom de l’exploitation forestière,l’invasion de certaines propriétésencore couvertes de forêts pouvaitêtre le fruit d’un accord tacite entreles « sans-terres » et les agents de lafilière bois, afin de se passer de l’ac-cord du propriétaire pour exploiter lebois. Actuellement, les invasions decertains grands ranchs insolvables,rapidement connus de certains lea-ders locaux, permettent à la fois àleurs propriétaires de recevoir uneindemnisation et à ces leaders derevendre rapidement la terre envahiepar lots de 50-100 ha, lots qui serontensuite régularisés par l’Incra (Institutnational de la réforme agraire).

En outre, les demandeurs deterres sont multiples. Les agriculteurscherchent à augmenter la taille deleur exploitation mais aussi à trouverun lot pour leurs enfants, satisfaireles besoins en alimentation de lafamille car les terres cultivées sontsystématiquement remplacées pardes pâturages. Aux agriculteurs,s’ajoutent les citoyens urbains,anciens garimpeiros qui sont restésdans la région, les employés des scie-ries qui commencent à fermer…

Le seul point commun à ces dif-férents types d’acteurs est que l’im-plantation de pâturages aux dépensdes forêts reste l’alternative privilé-giée. L’analyse des déterminants duchoix de l’élevage bovin dans le cadredu projet de recherche Iai4 montreque de nombreux déterminants agro-écologiques, socio-économiques etculturels sont à l’origine de cetengouement des petits propriétairescomme des grands, pour une activitéqui, a priori, présente des taux derentabilité faibles et ne serait pascompatible avec des exploitations depetite taille (VEIGA et al., 2001a).

Un développementpiloté par les

activités d’élevageet du bois depuisles années 1990

Quarante ans après le début dela colonisation officielle, le Sud duPara présente un paysage agricoledont un tiers seulement est couvertde forêt et un taux annuel de défores-tation de l’ordre de 15-20 % des sur-faces encore en forêt. En dehors desparcs et réserves, la région du Sud duPará est devenue une succession depâturages entrecoupés de temps entemps par de petits massifs forestiersdont les bois de valeur ont été exploi-tés (photo 4). Même les zones derelief, dénommées serras, sont deplus en plus déforestées et implan-tées en pâturage (photo 5).

En contrepartie, la population decette région a décuplé ( 40 000 habi-tants en 1960 à plus de 400 000 en1990). Des villes se sont créées, danslesquelles se concentre la majeure par-tie de la population. A l’origine desimples points d’arrivée et d’appui desnouveaux migrants, elles se sont peu-plées, organisées, équipées. Elles sontdevenues les chefs-lieux des nouveauxmunicipes : Redenção, Xinguará, Paúd’Arco, Rio Maria. Scieries, laiteries,abattoirs, ateliers de découpe, mégis-series sont les principales activitésurbaines rencontrées avec les com-merces et les services, eux aussi forte-ment orientés vers les activités d’éle-vage (figure 3). Des routes ont étéconstruites. À l’origine de simplespistes impraticables en saison despluies, elles ont été aménagées et enpartie goudronnées dès le milieu desannées 1980, devenant ainsi prati-cables tout au long de l’année. Il s’agitlà d’une différence notable par rapportà d’autres fronts pionniers commeceux de la Transamazonienne, où lesroutes sont restées précaires et diffici-lement praticables en saison des

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3 On peut même parler, dans une certaine, mesure d’un processus inverse dedéconcentration foncière au vu des nombreux projets d’assentamento (régularisationde l’occupation des terres après invasion) : 19 projets sur les seuls municipes deRedenção, Cumaru do Norte et Santa Maria das Barreiras entre 1995 et 1999.

4 Projet Cattle ranching, land use and deforestation in Brazil, Peru and Ecuador, financépar la National science foundation via l’Institut interaméricain for global change (Nsf-Iai).

Photo 4. Pâturage au pied de la Serra de Redenção, Brésil, 2002. Grazing land at the foot of the Serra de Redenção, Brazil, 2002. Photo J.-F. Tourrand.

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Figure 3. Dynamiques des agro-industries liées à l’élevage bovin dans le Sud du Pará. Le cas du lait. Agro-industrial dynamics associated with cattle farming in southern Pará. Case study on dairy farming. Source : R. Poccard-Chapuis, 2004.

pluies. Le Sud du Pará s’est ainsitrouvé relié au nord à Belém, capitalede l’État du Pará, au sud-est aux Étatsdu Goiás et du Tocantins, au sud à l’État du Mato Grosso.

Contrairement à la situationavant les années 1960, le développe-ment se traduit donc par des impactsécologiques forts – la déforestation –mais aussi par des bénéfices écono-miques plus élevés (développementdes routes, des agro-industries).Aujourd’hui, la Basa (Banco daAmazonia) et l’Ipea (Institut derecherche économique appliquée).choisissent le Sud du Pará pourimplanter un pôle pilote d’élevagebovin viande, illustrant le poids éco-nomique du secteur pour la région.Les dynamiques locales sont fortes,avec une volonté claire de sortir lanouvelle région de l’espace politiqueamazonien, considéré comme rétro-grade et sous-développé, pour l’inté-grer dans un nouvel État brésilien, l’État de Carajás, jugé plus proche desÉtats brésiliens industrialisés du Sud.

L’histoire de la région montreque le développement des fronts pion-niers est marqué par un certainnombre de cycles miniers, comme ceuxdu caucho, de l’or, du bois qui sont depuissants moteurs de migration maisqui, lorsqu’ils prennent fin, se tradui-sent par des récessions – fermeturedes mines d’or, de l’exploitation desseringuas, de certaines scieries.Parallèlement, se développe progressi-vement l’élevage bovin, qui s’imposelentement et qui évite l’effondrementcomplet de la région nouvellementcolonisée, car c’est la seule qui semblese maintenir lorsque les autres entrenten phase de récession. On entend sou-vent dire que ce n’est qu’un nouveaucycle, guidé par la spéculation(SCHNEIDER et al., 2000) qui, à longterme, entraînera inéluctablement ladégradation des terres, de nouveauxconflits sociaux et l’abandon des terresdégradées. Qu’en est-il dans le casspécifique du Sud du Pará ?

L’élevage bovin est-il compatible avecun développementdurable des fronts

pionniers ?

De la dégradation inéluctabledes pâturages…

Du fait de l’ancienneté de lacolonisation de la région, tous lesingrédients sont présents pour quel’on y observe une phase de dégrada-tion rapide des terres et d’abandonprogressif des surfaces déforestées.Dans le cadre d’un projet financé parle Ppg75, une méthode a été mise aupoint afin d’analyser plus précisé-ment cette dynamique, à partir del’analyse d’images satellitaires.

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Photo 5. Mont déforesté dans un pâturage, Redenção, Brésil, 2002. Deforested hillock in a pasture zone, Redenção, Brazil, 2002. Photo J.-F. Tourrand.

5 Uso da terra, dinâmica de paisagem emonitoramento da construção regionalna Amazônia Brasileira.

L’analyse des dynamiques destypes d’utilisation des terres déjà défo-restées a été réalisée entre 1986 et2000 (figure 4). La dégradation depâturage peut s’identifier par le pas-sage pâturage-juquira6. La reprise depâturage peut s’identifier par le mouve-ment inverse juquira-pâturage. Dans larégion de Redenção, la proportion deparcelles fourragères qui passe dans laclasse juquira est pratiquement contre-balancée par la récupération de lajuquira en pâturage. De plus, la dégra-dation de pâturage n’est pas systéma-tique dans la mesure où des parcellesde plus de 15-20 ans ne présentent pasde baisse significative de productivitéfourragère, certaines ayant été préala-blement dégradées, puis récupérées.

Les enquêtes de terrain montrentégalement qu’un pâturage envahi parle recrû ou juquira représente parfoisune phase transitoire nécessaire avantd’être récupéré. Il est fréquent de trou-ver, sur la même exploitation, des par-celles fourragères hautement produc-

tives, supportant une charge de 1,5 à2 bovins/ha, ainsi que d’autres envoie d’envahissement par la juquira ouinexploitées car totalement envahiespar le recrû. Il s’agit, donc, d’une ges-tion diversifiée du pâturage en fonc-tion des moyens, des stratégies et desobjectifs de production de l’exploitant.

En outre, un pâturage envahi parle recrû ne signifie pas forcément que lesol soit dégradé. Il y a dégradation dupeuplement fourrager, mais rarementdu sol. Aussi, la dégradation du pâtu-rage serait moins liée à la fragilité et lapauvreté naturelles des sols qu’auxtechniques et pratiques de gestionétroitement dépendantes des straté-gies de production. Identifier les déter-minants du comportement des acteursvis-à-vis de la gestion de leur pâturageest nécessaire si l’on veut être à mêmed’identifier les politiques efficaces sus-ceptibles de favoriser une gestion àlong terme des pâturages. Il s’agit d’undes objectifs du projet de recherche Iai,mentionné précédemment.

L’hypothèse de la baisse de lafertilité des sols au cours du temps àla base de certains travaux (commeceux de Cattaneo, 2002 ; Schneideret al., 2000) tient sans doute au faitqu’avant l’introduction de la variétéfourragère braquiarão (Brachiaria bri-zantha), vers la fin de la décennie1980, les variétés alors cultivéesétaient plus sensibles à l’envahisse-ment7 et aux ravageurs8. La situationa complètement changé avec l’intro-duction de cette variété qui dominemaintenant l’ensemble des pâturagesamazoniens (Veiga, Tourrand, 2002).

Enfin, un exploitant n’abandonnepas son ancienne terre, qu’elle soitdégradée ou non. Soit il la vend, pourfinancer l’acquisition de sa nouvelleterre, soit il la garde comme un place-ment, qui sera valorisé ultérieurement.

De l’insertion de l’agriculture familialedans les filières bovines

L’élevage bovin ne se limite plusaux grands propriétaires fonciers, ilest devenu une composante majeurede l’agriculture familiale (Ludovinoet al., 1998 ; Veiga et al., 1996 ;Ferreira, 2001 ; Ludovino, 2002).L’insertion de l’agriculture familialedans les filières bovines passe par laproduction de veaux et de lait,lorsque des laiteries s’installent dansles villes proches (Poccard-Chapuiset al., 2001a et b ; Veiga et al., 2001b).Il y a dix ans, le développement de laproduction laitière sur un front pion-nier amazonien était impensable.C’était sans tenir compte des avan-tages comparatifs des fronts pion-niers : coût de production très bas9,absence d’alternative agricole àgrande échelle et dynamisme desacteurs locaux. Aujourd’hui, la pro-duction laitière est en passe de deve-nir la principale activité agricole del’agriculture familiale de cette région.

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6 Jachère après pâturage.7 Cas du colonião (Panicum maximum) en raisonde son port érigé en touffes.

8 Cas du quicuio-da-Amazônia (Brachiariahumidicola) et de la braquiarinha (Brachiariadecumbens) sensibles à la cigarrinha (Deosincompleta).

9 De l’ordre de 0,02-0,03 US$ par litre de lait(Machado, 2000), soit la moitié du coût dans lesÉtats brésiliens des régions du Sudeste et du Sul.

Figure 4. Dynamique d’utilisation des terres déjà déforestées dans la région de Redenção,entre 1992 et 1999. The dynamics of land use in deforested zones, Redenção region, 1992 - 1999.Source : M. Thâles, Mpeg, Belém, Pará.

Elle est d’autant plus importante quel’absence de conditions édapho-climatiques propices aux culturespérennes (cacao, café, palmier àhuile...) rend difficiles les autres alter-natives végétales, comme c’est le casdans le Rondônia, l’Acre et sur laTransamazonienne (Ferreira, 2001).

Les laiteries artisanales pourl’approvisionnement local ont pro-gressivement laissé la place à depetites agro-industries visant lesmarchés régionaux et nationaux.Pour réduire l’atomisation de la pro-duction et augmenter le volume delait par unité de production, ces nou-velles laiteries forment les paysans,diffusent des itinéraires techniques etorganisent la collecte avec des tanksréfrigérés aux endroits stratégiques.Depuis 4-5 ans, les grands groupeslaitiers nationaux et internationauxs’implantent en Amazonie par lerachat de ces laiteries et de leursréseaux d’approvisionnement. Au furet à mesure de l’intégration desfilières locales aux filières nationaleset internationales, les exigences dequalité peuvent remettre en causel’insertion de l’agriculture familialedans ces filières, comme cela a déjàeu lieu dans d’autres régions. La pré-occupation principale est d’identifierles politiques qui peuvent garantircette insertion à long terme. Ce n’estpas propre au contexte amazonien nià l’élevage bovin, mais bien à la placede l’agriculture familiale dans desfilières de plus en plus compétitives.

D’autre part, les gains sont rapi-dement limités par la taille de l’ex-ploitation lorsqu’ils dépendent uni-quement de l’élevage extensif. Unequestion fondamentale pour lesfronts pionniers est de rechercher desmodes d’intensification ou des alter-natives qui soient compatibles avecles conditions locales et qui permet-tent d’augmenter la création devaleur ajoutée pour la petite agricul-ture. C’est actuellement l’un desobjectifs du projet de l’Embrapa surl’implantation de systèmes agro-sylvopastoraux en Amazonie.

Conclusion

L’élevage bovin est une compo-sante incontournable du développe-ment régional dans le Sud du Pará.Ses moteurs sont puissants car fon-dés sur les avantages comparatifs dela région. Plusieurs indicateurs mon-trent qu’il semble résister au phéno-mène de « boom and bust » quiaffecte un grand nombre d’activitéssur les fronts pionniers.

Toutes les externalités négativesde l’élevage ne sont plus forcémentd’actualité 40 ans après la colonisa-tion. C’est la cas notamment de l’aban-don des terres par épuisement dessols, les techniques actuelles de récu-pération de pâturage permettant uneplus grande souplesse de gestion dessystèmes fourragers. C’est le cas éga-lement de l’élevage bovin spécifiquede la grande production. Avec le lait etla production de veaux, l’agriculturefamiliale a su exploiter une niche éco-nomique qui bénéficie des avantagescomparatifs du contexte amazonien.Que dire de la faible création d’emploisde l’élevage quand les activités indus-trielles de la région, en dehors de lafilière bois, sont dans les secteurs de laviande, du lait et du traitement despeaux ?

En revanche, le développementde l’élevage bovin entraîne la conver-sion des ressources forestières enpâturage, avec toutes les externalitésenvironnementales négatives liées àla déforestation. Comment diminuerces externalités ? C’est une questionde recherche importante pour l’en-semble de l’Arc de déforestation.

En outre, si l’élevage bovin estun moteur du développement agro-industriel, les effets d’entraînementen amont et en aval ne seront pas for-cément suffisamment forts pourentraîner un développement qui nedépende plus de l’ouverture de nou-veaux massifs forestiers. Quels sontles freins à l’émergence d’autres acti-vités ?

Enfin, l’agriculture familiale s’in-sère dans les filières bovines mais ilexiste un risque que, sans interven-tion adaptée, elle soit rejetée de cesecteur. Cela est déjà arrivé et arriveencore dans les autres régions duBrésil, en particulier dans le domainede la production laitière. Quelles sontles alternatives qui peuvent garantirun maintien à long terme de cesexploitations familiales ?

Des réponses à ces différentesquestions sont nécessaires pour par-venir à sous-estimer les divergencesentre la croissance économique,l’équité sociale et le maintien du cou-vert forestier dans le Sud du Pará.

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SINOPSEPECUÁRIA BOVINA,DESMATAMENTO EDESENVOLVIMENTO REGIONAL:O CASO DO SUL DO PARÁ,AMAZÔNIA BRASILEIRA.

J.-F. TOURRAND, M.-G. PIKETTY, J. R. D. OLIVEIRA, M. C. THALES, A. M. ALVES, J. B. VEIGA, R. POCCARD-CHAPUIS

Quando o assunto sobre acolonização da Amazônia é invocado,escutamos falar mais sobre o desma-tamento, a degradação inelutável dossolos, a destruição da biodiversidade,dos conflitos e dos latifúndios do quedo desenvolvimento regional propria-mente dito. Segundo vários estudos, odesenvolvimento regional é difícil, jáque as terras não conseguem abrigaruma agricultura durável. Ou seja, umavez os solos degradados e os lucroscom exploração mineral dos recursosnaturais esgotados, as regiões coloni-zadas são rapidamente abandonadase trocadas por novos espaços flores-tais. Outro elemento que vem reforçaresta opinião é o fato destas superfí-cies desmatadas serem convertidas,em grande parte, em pasto destinadoà criação de bovinos. Esta atividade,vista como sendo pouco rentável,pouco criadora de riquezas e incompa-tível com a permanência de pequenasunidades de produção, é acusada deser responsável pelo mal que sofre aregião. Entretanto, diante da imen-sidão e da diversidade do contextoamazônico, nos parece lógico que estatendência não deva ser generalizadade modo sistemático. Tendo comoreferencial de estudo, o caso do sul doPará, os objetivos deste artigo são:descrever de modo detalhado a traje-tória de desenvolvimento desta regiãomostrando sua complexidade, e verifi-car a pertinência de um certo númerode relações de causa e efeito entre apecuária bovina, a não durabilidadedas ações de desenvolvimento regio-nal e o desmatamento da Amazônia.

De região florestal a um polo pilotode criação de bovinos.Em 40 anos, o sul do Pará passou deregião florestal tendo por principalatividade econômica a extração e aexploração do látex, a uma regiãocoberta, em sua metade, por pastosdedicados a criação de bovinos decorte. Durante este tempo, cidadesforam construídas e infra-estruturasviárias foram consideravelmente mel-horadas. A população que ali se mul-tiplicou por dez vive graças ao tra-balho fornecido pelas principaisatividades econômicas da região – amadeira e a criação de bovinos.Nestes últimos quarenta anos, dife-rentes ciclos econômicos viram o dianesta região: o da borracha, do ouroe da madeira. Estes ciclos conhece-ram um período de expansão bas-tante rápido seguido por uma fase derecessão. Já a criação de bovinosimplantou-se progressivamente,como primeira atividade agrícola. Ascriações de bovinos são encontradasem grandes latifúndios, bem comoem pequenas propriedades de agri-cultores de todas as origens. Acriação de bovinos é também respon-sável pela implantação de agroindús-trias nesta região: usinas de leite,abatedouros e curtumes. No planosocial, esta região é marcada por con-flitos fundiários e por invasões detodo tipo, ainda numerosos hoje emdia. Entretanto, os fatores determi-nantes destes conflitos não estãounicamente ligados ao processo deconcentração fundiária ou de degra-dação das terras aos quais são fre-qüentemente atribuídas as causas.

Um desenvolvimento regionalsujeito ao fracasso em longo prazo?Mesmo existindo casos de degra-dação de pastos na região, podemosobservar um movimento inverso sig-nificativo, de recuperação das terrasdegradadas. Em outras palavras,aquilo que é visto como degradaçãointegra-se, às vezes, em estratégiasespecíficas de gestão, ligadas àcriação extensiva de bovinos. Destaforma, antes de tirar conclusões pes-simistas quanto ao futuro da região,é necessário conhecer os elementosque constituem as estratégias decriação de cada ator. Sem esquecer,que cada um deles possui trajetóriase experiências diferentes. O fato dacriação de bovinos ser, ao mesmotempo, o elemento fundamental dodesenvolvimento agrícola da região eo principal motor de seu desmata-mento, conduz à busca de alternati-vas menos prejudiciais ao meioambiente e que possam ser integra-das aos sistemas de criação.A produção de vitelos garante ainserção da agricultura familiar dentrodo setor bovino. Esta inserção, semprecrescente dentro dos mercados nacio-nais, pode ser freada devido à exigên-cias quanto à qualidade do gado etambém pela existência das econo-mias de escala, conforme o ocorridoem outras regiões. Mas isto, não éespecífico nem à Amazônia nem aosetor bovino. Como fazer então, paragarantir esta inserção em longo prazo? De modo geral, as diferentes fases dodesenvolvimento do sul do Pará,mostram que sem intervençãoexterna fica difícil satisfazer, simulta-neamente, os conjuntos de critériosecológicos, sociais e econômicos quevisam um desenvolvimento durávelda região. Isto acontece particular-mente, devido ao fato de existir umcerto número de divergências entrecrescimento econômico regional,igualdade social e conservação dasflorestas. A fim de minimizar estasdivergências, é necessário definir otipo de intervenção mais eficaz eadaptada a cada contexto.

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