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Le rôle des institutions sous régionales dans la lutte contre les changements climatique : le cas de la Commission des forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC)

Résumé

Institution sous régionale de référence en matière d’harmonisation et de suivi des politiques forestières et environnementales en Afrique centrale, la COMIFAC a toujours su s’imposer de manière significative dans la lutte contre le changement climatique. Pour parvenir à bout de sa mission, elle oriente la politique des Etats membres en les stimulant à ratifier les conventions de lutte contre le changement climatique et à adopter des mesures internes y relatives. Ses actions sont visibles au sein des Etats membres et on peut citer le processus REDD. Un nouveau Plan de convergence a été adopté afin de renforcer les actions de l’Organisation en faveur de la lutte contre le changement climatique. Ces actions sont désormais érigées en axe prioritaire, ce qui va inciter les Etats membres à s’engager vers de nouveaux horizons comme l’Accord de Paris et les Objectifs de développement durable. Malgré des avancées visibles, des défis restent encore à relever, notamment en ce qui concerne le suivi des actions au sein des Etats membres, l’absence d’un mécanisme de sanction et le financement de ses activités.

ABSTRACT

The Role of Sub Regional Institutions in the Fight against Climate Change: The Case of the Central African Forests Commission (COMIFAC)

As a reference institution in charge of harmonizing and monitoring forest and environmental policies in Central Africa, the COMIFAC institution is significantly established in the fight against climate change. To achieve its mission, it gives directives to the policy of the States Parties by encouraging them to ratify important treaties on climate change and to develop related national measures and policies. These actions that include the REDD process and other climate change actions are operational inside Central Africa. To reinforce these actions, a new Convergence Plan was adopted to highlight the fight against climate change in the strategy of the Organization. Climate change actions are now established as a priority, and the strategy will encourage Member States to commit themselves towards new international agreements and strategies such as the Paris Agreement and the Sustainable Development Goals. Despite visible progress, there are challenges to overcome, particularly in the domain of monitoring actions inside Member Countries, sanction and financial mechanisms.

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INTRODUCTION

Depuis la Déclaration de Yaoundé1 au cours de laquelle les chefs d’Etat de l’Afrique Centrale, se sont réunis à l’effet d’examiner les problèmes liés à la conservation et à l’utilisation durable des écosystèmes forestiers d’Afrique centrale, le changement climatique a constitué et continue encore d’être une préoccupation majeure des Etats de l’Afrique Centrale. C’est une des justifications de la création de la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC)2 qui est une organisation chargée de l’orientation, de l’harmonisation et du suivi des politiques forestières et environnementales en Afrique Centrale3. En effet, le Traité relatif à la conservation et à la gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique Centrale et instituant la COMIFAC fait référence à deux textes internationaux majeurs de lutte contre les changements climatiques : la convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique4 et la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification5. Ces deux conventions, comme la plupart des textes internationaux sur l’environnement6, soulignent l’importance de la coopération dans la lutte contre le changement climatique. A ce titre, la COMIFAC apparaît comme une institution sous-régionale d’intégration des politiques forestières et environnementales.7

Dans la mise en œuvre de sa politique d’harmonisation, la COMIFAC met en place un Plan de convergence8 qui présente les actions prioritaires à mettre en œuvre pour l’harmonisation des politiques et stratégies. Ce Plan de convergence est révisé tous les dix ans. Même si le Plan de convergence de la première génération9, ne s’est souciée du changement climatique que de manière parcellaire, le Plan de convergence de la deuxième génération, qui s’étend de 2015 à 2025 a dédié tout un axe prioritaire sur la lutte contre les effets du changement climatique et la désertification10. A travers ce nouveau Plan de convergence qui place les actions de lutte contre le changement climatique au premier plan, ainsi que les différentes actions mises en 1 Déclaration de Yaoundé du 17 mars 1999 entre les chefs d’Etats de l’Afrique Centrale.2 La COMIFAC regroupe 10 pays : Burundi, Cameroun, République Centrafricaine (RCA), Congo, République Démocratique du Congo (RDC), Gabon, Guinée Equatoriale, Rwanda, Sao Tome et Principe, Tchad.3 Article 5 alinéa 2 du Traité relatif à la conservation et à la gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique Centrale et instituant la Commission des forêts d’Afrique Centrale.4 En effet les parties à Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, dans le préambule, sont conscientes du rôle et de l’importance des puits et réservoirs de gaz à effet de serre dans les écosystèmes terrestres et marins.5 La Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification, en particulier en Afrique, adoptée à Paris le 17 juin 1994, demandent aux pays de se consulter et de coopérer pour élaborer des programmes d’action sous-régionaux ou régionaux en vue d’harmoniser, de compléter et de rendre plus efficaces les programmes nationaux (voir article 11).6 En effet le Traité instituant la COMIFAC, intègre dans son préambule la convention sur la diversité biologique, la Déclaration de Rio de 1972 sur tous les types de forêts et l’Agenda 21, qui prônent aussi l’importance de la coopération en matière environnementale.7 On peut la qualifier ainsi en référence à d’autres organisations sous-régionales comme l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) qui est qualifiée d’institution d’intégration juridique, ou de la Communauté Economique et monétaire de l’Afrique Centrale qui est qualifié d’institution d’intégration économique et monétaire. Voir à ce propos, Boris MARTOR et Sébastien THOUVENOT, L’Uniformisation du droit des affaires en Afrique par l’OHADA, Pratiques et actualités du droit OHADA, Journées d’études Juriscope Poitiers, P.105. Ohadata D-12-63.8 Le Plan de convergence est régulièrement révisé en fonction des priorités de la sous-région.9 Le premier Plan de convergence a été adopté pour s’étendre de la période allant de 2005 à 2015.10 Axe prioritaire d’intervention 4.

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œuvre par la COMIFAC dans le domaine, plusieurs interrogations s’imposent : quel est l’apport de la COMIFAC dans la lutte contre le changement climatique ? L’institution d’intégration des politiques forestières et environnementales qu’est la COMIFAC permet-elle aux Etats membres et à la sous-région de lutter efficacement contre le phénomène de changement climatique ? Pour répondre à ces préoccupations, il importe de se pencher sur les mesures d’harmonisation en matière de changement climatique, ainsi que sur les réalisations et l’efficacité de ces mesures.

I- La COMIFAC : une institution d’harmonisation des politiques et législations des pays membres dans la lutte contre les changements climatiques

A travers son Traité et son Plan de convergence, la COMIFAC a depuis sa création milité fortement en faveur des initiatives de lutte contre le changement climatique. Pour le faire, elle opte pour l’harmonisation des politiques et législations avec des moyens de mise en œuvre déterminés.

I.1. L’harmonisation au niveau international et régional

Il s’agit de l’harmonisation par la ratification des traités et accords internationaux et de l’harmonisation au niveau de la sous-région.

I.1.1. L’harmonisation par la ratification des accords internationaux sur les changements climatiques.

Depuis la germination11 de la COMIFAC, la lutte contre le changement climatique a toujours été au cœur de sa préoccupation. C’est alors qu’à la Déclaration de Yaoundé, les Etats se sont persuadés du rôle important de la coopération sous régionale et de la lutte contre la désertification12. Pour y parvenir, les Chefs d’Etats se sont engagés à « adopter des politiques nationales harmonisées en matière de forêts » et accélérer la mise en place des instruments d’aménagements et développer des ressources humaines pour leur mise en œuvre13. L’harmonisation est orientée par l’harmonisation des politiques et législations en matière forestières avec les conventions internationales.

Il est important de préciser que, malgré le fait que la lutte contre les changements climatiques soit présente dans la germination de la COMIFAC, ce n’est que récemment qu’elle a intégré ce volet dans la pratique. Ainsi, elle accompagne depuis plus de six ans le groupe des négociateurs climat et facilite le décryptage des informations techniques avant, pendant et après la COP. Elle constitue un cadre approprié de dialogue et de concertation pour renforcer les capacités et pour faciliter l’élaboration des positions communes pendant les négociations.14

11 Voir Déclaration de Yaoundé12 Idem. 13 Article 1er alinéa 3 du traité de la COMIFAC.14 Cléto Ndikumagenge et Imelda Ndihokubwayo, Des cadres de dialogue pour la reconnaissance des droits des communautés locales : Une option pour le nouvel accord sur le climat ? in La gestion inclusive des forêts d’Afrique centrale : Passer de la participation au partage des pouvoirs. FAO-CIFOR : Libreville-Bogor. 2016.

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L’harmonisation par la ratification des traités et accords internationaux est une des exigences des plans de convergence. Dans le Plan de convergence de 2005, l’harmonisation devait permettre aux Etats membres de s’arrimer aux instruments internationaux d’une part et aux instruments définis par la COMIFAC d’autre part. En ce qui concerne l’arrimage des Etats membres aux instruments internationaux de lutte contre le changement climatique, le Plan de convergence demande aux Etats membres d’une part de signer et de ratifier les conventions internationales et d’autre part de mettre en œuvre les conventions et accords ratifiés15.Les conventions internationales relatives aux changements climatiques que les Etats membres sont tenues de signer et de ratifier sont entre autres : le Traité de la COMIFAC, les accords la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, le Protocole de Kyoto à la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.

En outre le Plan de convergence (première édition) consacre comme activité de convergence la mise en œuvre des conventions ratifiées et les accords signés. Au niveau national, la COMIFAC recommande aux Etats parties d’élaborer et de mettre en œuvre les programmes nationaux de gestion de l’environnement entre autres. Au niveau interne, plusieurs actions ont été initiées, même si elles restent limitées. Par exemple, en 2009 au Cameroun, un décret du président de République créait l’Observatoire national des changements climatiques (ONACC) qui, malheureusement, n’est pas encore opérationnel16.

Le Plan fait également référence aux puits de carbone, au Protocole de Kyoto. Dans cette optique, au niveau sous régional, la COMIFAC a envisagé de développer des mécanismes novateurs de financement17.

Contrairement au Plan de convergence de la première génération dont les actions en faveur de la lutte contre les changements climatiques sont moins prononcées, le Plan de convergence de la deuxième génération (2015-2025) innove en érigeant la lutte contre les changements climatiques en axe prioritaire afin de s’arrimer aux préoccupations mondiales en la matière.

Au rang des préoccupations mondiales relatives aux changements climatiques se trouvent l’accord de Paris et les objectifs de développement durables qui ont eu l’assentiment de la COMIFAC et de ses Etats membres. En date du 10 octobre, deux Etats membres de la COMIFAC ont déjà ratifiés l’Accord, à savoir le Cameroun (29 juillet 2016) et le Rwanda (6 octobre 2016). On comprend dès lors que la mise en œuvre du Plan de convergence de la deuxième génération va porter sur la ratification de l’Accord de Paris et la réalisation des objectifs de développement durable par les Etats membres ainsi que leur mise en œuvre.

I.1.2. L’harmonisation par l’arrimage des politiques et législations des Etats membres aux exigences de la COMIFAC

Les défis de la COMIFAC ne s’arrêtent pas à la ratification des traités et accords internationaux. La COMIFAC se présente comme un véritable cadre d’arrimage des législations et politiques internes au Plan de Convergence de la COMIFAC. Et à ce titre le 15 Voir le Plan de convergence 2005-2015.16 Voir Bérenger TCHATCHOU et al, Changement climatique dans le Bassin du Congo, CIFOR. 2015.17 Voir Axe stratégique 9 : développement des mécanismes de financement

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Plan de convergence de la deuxième génération se veut une illustration en matière de lutte contre les changements climatiques.

Le Plan de convergence de la deuxième génération se veut plus ambitieux. La lutte contre le changement climatique est perceptible dans son but. C’est ainsi que dans une logique de transition vers une économie verte, les ressources forestières et fauniques des pays d’Afrique centrale sont conservées efficacement et gérées durablement de manière concertée « pour l’équilibre écologique de la planète »18.

L’axe prioritaire d’intervention 4 est intitulé « Lutte contre les effets du changement climatique et la désertification ». Pour faire face aux défis de changement climatique, la COMIFAC s’engage à réagir de façon conséquente et durable à travers les thématiques prioritaires suivantes : régénération et reboisement forestier ; développement et mise en œuvre des stratégies nationales d’adaptation aux changements climatiques ; développement et mise en œuvre des mesures d’atténuation aux changements climatiques ; lutte contre la dégradation des terres et la désertification.

L’objectif stratégique relatif à la lutte contre les effets néfastes des changements climatiques a comme indicateur d’impact, « D’ici 2025, le taux de déforestation et de dégradation des forêts est stabilisé dans tous les pays d’Afrique centrale ». Cet indicateur d’impact se dédouble en deux objectifs opérationnels : développer et mettre en œuvre les stratégies nationales d’adaptation aux changements climatiques et développer et mettre en œuvre des mesures d’atténuation des effets des changements climatiques.

Pour développer et mettre en œuvre les stratégies nationales d’adaptation aux changements climatiques, le résultat attendu consiste à accroître la capacité des Etats à faire face aux effets néfastes des changements climatiques.

Pour développer et mettre en œuvre des mesures d’atténuation des effets des changements climatiques, les résultats attendus sont les suivants : les systèmes nationaux de surveillance et de suivi du couvert forestier sont mis en place et opérationnels ; les stratégies d’atténuation (REDD+19, Plan climat, NAMA20) sont élaborées et mises en œuvre ; les émissions de gaz à effet de serre issus de la déforestation et la dégradation sont maîtrisées.

On en déduit que pour atteindre ces résultats, la COMIFAC, comme par le passé devra mettre des actions en faveur de la ratification de l’Accord de Paris par les Etats membres. Il revient en termes de défis de faire le décryptage des décisions prises dans le cadre de cet Accord et d’élaborer un plan d’actions sous-régional pour la mise en œuvre dudit Accord, ceci en veillant à la cohérence avec les orientations des Contributions Prévues Déterminées au niveau National (CPDN)21. En étroite collaboration avec la COMIFAC et la CEFDHAC22 et ses réseaux, les pays ont élaboré une feuille de route pour suivre de près la préparation, la mise en œuvre et le suivi du nouvel accord dans la sous-région.

18 C’est en ces termes qu’on peut paraphraser le but du Plan de convergence de la deuxième génération.19 Réduction des émissions dues à la déforestation et la dégradation des forêts.20 Mesures d’atténuation appropriées au niveau national.21 Rapport annuel 2015, COMIFAC 2016.22 Conférence sur les écosystèmes de forêts denses et humides d’Afrique Centrale.

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Les réseaux de la CEFDHAC contribuent fortement aux dialogues organisés par la CEEAC23. Il s’agit notamment du RIFFEAC (Réseau des institutions de formation forestière et environnementale d’Afrique centrale), du REPALEAC (Réseau des populations autochtones d’Afrique centrale), du REFADD (Réseau des femmes africaines pour le développement durable), du REJEAC (Réseau des jeunes d’Afrique centrale) et du REPAR (Réseau des parlementaires d’Afrique centrale).

Avant la COP21, il s’est agi de définir, d’adopter et de vulgariser une position commune à l’Afrique centrale assortie d’un plan de communication. Pendant la COP21, le travail a consisté à faire des analyses et informer régulièrement les ministres sur l’évolution des négociations, à arrêter les points d’achoppement et une stratégie politique. Après la COP21, il s’agit de restituer les résultats, de définir et d’adopter une stratégie de suivi de ces résultats assortie d’un plan opérationnel développé de façon participative.24

Malgré la grande ambition du Plan de Convergence de la deuxième génération dans la lutte contre le changement climatique, on se demande si la COMIFAC aura les moyens de sa politique ; étant entendu que par le passé, ses objectifs n’ont pas toujours été atteints faute de ressources et de moyens.

I.2. Les moyens d’intervention

Les moyens d’intervention de la COMIFAC en matière de climat sont deux ordres : les organes prévus par le Traité et d’autres moyens comme le Groupe de travail Climat.

En ce qui concerne les moyens mis en place par le Traité, on a le sommet des chefs d’Etat et de Gouvernement, le Conseil des Ministres et le Secrétariat exécutif.

Le Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement a pour rôle d’arrêter les orientations de la COMIFAC pour la mise en œuvre des engagements du Traité25.

Le Conseil des Ministres26 est composé des Ministres en charge des forêts et/ou de l’environnement de chaque Etat membre de la COMIFAC. Le Conseil des Ministres est l’organe de décision, de coordination et de contrôle de la mise en œuvre des politiques en matière de gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique Centrale. A ce titre il est chargé entre autres de veiller à l’exécution des orientations prises par le Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement, d’orienter et d’évaluer l’action du Secrétariat exécutif. Le Conseil des Ministres se tient en session ordinaires tous les deux ans.

Le troisième organe du Traité instituant la COMIFAC est le Secrétariat exécutif, qui est l’organe d’exécution de la COMIFAC. Il a pour mission d’assurer la coordination de la mise en œuvre des activités de la COMIFAC, et d’appliquer les décisions du Conseil des Ministres.

23 Communauté économique des Etats de l’Afrique Centrale.24 Cléto Ndikumagenge et Imelda Ndihokubwayo, Des cadres de dialogue pour la reconnaissance des droits des communautés locales : Une option pour le nouvel accord sur le climat ? in La gestion inclusive des forêts d’Afrique centrale : Passer de la participation au partage des pouvoirs. FAO-CIFOR : Libreville-Bogor. 2016.25 Les engagements du Traité sont décrits à l’article 1 du Traité.26 Pour les attributions du Conseil des Ministres, voir les articles 9 à 12 du Traité de la COMIFAC.

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Un autre moyen d’intervention de la COMIFAC dans le domaine du climat, est le Groupe de Travail climat. Il exerce plusieurs actions dont la contribution aux négociations sur le changement climatique. C’est le cas par exemple en 2011, en prélude à la Conférence extraordinaire du Conseil des Ministres de la COMIFAC27, une réunion des points focaux, membres du Groupe de travail Climat a été organisé et a permis d’élaborer le projet de déclaration sur la position commune des pays de l’Afrique Centrale sur la préparation des échéances de négociations futures post Cancun en vue d’un nouveau régime climat post-Kyoto 2012. Ladite déclaration a été adoptée par le Conseil des Ministres.

La COMIFAC souffre cependant d’une carence de ressources humaines et financières28. Elle fait régulièrement recours à l’expertise internationale29, ce qui n’est pas de nature à se forger une compétence propre dans le domaine du changement climatique. En plus, il faut préciser que certains partenaires ne passent pas nécessairement par la COMIFAC pour exercer les actions relatives au changement climatique dans l’espace COMIFAC30.

II- La COMIFAC : une institution d’harmonisation avec des réalisations en matière de changements climatiques visibles malgré ses faiblesses

Les actions de la COMIFAC sont visibles, malgré quelques insuffisances.

II.1. Les avancées de la COMIFAC dans le domaine du changement climatique

Il convient de distinguer les avancées législatives des avancées dans les actions.

II.1.1. Les avancées en matière législative

Il faut distinguer les avancées en ce qui concerne les ratifications et signatures des traités et accords internationaux des avancées internes.

Sur le plan international, les deux conventions en matière climatique ont eu l’assentiment de tous les pays membres de la COMIFAC. Tous ces pays sont désormais membres de la Convention cadre des nations Unies sur les changements climatiques et du Protocole de Kyoto à la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques31.

Sur le plan interne, des actions ont été prises çà et là pour intégrer les recommandations internationales relatives aux changements climatiques. En 2014 par exemple, le Cameroun, le Congo et la République Centrafricaine avaient déjà adopté leur Plan d’action nationale d’adaptation au changement climatique, et celui de la Guinée Equatoriale était en préparation.

Tous les pays de la sous-région sont déjà dotés des lois forestières, et certains pays sont entrain de réviser les leurs pour s’arrimer aux nouvelles préoccupations mondiales, à l’instar

27 Tenue du 16 au 18 mai 2011.28 Voir infra.29 Voir Bérenger TCHATCHOU et al, Changement climatique dans le Bassin du Congo, CIFOR. 2015.30 Infra.31 Adopté le 11 décembre 1997.

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du Cameroun. Encore faut-il noter que l’adoption des lois forestières dans ces Etats est nécessairement antérieure à la création de la COMIFAC32.

Il convient de relever toutefois que ces avancées en matière législative au sein des pays membres, ne saurait être une victoire de la COMIFAC. Car bien avant sa création, les pays membres avaient déjà pris des engagements dans ce sens33 : ces pays avaient non seulement ratifié les conventions, mais ils avaient commencé la mise en œuvre de ces conventions.

II.1.2. Les avancées dans les actions

Les actions de la COMIFAC dans le domaine du changement climatique se sont manifestées, soit à travers ses programmes et projets, soit à travers les efforts des pays membres, soit à travers l’implication de la COMIFAC dans les négociations internationales.

Dans le domaine des programmes et projets, la COMIFAC a mis sur pied un certain nombre de programmes et de projets, parmi lesquels : le Programme d’appui à la conservation des écosystèmes du Bassin du Congo – PACEBCo34 ; le Projet régional de renforcement des capacités REDD35 dont l’objectif est de renforcer les capacités des acteurs au niveau régional en matière de REDD+ ; le Projet « Centre d’évaluation des politiques REDD+ (REDD-PAC) dans le Bassin du Congo », dont l’objectif est d’identifier des politiques REDD+ efficaces et socialement justes qui peuvent sauvegarder et mettre en valeur les écosystèmes et aider à atteindre les objectifs de la Convention sur la diversité biologique.

Dans le cadre de la mise en œuvre de la composante 2, en son volet 2, portant sur la gestion durable de la biodiversité et adaptation aux changements climatiques du  Programme d’Appui à la Conservation des Ecosystèmes  du Bassin du Congo (PACEBCo),  le Réseau des Organisations du Sud-Est (ROSE) a organisé du 13 au 19 Juillet  2014, à Yokadouma dans la région de l’Est Cameroun, une session de formation  sur le suivi socio-écologique  et inventaire. En outre, le projet Contribution pour l’Atténuation et l’Adaptation des Populations à la variabilité et au Changement climatique (CAPV-2C), du ROSE vise l’amélioration des conditions de vie des populations et la lutte contre le réchauffement climatique dans la Région de l’Est Cameroun.  Ce projet fait suite au choix porté sur le ROSE  après un appel à proposition pour la mise en œuvre des projets pilotes dans l’Antenne du Tri national de la Sangha (TNS)36. Ce projet cadre bien avec les attentes visées par le  (PACEBCo) pour la mise

32 Par exemple, la loi forestière du Cameroun a été adopté en 1994.33 Par exemple, les Etats membres avaient déjà ratifiés la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique avant la création de la COMIFAC : le Burundi (1997), le Cameroun (1994), le Tchad (1994), le Congo (1996), la RDC (1995), le Gabon (1998), Guinée Equatoriale (2000), Rwanda (1998), Sao Tome et principe (1999), la RCA (1995).34 Ce programme comporte quatre composantes qui sont : (i) l’appui institutionnel à la COMIFAC et ses partenaires ; (ii) le développement rural communautaire ; (iii) la conservation et la gestion de la biodiversité ainsi que l’adaptation au changement climatique et (iv) la gestion du programme. Pour plus de détails, voir http://www.pacebco-ceeac.org 35 Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation des forêts.36 Le projet CAPV-2C s’étend en effet sur les communautés de Djanko et Mpemog, dans lesquelles se regroupent sept villages. Il s’agit de : Ngolla 35, Nampella, Menziong, Nkameko’o, Bompello, Massiembo et Mang.

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en œuvre des composantes 2 et 3 pour assurer l’adaptation aux changements climatiques et la promotion durable du bien-être des populations.37

Le programme PACEBco a certes produit des résultats dans sa composante sur le changement climatique. Mais à l’échelle de la COMIFAC38, ces résultats sont bien maigres et ont bénéficiés seulement au tiers des Etats membres de la COMIFAC. La durée du projet (cinq ans) ainsi que le financement39 ne pouvaient pas produire de résultats miracles.

La COMIFAC s’est montré très actif dans le processus REDD. A cet effet, les pays de l’espace COMIFAC ont préparé et soumis au Secrétariat de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, quatre soumissions sur la problématique du REDD respectivement en : avril 2006, février 2007, août 2007 et mars 2008.

Le mécanisme REDD est une réalité dans les pays de la COMIFAC. C’est le cas par exemple avec le « Projet pilote géographiquement intégré REDD+ d’Isangi en RDC ». Ce projet est innovant du fait qu’il aborde les aspects relatifs à l’aménagement du territoire et à la trajectoire de développement futur dans le contexte de la REDD+ au niveau du territoire de la RDC.

Au niveau national, plusieurs actions ont été entreprises pour réduire la déforestation et lutter contre le changement climatique. La République Démocratique du Congo a par exemple bénéficié du soutien de l’UN-REDD pour la réalisation et la mise en œuvre de son programme national REDD+.40

Dans le cadre spécifique du groupe de travail désertification, la COMIFAC a réalisé avec l’appui des partenaires, diverses études visant à tenir compte des considérations liées à l’adaptation aux changements climatiques dans la mise en œuvre des conventions internationales. Ainsi, l’étude sur la « gestion des terres et les options de financements liés aux changements climatiques en Afrique centrale » a permis de cibler les activités d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques en Afrique centrale.41

L’Afrique Centrale s’est engagée depuis 2006 dans les négociations internationales sur le climat pour la prise en compte du rôle des forêts tropicales dans la lutte contre les changements climatiques. Pour cela, un groupe de travail régional a été mis en place et différentes concertations ont été menées tant au niveau régional qu’international pour promouvoir les positions communes de la sous-région sur un certain nombre de préoccupations telles que les approches politiques, les incitations financières, etc.42. La COMIFAC accompagne depuis plus de six ans le groupe des négociateurs climat et facilite le décryptage des informations techniques avant, pendant et après la COP. Elle constitue un

37 http://www.pacebco-ceeac.org/index.php?option=com_content&view=article&id=235:2014-09-09-10-54-32&catid=41:changements-climatiques&Itemid=16338 Sur 10 pays membres de la COMIFAC, les effets palpables du PACEBco ne sont visibles que dans trois Etats : Cameroun, Congo, République Centrafricaine39 Le programme est financé par la Banque Africaine de développement (BAD).40 Voir Bérenger TCHATCHOU et al, Changement climatique dans le Bassin du Congo, CIFOR. 2015.41 Dénis Jean SONWA et Johnson NDI NKEM, Les forêts du bassin du Congo et l’adaptation aux changements climatiques. Editions Karthala, 2013.42 Voir Contribution de la Commission des Forêts d’Afrique Centrale à la préparation de la huitième session du FNUF, http://www.un.org/esa/forests/pdf/national_reports/unff8/COMIFAC.pdf.

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cadre approprié de dialogue et de concertation pour renforcer les capacités et pour faciliter l’élaboration des positions communes pendant les négociations43.

Il convient de souligner que les efforts consentis par les pays de la sous-région en matière de gestion durable des forêts se traduisent par un faible taux de déforestation (0,19%/an)44. Les taux de déforestation dans le Bassin du Congo restent faibles, comparés à celui de l’Amazonie45. En effet, le taux de déforestation net dans le Bassin du Congo est passé de 0,09 % entre 1990 et 2000 à 0,17 % entre 2000 et 200546 contre 0,4 % pour l’Amazonie47.

Comme par le passé, le Groupe de travail Climat a été actif en 2015 dans la préparation de la participation de l’Afrique centrale à la COP 21 Climat tenue en décembre 2015 à Paris. Plusieurs réunions de concertation et de renforcement des capacités ont été organisées à cet effet avec les appuis des partenaires. Il s’agit de : de l’atelier sous-régional de renforcement des capacités du Groupe de travail et de préparation des échéances futures de la CCNUCC tenu du 31 mars au 3 avril 2015 à Bujumbura ; de l’atelier sous-régional de préparation des échéances futures sous la CCNUCC tenu du 16 au 18 septembre 2015 à Douala ; et de l’atelier sous-régional des juristes des pays membres de la COMIFAC tenu du 03 au 05 août 2015 à Douala.48 Ces rencontres avaient pour défis majeurs : l’examen du projet de l’Accord Climat issu de la réunion de Genève et de la neuvième Session de la Plate-forme de Durban (ADP); l’amélioration de la maîtrise par les négociateurs, juristes et autres membres du Groupe de travail, des principaux enjeux en cours de négociation dans le cadre du nouveau régime climatique global49.On constate donc que les actions de la COMIFAC existent à côté des actions dans chaque Etat membre. La COMIFAC n’est pas toujours au courant des efforts individuels des Etats membres dans la lutte contre le changement climatique, ce qui ne facilite pas toujours la vulgarisation desdites informations50.

43 Cléto Ndikumagenge et Imelda Ndihokubwayo, Des cadres de dialogue pour la reconnaissance des droits des communautés locales : Une option pour le nouvel accord sur le climat ? in La gestion inclusive des forêts d’Afrique Centrale : Passer de la participation au partage des pouvoirs. FQO-CIFOR, 2016.44 Voir Contribution de la Commission des Forêts d’Afrique Centrale à la préparation de la huitième session du FNUF45 Bérenger TCHATCHOU et al, Changement climatique dans le Bassin du Congo, CIFOR. 2015.46 Wasseige C. de, de Marcken P., Bayol N., Hiol Hiol F., Mayaux Ph., Desclée B., Nasi R., Billand A., Defourny P., Eba’a Atyi R., Les forêts du Bassin du Congo –État des forêts 2010, Luxembourg, Office des publications de l’Union européenne. 2012.47 Demaze M.T., La déforestation en Amazonie brésilienne : une rupture apparente entre développement et environnement. 2007. Le Mans. http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/30/89/73/PDF/Tsayem_deforestation_Amazonie.pdf.48 Voir Contribution de la Commission des Forêts d’Afrique Centrale à la préparation de la huitième session du FNUF, http://www.un.org/esa/forests/pdf/national_reports/unff8/COMIFAC.pdf.49 Idem.50 Bérenger TCHATCHOU et al, Changement climatique dans le Bassin du Congo, CIFOR. 2015.

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II.2. Les faiblesses de la COMIFAC en matière de lutte contre les changements climatiques

Malgré ses multiples réalisations, la COMIFAC fait face à de nombreux défis dans la lutte contre le changement climatique. On peut citer entre autres la souveraineté des Etats, l’absence d’un mécanisme de sanction et les limites financières et institutionnelles.

II.2.1. La nécessité de recourir à la volonté interne des Etats

Pour la mise en œuvre de la politique de la COMIFAC, tous les Etats parties conservent leur souveraineté dans le domaine législatif et règlementaire. Avec la souveraineté des Etats sur le plan législatif et règlementaire, les décisions prises au niveau de la COMIFAC ne s’appliquent pas automatiquement au sein des Etats parties. Il appartient à chaque Etat, avec toutes les caprices (temps, situations financières et autres) que cela comporte, d’intégrer la politique de la COMIFAC dans sa législation. Ce qui n’est pas toujours le cas.

Pour pallier à cette insuffisance, il serait souhaitable pour la COMIFAC, d’utiliser les mécanismes d’autres organisations afin que ses décisions soient exécutées directement au sein des Etats membres. Le cas de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaire (OHADA) est illustrateur à cet égard. En effet les décisions du conseil des ministres de l’OHADA, c’est-à-dire les Actes uniformes sont directement applicables dans les Etats parties51. Ces Actes uniformes se substituent aux législations nationales préexistantes, dans la mesure où les dispositions de ces législations nationales ne sont pas contraires à celles des Actes uniformes52.

A défaut d’adopter des textes directement applicables dans les Etats membres, la COMIFAC gagnerait à donner une place à ses directives dans l’ordonnancement juridique. Le traité pourrait par exemple être révisé et donné une place aux directives dans l’espace COMIFAC. Par exemple, s’il ressort du Traité que les directives ont la valeur des traités, cela permettrait aux Etats membres d’insérer la place des directives dans la hiérarchie des normes juridiques.

II.2.2. Les limites financières et institutionnelles

Pour mettre en œuvre ses actions, la COMIFAC fait recours à deux sources de financements : la contribution des Etats membres et la contribution des partenaires. Si les partenaires au développement apportent des appuis pour la mise en œuvre du Plan de convergence, la contribution des Etats membres doit servir au fonctionnement de l’organisation.

La contribution des Etats membres est très irrégulière. La plupart des pays accusent des arriérés de cotisations égalitaires, ainsi que les retards de versements qui pénalisent le fonctionnement harmonieux de l’organisation, et qui est à l’origine des tensions de trésorerie53. Par exemple, en 201154, pour une contribution de 148 045 891 FCFA, seul l’Etat 51 Voir Traité du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.52 Jean PAILLUSSEAU, Le droit OHADA, un droit très important et original, Pratiques et actualités du droit OHADA, Journées d’études Juriscope Poitiers, P. 101. Ohadata D-12-64.53 Jonas NAGAHUEDI MBONGU SODI, Un modèle de coopération sous-régionale pour la gestion durable des forêts tropicales : cas de la COMIFAC, 54 Pour une situation détaillée des contributions de l’année 2011, voir Rapport Annuel, COMIFAC, 2011.

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du Cameroun avait donné sa contribution pour le compte de cette année (30 700 000 FCFA), les contributions des autres Etats représentaient plutôt des arriérés : Gabon (30 700 000) ; République centrafricaine (20 000 000) ; République Démocratique du Congo (66 645 891). Le reste des Etats (Burundi, Congo, Guinée Equatoriale, Rwanda, Sao Tome et Principe et Tchad), n’avaient pas payé leurs contributions.

L’exécution des activités de la COMIFAC dépend en grande partie des contributions des partenaires. Au cours de l’année 2011 par exemple, la contribution globale55 des partenaires était de l’ordre de 227 623 208 FCFA contre 148 045 891 de contribution des Etats membres.

Cette forte dépendance de la COMIFAC de l’appui financier des partenaires, peut remettre en cause la pérennité de l’institution. Il n’est pas inutile de rappeler que les partenaires financiers ne passent pas obligatoirement par la COMIFAC pour agir dans la sous-région. A défaut de passer par la COMIFAC, il aurait été préférable de faire de la COMIFAC un organe de contrôle de leurs actions.

Une autre difficulté réside dans le fonctionnement des structures de relais de la COMIFAC dans les Etats membres. Ces structures de relais que sont les Coordinations nationales ne disposent pas toujours des ressources nécessaires pour s’acquitter de leurs missions. Pour un meilleur déploiement des activités de la COMIFAC en matière de changement climatique, il s’avère important de renforcer les capacités opérationnelles de celles-ci. Aussi, elle devrait être renforcée dans ses capacités en négociation et dans ses compétences juridiques56.

Une autre difficulté réside dans la divergence des terminologies juridiques employées dans l’espace COMIFAC. A titre d’exemple, le concept de forêt communautaire varie d’un pays à l’autre ; forêts communautaires57 (Cameroun, Gabon, République centrafricaine, Guinée équatoriale), séries de développement communautaire58 et terres autochtones59 (République du

55 Les appuis financiers des partenaires mentionnés ici sont uniquement ceux dont les fonds transitent par les comptes de la COMIFAC.56 Cléto Ndikumagenge et Imelda Ndihokubwayo, Des cadres de dialogue pour la reconnaissance des droits des communautés locales : Une option pour le nouvel accord sur le climat ? in La gestion inclusive des forêts d’Afrique Centrale : Passer de la participation au partage des pouvoirs. FQO-CIFOR, 2016.57 Une forêt communautaire est une forêt du domaine forestier permanent (art. 28 loi forestière congolaise en cours de révision) ou du domaine forestier non permanent (art. 3.11 du Décret n° 95/531, Cameroun - art. 12 loi forestière Guinée Equatoriale 1997 - art. 133 loi forestière centrafricaine 2008) ou du domaine forestier rural (art. 156, code forestier gabonais 2001). Elle fait l’objet d’une convention de gestion entre une communauté villageoise et/ou autochtone organisée et l’Administration chargée des forêts. La gestion de cette forêt relève de la communauté villageoise concernée, avec le concours ou l’assistance technique de l’Administration chargée des forêts. Elle a une superficie minimale de 50 ha (art. 5 Décret 09.11 RCA) et de 5 000 ha maximum (Cameroun, art. 27 al.4 Décret n° 95/531). Elle doit être dotée d’un plan simple de gestion avec inventaires forestiers.58 Une série de développement communautaire est l’ensemble de terroirs et finages villageois, centrés autour de l’arbre, des forêts et des autres ressources naturelles susceptibles de contribuer au développement des économies des communautés rurales et à la lutte contre la pauvreté. Elle prend en compte les forêts naturelles et artificielles, les terres agricoles, les jachères, les zones de pêche et de chasse, (article 18, décret 5053). La taille est liée à la démographie des villages bénéficiaires. Même si la série de développement communautaire n’est pas une forêt communautaire au sens strict du terme, elle est, néanmoins, assimilable à celle-ci. Du reste, la définition de la forêt communautaire telle que proposée par le code forestier congolais en révision est un compromis entre les deux approches de gestion communautaire des ressources forestières.59 Les populations autochtones ont un droit collectif et individuel à la propriété, à la possession, à l’accès et à l’utilisation des terres et ressources naturelles qu’elles occupent ou utilisent traditionnellement pour leur subsistance, leur pharmacopée et leur travail (art. 31, loi n° 5-2011, Congo).

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Congo), concession forestière de communauté locale60 (RDC). La COMIFAC gagnerait à adopter une terminologie juridique commune dans les Etats membres afin de faciliter l’harmonisation et la recherche.

Contribut ions Recouvrements Contribut ions Recouvrements Contribut ions Recouvrements Contribut ions Recouvrements Contribut ions Recouvrements

Burundi - - - - - 25 625 997 - 35 740 972

Cameroun 30 700 000 - 30 700 000 - 30 700 000 - 30 700 000 -

Congo - - 30 700 000 79 300 000 16 000 000 - - -

Gabon - 30 700 000 - 30 700 000 - - - 15 350 000

Guinée equatoriale - - 30 700 000 153 500 000 30 700 000 - - -

RCA - 20 000 000 - - - - - -

RDC - 66 645 891 - - - - - -

Rwanda - - - - - - - -

Sao Tome et Principe - - - - - - - -

Tchad - - - - - - - 61 400 000

Total 30 700 000 117 345 891 - - 92 100 000 263 500 000 77 400 000 25 625 997 30 700 000 112 490 972

Contribution des partenaires227 623 208 236 215 002 434 790 610 63 528 470

Etats des contributions de 2011 à 2015Contributiondes Etats membres

2011 2012 2013 2014 2015

II.2.3. L’absence d’un mécanisme de sanction

En droit, l’efficacité d’une mesure s’apprécie par les moyens de sanction mis en place pour réprimer les contrevenants. Le projet de la COMIFAC, très ambitieux, est dépourvu de tout mécanisme de sanction notamment en ce qui concerne l’application des mesures prises par la COMIFAC au sein des Etats membres.

La seule sanction prévue par le Traité de la COMIFAC est relative à l’absence de contribution financière annuelle obligatoire des Etats membres. Ainsi, tout Etat qui ne remplit pas ses obligations financières perd son droit de vote ainsi que tout appui de l’organisation, jusqu’à régularisation61. Cette sanction n’est qu’une conséquence logique de l’absence de contribution, et ne saurait en aucun cas obliger une partie à respecter ses autres engagements. Etant entendu que toutes les actions sur le changement climatique dans la région ne transitent pas nécessairement par la COMIFAC, cette sanction perd toute son efficacité. Car même sans l’appui de la COMIFAC, un Etat qui ne respecte pas ses obligations envers la COMIFAC peut recevoir l’appui d’autres organisations. Pour aider la COMIFAC, les partenaires techniques et financiers, pourront par exemple subordonner leur appui aux Etats membres au respect de leurs obligations envers le traité, afin de pérenniser et de crédibiliser davantage la COMIFAC. Car la COMIFAC se présente davantage comme une institution plus politique que juridique.

CONCLUSION.

60 Une concession forestière de communauté locale est une forêt attribuée gratuitement et perpétuellement par l’État à une communauté locale sur la base des forêts qu’elle possède régulièrement en vertu de la coutume, en vue de son utilisation sous toutes les formes, pour la satisfaction de ses besoins vitaux , avec l’obligation d’y appliquer les règles et pratiques de gestion durable (art. 2 décret n° 14/018 du 02 août 2014). Elle ne doit pas excéder 50 000 ha (art. 18 du décret 14/018).61 Article 20 du Traité.

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Les actions de la COMIFAC en faveur de la lutte contre les changements climatiques sont visibles et palpables dans tous les pays membres. Des progrès considérables sont observés. Mais des faiblesses des mécanismes mis en place sont également observées. Pour bien avancer dans sa politique de lutte contre les changements climatiques et faire exécuter ses décisions directement dans les Etats parties, la COMIFAC gagnerait à revoir les mécanismes d’exécution de ses décisions dans les Etats membres et mettre en place un mécanisme de sanction contre les Etats qui ne remplissent pas leurs obligations au titre du Traité instituant la COMIFAC. Aussi, les partenaires qui agissent directement au sein des pays membres, gagneraient à faire coordonner leurs activités par la COMIFAC, et permettre ainsi aux Etats récalcitrants de respecter leurs obligations envers la COMIFAC.

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