Ë propos dÕun myxome du maxillaire: difÞcult s

7
RÉSUMÉ Le myxome odontogène ou ostéogène est une tumeur bénigne des maxillaires d’origine mésodermique. C’est une lésion rare dont toutes les caractéristiques ne sont pas encore parfaitement définies. La découverte de cette lésion est le plus souvent fortuite car son évolution est lente et asymptomatique. Son diagnostic clinique, radiologique et histologique pose différents problèmes qui sont abordés après la présentation d’une volumineuse lésion de l’hémi-maxillaire droit, d’aspect multiloculaire, ayant entraîné une déformation faciale. Le traitement est chirurgical. Le taux de récidive étant peu documenté, un suivi clinique et radiologique à long terme est recommandé. (Med Buccale Chir Buccale 2005; 11: 23-29). mots clés : Tumeur bénigne, myxome odontogène, myxome ostéogène. SUMMARY Odontogenic or osteogenic myxoma is a benign tumor of the maxillae of mesenchymal origin. It is a recognized lesion. Its detection is often casual because of its slow and unsymptomatic growth. The clinical, radiological and histological diagnosis display significant problems illustrated with the case of an important multilocular lesion in the right maxilla, with facial distortion. Surgery is the treatment. The rate of recurence being poorly documented, clinical and radiological follow up is recommanded for a long period.(Med Buccale Chir Buccale 2005; 11: 23-29). key words : Benign tumor, odontogenic myxoma, osteogenic myxoma médecine buccale chirurgie buccale VOL. 11, N°1 2005 page 23 Cas clinique À propos d’un myxome du maxillaire : difficultés diagnostiques et conduite à tenir A case of myxoma of the maxilla: diagnosis difficulties and therapeutic attitude FRANÇOIS ESCOLLE*, MICHEL GASS*, PHILIPPE BARRIERE**, ANDRE WARTER***, AHMED FEKI* * Département de Médecine Buccale et de Chirurgie Buccale, SCTD, Hôpitaux universitaires de Strasbourg ** Service de Stomatologie et de Chirurgie Maxillo-Faciale et Reconstructrice, Hôpitaux universitaires de Strasbourg *** Institut d’Anatomie Pathologique, Faculté de Médecine de Strasbourg Demande de tirés à part : François Escolle – 3 bis boulevard de la Libération – 13700 Marignanne Accepté pour publication le 11 octobre 2004 Article publié par EDP Sciences et disponible sur le site http://www.mbcb-journal.org ou http://dx.doi.org/10.1051/mbcb/2005002

Upload: others

Post on 05-May-2022

2 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Ë propos dÕun myxome du maxillaire: difÞcult s

RÉSUMÉ

Le myxome odontogène ou ostéogène est une tumeur bénigne des maxillaires d’origine mésodermique. C’estune lésion rare dont toutes les caractéristiques ne sont pas encore parfaitement définies. La découverte decette lésion est le plus souvent fortuite car son évolution est lente et asymptomatique. Son diagnostic clinique,radiologique et histologique pose différents problèmes qui sont abordés après la présentation d’une volumineuselésion de l’hémi-maxillaire droit, d’aspect multiloculaire, ayant entraîné une déformation faciale. Le traitementest chirurgical. Le taux de récidive étant peu documenté, un suivi clinique et radiologique à long terme estrecommandé. (Med Buccale Chir Buccale 2005; 11: 23-29).

mots clés : Tumeur bénigne, myxome odontogène, myxome ostéogène.

SUMMARY

Odontogenic or osteogenic myxoma is a benign tumor of the maxillae of mesenchymal origin. It is a recognizedlesion. Its detection is often casual because of its slow and unsymptomatic growth. The clinical, radiological andhistological diagnosis display significant problems illustrated with the case of an important multilocular lesion in theright maxilla, with facial distortion. Surgery is the treatment. The rate of recurence being poorly documented, clinicaland radiological follow up is recommanded for a long period.(Med Buccale Chir Buccale 2005; 11: 23-29).

key words : Benign tumor, odontogenic myxoma, osteogenic myxoma

médecinebuccalechirurgiebuccale

VOL. 11, N° 12005

page 23

Cas clinique

À propos d’un myxome du maxillaire : difficultés diagnostiques et conduite à tenir

A case of myxoma of the maxilla: diagnosis difficulties and therapeutic attitude

FRANÇOIS ESCOLLE*, MICHEL GASS*, PHILIPPE BARRIERE**, ANDRE WARTER***, AHMED FEKI*

* Département de Médecine Buccale et de Chirurgie Buccale, SCTD, Hôpitaux universitaires de Strasbourg** Service de Stomatologie et de Chirurgie Maxillo-Faciale et Reconstructrice, Hôpitaux universitaires de Strasbourg*** Institut d’Anatomie Pathologique, Faculté de Médecine de Strasbourg

Demande de tirés à part :

François Escolle – 3 bis boulevard de la Libération – 13700 Marignanne

Accepté pour publication le 11 octobre 2004

Article publié par EDP Sciences et disponible sur le site http://www.mbcb-journal.org ou http://dx.doi.org/10.1051/mbcb/2005002

Page 2: Ë propos dÕun myxome du maxillaire: difÞcult s

médecinebuccale

chirurgiebuccale

page 24

masse tumorale est de couleur et d’apparence nor-males ; il n’y a ni fistule, ni ulcération. À la palpation,la masse est de consistance dure, fixée à l’os ; lapremière molaire maxillaire droite présente unemobilité transversale. Il n’y a ni signe neurologiquesensitif ou moteur associé, ni de signes fonction-nels respiratoires ou oculaires.Le cliché panoramique montre une zone radio-claire,hétérogène, dans la tubérosité maxillaire droite(Fig. 2). Sur le cliché de face, de type Blondeau, lesinus maxillaire droit est radio-opaque. L’examentomodensitométrique du massif facial met enévidence une opacité sinusienne droite, les fossesnasales ne sont pas touchées (Figures 3-4).Une biopsie est réalisée sous anesthésie locale.L’examen anatomopathologique révèle que le tissuest constitué principalement de cellules fusiformesde disposition très variable. L’index mitotique estnul. La lésion est trop peu cellulaire pour constituerune tumeur fibreuse solitaire du sinus et trop peuinflammatoire pour correspondre à une pseudo-tumeur inflammatoire. L’analyse des différentsfragments prélevés ne montre aucun signe demalignité. Leur aspect évoque une structure fibreuseou nerveuse. L’immunomarquage à la vimentine estmassivement positif, celui à la protéine S-100 posi-tif sur de rares cellules. Elles sont cependant asseznombreuses pour faire évoquer d’abord unneurofibrome isolé [7], puis un méningiome dans savariante fibroblastique.

D’après l’Organisation Mondiale de la Santé [1],le myxome des maxillaires est une tumeurbénigne, d’origine mésenchymateuse. C’est unetumeur rare qui représente de 0,41 % à 7,19 %des tumeurs maxillaires [1,2]. Sa fréquence, sonétiologie, sa pathogénie et ses modalités thé-rapeutiques sont souvent discutées dans lalittérature [3,4,5,6]. Les difficultés diagnostiquesrencontrées lors de la prise en charge d’un casont conduit à faire le point sur cette affection et àessayer d’en préciser les principales caracté-ristiques.Seule la confrontation des éléments cliniques etradiographiques avec l’examen anatomo-patho-logique permet d’établir le diagnostic et de pro-poser un traitement adapté.

OBSERVATIONUne patiente âgée de 47 ans est adressée endécembre 2002 par son praticien traitant pour unetuméfaction faciale jugale droite. L’interrogatoiremédical ne découvre aucun antécédent médico-chirurgical particulier, ni signes généraux associés.L’examen exobuccal montre une tuméfactiongénienne évoluant depuis 4 mois, de façon asymp-tomatique. L’examen clinique endo-buccal (Fig. 1)révèle un élargissement du processus alvéolairedans la région molaire maxillaire droit avec vous-sure vestibulaire nette. La muqueuse recouvrant la

médecinebuccale

chirurgiebuccale

VOL. 11, N° 12005

page 24

F. Escolle et coll.

Figure 1 : Vue endobuccale préopératoire : tuméfac-tion vestibulaire maxillaire droite.Intrabucal view: buccal expansion of right maxillary.

Figure 2: Orthopantomogramme préopératoire : imagehétérogène de la zone tubérositaire maxillaire droite.Preoperative panoramic radiograph: heterogenous aspectof the right tuberosity area.

Page 3: Ë propos dÕun myxome du maxillaire: difÞcult s

Figure 3 : Examen tomodensitométrique, coupe fron-tale : image en bissac radio-transparente avec amin-cissement du plancher de l’orbite droite.Frontal CT view: a bilocular tumor radiolucency lesion withthinning of orbital floor.

médecinebuccalechirurgiebuccale

page 25

médecinebuccalechirurgiebuccale

VOL. 11, N° 12005

page 25

Myxome odontogène

Figure 4 : Examen tomodensitométrique, coupeaxiale : hypoplasie du sinus droit sans effraction dela muqueuse.Axial CT view: right sinus hypoplasia, no break throughthe mucosa.

Afin d’éliminer l’hypothèse de l’extension d’unméningiome intra-cranien, une imagerie par ré-sonance magnétique est réalisée (Fig. 5-6). La lésionmesure 4,5 cm dans le sens antéro-postérieur, 3 cmdans le sens transversal, 5 cm dans le sens verti-cal. À son contact, le plancher de l’orbite apparaît

Figure 5 : IRM, coupe frontale : amincissement duplancher de l’orbite droite sans envahissement.Frontal MR image: thinning of the right orbital floorwithout invasion.

Figure 6 : IRM, coupe axiale : extension du proces-sus tumoral dans le sinus droit.Axial MR image: extensive lesion in the right sinus.

soulevé. L’exploration cérébrale est sans particula-rité ce qui permet de présumer de la bénignité dela lésion.

Page 4: Ë propos dÕun myxome du maxillaire: difÞcult s

médecinebuccale

chirurgiebuccale

page 26

médecinebuccale

chirurgiebuccale

VOL. 11, N° 12005

page 26

F. Escolle et coll.

Figure 7 : Pièce opératoire, aspect macroscopique : différence d’aspect selon la face.a : lisse, au contact de la table externe ;b: granulomateuse, au contact de la muqueuse sinusienne.Macroscopic view showing the difference of texture onboth faces of the tumour :a : smouth aspect contigous to external tableb: granulomateous aspect, facing the sinus mucousmenbrane.

Figure 8 : Examen anatomopathologique : cellulesfusiformes et étoilées dans une substance mucoïde(coloration HE).Histologic findings: spindle-shaped and stellate cells in amucoid matrix (HE coloration).

Figure 9: Examen tomodensitométrique postopératoire(six mois), coupe frontale : épaississement du plancherde l’orbite.Axial CT view at six months postoperative : thickening ofthe orbital floor.

L’exérèse chirurgicale est réalisée par voie endo-buc-cale, sous anesthésie générale. Après incision de lamuqueuse en pleine épaisseur, le lambeau est récliné,puis la table externe est trépanée. Un abord crestal,plus conservateur, est réalisé. L’énucléation de latumeur est pratiquée sans effraction de la membranesinusienne. La première molaire maxillaire droite estavulsée dans le même temps opératoire.La pièce opératoire présente macroscopiquementdeux aspects (Fig. 7) : du coté vestibulaire, elle estlisse et blanchâtre, du coté sinusien, elle est consti-tuéé par un tissu lâche, granulomateux et inflam-matoire. La majeure partie de la lésion est faite d’uneprolifération de cellules fusiformes (Fig. 8) avec uncytoplasme tantôt filiforme, tantôt un peu plus

charnu, de disposition tourbillonnante. On observeaussi un type cellulaire épithélioïde, régulièrementdisposé dans le stroma. Le stroma comporte unœdème basophile donnant une apparence myxo-mateuse à la lésion. La densité du collagène restemodérée. L’immunohistochimie fournit les mêmesrésultats que ceux obtenus sur la biopsie. La pré-sence de quelques travées osseuses résiduellespermet d’affirmer que cette lésion s’est développéeau sein de l’os et non pas à partir de la muqueuse.Il s’agit d’une lésion qui possède les caractères mor-phologiques et immuno-histochimiques d’un tissufait de myofibroblastes. Compte tenu de l’absenced’activité mitotique significative, cette lésion estconsidérée comme bénigne, avec un risque de réci-dive important. Le diagnostic de myxome odonto-géne central semble être le plus probable.Les suites opératoires sont simples et la douleurcontrôlée par un antalgique de niveau 2. Après sixmois, la face est de nouveau symétrique, la plaiebien cicatrisée, la palpation endobuccale de cettezone reste sensible mais il n’y a pas de troubles dela sensibilité du V2 ; la patiente se plaint de douleursdans la région de la pommette droite et sur les dents11, 12, 13. L’examen tomodensitométrique confir-me l’épaississement du plancher de l’orbite et ledébut de pneumatisation du sinus. Par contre unezone radio-transparente persiste en deçà : la cavitélaissée par l’énucléation ne s’est pas encore réos-sifiée (Fig. 9-10).

Page 5: Ë propos dÕun myxome du maxillaire: difÞcult s

Figure 10 : Examen tomodensitométrique postopéra-toire (six mois) coupe axiale : début de pneumatisationdu sinus.Frontal CT view at six months postoperative : new pneu-matisation of the sinus is taking place.

médecinebuccalechirurgiebuccale

page 27

COMMENTAIRESLes myxomes intraosseux des maxillaires sontles plus fréquents après les myxomes cardiaques[8]. Compte tenu des circonstances de survenueet de son extrême rareté en d’autres points dusquelette, l’origine odontogène apparaît la plusprobable [9,10].Il est rare de l’observer avant 10 ans et après50 ans, l’âge moyen d’apparition étant 30 ans[11,12]. Des cas pédiatriques, survenant respecti-vement à l’âge de 13 et 17 mois, ont été rappor-tés [8,13]. Il n’y a pas de sexe ratio prédominant[2,14]. La localisation mandibulaire est légèrementplus fréquente que la localisation maxillaire[13,14,15]. Au maxillaire, la lésion se développedans 74 % des cas dans la région antérieure à lapremière molaire [11]. La consultation est le plussouvent motivée par la présence d’une tuméfac-tion osseuse unilatérale, non douloureuse et sanstroubles fonctionnels [2,15,16,17]. La palpationrévèle une masse de consistance ferme, pouvantêtre élastique lorsqu’il y a une effraction de la cor-ticale. Les signes dentaires associés sont la mobi-lité, le déplacement ou la perte de dents [2,8].Souvent la vitalité pulpaire n’est pas compromise[3]. Au maxillaire, le développement intra-sinusienautorise une extension longtemps asymptoma-tique, ce qui aboutit à une découverte souvent

médecinebuccalechirurgiebuccale

VOL. 11, N° 12005

page 27

Myxome odontogène

tardive. Il se déroule de un à cinq ans entre le pre-mier signe de la maladie et le diagnostic anatomo-pathologique [8]. Le pronostic peut être parfoisréservé en raison de la proximité de la base ducrâne et des organes olfactif et visuel. Cetenvahissement peut avoir des répercussionsfonctionnelles : obstruction nasale, diplopie,exophtalmie… [8].En première intention, le cliché de face nez-men-ton-plaque et l’orthopantomogramme sont réali-sés. Cela permet de préciser les rapportsanatomiques et le développement intra-sinusiende la tumeur. Un examen tomodensitométriqueest indispensable pour déterminer les modalitésde l’intervention chirurgicale en fonction de latopographie tridimensionelle de la lésion et desrapports de voisinage. Cette lésion se présentecomme une image radio-transparente uni- oumultiloculaire faiblement définie, avec de finestrabéculations [14,18].L’IRM [12,19,20] est recommandée pour une tumeurlocalisée dans le sinus maxillaire. Elle permetd’éliminer, en corrélation avec l’examen anatomo-pathologique, la suspicion d’un méningiome. Cedernier peut être primaire ou avoir une origineintra-cranienne ; cette distinction modifie l’ap-proche thérapeutique.Après les examens clinique et radiologiques,plusieurs hypothèses diagnostiques peuvent êtreenvisagées : sarcome osseux, améloblastome[10,12,21,22], granulome centro-osseux à cellulesgéantes…. [3,10,22]. Pour établir un diagnosticexact, il est nécessaire de confronter les donnéescliniques, radiologiques et histologiques.L’aspect macroscopique de cette tumeur estcaractéristique: elle est brillante, lisse, blanchâtre,grisâtre ou jaunâtre [23,24]. Sa consistance, quidépend de l’abondance des fibres collagènes, esttrès variable, ferme (fibromyxome) ou gélatineuse(myxome).L’aspect microscopique de cette tumeur révèledeux types de cellules étoilées et fusiformes, àcytoplasme basophile, peu abondant, avec unpetit noyau hyperchromatique. La densité cellu-laire est variable. La substance fondamentalereprésente l’élément le plus abondant ; le stroma,« d’aspect myxoïde », a été comparé au mésen-chyme primitif du réticulum stellaire des germes

Page 6: Ë propos dÕun myxome du maxillaire: difÞcult s

dentaires. Certains auteurs distinguent des cel-lules non sécrétantes, rondes et sombres et descellules fusiformes ou étoilées, claires, semblablesà des fibroblastes [25,26,27]. Ces cellules ont unefaible activité enzymatique ce qui est compatibleavec la croissance lente de la tumeur [25].L’immunohistochimie a permis de mettre en évi-dence la positivité des cellules à la protéineS-100 ce qui indique l’origine mésenchymateusedu myxome des maxillaires [5]. La positivité à lavimentine caractérise les cellules fusiformesconstitutives du myxome.Cependant le myxome est une tumeur rare, parsa rareté, et controversée en raison du nombrede variantes ultrastructurelles [1]. Des ilôts d’épi-thelium odontogène peuvent être retrouvés, sousforme de petits lobules ronds ou de fines travées[14]. Dans ce cas, les fibroblastes constituant lemyxome dériveraient du desmodonte, de la pulpeou du follicule dentaire [2,6]. Des zones vascula-risées [1] ainsi que des calcifications [1,6] sont par-fois présentes. La présence de résidus d’ostrabéculaire est considérée par certains auteurscomme une caractéristique structurelle dumyxome odontogéne en relation avec leur crois-sance lente et infiltrante [7]. La classification decette tumeur dépend de la quantité et de lamaturité des fibres collagènes dans la matriceextra-cellulaire ainsi que de la densité cellulaire.Un myxome avec une densité élevée en fibrescollagènes et en cellules correspondrait à unfibrome, avec une densité plus faible à un fibro-myxome [1,2,6]. Dans cette hypothèse le myxome,le fibromyxome et le fibrome odontogènes repré-senteraient différentes variantes d’un mêmeprocessus tumoral. Pour d’autres auteurs, lefibrome odontogène representerait le stade ter-minal de l’évolution du myxome odontogène [20].La détection d’éléments structurels supplémen-taires (ilôts épithéliaux ou calcifications) permetde différencier une tumeur simple d’une tumeurcomplexe. Pour certains auteurs, le fibrome a obli-gatoirement une structure complexe, le myxomeet le fibromyxome une structure simple [1].Dans le cas clinique présenté, l’examen histolo-gique révèle une structure très riche en cellules eten tissu fibreux, assez proche d’un myxome destissus mous. Mais le développement intra-osseux,

à proximité de la première molaire maxillaire droite,permet de poser le diagnostic de myxome odon-togène central complexe. Seul son stade d’évo-lution n’a pas pu être déterminé avec certitude.Deux approches thérapeutiques chirurgicales dif-férentes sont retrouvées dans la littérature [2,13].Le traitement radical comporte une résectioninterruptrice ou non, avec ou sans greffe osseuseimmédiate. Cet acte est souvent réalisé sousanesthésie générale [21] ; se sont la localisation etl’extension de la tumeur qui détermine sonindication. L’abord est endo-buccal sauf si le pro-cessus touche le condyle mandibulaire. En raisondes séquelles esthétiques et fonctionnelles impor-tantes, le traitement radical est réservé aux lésionsvolumineuses ou récidivantes [22], ou chez le trèsjeune enfant [13]. Le traitement conservateurconsiste en une énucléation et un curetage soi-gneux, avec ou sans cautérisation chimique ouélectrique des parois de la cavité d’exérèse. L’âgedu patient et ses antécédents médicaux inter-viennent aussi dans le choix du traitement. La réos-sification est observable radiologiquement dès le6e mois post-opératoire [20,24]. Le taux de récidiveimportant, de l’ordre de 25% [2,8,13], impose unesurveillance clinique et radiologique régulière etprolongée. La fréquence des contrôles radiogra-phiques communément admise est trimestrielle lapremière année, puis semestrielle les deux annéessuivantes, puis annuelle pendant dix ans [16].

La présentation de ce cas met en évidence l’im-portance d’inclure le myxome dans le diagnosticdifférentiel des lésions radio-transparentes etradio-opaques du maxillaire et de la mandibule,aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte. De plus,son comportement clinique – croissance lente etévolution asymptomatique – et l’envahissementpériphérique important imposent un acte chirur-gical thérapeutique précoce. Le diagnostic et letraitement nécessitent une étroite collaborationentre clinicien, radiologue et anatomopatholo-giste. Même si cette lésion est rare, elle ne doitpas être méconnue. Le taux de récidive imposeune surveillance régulière, surtout lorsque l’onopte pour une chirurgie conservatrice, indicationqui devrait être envisagée aussi souvent que pos-sible en première intention.

médecinebuccale

chirurgiebuccale

page 28

médecinebuccale

chirurgiebuccale

VOL. 11, N° 12005

page 28

F. Escolle et coll.

Page 7: Ë propos dÕun myxome du maxillaire: difÞcult s

1 - PHILIPSEN HP, REICHART PA. Revision of the 1992, editionof the WHO histological typing of odontogénic tumours.A suggestion. J Oral Pathol Med 2002 ; 31 : 253-8.

2 - SUAREZ PA, BATSAKIS JG, EL-NAGGAR AK. Pagy consul-tation : don’t confuse dental soft tissues with odontoge-nic tumors. Ann Otol Rhinol Laryngol 1996; 105: 490-4.

3 - GORMLEY MB, MALLIN RE, SOLOMON M. Odontogenicmyxofibroma : report of two cases. J Oral Surg 1975 ;33 : 356-9.

4 - GUILBERT F, CHOMETTE G, LE CHARPENTIER Y, AURIOL M.Les images radiographiques types : rapport sur lestumeurs bénignes et les pseudo-tumeurs desmaxillaires. Rev Stomatol Chir Maxillofac 1993 ; 94 :197-265.

5 - LOMBARDI T, KUFFER R, BERNARD J-P, FIORE-DONNO G,SAMSON J. Immunohistochemical staining for vimentinfilaments and S-100 protein in myxoma of the jaws.J Oral Pathol Med 1988 ; 17 : 175-7.

6 - REGEZI JA. Odontogenic cysts, odontogénic tumors,fibroosseous, and giant cell lesions of the jaws. ModPathol 2002 ; 15 : 331-41.

7 - ODELL EW, MORGAN PR. Biopsy pathology of the oraltissues. Chapman and Hall Medical, London 1998 :434-439.

8 - WACHTER BG, STEINBERG MJ, DARROW DH, MCGINN J D,PARK AH. Odontogenic myxoma of the maxilla : a reportof two pediatric cases. Int J Pediatric Otorhinolaryngol2003 ; 67 : 389-93.

9 - GUNDLACH KKH, SCHULZ A. Odontogenic myxoma.Clinical concept and morphological studies. J OralPathol 1977 ; 6 : 343-58.

10 - HENDLER BH, ABAZA NA, QUINN P. Odontogenic myxoma.Surgical management and an ultrastrucrural study. OralSurg Oral Med Oral Pathol 1979 ; 47 : 203-16.

11 - HANDLERS JP, ABRAMS AM, MELROSE RJ, DANFORTH R.Central odontogenic fibroma: clinicopathologic featuresof 19 cases and review of the literature. J Oral MaxillofacSurg 1991 ; 49 : 46-54.

12 - PIETTE E. fibrome odontogénique central (pp.1245). In :Traité de pathologie buccale et maxillo-faciale. E. Piette,H. Reychler Eds. De Boeck-Wesmael, Bruxelles, 1991.

13 - FENTON S, SLOOTWEG P.J, DUNNEBIER EA. Odontogenicmyxoma in a 17 month old child : a case report. J OralMaxillofac Surg 2003 ; 61 : 734-6.

14 - MOSHIRI S, ODA D, WORTHINGTON P, MYALL R.Odontogenic myxoma : histochemical and ultrastruc-tural study. J. Oral Pathol Med 1992 ; 21 : 401-3.

15 - ALLEN CM, HAMMOND HL, STIMSON PG. Central odonto-génic fibroma, WHO* type. A report of three cases withan unusual associated giant cell reaction. Oral Surg OralMed Oral Pathol 1992 ; 73 : 62-6.

16 - BARROS RE, DOMINIQUEZ FV, CABRINI RL. Myxoma of thejaws. Oral Surg Oral Med Oral Pathol 1969 ; 27 : 225-36.

17 - HOVANIAN AP. Myxoma of the maxilla. Oral Surg OralMed Oral Pathol 1953 ; 6 : 927.

18 - LAMARQUE S, DE MELLO G, TAS P. Le fibrome odonto-génique central, à propos d’un cas. Med Buccale ChirBuccale 1995 ; 1 h 31-6.

19 - ASAUMI J, KONOUCHI H, HISATOMI M, KISHI K. Odontogenicmyxoma of maxillary sinus : CT and MR-pathologic cor-relation. Euro J Radiol 2001 ; 37 : 1-4.

20 - KAFFE I, NAOR H, BUCHNER A. Clinical and radiologicalfeatures of odontogenic myxoma of the jaws.Dentomaxillofac Radiol 1997 ; 26 : 299-303.

21 - BUCHNER A, YOCHANAN R. Fibromyxoma of the maxilla.J Oral Surg 1965 ; 23 : 145-7.

22 - KANGUR TT, DAHLIN DC, TURLINGTON EG. Myxomatoustumors of the jaws. J Oral Surg 1975 ; 33 : 523-8.

23 - DECHAUME M, GRELLET M, PAYEN J. Contribution à l’étudedes myxomes des maxillaires. Rev Stomatol 1968 ; 69 :353-66.

24 - SENTILHES CL, MICHAUD J. Myxome des maxillaires. RevStomatol Chir Maxillofac 1987 ; 88 : 20-5.

25 - HARRISON JD. Odontogenic myxoma: ultrastructural andhistochemical studies. J Clin Pathol 1973 ; 26 : 570-82.

26 - WESTWOOD RM, ALEXANDER RW, BENNETT DE. Giantodontogenic myxofibroma. Oral Surg 1974 ; 37 : 82-92.

27 - OLIVIER DS, DI NARDO LJ, MONAHAN M. PatQuiz Case 2.Diagnosis : odontogénic fibromyxoma. Arch OtolaryngolHead Neck Surg 1995 ; 121 : 805-7.

médecinebuccalechirurgiebuccale

page 29

médecinebuccalechirurgiebuccale

VOL. 11, N° 12005

page 29

Myxome odontogène

RÉFÉRENCES