û mensuel # 294 •juin 2013 - réalités cardiologiques

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cardiologiques û Mensuel # 294 • Juin 2013 www.realites-cardiologiques.com La FMC du cardiologue d’aujourd’hui pour préparer la médecine de demain Billet du mois : Recommandations de l’ESH sur l’HTA Infarctus du myocarde : quoi de neuf en 2012 ? Éléments rationnels du choix d’un stent actif L’essentiel sur la VO 2 en cardiologie Gestion des antiagrégants plaquettaires en chirurgie non cardiaque Dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse chez le diabétique

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cardiologiques

û Mensuel # 294 • Juin 2013

www.realites-cardiologiques.comLa FMC du cardiologue d’aujourd’hui pour préparer la médecine de demain

Billet du mois : Recommandations de l’ESH sur l’HTA

Infarctus du myocarde : quoi de neuf en 2012 ?

Éléments rationnels du choix d’un stent actif

L’essentiel sur la VO2 en cardiologie

Gestion des antiagrégants plaquettaires en chirurgie non cardiaque

Dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse chez le diabétique

Page 2: û Mensuel # 294 •Juin 2013 - Réalités Cardiologiques

Insuffisance cardiaquechronique1

“ Traitement de l’insuffisance cardiaque chronique de classe NYHA II à IVavec dysfonction systolique,

chez les patients en rythme sinusal et dont la fréquence cardiaqueest supérieure ou égale à 75 bpm,

en association au traitement standard comprenant les bêtabloquants,ou en cas de contre-indication ou d’intolérance aux bêtabloquants.”

Ivabradine

SI/D

TC-

13PA

07P

/10-

2012

-Vis

an°

12/0

9/61

9525

27/P

M/0

11.

1. Indication non remboursable à la date du 01/10/2012 (demande d’admission à l’étude)

PROCORALAN 5 mg : comprimés pelliculés sécables. PROCORALAN 7,5 mg : comprimés pelliculés. Composition : Ivabradine 5 mg ou 7,5 mg. EEN : lactose. Indications : Traitement de la maladie coronaire : Traitement symptomatique de l’angor stablechronique chez l’adulte coronarien en rythme sinusal. L’ivabradine est indiquée : - chez les adultes présentant une intolérance ou une contre-indication aux bêtabloquants, - ou en association aux bêtabloquants chez des patients insuffisamment contrôlés parune dose optimale de bêtabloquants, et dont la fréquence cardiaque reste supérieure à 60 bpm. Traitement de l’insuffisance cardiaque chronique : L’ivabradine est indiquée dans le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique de classe NYHA II à IV avecdysfonction systolique, chez les patients en rythme sinusal et dont la fréquence cardiaque est supérieure ou égale à 75 bpm, en association au traitement standard comprenant les bêtabloquants ou en cas de contre-indication ou d’intolérance aux bêtabloquants.Posologie et mode d’administration * : Traitement de la maladie coronaire : la posologie initiale recommandée est de 5 mg d’ivabradine 2 fois/j par voie orale, une prise le matin et une le soir au cours des repas. Après 3 à 4 semaines de traitement, la poso.peut être augmentée à 7,5 mg 2 fois/j, selon réponse thérapeutique. Si la fréquence cardiaque (FC) de repos descend en dessous de 50 bpm ou si symptômes liés à la bradycardie, la dose doit être diminuée en sachant qu’une posologie de 2,5 mg 2 fois/j peutêtre envisagée. Le traitement doit être interrompu si la FC reste < 50 bpm ou si les symptômes liés à la bradycardie persistent. Traitement de l’insuffisance cardiaque chronique : instaurer traitement uniquement chez les insuffisants cardiaques stables. La poso.initiale recommandée est de 5 mg d’ivabradine 2 fois/j. Après 2 semaines de traitement, la poso. peut être augmentée à 7,5 mg 2 fois/j si FC de repos persiste au-dessus de 60 bpm, ou diminuée à 2,5 mg 2 fois/j si FC de repos persiste en dessous de 50 bpmou en cas de symptômes liés à la bradycardie. Si la FC est comprise entre 50 et 60 bpm, la poso. de 5 mg 2 fois/j peut être maintenue. Si, durant le traitement, la FC de repos descend de façon persistante en dessous de 50 bpm ou en cas de symptômes liés àla bradycardie, la dose doit être diminuée à la poso. inférieure. Si la FC de repos persiste au-dessus de 60 bpm, la poso. peut être augmentée à la poso. supérieure. Le traitement doit être interrompu si la FC reste inférieure à 50 bpm ou si les symptômes liés àla bradycardie persistent. Instaurer le traitement à 2,5 mg 2 fois/j chez le sujet âgé de 75 ans et plus. Utiliser avec précaution chez l’insuffisant hépatique modéré et l’insuffisant rénal si Clcréat < 15 ml/min. Pas de données disponibles chez les enfants de moinsde 18 ans. CTJ : 1,87 €. Contre-indications : Hypersensibilité connue à la substance active ou à l’un des excipients ; Fréquence cardiaque de repos < 60 bpm avant le traitement ; Choc cardiogénique ; Infarctus aigu du myocarde ; Hypotension sévère (< 90/50 mmHg) ;Insuffisance hépatique sévère ; Maladie du sinus (« sick sinus syndrome ») ; Bloc sino-auriculaire ; Insuffisance cardiaque instable ou aiguë ; Patient pacemaker-dépendant (fréquence cardiaque exclusivement imposée par le pacemaker) ; Angor instable ; Blocauriculo-ventriculaire du 3e degré (BAV III) ; Association à des inhibiteurs puissants du cytochrome P450 3A4 tels que les antifongiques azolés (kétoconazole, itraconazole), les antibiotiques de la famille des macrolides (clarithromycine, érythromycine per os,josamycine, télithromycine), les inhibiteurs de protéases (nelfinavir, ritonavir) ou la néfazodone ; Grossesse, allaitement. Mises en garde et précautions d’emploi * : arythmies cardiaques ; patients avec BAV du 2e degré ; patients présentant une bradycardie ;Assoc. avec inhibiteurs calciques réduisant la FC (vérapamil/diltiazem) ; l’insuffisance cardiaque doit être stabilisée avant d’envisager un traitement avec l’ivabradine ; insuffisants cardiaques de classe NYHA IV ; AVC ; fonction visuelle ; patients hypotendus ;fibrillations auriculaires ; patients présentant un QT long congénital ou traités par des médicaments allongeant le QT ; patients hypertendus nécessitant une modification de leur traitement antihypertenseur ; contient du lactose. Interactions * : Assoc. contre-indiquée :inhibiteurs puissants du CYP3A4. Assoc. déconseillée : Inhibiteurs modérés du CYP3A4 : diltiazem/vérapamil ; Médicament allongeant le QT. Assoc. nécessitant des précautions d’emploi : diurétiques hypokaliémants (thiazidiques et de l’anse) ; autres inhibiteursmodérés du CYP3A4 ; Jus de pamplemousse ; Inducteurs du CYP3A4. Grossesse et allait. * : Contre-indiqués. Conduite et utilisation de machines * : prise en compte de possibles phosphènes. Effets indésirables * : Très fréquent : Phosphènes ; Fréquent :Bradycardie, BAV I – allongement de l’intervalle PQ à l’ECG, extrasystoles ventriculaires, vision trouble, céphalées, sensations vertigineuses ; pression artérielle non contrôlée ; Peu fréquent : Hyperuricémie, éosinophilie, syncope, vertiges, palpitations, extrasystolessupraventriculaires, hypotension, dyspnée, nausées, constipation, diarrhée, angioœdème, rash, crampes musculaires, asthénie, fatigue, élévation de la créatininémie, allongement de l’intervalle QT à l’ECG ; Rare : érythème, prurit, urticaire, malaise ; Très rare :Fibrillation auriculaire ; BAV du 2e et du 3e degré ; maladie du sinus. Propriétés * : ATC : C01EB17. L’ivabradine agit en réduisant uniquement la fréq. cardiaque par inhibition sélective etspécifique du courant pacemaker If qui contrôle la dépolarisation diastolique spontanée au niveau du nœud sinusal et régule la fréquence cardiaque. Prescription et délivrance : Liste I.Procoralan 5 mg : 34009 371 676 2 8, EU/1/05/316/003 (56 cp) : 52,36 € - 34009 567 208 1 1, EU/1/05/316/006 (100 cp, modèle hosp.). Procoralan 7,5 mg : 34009 371 679 1 8,EU/1/05/316/010 (56 cp) : 52,36 € - 34009 567 209 8 9, EU/1/05/316/013 (100 cp, modèle hosp.). Collect. Remb. Séc. soc 65 % dans le traitement symptomatique del’angor stable chronique chez l’adulte coronarien en rythme sinusal présentant une intolérance ou une contre-indication aux bêtabloquants. - Non remboursable à la date du01/10/2012 : - dans le traitement de la maladie coronaire, en association aux bêtabloquants chez des patients insuffisamment contrôlés par une dose optimale de bêtabloquants,et dont la fréquence cardiaque reste supérieure à 60 bpm, - dans le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique. (demande d’admission à l’étude). Info. méd. : Biopharma –35 rue de Verdun 92284 Suresnes Cedex - Tél. 01 55 72 60 00. Titulaire/Exploitant : Les Laboratoires Servier – 50, rue Carnot - 92284 Suresnes Cedex. AMM du 25/10/2005,rév. 10/2012. 13 PA 5024 FF V1.* Pour une information complète, consulter le RCP disponible sur le site Internet de l’EMA.

2 prises par jour1 prise le matin + 1 prise le soir

cf. § posologie et mode d’administration

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réalités Cardiologiques # 294_Juin_2013

Billet du mois

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Ç a y est, la Société européenne d’hypertension artérielle (ESH) a présenté àMilan et publié simultanément, le samedi 15 juin 2013, ses nouvelles recom-mandations pour la prise en charge de l’hypertension artérielle: 72 pages,

735 références bibliographiques.

Rappelons qu’en janvier 2013, des recommandations de 4 pages de la Société fran-çaise d’hypertension artérielle (SFHTA) étaient publiées sur leur site Internet et, enmai 2013, laHASproposaituneutilisationdesantihypertenseursguidéeparuneana-lysedeleurefficiencemédico-économiquedansunrapportde252pages,offrantainsiaux plus courageux un peu de lecture pour leurs prochaines vacances. En 6 mois, il yadonceutrois textessusceptiblesdeguidernospratiques thérapeutiquesdans l’HTA.

Les recommandations nord-américaines du JNC 8 auraient pu être présentées mi-mai 2013 à l’ASH à San Francisco, mais il n’y a été fait mention que de ce qu’ellespourraient contenir. Cependant, si tout va bien, elles devraient nous parvenir dansles… 3 mois à venir. En effet, depuis maintenant 2 ans, à la question de savoir quandparaîtrait le JNC 8, la réponse est invariable: dans les 3 mois. Enfin, si tout avancecomme prévu, de nouvelles recommandations de la HAS pour la prise en chargede l’HTA devrait être publiées… on ne sait pas bien quand, comme répondent lespersonnes susceptibles de savoir lorsqu’elles sont interrogées.

[ Qu’a dit la HAS en 2013 ?

Si 5 classes de traitements antihypertenseurs peuvent être utilisées en premièreintention dans le traitement de l’HTA, les diurétiques, les antagonistes calciqueset les IEC devraient être considérés en priorité en instauration de traitement. Eneffet, dans cette analyse de la HAS, d’une part, les bêtabloquants ne sont pas effi-cients en l’absence de complications cardiovasculaires et, d’autre part, les ARA 2,du fait de l’écart de prix constaté en juillet 2012 entre cette classe et les autres classesd’antihypertenseurs, seraientmoinsefficients que les3classesproposéesenpriorité,même s’ils apportent un bénéfice clinique en termes de tolérance et de persistancedu traitement. Cette conclusion pourrait cependant évoluer en cas de modificationsubstantielle de cette différence de prix ou d’actualisation des connaissances surl’effet des traitements antihypertenseurs sur la santé.

[ Que disent les recommandations européennes en 2013 ?

Concernant les cibles tensionnelles, la pression artérielle systolique (PAS) cible estinférieure à 140 mmHg et non plus à 130 mmHg chez les diabétiques ou en cas denéphropathie, qu’elle soit en rapport avec un diabète ou non. Chez le sujet de plus de80 ans, la cible est une PAS comprise entre 150 et 140 mmHg. Concernant la pressionartérielle diastolique, la cible est inférieure à 90 mmHg, sauf chez le diabétique oùelle est plus basse, inférieure à 85 mmHg, tout en sachant que chez ces patients desvaleurs comprises entre 80 et 85 mmHg sont sans danger et bien tolérées.

Et de 3…

➞ F. DiÉvartClinique Villette, Dunkerque.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin_2013

Billet du mois

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de l’ESH de 2013, les noms de deux descoordinateurs de ces recommandations(G. Mancia et A. Zanchetti) sont cités115 fois et 15,6 % des articles référen-cés (115 articles), dont la plupart desrevues générales notamment, provien-nent du Journal of Hypertension, voirede ses suppléments, dont A. Zanchettiest rédacteur en chef. Si la synthèse desdonnées de la science était exhaustiveet neutre dans les références des recom-mandationsnord-américainesàvenir, lesarticles issusdu JournalofHypertensiondevraient avoir un taux proche de celuiconstaté dans les recommandations del’ESH. Or, si l’on prend en référence leJNC 7 nord-américain, publié en 2003,parmi les 386 références citées, 2 seule-ment (0,52 %) étaient issues du Journalof Hypertension alors que les revuesnord-américaines (Hypertension, Am JHypertension, Arch Intern Med, Ann ofInternMed,etc.) et lesauteursdu JNC7yétaient beaucoup plus représentés qu’ilsne le sont dans les recommandations del’ESH. Vous avez dit analyse exhaustiveet neutre…

Pourquoi? Parce que les faits sont par-fois manquants ou fragiles, parce queles hommes ne peuvent pas unique-ment raisonner de façon scientifique,ils ne peuvent que faire des choix gui-dés par leur culture, leurs croyanceset/ou leurs intérêts, directs ou non,conscients ou non…

Pourquoi? Parce que le principe d’unerecommandation est de rendre des faitsopérationnels, et cela dans une sociétéayant ses contingences.

[ Que faire en pratique ?

Nepasconsidérerdes recommandationscomme ayant valeur de loi, mais commeune interprétation, possible et parfoisorientée, de faits dont il est devenuimpossible d’appréhender la totalité,interprétation permettant de guider unepratique.

tion peuvent être notées; en effet, là oùlaHASpropose3classes, les recomman-dationseuropéenneset françaisesenpro-posent 5 et ne différencient pas les IECdesARA2commetraitementpotentieldepremière intention. En 2011, des recom-mandations anglaises avaient proposéen première intention, soit un IEC ou unARA2,soitunantagonistecalcique,maisni les diurétiques ni les bêtabloquants.Pourquoi ces divergences alors quetoutes ces recommandations reposentsur les mêmes données scientifiques?

Pourquoi ? Probablement parce qu’ily a une différence fondamentale entrece que l’on demande aux recomman-dations et ce qu’elles sont vraiment.Il est demandé aux recommanda-tions d’être une synthèse des donnéesacquises et exhaustives de la sciencepermettant au médecin de guider sapratique. Selon cette vision, depuis unarrêté d’avril 2011, le Conseil d’Étatdonne aux recommandations issues dela HAS une quasi-force de loi. La réa-lité est, en fait, bien différente de cettevision idéalisée: les recommandationsne sont qu’une interprétation possiblede données partielles et choisies de la“science”. Ainsi, par exemple, parmi les735référencesbibliographiquesdutexte

Le niveau de preuve du bénéfice decertaines mesures hygiéno-diététiquesest classé au niveau maximal en termesd’effet sur la diminution de la pressionartérielle et en niveau intermédiaire entermes de réduction desévénements car-diovasculaires.Cesrèglessont ladiminu-tiondelaconsommationsodée, la réduc-tionpondérale, lapratiqued’uneactivitéphysique régulière, la consommationrégulière de fruits et légumes et la modé-ration de la consommation alcoolisée.

Les 5 classes thérapeutiques usuelles peu-ventêtreutiliséesenpremière intention, lechoixétantguidéparlescaractéristiquesdespatients. Mais on peut aussi comprendreque 4 classes sont favorisées lorsqu’estprésenté le schéma des associations thé-rapeutiques préférentielles (fig. 1) et queles bêtabloquants, sans être exclus, ne sontplus des traitements “favorisés” dans cesassociations. Enfin, retenons que l’associa-tiond’unIECetd’unARA2n’estpasrecom-mandée.LespropositionsdelaSFHTAsonttrèsprochessurcesdernierspoints.

[ Les divergences

Des différences notables en ce quiconcerneletraitementdepremièreinten-

Diurétiques thiazidiques

ARA2Bêtabloquants

Autresantihypertenseurs

IEC

Antagonistescalciques

Fig. 1 : Les associations de classes antihypertensives selon les recommandations de 2013 de l’ESH. Traitvert plein : associations préférentielles. Trait vert pointillé : associations utiles (mais avec quelqueslimites). Trait noir pointillé : associations possibles mais moins bien évaluées. Trait rouge : associa-tions non recommandées.

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réalitéscardiologiquesComité d’HonneurPr J. Acar, Pr M. Bertrand, Pr J.P. Bounhoure,Pr J.P. Bourdarias, Pr M. Brochier, Pr J.P. Broustet,Pr A. Casassoprana, Pr J. Deanfield,Pr J.M. Gilgenkrantz, Pr P. Godeau, Pr R. Gourgon,Pr R. Grolleau, Pr L. Guize,Pr P. Hugenholtz, Pr J. Kachaner, Pr H. Kulbertus,Pr J. Lanfranchi, Pr P. Lesbre, Pr S. Levy,Pr J.M. McKenna, Pr J.M. Mallion, Pr G. Motté,Pr A. Nitenberg, Pr J.Y. Neveux, Dr J.P. Ollivier,Pr J. Puel, Pr M. Safar, Pr K. Schwartz,Pr P.W. Serruys, Pr R. Slama, Pr B. Swynghedauw,Pr P. Touboul, Pr P.E. Valère

Comité ScientifiquePr J. Amar, Pr P. Amarenco, Pr M.C. Aumont,Pr J.P. Bassand, Pr J.P. Becquemin, Pr A. Benetos,Pr A. Berdeaux, Pr J. Blacher, Pr J.J. Blanc,Pr O. Blétry, Pr M.G. Bousser, Pr E. Bruckert,Pr B. Chamontin, Pr B. Charbonnel, Pr A. Cohen,Pr S. Consoli, Pr Y. Cottin, Pr J.C. Daubert,Pr J. de Leiris, Pr M. de Lorgeril, Pr H. Douard,Pr J.L. Dubois-Randé, Pr. H. Eltchaninoff,Pr J.L. Elghozi, Pr J. Ferrières, Pr M. Galinier,Pr J. Garot, Pr P. Gibelin, Pr T. Gillebert,Pr X. Girerd, Pr P. Guéret, Pr P.J. Guillausseau,Pr A. Hagège, Pr T. Hannedouche, Pr O. Hanon,Pr L. Hittinger, Pr B. Iung, Pr Y. Juillière,Pr E. Kieffer, Pr J.M. Lablanche, Pr A. Leenhardt,Pr J.Y. Le Heuzey, Pr D. Loisance,Pr J. Machecourt, Pr J.L. Mas, Pr G. Meyer,Dr J.P. Monassier, Pr J.J. Mourad,Pr G. Montalescot, Pr A. Pavie, Pr R. Roudaut,Pr D. Sidi, Pr M. Slama, Pr G. Slama,Pr J.L. Schlienger, Pr G. Steg, Pr D. Thomas,Pr C. Tribouilloy, Pr P. Valensi, Pr E. Van Belle

Comité de Lecture/RédactionDr B. Brembilla-Perrot, Dr J. Chapman,Dr B. Cormier, Dr X. Copie, Pr J.N. Dacher,Dr M. Dahan, Dr T. Denolle, Dr F. Diévart,Dr P. Dupouy, Dr F. Extramiana, Dr L. Fermont,Dr J.M. Foult, Dr D. Himbert,Pr Ph. Hoang The Dan, Pr P. Jourdain,Dr J.M. Juliard, Dr D. Karila-Cohen, Pr J.P. Laissy,Dr S. Lafitte, Dr D. Logeart, Dr D. Marcadet,Dr P.L. Massoure, Pr J.L. Monin, Dr M.C. Morice,Pr A. Pathak, Dr J.F. Paul, Dr D. Payen,Dr O. Paziaud, Dr F. Philippe,Dr G. Pochmalicki, Dr P. Réant, Dr Ph. Ritter,Pr J. Roncalli, Dr C. Scheublé, Dr L. Tafanelli,Dr B. Vaisse, Pr B. Verges

Rédacteur en ChefDr Marc Genest

Conseiller ScientifiqueDirecteur des opérations spécialesDr François Diévart

Directeur de la PublicationDr Richard Niddam

Réalités Cardiologiquesest édité par Performances Médicales91, avenue de la République75540 Paris Cedex 11Tél. : 01 47 00 67 14, Fax : 01 47 00 69 99E-mail : [email protected]

Secrétariat de RédactionAgnès Le Fur, Évelyne Kerfant

PublicitéDominique Chargy

Rédacteur graphisteMarc Perazzi

Maquette, PAOÉlodie Lelong

ImprimerieImpression : bialec – Nancy95, boulevard d’AustrasieCS 10423 – 54001 Nancy cedexCommission Paritaire : 0117 T 81117ISSN: 1145-1955Dépôt légal : 2e trimestre 2013

û Billet du mois3 Et de 3…

F. Diévart

û L’année cardiologique6 Infarctus du myocarde :

quoi de neuf en 2012 ?J.P. Monassier

û Revues générales11 Dépistage de l’ischémie myocardique

silencieuse chez le diabétiqueJ. Jaussaud, H. Douard, B. Catargi

17 Éléments rationnels du choixd’un stent actifJ. Van Rothem, T. Lefèvre

23 L’essentiel sur la VO2 en cardiologieJ.Y. Tabet, P. Meurin, F. Beauvais,A. Cohen-Solal

30 Gestion des antiagrégantsplaquettaires en chirurgienon cardiaqueT. Cuisset, J. Quilici, G. Cayla

Un bulletin d’abonnement est en page 29.Photo de couverture : © psdesign1 – Fotolia.com

Juin 2013 #294

10-31-1745

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réalités Cardiologiques # 294_Juin_2013

L’Année cardiologiqueInfarctus du myocarde

6

[ Le Livre de la LOI

Il n’est pas possible de débuter cetterevue annuelle sans donner la prio-rité aux nouvelles recommandationsde la Société Européenne [1] d’autantplus que généralement elles sont auto-matiquement validées par la SociétéFrançaise de Cardiologie. Comment nepas se précipiter sur les 10 pages dédiéesaux méthodes de reperfusion? Comptetenu des auteurs, notamment des deuxéminentscollègues français, onn’estpassurpris que le support bibliographiquesoit complet mais laisse peu de placedans les cas litigieux au bon sens duclinicien, notamment pour les patientsadmis tardivement.

Dans les essais cités, a-t-on examinéle pronostic d’un patient admis à la24e heure et porteur d’une occlusionde l’IVA proximale (oubli : il n’est pasnécessaire d’aller le vérifier en corona-rographie) puis dilaté à un groupe traitéexclusivement médicalement? En casde décès, lui aura-t-on donné toutes seschances? On constate avec plaisir queles résultats des études PRAGUE sontpris en compte et que des réseaux relianthôpitaux sans équipe entraînée prête àaccueillir un patient non thrombolysésont plus efficaces qu’une thrombolyseintraveineuse.

L’exception d’un délai supérieur à120 minutes entre le premier contactmédical et le geste invasif éventueldevant faire pratiquer une thrombolyse,surtout si la douleur dure depuis moinsde 2 heures, est clairement et justementexpliquée. On pourrait y ajouter un élé-ment pratique : exceptionnellement,

L’ infarctus du myocarde, dontle traitementest ladésobstruc-tion du vaisseau coupable au

sein d’un environnement pharmacolo-gique antithrombotique, antalgique etpeut-être protecteur myocardique, resteun défi clinique majeur. La mortalitéhospitalière stagne et les résultats myo-cardiques sont souvent décevants, sur-tout en cas d’occlusion proximale d’unvaisseau majeur. C’est la raison pourlaquelle je me suis fixé ce seul thèmepour 2012. Toutes les références ana-lysées concernent le domaine cliniqueen excluant (à une exception près) lestravaux concernant l’expérimentationanimale qui, pourtant, continuent à sedéveloppernotammentdans ledomainedu conditionnement myocardique.

pour des raisons anatomiques commepar exemple un ostium coronaire parti-culièrementmalpositionné, la thrombo-lyseest certainementplus efficacequ’unacharnement technique.

Pourquoi assouplir les délais d’inter-vention ? Chacun sait qu’une équipeentraînée doit pouvoir accueillir unpatient directement en salle en moinsde 45 minutes après le premier contactextrahospitalier. Décrire des sous-groupes pour lesquels il est possible“d’enfiler son pantalon” plus lentementà 3 heures du matin ou de quitter la tablefamiliale le dimanche est “ségrégatoire”et ouvre la porte à davantage de laxisme,pourtant déjà excessif. Le patient doitêtre pris en charge par un skilled staff :oui, cela est appliqué en France depuisun quart de siècle ! Mais les auteurspourraient-ils aller au bout de leur idée:pour qui ne le sait pas, un infarctus estdouloureux! Il l’est souvent encore plusau moment de la reperfusion. Par consé-quent, outre l’équipe cardiologique, laprésence d’un anesthésiste serait hau-tement souhaitable d’autant plus que,dans quelques cas, il est nécessaired’intuber… Par ailleurs, certains anes-thésiques volatiles pourraient à la foissoulager le patient et conditionner sonmyocarde.

On comprend parfaitement que lesméthodes de conditionnement n’aientété qu’effleurées. Le terme “lésions dereperfusion” (sauf lecture incomplètedema part) n’est pas cité, ni la belle étudeCIRCUS d’origine lyonnaise dont lesrésultats pourraient modifier l’approchede cette maladie: décidément l’Europe!Pourtant, des gestes techniques, issusdes travaux “préliminaires” sur le

Infarctus du myocarde :quoi de neuf en 2012 ?

➞ J.P. MonassierFondation du Diaconat, Mulhouse.hôpital Albert-schweitzer, ColMAr.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin_2013

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témoins et postconditionnés), une autreéquipe a mis en évidence une diminu-tion de libération de troponine, uneamélioration significative de la fractiond’éjection ainsi qu’une moindre libéra-tion de radicaux libres pendant la reper-fusion (malonyldialdéhyde [MDA]) [4].

3. Conditionnementpharmacologique

On peut rappeler les nombreuses molé-cules testées au cours des années pré-cédentes:

>>> L’adénosine est un autacoïde issude l’ATP, progressivement hydrolysépendant l’ischémie. Elle a donné desespoirs, laissant penser qu’elle était enmesure de stimuler les voies de protec-tion myocardique pendant la reperfu-sion. Associée à la thrombolyse chez despatientsprésentantuninfarctusantérieur,les résultats d’une perfusion de 3 heuressont positifs sur la taille de l’infarctus,la mortalité et l’insuffisance cardiaqueà condition d’être utilisée à dose élevée(70 µg/kg/minvs50 µg/kg/min(RossAM,2005)etdansundélai inférieurà3 heures(KlonerRA,2006).Uneméta-analysedesétudes recherchant l’impact de l’asso-ciation adénosine-angioplastie [5] a étéproposée cette année. Elle montre uneaugmentationde39 %dudegréderégres-sion de ST (p = 0,04) et une diminutiondu sus-décalage résiduel. Elle n’observeaucune différence quant à la libérationenzymatique, la qualité du flux périphé-rique (MBG 3) et la valeur de la fractiond’éjection. Paradoxalement, malgré cesdonnées timides, les auteurs constatentune tendance vers une baisse de la mor-talité (RR:0,15; IC:0,25-1,23).La largeurdel’intervalledeconfiance jetteundoutesur la réalité de cette donnée. Toutefois,on sait que la régression de ST est un fac-teur pronostique. Mais de tels résultatsne sont pas suffisants pour conforter uneutilisation routinière de cette molécule.Enfin, il faudra essayer de comprendrepourquoi l’évidence scientifique ne setraduit pas cliniquement.

1. Déception

Une étude randomisée, ayant inclus78 patients “postconditionnés” par4 cycles de 1 minute chacun, ne montreaucun bénéfice quant à la taille del’infarctus mesurée en IRM à 30 jours,voire une tendance à un effet négatifchez les diabétiques [3]. Les événementscliniques sont significativement plusnombreux après postconditionnement.Ce travail doit susciter une réflexionconcernant les patients qui justifient decette technique (âge inférieur? localisa-tion, délai). Débuter la procédure de pro-tection après avoir implanté le stent n’estprobablement pas la solution techniqueidéale.Enfin, l’algorithmepostcondition-nement ne peut être identique chez tousles patients. Ceux dont le ST s’abaisserapidementdèsledébutdelareperfusiondevraientêtreexcluscarlesgonflagesulté-rieurs aggravent l’ischémie. À l’inverse,quand le ST se majore, il faut se caler surson évolution et ne pas hésiter à augmen-terlenombredecycles.Ilparaîtégalementutile de tenir compte de la fréquence car-diaque initiale des traitements antérieurs(les plus lents: < 90/min ont souvent unphénotypeprotecteur),etonvérifieras’ilssont comparables dans les deux groupes.Enfin, lespluritronculaireset lespatientsangineux sont préconditionnés.

Il n’est pas impossible que le postcondi-tionnement ne soit utile que dans cer-taines populations et que sa techniquene soit pas encore idéale. Néanmoins,cette étude est là et mérite réflexion. Ellecontredit d’autres travaux antérieursfavorables à la technique (Staat P, 2005)(Thibault H, 2008) (Laskey WK, 2008)(Yang XC, 2007) (Zhao WS, 2009) égale-mentconstruits sous la formede“preuvede concept”. Il existe probablement unefenêtre chronologique et clinique d’effi-cacité; elle reste à déterminer.

2. Espoir

Utilisant des cycles de 30 secondes(chez respectivement 28 et 22 patients,

conditionnementmyocardique,auraientpu être considérés:– réocclure l’artère en cas d’orage ryth-mique ou en cas de paroxysme dou-loureux associé à une majoration dusus-décalage de ST;– ouvrir l’artère sans précipitation (leterme expedicious me paraît inappro-prié), utiliser en première intentionun ballon sous-dimensionné et ne pasle gonfler si un flux même modesteapparaît ;– ce dernier geste permet de démasquerunthrombusextensifet rendalorsnéces-saire la thromboaspiration (dont on seréjouit qu’elle ne soit pas proposée sys-tématiquement);– en cas de choc cardiogénique, mettreen place une contrepulsion, ne pas pra-tiquer immédiatement l’angioplastie,conditionner le patient et le transférervers un centre en mesure d’installer enpremière intention une “suppléancecirculatoire”. Un nombre significatifde patients se dégradent ou meurent aumoment du rétablissement du flux.

Ces remarques sont issues “du terrain”,et les faits constatés se randomisent mal.Au fait, a-t-on posé la question suivanteaux auteurs: combien d’infarctus avez-vous personnellement pris en charge aucoursdes12derniersmoispendantet endehors d’heures dites ouvrables? Pourl’infarctus, ce dernier terme est inaccep-table pour le patient.

[ Conditionnementmyocardique

Les lésions de reperfusion dont l’exis-tence n’est plus contestée chez l’animalet chez l’homme peut accroître la taillede l’infarctus de 40 à 50 % en prenant encompte l’étendue du tissu non viable àla fin de l’ischémie. Tous les travaux desprochaines années seront dirigés versce problème majeur, d’autant plus qu’ils’exprime avec la plus grande intensitéquand plus de 20 % du ventricule sont la“zoneàrisque”etqueledélaiestcourt [2].

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réalités Cardiologiques # 294_Juin_2013

L’Année cardiologiqueInfarctus du myocarde

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tiques [14]. Le point le plus séduisantconcerne l’utilisation du score SYNTAXdans ce contexte d’urgence [15]. Unevaleur supérieure à 22 prédit une mor-talité très supérieure à 42 mois (93 vs79 %; p < 0,002).

[ No-reflow

Il est satisfaisant de trouver des auteursqui admettent que la perfusion péri-phérique après angioplastie peut êtreperturbée par d’autres paramètres quel’athéro-thrombo-embolie. Quatre para-mètres y participent [16]:– la fuite distale de thrombus;– les lésions endothéliales ischémiques;– les lésions endothéliales de reper-

fusion;– ladysfonctionvasomotriceartériolaire.

Cettecomplicationdereperfusiongardeun pronostic défavorable. Utilisant lescritères angiographiques les plus som-maires (flux TIMI < 3), il est rencontréchez 2,3 % des patients (population= 6553). La mortalité quadruple : 12,6vs 3,8 %; p < 0,001) [17]. Le retour desmolécules “vasoactives” comme lenitroprussiate de sodium divise par 2l’index de résistance périphérique(45 ± 37 vs 76 ± 42 ; p = 0,0006) [18]chez des patients ayant pourtant atteintun flux TIMI 3. La souffrance des diffé-rentes composantes histologiques desparois du cardiomyocyte et de l’artèrecoronaire trouve sa démonstration dansles lésions du glycocalyx (fine couchede glycoprotéines qui recouvre et pro-tège les deux membranes), partielle-ment détruit par la reperfusion [19].Certains paramètres biologiques per-mettent de prédire la survenue d’uneperfusion médiocre :– l’élévation immédiate préprocéduraledu BNP qui, lorsqu’il est supérieur à80 pg/mL, annonce une moindre régres-sion de ST, un flux plus lent, un indice“Blush” plus bas et une mortalité plusélevée (16,2 vs 3,3 %). Malgré l’opposi-tion que nous rencontrons auprès de nos

myocardique détruite, mais une amé-lioration de la perfusion tissulaire etun remodelage moins intense à 6 mois,ce qui contredit le travail de Ludman[9] (n = 51) qui avait au contraireobservé une obstruction microvascu-laire plus importante et une dilatationventriculaire accrue. Des différencesde doses peuvent peut-être expliquerces résultats diamétralement opposés.La méta-analyse de Gao [10] (n = 1564)a confirmé l’absence d’effets sur tousles critères de jugement, elle ne majorepas le risque de thrombose de stent. Lamesse n’est pas nécessairement dite :des données expérimentales mon-trent des effets favorables de l’EPOadministrée au décours d’ischémiesbrèves [11], mais avec une fenêtre d’ef-ficacité faible, ce qui pourrait s’avérercliniquement peu réalisable. Une ana-lyse ancillaire de REVEAL pourraitmettre un point final à ce débat ou, aucontraire, faire poursuivre les essais.

[ Stents nus oupharmacoactifs ?

Il est désormais admis que les stentsactifs diminuent le risque de resténoseau prix d’un faible taux supplémentairede thromboses tardives.Dans lecontextede l’infarctus, il est difficile de savoir sile patient sera en mesure de suivre unethérapeutique antiplaquettaire doublede façon plus prolongée, notamments’ils sont âgés et susceptibles de subirunechirurgie imprévue.La faisabilitéestdémontrée mais le choix doit se faire aucas par cas. Sur près de 1000 référencesdédiées à ce sujet, étonnamment 300ont encore été publiées en 2012 : ellesn’apportent que peu d’éléments nou-veaux. Chez le patient insuffisant rénalchronique (ce qu’il ne sait pas toujours),les stents au sirolimus ou au paclitaxelsemblent supérieurs en termes de res-ténose [12]. Le paclitaxel est aussi effi-caceavecousanspolymère [13].Auseind’une population générale, sirolimusou paclitaxel offrent des résultats iden-

>>> Le nicorandil (actif sur l’ouver-ture des canaux KATP mitochondriauxpotentiellement en mesure d’éviter latransition mitochondriale) et le peptidenatriurétique auriculaire (ANP) (carpé-ritide) ont fait l’objet de l’essai J-WIND(Asakura M, 2004) (Minamito T, 2004),en association avec l’angioplastie pri-maire. Le nicorandil n’a pas confirméles espoirs et l’ANP a montré une dimi-nution de 15 % de la taille de l’infarctusetuneaméliorationde la fonctionventri-culaire gauche (Kitazake 2007).

Le passage du laboratoire à la cliniqueest donc souvent décevant. Les résultatsde l’évaluation d’autres molécules, dontlesupportexpérimentalestpuissant,ontété publiés:

>>> L’exénatide est un analogue duglucagon. Dans un travail randomisé(n = 172) [6], le produit a été perfusé15 minutes avant le début d’une throm-bolyse puis poursuivi pendant 6 heures.Le critère premier de jugement (massemyocardique épargnée représentée parla taille de l’infarctus/aire myocardiqueà risque mesurée en IRM à 90 jours) estpositif:71 (13) %vs62(16) %;p= 0,003.Cette molécule destinée à améliorer lemétabolisme de l’infarctus reperfusémérite d’être réévaluée.

>>> L’érythropoïétine (EPO). Lerécepteur de l’EPO active une voie desurvie myocardique impliquée dansla prévention des lésions de reperfu-sion (PI3K-Akt) (Tada H, 2006). Desdonnées expérimentales paraissaientconfirmer cette logique fondamen-tale. Une étude pilote randomisée (n= 35) (EPOC-AMI) a montré en 2010qu’une faible dose d’érythropoïétine,associée à l’angioplastie primaire, amé-liore la fraction d’éjection (49 vs 55 %;p = 0,003). L’étude REVEAL (Najjar S,2011) a été confirmée par une étudeplus confidentielle [7] et d’autres tra-vaux en cours ont été soumis au coursde cette dernière année: Prunier [8] n’apas constaté de diminution de la masse

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réalités Cardiologiques # 294_Juin_2013

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[ La cerise sur le gâteau !

J’avais annoncé (avec regrets) que cetterevue annuelle occulterait de nom-breuses données scientifiques fonda-mentales qui pourraient changer nospratiques pharmacologiques à l’avenirsi les l’industrie pharmaceutique veutbien s’intéresser à ce domaine. Il nem’est pas possible de clore ce textesans citer le remarquable travail del’équipe de Christophe Piot, publiéesous la plume de François Roubille[32]. Ces auteurs ont réabordé le post-conditionnement sous un autre jouret ont voulu savoir si, chez la sourisdont l’artère antérieure était occluse,le postconditionnement pouvait, àl’instar du préconditionnement, béné-ficier d’une seconde fenêtre d’effica-cité plus tardive. Après 40 minutesd’ischémie et 60 minutes de reperfu-sion, ils ont effectué 3 cycles condi-tionnants à 10 secondes, 1, 5, 10, 15,20, 30 et 45 minutes. Ils ont eu la “sur-prise” de constater que la techniqueredevenait efficace (taille de l’infarc-tus) à la 30e minute et ont démontréque si les premières minutes de reflowsont essentielles, les lésions de reper-fusion (comme celles d’ischémie) sedéveloppent progressivement comme“le front d’une vague destructrice” !À suivre.

C’est volontairement que j’ai laissé“sur le banc de touche” la thérapie cel-lulaire en attendant qu’elle murisse etqu’elle puisse être décrite plus longue-ment en 2014.

ses conséquences (sous forme d’hémor-ragies intramyocardiques) va bénéficierplus largement de la résonance magné-tique qui devient le gold standard de lamesure de la taille de l’infarctus, de laqualité de la perfusion et de la présenced’hémorragies intramusculaires. Unerevue superbe de Katherine Wu mérited’être lue [27].

[ Les anti-GP IIb/IIIaont-ils encore une place ?

Oui, surtout par voie intracoronaire !Quatre méta-analyses des essais rando-misés comparant les deux approchessont disponibles [28-31]. Les résultatssont synthétisés dans le tableau I, ensachant que certains essais sont trèsprobablement communs à plusieursanalyses.

L’étude de Shimada et al. met en évi-dence une diminution particulière-ment significative chez les patientsayant été en outre par thrombectomie :6,1 vs 16,2 % p = 0,0004. Deux analysesn’ont concerné que l’abciximab. Il n’estévidemment pas acceptable d’essayerd’en extraire des comparaisons entre lesmolécules disponibles. On peut toute-fois rappeler que ce produit n’étant passpécifique des plaquettes mais interve-nant également sur les leucocytes, dontl’implicationdans les lésionsdereperfu-sion est majeure, pourrait être considéréavec des “yeux de Chimène” et pourraitjustifier des études ciblées sur cet événe-ment désormais capital.

laboratoires, cet indice prend une placede plus en plus importante dans notrepratique tant à l’admission qu’au coursdu suivi du patient [20] ;– relation neutrophiles-lymphocytes(N/L) : un rapport N/L supérieur à3,3 prédit un no-reflow (critère clas-sique TIMI flow), avec une sensi-bilité de 74 % et une spécificité de83 %, parallèlement à une élévationdes événements cliniques [21]. Dansces cas, la CRP ultrasensible s’élèveconjointement.

L’utilisation préangioplastie d’unedose de charge de statines a été pré-cédemment suggérée (Winchester DE2010). Elle peut être proposée avecsuccès avant une angioplastie pri-maire [22] et permet une diminutiondu risque de no-reflow (RR = 0,43 ;IC 0,26-0,71 ; p < 0,001).

Qu’en est-il de la thromboaspiration?Elle n’est pas discutée en cas de throm-bus extensif [23]. Mais, malheureuse-ment, même dans cette circonstanceanatomique, aucun bénéfice n’estmis en évidence. Bien entendu, ellepeut être utilisée par voie radiale. Elleconnaît aussi quelques échecs qui peu-vent être contournés en utilisant lecathéter-guide 6F (prudemment) [24].De nouveaux outils apparaissent [25],y compris pour les thromboses de pon-tages veineux. L’étude TAPAS n’a sansdoute pas convaincu tout le monde.Une étude a analysé les résultats dela thrombectomie par tomographie decohérence optique [26], et les auteursn’ont remarqué aucune différencequant à la zone perfusée.

Le sujet du no-reflow reste difficile,cliniquement d’importance, de physio-pathologie variée et de traitementcomplexe. Aux côtés de la thrombo-aspiration qui ne doit pas être systéma-tique mais élective, d’autres approchespourrontêtreproposéesafinde faire faceaux composantes non thrombotiques decette complication. Son étude et celle de

Auteur Etudes Patients Mortalité% TIMI 3 Blush 2,3 Événements Hémorragies

Friedland 10 1 590 – RR : 1,08* – – RR : 0,92Shimada 4 1 148 1,5 vs 3,6* – – 6,1 vs 16,2*Wang 8 686 RR : 0,44* RR : 1,46* RR : 1,78* RR : 0,48*De Luca 8 3 259 RR : 0,85 RR : 1,76* ** – *** RR : 1,19* différence significative ** regroupement des deux paramètres *** différence en faveurdes patients à haut risque.

Tableau I : Résultats des méta-analyses.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin_2013

L’Année cardiologiqueInfarctus du myocarde

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L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflitsd’intérêts concernant les données publiéesdans cet article.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues généralesDiabète

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Résumé : La pathologie coronaire apparaît comme la principale cause de décès du patient diabétique et tendà se présenter sous forme silencieuse, ce qui retarde le diagnostic.Néanmoins, le dépistage systématique de l’IMS dans cette population est actuellement largement débattudepuis la publication des études DIAD et DYNAMIT, dans lesquelles aucun bénéfice sur la mortalité n’étaitretrouvé. De plus, il est actuellement reconnu, après les études COURAGE puis BARI 2D, l’absence de bénéficeà une stratégie de revascularisation percutanée en comparaison avec un traitement médical optimisé.Ces résultats sont cependant à nuancer lorsque l’ischémie myocardique d’effort est très étendue (> 10 % de lamasse ventriculaire) ou si les capacités à l’exercice très limitées !Si la stratégie de dépistage repose actuellement sur les recommandations de la SFC/ALFEDIAM de 2004, lesAméricains ont récemment largement réduit les indications de recherche de l’IMS en soulignant notammentl’intérêt croissant de la mesure du score calcique.

➞ J. JAUSSAUD1,H. DOUARD1,2, B. CATARGI2

1 Service de Cardiologie Médicale,Épreuve d’Effort et Réadaptationdes Cardiaques, CHU de Bordeaux,Hôpital Haut-Lévêque, PESSAC.2 Service d’Endocrinologie-Diabétologie, CHU de Bordeaux,Hôpital Haut-Lévêque,PESSAC.

Dépistage de l’ischémie myocardiquesilencieuse chez le diabétique

L’ incidence croissante dudiabète (notamment detype 2), associée ou non à

d’autres facteurs de risque cardiovascu-laires, estunvéritableproblèmedesantépublique. En effet, il est actuellementreconnu que le diabète est un facteurde morbi-mortalité vasculaire majeurpuisque le risque de décès d’originecoronaire est équivalent dans cettepopulation à celui des patients ayantdéjà présenté un syndrome coronaireaigu. Or, la maladie coronaire seraitresponsable de plus de 65 % des décèsdans cette population.

De plus, la coronaropathie du diabé-tique, complexe et d’évolution insi-dieuse, tend à se présenter sous uneforme silencieuse, (IMS) retardant alorsle diagnostic et le traitement spécifique,aggravantainsi lepronosticdespatients.

La question du dépistage systématiquede l’IMS est néanmoins remise en cause

par l’intérêt des tests non invasifs cou-plés ou non à une imagerie, d’autant queles bénéfices de la revascularisation,notamment par angioplastie, ne sont pasévidents chez ces patients.

[ L’ischémie myocardiquesilencieuse chez lediabétique

Il est reconnu que le patient diabétiqueprésente au moins 2 fois plus d’IMSde type 1 (patients asymptomatiquessans antécédents d’infarctus) que lenon diabétique [1]. Son incidence estsupérieure dans le diabète de type 2et concerne environ 25 % des patients[1, 2]. Elle serait liée à une dysfonc-tion endothéliale, à une augmentationdes bêta-endorphines (diminuant lasymptomatologie angineuse) et à unedysfonction du système nerveux auto-nome. Il existe par ailleurs une relationentre l’existence d’une IMS et le risque

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues généralesDiabète

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[ Faut-il systématiquementdépister l’IMS ?

Il existe donc depuis plusieurs annéesune véritable controverse entre les par-tisans d’une recherche systématiquede l’IMS et les partisans d’une relativeabstention de dépistage. Celle-ci estnourrie par la pratique quotidienne despraticiens diabétologues et cardiologueset a été renforcée par l’étude DIAD [7].Cette dernière visait à étudier l’intérêtd’un dépistage scintigraphique (adéno-sine) systématique versus l’absence dedépistage dans une cohorte prospectiverandomisée de diabétiques de type 2sans maladie coronaire connue. Lecritère primaire était un critère compo-site (IDMnonfataletdécèscardiaque), ladurée moyenne de suivi était de 4,8 ans;1123 patients ont donc été inclus dansce protocole dans lequel il n’a pasété retrouvé de bénéfice pronostiquesignificatif par un screening systéma-tique (2,7 % d’événements primairesdans le groupe dépisté versus 3 %).

Néanmoins, cette étude a été vivementcritiquée en raison d’un faible taux decoronarographies réalisées à la suite desscintigraphies positives et une popula-tion à faible risque cardiovasculaire(25 % avaient une microalbuminurieou une protéinurie, la durée moyennedu diabète était de 8-9 ans, etc.). De plus,il était retrouvé un defect perfusionnelde stress de l’ordre de seulement 4,1 %du ventricule gauche chez les partici-pants avec événements contre 1,4 %pour ceux sans événement (p = 0,12) :

hypertension artérielle traitée ou deschiffres supérieurs à 140/90 mmHg,un tabagisme actif ou arrêté depuismoins de 3 ans et un antécédent fami-lial cardiovasculaire avant 60 ans. Laprésence d’une atteinte athéroma-teuse périphérique (artérite, sténosecarotide) ou d’une albuminurie avecdeux autres facteurs associés constitueégalement des indications classiquesde dépistage [5].

En effet, un âge > 60 ans est associé àune prévalence de l’IMS élevée (25 %des cas). De plus, la valeur prédictived’une IMS pour la survenue d’un évé-nement cardiaque majeur est plus forte(33 %). L’ancienneté du diabète est unfacteur indispensable à la stratificationdu risque coronaire dans cette popula-tion puisque, au-delà de 10 ans, le ris-que relatif de décès de nature coronaireest au moins 3 fois plus élevé que chezles non diabétiques. Enfin, l’existenced’une microalbuminurie est associée àunrisquecardiovasculaireestiméà30 %à 10 ans.

En 2010, l’American DiabetesAssociation (ADA) a revu ses recom-mandations concernant le dépistage del’ischémie myocardique du diabétiqueen ne le proposant qu’aux sujets symp-tomatiques (angor typique ou non) ouprésentant une anomalie à l’ECG derepos, rappelant que le dépistage despatients asymptomatiques et sans ano-malie ECG n’a pas montré de bénéficecliniqueetque l’IMSpouvait se résoudreavec le temps [6].

cardiovasculaire notamment coronaire.Ainsi, après 60 ans, le risque relatif desurvenue ultérieure d’un événementcardiaque majeur est 3 fois plus élevéchez le diabétique ayant une IMS quechez le diabétique sans IMS ! [3]

L’existence d’une IMS augmente le ris-que de sténose coronaire d’un facteur 7.Cependant, il faut rappeler qu’une sté-nose coronaire épicardique > 70 % n’estpas systématiquement accompagnéed’une altération de la réserve coronaireau cours d’un test d’effort ou d’un stresspharmacologique ! Inversement, undefect perfusionnel scintigraphique par-fois significatif peut être observé alorsque le réseau coronaire épicardique est“normal”.

Ainsi, Marciano et al. retrouvent unealtération de la réserve coronaire aucours d’une scintigraphie de stress chez22 % des diabétiques alors que la coro-narographie est dite “normale” [4]. Cesanomalies ont été imputées à une alté-ration de la microvascularisation asso-ciée à une dysfonction endothéliale.Toutefois, il semble que le pronostic del’IMS soit essentiellement dépendant del’existence ou non de sténoses > 70 % àl’angiographie.

[ Le dépistage de l’IMS :les recommandations(tableau I)

Actuellement, les recommandationsfrançaises (SFC/ALFEDIAM 2004)proposent la réalisation d’un test dedépistage de l’ischémie coronairechez les diabétiques de type 2 deplus de 60 ans, ou après une exposi-tion au diabète > 10 ans (ou diabètede type 1 > 15 ans chez un patient deplus de 45 ans) en cas de présencede deux facteurs de risque associés(dyslipidémie supérieure à 2,5 g/L ;LDL-cholestérol supérieur à 1,6 g/L ;HDL-cholestérol inférieur à 0,35/L ;triglycérides supérieurs à 2 g/L), une

Recommandations SFC/ALFEDIAM 2004 Recommandations ADA 2012Diabète de type 2 > 60 ans ou Diabétiques avec symptômes

diabète > 10 ans + 2 FDRCV typiques ou atypiquesDiabète de type 1 > 45 ans et ECG anormal

depuis > 15 ans + 2 FDRCVDiabète et AOMI/athérome carotide/

macroprotéinurieDiabète et microalbuminurie

et 2 FDRCV

Tableau I : Recommandations du dépistage de l’IMS chez le diabétique de type 2.

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plus de 1900 patients multitronculaires,unestratégiede revascularisation percu-tanée par stent actif et les pontages. Lecritère primaire comprenant décès, IDMet AVC est alors significativement réduitdans le groupe chirurgical (p = 0,005),plaidant ainsi en faveur d’une stratégiede revascularisation par pontage chezles diabétiques multitronculaires [13].D’ailleurs, il est probable que l’étenduede l’ischémie dans ce groupe soit supé-rieure que dans un groupe monotroncu-laire ou présentant des lésions distales.

La notion de l’étendue de l’ischémiepour la décision de revascularisationmyocardique est d’ailleurs reconnuedans la maladie coronaire stable. Ainsi,iln’estdémontréunbénéficede la revas-cularisationquesi l’hypoperfusionmyo-cardiquedestressconcerneplusde10 %de la masse ventriculaire gauche, y com-pris chez le diabétique (ce qui était loind’être le cas dans l’étude DIAD).

Il est admis qu’une sténose jugée signi-ficative (soit > 70 %) en luminographien’induit pas systématiquement uneischémie myocardique: il est désormaisconnu, notamment après l’étude FAME,que le bénéfice d’une revascularisation,notamment par voie percutanée, ne seraattenduqu’aprèsavoir lapreuvecertainedu caractère fonctionnel d’une sténose[14] et d’une ischémie conséquente dansle territoire myocardique de l’artère sté-nosée [8]. De plus, il a été démontré dansuneétudeposthoc, issuedelapopulationde COURAGE, que la revascularisationcoronaire en cas d’ischémie silencieusenediminuaitpasdemanièresignificativele risque de décès ou d’IDM [15].

L’ensemble de ces points ne plaide pasen faveur de gestes de revascularisa-tion élargis dans la maladie coronairestable. Néanmoins, il semble fonda-mental de prendre en compte la notiond’étendue de l’ischémie myocardique,notamment grâce aux techniques noninvasives de dépistage de l’ischémiemyocardique que sont la scintigraphie

coronariens, DADDY D intègre les deuxfaces de la problématique (screening etrevascularisation) et une méthode dedépistage usuelle qu’est le test d’effort.

[ Pour quel traitement ?

Toutes les études s’accordent pour con-firmer la place majeure du traitementmédicaloptimaldudiabèteetdesautresfacteurs de risque vasculaire afin deréduire la morbi-mortalité coronairedans cette population. La place du testischémique dans le dépistage de l’IMS,notamment par un test d’effort coupléou non à une imagerie myocardique(échocardiographie de stress ou scinti-graphie), pourrait alors en cas de posi-tivité affiner la stratification du risquevasculaire tel qu’induire un renforce-ment du traitement médical: ajout d’unantiagrégant plaquettaire, voire d’unralentisseur de la fréquence cardiaquedans une population chez laquelle laneuropathie végétative induit fréquem-mentune tachycardie sinusaleauxeffetspro-athéromateux.

Malheureusement, la positivité d’untest de dépistage de l’IMS conduit tropsouvent à la réalisation d’une corona-rographie qui peut alors déboucher surun geste de revascularisation percutané,voire chirurgical. Or, il a été démontréle faible bénéfice de la revascularisationcoronaire percutanée sur la mortalitédes patients présentant une coronaro-pathie stable, notamment après l’étudeCOURAGE [11]. Dans BARI 2D [12],après 5 ans de suivi, il n’est pas mis enévidence de différence de mortalité nid’événements majeurs (décès/IDM/AVC) entre le groupe revascularisé enpremière intention et celui traité par leseul traitement médical ! Néanmoins,dans le groupe des pontés, dans lequelil y avait plus de tritronculaires, le tauxd’événements majeurs est un peu plusbasquesoustraitementmédical.Cepointest par ailleurs précisé grâce à l’étudeFREEDOM qui a comparé, en incluant

les patients présentaient une ischémierelativement limitée pour laquelle ungeste de revascularisation n’aurait pasété plus bénéfique qu’un traitementmédical optimal, comme l’ont suggéréHachamovitch et al. en 2003 [8]. D’autrepart, alors que l’incidence annuelle desévénements était de l’ordre de 0,6 %/andans l’ensemble de la cohorte, celle-ci était de l’ordre de 2,4 %/an dans lapopulation ayant un defect perfusion-nel modéré à sévère à la scintigraphie.Il faut rappeler que, dans cette étude, ladurée d’exposition au diabète, la fonc-tion rénale, le taux de LDLc, la micro-albuminurie, la neuropathie végétative,une AOMI étaient des critères prédictifsdu risque d’événements.

Enfin, les résultats de DIAD ont par lasuiteétéconfirmésparl’étudeDYNAMITmalgré son manque de puissance et lesdifficultés de recrutement qui avaiententraîné l’arrêt prématuré de l’étude[9]. Au-delà de la “négativité” de celle-ci, une autre étude italienne a démontréquelastratégiededépistagesystématiqueétait bénéfique dans une population de141patientsdiabétiquesdetype2asymp-tomatiques à haut risque [10]. Ainsi, ilsemble fondamental de tenir comptedu risque cardiovasculaire global lié audiabète, mais aussi de repenser la straté-giedeprescriptiondesexamenscomplé-mentaires,notammentdelascintigraphiemyocardique de stress.

L’étude italienne DADDY D, actuelle-mentencours,permettraprochainementde répondre à la question du screeningsystématique de patients diabétiquesde type 2 à haut risque avec objectif detraitement, en comparant l’effet d’unestratégie médicamenteuse optimiséeseule à celle d’une revascularisationpercutanée ou chirurgicale après untest d’effort positif ayant conduit à uncontrôle coronarographique. En effet,si DIAD répondait à la question dudépistage systématique et que BARI 2Ds’était uniquement intéressée à la straté-gie thérapeutique chez des diabétiques

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Revues généralesDiabète

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ischémique apparaissent certes plussensibles et spécifiques, possédant sur-tout une valeur quantitative (valeur cut-off de 10 %) et localisatrice supérieure.L’épreuve d’effort permet une stratifica-tion plus précise du risque coronarien.Plusieurs études ont montré que cer-tains paramètres, dont principalementla capacité d’effort (en METs), reflétantindirectement la fonction ventriculairegauche,ontuneexcellentevaleurprédic-tive négative pour le risque d’infarctus,la mortalité cardiovasculaire, le risqueopératoire ou encore plus récemmentla mort subite. Néanmoins, si l’épreuved’effortpeutmanquerde fiabilitédans lareconnaissance des atteintes monotron-culaires à faible risque, sa sensibilité estnettement supérieure dans le dépistagedes lésions tritronculaires sévères ou dutronccommun,pour lesquels lebénéficed’une revascularisation chirurgicale estactuellement reconnu (étude BARI 2D).

Plusieurs séries ont montré que la sen-sibilité et la spécificité du test d’effortétaientidentiquesentrelesdiabétiquesetlesnondiabétiques.Demême, les limitesd’interprétationchezlesdiabétiquessontsimilairesàcellesdespatientsnondiabé-tiques, conséquences des modificationsélectrocardiographiques de repos, maisaussi des limites d’ordre périphérique,musculaireouarticulaireetpulmonaire.Or, la principale valeur pronostiquedu test d’effort est d’être capable de leréalisercomme dans l’étude de Vanzetto[18] ! Cette valeur pronostique du testd’effort chez les diabétiques de type 2a été soulignée dans plusieurs travaux.L’étudemilanaisemenéechez700diabé-tiquesasymptomatiques,suivissur5ans,montre que le taux d’incidents gravespasse de 0,97 à 3,85 % en cas de testsanormaux.ChaqueMETsupplémentaireatteintdiminuede25 %lamortalitédanstoutes les tranches d’âge. Il paraît alorsraisonnabledelimiter les testsd’imagerieaux tests d’effort très pathologiques,notamment en termes de performanceet d’ischémie, ou en cas d’impossibilitéde réalisation ou d’interprétation

Dans l’étudePET[17],dans laquelleplusde 20 % des patients étaient des diabé-tiques, le bénéfice d’un programme deréentraînementétait supérieursur lasur-vieàunerevascularisationcoronariennepercutanée! Plus particulièrement, chezle diabétique, la réadaptation permetune réduction du stress oxydant et del’HbA1c, une amélioration de la fonc-tion des cellules bêta du pancréas et dela vasodilatation endothélium-dépen-dante, une diminution de l’insulino-résistance, mais surtout une réductionde la tension artérielle, du taux de LDLcet une augmentation du HDLc!

[ Les méthodes de dépistagede l’IMS

Un rappel bayésien rapide soulignequ’untestdedépistageefficaceestessen-tiellement pertinent en cas de préva-lencesuffisammentélevéedelamaladie,cequiest lecaspour toutes les situationscliniques précédemment énoncées.L’épreuve d’effort isolée semble moinsperformante que les tests d’imageriecouplés, ce qui est logique quand ils sesurajoutent à l’analyse de l’ECG d’effortphysiologique, un peu moins quand ilssont pharmacologiques. Cependant,les tableaux comparatifs classiques desépreuves d’effort et des autres examensnon invasifs d’imagerie ont été réalisésà partir de séries où il existe un biaisde vérification majeur : un test négatifconduit rarement à une coronarogra-phie, ce qui augmente la sensibilité enabaissant la spécificité, et les décisionsde vérification coronarographique nesont jamais prises avant la réalisationd’un test non invasif. Il faut soulignerégalement les différences de coûts etde disponibilité entre ces techniquesd’imagerie et un test d’effort simple.

Cependant, l’épreuve d’effort doitde plus en plus être considérée poursa valeur pronostique davantage quepour sa valeur diagnostique, alors queles autres techniques de détection

et l’échocardiographie de stress, maisaussi de la performance d’effort réalisée.En justifiant la réalisationd’undépistagede l’ischémie myocardique silencieusedans une population de diabétiquesde type 2 considérée à haut risque, laréalisation d’une coronarographie nedevrait être décidée qu’en cas de béné-fice escompté d’un geste de revasculari-sation, c'est-à-dire si – et seulement si –l’étendue de l’ischémie est supérieure à10 % de la masse ventriculaire gauche etpour une capacité d’effort abaissée.

Laplacedesnouveauxanti-ischémiqueset notamment de l’ivabradine doit égale-ment être revue dans le contexte dudiabétique de type 2. Dans les essaisde développement, il n’existait pas demodificationdesparamètresglucidiques,et l’efficacitéainsiquelatoléranceétaientcomparables à celles de la populationgénérale. Il est reconnuqu’unefréquencecardiaquederepossupérieureà70batte-ments/minute dans une populationdiabétique de type 2 coronarienne (doncdépistée…) est un marqueur prédictifpuissant d’événements cardiovasculai-res.Deplus, ilaétédémontré,notammentdansSHIFT,uneefficacitédel’ivabradineéquivalente sur le pronostic des insuf-fisants cardiaques, qu’ils soient diabé-tiques ou non! L’intérêt du dépistagede l’IMS apparaît ainsi pertinent afind’adapter la fréquence cardiaque [16].

En effet, il est désormais reconnu qu’unefréquence cardiaque de repos “élevée”dont l’incidence est fréquente chez lediabétique (neuropathie végétative)s’accompagne d’une augmentation desbesoins en oxygène, favorise le dével-oppement de l’insuffisance cardiaquemais aussi de l’athérosclérose touten réduisant la stabilité des plaquesd’athérome, réduit la durée du remplis-sage ventriculaire gauche et favorise leremodelage “délétère” du myocarde…

Enfin, l’intérêt de la réadaptation et del’activité physique en général du patientcoronarienstablen’estplusàdémontrer.

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la plus pertinente en s’aidant si besoindes nouvelles technologies telles que laFFR pour préciser au mieux l’origine del’ischémie myocardique.

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voire d’une angioplastie, mais surtoutpermettre de renforcer si besoin le trait-ement médical et d’organiser une sur-veillance adéquate.

L’intérêt croissant des stratégies médica-menteuses de réduction de la fréquencecardiaque devrait être revu dans cettepopulation ainsi que le rôle de la réad-aptation à l’exercice. Par ailleurs, mêmesi les bénéfices de la revascularisationpercutanée ne semblent pas démon-trés après BARI 2D, il reste importantde dépister les patients pour lesquelsla chirurgie coronaire s’accompagned’une réduction du taux de décès ! Ilen est de même pour les diabétiquesayant une ischémie de stress étenduesur plus de 10 % de la masse ventricu-laire gauche.

Il sembleainsinécessairedemieuxstrat-ifier le dépistage de l’IMS en soulignantle rôle primordial des tests ischémiquesdans la quantification du defect perfusi-onnel, l’adaptation du traitement médi-cal et le suivi au long cours; envisagerune exploration coronarographique encas d’ischémie étendue afin de discu-ter de la technique de revascularisation

Plusrécemment,l’intérêtducoroscannermultibarette a été souligné, notammentdans les recommandations américaines,avec la mesure du score calcique. Cetindice, ne nécessitant aucune injec-tion de produit de contraste iodé per-mettrait de quantifier les calcificationscoronaires athéromateuses et pourraitprédire le risque d’ischémie myocar-dique de stress et d’événements cardio-vasculaires.En effet, siun score calciquesupérieur à 1000 prédit un taux de mor-talité annuelle de 7,7 %, il serait < 1 %si ce score est < 400.

Le score calcique serait le meilleurcritère prédictif de mortalité de toutescauses dans la population diabétiquede type 2 et également d’événementscoronariens. Il serait alors proposé deréaliser la mesure du score calciquechez les diabétiques de type 2 âgés deplus de 60 ans et évoluant depuis plusde 10 ans, en association avec au moins3 facteurs de risque cardiovasculaire. Sice score est < 100, un nouveau dépistageest proposé à 2 ans. Une scintigraphiemyocardique est proposée si ce scoreest > 400. Négative, elle conduit à unnouveau dépistage à 2 ans. Positive, unecoronarographie est alors proposée [19].

[ Conclusion

L’utilité du dépistage de l’IMS estactuellement débattue. Si la stratifica-tion du risque cardiovasculaire sembleindispensable dans cette populationafin d’adapter le traitement médicalau plus près des recommandationsactuelles, la recherche de l’IMS sys-tématique après DIAD et DYNAMITne semble pas être accompagnée d’unbénéfice sur la morbi-mortalité despatients, et ce d’autant que la revas-cularisation coronaire ne diminuepas les événements cardiovasculaires.Il faut néanmoins rappeler que la strat-ification du risque coronarien ne doitpas s’entreprendre dans le seul but dela réalisation d’une coronarographie,

û La stratégie de dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse dans lediabète repose sur les recommandations françaises éditées en 2004.

û Le dépistage systématique de l’IMS est actuellement débattu aprèsl’étude DIAD dans laquelle aucun bénéfice n’était retrouvé.

û Une stratégie de revascularisation percutanée (angioplastie et stent)ne fait pas mieux que le traitement médical optimal dans la maladiecoronaire stable.

û Le score calcique apparaît comme un indice pronostique puissant chez lediabétique.

û La capacité à l’effort (en METs) possède une valeur prédictive forte demorbi-mortalité dans cette population au même titre que l’étendue del’ischémie mesurée en scintigraphie ou à l’échocardiographie d’effort,et devrait apparaître systématiquement dans les rapports.

POINTS FORTS

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Revues généralesDiabète

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L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflitsd’intérêts concernant les données publiéesdans cet article.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues GénéralesCardiologie interventionnelle

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Résumé : Tous les stents actifs ne sont pas égaux et le choix d’un stent devrait être fondé sur des élémentsrationnels tenant compte de la “déliverabilité”, de l’efficacité et bien sûr de la sécurité d’utilisation.L’arrivée des stents actifs au début du IIIe millénaire a réellement été un saut technologique dans le domaine del’angioplastie coronaire. Les stents actifs de 2e voire de 3e génération ont aujourd’hui un risque de thrombose àcourt et long terme inférieur à celui des DES de 1re génération et comparable, voire inférieur, à celui des stentsnus. En 2013, les DES sont donc plus efficaces que les BMS et au moins aussi sûrs.Les stents à élution de “limus” sont aujourd’hui les plus utilisés et présentent des performances comparables,mais leurs architectures diffèrent. Les stents présentant une structure à 2 connecteurs longitudinaux ont unemeilleure flexibilité et possiblement une meilleure “déliverabilité”; cependant, ils sont plus fragiles avec unrisque accru de compression ou de déformation longitudinale, ce qui peut poser problème dans le traitementdes lésions complexes. Les stents actifs à polymères bioabsorbables, apparus plus récemment sur le marché,ont une efficacité comparable aux stents à polymères durables mais pourraient encore gagner en sécurité enréduisant le risque de thrombose très tardive. La barre est désormais placée très haute tant en sécurité qu’enefficacité et les nouveaux stents entièrement biorésorbables, dont les résultats sont très prometteurs, vontdevoir encore faire mieux pour s’imposer.

Éléments rationnels du choixd’un stent actif

L e choix d’un stent est une pré-occupation quotidienne du car-diologue interventionnel. Les

prothèses disponibles sont nombreuseset il n’est pas simple de fonder une pré-férence. La décision peut être influencéepar la connaissance des données de lalittérature (efficacité, sécurité), la facilitéd’utilisation du stent, voire des considé-rations personnelles ou financières oudes opportunités de recherche clinique.

Pour y voir plus clair, des travaux scien-tifiques tentent régulièrementdecompa-rer lesperformancesdesstentsentreeux.Les différences de résultats cliniquesexistent, mais sont souvent modestes etdifficiles à mettre en évidence, néces-sitant de larges cohortes de patients etdes suivis à long terme. Des critères dejugement intermédiaires plus sensiblescomme la perte luminale tardive (le

fameux LLL ou late lumen loss) ou letaux de thrombose sont souvent utilisés.Les comparaisons restent toutefois dif-ficiles tant les situations cliniques sontmultiples, les profils des patients et lestypes de lésions variables. Malgré cela,des éléments assez solides peuvent per-mettre de rationnaliser le choix.

[ L’apport des stents actifs

L’angioplastie au ballon seul, intro-duite par Andreas Gruentzig en 1977,était réservée à des lésions simples carassociée à un risque relativement élevéde complications périprocédurales et àun taux de resténose clinique de l’ordrede 40 %. L’introduction des stents nusen 1986 par Jacques Puel a permisd’apporterunegrandesécuritéà laprocé-dure d’angioplastie, mais a introduit un

➞ J. Van Rothem1,t. LefÈVRe2

1. Hôpital Universitaire Rangueil,ToUloUse.2. Institut Cardiologique Paris-sud,Massy.

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Revues GénéralesCardiologie interventionnelle

18

nouveau paramètre: le risque de throm-bose de stent. Initialement de l’ordrede 10 à 15 %, il a progressivement étéabaissé à un niveau de bruit de fond, del’ordre de 1 % à 1 an grâce aux améliora-tions techniques (meilleure apposition)etàunemeilleurepréparationdupatientavec la bithérapie antiplaquettaire pour-suivie pendant au moins 1 mois.

Le problème du retour élastique aprèsdilatation au ballonnet étant solutionnépar le stent, il demeurait le risque deresténose lié à la prolifération intimaleintrastent – responsable d’un risque deresténose clinique à 6 mois de l’ordre de15 % (20 à 30 % en angiographie) – d’oùl’idée d’ajouter une substance antipro-liférative délivrée progressivement aucontact de la paroi artérielle via un poly-mère attaché au stent. Dès la premièregénération, les stents actifs (Cypher avecle sirolimus et Taxus avec le paclitaxel)ont montré une efficacité spectaculairepour diminuer le risque de resténose etle taux de revascularisation de la lésiontraitée (le fameux TLR: target lesionrevascularization) [1] avec un taux deréinterventionà1anàunseulchiffre [2].Cela a entraîné, du fait de la sécurité dela procédure apportée par le stent et dufaible risque de récidive apporté par lasubstanceantiproliférative,unélargisse-ment progressif des indications vers deslésions plus complexes.

[ Risque de thrombose avecles premières générations

Si l’efficacité des stents actifs est incon-testable, leur sécurité d’utilisation estlongtemps restée un sujet de préoc-cupation et de controverse. Avec lesstents actifs de 1re génération, le risquede thrombose persiste au-delà de la1re année et on parle alors de thrombosetardive, voire très tardive [3] – phéno-mène déjà observé avec les stents nusmais jusqu’à présent considéré commenégligeable. Ce risque s’est avéré, au fildes études, plus important avec le stent

Taxus à élution de paclitaxel qu’avecle stent Cypher à élution de sirolimus.Dans une étude récemment publiée,le risque de thrombose tardive à 3 anss’est avéré plus important avec le stentCypher qu’avec le stent Endeavor, stentau zotarolimus, plus récemment intro-duit sur le marché (1,1 % vs 0,3 % ;p < 0,001) [4].

En dehors des mal-appositions initiales,le phénomène de thrombose tardivepeut être lié à une réaction d’hypersen-sibilité aux composants de la prothèse,notamment le polymère, comme celaa été observé dans de rares cas avec lestent Cypher. Le retard à l’endothéli-sation peut également prolonger l’effetthrombogène du stent au contact desplaquettes sanguines circulantes,notamment lorsque des montages com-plexes sont réalisés avec les stents. Bienque réel, ce risque reste modeste et nes’accompagne pas d’une augmentationsignificative du taux de décès ou desinfarctus du myocarde en comparaisonaux stents nus.

Enfin, ce phénomène de thrombose tar-dive n’est pas l’apanage des DES de pre-mière génération. Il existe égalementavec les stents nus. Il est probablement

moins fréquent et souvent favorisé par undéploiementinitialinadéquat,unmontagecomplexe avec plusieurs stents ou l’arrêtintempestif du traitement antiagrégant.

[ Les stents actifsde 2e génération

Le “design” des stents actifs a natu-rellement évolué afin d’améliorer nonseulement leur facilité d’utilisation(“déliverabilité”), mais également leurefficacité et leur sécurité. Ainsi, l’alliaged’acier 616L a été remplacé par unalliage en cobalt-chrome, plus radio-opaque, permettant d’affiner l’épaisseurdes stents et ainsi d’obtenir une réen-dothélialisation. Les nouvelles archi-tectures à cellules ouvertes de certainsstents proposent un meilleur compro-mis entre profil de franchissement plusperformant, flexibilté et maintien d’uneforce radiale suffisante. Les polymèresont gagné en biocompatibilité et diffu-sent les drogues antiprolifératives surdes durées plus adaptées. Ces amélio-rations technologiques s’accompagnentd’un bénéfice clinique indiscutable.Ainsi, en comparaison au stent Taxus,le stent Xience diminue significative-ment le risque d’événements majeurs à

Cardiac

death,or

myo

cardial

infarct

ions,or

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15

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6

3

00 3 6 9 12

Time in months

15 18 21 24

EES (n=2854)PES (n=1551)

HR (95% CI)0,58 (0.47-0.72)

p<0.0001

Cardiac

death,or

myo

cardial

infarct

ion,or

ische

mia-

drive

ntarget

lesionr

evascu

lariza

tion(

%)

15

12

9

6

3

00 3 6 9 12

Time in months

15 18 21 24

EES (n=1393)PES (n=988)

HR (95% CI)0,76 (0.58-0.98)

p=0.0411.1 % 11.0 %

6.6 %8.7 %

Fig. 1 : Événements majeurs à 2 ans sous Taxus et Xience. D’après Planner et al. JACC Cardiovasc Interv,201;4:1104-1115.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

19

2 ans (fig. 1) dans l’angor stable (6,6 %contre 11,1 % d’événements à 2 ans ;p < 0,0001) et dans les syndromescoronariens aigus (8,7 % contre 11 %;p = 0,004) [5].

Ses concurrents : les stents ResoluteIntegrity et Promus Element (fig. 2) don-nent des résultats cliniques équivalentsà 1 an [6].

Enfin, la sécurité d’utilisation a aussiété accrue avec une très nette réductiondu risque de thrombose. Il est désor-mais démontré que le risque de throm-bose d’un stent Xience est inférieur àcelui d’un stent Taxus ou Cypher [5].Aujourd’hui, le risque de thromboseprécoce (moins de 30 jours) avec lesstents de 2e et de 3e génération (sanspolymère) est < 1 %, probablementidentique, voire plus faible, que celuides stents nus, comme cela a été mon-tré récemment dans l’étude randomi-sée EXAMInATIon [7] comparantle stent Xience (évérolimus) au stentnu de même type mais non actif, à laphase aiguë de l’infarctus du myocarde(fig. 3) et, plus récemment, dans l’étudeCoMfoRTABLE AMI [8], comparantle stent nu au stent biolimus à poly-mère bioabsorbable à la phase aiguë del’infarctus du myocarde.

De la même façon, le risque de throm-bose tardive a diminué avec les stentsdedernièregénérationet semblemainte-nant comparable au risque observé avecles stents nus (fig. 4).

Ainsi,dans laméta-analysedePalmerini(fig. 5), le risque de thrombose avec lesstents à l’évérolimus pourrait même êtreinférieur à celui des stents nus [9].

[ L’apport des polymèresbioabsorbables

Les polymères des DES de 1re générationayant été mis en cause dans le risquede thrombose tardive, des polymères

20

15

10

5

0

Cumulative

incid

ence

ofeven

ts(%

)

0 30 60 90 120

p=0.92

150 180Days since initial procedure

Target-lesion failure

210 240 270 300 330 360

Zotarolimus (n=1140) Everolimus (n=1152)

Fig. 2 : Événements cardiovasculaires sous zotarolimus et évérolimus. D’après Serruys et al. N Engl J Med,2010;363:136-146.

3.0

2.5

2.0

1.5

1.0

0.5

0.0

Cumulative

incid

ence

ofeven

ts(%

)

0 30 60 90 120 150 180 210 240 270 300 330Time after initial procedure (days)

360

Stent thrombosis HR 2.75 (95% CI: 1.15-6.54); Pr>χ2=0.02χ2=5.7114; DF=1; p=0.0169

Fig. 3 : Résultats de l’étude EXAMINATION. D’après Sabate et al. Lancet, 2012;380:1482-1490.

3

2

1

00 3 6 9 12

Time in months

15 18 21 24

Sten

tthrom

bosis

ARCd

efor

prob

(%) 2.3 %

EES (n=4.247)PES (n=2.542)

HR:0.30 0.19-0.47p<0.001

0.7 %

Fig. 4 : Méta-analyse des études SPIIT II, III, IV et de l’étude COMPARE. D’après Kereiakes et al.EuroIntervention, 2011;7:74-83.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues GénéralesCardiologie interventionnelle

20

bioabsorbables délivrant la drogue anti-resténoseenquelquesmoisontétédéve-loppés. Ces stents ont indiscutablementune efficacité supérieure aux DES de1re génération et au moins comparableà celle des DES de 2e génération [10].Les données à moyen terme, observéesdans l’étude LEADERS sont extrême-ment prometteuses en termes d’effica-cité et de sécurité (fig. 6). Ainsi, dans lesous-groupe de patients à haut risquecomme la phase aiguë de l’infarctus dumyocarde, le risque de mortalité à 5 ansestdiminuépar rapportaumeilleurstentde première génération (Cypher).

[ Rôle du design des stents

L’efficacité des différents stents actifsde 2e génération est comparable maisleur design varie et leur confère des pro-priétés mécaniques particulières. Cesdifférences peuvent s’avérer utiles pourle choix du stent selon le type de lésionà traiter.

La capacité maximale d’expansion estmise à profit en cas d’utilisation du PoT(proximal optimization technique) dansle traitement des bifurcations et particu-lièrement dans l’angioplastie du tronccommun [11]. La connaissance descapacités d’ouverture maximale d’unecellule est également importante en casde réouverture de maille et de kissingballoon (fig. 7).

Le nombre de connecteurs longitudi-naux conditionne la résistance longi-tudinale. Les stents à deux connecteurslongitudinaux ou à structure hélicoï-dale (Promus, Resolute) ont un risquelégèrement accru de compression lon-gitudinale [12] en comparaison auxstents à 3 connecteurs et doivent êtreutilisés avec une précaution parti-culière en cas de lésion ostiale où lescontacts répétés avec le cathéter guidepeuvent être traumatiques. Des don-nées récentes suggèrent également unrisque de déformation excessive, voire

6

5

4

3

2

1

0

%

0 to 1 year RR0.99 (0.51-1.95)

p=0.98*

1 to 5 year RR0.26 (0.10-0.68)

p=0.003*

0 6 12 18 24 30

Months

36 42 48 54 60

BESSES

2.0 %2.5 %

0.66 %

2.0 %

Fig. 6 : Thrombose de stent certaine à 5 ans dans l’étude LEADERS. D’après Serruys P. TCT 2012.

û Les stents actifs sont plus efficaces que les stents nus en diminuantle risque de resténose et de réintervention.

û Les stents actifs de 1re génération (Cypher, Taxus, Endeavor) ont un risquefaible de thrombose précoce (< 30 jours) mais un risque de thrombosetardive (> 1 an) légèrement plus élevé que celui des stents nus.

û La mortalité à long terme des patients traités avec un stent actif ouun stent nu est comparable.

û Les stents actifs de 2e génération sont au moins aussi efficaces queceux de 1re génération et plus sûrs avec un risque de thromboseparticulièrement bas.

û Les stents à polymère bioabsorbable (Nobori, BioMatrix) ont un risquede thrombose très tardive inférieur à celui de la plupart des stents àpolymère durable.

POINTS FORTS

(A) Definite thrombosisDirect estimate -1.427 0.519 32.4% 0.24 (0.09-0.66)Indirec estimage -1.421 0.359 67.6% 0,24 (0.12-0.49)Total (95% CI) 100.00% 0,24 (0.14-0.49)Test for overall effect Z = 4,82 (p<0,00001)

(B) Definite or probable thrombosisDirect estimate -0.968 0.377 39.4% 0.38 (0.18-0.80)Indirec estimage -1.122 0.304 60.6% 0.33 (0.18-0.59)Total (95% CI) 100.00% 0.35 (0.22-0.55)Test for overall effect Z=4.48 (p<0,00001)

0.001 0.1

Favours CoCr-EEs

log (odds ratio) SE Weight Odds ratio IV,random, 95% CI

Favours BMS

1 10

Fig. 5 : Résultats de la méta-analyse. Palmerini T et al. Lancet, 2012;379:1393-1402.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

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double antiagrégation prolongée. Cesinformations sont d’une importancecapitale, car elles suggèrent que ladurée de la bithérapie ne sera peut-êtrebientôt plus une limite pour le choixd’un stent actif.

Bibliographie01. Stettler C, Wandel S, allemann S et al.

outcomes associated with drug-eluting andbare-metal stents: a collaborative networkmetaanalysis. Lancet, 2007;370:937-948.

02. GarG S, SerruyS PW. Coronary stents: cur-rent status. J Am Coll Cardiol, 2010;56Suppl 10:S1-42.

03. Stone GW, elliS SG, Colombo a, Grube eet al. Long-term safety and efficacy of pacl-itaxel-eluting stents final 5-year analysisfrom the TAXUS Clinical Trial Program.JACC Cardiovasc Interv, 2011;4:530-542.

Le stent biorésorbable à élution d’évé-rolimus (BVS), développé par Abbott,montre déjà des résultats préliminairestrès favorableset laisseentrevoirunnou-veau paradigme en angioplastie coro-naire. L’amélioration technologique desstents s’accompagne également d’uneréduction progressive et constante de ladurée nécessaire de double antiagréga-tion plaquettaire.

Recommandée pour au moins 1 an en2006, des données récentes montrentqu’avec les stents actifs de 2e généra-tion, une double antigrégation plaquet-taire de 3 à 6 mois serait suffisante etpermettrait de diminuer significative-ment le risque hémorragique lié à une

de fractures de maille dans le traite-ment des bifurcations.

[ Et demain ?

Les stents entièrement biorésorbablesconstituent probablement l’avancéetechnologique la plus remarquabledont pourront probablement profiterles patients à long terme. En permet-tant de maintenir une force radialesuffisante de manière transitoire pourla durée nécessaire à la cicatrisationphysiologique, ces stents ont l’avan-tage de ne laisser aucun matérielmétallique à demeure et de préserverla vasomotricité.

Post-dilatation expansion and DES model designsBalloonMax.size

Element Xience Taxus Integrity BioMatrix Cypher

4.0

5.0

6.0

2.25

2.50

2.75

3.00

3.50

4.00

4.50

5.00

Very small (2 cells) Medium vessel Small vessel Small vessel Medium vessel Medium vesselmax expansion: workhorse workhorse workhorse workhorse workhorse3.0mm (6 crowns, 3 cells) (6 crowns, 2 cells) (7 crowns, 2 cell*) (6 crowns, 2 cells) 6 crowns,

max expansion: max expansion: max expansion: max expansion: 6 cells)Small vessel 4.4mm 3.4mm 4.9mm 4.6mm max expansion:workhorse *1.5 cell in Resolute 4.7mm(8 crowns, 2 cells)max expansion:3.8mm Medium vessel

workhorse(9 crowns, 3 cellsmax expansion:

Medium vessel 4.8mm Medium vesselworkhorse workhorse(8 crowns, 2 cells) (10 crowns, 2 cells)max expansion: Large vessel max expansion: Large vessel Large vessel4.4mm (9 crowns, 3 cells) 5.4mm (9 crowns, 3 cells (7 crowns, 7 cells

max expansion: max expansion: max expansion:5.6mm 5.9mm 5.8mm

Large vessel Large vessel(10 crowns, 2 cells) (9 crowns, 3 cells)max expansion: max expansion:5.7mm 6.0mm

➜ Minimal stent LD excluding struts➜ Limited to 6.0mm balloon at 14 ATM

Fig. 7 : Capacités d’ouverture maximale. D’après Foin et al. EuroIntervention 2012. EuroIntervention, 2012;20120509-02.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues GénéralesCardiologie interventionnelle

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taneous coronary intervention: a pooledanalysis of individual patient data fromthe ISAR-TEST 3, ISAR-TEST 4, andLEADERS randomized trials. Eur Heart J,2012;33:1214-1222.

11. Foin n, Sen S, alleGria e et al. Maximalexpansion capacity with current DES plat-forms: a critical factor for stent selectionin the treatment of left main bifurcations?EuroIntervention, 2013;8:1315-1325.

12. ormiSton Ja, Webber b, WebSter mW. Stentlongitudinal integrity bench insights intoa clinical problem. JACC CardiovascInterv, 2011;4:1310-1317.

L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflitsd’intérêts concernant les données publiéesdans cet article.

07. Sabate m, Cequier a, iñiGuez a et al.Everolimus-eluting stent versus bare-metal stent in ST-segment elevationmyocardial infarction (EXAMInATIon):1 year results of a randomised controlledtrial. Lancet, 2012;380:1482-1490.

08. räber l, KelbæK H, oStoJiC m et al.Effect of Biolimus-Eluting Stents WithBiodegradable Polymer vs Bare-MetalStents on Cardiovascular Events AmongPatients With Acute Myocardial Infarction.The CoMfoRTABLE AMI RandomizedTrial. JAMA, 2012;308: 777-787.

09. Palmerini t, biondi-zoCCai G, della riva det al. Stent thrombosis with drug-elutingand bare-metal stents: evidence from acomprehensive network meta-analysis.Lancet, 2012;379:1393-1402.

10. SteFanini GG, byrne ra, SerruyS PW et al.Biodegradable polymer drug-elutingstents reduce the risk of stent thrombosisat 4 years in patients undergoing percu-

04. Camenzind e, WiJnS W, mauri l et al.Stent thrombosis and major clinicalevents at 3 years after zotarolimus-elut-ing or sirolimus-eluting coronary stentimplantation: a randomised, multicen-tre, open-label, controlled trial. Lancet,2012;380:1396-1405.

05. Planer d, SmitS PC, KereiaKeS dJ et al.Comparison of everolimus- and paclitaxel-eluting stents in patients with acute andstable coronary syndromes: pooled resultsfrom the SPIRIT (A Clinical Evaluationof the XIEnCE V Everolimus ElutingCoronary Stent System) and CoMPARE(A Trial of Everolimus-Eluting Stents andPaclitaxel-Eluting Stents for CoronaryRevascularization in Daily Practice) Trials.JACC Cardiovasc Interv, 2011;4:1104-1115.

06. SerruyS PW, Silber S, GarG S et al.Comparison of zotarolimus-eluting andeverolimus-eluting coronary stents.N Engl J Med, 2010;363:136-146.

Variables Unités AnormalCavités Diamètre basal et mi-hauteur Cm > 4,2 et 3,5

Epaisseur du VD en sous-costal Cm > 0,5Longueur longitudinale VD Cm > 86Ø distal chambre de chasse pulmonaire en PSPA Cm > 2,7Profondeur OD Cm > 5,3Diamètre antéro-latéral OD Cm > 4,4Surface OD fin de diastole Cm2 > 18

Fonctionsystolique

TAPSE Cm < 1,6Pic de vitesse à l’anneau tricuspidien en Dopplertissulaire

Cm/s < 10

Indice de performance myocardique en Dopplerpulsé

< 0,4

Indice de performance myocardique en Dopplertissulaire

< 0,55

Fraction de raccourcissement de surface % < 35Fonctiondiastolique

Rapport E/A < 0,8 ou > 2,1Rapport E/e’ > 6Temps de décélération ms < 120

Tableau I : Références des mesures des cavités droites et des fonctions systolique et diastolique VD,d’après [1].

Dans lenuméro293deRéalités Cardio­logiques (Avril-Mai), deux erreurs sesont glissées dans le tableau I publiéen page 49.

Ces deux erreurs concernent lesindices de performances myocar-dique enDoppler pulsé et enDopplertissulaire.

Pour plus de clarté, nous publions denouveau ce tableau dans son inté-gralité.

Erratum

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues GénéralesExplorations

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Résumé : L’épreuve d’effort couplée à l’analyse des échanges respiratoires reste le moyen le plus fiablepour déterminer la capacité à l’effort d’un sujet. En cardiologie, cet examen reste incontournable dans deuxpopulations “opposées”: le patient insuffisant cardiaque et le sportif d’endurance de haut niveau.• Chez le patient insuffisant cardiaque, le pic de VO2, la pente VE/VCO2 et la puissance circulatoire (produit dela pression artérielle systolique et de la consommation d’oxygène au maximum de l’effort) sont les principauxparamètres pronostiques. Le premier seuil ventilatoire est un indice très informatif sur la qualité de vie despatients.• Chez le sportif de haut niveau, cet examen permet de sélectionner les plus jeunes en fonction de leurscapacités d’endurance, d’explorer une symptomatologie inhabituelle, de calibrer et de mesurer les effets del’entraînement des athlètes.

L’essentiel sur la VO2 en cardiologie

L a réalisation d’une épreuved’effort couplée à l’analyse deséchanges respiratoires permet

une étude précise et objective des capa-cités d’effort d’un sujet. La relation quilie l’intensité de l’effort fourni (expriméen watts ou en METS) et la consomma-tion d’oxygène nécessaire pour fournircet effort (c’est-à-dire le coût énergé-tique) sont connues chez le sujet “sain”.La consommation maximale d’oxygène(ou VO2max) peut donc être prédite demanière relativement fiable dans cettepopulation, à partir d’une épreuved’effort maximale ou sous maximalesansmesuredirectedeséchangesgazeux(lors d’une épreuve d’effort sous maxi-male, la fréquence cardiaque maximaleest alors estimée et non mesurée). Parexemple, la formuledeHawley:VO2max= 0,01141 × PMA + 0,435 permet d’éva-luer la VO2max d’un sujet sain à partirde la puissance maximale développéeexprimée en watts.

Les différences observées dans cettepopulation de sujets sains entre laVO2max estimée et mesurée sont faibleset n’ont pas de conséquence clinique.En revanche, le coût énergétique est

éminemment variable chez le patientinsuffisant cardiaque [1] et chez lesportif de haut niveau. Dans ces deuxpopulations “extrêmes” d’une part, laprédiction de la VO2max est peu fiableet, d’autre part, une imprécision demesure peut avoir des conséquencesimportantes.

>>> Chez le patient insuffisant car-diaque, une évaluation précise de latolérance à l’effort avec mesure de laVO2max va permettre une évaluationfonctionnelle et pronostique majeure etégalement de guider les thérapeutiqueset d’en mesurer les effets.

>>> Chez le patient sportif de hautniveau, cet examen permet de sélec-tionner les plus jeunes en fonction deleurs capacités d’endurance, d’explo-rer une symptomatologie inhabituelle,de calibrer et de mesurer les effets del’entraînement des athlètes.

[ Réalisation pratique

La mesure des échanges respiratoires estréalisée au cours d’une épreuve d’effort.

➞ J.Y. TabeT1, 2, P. Meurin1,F. beauvais2,a. Cohen-solal2

1. Les Grands Prés, Centre deRéadaptation Cardiaque de la Brie(CRCB), ViLLeneuVe-Saint-DeniS.2. inSeRM u942, Service deCardiologie, Hôpital Lariboisière,Faculté de Médecine Paris Diderot,PaRiS.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues GénéralesExplorations

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Celle-cipeutêtre réaliséesur tapis (moded’évaluation le plus utilisé dans les paysanglo-saxons) ou sur cycloergomètre(mode d’évaluation le plus utilisé enFrance). Le patient réalise une épreuved’effort dite “triangulaire”, c’est-à-direà charge croissante, utilisant un incré-ment de charge adapté aux patients: parexemple, un incrément de 10 W/minchezlepatientinsuffisantcardiaquesuivid’une période de récupération. Chez lesportif, le test d’effort doit être autantque possible réalisé dans les conditionsles plus proches de son entraînement.L’analyse des échanges respiratoires sefaitpar l’intermédiaired’unemboutbuc-cal ou d’un masque relié à un analyseur.

L’épreuve d’effort doit être maximale,c’est-à-dire “épuisante” pour le patient,si on veut obtenir le maximum d’infor-mations fonctionnelles et pronostiques.Une épreuve sous maximale peut êtresuffisante dans certains cas, si l’épreuved’effort est réalisée par exemple pourdéterminer l’intensité des séances deréadaptation. Enfin, le personnel doitêtre forméà la techniqueet l’équipementde qualité parfaite, calibré soigneuse-ment entre chaque test.

[ Interprétation des indicestirés de l’épreuve d’effortavec mesure des échangesrespiratoires

1. Le pic de VO2

l Interprétation

La valeur maximale de la VO2 recueillielors d’une épreuve d’effort est un témoinde la capacité maximale d’un patient àl’effort.LeplussouventonobtientunpicdeVO2 etnon la “VO2max”qui impliqueun plateau de la courbe de consomma-tion d’oxygène au maximum de l’effort,c’est-à-direunestagnationde laconsom-mation d’oxygène alors que l’intensitéde l’effort demandé augmente. Il existede nombreux déterminants cardiaques

etpériphériques, et les facteurs limitantsde l’augmentationde laVO2 varientd’unpatient à l’autre:–chezunsportif ouchezunsujet sain, lefacteur limitant de la VO2max est l’aug-mentation du débit cardiaque;– chez un patient insuffisant cardiaqueou très déconditionné, les facteurs limi-tantsserontd’unepart l’augmentationdudébit cardiaque à l’effort et, d’autre part,le déconditionnement périphérique.

L’importance du déconditionnementchez les patients insuffisants cardiaquesexplique notamment la très mauvaisecorrélation existante entre la tolérance àl’effortetlesindicesdefonctionsystoliquetelsquelafractiond’éjectionventriculaire

gauche[2,3]. Inversement, l’améliorationde la performance cardiaque n’améliorepas nécessairement de façon parallèle latolérance à l’exercice [4].

L’utilisation de la VO2 chez l’insuffisantcardiaque permet également d’évaluerles bénéfices sur la tolérance à l’effortdes différentes thérapeutiques. Chez unsujet sain, le pic de VO2 normal se situeentre 30 et 35 mL/kg/min. Ce chiffre estabaisséchez l’insuffisantcardiaquecom-pris le plus souvent entre 10 et 20 mL/kg/min. Inversement, il est augmentéchez le sportif d’endurance, pouvantatteindre 70 à 80 mL/kg/min chez lesmarathoniens ou les cyclistes de trèshaut niveau (fig. 1, 2, 3).

Fig. 1: VO2 normale. Homme 60 ans. Épreuve d’effort négative à 170 W et 95 % de la FMT. Pic VO2 27 mL/kg min,soit 98 % de la théorique. SV1 12 mL/kg/min.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

25

L’évolution de la tolérance à l’effortjugée par l’évolution du pic de VO2 aégalementunevaleurpronostique:ainsi,l’amélioration au cours des mois du picde VO2 est associée à un bon pronostic[9]. De même, l’évolution du pic de VO2

peut être un marqueur de réponse à untraitement : les patients qui sont dits“répondeurs” à un programme de réa-daptation – c’est-à-dire qui améliorentsignificativement leur pic de VO2 aprèsun programme de reconditionnement àl’effort – ont un meilleur pronostic com-paréauxpatientsnonrépondeursdont lepic de VO2 est peu modifié [10].

2. Pente VE/VCO2

Lapented’augmentationdelaventilation(VE) sur le volume expiré de dioxyde decarbone (VCO2) est un témoin de l’effi-cience respiratoire au cours de l’effort,c’est-à-dire la capacité du patient à éli-miner le CO2 pour une ventilation don-née.Cettepenteaugmentechezlepatientinsuffisant cardiaque en raison notam-ment d’une augmentation de l’espacemort ventilatoire (liée en partie à labaisse du débit pulmonaire), à une ano-malie des chémorécepteurs aortiques ouàl’existenced’unergoréflexemusculaireexacerbé.Savaleurnormaleest inférieureà30 %.Larelationqui lie laventilationetla VCO2 est une relation linéaire.

Plusieurs études ont validé la valeurpronostique de la pente VE/VCO2 dansl’insuffisance cardiaque, celle-ci étant leplussouventretrouvéecommesupérieureouégaleàcelledupicdeVO2,notammentchez lespatients sousbêtabloquants [11].Unevaleursupérieureà40 %estassociéeà un pronostic péjoratif. Ce paramètre apar ailleurs l’avantage de rester valide,mêmelorsd’uneépreuvesousmaximale.

3. Puissance circulatoire

La puissance cardiaque générée au coursdel’effortestdéfiniecommeleproduitdudébit cardiaque par la pression artériellemoyenne. Mesurée par des techniques

Chez les patients recevant un traite-ment bêtabloquant, les études mon-trent que la valeur pronostique dupic de VO2 est conservée mais qu’ilfaudrait, compte tenu de l’améliora-tion de leur pronostic sous traitement,revoir les seuils de transplantation à labaisse (le seuil à prendre en considé-ration serait alors compris entre 10 et12 mL/kg/min [7, 8].

l Valeur pronostique

La valeur pronostique du pic de VO2 estétablie depuis de nombreuses années ;depuis la publication princeps deMancini [5], le seuil de 14 mL/kg/min(ou 50 % des valeurs théoriques [6]) aété longtemps retenu pour inscrire lespatients sur la liste de transplantationcardiaque.

Fig. 2 : VO2 d’un patient insuffisant cardiaque mesuré à 12 ml/kg/min, soit 45 % de la théorique.SV1 = 10 mL/kg/min.

Fig. 3 : Sujet de 31 ans, triathlonien. Pic de VO2 58 ml/kg/min soit 190 % de la théorique (400 W).SV1 = 45 mL/kg/min. SV2 = 52 mL/kg/min.

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Revues GénéralesExplorations

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insuffisants cardiaques et des décondi-tionnements quelle qu’en soit la cause.

Le SV1 est un indice très informatif surla qualité de vie des patients. Il permetd’évaluer les efforts réalisables sansdyspnée, fatigue ou douleur musculaireexcessive et ainsi de fixer des niveauxd’entraînement. Il reste toutefois sou-vent difficile à interpréter car il peutêtre calculé par différentes méthodes, etsa détermination souffre d’une grandevariation inter-observatrice. Attentionà ne pas confondre seuil non atteint etseuilnondéterminable: les implicationsen sont différentes.

Le franchissement précoce du SV1(< 11 mL/kg/min) est associé à un pro-nostic péjoratif. Toutefois, sa valeurpronostique semble moins robuste quecelle du pic de VO2 même si cela restecontroversé. Ce paramètre reste utili-sable lors d’une épreuve sous maximale.

5. Le seuil ventilatoire 2

Lorsd’uneffortmaximal, la finde l’effortest marquée par un état d’acidose méta-bolique lactique compensé par unehyperventilation. Le 2e seuil ventilatoireest classiquement défini par:– la cassure de la courbe VE/VCO2 avecuneaugmentationrapidedelaventilation;

la réalisation de l’effort par l’utilisationexclusive du métabolisme aérobie. Lecomplémentd’énergienécessaireàlaréa-lisation de l’exercice est fourni en partiepar la glycolyse anaérobie, pour une partcroissanteàmesurequel’effortaugmente.On considère aujourd’hui qu’il s’agitd’une interprétation un peu simplistedeschoses,mais lavaleur informativeduparamètre est toujours importante.

LeSV1estclassiquementdéterminépar:– l’augmentation de la pente VE/VO2

en fonction du temps (ou équivalent enO2 : EqO2) sans modification de la penteVE/VCO2 en fonction du temps (ouéqui-valent en CO2 : EqCO2) ;– l’augmentation de la pression télé-expiratoire en oxygène (PETO2) sansmodification de la pression télé-expiratoire en CO2 (PETCO2) ;–lacassuredelacourbedeBeaver(VCO2/VO2) avecuneaugmentationrapidede laVCO2 en fonction de la VO2 (fig. 4).

Les valeurs du SV1 et du ratio SV1/VO2max (normale comprise entre 0,4 et0,6) reflètent le degré de déconditionne-ment d’un patient: une valeur basse duSV1 (et du ratio SV1/VO2max) témoigned’un déconditionnement périphériqueimportant et donc d’une participationprécoce du métabolisme anaérobieau cours de l’effort. C’est le cas des

invasives (et donc peu utilisable en pra-tique), elle représente un des facteurspronostiques les plus puissants dans l’in-suffisance cardiaque, même comparéeau pic de VO2 [12]. Par analogie, on peutdéfinir la puissance circulatoire maxi-male comme le produit du pic de VO2

(débit cardiaque max×différence artério-veineuse en oxygène maximale (DAVO2)par lapressionartériellesystoliquemesu-rée au maximum de l’effort. Cet indice,qui intègre l’évolution de la postcharge àl’effort, semble avoir une valeur pronos-tique supérieure à celle du pic de VO2.

Unevaleurduproduit:picdeVO2 (enmL/min/kg)×PAS(enmmHg)< 2000estasso-ciée à un taux de mortalité élevé à un an[13]. Ceci confirme une notion ancienneattribuant à l’absence de montée tension-nelleunevaleurpéjorativechezlescorona-riens;uneabsencedemontéetensionnellecoexistantavecunpicdeVO2 peuabaissédoit faire suggérer une insuffisance car-diaque sévère, compensée partiellementpar une bonne adaptation périphérique(chez un sportif, par exemple).

4. Le seuil ventilatoire 1

Le franchissement du seuil ventilatoire(SV1) au cours de l’effort correspondthéoriquement à l’incapacité de l’orga-nisme à produire l’énergie nécessaire à

Fig. 4 : Détermination du SV1 = AT (anaerobic threshold).

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

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récupération un apport assez rapide enO2 aux muscles pour assurer cette resyn-thèse – ce qui se traduit par un allonge-ment du temps de demi-décroissance dela VO2 en récupération.

Un sujet sain verra sa VO2 décroître deplus de 50 % en moins de 80 s, alorsqu’un patient insuffisant cardiaqueverra son T1/2 VO2 s’allonger, et ce demanière proportionnelle à son degréd’insuffisance cardiaque (de 100 à180 s de la classe NYHA I à la classeIV) [14]. La valeur pronostique de ce

l Temps de récupération de la VO2

La cinétique de décroissance de la VO2

en récupération dépend de la cinétiquede resynthèse des réserves énergétiquesmusculaires (ATP,phosphocréatine)uti-lisées lors de l’exercice. L’insuffisancecardiaque se caractérise par une utili-sation plus marquée de ces réserves aucours de l’effort et donc par un tempsde resynthèse des réserves énergé-tiques allongé du fait de l’importancedu déficit accumulé, mais aussi du basdébit cardiaque qui ne permet pas en

– une augmentation de l’équivalent enCO2 (VE/VCO2 en fonction du temps= EqCO2) ;– une baisse de la pression télé-expira-toire en CO2 (baisse de la PtCO2) (fig. 5).

Ce 2e seuil ventilatoire – appelé aussiseuil de désadaptation ventilatoiredans la mesure où la ventilation n’estplus dépendante de la capnie mais del’acidose métabolique – nécessite deréaliser un effort maximal; il est surtoututile chez les patients sportif pour cali-brer l’intensité de leur entraînement.

6. Autres indices

l Le pouls d’oxygène

Le pouls d’oxygène correspond au ratiode la VO2 par la fréquence cardiaque.Représentant à chaque instant le pro-duit du VES par la DAVO2, il est donc unreflet indirect de l’évolution du volumed’éjectionsystolique.Lorsd’uneépreuved’effort à charge croissante, la différenceartérioveineuse augmente, même enprésence d’une insuffisance cardiaqueévoluée. Par conséquent, une stagnationdu pouls d’oxygène observée au coursde l’effort est le reflet d’une baisse duvolume d’éjection systolique. La valeurpronostique du pouls d’O2 reste néan-moins inférieure à celle du pic de VO2.

Fig. 5 : Déterminations du SV2.

û Le pic de VO2, la pente VE/VCO2 et la puissance circulatoire sont lesprincipaux facteurs pronostiques dans l’insuffisance cardiaque.

û Le premier seuil ventilatoire est utile, notamment chez le patientinsuffisant cardiaque pour juger des activités réalisables sans effortexcessif et pour calibrer l’intensité des séances de réadaptation. Le2e seuil ventilatoire obtenu en fin d’effort lors d’une épreuve d’effortmaximale est utile pour calibrer les séances d’entraînement des sportifsde haut niveau.

û Il ne faut pas hésiter à réévaluer la capacité d’effort d’un patientinsuffisant cardiaque après une optimisation du traitement médicalet après un programme de réadaptation afin de juger de la réponse autraitement.

POINTS FORTS

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues GénéralesExplorations

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compte tenu d’une amélioration de leurpronostic sous traitement. La prise encompte de l’évolution de la postchargeà travers l’évaluation de la puissance cir-culatoire (= VO2 × PAS), ou la prise encompte de la réponse tensionnelle, sen-sibilise la pertinence de l’informationpronostique du pic de VO2. Il ne faut pashésiter à refaire cette évaluation aprèsune optimisation du traitement médicalet après un programme de réadaptationet de réentraînement physique afin dejuger de la réponse au traitement.

Chez les patients sous bêtabloquants, lapente VE/VCO2 possède une excellentevaleur pronostique probablement supé-rieure à celle du pic de VO2. Enfin, lorsd’un test sous maximal, le pic de VO2 oula puissance circulatoire ne sont plusutilisables, alors que la pente VE/VCO2

et d’autres indices tels que le SV1 ou leT1/2VO2 enrécupérationrestentvalides.

[ Conclusion

La réalisation d’une épreuve d’effortavec mesure des échanges respiratoiresreste l’examen le plus fiable pour éva-luer la tolérance à l’effort d’un patient.Celle-ci reste indispensable dans deuxpopulations “opposées”:– le patient insuffisant cardiaque chezlequel cette évaluation va permettred’apporterdesinformationspronostiquesmajeures et guider la thérapeutique;– et le sportif de haut niveau chez lequelelle permettra d’apprécier son niveau,guider son entraînement et mesurer lesprogrès accomplis.

Bibliographie01. KoiKe A, itoh h, KAto M et al. Prognostic

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[ En pratique,quand réaliser le test etquels indices utiliser ?

1. Quand ?

Tout insuffisant cardiaque par dys-fonction systolique (car c’est dans cecadre que la méthodologie a été essen-tiellement évaluée), apte à réaliser uneépreuve d’effort valide, justifie de cetexamen, avec une périodicité d’autantplus rapprochée que l’insuffisance car-diaque est sévère.

2. Évaluation fonctionnelle

Le pic de VO2 est le critère essentiel. Ildoit être exprimé en pourcentage desvaleurs théoriques, notamment pour lespatients jeunes ou très âgés.Le SV1 et la pente VE/VCO2 permettentde mieux approcher la tolérance d’uneffortsousmaximal,c’est-à-dired’évaluerla gène fonctionnelle des patients pourréaliser les tâches de la vie courante.

3. Évaluation pronostique

Le pic de VO2 reste à ce jour le goldstandard, même si les seuils “critiques”doivent être revus à la baisse chez lespatients traités par bêtabloquants

paramètre reste inférieure à celle dupic de VO2 mais demeure utilisableen présence d’un test d’effort sousmaximal. Une prolongation du T1/2VO2, en présence d’un pic de VO2

abaissé, permet de confirmer que l’onest en présence d’une insuffisancecirculatoire sévère et non pas d’uneépreuve d’effort sous maximale pourdiverses raisons.

l Oscillations respiratoires

La présence d’oscillations respiratoiresau repos ou au cours de l’effort témoigned’unasynchronismeentre lastimulationdeschémorécepteurs aortiques à l’hypo-capnie et la réponse ventilatoire d’ori-ginecentrale, liéenotammentàunretardcirculatoire (fig. 6). La physiopathologiede ces phénomènes est complexe et serapproche de celle de la dyspnée deCheyne-Stokes décrite dans l’insuffi-sance cardiaque sévère. Ces anomaliestémoignent en général d’une insuffi-sance cardiaque sévère avec élévationdes pressions de remplissage; la valeurpronostiqueindépendantedecesphéno-mènes reste controversée mais est indis-cutablement péjorative [15]. L’existenced’oscillations confirme l’insuffisancecirculatoire sévère en présence d’uneépreuve brève.

Fig. 6 : Présence d’oscillations respiratoires.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

29

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L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflitsd’intérêts concernant les données publiéesdans cet article.

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Revues GénéralesThérapeutique

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Résumé : La gestion des antiplaquettaires chez des patients porteurs de stent représente une situationcliniquecompliquéeoùuneapprochemultidisciplinairedoitpermettredeproposerlameilleurestratégieànospatients. Cette discussion devra intégrer la balance entre le risque ischémique de l’arrêt des antiplaquettaires(thrombose de stent notamment) et le risque hémorragique d’une chirurgie sous antiplaquettaires.Il n’y a donc pas d’approche dogmatique, et chaque situation sera différente en fonction du stent implanté, del’ancienneté de l’angioplastie, des caractéristiques du patient et du type de chirurgie prévue.Toutefois, il existe des règles simples à respecter afin de prévenir des accidents cliniques parfois dramatiques :éviter un stent, a fortiori actif si une chirurgie est prévue ; garder l’aspirine si possible ; retarder les chirurgiesnon urgentes (> 6 semaines pour stent nu, > 6 mois pour stent actif) et arrêter les antiplaquettaires le moinslongtemps possible.

Gestion des antiagrégants plaquettairesen chirurgie non cardiaque

L es traitements antiplaquettairesont accompagné le développe-ment de la cardiologie interven-

tionnelle et, en particulier, l’essor desstents nus puis actifs. Il est actuellementadmis que la poursuite d’une bithérapieantiplaquettaire est nécessaire pendantau minimum 6 semaines après un stentnu, 6 mois voire un an après implanta-tion d’un stent actif et, plus largement,dans les suites d’un syndrome corona-rien aigu. Cette stratégie thérapeutique,chez des malades de plus en plus âgés,a malheureusement pour corollaire unemajoration du risque hémorragique.Nous sommes donc de plus en plus sou-ventconfrontésàdessituationsaiguësoùlapoursuitede labithérapieantiplaquet-taireest remiseencauseavantsonterme.

Ce problème se pose le plus souvent àl’occasion d’un geste invasif ou d’unechirurgie intercurrente extracardiaque.Le risque hémorragique global se trouvealors en balance avec le bénéfice cardio-logiquedutraitement, à savoir lapréven-tiond’unaccident thrombotique.Depuis

l’arrivée des endoprothèses actives etla médiatisation dans la communautémédicaledelaproblématiquedes throm-boses de stent tardives (> 1 mois), desefforts importants d’information et deprévention ont été faits sur le risqued’arrêt du traitement antiagrégantplaquettaire.

La décision finale vis-à-vis du traite-ment antiplaquettaire interviendra auterme d’une discussion collégiale entrechirurgien, anesthésiste et cardiologuedont le but sera d’apprécier au mieux labalance risque/bénéfice du traitementantiplaquettaire en cours.

>>> L’évaluation du risque ischémiqueest généralement bien faite chez lespatients les plus à risque. En revanche,elle est plus difficile chez les patientsstables,ouaumomentde laconsultationd’anesthésie chez des malades dont ledossier médical est souvent incomplet.Les facteurs de risque ischémique qu’ilfaut identifier en priorité sont représen-tés par:

➞ T. CuisseT1, J. QuiLiCi1,G. CaYLa2

1 CHU Timone, Marseille.2 CHU NîMes.

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– instabilité de la coronaropathie (risqueaccru si syndrome coronaire aigu dansles 12 derniers mois) et terrain à risque(facteurs de risque à noter, diabète enparticulier) ;– antécédents de revascularisation parchirurgieouangioplastie (datedugeste);– dans le cas d’une angioplastie : typed’endoprothèse utilisée (nue ou active),nombre d’endoprothèses, site d’implan-tation et du délai entre la pose de l’endo-prothèse et la chirurgie.

>>> L’évaluation du risque hémorra­gique, quant à elle, reste plus complexe.La prolongation des bithérapies antipla-quettaires après stent actif et l’arrivée denouveauxagentsantiplaquettairesorauxplus puissants (prasugrel et ticagrelor)doivent être à présent prises en comptedans l’évaluation du risque hémorra-gique de nos patients. Les anesthésisteset les chirurgiens sont les plus aptes àestimer ce risque au niveau individuel.

[ Évaluation des risquesischémiques ethémorragiques

1. Risques liés à l’arrêt du traitementantiagrégant plaquettaire (AAP)

>>> L’arrêt du traitement aaP s’accom­pagne d’une perte progressive de l’effetantiplaquettaire et donc d’un risqued’accident artériel aigu du simplefait du sevrage, voire par un possible“effet rebond”. Le risque thrombo-tique devient maximal après le 7e jourd’arrêt du traitement antiplaquettaire.Il s’explique d’une part par le recou-vrement d’une fonction plaquettairenormale et, d’autre part, par le contextepostopératoire où l’on observe uneactivation plaquettaire plus importanteassociée à la réaction inflammatoire liéeà l’intervention. Enfin, la pharmaco-cinétique des antiagrégants plaquet-taires oraux peut être modifiée enpostopératoire en raison des modifica-tions de leur absorption digestive.

>>> L’arrêt des aaP est responsabled’environ 5 % des hospitalisationspour syndrome coronarien aigu et15 % des récidives de syndromes coro­nariens aigus [1, 2]. Dans ces séries, lesévénements coronariens ont été notés10 ± 1,9 jours et 11 ± 0,8 jours aprèsl’arrêt de l’aspirine, ce qui suggèrequ’un arrêt bref de 3-5 jours de l’aspirinepourrait ne pas entraîner de risque tropimportant. De plus, il a été montré que6 à 10 jours après l’arrêt de l’aspirine, ilexiste un risque accru d’accident vascu-laire cérébral [3] et d’ischémie aiguë desmembres inférieurs chez des patientsporteurs d’une artériopathie [4]. Ces tra-vaux suggèrent que l’arrêt de l’aspirinepeut entraîner un rebond en termes derisque ischémique, mais qu’une inter-ruption courte (3 à 5 jours) de l’aspirineest envisageable.

Dans une série de 192 patients béné-ficiant d’une chirurgie non cardiaquedans les 2 ans suivant une angioplastie,Schouten et al. [5] reportent un taux dethrombose de stent de 2,6 % (5/192).

Les facteurs prédictifs les plus évidentssont l’arrêt de tous les AAP et l’acteinvasif effectué précocement suivantla pose du stent, alors que la nature dustent intervient finalement assez peu.L’expérience de la Mayo Clinic [6] sur520 patients bénéficiant d’une chirurgiedans les 2 ans suivant la mise en placed’un stent actif montre une diminutiondu risque d’événement dans le temps.L’incidence d’accidents coronaires restesignificative durant toute la premièreannée chez des patients majoritaire-ment opérés sous monothérapie (70 %)et sous bithérapie (30 %).

>>> en pratique, si on doit arrêter pré-maturément, il faut raisonnablementattendre un minimum de 6 semainesavant le sevrage et n’arrêter que leclopidogrel en maintenant autant quepossible l’aspirine. Une récente revuede la littérature [7] de tous les cas dethrombose de stent a démontré quel’arrêt complet de la bithérapie est asso-cié à la survenue de la thrombose dansun délai de 10 jours alors qu’il faut en

100

90

80

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60

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20

10

0

%

0 50 100 150 200 250 300 350Délai entre arrêt AAP/thrombose de stent

Arrêt aspirine (patients en monothérapie)

Arrêt aspirine et clopidogrel

Arrêt clopidogrel, l’aspirine étant maintenue

Fig. 1 : Délai de survenue des thromboses de stent en fonction du maintient ou de l’arrêt de l’aspirine etdu clopidogrel (d’après Eisenberg et al. [7]).

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

Revues GénéralesThérapeutique

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aléatoire la reprise des AAP mais égale-ment leur efficacité biologique.

Le but de l’évaluation du risque hémor­ragique des interventions chirurgicalesest de pouvoir identifier les gestes à plushaut risque hémorragique pour lesquelsla poursuite de l’aspirine est impossible,de ceux pour lesquels il est préférablede la maintenir. Une méta-analyse sur lachirurgie avec ou sans aspirine à faibledose [10] confirme que l’aspirine aug-mente les complications hémorragiquesminimes de 50 % sans influencer signi-ficativement les saignements graves,hormis en ce qui concerne la chirurgie

rassurante, lessituations lesplusàrisque(hémorragique ou ischémique) sont lesmieux gérées.

L’évaluationdurisquehémorragique liéà un geste invasif est bien plus difficile,notamment pour le cardiologue quiconnaît souvent mal la problématiquecomplexe de la période postopératoire.L’analgésiepostopératoire (rachianesthé-sie fréquemment pratiquée), la nécessitéd’une prévention des accidents veineuxthromboemboliques postopératoires, lareprised’un transit intestinal, la réactioninflammatoire, l’anémie fréquente, etc.sont autant de facteurs qui vont rendre

moyenne122 joursaprès l’arrêtduclopi-dogrel lorsque l’aspirine est maintenue,remettant en question un lien de causa-lité immédiat entre arrêt du clopidogrelet thrombose de stent (fig. 1).

>>> Enfin, les résultats des premièresétudes comparant l’arrêt de l’aspirinecontre sa poursuite durant la périodepériopératoire confirment l’intérêtde poursuive l’aspirine pendant unechirurgie non cardiaque. Les résultatsde l’étude suédoise, récemment publiés–sur220patients randomiséspourbéné-ficier d’une chirurgie non cardiaquesous aspirine ou placebo – confirment laréduction des événements ischémiquessous aspirine sans augmentation descomplications hémorragiques majeuresdurant la période périopératoire [8]. Lerisque de thrombose de stent est majeurau cours des 6 premières semaines aprèsl’implantationpourunstentnu.Pour lesstents actifs, la règle a longtemps été deconserver un an de bithérapie. Avec lesstents actifs de nouvelle génération, desdurées plus courtes (6 mois) semblentenvisageables, facilitant ainsi la gestiondes patients bénéficiaires de ces stentset qui doivent être opérés.

2. Évaluation du risque hémorragiquede la chirurgie sous antiagrégantplaquettaire

Des efforts importants restent à faireconcernantl’évaluationdurisquehémor-ragique. En effet, l’enquête REGINA(REgistresur laGestionde l’INterruptiondes Antiagrégants plaquettaires orauxchez le coronarien) [9], effectuée auprèsdes praticiens soumis à des scénariosd’interruption des AAP oraux chez lescoronariens stentés, a bien montré leslacunes des praticiens concernant l’éva-luation de ce risque. Au total, 21 scéna-rios étaient proposés et l’arrêt completde labithérapieétait requisdansunseul.Elle montre que le taux d’arrêt completde la bithérapie est deux fois supérieurà celui attendu dans des situations defaible risque hémorragique. De façon

Risque hémorragique CommentairesType de chirurgie Élevé Moyen Faible

NeurochirurgieChirurgie intracrânienne etspinale : arrêt de tous les AAPnécessaire

Ophtalmologie

Segmentantérieur(cataracte)

Chirurgie des structuresavasculaire (cataracte) :possible sous AAP

Segmentpostérieur(rétine) etchirurgieextra-oculaire

Chirurgie rétinienne etchirurgie strabisme : arrêtle plus souvent des AAP

Digestive

Risque très variable enfonction de la chirurgielaparoscopie,cholécystectomieappendicectomie :faisable sous AAP

Orthopédique Chirurgie possible sous AAP

Chirurgie carcinologique Risque élevé si large plan dedécollement

Chirurgie dermatologiqueet plastique

Risque faible sauf pourlarge reconstruction

Chirurgie urologique Risque hémorragique élevépour la chirurgie prostatique

Chirurgie dontaleet parodontale

Possible sous aspirine etclopidogrel avec précautionset hémostase locale

Actes endoscopiques

Gestes endoscopiquesGestes diagnostiques peuventêtre réalisés sous bithérapieantiplaquettaire

Gestes endoscopiquespneumologiques

Tous les gestes possibles sousaspirine seule sauf les biopsiestransbronchiques

Tableau I.

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réalités Cardiologiques # 294_Juin 2013

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précédant la chirurgie (ticagrelor ouclopidogrel). Le taux de complicationhémorragique était similaire entre lesdeux groupes, avec des valeurs élevéesd’hémorragies majeures [14]. Les don-nées pharmacologiques sont en faveurd’un sevrage de 5 jours (comme avec lePlavix) avant un geste invasif.

[ Que faire en pratique ?

Les règles essentielles sont résuméesdans le tableau II.

1. Mesures préventives

Il est capital, en amont, d’identifier lessituations d’arrêt prévisibles du traite-mentantiplaquettaireavanttouteimplan-tation de stent actif. L’utilisation dequestionnairestandardisédoitpermettred’améliorer le dépistage des malades àrisque d’interruption prématurée (para-mètressocio-économiquesoumédicaux)chez lesquels un stent nu sera privilégié.

2. Comment gérer l’arrêt en pratique ?

l Les règles de bases à observer:

– différer tout geste invasif et en parti-culier la chirurgie non urgente de 6 à12 mois, au mieux en cas d’endopro-thèse active (parfois négociable entre3 et 6 mois avec l’accord de l’équipe

un délai de 7 jours de non prise avantd’envisager un geste invasif.

en résumé, les données limitées sonten faveur d’une majoration du risquehémorragique lors d’une chirurgie sousprasugrel en comparaison au clopido-grel.Ce traitementdevraêtrearrêtéavantle geste au moins 7 jours avant.

2. Le ticagrelor

Le ticagrelor est un inhibiteur directet réversible des récepteurs P2Y12 quiappartientà lanouvelleclassedescyclo-pentyl-triazolo-pyrimidines. Comme leprasugrel, le ticagrelorentraîneune inhi-bition plaquettaire plus intense que leclopidogrel.Soninhibitionréversible luiconfère un avantage théorique lorsqu’onenvisage un geste invasif.

L’étude ONSET/OFFSET [13] confirmeun recouvrement rapide de la fonctionplaquettaire après arrêt de la molécule.L’inhibition de l’agrégation plaquettaireaprès 3 jours d’arrêt du ticagrelor estpresque voisine de celle obtenue après5 jours d’arrêt du clopidogrel.

Sur le plan clinique, l’étude PLATO(PLATO-CABG) donne des rensei-gnements sur le risque hémorragiquedes malades pontés. Cette sous-études’intéressait aux 1261 patients n’ayantpas arrêté la molécule dans les 7 jours

intracrânienne et transurétrale. Ceci estconfirmé par la publication récente del’étude STRATAGEM [11]. 291 patientsont été randomisés 10 jours avantchirurgie entre poursuite de l’aspirineou placebo. Les gestes réalisés le plusfréquemment étaient orthopédiques(52,2 %), chirurgie viscérale (20,6 %)ou urologique (15,5 %). Aucune diffé-rence significative en termes de saigne-ment grave n’a été observée entre lesdeux groupes sur un suivi à un mois. Letableau I résume les risques hémorra-giques des interventions chirurgicales etdes gestes endoscopiques.

[ Les nouveauxantiplaquettaires :quels changements ?

1. Le prasugrel

Le prasugrel est une thiénopyridine denouvelle génération qui entraîne uneinhibition plaquettaire plus intense etplushomogèneencomparaisonauclopi-dogrel. Comme le clopidogrel, il permetl’inhibition irréversible des récepteursplaquettairesP2Y12à l’ADP.Soneffetestdonc maintenu durant toute la durée deviedelaplaquette.Sonindicationactuelleest limitéeauxmaladesbénéficiantd’uneangioplastie pour syndrome coronaireaigu, en association avec l’aspirine. Ilexiste une précaution d’emploi vis-à-visdu risque de saignement concernant lessujets de plus de 75 ans et les sujets depetit poids (< 60 kg) [12].

Les données provenant de l’étudeTRITON sur les patients ayant eu unechirurgie de pontage aorto-coronairesous prasugrel (n = 213) retrouvent untauxd’hémorragiemajeure (critèreTIMI)plus élevé par rapport à ceux opéréssous clopidogrel (n = 224) (11,27 % vs3,57 %; p = 0,002). Cet excès de risquehémorragiquepersistependant les7pre-miers jours. Ces données ont été reprisespar l’AMM et par les dernières recom-mandationsaméricainesquipréconisent

Règle d’or pour gestion des AAP en chirurgie non cardiaque

l Approche multidisciplinaire : cardiologue, anesthésiste, chirurgien…l Plus simple : Éviter stent actif si chirurgie prévuel Délai de sécurité : 6

6 semaines (BMS) et 6 mois (DES), retarder chirurgie si possiblel Délai d’arrêt : 3-5-7 selon geste/délai depuis stent/type stent

3 jours (aspirine si impératif), 5 jours (clopidogrel-ticagrelor), 7 jours (prasugrel)l Garder l’aspirine (très souvent possible)l Pas d’indication de relais (HBPM, cebutide…)l Période postopératoire : reprise rapide, dose charge si haut risque

Tableau II.

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Revues GénéralesThérapeutique

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pour chaque intervention le risquehémorragique et le risque thrombotique.

L’arrêt de tout traitement est nécessaireen cas de risque hémorragique majeursanshémostasepossible, et ceciquelquesoit le risque de thrombose associé.

Dans tous les autres cas de figure, lemaintien de l’aspirine doit rester unerègle de base, et la bithérapie sera main­tenue en cas de risque mineur (ce qui estle cas dans la plupart des gestes endo­scopiques).

Encequiconcernelerisquedethrombosedestent, ilestmajeurdansles6premièressemaines d’un SCA ou de la pose dustent, et le maintien de la bithérapie doitrester la règle. La reprise du clopidogrelen postopératoire devra se faire dès que

comme délétères dans la mesure oùelles favorisent des interruptions pro­longées de la bithérapie et, surtout,elles augmentent le risque hémorra­gique périopératoire. En l’état actueldes connaissances, aucun traitementsubstitutif (HNF ou HBPM) à dosescuratives, ou anti­inflammatoire nonstéroïdien (cebutid), n’a été validé defaçon prospective.

[ Les recommandations de laSFAR et de la Société françaisede Cardiologie (GACI)

Ces recommandations (tableau III) ontété rédigées pour guider la gestion dutraitement antiagrégant plaquettairechez les patients porteurs d’endopro­thèses.Ce tableauàdoubleentrée évalue

cardiologique et du type de stent actifutilisé) et 6 semaines pour un stent nu;– en cas de chirurgie qui ne peut êtredifférée, on doit respecter la règle des6 semaines quelle que soit la nature del’endoprothèse;– éviter l’arrêt systématique de tous lesAAP: la majorité des actes invasifs peutse faire sous aspirine à faible dose enmonothérapie;– en cas d’arrêt nécessaire : arrêt courtet reprise rapide (par dose de charge sirisque élevé);– le traitementdesubstitutionestàévitercar inutile, voire délétère;– les tests plaquettaires (agrégométrie,VASP, etc.) n’ont aucun intérêt démon­tré dans ce cadre et n’apportent pas derenseignement exploitable au clinicien.

l Les délais à observer

Les délais à observer entre l’arrêt dutraitement et le geste invasif envisagérésultent de la synthèse entre les don­nées pharmacologiques, pharmaco­dynamique et la littérature scientifique.Concernant l’aspirine, la perturbationde l’hémostase primaire est complète­ment corrigée lorsque l’ensemble desplaquettes a été renouvelé, soit après 7 à10 jours. Cependant, un chiffre de 50 G/lde plaquettes fonctionnelles est consi­déré comme suffisant pour une actionhémostatique normale. Or, le renouvel­lementdupoolplaquettaireestdel’ordrede 10 % par jour. En fonction du chiffreplaquettairedebase,3à5 joursd’arrêtdutraitementsont leplussouventsuffisantspourquelepatientait récupéréunefonc­tion hémostatique normale.

Les délais recommandés avec le clopi-dogrel et le ticagrelor sont supérieurs(5 jours) de même qu’avec le prasugrel(7 jours).

lPeut-on encore envisager des substitu-tions pour les antiplaquettaires?

Elles n’ont aucun intérêt démontré àce jour. Elles doivent être considérées

Risque hémorragiqueÉlevé

Déterminé par une liste ou nepouvant pas être réalisé sousagents antiplaquettaires

Intermédiaire FaibleDéterminé par une liste ouréalisable sous un agentantiplaquettaire

Risq

ueth

rom

botiq

ue

Élevé– Stent nu

(< 4-6 semaines)– Stent actif (< 1 an)– Syndrome

coronaire aigu(< 1 an)

– Patient traité parbithérapie

A. Retarder le gesteB. Réaliser le geste sous

au moins un agentantiplaquettaire(considérer que le surrisquehémorragique estacceptable

C. Arrêt du clopidogrel< 5 jours en préopératoire etarrêt de l’aspirine < 3 jours,sans substitution.

Dans tous les cas, reprisepostopératoire dès quel’hémostase est jugéesatisfaisante

– Retarder le geste– Réaliser le geste sous 1 AAP

IntermédiairePréventionsecondaire sousmonothérapie

A. Réaliser le geste sous 1 AAPB. Remplacer le clopidogrel

par de l’aspirine enl’absence de CI

C. Arrêt de l’aspirine < 3 jours.Dans tous les cas, reprisepostopératoire dès quel’hémostase est jugéesatisfaisante

– Réaliser le geste sousclopidogrel ou aspirine

Tableau III : Recommandations du GACI/SFAR sur la gestion des antiplaquettaires chez les patientsporteurs d’endoprothèses coronaires [15].

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possible,parunedosedechargede300 mgchez les malades à plus haut risque.

[ Conclusion

LagestiondesAAPorauxdanslapériodepériopératoire doit être pragmatique etnécessite la prise en compte du doublerisque : le risque ischémique relative-ment facile à évaluer et le risque hémor-ragique souvent plus difficile à définir.Cette appréciation globale est capitale etrepose sur une concertation multidisci-plinaire entre cardiologue, anesthésisteet chirurgien. La poursuite de petitesdoses d’aspirine est à privilégier autantque possible.

Retenons que lorsque l’on a respecté undélai de 6 semaines après la pose d’unstent nu, le risque d’accident thrombo­tique est mineur, surtout si l’aspirineest maintenue. Avec les stents actifs, undélai de 6 à 12 mois doit être respectédans la mesure du possible.

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05. sChouten o, van doMBurG rt, Bax JJ et al.Noncardiac surgery after coronary stent-ing: early surgery and interruption ofantiplatelet therapy are associated with an

û La gestion périopératoire des antiplaquettaires doit toujours se faire defaçon pluridisciplinaire.

û Le rapport de la balance entre le risque ischémique de l’arrêt et le risquehémorragique de la poursuite est capital.

û L’aspirine doit être maintenue autant que possible.

û Une chirurgie non urgente dans les 6 mois après stent actif devra êtreretardée.

û L’arrêt des antiplaquettaires doit être le plus court possible et sans relais.

POINTS FORTS

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06. raBBitts Ja, nuttall Ga, Brown MJ et al.Cardiac risk of noncardiac surgery afterpercutaneous coronary interventionwith drug-eluting stents. Anesthesiolog,2008;109:596-604.

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13. GurBel Pa, Bliden kP, Butler k et al.Randomized Double-Blind Assessmentof the ONSET and OFFSET of theAntiplatelet Effects of Ticagrelor VersusClopidogrel in Patients With StableCoronary Artery Disease. RandomizedDouble-Blind Assessment of the ONSETand OFFSET of the Antiplatelet Effectsof Ticagrelor Versus Clopidogrel inPatients With Stable Coronary Disease:The ONSET/OFFSET Study. Circulation,2009;120:2577-2585.

14. wallentin l, BeCker rC, BudaJ a et al.Ticagrelor versus clopidogrel in patientswith acute coronary syndromes. N Engl JMed, 2009;361:1045-1057.

15. Recommandations SFAR/SFC. Priseen charge du coronarien qui doit êtreopéré en chirurgie non cardiaque.Coordinateurs : Geneviève Derumeaux(SFC) – Vincent Piriou (SFAR).

L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflitsd’intérêts concernant les données publiéesdans cet article.

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