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CAVIUSIETTIE

Cette année (^m ^ en va,,,

La voilà donc terminée cette année 1939 qui s'ouvraitdans la paix et qui se clôt en pleine guerre...

Comme vous vous sentiez joyeuses, il y a juste un an,à cette époque où s'annoncent les cadeaux, les vœux,les mille plaisirs des réunions familiales.

Pour beaucoup d'entre vous la vie a bien changé de-puis... Elles ont été envoyées loin de leur maison, quel-quefois loin de leur chère maman, obligée de rester auposte pour gagner le pain quotidien.

Pendant la belle saison, cet exil pouvait peut-être avoirson charme : on s'imaginait' que l'on était en vacances,— des vacances prolongées, — et l'on profitait du soleil,

des fleurs, des fruits...

Maintenant le mauvais temps, la neige, la pluie, le

froid sont venus et il ne reste plus pour vous que le re-vers de la médaille.

Ne laissez pas au vilain «. cafard » la possibilité d'en-tamer votre courage. Ce courage, il est nécessaire à tous,en ce vioment, et vous, pctit-zs filleules chéries, vousavez aussi votre rôle à remplir dans le grand effort qui

est demandé à tous les Français.

Tout en travaillant, tout en jouant, vous êtes à laplace que les circonstances présentes vous ont assignée.

Vous' y êtes en quelque sorte mobilisées, comme nos

soldats!Sercz-vous moins courageuses qu'eux? Votre devoir est

moins dur que le leur, il «t proportionné à vos^ forces :ayez donc à cœur de le parfaitement accomplir...

/•"» ce dernier jour de l'année, mes petites amies bienchères, recueillez-vous avant de vous endormir... feuil-letez, en esprit, le calendrier de 1939 pour vous demandersincèrement comment, dans chaque circonstance qui s'estofferte, vous vous êtes comportées.

Ce petit examen, fait avec une entière loyauté, voussera bien utile en vous montrant où vous en êtes.

Quelle que soit la réponse que votre conscience vousfera, ne voiis découragez pas. Qiiand on a quelques dé-faillances à se reprocher, il est toujours temps de sereprendre, de réparer, de mieux faire à l'avenir.

Après un échec, il ne faut jamais désespérer du succès,mais se relever avec plus de vaillance.

Co7nme preuve, rappdcz-vous l'autre guerre, celle

de 14.Au début, nos admirables poilus ont essuyé bien des

revers... Au lieu de se décourager et de se rendre, ils sesont redressés dans M» effort magnifique et ont alorsremporté la miraculeuse victoire de la Marne... à partirde laquelle ils ont tenu l'ennemi en échec jusqu 'à la

Victoire définitive...

Petites filleules chéries, . quel qu'ait été le début devotre année, ayez confiance vous ai .zd, et soyez dignesd'Eux.

MARRAINE.

Le ministère de la Défensenationale envisafie d'utiliser leschiens pour la gueri'e. A cettefin, il a organisé, dans différen-tes régions, des centres de re-crutement des... toutous.

Quels services militaires at-tend-on de ces nouvelles re-crues à quatre pattes? — Desservices de plus d'une sorte,à tel point qu'on les répartitentre des spécialistes.

Le chien de chasse deviendrale ï chien sanitaire » du Ser-vice de- Santé. Grâce à lui,; depauvres blessés, qui seraientmorts abandonnés dans desfourrés, des roseaux, deschamps de blé, pouiTont êtredécouverts et sauvés.

Le lévrier sera affecté auservice des transmissions. Dansune sacoche attachée à son col-lier, il apportera à toute vi-tesse, depuis les tranchées jus-qu'au poste de commandement,des renseignements urgents etprécieux.

Le chien de garde doublerala sentinelle du poste avancé.C'est lui qui décèlera l'ennemiinvisible et silencieux qui, lanuit, essaye de se glisser cau-teleusement à travers les bar-belés...

Une raison nouvelle pour ai-mer CCS fuléles amis de rhommc.

Il y a quelque temps, Mar-raiue a reçu d'une petite fil-leule une lettre dont l'adressese réduisait à ces mots: i Mar-raine, à Paris. » Grâce, sansdoute, à quelque gentille em-ployée des Postes, fidèle lec-trice de Lisette et admiratricede Marraine, la lettre est bienarrivée à destination. De Mar-raine aussi connue dans toutela France, aussi aimée, il n»peut y avoir que celle qui estla bonne fée de Lisette!

Dernièrement, cette mêmeadiniuistration des Postes vitarriver dans la capitale une.lettre avec cette seule adresse :« Monsieur le Vicomte, àParis. » Le brave fermier del'Ouest, pour lequel son pro-priétaire résumait la bonté etla valeur, ne pouvait imaginerqu'on pût ne pas connaîtrecelui-ci à Paris.

Le plus fort, c'est que cettelettre parvint, et sans retard,entre les mains de celui auquelelle était destinée. Intelligem-ment, la Poste, sur le vu ducachet du départ, avait cherchédans l'annuaire et trouvé unvicomte dans ce village de pro-vince. Puis, un autre annuaireavait révélé son adresse àParis.

Un bon point pour la Poste !

Nous nous voyons çontraints, par les conditions économiques,

de porter le prix de vente au numéro, de notre journal LISETTE,

de 50 centimes à 60 centimes.Cette légère hausse du prix des journaux pour la jeunesse,

qui est appliquée depuis quelque temps déjà par la plupart

d'entre eux, sera, nous en sommes certains, acceptée avec

bonne grâce par notre fidèle public.Provisoirement (jusqu'au 18 janvier, dernier délai), le

prix de nos abonnements ne sera pas modifié. A l'occasion

des étrennes nous le maintiendrons, pendant cette période, à

20 francs par an. Profitez-en !

A partir du 18 janvier, le prix de l'abonnement sera porté à :

us AK 6 MOIS

France, abonnement-simple 25 francs 14 francs28 francs

Belgique (francs belges). 34 francs 17 francs8 francs 4 fr. 50

50 francs 26 francs75 francs 38 francs

Vous pouvez donc, en vous abonnant dès maintenant à

LISETTE, vous procurer, pour 20 francs, des étrennes qui dure-

ront toute une année, et dont le prix réel est de 25 francs.

ABONNEZ -VOUS ! ABONNEZ VOS AMIES!

-f. K U 2. 1 o

□DUE- LPcE)CRCE [ta>^BRic&'

Jackie leva son petit plumeau, et le fittournoyer au-dessus d'une vieille lanterneen bois contourné, dont les vitres pein-tes étaient cassées, et un nuage de pous-sière s'éleva. Comme la boutique étaitencombrée de potiches, vases, brijle-par-fums, vieilles soieries, lanternes, para-vents de laque, bref, de tout ce que peutcontenir le magasin d'un marchand chi-nois d'antiquités et de curiosités ; le nuagede poussière n'eut pas la force de volerbien loin, et il alla s'éparpiller à quel-ques mètres de là, sur une vieille robede mandarin aux soies pâlies. Jackiesoupira, et son petit bras retomba de dé-couragement. ■ I\on, décidément, c'étaitinutile, jamais il ne lui serait possible defaire régner l'ordre et la propreté dansla boutique de son père adoptif, Li-Chang-Li, antiquaire à Han-Keou. Elleregarda les vitres de la devanture pourse réconforter : elles brillaient nettes etclaires, et le passant pouvait admirerles belles et curieuses pièces qui se trou-vaient à l'intérieur. An ! ces ' vitres, cesvitres à l'européenne, comme elles sem-blaient dépaj'sees et insolites, à côté desboutiques voisines, toutes chinoises centpour cent, et qu'aucun obstacle ne sépa-rait du passant. Mais Li-Chang-Li avaitvoulu que son magasin, au cœur de laville chinoise, rappelât ceux d'Europe.

— Moi aussi, petite, je suis un Euro-péen, avait-il dit, en caressant les che-veux de Jackie, et son regard, à ce_ mo-ment-là, avait eu une expression si rê-veuse et si triste, que l'enfant, intimidée,ne répondit rien.

— Oui, répéta-t-il, cela me rappelleramon pays... et jjuis, je serai à l'abri desimportuns...

Jackie soupira une fois de plus, enconstatant que sa tâche s'avérait impos-sible. D'un mouvement rageur, elle en-voya le plumeau au loin, puis, jetant uneécfiarpe sur ses épaules frêles, elle fermala porte et sortit.

Dans la rue, c'était le va-et-vient inces-sant, les cris, les exclamations spécialesaux villes chinoises surpeuplées, et surtoute cette humanité flottait un mélange

d'odeurs de friture, de parfums, de pois-son séché, et aussi de malpropreté, carl'hygiène n'est pas la vertu principaledes Chinois.

Quelques chiens finissaient de remplirleur mission de nettoyeurs d'ordures. Surle pas de sa porte, le blanchisseur ache-vait de repasser le linge des clients eu-ropéens, et son petit garçon, gravementassis par terre, mangeait un boL de riz, detoute la vitesse des deux baguettes ^debambou qui lui servaient de fourchette.Jackie fut frappée du nombre siniiic-nant de soldats rencontrés, sans savoirà quelle raison l'attribue!'. Mais ni la pré-sence des troupes, ni les odeurs, ni labousculade, ne gênaient la fillette. Ellese glissait entre les groupes, si menue,qu'on ne lui eût jamais donné ses dixans, et marchait tout droit vers son but.

— Jackie. Eh ! lumière de mon cœur,où vas-tu donc ? demanda une voix mo-queuse.

Jackie se retourna en fronçant les sour-cils. La rencontre no lui était pas agréa-ble. Elle n'aimait pas ce grand garçondégingandé, aux yeux chassieux et au re-gard fuyant, qui venait de l'arrêter.

— Cela ne te regarde pas, Wu-Eang,dit-elle sèchement.

Le jeune Chinois se mit à rire.'— "ru n'es pas aimable, ma belle, mais

je te tiens, tu ne passeras pas sans medire où tu vas.

Jackie rougit de colère, puis elle se

baissa rapidement, et ses petites dentsblanches et pointues s'enfoncèrent dansla main qui meurtrissait son poignet.Wu-Fang poussa un cri, et lâcha la petitefille qui se sauva et se perdit dans lafoule.

Oh ! ce n'était pas une petite bonnefemme très commode que Jackie, maisWu-Fang, le fils de la Chinoise qui, cha-que matin, venait faire le ménage do sonpère adoptif, était un méchant garçon quine manquait jamais de la taquiner, et delui jouer de méchants tours... Et curieuxavec cela... Il la questionnait sans cessesur les occupations de Li-Chang-Li, surce qu'il disait, et quelles gens il recevait.Bien souvent, Jackie s'était disputée aveclui, car Wu-Fang, pendant l'une des nom-breuses absences du marchand, se per-mettait de déplacer les objets du maga-sin, et de fureter partout. Il avait mêmeessayé de déplacer le grand bouddha deporcelaine qui ornait l'angle le plmobscur de la boutique, et au sujet duquelLi-Chang-Li avait donné les ordres le»plus sévères.

— Personne ne doit toucher à cebouddha; avait-il dit. Et en disant cela,il avait pris un air si farouche queJackie pour rien au monde n'eût oséenfreindre l?i défense.

Sœur Marie des Anges caressa la petitetête brune encadrée de deux nattes biealisses, et elle releva sur les épaules me-nues le châle qui avait glissé.

— Pourquoi reviens-tu à la Mission ?Il n'y a pas classe ce soir. Aurais-tuoublie quelque chose ?

Les beaux yeux noirs de l'enfant ex-primèrent un vif chagrin.

— J'ai essayé de faire ce que vouanous aviez dit ce matin, à l'école, masœur...

— Et quoi donc?— Vous nous avez dit d'être propres,

de faire régner l'ordre autour de nous.Alors, j'ai essayé de nettoyer le magasinde mon père, mais c'est impossible... Ily a trop de choses, trop lourdes pourêtre remuées... Et c est si sale...

Elle poussa un profond soupir, et lareligieuse sourit. Depuis des annéesqu'elle s'occupait d'inculguer aux petite»Chinoises, fréquentant l'école de la Mis-sion, les règles élémentaires de l'hygiène,rarement la bonne parole était tombéedans un aussi bon terrain.

— Tu as voulu trop entreprendre enune seule fois, ma petite Jackie, dit-elleavec douceur. Commence par être trèspropre toi-même, veille sur tes vêtement»et, Bcjii à peu, tu arriveras à mettre del'ordre dans le logis de Li-Chang-Li...

— Oti ! soupira la fillette, mon pèreest si souvent absent... Ou bien, il reçoitdes visiteurs, la nuit... Je suis très seule.

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— Je sais, murmura la religieuse.Et dans son esprit elle évoqua la sil-

houette un peu voûtée, la barbe grison-nante, les yeux toujours inquiets de Li-Chang-Li... Bien de.s choses se murmu-laient à son sujet, bien des bruits cou-raient sur son compte... Mais sœurMarie des Anges aimait l'enfant, et se

LISETTE

et avancent vers la ville. Les troupes deTchang-Kai-Chek refluent vers Hang-Kéou... Il y aura, sans doute, des raidsd'avions bientôt. Retourne vite chez toi,et fais bien ta prière... Peut-être revien-dras-tu vivre ici plus tôt que tu ne lecrois...

Debout sur le seuil de la porte, la reli-

demandait ce qu'il adviendrait de la pau-vre petite.

Comme si elle eût deviné les secrètespensées de la religieuse, celle-ci reprit ense serrant contre la robe de bure :

— Je voudrais- tant rester avec vous, àl'orphelinat de la Mission... J'ai si peurquand mon père me laisse seule a la

farde de To, la mère de cet horrible Wu-'ang !— Il faudra le lui demander.Jackie secoua la tête :— Je l'ai déjà fait, mais il ne veut

Eas... Il m'aime à sa manière, et il esteureux, quand il revient, de me trou-

ver là. Depuis que mes parents sontmorts du choléra, il y a quatre ans, ilm'a recueillie et soignée... Et moi aussije l'aime, car il est bon, et je ne veuxpas lui faire de peine... Mais je serais siheureuse près de vous !

La rcligieusej tout en écoutant la petitefille, poursuivait son idée :

— Li-Chang-Li n'est pas Chinois, mal-gré son nom?

— Non. Il m'a dit un jour qu'il étaitAnglais, comme mes parents, mais il ya SI longteiiips, si longtemps qu'il vit enChine, qu'il a fini par vivre, parler ets'habiller comme un vrai Chinois, et ila pris un nom du pays.

Sœur Marie des Anges resserra le châleautour du cou de l'enfant.

— Il est tard, ma petite, le soir tombe,et je n'aime jias te savoir seule dans lesrues, à cette heure. Tu ne sais peut-êtrepas que les Japonais ont pris Nankin,

Jacli 'tc l'i rdiùt à 1 (1 th'i'dhée..,

gieuse, d'un air pensif, regarda s'éloi-gner, puis disparaître la petite formefrêle, SI menue, et cependant courageuseet réfléchie comme une petite femme.

Le repas du soir fut silencieux. Touteu se dépêchant de finir sa portion deriz et le poisson séché, Jackie regardaità la dérobée le visage las et soucieux deLi-Chaiig-Li, et elle n'osait interrompresa méditation.

— Tu as fini, petite? demanda-t-il. Ehbien, va te coucher, et dors. Ne t'in-quiète pas, si tu entends parler. J'attendsun visiteur.

L'enfant tendit son front au baiser deson père adoptif, et elle monta sagementau premier étage.

« Encore un visiteur... »Les volets de la boutique étaient soi-

gneusement clos. La petite pièce où lemarchand et sa fille avaient pris leurrepa.s, communiquait avec le magasin. Ungrand châle servait de portière.

Dans sa chambre, Jackie ne se désha-billa pas. Sans savoir pourquoi, l 'annoncedu visiteur nocturne la troublait. Elle sen-tait qu'il existait un mystère dans la vie deson père adoptif, et elle redoutait un dan-ger. Dans la rue, on entendait le bruitsourd de l'artillerie en marche, le piéti-nement des soldats. Alors elle se sou-vint des récits des réfugiés recueillis à laMission... Bientôt, les Japonais seraientlà et, avant eux, leurs avions, les bom-

' bes, l'incendie...L'enfant frissonna. Une terreur sans

nom l'envahit. Elle se leva dans l'obscu-rité, ne pouvant plus supporter sa soli-tude. Elle descendit l'escalier sans faireplus de bruit qu'une souris. Mais il n'yavait plus personne dans la petite salle.Tout était noir.

La inain de Jackie frôla la tenture quiséparait le magasin de l'arrière-boutique.Au même instant, elle entendit un bruitde pas, et un chuchotement. C'était sonpère adoptif qui avait dû sortir par laporte située derrière la maison, et. qui re-venait avec son visiteur. Jackie connais-sait suffisamment le magasin pour savoir,malgré son encombrement, s'y dirigerdans l'obscurité. Elle se glissa derrièreun paravent de bois ajouré, tout près dugrand bouddha de porcelaine.

La conversation fut longue entre lesdeux hommes, qui parlaient une langueinconnue de l'enfant. Seulement, au tonsuppliant de l'inconnu, à la voix autovi-taii-e de son père, la petite fille compritque le visiteur refusait de faire ce quevoulait Li-Chang-Li.

Enfin, le marchand conclut, et cette foisdans sa langue habituelle :

■ — C'est pour la dernière fois.A travers les arabesques de bois dé-

coupé du paravent, Jackie vit son pèresoulever la tenture, et entrer dans le ma-gasin. Elle se sentit défaillir de terreuren le voyant s'approcher de sa cachette.:Mais il s'arrêta près du grand bouddhade porcelaine. Il regarda un instant ledieu au sourire mystérieux, puis il appuyasur le bras levé de l 'idole. On entenditun bref déclic, et la statue bascula enarrière, découvrant la cachette aménagéedans son socle. Li-CKang-Li plaça dansla profonda cavité une liasse de papiers,mis il remit la statue en place. Ensuite,aissaiit une veilleuse sur la table de l'ar-

rière-boutique, il partit en compagnie duvisiteur.

La petite fille voulut sortir de sa ca-chette et profiter de ce court répit pourregagner son lit, mais, avant qu elle eûtfait un mouvement, elle_ vit émerger d'unballot de tapis et de soieries, la tête gri-maçante et détestée de Wu-Fang.

(Voir la suite pai/e 14.)

UNE BONNE NOUVELLE

Dans le prochain numéro commenceraun merveilleux roman

d'un auteurque vous

aimeztoutes : par

Claude RENAUDY

Toutes vos amies vou-dront le lire aussi :

prévenez-les, pour qu'elles retiennent, chez lemarchand de journaux, le n° 1 de "LISETTE"

daté du 7 janvier 1940.

SOUS LE SIGNE DU RUBAN ROUGE.. SAINT-DENIS

É C O U E N

LES LOGES

CHEZ LES JEUNES FILLES DE LA LEGION D'HONNEUR

u existe, aux abords de Paris, troisvieilles et curieuses institutions — quin'en font qu'une à proprement parler— et que l'on dési.c:ne sous le nom deMaisons d'éducation ' de la Légiond'honneur.

L'une se trouve à Saint-Denis, dansles bâtiments de l'ancienne abbaye desBénédictins, dont la célèbre église, àcôté, abrite les sépultures de maints roiset reines de France. y'

L'autre est à Ecouen, en Seine-et-Oise, dans un château qui fut la pro-priété des Montmorency.

L'autre, enfin, est installée aux Loges,un ancien monasttre situé au milieu dela forêt de Saint-Germain, et qui doitsou nom à ce qu'il fut bâti sur l'empla-cement d'un pavillon de cliasse deLouis XIII, où se trouvaient des logespour les faucons.

Ces trois maisons sont des pension-nats de jeunes filles... Mais ce qui lesdistingue de tous les autres établisse-ments similaires, c'est qu'on n'y admetque les filles, ou les très proches pa-rentes de membres de la Légion d'iiçn-neur (décorés de la croix de la Légiond'honneur: ruban rouge.)

C'est Napoléon I'"' qui les créa, cesmaisons, au lendemain d'Austerlitz, en1805, pour les « filles de ses braves^».N'avait-il pas institué, trois ans plus tôt,l'ordre de la Légion d'honneur pour ré-compenser ces mêmes « braves » ? Fon-der des maisons d'éducation pour leursfilles, c'était parachever son œuvre. Enefiet, les guerres faisaient beaucoupd'orphelines ; par ailleurs, nombre demilitaires veufs, obligés de suivre l'em-pereur à l'étran.ger, ne savaient à quiconfier leurs enfants.

Ecouen fut réalisée la première, sousla direction de Mme Campan, en 1806.Puis vint le tour de Saint-Denis, eu

180g. En 1811, enfin, les Loges fut ou-verte — en même temps que deux au-tres maisons qui étaient appelées à dis-paraître.

Pendant longtemps, Ecouen et lesLoges ne furent considérées que commeles succursales de la maison de Saint-Denis. Celle-ci tirait sa prédominancede ce qu'on n'y recevait que des fillesd'officiers supérieurs (à iiartir de coin-mandant), ou des civils exerçant desfonctions correspondant à ce grade —tous légionnaires, bien entendu. Quantà Ecouen et aux Loges, on y envoyaitrespectivement les filles d'officiers su-balternes (capitaines, lieutenants) et lesfilles de sous-officiers et soldats.

Ces trois « classes » sont suppriméesdepuis longtemps. Dans les Maisons dela Légion d'honneur, on admet mainte-nant, indistinctement, les enfants, detous les légionnaires français civils oumilitaires.

Les études durent six ans; et la seuledistinction que l'on fait encore est lasuivante: les trois premières annéess'écoulent à Ecouen et aux Loges, lestrois dernières à Saint-Denis. Ces élu-des mènent au baccalauréat. Maiscomme à la Légion d'honneur on tientà /onner, selon le mot de l'empereur,« des femmes utiles », les élèves sontorientées tout de suite vers la profes-sion qui semble leur convenir le mieux.

Pour entrer à la Légion d'honneur, ilne suffit pas d'avoir un papa décoré. Ilfaut, en outre, être âgée de 11 à 13 ans;avoir son certificat d'études primaires,ou avoir subi avec succès l'examend'admission en sixième dans un lycéeou collège. Faute de quoi, on peut êtreautorisé, dans certains cas, à passer unpetit examen.

Saint-Denis abrite 400 élèves; Ecouen,200; les Loges, aoo. Chaque année, on

procède à 140 nominations, dont 42 àtitre gratuit (pour les orphelines sançfortune, de préférence) , et gS à titrepayant (pour les filles, petites-filles,sœurs ou nièces de légionnaires).

Le prix de pension est de 3.000 francspar an. Mais des réductions allant jus-qu'à la demi-pension peuvent être ac-cordées.

L'uniforme — car il y en a un — estfourni par les maisons. Il se composed'une robe, d'une cape, d'un chapeau "étd'une collerette, qui est la seule partiedu vêtement subsistant du premierEmpire.

Il y a, aussi, les ceintures...Les ceintures et leurs couleurs gui

diffèrent selon les classes, c'est une desplus jolies traditions de la Légiond'honneur.

En voici la gamme :i"" année : violette.2" année: aurore (jaune doré).3* année : bleue.4" ^nnée : nacarat (rouge clair) ..S" année : blanche6° année : multicolore.Il y a ainsi la « classe bleue », la

« classe nacarat », etc. La i classe mul-ticolore », c'est celle du bachot, celledes révisions ; elle est donc représentéepar une ceinture qui résume toutes lesautres sous forme de rayures.

Bien d'autres traditions, jalousementconservées depuis plus d'un siècle, sonttoujours en vigueur dans les Maisonsde la Légion d'honneur. En voici unedernière, qui se relie à la précédente.Les * dames » sont habillées en bleu.Mais les surveillantes sont vêtues denoii*: ce sont les « dames noires ».Quant au personnel domestique, il esten bordeaux, tandis que les ouvrières(lingères) sont en marron...

RE.MÎ LOUYS.

- 5 - M- 53

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— Alors, oùl allez-vous nous loger ?— Je ne sais... Le paya est plein à

craquer. Chez l'habitant, il n'y a plusla moindre place.

— Nous ne pouvons, pourtant, rester

dans la rue...— Ecoutez... A l'entrée du village il

y a une vaste grange abandonnée. Jevais vous y faire conduire et vous en-voyer des paillasses. Demain, on essayera

de faire mieux.A présent, assis sur les paillasses qu'on

venait de leur apporter, ils se regardaientavec des yeux sans vie, des yeux que

n'éclairait plus aucun espoir.Les pauvres gens étaient restés les

derniers, dans leur petit hameau de lafrontière de l'Est. Tous les autres étaientpartis. Mais le vieux grand-père malade

avait dit :— Je veux mourir ici, chez moi oîi

j'ai toujours vécu. Et ma place est aucimetière où sont tous mes défunts.

A cause de lui et de ce suprême dé-sir, la famille n'avait pas quitté le sol

nata\. , . . „ .. ,Mais, contre toute prévision, 1 aieul

n'était pas mort et l'existence était de-venue impossible dans ce coin de terreabandonné où l'isolement moral s'ajou-

tait aux privations matérielles.

— Qu'il est joli ton serin !

— Les Lebrech sont à Courcel... Etaussi les Vertil et les Termann... Allonsles rejoindre.

C'est ainsi que les vieux grands-pa-

rents, la jeune femme et ses enfants ve-naient d'arriver au village. Hélas ! Au-

cune place pour eux ! Du moins aucuneautre place que cette grange noire, pous-siéreuse, où les murs disparaissaient sousles toiles d'araignée-s, où la vitre de la

lucarne, brisée, laissait passer la froide

bise.Les bras ballants, la lèvre tombante,

les malheureux, découragés, s'abandon-naient à leur chagrin. Seul, le petit Mar;cel restait sur la porte serrant contre lui

la cage où son oiseau, plein d'épouvante,cognait ses ailes contre les barreaux.

— Qu'il est joli ton serin, mon petitbonhomme! Tu l'as apporté avec toi?

— Oui... Il s'appelle Frifri... Mais ila peur... Le voyage a été si long!

— Et où loges-tu maintenant?... Dans

cette grange?...— Oui. Elle est très laide. Maman dit

que les moutons sont mieux dans leur

étable.Nelly se retourna.— Viens-tu, Robert?...Un grand garçon surgit du sentier

voisin et rejoignit la charmante adoles-

cente, fraîche et blonde, qui l'appelait.— Tu as besoin de moi?—• C'est pour les gens qui sont dans

la grange... Si nous pouvions les aider!

Ils entrèrent, saluèrent le vieillard, lesdeux femmes, la grande fillette qui tenaitle dernier-né.

— Voulez-nous nous' permettre de net-

toyer la grange? Mon frère va aller cher-cher des balais et une tête de loup. Toutà l'heure ce sera très propre.

Robert s'éloigna et revint bientôt avecles instruments ménagers. Tout en es-sayant de distraire, par leur bavardage,

les pauvres gens, Robert et Nelly ne per-daient pas leur temps : les toiles d'arai-gnées tombaient et la poussière chassée

des moindres recoins, était jetée hors dela maison.

— A présent il vous faut un petitfourneau. Il y en a un dans notre gre-nier. Avec la permission de maman, je

vais vous l'apporter.

— Et moi je lui demanderai des lé-gumes. Maman est très bonne, elle m'endonnera sûrement.

Le frère et la sœur restèrent longtemps

absents. Les deux vieillards, qui avaientpris plaisir à leur présence et à leurbabil, se désolaient déjà.

— Ils avaient si bien commencé !...Nous ont-ils déjà oubliés?

— 6 -

Amère, la jeune femme répondit :— C'était trop beau ! Pourtant, ils

.-ivaient l'air d'avoir bon cœur... Ils ontété touchés de savoir que mon Paul estau front comme leur papa... Mais ils sontdéjà las de nous avoir aidés !

Non, ils n'étaient pas las les chers en-fants ! Us se démenaient le plus qu'ilspouvaient, au contraire. En route, ilsavaient rencontré leur cousin Jean et

leurs amis Alain et Colette.

— Venez... On fera une partie de ping-pong et l'on "goûtera. Maman a fait cuiredes châtaignes.

— Oh ! Jean, si tu voulais nous lesdonner...

— Pour vous tout seuls!... Ce quevous êtes gourmands !

— Ecoute... On va t'expliquer.Nelly parla.

— Avez-vous compris? conclut-elle.

Jean, Colette, Alain avaient si biencompris que, à leur tour, ils offraientleur concours.

— Entendu pour les châtaignes. J'ap-poterai aussi un pot de lait pour les deuxderniers... La fermière nous l'a livrétout à l'heure.

— Et nous, on viendra avec des cou-vertures. Je sais qu'il y en a des taschez nous.

-7- Si maman pouvait nous donner lavieille table qui est dans la serre.

-;- Oh! j'y pense... J'ai un fauteuil enpaille que ma marraine m'avait offert...

ce sera parfait pour la vieille aïeule...

— Et une lampe?... Qui en découvriraune?...

— Moi!... Avec des allumettes...

Une heure plus tard, alors que les mal-

heureux s'abandonnaient à leur peine,toute la bande revint. Les garçons pous-saient des brouettes et les fUles portaientsacs et paniers.

— Vous nous attendiez avec impa-

LISETTE

tience, n'est-ce pas ? fit Nelly. Tenez,nous vous amenons notre cousin et nos

amis. Ils sont contents de vous être uti-les.

Jean déballait le fourneau, quelques

La vieille maman pleurait d'attendris-sement.

— C'est-y possible de rencontrer desi gentils enfants !... Cela vous portera

chance ! Le bon Dieu vous le rendra !

Alain s'élança.

— Je cours en chercher.

Quand il revint, toute la famille en.tourait la table. Nelly et Colette fai-saient le sei-vice.

— Vous êtes fatigués. Restez assis.Demain vous déferez vos paquets et vousarrangerez tout.

La soupe fumante donna des couleursà tous. Marcel et sa sœur .Marthe de-vinrent bavards, et le tout petit voulut

bien laisser reposer sa "maman et alleravec Colette.

Les deux vieux, la jeune femme avaientperdu leur air de découragement .

— A présent nous allons vous quitter.Nous reviendrons vous voir demain.

— A demain. Et grand merci. Sansvous que serions-nous devenus?...

Marcel se précipita dans les bras deNelly.

— Moi je vous aime beaucoup... Je

veux vous embrasser.— Et moi aussi.

Marthe réclamait sa part des baisers

et Doudou tendait son petit bec rosevers Colette et Nelly.

— Au revoir... dormez bien...

Dans la grange, la paix était descen-due avec l'espoir de jours meilleurs.

Les jeunes gens étaient las. Ils n'.Tspi-raient qu'à leur lit. Jfais leur fiitigue

était joyeuse et ce fut avec entrain qu'ilsse donnèrent rendez-vous pour le jourprochain.

— Ce seront nos protégés, n'est -ce pas?

— Oui. Nous ne les abandonneronspas. Les petits sont mignons.

— Et quelles bonnes gens que ces deuxpauvres vieux !

— La jeune femme a bien du souci

avec tout son monde. Mais maman m'apromis qu'elle s'occuperait d'elle.

— Maman aussi.— Allons, au revoir...

Ils se séparèrent. Ils étaient radieux!...Leur bonté simple et généreuse avait ré-chauffé et consolé des cœurs éprouvés.

ANDRÉ HENHY.

— Tiens, cuilà ton goûter.

casseroles, des couvertures. U tendit àMarcel les châtaignes chaudes.

— Tiens, voilà ton goûter à toi et àta sœur.

— Et voici du lait pour le tout petit.

N'oublions pas la soupe, dit Nelly.Pendant que vous allumerez le feu, nouséplucherons les légumes, Colette et moi.

— Oh ! je sais aussi, fit l'aînée des ré-fugiés. Quand j'aurai fini mes châtai-

gnes, je vous aiderai.Elle parlait la bouche pleine, trop heu-

reuse de ce régal, après la misère du

voyage.

— Qu'il protège seulement papa... Etaussi votre fils qui est là-bas.

La grange prenait tournure. Sur lefourneau la soupe cuisait et, répandaitune délicieuse odeur. A côté, le fauteuilde paille était installé et la bonne aïeuleavait exigé que le grand-père y prîtplace.

— U a été si malade!... Il est encorefaible, vous savez. Moi, un escabeau mesuffit.

Nelly n'avait pas oublié les assiettes,

quelques couverts d'aluminium.Marcel battait des mains.— Ce qu'on est bien ici ! Presque aussi

bien que chez nous !— 'l'iens, j'ai pensé à ton oiseau...

Voilà des feuilles de salade et des grai-nes.

— Oh ! que vous êtes gentilles ! Voyez,Frifri n'a plus peur de vous !

— Je sais bien ce qui manque encore,dit Robert. Un peu de papier huilé pour

boucher le trou de la vitre.

Un Réga/ pour /e Jour de /'An♦

Malgré la guerre nous pouvons — nous devons même —

souligner le janvier par quelques douceurs.

Voici une recette simplifiée pour obtenir de bons marrons

glacés.

Choisissez de beaux marrons bien sains et faites-en griller

une quarantaine à feu pas trop vif, dans une poêle à trous,

spéciale pour pet usage. Secouez fréquemment la poêle. Vos

marrons doivent cuire sans brûler et sans prendre couleur.

lînlevez-en soigneusement les deux peaux et laisez-les

refroidir.

Embrochez ensuite chaque marron sur une petite brochette

de bois ou sur une aiguille à tricoter en acier.

Ceci fait, préparez votre caramel avec 500 grammes de

sucre en morceaux et deux verres d'eau. Faites fondre dou-

cement, puis, sur un bon feu, amenez à' ébullition et laissez

cuire en écuni.ant souvent.

Lorsque quelques gouttes du sirop jetées dans un bol

d'eau froide se solidifient et craquent sous la dent sans coller,

le caramel est à point, car il faut éviter de le laisser jaunir.

Retirez du feu, et, lorsqu'il ne se forme plus de bouillons,

trempez-y les marrons un à un à l 'aide de vos brochettes.

Puis, plantez le lx>ut de ces brochettes dans un récipient

rempli de sable, jusqu'à ce que vos marrons soient égouttés

et refroidis.

Faites'-les alors glisser en maintenant la brochette d 'une

main et en poussant le marron de l 'autre.

L'ITINÉRAIRE

I.e train part de Jlarscillc et doit arriver à Paris. Il s'oEit deprendre la ligne qni y conduit, car certaines abouti.sscnt :\ de petitesstations terminus (in(li(iu(fes par un cercle noir). En aucun cas onne doit revenir en arrière.

Ces excellents marrons glacés seront pins jolis encore

si vous les servez dans des petits godets de papier plissé.

Vous pouvez en envoyer une- caissette à vos chers soldats

qui les apprécieront sûrement. -

TANTE BISCUIT.

— 7 - N- 53

© Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l'Image

Page 5: © Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l'Image

RÉSUMÉ (i). — M. de Balloy étant tombé gravement malade en Pologne, sa femme et Christiane, sa fiUc, sont af)t>c}ées aufyr ^-sde lui par un ami, le comte Kirzcnski. Elles se mettent en l'outc aussitôt, traversant l'Allemagne déjà sous les arnies. A leurarrivée à Varsovie, IVladimir Kirzenski vient les attendre à la gare pour les conduire chez ses parents, où elles retrëù'vcnt leur

cher malade.

m. VERS LE DEVOIR.M

. de Balloy n'était pas encore — loin de là— hors de dang-er.

A la suite d'une chute de cheval il avaitéprouvé une forte commotion cérébrale quia\-ait donné à sou entourage les pires inquié-tudes. Au dire des' médecins, il en avait encorepour plusieurs semaines avant de pouvoir êtreramené eu France. D'ici là, repos absolu etcalme complet seraient les meilleurs facteursde la guérison.

Mme de Balloj', oubliant qu'elle-même n'é-tait encore qu'une faible convalescente, étaitdevenue l'infirmière du cher malade, secondéepar la brave Adèle; le comte Kirzenski et safemme cherchaient, par tous les moyens, àfaciliter toutes choses pour leurs hôtes fran-çais.

Une sympathie cordiale et spontanée n'avaitpas tardé à unir la jeunesse. Christiane trou-vait eu VVanda et en Wladimir les plus char-mants amis qu'elle pût rêver. Quant aux deuxpetits, Michel et Sonia, ils étaient, tout sim-plement, en admiration devant la jolie Fran-çaise.

Wauda, exactement de l'âge de Christiane,et son frère avaient entrepris de distraire leiirnouvelle amie que l'état de sou père attristaitprofondément.

Déjà très artiste, très aU courant de l'his-toire et des beautés de sa patrie, Wladimirs'était fait le guide du trio à tTavers les monu-ments et les jardins de Varsovie. C'était unplaisir pour Christiane que d'admirer la vieille

Voir Lisette n* 51.

ville groupée sur les bords de la Vis-tule, les vastes parcs, le beau quar-tier d'Ujardowska qui lui rappelaitnos Champs-Eb'sées, puis la cathé-drale .Saint-Jean, les musées, et, nucentre de la ville, les rues animéescil foisonnent les beaux magasins,les_, pâtisseries alléchantes.

On a appelé Varsovie « le Parisdu Nord ». De fait, Christiane ne se sentait pas étrangère dans cette belle capitale à Tavie intense; partout oîi elle passait, elle entendait monter vers elle un écho de la fidèle

. , amitié franco-polonaise.Dès que l'on devinait sa nationalité, ou s'efforçait de lui faire un chaleureux accueil.

— Voyez-vous, expliquait fièrement Wladimir, la Pologne est le seul pa\-s d'Europe qui n'ait jamiiis faitla guerre à la France... Une amité dont la fidélité remonte si loin dans l'histoire ne peut être qu'inébran-lable dans l'avenir.

— Oui, répondit Christiane émue, entre nos deux patries c'est à la vie à la mort.

— A la vie, à la mort, répéta lentement le jeune garçon.

Et, à cette heure grave qui semblait à la veillv ik- siimicr,ces mots- prenaient presque la forme d'un seniu-nL.

Les jours passaient, pas tout à fait heureux, parce que la

santé de M. de Balloy donnait toujours de-«graves inquié-tudes, et, surtout, parce que les nouvelles politiques, cha-que jour plus alarmantes, faisaient les cœur.s'se serrer.Le mois d'août touchait à .sa fin, et, dans beaucoup defamilles polonaises, le père oti les fils avaient été convo-qués sous les drapeaux.

Un soir, comme Wladimir, Christiane et Wanda ren-traient à ÎMosaska, la vieille demeure familiale des Kir-zenski, ils furent frappés par l'agitation inaccoutumée quiy régnait. Michel s'élança vers eu.x, le visage bouleversé :

•— Père est rappelé, il part tout à l'heure.

Ils n'avaient pas besoin de demander vt-rs quelle desti-nation partait le comte; ils avaient compris que la l'olni^neen danger appelait ses fils à son .secours, et .Stanislas Kir-zenski était capitaine de réserve.

L'officier, déjà tout équipé, s'apprêtait à quitter samaison. Lorsqu'il aperçut sou fils aîné, sou maie visages'éclaira d'un sourire de vaillance; Il lui tendit les bras :

— Wladimir, dit-il d'une voi.x vibrante, c'est toi qui, enmon absence, deviens le chef de notre maison ; j'ai

• confiant* en toi. Je sais que tu ne feras jamais rien quenotre honneur puisse réprouver. Que Dieu te protège, toi,tous les "nôtres et les hôtes qui sont sous notre toit. Vivela Pologne ! (A suivre.)

Texte d'Hélènc-Jcau BABIN. — Dessins de I.CVESQUE.

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LISETTE

BLOUSON-CHEMISIER au TRICOTCette blouse d'écolièie à manches

courtes est brodée sur la poche d'unefleurette en laine de ton opposé. Desboutons fantaisie de même nuance quela broderie garaissent le devant. Onpeut faire le devant ouvert complè-tement, comme sur le schéma, ou bienouvert jusqu'à la taille seulement,

comme sur la figurine.

EXECUTION POUR 10 ANS. — Ilfaut environ 200 gr. de laine Tuni-

sienne 5 fils; des aiguilles de 3 mm. 5.

Dos: Monter 80 m. et faire 5 cm.de côtes: 2 m. end., 2 m. env. (fig. 1).Continuer au point jersey: un r. end.,tin r. env. (fig. 2), tout droit jusqu'à22 cm. de hauteur.

Fermer de chaque côté pour les em-manchures 4 m. et deux fois une m. ;continuer tout droit.

• Quand les emmanchures ont 14 cm.,fermer 22 m. de chaque côté en troisjfois pour les épaules et fermer en unefois les mailles du milieu pour l'en-colure.

Devant: Monter 80 m. et faire 5 cm.de côtes. Continuer au point jersey enséparant les mailles en deux; prendre36 m. pour le côté gauche et ajouter8 m. au milieu du devant qui serontfaites au point mousse (toujours àl'endroit) (fig. 3). Travailler sur ces

44 m. jusqu'à 22 cm. de hauteur ; fer-mer pour l'emmanchure 3 m., 2 m.et deux fois une m. et continuer toutdroit. A 33 cm. du bas, fermer côtéencolure 13 m. et trois fois 2 m. Fer-

mer en trois fois les 22 m. de l'épaule,à la même hauteur que dans le dos.

Faire le côté droit en sens inversesur les 44 m. en attente ; sur la bandemousse, faire sept boutonnières es-pacées de 5 cm. en fermant les 2 m.du milieu et en les remontant au rangsuivant.

Manche: Monter 45 m.; faire 2 cm.de côtes; prendre le point jersey enfaisant une augmentation toutes les4 m. pour avoir 57 m. Faire 8 cm. dejersey, puis fermer 2 m. au bout dechaque rang, jusqu'à ce qu'il reste12 m. qu'on ferme 2 à 2.

Col : Faire les coutures d'épaule etremmailler l'encolure sauf 5 m. auxdeux e.xtrémités. Faire un cm. de jer-sey avec les 3 m. des bords au pointmousse ; répartir 10 augmentations surtoute la largeur, faire encore 2 cm.,terminer par 6 r. de mousse. Fermertrès lâche.

Poche: Monter 20 m., faire 5 r. demousse, 4 cm. de jersey, puis fermer2 m. à chaque bout d 'aiguille six foiset fermer les m. qui restent en unefois. Broder la fleurette au point debouclette.

Pour 14 ans. — Monter 84 m. pourle devant et le dos, et 49 m. pour lamanche. — Se guider sur les mesuresdu schéma.

Fiff. S

■<0 AN^

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Ooi

3 <r J

Laine Tunisienne 5 fils, la pelote de 50 gr. :7 francs, en tous coloris. Les 4 pelotes :30 francs franco.

Aiguilles Jouvenia, long. 30 cm., 4fr. 50 i".Pour toute commande, s'adresser au Ser-

vice d'Ouvrages de Lisette, 1, rue Gazan,Paris-14e (chèque postal : Paris 26-56), etjoindre le montant a la commande.

N- 53 — 10 —

COUTUMES

Vous connaissez, tontes, certainescoutumes qui vous paraissent tin peuétonnantes. En voici deux, que vousignoriez certainement et qui mesemblent assez curieuses.

En Croatie, à Crkveuica, toutes lesfemmes sans exception sont en deuil.Cette extraordinaire et sombre cou-tume remonte au xv" siècle, depuisla mort de Frankopan, martj'r del'indépendance croate.

Eiî vSilésie, maintenant, à Goerlitz,très exactement. 11 existe, dans cetteville, une horloge qui avance tou-jours et ne marque jamais l'heureexacte.

C'est à la suite d'une tragique his-toire qui remonte à l'an 1453. Unsouvenir historique...

En cette année, des gens qui n'é-taient pas du tout contents de leursconseillers, décidèrent, tout simpl'^-ment, de les tuer à leur so'-tie del'Hôtel de ville, à midi précis, nosconseillers étant gens fort exacts.J'imagine qu'ils avaient l'intentionde prendre leur place...

Mais un des conjurés, peut-êtreeffrayé par la portée de cet acte, nevoulut pas trahir ses amis, mais nevoulut pas, non plus, être compliced'un tel crime. U décida de sauver lesvictimes. U avança tout simplementl'horloge...

Et à\uidi moins le quart, alors quel'horloge sonnait midi, les conseillerssortirent de l'Hôtel de ville et ren-trèrent déjeuner, laissant les conjuréstout pantois de leur « conspirationratée ».

COUSINE Z.-VBETH. .

MÎES \mIl mmm

Ces temps derniers, j'ai lu beau-coup. J'ai lu surtout des statistiques.J'espère que vous savez ce que c'est ?En tout cas, voici la définition dudictionnaire : la statistique est unescience qui a potir objet le groupe-ment méthodique des faits sociaux

■ai se prêtent à une évaluation numé-rique... .

Voici donc ce que i 'ai appris :

Aimez-vous le riz? D'après les tou-tes dernières statistiques, il y a,actuellement,' 800 millions de per-sonnes environ qui mangent du rizchaque jour...

Pour celles d'entre vous qui con-naissent Paris et ses beaux arbres.vSavez-vous combien il y en a ? 'Trois cent quarante-deux mille. Avecette magnifique forêt, Paris est unees villes les plus boisées du monde.

QUl SAVAIT 'CELAMES CHÈRES PETITES COUSINES,

Et voici les questions pour aujourd'hui. Elles sont d'une simplicité

remarquable :

I- — Quel est le patron des boulangers? Celui des' cordonniers ?

2. — Savez-vous oi'i sont enterrés : Corneille, Le Nôtre, Duguay-Trouin ?

3. — Quelles sont les plus grandes chutes du monde?

4. — A cpielle époque fut inventé le parchemin ?

5. ■— La baleine est-elle le plus grand dés poissons ?

{Voir les réponses page 14.)

AMUSONS-NOUS

Une petite charade, maintenant :

Mou Minet, que l'appétit gagne,

vSe régale avec mou premier.

Mou deuxième dans la Bretagne,

Se travaille près du foyer.

Mon tout, utile et nourricier.

Etend ses bras dans la campagne.

Et une petite devinette :

Qu'est-ce qui s'annonce

avec fracas, fait faire la gri-

mace ou verser des larmes,

tout en procurant un ccitain

plaisir et se répète quelquefois

par esprit d'imit.ition ?

(Voir les réponses page 14.)

LE COSTUMEA TRAVERS LES AGES

1850. — Les femmes de cettetpociuc ofTcctent la curieuseforme d'une bouteille largedu bas et très mince à par-tir de la taille. Regardez cesgtavures. I,e corsage est trèsajusté et la jupe, montée surdes crinolines, est souventreudiie plus volumineuse en-core par un triple rang devolants. I<e chapeau,, parcontre, a retrouvé des propor-tions presque normales. J.acoiffure la plus répandue es( / ^la s capote », chapeau rajipc- y '4^.lant celui que portent de no.s //^/j;jours les salutistes. //f r

— 11

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LNTRE.Z DANS.VOYEZ

conntON

DANe>L

LA DANÔL..

Vous n'allez pas encore au bal commeCendrillon, mai» vous faites de bellesrondes et de longues farandoles avec voscompagnes, .le vais donc vous parler dela danse, presque aussi vieille que lemonde et qui est « un art » comme lamusique, la peinture, la sculpture.

Et d'abord no croyez pas que les gensont toujours dansé pour s'amuser, maisnon : les premières danses furent desdanses sérieuses, des danses saciécs Dan-seurs ou danseuses allaient et venaientavec de beau.x gestes nobles et lents, delongs vêtements et un air solçnnel.

Chez les juifs, par exemple, la danseétait considérée comme une prière et l'ondit fiuc, pour e.xprimer sa joie, le grandroi David dansa devant l'Arche d'Al-liance.

Les Egyptiens, les Romains et les Grecsdansaient également à certaines fêtesreligieuses. Do même, en Amérique, chezles Aztèques, les prêtresses de la luneet du soleil dansaient sur les marches destemples pour obtenir les bonnes grâcesdo ces divinités redoutables !

Aujourd'hui encore, dans la fameuseîle de Bali (les danseuses de cette îlevinrent à l'exposition de 1931), les dan-ses font toujours partie d'une cérémoniereligieuse, et gardent une sorte de gra-vite, même lorsqu'elles deviennent trèsrapides.

. Aux Indes, en Perse, à Java, c'est en-core la même chose : les danseuses, soi-gneusement choisies et dirigées, dansentselon des rites religieux. J'ai vu ainsila très belle danse d'une Persane quidansait « poui' ensorceler les étoiles afinqu'il ne pleuve pas ».

Et, dans l'Indochine française, c'estune vraie gloire d'être « danseuse ». ALuang-Prabang, les danseuses sont tou-tes des princesses attachées au palaisroyal et qui ont une sorte de culte pourla danse.

Continuant la tradition juive, les chré-tiens ont eu leurs « danses liturgiques ».On en vit dans les églises, au moyen âge,mais cela ressemblait plutôt à des proces-sions, à des prières mimées par gestes...

On raconte même qu'un concile (as-semblée d'évêques) fut ouvert par desdanses liturgiques, extrêmement giavcset solennelles, naturellement !

Et, au début de ce siècl(ij on voyaitencore, en Espagne, les célèbres a pe-tits danseurs de la cathédrale de SéviUe»,aussi célèbres que nos «' Petits chanteursà la Croix de bois ». J'ai encore unephotographie de ces jeunes Espagnols,prise en 1913. Imaginez une douzaine deg.arçons, de l'âge de vos frères (les plusvieux ne dépassant pas quatorze ans),

somptueusement vêtus d'habits de satinblanc à raies rouges et coiffés de largeschapeaux à plumes.

Ces danseurs, pendant les cérémoniessolennelles de la cathédrale d(i^ SéviUe,exécutaient des danses lentes et gravest.indis que l'orgue jouait, et ces dansesétaient un hommage offert à Dieu.

Pourtant ces danses furent suppriméeset je ne crois pas qu'on les ait rétablies...On avait peur, sans doute, de voir ces

VuTis l'Indochine française...

danses respectueuses et belles confonduesavec les clauses échevelées qui nous ve-naient d'Amérique.

Les danses sacrées durent toujours. Onvoit encore, en Corse, des danses funè-bres exécutées aux enten-ements par les» pleureuses ». Et, enfin, il faut que jevous parle de deux jeunes Françaises,Josette et Renée FoatelH, qui défendentavec succès ces belles danses graves etreligieuses que le n jazz-band » a faillichasser.

J'ai vu danser ces deux sœurs cetteannée même. Vêtue de longs voilesblancs. Renée Foatelli a dansé des dansesuniquement religieuses sur des hymnesque l'on n'entend que dans les églises.Et je vous assure que c'était très beau ettrès émouvant. Elle dansait plus encoreavec ses bras qu'avec ses pieds, sur unrythme niiijestueux et lent.

Les jeunes Foatelli se font une gloiiede n'interpréter que des danses sacréeset, pour chaque danse, de somptueuxcostumes et des jeux de lumière appro-priés ajoutent encore à la beauté du spec-tacle.

Je vois que nous sommes loin des ron-des folles dont nous parlions tout àl'heure... mais c'est qu'il y a bien dessortes de danses.

A travers les siècles, on peut suivretoutes les danses populaires, danses cam-

— 12 —

jagnardes des dimanches après-midi,'été, sur la place du viUage, dans l'om-

bre des branches.J'ai vu danser des Suédois sages et

paisibles, et des Tchèques aux magni-fiques costumes qui frappaient du talon :les femmes tchèques dansent, elles-mê-mes, avec des bottes. J'ai vu la « cser-das » endiablée des Hongrois, véritabledanse guerrière, et les merveilleux bal-lets russes. . .

Mais nous avons aussi en France debelles danses populaires : la farandoleprovençale, la bourrée auvergnate, lesdanses bretonnes si pittoresques, lesdanses basques qui sentent déjà l'Es-pagne...

Car l'Espagne est le pays de la danse !Je crois que les petites Espagnoles saventdanser avant de savoir marcher... Losdanses espagnoles, très vivantes et ac-compagnées — par la danseuse elle-même— du bruit des castagnettes, ont fait letour du monde. Leurs noms chantentdéjà comme une musique : fandango, bo-léro, tango, habaiiera, séguedille, rumba.

Une danseuse espagnole, 1' « Argen-tina », fut vraiment une très grande ar-tiste qui considérait la danse comme unechose sérieuse, comme une sorte de voca-tion.

A l'Opéra de Paris, on défend encorela danse classique; et cette danse, avec« pointes » et « eutre-chats », es* undur métier qu'il faut commencer trèsjeune!... Oui, je plains ces pauvres peti-tes filles qui, dès dix ans, mènent unedure vie pour apprendre un métier quileur causera souvent bien des déboires,car il est difficile de devenir « danseuseétoile » ! A l'Opéra aussi, un Russe,Serge Lifar, s'est rendu célèbre avec desdanses extrêmement originales et trèsartistiques.

Je n'ai plus beaucoup de place pourvous parler des danses « mondaines » quichangent avec la mode et que dansaientavant la guerre vos grandes sœurs... On adansé ainsi, depuis deux cents ans, la ga-votte, le menuet, la pavane, la valse, lapolka, le boston, la mazurka, le tango, larumba, le fox-trott et cette danse nègre,le « charleston », qui n'avait plus riend'élégant ! Aujourd'hui, les danses sontplus calmes avec les blushes et, enfin, «lelambeth walk», qui fait penser au p.aisi-ble quadrillg des lanciers de vos arrière-grand -mères !

Je sais bien que l'on en revient auxcrinolines, -qui ne permettent pas de dan-

L'Espag-ne est le pays de la danse...

ses violentes ! Quant à la valse, elle serabientôt centenaire, et c'est la seule dansedont on ne se soit jamais lassé dans lesbals et les salons. Elle venait de Vienne,une ville où, jadis, l'on s'amusait beau-coup avant qu elle soit sous la botto alle-mande...

CLAUDE RBNATJDT.

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Qcr EBcmajnDCEDDo^QDŒ CP(n)l3R.a:Œ[LX^BRlŒ-

Jackie était une enfant courageuse etpleine de décision. Elle ne poussa pas uncri, et ne trahit pas sa présence. Cemaudit Chinois avait dû profiter de souaiwence de l'après-midi pour se glisserdans le magasin, afin d'épier les faits etgestes du marchand. Le jeune garçonsortit de sa cachette et s'avança versle dieu de porcelaine.

« Que faire ? »Jackie était trop petite pour lutter

avec lui et l'empêcher de s'emparer despapiers. Mais au moment oii le jeuneespion, debout devant le bouddha, s'ap-jrêtait à refaire le geste de Li-Chang-Li,e lourd paravent de bois, derrière lequel

s'abritait Jackie, s'abattit sur lui.Prompte comme l'éclair, la fillette lança

sur le paravent un tabouret et une pilede coussins et, pendant que Wu-Fang, foude terreur, se débattait sous cet amas,elle fit marcher le mécanisme de la sta-tue, s'empara des papiers et se glissadans sa chambre avant que sa victime eûtréussi à sortir de sa fâcheuse position.-

Le cœur battant, elle poussa le verrou,et attendit une offensive de Wu-Fang.Mais le jeune homme n'avait pas l'âmed'un héros. Surpris par cette attaque,dont il ne pouvait deviner l'auteur, etcraignant le retour du marchand, il s'en-fuit à toutes jambes.

Peu aprèSj Jackie entendit le pas lasséet la tou.x sèche de son père adoptif, quirefermait la porte en s'étonnant de latrouver ouverte. Alors, de ses doigts en-core tremblants, l'enfant tira le verrouet descendit l'escalier.

Pas une fois, Li-Chang-Li n'interrom-pit le récit ciue lui fit la petite fille. Maisson visage devint couleur de cendre, etdes gouttes de sueur froide perlèrent àson front.

— Tu es une brave petite, ma Jackie,dit-il en posant ses mains sur les épaulesmenues. Ce soir, vois-tu, c'est ma vieque tu as sauvée. Tu n'es qu'une enfant,mais tu viens de te conduire avec uneprésence d'esprit que bien des grandespersonnes n'auraient pas eue. Je vais teconfier un secret... le secret de ma vie...Je suis Anglais, tu le sais ; mais, si j'aiadopté les apparences et les habitudesd'un Chinois de race pure, ce n'est quepour mieux servir mon pays d'origine...Oui, Jackie, je suis un de ces innom-brables agents obscurs, inconnus, dis-persés à travers le monde, qui constituentle service de renseignements appelé l'In-telligence Service, lequel travaille sansarrêt, dans le secret, pour la sécurité etla gloire de l'Angleterre et de son Em-pire...

(Suite ilr la parje 4.)

Li-Chang-Li s'était redressé; toute tracede crainte avait disparu de son visage,et ses yeux brillaient de fierté...

La petite fille le regardait. Elle ne corn-prenait pas très bien ce qu'il lui expli-quait, mais elle sentait que son pereadoptif, en risquant sa vie, obéissait a unaustère devoir.

— Tu ne saurais comprendre, reprit-il,pourquoi, dans ce beau et malheureuxpays qu'est la Chine, les puissancesd'Europe et d'Asie, par l'entremise deleurs agents, se livrent une guerre sourdeet implacable... Tu es trop jeune pourte douter de ces luttes, mais apprendsque depuis des années les renseignements,que j'envoie à mes chefs, gênent et entra-vent l'action des Japonais... Depuislongtemps aussi, ceux-ci me soupçonnentd'être autre chose que l'antiquaire Li-Chang-Li... Or, même parmi les Chinois,les Japonais ont des espions, et je voismaintenant que Wu-Fang est l'un d'eux...Que faire ? Ces papiers doivent être portéschez un des agents que j'emploie, à l'au-tre extrémité de la ville. Et, désormais,je suis surveillé, espionné. Si l'on me

Alors, une petite main...

voit sortir, ce sera un jeu pour mesennemis de me bousculer, de déclancherune bagarre et de me voler ces papiers...Si Wu-Fang s'en était emparé ce soir,non seulement moi-même, mais tous ceuxqui me servent auraient été perdus...

Absorbé dans ses tristes pensées, lepauvre homme se couvrit le visage de sesmains, et il poussa un profond soupir.

Alors, une petite main se posa sur sonépaule, et une voix enfantine, mais réso-lue, murmura à son oreille:

— 14 —

— Père, c'est moi qui porterai vos pa-piers...

— Toi ? pauvre petite !— Qui donc se méfiera d'une enfant?

Je connais assez la ville, je ne me per-drai pas, je vous le jure.

Elle parlait d'un ton si ferme, elle setenait si droite et si résolue, que le mar-chand eut un sourire ému et, attirantJackie près de lui, il l'embrassa avectendresse.

Oui, qui se méfierait de la forme menue,enveloppée d'un grand châle, dont leslongues franges lui battent les mollets ?Qui donc penserait que dans les plis de cechâle, les petites mains crispées tiennent,bien serrés, les papiers dont dépend lesort de son père.

■lackie était partie de bonne heuremais, malgré cela, dans les rues régnaitune vive animation. A la suite des arméesqui reculaient, était venu le lamentabledéfilé des habitants fuyant l'invasion,et l'enfant eut fort affaire pour se frayerun passage au milieu des chariots et des

-groupes de femmes et d'enfants, campésa même la rue, assis au milieu de leursballots.

Jackie, un instant, reconnut la sil-houette dégingandée et redoutée de Wu-Fang. Vite elle se dissimula derrière unecharrette où s'élevait une pyr ,T,mide dehardes et d'ustensiles variés, puis, le dan-ger passé, elle reprit sa route. Elle quittala cité chinoise et pénétra dans le quar-tier européen. Là, il n'y avait pas dedésordre et d'animation, mais des déta-chements de soldats européens qui nefirent pas attention à elle. A la ported'une grande banque, deux soldats mon-taient la garde et, comme elle passaittrop près, l'un d'eux l'éloigna de lacrosse de son fusil ; puis, à nouveau, ellerentra dans le quartier chinois, au nordde la ville. Elle était lasse, la pauvrepetite, et elle avait peur de ne pas trou-ver le marchand d'étoffe dont lui avaitparlé son père.

Enfin, dans une rue étroite et tor-tueuse, elle aperçut l'enseigne de To-Tu-

LISETTE

Tchang. To-Tu-Tchang lui-même, deboutsur le pas de sa porte, regardait les pas-sants. Derrière ses lunettes, ses yeux fu-reteurs ne perdaient pas un détail de cequi se passait.

— Qui cherches-tu, petite? demanda-t-il à Jackie qui s'avançait vers lui.

— Vous, répondit-elle à voix basse. Jesuis la fihe de Li-Chang-Li.

Bien que le Chinois fût surpris, pas un

riere ses lunettes^ de ses yeux a demifermés, il regardait Jackie.

— Tu es une enfant à qui l'on peut sefier, je vois, dit-O. Eh bien, voici ce quetu diras à ton père. Jadis il m'a renduservice, et je ne l'oublie pas. Tu lui dirasdonc : Demain, à la porte du Dragon,

— Vous, ripondlt-elle à niix liasse.

muscle de son visage ne tressaillit. Il fitentrer la fillette dans sa boutique, puisdans une autre pièce peu claire et où flot-taient toutes sortes d'odeurs.

— Mon père m'a chargée de vous re-mettre ceci, dit-elle en glissant le pa-quet de papiers à To-Tu-Tchang. Il estsurveillé, démasqué par un espion à lasolde du Japon, et il faut avertir vosamis de ne plus venir chez lui, car euxaussi deviendraient suspects...

Le Chinois prit le paquet dans sesmains, le souleva, puis il resta plongédans une profonde méditation. Mais der-

une caravane de marchands thibétainspart pour Lhassa... H leur manque unguide... Celui qui se présentera de lapart de To-Tu-Tchaug sera le bienvenu...Et nul ne lui demandera son vériUiblenom. ilais, que ce soir inêuie, il chercheasile parmi eux, et profile, pour dispa-raître, de l'ombre de la nuit.

.Jackie répéta, mot jiour mot, les pa-roles du marchand, et celui-ci, après miavoir fait boire du thé pour la récon-forter, et manger des galettes de riz, luiordonna de partir au plus vite.

Le soir du même jour, à la porte de laMission, un homme et uiu' petite fille de-_.mandèrent à voir sœur .Marie des Anges.'L'homme portait le costume thibétain, lablouse de peau serrée à la taille, et lebonnet doublé de fourrure. Et la reli-gieuse eut peine à reconnaître le pèreadoptif de Jackie.

— Ma sœur, dit Li-Chang-Li, un amim'a fait connaître , que ma vie était en

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danger, et qu'il me fallait quitter laville. Je pars donc pour le 'Thibct. Jereviendrai un jour, je l'espère, maisquand ? En attendant, je vous confie

Jackie. C'est à elle que je dois la vie, etje veux que son avenir soit assuré. Dema fortune actuelle, j'ai fait deux parts;l'une pour moi, et l'autr*, la plus impor-tante, pour elle.

n défit la couverture qui enveloppait levolumineux cohs qu'il avait ajiporté aveclui. Et, aux yeux de la religieuse et deJackie, apparut le bouddha de porce-laine.

— C'est une pièce de très grandevaleur, dit-il. Mais, en plus, dans la ca-chette du socle, dont l'enfant connaît lemécanisme, se trouve la fortune de.Tackie... Et maintenant, adieu... Soignezbien ma petite fiUe, et priez pour moi...

Il serra sur son cœur l'enfant qui pleu-rait, et il s'enfuit très vite, sans se re-tourner, vers son nouveau destin.

Les deux femmes le regardèrent s'éloi-gner et disparaître dans la nuit. Mais lesbras maternels de sœur Marie des Angesentouraient les épaules de Jackie; etdéjà, malgré^ son chagrin, la petite fillecommençait à sourire...

MABC AULÊS.

RÉPONSES AUX QUESTIONSde la page 11

♦Je suis sûre que vous avez tout trouvé,

mais pour celles d'entre vous qui ne

sont pas très calées, voici les ré-

ponses :

1. — 'Le patron des boulangers est

saint Honoré ; celui des cordonniers

saint Crépin.

2. — Ils sont enterrés à Paris, en l'église

Saint-Roch.

,3- — Ce ne sont pas les chutes duNiagara, mais bien celles du iiam-

bèze (en Afrique centrale). La hau-

teur de ces diutes atteint 104 mètres,

et sur les côtés 75 à 78 mètres.

4. — A Pergame, 200 ans environ avant

Jésus-Christ et après la défense duroi d'Egypte d 'exporter le papyrus.

,ç. — Non, parce que la baleine est unmammifère et non un poisson...

Cliaradc : Mou-lin (moulin).

Devinette : l'étemuement.

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Page 9: © Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l'Image

LISETTE

RÉSUMÉ: ^^^y^ ^ ^j^j^^ ç^Qypii^ /pfA'/lflOSONT FH GUERRE.

POUR SEVENÔEH DES MÉCHANCETÉSQUE Luimir SANS CESSE GOUPIL, KLIK, QUICONNAÎT LA GOURMANDISE DE SON ENNEMI,PRÉPARE UN SUPEPBE FAI SAN,... QU'iL POli/REM POINT DE ̂ E RENDRE IMMANGEABLE:APRÈS QUOI, IL SE CACHE DANS UNE HUCHEÀ PAiN, POUR NE R'EN PEBDRE DU SPECTACLE.

ATTIRÉ PAR LA BONNE OOEUR GOUPIL VIENTPOUR SE DÉLECTER.

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