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Véritable artiste de la peur et de langoisse. Une CONFéRENCE LUNDI 19 MARS 19H une leçon de cinéma JEUDI 15 MARS 19H Kiyoshi kurosawa RÉTROSPECTIVE 14 mars 19 avril Horaires + programme sur cinematheque.fr La Cinémathèque française Musée du cinéma 51, rue de Bercy Paris 12 e Grands mécènes de La Cinémathèque française Kaïro © Zootrope Jérémie Souteyrat pour Zoom Japon www.zoomjapon.info gratuit numéro 19 - avril 2012 Architecture Le retour aux sources POLITIQUE Un populiste à Ôsaka p. 4 LITTÉRATURE Le roman japonais p. 14 VOYAGE One Piece à Tôkyô p. 20

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Zoom Japon, numéro 19 (avril 2012)

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Page 1: ZOOM Japon 19

Véritable artiste de la peur et de l�angoisse.

Une CONFéRENCELUNDI 19 MARS 19H

une leçon de cinémaJEUDI 15 MARS 19H

Kiyoshi kurosawaRÉTROSPECTIVE

14 mars � 19 avril

Horaires + programme sur cinematheque.fr

La Cinémathèque française Musée du cinéma

51, rue de Bercy � Paris 12eGrands mécènes de La Cinémathèque française

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ArchitectureLe retour aux sources

POLITIQUEUn populisteà Ôsaka p. 4

LITTÉRATURELe roman japonais p. 14

VOYAGEOne Piece à Tôkyô p. 20

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ÉDITO Construire

Dans notre numéro defévrier, nous vous annon-cions que Zoom Japon s’as-sociait à l’appel de fondslancé par l’architecte ITÔ

Toyô pour la constructiond’une Maison pour tous à Rikuzentakata. Surles 40 000 euros nécessaires, nous avons déjàrecueilli près de 10 000 euros. C’est bien, maisc’est encore insuffisant. En lisant le dossier dela livraison d’avril, vous découvrirez l’impor-tance de ce type de construction dans les régionssinistrées et l’engagement de plusieurs archi-tectes en faveur d’une architecture plus prochedes besoins fondamentaux des populations.Nous vous invitons également à découvrir l’ex-position One Piece qui vient d’ouvrir à Tôkyôsans oublier vos rubriques habituelles. N’hési-tez pas à nous écrire et à vous abonner.

LA RÉ[email protected]

ZOOM ACTU

ECONOMIE Privatisation dela PosteUn accord pour une privatisation de la poste

est en bonne voie. Ce service public qui est

accessoirement la plus grande banque du

monde qui, depuis une loi de 2005, pourrait

être privatisée ne l’a jamais été faute

d’accord politique. Aujourd’hui cela semble

possible, car les sommes récoltées lors de

cette opération serviront à payer en grande

partie la reconstruction dans le nord-est.

SOCIÉTÉ On ne plaisante pasavec l’hymne national A Ôsaka, un enseignant de 61 ans a été démis

de ses fonctions. Il avait refusé de se lever au

moment où était joué l’hymne national lors

d’une cérémonie de remise des diplômes. Ce

n’est pas la première fois que des enseignants

sont sanctionnés pour ne pas avoir respecté

Kimigayo. Depuis plusieurs années, certains

d’entre eux le critiquent, car synonyme pour

eux du passé militariste du pays.

des Japonais

sont favorables

à une sortie du nucléaire selon un sondage

du Tôkyô Shimbun paru le 11 mars

dernier. Néanmoins, ils sont 69 % à

accepter un redémarrage de certains

réacteurs pour éviter les coupures

d’électricité prévues avec l’arrivée de l’été.

79,6 %

U N JOUR AU JAPON par Eric Rechsteiner

Sur la route qui mène à Fukushima, un panneau à l’effigie du Premier ministre Noda et sa formation politique, leParti démocrate, annonce : “Sans renaissance de la préfecture de Fukushima, pas de renaissance du Japon”. Un mes-sage qui laisse de marbre la population de Minami-Sôma. La ville a souffert du séisme et du tsunami, mais sur-tout sa partie sud appartient à la zone d’exclusion des 20 km autour de la centrale de Fukushima Dai-ichi.

Le 1er mars 2012, à Minami-Sôma

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Couverture : Take no kai, à Kesennuma. Photo de Jérémie Souteyrat

2 ZOOM JAPON numéro 19 avril 2012

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ZOOM ACTU

Très bon cru que cette année 2012 consacréeaux lettres japonaises. Une bonne occasionpour Zoom Japon de mieux se faire connaître.

C omme il se doit après un évènement majeur, ilfaut tirer quelques conclusions du Salon dulivre 2012 qui avait comme invité d’honneur

le Japon. “Un Salon du livre réussi en pleine période élec-torale ? Les professionnels n’ycroyaient pas”, rappelle le magazineLivres hebdo en préambule du petitdossier qu’il lui a consacré danssa livraison du 23 mars. Pourtant,c’est une réussite puisque la fré-quentation a augmenté de 5 % parrapport à l’année précédente.Quelque 190 000 personnes sontainsi venues jusqu’à la Porte de Ver-sailles pour voir des livres, écouterdes écrivains ou faire des décou-vertes parfois étranges. Il faut direque certains visiteurs ont dû êtresurpris de découvrir des jeunes encosplay dans les allées de ce salon engénéral arpentées par des gens bien propres sur eux. Acertains moments, on se serait cru à la Japan Expo. Tou-jours est-il que les 5 % de fréquentation en plus sontsûrement liés à la présence massive de nombreux édi-teurs de manga. “C’était un salon vivant, ce qui n’estpas toujours le cas”, peut-on encore lire dans les colonnesde Livres hebdo. Manga, littérature japonaise et auteursnippons ont donc contribué largement au succès decette manifestation annuelle à laquelle Zoom Japon étaitaussi associé pour la première fois. Votre mensuel pré-féré, espérons-le, avait entièrement consacré son numéro

de mars aux livres dans le but d’attirer l’attention desvisiteurs du salon. Au total, ce sont plus de 70 000 exem-plaires de Zoom Japon qui ont été distribués à cette occa-sion, notamment au niveau de l’espace Japon toujoursbien achalandé. D’ailleurs, les ventes de livres dans les300 m2 de la librairie “japonaise” installée dans cet espaceont progressé de 25 % en volume par rapport à 2011.Parmi ces bonnes ventes figuraient peut-être les deux

ouvrages récompensés par le Prix Zoom Japon 2012 :La Plaine du Kantô de KAMIKURA Kazuo traduit parSamson Sylvain (éd. Kana) et La Prière d’Audubon deISAKA Kôtarô traduit par Corinne Atlan (éd. PhilippePicquier). La remise du Prix, une première pour ZoomJapon, nous a permis de réunir les traducteurs, éditeursainsi que KAMIKURA Migiwa, fille de feu KAMIKURA

Kazuo, venue spécialement de Tôkyô pour le recevoir.De quoi nous inciter à poursuivre notre travail et à pren-dre d’autres initiatives.

GABRIEL BERNARD

BILAN Le Salon du livre àl’heure japonaise

Les lauréats du Prix Zoom Japon 2012 sur la Grande scène du Salon du livre de

Paris, le 17 mars

avril 2012 numéro 19 ZOOM JAPON 3

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D ébut décembre, dans le taxi pris à la sortie dela gare de Shin Ôsaka, le chauffeur sembleparticulièrement loquace. Il a envie de par-

ler politique. Il sait que la route est encombrée jusqu’ànotre destination et qu’il aura le temps de livrer sonanalyse du changement qui vient de se produire à latête de la troisième ville du pays, capitale économiquedu Kansai. HASHIMOTO Tôru a réussi à troquer soncostume de gouverneur pour celui de maire. A 42 ans,celui, qui fut le plus jeune gouverneur de préfecture auJapon après son succès au scrutin de 2008, marque defaçon incontestable de nouveaux points au niveau poli-tique. Diriger la ville d’Ôsaka est évidemment une étapeimportante pour cet homme ambitieux et particu-lièrement habile dans sa manière de s’adresser aux élec-teurs. “Je ne peux pas dire que j’étais un vrai fan de HAS-HIMOTO, mais il a su réveiller en moi des envies dechangement”, confie M. SUGIMOTO, le chauffeur detaxi. “Ça fait trente ans que j’exerce mon métier. Ces der-nières années ont été très dures. Le Parti libéral-démo-crate (PLD) comme le Parti démocrate ont été incapa-bles de sortir le pays de la crise. Il faut du sang neuf et M.HASHIMOTO incarne la nouveauté”, poursuit-il, en jetantun coup d’œil dans le rétroviseur pour observer la réac-tion de son passager. “Ce n’est que le début, je le sens”,ajoute-t-il. Il est vrai que la victoire écrasante de HAS-HIMOTO Tôru, le 27 novembre, s’explique avant toutpar sa capacité à mobiliser l’opinion publique qui s’étaitpeu à peu désintéressée de la chose politique au coursdes deux dernières décennies. Avec un taux de parti-cipation de près de 61 % contre 41 % en 2007, il estindéniable que l’élection municipale de 2011 a béné-ficié de l’effet HASHIMOTO. Celui-ci a été d’autant plusdéterminant que la désignation du maire avait lieu le

même jour que celle du gouverneur, charge que M.HASHIMOTO avait abandonnée fin octobre pour per-mettre à son fidèle MATSUI Ichirô de briguer le man-dat au nom de leur parti Ishin no kai (Association pourla restauration). Fondée en 2010, cette formation anotamment pour objectif d’unifier Ôsaka, c’est-à-direde fusionner la préfecture et la municipalité afin dedonner au futur dirigeant de cette entité un poids poli-tique considérable. Même si les deux hommes ontreconnu au lendemain de leur victoire du 27 novem-bre que leur projet de fusion nécessitait encore d’êtreaffiné et expliqué, ils ont conscience de l’importancesymbolique qu’il représente. “C’est vrai qu’on ne saitpas vraiment ce que cela donnera, reconnaît M. SUGI-MOTO, mais leurs idées ont au moins le mérite de fairebouger les choses”. C’est tellement vrai que certains n’ontpas hésité à utiliser le terme de “séisme” pour évoquerl’élection de HASHIMOTO Tôru à la tête d’Ôsaka. Il aen effet réussi à détrôner les partis traditionnels, enpremier lieu le Parti libéral-démocrate qui apparaît auxyeux de nombreux électeurs comme l’incarnation de

Elu fin novembre à la tête d’Ôsaka, le leaderdu petit parti Ishin no kai commence à fairetrembler les formations traditionnelles.

POLITIQUE Un populiste nommé Hashimotol’immobilisme. De la même façon, le système bureau-cratique hérité des cinquante années au cours desquellesle PLD a dominé le paysage politique japonais figureparmi les cibles préférées du nouveau maire. Ce der-nier sait cependant qu’il aura maille à partir avec lesbureaucrates peu enclins à soutenir son idée de fusionentre la préfecture et la mairie. Mais cela ne lui fait paspeur. Dans les heures qui ont suivi son élection, HAS-HIMOTO Tôru a convoqué les principaux responsablesadministratifs de la ville pour leur expliquer qu’il étaitdésormais le maître à bord. Les images de l’arrivée àcette réunion des bureaucrates l’air contrit ont fait letour des télévisions. Elles tranchaient avec la décon-traction affichée par le nouvel élu. Sûr de lui, de sondestin — il ne cesse de répéter qu’il ne s’agit que d’uncommencement —, HASHIMOTO Tôru commence àfaire peur. Il a décidé de former 2 000 candidats pourde prochaines échéances électorales. Son côté popu-liste inquiète, car il fait mouche auprès d’une opinionpublique qui est allée de déconvenues en déconvenuesces dernières années. Vouloir faire d’Ôsaka un véri-table pôle d’attraction et s’associer avec d’autres grandescités comme Yokohama (la seconde ville du pays entermes d’habitants) pour défier le pouvoir central etses pesanteurs, voilà des idées qui ne laissent pas indif-férents. Sa sortie sur le nucléaire, proposant le 18 marsà Kansai Electric Power Co., société qui gère les cen-trales de la région, de renoncer à cette énergie parti-cipe de cette envie permanente de mettre les pieds dansle plat. A un moment où la majorité des Japonais sontdésormais favorables à une sortie du nucléaire (79,6 %selon un sondage récent du Tôkyô Shimbun) et face àun gouvernement démocrate plutôt tenté de redémar-rer l’exploitation des installations nucléaires arrêtéespour entretien, l’audace de HASHIMOTO lui fait gagnerdes points auprès des électeurs. “Il ira loin”, estime d’ail-leurs le chauffeur de taxi qui ne tarit pas d’éloges à sonégard. ODAIRA NAMIHEI

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Le 26 novembre 2011, à la veille des élections, HASHI-

MOTO Tôru s’adresse une dernière fois aux électeurs.

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ZOOM ACTU

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Comment expliquez-vous le succès deHASHIMOTO Tôru ?MATSUTANI Mitsuru : Je pense qu'il fautanalyser le cas de HASHIMOTO Tôru en fonc-tion de l'environnement social, de la situa-tion politique actuelle et des positionsadoptées par ce personnage. D'ailleurs,plutôt que d'évoquer le succès de HASHI-MOTO Tôru qui me semble encore difficileà établir, je préfère m'intéresser à ce qui luia permis d'élargir son assise électorale.Comme dans la plupart des pays occiden-taux, il y a les changements intervenus auniveau politique et social. En raison desbouleversements sociaux des dernières an-nées, la base sur laquelle les partis poli-tiques traditionnels ont pu jusque-là comp-ter a grandement évolué. L'absence de ré-ponse satisfaisante de la part de ces forma-tions aux changements a favorisé une pertede confiance des électeurs. Par ailleurs, les électeurs plus diplômés etmieux informés que par le passé neconsidèrent plus les partis politiques et leshommes politiques traditionnels commeleurs représentants d'office, mais ils pré-fèrent s'exprimer en fonction de leursidées et de leurs points de vue. C'est dansce contexte de défiance à l'égard des for-mations politiques et de prise deconscience des électeurs que s'inscrit laréussite d'un politicien comme HASHIMOTO

Tôru.Il faut ajouter le changement politique in-tervenu ces dernières années dans l'archi-pel. L'affaiblissement des partis tradi-tionnels est certes un élément que l'on re-trouve dans d'autres pays, mais il a étéparticulièrement remarquable au Japon.A gauche, le Parti socialiste a quasimentdisparu tandis que dans le camp conser-vateur, le Parti libéral-démocrate (PLD) avu sa base électorale pratiquement dispa-raître. Le Parti démocrate, qui s'est imposé

comme le principal rival du PLD, n'a paspour sa part réussi à se doter d'un élec-torat stable. Compte tenu de cette situa-tion peu favorable aux formations clas-siques, on peut dire qu'il est presque na-turel que de nouvelles forces parviennentà s'imposer. Les prises de position de HASHIMOTO Tôrusont aussi de nature à favoriser l'adhésiondu plus grand nombre. Les classesmoyennes dans les grandes villes fontgrand cas de la « compétitition » et sou-tiennent les réformes néolibérales en fa-veur d'une cure d'amaigrissement del'administration et d'un renforcement deson efficacité. Les conservateurs atta-chent de l'importance aux valeurs tradi-tionnelles et apprécient les politiciens quiadoptent un discours symbolique oùl'Etat et la tradition ne sont pas absents.Pour obtenir un soutien aussi large quepossible, il est indispensable de satisfaireles néolibéraux et les nationalistes. Onpeut dire que HASHIMOTO Tôru a réussi àtrouver une position idéale entre lesdeux.Enfin, il faut reconnaître que HASHIMOTO

Tôru dispose d'une réelle capacité de per-suasion et parvient à exprimer de façonconvaincante ses idées notamment en si-tuation de rapports de force. C'est ce quifait d'ailleurs défaut à la plupart des po-liticiens traditionnels.

Quand on évoque le nom de HASHIMOTO

Tôru, on y associe souvent le termepopulisme. Est-il populiste ?M. M. : Tout dépend de ce que l'onentend par populisme. Cela ne corres-pond pas en tout cas au populisme d'ex-trême droite tel qu'on peut l'envisager enEurope. Jusqu'à présent du moins, il n'ajamais fait preuve de xénophobie et si telétait le cas, cela ne lui vaudrait pas de

bénéficier d'un large soutien au sein dela population. Le rejet des étrangers n’estpas en soi un sujet de mobilisation poli-tique dans l’archipel. Si l'on définit le populisme comme unmoyen politique qui permet de toucherdirectement les électeurs en ayant un dis-cours propre qui peut se passer des orga-nisations intermédiaires et qui met enavant la “confrontation” avec un“ennemi” qui défend lui-même ses pro-pres intérêts, HASHIMOTO TÔRU est sansaucun doute un populiste. C’est dans cesens que l’on peut le désigner commepopuliste. Il a en effet la capacité à trans-cender les organisations politiques enplace et à s’en passer. Il n’a pas besoin

d’elles pour exister. C’est sans doute laraison pour laquelle il bénéficie d’un sou-tien assez large dans la population, carcelle-ci se montre de plus en plus défianteà l’égard des formations traditionnellesqui n’ont pas réussi à sortir le pays de l’or-nière.Cette définition du populiste se rap-proche plus de celle que l’on rencontreen Amérique latine.

Les jeunes semblent intéressés par lepersonnage. Incarne-t-il, selon vous,la voix de la jeunesse ?M. M. : Tout d'abord, il y a plusieursfaçons de considérer la « jeunesse ». Dansl'ensemble, il est vrai que les jeunes repré-sentent un soutien important pour lemaire d’Ôsaka. Néanmoins il faut rappe-ler qu’une grande partie de la jeunessene participe pas ou très peu aux élections.Dans ces conditions, on ne peut pas direqu'il s'agisse non plus d'un soutien trèsstable ni qu’il est déterminant pour HAS-HIMOTO Tôru. A la différence de ce qui sepasse en Europe, on ne peut pas affirmerque les jeunes forment le noyau dur deses soutiens, d'autant que HASHIMOTO Tôrune revendique pas non plus le statut de« voix de la jeunesse ».

Quel est son objectif ? Veut-il devenirPremier ministre ?M. M. : HASHIMOTO Tôru ne s'est jamaisexprimé à ce sujet, mais de nombreuxobservateurs estiment en effet qu'ilcherche à atteindre cette fonction. Il severrait sans doute bien à la tête du gou-vernement. Toutefois, il est encore pré-maturé de se prononcer et d’affirmer s'ilpourra ou non parvenir à cet objectif. Laroute est encore longue et semée d’em-bûches.

PROPOS RECUEILLIS PAR O. N.

Matsutani Mitsuru, une analyse prudente du phénomène

I NTERVIEW

Originaire de Fukushima, MATSUTANI

Mitsuru enseigne la sociologie àl’université Chûkyô de Nagoya. Ils’intéresse notamment aux questionsreligieuses d’un point de vuesociologique et manifeste un intérêtparticulier à l’égard du phénomèneHashimoto qui enregistre un soutien deplus en plus grand dans le pays.

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L orsqu’on se rend sur les lieux qui ont été dévas-tés — le mot n’est pas trop fort — par le vio-lent séisme et le non moins terrible tsunami

du 11 mars 2011, on prend toute la mesure de la puis-sance des éléments qui ont non seulement balayé toutce qui se trouvait sur leur passage, mais aussi prati-quement remodelé le paysage. Certaines forêts ontpris la forme de la vague et les arbres sont littérale-ment brûlés par l’eau de mer. Dans la plupart des sitesvisités, les débris et autres gravats ont été ramassés,entassés pour former d’énormes monticules que desengins escaladent pour trier ce qui pourra être brûlé,recyclé ou enterré le cas échéant. Il reste parfois desbâtiments renversés ou éventrés qui finiront eux aussi

par être rayés de la carte. L’heure est à la réflexion.Dans les différentes villes touchées, les responsa-bles locaux s’affairent et tentent d’envisager le futurde leur cité. Ils doivent aussi s’assurerque les sinistrés ont bien été relogés.Fin octobre 2011, sept mois après lacatastrophe, tous les centres d’évacua-tion ont fermé leurs portes, preuve queles efforts consentis pour le relogement ont été cou-ronnés de succès. Partout dans la région, on a vu pous-ser des maisons provisoires au confort sommaire etconçues avant tout pour servir d’abri plutôt que desubstitut à la maison perdue après le passage de ladéferlante. Petits, pas toujours très bien agencés,ces logements provisoires ont rapidement montréleurs limites. C’est la raison pour laquelle certainsarchitectes ont tenté de proposer des solutions quipermettent à ces personnes souvent choquées de pou-

voir bénéficier d’un logement digne de ce nom. Maisils ont souvent dû se heurter à la lourdeur bureaucra-tique. Néanmoins, quelques expériences heureuses

comme celle menée par BAN Shigeruà Onagawa ou SUGAWARA Daisuke àRikuzentakata (voir p. 11) ont permisde montrer qu’il était possible d’offrirdes solutions grâce auxquelles les indi-

vidus pourraient se sentir mieux et ainsi reconstruiredes liens sociaux. C’est le principal constat que plu-sieurs professionnels ont tiré de leurs rencontres avecles populations qui redoutaient pour la plupart d’avoirà se retrouver dans des préfabriqués en étant pri-vées de tout contact avec les autres. Ainsi, des archi-tectes ont imaginé de bâtir des espaces pour permet-tre à la vie communautaire de retrouver droit de citédans des zones où chacun semblait condamné à vivrereplié sur lui-même. Ces édifices ont des formes

La plupart des sinistrés ont été relogés

ARCHITECTURE Le retour aux sourcesDans toute la région du Tôhoku ravagéepar le tsunami, on multiplie les initiativesarchitecturales.

ZOOM DOSSIER

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A Kesennuma, perché sur une petite colline, Take no kai domine cette mer qui, il y a un peu plus d’un an, a semé la mort et la destruction

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variées et leur conception est parfois compliquée oubien très simple. A Kamaishi, port situé à environ200 km au nord de Sendai, l’architecte KAKIUCHI

Kôji a posé sur les fondations d’une maison détruitepar le tsunami ce qui ressemble à un toit avec un bancpour que les gens viennent s’y abriter pour discuter.En empruntant la route 45 qui longe la côte à par-tir de la petite cité portuaire en direction de Sen-dai, on découvre des lieux aux formes insolites commele Take no kai imaginé par TÔKI Hirokazu (voir ci-contre) à Kensennuma. Construit en bambou etrecouvert d’une toile blanche, il a vite été adopté parla population qui a participé à son édification. Dansles zones de relogement, on a pris conscience de lanécessité de remettre la communauté au cœur des prio-rités pour éviter que les populations ne sombrent dansla dépression faute de pouvoir communiquer. A Ona-gawa, à une soixantaine de kilomètres au nord de Sen-dai, BAN Shigeru qui s’est occupé de la constructionde logements conçus à partir de conteneurs (voir pp. 10-11) a dans un premier temps installé au centre de l’en-semble une immense toile pouvant abriter quelquesactivités, mais dans une région où l’hiver est rigoureux,il fallait plus. Mi-décembre, il a donc créé une mini-rue commerçante couverte et fermée toujours à basede conteneurs dans le but d’inciter les habitants à seretrouver pour échanger. C’est le même désir qui aanimé ITÔ Toyô lorsqu’il a conçu la première Mai-son pour tous (Minna no ie) dans le quartier de Miya-gino à Sendai (voir pp. 8-9). Il s’est souvenu du rôlecrucial de l’architecture comme vecteur de communi-cation entre les êtres. L’impact positif de cette premièreexpérience l’a incité avec d’autres architectes à pour-suivre dans d’autres villes sinistrées. Zoom Japon, vousle savez, s’associe à cette opération et vous invite (voirp. 13) à faire un don même symbolique pour aider àla construction de ces maisons qui participent à leur

manière à la reconstruction de cette belle région duTôhoku. Il s’agit avant tout d’aider à la reconstructiondu moral des populations concernées. Grâce à cela,elles pourront sans doute plus facilement se projeterdans l’avenir et réfléchir plus sereinement à la façon derebâtir leurs cités.

ODAIRA NAMIHEI

Comment est né le projet Takeno kai ?TÔKI Hirokazu : La ville où réside unde mes amis a été dévastée par letsunami. Quand je m'y suis rendupour le rencontrer, il m'a dit : “il fautque nous laissions à nos enfants et pe-tits-enfants une ville dont ils serontfiers”. Ça m'a beaucoup touché. Etlorsque j'ai entendu des personnesdire que “le tsunami a détruit tous leslieux où nous pouvions nous réunir”,je me suis demandé ce que nouspourrions faire. Nous n'avions ni ar-gent ni moyen pour nous faire en-tendre, mais nous avions l'énergiedes étudiants. Conscients que celane serait que provisoire, j'ai imaginéde créer un lieu de “repos” que lapopulation locale pourrait s'appro-prier. En revenant à l'université,j'en ai parlé avec les étudiants quiont réagi avec enthousiasme.

Pourquoi avez-vous choisi d'uti-liser le bambou ?T. H. : D'abord, c'est une plante quia une croissance rapide et que l'ontrouve facilement au Japon. Elle estfacile à couper et à manipuler. Encas de catastrophe, lorsque lesmatériaux viennent à manquer, ons'est aperçu que les gens ne pou-vaient pas construire seuls des bâti-ments provisoires. L'autre raison quinous a amenés à recourir au bam-bou est liée à l'environnement. Lebambou est un matériau familierdes Japonais depuis très longtemps.Autrefois, il était très présent dansleur quotidien, mais avec l'indus-trialisation, il a peu à peu disparu.Cette rupture avec l'écosystème afini par donner lieu à des problèmesenvironnementaux. Il nous a sem-blé important de remettre en avantle bambou au cœur de la vie quo-tidienne, permettant ainsi d'instau-rer des relations harmonieuses entrela nature et la société humaine.

Votre construction a été baptisée“arche de la reconstruction”.C'est une dénomination lourde desens. Est-ce votre idée ?T. H. : En fait, c'est une expressionqui est sortie spontanément de labouche de ceux à qui nous avonsmontré les plans. Le site où nousavons bâti Take no kai est situé surune petite colline qui surplombe lamer de l'autre côté de la ville quia été dévastée par le tsunami.Quand j'ai expliqué le projet et sou-ligné qu'il serait construit en bam-

bou, une personne dans l'assistancea dit : “On dirait un radeau. S'il y aun autre tsunami, il flottera commel'arche de Noé”. “Oui, c'est ça. Unearche ! Une arche !” ont dit d'autrespersonnes. Au moment où il fautsurmonter une catastrophe et bâtirun nouveau monde tourné versl'avenir je voulais que cette “arche”permette de se projeter et d'accom-pagner des rêves. Et tout le mondea été d'accord avec moi.

De nombreux bâtiments permet-tant aux personnes de se réuniront été construits dans la région.Comment expliquez-vous cettetendance ?T. H. : J'ai moi-même connu leséisme de Kôbe en 1995 et je saisque l'une des choses les plus impor-tantes pour les victimes, c'est depouvoir savoir ce que les autres sontdevenus. Voilà pourquoi, je pensequ'il était important de pouvoiravoir un lieu où les gens puissent serassembler et échanger.

Take no kai est le résultat d'untravail d'équipe. Pouvez-vousnous raconter comment celas'est-il passé ?T. H. : Je pense que c'est la premièrefois que l'on construit un édifice, enrassemblant l'énergie d'étudiantsvenus de tout le pays et celle de lapopulation locale. Cela ne veut pasdire pour autant que tous les habi-tants de la région ont accepté notreproposition. “Que peut-on faire avecdu bambou ?”, “On ne peut rien faired'un édifice sans équipement. Atten-dons que les autorités mettent enplace un projet”. Voilà le genre dechoses que l'on a pu entendre et

qui ne permettaient pas d'avancer.Et puis, un homme qui avait perduses parents et sa maison lors du tsu-nami nous a proposé son terrain ennous disant : « Ne pouvons-nous pascommencer à faire quelque chose. Ilne se passera rien si nous n'entrepre-nons rien ». C'est à partir de là quenous avons pu entamer un travailcollectif qui s'est traduit par un sou-tien des populations à toutes lesétapes de la construction, de lacoupe des bambous à la fourniturede certains produits. Pendant lestravaux, il y avait un homme qui seprésentait chaque jour. Il a observéles différentes étapes et après lapause de la toile, il a déclaré  :“Dorénavant, nous prendrons le plusgrand soin de ce bâtiment”. J'ai eules larmes aux yeux lorsque j'aiappris qu'il faisait partie de ceux quis'étaient le plus opposés au projetau départ.

En tant qu'architecte, commentavez-vous perçu le déroulementde ce projet et comment envisa-gez-vous désormais votremétier ?T. H. : L'architecture a un rôle socialet fonctionnel. Mais on peut sedemander si avant le 11 mars, onn'a pas eu tendance à oublier cetteévidence. C'est en tout cas ce quej'ai ressenti au lendemain du11 mars. Il se peut que ce soit lié aufait que j'ai vu disparaître en un ins-tant des quartiers construits grâce ànotre puissance technique ou quej'ai assisté à la façon dont Take nokai a été construit. Comme l'a trèsbien résumé un des étudiants pré-sents sur le chantier : “Les petits ruis-seaux font les grandes rivières. C'estce que ce projet m'a fait comprendre.Grâce à cet état d'esprit de coopéra-tion, nous avons pu mener à bien Takeno kai. En voyant les enfants s 'amu-ser le jour de l'inauguration, j'ai prisconscience de l'importance de ce quenous avions accompli ensemble”. C'esten ayant à l'esprit cet enthousiasmedes jeunes que j'entends poursuivremon travail d'architecte. YAMAMOTO

Osamu, historien de l'architecturemoderne, définit celle-ci comme “unidéal humain qui nous incite à mieuxvivre qu'aujourd'hui”. Nous devonsbâtir des lieux qui sont des sourcesd'énergie pour vivre. La puissancede l'architecture est formidable. C'estce que j'ai ressenti en réalisant ceprojet.

PROPOS RECUEILLIS PAR O. N.

Tôki Hirokazu, le partage avant tout

I NTERVIEW

TÔKI Hirokazu, spécialiste desquestions environnementales,enseigne à l’université préfecto-rale de Shiga. Depuis des années,il travaille pour une meilleureintégration de l’architecture dansl’environnement.

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A Kamaishi, un banc et un simple toit

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Comment avez-vous vécu le 11 mars 2011 ? ITÔ Toyô : J'étais en réunion au 3ème étage de monagence à Tôkyô. Les secousses étaient très fortes et noussommes tous descendus dans la rue par l'escalier. Der-rière nous, on a vu un immeuble d'habitation haut d’unecentaine de mètres qui se balançait tout doucement degauche à droite. C'était très effrayant. Le lendemain, le12 mars, on devait fêter les dix ans de l'ouverture de laMédiathèque de Sendai, et je devais y faire une confé-rence. Mais ce qui m’importait alors le plus, c’était desavoir ce qui se passait là-bas.

Est-ce que votre vision ou pratique de l'architecturea changé depuis cette date ?I. T. : Toute ma vie, j'ai réfléchi à l'architecture en meconcentrant sur Tôkyô et en me demandant ce que de-vait être l'architecture urbaine. Mais la ville a beaucoupchangé. L'architecture de la capitale est devenue en-nuyeuse. Presque tous les bâtiments sont construits demanière semblable. C'est seulement en surface quel'on rajoute quelque chose, pour créer un changement.Les architectes travaillent principalement sur ce petitquelque chose en surface. Ils ne sont plus connectés à lavraie nature de l'architecture. Ces dernières années, j’aicommencé à réfléchir à la manière de redonner à l'archi-tecture un sens plus social. C'est à ce moment-là que letremblement de terre s’est produit dans le nord-est de l’ar-chipel, dans cette région qu’on appelle le Tôhoku.Cette dernière a été oubliée par le développement éco-nomique du Japon. Je m’y suis donc rendu pour essayerde saisir l’état d’esprit qui y régnait. C'est une démarchepersonnelle destinée à nourrir ma réflexion.Dans l'architecture actuelle, tout le monde parle d'éco-logie, d'énergie renouvelable, de développement dura-ble, mais dans les faits, la limite entre l'environnementnaturel et l'environnement habité par les hommes estbeaucoup plus marquée aujourd’hui que par le passé. C'estdans ce contexte que l'on travaille à améliorer l'efficacitéénergétique, en faisant appel par exemple aux énergiesrenouvelables. Je pense que l'on a fait, à la base, une er-reur fondamentale. Autrefois, les maisons japonaisesétaient en bois. Elles permettaient d’entretenir un rap-port plus harmonieux entre l’environnement intérieur

et extérieur. Il existait toutes sortes de partitions (shōji,fusuma, kôshi...) qui, en se combinant, permettaient dechanger successivement la relation entre extérieur et in-térieur. J'aimerais intégrer de nouveau cette manière depenser afin de me rapprocher au plus près de l'efficacitéénergétique. J'avais le projet de mettre cela en place dansle Tôhoku. Mais en allant dans les zones dévastées, j'airéalisé que la reconstruction des villes était en train decalquer exactement l'architecture contemporaine de Tô-kyô. C'est le même modèle de pensée. J'ai eu un vérita-ble choc en voyant cela.

A Tôkyô, on ne trouve plus beaucoup d'engawacomme dans les maisons traditionnelles, ces zones in-termédiaires entre intérieur et extérieur.I. T. : C’est vrai. Il se passe exactement la même choseavec les logements provisoires. Leurs concepteurs ont re-pris le modèle des appartements de Tôkyô et les ont re-faits en plus petit. Cela favorise un minimum d'intimité,mais s'il y avait un engawa entre les voisins, la vie dansces logements provisoires changerait énormément.C'est pourquoi, je fais des propositions dans ce sens à Ka-maishi. Autrefois, les voisins ne rentraient pas chez lesuns chez les autres par la porte principale. Ils passaientpar le jardin et se saluaient sur l'engawa. Là, ils s'asseyaientet se retrouvaient pour discuter. C'est ce type de lieu avecdes espaces de partage que je voudrais mettre en place.On dit que Tôkyô est une ville sûre, mais elle doit en-

CONCEPT Itô Toyô et la Maison pour tousArchitecte parmi les plus influents de sagénération, il veut aider les sinistrés du11 mars à repenser leurs villes.

core s'ouvrir. Dans la Maison pour tous (Minna no ie)du quartier de Miyagino à Sendai, j'ai créé un engawa.Ainsi, le matin, si une personne âgée vient s'y asseoir, etqu'une autre personne vient à passer, elles se saluent etpeuvent prendre le temps de s'installer pour discuter. Lacommunication se fait alors de manière naturelle. De cepoint de vue, Tôkyô a beaucoup de choses à apprendredu Tôhoku. Il est temps maintenant de repenser et deconstruire un modèle japonais fondé sur les principesd'union avec la nature, de communauté et de partage.

Pouvez vous expliquer plus précisément vos projets au-tour de l’idée visant à créer des liens sociaux ?I. T. : J'ai d’abord eu le désir de faire quelque chose im-médiatement après le désastre, même à petite échelle.Quelques jeunes architectes m'ont fait remarquer qu'ilsauraient aimé que je développe un projet de plus grandeampleur. Mais j'ai voulu, dans un premier temps, créerune petite maison en bois au milieu des logements pro-visoires que tout le monde pourrait utiliser, une Maisonpour tous. L’idée est que les habitants peuvent s'y réu-nir, trouver du réconfort, manger, discuter ou boire. J’aiélaboré ce projet en discutant avec les habitants et en col-laborant avec cinq architectes. C'est moi qui ai conçu etfait les plans de la première Maison pour tous. Les au-tres architectes vont s'occuper des quatre autres maisonsen cours de réalisation à partir de leurs propres plans.L'idée de la Maison pour tous m'est venue après avoir vi-

Profondément marqué par les événements tragiques du 11 mars 2011, ITÔ Toyô s’investit beaucoup dans la recons-

truction de cette région à laquelle il est très attaché.

ITÔ

Toyô

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BIOGRAPHIEITÔ TOYÔ est né en 1941. Diplômé en architecturede l'Université de Tôkyô en 1965, héritier de laréflexion métaboliste de KIKUTAKE Kiyonori sur lesvilles utopiques, il a développé un style qui secaractérise par la légèreté et la transparence. Il a éténommé commissaire du Pavillon du Japon à laBiennale d'architecture de Venise 2012.

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sité les centres de réfugiés. Les gens vivaient ensemble dansles gymnases et disaient qu'ils ne voulaient pas aller dansles logements provisoires en préfabriqué, parce qu'ils s’ysentiraient isolés. Dans les gymnases, ils pouvaient res-ter ensemble, manger et discuter. En les écoutant, je mesuis dit qu'il leur faudrait un endroit où ils pourraientcontinuer à se retrouver et faire la cuisine ensemble. J'aicommencé, à petite échelle, avec une maison en bois dansle quartier de Miyagino, à l’est de Sendai. Le lieu a étéinauguré à l'automne dernier. Il a bénéficié du soutienfinancier de la préfecture de Kumamoto, à Kyûshû. Leshabitants sont très heureux de l'avoir et ils l'utilisent tousles jours.

Est-ce que la notion de bien-être est importantepour vous ?I. T. : Je réfléchis depuis longtemps, et bien avant le pro-jet de Maison pour tous, à la manière de créer des espacesdans lesquels les gens se sentent bien. Donner le senti-ment de liberté est très important à mes yeux. J'ai pu leconstater à la Médiathèque de Sendai. On trouve des per-sonnes âgées qui lisent ou regardent des vidéos à côté d'en-fants qui peuvent se mettre à courir. Il est très impor-tant que les étudiants, les gens âgés et les enfants se re-trouvent tous ensemble pour utiliser ce lieu. J'ai fait dis-paraître les séparations. Grâce à cela, les habitants de Sen-dai adorent la Médiathèque et en prennent soin. A n'im-porte quelle échelle, ce genre de chose peut être recréé.L'important est qu’on s'y sente tout de suite à l'aise. Des lieux comme la Maison pour tous sont particuliè-rement importants, non seulement pour se retrouver etse réconforter, mais aussi pour réfléchir et discuter en-semble de la nouvelle ville à reconstruire. On est en traind'en élaborer une autre à Kamaishi, dans la préfectured'Iwate. Elle ne sera pas implantée au milieu des logementsprovisoires, mais dans la rue commerçante. Elle devraitêtre prête d'ici deux à trois mois. Dans ce type de lieu aucœur de la ville, on pourra alors réfléchir à la manière defaire revivre le quartier qui a été totalement détruit. Onprévoit toutes sortes de manifestations festives et opé-rations avec des enfants. C'est en participant à ce genred'évènements que les gens auront l'occasion de se pen-cher sur la reconstruction de leur ville. Je travaille aussi sur un autre projet plus ambitieux à Ka-maishi. La population était de 40 000 personnes avantle désastre. Je participe au plan de reconstruction de laville. Celui-ci comporte beaucoup de paramètres et il estextrêmement complexe. Je participe seulement en tantque conseiller au sein de la Commission en charge de lareconstruction que la ville a mise sur pied depuis l'an-née dernière. On ne sait pas encore sur quel genre de pro-jets architecturaux cela va déboucher. On commence toutd'abord par la structure générale. Il faut régler en premierlieu le problème du transfert de la ville et des logementsvers de nouveaux espaces. Il faut décider où l’on va im-planter les maisons, les écoles ou encore l'hôpital. Les gensne peuvent pas l’imaginer concrètement et il leur est dif-ficile de donner un avis. Mon rôle est de les conseiller enleur faisant des propositions.

Est-ce que l’Etat ou les villes financent des projetscomme la Maison pour tous ?I. T. : A la base, ce sont des donations (voir p. 13). La villene donne rien. Au Japon, il est de règle de faire exactementla même chose partout pour assurer l’équité entre tous, sur-tout après une catastrophe naturelle. C’est dans cecontexte que les logements construits lors du séisme deKôbe ont servi de modèle de base pour les logements dansle Tôhoku, même si le climat est plus rigoureux. Lorsqu'ons'en est rendu compte, il a fallu rajouter des doubles-vitragespour isoler. C'est le côté négatif de la bureaucratie japo-naise où le principe d'équité est poussé à son extrême. Acause de cela, les villes doivent construire la même chose

partout. Si certains logements provisoires bénéficiaient desaménagements que nous avons imaginés pour nos mai-sons mais pas d'autres, cela poserait problème. Faire unechose très belle dans un seul endroit ne convient pas nonplus. La ville ne peut donc pas investir dans ce genre dechoses. C’est donc pourquoi nous faisons appel auxdons. Nous prévoyons de construire d'autres Maisons pourtous dans les zones de relogements provisoires. Avec lesautres architectes, nous parlons en ce moment d'enconstruire quatre au cours des 3 à 4 mois à venir. Mais aufond, j'aimerais en construire une centaine.

PROPOS RECUEILLIS PAR KEIKO COURDY,RÉALISATRICE DU JAPAN WEBDOC PROJECT

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La première Maison pour tous a été inaugurée à l’automne dernier dans le quartier de Miyagino, à Sendai. Implan-

tée dans un parc où sont installés des logements provisoires, elle est appréciée des habitants dont M. Seto (en bas,

à gauche) qui entretient notamment le poële.

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ZOOM DOSSIER

Le 11 mars a-t-il changé quelque chose dans votretravail d'architecte ?BAN Shigeru : Je travaille sur l'architecture liée à l'ac-cueil de réfugiés depuis 1994. Ce n'est donc pas la pre-mière fois que je suis confronté à ce genre de situationet cela ne change rien. En revanche, il y a beaucoupd'architectes japonais qui s’y sont intéressés pour la pre-mière fois. Cela ne change rien non plus que je sois Ja-ponais. Le Japon est important à mes yeux, car c'estmon pays natal. Mais quand une catastrophe se pro-duit, c'est la même chose partout. Il est juste un peuplus facile de travailler au Japon, parce que j'ai un bu-reau et beaucoup d'étudiants. Les séismes ne sont pasune catastrophe naturelle. C'est un désastre créé parl'homme. Les séismes eux-mêmes ne tuent pas les gens.Ce sont les immeubles qui tuent en s'effondrant. C'estdonc notre responsabilité d'architecte. Dans le cas desréfugiés, les gens ont besoin de nouvelles maisons, maison ne demande pas à des architectes de les construire.Le gouvernement s’adresse à des sociétés spécialiséesdans le préfabriqué. Les architectes ne sont pas impli-qués dans le processus. Voilà pourquoi la situation estsi catastrophique.

Quel genre de propositions avez-vous fait pour le Tô-hoku ?

B. S. : Nous avons réfléchi avec mes étudiants à ce quiétait le plus approprié pour les réfugiés, et qui pouvaitaussi être accepté par les autorités. Nous avonsconstruit un prototype à partir de mes expériences pas-sées au Rwanda, à Kôbe ou à Niigata. Nous leur avonsmontré exactement ce que nous voulions faire. C'estuniquement lorsque nous avons eu la chance de ren-contrer des gens bienveillants parmi les autorités lo-cales que notre projet a pu être lancé. Pour cela, nousavons visité une cinquantaine de centres de réfugiés.

Qu'est-ce qui vous pousse à vous engager ainsi per-sonnellement ?B. S. : Les architectes travaillent en général pour lesclasses privilégiées. Le pouvoir et l'argent sont invisi-bles. Ces gens riches emploient des architectes pourrendre visible leur pouvoir et leur argent grâce à unearchitecture monumentale. J'ai été très déçu par no-tre profession. J'avais pensé qu'en tant qu'architecte, jepourrais aussi travailler pour le grand public, mais j'aidécouvert que nous travaillions seulement pour les nan-tis. Lorsque j'ai vu les structures pour les camps de ré-fugiés au Rwanda en 1994 où les gens avaient extrê-mement froid sous leurs couvertures, j'ai essayé de trou-ver des solutions. Les infrastructures données par lesNations Unies n'étaient pas efficaces pour les proté-ger. Les aides médicales ne servaient à rien s'ils ne bé-néficiaient pas d’un abri approprié. Alors je me suisrendu à Genève au Haut Commissariat des NationsUnies pour les réfugiés. C'est comme les autorités lo-

RELOGEMENT L’engagement de Ban ShigeruDéçu par les pesanteurs administratives,l’architecte japonais se bat pour donner auxsinistrés des logements dignes de ce nom.

cales au Japon. Si on les contacte par lettre, ils ne ré-pondent pas. J'y suis donc allé directement sans ren-dez-vous pour rencontrer des gens et les convaincre.J'ai eu la chance de tomber sur la bonne personne quim'a immédiatement recruté pour développer ce pro-jet au Rwanda.

En plus des systèmes de séparation dans les centresde réfugiés, vous avez aussi travaillé sur des logementsprovisoires ?B. S. : Avant même le séisme, j'avais déjà dessiné le pro-jet de maisons temporaires à trois niveaux conçues avecdes conteneurs. Je savais que les logements provisoiresdu gouvernement seraient inadaptés et je m'étais pré-paré en recherchant l'opportunité de mettre en placece projet. Ma solution en étage était appropriée à la si-tuation qui prévaut dans le Tôhoku. Le désastres'étend sur plus de 500 km de côtes et les villes n'ontpas assez d'espace libre. Il y a très peu de zones platespour construire les logements provisoires. Les gens neveulent pas non plus vivre trop loin des côtes. La so-lution de maisons sur plusieurs étages me semblait laplus appropriée pour répondre à ces conditions. Toutde suite après la catastrophe, je me suis inscrit à la pré-fecture. On ne peut pas construire sans autorisation.Il faut que les responsables locaux donnent leur accordpour être commissionné et financé par le gouverne-ment. Avant même que mes maisons sur plusieursétages n'aient été acceptées, j'ai fait cette démarche, touten continuant à visiter les centres de réfugiés avec lessystèmes de partitions.Par chance, j'ai rencontré celui qui était encore maired'Onagawa. Il cherchait des solutions pour construiredes maisons provisoires, car il manquait d'espace. Je luiai proposé mon plan et il l'a beaucoup aimé. Ce maireétait très enthousiaste et il avait assez de poigne pourimposer ce projet. En général, c'est très difficile de fairequelque chose de différent. Il a dû prendre la respon-sabilité et c'est comme cela que ce projet hors normea pu voir le jour. Je travaille aussi sur la conception d'unautre projet à Sôma dans la préfecture de Fukushima.C'est un centre pour enfants orphelins baptisé "ARTMAISON". Ce projet est sponsorisé par LVMH. Dansla même ville, on m'a aussi demandé de concevoir deslogements publics bon marché. Les gens vont devoirquitter les logements provisoires et intégrer des mai-sons permanentes. La ville de Sôma m'a donc demandéde concevoir quatre appartements doubles.

Pouvez-vous nous expliquer votre approche deslogements provisoires?B. S. : Afin d'être le plus équitable possible, un systèmede loterie décide des attributions d'appartements.Chaque personne reçoit donc son appartement au ha-sard. Les voisins ne sont plus nécessairement ceux

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Située à une soixantaine de kilomètres de Sendai, Onagawa a été très touchée par le tsunami. Les logements ima-

ginés par BAN Shigeru ont été implantés dans un stade de base-ball au sommet d’une colline.

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d’avant. Les communautés telles qu’elles existaient dis-paraissent et beaucoup de gens se retrouvent ainsi seuls.A Onagawa, ceux qui ont été choisis pour vivre dansmes logements disaient qu'ils étaient les moins chan-ceux, car ils ont dû rester dans les centres de réfugiésplus longtemps. Ils se sont plaints à la ville. Ils n’ont em-ménagé que fin octobre. Mais après avoir intégré les ap-partements, ils ont finalement dit qu’ils avaient bienfait d’attendre parce qu'ils étaient bien mieux installésque les autres. La taille est exactement la même pourtous les logements provisoires. Il serait impossible si-non d’être financé par le gouvernement. Mais on y aajouté des structures de rangements en bois. Je les ai des-sinées, puis j'ai obtenu des financements privés. J'ai de-mandé aux bénévoles de les fabriquer et de les intégrer.Cela permet aux habitants d'avoir assez de rangementsdans ces petits espaces. Si vous visitez les logements pro-visoires ordinaires, ils sont remplis d'objets et les gensdoivent circuler au milieu dans des espaces très restreints.Nous avons fourni assez de rangements pour utiliserau mieux l'étroitesse de l'espace. C'est pour cela aussique nos maisons sont si appréciées. Nous avons aussifabriqué des tables en bois et tubes de papier. Mes mai-

sons ont aussi une assez bonne isolation et même l'acous-tique est très bien faite. C'est sans comparaison par rap-port aux logements provisoires qu’on rencontre ailleurs.

La Croix Rouge fournit en plus la climatisation, le ré-frigérateur, le four micro-onde, le téléviseur. Tout estlà dès l’emménagement. Les logements provisoires dugouvernement ont une très mauvaise isolation qui setraduit par de la condensation et de nombreusesfuites, mais ce n'est pas le cas de ceux que j’ai bâtis. Lesmaisons provisoires d'Onagawa ont été conçues pourêtre permanentes, mais selon la loi japonaise les gensne peuvent y vivre que deux ans gratuitement. Cela s'estpassé ainsi lors des tremblements de terre précédents.Cette fois-ci pourtant, je pense qu'ils ne pourront sansdoute pas partir d’ici deux ans. Avec le déplacement desvilles, la reconstruction va prendre plus de temps. Lesgens vont sans doute devoir rester plus longtemps.

PROPOS RECUEILLIS PAR K. C.

BIOGRAPHIEBAN Shigeru est né en 1957. Il est diplômé del'Université Cooper Union à New York. Parmi sesdernières créations, on trouve notamment le CentrePompidou-Metz en 2010. Il travaille sur des projetshumanitaires depuis 1994, se distinguant parl’utilisation de matériaux peu chers et faciles àmonter (tubes en papier, partitions en tissu).

Depuis près de 20 ans, il vient en aide aux sinistrés.

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Comment est né ce projet ?SUGAWARA Daisuke : L'idée est venue aprèsavoir participé à l'enlèvement de gravats.En tant qu'architecte, je m'étais demandéce que je pouvais faire. Pour évaluer les be-soins, je me suis rendu à Rikuzentakata entant que bénévole le 8 mai. Au retour, jesuis allé rendre visite à l'entreprise SumitaHouse Industrial Co. qui a ensuite participéau projet. Le 10 mai, Sumita m'a contactépour me dire qu'elle souhaitait “coopérer auniveau matériel et des infrastructures à la créa-tion d'une cité miniature”. Je me suis chargéd'établir les plans de répartition de chaquemaison et de choisir les infrastructures né-cessaires. Je pense que ça a été la meilleurefaçon de s'assurer que les conditions de viedans ces logements provisoires seraientd'un niveau élevé.

C’est le bois qui domine.S. D. : Les unités de logement d'urgenceen bois ont été conçues par Sumita. Grâceà cela, nous avons construit des logementsprovisoires qui ont permis de faire travail-ler la main-d'œuvre locale. Par ailleurs, c'estun bois qui est adapté aux conditions cli-matiques locales, ce qui permet d'assurerun confort optimal.

La qualité des maisons est bien meil-leure que la moyenne.S. D. : Tout à fait. Les unités et l’environ-

nement sont plutôt de bonne qualité. Cequi a permis d'assurer la qualité de cesconstructions provisoires, c'est le plan dedéploiement que nous autres architectesavons établi. Nous avons fait en sorte depréserver l'intimité de chaque habitation.Dans le même temps, nous avons fait ensorte que le jardin devienne le cœur de lacommunauté. Les règles qui s'appliquentà la disposition de chaque maison ont unimpact sur l'ensemble de telle sorte que cela

donne l'impression d'être un village quiexiste depuis longtemps alors qu'il est com-posé de nouvelles constructions. Maiscela ne se limite pas simplement à l'aspectvisuel. Je pense que les règles que nousnous sommes fixées pour la constructioncomprennent aussi l'idée d'une commu-nauté villageoise qui peut apparaître entreles résidents.

Que retirez-vous de cette expérience ?

S. D. : J'ai découvert dans le comporte-ment des architectes japonais un problèmequi est commun à tous les architectes dansle monde. Après cette terrible catas-trophe, il y a eu deux types d'architectes.Il y a eu ceux qui stupéfaits sont restés im-puissants et ceux qui ont bâti dans leszones sinistrées des bâtiments singuliersdans leur propre style. Cela caractérise bienle système en place qui veut que l'on conti-nue à construire des "bâtiments originaux"tiraillés entre le "caractère social" exigé parla société et le sérieux sentimental des ar-chitectes. Le projet de Kesennuma manquede clinquant au regard de ceux qu'onnomme "architectes". Il est sobre. Toute-fois je pense que ce type de concept estindispensable à la reconstruction à longterme à laquelle peuvent participer denombreux architectes. Un siècle avant J.C.,l'architecte romain Vitruve a publié son fa-meux traité De architectura. A cetteépoque, l'architecte ne se contentait pasde faire des "bâtiments", il concevait cedont il avait besoin pour y parvenir : ma-chines ou travaux publics. Il est bien sûr"important de créer des choses nouvelles",mais il faut s'adapter pour répondre auxconditions requises et ne pas simplementse contenter du style. C'est en cela quel'architecte est un vrai professionnel quece soit au Japon ou ailleurs.

PROPOS RECUEILLIS PAR O. N.

Sugawara Daisuke défend une vision d’ensemble

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C’est à Rikuzentakata dans un espace réservé initialement aux camping-cars queSUGAWARA Daisuke a recréé un petit village où chacun tente de se reconstruire.

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MUSIQUE Une maison enchansonsTouché par l’appel lancé en faveur de la

construction d’une seconde Maison pour

tous (Minna no ie) à Rikuzentakata, le label

Sonore dirigé par Franck Stofer sort une

compilation de musiciens japonais.

Commercialisé

sous la forme

originale d’un

badge lecteur

audio, cet

ensemble de

12 titres

composés par les

artistes japonais les plus intéressants dans

le champ des musiques électroniques et

expérimentales a été judicieusement

baptisé Minna no ie. L’intégralité des

recettes générées par cette compilation

vendue 25 € sera versée à l’association qui

gère la construction de la Maison pour tous.

http://fr.jaapan.com/s/11662_127183_minna-no-

ie-playbutton-compilation

ZOOM CULTURE

H UMEUR par KOGA Ritsuko

Je n’ai pas toujours rêvé de me marier, mais je medisais que si cela devait arriver, je voulais faire unmariage à la française, une cérémonie simple à la mai-rie et une fête modeste, mais sympa en petit comité.Je méprisais le mariage japonais se faisant en généraldans une fausse chapelle suivi d'un grand repas de2 heures avec une centaine d'invités, le tout pourun coût moyen de 30 000 euros. L'alliance devantcoûter en principe l’équivalent d’au moins trois foisle salaire du marié.Pour éviter ce cauchemar (?), j’ai fait une croix pen-dant longtemps sur le mariage jusqu’au jour où le des-tin m’a conduite en France. Avec mon compagnonfrançais avec qui je vivais, nousavons un jour décidé de convo-ler pour diverses raisons. Il étaitaussi anti-mariage que moi, maisune fois la décision prise, il ne res-tait plus qu'à penser à la fête !Comme je voulais le faire à lafrançaise, je les ai laissés gérer àleur manière, lui et sa famille, sur-tout ma future belle mère qui disait "on va faire unepetite fête, mais bien". Pendant un an de préparationet le jour du mariage, tous les services ont été assu-rés par sa grande famille : ma robe, la cuisine, lestables, la musique, etc... pour un mariage simple100% fait main. "C'est magnifique, mais pourtant, com-bien de belles familles ai-je ?" Je me suis posé la ques-tion... Finalement, pour une petite fête, ma bellefamille a fait une liste de 200 invités en disant qu’ils’agissait de membres inévitables, et qu'il devait y avoirencore au moins 500 personnes dans le monde (mal-gré le 4e anniversaire de notre mariage fêté ce mois-ci, je ne connais toujours pas toute cette partie desa “famille”). J'avais oublié de mentionner un petitdétail : ma belle famille n’est pas d'origine française,elle est originaire d'un pays où l’influence africaine estgrande ! Ainsi la petite fête de mon rêve a duré pen-dant 3 jours et je suis restée couchée le dernier jourpendant que les autres dansaient encore. Enfin, dansnotre mariage, le côté typiquement français est lecontrat de mariage !

Un mariage en version française

SCÈNE Kuricorder QuartetDes concerts tout en douceur avec les

quatre multi-instrumentistes du

Kuricorder Quartet. As de la flûte à bec, ils

jouent également de la guitare, du tuba,

des percussions, mais aussi de l’ukulélé, de

l’harmonica… S’il compose régulièrement

pour le cinéma et la télévision, le quartet

s’est notamment fait connaître avec sa

version pour flûtes à bec de la Marche

impériale, thème de Dark Vador… Un

univers musical naïf et poétique, empreint

de la nostalgie de l’enfance. Depuis sa

création en 1994, ce groupe inclassable

s’inspire en effet aussi bien du rock et du

funk que des musiques médiévales ou du

folk. Dans son 7e album, qui sort en avril,

il reprend avec son style inimitable les

musiques des films E.T., Jurassic Park, Le

troisième homme…

Sans prétention aucune, les quatre

membres du Kuricorder Quartet ne

manquent ni d’humour ni de talent. Ils

nous promettent deux concerts pleins de

fraîcheur, avec un zest d’excentricité à la

Maison de la culture du Japon à Paris.

Vendredi 27 à 20 h et samedi 28 avril à 15 h

101 bis, quai Branly, 75015 Paris.

Réservations : 01 44 37 95 95 (15 € - 12 €)

CINÉ-CLUB Un film oscariséà La Pagode Oscar du meilleur film étranger en 2009,

Departures (Okuribito) de TAKITA Yôjirô fait

partie de ces films japonais qui font de

trop courtes escales sur nos écrans. Une

bonne occasion de revoir cette

découverte poétique et humoristique de

l’univers des pompes funèbres au Japon

avec l’étonnant MOTOKI Masahiro et

l’excellent YAMAZAKI Tsutomu. A ne pas

manquer le 14 avril à 10 h 30.

57 bis, rue de Babylone 75007 Paris

www.rendezvousaveclejapon.fr

12 ZOOM JAPON numéro 19 avril 2012

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Je souhaite aider à la construction de la Maison pour tous - Minna no ie à Rikuzentakata en donnant la somme de :

Chèque à rédiger à l’ordre de ASS Japonaide à envoyer à :

Le 11 mars 2011, la côte nord-est du Japon a été frappée par un très violent séisme suivi quelques minutes plus tardpar un tsunami qui a dévasté villes et villages, faisant des milliers de victimes et des dégâts considérables. Après une concen-tration des efforts sur le relogement des sinistrés pour la plupart dans des ensembles de préfabriqués, en attendant depouvoir réorganiser l’urbanisme et la construction d’habitations dans les hauteurs, il est apparu indispensable de four-nir à ceux que l’on peut encore appeler des réfugiés, un lieu convivial où ils pourraient se retrouver et partager leursprojets d’avenir. Répondant à ce besoin manifeste, l’architecte ITÔ Toyô a décidé de bâtir une première Maison pourtous (Minna no ie) à Sendai, avec le soutien de la région de Kumamoto. Elle a été inaugurée à l’automne 2011.

Une nouvelle maison est prévue à Rikuzentakata pour laquelle ITÔ Toyô a fait appel à de jeunes architectes, INUI Ku-miko, FUJIMOTO Sou, HIRATA Akihisa et d’autres Maisons pour tous devraient ensuite être construites près de chaqueensemble de logements provisoires. Pour être mené à bien, le projet de Rikuzentakata, géré par l’association Kisyn nokai créée par Itô Toyô et plusieurs architectes japonais de renom, YAMAMOTO Riken, NAITÔ Hiroshi, KUMA Kengoet SEJIMA Kazuyo, a besoin de notre soutien. Zoom Japon s’associe à la démarche entreprise au Japon et lance auprèsde ses lecteurs un appel aux dons pour réunir les 50 000 euros nécessaires à la construction de cette maison commune.

Les fonds récoltés par l’intermédiaire de l’association Japonaide seront versés à Kisyn no kai qui les utilisera pour ache-ver le projet de Rikuzentakata.

5 euros 10 euros 20 euros 30 euros 50 euros Autre : _________________

Zoom JaponOpération Maison pour tous

12 rue de Nancy75010 Pariswww.japonaide.org

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ZOOM CULTURE

Q uelle bonne idée d’avoir publié cet ouvrage !Voilà ce que l’on se dit lorsqu’on referme pourla dernière fois Ecrire au Japon : Le roman

japonais depuis les années 1980 de OZAKI Mariko. Unenouvelle fois, les éditions Philippe Picquier se distin-guent en laissant la parole à un auteur japonais pourqu’il analyse la littérature de son pays, plutôt que de lais-ser à un Occidental le soin de le faire. L’autre intérêt dece livre, c’est d’avoir été écrit par une journaliste bieninformée et visiblement attachée à la matière qu’elletraite. Cela permet d’avoir entre les mains un ouvrageagréable à lire accompagné de quelques anecdotes dontune étude universitaire aurait été forcément privée pourlaisser la place à l’appareillage de notes. Par ailleurs, salecture permet, c’est essentiel, de (re)contextualiser uncertain nombre de romans japonais parus ces dernièresannées. On y apprend également de nombreux détailsfort intéressants sur le fonctionnement du monde del’édition au Japon. En moins de deux cents pages, l’au-teur brosse un portrait sans concession de la littératurejaponaise à l’égard de laquelle les lecteurs français mani-

LITTÉRATURE De Murakami à Murakami politiques et à l’effondrement de nom-breux repères, la littérature nationaleconnaît aussi des changements impor-tants avec une sorte de passage detémoin entre les générations plus âgéeset les plus jeunes. Tout au long des deuxdécennies que la journaliste du YomiuriShimbun, le premier quotidien duJapon, a choisi de passer au crible, onvoit ainsi apparaître des têtes nouvelles(souvent très jeunes) et des théma-tiques originales qui contredisent dansles faits les propos de HASUMI Shige-

hiko. Au fil des pages, on constate en effet que les écri-vains japonais sont profondément en phase avec lasociété qui les entoure et qu’ils savent prendre à leurcompte les avancées technologiques (fax, ordinateur,Internet, téléphone portable) qui ont transformé nosexistences. Parue initialement en 2007 au Japon, l’édi-tion française bénéficie d’une postface particulière.Cette dernière a le mérite de mettre en perspectives leschangements induits par le 11 mars et l’après 11 mars2011. Comme en ont témoigné les écrivains japonaisprésents au Salon du livre, ces événements ont eu unimpact très net sur eux. “Le Japon se trouve confrontéà une situation inconnue depuis des siècles. Dans cecontexte, quel rôle la littérature et les écrivains pourront-ils tenir ?” écrit OZAKI Mariko. Les réponses commen-cent à arriver dans les rayons des librairies nippones.On les retrouvera d’ici quelque temps traduites en fran-çais. A ce moment-là, on aura besoin à nouveau deslumières de la journaliste.

GABRIEL BERNARD

Grâce à l’excellent travail de OZAKI Mariko,les lecteurs plongent avec délice dans lesdessous de la littérature japonaise.

festent un intérêt croissant. Les excel-lentes ventes en France des deux pre-miers tomes de 1Q84 de MURAKAMI

Haruki chez Belfond qui vient de faireparaître le troisième confirment aussicette tendance. Il est d’ailleurs intéres-sant de noter que l’essai de OZAKI

Mariko démarre avec l’entrée fracas-sante d’un certain MURAKAMI Harukisur la scène littéraire nippone mêmesi certains esprits chagrins pouvaientécrire à l’époque : “L’ère du roman esten train de prendre fin et la littératurecontemporaine ne dispose plus de la force nécessaire pourcréer de nouveaux récits ni de nouvelles thématiques”.Malgré le pessimisme d’un HASUMI Shigehiko, profes-seur à la prestigieuse université de Tôkyô et voix trèsécoutée dans les milieux intellectuels, le roman japo-nais va montrer son extraordinaire vitalité au cours desdeux décennies suivantes. Ce qui est certain, comme ledémontre très bien OZAKI Mariko, la fin des années1980 est un tournant capital dans l’histoire littérairejaponaise. Tout comme le pays qui s’apprête à entrerdans une longue période de turbulences liées à l’éclate-ment de la bulle financière, aux bouleversements géo-

14 ZOOM JAPON numéro 19 avril 2012

RÉFÉRENCEÉCRIRE AU JAPON : LE ROMAN JAPONAIS DEPUIS LESANNÉES 1980 de OZAKI Mariko, trad. par CorinneQuentin, éd. Philippe Picquier, 19,80 €.

Comme le rappelle fort justementOZAKI Mariko dans son essai sur le ro-man japonais, les prix littérairesjouent un rôle très important. Parmieux, le plus célèbre est le prix Akuta-gawa. Décerné deux fois par an de-puis 1935, on le compare souvent auprix Goncourt en ce sens qu’il contri-bue à doper les ventes des ouvragesrécompensés. Mais à la différence duGoncourt, il a pour vocation de favo-

riser l’émergence de nouveaux ta-lents. Dans son livre, OZAKI Marikorappelle notamment la date du15 janvier 2004 lorsque le jury duprix décide de récompenser deuxjeunes femmes de 19 et 20 ans,WATAYA Risa et KANEHARA Hitomi. Unchoix audacieux qui a bouleversél’univers littéraire de ces dernières an-nées. Un autre événement mar-quant vient de se produire. Il ne fi-

gure pas dans l’ouvrage d’OZAKI Ma-riko, c’est le fait que le jury est désor-mais composé de personnes néesaprès la Seconde Guerre mondiale.Les membres qui en font partie ontaujourd’hui entre 50 et 65 ans. Il vasans dire que ce changement géné-rationnel aura sans doute des consé-quences sur les choix des futurs lau-réats, ce qui devrait renforcer l’inté-rêt que les Japonais portent à ce prix.

Petite révolution autour du prix Akutagawa

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automobilistes préfèrent écouter de la littérature que dela musique ou la radio. C’est une façon assez agréable depasser le temps lorsqu’on n’a pas la possibilité de trans-porter avec soi les trois volumes d’un roman comme1Q84. Maia Baran et Emmanuel Dekoninck qui incar-

ZOOM CULTURE

Au moment où tous les amateurs de MURAKAMI

Haruki peuvent se précipiter chez leur li-braire pour acheter le Livre 3 de 1Q84 (éd. Bel-

fond, trad. par Hélène Morita), dernier volume de ce ro-man fleuve, l’éditeur Audiolib spécialisé dans “les livresà écouter” sort les Livres 1 et 2 sous forme de CD MP3.Si rien ne remplace le plaisir de lire soi-même et ainsi des’imprégner à son rythme des mots qu’un écrivain a choi-sis de poser sur une page, on appréciera néanmoins cetteinitiative qui permet d’avoir accès de façon différente àl’un des grands succès de la littérature mondiale. EnFrance, le livre audio tarde à démarrer par rapport auxEtats-Unis ou aux pays scandinaves où la publication d’unouvrage (en général un best-seller annoncé) s’accompagnegénéralement de la sortie de la version audio. Certains

L’éditeur de livres audio Audiolib sort ces jours-ci le Livre 2 de 1Q84. A seprocurer, en attendant le Livre 3 en juin.

ROMAN 1Q84 à lire et/ou à écouternent respectivement Aomame et Tengo, les deux person-nages principaux de l’œuvre signée MURAKAMI, ont réussià trouver le bon ton et un rythme juste pour nous en-traîner dans cet univers si particulier de 1Q84. C’est d’au-tant plus appréciable que le Livre 1 correspond à17 heures d’écoute et le Livre 2 à 14 heures. En écoutantces voix, cela rappelle ces histoires (plus courtes) que nosparents pouvaient nous raconter pour nous endormir.L’écriture de MURAKAMI se prête d’ailleurs très bien à unelecture à voix haute et l’histoire décrite dans 1Q84 quinavigue entre le passé et le présent est très bien adaptéeà ce mode de distribution. Quel que soit celui que vouspréférez, 1Q84 doit figurer dans votre bibliothèque ouvotre discothèque. G. B.

16 ZOOM JAPON numéro 19 avril 2012

condensés des grands titres de la littérature.Après avoir justement publié la version des-sinée du roman fleuve du Russe LéonTolstoï et celle d’A la recherche du tempsperdu de Marcel Proust, la maison d’éditionpassée dans le giron de Delcourt s’emploieà intéresser les lecteurs à des œuvres bienplus engagées comme Le Capital de KarlMarx et Le Manifeste du Parti communistedu même auteur co-signé avec Friedrich Engels. C’est d’ail-leurs aussi une caractéristique de l’éditeur East Press quede mettre à disposition du grand public des ouvrages dontle contenu aborde des questions politiques et sociales.De fait, la jeunesse nippone aux prises avec une réalité

Depuis quelques années, l’éditeur japonais EastPress s’est fait une spécialité d’éditer sousforme de manga des classiques de la littérature

mondiale sans doute pour y intéresser celles et ceux quis’en détournent, estimant qu’il y a trop à lire ou que lesouvrages sont trop épais. En France, le phénomène estidentique puisque les jeunes préfèrent de loin dévorerdes mangas que de se lancer dans la lecture de Guerre etPaix. Prenant le relais d’East Press, Soleil Manga s’est lancédans la traduction française de ces mangas, substituts

A quelques semaines du bac, certaineslacunes peuvent être comblées grâce à lasortie du Manifeste du Parti communiste.

MANGA Lecteurs, engagez-vous !économique bien moins réjouissante que par lepassé doit apprendre à composer avec. Pour cefaire, l’accès à la littérature prolétarienne commeLe Bateau-usine de KOBAYASHI Takiji (traduc-tion française chez Yago) a joué un rôle impor-tant ces dernières années. Pas sûr que l’effet soitle même en France, mais on peut tout de mêmesaluer la sortie de ces livres qui ne remplacerontcependant jamais les originaux. G. B.

RÉFÉRENCE1Q84 de MURAKAMI Haruki, trad. par Hélène Morita,avec les voix de Maia Baran et Emmanuel Dekoninck,éd. Audiolib, Livre 1 et Livre 2, 24 € chaque.

RÉFÉRENCELE MANIFESTE DU PARTI COMMUNISTE de Karl Marx,dessin de Variety Art Works, trad. par FlorentGorges, éd. Soleil Manga, 6,95 €.

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ZOOM NIHONGO

PIPO AU JAPON

Quand on se déplace au Japon, on est frappé devoir à quel point l'environnement peut chan-ger sans avoir besoin de parcourir des kilomè-

tres. Avancer dans la ville japonaise, c'est faire défiler undécor qui se transforme en permanence, souvent sanslogique apparente et sans transition. On passe aisémentdu quartier commerçant, animé à outrance, aux ruellestranquilles et arborées, des façades boisées de l'habitattraditionnel aux enchevêtrements métalico-électriquesdes parkings à étages et des transformateurs pas si hautsperchés, des résonances étourdissantes de l'entrée d'unesalle de pachinko à la sérénité de celle d'un salon de thé…Il y en a des choses et du monde à faire tenir sur ces boutsde terre pris entre mers et océan, alors on ne s'encom-bre pas des transitions. Et la langue n'échappe pas à cefaçonnement du paysage qu'elle épouse pour mieux scin-der les petits événements qui le composent. Les diffé-rents registres du japonais se juxtaposent avec applica-tion, et les clameurs du marchand de bento côtoient lesjacasseries des commères de quartier…

お弁当べんとう

にお茶ちゃ

はいかがですか。O bentô ni ocha wa ikaga desu ka.Du thé pour accompagner votre bento ?

あらま、そうですか。おかわいそうに…Arama, sô desu ka. O kawai sô ni...Vous m'en direz tant ! Comme je vous plains...

Ikaga desu ka, forme polie de dô desu ka (qu'en dites-vous?), tranche avec le flegme de arama, interjectionmarquant l'étonnement employée essentiellement par

LANGUE La réjouissantediversité des registres

les femmes. A seulement quelques mètres de là, un livreurtire sa révérence sur le palier d'un immeuble après avoiraccompli sa mission, alors qu'un adolescent hausse le tonpour une histoire de forme (on n'est rien au Japon sansle regard des autres)…

毎度まいど

ありがとうございました。失礼しつれい

します!Maido arigatô gozaimashita. Shitsurei shimasu !Merci encore. Au revoir Madame !

格好かっこう

つけんじゃねえよ。Kakkô tsuken ja nee yo.Espèce de frimeur !

Cette dernière formule doit principalement sa vulga-rité à la syllabe nee, forme mal dégrossie de nai (ない)qui exprime la négation. Bagarre des mots qui prendune toute autre forme, un peu plus loin, dans les oreillesd'un marmot pleurnichard réprimandé par sa mère quine sait plus où se mettre…

こらっ!やめなさい!Korah ! Yamenasai !Dis donc ! Ça suffit !

La langue japonaise s'emploie à nous faire voyager, il suf-fit de se laisser porter.

PIERRE FERRAGUT

Loué, des décennies durant, comme "terre decontrastes", le Japon véhicule une langue auxregistres disparates à souhait.

PRATIQUELE MOT DU MOIS

会話かいわ

(kaiwa) : dialogue

相手あいてに合

あわせて会話

かいわすることが大切

たいせつです。

Aite ni awasete kaiwa suru koto ga taisetsu desu.Il est important d'adapter son langage à soninterlocuteur.

Institut de Langue Japonaise de S3083833410:xaffa/☎ ( )serueh81à41edlieuueccA arffrgns.www

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avril 2012 numéro 19 ZOOM JAPON 17

Page 18: ZOOM Japon 19

le restaurant japonais Aida étoilé par le guide Miche-lin. Même si le plaisir de travailler dans des établis-sements de cette qualité était là, il n’était pas entiè-rement satisfait, car il cherchait avant tout cetteproximité que l’on trouve dans ces gargottes japo-naises où boire et manger simplement procurent unbonheur sans nom. Lengué est né de ce désir pro-fond. La clientèle qui le fréquente ne s’y trompe d’ail-leurs pas. En l’espace de quelques mois, l’izakaya pari-sien s’est bâti une solide réputation. 70 % de ses clientssont des Français qui ont découvert cet état d’esprit

si particulier et sont tombés amou-reux de la cuisine de KONDO Katsu-toshi. Lorsqu’ils se présentent le soir,ils peuvent ainsi déguster de savou-reux petits plats, véritables amuse-bouches qui mettent le palais dans lesmeilleures dispositions possibles pourapprécier la formidable carte des vinset de saké que le patron de Lengué aétabli avec passion. Camembert frit,huître en marmite, roulé d’anguilleou encore croquettes de potiron, voiciquelques exemples des petits platsmitonnés par M. KONDO derrière son

comptoir. Et lorsqu’on pénètre dans ce charmant lieuqui ressemble peu à un vrai izakaya, on retrouve néan-moins l’atmosphère sympathique et chaleureuse quiprocure ces instants de bonheur si rares de nos jours.Le tout pour un prix somme toute raisonnable.

GABRIEL BERNARD

ZOOM GOURMAND

P our KONDO Katsutoshi, le patron de Lengué, ily a un mot qui compte par-dessus tous les autres,il s’agit du terme bonheur. C’est ce que l’on res-

sent lorsque l’on pénètre dans son izakaya ouvert en mai2011 dans le quartier latin à Paris. Donner du plai-sir et apporter un peu de bonheur à ses clients, c’estd’ailleurs ce qui l’a motivé à se lancer dans cette aven-ture. Au Japon, l’izakaya se situeentre le café et le restaurant. Il res-semble aux bars à vins tels qu’ils sesont développés ces dernièresannées dans la capitale française,c’est-à-dire des endroits chaleu-reux où, entre amis, on vient pren-dre un verre de bon vin accompa-gné d’un petit plat à grignoter.Dans bon nombre de ces endroits,si la boisson est souvent à la hau-teur des attentes, ce n’est pas tou-jours le cas de la nourriture com-posée bien souvent de charcuterie.KONDO Katsutoshi qui a une expérience de somme-lier voulait que les éléments de base de l’izakaya - lesmets et le breuvage - soient au même niveau, c’est-à-dire le plus élevé. Autant le dire tout de suite, il aréussi son pari. Originaire de la préfecture d’Aichi, ila fait ses études plus à l’ouest, à Kôbe où il a vécu leséisme qui a détruit une partie de la ville en janvier1995. Après cette date qui l’a beaucoup marqué,KONDO Katsutoshi est venu faire ses classes en Francepour apprendre à apprécier et choisir le vin avant detravailler dans plusieurs grandes maisons, notamment

Dans le Quartier Latin, l’izakaya fondé parKONDO Katsutoshi est devenu en quelquesmois un lieu nippon incontournable.

RESTAURANT Lengué, rien quedu bonheur

Du thé japonais commes’il en pleuvaitEtablie il y a plus de 150 ans au Japon, la

maison Jûgestudô est spécialisée dans le

thé japonais et dans les accessoires qui

permettent de le mettre en valeur. Pour

les Japonais, le thé est un art. C’est sans

doute la raison pour laquelle la boutique

ressemble davantage à une galerie d’art

contemporain qu’à un magasin ordinaire.

C’est un “endroit

où vous pourrez

accéder à l’esprit

du thé et du zen”,

explique-t-on. Au

rez-de chaussée,

le moins que l’on

puisse dire, c’est

que le

dépouillement est

la règle première.

Un grand comptoir et une bouilloire

annoncent que c’est l’endroit où le client

peut déguster le thé vert choisi avec soin

par les responsables de Jûgestudô.

On trouve également de nombreux

accessoires authentiques en provenance

direct de l’archipel. C’est ce qui explique

les prix relativement élevés, sans pour

autant être excessifs, sachant que la

plupart des objets proviennent des

meilleurs artisans. Il y en a pour tous les

goûts et pour toutes les bourses. Si vous

ne pouvez pas vous déplacer sur Paris, la

maison Jûgetsudô est présente sur la

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ça, vous ne devenez pas un passionné de

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DR

18 ZOOM JAPON numéro 19 avril 2012

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L A RECETTE DE KATSUTOSHI, chef de Lengué

INGRÉDIENTS (pour 4 personnes)

2 maquereaux d’environ 600g

1 oignon nouveau1 à 2 poivron(s) jaune(s)1 à 2 poivron(s) vert(s)Un peu de ciboulette 100g de sel

Préparation de la sauce vinaigrée:70 ml de dashi (5g de dashi dilué dans 65 mld’eau)15 ml de mirin15 ml de sauce de soja20 ml de vinaigre de riz

PRÉPARATION1 - Lever les filets des 2 maquereaux. 2 - Recouvrir de 100 g de sel les 4 filets de maquereaux de façon à leurfaire rendre leur eau. Au bout de 20 minutes, les passer à l’eau. 3 - Retirer les arêtes avec une pincette ainsique la peau. Couper en petites bouchées. 4 - Peler les poivrons et couper en petits morceaux. 5 - Saupou-drer les filets de maquereaux avec de la farine de blé ou de pomme de terre. Plonger-les dans de l’huile à180°. Rajouter les morceaux d’oignon et de poivron sans les enduire de farine. 6 - Au bout d’environ 1 minute,retirer de la friteuse et disposer sur un plat. Verser uniformément sur le tout la sauce vinaigrée. 7 - Dresser enrajoutant la ciboulette. 8 - A déguster immédiatement chaud. Vous pouvez également conserver le plat marinépendant 3 jours au réfrigérateur.

ZOOM GOURMAND

C’est au milieu du XVIème siècle queles Portugais et les Espagnols débar-quent dans l’archipel. Les Japonaisles baptisent sobrement Namban, lit-téralement les “barbares du sud”.Leur présence va s’accompagner dela mise en place d’un fructueux com-merce grâce auquel le Japon vadécouvrir de nouveaux produitsinexistants sur son sol. De leur côté,les Européens se délectent du raffi-nement nippon. De cette rencontreva naître un art que l’on désigneencore de nos jours sous le nom deNamban bijutsu (Art namban). Les

missionnaires et les jésuites euro-péens auraient enseigné par exem-ple des techniques picturales incon-nues à cette époque dans l’archipel,influençant ainsi des artistes japonaisqui ont laissé de nombreuses œuvresde grande qualité. On peut admirerde très belles pièces au musée de laville de Kôbe, sans doute l’un deslieux les mieux pourvus en lamatière. Au-delà de leur influence auniveau commercial ou artistique, les“barbares du sud” (à ne pas confon-dre avec les Kômô, les “cheveuxrouges” qui ont par la suite désigné

les Hollandais) ont aussi influencé lacuisine. Avec la Bible, ils ont importél’oignon. Voilà pourquoi le termeNambanzuke est employé dès lorsqu’on recourt aux oignons dans cer-tains plats. Un autre héritage de lagastronomie ibérique est le kasutera,terme dérivé du portugais pão deCastella (pain de Castille). Il désigneun gâteau spongieux toujours trèspopulaire, notamment dans larégion de Nagasaki. C’est dans ceport que les Portugais étaient trèsprésents avant d’être expulsés manumilitari au début du XVIIème siécle.

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Kim

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Nambanzuke(Maquereau à la Nambanzuke)

avril 2012 numéro 19 ZOOM JAPON 19

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Au Japon, chaque nouveau volume de la sagaOne Piece est attendu avec une impatiencenon dissimulée. Les Japonais sont devenus

accros aux personnages imaginés par ODA Eiichirô.Son éditeur, Shûeisha, se frotte évidemment les mains,car les ventes de chaque tome se comptent par millionsd’exemplaires. Désormais, le tirage initial pour les aven-tures du capitaine Monkey D. Luffy et de son équi-page est au minimum de quatre millions d’exemplaires.De quoi donner le sourire d’autant que l’histoire pré-

publiée dans le magazine Shônen Jump permet à cedernier de maintenir de très bonnes ventes au momentoù ses concurrents ont bien du mal à enrayer l’érosionde leur lectorat. Cette réussite extraordinaire rappellecelle de Dragon Ball dont ODA Eiichirô revendiquela filiation. Pour l’expliquer, il faut se souvenir des troisprincipes du magazine Shônen Jump : effort (doryoku),victoire (shôri) et amitié (yûjô). Pour être publié dansses colonnes, il faut qu’une série possède au moins unede ces caractéristiques. A l’instar de Dragon Ball, OnePiece est doté des trois, assurant ainsi son universalitéet son succès auprès d’un public assez large. Contrai-rement à ce que l’on pourrait penser de prime abord,cette série n’est pas réservée au public le plus jeune.

Certes les enfants peuvent s’identifier à ces person-nages hauts en couleurs dont le comportement par-fois loufoque ne manque pas d’une certaine drôle-rie. L’humour très présent est évidemment un atoutmajeur, mais c’est surtout la camaraderie (nakama)qui imprègne l’ensemble de l’œuvre et permet ainsi detranscender les générations. Au Japon, cette notionest très importante, car elle est à la base de la plupart

Au cœur de l’un des quartiers les pluspopulaires et au sommet d’une tour horsnorme, découvrez le monde d’ODA Eiichirô.

Les amateurs de l’univers conçu par ODA Eiichirô ne seront pas déçus et les autres pourront y plonger sans problème.

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Page 21: ZOOM Japon 19

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ZOOM VOYAGE

des rapports entre les individus. Elle est devenue d’au-tant plus importante ces derniers mois à la suite desévénements du 11 mars 2011. Résultat, lorsqu’on exa-mine la répartition des lecteurs de One Piece partranche d’âge, on a quelques surprises. Les moins de12 ans représentent 3 % des acheteurs, les 13-18 ans10,5 %, les 19-29 ans 37,4 %, les 30-49 ans 36,9 % etles plus de 50 ans 12,2 %. En d’autres termes, aucunsegment de la société n’échappe à l’influence de cemanga qui désormais se décline au cinéma, dans lesjeux vidéo ou à la télévision. One Piece, c’est aussi uneexposition qui se déroule jusqu’au 17 juin prochain àla Mori Arts Center Gallery, dans le quartier de Rop-pongi, longtemps considéré comme un endroit peufréquentable en raison de sa vie nocturne agitée quiétait liée à la présence de soldats américains. Les boîtesde nuit, la drogue et l’alcool ont contribué à donnerà cet endroit une image plutôt négative. Cela a nette-ment changé ces dernières années avec l’arrivée de nou-veaux ensembles d’une grande audace architecturaleà l’instar du National Art Center ou de RoppongiHills. Ce dernier complexe est devenu un lieu de pro-menade des Tokyoïtes qui en apprécient justementl’inventivité recherchée par les architectes. La MoriTower et ses 54 étages est justement le phare de cetensemble. Imaginée par l’agence américaine KohnPedersen Fox, elle est beaucoup visitée, car elle pro-pose au 52ème étage le Tokyo City View (9 h~1 h,1500 yens), un atrium circulaire qui permet d’avoirune vue assez extraordinaire sur la capitale japonaise.Lorsqu’il fait beau et que le ciel est bien dégagé, onpeut voir apparaître le mont Fuji. Mais c’est le soir quela vue est la plus bluffante. La cité illuminée est toutsimplement magnifique. C’est le lieu idéal pour fairedes photographies que vos amis vous envieront. LesJaponais se bousculent donc à cet étage pour profiter

de cette vue exceptionnelle. Il est probable qu’ils serontun peu plus nombreux encore tout au long de ce prin-temps 2012 puisque One Piece Ten [Exposition OnePiece] se tient à la Mori Arts Center Gallery. Situé aumême niveau que le Tokyo City View, cet espace d’ex-positions temporaires profite bien évidemment ducaractère attractif de la vue panoramique sur la capi-tale pour assurer une bonne fréquentation. Il va sansdire que l’exposition One Piece conçue par ODA Eii-chirô va attirer un surcroît de visiteurs au cours destrois prochains mois. Ouverte le 20 mars dernier, ilétait assez étonnant de voir que le public présent étaitsurtout féminin et relativement âgé. “Je suis particu-lièrement intéressée par l’importance donnée aux liensd’amitié dans cette histoire”, explique une femme d’unequarantaine d’années. C’est un point qui est mis enavant dans cette manifestation et qui conforte ainsil’attachement des visiteurs à l’égard de la saga. Sur la

plupart des planches qui sont exposées dans une sortede long couloir que l’on emprunte pour s’imprégnerde l’atmosphère qui règne dans l’histoire, le termenakama revient très souvent comme celui de tomoda-chi (ami). C’est la première étape de l’exposition quise poursuit par l’exploration des produits dérivés dela fameuse série. Au-delà du manga lui-même et de sesmillions d’exemplaires vendus, One Piece, c’est aussil’animation et le jeu vidéo, lesquels constituent desœuvres d’art à part entière. C’est la raison pour laquellela Mori Arts Center Gallery insiste également sur cesaspects qui apportent un peu de couleurs à un universessentiellement noir et blanc (manga oblige). L’idéeest de donner un peu de vie à des personnages depapier. Le recours à des animations multimédias favo-rise cette perception et on se laisse prendre au jeu.Conçue comme un parcours ludique, One Piece Tenest une exposition très réussie qui ravira les fans, mais

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Véritable phénomène de société, One Piece est tout droit sorti de l’imagination de ODA Eiichirô.

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S’Y RENDREMORI TOWER, 6-10-1, Roppongi, Minato-ku, Tôkyô106-6106. En métro, emprunter les lignes Hibiya ouToei Ôedo et descendre à Roppongi ou Azabu Jûban.www.mori.co.jp/en/projects/roppongi/art_cultural.html

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ZOOM VOYAGE

intéressera aussi les per-sonnes qui connaissent mall’univers d’ODA Eiichirô.Cela n’en fera peut-être pasdes lecteurs invétérés dumanga ou des incondition-nels des films d’animation,mais elles auront l’impres-sion d’avoir appris deschoses. N’est-ce pas l’objet de la plupart des exposi-tions organisées à travers le monde ? Les enfants nesont pas oubliés avec un mur d’images interactif quileur permet de déplacer virtuellement les personnageset de construire leur propre déroulé de l’histoire. Ilspeuvent ensuite se laisser entraîner grâce à la magie dela technologie dans une espèce de long tunnel en com-

pagnie de tous leshéros. De quoi passerun moment très agréa-ble. Et comme OnePiece est également unexcellent produit d’ap-pel, les organisateursde l’exposition ont évi-demment pensé aux

souvenirs estampillés One Piece. Du T-shirt au sac entissu, en passant par les cartes postales, le bandana oule mug, de 500 à 7500 yens, il y en a pour toutes lesbourses. D’une manière ou d’une autre, vous serez aussiemporté dans cet univers chaleureux et festif du mangale plus populaire de l’archipel.

GABRIEL BERNARD

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Si l’engouement des Japonais pourles aventures du capitaine MonkeyD. Luffy est indéniable, il l’est toutaussi fort au-delà des frontières del’archipel. Le phénomène One Pieceest international et suscite une fer-veur incroyable dans de nombreux

pays où l’on attend avec impa-tience la sortie de chaque nouveauvolume. En France, c’est l’éditeurgrenoblois Glénat qui a gagné lejackpot. En mai 2011, l’éditeur fran-çais a annoncé que le manga signépar ODA Eiichirô était devenu la sé-rie la plus vendue dans l’hexagonedevant Naruto qui a longtempstenu la tête. Depuis sa sortie sur leterritoire français en 2000, le mangas’est vendu à plus de 6 millionsd’exemplaires. Du côté de l’anima-tion, c’est Kaze qui assure la distri-bution de la dizaine de films adap-tés de la série. Le 24 août dernier,l’éditeur en partenariat avec Euro-zoom avait sorti dans les salles obs-cures One Piece Strong World, ladixième adaptation, sans doute lameilleure dans la mesure où elle aété supervisée par ODA Eiichirô à ladifférence des films précédents. Il ena écrit l’histoire et dessiné les person-nages, une implication qui justifie le

déplacement. Par ailleurs, et celas’adresse déjà aux amateurs de la sé-rie, ce film crée un lien avec lemanga original. Ailleurs dans lemonde, on retrouve le même inté-rêt pour l’histoire. Lors du lancementdu mouvement Occupy aux Etats-Unis, on a ainsi pu voir parmi les ma-nifestants des personnes déguiséesen capitaine Luffy et ses compa-gnons. Une influence qui s’expliquepar la très bonne réception de la sé-rie sur le territoire américain. OnePiece est la pièce maîtresse de cequ’on appelle le Japan Cool et queles autorités défendent avec vi-gueur, car cela contribue à donnerune bonne image du Japon dans lemonde. Le rythme de publication estquasiment le même qu’au Japon afinde répondre à la demande massivedes fans dont le nombre ne cesse degrossir d’année en année. Un phé-nomène auquel il est difficiled’échapper. G. B.

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Un succès planétaire

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