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Zimbabwe Harare chiffres clés Superficie en milliers de km 2 : 387 Population en milliers (2001) : 12 852 PIB par habitant en dollars (2001) : 371 Espérance de vie (2000-2005) : 42.9 Taux d’analphabétisme (2001) : 10.6

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Zimbabwe

Harare

chiffres clés• Superficie en milliers de km2 : 387• Population en milliers (2001) : 12 852• PIB par habitant en dollars (2001) : 371• Espérance de vie (2000-2005) : 42.9• Taux d’analphabétisme (2001) : 10.6

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Perspectives économiques en Afrique© BAfD/OCDE 2003

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LA PROFONDE CRISE POLITICO-ÉCONOMIQUE quifrappe le Zimbabwe depuis 1997 s’est encore aggravéeen 2001 et 2002, sous l’effet conjugué de déséquilibresmacro-économiques croissants, de la sécheressegénéralisée au cours du premier trimestre 2002 et del’accélération des réformes agraires qui a suivi laréélection contestée du président Robert Mugabe. Parconséquent, le pays connaît actuellement une gravecrise alimentaire. Selon les estimations, la pénurie decéréales devrait atteindre 1.8 million de tonnes et lamoitié de la population risque d’être touchée par lafamine, tandis que les nécessaires importations dedenrées sont freinées par le manque croissant de devisesétrangères. Parallèlement à cette situation alimentairealarmante, l’économie s’est encore dégradée en 2002 :le taux de chômage devrait atteindre 60 pour cent dela population active. Même si le gouvernement a réussià réduire le déficit budgétaire, le faisant passer de20.7 pour cent du PIB en 2000 à 8.1 pour cent en 2001,

l’économie pâtit du recul général de la confiance desentreprises, du laxisme de la politique monétaire – quia fait plus que doubler le taux d’inflation moyen – etde la surévaluation du taux de change fixe. Le PIB réel,qui s’était déjà contracté de 7.4 pour centen 2001, devrait se replier de 11.4 pourcent en 2002 dans un contexte de faiblessepersistante de l’agriculture, des mines,des activités manufacturières et dutourisme. La crise actuelle risqued’aggraver un contexte social déjà préoccupant : ledualisme persiste et reste très marqué, 2 millions depersonnes au moins sont séropositives ou malades dusida et les systèmes de santé et d’éducation ne cessentde se dégrader. Ce scénario de plus en plus inquiétant,auquel s’ajoute l’intensification du processus deredistribution des terres qui réduit la productivitéagricole, pourrait entraîner une nouvelle baisse du PIBd’environ 5.6 pour cent en 2003.

La dégradation continue de la situation économique et politiqueaggrave un contexte social déjà inquiétant

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2003(p)2002(e)2001200019991998199719961995

Figure 1 - Taux de croissance du PIB réel

Source : Estimations et prévisions des auteurs sur la base des données du FMI et des autorités nationales.

Développements économiquesrécents

Après une période de croissance soutenue, lasituation macro-économique du Zimbabwe s’estfortement dégradée ces cinq dernières années et, depuis

1998, le pays est aux prises avec une crise profonde.Après une stagnation du PIB réel en 1999, la crise s’estaggravée, avec un recul de 5.1 pour cent du PIB en 2000et de 7.4 pour cent en 2001. Le recours abusif desautorités fiscales à l’emprunt bancaire a alimenté lacroissance de la masse monétaire, provoquant une

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Zimbabwe

flambée de l’inflation. Cet environnement inflationnistea produit une augmentation considérable des coûts deproduction et réduit la compétitivité à l’exportation.En outre, l’économie a souffert de l’incertitudepersistante entourant le programme de réforme agraire,du recul de la confiance des entreprises et de la pénuriede devises qui ont eu pour conséquence un repli desimportations de matières premières. L’agriculture, lesactivités manufacturières, les mines et le tourisme– moteurs de la croissance – ont été les secteurs lesplus touchés par la crise.

Depuis 1999, le niveau élevé des capacitésdisponibles dans le secteur manufacturier, l’un des plusdiversifiés du continent africain, tenait essentiellementà l’érosion progressive de la compétitivité. La forteinflation enregistrée en 2000-01, la pénurie de deviseset la diminution de la demande intérieure provoquéepar la hausse du chômage et le repli du pouvoir d’achatont elles aussi pesé sur un secteur déjà déprimé. Levolume de la production industrielle s’est contracté de10.5 pour cent en 2001 et devrait perdre encore17.2 pour cent en 2002. En outre, la surévaluation dutaux de change a fortement pénalisé les exportations,tandis qu’en l’absence de devises, de nombreusesentreprises (surtout parmi celles qui n’exportent pas)ont été contraintes de recourir au marché des changesparallèle (et d’acheter des dollars des États-Unis à plusde 700 dollars zimbabwéens l’unité à la mi-2002) afind’importer des matières premières et des pièces

détachées. Cette situation a conduit à une flambée desprix et, partant, a exacerbé la spirale inflationniste. Lesentreprises qui ne sont pas en position d’augmenter leursprix en raison du contrôle en vigueur depuis octobre2001 pour certains produits de base, ont beaucoup demal à couvrir leurs coûts de production. Les secteursles plus touchés sont la boulangerie, le sucre, l’huile decuisson, l’ameublement et l’industrie céréalière. Parconséquent, le secteur de la transformation opèrenettement en deçà de ses capacités (le taux d’utilisationmoyen des capacités est d’environ 50 pour cent) et aumoins 500 entreprises ont mis la clé sous la porte en2000 et 2001. Outre des reculs enregistrés dans l’agro-alimentaire et les boissons, les machines et le transportont aussi souffert de la baisse de la demande desagriculteurs pratiquant l’agriculture de rapport à lasuite de la réforme agraire et de la gestion par l’État desdroits de propriété. Ces incertitudes liées à la réformeagraire et, plus généralement, aux inquiétudesfondamentales concernant la politique économiquedu pays, ont sapé la confiance des milieux d’affaires etentraîné un repli persistant des investissements privés.

Selon les estimations, l’agriculture a reculé de12.9 pour cent en 2001. Ce déclin marqué de laproduction est imputable à des précipitations erratiques(alternance de périodes de sécheresse et d’inondationsà la mi-saison en 2000/01) et à la perturbation desactivités agricoles due à l’occupation illégaled’exploitations. Les performances de ce secteur semblent

■ Afrique ■ Zimbabwe

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Figure 2 - PIB par habitant au Zimbabwe et en Afrique (en dollars courants)

Source : Estimations des auteurs sur la base des données du FMI.

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Zimbabwe

■ Volume

-25 -20 -15 -10 -5 0 5 10

Agriculture

Industries manufacturières

Mines

BTP

Services publics

Services financiers et assurance

Transports, stockage et communications

Hôtels et restaurants

Eau et électricité

Immobilier

Autres services

PIB au coût des facteurs

Figure 4 - Contributions à la croissance du PIB en 2001a

a. Les données pour la figure 4 sont aux prix des facteurs. Par conséquent, la croissance du PIB réel diffère du PIB réel aux prix du marchérapporté au tableau 1. Aucune donnée n’existe sur l’évolution des prix sectoriels.

Source : Estimations des auteurs sur la base des données des autorités nationales.

Agriculture

Mines

Industries manufacturières

BTPServices publics

Hôtelset restaurants

Autres services

ImmobilierÉlectricité et eau

Services financierset assurance

Transports, stockageet communications

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Figure 3 - Ventilation sectorielle du PIB en 2001

Source : Estimations des auteurs sur la base des données des autorités nationales.

s’être encore détériorées en 2002 (de 21 pour cent) àla suite de la grave sécheresse qui a frappé le pays dejanvier à mars, du fléchissement de la productivitéagricole dû au programme de réinstallation en courset de la pénurie aiguë de devises qui freine l’importation

d’intrants essentiels. La production de maïs, qui a cédé33 pour cent (1.4 million de tonnes environ en2000/01, contre 2.1 millions en 1999/2000), auraitperdu 66.2 pour cent lors de la campagne 2001/02(pour atteindre 0.49 million de tonnes). Le blé d’hiver

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devrait lui aussi connaître une forte baisse(165 000 tonnes, contre 282 000 l’année précédente),à cause du processus de redistribution des terres. Cettevariété de blé est en effet presque exclusivement cultivéesur les très grandes exploitations commerciales équipéesde systèmes d’irrigation. Le Zimbabwe est parconséquent en proie à une grave crise alimentaire :environ la moitié de la population a besoin d’une aidealimentaire. L’office de commercialisation des céréales(Grain Marketing Board – GMB) ne peut répondre qu’àune infime partie des besoins du pays et la fourniturede céréales est irrégulière. En avril 2002, le présidentdu Zimbabwe a déclaré l’état de catastrophe pourtoutes les terres communales, les zones de réinstallationet les zones urbaines et, en juillet 2002, les pouvoirspublics ont mis en place un programme d’aidealimentaire et augmenté l’enveloppe budgétaire destinéeà l’importation de céréales et autres intrants. Cependant,la capacité d’importation du pays est fortement limitéepar l’importante pénurie de devises. Le déficit encéréales à la mi-2002 atteignait environ 1.8 million detonnes, tandis que les importations prévues par l’Étatse montaient à 300 000 tonnes et les engagements autitre de l’aide alimentaire à 100 000 tonnes, les pouvoirspublics ayant accepté les aliments génétiquementmodifiés.

La pénurie de devises est aggravée par lesperformances médiocres de la production et desexportations de tabac et de coton, qui constituent lesprincipales sources de change. La production de tabaca reculé de 15.4 pour cent en 2000/01 du fait del’occupation illégale des terres et de la saisie denombreuses exploitations commerciales. Les prévisionspour la prochaine récolte sont peu encourageantes,car les investissements ont dégringolé en raison desincertitudes qui subsistent. Les ventes de graines detabac se sont considérablement réduites par rapport àl’année dernière et, par conséquent, la préparation desterres en vue de la prochaine récolte n’a pas été faitecorrectement. Ce comportement prudent s’expliqueégalement par les difficultés d’accès aux crédits pourfinancer la prochaine campagne. Les banques sont eneffet peu disposées à accorder des lignes de crédit auxagriculteurs dont les terres sont occupées ou inscritessur la liste des acquisitions forcées. Les règles de

commercialisation et de financement fixées par labanque centrale continuent en outre de peser sur lesplanteurs de tabac. Même si cette culture constitue laprincipale source de devises du pays, les planteurs sontpayés en monnaie locale (à un taux de change fortementsurévalué). Toutes les devises générées par la vente auxenchères sont contrôlées par la banque centrale etl’ensemble des planteurs de tabac ne reçoit qu’uneportion des devises, limitée à 20 pour cent, pourl’importation d’intrants. La fragilité de ce secteurprovient également de la faiblesse des prix en dollarszimbabwéens payés aux producteurs au début duprocessus annuel d’adjudication (mai 2002), en raisonde la conversion du prix plancher en dollars des États-Unis (au taux de change officiel surévalué d’un dollardes États-Unis pour 55 dollars zimbabwéens). Poursoutenir les ventes déprimées de tabac et pour dégagerdavantage de recettes pour l’importation de nourriture,les pouvoirs publics ont alors progressivement dévaluéla monnaie pour aider ce secteur. Depuis juillet 2002,les planteurs reçoivent une subvention et peuventappliquer un taux de change de 159 dollarszimbabwéens pour chaque dollar des États-Unis qu’ilsgagnent dans les ventes aux enchères. Dans un contextede quasi-doublement des coûts de production, unetelle mesure leur permet quand même de dégager unepetite marge.

La crise du secteur minier, qui a débuté en 2000,s’est aggravée en 2001. La production d’or – représentantenviron la moitié de la valeur totale du secteur minier –a cédé 18.2 pour cent en 2001, passant de 22.07 à18.04 tonnes entre 2000 et 2001, sous l’effet conjuguéde la baisse des cours internationaux et d’un taux dechange surévalué. Contraints de vendre l’intégralité deleur production à la banque centrale, les producteursd’or doivent aussi acheter une partie des intrantsimportés à un prix majoré sur le marché des changesparallèle. Les problèmes de viabilité provoqués par undécalage accru entre dépenses et recettes ont poussécertaines entreprises à réduire leurs activités. Nombred’entre elles ont même dû fermer leurs portes. Pour éviterde nouvelles faillites, le gouvernement a mis en placeen avril 2001 un mécanisme de soutien des cours del’or, qui a été revu quatre fois à la hausse jusqu’en mars2002, date à laquelle il a atteint un prix plancher de

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531 dollars des États-Unis l’once, contre un coursinternational de 296 dollars des États-Unis. L’aidefournie par ce mécanisme de soutien des cours restetoutefois très limitée dans un contexte de forte inflationet de surévaluation persistante du taux de change. Lasituation est aggravée par l’effondrement desinvestissements étrangers dû à l’environnementpolitique. Selon les estimations, la production de 2002a reculé de 22 pour cent.

Après une progression inégalée pendant lesannées 90, le tourisme a accusé un recul considérableen 2000 en raison de l’aggravation de la criseéconomique et de l’instabilité politique du pays avantles élections présidentielles de mars 2002. Le déclin s’estpoursuivi en 2001 : cette activité a perdu 38 pour cent,ce qui a accentué la pénurie de réserves de change. Ils’agit du pire repli consécutif jamais enregistré par cesecteur depuis l’indépendance du Zimbabwe. Lecontexte politique actuel freine le développement dutourisme et les premières estimations pour 2002prévoient un nouveau fléchissement.

En revanche, l’immobilier aurait légèrementprogressé en 2001, de 6.5 pour cent, grâce laréorientation des investissements vers ce secteur audétriment des activités de production, phénomène quia gonflé artificiellement les prix de l’immobilier. Lesecteur a par ailleurs bénéficié d’une demande accruede la part des ressortissants du pays vivant à l’étrangeret à la recherche de biens immobiliers, qui règlent leursachats en devises fortes et au taux du marché parallèle.

Le secteur financier, qui entre pour 9 pour centenviron dans le PIB, fait lui aussi preuve d’une certainesolidité. Sa croissance réelle a avoisiné 2 pour cent en2001. Cependant, elle est principalement imputable auxdistorsions créées par la surévaluation du taux de changeet aux possibilités de dégager des bénéfices en effectuantdes transactions en devises sur le marché parallèle. Lesbanques sont par ailleurs les premiers dépositaires dela dette publique. De plus, la politique de faibles tauxd’intérêt menée par la banque centrale a conduit àune hausse vertigineuse du marché boursier,indépendamment des fondamentaux économiques dessociétés dont les titres sont négociés. Même si leZimbabwe a largement libéralisé sa balance desopérations courantes, conformément à l’article VIIIdu FMI, son compte de capital reste soumis à quelquescontrôles. Les investissements extérieurs desZimbabwéens nécessitent l’approbation de la banquecentrale. Cette situation, associée à la pénurie de devises,a incité la plupart des investisseurs institutionnels àutiliser la bourse du Zimbabwe (Zimbabwe StockExchange – ZSE) pour se couvrir contre les rendementstrès négatifs du marché monétaire. Le dynamisme dela ZSE contraste fortement avec l’effondrement généralde la productivité et signale l’existence d’une importantebulle boursière.

Cependant, le secteur financier commence àprésenter des signes de récession, sous l’effet de lacontagion d’un secteur productif en déclin. La crise liéeà la réforme agraire pose de graves problèmes, tant entermes de prêts non productifs, du fait de l’éviction des

Tableau 1 - Composantes de la demande (en pourcentage du PIB)

Source : Estimations et prévisions des auteurs sur la base des données du FMI et des autorités nationales.

1995 1999 2000 2001 2002 (e) 2003 (p)

Formation brute de capital 24.5 15.1 14.0 0.4 1.8 2.5Secteur public 4.6 1.9 1.6 2.4 3.1 3.2Secteur privé 19.9 13.2 12.4 -2.0 -1.3 -0.7

Consommation 78.2 85.4 87.2 100.8 99.5 98.8Publique 17.8 15.4 24.8 33.8 33.0 34.0Privée 60.4 70.0 62.4 67.0 66.5 64.8

Solde extérieur -2.7 -0.4 -1.2 -1.2 -1.3 -1.4Exportations 37.8 46.8 30.3 23.3 9.4 4.0Importations -40.4 -47.2 -31.6 -24.6 -10.7 -5.3

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propriétaires des exploitations commerciales, que derisques liés à l’obligation, imposée par les pouvoirspublics, de prêter aux exploitants nouvellementréinstallés. En outre, le contrôle public accru sur lemarché des changes risque de réduire les gains réaliséspar les banques sur le marché parallèle.

La crise récente modifie la structure de la demande.Depuis 2001, la formation brute de capital a fortementrégressé, en conséquence des déséquilibres macro-économiques et des perturbations qui ont touché lesactivités agricoles. La formation brute de capital fixeprivée est notamment négative depuis 2001, du fait desdestructions de matériel agricole pendant l’occupationillégale des exploitations et du transfert de propriétésdans le cadre de la réforme agraire. Depuis 2002, lesschémas de consommation se sont dégradés en raisonde la hausse de l’inflation, tandis que l’augmentationbudgétée des dépenses publiques a été considérablementfreinée par la pénurie de devises.

La demande extérieure évolue fortement elle aussi.Déjà fragiles, les exportations ont été victimes d’unepolitique de change erratique, tandis que la pénurie dedevises étrangères a paralysé les importations. Selonles estimations, les importations sont ainsi passées de47.2 à 10.7 pour cent du PIB entre 1999 et 2002 etles exportations sont tombées à 9.4 pour cent (contre46.8 pour cent en 1999). Dans un contexte desurévaluation encore plus marquée du taux de changeet de sévères pénuries de devises, les exportations et lesimportations devraient continuer de se contracter en2003.

Politique macro-économique

Politique budgétaire et monétaire

Ces dix dernières années, la situation budgétaire duZimbabwe s’est caractérisée par un déficit budgétaireélevé et persistant, représentant environ 8 pour cent duPIB en moyenne. En 2000, le déficit global (dons ycompris) a atteint près de 21 pour cent du PIB,principalement en raison d’augmentations conséquenteset non budgétisées des traitements des fonctionnaires,

octroyées dans la perspective des élections législativesde juin 2000.

Une inflation soutenue, un taux de change surévalué,la quasi-absence d’un accès au financement extérieur etle creusement considérable du déficit ont modifié lastructure de la dette publique. En 2000, la dette extérieurereprésentait 41 pour cent de l’endettement public total(et 38 pour cent en 2001), contre 78 pour cent à peinedeux ans auparavant. La part de l’endettement publicintérieur a progressé dans les mêmes proportions et, en2000, les paiements d’intérêt sur la dette intérieure ontabsorbé près de 60 pour cent des recettes totales. En 2001,l’État a réussi à réduire les pressions liées au service dela dette grâce à une politique de rééchelonnement, quiconsistait à passer de bons du Trésor à moins de sixmois à des emprunts d’État à plus long terme et à destaux inférieurs. Fin 2001, la part de la dette à court termeest ainsi tombée à 67 pour cent, contre 94 pour centfin 2000 et (nous y reviendrons dans la section consacréeà la politique monétaire) les rendements effectifs moyensdes bons du Trésor sont passés de 65-70 pour cent en2000 à 11-27 pour cent en 2001. Ce profondchangement a accordé un répit aux autorités fiscales.Grâce à cette stratégie et à des dépenses plus faibles queprévu en raison du manque de devises, le déficitbudgétaire est ressorti à 8.1 pour cent du PIB en 2001,contre un objectif de départ de 15.5 pour cent (en2001, les paiements d’intérêt représentaient environ30 pour cent des recettes totales).

Le budget 2002, adopté en novembre 2001, visaitun déficit (hors dons) de 14.9 pour cent du PIB. Ilprévoyait d’importants emprunts intérieurs financéspar un nouvel accroissement de la dette à moyen etlong termes, à 40 pour cent au moins. Les dépensespubliques totales devaient augmenter et passerd’environ 35 à 42 pour cent du PIB, du fait de la haussedes enveloppes budgétaires allouées aux réformesagraires et aux traitements des fonctionnaires. Lesrecettes devaient, elles, progresser de 3 pour cent grâceà l’action des autorités fiscales désormais pleinementopérationnelles. Cependant, ces projections reposentsur les estimations officielles d’une contraction duPIB limitée à 5.2 pour cent. Tout l’exercice est faussépar le fait que les prévisions des pouvoirs publics sont

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très aléatoires. Néanmoins, à la mi-2002 et malgré unebaisse persistante des droits de douane à l’exportation,les recettes ont grimpé d’environ 16 pour cent(115 milliards de dollars zimbabwéens, contre unobjectif de 99.5 milliards)1 grâce aux impôts versés parles entreprises et les particuliers – les efforts derecouvrement et les augmentations de prix expliquentce bon résultat. Dans le même temps, les dépensesn’ont pas atteint les niveaux escomptés (142 milliardsde dollars zimbabwéens environ contre un objectif de191 milliards, soit un manque à gagner de près de25 pour cent)2 provoqué par la pénurie de produitsde base et de devises. En juin 2002, la faiblesse destaux du marché a permis aux pouvoirs publicsd’économiser 51 pour cent sur les intérêts liés auremboursement de la dette. Face aux graves pénuriesde produits alimentaires dues à la sécheresse de2001/02, un collectif budgétaire a été voté en juillet2002 afin de financer les nécessaires importations dedenrées. Des fonds supplémentaires ont égalementété alloués pour venir en aide aux agriculteurs réinstalléset pour ajuster le niveau de vie des fonctionnaires.Malgré ces dépenses additionnelles, le déficit 2002devrait être inférieur à l’objectif, en raison de l’impactcombiné de la baisse des taux et de la pénurie dedevises.

Depuis janvier 1999, c’est l’accroissement du besoinde financement de l’État qui oriente la politiquemonétaire. Ce dernier a fait essentiellement appel auxbons du Trésor et aux lignes de crédit proposées par labanque centrale (Reserve Bank of Zimbabwe – RBZ).Cette stratégie du secteur bancaire pour financer ledéficit budgétaire a alimenté la croissance annuelle dela masse monétaire, qui est passée de 56.9 pour centen janvier 2001 à 102.7 pour cent à la fin de l’année.Les chiffres récemment communiqués par la RBZmontrent que la croissance annuelle de M3 a étésignificative, passant de 99.5 pour cent en janvier 2002à 124 pour cent en septembre de la même année. Unetelle expansion au moment où la production de bienset de services se contractait a fait grimper l’inflation de103.8 pour cent en novembre 2001 à un record absolude 175.5 pour cent en novembre 2002.

Avec l’entrée en vigueur d’une disposition obligeantles investisseurs institutionnels, tels que les assurances,les régimes de retraite et les fonds communs deplacement, à détenir 45 pour cent d’emprunts d’Étatà long terme, la RBZ a pu ramener le taux d’intérêt desbons du Trésor à 90 jours de 68 pour cent en décembre2000 à 27 pour cent à la fin 2001 (contre un point basà 11.4 pour cent en avril 2001). Par ailleurs, la banque

Tableau 2 - Tableau des opérations financières de l’État (en pourcentage du PIB)

a. Seuls les principaux postes de recettes et de dépenses sont détaillés.Source : Estimations et prévisions des auteurs sur la base des données du FMI et des autorités nationales.

1995 1999 2000 2001 2002(e) 2003(p)

Recettes totales (avec dons) a 28.2 29.2 28.1 26.6 26.7 27.6Recettes fiscales 23.4 26.7 25.4 24.6 25.1 26.0

Dépenses totales (et prêts nets) a 44.6 38.7 48.8 34.7 35.9 37.0Dépenses courantes 39.1 34.7 46.0 32.2 32.4 33.6

Sans les intérêts 29.9 24.4 29.0 24.3 27.7 28.4Salaires 11.1 13.5 16.9 13.4 13.2 13.7Paiements d’intérêt 9.3 10.3 17.1 7.9 4.7 5.2

Dépenses en capital 2.9 2.8 1.8 2.5 3.1 3.3

Solde primaire -7.2 0.9 -3.6 -0.2 -4.5 -4.3Solde global -16.4 -9.5 -20.7 -8.1 -9.2 -9.5

1. Équivalant respectivement à 2 milliards et 1.8 milliard de dollars des États-Unis, au taux de change officiel (55 dollars zimbabwéens

pour un dollar des États-Unis).

2. Équivalant respectivement à 2.8 et 3.5 milliards de dollars des États-Unis, au taux de change officiel (55 dollars zimbabwéens pour un

dollar des États-Unis).

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Zimbabwe

centrale a mis les réserves obligatoires à la dispositiondes banques commerciales et des banques d’affaires, pourque ces établissements puissent accorder des prêts autaux préférentiel de 30 pour cent aux entreprises deproduction et de 15 pour cent aux secteursd’exportation. En octobre 2002, ces taux ont été ramenésà respectivement 15 et 5 pour cent. Au premier semestre2002, le taux du marché atteignait en moyenne32.5 pour cent pour les prêts et 17.6 pour cent pourles dépôts. Dans un contexte d’inflation atteignant enmoyenne 116 pour cent sur les six premiers mois del’année 2002, les taux d’intérêt réels fortement négatifsont pesé sur la capacité des fonds de pension, descompagnies d’assurance et des établissements de dépôtà rémunérer investisseurs et épargnants. De plus, lesinvestisseurs se désintéressent des activités de productionau profit des emprunts destinés à la consommation ouà la spéculation, notamment sur les devises, les actionset l’immobilier, provoquant une envolée des prix de cesactifs. Pour soutenir la stratégie du gouvernement vis-à-vis de la dette publique, la banque centrale devraitpoursuivre sa politique monétaire actuelle aussilongtemps que possible.

Malgré les efforts de rééquilibrage du marché, ledollar zimbabwéen reste fortement surévalué. En août2000, la RBZ a abandonné la parité fixe de 38 dollarszimbabwéens pour un dollar des États-Unis, appliquéedepuis janvier 1999. La monnaie nationale a subi unedévaluation ponctuelle de 24 pour cent ainsi que desdévaluations périodiques en fonction des écarts de tauxd’inflation avec les différents partenaires commerciaux.Malgré une dépréciation de 31 pour cent par rapportau dollar des États-Unis à la fin 2000, le dollarzimbabwéen est resté supérieur à sa valeur d’équilibre,fixée à 55 dollars zimbabwéens pour un dollar desÉtats-Unis. Dans un contexte d’inflation élevée parrapport à celle des principaux partenaires commerciaux,ce niveau de change a des répercussions majeures surla compétitivité des exportations, les rentrées de deviseset les performances économiques générales. En outre,la politique monétaire introduite en 2001 et qui consisteà baisser artificiellement les taux d’intérêt a accru lespressions sur le taux de change. Les importateurspeuvent désormais emprunter à un taux d’intérêt réelnégatif. En conséquence, sur le marché des changes

parallèle qui jouait jusqu’ici un rôle essentiel dans lefonctionnement de l’économie, les cours ont flambé àla mi-2001, passant de 25 pour cent vers la fin 2000à 635 pour cent en décembre 2001. Le dollar des États-Unis s’est ainsi échangé à plus de 400 dollarszimbabwéens. Après avoir avoisiné 320 dollarszimbabwéens pour un dollar des États-Unis juste avantl’élection présidentielle, le taux de change parallèle s’estensuite déprécié, tombant à 850 dollars zimbabwéensvers la fin juin 2002, ce qui traduit le brusquegonflement de la demande de devises provoquée parune perte générale de confiance des milieux d’affaires.Cependant, grâce au renforcement des contrôles sur lesbanques commerciales et les bureaux de change,soupçonnés d’être impliqués dans des activités sur lemarché parallèle, la monnaie locale s’est raffermie enjuillet 2002, pour atteindre quelque 680 dollarszimbabwéens pour un dollar des États-Unis. Cetteprime de 1 136 pour cent par rapport au taux de changeofficiel offre aux spéculateurs une importante marge demanœuvre pour effectuer des opérations d’arbitrage,qui viennent à leur tour alimenter le marché parallèle.Malgré ce scénario inquiétant, le taux de change actueldevrait être maintenu en 2003, car le gouvernementest fermement opposé à une dévaluation, comme l’amontré le remaniement ministériel d’août 2002. Eneffet, le ministre des Finances, Simba Makoni, uniquepartisan de la dévaluation, a été remplacé par sonprédécesseur, Herbert Murewa, favorable à l’indexationactuelle de la monnaie.

Comme nous l’avons indiqué plus haut, l’inflations’est envolée en 2001 et 2002, sous l’effet de pressionscontraires de la demande et des coûts. D’un côté, leniveau élevé de la liquidité dans une économie en replia suscité des tendances spéculatives, faisant augmenterles cours des actions et les prix de l’immobilier. Lapénurie persistante de devises a elle aussi contribué àla pression inflationniste. Elle a contraint les producteursà se procurer des devises sur le marché parallèle à destaux élevés et ce coût a ensuite été répercuté sur lesconsommateurs. En outre, les attentes inflationnistesdues à l’instabilité macro-économique se sontconcrétisées, car les agents économiques ont relevéleurs prix par anticipation d’un renchérissement desautres intrants essentiels, comme la main-d’œuvre et

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les matières premières. Afin d’endiguer l’inflation, legouvernement a mis en place un contrôle direct surcertains prix. Le GMB est redevenu un monopole enjuin 2001, qui contrôle le prix et la distribution du maïset du blé et, depuis octobre 2001, ses pouvoirs ont étéétendus aux prix de gros et de détail des autres produitsde base. Cette intervention n’a pas produit les effetsescomptés, car l’encadrement des prix a provoqué despénuries sur certains produits, ce qui a alimenté lemarché noir. Les rares produits de base sont doncvendus très cher.

En 2002, l’inflation s’établit en moyenne à 129 pourcent selon les estimations et devrait rester supérieure à100 pour cent en 2003, la politique budgétaire etmonétaire demeurant inchangée sur l’essentiel de lapériode étudiée.

Position extérieure

Malgré les efforts considérables déployés ces dixdernières années pour libéraliser les échanges, leZimbabwe se caractérise toujours par un régimecommercial assez contraignant, notamment en ce quiconcerne le compte de capital. Le mécanisme derépartition des devises, assoupli au début de la décennie,a depuis peu été rétabli sous la forme de stricts contrôlesvisant à réguler la croissance des importations. Lesexportations restent assujetties à un système de permiset de monopoles : le GMB détient le monopole desexportations de maïs et seule la RBZ a le droit d’exporterl’or. La commission de commercialisation des minerais(Minerals Marketing Council of Zimbabwe – MMCZ)contrôle l’essentiel des exportations de minerais duZimbabwe. En 2001, plusieurs mesures ont étéintroduites afin de compenser la perte de compétitivitéet de mettre un frein aux activités du marché parallèle.Ainsi, la RBZ a relevé à 40 pour cent le taux de remiseobligatoire des recettes d’exportation. Les exportateursdoivent donc rapatrier via le marché officiel une partiedes recettes réalisées à l’étranger. Étant donné l’importantécart entre le taux de change officiel et celui du marchéparallèle, cette obligation s’apparente à une taxe pourles exportateurs. En mars 2001, les autorités ont rehausséle niveau de protection en augmentant les droits dedouane sur certains produits manufacturés pour lesquels

il existe des substituts produits localement – c’est parexemple le cas dans l’alimentation – et réduit les tauxsur certaines matières premières et certains biensd’équipement, essentiellement des machines.Cependant, à la mi-2002, les droits sur les importationsde maïs et de blé ont été suspendus afin de faire baisserle prix du maïs et d’atténuer les graves problèmesprovoqués par la sécheresse.

Depuis 2000, la position extérieure du Zimbabwes’est considérablement dégradée sous l’effet combinédu gel de l’aide étrangère et du recul des exportations.Une forte inflation, en présence d’un taux de changefixe, a mis en péril la compétitivité et provoqué unecontraction de 6.6 pour cent des exportations en 2001.Plus précisément, la pénurie de devises a obligé lesentreprises à recourir au marché parallèle pour seprocurer des matières premières, des produits chimiques,de l’outillage et des équipements, ainsi que descarburants et de l’électricité. Cette augmentation descoûts de production pénalise un secteur minier etmanufacturier déjà en difficulté. En raison de l’instabilitépolitique actuelle, les recettes du tourisme ont dégringoléen 2001, exerçant une influence délétère sur la balancedes services, qui est passée d’un excédent de 21 millionsde dollars des États-Unis en 1999 à un déficit de198 millions. La balance des opérations courantesaffiche ainsi un déficit équivalant à 2.7 pour cent duPIB. Les exportations et les importations devraientcontinuer de se contracter en 2002 et 2003.

Selon les estimations, les exportations agricoles, debiens manufacturés et de produits miniers ont encorebaissé en 2002. La pénurie de devises et les difficultésd’accès à la plupart des lignes de crédit limitent toujoursfortement la capacité d’importation du Zimbabwe. Lesimportations de produits alimentaires nécessaires pourcompenser le recul de la production de denrées deconsommation courante ont représenté environ 19 pourcent du total en 2002, réduisant les fonds disponiblespour d’autres importations telles que les matièrespremières, les carburants et les biens d’équipements.

L’évolution négative des comptes courants estaggravée par la dégradation du compte de capitalenregistrée depuis 2000. Les entrées de capitaux à court

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et à long termes, ainsi que les investissements étrangersont considérablement régressé en raison d’un contextemacro-économique et socio-politique défavorable etde l’accentuation de la perte de confiance des milieuxd’affaires. L’amenuisement des financements accordéspar les bailleurs de fonds explique lui aussi ladétérioration du compte de capital.

Depuis son indépendance, le Zimbabwe faitlargement appel aux bailleurs de fonds internationauxinstitutionnels et commerciaux. Même si, sur le papier,l’encours de sa dette extérieure est resté inchangé depuis

1997, en raison de la réduction des aides et des prêtsoctroyés par les organismes multilatéraux, les créancesdu Zimbabwe vis-à-vis de l’étranger ont fortementprogressé avec l’accumulation d’arriérés. L’encours dela dette extérieure totale – hors arriérés – était descenduà 50.4 pour cent du PNB en 2001, après une netteaugmentation en 1999 (88.7 pour cent du PNB). Ladette extérieure, publique pour environ 70 pour cent,est pour l’essentiel à moyen et à long termes. La moitiéa été contractée auprès d’institutions multilatéralescomme la Banque mondiale et le FMI et le reste auprèsde gouvernements étrangers et, dans une moindre

Tableau 3 - Comptes courants (en pourcentage du PIB)

Source : Estimations et prévisions des auteurs sur la base des données du FMI et des autorités nationales.

1995 1999 2000 2001 2002(e) 2003(p)

Balance commerciale 1.2 4.6 3.7 0.8 -0.1 -0.6Exportations de biens (f.o.b.) 30.8 35.5 24.5 17.9 7.4 3.2Importations de biens (f.o.b.) -29.6 -30.9 -20.8 -17.1 -7.5 -3.7

Services -3.5 0.4 -1.5 -2.1Revenus des facteurs -4.5 -6.6 -5.3 -2.6Transferts courants 1.7 2.1 1.7 1.3

Solde des comptes courants -5.1 0.5 -1.4 -2.7

■ Dette/PNB Service/Exportations

0

9

18

27

36

45

54

63

72

81

90

200120001999199819971996199519941993199219911990

Figure 5 - Part de l’encours de la dette dans le PNB et ratio du service de la dette sur les exportations (en pourcentage)

Source : Banque mondiale.

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proportion, de créanciers privés. La pénurie de devisesde ces deux dernières années a rendu les remboursementsde plus en plus difficiles et, à la mi-1999, l’État n’a plusété en mesure d’honorer ses engagements. Les arriérésvis-à-vis de l’étranger sont ainsi passés de 197.5 millionsde dollars des États-Unis en 2000 à 762.7 millions en2001. A la mi-2002, les arriérés de remboursementvis-à-vis de l’étranger s’établissaient à environ 1.1 milliardde dollars des États-Unis, dont plus de 450 millionssont dus à des créanciers multilatéraux. En juin 2002,face à l’accumulation d’arriérés (plus de 132 millionsde dollars des États-Unis), le FMI a suspendu son aidetechnique.

Questions structurelles

Avec une économie relativement diversifiée parrapport aux autres pays d’Afrique, le Zimbabwe secaractérisait jusqu’au début des années 90 par uneimportante intervention de l’État et de sévères contrôlesdes prix. La libéralisation progressive de l’économie, dansles années 90, a réduit cet interventionnisme.Néanmoins, les secteurs clés sont toujours surveillés deprès et le ralentissement économique n’a pas aidé à lamise en œuvre des réformes prévues.

Même si la décision de privatiser les entreprisespubliques a été annoncée dans le cadre du processusde libéralisation amorcé en 1991, l’agence deprivatisation du Zimbabwe (Privatisation Agency –PAZ) n’a vu le jour qu’en septembre 1999. Aucun textede loi ne vient conforter son autorité, mais elle estdirectement placée sous l’autorité du conseil desministres. En effet, il s’agit d’une institution semi-autonome, qui siège au même endroit que la présidenceet le conseil des ministres (Office of the President andCabinet – OPC) et dont le directeur rend directementcompte au conseil des ministres par le biais du secrétairegénéral. Le principal objectif du programme deprivatisations était de supprimer l’immense ponctionbudgétaire exercée par les entreprises publiques et depromouvoir l’autonomisation économique au niveaulocal. Les plus grandes entreprises d’État (environ dixsur un total de 45) se concentrent dans les servicespublics, notamment dans l’énergie (production et

distribution), le transport aérien et ferroviaire et d’autressecteurs stratégiques comme les télécommunications,le développement industriel, les services financiers etla banque. En 2002, le programme de privatisations nedisposait toujours pas de cadre réglementaire global,même si la PAZ a publié un manuel qui en fixe les règles.Ce manuel formule néanmoins des principes générauxet reste subordonné à la loi sur les entreprises ainsi qu’àla législation spécifique aux différents secteurs. Laprivatisation est donc menée au cas par cas, les secteursadoptant des approches différentes pour créer leurspropres autorités réglementaires. Elle a commencé parla cession accélérée des sociétés inscrites à la bourse. En2001, sept des 12 entreprises concernées ont été vendues,parmi lesquelles Cottco (coton), ZimRE (réassurance)et la Zimbabwe Development Corporation (ZDC). Lacession de plusieurs autres entreprises de services publics(les compagnies aériennes et les chemins de fer sont lespremiers sur la liste) interviendra dans un deuxièmetemps. Les organismes parapublics à fonction sociale(comme les universités et les établissementsd’enseignement supérieur) doivent également êtreprivatisés à terme.

Le processus des dix derniers années est resté lentet, en raison de la nature de ses pouvoirs, la PAZ sembleavoir été marginalisée par un certaine ingérence politiquedans l’attribution des entreprises publiques. En 2001,les recettes des privatisations ne représentaient que32 pour cent de l’objectif, soit 7.1 milliards de dollarszimbabwéens au lieu des 22 milliards prévus. Selon lebudget 2002, les recettes en fin d’année devaientavoisiner 40.9 milliards de dollars zimbabwéens. Or,en novembre 2002, elles n’atteignaient que10.2 millions.

Le processus de privatisations se heurte en effet àde nombreux obstacles liés à l’environnement macro-économique actuel. La participation étrangère est enparticulier freinée par la dégradation de la situationpolitique et économique ainsi que par la politique deschanges, qui fait fortement grimper les valorisations endollars des États-Unis au taux officiel. En outre, avantde pouvoir effectivement mettre en œuvre la privatisationdes entreprises de services publics, il est nécessaired’adopter une loi globale et harmonisée dans ce domaine.

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Depuis l’indépendance du pays, la distribution trèsinégale des terres a toujours menacé la cohésion socialedu pays et, à partir de juin 2000, la réforme agraire estdevenue la priorité absolue des pouvoirs publics. Pourmieux comprendre la crise agraire que connaît leZimbabwe, il est nécessaire d’analyser les différentesétapes du processus de redistribution des terres. Entrel’indépendance politique du pays, en 1980, et laredistribution massive, qui est intervenue en 2001 et2002, la situation était très déséquilibrée : quelque4 500 grandes exploitations commerciales, la plupartappartenant à des agriculteurs blancs, occupaient11 millions d’hectares sur les terres les plus fertiles etles mieux irriguées du pays ; à l’opposé, 1.2 million defamilles, soit environ la moitié de la population, separtageaient 16.3 millions d’hectares de terrescommunales de mauvaise qualité et vulnérables auxsécheresses. En outre, selon la Banque mondiale, environ40 à 50 pour cent des terres arables à fort potentieln’étaient pas cultivées pour diverses raisons, dont lesrestrictions frappant la subdivision des parcelles,l’attribution de droits d’utilisation de l’eau et l’absencede taxe foncière. Le processus de réinstallation acommencé peu après l’indépendance dans le but deparvenir à une répartition plus équitable des terres.Néanmoins, après une période de réinstallation rapide(1980-84), le processus s’est ralenti au milieu desannées 80. En conséquence, jusqu’en 1997, legouvernement n’avait redistribué que 3.5 millionsd’hectares de terres commerciales, équivalant à 10 pourcent des terres arables et à 25 pour cent des terresoccupées par les Blancs avant l’indépendance. Dansun contexte de marasme économique et de manque demoyens pour financer le coûteux processus deréinstallation, le mécontentement politique et populairecroissant a conduit les pouvoirs publics à adopter desmesures plus radicales. En novembre 1997, le systèmede vente de gré à gré est abandonné et remplacé par lerachat obligatoire, annoncé par le gouvernement, de1 471 exploitations commerciales (près de 40 pourcent des terres possédées par les Blancs). Cette décisiona plongé le pays dans une grande confusion. La situations’est aggravée au cours des trois dernières années, malgréla conférence internationale des donateurs qui s’esttenue à Harare en septembre 1998 et au cours delaquelle les principaux bailleurs de fonds, le

gouvernement et les parties prenantes sont tombésd’accord sur une phase initiale de deux ans. A la mi-2000, le gouvernement a lancé son programme dedéveloppement accéléré concernant 5 millions d’hectareset 150 000 familles. Contrairement à l’ancienprogramme qui concernait 3.5 millions d’hectares etla réinstallation de 73 000 familles, ce nouveau dispositifprévoyait une indemnisation en fonction de la valeurajoutée et non de la valeur proprement dite de la terre.Cependant, parallèlement au processus officiel, certainesexploitations ont été occupées illégalement en dépit deleur statut juridique inscrit dans le programme deréforme agraire. Même si l’accord d’Abuja, signé enseptembre 2001 par les ministres du Commonwealth,prévoyait le retrait des colons des exploitations noninscrites – ou illégalement inscrites – sur la liste, ainsique le rétablissement de l’État de droit et une transitionpacifique et en douceur, l’occupation et ledémantèlement d’exploitations se sont poursuivis.Depuis l’élection de mars 2002, le gouvernementaccélère le processus de redistribution des terres etélargit les paramètres du programme. Ainsi, la loi surl’acquisition des terres, amendée en mai 2002, a conféréà l’État l’intégralité des droits sur les terres inscrites surla liste des acquisitions. Par ailleurs, cette loi réviséeimpose aux exploitants dont les biens ont été inscritssur la liste de cesser toute activité et de partir dans lestrois mois. Cette loi jette aussi les bases du programmeAgriculture, Technical and Extension Service qui doitsoutenir le développement de l’irrigation, de lamécanisation agricole et de la formation pour lesexploitants qui viennent de se réinstaller. Selon leschiffres officiels, le gouvernement avait répertorié5 153 exploitations pour l’acquisition et la réinstallationen juillet 2002, représentant une superficie totale de9.8 millions d’hectares. Sur ce total, 6.2 millionsd’hectares ont été attribués à près de 210 000 ménagespratiquant une agriculture de subsistance à petite échelle(3 à 6 hectares) et 3.6 millions d’hectares ont été cédésà 54 600 nouveaux exploitants pratiquant uneagriculture commerciale (de 50 à 300 hectares).Concernant le nombre d’exploitations inscrites sur laliste, le syndicat de l’agriculture commerciale(Commercial farmers Union – CFU) présente desdonnées légèrement différentes : à compter du lancementde la réforme accélérée en juillet 2000, un total de

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3. Le délai a expiré le 10 août 2002 pour 2 900 exploitations, mais la plupart des agriculteurs ont défié l’ordre et nombre d’entre eux sont

recherchés par la police. Une nouvelle loi adoptée en septembre oblige les agriculteurs à quitter leurs terres sous une semaine à

compter de la réception du mandat d’expulsion, et non plus sous 90 jours comme prévu initialement.

4. Les effets agricoles concernent le financement à court terme des fonds de roulement alors que les obligations agricoles, dont les

échéances prévues sont fixées à 3-5 ans, sont censées financer le développement des infrastructures.

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5 909 exploitations commerciales (10.5 millionsd’hectares) sur 6 032 (10.6 millions d’hectares) ontété inscrites sur la liste des acquisitions forcées. Environ51 pour cent des exploitations concernées ont reçu desmandats d’expulsion, demandant aux agriculteurs decesser toute activité et de quitter leur propriété dansun délai de trois mois3. Quelque 27 pour cent desexploitations ont ainsi été fermées, tandis que les autrespoursuivent leurs activités, entièrement ou partiellement.Le processus de réforme agraire n’a pas réussi à sortir350 000 travailleurs agricoles et 200 000 à300 000 journaliers occasionnels d’une situation difficile,car leur emploi est menacé par l’expulsion desagriculteurs blancs. On estime que seulement 2 pourcent des travailleurs agricoles ont reçu des terres dansle cadre de ce processus de réforme accéléré et la plupartd’entre eux n’ont pas été réembauchés par les agriculteursréinstallés. Dans un contexte de politisation croissantede la question des terres, il est fort probable que l’onenregistre l’année prochaine des pertes de productionconsidérables et un taux de chômage élevé chez lestravailleurs agricoles. En effet, comme nous l’avonsévoqué plus haut, le blé et le tabac sont menacés parles incertitudes entourant la question des terres : lesagriculteurs blancs restants ont d’immenses difficultésà obtenir des financements pour la prochaine campagne,car ils ne peuvent pas utiliser la terre et les enginsagricoles comme garanties. De plus, la plupart desagriculteurs réinstallés ne bénéficient pas des moyens,des infrastructures et du soutien des institutionsfinancières. La question du financement de la prochainecampagne est donc cruciale. L’État devra surtout aiderles exploitants qui viennent de se réinstaller à travaillerde façon viable en leur fournissant des engrais, dessemences, des infrastructures d’irrigation et un accèsau crédit. Pour ce faire, il a débloqué 8.5 milliards dedollars zimbabwéens et il est probable que les banquescommerciales seront sollicitées pour soutenirl’agriculture, en accordant un certain pourcentage deleurs prêts à ce secteur. Au début du 4e trimestre 2002,

les banques commerciales avaient déjà commencé àémettre des effets agricoles garantis par l’État pourfinancer les fonds de roulement des nouveauxexploitants. De source officielle, la vente de ces effetset celles des obligations agricoles entre novembre 2002et avril 2003 devrait rapporter 60 milliards de dollarszimbabwéens4.

Contexte politique et social

Après une campagne électorale marquée par laviolence, Robert Mugabe a été réélu en mars 2002 àla présidence du pays. Le scrutin n’aurait été ni libreni équitable. Son résultat a été contesté par le partid’opposition et condamné par la communautéinternationale. Le pays a été temporairement exclu duCommonwealth et les États-Unis et l’Union européennelui ont imposé des « sanctions intelligentes ». Malgrél’isolement dans lequel le pays s’est retrouvé et les effortsdes chefs d’État sud-africain et nigérian, MM. Mbekiet Obasanjo, pour proposer des négociations entre leparti au pouvoir, le ZANU-PF (Zimbabwe AfricanNational Union- Patriotic Front – Union nationaleafricaine du Zimbabwe-Front patriotique) et le partid’opposition, le MDC (Movement for DemocraticChange – Mouvement pour le changementdémocratique), le pays n’a pu sortir de l’impassepolitique. Le candidat du MDC, Morgan Tsvangirai,a déclaré qu’il ne participerait à un gouvernementprovisoire qu’à condition que cela conduise à denouvelles élections, alors que Robert Mugabe est peususceptible de quitter ses fonctions de son plein gré.Depuis l’élection, le gouvernement a activé le processuscontroversé de réforme accélérée et fait taire touteforme d’opposition dans la presse indépendante, lessyndicats et les partis politiques. Le mécontentementde la population, sensible depuis 2000 en raison del’impact négatif des réformes menées dans les années 90sur le niveau de vie de la population et la montée de

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la corruption parmi les dirigeants politiques, ne cessede s’amplifier et le soutien dont dispose M. Mugabese réduit peu à peu. Le MDC entend donc se fairel’écho de ce mécontentement et, depuis les électionsgénérales de juin 2000 (où le MDC a remporté 57 siègessur 120), M. Mugabe et le ZANU-PF rencontrent uneforte opposition politique organisée.

Cependant, depuis l’élection présidentielle de mars2002, le MDC semble adopter une attitude attentisteet se concentrer désormais sur les élections locales,après l’accession de l’un de ses candidats à la mairie dela capitale. De son côté, M. Tvangirai a été accusé detrahison par le gouvernement et a des démêlés avec lajustice.

La crise alimentaire actuelle, l’aggravation de lacrise économique et un processus désordonné deredistribution des terres ne font qu’amplifier lemécontentement de la population, tandis que lesinquiétudes des bailleurs de fonds vis-à-vis de l’ingérencepolitique dans la distribution de nourriture ralentissentles opérations d’aide alimentaire.

Dans un tel contexte et malgré les annonces faitespar l’opposition, on ne devrait pas assister à demanifestations de grande envergure contre legouvernement. En outre, conformément aux nouvelleslois sur la sécurité, il est interdit d’appeler à la grèvegénérale et ce genre d’action de masse serait probablementréprimé violemment par l’armée et les ancienscombattants de la guerre d’indépendance. MM. Mbekiet Obasanjo vont devoir œuvrer pour que le pays trouveune solution négociée à la crise politique et renoue sesrelations avec les bailleurs internationaux. Les dirigeantssud-africain et nigérian sont motivés par la crainte que,faute de résultats tangibles, le soutien financier accordépar les États-Unis et l’Union européenne au NEPAD(Nouveau partenariat pour le développement del’Afrique) – une ambitieuse initiative qui prévoit unmécanisme d’examen des questions de gouvernance parles pairs – ne s’en trouve compromis. Beaucoup voientdans le cas du Zimbabwe un premier test de cetteprocédure. Selon le scénario le plus plausible, le présidentMugabe restera au pouvoir jusqu’au terme de sonmandat, mais il fera rapidement connaître son successeur.

Au niveau international, ces dernières années ontvu l’engagement militaire du Zimbabwe dans la guerreen République démocratique du Congo (RDC), auxcôtés du président Kabila, depuis 1998. A la mi-2001,on estimait à 12 000 le nombre d’hommes envoyés dansce pays. Depuis septembre 2002 et dans la foulée desaccords de paix séparés signés par le Congo RDC avecle Rwanda et l’Ouganda au troisième trimestre 2002,le Zimbabwe commence néanmoins à rappeler sestroupes.

La société zimbabwéenne se caractérise par uneaggravation des disparités de revenus, qui pèse surl’évolution socio-économique du pays. Le pays connaîtdepuis quelques années un dualisme persistant etcroissant qui voit les 20 pour cent les plus riches de lapopulation se partager 60 pour cent du revenu total.En outre, la crise économique récente et la réductionconcomitante des ressources nationales consacrées auxservices sociaux entravent la viabilité de systèmes de santéet d’enseignement très développés qui avaient permisau Zimbabwe de se placer en tête du continent dix ansaprès son indépendance. Par ailleurs, la propagation duVIH/sida ruine rapidement les gains d’espérance de vieenregistrés au cours de ces 20 dernières années et la forteprévalence du virus désorganise le système de santé.

Les inégalités entre zones rurales et urbaines restentconsidérables. Selon une étude de la Banque mondiale(1995/96), l’incidence de la pauvreté était de 48 pourcent dans les campagnes, contre 7.9 pour cent dans lesvilles. Par ailleurs, les principaux indicateurs de lapauvreté – mesure de la gravité en fonction del’incidence, de la profondeur et de la répartition de cephénomène – ont augmenté de plus d’un quart aucours de la première moitié des années 90. L’absencede données fiables ne permet pas un suivi précis de lasituation actuelle. Néanmoins, certains indicateurs fontétat d’une aggravation. Étant donné l’élasticitérelativement élevée de la pauvreté (0.68) et de l’extrêmepauvreté (1.2) par rapport à la croissance, la pauvretéa certainement progressé au cours des cinq dernièresannées. En 1995-01, le PIB a progressé de 0.1 pour centen moyenne, alors qu’une croissance de 4.7 pour centpar an est nécessaire pour éviter l’augmentation dunombre d’individus vivant dans l’extrême pauvreté. La

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situation s’est encore dégradée en 2002 sous l’effetconjugué des difficultés économiques générales, desrelations tendues avec les bailleurs et de la sécheressegénéralisée. Comme nous l’avons évoqué plus haut,plus de 6 millions de Zimbabwéens sont menacés parl’aggravation de la pénurie alimentaire qui frappe le pays.

Selon une étude conjointe menée en mai 2002 parle ministère de la Santé et l’Organisation mondiale dela santé, les vastes déplacements de population provoquéspar la crise humanitaire actuelle entraînent, pour cesindividus, une privation d’accès aux services de santé,et notamment à l’eau potable et à des installationssanitaires adéquates. On estime ainsi qu’un million depersonnes sont exposées aux épidémies. Depuis 2000,les difficultés économiques ont provoqué une fuite descerveaux, les services de santé sont de plus en plusdifficiles d’accès et les médicaments essentiels fontdéfaut. Selon les estimations, 150 000 enfants ontcruellement besoin de services de protection et 600 000de programmes de nutrition ciblés. L’aggravation de lacrise alimentaire démultiplie les problèmes existants,tels que la malnutrition chronique et le VIH/sida.

Avec, selon les estimations, 28 pour cent de lapopulation adulte séropositive ou malade, le Zimbabweest l’un des pays les plus touchés au monde par leVIH/sida. Seuls le Botswana et le Swaziland connaissentune situation encore plus grave. D’après l’ONUSIDA,environ 2.2 millions de personnes seraient séropositivesou malades. Le taux de mortalité causé par cette maladieest passé de 18.29 pour mille en 1998 à 34.14 en 2001.Cependant, ces chiffres devraient augmenter du fait dela crise alimentaire de 2002 qui a exacerbé la vulnérabilitéaux infections et exposé des individus séropositifs oumalades à des surinfections, puisque leurs résistancesétaient amoindries par une mauvaise nutrition.L’épidémie se concentre le long des grandes routes et,avec l’insécurité alimentaire actuelle et l’augmentationqui en résulte des comportements à risque comme laprostitution ou la migration, le risque de contagions’accroît considérablement. Le sida fait également denombreux orphelins. Ils sont aujourd’hui environ600 000 et seront, d’après les estimations, 1.2 millionen 2010 (près de 10 pour cent de la population totale).Leur nombre pèsera lourdement sur les services sociaux

et sur la cohésion sociale du pays. Même si lesconséquences économiques de cette situation ne sontpas clairement estimées, les études préliminairesprévoient une baisse de un pour cent de la croissanceannuelle de la production par habitant. Pour luttercontre cette menace, un prélèvement fiscal pour le sida(retenue à la source de 3 pour cent) et un impôt surles sociétés ont été introduits en 2000. En 2001, leparlement a institué un conseil pour le sida, chargé demettre en œuvre la stratégie nationale de lutte contrecette maladie et de débloquer des fonds au profit descomités de lutte contre le sida créés au niveau desdistricts. Jusqu’ici, l’absence de programme clair freinele déploiement d’une politique efficace. De plus, lagabegie et l’absence de capacités au niveau des districtscompromettent une bonne utilisation de ces fonds.

Par rapport aux autres pays en développement, lesystème éducatif du Zimbabwe a réalisé d’immensesprogrès depuis l’indépendance du pays et le niveaud’instruction de la population est relativement élevé.Les avancées les plus notables ont été réalisées dans lesdix premières années de l’indépendance (entre 1980 et1990). Le nombre d’écoles primaires et secondaires aaugmenté respectivement de 42 et 662 pour cent et letaux d’inscription a progressé de plus de 200 pour cent,tous niveaux confondus. Cette progression spectaculairea débouché sur la gratuité et l’universalité del’enseignement primaire. En 1999, environ la moitiédes enfants de 15 à 19 ans étaient inscrits dans desétablissements d’enseignement secondaire. Le tauxd’alphabétisation des adultes a lui aussi progressé,passant de 70 pour cent en 1980 à 88 pour cent en 1999(selon les statistiques de la Banque africaine dedéveloppement). Néanmoins, les difficultés politiqueset économiques actuelles, le VIH/sida, les déplacementset la réinstallation des populations ralentissent leprocessus. Le nombre d’élèves abandonnant l’école esten augmentation, surtout chez les 15-19 ans, et onestime que le processus de réinstallation perturbera lascolarisation de plus de 200 000 enfants.

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