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WHERE THE RAIN FALLS (Là où TombE LA pLuIE) : cHANgEmENT cLImATIquE, SécuRITé ALImENTAIRE ET dES moyENS dE SubSISTANcE ET mIgRATIoN
RAppoRT SuR LA poLITIquE gLobALE
KOKO WARNER, TAMER AFIFI, KEVIN HENRY, TONYA RAWE, CHRISTOPHER SMITH, ALEX DE SHERBININ
uN pRojET d’éTudE coNduIT dANS 8 pAyS pouR mIEux compRENdRE LES pRécIpITATIoNS, LA SécuRITé ALImENTAIRE ET LES mouvEmENTS dE popuLATIoNS.
Soutenu par :
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 3
cARE FRANcE
L’uNIvERSITé dES NATIoNS uNIES
INSTITuT dE L'uNIvERSITé dES NATIoNS uNIES pouR
L’ENvIRoNNEmENT ET LA SécuRITé HumAINE (uNu-EHS)
cENTRE pouR uN RéSEAu INTERNATIoNAL d’INFoRmATIoN
SuR LES ScIENcES dE LA TERRE à L’INSTITuT dE LA TERRE dE
L’uNIvERSITé coLumbIA.
décembre 2012
4_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
crédit photo : © 2012 Lars johansson
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 5
Where the rain falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationKOKO WARNER, TAMER AFIFI, KEVIN HENRY, TONYA RAWE, CHRISTOPHER SMITH, ALEX DE SHERBININ
6_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
RemerciementsLe présent rapport et les différentes activités du projet ont pour
but de mieux faire comprendre l’incidence du changement
climatique sur la sécurité alimentaire et la mobilité humaine
et de renforcer les mesures pour y répondre. Il a été publié
dans le cadre du projet « Where The Rain Falls : changement
climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance
et migration » (« Rainfalls »), lequel a été rendu possible
grâce à une généreuse contribution du groupe AxA et de
la Fondation john d. et catherine T. macArthur sous la
responsabilité de Alice Steenland, john Slocum et milena
Novy-marx.
Nous voudrions saluer ici les chercheurs dont les études de
cas développé dans le cadre du projet ont inspiré ce rapport
de synthèse. Nous remercions les auteurs suivants pour
leurs contributions : m. panomsak promburom (centre de
recherche sur les systèmes de ressources agricoles) et le
dr. patrick Sakdapolrak (université de bonn) qui ont mené
les recherches de terrain en Thaïlande, m. Raúl Ho (m.Sc
– consultant indépendant) et m. Andrea milan (uNu-EHS)
pour leurs recherches de terrain au pérou, le dr. janakaraj
Murali (TERI Inde) et le Dr. Tamer Afifi (UNU-EHS) pour
leurs recherches en Inde, m. Nguyen cong Thao (Institut
d’anthropologie, Académie vietnamienne des sciences
sociales – doctorant à statut Abd de l’université de Hawaï
à manoa, états-unis), le dr. Nguyen viet Khoa (centre
national d’extension agricole) et le dr. Kees van der geest
(université d’Amsterdam) pour leur travail au viet Nam,
le dr. Ahsan uddin Ahmed et le dr. Sharmind Neelormi
(tous deux du centre pour le changement mondial, dhaka,
bangladesh), m. Selim Reza Hassan (cARE bangladesh)
et le dr. benjamin Etzold (université de bonn), chargés du
travail de terrain au bangladesh, ainsi qu’Andrea milan,
pour ses apports sur le terrain, le dr. Edward Salifu mahama
(université pour les études sur le développement, ghana)
et le dr. christina Rademacher-Schulz (uNu-EHS) qui ont
effectué le travail de terrain au ghana, le dr. Sergio Ruano
(consultant indépendant) et m. Andrea milan pour le travail
de terrain au guatemala, ainsi que le dr. Emma T. Liwenga
(Institut pour l’évaluation des ressources, université de dar
es-Salaam, Tanzanie). Le dr. Koko Warner (uNu-EHS) a
collaboré en tant que directeur scientifique des recherches «
Rainfalls ». Le Dr. Tamer Afifi (UNU-EHS) et M. Kevin Henry
(cARE France) ont coordonné respectivement les recherches
et le projet.
Nous voudrions remercier les membres du groupe technique
consultatif de Rainfalls pour leurs précieux apports : le
professeur Susan martin (Institut pour l’étude des migrations
internationales de l’université de georgetown, états-unis),
le professeur émérite Roger Zetter (université d’oxford),
le dr. mathieu choux (groupe AxA), le dr. Tara Shine
(Fondation mary Robinson), mme Agnes otzelberger
(Réseau cARE International sur la pauvreté, l’environnement
et le changement climatique), le dr. youba Sokona (centre
africain pour la politique climatique) et le dr. Fatima denton
(cRdI).
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 7
Nous tenons aussi à remercier les experts suivants, qui ont
participé à la relecture du présent document : le dr. Saleemul
Huq (IIEd et IcccAd), m. chipo plaxedes mubaya (udSm
– IRA, Tanzanie), m. ced Hesse (IIEd), le dr. marloes mul
(uNESco-IHE), le dr. Siza Tumbo (Sokoine university of
Agriculture, Tanzanie), le dr. rer. pol. Wolfgang-peter Zingel
(Südasien-Institut Abteilung Internationale Wirtschafts- und
Entwicklungspolitik), le dr. Ainun Nishat (université bRAc,
bangladesh), le dr. Rezaur Rahman (Institut pour la gestion
de l’eau et des inondations et bangladesh university of
Engineering and Technology), le dr. A.S.R.A.S. Sastri (Indira
gandhi Agricultural university, Inde), le dr. Anwara begum
(bangladesh Institute of development Studies), le dr. osman
Kanton (udS, ghana), le dr. Abdul-Korah (college of Saint
Rose, états-unis), dr. benjamin Schraven (dIE, Allemagne),
dr. Irit Eguavoen (ZEF bonn, Allemagne), dr. patrick Laux
(Institut de technologie de Karlsruhe, Allemagne), mme.
olivia dun (université de Sydney, Australie), mme jane chun
(pNud), m. Nguyen chi quoc (oIm), m. peter mackay
(consultant en changement climatique), NgÔ THI pHuoNg
Lan (université nationale du viet Nam – Hô-chi-minh-
ville), le dr. NguyEN HIEu Trung (université de can Tho
et Institut dRAgoN – mékong), le dr. Karl Husa (université
de vienne), m. vitoon panyakul (greennet), le dr. jonathan
Rigg (université de durham, Faculté de géographie), le
dr. Edwin castellanos (Institut pour l’environnement et
la biodiversité, université del valle, guatemala), le prof.
claudia donis (université de sciences sociales d’Amérique
latine, guatemala), le prof. Alipio canahua (université
nationale de l’Altiplano – puno – pérou), le dr. Luis Suárez
Salas (université Alas peruanas de Huancayo, pérou), le dr.
juan Torres guevara (université nationale pour l’agriculture
– La molina – Soluciones prácticas – ITdg, pérou), le dr.
Susan cutter (université de caroline du Sud, états-unis), le
dr. pablo Lucas (cFpm), m. vikram Kolmannskog (conseil
norvégien pour les réfugiés), m. david Waskow (oxfam) et
un relecteur anonyme travaillant pour le Fonds de recherche
AxA.
Nous aimerions aussi remercier les experts suivants, qui ont
participé directement à la relecture des huit études nationales
et dont les contributions ont permis d’améliorer la qualité
globale du présent rapport : le dr. chilanga Asmani (uNFpA),
le dr. Stephen Nindi, le prof. Allan m. Findlay (Faculté pour
l’environnement, université de dundee, écosse), m. Tasneem
Siddiqi (The Asia Foundation), le prof. murari Lal (cESdAc),
le dr. bandi venkateswarlu (cRIdA), le dr. Anil Kumar
Singh (IcAR), m. Shirish Sinha dEZA SINSH (Ambassade de
Suisse en Inde), le prof. Stephen Kendie (université de cape
coast, ghana), le dr. Issac Agyemang (FIdS, ghana), le dr.
Felix Asante (ISSER, ghana), mr. Koos Neefjes (pNud), le
dr. james Taylor (université d’Adélaïde, Australie), le dr.
Huynh Truong Huy (Faculté des sciences économiques et
8_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
d’administration des entreprises, université de can Tho,
viet Nam), le prof. Hugo graeme (université d’Adélaïde), le
dr. Sureeporn punpuing (Institut d’études sur la population
et les sciences sociales, université de mahidol, Thaïlande),
mme Hilda Rivera (Rain Forest Alliance), m. carlos
mansilla (ministère de l’environnement et des ressources
naturelles, guatemala), le dr. juventino galvez (Institut pour
l’agriculture, les ressources naturelles et l’environnement,
université Rafael Landívar, guatemala), le dr. Katrin millock
(cNRS, école supérieure des sciences économiques, paris) et
le prof. Anthony oliver-Smith (université de Floride, états-
unis).
Les auteurs du présent rapport tiennent aussi à exprimer leur
reconnaissance à :
- cARE France qui s’est chargé de la gestion du projet et
en particulier mlle Aurélie ceinos, chargée de programme,
et mlle Kimberly bennett, coordinatrice des communications
externes, pour leurs nombreuses contributions à ce projet.
ce dernier n’aurait pas vu le jour sans le soutien actif
des bureaux de pays de cARE au bangladesh, en Inde,
en Thaïlande, au viet Nam, au ghana, en Tanzanie, au
guatemala et au pérou, ainsi que de l’équipe pEccN (Réseau
pauvreté, Environnement et changement climatique) de
cARE International et de cARE uSA.
- uNu-EHS, en particulier le dr. jakob Rhyner, vice-recteur
de l’université des Nations unies en Europe (uNu – viE) et
directeur de l’uNu-EHS, ainsi que l’équipe de l’information
et des communications : le dr. Alice Fišer, mme Katharina
brach et mme Andrea Wendeler, sans oublier mme verena
Russo et m. Serge birtel.
- nos collègues du centre pour le réseau international
d’information sur les sciences de la terre (cIESIN)/université
columbia, le personnel de SIg cody Aichele, Tricia chai-
onn, dara mendeloff, et Sneha Rao, le cartographe Al
pinto, Andrés gonzalez pour le client de cartes web, Susana
Adamo pour son aide lors de la conception de l’enquête et
de la stratégie d’échantillonnage et michael bell et john del
corral pour leur analyse des données climatiques (Institut de
recherche international sur le climat et la société/université
columbia).
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 9
crédit photo : © 2007 bill dowell/cARE
10_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Table des MatièresRemerciements
Synthèse
1- Nature et objectif du présent rapport
1.1 Que sait-on de l’influence des changements environnementaux
sur la mobilité humaine ?
1.2 Rapports entre la variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire/
des moyens de subsistance et la mobilité humaine
1.3 De l’utilité de comprendre les décisions en matière de mobilité dans
le contexte des changements climatiques
1.4 Nouvelle approche de réflexion et contribution du présent rapport
1.5 Portée et limites du présent rapport
2- Méthodes multidisciplinaires du projet Where The Rain Falls
2.1 Entretiens auprès d’experts
2.2 Recherches participatives
2.3 Enquête auprès des ménages
2.4 Scénarios futurs des précipitations et de la migration tirés de la
modélisation axée sur les agents
2.5 Champs de recherche, méthodes et triangulation
3- Caractéristiques nationales et des sites de recherche
3.1 Critères pour la sélection des pays et des sites
3.2 Contexte national
3.3 Caractéristiques des sites de recherche
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 11
4- 4. Résultats des études de cas : la migration dans le contexte de la variabilité
pluviométrique et de la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance
4.1 Thaïlande : grâce à des sources de revenus diversifiées et un accès aux biens
et aux services la migration est désormais un choix dans la province de Lamphun
4.2 Pérou : les options en matière de subsistance et les stratégies de migration dans
la province de Huancayo varient en fonction de l’altitude et de la proximité avec
les centres urbains
4.3. Viet Nam, delta du Mékong : les populations pauvres de la commune de Hung
Than, sans terres et peu qualifiées, n’ont guère d’options, en dépit de la croissance
économique
4.4 Inde : les ménages pauvres de Janjgir-Champa continuent d’utiliser la migration
saisonnière pour assurer leur sécurité alimentaire, en dépit de l’irrigation, de
l’industrialisation et des Mesures de protection sociales et économiques
4.5 Bangladesh : la migration est une stratégie d’adaptation clé pour les ménages
pauvres de Kurigram, mais les coûts sociaux en sont élevéss
4.6 Ghana : la forte dépendance envers l’agriculture pluviale dans le district de
Nadowli explique la persistance de la migration saisonnière comme stratégie
d’adaptation
4.7 Guatemala : le manque de diversification des moyens de subsistance et de
possibilités migratoires laisse peu d’options aux habitants de Cabricán
4.8 Tanzanie : la migration est une stratégie d’adaptation tant pour les petits
exploitants agricoles que pour les éleveurs qui luttent pour la sécurité alimentaire
dans le même district.t
5- Analyse des décisions des ménages en matière de migration à l’heure actuelle
: caractéristiques des ménages et sensibilité à la variabilité pluviométrique et à la
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance
5.1 Caractéristiques des ménages dans les districts ciblés
5.2 La migration : adaptation ou échec de l’adaptation ? Quatre profils de migration
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12_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
liée à la pluviométrie
La migration comme facteur d’amélioration de la résilience (migration efficace)
La migration comme stratégie de survie, mais non de prospérité
La migration comme stratégie d’adaptation aggravante et utilisée en dernier recours
Impossibilité de migration, difficultés et survie dans les lieux d’origine
6-Migration dans le contexte des variabilités pluviométriques et de l’insécurité
alimentaire/des moyens de subsistance futures
6.1 Modélisation axée sur les agents (MAA)
6.2 Le modèle de migration axé sur les agents de « Rainfalls »l
6.3 Scénarios d’anticipation et analyse : modélisation dans le cas du district de
Same, Tanzanie
Résultats pour la Tanzanie : migration de 2014 à 2040 selon les scénarios de
précipitation suivants : augmentation de la sécheresse/de l’humidité, très forte
augmentation de la sécheresse/de l’humidité
7- Conclusions
8- Réflexions pour les décideurs et les praticiens : permettre des choix informés à
l’échelle mondial, national et local
8.1 Décideurs mondiaux
8.2 Gouvernements et partenaires d’exécution
9- Annexe technique
9.1 Modélisation axée sur les agents
9.2 Cartographie et références
10- Notes
A propos
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 13
crédit photo : ©2012 Aurélie ceinos/cARE
14_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
SynthèseL’étude «Where The Rain Falls» (« Rainfalls ») explore les
rapports entre variabilité pluviométrique, sécurité alimentaire
et des moyens de subsistance et mobilité humaine sur des
sites de recherche très divers dans huit pays d’Asie, d’Afrique
et d’Amérique latine. même si le changement climatique a
des répercussions sur presque tous les aspects de la sécurité
alimentaire – de la production et de la disponibilité des vivres
à la stabilité de l’approvisionnement, l’accès aux denrées
et à leur consommation – nos recherches se sont limitées
aux liens entre l’instabilité des régimes pluviométriques
et de la production alimentaire d’une part et la stabilité de
l’approvisionnement en nourriture d’autre part . L’initiative
« Rainfalls » est essentiellement axée sur l’étude des
circonstances dans lesquelles les habitants des huit sites
choisis comme cas d’étude en Amérique latine, en Afrique et
en Asie envisagent la migration comme stratégie de gestion
des risques face à la variabilité pluviométrique et l’insécurité
alimentaire/des moyens de subsistance.
Il est probable que le changement climatique aggrave la
situation dans certaines régions du monde qui connaissent
déjà des niveaux élevés d’insécurité alimentaire.
L’augmentation de la variabilité pluviométrique et de ses
effets (saisons moins prévisibles, précipitations plus erratiques,
phénomènes météorologiques inhabituels pour la saison ou
disparition des saisons de transition) ont des répercussions
non négligeables sur la sécurité alimentaire, les moyens de
subsistance de millions de personnes et la décision de migrer
des ménages vulnérables. Si les décideurs et acteurs du
développement veulent garantir une transition vers un avenir
plus résilient aux impacts du changement climatique et des
politiques d’adaptation appropriées, ils doivent mieux saisir
les corrélations existant entre le changement climatique,
les profils des ménages en terme de sécurité alimentaire
et des moyens de subsistance et les décisions relatives à la
migration.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 15
Le présent rapport apporte six nouvelles contributions aux recherches sur le changement climatique et la mobilité humaine :
◆ méthodes de recherche de nouvelle génération, combinant méthodes quantitatives et qualitatives, avec notamment une enquête auprès des ménages, divers outils de recherche participative (Participatory Research Approach ou PRA) et des entretiens auprès d’experts ;
◆ données empiriques fournies par huit études de cas détaillées menées dans trois régions, en s’appuyant sur des travaux empiriques antérieurs sur les changements environnementaux et la mobilité humaine (EACH-FOR, 2009) ;
◆ cartes inédites des impacts du changement climatique, avec répartition des populations et schémas de migration, représentant certains des principaux processus associés à la variabilité pluviométrique et certains des grands systèmes humains-écologiques où de tels changements entraînent une migration ;
◆ cadre analytique pour harmoniser les constatations faites sur huit sites de recherche très divers afin de répondre à la question : « Dans quelles circonstances les ménages utilisent-ils la migration comme stratégie de gestion des risques ? » ;
◆ travail de modélisation axé sur les agents pour répondre à la question « Dans quelles circonstances la variabilité pluviométrique influence-t-elle fortement les futures migrations ? », mis en pratique pour la première fois sur le site de recherche tanzanien ;
◆ réflexions politiques pour les pouvoirs publics, les institutions multilatérales ou de recherche et les organisations non gouvernementales qui travaillent directement avec certaines des populations les plus vulnérables du monde
16_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Principales constatations : relations actuelles entre la
variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire et des
moyens de subsistance et la migration
de par leur diversité, les huit cas d’étude ont fourni l’occasion
d’explorer de façon nuancée la question « dans quelles
circonstances les ménages utilisent-ils la migration comme
stratégie de gestion des risques ? » pour répondre à cette
question, la recherche a utilisé un cadre d’analyse permettant
d’identifier les grands facteurs qui contribuent à la prise de
décision des ménages selon plusieurs niveaux :
◆ Au premier niveau, le cadre établit des distinctions entre
les huit pays en s’appuyant sur des indicateurs sociaux,
économiques et démographiques qui s’imposent au
niveau macro. L’analyse de ces contextes nationaux, qui
présentent des caractéristiques différentes (lesquelles ont
une incidence sur les stratégies de subsistance des ménages,
et notamment sur les décisions relatives à la migration)
a permis de déduire une typologie. Le classement de ces
pays coïncide partiellement avec une typologie régionale
des contextes nationaux. Ainsi, trois des quatre cas d’étude
asiatiques entrent dans la catégorie des pays dynamiques
qui connaissent une pauvreté et une insécurité alimentaire
moyennes à élevées, la Thaïlande faisant exception étant
donné les succès engrangés ces dernières années en termes
de réduction de la pauvreté..
◆ Au niveau infranational, la diversité des sites de recherche
du projet se traduit par une série de caractéristiques
géographiques, météorologiques et agro-écologiques. Les
plus importantes, outre des précipitations annuelles allant
de 560 mm à 1 700 mm, ont trait à : la proximité de villes
ou autres grands centres offrant des opportunités d’emploi
alternatif appréciables (p. ex. des zones industrielles) ;
l’altitude ; la saisonnalité des régimes de précipitations
; le degré de dépendance envers les cultures pluviales par
opposition aux cultures irriguées.
◆ Enfin, les principales caractéristiques qui, au niveau
individuel ou familial, semblent devoir entrer en ligne de
compte dans les prises de décision en matière de migration
ont été répertoriées en s’appuyant sur des données primaires
recueillies lors d’enquêtes auprès des ménages : taille et
composition du ménage ; propriété foncière ; patrimoine
; degré de diversité des moyens de subsistance ; niveaux
d’éducation. ces caractéristiques mettent en lumière les
facteurs qui influent sur les décisions actuelles ou futures
relatives à la migration et permettent de mieux comprendre
quels sont les ménages qui seront sans doute incapables de
s’adapter aux changements pluviométriques soit in situ soit
par la migration ou au contraire, quels sont les facteurs qui
contribuent à la résilience ou à la vulnérabilité de certains
types de ménage face à ces perturbations.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 17
Observations de terrain
Les recherches de terrain dans les huit pays étudiés ont révélé
que :
◆ pour la grande majorité d es populations rurales des huit
lieux de recherche le changement climatique se traduit
à travers les variations pluviométriques. ces perceptions
influent sur leurs décisions quant à la gestion des risques.
Les modifications les plus communément citées concernent
les dates, la qualité, la quantité ou la prévisibilité globale
des précipitations, y compris : l’arrivée tardive de la saison
des pluies, d’une durée réduite ; une réduction du nombre
annuel de journées de pluie ; une fréquence accrue des pluies
diluviennes ; une fréquence accrue et une prolongation des
périodes sèches pendant la saison des pluies. dans nombre de
cas, il y a corrélation entre la perception de ces changements
et une analyse des données météorologiques locales au cours
des dernières décennies.
◆ Les ménages vivant essentiellement de l’agriculture sur
les sites de recherche rapportent dans leur grande majorité
que la variabilité pluviométrique a un effet négatif sur la
production et contribue à l’insécurité alimentaire et des
moyens de subsistance. Les niveaux d’insécurité alimentaire
sur les huit sites varient fortement à cause de facteurs
comme : la quantité totale et les fluctuations saisonnières des
précipitations ; le degré d’intensification de l’agriculture ; le
degré de diversification des moyens de subsistance ; l’accès
des ménages pauvres à des mesures de protection sociale et
autres services d’appui.
◆ L’observation de la migration, phènomène commun aux huit
sites de recherche, permet de dégager les tendances suivantes,
la migration est : presque entièrement confinée à l’intérieur
des frontières nationales ; à prédominance masculine, mais
avec participation accrue des femmes dans un certain nombre
de pays ; essentiellement le fait de membres individuels au
sein du ménage (l’Inde, où des familles entières (nucléaire)
déménagent, fait exception) ; due à des besoins liés à la
subsistance (revenus du ménage) dans la plupart des pays,
quoiqu’un nombre croissant de migrants cherchent à présent
à améliorer leurs compétences (p. ex. grâce à l’éducation)
dans des pays comme la Thaïlande, le viet Nam et le pérou ;
une combinaison de mouvement du type rural-rural et rural-
urbain, les destinations les plus fréquentes étant les zones
agricoles plus productives (ghana, bangladesh, Tanzanie), les
centres urbains à proximité (pérou, Inde), les zones minières
(ghana) ou industrielles (Thaïlande, viet Nam).
◆ Les ménages ont recours à la migration pour gérer des
risques climatiques comme la variabilité pluviométrique. La
migration – saisonnière, temporaire ou permanente – joue
un rôle important dans les efforts menés par beaucoup
de familles pour affronter la variabilité pluviométrique et
l’insécurité alimentaire et des moyens de subsistance. d’après
les informations recueillies sur un certain nombre de sites de
recherche, elle a augmenté au cours des décennies passées.
La pluviosité pèse plus directement sur les décisions relatives
à la migration là où la dépendance envers l’agriculture
pluviale est forte, où il n’y a souvent qu’une seule récolte
par an, et où il existe peu de possibilités de diversification des
revenus. En l’absence d’appui au développement de moyens
de subsistance résilient face au changement climatique, la
pression exercée sur les moyens de subsistance tributaires de
la pluie influencera sans doute davantage la mobilité à long
terme des ménages vulnérables dans les décennies à venir.
18_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
◆ La vulnérabilité des ménages face à la variabilité
pluviométrique a un impact sur les résultats en matière de
sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et les
choix et schémas de migration. Les ménages possédant des
biens diversifiés et un accès à des options variées en termes
d’adaptation, de diversification des revenus ou de gestion
des risques (par le biais de réseaux sociaux, de programmes
d’appui communautaires ou gouvernementaux et de
l’éducation) peuvent recourir à la migration de manière à
améliorer leur résilience. ceux qui ont le moins accès à ce
type d’options (peu ou pas d’opportunités en matière de
diversification des revenus, pas de terres, peu d’instruction)
ont recours à la migration (en général interne) comme
stratégie de survie pendant les périodes de disette. cette
décision, qui vient s’ajouter à d’autres mesures d’ajustement,
dommageables à long terme,, maintient ces populations en
marge d’une existence décente, ou les y accule.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 19
crédit photo : © 2007 bill dowell/cARE
20_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Quatre profils distincts : la migration comme stratégie de
gestion des risques
L’analyse préliminaire des données de l’enquête sur les
ménages a permis de dégager quatre profils distincts de
familles pour qui la migration est une réponse possible à la
variabilité pluviométrique et à l’insécurité alimentaire et des
moyens de subsistance.
Le premier groupe (que l’on trouve le plus couramment dans
les pays qui sont en mesure de procurer des sources de revenus
alternatives et une certaine sécurité alimentaire à la majorité
de leur population) se sert de la migration pour améliorer sa
résilience, par exemple en investissant dans l’éducation, la
santé, les emplois résistant aux changements climatiques et
la diversification des risques. Pour ces ménages, la migration
s’insère dans un ensemble de stratégies d’adaptation et ils
se déplacent de façon saisonnière ou temporaire, en général
pour trouver des emplois non agricoles dans les villes ou à
l’étranger.
Le deuxième groupe – que l’on trouve souvent dans les
pays présentant un moindre niveau de sécurité alimentaire
et possédant moins de possibilités de diversification des
revenus – se sert de la migration non pas pour prospérer,
mais pour survivre. Il se déplace de façon saisonnière dans
son propre pays pour trouver du travail (souvent) agricole
dans d’autres zones rurales. pour le troisième groupe, dont
les conditions de sécurité alimentaire sont encore plus fragiles
et pour lequel les possibilités d’adaptation sont plus rares
ou leur recherche, peu persévérante, la migration est une
affaire de sécurité humaine dans le cadre de ce que l’on peut
considérer comme une stratégie d’ajustement dommageable
à long terme. ce groupe se déplace souvent vers d’autres
Relation future possible entre la variabilité pluviométrique,
la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et la
migration
Pour mieux comprendre la forte influence que pourrait exercer
à l’avenir l’augmentation de la variabilité pluviométrique sur la
mobilité humaine, il est important d’inventorier les différents
impacts que des scénarios probables pourraient avoir sur les
flux migratoires. La modélisation axée sur les agents est une
technique informatique de simulation sociale qui permet à
l’utilisateur de modéliser le comportement d’organes de
décision individuels ainsi que leurs interactions mutuelles
et avec l’environnement. L’utilisation d’un processus de
simulation et d’analyses orientées vers l’avenir permet de
comprendre les circonstances dans lesquelles la variabilité
pluviométrique risque d’influencer fortement la migration
vers différents environnements. Les sites qui ont servi de cas
d’étude « Rainfalls » sont utilisés comme exemples d’endroits
où les modifications pluviométriques risquent de contribuer à
un accroissement de l’insécurité alimentaire et de la mobilité
humaine.
Le modèle de migration axé sur les agents du projet «
Rainfalls » (mmAAR) présente deux niveaux d’analyse des
zones rurales de la région pendant les périodes de disette à
la recherche de nourriture ou d’un emploi qui lui permette de
se la procurer. Le dernier groupe semble être composé de «
populations piégées » qui luttent pour survivre sur leur lieu
d’origine et n’ont pas facilement recours à la migration pour
s’adapter aux impacts négatifs des facteurs de stress liés aux
variations pluviométriques.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 21
comme l’indiquent les études de cas et les résultats de la
modélisation, les changements intervenus tant dans la
moyenne que dans la variabilité des précipitations locales
influent sur des facteurs tels que le marché du travail régional
et les systèmes de production alimentaire. La variabilité
pluviométrique a aussi une incidence sur la vulnérabilité des
ménages, en fonction de caractéristiques comme les revenus,
le patrimoine et la taille de la famille. Les résultats des études
de cas et de la modélisation illustrent les circonstances dans
lesquelles interviennent les décisions relatives à la migration.
Ils montrent que les ménages tant « satisfaits » que «
vulnérables » ont recours à la migration, mais que celle-ci
s’opère de façon très différente. Les premiers voient leur
résilience renforcée tandis que la vulnérabilité des seconds
face aux facteurs de stress, climatiques ou non, n’a de cesse
de s’aggraver.
agents, relatifs à la vulnérabilité et au processus décisionnel
intervenant lors de la migration : le ménage et l’individu. Les
caractéristiques de l’un comme de l’autre proviennent des
données de l’enquête menée auprès des ménages sur chacun
des sites étudiés. Le mmAAR est conçu pour représenter le
degré de vulnérabilité des ménages lorsque leurs moyens
de subsistance et leur sécurité alimentaire subissent des
modifications due à la variabilité pluviométrique, ainsi que
l’incidence de ces changements sur la migration des membres
de la famille. Les recherches ont mis en lumière différents
impacts que des scénarios probables pourraient avoir sur les
flux migratoires et ont montré qu’à l’avenir, les variations
pluviométriques risquaient d’influencer fortement la mobilité
humaine. Le modèle a été tout d’abord appliqué au site de
recherche tanzanien avec les résultats suivants :
◆ La migration des ménages vulnérables est extrêmement
sensible aux changements de pluviométrie. pendant la
majeure partie de la période de simulation, le plus grand
nombre normalisé de migrants modélisés destinés à quitter
un foyer vulnérable se trouve dans le scénario 4 (sécheresse
extrême). par contraste, le scénario 3 (humidité extrême)
présente quant à lui le nombre le plus bas de migrants quittant
un foyer vulnérable. Le nombre de migrants modélisés
destinés à quitter un foyer vulnérable dans les scénarios 1
(sécheresse) et 2 (humidité) marque une augmentation nette
par rapport aux chiffres de référence dans les deux cas, mais
pas aussi importante que dans le scénario 4.
◆ par contraste, la migration « répondant à des aspirations »
dans les ménages satisfaits présente moins de susceptibilité
aux diverses hypothèses de variabilité concernant les futurs
régimes pluviométriques. Les deux scénarios sur l’humidité
produisent une légère augmentation de la migration satisfaite
alors que les deux scénarios de sécheresse montrent un léger
recul.
22_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Réflexions pour les décideurs et praticiens
dans le monde entier, les communautés vulnérables subissent
déjà les impacts associés aux phénomènes météorologiques
extrêmes et aux changements climatiques à évolution
lente . pourtant, selon des estimations récentes, le rythme
actuel des émissions, associé aux promesses de réduction,
pourrait conduire à une augmentation des températures
s’échelonnant de 3,5 à 6°c . Fondamentalement, la crise
climatique exige une réponse beaucoup plus forte de la
communauté internationale, des gouvernements nationaux
et des collectivités locales, tant dans les pays développés
qu’en développement, dans des domaines tels que la
sécurité alimentaire, l’environnement et plus largement le
développement durable.
Les conclusions de l’étude permettent d‘élaborer une série
de recommandations politiques et pratiques qui, prises
collectivement, pourront aider les populations démunies
à faire des choix informés en matière de migration,
d’adaptation et de sécurité alimentaire, choix qui leur
permettront de préserver leur dignité et leur sécurité et
d’améliorer leur résistance aux changements climatiques.
Les états et les communautés les plus sévèrement touchés
ne peuvent assumer seuls l’aide aux populations vulnérables
et leur protection. Le principe d’une responsabilité commune
mais différenciée (tant pour minimiser la pression sur les
populations vulnérables que pour accroître les possibilités
d’adaptation) doit donc sous-tendre les négociations portant
sur les politiques à adopter et leur mise en place à tous les
niveaux.
L’hésitation des états à prendre des mesures ambitieuses
d’atténuation, de financement et d’adaptation face aux
changements climatiques, ne fera qu’en exacerber les
impacts et les coûts, tant humains que financiers. Au plan
mondial, les parties à la convention-cadre des Nations unies
sur les changements climatiques doivent :
◆ accepter une approche équitable pour réduire les émissions
de gaz à effets de serre conformément aux recommandations
de la communauté scientifique afin que l’augmentation de la
température mondiale moyenne ne dépasse pas 2°c, voire
1,5°c
◆ intensifier leur engagement et convenir de sources
innovantes pour assurer un financement de l’adaptation
suffisant, durable, prévisible, nouveau et supplémentaire qui
encourage la transparence, les approches participatives et la
responsabilisation ;
◆ faciliter la coordination régionale et mondiale par
l’intermédiaire du Comité d’adaptation, afin de permettre
l’appui aux développements des plans Nationaux
d’Adaptation ;
◆ évaluer les pertes et dommages et y remédier par le biais
de la convention-cadre des Nations unies et du mécanisme
et programme de travail relatifs aux pertes et dommages
de façon à répondre aux besoins des populations les plus
vulnérables.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 23
Le changement climatique, la sécurité alimentaire, la
pauvreté, la gestion des ressources naturelles et la mobilité
humaine sont inextricablement liés et on ne peut y remédier
séparément. ceux qui décident des mesures à prendre en
matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle au plan
mondial doivent :
◆ appeler davantage à la lutte contre la crise climatique et
incorporer des considérations relatives au changement
climatique et à l’égalité des sexes dans les initiatives
mondiales de sécurité alimentaire et nutritive.
◆ décider d’objectifs qui appuient le droit de tous à un
développement durable après 2015, à la suite des objectifs
du millénaire pour le développement..
Les impacts sont locaux, ce qui rend indispensable une action
aux niveaux national et local. Les gouvernements des pays
tant développés qu’en développement, les organisations
non gouvernementales, les institutions multilatérales et les
agences des Nations unies doivent s’efforcer d’encourager
la collaboration intersectorielle, entre ministères et
transfrontalière. Ils doivent aussi :
pour les populations déjà démunies et vulnérables, le
changement climatique est un nouveau défi majeur et
évolutif . Et toute solution à long terme ne pourra se faire
sans elles.. Il est donc nécessaire de garantir leur autonomie
et leur donner accès à de meilleurs outils de décision et de
gestion: informations, ressources et moyens de subsistance
qui tiennent compte du changement actuel des schémas
pluviométriques. mais on ne peut laisser les populations et
communautés locales relever seules ces défis : l’avènement
de solutions durables nécessitera les efforts concertés et
déterminés de la communauté internationale pour accroître
la résilience face aux facteurs de stress climatiques.
◆ accompagner et favoriser la sécurité alimentaire ainsi que
des moyens de subsistance résilients.
◆ renforcer et étendre la réduction des risques de catastrophe
et ses liens avec le développement à long terme.
◆ incorporer les questions relatives à l’égalité des sexes.
◆ impliquer les populations vulnérables et leur accorder la
◆ accompagner, promouvoir et mettre en œuvre des plans
globaux participatifs, tant nationaux que locaux, afin
d’anticiper et prévoir les éventuelles questions de sécurité
alimentaire et des moyens de subsistance ou de mobilité
humaine liées aux facteurs de stress climatiques.
◆ s’attaquer aux défis et opportunités transfrontaliers liés à
l’adaptation et à la mobilité humaine.
24_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
crédit photo : © 2012 Lars johansson
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 25
priorité.
1- Nature et objectif du présent rapport
Dès le milieu des années 1980 au moins, les scientifiques
ont établi des corrélations entre les changements
environnementaux et la mobilité humaine . c’est alors que
les premiers débats sur les projections et prévisions quant
au nombre de futurs « migrants environnementaux » ont
vu le jour . plus récemment, des travaux tant conceptuels
qu’empiriques ont étudié les relations plus larges existant
entre les facteurs environnementaux et la migration dans
diverses situations . ces travaux ont permis de dégager
des schémas généraux qui ont servi de point de départ
pour des études plus nuancées sur les interactions entre
facteurs climatiques et socioéconomiques . depuis, des
études ont montré que les facteurs environnementaux
jouent effectivement un rôle dans la mobilité humaine et
souligné le fait qu’il se peut que certaines des populations
les plus exposées aux facteurs de stress environnementaux
(en particulier les agriculteurs, éleveurs, pasteurs, pêcheurs et
1.1 Que sait-on de l’influence des changements
environnementaux sur la mobilité humaine ?
autres, dont le mode de vie dépend des ressources naturelles
et des conditions climatiques) n’aient, par l’avenir, que peu
ou pas la possibilité de se déplacer loin de leur lieu de vie
d’origine . dans les décennies à venir, ces populations à la
« mobilité » potentiellement « limitée » risquent de voir le
potentiel de leurs territoires d’origine se détériorer en même
temps que se réduiront leurs possibilités de migrer vers des
zones plus favorables tout en préservant leur sécurité et leur
dignité. à moyen et long terme, les implications qu’aura
le changement climatique sur de nombreuses questions
relatives aux mouvements de population sont telles que des
chercheurs se sont mis en quête de mieux comprendre dans
quelles circonstances les facteurs climatiques influent sur les
décisions humaines : partir ou ne pas partir, où aller, quand,
et quand revenir ?
26_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
1.2 Rapports entre la variabilité pluviométrique, la sécurité
alimentaire/des moyens de subsistance et la mobilité humaine
L’étude « Rainfalls » tire ses informations de recherches
empiriques et participatives menées dans huit pays d’Asie,
d’Afrique et d’Amérique latine. Les données primaires
originales ont servi à tracer de nouvelles cartes montrant les
flux migratoires au sein de régions particulières dans les pays
choisis pour l’étude. des recherches de terrain approfondies
ont eu lieu sur des sites au guatemala, au pérou, au ghana,
en Tanzanie, en Inde, au bangladesh, en Thaïlande et au
viet Nam. Les huit études de cas « Rainfalls » apportent
des éléments probants qui dévoilent une série d’interactions
complexes et illustrent les effets réciproques de la variabilité
pluviométrique, de l’insécurité alimentaire et des moyens de
subsistance, et des choix migratoires (saisonniers, temporaires,
permanents ou aucun) pour des ménages présentant des
caractéristiques différentes (richesse, propriété foncière,
accès à des options en termes de diversification des revenus,
sexe, âge, éducation etc.). L’étude détaille également dans
quelles mesures ces caractéristiques influent positivement
ou négativement sur les capacités des ménages à décider de
migrer ou non de manière judicieuse.
En se basant sur les interactions actuelles entre variabilité
pluviométrique, sécurité alimentaire et des moyens de
subsistance et décisions migratoires des ménages, l’étude «
Rainfalls » fait appel à une modélisation axée sur les agents
pour comprendre l’incidence que les modifications futures
des régimes pluviométriques auront sur la migration. pris
dans leur ensemble, les études de cas et les résultats de la
modélisation : (1) démontrent la complexité et la diversité
de ces relations et la nécessité d’adapter les politiques et
interventions pour tenir compte de facteurs clés aux niveaux
nationaux, infranationaux, communautaires, familiaux et
individuels. (2) étudient en détail l’idée selon laquelle la
variabilité pluviométrique a une incidence sur les décisions
migratoires des ménages dans la mesure où elle a une
influence négative sur leur consommation alimentaire et leurs
revenus, surtout sur les sites où les moyens de subsistance
dépendent largement des cultures pluviales.
par conséquent, la question des interactions entre le
changement climatique mondial (et local) et la migration
humaine n’est pas de savoir si les facteurs environnementaux
sont les seules causes de la mobilité mais comment de multiples
facteurs convergent pour peser sur les choix migratoires. une
compréhension plus nuancée de la façon dont les facteurs
climatiques influencent sur ces choix permettra de formuler
des politiques d’investissements et d’adaptation pour que,
quelles que soient les stratégies adoptées par les ménages
(notamment la migration), celles-ci contribuent à améliorer
leur résilience aux changements climatiques .
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 27
1.3 de l’utilité de comprendre les décisions en matière de
mobilité dans le contexte des changements climatiques
L’étude «Where The Rain Falls» (« Rainfalls ») s’inspire des
recherches menées jusqu’à présent sur les changements
environnementaux et la migration . Elle isole la variabilité
pluviométrique et l’insécurité alimentaire en les identifiant
comme des facteurs clés de la migration. ce faisant, elle
permet l’analyse des caractéristiques des ménages et, en
relation avec ces deux facteurs, répond à la question de
recherche : « dans quelles circonstances les ménages ont-
ils recours à la migration comme stratégie de gestion des
risques ? ». L’étude « Rainfalls » apporte des indications sur
la façon dont la mobilité humaine pourrait se développer
dans le contexte du changement climatique, où les régimes
pluviométriques devraient évoluer considérablement au
cours des prochaines décennies, notamment en termes de
dates (saisonnalité), de qualité (phénomènes extrêmes,
intensité des précipitations) et de répartition (géographique).
jusqu’à présent, les publications portant sur la migration
environnementale se sont peu intéressées aux circonstances
entourant les décisions et processus migratoires, tels que la
durée du séjour des migrants sur le lieu de destination, les
caractéristiques des migrants et des non-migrants, les actions
et démarches entreprises par les migrants à leur arrivée, le
type d’emploi recherché et les facteurs qui encouragent ou
découragent leurs choix en matière de migration. L’étude
« Rainfalls » : (1) met en lumière les caractéristiques des
ménages migrants et non migrants et les facteurs qui influent
sur leur décision à l’heure actuelle (résultats des études de
cas) et le feront à l’avenir (résultats de la modélisation) ;
(2) permet de mieux comprendre quels types de ménages
peuvent se retrouver dans l’incapacité de s’adapter aux
changements pluviométriques dans certaines régions, que
ce soit in situ ou par le biais de la migration, et quels sont
les facteurs qui contribuent à accroître la résilience ou la
vulnérabilité de certains types de ménages face aux variations
pluviométriques.
Les résultats de l’étude « Rainfalls » présentés ci-dessous
permettent de dégager quatre profils de ménages allant
de ceux qui sont en mesure de recourir à la migration pour
améliorer leur résilience à ceux qui, disposant d’une marge
d’adaptation réduite, luttent pour survivre sur leur lieu de
vie sans pouvoir envisager la migration comme stratégie de
gestion des risques.
28_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
1.4 Nouvelle approche de réflexion et contribution du
présent rapport
Une nouvelle approche de réflexion doublée d’une attitude
pragmatique sera nécessaire pour répondre aux menaces
en termes de sécurité humaine que les changements
environnementaux, dont le changement climatique,
font peser sur les schémas actuels de mobilité humaine
(notamment la migration et le déplacement) et sur la
répartition des populations à l’avenir. La mobilité humaine
est une réaction non négligeable (et de plus en plus
fréquente dans certaines régions) aux bouleversements
des régimes climatiques se produisant à travers le monde.
or, les publications relatives au changement climatique ou
à la mobilité humaine ne traitent guère des circonstances
où la mobilité s’avère une option d’adaptation, ni de ses
impacts ni des autres options possibles. Les décideurs ont
besoin de meilleures informations, de données empiriques
et d’une analyse des problèmes et des solutions potentielles
relatives aux mouvements de population dans le contexte
du changement climatique. L’étude « Rainfalls » répond à ce
besoin et permet de combler les lacunes grâce à:
◆ des méthodes de recherche nouvelle génération : L’approche
méthodologique développée pour le projet « Rainfalls », qui a
été publiée pour servir de ressources aux futures recherches,
associe plusieurs méthodes (enquête auprès des ménages,
divers outils pour la recherche participative, et entretiens
auprès d’experts). de plus, les données météorologiques
locales recueillies ont pu être comparées aux perceptions
locales des changements des régimes pluviométriques.
◆ Nouvelles données empiriques : des équipes de chercheurs
nationaux et internationaux se sont déployées sur huit sites
au guatemala, au pérou, au ghana, en Tanzanie, en Inde, au
bangladesh, en Thaïlande et au viet Nam. Elles ont récolté
un grand nombre de données quantitatives et qualitatives
portant sur les régimes historiques de précipitations, les
conditions de sécurité alimentaire des ménages et les
schémas de mobilité humaine (n = 1 295 enquêtes auprès
des ménages et plus de 2 000 participants aux groupes de
discussion et aux entretiens auprès des experts).
◆ cartes : de nouvelles cartes ont été dessinées pour chacun
des sites étudiés afin d’obtenir une représentation visuelle des
principales données relatives aux régimes des précipitations, à
l’agriculture et à la sécurité alimentaire, ainsi qu’aux schémas
migratoires actuels dans les villages étudiés.
◆ Cadre analytique : Afin d’harmoniser les informations
recueillies sur les huit sites de recherche, très différents,
et de répondre à la question « dans quelles circonstances
les ménages utilisent-ils la migration comme stratégie de
gestion des risques ? », un cadre analytique a été proposé
pour mettre en évidence huit considérations clés aux niveaux
national, des sites et des ménages.
◆ modélisation axée sur les agents : grâce aux données
recueillies sur le terrain, le projet a commencé à développer
le modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls »
(mmAAR), qui dresse un tableau prévisionnel des décisions
migratoires des ménages dans le cadre de différents scénarios
relatifs à la variabilité pluviométrique. Le rapport présente
les résultats préliminaires obtenus sur le site de recherche
tanzanien.
◆ Réflexions politiques : Les auteurs s’inspirent des conclusions
des recherches de terrain pour proposer des réflexions sur
les politiques à adopter aux niveaux mondial et national, à
l’intention des états, des agences multilatérales, des instituts
de recherche et des organisations non gouvernementales
qui travaillent directement avec de nombreuses populations
parmi les plus vulnérables au monde
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 29
1.5 portée et limites du présent rapport
Les auteurs du rapport n’ont pas tenté de :
◆ Fournir des estimations mondiales sur le nombre d’individus qui pourraient se déplacer ou y être contraints à l’avenir en réaction à la variabilité pluviométrique .
◆ Indiquer les destinations géographiques précises des futurs migrants.
◆ Établir des relations de cause à effet entre la variabilité pluviométrique ou autres phénomènes liés au changement climatique et la mobilité humaine.
Ils se sont attachés plutôt à démontrer les relations actuelles entre la variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance, et les circonstances dans lesquelles la migration devient une stratégie de gestion des risques pour ces facteurs de stress dans différentes régions du monde. Ils espèrent que le rapport s’avérera utile à ceux qui essaient de déterminer les zones de tension actuelles en termes de migration et de sécurité alimentaire dues à la variabilité pluviométrique, et celles susceptibles d’y être confronté à l’avenir. La modélisation axée sur les agents du projet « Rainfalls » permet de présenter des scénarios d’anticipation plausibles qui serviront de point de départ aux décideurs. Ainsi, ceux-ci pourront focaliser les débats sur le rôle de la mobilité humaine dans l’adaptation.
30_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
2- Méthodes multidisciplinaires du projet « Where The Rain Falls »des recherches de terrain ont été menées dans huit pays
(bangladesh, ghana, guatemala, Inde, pérou, Tanzanie,
Thaïlande et Viet Nam) afin de réaliser le premier objectif du
projet Where The Rain Falls, à savoir « conceptualiser la relation
entre le changement des régimes météorologiques (saisons
et précipitations en particulier), la sécurité alimentaire, les
inégalités sociales (notamment en termes d’égalité des sexes)
et les différentes formes de mobilité humaine . » La question
associée à cet objectif est : « dans quelles circonstances les
ménages ont-ils recours à la migration comme stratégie de
gestion des risques en réponse à une augmentation de la
variabilité pluviométrique et de l’insécurité alimentaire ? »
pour les recherches de terrain, trois méthodologies
complémentaires ont été utilisées : recherches participatives
(pRA), enquête auprès des ménages (HH) dans les
communautés étudiées et entretiens avec divers experts
dans leurs pays respectifs. Les chercheurs ont également
procédé à des analyses documentaires pour chacun des cas.
Le choix de ces trois méthodes s’explique par le fait qu’ils
souhaitaient recueillir des observations sur le thème étudié et
sur sa dynamique auprès de sources variées. Ils souhaitaient
ensuite confronter ces observations et vérifier si celles-ci
se complétaient ou se contredisaient. Les méthodologies
utilisées pour le projet Where The Rain Falls apportent une
nouvelle dimension aux recherches effectuées à ce jour sur
la thématique de la migration environnementale provoquée
par les changements climatiques . pour autant que les
auteurs le sachent, c’est la première fois que l’on combine
ces méthodes dans le cadre d’une recherche de terrain multi-
pays sur ce sujet.
même si les séances de recherche participative et l’enquête
auprès des ménages concernent les mêmes communautés, il
était important de recueillir des données tant quantitatives
que qualitatives et ainsi réaliser une analyse approfondie qui
non seulement permette de répondre à la première question
de recherche mais serve aussi à développer et appliquer le
modèle axé sur les agents (mAA). Les trois méthodes ont
été testées avant de commencer le travail sur le terrain
pour garantir leur validité et vérifier leur utilité en termes
de contenu et de longueur ainsi que leur applicabilité dans
divers contextes culturels. on trouvera une présentation de
chacune de ces méthodes ci-dessous .
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 31
crédit photo : © 2008 phil borges/cARE
32_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
2.1 Entretiens auprès d’experts
Les experts interrogés sont essentiellement des représentants
gouvernementaux, des dirigeants locaux, des acteurs de la
société civile et des scientifiques/universitaires possédant
des connaissances ou des informations précises en rapport
avec le projet (migration, variabilité pluviométrique,
insécurité alimentaire et des moyens de subsistance, plans
de développement nationaux ou locaux, adaptation aux
changements climatiques, vulnérabilité etc.). dans la
mesure où le temps et le budget impartis le permettaient,
les entretiens ont été menés aux niveaux national, régional/
de district et local pour recueillir autant d’informations
utiles que possible. Le manuel pour les entretiens semi-
structurés comprenait des questions relatives à chacun des
trois principaux thèmes (changement climatique et variabilité
pluviométrique, insécurité alimentaire et des moyens de
subsistance, migration). Non seulement ces questions
couvraient les observations, interprétations et analyses des
experts, mais elles étaient orientées vers l’action, un espace
étant réservé pour les recommandations des personnes
interrogées.
crédit photo : © 2007 brendan bannon/cARE
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 33
2.2 Recherches participatives (pRA)
L’objectif des séances de recherche participative était
d’impliquer les communautés locales et certains groupes
particuliers dans l’évaluation de la situation, présente et
antérieure, dans leur village, d’entendre de leur propre
bouche quel avenir ils se souhaitaient et de recueillir des
messages sur lesquels baser l’élaboration des politiques
locales, nationales ou mondiales. ce qu’il faut savoir des
séances de recherche participative, c’est qu’elles comprennent
des questions ouvertes qui permettent tant à l’enquêteur
qu’aux experts interrogés d’explorer certains sujets en
profondeur, sans limiter les réponses au format rigide d’un
questionnaire d’enquête. des éléments visuels comme des
tableaux à feuilles mobiles, des cartes ou des craies ont servi
d’outils pour animer les discussions en groupe. ces séances
ont permis de comprendre les dynamiques de groupe et les
corrélations entre les différentes questions. cette technique
a été utilisée sur les sites des huit pays. La composition des
groupes variait selon les sessions, certains étant homogènes
(rien que des hommes, des femmes, des personnes âgées,
des individus marginalisés, des jeunes, des cultivateurs ou des
personnes travaillant hors du secteur agricole etc.) et d’autres
mélangés, afin d’obtenir l’éventail le plus large possible de
commentaires et de dégager et inclure le vécu de groupes
sociaux précis. cette approche s’est révélée particulièrement
importante afin de recueillir le point de vue des femmes,
des personnes âgées ou des groupes susceptibles d’être
socialement marginalisés etc.
Les séances de recherche participative proposaient une large
gamme d’outils adaptés au contexte, au type d’information
souhaitée et aux groupes invités. En voici une liste non
exhaustive : transect (qui fournit une représentation
transversale des différentes zones agro-écologiques et
les compare à certains paramètres intéressants pour nos
recherches), classement par richesse (explore les perceptions
des différences de niveaux de vie et des inégalités au sein
des communautés), groupe de discussion (réunit divers
groupes appartenant à la communauté pour des discussions
ouvertes), cartes de mobilité (explore les schémas de mobilité
des individus, des groupes et des communautés), calendriers
saisonniers (perceptions qu’ont les habitants des variations
saisonnières sur les sites de recherche), classement des risques
d’atteinte aux moyens de subsistance (perceptions qu’ont
les habitants des risques qu’ils encourent et leur classement
par ordre d’importance), diagrammes de venn (illustrent
l’importance et la facilité d’accès à des institutions cruciales
ou aux individus qui influencent les communautés locales)
et diagrammes d’impact (révèlent les impacts de certaines
activités, interventions ou événements sur les communautés
et les corrélations entre tous ces facteurs).
34_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
2.3 Enquête auprès des ménages
L’objectif de l’enquête auprès des ménages était d’obtenir
des indicateurs quantifiables et de dégager des tendances
reflétant les différents facteurs qui affectent les ménages en
termes de variabilité pluviométrique, de sécurité alimentaire/
des moyens de subsistance et de migration. Il s’agissait
aussi de rendre possible une analyse statistique pour
compléter les résultats qualitatifs. jusqu’à présent, les études
multi-pays menées sur la relation entre les changements
environnementaux et les migrations faisaient appel soit à
des enquêtes soit à des groupes de discussion, mais pas aux
deux.
L’enquête auprès des ménages comprenait différentes
sections, chacune représentant un aspect important de
l’étude : informations démographiques générales sur les
ménages, activités économiques des ménages, problèmes
de subsistance, sécurité alimentaire et consommation,
migration, stratégies d’adaptation, régimes des précipitations,
patrimoine et ressources familiaux. Les sections n’étaient
pas thématiquement séparées afin de pouvoir détecter les
variables communes et explorer les corrélations mutuelles ainsi
que leurs dynamiques au sein des ménages. contrairement
à la recherche participative, la plupart des questions de
l’enquête étaient fermées et quantifiables. Chaque section
comprenait malgré tout quelques questions ouvertes pour
étayer l’analyse des données et servir à la modélisation.
celles-ci ont permis de révéler davantage de détails tout en
replaçant les réponses des ménages dans leur contexte.
Les foyers ciblés dans chacune des huit études de cas étaient
au minimum 150, chaque site de recherche comprenant
un total de 3 ou 4 villages. Les chercheurs ont utilisé une
technique d’échantillonnage aléatoire simple ou stratifié selon
les informations démographiques disponibles dans chaque
cas . Le répondant ciblé était le chef de famille (homme
ou femme). Lorsque celui-ci/celle-ci n’était pas disponible,
l’entretien s’est déroulé avec le second représentant du
ménage, à condition que celui-ci/celle-ci possède la maturité
nécessaire, et soit capable de traiter des sujets étudiés et de
participer au processus décisionnel familial.
Les chercheurs ont dû accepter des compromis pour
garder une certaine cohérence dans l’administration et
les résultats du questionnaire, puisque les huit cas d’étude
représentaient des contextes culturels très différents. des
tests préalables leur ont permis de déterminer quelles
portions de l’instrument ajuster en fonction du contexte local
: de petites modifications ont été apportées, le cas échéant,
dans la formulation de certaines questions et dans les unités
de mesure afin qu’elles correspondent à celles en usage sur
chaque site. L’on a également tenu compte de certaines
caractéristiques démographiques (appartenance ethnique,
caste, pratiques conjugales etc.) lors de l’adaptation du
questionnaire à chacun des cas d’étude.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 35
2.4 Scénarios futurs des précipitations et de la migration tirés
de la modélisation axée sur les agents
Le premier objectif de l’étude « Rainfalls » était de comprendre
les relations actuelles entre variabilité pluviométrique,
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance et décisions
des ménages en matière de migration. pour ce faire, l’on
a eu recours au travail de terrain et aux méthodes décrites
ci-dessus. Le deuxième objectif impliquait d’explorer
des scénarios potentiels pour répondre à la question : «
quels sont les scénarios où la variabilité pluviométrique
et la sécurité alimentaire seront susceptibles d’influencer
fortement la mobilité humaine dans certaines régions du
monde au cours des 20 ou 30 années à venir ? » pour cet
objectif de recherche orienté vers l’avenir, l’on a eu recours à
une modélisation axée sur les agents. Les résultats obtenus
en Tanzanie figurent dans le présent rapport. On trouvera
également dans l’annexe technique une description plus
détaillée de la modélisation.
2.5 champs de recherche, méthodes et triangulation
dans le cadre conceptuel des huit études de cas (Tableau
1), l’interaction entre les aspects les plus importants pour
chaque ménage, à savoir la variabilité pluviométrique, la
sécurité alimentaire et la migration (considérée comme un
élément particulier des stratégies d’adaptation) constitue
le principal centre d’intérêt. c’est là-dessus que se fonde
l’approche globale « moyens de subsistance (sécurité) »
utilisée ici, laquelle apparaît en gris à l’arrière-plan. L’on a
fait abstraction des extensions conceptuelles. Le cadre
peut aussi être déterminé par d’autres facteurs, tels que les
développements économiques ou politiques, les conflits, etc.
36_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
L’illustration 1 offre un aperçu des trois principaux champs de
recherche du projet « Rainfalls », des sources d’informations
utilisées ainsi que du processus de triangulation effectué
grâce aux méthodes décrites ci-dessus. dans ce cadre, on
voit que la sécurité des moyens de subsistance des ménages
étudiés est influencée par la variabilité pluviométrique
(variable indépendante ayant un effet sur le cheptel et
les récoltes). ces facteurs, ajoutés à celui de la propriété
foncière, aident à déterminer la situation du ménage en
termes de sécurité alimentaire, laquelle est également
structurée par des processus externes. dans le cadre, la
notion de « degré de vulnérabilité » (qui prend en compte le
degré de diversification économique, le nombre de membres
de la famille en âge de travailler, la situation financière etc.)
sert à indiquer l’éventail de stratégies d’adaptation possibles
pour les ménages. Les conclusions de l’étude se fondent
majoritairement sur des données qualitatives et quantitatives
récoltées sur le terrain. L’utilisation de données secondaires
est signalée par des encadrés de couleur en marge de ceux
des domaines de recherche. Enfin, comme le montre le cadre,
les conditions initiales évoluent de façon dynamique étant
donné les corrélations et interactions des actions du ménage
(boucles de rétroaction).
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 37
Illustration 1 : Champs de recherche, méthodes et sources
de données - Source : Rademacher-Schulz et Rossow, 2012
38_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
3- Caractéristiques nationales et des sites de rechercheétant donné la diversité des huit cas d’étude, la présente section propose un cadre d’interprétation des
résultats du projet qui pourra servir à de futures recherches. Les critères de sélection des pays et des sites
sont détaillés ci-dessous. on trouvera ensuite un premier niveau de catégorisation, qui fait la distinction
entre les huit pays en fonction d’indicateurs sociaux, économiques et démographiques au niveau macro.
Au niveau infranational, les différences entre les divers sites de recherche du projet sont décrites en termes
de caractéristiques géographiques, météorologiques et agro-écologiques.
Les sites de recherche/cas d’étude des huit pays ont été sélectionnés en fonction d’une série de critères
généraux : couvrir plusieurs régions: l’Asie du Sud et du Sud-Est, l’Afrique subsaharienne et l’Amérique
latine permet de garantir un certain équilibre. ces sites sont représentatifs des principaux écosystèmes et
moyens de subsistance, avec des niveaux moyens de pauvreté et d’insécurité alimentaire et des moyens
de subsistance sensibles à la variabilité pluviométrique. Ils ont été choisis pour produire une représentation
diversifiée de la géographie et du lieu dans un contexte national (proximité avec des centres économiques
majeurs ou mineurs). Pour des raisons pratiques, ils ont été sélectionnés sur la base de données fiables
sur les précipitations, de leur facilité d’accès géographique, de la présence de cARE sur place et des
relations que l’organisation a pu établir au plan local, ce dernier élément permettant de bénéficier de la
confiance des communautés locales et ainsi procéder aux recherches en un court laps de temps puis au
suivi programmatique ultérieur.
Les huit pays où les recherches ont été effectuées présentent, au niveau macro, un large éventail de
conditions dans lesquelles les ménages prennent des décisions, dont celle de la migration, pour assurer
leur subsistance. En termes de performance économique globale, de niveaux de développement et de
sécurité alimentaire, le pérou et la Thaïlande arrivent en tête du classement (voir Tableau 1) . à l’opposé,
le bangladesh et la Tanzanie se situent au bas de l’échelle pour ces trois indicateurs. Les pays du groupe
3.1 critères pour la sélection des pays et des sites
3.2 contexte national
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 39
crédit photo : © 2007 bill dowell/cARE
40_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Pauvreté et insécurité alimentaire
relativement faibles
Pauvreté et insécurité alimentaire
modérées à élevées
Transition économique et
démographique à un stade plus
avancé
pérou
Thaïlande
vietnam
Inde
bangladesh
ghana
guatemala
Tanzanie
Transition économique et
démographique à un stade moins
avancé
intermédiaire (Inde, viet Nam, ghana et guatemala) ne sont pas homogènes en termes de développement économique et
social ou de sécurité alimentaire. on peut noter par exemple des niveaux plus élevés de malnutrition en Inde et au guatemala.
d’autres indicateurs offrent des enseignements sur le contexte national, en perpétuel évolution, dans lequel les ménages ont
accès à diverses options en matière de subsistance, ainsi que sur la façon dont ces options influent sur les décisions migratoires
dans les familles rurales . Dans les pays où les possibilités de diversifier les sources de revenus en dehors de l’agriculture sont
limitées et où le taux de croissance de la population reste élevé, les ménages ruraux peuvent être obligés de choisir la migration
comme stratégie de gestion des risques face à l’insécurité alimentaire, en tout cas davantage que ceux qui vivent dans des pays
offrant une gamme plus large en matière de diversification des revenus, agricoles ou non. L’analyse montre que le Pérou et la
Thaïlande sont des pays caractérisés par une économie dynamique où la pauvreté et l’insécurité alimentaire sont relativement
faibles. Le viet Nam, l’Inde et le bangladesh appartiennent tous les trois à la catégorie des pays en pleine transition économique
et démographique, avec cependant des niveaux de pauvreté et d’insécurité alimentaire qui restent modérés à élevés. La dernière
catégorie comprend le ghana, la Tanzanie et le guatemala, où les niveaux de pauvreté et d’insécurité alimentaire sont élevés. Leur
croissance économique faible, combinée à la croissance de la population et à une forte dépendance envers l’agriculture paraît, à
des degrés divers, limiter les possibilités de diversifier les moyens de subsistance des ménages ruraux.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 41
Tableau 1 : Contexte des huit pays étudiés : pauvreté, sécurité
alimentaire, transition économique et démographique au
niveau macro
Le classement de ces pays coïncide, quoique partiellement,
avec la typologie régionale des contextes nationaux. Trois des
quatre cas d’étude asiatiques s’inscrivent dans la catégorie
des pays dynamiques possédant un niveau de pauvreté et
d’insécurité alimentaire modérées à élevées, la Thaïlande
faisant exception étant donné les succès que remporte
sa politique de réduction de la pauvreté depuis quelques
dizaines d’années. Le ghana et la Tanzanie sont tous deux les
exemples d’une croissance économique réussie en Afrique,
mais la pauvreté, l’insécurité alimentaire et la croissance de
la population y restent relativement élevées. Les deux études
de cas latino-américaines se trouvent aux deux extrémités
de l’échelle, le pérou ayant connu d’énormes avancées ces
dernières décennies, tant en termes de croissance économique
que de réduction de la pauvreté, alors que le guatemala fait
face à une stagnation économique et continue de présenter
des niveaux élevés de malnutrition et d’inégalité.
on constate aussi une grande diversité parmi les sites
sélectionnés dans les huit pays où ont été effectuées les
recherches pour le projet. L’un des critères importants pour
la sélection des sites se rapportait à la variable indépendante
de l’étude, à savoir les précipitations. Suivant les sites, leur
moyenne annuelle varient entre 560 mm et 1 700 mm (voir
Tableau 2). La saisonnalité des régimes pluviométriques et
la dépendance envers les cultures pluviales étaient aussi
des considérations importantes, même si, comme dans le
cas de l’Inde, les communautés avaient largement accès à
l’irrigation par canaux. d’autres caractéristiques relatives
à des variables importantes ont été prises en compte :
sensibilité des sources locales de revenus aux modifications
des régimes pluviométriques, niveaux élevés de pauvreté et
d’insécurité alimentaire, migrations documentées au cours
de l’histoire, et rapport supposé entre modifications des
régimes des précipitations, insécurité alimentaire et mobilité
humaine. L’altitude (hautes et basses terres) et la proximité de
villes ou autres centres présentant des opportunités d’emploi
alternatif non négligeables (p. ex. zones industrielles) ont
également joué un rôle dans la sélection.
3.3 caractéristiques des sites de recherche
42_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Table 2: Average annual rainfall in the research sites
Au guatemala, au pérou et en Thaïlande, les recherches ont été menées sur des hauts plateaux. Si le site du guatemala est fort
éloigné des grands centres urbains, celui du pérou se distingue par sa proximité avec une ville secondaire importante et en pleine
expansion. Les sites à faible altitude se trouvent au ghana, en Inde, au bangladesh et au viet Nam. quant aux villages étudiés
en Tanzanie, ils comprennent tant des plaines que des hautes terres. L’accès à l’irrigation est presque inexistant sur les sites du
guatemala et du ghana, et de 84 pour cent en Inde, ce qui n’empêche que sur ces trois sites, la plupart des agriculteurs doivent se
contenter d’une seule récolte par an. La double récolte annuelle, voire plus, est chose courante au bangladesh, au viet Nam et en
Thaïlande, qui disposent de ressources hydriques plus abondantes pour l’agriculture, en raison des précipitations plus importantes
et de la proximité des rivières. En Tanzanie, bien que le site soit semi-aride, le régime des précipitations est bimodal. Il est donc
possible de procéder à deux récoltes par an lorsque les pluies ne font pas défaut.
bangladesh, région du nord (district de Kurigram)
viet Nam, delta du mékong (province de dong Thap)
Inde centrale (district de janjgir, chhattisgarh)
guatemala, hauts plateaux orientaux (municipalité de cabricán)
ghana du nord (district de Nadowli, Haut ghana occidental)
Thaïlande, région du nord (province de Lamphun)
pérou, Andes centrales (province de Huancayo)
Tanzanie du nord (district de Same, région du Kilimandjaro)
1,700
1,500
1,150
1,036
1,229
1,017
800
560
Plaine fluviale
plaine du delta
plaine irriguée
Hauts plateaux
Savane boisée
Région montagneuse et
fluviale
Région montagneuse
Hauts plateaux et
plaine fluviale
Précipitations moyennes
annuelles approximatives (mm)GeographieSite de recherche
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 43
crédit photo : © 2011 Kees van der geest
44_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
4. Résultats des études de cas : la migration dans le contexte de la variabilité pluviométrique et de la sécurité alimentaire / des moyens de subsistanceon trouvera dans la présente section un résumé des conclusions des
rapports des études de cas résultant des recherches de terrain menées dans
les huit pays couverts par le projet. ces études ne sont pas regroupées
géographiquement mais en fonction des catégories définies dans le cadre
analytique décrit ci-dessus. chacune des synthèses comprend une carte dont
le contenu et l’objectif sont décrits dans les pages qui suivent. Les schémas
de migration que l’on abordera ci-dessous en relation avec la variabilité
pluviométrique et la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance sont
définis de la façon suivante : la migration saisonnière est définie dans la
présente étude comme un déplacement de moins de six mois, alors que la
migration temporaire se réfère à des déplacements de six mois à deux ans.
La migration permanente qualifie les déplacements de plus de deux ans.
chacune des huit études de cas comprend une carte qui situe le site de
recherche en question et fournit des données contextuelles sur l’importance
des précipitations et leur variabilité, la pauvreté et l’agriculture. Les cartes
décrivent aussi les flux migratoires rapportés par les répondants pendant la
recherche de terrain. on trouvera des informations complètes sur tous les
éléments reproduits sur les cartes dans l’annexe technique.
Légende des cartes du présent rapport
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 45
46_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
4.1 Thaïlande : grâce à des sources de revenus diversifiées et un
accès aux biens et aux services, la migration est désormais un choix
dans la province de Lamphun21
En Thaïlande, les recherches ont été menées dans quatre
villages de la province de Lamphun (deux de l’ethnie thaï et
deux de l’ethnie Karen) : don-moon, Sandonhom, maebon-
Tai et Huai-ping. ceux-ci se trouvent dans le sous-district de
ban puang, dans un environnement rural et montagneux
typique du nord de la Thaïlande. Les villages sont perchés
sur les pentes de collines boisées, le long de ruisseaux qui
se jettent dans la rivière Li. (pour les données relatives à la
situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres
agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations
de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 3
ci-dessous.) En Thaïlande, la migration fait partie depuis 50
ans d’un processus plus large de transformation économique
et de réponse à des niveaux assez élevés par le passé
d’insécurité alimentaire et de pauvreté. pour les populations
rurales, c’est une stratégie courante d’adaptation à la
saisonnalité de la production agricole, la rareté des terres et la
crise économique . une politique d’investissement destinée
à favoriser une agriculture plus productive, diversifier les
sources de revenus et promouvoir l’éducation et la sécurité
sociale a permis d’améliorer la résistance des ménages de
la province de Lamphun à des facteurs de stress comme la
variabilité pluviométrique et l’insécurité alimentaire.
Illustration 3: Site de recherche en Thaïlande
Moyenne des précipitations
Terres agricoles (%)
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Variabilité Pluviométrique/Fréquence des sécheresses
Pluvi
ales
(%
)Ir
riguée
s (%
)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 47
Illustration 3: Site de recherche en Thaïlande
48_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
crédit photo : © 2011 phalakorn paomai
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 49
La moyenne annuelle des précipitations dans la province de
Lamphun est de 1 017,03 mm. Les données météorologiques
locales montrent que la pluviosité annuelle a légèrement
augmenté au cours des 30 dernières années. Six des sept
pics dépassant la moyenne annuelle de 1 200 mm ont eu
lieu au cours des deux dernières décennies. Fin 2011, la
Thaïlande a été frappée par l’une des pires inondations
depuis des décennies. de fortes pluies (28 pour cent de plus
que la normale entre janvier et octobre) ont provoqué de
graves inondations accompagnées d’importants dégâts à
bangkok et dans le centre du pays. ces crues ont recouvert
1,6 millions d’hectares, occasionné la perte d’un quart de la
production de riz, provoqué 730 décès et contraint 9 859
usines employant un total de 666 000 personnes à fermer
leurs portes. Selon la banque mondiale, les dommages et
pertes économiques ont atteint 45,7 milliards de dollars
uS. Les pluies exceptionnelles de 2011 ont dominé les
conversations sur les contraintes climatiques parmi les
villageois de la zone de recherche. Les participants à l’étude
ont constaté une évolution des schémas climatiques au cours
de la dernière décennie, dont des précipitations accrues et
des températures plus élevées pendant la saison froide. Les
villageois disaient être régulièrement exposés au stress lié à la
pluviosité, notamment les phénomènes de périodes sèches,
de pluies abondantes et de crues soudaines. quatre-vingt-
sept pour cent des ménages interrogés ont déclaré que des
pluies diluviennes se produisaient plus fréquemment depuis
10-20 ans.
La pauvreté et l’insécurité alimentaire sont d’abord des
phénomènes ruraux en Thaïlande : 88 pour cent des 5,4
millions d’individus défavorisés du pays vivent à la campagne.
Le taux national de pauvreté est passé de 57 pour cent en
1962/63 à 8 pour cent en 2009. dans le nord, il était de
10,5 pour cent en 2010, ce qui est supérieur à la moyenne
nationale et bien plus élevé qu’à bangkok (0,6 pour cent).
même si l’insécurité alimentaire a fortement décru, elle
demeure un problème dans certaines des poches rurales des
régions du nord et du nord-est . dans la zone étudiée, les
deux villages thaïs possèdent deux fois plus de revenus et des
niveaux d’instruction nettement supérieurs à ceux des deux
villages karen. dans les quatre villages, seuls 2,4 pour cent des
ménages ne possèdent pas de terres. Au cours des dernières
décennies, le pourcentage de la population pratiquant
une agriculture de subsistance dans le nord du pays ayant
fortement diminué, les revenus des cultures commerciales,
du tissage, des transferts d’argent, des petites entreprises et
petits commerces et des programmes gouvernementaux de
sécurité sociale (p. ex. indemnités en faveur des personnes
âgées) sont devenus des éléments importants d’une gamme
plus diversifiée de moyens de subsistance pour les habitants
des zones rurales de la province de Lamphun.
La migration est une pratique courante dans les quatre
villages (67 pour cent précisent qu’un membre ou plus ont
connu cette expérience). même si près de 62 pour cent
des personnes ayant fait l’expérience de la migration sont
de sexe masculin, les femmes représentent aujourd’hui une
bonne moitié des migrants internes (non internationaux). Les
50_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
trois-quarts des migrants internes actuels sont non mariés, et
85,5 pour cent d’entre eux sont des migrants temporaires qui
ont quitté leur village pour une durée de plus de six mois sans
y revenir. La migration internationale s’était autrefois avéré
une stratégie de subsistance importante dans trois des quatre
villages étudiés. Aujourd’hui, seulement 10,7 pour cent
des migrants quittent le pays, la plupart pour Taïwan ou la
corée du Sud. d’après les résultats des séances de recherche
participative, les destinations actuelles privilégiées par les
migrants sont toutes internes, qu’il s’agisse de bangkok (qui
accueille 40 pour cent des migrants), de zones industrielles
(Lamphun, 25 pour cent) ou de centres urbains (chiang
mai, 20 pour cent). Alors que moins d’un quart de ceux qui
ont fait l’expérience de la migration citaient des raisons non
économiques, la migration interne est aujourd’hui motivée
par un désir d’éducation dans 38,6 pour cent des cas,
indiquant que la nature même de l’émigration est en train de
changer dans ces villages.
parmi les ménages interrogés, 51 pour cent considéraient que
les facteurs de stress environnemental liés aux précipitations
avaient un impact non négligeable sur leurs moyens de
subsistance. En outre, trois quarts des ménages indiquaient
une baisse de leurs revenus, suite à des récoltes moins
abondantes et à une baisse des revenus agricoles induites
par le stress environnemental. En dépit de contraintes
climatiques prononcées et manifestes, la diversification
des risques a permis aux ménages d’éviter la faim ou les
stratégies d’ajustement dommageables à long terme.
une grande majorité d’entre eux, dans les quatre villages,
sont à l’abri de l’insécurité alimentaire et pour le moment,
la gravité et la fréquence des agressions climatiques ne
dépassent pas un seuil qui, de leur point de vue, rendrait la
migration nécessaire pour des raisons de survie. des activités
rémunératrices diversifiées, agricoles et non agricoles (moins
sensibles à la variabilité pluviométrique), l’accès à des
ressources financières par le biais de fonds communautaires
et l’aide de l’administration locale contribuent à réduire la
vulnérabilité au stress et à l’insécurité alimentaire liées à la
pluviométrie. En dépit de l’impact négatif du changement
climatique, la majorité des ménages disait pouvoir y faire face
et s’adapter sur place. pour eux, la migration est un moyen
de profiter d’opportunités supplémentaires et d’améliorer
encore leur subsistance. En Thaïlande, les ménages interrogés
se disaient concernés par les agressions climatiques, mais la
plupart ont accès à des ressources qui leur permettent de
surmonter la variabilité pluviométrique. pour eux, la migration
représente une option supplémentaire de gestion des risques
environnementaux ou autres, qui contribue à la résilience
familiale (transferts de fonds pour financer l’éducation, afin
de permettre la diversification des moyens de subsistance du
ménage et réduire sa sensibilité à la variabilité pluviométrique
et l’insécurité alimentaire).
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 51
crédit photo : © 2011 phalakorn paomai
52_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Illustration 4 : Zone de recherche au Pérou
Moyenne des précipitations
Terres agricoles (%)
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Variabilité Pluviométrique/Fréquence des sécheresses
Pluvi
ales
(%
)Ir
riguée
s (%
)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 53
4.2 pérou : les options en matière de subsistance et les stratégies de migration dans
la province d’Huancayo varient en fonction de l’altitude et de la proximité avec les
centres24
Les recherches ont été menées dans trois villages du sous bassin du Rio Shullcas (et
de ses environs) qui fait partie du bassin fluvial du Mantaro : Acopalca, Paccha et
chamisería. Ils se situent dans le département de junín, dans les Andes centrales
péruviennes. Les villages, qui font partie de la province de Huancayo, sont perchés
à des hauteurs allant de 2 500-3 500 mètres au-dessus du niveau de la mer (zone
écologique quechua) à 4 000-4 800 mètres (zone écologique puna). (pour les
données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres
agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site
de recherche, consultez l’Illustration 4 ci-dessous.) dans cette zone de recherche,
les schémas de mobilité varient considérablement en fonction de l’altitude et de la
proximité de la ville de Huancayo.
La moyenne des précipitations annuelles dans le sous bassin du Shullcas est
actuellement de 800 mm. Les constatations faites pendant les recherches confirment
la perception de régimes pluviométriques de plus en plus imprévisibles qui, ajoutés
au gel et à des vagues de chaleur intense, ont un impact négatif sur la production
agricole. Les principaux changements rapportés dans la zone de recherche
comprennent des précipitations plus intenses mais moins fréquentes, davantage de
pluies torrentielles à des moments inattendus et des périodes sèches plus longues
pendant la saison des pluies. Inondations et sécheresses touchent respectivement
37 pour cent et 42 pour cent des ménages interrogés. La zone de recherche subit
aussi les effets du recul du glacier Huayatapallana. Les autres impacts anticipés du
changement climatique au pérou comprennent un nombre accru de journées de gel
et une réduction de 10 à 19 pour cent des précipitations .
Le département de junín faisait état d’un niveau de pauvreté de 32,5 pour cent
en 2010, dont 13,8 pour cent d’extrême pauvreté. La malnutrition chronique
dans les zones montagneuses les plus pauvres du pérou concerne jusqu’à 50 pour
54_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
cent des habitants. dans la zone étudiée, plus d’un tiers
de la population tire sa subsistance de l’agriculture, et les
cultivateurs se plaignent de rendements moindres qu’ils
attribuent à un sol « fatigué ». parmi les ménages qui ont fait
l’objet de l’enquête, 43,3 pour cent ne possédaient aucune
terre, 39,3 pour cent étaient de petits cultivateurs et 8,8 pour
cent étaient de gros exploitants. dans les endroits les plus
isolés, en haute altitude, l’économie dépend largement de
l’élevage. à des altitudes plus basses, les ménages dépendent
majoritairement de l’agriculture à petite échelle et de divers
types d’emplois réguliers ou occasionnels dans la ville voisine
de Huancayo. Les régimes fonciers ont un impact non
négligeable sur les stratégies de subsistance des ménages,
et le morcellement des terres dans les zones agricoles
des plaines ne fait que s’aggraver. Les hauts plateaux ne
connaissent pas ce problème, car on y a gardé des régimes
fonciers communaux, une façon de mutualiser les risques
pour gérer les événements climatiques extrêmes. En dépit
du rôle important qu’elles jouent, tant sur le plan familial
que productif, les femmes et les filles restent largement
exclues des processus décisionnels au niveau du ménage
et de la communauté (sans parler des niveaux décisionnels
supérieurs) et leur accès à l’éducation demeure plus limité
que celui des hommes et des garçons. Elles souffrent aussi
davantage des impacts des changements environnementaux,
car elles sont chargées, entre autres responsabilités, de
l’approvisionnement en eau et en bois pour le feu, en plus de
leurs activités dans l’élevage et l’agriculture.
La migration est une stratégie de diversification des moyens de
subsistance et des sources de revenus, de gestion des risques
et d’adaptation aux changements climatiques. Les émigrés
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 55
crédit photo : © 2007 Nathan bolster/cARE
56_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
des villages étudiés sont principalement des hommes, jeunes
ou adultes, et pratiquent la migration temporaire plutôt que
saisonnière. comme ils sont, dans leur grande majorité, de
sexe masculin, les femmes se retrouvent avec un supplément
de travail et un lourd fardeau émotionnel lorsque les hommes
émigrent de façon prolongée. Les ménages qui vivent sous le
seuil de pauvreté, y compris ceux ne possédant aucune terre
ou un maximum de 0,5 hectare, ont deux fois plus de chances
d’émigrer à la recherche de revenus non agricoles que ceux
qui se trouvent au-dessus de ce seuil. En ce qui concerne les
facteurs qui influent sur les décisions touchant à la migration,
les pressions induites par les précipitations et l’insécurité
alimentaire sont plus souvent citées que les moteurs de la
migration dite d’aspiration (comme les réseaux sociaux et
l’attrait des « lumières de la ville »). à plus basse altitude, il
est courant qu’un ou plusieurs membres du ménage fassent
le trajet quotidien vers la ville de Huancayo pour travailler
dans le bâtiment, le secteur marchand ou d’autres secteurs
économiques. ces ménages pratiquent aussi la migration
saisonnière aux confins du bassin amazonien pour la
cueillette du café. par contraste, ceux qui vivent à plus haute
altitude s’engagent dans une migration à plus long terme,
notamment en se rendant aux états-unis comme bergers
pour des contrats de trois ans. Là, la migration constitue une
stratégie typique de gestion des risques, car à cette altitude,
les sources de revenus sont moins nombreuses (en dehors de
l’élevage de troupeaux).
Les ménages interrogés se plaignaient d’une pluviométrie
de plus en plus imprévisible, qui ajoutée au gel et aux
vagues de chaleur, influe négativement sur la production
agricole. L’impact des modifications des précipitations sur
la production alimentaire s’avère conséquent pour 53 pour
cent des ménages ayant répondu. deux tiers des ménages
interrogés voient leurs récoltes endommagées et leur
rendement diminuer et pour 42 pour cent d’entre eux, les
effets négatifs sur les revenus du ménage sont substantiels.
même si les variations pluviométriques ont un impact direct
sur la sécurité alimentaire des ménages, le problème est
moins aigu que par le passé dans la zone étudiée, car les
habitants ne sont plus aussi tributaires des revenus agricoles
et qu’ils trouvent davantage d’emplois non agricoles dans les
centres urbains. La population de la ville voisine de Huancayo
a augmenté de 50 pour cent depuis les années 1980. Il est
à noter cependant que les revenus non agricoles s’ajoutent
aux revenus agricoles et qu’ils ne les remplacent pas. Les
modifications de la pluviométrie influent sur la capacité des
ménages à se nourrir et à assurer leur subsistance. En dépit des
progrès importants affichés par le pays quant à la réduction
de la pauvreté et l’insécurité alimentaire, la migration reste
une importante stratégie de diversification des revenus,
surtout pour les ménages pauvres et sans terres. pour éviter
l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance, la moitié
des ménages interrogés cherche à améliorer ses revenus en
pratiquant d’autres activités (facilitées par la migration).
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 57
crédit photo : © 2008 phil borges/cARE
58_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
4.3 viet Nam, delta du mékong : les populations pauvres
de la commune de Hung Than, sans terres et peu qualifiées,
n’ont guère d’options, en dépit de la croissance économique26
Au viet Nam, les recherches ont été menées dans la commune
de Hung Thanh (district de Thap muoi, province de dong
Thap), qui se trouve à environ 135 km de la côte, dans la
région rizicole du delta du mékong. (pour les données relatives
à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes,
aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux
destinations de migration du site de recherche, consultez
l’Illustration 5 ci-dessous.) La zone connaît des crues
annuelles, qui atteignent leur pic en octobre. à l’époque où
a eu lieu le travail de terrain pour cette étude, d’octobre à
novembre 2011, les crues avaient atteint leur niveau le plus
élevé depuis dix ans dans la commune de Hung Thanh,
complètement inondée mise à part une petite bande de terre
le long de la principale route surélevée. Les ménages pauvres,
qui n’ont que peu ou pas de terres, sont les plus vulnérables
face aux modifications des conditions climatiques locales. Ce
sont eux qui bénéficient le moins de l’agriculture intensive
qui se met en place dans la zone étudiée. La mécanisation
croissante de l’agriculture, qui profite aux gros exploitants,
fait baisser la demande de main d’œuvre pour les travailleurs
agricoles sans terres. ces derniers ont de plus en plus recours
à la stratégie de l’émigration pour faire face aux nombreuses
menaces qui pèsent sur leur subsistance, dont la modification
des régimes de précipitation et de crues, la concentration
croissante de la propriété foncière et la réduction du nombre
d’emplois suite à la mécanisation.
Illustration 5 : Zone de recherche au Viet Nam
Moyenne des précipitations
Terres agricoles (%)
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Variabilité Pluviométrique/Fréquence des sécheresses
Pluvi
ales
(%
)Ir
riguée
s (%
)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 59
Illustration 5 : Zone de recherche au Viet Nam
60_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Les recherches ont révélé de nombreuses modifications
du régime des précipitations depuis 20-30 ans : le volume
total des précipitations annuelles a augmenté, la saison des
pluies est plus longue, la pluviosité est moins prévisible et le
nombre de phénomènes météorologiques extrêmes, comme
les tempêtes et les pluies torrentielles, est en hausse. En
dépit du volume plus important des précipitations annuelles,
le niveau des crues a baissé au cours des 20-30 dernières
années, comme le montrent les données fournies par la
station de météorologie et d’hydrologie de cao Lanh pour
la période 1979-2008. ce paradoxe s’explique par le fait
que les niveaux de crue dépendent en grande partie de la
pluviométrie et de la rétention d’eau intervenant en dehors
de la zone considérée, à savoir en amont du bassin du
mékong.
dans la zone étudiée, les moyens de subsistance et la sécurité
alimentaire restent nettement tributaires de l’agriculture en
dépit d’une certaine diversification au cours des dernières
décennies, les transferts d’argent, l’aquaculture et les emplois
salariés gagnant en importance comme sources de revenus.
La grande majorité des répondants à l’enquête auprès
des ménages qui possèdent leur propre rizière (62 % du
total) a indiqué que les rendements ont baissé du fait des
changements intervenus dans les régimes pluviométriques et
de crue. mais cet impact négatif est quelque peu atténué
par les modifications d’origine humaine apportées aux
cultures, notamment l’utilisation de plus en plus fréquente de
semences et d’engrais améliorés, la construction de digues
et la mécanisation, qui ont contribué à une amélioration du
rendement de la riziculture et à l’intensification des cultures.
Les ménages ne possédant que peu ou pas de terres, qui
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 61
crédit photo : © 2005 phil borges/cARE
62_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
représentent respectivement 26 et 30,7 pour cent des 150
familles interrogées, sont les moins à même de bénéficier
de ces avancées, quand ils n’en subissent pas le contrecoup,
comme c’est le cas pour la mécanisation. La moitié des
ménages sans terres (50 %) et un quart de ceux qui en
possèdent peu (25,6 %) ont souffert de pénurie alimentaire
pendant les sept jours qui ont précédé l’enquête. pour y
remédier, ils ont dû emprunter des vivres ou de l’argent pour
acheter à manger (83,3 %), consommer des aliments moins
chers (63,8 %), limiter les portions (50 %) ou réduire la part
des adultes en faveur des enfants (36,1 %). pour 41,3 pour
cent des ménages sans terres, les apports alimentaires ont
été insuffisants au cours de l’année écoulée et 52,2 pour cent
d’entre eux disent avoir fait face à une situation similaire au
cours des 5 à 10 dernières années, ce qui représente plus
du double de la moyenne de l’ensemble des ménages ayant
fait l’objet de l’enquête. La situation d’insécurité alimentaire
atteint son apogée lors de la saison des crues (de septembre à
novembre), affectant principalement les ménages sans terre
employés comme ouvriers agricoles, pour lesquels le travail
fait défaut en raison de la montée des eaux.
En dépit de l’absence de chiffres officiels sur ce sujet au
niveau de la commune de Hung Thanh, l’ensemble des
informations recueillies par l’enquête auprès des ménages,
les séances de recherche participative et les entretiens auprès
d’experts suggèrent une forte augmentation de la migration
au cours des dix dernières années. Elle devient de plus en
plus fréquente à cause de la pression croissante exercée
sur les moyens de subsistance locaux, la demande accrue
de main d’œuvre industrielle en dehors de la commune et
la levée d’un certain nombre de restrictions politiques sur
crédit photo : © 2011 Kees van der geest
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 63
la mobilité. de plus en plus de femmes et d’hommes de la
commune de Hung Than trouvent du travail dans les zones
industrielles, en particulier à Hô-chi-minh-ville. L’enquête
auprès des ménages révèle que dans 90 des 150 familles
interrogées (60 %), au moins un des membres actuels a fait
l’expérience de la migration. Sur les 168 migrants cités dans
l’enquête, 106 sont de sexe masculin (63,1 %). Les migrants
du site de recherche avaient en moyenne 22 ans au moment
de leur première migration. La migration saisonnière a lieu
surtout pendant la saison des crues, lorsque le travail diminue
au sein de la communauté. près de la moitié des migrants
choisissent des destinations en dehors du delta du mékong,
mais restent dans la partie sud du viet Nam (essentiellement
Hô-chi-minh-ville, binh duoung et dong Nai). Les habitants
de Hung Thanh qui se déplacent au sein de la province sont
surtout des migrants saisonniers qui louent leurs services en
tant que travailleurs agricoles ou ouvriers dans des usines
locales pour des périodes de moins de six mois. En plus de
l’impact indirect de la variabilité pluviométrique sur la mobilité
humaine, les recherches de terrain ont mis en lumière un
lien direct entre les crues et la migration. pendant la saison
des pluies, le travail diminue au sein de la communauté et
beaucoup de jeunes en profitent pour pratiquer la migration
saisonnière. ce phénomène illustre le fait que pour ces
communautés, il existe un facteur récurrent non négligeable
qui influe, et continuera d’influer, sur les décisions relatives à
la migration.
La majorité des personnes qui ont répondu au questionnaire
notait les effets néfastes des pluies torrentielles, des
modifications saisonnières des précipitations et de la fréquence
accrue des jours de pluie sur les récoltes et les sources de
revenus non agricoles. à la question de savoir si les variations
des régimes pluviométriques avaient un impact négatif
sur l’économie du ménage, 89,5 pour cent des personnes
interrogées ont répondu « oui », et 35,9 pour cent d’entre
elles ont répondu « oui, beaucoup ». En règle générale, les
ménages ont plus souvent tendance à recourir à la migration
comme stratégie de gestion des risques s’ils éprouvent des
difficultés à assurer leur subsistance localement parce que :
ils n’ont pas assez de terres ; la demande de main d’œuvre
agricole n’est pas assez forte ; ils n’ont ni les compétences
ni le capital de départ pour se procurer des revenus non
agricoles suffisants sur place.
même si la migration leur permet de gérer les risques à court
terme, l’impact sur leur résilience à long terme peut être
très négatif. Pour les ménages sans terres et peu qualifiés,
la migration permet de parer au manque de revenus si
elle réussit, mais elle peut aussi interrompre le processus
éducatif et d’acquisition de compétences nécessaires pour
renforcer leurs capacités à surmonter les chocs et prospérer
économiquement.
64_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Illustration 6 : Zone de recherche en Inde
Moyenne des précipitations
Terres agricoles (%)
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Variabilité Pluviométrique/Fréquence des sécheresses
Pluvi
ales
(%
)Ir
riguée
s (%
)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 65
4.4 Inde : les ménages pauvres de janjgir-champa continuent d’utiliser la migration
saisonnière pour assurer leur sécurité alimentaire, en dépit de l’irrigation, de
l’industrialisation et des mesures de protection sociales et économiques27
Les recherches menées en Inde couvraient quatre villages du district de janjgir-
champa, dans l’état du chhattisgarh : jullan pakaria, Akalteri, banahil et Silli. Les
agriculteurs dépendent presque entièrement d’une unique récolte annuelle de
riz qu’ils cultivent pendant la saison de la mousson. (pour les données relatives
à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la
fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche,
consultez l’Illustration 6 ci-dessous.) L’insécurité alimentaire reste forte, bien que la
majorité des paysans de ces villages (84 %) aient accès à des canaux d’irrigation.
Le système d’irrigation permet une récolte par an. Il n’y a pas assez d’eau pour
une deuxième (rabi), et les agriculteurs locaux semblent avoir presque totalement
abandonné la production de légumes secs et d’autres cultures, ce qui explique le
haut niveau de chômage pendant la saison sèche. La migration devient alors une
stratégie d’ajustement, notamment pour les petits exploitants ou les ménages sans
terres.
Le projet s’est focalisé sur les problèmes liés à la pluviosité (sécheresse, moussons
tardives ou erratiques, décalage des saisons) auxquels sont confrontés les ménages
des quatre villages étudiés. Les recherches ont mis en lumière des changements
ayant un impact négatif sur la sécurité alimentaire. même si la moyenne annuelle
des précipitations ne décroît pas de façon perceptible, les experts signalent une
baisse non négligeable du nombre annuel de jours de pluie (qui est passé de 65
à 56) et un décalage d’une semaine pour le début de la mousson (du 10 au 17
juin), ce que confirment les données météorologiques locales. Le niveau de la nappe
phréatique aurait également baissé. d’après plus d’un tiers des ménages interrogés,
la fréquence des sécheresses et des périodes sèches est en augmentation depuis 10-
20 ans. près de 60 pour cent d’entre eux disent souffrir du fait que les saisons des
pluies ont raccourci.
Les habitants des villages étudiés dépendent largement de l’agriculture pour leur
66_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
subsistance. Les experts et les participants aux groupes
de discussion s’accordent à dire qu’à chhattisgarh, et en
particulier dans la zone étudiée, les principaux problèmes
agricoles sont les suivants : moussons/saisons décalées,
monoculture du riz/récolte annuelle unique, maladies
chroniques des cultures, agriculture intensive à haut niveau
d’intrants et non durable, manque de main d’œuvre au
moment des récoltes et prix défavorables aux producteurs.
même si les quatre villages ont accès à l’irrigation par canaux,
celle-ci reste insuffisante pour beaucoup d’agriculteurs,
vu le peu d’eau disponible et le manque de gestion des
systèmes. Les habitants dépendant essentiellement de la
monoculture du riz pendant la mousson, il n’est pas étonnant
que lorsqu’ils ont dû classer les menaces pesant sur leurs
moyens de subsistance au cours des séances de recherche
participative, ils aient cité en premier lieu des risques liés
à la pluviométrie, tels que les précipitations (en retard ou
erratiques), le décalage des saisons, les crues soudaines et la
pénurie d’eau potable. La croissance rapide de la population
a des implications tout aussi importantes sur la sécurité
alimentaire des sites étudiés, étant donné le morcellement
des terres voulu par le système traditionnel d’héritage. c’est
sans doute pourquoi on observe que le nombre de ménages
qui s’engagent pour des travaux agricoles à la journée est
nettement plus élevé qu’il y a dix ans, selon les résultats de
l’enquête. d’après les participants aux groupes de discussion,
les habitants cherchent à surmonter l’insécurité alimentaire
en demandant de l’aide à leur famille ou à des institutions, en
réduisant leur consommation et leurs dépenses alimentaires,
ou en essayant d’améliorer leurs revenus sans pour autant
quitter leur village. En ce qui concerne les mesures de
protection sociales ou économiques et les institutions,
les communautés ont mentionné les organismes suivants
comme ayant un impact essentiel sur la sécurité alimentaire
: les panchayat villageois (organes d’autogestion élus), les
centres Anganwadi (crèches/programmes de nutrition pré-
scolaire), les magasins de distribution de rations (système
public de distribution à prix équitable) et le bureau de poste.
S’il existe d’importants programmes nationaux de sécurité
sociale, notamment de rations alimentaires pour les familles
vivant sous le seuil de pauvreté et un système garantissant
100 jours d’emploi (mgNREgA), ceux-ci ne sont pas toujours
administrés de manière équitable et transparente, selon les
participants aux groupes de discussion, si bien que certaines
familles pauvres ne peuvent en tirer profit.
L’émigration est essentiellement saisonnière sur le site de
recherche (environ 66 %). L’émigration effectuée de janvier
à mai, après la principale récolte qui a lieu en novembre et
décembre, est le schéma le plus courant. La majorité (88 %)
est constituée de migrants économiques à la recherche de
meilleurs moyens de subsistance et de nouvelles sources de
revenus. ceux qui émigrent pour parfaire leur éducation ne
comptent que pour 2 pour cent du total. Les émigrés des
villages étudiés cherchent du travail dans les briqueteries (34
%), ou des emplois occasionnels dans le secteur informel (28
%) et le bâtiment (16 %). Les principales destinations sont
Raipur (capitale du chhattisgarh), Korba (mines de charbon
dans la partie nord du chhattisgarh) et les grandes villes à
l’est de l’Inde (calcutta), à l’ouest (pune et Ahmedabad) et
au nord (Allahabad, chandigarh, Amritsar, Shimla, jammu,
Ladakh et delhi). ce type de migration saisonnière se fait
d’autant plus facilement qu’il existe un réseau informel
d’intermédiaires et de courtiers. même si les habitants des
villages étudiés se déplacent le plus souvent en famille (seuls
19 pour cent sont célibataires), la majorité des migrants
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 67
crédit photo : © 2011 julie maldonado
68_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
est de sexe masculin (62 pour cent). La migration familiale
a ceci de positif qu’elle permet de préserver l’intégrité des
ménages, mais elle perturbe l’éducation des enfants en âge
d’être scolarisés et réduit leurs contacts avec l’enseignement
scolaire ce qui, à long terme, affecte les revenus et la mobilité
sociale des ménages concernés.
La migration est l’une des plus importantes stratégies
auxquelles les habitants des villages étudiés font appel
face aux variations pluviométriques, aux changements
climatiques et à l’insécurité alimentaire. même ceux qui
restent et obtiennent un emprunt risquent de devoir migrer
pour rembourser leurs dettes. c’est pourquoi la migration est
souvent le dernier recours des ménages sans ressources et
sans terres, surtout quand ils n’ont pas accès à ou ne peuvent
bénéficier d’autres options pour assurer leur subsistance sur
place. pourtant, même si elle leur permet de surmonter des
obstacles, la migration n’accroît pas leur résilience pas plus
qu’elle ne leur permet de saisir de meilleures opportunités.
dans certains cas, elle a des conséquences négatives sur les
relations entre générations, car elle nuit à l’apprentissage des
compétences et la poursuite des études qui permettraient
aux ménages d’améliorer leur qualité de vie et leur santé
et d’acquérir les qualifications nécessaires pour se procurer
des revenus stables. des centrales électriques récemment
construites dans la région devraient, en principe, absorber
la main d’œuvre agricole qui se cherche d’autres possibilités
d’emploi, mais en réalité, d’après les groupes de discussion,
elles sont en compétition avec les communautés pour les
mêmes ressources (terres, eau, air pur) et à ce jour, elles n’ont
guère fourni d’emplois aux habitants des villages étudiés.
Au lieu de cela, elles importent une main d’œuvre qualifiée,
forçant les villageois à aller chercher leur subsistance ailleurs.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 69
crédit photo : © 2011 julie maldonado
70_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
4.5 bangladesh : la migration est une stratégie d’ajustement clé pour les ménages
pauvres de Kurigram, mais les coûts sociaux en sont élevés28
des recherches ont été menées dans quatre villages du district de Kurigram, au nord-
ouest du bangladesh : Khanpara, Khamar Holokhana, Arazi Khodomtola, doalipara.
Le niveau de pauvreté y est très élevé, 75 pour cent des habitants dépendant
directement de l’agriculture pour leur subsistance. La région est baignée par les
fleuves Brahmapoutre et Dharala, et les revenus agricoles des villageois fluctuent
en fonction des sécheresses, des inondations et de l’érosion des berges. (pour les
données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres
agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de
recherche, consultez l’Illustration 7 ci-dessous.)
Les ménages « pauvres » ou de la « classe moyenne », dont le statut social dépend de
la taille de leur propriété foncière, sont plus « sensibles » aux sécheresses, autrement
dit à la variabilité pluviométrique, car ils dépendent, pour leur subsistance, de
l’agriculture pluviale agrémentée d’un accès limité à l’irrigation. quant aux « plus
pauvres », qui ne possèdent que peu ou pas de terres, leur vulnérabilité est forte
notamment du fait qu’ils disposent de qualifications et d’un patrimoine plus limités
pour surmonter les chocs. La migration rurale à la recherche d’emplois agricoles sert
de stratégie de protection contre l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance
liée entre autres aux facteurs de stress climatiques.
La quantité totale de pluies de mousson n’a diminué que de façon minime au
Kurigram, cependant la variabilité pluviométrique augmente. Les données sur les
précipitations fournies par les stations météorologiques locales révèlent que de 1979
à 2012, la hauteur totale des pluies de mousson (1er juin – 30 septembre) a varié de
moins de 1 000 mm à plus de 2 500 mm certaines années. Les pluies de la mousson
ont été insuffisantes en 2011 : elles n’ont fourni que 57, 75 et 87 pour cent de la
moyenne à long terme pour les mois de juin, juillet et août respectivement. à cela
se sont ajoutées 24 journées consécutives sans pluie. La majorité des habitants de la
zone étudiée a noté des changements majeurs en matière de régime pluviométrique
Illustration 7 : Zone de recherche
au Bangladesh
Moyenne des précipitations
Terres agricoles (%)
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Variabilité Pluviométrique/Fréquence des sécheresses
Pluvi
ales
(%
)Ir
riguée
s (%
)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 71
72_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
crédit photo : © 2009 josh Estey/cARE
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 73
au cours des 10-30 dernières années. cette opinion est sans
doute colorée par des vécus plus récents, comme les trois
semaines sans pluie intervenues au milieu de la mousson
2011 : 96 pour cent des personnes interrogées ont mentionné
l’augmentation des périodes sèches et des sécheresses et 84
pour cent, celle de la fréquence des phénomènes climatiques
extrêmes. plus de 90 pour cent des participants à l’étude se
souvenaient qu’une année était auparavant constituée de
six saisons distinctes, alors qu’il n’y en a plus que quatre à
présent. Les groupes de discussion ont dit aussi constater
une diminution drastique de la période de pluviosité appelée
localement Kaitan Satao (au mois d’octobre). Enfin, le district
est très exposé aux inondations, aux sécheresses et aux pluies
torrentielles, d’après respectivement 65, 46 et 38 pour cent
des répondants. ces inondations sont généralement dues
à de fortes précipitations locales, mais même une mousson
normale peut provoquer de graves inondations à Kurigram
si elle s’accompagne de pluies diluviennes en amont, dans le
nord de l’Inde et l’Himalaya.
dans le district de Kurigram, les sources locales de revenus
agricoles sont saisonnières et sensibles aux changements de
régime pluviométrique. Les périodes sans pluie intervenues
pendant la cruciale saison aman (repiquage du riz), que les
participants aux séances de recherche ont décrites comme
sans précédent, nuisent gravement à la sécurité alimentaire/
des moyens de subsistance des ménages. Le taux de pauvreté
a baissé lors des dernières décennies, mais l’insécurité
alimentaire chronique reste un problème majeur à Kurigram,
surtout pendant la période de pénurie alimentaire (monga),
qui culmine en septembre et octobre. même si la production
agricole a augmenté dans le district grâce, en grande partie,
74_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
à l’introduction de variétés produisant un meilleur rendement
et à une plus grande intensité culturale, les ménages pauvres
en bénéficient très peu, étant donné le prix élevé des
intrants et la rareté des terres disponibles. La croissance de la
population est également un facteur d’insécurité alimentaire
pour les ménages locaux. Ainsi, la taille de Khanpara, qui
comptait environ 200 habitants il y a 30 ans, a presque triplé
: le village dénombre aujourd’hui 590 habitants. Les terres
auparavant cultivées par 25 familles doivent à présent faire
vivre 118 ménages.
à Kurigram, la migration est un phénomène très fréquent
depuis les années 1970. Les ménages ruraux pauvres et
sans terres y ont recours pour éviter l’insécurité alimentaire
saisonnière. près de la moitié d’entre eux (43 pour cent des
familles interrogées) comptent sur les revenus de l’émigration.
dans les villages étudiés, les émigrants ont en moyenne
37 ans (ils sont plus âgés que ceux qui migrent « pour
répondre à leurs aspirations ») et n’ont bénéficié que de 3,5
ans de scolarisation. chaque migrant fait 22 déplacements
en moyenne. La migration saisonnière est le schéma le
plus courant (environ 80 pour cent des cas), et chaque
déplacement dure 5,3 mois en moyenne. Sur le site étudié, 98
pour cent des déplacements migratoires se font à l’intérieur
du bangladesh. dans leur grande majorité, les migrants des
villages de Kurigram se déplacent pour trouver de l’emploi
comme ouvriers agricoles dans d’autres zones rurales, car
cela ne leur demande pas d’autres qualifications que celles
qu’ils possèdent déjà. Les régions agricoles de munshiganj
et Feni sont les deux destinations les plus courantes pour
les migrants saisonniers d’après les participants aux groupes
de discussion à Khanpara. Selon leurs dires, il y existe en
crédit photo : © 2009 josh Estey/cARE
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 75
effet une forte demande de main d’œuvre agricole, ce qui
en fait une destination (rurale) de choix en particulier au
moment des récoltes, à cause de l’intensité culturale accrue
et de l’émigration locale qui y sévit. beaucoup de villageois
travaillent aussi temporairement dans les villes de dhaka
et Rangpur où les salaires sont plus élevés dans le secteur
du prêt-à-porter ou dans l’économie informelle. même si
la vaste majorité des migrants des villages étudiés sont de
sexe masculin (97 %) et chefs de famille (89 %), ce sont
les femmes qui assument presque entièrement le coût social
de la migration. demeurant sur place, elles doivent souvent
assumer la culture de la terre familiale et s’engagent parfois
comme journalières occasionnelles pour nourrir leur famille
et rembourser leurs dettes. En outre, les adolescentes et
les jeunes femmes sont victimes de harcèlement sexuel en
l’absence des hommes de la famille, devenant ainsi les cibles
de l’opprobre sociale ou contraintes à un mariage précoce
avec des implications sociales et démographiques négatives
à long terme.
à Kurigram, la migration est une stratégie d’adaptation
majeure pour surmonter des conditions économiques
défavorables ou des conditions environnementales
inattendues, notamment les implications locales de la
variabilité pluviométrique. 89 pour cent des répondants ont
noté que le régime climatique et la variabilité pluviométrique
actuels ont un impact sur le budget familial. pour 39 pour
cent des ménages interrogés, l’allongement des périodes
sèches constitue une raison « très importante » d’émigrer
alors que pour 36 pour cent d’entre eux, les sécheresses plus
fréquentes peuvent être un déclencheur « très important »
de la migration. Les retombées sur la production agricole
locale (et donc sur les moyens de subsistance des habitants)
de ces deux variations climatiques sont graves. Si les
ménages les plus riches peuvent craindre les effets de la
variabilité pluviométrique en raison des plus grandes surfaces
agricoles dont ils disposent, ils y sont en réalité moins
sensibles car ils possèdent davantage de biens et disposent
de multiples sources de revenus. Les ménages pauvres,
sans terres et peu qualifiés, qui dépendent essentiellement
des cultures pluviales tant pour leur subsistance que pour
leur sécurité alimentaire, sont plus sensibles à la variabilité
pluviométrique. ce sont eux qui émigrent le plus souvent, à
cause de l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance
en période d’absence ou d’imprévisibilité des pluies. Les
ménages sans terre extrêmement pauvres sont sensibles à la
variabilité pluviométrique, mais ne disposent généralement
pas des ressources nécessaires pour émigrer vers des zones
où la demande de main d’œuvre agricole est plus élevée.
c’est pourquoi cette population « piégée » souffre d’une
insécurité alimentaire aiguë tout au long de l’année. Le cas
des ménages qui ont le degré d’éducation et les aptitudes
nécessaires pour saisir des opportunités d’emploi, et dont
un membre au moins a émigré, est différent. L’argent
qu’envoient les migrants travaillant de façon permanente
dans les zones urbaines contribue à la sécurité alimentaire de
ces familles. En revanche, les ménages qui ne possèdent que
peu de terres et de compétences et pratiquent la migration
saisonnière agricole parviennent rarement à briser le cycle de
l’insécurité alimentaire, de l’endettement et de la migration
temporaire pour trouver du travail. pour eux, la migration est
une stratégie d’ajustement destructive, qui à la longue nuit
à leur bien-être.
76_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Illustration 8 : Zone de recherche au Ghana
Moyenne des précipitations
Terres agricoles (%)
Pluvi
ales
(%
)Ir
riguée
s (%
)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 77
4.6 ghana : la forte dépendance envers l’agriculture pluviale dans le district de
Nadowli explique la persistance de la migration saisonnière comme stratégie
d’ajustement29
Les recherches ont été menées dans quatre villages du district de Nadowli : mantari,
Nanville, Takpo, et Zupiri. ceux-ci se trouvent dans le Haut ghana occidental,
région la plus pauvre du pays. (pour les données relatives à la situation, au paysage,
aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses
et aux destinations de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 8 ci-
dessous.) Les paysans de ces villages n’ayant pas accès aux systèmes d’irrigation,
la production agricole se limite de fait à une récolte par an et est entièrement
tributaire de la pluviométrie. cette forte dépendance à l’égard des précipitations et
le manque de moyens de subsistance alternatifs in situ accroissent la vulnérabilité
aux changements climatiques des ménages pauvres de ces villages et perpétuent le
recours à la migration (saisonnière, temporaire ou permanente ) comme stratégie de
subsistance et comme mécanisme pour surmonter l’insécurité alimentaire.
Le climat de cette région est marqué par une saison des pluies (de mai à septembre/
octobre) et une saison sèche (le reste de l’année). Au cours des 20-30 dernières
années, les changements suivants ont été observés dans le régime pluviométrique des
villages étudiés : augmentation des pluies torrentielles entraînant des inondations,
saison des pluies décalée (d’avril à mai) ainsi que des périodes sèches associées à
des températures élevées. Les résultats de l’enquête auprès des ménages montrent
que 92 pour cent des participants ont perçu des changements dans la pluviométrie
au cours de cette période : 87,3 pour cent des personnes interrogées estiment que
les sécheresses ont été plus nombreuses au cours des 10-30 dernières années et
64,8 pour cent parlent de phénomènes climatiques plus extrêmes. cette perception
qu’ont les villageois d’un climat de plus en plus imprévisible est largement corroborée
par les données météorologiques locales et les avis d’experts, qui confirment une
hausse des températures moyennes et une plus grande fréquence de phénomènes
comprenant tant des périodes sèches plus longues que des pluies plus fortes pendant
la période des semis. L’analyse du retard de la saison des pluies n’a quant à lui pas
78_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
crédit photi : © 2011 christina Rademacher-Schulz/ uNu-EHS
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 79
été établi de façon irréfutable : l’analyse des données météorologiques de la station
de Wa ne confirment pas cette tendance mais l’analyse plus large des données
des différentes stations météorologiques du nord du ghana montre que celle-ci a
débuté avec un décalage de plus de quinze jours entre 1961 et 2001 .
La sécurité alimentaire/des moyens de subsistance de 85 pour cent des habitants de
ce district est tributaire de l’élevage ou d’une agriculture de subsistance. Le degré
de diversification économique est minime. Les principaux aliments de base sont le
mil, le maïs, le sorgho et l’igname. La culture commerciale de l’arachide prend de
l’ampleur, car elle permet aux paysans de se procurer des vivres sur les marchés locaux
pour nourrir leur famille. Le manque d’appui aux petits exploitants, qui n’ont, par
exemple, qu’un accès limité aux intrants agricoles bon marché (engrais, pesticides)
compromet la sécurité alimentaire des ménages vivant dans la zone étudiée,
tout comme les pertes élevées dues aux ravages des nuisibles après les récoltes.
pendant la saison sèche, la population s’adonne au commerce, à la transformation
des aliments et à la migration saisonnière. pour la majorité des ménages interrogés
sur le site de recherche (98 %), les changements dans le régime des précipitations
ont un effet néfaste sur les récoltes, ce qui aggrave leur situation économique. Les
périodes sèches ou les fortes pluies survenant à des moments cruciaux de la saison
agricole peuvent affecter les récoltes et en réduire, voire en détruire entièrement,
le rendement, causant ainsi des pénuries alimentaires. ces effets néfastes sur les
cultures provoquent la hausse des prix des aliments. pour trente-sept pour cent
des ménages interrogés, la flambée des prix réduit l’accès à la nourriture pour leur
famille. pendant la période de soudure précédant la récolte suivante (mai à août),
75 pour cent des répondants ne disposaient pas de nourriture en quantité suffisante
pour couvrir les besoins du ménage et 69 pour cent ne disposaient pas de l’argent
nécessaire à l’achat de vivres. d’après 37 pour cent des répondants, la production
animale, pourtant la « soupape de sécurité » qui, en temps de crise, leur permet de
vendre une partie de leur cheptel afin de se procurer les revenus nécessaires à l’achat
de vivres au marché, a également chuté. pour surmonter l’insécurité alimentaire,
due en grande partie à la variabilité pluviométrique, les répondants ont mentionné
les stratégies d’ajustement suivantes, par ordre d’importance (plusieurs réponses
autorisées) : vente de biens (29 %), réduction de la consommation de nourriture
80_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
(21 %), diversification des revenus du ménage (14 %), principalement par la
migration, et modification des cultures soit en les diversifiant, soit en semant
des variétés à maturation précoce ou en répandant plus d’engrais (11 %).
conformément aux normes sociales et culturelles de la zone étudiée,
la migration est plus courante chez les hommes que chez les femmes. Il
n’empêche que les émigrées se font plus nombreuses depuis les années
1980 et qu’à l’heure actuelle, les femmes comptent pour 31 pour cent
des migrants. L’âge moyen des migrants lors de leur premier déplacement
est de 23 ans. Ils ont recours à cette stratégie avant tout pour des raisons
économiques (83 %). Neuf pour cent seulement le font pour étudier . Les
résultats de l’enquête auprès des ménages montrent que 39 pour cent sont
des migrants saisonniers, 36 pour cent des migrants permanents, et les
derniers 25 pour cent des migrants temporaires. Les résultats des recherches
participatives confirment que la migration saisonnière domine. Les débats
sur la mobilité et les calendriers saisonniers au sein des groupes de discussion
ont révélé que les migrants se déplacent en général pendant la saison sèche
et reviennent pour participer aux travaux agricoles dans leurs champs
lorsque la saison culturale reprend. En cas de pénurie alimentaire aiguë,
des membres de la famille sont parfois obligés d’émigrer à des moments
inhabituels, comme pendant la saison des pluies. Les principales activités
économiques des migrants sont les travaux agricoles (52 %) et miniers (14
%). Les destinations les plus courantes sont les régions de brong Ahafo
(38 %) et Ashanti (39 %). La région de brong Ahafo (ceinture médiane du
pays), aux terres plus fertiles que dans le nord du ghana, produit en effet
deux récoltes par an. Les zones aurifères du pays attirent de jeunes migrants
saisonniers qui espèrent faire fortune en peu de temps. La migration vers ces
régions est facilitée à présent à la fois par les réseaux qui se sont développés
entre migrants du site de recherche et par des systèmes de transport régulier
vers ces destinations.
Les membres de la famille migrent essentiellement pour des raisons de
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance, laquelle est directement
crédit photo : © 2009 Sarah bones/cARE
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 81
liée à des facteurs climatiques et environnementaux, étant
donné la dépendance des villageois envers les cultures
pluviales. L’enquête auprès des ménages a montré que
les principales raisons de la migration sont les suivantes
: déclin de la production agricole vivrière pour leur propre
consommation ; changements relatifs à la saison des pluies
; chômage ; périodes de sécheresse plus longues, suivies de
récoltes imprévisibles ; fréquence accrue des sécheresses.
Les dix facteurs les plus importants sont exclusivement
de nature agricole (ou relatifs à l’élevage) et ont un lien
avec la sécurité alimentaire et la variabilité climatique/
pluviométrique. c’est pourquoi, pour les ménages pauvres
du site de recherche, la migration vers d’autres régions du
pays est une stratégie courante pour diversifier les revenus
et recevoir les transferts d’argent qui permettront l’achat de
vivres. La migration permet à ces ménages de remédier à
l’absence de revenus, mais elle ne sert pas à améliorer leur
bien-être à long terme. ce type d’ajustement peut avoir des
conséquences négatives, par exemple lorsque les chefs de
famille (qui ont émigré à la recherche de nourriture ou de
revenus pour acheter des vivres) ne sont pas présents pour
venir en aide aux autres membres du foyer. En revanche,
les ménages plus aisés disposent de sources de revenus plus
diversifiées, les membres en âge de travailler y pratiquent
davantage la migration saisonnière et sont donc beaucoup
moins vulnérables face aux impacts négatifs des changements
pluviométriques. pour eux, la migration saisonnière est
plutôt un outil concourant à leur progression sur l’échelle
sociale. Les femmes chefs de famille sont plus vulnérables
que les hommes : leurs ménages sont davantage menacés
par l’insécurité alimentaire, les personnes en âge de travailler
y sont moins nombreuses, elles possèdent moins de terres et
pratiquent un peu moins la migration que leurs homologues
masculins.
82_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Illustration 9 : Zone de recherche au Guatemala
Moyenne des précipitations
Terres agricoles (%)
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Variabilité Pluviométrique/Fréquence des sécheresses
Pluvi
ales
(%
)Ir
riguée
s (%
)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 83
4.7 Guatemala : le manque de diversification des moyens de subsistance et de
possibilités migratoires laisse peu d’options aux habitants de cabricán33
Les recherches ont été menées dans quatre villages de la municipalité de cabricán,
sur les hauts-plateaux orientaux du guatemala : El cerro, buena vista, El durazno,
et quiquibaj. Située à 2 625 mètres au-dessus du niveau de la mer, cabricán est
l’une des municipalités les plus pauvres du pays. (pour les données relatives à
la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la
fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche,
consultez l’Illustration 9 ci-dessous.) La population appartient à la communauté
autochtone mam et dépend fortement des précipitations pour son unique récolte
annuelle.
cabricán est située dans une région froide, avec une saison des pluies et une saison
sèche bien démarquées. Le régime pluviométrique normal est bimodal, avec des
pics en juin et en septembre. La hauteur annuelle totale des précipitations, qui
tombent majoritairement de mai à octobre, a fluctué de quelques 600 mm à plus de
1 400 mm, au cours des 35 dernières années. Les données météorologiques locales
des quatre dernières décennies montrent une tendance vers des précipitations
totales plus importantes, les périodes de hausse alternant avec des périodes de
diminution. El Niño est un déterminant important du calendrier et de la pluviosité
au guatemala. or, il a augmenté tant en fréquence qu’en intensité au cours des
60 dernières années : trois apparitions (toutes modérées) de 1951 à 1970, cinq
(dont deux fortes, et une très forte) de 1971 à 1990 et six (dont une très forte) de
1991 à 2010 . El Niño a un impact négatif sur la pluviométrie, surtout sur la côte
Pacifique du Guatemala et en particulier pendant les mois d’août et de septembre
. Les personnes qui ont répondu à l’enquête auprès des ménages ont mentionné
plusieurs modifications non négligeables du climat local ces dernières décennies
: la saison des pluies s’est raccourcie, les pluies sont moins fréquentes mais plus
intenses et les périodes sèches sont plus longues. Les participants aux groupes de
discussion ont confirmé ces constatations, les personnes âgées déclarant qu’il y a 30
ans, la saison des pluies commençait en mars et se terminait en octobre/novembre.
84_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Au fil du temps, les pluies ne sont plus arrivées qu’en mai/
juin et s’arrêtent normalement en octobre. Soixante-sept
pour cent des ménages interrogés ont mentionné une
augmentation des pluies diluviennes et soixante-cinq pour
cent, une augmentation des phénomènes climatiques
extrêmes pendant les 10-20 dernières années. Au cours des
13 dernières années, le guatemala a été sérieusement touché
par une pluviométrie extrême associée à des ouragans et des
tempêtes tropicales : mitch en 1998, Stan en 2005, Agatha
en 2010 et la dépression tropicale 12-E en 2011. ces quatre
phénomènes ont produit des précipitations anormalement
élevées et les tempêtes ont provoqué des dégâts importants
dans les municipalités des hauts-plateaux de l’ouest comme
cabricán.
Les recherches menées pour le projet ont confirmé le manque
de diversification des systèmes de subsistance locaux : 66
pour cent des ménages citent l’agriculture comme principale
activité économique. Les familles paysannes des villages
étudiés pratiquent un système d’agriculture de subsistance,
le milpa (maïs, associé à différents types de fèves), avec une
seule récolte par an. à cabricán, les propriétés foncières
mesurent moins d’une manzana (7 000 mètres carrés) dans
90 pour cent des cas, et plus de 90 pour cent de la population
gagnent moins de deux dollars uS par jour. La qualité du
logement, plus élevée pour les ménages recevant des
transferts d’argent, est ce qui les distingue principalement les
uns des autres. L’insécurité alimentaire, qui culmine pendant
les mois précédant la récolte de novembre, est très répandue
: 78 pour cent des personnes interrogées disent avoir souffert
de pénurie alimentaire au moins une fois au cours des dix
dernières années. Le manque d’accès à des aliments nutritifs
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 85
photo credit : © 2008 brian Atkinson/cARE
86_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
(peu de produits dans les marchés locaux) et de mauvaises
habitudes alimentaires (tendance prononcée à consommer
trop de maïs) rendent la situation encore plus précaire. Le
tissage est en train de devenir la deuxième source de revenus
par ordre d’importance, 22 pour cent des ménages le citant
comme leur activité principale et 30 pour cent comme leur
deuxième activité la plus importante. ceci dit, les tisserands
ne sont payés que pour le volume de travail fourni au
propriétaire des métiers à tisser, qui contrôle tant les intrants
(fournitures) que la vente des produits finis. Cela ne permet
guère d’envisager cette activité comme une stratégie viable
de diversification des revenus à long terme.
La mobilité humaine est une stratégie courante de gestion
des risques sur le site de recherche. Au guatemala, les
historiens la font remonter aux années 1870, lorsque le
café est devenu un important produit d’exportation et que
la population autochtone des hauts plateaux a commencé
à fournir l’essentiel de la main d’œuvre des plantations.
Aujourd’hui, les données de l’enquête auprès des ménages
montrent que, dans 97 pour cent des cas, l’émigration à
cabricán est entreprise dans le but de réduire la variabilité de
la consommation et des revenus familiaux liés aux cultures
pluviales. Seuls 25 pour cent des ménages disent avoir fait
l’expérience de la migration, ce qui est peut-être une sous-
estimation due à la crainte d’avouer qu’un membre du
ménage vit à l’étranger. Les migrants sont à 77 pour cent
de sexe masculin, 80 pour cent d’entre eux sont mariés
ou en union consensuelle. outre le caractère patriarcal de
la société guatémaltèque, la langue présente un obstacle
supplémentaire pour les femmes de cabricán, dont beaucoup
ne parlent que le dialecte mam.
photo credit : © 2011 Andrea milan/uNu-EHS
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 87
vu l’isolement économique relatif de cabricán à l’échelle
nationale, les possibilités de migration (tant saisonnière à
l’intérieur du guatemala qu’à plus long terme aux états-
unis) se font rares : 70 pour cent des ménages disent aspirer
à une migration non saisonnière à destination des états-unis
(New york, le New jersey, la virginie ou Los Angeles), où les
villageois ont établi des réseaux au fil des années. Or, cette
démarche est devenue beaucoup plus difficile depuis dix ans
pour les raisons suivantes : renforcement des contrôles à la
frontière américaine ; baisse de la demande de main d’œuvre
immigrée aux états-unis ; coût élevé (de 45 000 à 60 000
quetzales, soit environ 6 000 dollars uS) ; conditions de
voyage plus dangereuses à travers le mexique.
La migration interne vers des centres urbains comme
quetzaltenango ou ciudad de guatemala a moins la faveur
des ménages. par le passé, la migration saisonnière interne
était chose courante, tant vers la côte sud que vers l’intérieur
des terres, mais le marché du travail s’y est fortement
contracté suite au passage à des cultures requérant une main
d’œuvre moins nombreuse (canne à sucre au lieu de coton).
de plus, les producteurs des cultures d’exportation engagent
désormais la main d’œuvre agricole locale à plein temps.
Lorsqu’on a demandé aux personnes interrogées si les
changements de pluviométrie avaient un impact sur la
production de vivres, 68 pour cent ont répondu « oui,
beaucoup » et 29 pour cent « oui, mais seulement un peu
». dans les quatre villages, les participants aux groupes de
recherche ont exprimé de graves inquiétudes quant à l’avenir
de leur famille et de leur communauté. Les préoccupations
des ménages concernent la viabilité à long terme de leurs
systèmes agricoles et de l’accès aux aliments. Selon eux,
rares sont les possibilités de diversification des ressources
(comme le tissage, où les revenus baissent aussi, vu l’excès
de main d’œuvre). Les facteurs de stress climatiques,
l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance et les
obstacles à la migration ne laissent aux paysans locaux
que peu d’alternatives viables pour diversifier leurs revenus
et affranchir leur famille de la pauvreté, que ce soit par
l’adaptation sur place ou par la migration.
88_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Illustration 10 : Site de
recherche en Tanzanie
Moyenne des précipitations
Terres agricoles (%)
très élevée
élevée
modérément élevée
modérée
faible
très faible
Variabilité Pluviométrique/Fréquence des sécheresses
Pluvi
ales
(%
)Ir
riguée
s (%
)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 89
4.8 Tanzanie : la migration est une stratégie d’ajustement tant pour les petits
exploitants agricoles que pour les éleveurs qui luttent pour leur sécurité alimentaire
dans le même district36
En Tanzanie, les recherches pour le projet ont été menées dans trois villages du
district de Same: bangalala, Ruvu mferijini et vudee. Ils sont situés dans la région
du Kilimandjaro, zone semi-aride du bassin de la rivière pangani, dans le nord-est
du pays. (pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations
moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de
migration du site de recherche, consultez l’Illustration 10 ci-dessous.) étant donné
la forte dépendance envers l’agriculture et le peu d’opportunités d’emplois non
agricoles dans le district, des précipitations insuffisantes ou malvenues se traduisent
souvent par la perte des récoltes, l’insécurité alimentaire et la migration des ménages
pauvres qui n’ont que peu ou pas accès à de bonnes terres et à l’irrigation.
Au cours des 60 dernières années, la moyenne annuelle totale des précipitations,
caractérisées par un régime bimodal avec de « longues » pluies (masika) de mars
à mai et de « courtes » pluies (vuli) de septembre à décembre, a été de 560 mm/
an en moyenne. Les recherches effectuées pour le projet mettent en évidence la
perception généralisée que le régime des précipitations a énormément changé dans
le district de Same au cours des 20 dernières années. Les changements perçus sont les
suivants : (1) fréquence accrue de périodes sèches prolongées pendant la saison des
pluies ; (2) arrivée plus tardive et arrêt plus précoce des pluies ; (3) fréquence accrue
des violentes tempêtes. En plus des changements relatifs aux dates et à la répartition
des deux saisons des pluies annuelles, les habitants citent des températures plus
élevées et des vents plus violents comme facteurs d’aggravation des pénuries d’eau
locales dues au climat. L’analyse des données sur la pluviosité locale au cours des
30 dernières années confirme la perception locale d’une modification négative de
la pluviosité, avec notamment : une diminution des pluies pendant la saison longue
(masika) et des précipitations annuelles totales ; une réduction du nombre de jours
de pluie par an (qui sont passés de 90 à 71) ; un arrêt précoce de la saison des pluies,
et donc des saisons végétatives plus courtes.
90_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Les données fournissent aussi des exemples spectaculaires
du caractère imprévisible des précipitations, comprenant
plusieurs cas présentant des niveaux annuels très bas,
suivis d’années marquées par une pluviosité abondante.
Ces données confirment les perceptions locales au sujet de
la nature changeante et extrêmement imprévisible de la
pluviométrie sur le site de recherche, où le calendrier et la
répartition/l’intensité des précipitations peuvent entraîner la
perte des récoltes, même les années où le total annuel est «
normal ».
L’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance est un
problème très répandu dans le district de Same. Elle est
particulièrement présente pendant les mois de septembre
à janvier. à bangalala, le village où était basée l’équipe
de recherche, les groupes de discussion ont révélé que
seulement 5 pour cent des ménages sont considérés comme
« aisés » et capables de servir trois repas par jour à tous les
membres de la famille. Le groupe intermédiaire quant à
lui (65 pour cent des ménages) ne peut pas se permettre
plus de deux repas quotidiens, et les 30 pour cent les plus
pauvres arrivent à peine à un repas nutritif par jour. même
si les trois villages reflètent la grande diversité des conditions
agro-climatiques dans les zones montagneuses et les plaines
du bassin de la rivière pangani, leurs habitants ont ceci de
commun qu’ils dépendent largement de l’agriculture et de
l’élevage pour leur subsistance. d’après les données fournies
par l’enquête auprès des ménages et les séances de recherche
participative, les trois principales activités économiques
(agriculture, élevage et travail occasionnel) sont toutes
fortement tributaires des ressources naturelles de la région,
et il n’y a pour ainsi dire aucune diversification des sources
de revenus en dehors des travaux des champs. quant à
l’agriculture locale, elle dépend largement de la pluviométrie,
soit directement, soit par le biais de systèmes d’irrigation
locaux (dont des retenues d’eau traditionnelles appelées
ndiva). Les propriétés foncières sur la zone ont une taille
moyenne 1,54 hectares (ce qui est considéré comme une
surface très modeste) et nourrissent chacune une famille de
six personnes. dans les trois villages où les recherches ont été
effectuées, les participants aux groupes de discussion disent
utiliser les stratégies d’ajustement à court terme ci-dessous
pour compenser les pénuries alimentaires : (1) changements
dans la consommation alimentaire du ménage (diminution du
nombre de repas quotidiens, voire jeûne pendant la journée,
élimination des aliments les plus chers comme le poisson,
repas plus légers ; (2) changements d’activité économique
(travail occasionnel au sein de la communauté, abattage
des arbres, ramassage du bois, fabrication de charbon de
bois, réduction des zones cultivées) ; (3) vente de biens (en
général du cheptel, presque jamais de terres) (4) chercher
de l’aide chez d’autres (assistance publique, aide des oNg,
emprunts auprès d’amis ou de la famille).
vu l’absence dramatique d’emplois alternatifs non agricoles,
la migration est une stratégie très importante de gestion des
risques pour les ménages de ces villages, où le nombre de
migrants économiques dépassent celui des individus ayant
émigré pour parfaire leur éducation (à raison de deux contre
un). bien que la majorité des émigrés soit jeune et de sexe
masculin, les femmes représentent un tiers du total à présent.
même si une légère majorité des premiers déplacements
(53,4 pour cent) est saisonnière (moins de six mois) avec
retour assuré, les schémas diffèrent d’un village à l’autre.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 91
Il n’y a qu’à Ruvu mferijini, qui comprend une importante
population masaï, que les migrants saisonniers sont nettement
majoritaires (66,3 %). dans les villages étudiés, la migration
est essentiellement interne. Très peu d’habitants traversent
les frontières (pour se rendre au Kenya) et ce sont en majorité
des pasteurs masaï. La plupart semblent se rendre dans
d’autres zones rurales où les conditions météorologiques
sont plus favorables et où ils peuvent pratiquer des activités
qui leur sont familières, comme l’agriculture ou l’élevage,
ou travailler comme journaliers. Les séances de recherche
participative ont révélé que beaucoup se rendent dans la
région du Kilimandjaro et les zones voisines du nord-est de
la Tanzanie. Les résultats de l’enquête auprès des ménages
montrent cependant que la destination la plus courante est
la capitale dar es-Salaam (32 pour cent des migrants), où
ils cherchent du travail sur les marchés/dans le commerce
de détail, dans le bâtiment ou d’autres services. L’émigration
dans le district de Same suit donc deux schémas distincts:
rural-rural et rural-urbain.
vu les conditions qui règnent dans le district de Same, les
modifications de la pluviométrie se traduisent par des
impacts directs sur la sécurité alimentaire. La sécheresse
apparaît comme la plus grande menace qui pèse sur la
subsistance des ménages. plus de 80 pour cent de ceux qui
ont répondu à l’enquête auprès des ménages disent que la
variabilité pluviométrique a un effet négatif « important »
sur la production alimentaire. Les résultats de cette enquête
mettent en lumière la forte relation entre des régimes
climatiques changeants et imprévisibles et la décision
d’émigrer. Les trois principaux facteurs affectant les décisions
des ménages en matière de migration sont les suivants : (1)
fréquence accrue des sécheresses ; (2) périodes de sécheresse
plus longues ; (3) pénurie d’eau. Les participants aux groupes
de discussion se disaient préoccupés par la dégradation de
l’environnement local, qu’ils attribuent aux sécheresses
récentes, au manque de respect des lois contre l’abattage
des arbres et autres pratiques destructrices dans les bassins
hydrographiques cruciaux et à la croissance de la population.
Les groupes de discussions avec les jeunes, lesquels jouissent,
dans l’ensemble, d’une plus grande liberté de mouvement,
montrent que ces derniers n’envisagent guère l’agriculture
pour leur avenir et sont plus enclins à chercher fortune dans
les zones urbaines, en dépit des difficultés qu’y rencontrent
les migrants n’ayant que peu d’éducation et de ressources
financières.
92_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
crédit photo : © 2007 brendan bannon/cARE
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 93
5- Analyse des décisions des ménages en matière de migration à l’heure actuelle : caractéristiques des ménages et sensibilité à la variabilité pluviométrique et à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistancedans la présente section, nous donnons un aperçu des
principales caractéristiques au niveau des individus et des
ménages. Nous nous appuyons pour cela sur les données
primaires réunies lors des enquêtes auprès des ménages. à
partir de là, nous analysons les conclusions des huit études
de cas afin de montrer les relations actuelles entre les moyens
de subsistance tributaires de la pluviométrie et la sécurité
alimentaire, ainsi que les circonstances dans lesquelles les
ménages ont aujourd’hui recours à la migration pour gérer
les risques d’impact sur la consommation et les revenus
familiaux. Nous avons ainsi obtenu quatre profils distincts.
chaque site de recherche possède ses propres
caractéristiques, mais les valeurs médianes fournissent un
aperçu des caractéristiques des populations vivant dans les
zones d’investigation. Le ménage médian a 5,6 personnes à
charge. Le chef de famille et ceux qui sont à sa charge ont
respectivement 4,7 et 5,9 années de scolarisation. La taille
moyenne des ménages qui ont participé à l’enquête est la
plus importante au ghana, au guatemala et en Inde. En se
basant sur la norme internationale qui est de 1,25 à 2 dollars
uS par jour suivant les pays, le taux de pauvreté médian pour
5.1 caractéristiques des ménages dans les districts ciblés
les ménages interrogés est de 67,3 pour cent. Le pourcentage
médian de ménages ayant connu des périodes de pénurie
alimentaire au cours de l’année écoulée est quant à lui de
52,7% Les ménages de Tanzanie, du bangladesh et du pérou
ont été les plus réactifs face à l’insécurité alimentaire au
cours de l’année écoulée, mais comme le montre l’analyse
ci-dessous, l’aptitude à gérer cette insécurité par le biais
d’options comme la migration varie de manière considérable
parmi ces trois pays.
Le tableau 3 constitue une synthèse de l’enquête auprès
des ménages menée dans chacun des huit pays. La dernière
colonne fait entres autre apparaitre le nombre total de
ménages interrogés sur les sites de recherche « Rainfalls
». L’étude a permis d’interroger, pour chaque site, de 136
à 206 ménages représentant au moins 10 pour cent de la
population locale (du district) dans six des huit cas. En tout,
les chercheurs de « Rainfalls » ont interrogé 1 310 ménages
auxquels viennent s’ajouter plus de 2 000 participants
individuels dans les groupes de discussion ou les entretiens
auprès d’experts. Sur la totalité des ménages interrogés, la
valeur médiane de ceux dirigés par des femmes est de 13,3
pour cent.
94_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Tableau 3 : Ménages interrogés sur les sites de recherche des huit cas d’étude
Lam
phun
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land
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Chha
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 95
L’accès à des terres de qualité suffisante pour satisfaire à la
consommation alimentaire des ménages et leur procurer les
revenus dont ils ont besoin constitue une problématique
importante dans les zones de recherche. L’absence ou
l’insuffisance de terres se constatent dans les valeurs médianes de
15,5 et 37,7 pour cent respectivement des ménages interrogés,
lesquels présentent des caractéristiques distinctes sur chaque
site en lien avec leurs décisions en matière de mobilité (voir plus
bas). La propriété foncière moyenne pour les ménages, tous sites
confondus, est de 1,5 ha de terres productives (à l’exclusion des
pâturages pour le bétail). L’absence ou l’insuffisance de terres
parmi les ménages échantillonnés étaient importantes sur un
certain nombre de sites de recherche : bangladesh (84 % des
ménages échantillonnés), pérou (82,6 %), guatemala (67,9 %),
Inde (60,5 %), et viet Nam (57 %). Le manque de terres était
plus modéré en Thaïlande (47 %), en Tanzanie (31,5 %), et au
ghana (9,8 %), où, par contre, la qualité du sol est un facteur
important. dans ce dernier pays, d’ailleurs, la rareté des terres
n’est pas un facteur déterminant, dans la mesure où les droits
fonciers sont détenus par la communauté et les agriculteurs ont
facilement accès aux terres d’autres membres de la communauté.
Le rapport de dépendance moyen des ménages est le plus élevé
sur le site de recherche tanzanien (1,29), suivi par le guatemala
(1,10). cela veut dire qu’en Tanzanie, il y a, en moyenne, 1,29
membre inactif (à charge) pour tout membre actif d’un ménage.
à l’opposé, les deux extrêmes sont le viet Nam (0,49) et la
Thaïlande (0,46). Ainsi, sur le site de recherche thaïlandais, il
y a, en moyenne, 0,46 membre inactif (à charge) pour tout
membre actif d’un ménage. Le tableau 4 synthétise l’expérience
migratoire des ménages échantillonnés dans chacune des études
de cas37.
*Définition du rapport de dépendance : rapport entre les membres du ménage ne faisant généralement pas partie de la population active (personnes à charge : 0-14 ans et > 64 ans) et ceux qui en font généralement partie (membres productifs : 15-64 ans). on s’en sert pour mesurer la charge pesant sur les membres productifs du ménage.
** Ayant peur de terres : la définition varie par pays : Thaïlande < = 10 Rai ou 1,6 ha ; pérou 0,1 - 5 ha ; Inde < = 1 acre ; viet Nam 0,1 - 1 ha ; ghana 0,1 - 1 ha ; bangladesh 0,1 - 0,7 ha ; Tanzanie 0,01 à 1,75 acres ; guatemala < 0,44 ha.
*** Exploitation moyenne : la définition varie par pays : Thaïlande 10,01 à 20 Rai ; Inde 1,01 - 2 acres ; ghana < 5 ha ; Tanzanie 1,76 à 4 acres ; guatemala > 0.44 et < 1 ha
**** Exploitation plus grande que la moyenne : la définition varie par pays : Inde > = 2 acres ; Ghana > 5,01 ha ; Tanzanie > = 4,01 acres ; guatemala > 1 ha
96_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Table 4 : Migration experience in the households sampled
Lam
phun
Thai
land
Huan
cayo
Peru
Chha
ttisg
arh
Indi
a
Sam
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nzan
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Bang
lade
sh
Dong
Tha
pVi
etna
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Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 97
*La migration saisonnière est définie comme une migration annuelle récurrente pour des périodes de moins de six mois par an. ** La migration temporaire est définie comme un départ du foyer d’origine pour six mois par an au moins pour une destination au sein du pays ou à l’étranger à des fins de travail, d’étude ou de réunification familiale, à une distance telle que la personne concernée est obligée de s’y installer et d’y passer ses nuits. *** « Migration actuelle » signifie qu’une personne est absente en ce moment pour des raisons de migration.
**** La migration de retour est définie comme le retour d’un membre du ménage qui a émigré à une époque antérieure et n’a pas migré à nouveau depuis plus d’un an.
98_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Les huit études de cas « Rainfalls » permettent de mieux
comprendre comment les ménages ont recours à la
migration pour gérer les risques ou survivre face à des
régimes pluviométriques changeants qui minent la sécurité
alimentaire/des moyens de subsistance. L’étude « Rainfalls
» a mis en lumière le fait que les ménages « satisfaits », qui
disposent d’actifs variés et de diverses options en matière
d’adaptation, de diversification des revenus ou de gestion
des risques (à travers des réseaux sociaux, des programmes
communautaires ou gouvernementaux ou par l’éducation)
ont recours à la migration pour renforcer leur résilience.
pour les ménages « vulnérables », dont l’accès à de telles
options est minime (peu ou pas d’opportunités de diversifier
leurs sources de revenus, pas de terres, peu d’instruction), la
migration est une stratégie de survie dans un contexte global
de stratégies d’ajustement dommageables à long terme
qui les laissent voire les piègent en marge d’une existence
décente.
L’étude « Rainfalls » synthétisée dans le présent rapport
destiné aux décideurs dresse quatre profils différents pour
les ménages qui ont recours à la migration comme réponse
à la variabilité pluviométrique et aux facteurs de stress liés
à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance. ces
profils, décrits ci-dessous, sont présents sur les huit sites de
recherche parmi les ménages luttant contre les facteurs de
stress climatiques, mais dans certains pays, on constate la
présence de blocs, constitués de ménages caractérisés par des
schémas dominants. Ces profils englobent un large éventail
de cas, dont certains ont d’ailleurs des points communs avec
5.2 La migration : adaptation ou échec de l’adaptation ?
Quatre profils de migration liée à la pluviométrie
La migration comme facteur d’amélioration de la résilience
(migration efficace)
pour ces ménages, la migration se présente, dans tous les
cas d’étude, comme une stratégie utilisée, parmi beaucoup
d’autres, pour gérer les risques ou assurer leur subsistance. Ils
répondent au profil suivant : bas revenu ou pauvreté, mais
avec un accès suffisant à divers moyens de subsistance et avec
des atouts (sociaux, politiques, financiers) qui les rendent
moins sensibles aux facteurs de stress climatiques. dans ces
foyers, les enfants bénéficient en général d’une scolarité de
3 à 5 ans plus longue que celle de leurs parents, les migrants
ont 20 ans environ, sont célibataires, aspirent à de meilleures
opportunités de vie et sont en mesure d’envoyer de l’argent à
leur famille. pour eux, la migration est avant tout une option
accessible qui leur permet d’améliorer la sécurité alimentaire
et la résilience de toute la famille, y compris ceux qui sont
restés au pays. deuxièmement, c’est un choix actif, positif,
leur permettant de saisir une opportunité qui profitera à
tous. Les transferts d’argent des migrants permettent ainsi
à ces ménages d’investir dans l’éducation, dans la santé et
dans des biens qui améliorent leur aisance et diminuent leur
exposition aux facteurs de stress climatiques.
pour les deux groupes suivants, l’effet des migrations sur les
ménages confrontés à ces facteurs dépend du degré de «
réussite » des membres émigrés, qui doivent se procurer de
la nourriture ou obtenir les ressources nécessaires pour en
obtenir.
les profils voisins. Ils ne sont donc pas exclusifs et servent
simplement de points de départ pour des recherches plus
approfondies où l’on affinera les variables explicatives clés.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 99
La migration comme stratégie de survie, mais non de
prospérité
pour ce groupe, la migration permet d’éviter les pires
conséquences de la variabilité pluviométrique et de
l’insécurité alimentaire, mais étant donné que la diversification
des revenus est quasi inexistante et que les possibilités
d’adaptation sur place sont rares, les seules options dont ils
disposent permettent à peine aux individus « de s’en sortir
». ces familles ne possèdent en général que peu de terres,
et même si elles ont accès à des stratégies de diversification
des revenus, les options qui s’offrent à elles sont insuffisantes
pour assurer la sécurité alimentaire du ménage. Les migrants
sont en général des chefs de famille, d’environ 45 ans. Les
enfants ont le même niveau d’éducation (à quatre mois près
en moyenne) et les mêmes compétences que leurs parents.
Les familles n’ont guère accès à des organismes sociaux et
elles ont moins accès que le groupe précédent à d’autres
formes de diversification des revenus ou à des mesures
permettant de surmonter les facteurs de stress climatiques
qui menacent leur sécurité alimentaire et leurs moyens de
subsistance.
bien qu’elle reste un tant soit peu accessible, car ils ont les
moyens d’y recourir, la migration est un choix plus risqué
pour ces ménages que pour leurs homologues « satisfaits ».
Les membres de ce groupe peuvent facilement passer de «
satisfaits » à « vulnérables » si la stratégie échoue ou si les
facteurs de stress liés à la pluviométrie s’accentuent jusqu’à
devenir insurmontables. La migration perpétue alors le cycle
de l’endettement (elle représente un investissement) et de
la faim chronique (si la migration s’avère être un échec). Elle
ne constitue sans doute pas le meilleur des choix si d’autres,
plus durables, sont disponibles ou accessibles sur place. Elle
est souvent saisonnière ou temporaire, permettant de se
procurer immédiatement de la nourriture ou des ressources
donnant accès aux vivres. c’est donc une mesure à court
terme, qui offre une solution temporaire à la variabilité
pluviométrique et à ses effets (mauvaises récoltes, baisse des
revenus ménagers), mais elle n’a pas un effet radical et ne
permet pas aux ménages d’échapper au cycle de la pauvreté.
La migration comme stratégie d’ajustement utilisée en
dernier recours
Le profil suivant comprend les ménages pour qui la migration
est une stratégie d’adaptation dommageable à long terme
(c’est-à-dire qu’elle aggrave leur vulnérabilité ou les
empêche d’échapper à la pauvreté). Ils s’apparentent à ceux
du groupe précédent : pauvres, peu ou pas de terres, peu
ou pas d’options en matière de diversification des revenus
en dehors de l’agriculture et de l’élevage. Les enfants ont
le même niveau d’éducation que leurs parents (bas). Les
migrants issus de ces ménages rivalisent entre eux afin de
trouver des emplois non qualifiés dans le secteur agricole (et
parfois dans des zones urbaines). Leur profil, d’après l’étude
« Rainfalls », est le suivant : chef de famille, la quarantaine,
marié avec personnes à charge. Eux aussi ne font « que
s’en sortir » et ils n’ont pas accès à ou sont incapables de
saisir des opportunités d’adaptation ou de diversification
des revenus in situ. Les mesures les plus courantes pour
surmonter les facteurs de stress liés à la pluviosité influant
sur les moyens de subsistance et la disponibilité des aliments
sont les suivantes : réduire la consommation alimentaire et
la qualité des aliments, vendre des biens, ou demander de
l’aide à d’autres villageois. d’après les groupes de discussion,
100_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
comme ces ménages ne jouissent déjà que d’une mobilité
limitée, des villages entiers risquent de se trouver confrontés
à des problèmes semblables et ne seront plus en mesure de
s’entraider si le besoin s’en fait sentir (covariance des risques).
pour ces ménages, la migration peut être saisonnière (moins
de six mois), temporaire (plus de six mois) ou permanente,
avec pour destination les zones les plus proches offrant les
meilleures opportunités en matière de subsistance. Lorsque,
pendant les périodes de pénurie alimentaire, ces migrants
quittent leur village à la recherche de nourriture ou de
ressources pour s’en procurer, ceux qu’ils laissent derrière
eux voient leur vulnérabilité s’accroître face à une série de
facteurs de stress aussi bien environnementaux que sociaux.
La migration est un pis-aller pour éviter les pires conséquences
de l’insécurité alimentaire, mais elle oblige également les
ménages à prendre des mesures qui les appauvrissent encore
plus , comme le recours au crédit pour payer les dépenses
qu’elle entraîne. En outre, le déclenchement répété de chocs
et de facteurs de stress environnementaux (de même que
l’émigration répétée) érode les moyens de subsistance de
ces populations, leur sécurité alimentaire et leur patrimoine
au point de rendre la migration impossible. on retrouve
ce schéma pour un petit nombre de foyers sur tous les
sites étudiés, mais il est plus présent dans les pays qui ont
à surmonter des obstacles plus importants en matière de
pauvreté, d’insécurité alimentaire et de diversification des
moyens de subsistance dans les secteurs vulnérables au
climat.
Impossibilité de migration, difficultés et survie dans les
lieux d’origine
Le dernier profil comprend les ménages décrit comme des
« populations piégées » : ils ne disposent d’aucun atout
susceptible d’appuyer le processus de migration, voire même
de les aider à surmonter l’insécurité alimentaire, ni aucun
choix en matière de migration. Ils ne possèdent souvent
que peu ou pas de terres et vivent dans des régions où le
dénuement est extrême. Les caractéristiques de ces ménages
(ou des individus qui les composent) sont les suivantes :
ménages dirigés par une femme, qui assume de multiples
charges car elle doit s’occuper des terres agricoles, mais
aussi des jeunes enfants et des personnes âgées ; ménages
où, souvent, le principal soutien de la famille a déjà quitté
le foyer à la recherche d’autres moyens de subsistance ;
ménages où il y a peu de travailleurs valides par rapport aux
personnes à charge comme les enfants, les personnes âgées
ou handicapées.
Ces familles sont confrontées à des déficits aigus en matière
de production et de consommation alimentaires en cas
de variations pluviométriques, et déclarent disposer de
ressources alimentaires insuffisantes à plusieurs reprises
dans l’année. Elles n’ont que peu ou pas d’options en
matière de diversification et n’en ont que très peu en
matière de migration. pour les ménages ou les populations
piégés, le déclenchement répété de chocs et de facteurs de
stress environnementaux ne fait qu’éroder davantage leur
patrimoine et accroître leur insécurité alimentaire/des moyens
de subsistance. Au guatemala, des communautés reculées,
dépourvues des conditions permettant d’assurer leur sécurité
alimentaire, se trouvent dans une situation où les possibilités
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 101
sont limitées : grande vulnérabilité face aux précipitations,
peu de possibilités de diversifier localement les risques ou les
moyens de subsistance, solutions migratoires trop onéreuses
(vers une grande ville ou un autre pays), trop risquées, où à
destination de lieux porteurs des mêmes difficultés.
102_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
6- Migration dans le contexte des variabilités pluviométriques et de l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance futuresPour saisir à quel point la pluviométrie pourrait influencer la
mobilité humaine à l’avenir, il est important de répertorier
l’ensemble des répercussions que des scénarios probables
pourraient avoir sur les flux migratoires. En enquêtant sur
les effets de la variabilité pluviométrique sur des facteurs tels
que la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance au
niveau des ménages et des communautés, on comprendra
mieux comment celle-ci influence les décisions individuelles
des migrants. En se fondant sur les données obtenues sur
les sites de recherche, où les changements pluviométriques
peuvent contribuer à accroître l’insécurité alimentaire/des
moyens de subsistance, notre processus de simulation et
d’analyse tourné vers l’avenir permet de mieux comprendre
dans quelles circonstances la variabilité pluviométrique peut
influencer fortement la migration.
La modélisation axée sur les agents est une technique
informatique de simulation sociale qui permet à l’utilisateur
de modéliser le comportement d’entités décisionnelles
individuelles (individus et/ou ménages, par exemple) et
la façon dont ils agissent l’un envers l’autre et en relation
avec l’environnement. ce type de modélisation permet de
combiner différents niveaux d’analyse afin de comprendre le
comportement général du phénomène qui nous intéresse. Le
modèle axé sur les agents (mAA) est constitué de nombreux
6.1 modélisation axée sur les agents (mAA)
individus et unités potentiellement hétérogènes (agents)
capables de prendre des décisions de manière autonome,
souvent avec des objectifs précis, et qui peuvent être aptes
à apprendre, à s’adapter et à modifier leur comportement
en fonction des changements qu’ils perçoivent au sein de
leur environnement. Le comportement des agents et leurs
interactions sont souvent dictés par des règles définies par
l’utilisateur et paramétrées à partir de connaissances ou
de données existantes. Si l’on définit le modèle à partir de
données disponibles et qu’on évalue sa capacité à reproduire
un phénomène réel, il peut servir soit comme outil prédictif
soit comme un moyen d’obtenir des indications inaccessibles
autrement.
Les sections suivantes décrivent le cadre conceptuel du
modèle « Rainfalls » ainsi que les résultats obtenus lors d’une
première modélisation effectuée dans le district de Same, en
Tanzanie. La description du cadre conceptuel et des résultats
du modèle tanzanien présente les conclusions préliminaires
de la modélisation axée sur les agents entreprise par le projet
« Rainfalls ». on trouvera des informations supplémentaires
sur le développement et le paramétrage du modèle dans
l’annexe technique. Les résultats d’investigations plus
approfondies de ce type de modélisation et de la façon
dont il a été appliqué aux autres cas d’étude seront publiés
ultérieurement.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 103
crédit photo : © 2012 Lars johansson
104_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Le modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls
» (mmbAR) a été conçu pour représenter le degré de
vulnérabilité des ménages aux changements provoqués
par la variabilité pluviométrique en termes de sécurité
alimentaire/des moyens de subsistance, ainsi que l’impact
de ces changements sur la migration des membres de
la famille. Le fonctionnement informatique du mmAAR
repose sur un cadre conceptuel (Illustration 11) conçu pour
représenter les relations complexes entre les facteurs qui, à
de multiples niveaux, contribuent à l’insécurité alimentaire/
des moyens de subsistance des ménages et à la migration.
dans le cadre-même, des encadrés indiquent les éléments
inclus dans le modèle à l’un ou l’autre des niveaux d’analyse
(externe, structurel/institutionnel, ménage et individu), et les
flèches indiquent la direction principale de l’influence d’un
élément sur un autre. Les termes en caractères gras mettent
en évidence les composantes principales de l’évaluation de
la vulnérabilité et les processus décisionnels en matière de
migration qui ont été modélisés. Les termes qui ne sont pas
en gras désignent les facteurs secondaires dont on considère
qu’ils contribuent à ces processus.
.
6.2 Le modèle de migration axé sur les agents de « Rainfalls » L’évaluation de la vulnérabilité du ménage, au centre du
cadre conceptuel, est influencée par les effets de tout
changement externe intervenant dans la variabilité et la
moyenne pluviométriques locales sur une large gamme de
facteurs structurels/institutionnels touchant à la sécurité
alimentaire/des moyens de subsistance, y compris l’état
général du marché régional du travail et de la production
alimentaire. Elle dépend également de certains attributs et
caractéristiques propres au ménage, notamment les revenus,
le patrimoine et la taille de la famille. que le ménage se
perçoive comme vulnérable (avec un besoin imminent de
modifier sa situation) ou satisfait (ses stratégies d’adaptation
s’avérant suffisantes), il entreprend un processus décisionnel
au regard de la migration. Toute décision concernant la
migration dépend de facteurs individuels comme l’âge, le sexe
et l’état civil aussi bien que de facteurs propres au ménage
comme le nombre de membres économiquement actifs et les
biens fonciers, avec pour résultat une forme de migration qui
sera soit vulnérable soit satisfaite. La première indique une
migration davantage poussée par le besoin et la deuxième
davantage inspirée par la recherche d’opportunités. comme
dans le monde réel, le comportement d’un agent influence
les actions ultérieures des autres par le biais d’interactions
et d’effets de retour tels que l’impact de la migration sur le
réseau social, les revenus du ménage et le marché du travail
local.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 105
Illustration 11 : Cadre conceptuel du modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls »
106_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
bien qu’il ait été créé pour les huit sites d’étude « Rainfalls »,
le cadre conceptuel ci-dessus a d’abord été développé et testé
sur le site de recherche tanzanien. dans ce mAA de simulation,
les ménages et les individus sont tous représentés comme
des agents en situation d’interaction mutuelle (ménage-
ménage ou individu-individu) ou avec leur environnement.
Les caractéristiques des agents, qu’il s’agisse de ménages ou
d’individus, découlent directement des données de l’enquête
auprès des ménages recueillies dans les trois villages étudiés.
Les règles concernant les actions et interactions qui régissent
le comportement des agents soumis à différents degrés de
variabilité pluviométrique ont aussi été établies après analyse
d’une large gamme de données d’enquête sur les moyens
de subsistance, la sécurité alimentaire et la migration. En se
basant sur ces données, les évaluations de la vulnérabilité et
les décisions migratoires simulées sont censées refléter celles
qui ont été observées sur le terrain.
Les scénarios des précipitations futures utilisées comme
stimulus du changement et modélisées lors du travail de
simulation en Tanzanie sont fournis par la méthode de
simulation de monte carlo. celle-ci reproduit le caractère
pdm (« probability-distributed model » e.g. basé sur la
distribution des probabilités) stochastique de la variation
des précipitations futures autour d’une tendance à plus
long terme. Les flux de migrants modélisés pour différents
scénarios d’anticipation de la pluviométrie permettent
également de comprendre l’influence des précipitations
sur la migration. Les scénarios de précipitations testés en
6.3 Scénarios d’anticipation et analyse : modélisation du cas
du district de Same, Tanzanie
Tanzanie sont censés représenter le degré approximatif de
changement climatique prévu pour le pays. En reproduisant
le taux de changement à l’horizon 2100 estimé par
paavola (2003) , le scénario 1 représente une tendance à la
sécheresse, les précipitations moyennes annuelles diminuant
de 5 pour cent maximum d’ici 2040 et la variabilité autour
de cette moyenne augmentant de 5 pour cent maximum
la même année. Inversement, le scénario 2 présente une
tendance à l’humidité, la moyenne des pluies annuelles et la
variabilité autour de cette moyenne augmentant toutes deux
de 5 pour cent maximum d’ici 2040. En reproduisant le taux
de changement à l’horizon 2100 prévu par Agrawal et al.
(2003) , le scénario 3 présente une tendance à une humidité
extrême, la moyenne des pluies annuelles et la variabilité
autour de cette moyenne augmentant toutes deux de 22,5
pour cent maximum d’ici 2040. Inversement, le quatrième et
dernier scénario représente une tendance à une sécheresse
extrême, les précipitations moyennes annuelles diminuant de
22,5 pour cent maximum d’ici 2040 et la variabilité autour
de cette moyenne augmentant de 22,5 pour cent maximum
la même année.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 107
En se servant du cadre conceptuel décrit ci-dessus, le
mmAAR Tanzanie indique le nombre de migrants issus de
ménages satisfaits ou vulnérables des villages faisant l’objet
de l’étude. chacun des ménages évalue sa vulnérabilité face
aux impacts des changements de pluviométrie mois par
mois. Les changements saisonniers comme les saisons des
pluies vuli et masika influent sur les revenus, la production
alimentaire et par conséquent la vulnérabilité des ménages
tout au long de l’année. qu’il soit satisfait ou vulnérable,
chaque ménage peut citer la migration d’un ou plusieurs
de ses membres comme stratégie de subsistance viable.
L’illustration 12 montre le taux de différence normalisé de
la migration modélisée pour les ménages vulnérables. Les
flux de migrants, normalisés par rapport au nombre d’agents
émigrants selon un scénario de précipitations « moyennes »
(sans changement de variabilité ni de moyenne), constituent
la moyenne des ensembles constitués de cinq membres. Ils
apparaissent comme des moyennes mobiles, étalées sur cinq
ans pour mieux faire ressortir les tendances.
Résultats pour la Tanzanie : migration de 2014 à 2040 selon
les scénarios de précipitation suivants : augmentation de
la sécheresse/de l’humidité, très forte augmentation de la
sécheresse/de l’humidité
108_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
pendant presque toute la période de simulation, le taux
normalisé de migration modélisée chez les ménages
vulnérables est généralement le plus élevé dans le scénario
4 (sécheresse extrême). d’après ce scénario, le taux annuel
moyen normalisé de la migration vulnérable est de 0,5
(soit une augmentation de 50 % par rapport aux agents
modélisés sous des conditions « normales »). par contraste,
le scénario 3 (humidité extrême) produit généralement les
taux de migration vulnérable les plus bas. Avec un taux
annuel moyen de -0,16, il est également le seul scénario à
produire systématiquement des taux de migration vulnérable
moyenne du scénario 1
(sécheresse) = 0,26Taux de différence normalisé de la migration vulnérable
moyenne du scénario 3
(humidité extrême) = -0,16
moyenne du scénario 2
(humidité) = 0,27
moyenne du scénario 4
(sécheresse extrême) = 0,50
Illustration 12 : différence normalisée sur une moyenne mobile de cinq ans dans le taux de migration vulnérable selon le
modèle MMAAR. Les barres d’erreur indiquent la marge d’erreur modélisée avec des ensembles de cinq membres.
plus faibles que le scénario « normal » par rapport auquel
s’effectue la normalisation des résultats de la simulation. Les
scénarios 1 (sécheresse) et 2 (humidité) présentent des taux
similaires de changement positif dans la migration vulnérable
normalisée au cours de la période de simulation, avec une
moyenne de 0,26 et 0,27 respectivement.
ces résultats correspondent à ce que l’on pourrait
logiquement attendre de ce type de contexte semi-aride
(précipitations annuelles moyennes à long terme de 560
mm/an à peine) caractéristique du site de recherche
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 109
tanzanien. dans un tel environnement, un scénario de
sécheresse extrême devrait entraîner une vulnérabilité accrue
des ménages et par conséquent une augmentation nette
des formes de migration vulnérables. pour la même raison,
on pourrait également s’attendre à un niveau modérément
élevé de migration vulnérable sous un scénario de sécheresse.
Inversement, la prospérité relative que pourrait produire un
scénario d’extrême humidité pourrait s’expliquer par une
vulnérabilité moindre de la plupart des ménages pendant les
périodes où l’eau est plus abondante. Le niveau modérément
élevé de migration vulnérable sous un scénario d’humidité
contredit cette attente. une explication possible tiendrait
à l’interaction entre le désir de migration du ménage et sa
capacité réelle à migrer. La faible humidité constatée dans le
scénario 2 peut produire une augmentation du nombre de
ménages qui seront en mesure d’investir dans la migration
sans pour autant améliorer leur situation au point de ne plus
être considérés comme vulnérables. ou alors, l’augmentation
annuelle moyenne de 5 pour cent des précipitations à
l’horizon 2040 dans le scénario à humidité modérée est
peut-être, dans le contexte semi-aride et marginalisé du
site de recherche tanzanien, tout simplement insuffisante
pour atténuer la vulnérabilité des ménages pauvres et
leur permettre de multiplier les options pour assurer leur
subsistance in situ et ainsi parer à l’avancée de la migration
vulnérable.
bien que les barres d’erreur sur l’illustration 12 indiquent des
variations dans les résultats de la simulation pour les migrants
vulnérables, la nature des rapports entre les différents
scénarios ne s’en trouve pas modifiée même aux extrêmes
de chaque marge. En dépit de sa valeur considérable pour
cette étude, le nombre de migrants vulnérables modélisés
dans chacun des scénarios testés dépend à la fois du fait
que les ménages sont considérés comme vulnérables et de la
tendance de leurs membres à émigrer. c’est pourquoi il est
important de prendre aussi en compte le nombre de migrants
satisfaits modélisés dans les quatre scénarios en question
(Illustration 13).
110_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Les résultats de la modélisation pour la migration satisfaite
(Illustration 13) montrent une sensibilité bien moindre aux
modifications de la pluviométrie que pour la migration
vulnérable. pendant la quasi-totalité de la période de
simulation, le scénario 2 (humidité) produit le taux le plus
élevé de migration modélisée chez les ménages satisfaits.
ceci dit, le taux annuel moyen normalisé de migration
satisfaite est de 0,05, soit seulement 5 pour cent de plus
que pour le scénario « normal ». de même, pour la majeure
partie de la période de simulation, le scénario 1 (sécheresse)
produit le taux le plus bas de migration satisfaite normalisée
moyenne du scénario 1
(sécheresse) = -0,05
moyenne du scénario 3
(humidité extrême) = 0,03
moyenne du scénario 2
(humidité) = 0,05
moyenne du scénario 4
(sécheresse extrême) = -0,02
Illustration 13 : différence normalisée sur une moyenne mobile de cinq ans dans le taux de migration satisfaite selon le modèle
MMAAR. Les barres d’erreur indiquent la marge d’erreur modélisée avec des ensembles de cinq membres.
avec un taux annuel moyen normalisé égal mais inverse de
-0,05. Entre ces deux limites relatives, les scénarios 3 et 4
(humidité extrême et sécheresse extrême) révèlent des
tendances globales encore plus fines, bien qu’elles présentent
les mêmes signes que leurs équivalents modérés. or, si le
scénario « humidité extrême » révèle un taux positif plus
modéré que celui de l’humidité (moyenne annuelle de 0,03),
celui de l’extrême sécheresse révèle un taux négatif plus
modéré que celui de la sécheresse (moyenne annuelle de
-0,02). Les barres d’erreur qui apparaissent sur les résultats
de la simulation de la migration satisfaite n’indiquent qu’une
Taux de différence normalisé de la migration satisfaite
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 111
très légère déviation de la moyenne pour la marge d’erreur
complète simulée avec des ensembles de cinq membres.
Il est à noter qu’alors que les deux scénarios « humides »
produisent systématiquement un changement positif pour
la migration satisfaite, les deux scénarios de sécheresse
produisent quant à eux un résultat négatif une fois normalisés
par rapport à la migration satisfaite modélisée selon un
scénario « normal ». ces résultats s’expliquent par le fait
qu’en toute probabilité, les ménages seront plus aptes à
investir dans des types de migration satisfaite ou tournée vers
la recherche d’opportunités pendant la période de relative
abondance qu’apporte une pluviosité accrue. Inversement,
leurs capacités seront réduites dans les périodes d’austérité
imposées par une baisse des précipitations. ceci dit, étant
donné la faible ampleur des changements intervenus
dans les formes satisfaites de migration et reproduits
dans l’illustration 13, il paraît irréaliste d’entreprendre une
comparaison approfondie des relations précises entre les
différents scénarios.
pour résumer, les résultats de la modélisation axée sur les
agents pour le district de Same en Tanzanie indiquent une
faible sensibilité à la variabilité pluviométrique des formes
satisfaites de migration. d’après la simulation, les légères
augmentations de la migration satisfaite semblent résulter
d’une pluviosité accrue, alors que les légères baisses sont
attribuées à des précipitations moins importantes. En
revanche, les formes vulnérables de migration sont bien plus
sensibles aux différents scénarios de variations des pluies
: selon la modélisation, la migration la plus vulnérable se
produit suivant un scénario de sécheresse extrême, et la moins
vulnérable en cas d’extrême humidité. Les changements dans
les régimes pluviométriques peuvent avoir un impact sur la
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance à l’avenir, et
pourraient accroître la vulnérabilité de nombreux ménages
dans le monde. Les différents scénarios climatiques ayant un
effet manifeste sur les formes vulnérables de migration, la
modélisation axée sur les agents présentée ici illustre le rôle
que pourrait, à l’avenir, jouer la migration dans la gestion des
facteurs de stress climatiques.
112_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
7- ConclusionsIl est essentiel de comprendre la façon dont les ménages
gèrent aujourd’hui les effets des modifications des régimes
pluviométriques sur leur sécurité alimentaire et leurs moyens
de subsistance, afin de garantir des plans d’adaptation,
des politiques de développement et plus globalement une
transition vers un monde plus résilient qui tiennent compte
des changements climatiques. partout dans le monde, les
communautés vulnérables subissent déjà les effets des
phénomènes météorologiques extrêmes et du changement
climatique à évolution lente, et constatent des changements
dans les précipitations et dans les périodes végétatives ainsi
qu’une augmentation des événements climatiques extrêmes
. Le changement climatique menace la productivité agricole,
aggrave l’insécurité alimentaire et met en péril les moyens
de subsistance et la survie des populations pauvres, et en
particulier des petits exploitants agricoles, des éleveurs
et des paysans sans terre dans les pays les moins avancés.
cela en poussera certains à aller chercher des moyens de
subsistance ailleurs et en piègera d’autres dans la pauvreté. Le
changement climatique affecte de plus en plus l’habitabilité
même de certaines zones, forçant les habitants à partir.
L’étude « Rainfalls » montre que la question qui se pose,
en ce qui concerne les interactions entre les changements
climatiques planétaires (et locaux) et la migration humaine,
n’est pas de savoir si les facteurs environnementaux sont les
seuls responsables de la mobilité, mais comment ces facteurs
se conjuguent pour déterminer les choix migratoires. Si l’on
arrive à appréhender de façon plus nuancée l’interaction
des variables climatiques et des autres variables (dont la
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance) et leur poids
sur les choix migratoires, il sera plus facile de structurer les
investissements d’adaptation, afin de s’assurer que quelles
que soient les stratégies auxquelles les ménages ont recours
(y compris la migration) celles-ci contribuent à améliorer leur
résilience face aux changements climatiques.
Les résultats de la modélisation des précipitations en Tanzanie
montrent clairement que la variabilité pluviométrique
et la vulnérabilité des ménages face à ces changements
influencent les décisions relatives à la migration. Les ménages
qui disposent d’options plus variées ou plus avantageuses
en matière d’adaptation semblent moins sensibles aux
changements pluviométriques et moins prompts à migrer,
poussés par le besoin, dans des conditions défavorables.
dans les prochaines décennies, la façon dont les ménages
concernés géreront les changements en matière de sécurité
alimentaire/des moyens de subsistance conditionnera les
schémas de répartition de la population dans les régions du
monde hautement vulnérables aux changements climatiques.
celles-ci comprennent les zones montagneuses, les deltas
à forte densité de population, et les zones arides ou semi-
arides où les cultures pluviales et l’élevage subissent déjà des
pressions. La plupart des ménages tenteront de gérer ces
risques en essayant de diversifier leurs sources de revenus
dans leur lieu d’origine et en faisant appel à la migration
saisonnière ou temporaire.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 113
Des mesures d’adaptation efficaces garantissant
particulièrement la promotion d’une agriculture durable
et d’une diversification des moyens de subsistance ruraux
permettront d’éviter des mouvements de populations massifs
et non planifiés. Cependant, les pays et communautés plus
pauvres ne sont pas en mesure d’entreprendre une adaptation
à grande échelle. Aussi les sociétés touchées par les variations
des régimes pluviométriques (pluies insuffisantes ou trop
abondantes à certaines époques de l’année, sécheresse ou
humidité accrue à long terme) risquent de voir se détériorer
leur bien-être, leurs moyens de subsistance et leur sécurité
alimentaire, en une spirale descendante au bout de laquelle
les réseaux sociaux subiront un stress excessif et où, pour ceux
qui seront obligés de partir comme pour ceux qui resteront
sur place, les tensions et la violence se feront plus fortes.
La mobilité humaine liée aux changements pluviométriques
et à l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance est
une question que l’on ne peut traiter efficacement que si on
l’envisage comme un processus mondial et non comme une
série de crises locales. L’aide et la protection des populations
vulnérables est une lourde responsabilité que ne peuvent
porter seuls les états et communautés concernés. Tous les
pays doivent contribuer à minimiser la pression exercée
sur les populations vulnérables et leur fournir des options
en matière d’adaptation, notamment des déplacements de
population dans la dignité et en toute sécurité si cela devient
inévitable.
photo credit : © 2011 christina Rademacher-Schulz/uNu-EHS
114_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
photo credit : © 2012 Lars johansson
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 115
8- Réflexions pour les décideurs et les praticiens : permettre des choix informés à l’échelle mondial, national et local.L’étude « Rainfalls » s’est donnée pour objet les relations
entre variabilité pluviométrique, sécurité alimentaire/des
moyens de subsistance et mobilité humaine. Elle étudie aussi
les circonstances dans lesquelles les ménages ont recours à
la migration comme stratégie de gestion des risques face à
la variabilité des précipitations et à l’insécurité alimentaire.
L’étude montre que pour certains ménages, la migration est
un moyen avéré d’améliorer leur résilience. pour d’autres, la
migration s’avère un pis-aller qui perpétue le cycle négatif de
pauvreté et de pénurie alimentaire ou pire encore, érode leur
résilience face aux facteurs de stress climatiques actuels ou
futurs. pour d’autres encore, et pour certaines populations
particulièrement vulnérables, la migration n’est une option
réaliste ni pour améliorer la résilience ni pour éviter les
conséquences les plus pénibles de l’insécurité alimentaire.
ces constatations ont des répercussions sur les politiques
d’orientation qui visent à aider les populations à s’adapter,
voire à prospérer lorsqu’elles sont confrontées, entre
autres, à des facteurs de stress climatiques : si l’on ne
formule pas de nouvelles approches pour offrir davantage
de possibilités de subsistance et de gestion des risques aux
ménages se situant à la frontière entre développement et
pauvreté, ceux-ci ne feront qu’accumuler davantage de
retard dans leur quête d’adaptation et de développement
durable, avec pour résultat probable une migration dans
des circonstances défavorables. cela annulera les avancées
durement obtenues en termes de bien-être des populations
et obligera les états à répondre aux besoins accrus d’un
nombre croissant de citoyens marginalisés et sans doute
mobiles. S’ils comprennent les circonstances et les facteurs
qui déterminent les choix migratoires des ménages (aux
niveaux national, local et familial), les décideurs seront plus
aptes à créer des environnements favorables qui permettront
aux populations de s’adapter au changement climatique
et d’envisager la migration comme une stratégie destinée
à améliorer leur résilience, et non comme une tactique de
survie dommageable à long terme. .
Les considérations qui suivent, tant sur les politiques
d’orientation que sur la pratique, sont une synthèse des
réflexions que l’on trouvera dans les huit rapports nationaux
des études de cas. Les impacts des changements climatiques
sont locaux, mais les orientations mondiales en matière
de changement climatique, de sécurité alimentaire et de
développement durable influencent les choix politiques
nationaux et l’accès aux aides. Il y a des défis pour lesquels
une action planétaire s’impose. pour d’autres, des mesures
aux niveaux national et local sont indispensables pour aider les
communautés et ménages vulnérables. Les recommandations
ci-dessous énumèrent une série de mesures qui, dans leur
ensemble, peuvent permettre aux populations pauvres de
prendre des décisions informées sur la migration, l’adaptation
et la sécurité alimentaire, afin d’améliorer leur résilience.
116_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
L’étude « Rainfalls » apporte la preuve que certaines
communautés sont déjà aux prises avec les effets d’une
pluviométrie changeante. plus les pouvoirs publics retarderont
leur action face au changement climatique et repousseront
l’adoption de mesures ambitieuses d’atténuation et
d’adaptation, plus les impacts seront graves et les coûts
élevés, tant en termes humains que financiers.
à ce jour, les effets des émissions sont déjà considérables.
Selon des estimations récentes, les tendances actuelles en
matière d’émissions associées aux promesses de réduction
pourraient entraîner un réchauffement de 3,5 à 6° c . même
après avoir pris des mesures d’atténuation et fait des choix
d’adaptation, les pays, communautés et ménages vulnérables
seront sans doute dépassés par les changements climatiques.
certains verront leurs moyens de subsistance et leur sécurité
alimentaire se détériorer inexorablement, accompagné
de pertes et d’une atteinte à leur bien-être qui dépassera,
dans l’ensemble, tout ce que l’on a connu . Les parties à
la convention-cadre des Nations unies sur les changements
climatiques doivent prendre des mesures urgentes dans trois
secteurs (atténuation, adaptation [notamment financière]
et pertes et dommages) afin de s’attaquer aux causes du
changement climatique et de l’impact disproportionné qu’il
exerce sur les populations les plus vulnérables et les moins
responsables de ces changements. Il est nécessaire que les
parties s’engagent à :
Les parties doivent fixer ensemble leur pic d’émissions d’ici
2015 et s’accorder afin de réduire les émissions mondiales
d’au moins 80 pour cent par rapport aux niveaux de 1990
d’ici 2050. Elles doivent aussi se mettre d’accord sur un
processus permettant d’augmenter les niveaux de réduction
des émissions si de nouvelles études scientifiques en
démontrent la nécessité, pour être certaines d’atteindre les
objectifs mondiaux en matière de température et empêcher
que les changements climatiques ne s’emballent. comme
l’explique l’Article 2, l’objectif ultime de la convention (éviter
les perturbations climatiques dangereuses) est le point
d’ancrage pour répondre aux besoins des communautés
vulnérables et éviter les pertes et dommages.
Les parties doivent veiller à ce que le Fonds vert pour le climat
encourage la transparence, les approches participatives
et la responsabilisation afin que les fonds et programmes
répondent aux besoins des plus vulnérables. L’adaptation
demande un financement robuste. Plus les efforts consentis
pour permettre aux communautés vulnérables de s’adapter
aux impacts du changement climatique seront importants (par
le biais d’un financement adéquat favorables aux populations
démunies), plus celles-ci seront en mesure de prendre des
8.1 décideurs mondiaux
A l’attention des Parties à la Convention-cadre des Nations
Unies sur les changements climatiques
Adopter une approche équitable pour réduire les émissions
de gaz à effets de serre conformément aux recommandations
des scientifiques pour que la température mondiale
n’augmente pas de plus de 2 °C, voire de 1,5 °C.
Augmenter les promesses de fonds et convenir de
mécanismes innovants pour garantir un financement de
l’adaptation dans les pays en développement suffisant,
durable, prévisible, nouveau et supplémentaire
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 117
Faciliter la coordination mondiale et régionale pour
permettre aux pays en développement d’avoir accès à
l’aide et de définir et mettre en place leurs Plans Nationaux
d’Adaptation (PNA)
décisions informées afin d’améliorer leur résilience dans le
contexte des changements climatiques. Les pays développés
se sont engagés à mobiliser 100 milliards de dollars uS par
an jusqu’en 2020 destinés aux dépenses climatiques. mais
la somme reste insuffisante et les promesses de fonds ne se
sont pas encore traduites par des accords sur des sources de
financement permettant de répondre à ces engagements. En
même temps, la voie de l’atténuation adoptée « par défaut »
lors des négociations climatiques signifie que les impacts du
changement climatique dépasseront sans doute les limites de
l’adaptation. Des mesures supplémentaires spécifiques seront
donc nécessaires pour compenser les pertes et dommages,
en plus de ce que prévoit l’agenda de l’adaptation.
créé en 2010, le cadre d’adaptation de cancún de la
ccNucc a permis de créer une structure mondiale pour
traiter de l’adaptation . certaines parties de ce cadre sont
déjà fonctionnelles, comme le comité d’adaptation et le
programme de travail sur les pertes et dommages. d’autres
deviendront opérationnelles au cours des prochaines années
et devront produire des organismes et mécanismes d’appui
efficaces pour les pays en développement, afin de permettre
à ces derniers de répondre aux besoins des populations
vulnérables.
Alors que les communautés locales qui connaissent des
difficultés pour se nourrir et subsister entreprennent de
s’adapter aux perturbations pluviométriques et autres
facteurs de stress climatiques, notamment en recourant à
la migration, les choix qui s’offrent à elles dépendront des
initiatives que prendront les pouvoirs publics en matière
de planification. De son côté, le Comité d’adaptation
peut jouer un rôle crucial en donnant aux gouvernements
nationaux les moyens d’accéder aux informations et
ressources dont ils ont besoin, ainsi qu’un appui technique
et humain pour que des initiatives efficaces en faveur des
plus démunis atteignent ces communautés vulnérables.
Le plan de travail triennal de ce comité doit inclure une
cartographie des organes internationaux, nationaux et
régionaux en charge de l’adaptation et des ressources
relatives à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance
et à la mobilité humaine. Il doit identifier des moyens
concrets afin de faciliter la coordination entre ces différents
organes, pour ainsi répondre aux problèmes émergents et
combler les lacunes en matière de capacités, de ressources
et d’information dans ces domaines. La cartographie et la
coordination émanant du comité d’adaptation devraient
inclure les activités relatives à la mobilité humaine du HcR, de
l’omI et d’autres organisations, ainsi que des projets comme
l’initiative Nansen qui s’occupent de types particuliers de
mobilité (migration, déplacement, relocalisation planifiée).
Le comité doit aussi formuler des principes de base pour que
la migration s’effectue dans la dignité et en toute sécurité.
Lors de l’examen des capacités des centres régionaux,
le comité devrait tenir compte de leur contribution en
faveur de la coopération régionale en matière d’adaptation
transfrontalière, avec ses défis et ses opportunités.
118_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Les initiatives mondiales en matière de pertes et dommages
doivent aider les gouvernements nationaux à prendre en
compte les besoins des populations les plus vulnérables,
dont celles n’ayant pas accès aux possibilités d’adaptation
ou de migration ou qui pourraient être forcées de quitter
une région devenue hostile. La ccNucc doit contribuer à
faciliter l’évaluation systématique des pertes et dommages
réels ou potentiels, en particulier les pertes non économiques
ou difficilement quantifiables et l’érosion des moyens de
subsistance, de la sécurité alimentaire et du bien-être.
un mécanisme pour les pertes et dommages devrait
appuyer l’évaluation et la surveillance des perturbations
pluviométriques afin de signaler à la Conférence des parties
tout changement critique en matière de sécurité alimentaire/
des moyens de subsistance, de mobilité humaine ou de
viabilité à long terme des paysages. Il devrait également
appuyer des mesures de protection sociale et économique et
des assurances à prix raisonnable ou autres outils de gestion
des risques ou de transfert, afin de permettre aux populations
pauvres confrontées à une incertitude climatique croissante
de parer aux risques ou de les transférer.
Il est également nécessaire d’évaluer les capacités des
gouvernements nationaux et régionaux à gérer les pertes et
dommages, ainsi que les besoins connexes des communautés
vulnérables. La convention a un rôle à jouer là où les capacités
nationales ne suffisent pas : elle peut faciliter les échanges
d’expériences entre régions et encourager des approches
systématiques pour remédier aux pertes et dommages. ces
approches pourraient inclure une coordination des normes,
Les dernières années ont démontré combien il était difficile de
relever le défi de la faim dans le monde : près d’un milliard de
personnes continuent de souffrir d’une insécurité alimentaire
chronique. Le témoignage des communautés qui ont participé
à l’étude « Rainfalls » démontre de surcroît les liens étroits
entre changement climatique, sécurité alimentaire, pauvreté,
gestion des ressources naturelles et mobilité humaine. ces
questions ne peuvent se traiter de façon isolée. Alors que les
éléments qui les lient aux impacts des actions humaines sur
les ressources naturelles se font plus évidents, les décideurs
et praticiens doivent prendre conscience qu’une approche
globale du développement durable est impérative.
Évaluer et réparer les pertes et dommages de façon à aider
les populations vulnérables
A l’attention des décideurs politiques spécialisés dans
la sécurité alimentaire et nutritionnelle mondiale et le
développement durable
politiques et principes, par exemple pour que les mesures
relatives aux pertes et dommages (y compris la migration
et la réinstallation) soient transparentes et participatives, et
qu’elles respectent les droits des populations concernées.
Afin d’encourager les initiatives mondiales ou nationales qui
abordent l’intensification de la mobilité humaine dans sa
globalité, la convention doit aussi coordonner ses activités
avec les organismes dont le mandat couvre la gestion de
la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance et de la
mobilité humaine. Enfin, la Conférence des parties doit
aussi prendre acte de la nécessité d’envisager des approches
relatives auà la réinsertion, à la restitution et à une série de
questions opérationnelles comme les dispositions financières
ou les dédommagements en faveur des communautés
touchées.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 119
Il est très important que les décideurs mondiaux en matière
de sécurité alimentaire et nutritionnelle, dont le comité
de la sécurité alimentaire mondiale et l’initiative Renforcer
la nutrition, prennent conscience de la menace que le
changement climatique fait peser sur leurs objectifs communs
et l’expriment haut et fort. ces décideurs doivent incorporer
les effets du changement climatique dans les politiques
alimentaires et nutritionnelles et dans leur pratique, en
tenant compte du fait que ces impacts diffèrent pour les
hommes et les femmes. Ils devraient aussi réitérer l’appel à
l’action mondiale pour confronter la crise climatique afin de
démontrer l’importance du leadership et renforcer la volonté
politique en faveur de mesures énergiques.
Alors que la date butoir de 2015 approche pour les objectifs
du millénaire pour le développement, les dirigeants doivent
élaborer et convenir d’une nouvelle série « d’objectifs pour
un développement durable » qui traitent des rapports entre
pauvreté, environnement, changement climatique et mobilité
humaine. Les dirigeants doivent reconnaître l’existence des
facteurs de changement environnemental et leur impact sur
la pauvreté et la sécurité alimentaire. ces objectifs doivent
exiger la contribution active de l’ensemble de la communauté
internationale : chaque pays devra s’employer à réduire
le nombre de ces facteurs et garantir le droit de tous à un
développement durable.
Renforcer l’appel à la lutte contre la crise climatique et
intégrer le changement climatique et les considérations
relatives à l’égalité des sexes dans les initiatives mondiales
en faveur de la sécurité alimentaire et nutritionnelle
Formuler des objectifs à la suite des Objectifs du Millénaire
pour le développement afin d’appuyer le droit de tous à un
développement durable
120_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Le cadre d’adaptation de cancún a représenté un grand
pas en avant pour les initiatives mondiales en matière
d’adaptation, en établissant des processus pour appuyer
l’action nationale et prodiguer des conseils sur les principes
d’adaptation, l’assistance et les mesures à prendre (dont la
migration). Il fait aussi référence à de nombreuses questions
connexes (migration, vulnérabilité et sécurité alimentaire)
qui demandent une approche holistique. dans le sillage
des progrès effectués à l’échelle mondiale, il est temps de
s’intéresser aux niveaux national et local pour permettre
aux populations pauvres et vulnérables de s’adapter aux
changements climatiques et de faire des choix qui peuvent
renforcer leur résilience (dont la migration).
Les plans, les politiques et les pratiques des gouvernements
des pays en développement, auront des implications non
négligeables, aux niveaux national et local, sur l’aptitude
des populations pauvres et vulnérables à s’adapter et à gérer
les impacts et la variabilité climatiques. Les gouvernements
des pays développés et les agences humanitaires peuvent
appuyer ces efforts et promouvoir des principes et approches
en matière d’adaptation qui tiennent compte des besoins
des populations les plus vulnérables. En tant que partenaires
d’exécution des gouvernements nationaux et des collectivités
locales, les oNg humanitaires ou axées sur le développement
ou l’écologie, les institutions multilatérales et les agences
des Nations unies ont la responsabilité de veiller à ce que
leur pratique reflète ces principes et intègre les impacts
et vulnérabilités climatiques projetés afin d’améliorer les
capacités d’adaptation des communautés et des populations
pauvres et vulnérables. ces acteurs doivent également
Les gouvernements devraient anticiper les questions de
sécurité alimentaire/des moyens de subsistance ou de
mobilité humaine liée aux facteurs de stress climatiques
et préparer des plans en conséquence. pour cela, il faut
que les processus gouvernementaux de planification aux
niveaux national et local prennent en compte tous les
secteurs concernés. Les plans doivent également incorporer
les projections climatiques, inclure des analyses et proposer
des politiques améliorées qui permettent de multiplier ou
limiter les options en matière d’adaptation, avec notamment
des politiques régissant le travail, les biens fonciers et les
ressources naturelles, le déplacement et l’accès aux services
d’appui à la migration et à la réinstallation. La planification
et la mise en œuvre doivent encourager la participation et
respecter les droits des populations vulnérables, y compris les
migrants, les membres de leur famille ou les personnes qui
se voient dans l’obligation de migrer. Elles doivent respecter
les principes internationaux et les instruments relatifs aux
droits de l’homme. Une bonne planification et une mise en
œuvre efficaces exigent la participation des pouvoirs publics
à tous les niveaux, ainsi que celle de certains ministères,
lesquels doivent avoir les capacités et ressources nécessaires
pour s’impliquer dans ces processus. c’est pourquoi il est
nécessaire d’identifier et de combler les lacunes en matière
de capacités.
8.2 gouvernements et partenaires d’exécution
Appuyer, promouvoir et mettre en œuvre des plans
nationaux et locaux participatifs et couvrant l’ensemble des
secteurs affectés
chercher à améliorer leur collaboration afin de favoriser
l’efficacité et l’efficience et de relever des défis multisectoriels
de plus en plus complexes.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 121
Les mesures visant à améliorer les moyens de subsistance et
la sécurité alimentaire et à multiplier les options d’adaptation
des petits exploitants, des pêcheurs, des éleveurs et pasteurs
ainsi que des ménages sans terres comprennent entre autres
: la promotion d’une diversification durable des moyens
de subsistance ; une agriculture durable et résiliente aux
changements climatiques ; l’amélioration des pratiques
agricoles et de l’accès à des aliments nutritifs diversifiés.
La gestion communautaire des ressources naturelles
et la gestion intégrée des ressources en eau/des
bassins hydrographiques (notamment pour l’irrigation,
l’assainissement et l’hygiène) peuvent protéger les
écosystèmes dont dépendent les moyens de subsistance.
L’accès aux données climatiques locales, aux marchés, à la
microfinance, à la micro-assurance et à l’assurance indexée,
ainsi qu’à la protection sociale et à des programmes sociaux
renforce les capacités des ménages démunis à résister aux
chocs. des programmes d’éducation et de formation peuvent
offrir de nouvelles possibilités en matière de revenus, tant
pour les migrants que pour les non migrants.
Les impacts localisés de phénomènes climatiques extrêmes,
comme les inondations de 2011 qu’on a pu observer
au centre de la Thaïlande et dans le delta du Mékong au
Viet Nam pendant les recherches de terrain pour le projet,
peuvent résulter tant des conditions météorologiques que
de l’activité humaine loin en amont.
Sur le site de recherche du Ghana, 85 pour cent des
habitants du district tirent leur subsistance de l’agriculture
et de l’élevage. Or, les paysans n’ont pas accès à
l’irrigation et leurs cultures sont entièrement tributaires
des précipitations. Les communautés étudiées en Thaïlande
témoignent d’une plus grande résilience, avec un meilleur
accès aux marchés, à l’infrastructure et au crédit, ainsi qu’à
des sources de revenus diversifiées, à la production agricole
et à des programmes publics de protection sociale
Appuyer et encourager la résilience des moyens de
subsistance et la sécurité alimentaire
Appuyer et collaborer avec les initiatives visant à aborder les
défis et opportunités transfrontaliers relatifs à l’adaptation
et à la mobilité humaine
certains des impacts locaux des changements climatiques
résultent d’activités ou d’événements qui se sont produits loin
en amont ou qui peuvent être soit exacerbés soit atténués
par des mesures visant à gérer les risques ou les ressources
au sein d’un écosystème ou bassin hydrologique commun.
de même, les impacts des perturbations climatiques,
qu’elles soient rapides ou progressives, peuvent provoquer
des déplacements transfrontaliers ou rendre des zones
entières inhabitables, obligeant la population à s’installer
ailleurs. Avec l’augmentation des impacts climatiques, voire
de la mobilité humaine, les nations doivent coopérer au
niveau régional pour répertorier les défis transfrontaliers
et les opportunités à effet de levier. comme exemples de
collaboration, citons l’échange d’informations sur les impacts
projetés du changement climatique, l’étude des effets
transfrontaliers potentiels d’activités telles que les barrages
hydroélectriques ou l’irrigation améliorée, la publication des
stratégies climatiques et un dialogue régulier sur les défis et
opportunités communs.
122_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
conformément au cadre d’action de Hyogo, des systèmes
d’alerte précoce et autres mesures de réduction des
risques de catastrophe, y compris celles qui tirent parti des
capacités et des connaissances locales, doivent être intégrés
à la programmation du développement pour permettre la
préparation et la survie des ménages démunis. La riposte
aux catastrophes doit prendre en compte et multiplier les
stratégies de développement durables à long terme, les
actifs et les services déjà en place notamment l’aide à la
subsistance, l’éducation et les services de santé. de telles
initiatives peuvent minimiser l’impact des catastrophes sur les
populations déplacées, améliorer leur résilience et diminuer
leur vulnérabilité. pour cela, il faut renforcer la collaboration
entre les gouvernements nationaux ou les collectivités locales,
le système des Nations unies et les acteurs humanitaires et
du développement, afin de mieux coordonner les efforts
et d’optimiser les apports financiers. Ces parties prenantes
devraient aussi élaborer et tester des plans de contingence
pour répertorier les solutions, les défis à relever et les lacunes
à combler. Les initiatives visant à renforcer la résilience et les
capacités d’adaptation doivent prendre forme avant qu’une
catastrophe ne se produise, afin de protéger la vie et les biens
des populations pauvres et leur permettre de s’affranchir
définitivement de la pauvreté.
Au Viet Nam, les recherches ont été menées lors de graves
inondations, les plus sévères depuis dix ans. Si le niveau de
la mer montait d’un mètre dans une province située plus au
sud, cela réduirait les capacités de décharge du Mékong,
inonderait de larges bandes de terre et augmenterait peut-
être la fréquence et l’intensité des inondations en amont.
Au cours des 13 dernières années, le Guatemala a été
sévèrement touché par quatre phénomènes pluviométriques
extrêmes associés à des ouragans ou des tempêtes
tropicales : Mitch (1998), Stan (2005), Agatha (2010) et la
dépression tropicale 12-E (2011). Ceux-ci ont entraîné des
précipitations inhabituelles et causé d’importants dégâts.
Lorsque la migration sépare les ménages, non seulement ce
sont les femmes, demeurées sur place, qui doivent désormais
assumer toute la charge de travail, mais les inégalités en
matière de pouvoir décisionnel et d’accès aux ressources
telles que les intrants et la technologie vulnérabilisent celles
chargées des travaux agricoles. L’intégration de l’égalité des
genres demande que l’on étudie les impacts sur les hommes
et les femmes, les garçons et les filles en tant que groupes
sociaux distincts, afin que les mesures prises n’excluent ni
ne nuisent à aucun d’entre eux. Elle implique un dialogue
avec divers groupes sociaux pour examiner et promouvoir
la sensibilisation aux rôles masculins et féminins, aux
dynamiques de pouvoir et aux inégalités afin que ces groupes
comprennent comment ceux-ci appuient ou limitent les
capacités d’adaptation de la population. cela peut d’ailleurs
favoriser l’implication des femmes comme des hommes,
briser les barrières qui empêchent la participation équitable
Renforcer et étendre les actions de réduction des risques
de catastrophe notamment en les liant au développement
à long terme
Intégrer les considérations relatives à l’égalité des sexes
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 123
La priorité doit être donnée aux besoins des populations
les plus vulnérables, comme celles pour qui la migration
constitue une stratégie d’ajustement dommageable à long
terme ou qui sont incapables d’émigrer. Les évaluations
de vulnérabilité qui prennent en compte les dynamiques
socioéconomiques, politiques et environnementales peuvent
localiser ces populations et déterminer les causes sous-
jacentes de leur vulnérabilité. En outre, leur participation
pleine et entière à tous les stades du processus permettra
d’une part de déterminer leurs besoins et d’y remédier, et
d’autre part de valoriser les savoirs locaux ou autochtones et
de les intégrer aux stratégies d’adaptation. La participation
et le renforcement des capacités à l’échelle communautaire
peuvent améliorer le capital social au sein des collectivités,
permettre de mieux faire comprendre la nature des besoins et
Donner la priorité aux populations vulnérables et faire en
sorte qu’elles prennent part aux processus engagés
des impacts locaux et améliorer l’efficacité des programmes
gouvernementaux.
pour les populations déjà démunies et vulnérables, le
changement climatique implique un nouvel ensemble
substantiel de défis dynamiques. Fondamentalement, dans
les secteurs de la sécurité alimentaire, de l’environnement
et plus largement du développement durable, la crise
climatique exige des solutions nouvelles de la part de la
communauté internationale et des autorités nationales ou
locales tant dans les pays développés qu’en développement.
destinées aux parties prenantes à de nombreux niveaux,
les actions préconisées constituent un ensemble de mesures
qui se renforcent mutuellement. Exécutées ensembles,
elles permettront peut-être aux ménages et communautés
vulnérables d’accéder à des options de migration et
d’adaptation qui amélioreront leur résilience. Les populations
démunies font partie intégrante des solutions à long terme.
Il est nécessaire de leur procurer des moyens et des outils,
tels que des informations, des ressources et des options
de subsistance, qui tiennent compte des perturbations
pluviométriques. cependant, l’avènement de solutions
durables ne repose pas seulement sur les populations et les
communautés locales : nous devons tous collaborer en vue
de changements positifs.
Au Bangladesh, les femmes dont les maris émigrent
se chargent des travaux agricoles en plus de leurs
tâches ménagères. Les filles et les jeunes femmes sont
souvent victimes de harcèlement sexuel au sein de leur
communauté. Par crainte du rejet social que cela entraîne,
les pères qui migrent marient souvent leurs filles très tôt,
ce qui les expose à des conséquences néfastes pour la
santé et interrompt leur scolarisation.
aux processus décisionnels au sein de la communauté ou
du ménage et garantir que les membres des deux sexes
bénéficient de manière équitable des initiatives en matière
d’adaptation.
124_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
9- Annexe technique
comme le montre le cadre conceptuel (Illustration 11) qui
a servi de base au modèle de migration axé sur les agents «
Rainfalls » (mmAAR) en Tanzanie, les effets sur la migration
que provoquent les changements dans la variabilité et la
moyenne des précipitations au sein des trois communautés
reprises dans le modèle se traduisent par un changement de
statut des ménages en termes de vulnérabilité. La présente
annexe technique fournit des informations supplémentaires
sur la façon dont la pluviométrie affecte les processus des
ménages et des communautés et influence, par conséquent,
la migration des agents au sein du modèle.
En Tanzanie, le modèle de simulation a été appliqué avec
un pas de temps d’un mois, au cours duquel un générateur
d’événements appelle une série de fonctions interdépendantes.
ces dernières contrôlent le fonctionnement interne du
modèle, de façon à ce que les relations entre les éléments
puissent se résoudre numériquement sous les conditions
indiquées au temps . Les résultats de ces fonctions au
temps influencent les conditions sous lesquelles les mêmes
fonctions se produisent au temps en modifiant légèrement
les situations tant des agents que de leurs environnements
physiques et sociaux.
Le scénario des précipitations et l’impact des changements
apportés à ce scénario sur les fonctions au niveau des
ménages et des individus constituent le principal type de
9.1 modélisation axée sur les agents
changement vécu par les agents modélisés à chaque pas de
temps. cependant, les fonctions relatives à la population
qui modifient le nombre et les caractéristiques des agents
provoqueront aussi des changements tant parmi les agents
eux-mêmes (personnes individuelles et ménages) que
chez d’autres individus, au travers d’interactions sociales
modélisées. chacune de ces trois principales formes de
modification simulée (impact des précipitations, dynamique
de la population et interaction sociale) influeront donc sur
les conditions dans lesquelles un agent-ménage entreprend
d’évaluer sa vulnérabilité. Le résultat de cette évaluation
pèse alors sur la décision que prendra le ménage d’envoyer
ou de retenir les migrants potentiels. les mêmes fonctions
interdépendantes sont utilisées aumois de simulation suivant
(t+1)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 125
Impact des précipitations :
L’impact des précipitations se traduit au niveau structurel
par l’influence saisonnière qu’elles exercent sur le marché du
travail et les systèmes de production alimentaire.
Interprétation saisonnière des précipitations :
La pluviométrie mensuelle dans le district de Same en
Tanzanie est évaluée mensuellement. Elle est classée selon
les catégories suivantes : extrêmement sec, sec, moyen,
humide et extrêmement humide en utilisant des seuils définis
par quintiles. ces classements mensuels (r)* prennent une
signification saisonnière au travers de leur interprétation dans
les scénarios vuli (v), masika (m) et trimestriels (R) Selon le
mois de simulation à t , les valeurs , v, m et R représentent
le scénario de précipitations recherché.
Précipitations et marché du travail :
chaque mois, le marché du travail structurel de la région est
simulé comme une fonction (f) du scénario de précipitations
de trois mois (R). c’est pourquoi le scénario des trois derniers
mois a une influence sur le marché du travail structurel (L),
qui peut être moins opportun, moyen ou plus opportun.
étant donné la relation non-linéaire entre les précipitations
et le bon comportement du marché du travail, le fait qu’un
scénario de précipitations aboutisse ou non à une catégorie
particulière dudit marché dépend du taux de réponses des
ménages à l’enquête q412b (mois où le ménage n’a en
général pas assez d’argent pour se nourrir).
Précipitations et production alimentaire :
chaque mois, l’état général de la production alimentaire (F)
est évalué comme une fonction (x) des deux saisons des
pluies décrites plus haut : vuli (v) et masika (m). Il peut
être bas, moyen ou bon. étant donné la relation non-linéaire
entre précipitations et production alimentaire, le fait qu’un
scénario de précipitations à un temps t aboutisse ou non à
une catégorie particulière de production alimentaire dépend
du taux de réponses des ménages à l’enquête q412a
(mois où le ménage a tendance à ne pas pouvoir cultiver
suffisamment pour se nourrir).
V = (r(oct)+r(nov)+r(dec)+r(jan))/4
M = (r(feb)+r(mar)+r(apr)+r(may))/4
R = (r(t1)+r(t-1)+r(t-2))/3
L = f (R)
F = x(V, M)
Dynamiques des populations :
Les fonctions naissance, mariage et décès du modèle sont
annuelles. Les taux de naissance définis à partir des variantes
moyennes des données du rapport World population
prospects des Nations unies permettent de simuler la
naissance des agents et de les assigner de façon aléatoire à des
ménages existants. Les agents célibataires âgés de 18 ans ou
plus ont 10 pour cent de chances de se marier chaque année.
Le mariage ne représente aucun lien entre les ménages et ne
dépend pas du fait qu’il y ait ou non un(e) partenaire éligible.
dans le modèle, le décès se produit en fonction des taux de
décès définis à partir des variantes moyennes des données
du rapport World population prospects des Nations unies.
Interaction sociale :
Le modèle offre deux possibilités d’interaction entre les
agents ; compétition sur le marché du travail agricole et
communication entre migrants.
126_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
o = h(R)
w = b(o)
v = I/H+E/H
I = i(c, l, w, s)
c = j(D, F)
l = k(R, e)
Compétition sur le marché du travail agricole :
Les agents-ménages sont situés dans l’un des trois
environnements représentant les villages. Les ménages qui
se sont définis comme offrant des opportunités d’emploi à
d’autres lors de l’enquête auprès des ménages gardent la
même capacité d’emploi dans chaque simulation. de même,
ceux qui se sont définis comme offrant de la main d’œuvre
le font tout au long de la simulation. (Le même ménage
peut offrir à la fois des opportunités d’emploi et de la main
d’œuvre.)
Le taux d’opportunités d’emploi (o) offertes mensuellement
par les ménages éligibles à leur village est une fonction (h) du
scénario de précipitations (R) qui touche la région. Le travail
est ensuite divisé entre les travailleurs disponibles sur base
pseudo-compétitive (b), où le nombre de journées de travail
(w) octroyé à un individu n’est pas nécessairement celui qu’il
recevrait si celles-ci étaient également réparties entre tous.
Évaluation de la vulnérabilité du ménage :
Suite à l’impact d’un changement dans le régime des
précipitations sur le marché du travail structurel et sur les
niveaux de production alimentaire, chaque agent-ménage
entreprend une évaluation de sa vulnérabilité où le degré
de sécurité alimentaire/des moyens de subsistance qu’il
expérience à t joue un rôle. Le degré de vulnérabilité de
chaque ménage, ou note de vulnérabilité (v), dépend donc
de ses revenus (I) et de sa production alimentaire (E), ainsi
que de la taille du ménage (H).
Communication entre migrants :
dans le modèle, les agents-individus sont placés dans
un réseau social comprenant dix de leurs pairs, avec qui
ils partagent des informations sur chacune des activités
migratoires qu’ils entreprennent. Les réseaux d’agents sont
structurés comme dans le monde réel, mais à moindre échelle.
75 pour cent des connexions établies le sont avec des voisins.
Non seulement les agents partagent leurs comportements
migratoires avec leurs pairs, mais ils échangent aussi ces
informations avec tous les autres membres de leur ménage.
Revenus :
dans la simulation, les revenus du ménage sont donc une
fonction (i) du rendement des récoltes (c), du rendement
du cheptel (l), des travaux agricoles (w) et des transferts
d’argent par les migrants (s).
Seuls les ménages qui ont noté lors de l’enquête que leur
utilisation des récoltes/du cheptel contribuait à leurs revenus,
sont aptes à tirer un tel bénéfice de leurs terres/bétail. Les
revenus des récoltes sont une fonction (j) de la superficie
cultivée par un ménage (d) et du niveau de production
alimentaire structurelle (F), qui dépend lui-même de la
qualité des saisons des pluies vuli et masika.
Les revenus de l’élevage sont également affectés par le
scénario de précipitations de trois mois (R) et sont une
fonction (k) de l’appartenance ethnique (e) et du degré
d’impact (k) que selon les ménages, les changements dans
les précipitations ont eu sur le rendement du cheptel.
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 127
Les revenus des travaux agricoles (w) sont déterminés sur base de la
compétition pour ces emplois telle qu’elle est décrite plus haut. Les individus
qui appartiennent à un ménage mais sont en train de migrer à t contribuent
aussi chaque mois aux revenus du ménage en effectuant des transferts
d’argent (s). dans le format actuel du modèle, la valeur relative des
composantes du revenu et leur maximum et minimum mensuels potentiels
figurent dans le tableau 5 ci-dessous.
Tableau 5 : Valeur relative des composantes du revenu
Valeur relative : Revenu mensuel max. : Revenu mensuel min. :Équivalents des composantes :
Rendement des cultures par acre de terre (y) 6
1
0,5
0,5
0,5
0,25
0,1
0,25
1
0,5
0,25
0,125
0,125
0,125
0,063
0,025
5
1
0-0,05
0-0,05
0-0,025
0-0,025
0-0,25
0-0,0125
0-0,05
0-0,25
1
Note du cheptel (l) : 1 x vache
1 x Âne
1 x boeuf
1 x cochon
1 x chèvre
1 x poule
Travail d’une personne/jour (w)
Transferts d’argent d’un migrant (s)
128_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Production alimentaire :
pour que la sécurité des moyens de subsistance soit envisagée
sous l’angle de la sécurité alimentaire et des revenus, la
production alimentaire (E) est une fonction (q) du rendement
des cultures (c) et de celui du cheptel (l)
E = q(c, l)
P = A+0.5S
A = u(d, a, g, m)
vu cette double approche (revenus et production
alimentaire), différents types de ménage peuvent être classés
comme « vulnérables » pour différentes raisons. un ménage
à très bas revenu peut ne pas devenir vulnérable étant donné
le niveau de production alimentaire dont il a besoin pour
subsister. par contraste, un ménage ayant une production
alimentaire très faible ne sera pas vulnérable s’il bénéficie de
revenus relativement plus élevés. Les fonctions Rendement
des cultures et du cheptel pour la production alimentaire
fonctionnent de la même manière que celles qui paraissent
contribuer aux revenus mais elles dépendent du fait que les
ménages ont cité la production agricole/l’élevage comme
servant à l’alimentation du ménage et non à la vente.
Seuil de vulnérabilité :
En comparant leur note de vulnérabilité (v) à un seuil de
vulnérabilité (T), les ménages peuvent être considérés
comme vulnérables aux perturbations pluviométriques et
conscients d’un besoin imminent de rectifier leur situation.
Les ménages qui ont une note de vulnérabilité suffisante pour
les empêcher de devenir vulnérables sont considérés comme
satisfaits et aptes à poursuivre leurs stratégies d’adaptation.
Le seuil de vulnérabilité (T) est fixé à 0,04 suite à un
L’attitude d’un individu (A) envers la migration est une
fonction (u) de la catégorie foncière de son ménage (d), de
son âge (a), de son sexe (g) et de son état civil (m).
processus d’épreuve de sensibilité. En activant le modèle
tanzanien sans y inclure de processus migratoire de la part
des membres du ménage (et donc aucune contribution aux
revenus du ménage par le biais de transferts d’argent) mais
avec un classement constant au niveau « moyen » tant
pour le marché structurel du travail que pour la production
alimentaire structurelle, un seuil de vulnérabilité de T=0.04
conduit à un état d’équilibre du classement de la vulnérabilité
des ménages pendant toute la période de simulation. Toute
déviation de T=0.04 entraîne un changement graduel du
contenu et des catégories vulnérables au fil du temps.
Processus décisionnel concernant la migration :
vulnérables ou non, les ménages prennent des décisions
en matière de migration qui, même si elles passent par
l’agent-ménage, dépendent largement des attributs des
individus. que le ménage soit vulnérable ou satisfait, ses
membres individuels développent tous une propension (p)
à la migration qui est conditionnée par leur attitude envers
celle-ci (A) et leurs normes subjectives (S).
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 129
C = y (I, G, B, Q)
on déduit l’attitude d’un individu envers la migration de
l’analyse des attributs de ceux qui, dans l’enquête auprès des
ménages, sont notés comme ayant émigré. Si l’attitude d’un
individu est supérieure à 0, sa norme subjective est dérivée
du nombre de migrants actuels appartenant à la famille de
l’agent (b) et au réseau des pairs (n) en rapport avec la taille
du ménage (H) et du réseau de pairs (N).
La propension à la migration de chaque individu est
rapportée au ménage et classée de la plus forte à la plus
faible. Les ménages évaluent alors leur capacité à investir
dans la migration, leur maîtrise comportementale perçue (c),
dérivée comme une fonction (y) de leurs revenus (I), de leur
patrimoine (g), du nombre de migrants du ménage qui sont
déjà partis (b) et du coût de la migration (q).
Le coût de la migration (Q) est fixé à 1 (pour une comparaison
directe avec les sources de revenus potentielles relatives
du tableau 5 ci-dessus). par contre, le coût des formes
vulnérables de migration est fixé à 50 pour cent (0.5Q) du
coût normal de la migration (0,5).
S = — + — BH
nN
Hypothèses clés/demography:
◆ Le décès peut toucher n’importe quel agent à n’importe
quel point du temps modélisé, quel que soit son âge.
◆ Aucun nouveau ménage n’apparaît. Le mariage est une
fonction statistique et ne représente pas une union entre
deux ménages.
◆ Les agents deviennent économiquement actifs et éligibles
pour le mariage à l’âge de 18 ans.
Vulnérabilité :
◆ un acre de terre produit le même rendement, quel que soit
le lieu.
◆ Les opportunités de travail agricole dans un village seront
saisies par ceux qui vivent déjà dans ce village. on n’introduit
donc pas d’effet d’attraction pour les migrants dans les lieux
étudiés.
◆ Les revenus du ménage ne reçoivent aucun supplément
provenant d’activités non agricoles (dans ce modèle
préliminaire).
◆ Les récoltes et non le cheptel constituent la principale
source de revenus du ménage et de production alimentaire.
◆ Les terres agricoles représentent donc un flux d’actifs alors
que les animaux d’élevage représentent un stock (sauf, dans
une certaine mesure, pour la population masaï).
Les revenus excédentaires détenus à la fin d’un mois civil
produisent une augmentation marginale des biens du
ménage.
Migration :
◆ Le coût de la migration est le même pour tous les ménages,
même si les types de migration diffèrent, selon qu’elle est
satisfaite ou vulnérable.
◆ Toutes les migrations modélisées sont des migrations de
travail.
◆ Toutes les migrations sont réussies et produisent un bénéfice
standard pour le ménage.
◆ Les capacités d’un ménage à investir dans la migration et
sa volonté d’y parvenir diminuent en fonction du nombre de
migrants.
◆ La propension à la migration d’un individu est la même dans
des conditions avec impact (vulnérable) et sans (satisfaite).
130_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Les cartes (et autres graphiques sur la variabilité
pluviométrique) produites pour ce rapport ont été créées
à partir d’ensembles de données provenant de diverses
sources, et référencés ci-dessous. Lorsque l’une de ces séries
n’a servi que pour certains pays, ceux-ci sont indiqués entre
parenthèses à la fin de la citation.
ces cartes sont le fruit du travail de Tricia chai-onn et dara
mendeloff (membres de gIS) et d’Al pinto (cartographe),
sous la supervision d’Alex de Sherbinin, du centre pour un
réseau international d’information sur les sciences de la Terre
(cIESIN), qui dépend de l’Institut de la Terre de l’université
columbia. Le travail de cartographie a été entièrement
effectué à l’aide du logiciel ArcgIS v10 puis a été converti
en images dans Adobe Illustrator pour la production finale.
L’analyse des données climatiques pour les diagrammes
situés dans le coin inférieur droit de chaque carte est l’œuvre
de michael bell et john del corral, de l’Institut international
de recherche pour le climat et la société (IRI), qui fait partie,
lui aussi, de l’Institut de la Terre de l’université columbia. Ils
ont puisé dans la collection de données climatologiques de
l’IRI pour produire la série de données sur les tendances et
variations en se basant sur le maillage des différentes zones
étudiées.
9.2 cartographie et références
Azzarri, c., Wood, S., Hyman, g., barona, E., bacou, m. et
guo, Z. 2012. Sub-national poverty map for Sub-Saharan
Africa at 2005 International poverty Lines (r12.04). http://
harvestchoice.org/. (ghana, Tanzanie) [carte infranationale
de la pauvreté pour l’Afrique subsaharienne]
centre pour un réseau international d’information sur les
sciences de la Terre (cIESIN)/université columbia. 2005.
poverty mapping project: Small Area Estimates of poverty
and Inequality. palisades, Ny: NASA Socioeconomic data
and Applications center (SEdAc). http://sedac.ciesin.
columbia.edu/data/set/povmap-small-area-estimates-
poverty-inequality. (guatemala, viet Nam) [cartographie de
la pauvreté : estimations sur la pauvreté et l’inégalité]
centre pour un réseau international d’information sur les
sciences de la Terre (cIESIN). 2011. global Infant mortality
grid, 2008. palisades, Ny: cIESIN, Institut de la Terre de
l’université columbia. [cette série de données, mise à
jour en 2008, est issue de la série de données publiques
suivante : centre pour un réseau international d’information
sur les sciences de la Terre (cIESIN)/université columbia.
2005. poverty mapping project: global Subnational Infant
mortality Rates. palisades, Ny: NASA Socioeconomic data
and Applications center (SEdAc).
http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/set/povmap-global-
subnational-infant-mortality-rates.] (Bangladesh, Inde,
pérou, Thaïlande) [cartographie de la pauvreté : Taux de
mortalité infantile infranationaux]
Données sur la pauvreté
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 131
centre pour un réseau international d’information sur les
sciences de la Terre (cIESIN)/université columbia, Institut
International de Recherche sur les politiques Alimentaires
(IFpRI), banque mondiale et centre international
d’agriculture tropicale (cIAT). 2011. global Rural-urban
mapping project, version 1 (gRumpv1): urban Extents grid.
palisades, Ny: NASA Socioeconomic data and Applications
center (SEdAc). http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/
set/grump-v1-urban-extents. [cartographie mondial rurale-
urbaine]
New, m., Lister, d., Hulme, m. et makin, I. 2002: A high-
resolution data set of surface climate over global land areas.
climate Research 21:1-25. données disponibles sur http://
www.cru.uea.ac.uk/cru/data/hrg/tmc/. [Série de données
haute résolution sur le climat des zones terrestres]
Fischer, g., Nachtergaele, F., prieler, S., van velthuizen,
H.T., verelst, L. et Wiberg, d. 2008. global Agro-ecological
Zones Assessment for Agriculture (gAEZ 2008). Laxenburg,
Autriche et Rome, Italie : IIASA et FAo. [évaluation des
zones agro-écologiques pour l’agriculture]
variabilité pluviométrique/fréquence des sécheresses (carton
en médaillon)
Ce carton représente le coefficient de variation des
précipitations multiplié par l’indice de précipitations
standardisé (SpI) sur six mois. Le SpI représente le nombre
d’écarts-type de la valeur observée par rapport à la
moyenne à long terme pour une variable normalement
distribuée de façon aléatoire. comme les précipitations
ne sont pas normalement distribuées, on procède d’abord
à un ajustement pour transformer les valeurs ajustées des
deLorme publishing company, Inc., 2010, Roads.sdc: un
sous-ensemble de deLorme World base map (dWbm).
2010, deLorme publishing company, Inc., yarmouth, maine,
états-unis.
Lehner, b., Reidy Liermann, c., Revenga, c., vörösmarty, c.,
Fekete, b., crouzet, p., doll, p., Endejan, m., Frenken, K.,
magome, j., Nilsson, c., Robertson, j.c., Rodel, R., Sindorf,
N., Wisser, d. 2011. global Reservoir and dam database,
version 1 (gRandv1): Reservoirs, Revision 01. données
fournies par le NASA Socioeconomic data and Applications
center (SEdAc). http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/
collection/grand-v1. [base de données mondiale sur les
barrages et réservoirs]
National geographic basemap. 2012. National geographic,
ESRI, deLorme, NAvTEq, pNuE-Wcmc, uSgS, NASA,
ESA, mETI, NRcAN, gEbco, NoAA, Ipc.
Zones urbaines
Précipitations moyennes (carton en médaillon)
Terres agricoles (carton en médaillon)
Variabilité pluviométrique/fréquence des sécheresses
(carton en médaillon)
Fond cartographique
ocean basemap. 2012. gEbco, NoAA, cHS, oSu, uNH,
cSumb, National geographic, deLorme, NAvTEq, et ESRI.
132_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
Toutes les données proviennent de l’informathèque
de l’IRI. on trouvera ci-dessous les séries utilisées. Le
document complet sur les sources originales des données
est téléchargeable sur le lien « dataset documentation »
disponible pour chacune des uRL reprises ci-dessous.
Il est à noter que ces sources originales représentent des
données mondiales de réanalyse maillées et basées sur les
données des stations météorologiques disponibles (pour
CPC Unified) et sur des données satellitaires et des modèles
numériques (pour cmAp et Aphrodite), la couverture des
données observées étant souvent peu fournie. Cela signifie
que les résultats de l’analyse de la variabilité et des tendances
pluviométriques seront différents de ceux obtenus par les
stations météorologiques locales et repris dans les rapports
des études nationales.
National oceanographic and Atmospheric Administration
(NoAA), centres nationaux pour la prévision
environnementale (NcEp), centre de prévisions
Précipitations pendant la saison des pluies : déviation par
rapport à la moyenne (graphique)
climatologiques (CPC) : CPC Unified Precipitation gauge
based global data set, v1p0. [Analyse des précipitations
mondiales]
ces données sont produites à une résolution de 0,5° lat/
lon. à télécharger sur : http://iridl.ldeo.columbia.edu/
SouRcES/.NoAA/.NcEp/.cpc/.uNIFIEd_pRcp/.gAugE_
bASEd/.gLobAL/.v1p0/. (pérou uniquement)
National oceanographic and Atmospheric Administration
(NoAA), centres nationaux pour la prévision environnementale
(NcEp), centre de prévisions climatologiques (cpc) : cpc
merged Analysis of precipitation (cmAp): Analyses of global
precipitation using gauge observations, satellite estimates,
and numerical model predictions. [Analyse des précipitations
mondiales]
ces données sont produites à une résolution de 2,5° lat./
lon. et téléchargeables sur http://iridl.ldeo.columbia.edu/
SouRcES/.NoAA/.NcEp/.cpc/.merged_Analysis/.
monthly/. (ghana, guatemala, Tanzanie)
Research Institute for Humanity and Nature (RIHN), Institut
de recherche météorologique de l’Agence japonaise de
météorologie : RIHN aphrodite Asian precipitation from
ApHRodITE v1003R1.
ces données sont produites à une résolution de 0.5° lat./
lon. et téléchargeables sur http://iridl.ldeo.columbia.edu/
SouRcES/.RIHN/.aphrodite/.v1003R1/. (bangladesh, Inde,
Thaïlande et viet Nam)
précipitations en une distribution statistique normale. Les
données proviennent du site suivant :
pNuE (programme des Nations unies pour l’environnement).
2010. Global Risk Data Platform: Drought Coefficient of
variation. disponible à l’adresse suivante : http://preview.
grid.unep.ch/?preview=home&lang=fr (consulté en juillet
2010)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 133
134_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
10- Notes1 La sécurité alimentaire peut être définie comme une «
situation […] où toutes les personnes, en tout temps, ont
économiquement, socialement et physiquement accès à une
alimentation suffisante, sûre et nutritive qui satisfait leurs
besoins nutritionnels et leurs préférences alimentaires pour
leur permettre de mener une vie active et saine ». FAo,
L'état de l’insécurité alimentaire dans le monde 2001, Rome
: FAo, 2002.2 Tubiello, F. N., et g. Fischer. 2007. Reducing climate
change impacts on agriculture: global and regional effects of
mitigation, 2000-2080. Technological Forecasting and Social
change 74 : 1030-563 jennings, S. and j. magrath. What happened to the
seasons? Article présenté à la conférence sur la saisonnalité,
Future Agricultures consortium International. IdS Sussex,
Royaume-uni, juillet 2009.4 changement environnemental et scénarios de migrations
forcées (EACH-FOR), projet de recherche financé par la
commission européenne dans le 6e programme-cadre (Fp6),
(2007-2009), (contrat n° : 044468) disponible à l’adresse
suivante : http://www.each-for.eu/5 gIEc, 2012 : gestion des risques de catastrophes et de
phénomènes extrêmes pour les besoins de l’adaptation au
changement climatique. Rapport des groupes de travail I
et II du gIEc. [Field, c.b., v. barros, T.F. Stocker, d. qin,
d.j. dokken, K.L. Ebi, m.d. mastrandrea, K.j. mach, g.-
K. Plattner, S.K. Allen, M. Tignor, et P.M. Midgley (eds.)].
version anglaise : cambridge university press, cambridge,
Royaume-uni, et New york, Ny, états-unis, 582 p. Résumé
en français à l’intention des décideurs : https://docs.google.
com/file/d/0B1gFp6Ioo3akZWloNDdVZGkzeDg/edit?pli=1
6 3.5° c : d’après le climate Action Tracker http://
climateactiontracker.org/news/116/durban-Agreements-
a-step-towards-a-global-agreement-but-risk-of-exceeding-
3c-warming-remains-scientists.html ; 6° c d’après l’AIE.7 El-Hinnawy, E. (1985) a proposé la première définition de
« migrants climatiques » dans un rapport du programme
des Nations unies pour l’environnement (pNuE). d’autres
auteurs et institutions, comme l’organisation internationale
pour les migrations (OIM), ont affiné et complété sa
définition en 2007.8 Le document suivant tente de chiffrer la migration
environnementale actuelle et future : myers, N. (2005)
Environmental Refugees: An Emergent Security Issue. 13e
Forum économique, prague, 23-27 mai. christian Aid (2007)
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: Estimations et tendances mondiales. organisation
internationale pour les migrations, genève, http://www.iom.
int/cms/jahia/jahia/global-estimates-and-trends/lang/fr9 jäger et al. (2009) ont synthétisé les résultats du projet «
changement environnemental et scénarios de migrations
forcées (EAcH-FoR) » (EAcH-FoR, www.each-for.eu),
première enquête mondiale de ce genre, qui s’appuie
sur un travail de terrain pour explorer les changements
environnementaux et la migration dans 23 études de cas.
Warner et al. (2009) (« In Search of Shelter ») ont fait
connaître les résultats d’EAcH-FoR aux décideurs politiques,
en particulier dans le cadre du processus ccNucc.10 Hugo (2008) migration, development and environment.
genève, organisation internationale pour les migrations
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 135
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apgeog.2011.10.002. mcAdam et Saul (2010) An Insecure
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4. bronen (2011) Forced migration of Alaskan Indigenous
Communities due to Climate Change, in Afifi et Jäger (eds.)
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87-98, Springer, Heidelberg. cohen (2008) Listening to the
voices of the displaced: Lessons Learned. brookings-bern
project on Internal displacement. Ferris et Ferro-Ribeiro
(2012). protecting people in cities: the disturbing case of
Haiti. disasters (overseas development Institute et blackwell
publishing). cNucEd. 2011. Assuring food security in
developing countries under the challenges of climate
change: Key trade and development issues of a fundamental
transformation of agriculture. document d’analyse n° 201.
Février 2011.14 voir aussi : de Sherbinin et al. (2011) Shifts in rainfall
patterns and shorelines will contribute to mass migrations on
a scale never before seen. Scientific American, janvier 2011.
Hummel et al. (2012) climate change, Environment and
migration in the Sahel. Selected Issues with a Focus on
Senegal and mali. document de travail n°1. Francfort-sur-
le-main. Renaud, F. dun, o., Warner, K. bogardi, j. (2011) A
decision framework for environmentally induced migration.
International migration, vol. 49, No. S1, p. e5-e29. Foresight
(2011). migration and global Environmental change: Final
Project Report. Londres : Government Office for Science.15 on trouvera une description des méthodes de terrain et des
instruments de recherche « Rainfalls » dans : Rademacher-
Schulz, C., Afifi. T. Warner, K., Roseneld, T., Milan, A., Etzold,
b., Sakdapolrak, p. (2012). Rainfall variability, food security
and human mobility: An approach for generating empirical
evidence. InterSecTions n° 10. bonn : uNu-EHS.16 Les méthodes de recherche « Rainfalls » se sont inspirées
d’approches novatrices dans des études comme : groenewold
et bilsborrow (2008) design of samples for international
migration surveys: methodological considerations and
lessons learned from a multi-country study in Africa and
Europe. I: bonifazi et al. (2008): migration in Europe.
ImIScoE. Amsterdam university press. Kniveton et al. (2008)
predictive modeling. Forced migration Review, Special Issue:
climate change and displacement, 31, oxford. de Haas
(2010) The Internal dynamics of migration processes: A
Theoretical Inquiry. journal of Ethnic and migration Studies
36(10): 1587 – 1617. piguet (2010) Linking climate change,
environmental degradation, and migration: a methodological
overview. climate change (Wiley Interdisciplinary Reviews)
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 137
1, issue 4, 517-524. piguet et al. (2011) migration and
climate change. cambridge university press. cambridge.
Pour une réflexion sur la migration en tant que stratégie de
gestion des risques : Stark et Zakharenko (2012a) differential
migration prospects, Skill Formation, and Welfare. Review of
International Economics, vol. 20. Stark et janubek (2012b).
Migration networks as a response to financial constraints:
onset and endogenous dynamics. journal of development
Economics, 2012.17 pour une documentation complète sur les instruments
de recherche, voir le protocole de recherche « Rainfalls »
(Rademacher et al. (2012))18 ce qui distingue un échantillon aléatoire d’un échantillon
aléatoire stratifié, c’est que le deuxième permet d’inclure des
sous-populations clés.19 pour classer les pays de recherche, il faut avant tout
leur attribuer une place en termes de développement
socioéconomique. À cette fin, et conformément au fait
que le projet s’intéressait tout particulièrement à la sécurité
alimentaire, on a eu recours à trois indicateurs largement
diffusés : (1) produit national brut par habitant (Source :
Rapport sur le développement dans le monde 2012 : égalité
des genres et développement, 2011, banque internationale
pour la reconstruction et le développement/banque
mondiale, Washington, dc ; (2) Indice du développement
humain (Source : Rapport sur le développement humain
2011, durabilité et équité : un meilleur avenir pour tous, ©
2011, programme des Nations unies pour le développement)
; et (3) pourcentage des enfants de moins de cinq ans
souffrant d’un retard de croissance modéré à aigu (Source : La
situation des enfants dans le monde 2012 : les enfants dans
un monde urbain, Fonds des Nations unies pour l’enfance
(uNIcEF), février 2012.) Les catégories étaient les suivantes :
élevé, moyen ou bas, le seuil se situant aux points suivants :
revenu annuel par habitant (bas = moins de 1 000 dollars uS,
moyen = > 1 000 dollars uS et < 3 000 dollars uS, élevé =
> 3 000 dollars uS) ; indice du développement humain (bas,
moyen, élevé et très élevé en suivant la définition du PNUD)
et nutrition (retard de croissance modéré et aigu de > 40 % =
bas, > 20 % < 40 % = modéré, et < 20 % = élevé).20 Les huit pays sélectionnés ont aussi été classés selon un
certain nombre d’indicateurs qui permettent de se faire
une idée des changements survenus aux plans économique
et démographique. Les trois variables suivantes ont été
sélectionnées en raison de leur pertinence pour les recherches
du projet « Rainfalls » : (1) croissance annuelle moyenne
du pIb, 2007-2011 (Source : Rapport sur le développement
dans le monde 2012, banque mondiale) ; (2) contribution de
l’agriculture au pIb (Source : Rapport sur le développement
dans le monde, banque mondiale) et (3) Taux annuel de
croissance de la population, 2011 (Source : Rapport sur
le développement dans le monde, banque mondiale).
pour chacune de ces variables, les pays ont été classés en
utilisant les seuils suivants : croissance économique (élevée =
croissance annuelle de > 6 %, faible = croissance annuelle de
< 4 %) ; perspectives d’emploi non agricole (élevées = < 20
% de la valeur ajoutée en agriculture, faibles = > 20 % de la
valeur ajoutée en agriculture) ; et progrès dans la gestion de
la croissance de la population (élevé = croissance annuelle de
< 1 %, modéré = croissance annuelle de > 1 % <20%, faible
= croissance annuelle de > 2 %).21 Les informations reprises dans cette section sont tirées
de : promburom, panomsak ; Sakdapolrak, patrick (2012).
projet « Là où tombe la pluie ». étude de cas : Thaïlande.
Résultats de la province de Lamphun, Thaïlande. Rapport
n° 7. bonn : Institut de l’université des Nations unies pour
138_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
l’environnement et la sécurité humaine (uNu-EHS).22 piguet et al. (2011) migration and climate change.
cambridge university press. cambridge.23 pNud 2010 : Human security today and tomorrow. Thai
human development report 2009. bangkok : programmes
des Nations unies pour le développement.24 Les informations reprises dans cette section sont tirées
de : Ho, Raúl ; milan, Andrea (2012). projet « Là où tombe
la pluie ». étude de cas : pérou. Résultats de la province
de Huancayo, pérou. Rapport n° 5. bonn : Institut de
l’université des Nations unies pour l’environnement et la
sécurité humaine (uNu-EHS).25 mINAm (peruvian ministry of Environment). Segunda
Comunicación Nacional del Perú a la Convencion Marco de
las Naciones Unidas sobre Cambio Climático. Lima, peru :
mINAm, 2010.26 Les informations reprises dans cette section sont tirées de
: Khoa, Nguyen viet ; Thao, Nguyen cong ; van der geest,
Kees (2012). projet « Là où tombe la pluie ». étude de cas
: viet Nam. Résultats de la commune de Hung Thanh dans
le delta du mékong, viet Nam. Rapport n° 8. bonn : Institut
de l’université des Nations unies pour l’environnement et la
sécurité humaine (uNu-EHS).27 Les informations reprises dans cette section sont tirées de
: Murali, J. ; Afifi, T. (2012). Projet « Là où tombe la pluie ».
étude de cas : Inde. Résultats de janjgir-champa, Inde.
Rapport n° 4. bonn : Institut de l’université des Nations unies
pour l’environnement et la sécurité humaine (uNu-EHS).28 Les informations reprises dans cette section sont tirées de :
Ahsan, uddin Ahmed ; Hassan, Selim Reza ; Etzold, benjamin
; Neelormi, Sharmind (2012). projet « Là où tombe la pluie ».
étude de cas : bangladesh. Résultats du district de Kurigram,
bangladesh. Rapport n° 2. bonn : Institut de l’université des
Nations unies pour l’environnement et la sécurité humaine
(uNu-EHS).29 Les informations reprises dans cette section sont tirées de
: Rademacher-Schulz, christina, et Edward Salifu mahama
(2012). projet « Là où tombe la pluie ». étude de cas : ghana.
Résultats du district de Nadowli, Haut ghana occidental,
ghana. Rapport n° 3. bonn : Institut de l’université des
Nations unies pour l’environnement et la sécurité humaine
(uNu-EHS).30 dans le présent ouvrage, la migration saisonnière est
définie comme un déplacement de moins de six mois, alors
que la migration temporaire dure six mois à deux ans. Tout
déplacement de plus de deux ans est considéré comme une
migration permanente.31 Laux 2009. Statistical modeling of precipitation for
agricultural planning in West Africa, mitteilungen/Institut für
Wasserbau, université de Stuttgart, Heft 179, ISSN 0343-
1150, 198 pages.32 Les migrants ne se déplaçant ni pour le « travail » ni pour
« l’éducation » ont donné comme raisons de leur migration
le « mariage » (5 %) et « autres » (2 %).33 Les informations reprises dans cette section sont tirées de
recherches de terrain effectuées par Sergio Rolando Ruano
et Andrea milan dans le district de cabricán, au guatemala.34 mS (1999) « El Niño and Health°». équipe spéciale sur le
changement climatique et la santé. genève, Suisse. ; SNET
(2010) « El Niño y la oscilaciòn del Sur°». ministerio de
medio Ambiente y Recursos Naturales –mARN-. El Salvador.
voir aussi: omS (2000), « El Niño et ses répercussions sur la
santé », Aide-mémoire n° 192, https://apps.who.int/inf-fs/
fr/am192.html35 pedreros et al (2010) « The Effect of El Niño on Agricultural
Water balances in guatemala°», American geophysical
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 139
union, Réunion convoquée à l’automne 2010.36 Les informations reprises dans cette section sont tirées de :
Liwenga, Emma T. ; Kwezi, Lukas ; Afifi, Tamer (2012). Projet
« Là où tombe la pluie ». étude de cas : Tanzanie. Résultats
du district de Same, Tanzanie. Rapport n° 6. bonn : Institut
de l’université des Nations unies pour l’environnement et la
sécurité humaine (uNu-EHS).37 ILes répondants à l’enquête auprès des ménages ne
donnaient pas toujours une réponse précise. dans de tels cas,
l’enquêteur ne réitérait pas la question. Il arrivait aussi que les
personnes interrogées donnent deux réponses là où il n’en
fallait qu’une. c’est pourquoi, dans des cas exceptionnels,
il arrive qu’en additionnant les pourcentages de ce tableau
(surtout pour la Thaïlande, le pérou et l’Inde), on arrive à
une somme totale légèrement supérieure ou légèrement
inférieure à 100 pour cent.38 paavola, j. 2003 vulnerability to climate change in
Tanzania: Sources, Substance and Solutions. Article présenté
lors de l’atelier inaugural de l’initiative sur la vulnérabilité en
Afrique australe (SAvI), maputo, mozambique, 19-21 juin
2003. 39 Agrawala, S., moehner, A., Hemp, A., van Aalst, m.,
Hitz, S., Smith, j., meena, H., mwakifwamba, S.m., Hyera,
T. et mwaipopo, o.u., (2003), development and climate
change in Tanzania: Focus on Kilimanjaro, organisation
de coopération et de développement économiques, paris :
France.40 gIEc, 201 : gestion des risques de catastrophes et de
phénomènes extrêmes pour les besoins de l’adaptation au
changement climatique. Rapport des groupes de travail I et
II du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution
du climat [Field, c.b., v. barros, T.F. Stocker, d. qin, d.j.
dokken, K.L. Ebi, m.d. mastrandrea, K.j. mach, g.-K.
Plattner, S.K. Allen, M. Tignor, et P.M. Midgley (eds.)].
cambridge university press, cambridge, Royaume-uni, et
New york, Ny, états-unis, 582 p. Résumé à l’intention des
décideurs : © 2012, groupe d’experts intergouvernemental
sur l’évolution du climat, https://www.ipcc-wg1.unibe.ch/
srex/downloads/SREx_Spm_French.pdf41 3,5°c d’après le climate Action Tracker http://
climateactiontracker.org/news/116/durban-Agreements-
a-step-towards-a-global-agreement-but-risk-of-exceeding-
3c-warming-remains-scientists.html ; 6 °c d’après l’AIE.42 voir par exemple Arnell, N. « beyond 4° c: Impacts across
the global scale°». Institut Walker pour la recherche sur le
système climatique. université de Reading et équipe du
projet quEST-gSI, 2009. Article présenté à la conférence
internationale « 4° c and beyond°», oxford, septembre
2009.43 Le cadre d’adaptation de cancún comprend des dispositions
sur un ensemble d’approches en matière de gestion des
risques (paragraphe 14), ainsi que des conseils sur une série
de questions de mobilité humaine liées aux changements
climatiques (paragraphe 14(f)). La sécurité alimentaire et des
moyens de subsistance est mentionnée dans les notes en bas
de page.44 Initiative Nansen : communiqué de presse de
l ’ o N u : h t t p : / / w w w. u n . o r g / a p p s / n e w s / s t o r y
asp?NewsId=42298&cr=refugee&cr1=climate.
Liens vers le site de la conférence Nansen 2011 : http://
www.nansenconference.no/ et le rapport de la conférence :
http://www.unhcr.org/4ea969729.pdf45 1/cp.16, paragraphes 11-35 ; le paragraphe 14(f) aborde
la migration dans le contexte de l’adaptation aux impacts du
changement climatique.
140_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
À propos du projet Where The Rain FallsLe projet de recherche « Where The Rain Falls : changement
climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance
et migration » est un partenariat entre cARE International
et l’Institut pour l’Environnement et la Sécurité Humaine de
l’Université des Nations Unies (UNU-EHS). Il bénéficie de
l’appui financier du Fonds pour la recherche du Groupe AXA
et de la Fondation john d. et catherine T. macArthur. Son
ambition est de permettre aux universitaires, praticiens et
décideurs de mieux comprendre comment la variabilité des
précipitations affecte la sécurité alimentaire et des moyens de
Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrationJuin 2013 _ 141
subsistance et pèse sur les décisions des ménages en matière de
mobilité/migration au sein des populations particulièrement
exposées aux impacts du changement climatique. L’étude
se focalise sur les variations pluviométriques tant perçues
que mesurées (p. ex. longues périodes sèches ou humides,
sécheresses ou inondations, précipitations erratiques) et le
décalage des saisons. Les variations pluviométriques influent
sur le rendement des cultures et l’élevage du cheptel, ce
qui peut avoir une incidence sur la production alimentaire
locale, la disponibilité alimentaire et les prix et provoquer
une insécurité et des pénuries alimentaires. En général, les
habitants adoptent diverses stratégies pour surmonter le
stress et les variabilités associés à la sécurité alimentaire et des
moyens de subsistance. Nous avons essayé de comprendre
pourquoi certaines populations réagissent de façon
différente aux difficultés que causent l’instabilité des régimes
climatiques et l’insécurité alimentaire. Nous avons cherché à
savoir dans quelle mesure les modifications météorologiques
pèsent sur les décisions en matière de migration, laquelle
est l’un des mécanismes auxquels ont fréquemment recours
ceux qui éprouvent ce type de pénibilité.
Le projet s’est fixé trois objectifs :
1) comprendre les interactions actuelles entre variabilité
pluviométrique, sécurité alimentaire et des moyens de
subsistance et migrations ;
2) comprendre les interactions potentielles de ces facteurs au
cours des décennies à venir, lorsque l’impact des changements
climatiques commencera à se faire plus fortement sentir ;
3) collaborer avec les communautés pour identifier des
moyens de gérer la variabilité pluviométrique, la sécurité
alimentaire et des moyens de subsistance et la migration.
Le projet explore les trois questions suivantes (qui ont un
rapport direct avec les trois objectifs de recherche cités ci-
dessus) :
1) dans quelles circonstances les ménages envisagent-ils la
migration comme stratégie de gestion des risques en réponse
à une variabilité pluviométrique accrue et à l’insécurité
alimentaire ?
2) quels sont les scénarios où la variabilité pluviométrique
et la sécurité alimentaire seront susceptibles d’influencer
fortement la mobilité humaine dans certaines régions du
monde au cours des 20 ou 30 années à venir ?
3) dans le contexte du changement climatique, quel
ensemble de politiques garantira au mieux le caractère
volontaire de la mobilité humaine, c’est-à-dire son choix
parmi d’autres mesures de gestion des risques liés aux
changements climatiques, plutôt que de la perpétuer comme
une stratégie de survie, adoptée après épuisement de toutes
les autres possibilités ? Le projet explore ces alternatives dans
certaines régions du monde particulièrement affectées.
vous pouvez consulter les études de cas, la modélisation et
obtenir des renseignements supplémentaires sur nos sites
web : www.wheretherainfalls.org, www.ehs.unu.edu, www.
carefrance.org et www.careclimatechange.org .
142_ Juin 2013Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration
uN campus, Hermann-Ehlers-Str. 10, 53113 bonn,
Tel.: + 49-228-815-0200, Fax : + 49-228-815-0299
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Les opinions exprimées dans le présent rapport sont celles
de leurs auteurs et ne représentent pas nécessairement celles
de l’université des Nations unies, de cARE International, de
l’université columbia ou du projet « Where the Rain Falls
» (Where The Rain Falls). questions et commentaires sont
les bienvenus. prière de les adresser aux auteurs principaux
par l’intermédiaire de Koko Warner ([email protected].
edu) ou Kevin Henry ([email protected]). Les requêtes
des médias sont à adresser à Kimberly bennett (bennett@
carefrance.org).
L’université des Nations unies et cARE donnent permission
à toutes les organisations à but non lucratif de reproduire le
présent ouvrage, en tout ou en partie, à condition de citer
Imprintleur source. La notice suivante figurera de façon visible sur
toute reproduction : « Where The Rain Falls : changement
climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance
et migration » © 2012 cARE France. Reproduction autorisée.
Le rapport et des images haute résolution sont disponibles à
l’adresse suivante : www.wheretherainfalls.com
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e-ISbN : 978-3-944535-05-0
Impression respectueuse de l’environnement
Warner, K., Afifi, T., Henry, K., Rawe, T., Smith, C., de
Sherbinin, A. (2012). Where The Rain Falls : changement
climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance
et migration. Analyse et conclusion de la phase de recherche
du projet « Where the Rain Falls ». bonn : uNu et cARE
Le projet « Where the Rain Falls » (Là où Tombe La pluie) évalue l’impact des
variations de la pluviosité sur les sociétés, grâce à une compréhension plus détaillée
des liens entre variation pluviométrique, sécurité alimentaire, moyens de subsistance
et migration dans huit pays d’étude :
Bangladesh : Kurigram, division de Rangpur
Ghana : district de Nadowli, région du Haut Ghana Occidental
Guatemala : municipalité de Cabricán, département de Quetzaltenango
Inde : district de anjgir-Champa, Etat de Chhattisgarh
Pérou : district de Huancayo, région de Junín
Tanzanie : district de Same, région du Kilimanjaro
Thaïlande : district de Thung Hua Chang, nord de la Thailande
Viet Nam : province de Dong Thap
Le changement climatique entraîne déjà des évènements climatiques extrèmes,
comme des sécheresses et des innondations, donnant lieu à des situations
d’insécurité alimentaire et déplacements de populations. Les résultats de cette étude
permettront de guider les politiques en termes de changement climatique et leur
mise en œuvre, en prenant en compte des aspects pratiques importants, et ainsi,
lutter contre la pauvreté en protégeant les populations les plus vulnérables.
L’ensemble des résultats et des enseignements tirés du projet – un protocole
de recherche, un rapport d’étude de cas ainsi qu’un rapport de synthèse à
destination des responsables politiques – sont disponibles à l’adresse suivante :
www.wheretherainfalls.org.
Soutenu par :un projet de :
copyright © cARE France et uNu-EHS.
juin 2013