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DEPT DE MEDECINE GENERALE / UNIVERSITE PARIS DIDEROT

TRACE D’APPRENTISSAGE

Le présent modèle doit être utilisé pour UNE TRACE D’APPRENTISSAGE AU FORMAT WORD. Les données du formulaire ci-dessous doivent être remplies, puis la trace sera collée à la suite du formulaire

Nom et prénom de l’étudiant auteur de la présente trace : MULTON, Romain

Nom et prénom du tuteur :MAZARS, Thierry

Numéro du semestre du DES au cours duquel cette trace a été produite :S4

Date de réalisation de la trace:04/08/11

Le maître de stage du stage concerné par cette trace a-t-il évalué cette trace ? : Non

COMPETENCES VISEES PAR CETTE TRACE (effacer les compétences sans rapport avec ce document)

Compétence numéro 3. : Prendre une décision adaptée en situation d'urgence (potentielle/vraie)Competence numero 7:Prendre des décisions fondées sur les données actuelles de la science, adaptées aux besoins et au contexte

Si votre tuteur estime que cette trace mérite d’être publiée sur le site en tant que trace remarquable, acceptez vous qu’elle le soit ( Ne laissez que la réponse adaptée) :

Oui

Insérez à partir de la page suivante le texte de la trace d’apprentissageAttention, avant le transfert de la trace, son titre dans votre ordinateur doit être formaté comme suit :date(AAJJMM)_sujet, par exemple 100512_polytoxicomane_prise_en_charge_reseau . Aucune apostrophe, aucun guillemet dans le titre!

ATTENTION SI VOTRE TRACE EST UN RECIT, IL DOIT ETRE TOTALEMENT ANONYMISE: RIEN NE DOIT Y PERMETTRE D’IDENTIFIER UN PATIENT, NI VOTRE MAITRE DE STAGE, NI AUCUN PROFESSIONNEL

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Le ressenti d’un interne face à l’erreur médicale

Interne en cardiologie, j’ai eu à assurer la prise en charge initiale d’une patiente, Mme @@@ arrivée dans mon service un jeudi vers 17h00.

La patiente était une jeune femme de 38 ans, 2 enfants, sans antécédents particuliers, fumeuse, qui souffrait de céphalées depuis 15 jours. Elle avait consulté une première fois aux urgences dix jours auparavant, l’urgentiste avait conclu cliniquement à une crise migraineuse dans un contexte d’hypertension non connue auparavant et l’avait laissée repartir avec un traitement symptomatique. La patiente avait alors consulté son médecin traitant à 2 reprises. Ce dernier a introduit un double traitement antihypertenseur, pour corriger cette hypertension de novo. La patiente s’était représentée ce jour aux urgences avec un tableau associant céphalées pulsatiles bitemporales irradiant dans la nuque, tension artérielle à 170/100 au bras droit et 145/90 au bras gauche, diarrhées depuis 3 jours, vomissements la veille mais pas ce jour. Devant l’asymétrie tensionnelle, les urgentistes lui font faire un angioTDM thoraco abdomino pelvien à la recherche d’une dissection de l’aorte ou des artères sous-clavières. Cette hypothèse ayant été infirmée par l’examen, l’urgentiste estime avoir éliminé la pathologie présentant le plus de risque pour la patiente en termes de probabilité diagnostic et par son pronostic. L’urgentiste (Dr ROSS les noms sont fictifs ) fait alors appel au cardiologue, le Dr DEGARDE pour un avis concernant cette hypertension avec asymétrie tensionnelle résistant à un double traitement antihypertenseur. Le cardiologue de garde fait alors hospitaliser la patiente dans mon service pour prise en charge et recherche d’hypertension artérielle secondaire.

Lorsque j’examine la patiente, je suis frappé par ses plaintes concernant ses céphalées. Elle ne semble pas soulagée malgré les antalgique et le loxen IV. Mon interrogatoire révèle que la patiente est douloureuse depuis une séance de gymnastiques 15 jours auparavant. J’évoque alors une dissection carotidienne. Je réalise un examen clinique neurologique minutieux qui ne révèle absolument rien. Pas de signes de localisation, pupilles symétriques, pas de souffles carotidiens, nuque souple, pas de Babinski, pas de photo/phonophobie aucun trouble de la conscience ni de la vigilance. Par ailleurs, la patiente présente une fébricule à 38,4°C qui n’existait pas aux urgences. Mais mon interrogatoire confirme bien des diarrhées et vomissements la veille qui entreraient facilement dans un tableau de gastro entérite. L’idée d’un diagnostic de thrombophlébite cérébrale me passe par la tête mais la pathologie est rare, il n’y a pas de contexte évocateur en dehors du tabagisme et les BHCG sont négatifs.

Ayant bien étudié la prise en charge des céphalées aux urgences (cf la présentation « céphalées aux urgences » que j’ai réalisé en staff aux urgences d’Aulnay-sous-bois le semestre précèdent), je me sens alors frustré de ne pas avoir de scanner cérébral que

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j’aurais trouvé justifié chez cette patiente qui s’est présentée deux fois aux urgences en 15 jours pour des céphalées alors qu’elle n’est pas migraineuse connue.

Mais je décide de surseoir à l’examen pour trois raisons.

La première est que la patiente a déjà reçu une injection d’iode importante ce jour.

La deuxième est que l’état clinique de la patiente me semble stable, pas d’aggravation récente, hémodynamique stable et que par conséquent il n’y a pas d’urgence à réaliser un examen diagnostic, sachant qu’elle sera réévaluée dans environ 16 heures.

La troisième est que je crains la réaction de l’urgentiste (Dr ROSS) qui a estimé la patiente stable et passable en salle ainsi que celle de mon chef (Dr DEGARDE) qui l’a examinée une heure auparavant et l’a acceptée dans le service, sachant que si je lui fait réaliser un TDM en urgence, la patiente devra retourner dans le bloc d’urgence, mon seul élément clinique nouveau étant un fébricule sans aucun élément clinique de suspicion d’une méningite.

Enfin, et il s’agit en fait d’une quatrième raison qui m’a fait surseoir à l’examen, je dois admettre que le contact avec la patiente m’a semblé particulier, avec, il me semblait une exagération de la symptomatologie, un peu de théâtralisme. Bref, j’ai eu l’impression qu’elle était en cardio pour une gastro entérite carabinée parce qu’on avait cette histoire d’asymétrie tensionnelle qui ne rentrait dans aucune case syndromique dans ce contexte.

Le vendredi, c’est mon chef (Dr JEUNSENIOR) qui passe voir la patiente, il n’est pas convaincu sur la nécessité de développer les examens complémentaires, il conclut sur le dossier à une probable GEA, sachant que dès le lendemain la patiente est apyrétique sans antipyrétique. Il programme des examens en externe pour rechercher une HTA secondaire. La patiente se plaignant toujours de céphalées, mais nettement diminuées par la correction de la Tension artérielle sous Loxen, reste hospitalisée le weekend.

Le lundi matin, un autre senior (Dr VIEUCARDIO) qui s’occupe en alternance de la salle, examine la patiente et la fait sortir du service sous monothérapie anti hypertensive. Je suis tenu au courant par lui de sa décision et je n’émets pas d’objection.

7 jours plus tard, je recherche le dossier de la patiente pour rédiger son compte rendu d’hospitalisation, quand la cadre du service m’appelle pour me passer une communication téléphonique. C’est l’urgentiste (Dr ROSS) qui avait accueilli Mme @@@, qui m’appelle pour m’informer de son décès 3 jours auparavant.

Le choc est rude.

L’urgentiste m’explique que le SAMU a été appelé 4 jours après sa sortie de mon service au domicile de Mme @@@ pour un état de somnolence. Lorsque l’équipe est arrivée la patiente était en ACR (Arrêt cardio respiratoire). Elle n’a pas pu être réanimée.

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Le Dr ROSS n’avait aucune autre information à me communiquer à ce stade. Il exprima au téléphone tout d’abord un ton inquisiteur du type « On vous a confié une patiente, qu’est-ce que vous en avez fait ? » Je lui ai dit ce qui avait été constaté pendant son séjour dans le service ainsi que ce qui avait été fait. Il exprime alors des regrets de ne pas lui avoir fait de TDM cérébrale à son arrivée, arguant le fait que le radiologue lui aurait demandé de choisir entre l’angioscan thoraco-abdo-pelvien et cérébrale.

J’informe alors mon chef (Dr JEUNSENIOR) qui avait vu la patiente le lendemain de son arrivée dans le service. Il s’agit d’un jeune cardiologue de 32 ans. Il accuse de même la nouvelle. Nous consultons alors le dossier infirmier de la patiente afin de nous renseigner sur son état pendant le weekend. Il est fait mention uniquement de céphalées plus ou moins bien calmées par les antalgiques, et selon l’IDE en rapport avec l’évolution de la TA qui a varié de 14 à 16 de systolique pendant les 2 jours.

L’interne d’astreinte du samedi matin ne révèle rien de particulier non plus.

La patiente ne serait quasi plus douloureuse à partir du dimanche en fin d’après-midi.

Plus tard, dans la journée, le Dr JEUNSENIOR et moi-même informons le Dr VIEUCARDIO qui a fait sortir la patiente, un cardiologue d’une cinquantaine d’années, plus bourru, plus sûr de lui-même.

Il ne tient clairement pas à s’attarder trop sur le problème. Pour lui, rien ne s’opposait à la sortie de la patiente. Puis il râle contre son collègue qui avait accepté la patiente dans le service en bougonnant « Voilà ce qu’il se passe quand on accepte des patients qui ne relèvent pas de la cardio ! »

Je me suis ensuite attaché à rédiger le CRH de Mme @@@. L’exercice n’était pas simple car je devais rester objectif et ne pas réaliser un document en fonction des évènements post hospitaliers. Toutefois, j’avais conscience de l’importance de ce CRH, qui serait étudié dans ses moindres détails s’il existerait des suites medico-légales à cette histoire. Je n’ai pas cherché à savoir si mes chefs y ont apportés des modifications par la suite.

Ce jour, 75 jours après le décès de Mme @@@, et après avoir changé de service il y a 2 mois, je n’ai pas eu de retour sur cette histoire. Il y a 1 mois, j’ai contacté le jeune cardiologue qui m’a dit de n’a pas avoir eu de nouvelles informations sur le sujet.

Concernant l’erreur médicale en médecine générale (ref : La sécurité du patient en médecine générale J. Brami R. Amalberi)

Selon l’OMS : la première cause d’erreur médicale en médecine générale est l’erreur diagnostique.

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L’évaluation de ces erreurs et de leurs conséquences est encore imprécise du fait du faible nombre d’études sur le sujet.

Selon une étude récente portant sur 1074 plaintes de patients en 2003 2004 2005 (Amalberti Bons-Letouzey, Sicot 2009, La gestion des risques en médecine générale, une affaire de Tempos), la responsabilité du médecin G est retenue dans 25% des dossiers en moyenne. 35 à 45% des évènements indésirables graves (EIG) seraient évitables.

Les retards diagnostics de cancers (en mois) et de situations à hauts risques d’AVC/IdM (en heures) sont la première cause d’EIG. La nature trompeuse des tableaux cliniques et la banalité des premiers symptômes chez des patients sans antécédent est la cause la plus fréquente de retard diagnostique particulièrement en période épidémique (grippe, GEA…)

Les autres causes d’EIG sont dans l’ordre décroissant de fréquence : une conduite thérapeutique insuffisante (délai trop long, schéma inadapté), des effets médicamenteux indésirables (hors indication, CI non respecté, erreur de posologie), les gestes thérapeutiques invasifs, les problèmes d’éthique (certificat de complaisance…)

D’ après une étude américaine sur 307 plaintes tirées au sort (Gandhi ; Kchalia Thomas Missed and delayed dignoses in the ambulatory setting : a study of closed malpractice claims. 2006) , le retard de diagnostic s’explique par une absence de demande du test sensible dans 55% puis par l’absence de suivi dans 45%, l’absence d’un recueil de l’anamnèse correcte dans 42% et la mauvaise interprétation d’un test pertinent dans 37%

Les facteurs contributifs les plus souvent mis en évidences sont :

L’inattention du généraliste (79%), la fatigue (59%), le manque de connaissance partielle (48%)

Une autre cause profonde d’EIG est représentée par la non-remise en question d’un diagnostic établi par un spécialiste. Ainsi il s’avère que dans 46% des EIG secondaires à un retard diagnostic impliquent au moins 2 médecins (généraliste ou spécialistes)

Selon une enquête (étude EVISA sur 47 EIG ambulatoire en aquitaine ayant mené à une hospitalisation) les causes profondes d’EIG ambulatoire sont :

Les patients ou leur entourage (mauvaise compréhension du traitement, population fragile particulièrement à risque)

Les anticoagulants+++

Le fait que les généralistes n’osent pas assez remettre en cause les prescriptions hospitalières

La peur de la dépréciation de leur propre image aux yeux des patients ainsi que la lassitude face à des demandes appuyées et répétés

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Les problèmes de communication entre professionnels et la traçabilité de l’information

Analyse de mon RSCA par la méthode des barrières (modèle classique en analyse de sécurité)

La barrière de prévention : Conseils sur la pratique du sport, recherche de contre-indications à la pratique d’un sport, contrôle régulier de la TA au cabinet

La barrière de récupération : application des recommandations sur la prise en charge de céphalée persistante inaugurale. Application des recommandations concernant la prise en charge d’une découverte d’HTA >180 d’emblée chez quelqu’un de jeune.

La barrière d’atténuation : accès rapide à un centre hospitalier pourvu d’une unité de soins intensif neurovasculaire, voire de neurochirurgie

Analyse par la méthode de l’arbre des causes (réalisé avec l’aide de la fiche d’analyse approfondie de l’étude EVISA)

Patiente déjà suivie par MT pour les mêmes symptômes

Evaluée à 2 reprises aux urgences avec examen clinique rassurant

Examen complémentaire faussement rassurant

Sortie sans diagnostic et décès de la patiente dans les jours suivants

Réévaluation par 2 seniors différents (supervision inadaptée)

Examen complémentaire inadapté

Soins ne relevant pas du domaine des professionnels de santé (mauvaise orientation)Evaluée par

mon senior de façon rassurante

Symptôme trompeur

Crainte de l’opposition avec mes chefs

Mauvais contact avec la patiente

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Synthèse sur l’évènement indésirable grave relaté dans mon RSCA

1 Identifiez la nature de l’évènement indésirable : cf RSCA

2 Rassemblez vos connaissances académiques sur l’évènement indésirable : cf recommandation HAS sur prise en charge HTA en médecine ambulatoire et présentation staff « céphalées aux urgences »

3 Identifiez le problème de soin (la cause immédiate) qui a causé l’évènement indésirable : Absence de réalisation d’un scanner cérébral. Sortie de la patiente sans diagnostic

4 Identifier les causes : cf arbre des causes

5 Recherchez des solutions : (me concernant)

Application de la recommandation n°9 des 10 recommandations pour une médecine générale plus sure selon Brami et Amalberti : Ne pas hésiter à contredire les affirmations d’un médecin en situation hiérarchique forte

Ainsi que la recommandation n°3 : Bien écouter le patient

Epilogue

Dans un premier temps, j’ai d’abord beaucoup discuté avec mes co-internes de cardiologie de cette histoire. Leurs attitudes furent compréhensives et empathiques.

Immédiatement l’interne qui était d’astreinte le samedi matin et n’avait par conséquent pas pris part aux soins s’est posé de nombreuses questions sur son ressenti par rapport à la patiente pendant la matinée et s’est demandée si elle-même avait fait preuve d’une négligence quelconque. Ainsi, ma co-interne a cherché intuitivement sa place dans l’arbre des causes ou plutôt des responsabilités, qui a mené à ce drame.

L’attitude des seniors était tout à fait différente. Aucune réunion de service, aucune communication avec les médecins qui n’avaient pas directement participé à la prise en charge de la patiente.

Je n’ai donc pas reparlé de cette patiente avec mes seniors après l’annonce de la nouvelle au Dr VIEUCARDIO. Et étrangement, alors que cette histoire constituait ce que je considérais jusqu’à présent comme « le type d’évènement qui peut briser une vocation », j’ai poursuivi mon travail, mes gardes, mes visites… comme si de rien n’était.

Lorsque j’ai recontacté le Dr JEUNSENIOR il y a un mois pour organiser une soirée au restaurant avec mes co-internes et d’autres chefs de cardio, j’étais ravi d’avoir un prétexte

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pour lui demander s’il y avait eu du nouveau concernant le décès de Mme @@@@, en particulier s’il y avait eu autopsie. Il m’a répondu de façon un peu embarrassée qu’il n’avait eu connaissance d’aucune suite de cette affaire, qu’il avait appelé le MT de la patiente mais que ce dernier ne lui avait rien appris de particulier. Puis il m’a dit qu’il ne fallait pas que je passe trop de temps à réfléchir à cette histoire et qu’il convenait désormais de « passer à autre chose ». Je lui ai répondu que ça allait bien.

Quelques jours plus tard, je parle de cette histoire à mon praticien, le Dr FREUD, qui me conseille de réaliser une trace sur ce sujet et me donne des références qui m’ont permis de faire l’analyse de cet EIG.

Le fait d’écrire cette histoire puis d’en parler avec d’autres internes en groupe d’ED avec le Dr FREUD dans une réunion ayant pour but la constitution d’un RSCA sur le thème « Situations médicales à évolution non satisfaisantes » a été douloureux mais m’a apporté quelque chose.

Cela m’a permis de sortir de la culpabilité qui était restée mienne d’avoir continué à exercer, d’avoir continué à examiner, prendre en charge, soigner, tout en sachant que j’avais une part de responsabilité importante dans un drame qui a coûté la vie à un être humain.

J’avais le sentiment, jusqu’à ce que j’ai entrepris cette démarche, d’avoir « mis quelque chose sous le tapis ». J’avais également conscience que cette « chose importante » pouvait, selon le temps que je passerais à l’étudier et la façon dont je l’analyserais, changer ma pratique et modifier en profondeur mon appréhension de l’erreur médicale.

Il est clair que sans analyse structurée de l’EIG, sans échange avec les confrères, une telle expérience ne peut rien apporter de positif dans la carrière d’un médecin. Avant d’avoir débuté ce travail, j’abordais cet EIG sous le seul angle de ma responsabilité et je me bornais à me répéter mentalement la suite des évènements et les arguments théoriques qui auraient dû me faire agir autrement.

La discussion avec d’autres confrères, l’analyse structurée selon une méthode définie et éprouvée, sont véritablement les seuls outils qui peuvent, selon moi, aider le praticien à faire de ce type d’évènement, des moments cruciaux qui changeront positivement la pratique médicale et le vécu des EIG futurs.

Cela fut pour moi le moyen de comprendre l’erreur médicale; et les moyens de lutter contre ces erreurs sont bien différents de l’idée que je m’en faisais auparavant.

Car une information très importante du livre « La sécurité du patient en médecine générale de J. Brami et R. Amalberti », est que le manque de connaissance du médecin est l’une des causes d’erreur médicale, mais ce n’est pas la plus fréquente.

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Dans ma formation, le fait de ne pas savoir est tellement culpabilisé par les enseignants que l’on finit par être obsédé par l’idée qu’il faut tout savoir, et que c’est ce qui fera de nous des médecins qui ne commettront jamais d’erreur. On m’a par exemple culpabilisé (Tu ne sais pas ça, t’es mal barré pour l’internat, tu n’es pas bon…) de ne pas savoir, en quatrième année, les indications du traitement chirurgical dans la prise en charge du carcinome hépatocellulaire alors même que les recommandations varient très fréquemment et que celles-ci sont contestées par de nombreux médecins. Je n’ai jamais su ces indications !!!! Et je n’ai jamais tué personne par cette « ignorance crasse ».

Par contre j’ai participé à un évènement indésirable grave, car j’étais l’une des barrières entre la patiente et l’erreur médicale. Alors que j’avais toutes les connaissances requises pour prendre en charge la patiente selon les données actuelles de la science, j’ai dysfonctionné par crainte de l’opposition avec ma hiérarchie principalement.

Cette analyse m’a permis de me voir comme un maillon de la chaîne qui a abouti à l’EIG, et j’ai pu ainsi sortir de l’obsession sur ma responsabilité.

Bref c’est l’analyse de cette erreur médicale qui m’a permis de prendre conscience des véritables causes les plus fréquentes d’erreurs humaines et je me sens un peu mieux armé pour y faire face à l’avenir. Je me sens aussi un peu moins coupable de ne toujours pas connaitre les indications du traitement chirurgical dans la prise en charge du carcinome hépatocellulaire.

Bibliographie

La sécurité du patient en médecine générale J. Brami R. Amalberti

Amalberti Bons-Letouzey, Sicot 2009, La gestion des risques en médecine générale, une affaire de Tempos

Gandhi ; Kchalia Thomas Missed and delayed diagnoses in the ambulatory setting : a study of closed malpractice claims. 2006