vulnérabilités psychiques chez les étudiants : à propos de deux enquêtes en santé mentale à...

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Communication Vulne ´ rabilite ´ s psychiques chez les e ´ tudiants : a ` propos de deux enque ˆtes en sante ´ mentale a ` l’universite ´ Lyon 1 Psychological vulnerabilities among students: Two surveys about mental health at the University Lyon 1 Pierrette Estingoy a,b, *, Emmanuel Fort c , Jean-Claude Normand a,c , Je ´ ro ˆme Lerond d , Thierry D’Amato b,e a Medecine pre ´ventive, universite ´ Claude-Bernard–Lyon 1, domaine scientifique de la Doua, 6, rue de l’E ´ metteur, 69622 Villeurbanne cedex, France b Centre hospitalier Le Vinatier, 95, boulevard Pinel, 69677 Bron, France c UMRESTTE, universite ´ Claude-Bernard–Lyon 1, 8, avenue Rockfeller, 69373 Lyon cedex 08, France d Centre psychothe ´rapique de Nancy, 1, rue du Docteur-Archambault, BP 11010,, 54521 Laxou cedex, France e EA 4615, universite ´ Lyon 1, centre hospitalier le Vinatier, 95, boulevard Philippe-Pinel, 69677 Bron, France Annales Me ´ dico-Psychologiques 171 (2013) 392–398 INFO ARTICLE Mots cle ´s : Estime de soi De ´ pression Population e ´ tudiante Sante ´ mentale Schizophre ´ nie TDAH Keywords: ADHD Depression Mental health Schizophrenia Self-esteem Student population RE ´ SUME ´ Dans notre socie ´ te ´ qui ne souffre aucune contrainte temporelle, jeunesse et performance sont a ` l’honneur, tandis que pe ` se la menace d’un avenir mondial incertain. Face a ` cette situation, les jeunes adultes se trouvent soumis a ` des pressions multiples et contradictoires. Aux injonctions d’autonomisa- tion, de performances professionnelles et d’accomplissement personnel s’opposent les pre ´ visions de re ´ cession et d’absence de perspective, largement ve ´ hicule ´ es par les me ´ dias. Or, de tout temps, les jeunes adultes sont la cible pre ´ fe ´ rentielle des risques d’e ´ mergences psychopathologiques pour les maladies les plus graves comme la de ´ pression et la schizophre ´nie. Afin de re ´ pondre a ` notre mission de me ´ decine pre ´ ventive universitaire, nous avons souhaite ´ mieux e ´ valuer les risques en sante ´ mentale dans la population e ´ tudiante. Notre premie ` re enque ˆte (2009) e ´tudie la pre ´ valence du risque de de ´ pression (inventaire abre ´ge ´ de de ´ pression de BECK) et de schizophre ´ nie (e ´ chelle adapte ´ e de Mc Glashan pour les sympto ˆ mes prodromaux ou Scale Of Prodromal Symptoms). Les re ´ sultats montrent un risque de 5,7 % de de ´ pression pathologique (n = 2728) et 5,2 % de prodromes schizophre ´ niques (n = 2351). Notre deuxie ` me enque ˆte (2011) e ´ largit la recherche a ` de nouvelles dimensions (e ´ chelle d’estime de soi de Rosenberg, de ´ pistage TDAH) avec renseignements sur le profil e ´ tudiant. Sa me ´ thode d’exploitation permet aussi de croiser les e ´ chelles (n = 1899). Les re ´ sultats montrent une inflation des e ´ tudiants vulne ´ rables a ` 7,4 % pour les de ´ pressions se ´ve ` res et a ` 8,3 % pour les prodromes schizophre ´ niques. De plus, 10 % de jeunes de ´ clarent avoir eu des pense ´ es ou projets suicidaires tandis que les scores de tre ` s faible estime de soi concernent pre `s de un e ´ tudiant sur cinq, notamment les plus jeunes. Ces re ´ sultats confirment la ne ´ cessite ´ d’une politique de pre ´ vention et des actions sont de ´ ja ` envisage ´ es sur le terrain. ß 2013 Publie ´ par Elsevier Masson SAS. ABSTRACT In our society that tolerates no time constraint, youth and performance are honored while under the threat of a global uncertain future. Faced with this situation, young adults are subject to multiple and conflicting pressures. Empowerment injunctions, professional performance and personal fulfillment oppose forecasts of recession and lack of perspective, largely fueled by the media. Yet at all times, young adults are the preferential target for the emergence of psychopathological risks for the most serious diseases such as depression and schizophrenia. In order to fulfill our mission of Preventive University Health Program, we wanted to better assess the mental health risks in the student population. Our first survey (2009) studied the prevalence for depression risk (Beck Inventory Depression 13) and schizophrenia (adapted from Mc Glashan’s Scale of Prodromal Symptoms). The results show a 5.7% risk of pathological depression (n = 2728) and 5.2% of prodromal schizophrenia (n = 2351). Our second * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P. Estingoy). Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com 0003-4487/$ – see front matter ß 2013 Publie ´ par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.amp.2013.04.014

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Page 1: Vulnérabilités psychiques chez les étudiants : à propos de deux enquêtes en santé mentale à l’université Lyon 1

Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398

Disponible en ligne sur

wwwsciencedirectcom

Communication

Vulnerabilites psychiques chez les etudiants a propos de deux enquetesen sante mentale a lrsquouniversite Lyon 1

Psychological vulnerabilities among students Two surveys about mental health at the

University Lyon 1

Pierrette Estingoy ab Emmanuel Fort c Jean-Claude Normand ac Jerome Lerond dThierry DrsquoAmato be

a Medecine preventive universite Claude-BernardndashLyon 1 domaine scientifique de la Doua 6 rue de lrsquoEmetteur 69622 Villeurbanne cedex Franceb Centre hospitalier Le Vinatier 95 boulevard Pinel 69677 Bron Francec UMRESTTE universite Claude-BernardndashLyon 1 8 avenue Rockfeller 69373 Lyon cedex 08 Franced Centre psychotherapique de Nancy 1 rue du Docteur-Archambault BP 11010 54521 Laxou cedex Francee EA 4615 universite Lyon 1 centre hospitalier le Vinatier 95 boulevard Philippe-Pinel 69677 Bron France

I N F O A R T I C L E

Mots cles

Estime de soi

Depression

Population etudiante

Sante mentale

Schizophrenie

TDAH

Keywords

ADHD

Depression

Mental health

Schizophrenia

Self-esteem

Student population

R E S U M E

Dans notre societe qui ne souffre aucune contrainte temporelle jeunesse et performance sont a

lrsquohonneur tandis que pese la menace drsquoun avenir mondial incertain Face a cette situation les jeunes

adultes se trouvent soumis a des pressions multiples et contradictoires Aux injonctions drsquoautonomisa-

tion de performances professionnelles et drsquoaccomplissement personnel srsquoopposent les previsions de

recession et drsquoabsence de perspective largement vehiculees par les medias Or de tout temps les jeunes

adultes sont la cible preferentielle des risques drsquoemergences psychopathologiques pour les maladies les

plus graves comme la depression et la schizophrenie Afin de repondre a notre mission de medecine

preventive universitaire nous avons souhaite mieux evaluer les risques en sante mentale dans la

population etudiante Notre premiere enquete (2009) etudie la prevalence du risque de depression

(inventaire abrege de depression de BECK) et de schizophrenie (echelle adaptee de Mc Glashan pour les

symptomes prodromaux ou Scale Of Prodromal Symptoms) Les resultats montrent un risque de 57 de

depression pathologique (n = 2728) et 52 de prodromes schizophreniques (n = 2351) Notre deuxieme

enquete (2011) elargit la recherche a de nouvelles dimensions (echelle drsquoestime de soi de Rosenberg

depistage TDAH) avec renseignements sur le profil etudiant Sa methode drsquoexploitation permet aussi de

croiser les echelles (n = 1899) Les resultats montrent une inflation des etudiants vulnerables a 74 pour

les depressions severes et a 83 pour les prodromes schizophreniques De plus 10 de jeunes declarent

avoir eu des pensees ou projets suicidaires tandis que les scores de tres faible estime de soi concernent

pres de un etudiant sur cinq notamment les plus jeunes Ces resultats confirment la necessite drsquoune

politique de prevention et des actions sont deja envisagees sur le terrain

2013 Publie par Elsevier Masson SAS

A B S T R A C T

In our society that tolerates no time constraint youth and performance are honored while under the

threat of a global uncertain future Faced with this situation young adults are subject to multiple and

conflicting pressures Empowerment injunctions professional performance and personal fulfillment

oppose forecasts of recession and lack of perspective largely fueled by the media Yet at all times young

adults are the preferential target for the emergence of psychopathological risks for the most serious

diseases such as depression and schizophrenia In order to fulfill our mission of Preventive University

Health Program we wanted to better assess the mental health risks in the student population Our first

survey (2009) studied the prevalence for depression risk (Beck Inventory Depression 13) and

schizophrenia (adapted from Mc Glashanrsquos Scale of Prodromal Symptoms) The results show a 57 risk

of pathological depression (n = 2728) and 52 of prodromal schizophrenia (n = 2351) Our second

Auteur correspondant

Adresse e-mail docteurestingoyyahoofr (P Estingoy)

0003-4487$ ndash see front matter 2013 Publie par Elsevier Masson SAS

httpdxdoiorg101016jamp201304014

survey (2011) broadens the search for new dimensions (Rosenbergrsquos self-esteem scale Screening ADHD)

with the addition of useful information to the studentsrsquo profile His operational method also allows

crossing international scale items (n = 1899) The results show an inflation of studentsrsquo vulnerability to

73 for severe depression and 83 for the schizophrenic prodrome In addition 10 of youngsters report

having had suicidal thoughts or projects whereas very low self-esteem scores affect nearly 1 in 5 students

especially the youngest ones Those results confirm the need for a prevention policy and actions are

already planned in the field

2013 Published by Elsevier Masson SAS

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 393

1 Introduction

Dans notre societe qui ne souffre aucune contrainte temporellejeunesse et performance sont a lrsquohonneur tandis que pese lamenace drsquoun avenir mondial incertain Face a cette situation lesjeunes adultes se trouvent soumis a des pressions multiples etcontradictoires avec injonctions drsquoautonomisation de perfor-mances professionnelles et drsquoaccomplissement affectif tandisque les messages negatifs de concurrence et drsquoabsence deperspective sont largement vehicules par les medias Ils se doiventalors drsquoautant plus une reussite sur le plan des etudes

Par ailleurs les jeunes adultes sont la cible preferentielle delrsquoemergence pathologique des maladies psychiatriques les plusgraves comme les troubles de lrsquohumeur et la schizophrenie toutesdeux particulierement sensibles au stress Malheureusement il estetabli que ces deux constellations de troubles sont prises en chargetres tardivement lorsque la maladie est deja installee depuissouvent plusieurs annees Il en decoule une veritable perte dechance pour les patients qui arrivent alors dans des conditionssouvent dramatiques en service de psychiatrie lourde avec unpronostic qui srsquoaggrave proportionnellement au retard de diag-nostic

Entre-temps ces personnes ont pourtant presente des mani-festations de mal-etre tout a fait reperables mais non specifiquescomme la fatigue persistante les troubles drsquoattention la perte deconfiance ou de motivation lrsquoabus de toxiques Elles ont aussi putraverser de veritables depressions des crises suicidaires et memepresenter dans une proportion non negligeable des symptomesplus caracteristiques de psychoses debutantes

Or les differents modeles drsquointervention precoce montrentdesormais clairement le benefice drsquoune relation drsquoaide specialiseenotamment les strategies drsquoeducation a la sante ou de psy-chotherapies ciblees Mais en lrsquoabsence de contact avec uninterlocuteur sanitaire averti a une periode ou elles sont encoreaccessibles ces personnes srsquoisolent progressivement subissent desechecs successifs sur le plan scolaire professionnel et affectifavant de sombrer dans un episode majeur aux consequencesdesastreuses au plan psychologique et social

2 Problematique

Dans ce contexte il nous a paru indispensable de nousinterroger sur les indicateurs de la sante mentale des jeunesadultes etudiants ainsi que sur la pertinence des dispositifs de soinen lien avec les mesures de prevention et le depistage sur le terrain

21 Des constats alarmants sur la sante mentale des jeunes

Recemment lrsquoOMS rapportait qursquoenviron 20 des adolescentsde dix a 24 ans souffrent drsquoun probleme de sante mentale chaqueannee le plus souvent sous forme de depression ou drsquoanxietetandis que les comportements suicidaires restent lrsquoune desprincipales causes de mortalite chez les jeunes [14] En Franceles rapports sur la sante des etudiants evoquent ainsi les zonesdrsquoombre qui subsistent autour drsquoune certaine vulnerabilitepsychique [15] Celle-ci est rapportee aux exigences drsquoune

delicate transition vers lrsquoautonomie sous le stress competitif dela reussite [3]

22 Les dernieres donnees de la litterature

Les etudiants lyonnais seraient dans la moyenne nationale avecenviron un etudiant sur trois vulnerable a la depression unetudiant sur cinq ayant un sentiment de mal-etre au moins deuxsemaines et un etudiant sur cinq ayant consulte pour problemespsychiques essentiellement aupres drsquoun medecin generaliste [4]Ces donnees sont confirmees par des etudes qui revelentlrsquoexistence drsquoune forte detresse psychologique chez les etudiantsde la region PACA allant de 15 a 30 selon le sexe et lescirconstances [21]

Enfin de recentes etudes longitudinales montrent que les etatsmentaux des etudiants restent modifiables et que les strategiesactives de prevention peuvent etre efficaces notamment lors ducontexte transitionnel de la premiere annee [1]

23 La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain

Dramatiquement decrits comme laquo de grands malades raquo en depitde leur laquo meilleure volonte du monde raquo les services universitairesde medecine preventive et de promotion de la sante (SUMPPS) sontconsideres comme laquo des lieux irremplacables de reperage etdrsquoecoute des etudiants ayant des problemes de sante ou desproblemes psychologiques raquo [15]

A ce titre le SUMPPS de lrsquouniversite Claude-Bernard Lyon 1 estactuellement dote de deux mi-temps de psychologues et drsquounedemi-journee de psychiatre pour une population etudiante de35 000 personnes drsquoune moyenne drsquoage de 22 ans suivant uncursus dans les filieres sciences ou sante Les consultations pourdifficultes psychiques ou nerveuses concernent actuellementenviron 300 etudiants par an soit moins de 1 des etudiantsaffilies vus en moyenne cinq fois essentiellement pour desproblematiques reactionnelles ce qui se situe tres en dessous desbesoins presumes

Nos etudiants seraient-ils en excellente sante deja soignes Oune parviendraient-il pas a acceder a un soin necessaire dans notredispositif actuel avant de se voir exclure par defaut et rejoindreainsi la dramatique trajectoire des adultes en souffrance psychiqueet sociale

3 Methodologie

Afin de repondre a ces questions nous avons souhaite obtenirdes indications sur la vulnerabilite psychique des etudiants denotre etablissement afin de les comparer aux donnees de lalitterature et pouvoir envisager le cas echeant de nouvellesstrategies drsquointervention precoce Nous rapportons ici les resultatsde deux enquetes menees en 2008ndash2009 et 2010ndash2011

31 Des enquetes declaratives en ligne

Pour chacune des enquetes un auto-questionnaire a etepropose a partir drsquoun lien en libre acces place sur la page drsquoaccueil

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398394

du portail etudiant du site de lrsquouniversite sous lrsquointitule laquo EnqueteBien-etre raquo durant toute lrsquoannee universitaire

Le recueil des donnees est reste anonyme et declaratif dans lebut de faciliter la libre expression et aucune indication psycho-pathologique ne permettait de guider les reponses Pour eviter lesdoublons il etait impossible de repondre deux fois au memequestionnaire sous le meme login etudiant

Enfin un affichage automatique proposait de contacter leservice de medecine preventive pour inciter les personnesinteressees ou eventuellement en difficulte a venir consulter

32 Le contenu des questionnaires

Dans le but drsquoetablir un premier etat des lieux nous avons toutdrsquoabord choisi drsquoetudier la prevalence du risque de depression etde prodromes schizophreniques Pour cette premiere edition(2008ndash2009) les questionnaires etaient independants et com-prenaient pour seuls renseignements le sexe lrsquoage et la filiere delrsquoetudiant

Notre deuxieme enquete (2010ndash2011) a permis drsquoelargirnotre investigation a de nouvelles dimensions avec un croise-ment possible de toutes les donnees Le questionnaire uniquereprenait une autoevaluation de la depression des prodromes dela schizophrenie mais aussi un depistage du Trouble Deficitairede lrsquoAttention chez lrsquoadulte (TDAH) et une echelle drsquoestime desoi Les donnees sur le profil de lrsquoetudiant comprenaient en outrele niveau drsquoetude lrsquoattribution ou non drsquoune bourse lesantecedents de suivi psychologique etou de traitement med-icamenteux [6]

33 Les echelles psychopathologiques

Les echelles psychopathologiques utilisees etaient

lrsquo

inventaire abrege de la depression (Beck Depression Inventoryou BECK 13) surtout usite pour les etudes epidemiologiques oules depistages [2] comprend 13 items sur la tristesse lessentiments de decouragement drsquoechec de satisfaction deculpabilite et de deception les idees ou intentions suicidairesla perte drsquointeret la capacite de decision le mal-etre physique letravail la fatigue et enfin lrsquoappetit Les scores obtenus peuventaller drsquoun risque de depression leger [4ndash8] modere [8ndash16] asevere ( 16)

lrsquo

Tableau 1Resultats generaux - Enquetes Lyon 1 2009 et 2011

echelle adaptee de Mc Glashan sur les prodromes de laschizophrenie (Scale Of Prodromal Symptoms ou SOPS) com-porte 12 items testant les erreurs de perceptions les troubles dela relation ou de lrsquointerpretation du monde Un scorepositif 10 points est considere comme significatif pour unrisque de psychose [12]

la

Resultats generaux ndash Enquetes Lyon 1 2009 et 2011 ()

Echelles 2008ndash2009 2010ndash2011 Chi2

BECK 13

Depression moderee 169 211 p = 00009

Depression severe 57 74

Idees suicidaires 63 94 p00001

partie A de lrsquoechelle drsquoautoevaluation du TDAH chez lrsquoadulte(Adult ADHD Self-Report Scale ou ASRS V11) propose uneprediction autour de six items [10] Cette echelle tres sensible(positive a 46) reste peu specifique en raison de la necessitedrsquoune investigation retrospective des troubles qui doivent etrepercus comme genants drsquoou une question complementaire sur lesentiment drsquoimpact sur la reussite universitaire

SOPS

lrsquo

Prodromes SZP 52 83 p = 005

ASRS

Score 46 + impact 166

Score 66 + impact 37

Estime de soi

Tres faible a faible 544

Moyenne 171

Forte a tres forte 284

difference significative

echelle drsquoautoevaluation de lrsquoestime de soi de Rosenbergreprend sur dix items les differents aspects de la confiance en soide lrsquoamour de soi ainsi que les sentiments de respect et drsquoutilite alrsquoegard drsquoautrui

34 Analyse statistique

Les resultats ont ete analyses par le logiciel SAS version 93Les comparaisons statistiques ont ete realisees par des tests duChi2 pour les variables qualitatives et par des analyses de

variance pour les comparaisons de moyenne Les prevalences desdifferents outils de la deuxieme enquete ont ete redressees avecla methode de calage sur marge en utilisant la macro SAS Calmar[18] pour les ecarts observes entre le groupe des enquetes et lapopulation cible en termes de repartition des sexes la filiere et lecycle drsquoetude

4 Les resultats

Le taux de reponse est de 8 pour la premiere enquete (Beck n = 2728 et SOPS n = 2491) et de 6 pour la deuxieme enquete(n = 1899)

41 Profil de la population etudiee

Malgre une participation feminine deux fois plus nombreuse achaque enquete lrsquohomogeneite de notre echantillon reste excel-lente avec une moyenne drsquoage de 21 ans en sciences et sante

42 Vulnerabilite a la depression

Entre 2009 et 2011 nos resultats montrent une aggravation desscores de depression autant pour les risques moderes a severes (de226 a 285 ) que pour les risques severes (Tableau 1) Lesplaintes les plus frequentes concernent la fatigue (613 ) et lacapacite de travail (523 ) tandis que les reponses a caractere deseverite touchent plus souvent la culpabilite (45 ) et le sentimentde laideur (59 )

Par ailleurs le rapport masculinfeminin srsquoinverse selon lagravite les filles sont plus nombreuses pour la forme modereemais lrsquoindice de severite est plus frequent chez les garcons Cettetendance concerne egalement les idees ou les projets suicidairesavec 128 de garcons contre 77 de filles en 2011 (Tableau 2)

43 Vulnerabilite aux prodromes schizophreniques

De meme que pour la depression nos resultats revelent uneinflation du taux de positivite au depistage de prodromes entre2009 et 2011 (Tableau 1) Ici les difficultes les plus frequentescomme les plus severement marquees ne sont pas specifiques etconcernent le manque drsquoorganisation des pensees (515 )lrsquoimpression drsquoetre controle (41 ) ou de ne pas partager avecdrsquoautres sa vision de la realite (392 )

Par ailleurs nous observons une tres large surrepresentationmasculine pour cette forme de vulnerabilite allant jusqursquoa un sexeratio de trois garcons pour une fille en 2011 (Tableau 2)

Tableau 2Prevalences selon le genre ndash Enquetes Lyon 1 2011

Prevalences selon le genre ndash Enquetes Lyon 1 2011 ()

Echelles Femmes Hommes Chi2

BECK 13

Depression moderee 221 199 NS

Depression severe 70 78

Idees suicidaires 77 128 p00001

SOPS

Prodromes SZP 43 125 p00001

ASRS

Score 46 + impact 166 168 NS

Score 66 + impact 27 48

Estime de soi p = 0009

Tres faible 224 18

Faible 357 327

Moyenne 168 175

Forte 213 224

Tres forte 38 94

BECKSOPSASRS

Au moins un risque 103 193 p00001

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 395

44 Vulnerabilite aux troubles attentionnels

Parmi les enquetes une personne sur six declare souffrir dedifficultes drsquoattention ou drsquoorganisation impactant ses etudes etevoquant un TDAH Lorsque lrsquoon restreint les criteres positifs a 66cette susceptibilite touche pres drsquoune personne sur 20 avec deuxfois plus de garcons que de filles (Tableaux 1 et 2)

45 Le niveau drsquoestime de soi

La majorite des etudiants enquetes (54 ) presentent une estimede soi faible a tres faible avec un score moyen a 293 et un ecart-typede 59 (Tableau 1) et ce phenomene est plus marque chez les plusjeunes En revanche presque trois fois plus de garcons que de fillesrepondent aux criteres drsquoune tres forte estime de soi (Tableau 2)

46 Lrsquousage de soins et indicateurs de severite

Pres drsquoun etudiant sur cinq declare avoir deja beneficie drsquounsuivi psychologique et plus drsquoun quart a avoir deja eu recours a desmedicaments pour des difficultes nerveuses De plus les fillessemblent avoir plus souvent use de medicaments que les garconsdu meme age (Tableau 3)

Le croisement des donnees donne 133 drsquoetudiants (n = 252)qui presentent au moins un indicateur inquietant pour sa santementale a savoir soit un score de severite a la Beck [13] soit un

Tableau 3Taux de recours aux soins - Enquetes Lyon 1 2011

Taux de recours aux soins ndash Enquetes Lyon 1 2011 ()

Selon le genre Femmes Hommes Chi2

Suivi psychologique

Vie entiere 202 173 NS

Suivi en cours 65 62

Traitement medicamenteux

Vie entiere 324 209 p00001

Medication en cours 85 71 NS

Pour le sous-groupe a risque (BECK ou SOPS ou ASRS) n = 252

Jamais Soins interrompus Soin en cours

Suivi psychologique 594 215 191

Traitement medicamenteux 514 259 227

score positif a la SOPS soit un score de 66 avec impact sur lesetudes a la ASRS Le ratio est de presque deux garcons pour une fille(Tableau 2)

Toutefois la majorite de ces personnes a haut risque nrsquoauraitjamais beneficie de suivi et seulement 20 drsquoentre ellesmentionnent une prise en charge au moment de lrsquoenquete(Tableau 3)

5 Discussion et perspectives

Le choix methodologique drsquoune enquete participative basee surle volontariat et lrsquoanonymat constitue en soi un biais derecrutement Toutefois le taux superieur de reponses chez lesfilles moins touchees par les indicateurs de severite que lesgarcons semble contredire lrsquoidee drsquoun recrutement par suscepti-bilite personnelle

51 Comparaisons aux donnees externes

En ce qui concerne les risques depressifs nos resultats sontglobalement conformes aux resultats attendus En effet le tauxdrsquoepisodes depressifs majeurs en population generale sur uneannee oscille selon les etudes de 5 a 10 [17] Dans le meme sensles donnees actuelles sur les etudiants parisiens revelent un risquede depression caracterise pour 91 des personnes enquetees [13]Cette similitude concerne aussi les 10 de jeunes ayant eu penseesou projets suicidaires tels que rapportes en 2012 par lrsquoObservatoireexpertise et prevention pour la sante des etudiants [4]

De meme il est classiquement rapporte qursquoenviron 5 depersonnes adultes seraient sujettes aux deficits attentionnels avecune large predominance masculine [9]

La question des prodromes schizophreniques est pluscomplexe Si les dernieres estimations evaluent de facon con-vaincante la prevalence de la schizophrenie entre 04 et 07 dansle monde [10] la grande variabilite de methodes et de criteresselon les etudes rendent discutables lrsquoevaluation du taux depersonnes ayant un risque avere de transition vers la schizo-phrenie Celui-ci a recemment ete evaluee a 74100 000 personnes-annees pour une population londonienne de 16 a 35 ans avec uneequivalence pour les deux sexes [10] Nos indicateurs anormale-ment eleves refleteraient surtout une haute sensibilite de lrsquoechelleconcernant la schizotypie dont la prevalence generalementcomprise entre 5 a 10 pourrait atteindre pres de 30 desjeunes adultes en situation de grande precarite [19] De meme nosdonnees inhabituelles concernant la large preponderance mascu-line necessiteraient une investigation approfondie

Plus inquietants sont nos resultats en termes drsquoestime de soicompares a lrsquoetude de validite de lrsquoechelle en francais justementrealisee sur une population de jeunes etudiants et qui rapporte unscore moyen de 326 avec un ecart-type de 57 [20] Avec troispoints de moins nos etudiants sembleraient aujourdrsquohui plussouffrants

52 Eclairage depuis nos donnees internes

En depit de notre incitation a consulter aucune incidence surles demandes de soins nrsquoa emerge de ces enquetes en ligne Nousavons alors developpe deux recherchesactions autour descroyances concernant les soins psychiques par des etudiants enpsychologie aupres drsquoetudiants en science

Il est apparu que les jeunes ont une connaissance superficielleet confuse quant a la specificite de nos professions avec parfois undoute porte sur notre scientificite et nos competences Ces etudesont aussi revele la difference de representations et drsquoattentes ensante mentale entre les filles plus souvent dans un registrerelationnel et empathique et les garcons plus enclins a la

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398396

recherche de solutions sur un mode instrumental [5] Toutefois lefait de partager et transmettre un savoir entre pairs semble avoirfavorise une curiosite et un mouvement de confiance [7] Mieuxcette approche a effectivement permis a plusieurs etudiants defaire le pas vers la medecine preventive

6 Conclusions et perspectives

En somme plus de la moitie des etudiants enquetes presententune faible estime de soi et pres drsquoun etudiant sur trois estvulnerable a la depression Cette tendance est plus marquee chezles filles peut-etre plus sensibles et plus nuancees dans leurspropos Drsquoautre part plus drsquoun etudiant enquete sur dix presenteun risque de trouble psychique necessitant un soin et seulement20 de ceux-la beneficient drsquoune modalite de prise en charge Cerisque est plus souvent rapporte chez les garcons qui se montrentincisifs dans leurs reponses

Bien sur nos resultats ne sont pas exhaustifs et restent anuancer mais leur repetition et leur convergence permettent de lesconsiderer comme des indicateurs utiles sur le terrain Ainsi le faitdrsquoetre etudiant ne protege pas des risques en sante mentale et lesplus fragiles semblent echapper aux mesures actuelles deprevention

Alors qursquoune faible estime de soi potentialise les effets nefastesdu stress sur les eventuelles vulnerabilites sous-jacentes sastimulation pourrait contribuer a ameliorer la sante psychiqueen ameliorant certaines composantes anxieuses et depressivescomme le sentiment de culpabilite ou la crainte morbide delrsquoechec Ce serait retablir la relation circulaire drsquoautorenforcementreciproque entre estime de soi et performances scolaires [11]

Nous plaidons ainsi pour le developpement drsquoune politiqueactive drsquoinformation afin de faciliter lrsquoacces au soin precoce ensante mentale aupres des jeunes populations des le secondairemais aussi aupres des professionnels de premiere ligne comme lesenseignants les travailleurs sociaux les medecins generalistes etles infirmiers En ce sens un projet a mediatisation artistique avisee de destigmatisation est en cours de developpement pourlrsquoannee 2013 sous la forme drsquoun recit illustre sur la psychoseemergente chez le jeune adulte Lrsquoeclipse drsquoun ange

Declaration drsquointerets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits drsquointerets enrelation avec cet article

References

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P Estingoy et al Annales Medico

Discussion

-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 397

Dr J Birenbaumndash Parmi les etudiants acceptant une therapiequelles seraient les proportions respectives de ceux srsquoorientantplutot vers une therapie

a

nalytique

p

sychobiologique

c

ognitivo-comportementale

Reponse du Rapporteurndash Je nrsquoai pas ces chiffres mais il mesemble que la majorite des etudiants que nous voyons en Medecinepreventive est plutot demandeuse drsquoune demarche integrative et leconcept de psychotherapie de soutien compris comme uneapproche humaniste srsquoappuyant sur le renforcement des compe-tences propres des personnes en soins associant aussi bien desreferences psychodynamique que comportementale cognitive ouautres En deuxieme lieu lorsque sont proposees et expliqueesles diverses modalites possibles viennent les demandes plusspecifiques de TCC puis lrsquoapproche psychocorporelle Enfin uncertain nombre de personnes sont aussi en mesure de poser uneproblematique de type analytique et sont alors orientees vers cetype de prise en charge La demande pharmacologique est de faitexceptionnelle

Dr P Moutinndash Votre communication me paraıt tres inter-essante principalement dans lrsquointeret que vous portez a lrsquoetude dela vulnerabilite En effet comme lrsquoa decrit de facon detaillee le2 janvier dernier dans un quotidien du matin le docteur SamuelLepastier psychiatre psychanalyste la tendance est actuellementdans les medias a une diffusion excessive des etats lies a dessituations de stress Le risque est alors au moment de la prise encharge de tenir compte uniquement des facteurs exterieurs alrsquoorigine de lrsquoetat en oubliant ceux lies a la personne

Reponse du Rapporteurndash Merci Oui en effet nos interventionsde prevention face au stress chez les etudiants precisent combien lapersonnalite et ses capacites drsquoadaptation fruits de son histoire deses representations psychiques de son temperament de ses choixdeterminent en realite ce qui peut devenir pathologique ou non

Docteur J-G Veyratndash Merci pour cette tres interessante etudeUne question je ne crois pas que vous ayez pratique un testdrsquoalexithymie dans votre corpus Il aurait pu etre eclairant decomparer avec le resultat de Loas trouvant 17 de sujetalexithymiques dans son echantillon drsquoetudiants Bien sur ces17 ne sont pas consideres comme pathologiques mais crsquoest chezeux que se recruteront entre autres les futurs addictifs

Reponse du Rapporteurndash Nous nrsquoavons pas recherche lesalexithymiques effectivement porteurs drsquoune vulnerabilite trans-nosographique a des difficultes psychiques ou a des risquescomportementaux tels que lrsquoaddiction Crsquoest une piste a creuser

Dr P Houillonndash Nous venons drsquoassister a un etat des lieux sur lasituation specifique des etudiants en particulier sur leur vulner-abilite qui est analysee et chiffree Celle-ci est reliee a lrsquoambiancede stress drsquoune epoque de grande incertitude drsquoattente anxieuse dechangements imprevisibles et pour lesquels personne ne peut quedonc etablir de strategie En meme temps emerge en filigrane atravers ce qui vient drsquoetre dit lrsquoidee drsquoune opposition entre destroubles laquo nomenclatures raquo entraınant des reponses surtoutpsychopharmacologiques et des troubles laquo actuels raquo (c-a-d enlien avec les crises que nous traversons) pour lesquels noussommes assez depourvus Autant de facteurs de morbidite qui ontamene les auteurs a insister dans leur introduction sur lrsquoimpor-tance drsquoune information pertinente aupres des groupes concernes

en vue drsquoune prise de conscience des risques encourus Et crsquoest icique plusieurs questions se posent

c

omment delivrer cette information sachant que le renonce-ment aux soins est frequent comme cela a ete rappele et quelrsquoetudiant en apparence nrsquoattend rien drsquoautrui

q

ue faudrait-il modifier dans la pratique quotidienne pour que

lrsquoinformation soit mieux recue et suscite lrsquointeret envers desreponses susceptibles notamment drsquoattenuer les consequencesdu malaise existentiel noyau central de nombreuses formes dedepressions nouvelles atypiques ou masquees souvent accom-pagnees de cette anxiete sous-jacente plus ou moins habilementdissimulee

e

n resume quelles conditions principales seraient a reunir pour

une approche plus laquo communicante raquo de lrsquoindividu et du groupe Sur ce point le recul de la clinique qui vient drsquoetre souligne estcontre-productif dans la mesure ou une analyse soigneuse detableaux cliniques specifiques faciliterait une meilleure com-prehension des causes profondes avec pour consequence ladelivrance drsquoinformations plus ajustees et plus conformes auxattentes comme aux vrais besoins

c

omment en fin de compte envisager une information a vertu

preventive voire pedagogique a orientation curative

Pour repondre a ces interrogations le triple tropisme de lapresentatrice manifeste pour lrsquohistoire la philosophie et laclinique presente bien des avantages Il est meme presqueindispensable

Impossible en effet de se desinteresser drsquoune histoire indivi-duelle indissociable de la grande histoire qui est aussi celle deshommes confrontes avec leur temps

Impossible pour la philosophe de ne pas srsquointerroger sur le senset lrsquoorigine du laquo mal-etre raquo generateur de troubles psychocom-portementaux

Impossible pour la clinicienne de ne pas chercher a etablir decorrespondance entre lrsquoexpression drsquoune souffrance aux aspectsmultiformes et trompeurs (a inventorier) et lrsquoorigine de ce qui faitquestion et que seul un vrai dialogue avec echange de mots quiparlent peut soupconner

Compte tenu de votre experience acquise dans lrsquoapproche degroupe de jeunes adultes en difficulte quelle recommandationprincipale feriez-vous pour passer du simple laquo relationnel raquoindolore ou stereotype a un laquo communicationnel raquo capable de leverces inhibitions qui participent au refus des soins et des soignants

Reponse du Rapporteurndash Merci beaucoup pour votre commen-taire qui souleve tres justement le besoin de defendre le principedrsquoune philosophie des soins dans les pratiques quotidiennes

Ma premiere recommandation est alimentee par mon expe-rience quotidienne aupres de jeunes adultes qui ne veulent pas etreseulement laquo gueris de leurs maux raquo apres avoir ete etiquetesemballes ou protocolises mais surtout soulages du laquo mal a penservivre raquo entre soi et les autres Banalement ce serait de valoriser cetterencontre humaine impossible a mesurer mais aisement facile adevelopper en favorisant le recrutement drsquoacteurs de terrainsdirectement en lien avec les jeunes plus que le developpement desservices de controle technocratique lois ou reglements Donc faireconfiance a lrsquohumain prendre des risques pour developper le sens etle gout des responsabilites de chacun et en particulier des jeunesvis-a-vis drsquoeux-memes et de tous encourager la recompense et lareconnaissance Plus concretement lrsquoidee serait de promouvoir

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398398

toutes les formes drsquoechanges et de partages transgenerationnelstransprofessionnels la mise en œuvre drsquooperations de communica-tions portees par des pairs et des peres toutes mediationsconfondues pour informer bien sur et travailler sur le depistageprecoce des vulnerabilites psychopathologiques mais aussi pourdevelopper chez chacun le sens de lrsquoautre lrsquoempathie et lrsquoaltruismeles meilleures armes contre la souffrance de lrsquoame et lrsquoenfermementsur soi Bref rappeler que lrsquoavenir est devant chacun de nous et qursquoilnous appartient

Dr M Massonndash Je vous felicite pour cette communication Jevous signale egalement un travail coordonne par Guy Goodwin(UK) non encore publie sur lrsquoutilisation du Mood DisorderQuestionnaire (MDQ) drsquoHirschfeld pour depister les troublesbipolaires dans une population drsquoetudiants drsquoOxford

DOI de lrsquoarticle original httpdxdoiorg101016jamp201304014

0003-4487$ ndash see front matter

httpdxdoiorg101016jamp201304015

Reponse du Rapporteurndash Une echelle que nous attendons doncavec impatience

Pr E Pewzner-Apeloig ndash Je suis personnellement frappee par lafrequence des appels emanant des adolescents eux-memes jeveux dire que souvent ils sont a lrsquoinitiative de la demande drsquoaide etil nrsquoest pas rare qursquoils contactent un therapeute avant meme drsquoavoirparle de leur projet de psychotherapie a leurs parents

Drsquoautre part vous avez parle de la difficulte drsquointegration quidites-vous est plus frequente chez des etudiants boursiers certesvous avez raison drsquoinvoquer les difficultes financieres les obligeanta avoir une activite remuneree parallelement a la poursuite deleurs etudes Mais il me semble qursquoil ne faut pas negliger la placedes facteurs socio-culturels dans la comprehension de leur mal-etre et de la faible estime de soi

  • Vulneacuterabiliteacutes psychiques chez les eacutetudiants agrave propos de deux enquecirctes en santeacute mentale agrave lrsquouniversiteacute Lyon 1
    • Introduction
    • Probleacutematique
      • Des constats alarmants sur la santeacute mentale des jeunes
      • Les derniegraveres donneacutees de la litteacuterature
      • La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain
        • Meacutethodologie
          • Des enquecirctes deacuteclaratives en ligne
          • Le contenu des questionnaires
          • Les eacutechelles psychopathologiques
          • Analyse statistique
            • Les reacutesultats
              • Profil de la population eacutetudieacutee
              • Vulneacuterabiliteacute agrave la deacutepression
              • Vulneacuterabiliteacute aux prodromes schizophreacuteniques
              • Vulneacuterabiliteacute aux troubles attentionnels
              • Le niveau drsquoestime de soi
              • Lrsquousage de soins et indicateurs de seacuteveacuteriteacute
                • Discussion et perspectives
                  • Comparaisons aux donneacutees externes
                  • eacuteclairage depuis nos donneacutees internes
                    • Conclusions et perspectives
                    • Deacuteclaration drsquointeacuterecircts
                    • Reacutefeacuterences
                      • Discussion
Page 2: Vulnérabilités psychiques chez les étudiants : à propos de deux enquêtes en santé mentale à l’université Lyon 1

survey (2011) broadens the search for new dimensions (Rosenbergrsquos self-esteem scale Screening ADHD)

with the addition of useful information to the studentsrsquo profile His operational method also allows

crossing international scale items (n = 1899) The results show an inflation of studentsrsquo vulnerability to

73 for severe depression and 83 for the schizophrenic prodrome In addition 10 of youngsters report

having had suicidal thoughts or projects whereas very low self-esteem scores affect nearly 1 in 5 students

especially the youngest ones Those results confirm the need for a prevention policy and actions are

already planned in the field

2013 Published by Elsevier Masson SAS

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 393

1 Introduction

Dans notre societe qui ne souffre aucune contrainte temporellejeunesse et performance sont a lrsquohonneur tandis que pese lamenace drsquoun avenir mondial incertain Face a cette situation lesjeunes adultes se trouvent soumis a des pressions multiples etcontradictoires avec injonctions drsquoautonomisation de perfor-mances professionnelles et drsquoaccomplissement affectif tandisque les messages negatifs de concurrence et drsquoabsence deperspective sont largement vehicules par les medias Ils se doiventalors drsquoautant plus une reussite sur le plan des etudes

Par ailleurs les jeunes adultes sont la cible preferentielle delrsquoemergence pathologique des maladies psychiatriques les plusgraves comme les troubles de lrsquohumeur et la schizophrenie toutesdeux particulierement sensibles au stress Malheureusement il estetabli que ces deux constellations de troubles sont prises en chargetres tardivement lorsque la maladie est deja installee depuissouvent plusieurs annees Il en decoule une veritable perte dechance pour les patients qui arrivent alors dans des conditionssouvent dramatiques en service de psychiatrie lourde avec unpronostic qui srsquoaggrave proportionnellement au retard de diag-nostic

Entre-temps ces personnes ont pourtant presente des mani-festations de mal-etre tout a fait reperables mais non specifiquescomme la fatigue persistante les troubles drsquoattention la perte deconfiance ou de motivation lrsquoabus de toxiques Elles ont aussi putraverser de veritables depressions des crises suicidaires et memepresenter dans une proportion non negligeable des symptomesplus caracteristiques de psychoses debutantes

Or les differents modeles drsquointervention precoce montrentdesormais clairement le benefice drsquoune relation drsquoaide specialiseenotamment les strategies drsquoeducation a la sante ou de psy-chotherapies ciblees Mais en lrsquoabsence de contact avec uninterlocuteur sanitaire averti a une periode ou elles sont encoreaccessibles ces personnes srsquoisolent progressivement subissent desechecs successifs sur le plan scolaire professionnel et affectifavant de sombrer dans un episode majeur aux consequencesdesastreuses au plan psychologique et social

2 Problematique

Dans ce contexte il nous a paru indispensable de nousinterroger sur les indicateurs de la sante mentale des jeunesadultes etudiants ainsi que sur la pertinence des dispositifs de soinen lien avec les mesures de prevention et le depistage sur le terrain

21 Des constats alarmants sur la sante mentale des jeunes

Recemment lrsquoOMS rapportait qursquoenviron 20 des adolescentsde dix a 24 ans souffrent drsquoun probleme de sante mentale chaqueannee le plus souvent sous forme de depression ou drsquoanxietetandis que les comportements suicidaires restent lrsquoune desprincipales causes de mortalite chez les jeunes [14] En Franceles rapports sur la sante des etudiants evoquent ainsi les zonesdrsquoombre qui subsistent autour drsquoune certaine vulnerabilitepsychique [15] Celle-ci est rapportee aux exigences drsquoune

delicate transition vers lrsquoautonomie sous le stress competitif dela reussite [3]

22 Les dernieres donnees de la litterature

Les etudiants lyonnais seraient dans la moyenne nationale avecenviron un etudiant sur trois vulnerable a la depression unetudiant sur cinq ayant un sentiment de mal-etre au moins deuxsemaines et un etudiant sur cinq ayant consulte pour problemespsychiques essentiellement aupres drsquoun medecin generaliste [4]Ces donnees sont confirmees par des etudes qui revelentlrsquoexistence drsquoune forte detresse psychologique chez les etudiantsde la region PACA allant de 15 a 30 selon le sexe et lescirconstances [21]

Enfin de recentes etudes longitudinales montrent que les etatsmentaux des etudiants restent modifiables et que les strategiesactives de prevention peuvent etre efficaces notamment lors ducontexte transitionnel de la premiere annee [1]

23 La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain

Dramatiquement decrits comme laquo de grands malades raquo en depitde leur laquo meilleure volonte du monde raquo les services universitairesde medecine preventive et de promotion de la sante (SUMPPS) sontconsideres comme laquo des lieux irremplacables de reperage etdrsquoecoute des etudiants ayant des problemes de sante ou desproblemes psychologiques raquo [15]

A ce titre le SUMPPS de lrsquouniversite Claude-Bernard Lyon 1 estactuellement dote de deux mi-temps de psychologues et drsquounedemi-journee de psychiatre pour une population etudiante de35 000 personnes drsquoune moyenne drsquoage de 22 ans suivant uncursus dans les filieres sciences ou sante Les consultations pourdifficultes psychiques ou nerveuses concernent actuellementenviron 300 etudiants par an soit moins de 1 des etudiantsaffilies vus en moyenne cinq fois essentiellement pour desproblematiques reactionnelles ce qui se situe tres en dessous desbesoins presumes

Nos etudiants seraient-ils en excellente sante deja soignes Oune parviendraient-il pas a acceder a un soin necessaire dans notredispositif actuel avant de se voir exclure par defaut et rejoindreainsi la dramatique trajectoire des adultes en souffrance psychiqueet sociale

3 Methodologie

Afin de repondre a ces questions nous avons souhaite obtenirdes indications sur la vulnerabilite psychique des etudiants denotre etablissement afin de les comparer aux donnees de lalitterature et pouvoir envisager le cas echeant de nouvellesstrategies drsquointervention precoce Nous rapportons ici les resultatsde deux enquetes menees en 2008ndash2009 et 2010ndash2011

31 Des enquetes declaratives en ligne

Pour chacune des enquetes un auto-questionnaire a etepropose a partir drsquoun lien en libre acces place sur la page drsquoaccueil

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398394

du portail etudiant du site de lrsquouniversite sous lrsquointitule laquo EnqueteBien-etre raquo durant toute lrsquoannee universitaire

Le recueil des donnees est reste anonyme et declaratif dans lebut de faciliter la libre expression et aucune indication psycho-pathologique ne permettait de guider les reponses Pour eviter lesdoublons il etait impossible de repondre deux fois au memequestionnaire sous le meme login etudiant

Enfin un affichage automatique proposait de contacter leservice de medecine preventive pour inciter les personnesinteressees ou eventuellement en difficulte a venir consulter

32 Le contenu des questionnaires

Dans le but drsquoetablir un premier etat des lieux nous avons toutdrsquoabord choisi drsquoetudier la prevalence du risque de depression etde prodromes schizophreniques Pour cette premiere edition(2008ndash2009) les questionnaires etaient independants et com-prenaient pour seuls renseignements le sexe lrsquoage et la filiere delrsquoetudiant

Notre deuxieme enquete (2010ndash2011) a permis drsquoelargirnotre investigation a de nouvelles dimensions avec un croise-ment possible de toutes les donnees Le questionnaire uniquereprenait une autoevaluation de la depression des prodromes dela schizophrenie mais aussi un depistage du Trouble Deficitairede lrsquoAttention chez lrsquoadulte (TDAH) et une echelle drsquoestime desoi Les donnees sur le profil de lrsquoetudiant comprenaient en outrele niveau drsquoetude lrsquoattribution ou non drsquoune bourse lesantecedents de suivi psychologique etou de traitement med-icamenteux [6]

33 Les echelles psychopathologiques

Les echelles psychopathologiques utilisees etaient

lrsquo

inventaire abrege de la depression (Beck Depression Inventoryou BECK 13) surtout usite pour les etudes epidemiologiques oules depistages [2] comprend 13 items sur la tristesse lessentiments de decouragement drsquoechec de satisfaction deculpabilite et de deception les idees ou intentions suicidairesla perte drsquointeret la capacite de decision le mal-etre physique letravail la fatigue et enfin lrsquoappetit Les scores obtenus peuventaller drsquoun risque de depression leger [4ndash8] modere [8ndash16] asevere ( 16)

lrsquo

Tableau 1Resultats generaux - Enquetes Lyon 1 2009 et 2011

echelle adaptee de Mc Glashan sur les prodromes de laschizophrenie (Scale Of Prodromal Symptoms ou SOPS) com-porte 12 items testant les erreurs de perceptions les troubles dela relation ou de lrsquointerpretation du monde Un scorepositif 10 points est considere comme significatif pour unrisque de psychose [12]

la

Resultats generaux ndash Enquetes Lyon 1 2009 et 2011 ()

Echelles 2008ndash2009 2010ndash2011 Chi2

BECK 13

Depression moderee 169 211 p = 00009

Depression severe 57 74

Idees suicidaires 63 94 p00001

partie A de lrsquoechelle drsquoautoevaluation du TDAH chez lrsquoadulte(Adult ADHD Self-Report Scale ou ASRS V11) propose uneprediction autour de six items [10] Cette echelle tres sensible(positive a 46) reste peu specifique en raison de la necessitedrsquoune investigation retrospective des troubles qui doivent etrepercus comme genants drsquoou une question complementaire sur lesentiment drsquoimpact sur la reussite universitaire

SOPS

lrsquo

Prodromes SZP 52 83 p = 005

ASRS

Score 46 + impact 166

Score 66 + impact 37

Estime de soi

Tres faible a faible 544

Moyenne 171

Forte a tres forte 284

difference significative

echelle drsquoautoevaluation de lrsquoestime de soi de Rosenbergreprend sur dix items les differents aspects de la confiance en soide lrsquoamour de soi ainsi que les sentiments de respect et drsquoutilite alrsquoegard drsquoautrui

34 Analyse statistique

Les resultats ont ete analyses par le logiciel SAS version 93Les comparaisons statistiques ont ete realisees par des tests duChi2 pour les variables qualitatives et par des analyses de

variance pour les comparaisons de moyenne Les prevalences desdifferents outils de la deuxieme enquete ont ete redressees avecla methode de calage sur marge en utilisant la macro SAS Calmar[18] pour les ecarts observes entre le groupe des enquetes et lapopulation cible en termes de repartition des sexes la filiere et lecycle drsquoetude

4 Les resultats

Le taux de reponse est de 8 pour la premiere enquete (Beck n = 2728 et SOPS n = 2491) et de 6 pour la deuxieme enquete(n = 1899)

41 Profil de la population etudiee

Malgre une participation feminine deux fois plus nombreuse achaque enquete lrsquohomogeneite de notre echantillon reste excel-lente avec une moyenne drsquoage de 21 ans en sciences et sante

42 Vulnerabilite a la depression

Entre 2009 et 2011 nos resultats montrent une aggravation desscores de depression autant pour les risques moderes a severes (de226 a 285 ) que pour les risques severes (Tableau 1) Lesplaintes les plus frequentes concernent la fatigue (613 ) et lacapacite de travail (523 ) tandis que les reponses a caractere deseverite touchent plus souvent la culpabilite (45 ) et le sentimentde laideur (59 )

Par ailleurs le rapport masculinfeminin srsquoinverse selon lagravite les filles sont plus nombreuses pour la forme modereemais lrsquoindice de severite est plus frequent chez les garcons Cettetendance concerne egalement les idees ou les projets suicidairesavec 128 de garcons contre 77 de filles en 2011 (Tableau 2)

43 Vulnerabilite aux prodromes schizophreniques

De meme que pour la depression nos resultats revelent uneinflation du taux de positivite au depistage de prodromes entre2009 et 2011 (Tableau 1) Ici les difficultes les plus frequentescomme les plus severement marquees ne sont pas specifiques etconcernent le manque drsquoorganisation des pensees (515 )lrsquoimpression drsquoetre controle (41 ) ou de ne pas partager avecdrsquoautres sa vision de la realite (392 )

Par ailleurs nous observons une tres large surrepresentationmasculine pour cette forme de vulnerabilite allant jusqursquoa un sexeratio de trois garcons pour une fille en 2011 (Tableau 2)

Tableau 2Prevalences selon le genre ndash Enquetes Lyon 1 2011

Prevalences selon le genre ndash Enquetes Lyon 1 2011 ()

Echelles Femmes Hommes Chi2

BECK 13

Depression moderee 221 199 NS

Depression severe 70 78

Idees suicidaires 77 128 p00001

SOPS

Prodromes SZP 43 125 p00001

ASRS

Score 46 + impact 166 168 NS

Score 66 + impact 27 48

Estime de soi p = 0009

Tres faible 224 18

Faible 357 327

Moyenne 168 175

Forte 213 224

Tres forte 38 94

BECKSOPSASRS

Au moins un risque 103 193 p00001

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 395

44 Vulnerabilite aux troubles attentionnels

Parmi les enquetes une personne sur six declare souffrir dedifficultes drsquoattention ou drsquoorganisation impactant ses etudes etevoquant un TDAH Lorsque lrsquoon restreint les criteres positifs a 66cette susceptibilite touche pres drsquoune personne sur 20 avec deuxfois plus de garcons que de filles (Tableaux 1 et 2)

45 Le niveau drsquoestime de soi

La majorite des etudiants enquetes (54 ) presentent une estimede soi faible a tres faible avec un score moyen a 293 et un ecart-typede 59 (Tableau 1) et ce phenomene est plus marque chez les plusjeunes En revanche presque trois fois plus de garcons que de fillesrepondent aux criteres drsquoune tres forte estime de soi (Tableau 2)

46 Lrsquousage de soins et indicateurs de severite

Pres drsquoun etudiant sur cinq declare avoir deja beneficie drsquounsuivi psychologique et plus drsquoun quart a avoir deja eu recours a desmedicaments pour des difficultes nerveuses De plus les fillessemblent avoir plus souvent use de medicaments que les garconsdu meme age (Tableau 3)

Le croisement des donnees donne 133 drsquoetudiants (n = 252)qui presentent au moins un indicateur inquietant pour sa santementale a savoir soit un score de severite a la Beck [13] soit un

Tableau 3Taux de recours aux soins - Enquetes Lyon 1 2011

Taux de recours aux soins ndash Enquetes Lyon 1 2011 ()

Selon le genre Femmes Hommes Chi2

Suivi psychologique

Vie entiere 202 173 NS

Suivi en cours 65 62

Traitement medicamenteux

Vie entiere 324 209 p00001

Medication en cours 85 71 NS

Pour le sous-groupe a risque (BECK ou SOPS ou ASRS) n = 252

Jamais Soins interrompus Soin en cours

Suivi psychologique 594 215 191

Traitement medicamenteux 514 259 227

score positif a la SOPS soit un score de 66 avec impact sur lesetudes a la ASRS Le ratio est de presque deux garcons pour une fille(Tableau 2)

Toutefois la majorite de ces personnes a haut risque nrsquoauraitjamais beneficie de suivi et seulement 20 drsquoentre ellesmentionnent une prise en charge au moment de lrsquoenquete(Tableau 3)

5 Discussion et perspectives

Le choix methodologique drsquoune enquete participative basee surle volontariat et lrsquoanonymat constitue en soi un biais derecrutement Toutefois le taux superieur de reponses chez lesfilles moins touchees par les indicateurs de severite que lesgarcons semble contredire lrsquoidee drsquoun recrutement par suscepti-bilite personnelle

51 Comparaisons aux donnees externes

En ce qui concerne les risques depressifs nos resultats sontglobalement conformes aux resultats attendus En effet le tauxdrsquoepisodes depressifs majeurs en population generale sur uneannee oscille selon les etudes de 5 a 10 [17] Dans le meme sensles donnees actuelles sur les etudiants parisiens revelent un risquede depression caracterise pour 91 des personnes enquetees [13]Cette similitude concerne aussi les 10 de jeunes ayant eu penseesou projets suicidaires tels que rapportes en 2012 par lrsquoObservatoireexpertise et prevention pour la sante des etudiants [4]

De meme il est classiquement rapporte qursquoenviron 5 depersonnes adultes seraient sujettes aux deficits attentionnels avecune large predominance masculine [9]

La question des prodromes schizophreniques est pluscomplexe Si les dernieres estimations evaluent de facon con-vaincante la prevalence de la schizophrenie entre 04 et 07 dansle monde [10] la grande variabilite de methodes et de criteresselon les etudes rendent discutables lrsquoevaluation du taux depersonnes ayant un risque avere de transition vers la schizo-phrenie Celui-ci a recemment ete evaluee a 74100 000 personnes-annees pour une population londonienne de 16 a 35 ans avec uneequivalence pour les deux sexes [10] Nos indicateurs anormale-ment eleves refleteraient surtout une haute sensibilite de lrsquoechelleconcernant la schizotypie dont la prevalence generalementcomprise entre 5 a 10 pourrait atteindre pres de 30 desjeunes adultes en situation de grande precarite [19] De meme nosdonnees inhabituelles concernant la large preponderance mascu-line necessiteraient une investigation approfondie

Plus inquietants sont nos resultats en termes drsquoestime de soicompares a lrsquoetude de validite de lrsquoechelle en francais justementrealisee sur une population de jeunes etudiants et qui rapporte unscore moyen de 326 avec un ecart-type de 57 [20] Avec troispoints de moins nos etudiants sembleraient aujourdrsquohui plussouffrants

52 Eclairage depuis nos donnees internes

En depit de notre incitation a consulter aucune incidence surles demandes de soins nrsquoa emerge de ces enquetes en ligne Nousavons alors developpe deux recherchesactions autour descroyances concernant les soins psychiques par des etudiants enpsychologie aupres drsquoetudiants en science

Il est apparu que les jeunes ont une connaissance superficielleet confuse quant a la specificite de nos professions avec parfois undoute porte sur notre scientificite et nos competences Ces etudesont aussi revele la difference de representations et drsquoattentes ensante mentale entre les filles plus souvent dans un registrerelationnel et empathique et les garcons plus enclins a la

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398396

recherche de solutions sur un mode instrumental [5] Toutefois lefait de partager et transmettre un savoir entre pairs semble avoirfavorise une curiosite et un mouvement de confiance [7] Mieuxcette approche a effectivement permis a plusieurs etudiants defaire le pas vers la medecine preventive

6 Conclusions et perspectives

En somme plus de la moitie des etudiants enquetes presententune faible estime de soi et pres drsquoun etudiant sur trois estvulnerable a la depression Cette tendance est plus marquee chezles filles peut-etre plus sensibles et plus nuancees dans leurspropos Drsquoautre part plus drsquoun etudiant enquete sur dix presenteun risque de trouble psychique necessitant un soin et seulement20 de ceux-la beneficient drsquoune modalite de prise en charge Cerisque est plus souvent rapporte chez les garcons qui se montrentincisifs dans leurs reponses

Bien sur nos resultats ne sont pas exhaustifs et restent anuancer mais leur repetition et leur convergence permettent de lesconsiderer comme des indicateurs utiles sur le terrain Ainsi le faitdrsquoetre etudiant ne protege pas des risques en sante mentale et lesplus fragiles semblent echapper aux mesures actuelles deprevention

Alors qursquoune faible estime de soi potentialise les effets nefastesdu stress sur les eventuelles vulnerabilites sous-jacentes sastimulation pourrait contribuer a ameliorer la sante psychiqueen ameliorant certaines composantes anxieuses et depressivescomme le sentiment de culpabilite ou la crainte morbide delrsquoechec Ce serait retablir la relation circulaire drsquoautorenforcementreciproque entre estime de soi et performances scolaires [11]

Nous plaidons ainsi pour le developpement drsquoune politiqueactive drsquoinformation afin de faciliter lrsquoacces au soin precoce ensante mentale aupres des jeunes populations des le secondairemais aussi aupres des professionnels de premiere ligne comme lesenseignants les travailleurs sociaux les medecins generalistes etles infirmiers En ce sens un projet a mediatisation artistique avisee de destigmatisation est en cours de developpement pourlrsquoannee 2013 sous la forme drsquoun recit illustre sur la psychoseemergente chez le jeune adulte Lrsquoeclipse drsquoun ange

Declaration drsquointerets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits drsquointerets enrelation avec cet article

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P Estingoy et al Annales Medico

Discussion

-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 397

Dr J Birenbaumndash Parmi les etudiants acceptant une therapiequelles seraient les proportions respectives de ceux srsquoorientantplutot vers une therapie

a

nalytique

p

sychobiologique

c

ognitivo-comportementale

Reponse du Rapporteurndash Je nrsquoai pas ces chiffres mais il mesemble que la majorite des etudiants que nous voyons en Medecinepreventive est plutot demandeuse drsquoune demarche integrative et leconcept de psychotherapie de soutien compris comme uneapproche humaniste srsquoappuyant sur le renforcement des compe-tences propres des personnes en soins associant aussi bien desreferences psychodynamique que comportementale cognitive ouautres En deuxieme lieu lorsque sont proposees et expliqueesles diverses modalites possibles viennent les demandes plusspecifiques de TCC puis lrsquoapproche psychocorporelle Enfin uncertain nombre de personnes sont aussi en mesure de poser uneproblematique de type analytique et sont alors orientees vers cetype de prise en charge La demande pharmacologique est de faitexceptionnelle

Dr P Moutinndash Votre communication me paraıt tres inter-essante principalement dans lrsquointeret que vous portez a lrsquoetude dela vulnerabilite En effet comme lrsquoa decrit de facon detaillee le2 janvier dernier dans un quotidien du matin le docteur SamuelLepastier psychiatre psychanalyste la tendance est actuellementdans les medias a une diffusion excessive des etats lies a dessituations de stress Le risque est alors au moment de la prise encharge de tenir compte uniquement des facteurs exterieurs alrsquoorigine de lrsquoetat en oubliant ceux lies a la personne

Reponse du Rapporteurndash Merci Oui en effet nos interventionsde prevention face au stress chez les etudiants precisent combien lapersonnalite et ses capacites drsquoadaptation fruits de son histoire deses representations psychiques de son temperament de ses choixdeterminent en realite ce qui peut devenir pathologique ou non

Docteur J-G Veyratndash Merci pour cette tres interessante etudeUne question je ne crois pas que vous ayez pratique un testdrsquoalexithymie dans votre corpus Il aurait pu etre eclairant decomparer avec le resultat de Loas trouvant 17 de sujetalexithymiques dans son echantillon drsquoetudiants Bien sur ces17 ne sont pas consideres comme pathologiques mais crsquoest chezeux que se recruteront entre autres les futurs addictifs

Reponse du Rapporteurndash Nous nrsquoavons pas recherche lesalexithymiques effectivement porteurs drsquoune vulnerabilite trans-nosographique a des difficultes psychiques ou a des risquescomportementaux tels que lrsquoaddiction Crsquoest une piste a creuser

Dr P Houillonndash Nous venons drsquoassister a un etat des lieux sur lasituation specifique des etudiants en particulier sur leur vulner-abilite qui est analysee et chiffree Celle-ci est reliee a lrsquoambiancede stress drsquoune epoque de grande incertitude drsquoattente anxieuse dechangements imprevisibles et pour lesquels personne ne peut quedonc etablir de strategie En meme temps emerge en filigrane atravers ce qui vient drsquoetre dit lrsquoidee drsquoune opposition entre destroubles laquo nomenclatures raquo entraınant des reponses surtoutpsychopharmacologiques et des troubles laquo actuels raquo (c-a-d enlien avec les crises que nous traversons) pour lesquels noussommes assez depourvus Autant de facteurs de morbidite qui ontamene les auteurs a insister dans leur introduction sur lrsquoimpor-tance drsquoune information pertinente aupres des groupes concernes

en vue drsquoune prise de conscience des risques encourus Et crsquoest icique plusieurs questions se posent

c

omment delivrer cette information sachant que le renonce-ment aux soins est frequent comme cela a ete rappele et quelrsquoetudiant en apparence nrsquoattend rien drsquoautrui

q

ue faudrait-il modifier dans la pratique quotidienne pour que

lrsquoinformation soit mieux recue et suscite lrsquointeret envers desreponses susceptibles notamment drsquoattenuer les consequencesdu malaise existentiel noyau central de nombreuses formes dedepressions nouvelles atypiques ou masquees souvent accom-pagnees de cette anxiete sous-jacente plus ou moins habilementdissimulee

e

n resume quelles conditions principales seraient a reunir pour

une approche plus laquo communicante raquo de lrsquoindividu et du groupe Sur ce point le recul de la clinique qui vient drsquoetre souligne estcontre-productif dans la mesure ou une analyse soigneuse detableaux cliniques specifiques faciliterait une meilleure com-prehension des causes profondes avec pour consequence ladelivrance drsquoinformations plus ajustees et plus conformes auxattentes comme aux vrais besoins

c

omment en fin de compte envisager une information a vertu

preventive voire pedagogique a orientation curative

Pour repondre a ces interrogations le triple tropisme de lapresentatrice manifeste pour lrsquohistoire la philosophie et laclinique presente bien des avantages Il est meme presqueindispensable

Impossible en effet de se desinteresser drsquoune histoire indivi-duelle indissociable de la grande histoire qui est aussi celle deshommes confrontes avec leur temps

Impossible pour la philosophe de ne pas srsquointerroger sur le senset lrsquoorigine du laquo mal-etre raquo generateur de troubles psychocom-portementaux

Impossible pour la clinicienne de ne pas chercher a etablir decorrespondance entre lrsquoexpression drsquoune souffrance aux aspectsmultiformes et trompeurs (a inventorier) et lrsquoorigine de ce qui faitquestion et que seul un vrai dialogue avec echange de mots quiparlent peut soupconner

Compte tenu de votre experience acquise dans lrsquoapproche degroupe de jeunes adultes en difficulte quelle recommandationprincipale feriez-vous pour passer du simple laquo relationnel raquoindolore ou stereotype a un laquo communicationnel raquo capable de leverces inhibitions qui participent au refus des soins et des soignants

Reponse du Rapporteurndash Merci beaucoup pour votre commen-taire qui souleve tres justement le besoin de defendre le principedrsquoune philosophie des soins dans les pratiques quotidiennes

Ma premiere recommandation est alimentee par mon expe-rience quotidienne aupres de jeunes adultes qui ne veulent pas etreseulement laquo gueris de leurs maux raquo apres avoir ete etiquetesemballes ou protocolises mais surtout soulages du laquo mal a penservivre raquo entre soi et les autres Banalement ce serait de valoriser cetterencontre humaine impossible a mesurer mais aisement facile adevelopper en favorisant le recrutement drsquoacteurs de terrainsdirectement en lien avec les jeunes plus que le developpement desservices de controle technocratique lois ou reglements Donc faireconfiance a lrsquohumain prendre des risques pour developper le sens etle gout des responsabilites de chacun et en particulier des jeunesvis-a-vis drsquoeux-memes et de tous encourager la recompense et lareconnaissance Plus concretement lrsquoidee serait de promouvoir

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toutes les formes drsquoechanges et de partages transgenerationnelstransprofessionnels la mise en œuvre drsquooperations de communica-tions portees par des pairs et des peres toutes mediationsconfondues pour informer bien sur et travailler sur le depistageprecoce des vulnerabilites psychopathologiques mais aussi pourdevelopper chez chacun le sens de lrsquoautre lrsquoempathie et lrsquoaltruismeles meilleures armes contre la souffrance de lrsquoame et lrsquoenfermementsur soi Bref rappeler que lrsquoavenir est devant chacun de nous et qursquoilnous appartient

Dr M Massonndash Je vous felicite pour cette communication Jevous signale egalement un travail coordonne par Guy Goodwin(UK) non encore publie sur lrsquoutilisation du Mood DisorderQuestionnaire (MDQ) drsquoHirschfeld pour depister les troublesbipolaires dans une population drsquoetudiants drsquoOxford

DOI de lrsquoarticle original httpdxdoiorg101016jamp201304014

0003-4487$ ndash see front matter

httpdxdoiorg101016jamp201304015

Reponse du Rapporteurndash Une echelle que nous attendons doncavec impatience

Pr E Pewzner-Apeloig ndash Je suis personnellement frappee par lafrequence des appels emanant des adolescents eux-memes jeveux dire que souvent ils sont a lrsquoinitiative de la demande drsquoaide etil nrsquoest pas rare qursquoils contactent un therapeute avant meme drsquoavoirparle de leur projet de psychotherapie a leurs parents

Drsquoautre part vous avez parle de la difficulte drsquointegration quidites-vous est plus frequente chez des etudiants boursiers certesvous avez raison drsquoinvoquer les difficultes financieres les obligeanta avoir une activite remuneree parallelement a la poursuite deleurs etudes Mais il me semble qursquoil ne faut pas negliger la placedes facteurs socio-culturels dans la comprehension de leur mal-etre et de la faible estime de soi

  • Vulneacuterabiliteacutes psychiques chez les eacutetudiants agrave propos de deux enquecirctes en santeacute mentale agrave lrsquouniversiteacute Lyon 1
    • Introduction
    • Probleacutematique
      • Des constats alarmants sur la santeacute mentale des jeunes
      • Les derniegraveres donneacutees de la litteacuterature
      • La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain
        • Meacutethodologie
          • Des enquecirctes deacuteclaratives en ligne
          • Le contenu des questionnaires
          • Les eacutechelles psychopathologiques
          • Analyse statistique
            • Les reacutesultats
              • Profil de la population eacutetudieacutee
              • Vulneacuterabiliteacute agrave la deacutepression
              • Vulneacuterabiliteacute aux prodromes schizophreacuteniques
              • Vulneacuterabiliteacute aux troubles attentionnels
              • Le niveau drsquoestime de soi
              • Lrsquousage de soins et indicateurs de seacuteveacuteriteacute
                • Discussion et perspectives
                  • Comparaisons aux donneacutees externes
                  • eacuteclairage depuis nos donneacutees internes
                    • Conclusions et perspectives
                    • Deacuteclaration drsquointeacuterecircts
                    • Reacutefeacuterences
                      • Discussion
Page 3: Vulnérabilités psychiques chez les étudiants : à propos de deux enquêtes en santé mentale à l’université Lyon 1

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du portail etudiant du site de lrsquouniversite sous lrsquointitule laquo EnqueteBien-etre raquo durant toute lrsquoannee universitaire

Le recueil des donnees est reste anonyme et declaratif dans lebut de faciliter la libre expression et aucune indication psycho-pathologique ne permettait de guider les reponses Pour eviter lesdoublons il etait impossible de repondre deux fois au memequestionnaire sous le meme login etudiant

Enfin un affichage automatique proposait de contacter leservice de medecine preventive pour inciter les personnesinteressees ou eventuellement en difficulte a venir consulter

32 Le contenu des questionnaires

Dans le but drsquoetablir un premier etat des lieux nous avons toutdrsquoabord choisi drsquoetudier la prevalence du risque de depression etde prodromes schizophreniques Pour cette premiere edition(2008ndash2009) les questionnaires etaient independants et com-prenaient pour seuls renseignements le sexe lrsquoage et la filiere delrsquoetudiant

Notre deuxieme enquete (2010ndash2011) a permis drsquoelargirnotre investigation a de nouvelles dimensions avec un croise-ment possible de toutes les donnees Le questionnaire uniquereprenait une autoevaluation de la depression des prodromes dela schizophrenie mais aussi un depistage du Trouble Deficitairede lrsquoAttention chez lrsquoadulte (TDAH) et une echelle drsquoestime desoi Les donnees sur le profil de lrsquoetudiant comprenaient en outrele niveau drsquoetude lrsquoattribution ou non drsquoune bourse lesantecedents de suivi psychologique etou de traitement med-icamenteux [6]

33 Les echelles psychopathologiques

Les echelles psychopathologiques utilisees etaient

lrsquo

inventaire abrege de la depression (Beck Depression Inventoryou BECK 13) surtout usite pour les etudes epidemiologiques oules depistages [2] comprend 13 items sur la tristesse lessentiments de decouragement drsquoechec de satisfaction deculpabilite et de deception les idees ou intentions suicidairesla perte drsquointeret la capacite de decision le mal-etre physique letravail la fatigue et enfin lrsquoappetit Les scores obtenus peuventaller drsquoun risque de depression leger [4ndash8] modere [8ndash16] asevere ( 16)

lrsquo

Tableau 1Resultats generaux - Enquetes Lyon 1 2009 et 2011

echelle adaptee de Mc Glashan sur les prodromes de laschizophrenie (Scale Of Prodromal Symptoms ou SOPS) com-porte 12 items testant les erreurs de perceptions les troubles dela relation ou de lrsquointerpretation du monde Un scorepositif 10 points est considere comme significatif pour unrisque de psychose [12]

la

Resultats generaux ndash Enquetes Lyon 1 2009 et 2011 ()

Echelles 2008ndash2009 2010ndash2011 Chi2

BECK 13

Depression moderee 169 211 p = 00009

Depression severe 57 74

Idees suicidaires 63 94 p00001

partie A de lrsquoechelle drsquoautoevaluation du TDAH chez lrsquoadulte(Adult ADHD Self-Report Scale ou ASRS V11) propose uneprediction autour de six items [10] Cette echelle tres sensible(positive a 46) reste peu specifique en raison de la necessitedrsquoune investigation retrospective des troubles qui doivent etrepercus comme genants drsquoou une question complementaire sur lesentiment drsquoimpact sur la reussite universitaire

SOPS

lrsquo

Prodromes SZP 52 83 p = 005

ASRS

Score 46 + impact 166

Score 66 + impact 37

Estime de soi

Tres faible a faible 544

Moyenne 171

Forte a tres forte 284

difference significative

echelle drsquoautoevaluation de lrsquoestime de soi de Rosenbergreprend sur dix items les differents aspects de la confiance en soide lrsquoamour de soi ainsi que les sentiments de respect et drsquoutilite alrsquoegard drsquoautrui

34 Analyse statistique

Les resultats ont ete analyses par le logiciel SAS version 93Les comparaisons statistiques ont ete realisees par des tests duChi2 pour les variables qualitatives et par des analyses de

variance pour les comparaisons de moyenne Les prevalences desdifferents outils de la deuxieme enquete ont ete redressees avecla methode de calage sur marge en utilisant la macro SAS Calmar[18] pour les ecarts observes entre le groupe des enquetes et lapopulation cible en termes de repartition des sexes la filiere et lecycle drsquoetude

4 Les resultats

Le taux de reponse est de 8 pour la premiere enquete (Beck n = 2728 et SOPS n = 2491) et de 6 pour la deuxieme enquete(n = 1899)

41 Profil de la population etudiee

Malgre une participation feminine deux fois plus nombreuse achaque enquete lrsquohomogeneite de notre echantillon reste excel-lente avec une moyenne drsquoage de 21 ans en sciences et sante

42 Vulnerabilite a la depression

Entre 2009 et 2011 nos resultats montrent une aggravation desscores de depression autant pour les risques moderes a severes (de226 a 285 ) que pour les risques severes (Tableau 1) Lesplaintes les plus frequentes concernent la fatigue (613 ) et lacapacite de travail (523 ) tandis que les reponses a caractere deseverite touchent plus souvent la culpabilite (45 ) et le sentimentde laideur (59 )

Par ailleurs le rapport masculinfeminin srsquoinverse selon lagravite les filles sont plus nombreuses pour la forme modereemais lrsquoindice de severite est plus frequent chez les garcons Cettetendance concerne egalement les idees ou les projets suicidairesavec 128 de garcons contre 77 de filles en 2011 (Tableau 2)

43 Vulnerabilite aux prodromes schizophreniques

De meme que pour la depression nos resultats revelent uneinflation du taux de positivite au depistage de prodromes entre2009 et 2011 (Tableau 1) Ici les difficultes les plus frequentescomme les plus severement marquees ne sont pas specifiques etconcernent le manque drsquoorganisation des pensees (515 )lrsquoimpression drsquoetre controle (41 ) ou de ne pas partager avecdrsquoautres sa vision de la realite (392 )

Par ailleurs nous observons une tres large surrepresentationmasculine pour cette forme de vulnerabilite allant jusqursquoa un sexeratio de trois garcons pour une fille en 2011 (Tableau 2)

Tableau 2Prevalences selon le genre ndash Enquetes Lyon 1 2011

Prevalences selon le genre ndash Enquetes Lyon 1 2011 ()

Echelles Femmes Hommes Chi2

BECK 13

Depression moderee 221 199 NS

Depression severe 70 78

Idees suicidaires 77 128 p00001

SOPS

Prodromes SZP 43 125 p00001

ASRS

Score 46 + impact 166 168 NS

Score 66 + impact 27 48

Estime de soi p = 0009

Tres faible 224 18

Faible 357 327

Moyenne 168 175

Forte 213 224

Tres forte 38 94

BECKSOPSASRS

Au moins un risque 103 193 p00001

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 395

44 Vulnerabilite aux troubles attentionnels

Parmi les enquetes une personne sur six declare souffrir dedifficultes drsquoattention ou drsquoorganisation impactant ses etudes etevoquant un TDAH Lorsque lrsquoon restreint les criteres positifs a 66cette susceptibilite touche pres drsquoune personne sur 20 avec deuxfois plus de garcons que de filles (Tableaux 1 et 2)

45 Le niveau drsquoestime de soi

La majorite des etudiants enquetes (54 ) presentent une estimede soi faible a tres faible avec un score moyen a 293 et un ecart-typede 59 (Tableau 1) et ce phenomene est plus marque chez les plusjeunes En revanche presque trois fois plus de garcons que de fillesrepondent aux criteres drsquoune tres forte estime de soi (Tableau 2)

46 Lrsquousage de soins et indicateurs de severite

Pres drsquoun etudiant sur cinq declare avoir deja beneficie drsquounsuivi psychologique et plus drsquoun quart a avoir deja eu recours a desmedicaments pour des difficultes nerveuses De plus les fillessemblent avoir plus souvent use de medicaments que les garconsdu meme age (Tableau 3)

Le croisement des donnees donne 133 drsquoetudiants (n = 252)qui presentent au moins un indicateur inquietant pour sa santementale a savoir soit un score de severite a la Beck [13] soit un

Tableau 3Taux de recours aux soins - Enquetes Lyon 1 2011

Taux de recours aux soins ndash Enquetes Lyon 1 2011 ()

Selon le genre Femmes Hommes Chi2

Suivi psychologique

Vie entiere 202 173 NS

Suivi en cours 65 62

Traitement medicamenteux

Vie entiere 324 209 p00001

Medication en cours 85 71 NS

Pour le sous-groupe a risque (BECK ou SOPS ou ASRS) n = 252

Jamais Soins interrompus Soin en cours

Suivi psychologique 594 215 191

Traitement medicamenteux 514 259 227

score positif a la SOPS soit un score de 66 avec impact sur lesetudes a la ASRS Le ratio est de presque deux garcons pour une fille(Tableau 2)

Toutefois la majorite de ces personnes a haut risque nrsquoauraitjamais beneficie de suivi et seulement 20 drsquoentre ellesmentionnent une prise en charge au moment de lrsquoenquete(Tableau 3)

5 Discussion et perspectives

Le choix methodologique drsquoune enquete participative basee surle volontariat et lrsquoanonymat constitue en soi un biais derecrutement Toutefois le taux superieur de reponses chez lesfilles moins touchees par les indicateurs de severite que lesgarcons semble contredire lrsquoidee drsquoun recrutement par suscepti-bilite personnelle

51 Comparaisons aux donnees externes

En ce qui concerne les risques depressifs nos resultats sontglobalement conformes aux resultats attendus En effet le tauxdrsquoepisodes depressifs majeurs en population generale sur uneannee oscille selon les etudes de 5 a 10 [17] Dans le meme sensles donnees actuelles sur les etudiants parisiens revelent un risquede depression caracterise pour 91 des personnes enquetees [13]Cette similitude concerne aussi les 10 de jeunes ayant eu penseesou projets suicidaires tels que rapportes en 2012 par lrsquoObservatoireexpertise et prevention pour la sante des etudiants [4]

De meme il est classiquement rapporte qursquoenviron 5 depersonnes adultes seraient sujettes aux deficits attentionnels avecune large predominance masculine [9]

La question des prodromes schizophreniques est pluscomplexe Si les dernieres estimations evaluent de facon con-vaincante la prevalence de la schizophrenie entre 04 et 07 dansle monde [10] la grande variabilite de methodes et de criteresselon les etudes rendent discutables lrsquoevaluation du taux depersonnes ayant un risque avere de transition vers la schizo-phrenie Celui-ci a recemment ete evaluee a 74100 000 personnes-annees pour une population londonienne de 16 a 35 ans avec uneequivalence pour les deux sexes [10] Nos indicateurs anormale-ment eleves refleteraient surtout une haute sensibilite de lrsquoechelleconcernant la schizotypie dont la prevalence generalementcomprise entre 5 a 10 pourrait atteindre pres de 30 desjeunes adultes en situation de grande precarite [19] De meme nosdonnees inhabituelles concernant la large preponderance mascu-line necessiteraient une investigation approfondie

Plus inquietants sont nos resultats en termes drsquoestime de soicompares a lrsquoetude de validite de lrsquoechelle en francais justementrealisee sur une population de jeunes etudiants et qui rapporte unscore moyen de 326 avec un ecart-type de 57 [20] Avec troispoints de moins nos etudiants sembleraient aujourdrsquohui plussouffrants

52 Eclairage depuis nos donnees internes

En depit de notre incitation a consulter aucune incidence surles demandes de soins nrsquoa emerge de ces enquetes en ligne Nousavons alors developpe deux recherchesactions autour descroyances concernant les soins psychiques par des etudiants enpsychologie aupres drsquoetudiants en science

Il est apparu que les jeunes ont une connaissance superficielleet confuse quant a la specificite de nos professions avec parfois undoute porte sur notre scientificite et nos competences Ces etudesont aussi revele la difference de representations et drsquoattentes ensante mentale entre les filles plus souvent dans un registrerelationnel et empathique et les garcons plus enclins a la

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398396

recherche de solutions sur un mode instrumental [5] Toutefois lefait de partager et transmettre un savoir entre pairs semble avoirfavorise une curiosite et un mouvement de confiance [7] Mieuxcette approche a effectivement permis a plusieurs etudiants defaire le pas vers la medecine preventive

6 Conclusions et perspectives

En somme plus de la moitie des etudiants enquetes presententune faible estime de soi et pres drsquoun etudiant sur trois estvulnerable a la depression Cette tendance est plus marquee chezles filles peut-etre plus sensibles et plus nuancees dans leurspropos Drsquoautre part plus drsquoun etudiant enquete sur dix presenteun risque de trouble psychique necessitant un soin et seulement20 de ceux-la beneficient drsquoune modalite de prise en charge Cerisque est plus souvent rapporte chez les garcons qui se montrentincisifs dans leurs reponses

Bien sur nos resultats ne sont pas exhaustifs et restent anuancer mais leur repetition et leur convergence permettent de lesconsiderer comme des indicateurs utiles sur le terrain Ainsi le faitdrsquoetre etudiant ne protege pas des risques en sante mentale et lesplus fragiles semblent echapper aux mesures actuelles deprevention

Alors qursquoune faible estime de soi potentialise les effets nefastesdu stress sur les eventuelles vulnerabilites sous-jacentes sastimulation pourrait contribuer a ameliorer la sante psychiqueen ameliorant certaines composantes anxieuses et depressivescomme le sentiment de culpabilite ou la crainte morbide delrsquoechec Ce serait retablir la relation circulaire drsquoautorenforcementreciproque entre estime de soi et performances scolaires [11]

Nous plaidons ainsi pour le developpement drsquoune politiqueactive drsquoinformation afin de faciliter lrsquoacces au soin precoce ensante mentale aupres des jeunes populations des le secondairemais aussi aupres des professionnels de premiere ligne comme lesenseignants les travailleurs sociaux les medecins generalistes etles infirmiers En ce sens un projet a mediatisation artistique avisee de destigmatisation est en cours de developpement pourlrsquoannee 2013 sous la forme drsquoun recit illustre sur la psychoseemergente chez le jeune adulte Lrsquoeclipse drsquoun ange

Declaration drsquointerets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits drsquointerets enrelation avec cet article

References

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P Estingoy et al Annales Medico

Discussion

-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 397

Dr J Birenbaumndash Parmi les etudiants acceptant une therapiequelles seraient les proportions respectives de ceux srsquoorientantplutot vers une therapie

a

nalytique

p

sychobiologique

c

ognitivo-comportementale

Reponse du Rapporteurndash Je nrsquoai pas ces chiffres mais il mesemble que la majorite des etudiants que nous voyons en Medecinepreventive est plutot demandeuse drsquoune demarche integrative et leconcept de psychotherapie de soutien compris comme uneapproche humaniste srsquoappuyant sur le renforcement des compe-tences propres des personnes en soins associant aussi bien desreferences psychodynamique que comportementale cognitive ouautres En deuxieme lieu lorsque sont proposees et expliqueesles diverses modalites possibles viennent les demandes plusspecifiques de TCC puis lrsquoapproche psychocorporelle Enfin uncertain nombre de personnes sont aussi en mesure de poser uneproblematique de type analytique et sont alors orientees vers cetype de prise en charge La demande pharmacologique est de faitexceptionnelle

Dr P Moutinndash Votre communication me paraıt tres inter-essante principalement dans lrsquointeret que vous portez a lrsquoetude dela vulnerabilite En effet comme lrsquoa decrit de facon detaillee le2 janvier dernier dans un quotidien du matin le docteur SamuelLepastier psychiatre psychanalyste la tendance est actuellementdans les medias a une diffusion excessive des etats lies a dessituations de stress Le risque est alors au moment de la prise encharge de tenir compte uniquement des facteurs exterieurs alrsquoorigine de lrsquoetat en oubliant ceux lies a la personne

Reponse du Rapporteurndash Merci Oui en effet nos interventionsde prevention face au stress chez les etudiants precisent combien lapersonnalite et ses capacites drsquoadaptation fruits de son histoire deses representations psychiques de son temperament de ses choixdeterminent en realite ce qui peut devenir pathologique ou non

Docteur J-G Veyratndash Merci pour cette tres interessante etudeUne question je ne crois pas que vous ayez pratique un testdrsquoalexithymie dans votre corpus Il aurait pu etre eclairant decomparer avec le resultat de Loas trouvant 17 de sujetalexithymiques dans son echantillon drsquoetudiants Bien sur ces17 ne sont pas consideres comme pathologiques mais crsquoest chezeux que se recruteront entre autres les futurs addictifs

Reponse du Rapporteurndash Nous nrsquoavons pas recherche lesalexithymiques effectivement porteurs drsquoune vulnerabilite trans-nosographique a des difficultes psychiques ou a des risquescomportementaux tels que lrsquoaddiction Crsquoest une piste a creuser

Dr P Houillonndash Nous venons drsquoassister a un etat des lieux sur lasituation specifique des etudiants en particulier sur leur vulner-abilite qui est analysee et chiffree Celle-ci est reliee a lrsquoambiancede stress drsquoune epoque de grande incertitude drsquoattente anxieuse dechangements imprevisibles et pour lesquels personne ne peut quedonc etablir de strategie En meme temps emerge en filigrane atravers ce qui vient drsquoetre dit lrsquoidee drsquoune opposition entre destroubles laquo nomenclatures raquo entraınant des reponses surtoutpsychopharmacologiques et des troubles laquo actuels raquo (c-a-d enlien avec les crises que nous traversons) pour lesquels noussommes assez depourvus Autant de facteurs de morbidite qui ontamene les auteurs a insister dans leur introduction sur lrsquoimpor-tance drsquoune information pertinente aupres des groupes concernes

en vue drsquoune prise de conscience des risques encourus Et crsquoest icique plusieurs questions se posent

c

omment delivrer cette information sachant que le renonce-ment aux soins est frequent comme cela a ete rappele et quelrsquoetudiant en apparence nrsquoattend rien drsquoautrui

q

ue faudrait-il modifier dans la pratique quotidienne pour que

lrsquoinformation soit mieux recue et suscite lrsquointeret envers desreponses susceptibles notamment drsquoattenuer les consequencesdu malaise existentiel noyau central de nombreuses formes dedepressions nouvelles atypiques ou masquees souvent accom-pagnees de cette anxiete sous-jacente plus ou moins habilementdissimulee

e

n resume quelles conditions principales seraient a reunir pour

une approche plus laquo communicante raquo de lrsquoindividu et du groupe Sur ce point le recul de la clinique qui vient drsquoetre souligne estcontre-productif dans la mesure ou une analyse soigneuse detableaux cliniques specifiques faciliterait une meilleure com-prehension des causes profondes avec pour consequence ladelivrance drsquoinformations plus ajustees et plus conformes auxattentes comme aux vrais besoins

c

omment en fin de compte envisager une information a vertu

preventive voire pedagogique a orientation curative

Pour repondre a ces interrogations le triple tropisme de lapresentatrice manifeste pour lrsquohistoire la philosophie et laclinique presente bien des avantages Il est meme presqueindispensable

Impossible en effet de se desinteresser drsquoune histoire indivi-duelle indissociable de la grande histoire qui est aussi celle deshommes confrontes avec leur temps

Impossible pour la philosophe de ne pas srsquointerroger sur le senset lrsquoorigine du laquo mal-etre raquo generateur de troubles psychocom-portementaux

Impossible pour la clinicienne de ne pas chercher a etablir decorrespondance entre lrsquoexpression drsquoune souffrance aux aspectsmultiformes et trompeurs (a inventorier) et lrsquoorigine de ce qui faitquestion et que seul un vrai dialogue avec echange de mots quiparlent peut soupconner

Compte tenu de votre experience acquise dans lrsquoapproche degroupe de jeunes adultes en difficulte quelle recommandationprincipale feriez-vous pour passer du simple laquo relationnel raquoindolore ou stereotype a un laquo communicationnel raquo capable de leverces inhibitions qui participent au refus des soins et des soignants

Reponse du Rapporteurndash Merci beaucoup pour votre commen-taire qui souleve tres justement le besoin de defendre le principedrsquoune philosophie des soins dans les pratiques quotidiennes

Ma premiere recommandation est alimentee par mon expe-rience quotidienne aupres de jeunes adultes qui ne veulent pas etreseulement laquo gueris de leurs maux raquo apres avoir ete etiquetesemballes ou protocolises mais surtout soulages du laquo mal a penservivre raquo entre soi et les autres Banalement ce serait de valoriser cetterencontre humaine impossible a mesurer mais aisement facile adevelopper en favorisant le recrutement drsquoacteurs de terrainsdirectement en lien avec les jeunes plus que le developpement desservices de controle technocratique lois ou reglements Donc faireconfiance a lrsquohumain prendre des risques pour developper le sens etle gout des responsabilites de chacun et en particulier des jeunesvis-a-vis drsquoeux-memes et de tous encourager la recompense et lareconnaissance Plus concretement lrsquoidee serait de promouvoir

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398398

toutes les formes drsquoechanges et de partages transgenerationnelstransprofessionnels la mise en œuvre drsquooperations de communica-tions portees par des pairs et des peres toutes mediationsconfondues pour informer bien sur et travailler sur le depistageprecoce des vulnerabilites psychopathologiques mais aussi pourdevelopper chez chacun le sens de lrsquoautre lrsquoempathie et lrsquoaltruismeles meilleures armes contre la souffrance de lrsquoame et lrsquoenfermementsur soi Bref rappeler que lrsquoavenir est devant chacun de nous et qursquoilnous appartient

Dr M Massonndash Je vous felicite pour cette communication Jevous signale egalement un travail coordonne par Guy Goodwin(UK) non encore publie sur lrsquoutilisation du Mood DisorderQuestionnaire (MDQ) drsquoHirschfeld pour depister les troublesbipolaires dans une population drsquoetudiants drsquoOxford

DOI de lrsquoarticle original httpdxdoiorg101016jamp201304014

0003-4487$ ndash see front matter

httpdxdoiorg101016jamp201304015

Reponse du Rapporteurndash Une echelle que nous attendons doncavec impatience

Pr E Pewzner-Apeloig ndash Je suis personnellement frappee par lafrequence des appels emanant des adolescents eux-memes jeveux dire que souvent ils sont a lrsquoinitiative de la demande drsquoaide etil nrsquoest pas rare qursquoils contactent un therapeute avant meme drsquoavoirparle de leur projet de psychotherapie a leurs parents

Drsquoautre part vous avez parle de la difficulte drsquointegration quidites-vous est plus frequente chez des etudiants boursiers certesvous avez raison drsquoinvoquer les difficultes financieres les obligeanta avoir une activite remuneree parallelement a la poursuite deleurs etudes Mais il me semble qursquoil ne faut pas negliger la placedes facteurs socio-culturels dans la comprehension de leur mal-etre et de la faible estime de soi

  • Vulneacuterabiliteacutes psychiques chez les eacutetudiants agrave propos de deux enquecirctes en santeacute mentale agrave lrsquouniversiteacute Lyon 1
    • Introduction
    • Probleacutematique
      • Des constats alarmants sur la santeacute mentale des jeunes
      • Les derniegraveres donneacutees de la litteacuterature
      • La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain
        • Meacutethodologie
          • Des enquecirctes deacuteclaratives en ligne
          • Le contenu des questionnaires
          • Les eacutechelles psychopathologiques
          • Analyse statistique
            • Les reacutesultats
              • Profil de la population eacutetudieacutee
              • Vulneacuterabiliteacute agrave la deacutepression
              • Vulneacuterabiliteacute aux prodromes schizophreacuteniques
              • Vulneacuterabiliteacute aux troubles attentionnels
              • Le niveau drsquoestime de soi
              • Lrsquousage de soins et indicateurs de seacuteveacuteriteacute
                • Discussion et perspectives
                  • Comparaisons aux donneacutees externes
                  • eacuteclairage depuis nos donneacutees internes
                    • Conclusions et perspectives
                    • Deacuteclaration drsquointeacuterecircts
                    • Reacutefeacuterences
                      • Discussion
Page 4: Vulnérabilités psychiques chez les étudiants : à propos de deux enquêtes en santé mentale à l’université Lyon 1

Tableau 2Prevalences selon le genre ndash Enquetes Lyon 1 2011

Prevalences selon le genre ndash Enquetes Lyon 1 2011 ()

Echelles Femmes Hommes Chi2

BECK 13

Depression moderee 221 199 NS

Depression severe 70 78

Idees suicidaires 77 128 p00001

SOPS

Prodromes SZP 43 125 p00001

ASRS

Score 46 + impact 166 168 NS

Score 66 + impact 27 48

Estime de soi p = 0009

Tres faible 224 18

Faible 357 327

Moyenne 168 175

Forte 213 224

Tres forte 38 94

BECKSOPSASRS

Au moins un risque 103 193 p00001

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 395

44 Vulnerabilite aux troubles attentionnels

Parmi les enquetes une personne sur six declare souffrir dedifficultes drsquoattention ou drsquoorganisation impactant ses etudes etevoquant un TDAH Lorsque lrsquoon restreint les criteres positifs a 66cette susceptibilite touche pres drsquoune personne sur 20 avec deuxfois plus de garcons que de filles (Tableaux 1 et 2)

45 Le niveau drsquoestime de soi

La majorite des etudiants enquetes (54 ) presentent une estimede soi faible a tres faible avec un score moyen a 293 et un ecart-typede 59 (Tableau 1) et ce phenomene est plus marque chez les plusjeunes En revanche presque trois fois plus de garcons que de fillesrepondent aux criteres drsquoune tres forte estime de soi (Tableau 2)

46 Lrsquousage de soins et indicateurs de severite

Pres drsquoun etudiant sur cinq declare avoir deja beneficie drsquounsuivi psychologique et plus drsquoun quart a avoir deja eu recours a desmedicaments pour des difficultes nerveuses De plus les fillessemblent avoir plus souvent use de medicaments que les garconsdu meme age (Tableau 3)

Le croisement des donnees donne 133 drsquoetudiants (n = 252)qui presentent au moins un indicateur inquietant pour sa santementale a savoir soit un score de severite a la Beck [13] soit un

Tableau 3Taux de recours aux soins - Enquetes Lyon 1 2011

Taux de recours aux soins ndash Enquetes Lyon 1 2011 ()

Selon le genre Femmes Hommes Chi2

Suivi psychologique

Vie entiere 202 173 NS

Suivi en cours 65 62

Traitement medicamenteux

Vie entiere 324 209 p00001

Medication en cours 85 71 NS

Pour le sous-groupe a risque (BECK ou SOPS ou ASRS) n = 252

Jamais Soins interrompus Soin en cours

Suivi psychologique 594 215 191

Traitement medicamenteux 514 259 227

score positif a la SOPS soit un score de 66 avec impact sur lesetudes a la ASRS Le ratio est de presque deux garcons pour une fille(Tableau 2)

Toutefois la majorite de ces personnes a haut risque nrsquoauraitjamais beneficie de suivi et seulement 20 drsquoentre ellesmentionnent une prise en charge au moment de lrsquoenquete(Tableau 3)

5 Discussion et perspectives

Le choix methodologique drsquoune enquete participative basee surle volontariat et lrsquoanonymat constitue en soi un biais derecrutement Toutefois le taux superieur de reponses chez lesfilles moins touchees par les indicateurs de severite que lesgarcons semble contredire lrsquoidee drsquoun recrutement par suscepti-bilite personnelle

51 Comparaisons aux donnees externes

En ce qui concerne les risques depressifs nos resultats sontglobalement conformes aux resultats attendus En effet le tauxdrsquoepisodes depressifs majeurs en population generale sur uneannee oscille selon les etudes de 5 a 10 [17] Dans le meme sensles donnees actuelles sur les etudiants parisiens revelent un risquede depression caracterise pour 91 des personnes enquetees [13]Cette similitude concerne aussi les 10 de jeunes ayant eu penseesou projets suicidaires tels que rapportes en 2012 par lrsquoObservatoireexpertise et prevention pour la sante des etudiants [4]

De meme il est classiquement rapporte qursquoenviron 5 depersonnes adultes seraient sujettes aux deficits attentionnels avecune large predominance masculine [9]

La question des prodromes schizophreniques est pluscomplexe Si les dernieres estimations evaluent de facon con-vaincante la prevalence de la schizophrenie entre 04 et 07 dansle monde [10] la grande variabilite de methodes et de criteresselon les etudes rendent discutables lrsquoevaluation du taux depersonnes ayant un risque avere de transition vers la schizo-phrenie Celui-ci a recemment ete evaluee a 74100 000 personnes-annees pour une population londonienne de 16 a 35 ans avec uneequivalence pour les deux sexes [10] Nos indicateurs anormale-ment eleves refleteraient surtout une haute sensibilite de lrsquoechelleconcernant la schizotypie dont la prevalence generalementcomprise entre 5 a 10 pourrait atteindre pres de 30 desjeunes adultes en situation de grande precarite [19] De meme nosdonnees inhabituelles concernant la large preponderance mascu-line necessiteraient une investigation approfondie

Plus inquietants sont nos resultats en termes drsquoestime de soicompares a lrsquoetude de validite de lrsquoechelle en francais justementrealisee sur une population de jeunes etudiants et qui rapporte unscore moyen de 326 avec un ecart-type de 57 [20] Avec troispoints de moins nos etudiants sembleraient aujourdrsquohui plussouffrants

52 Eclairage depuis nos donnees internes

En depit de notre incitation a consulter aucune incidence surles demandes de soins nrsquoa emerge de ces enquetes en ligne Nousavons alors developpe deux recherchesactions autour descroyances concernant les soins psychiques par des etudiants enpsychologie aupres drsquoetudiants en science

Il est apparu que les jeunes ont une connaissance superficielleet confuse quant a la specificite de nos professions avec parfois undoute porte sur notre scientificite et nos competences Ces etudesont aussi revele la difference de representations et drsquoattentes ensante mentale entre les filles plus souvent dans un registrerelationnel et empathique et les garcons plus enclins a la

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398396

recherche de solutions sur un mode instrumental [5] Toutefois lefait de partager et transmettre un savoir entre pairs semble avoirfavorise une curiosite et un mouvement de confiance [7] Mieuxcette approche a effectivement permis a plusieurs etudiants defaire le pas vers la medecine preventive

6 Conclusions et perspectives

En somme plus de la moitie des etudiants enquetes presententune faible estime de soi et pres drsquoun etudiant sur trois estvulnerable a la depression Cette tendance est plus marquee chezles filles peut-etre plus sensibles et plus nuancees dans leurspropos Drsquoautre part plus drsquoun etudiant enquete sur dix presenteun risque de trouble psychique necessitant un soin et seulement20 de ceux-la beneficient drsquoune modalite de prise en charge Cerisque est plus souvent rapporte chez les garcons qui se montrentincisifs dans leurs reponses

Bien sur nos resultats ne sont pas exhaustifs et restent anuancer mais leur repetition et leur convergence permettent de lesconsiderer comme des indicateurs utiles sur le terrain Ainsi le faitdrsquoetre etudiant ne protege pas des risques en sante mentale et lesplus fragiles semblent echapper aux mesures actuelles deprevention

Alors qursquoune faible estime de soi potentialise les effets nefastesdu stress sur les eventuelles vulnerabilites sous-jacentes sastimulation pourrait contribuer a ameliorer la sante psychiqueen ameliorant certaines composantes anxieuses et depressivescomme le sentiment de culpabilite ou la crainte morbide delrsquoechec Ce serait retablir la relation circulaire drsquoautorenforcementreciproque entre estime de soi et performances scolaires [11]

Nous plaidons ainsi pour le developpement drsquoune politiqueactive drsquoinformation afin de faciliter lrsquoacces au soin precoce ensante mentale aupres des jeunes populations des le secondairemais aussi aupres des professionnels de premiere ligne comme lesenseignants les travailleurs sociaux les medecins generalistes etles infirmiers En ce sens un projet a mediatisation artistique avisee de destigmatisation est en cours de developpement pourlrsquoannee 2013 sous la forme drsquoun recit illustre sur la psychoseemergente chez le jeune adulte Lrsquoeclipse drsquoun ange

Declaration drsquointerets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits drsquointerets enrelation avec cet article

References

[1] Boujut E Koleck M Bruchon-Schweitzer M Bourgeois ML La sante mentalechez les etudiants enquete aupres drsquoune cohorte de 556 etudiants de 1re

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[3] EPSE (Observatoire expertise et prevention pour la sante des etudiants) Etudesur la sante mentale des etudiants premiers resultats 29 et 30 novembre2007 ENSP Consulte en ligne le 20 janvier 2013 sur URL httpwwwob-servatoire-epseorgenquetesenquete_maletrepdf

[4] EPSE (Observatoire expertise et prevention pour la sante des etudiants) Santeet condition de vie des etudiants Enquete nationale et synthese regionale2011ndash2012 Paris rue des ecoles 2012 299 p

[5] Estingoy P Boinot L Sauvade F Les psyrsquos vus par les etudiants une enquete surles representations sociales des professionnels en sante mentale 10e congresinternational de LrsquoAssociation de recherche et de soutien de soins en psychia-trie generale Paris 27ndash30 mars 2012

[6] Estingoy P Fort E Normand JC La sante mentale des etudiants A propos drsquouneenquete menee a lrsquouniversite Lyon 1 Congres de lrsquoencephale Paris 23ndash25 janvier 2013

[7] Estingoy P Regembal V Salome AG et al (2013) Representation des soins enpsychotherapie chez les etudiants recherche-action en sante mentale a lrsquouni-versite Lyon 1 Congres de lrsquoencephale Paris 23ndash25 janvier 2013

[8] Kessler RC et al The World Health Organization Adult ADHD Self-Report Scale(ASRS) a short screening scale for use in the general population Psychol Med200535245ndash56

[9] Kessler RC Adler M et al The prevalence and effects of adult attention deficithyperactivity disorder on work performance in a nationally representativesample of workers Occup Environ Med 200547565ndash72

[10] Kirkbride JB Stubbins C Jones PB Psychosis incidence through the prism ofearly intervention services BJP 2012200156ndash7 (Published online ahead ofprint December 22 2011 httpdoi 10 1192bjp bp 111 094896)

[11] Marsh HW Parker JW Determinants of student self-concept Is it better to be arelatively large fish in a small pond even if you donrsquot learn to swim as well JPers and Soc Psychol 198447213ndash23

[12] Miller TJ Mcglashan TH Rosen JL Somjee L Markovich PJ Stein K et alProspective diagnosis of the initial prodrome for schizophrenia based on thestructured interview for prodromal syndromes preliminary evidence ofinterrater reliability and predictive validity Am J Psychiatry 2002159863ndash5

[13] Morvan Y Louis A Brebant et al Prevalence des difficultes psychologiques desetudiants recours au generaliste ou au laquo psy raquo et retentissement sur le fonc-tionnement scolaire premiers resultats drsquoune enquete menee au service inter-universitaire de medecine preventive et de promotion de la sante de Paris aupresde 2886 etudiants 11e Congres de lrsquoEncephale Paris 23ndash25 janvier 2013

[14] Organisation mondiale de la sante Risque pour la sante des jeunes 64e

assemblee mondiale de la sante point 1316 28 avril 2011 WHA6425Consulte en ligne le 30 novembre 2012 sur URL httpappswhointgbebwhapdf_filesWHA64A64_25-frpdf

[15] Rosso-Debord V (deputee) Avis sur le theme des Formations superieures etrecherche universitaire ndash Vie etudiante Assemblee Nationale 11 octobre 2007no 277 80 p

[16] Saha S et al A systematic review of the prevalence of schizophrenia PLoS Med20052(5)e141 httpdoi101371journalpmed0020141

[17] Sapinho D et al Mesure de lrsquoepisode depressif majeur en population generaleenjeux contraintes limites BEH 200835ndash36314ndash7 laquo Sante mentale raquo

[18] Sautory O La macro CALMAR Redressement drsquoun echantillon par calage surmarge Serie des documents de travail de la Direction des statistiques demo-graphiques et sociales document F 9310 INSEE 1993 Disponible sur httpwwwinseefrfrmethodesdefaultasppage=outilscalmaraccueil_cal-marhtm MAJ 120313

[19] Vacher C Launay C Petitjean F Interet du concept de trouble schizotypiquedans la prevention de la schizophrenie Une etude menee dans une populationde jeunes adultes sans domicile fixe Ann Med Psychol 2001159330ndash5

[20] Vallieres EF Vallerand RJ Traduction et validation canadienne-francaise delrsquoechelle de lrsquoestime de soi de Rosenberg Int J Psychol 199025305ndash16

[21] Verger P et al Psychiatric disorders in students in six French universities 12-month prevalence comorbidity impairment and help-seeking Soc PsychiatrPsychiatric Epidemiol 201045189ndash99

P Estingoy et al Annales Medico

Discussion

-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 397

Dr J Birenbaumndash Parmi les etudiants acceptant une therapiequelles seraient les proportions respectives de ceux srsquoorientantplutot vers une therapie

a

nalytique

p

sychobiologique

c

ognitivo-comportementale

Reponse du Rapporteurndash Je nrsquoai pas ces chiffres mais il mesemble que la majorite des etudiants que nous voyons en Medecinepreventive est plutot demandeuse drsquoune demarche integrative et leconcept de psychotherapie de soutien compris comme uneapproche humaniste srsquoappuyant sur le renforcement des compe-tences propres des personnes en soins associant aussi bien desreferences psychodynamique que comportementale cognitive ouautres En deuxieme lieu lorsque sont proposees et expliqueesles diverses modalites possibles viennent les demandes plusspecifiques de TCC puis lrsquoapproche psychocorporelle Enfin uncertain nombre de personnes sont aussi en mesure de poser uneproblematique de type analytique et sont alors orientees vers cetype de prise en charge La demande pharmacologique est de faitexceptionnelle

Dr P Moutinndash Votre communication me paraıt tres inter-essante principalement dans lrsquointeret que vous portez a lrsquoetude dela vulnerabilite En effet comme lrsquoa decrit de facon detaillee le2 janvier dernier dans un quotidien du matin le docteur SamuelLepastier psychiatre psychanalyste la tendance est actuellementdans les medias a une diffusion excessive des etats lies a dessituations de stress Le risque est alors au moment de la prise encharge de tenir compte uniquement des facteurs exterieurs alrsquoorigine de lrsquoetat en oubliant ceux lies a la personne

Reponse du Rapporteurndash Merci Oui en effet nos interventionsde prevention face au stress chez les etudiants precisent combien lapersonnalite et ses capacites drsquoadaptation fruits de son histoire deses representations psychiques de son temperament de ses choixdeterminent en realite ce qui peut devenir pathologique ou non

Docteur J-G Veyratndash Merci pour cette tres interessante etudeUne question je ne crois pas que vous ayez pratique un testdrsquoalexithymie dans votre corpus Il aurait pu etre eclairant decomparer avec le resultat de Loas trouvant 17 de sujetalexithymiques dans son echantillon drsquoetudiants Bien sur ces17 ne sont pas consideres comme pathologiques mais crsquoest chezeux que se recruteront entre autres les futurs addictifs

Reponse du Rapporteurndash Nous nrsquoavons pas recherche lesalexithymiques effectivement porteurs drsquoune vulnerabilite trans-nosographique a des difficultes psychiques ou a des risquescomportementaux tels que lrsquoaddiction Crsquoest une piste a creuser

Dr P Houillonndash Nous venons drsquoassister a un etat des lieux sur lasituation specifique des etudiants en particulier sur leur vulner-abilite qui est analysee et chiffree Celle-ci est reliee a lrsquoambiancede stress drsquoune epoque de grande incertitude drsquoattente anxieuse dechangements imprevisibles et pour lesquels personne ne peut quedonc etablir de strategie En meme temps emerge en filigrane atravers ce qui vient drsquoetre dit lrsquoidee drsquoune opposition entre destroubles laquo nomenclatures raquo entraınant des reponses surtoutpsychopharmacologiques et des troubles laquo actuels raquo (c-a-d enlien avec les crises que nous traversons) pour lesquels noussommes assez depourvus Autant de facteurs de morbidite qui ontamene les auteurs a insister dans leur introduction sur lrsquoimpor-tance drsquoune information pertinente aupres des groupes concernes

en vue drsquoune prise de conscience des risques encourus Et crsquoest icique plusieurs questions se posent

c

omment delivrer cette information sachant que le renonce-ment aux soins est frequent comme cela a ete rappele et quelrsquoetudiant en apparence nrsquoattend rien drsquoautrui

q

ue faudrait-il modifier dans la pratique quotidienne pour que

lrsquoinformation soit mieux recue et suscite lrsquointeret envers desreponses susceptibles notamment drsquoattenuer les consequencesdu malaise existentiel noyau central de nombreuses formes dedepressions nouvelles atypiques ou masquees souvent accom-pagnees de cette anxiete sous-jacente plus ou moins habilementdissimulee

e

n resume quelles conditions principales seraient a reunir pour

une approche plus laquo communicante raquo de lrsquoindividu et du groupe Sur ce point le recul de la clinique qui vient drsquoetre souligne estcontre-productif dans la mesure ou une analyse soigneuse detableaux cliniques specifiques faciliterait une meilleure com-prehension des causes profondes avec pour consequence ladelivrance drsquoinformations plus ajustees et plus conformes auxattentes comme aux vrais besoins

c

omment en fin de compte envisager une information a vertu

preventive voire pedagogique a orientation curative

Pour repondre a ces interrogations le triple tropisme de lapresentatrice manifeste pour lrsquohistoire la philosophie et laclinique presente bien des avantages Il est meme presqueindispensable

Impossible en effet de se desinteresser drsquoune histoire indivi-duelle indissociable de la grande histoire qui est aussi celle deshommes confrontes avec leur temps

Impossible pour la philosophe de ne pas srsquointerroger sur le senset lrsquoorigine du laquo mal-etre raquo generateur de troubles psychocom-portementaux

Impossible pour la clinicienne de ne pas chercher a etablir decorrespondance entre lrsquoexpression drsquoune souffrance aux aspectsmultiformes et trompeurs (a inventorier) et lrsquoorigine de ce qui faitquestion et que seul un vrai dialogue avec echange de mots quiparlent peut soupconner

Compte tenu de votre experience acquise dans lrsquoapproche degroupe de jeunes adultes en difficulte quelle recommandationprincipale feriez-vous pour passer du simple laquo relationnel raquoindolore ou stereotype a un laquo communicationnel raquo capable de leverces inhibitions qui participent au refus des soins et des soignants

Reponse du Rapporteurndash Merci beaucoup pour votre commen-taire qui souleve tres justement le besoin de defendre le principedrsquoune philosophie des soins dans les pratiques quotidiennes

Ma premiere recommandation est alimentee par mon expe-rience quotidienne aupres de jeunes adultes qui ne veulent pas etreseulement laquo gueris de leurs maux raquo apres avoir ete etiquetesemballes ou protocolises mais surtout soulages du laquo mal a penservivre raquo entre soi et les autres Banalement ce serait de valoriser cetterencontre humaine impossible a mesurer mais aisement facile adevelopper en favorisant le recrutement drsquoacteurs de terrainsdirectement en lien avec les jeunes plus que le developpement desservices de controle technocratique lois ou reglements Donc faireconfiance a lrsquohumain prendre des risques pour developper le sens etle gout des responsabilites de chacun et en particulier des jeunesvis-a-vis drsquoeux-memes et de tous encourager la recompense et lareconnaissance Plus concretement lrsquoidee serait de promouvoir

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398398

toutes les formes drsquoechanges et de partages transgenerationnelstransprofessionnels la mise en œuvre drsquooperations de communica-tions portees par des pairs et des peres toutes mediationsconfondues pour informer bien sur et travailler sur le depistageprecoce des vulnerabilites psychopathologiques mais aussi pourdevelopper chez chacun le sens de lrsquoautre lrsquoempathie et lrsquoaltruismeles meilleures armes contre la souffrance de lrsquoame et lrsquoenfermementsur soi Bref rappeler que lrsquoavenir est devant chacun de nous et qursquoilnous appartient

Dr M Massonndash Je vous felicite pour cette communication Jevous signale egalement un travail coordonne par Guy Goodwin(UK) non encore publie sur lrsquoutilisation du Mood DisorderQuestionnaire (MDQ) drsquoHirschfeld pour depister les troublesbipolaires dans une population drsquoetudiants drsquoOxford

DOI de lrsquoarticle original httpdxdoiorg101016jamp201304014

0003-4487$ ndash see front matter

httpdxdoiorg101016jamp201304015

Reponse du Rapporteurndash Une echelle que nous attendons doncavec impatience

Pr E Pewzner-Apeloig ndash Je suis personnellement frappee par lafrequence des appels emanant des adolescents eux-memes jeveux dire que souvent ils sont a lrsquoinitiative de la demande drsquoaide etil nrsquoest pas rare qursquoils contactent un therapeute avant meme drsquoavoirparle de leur projet de psychotherapie a leurs parents

Drsquoautre part vous avez parle de la difficulte drsquointegration quidites-vous est plus frequente chez des etudiants boursiers certesvous avez raison drsquoinvoquer les difficultes financieres les obligeanta avoir une activite remuneree parallelement a la poursuite deleurs etudes Mais il me semble qursquoil ne faut pas negliger la placedes facteurs socio-culturels dans la comprehension de leur mal-etre et de la faible estime de soi

  • Vulneacuterabiliteacutes psychiques chez les eacutetudiants agrave propos de deux enquecirctes en santeacute mentale agrave lrsquouniversiteacute Lyon 1
    • Introduction
    • Probleacutematique
      • Des constats alarmants sur la santeacute mentale des jeunes
      • Les derniegraveres donneacutees de la litteacuterature
      • La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain
        • Meacutethodologie
          • Des enquecirctes deacuteclaratives en ligne
          • Le contenu des questionnaires
          • Les eacutechelles psychopathologiques
          • Analyse statistique
            • Les reacutesultats
              • Profil de la population eacutetudieacutee
              • Vulneacuterabiliteacute agrave la deacutepression
              • Vulneacuterabiliteacute aux prodromes schizophreacuteniques
              • Vulneacuterabiliteacute aux troubles attentionnels
              • Le niveau drsquoestime de soi
              • Lrsquousage de soins et indicateurs de seacuteveacuteriteacute
                • Discussion et perspectives
                  • Comparaisons aux donneacutees externes
                  • eacuteclairage depuis nos donneacutees internes
                    • Conclusions et perspectives
                    • Deacuteclaration drsquointeacuterecircts
                    • Reacutefeacuterences
                      • Discussion
Page 5: Vulnérabilités psychiques chez les étudiants : à propos de deux enquêtes en santé mentale à l’université Lyon 1

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398396

recherche de solutions sur un mode instrumental [5] Toutefois lefait de partager et transmettre un savoir entre pairs semble avoirfavorise une curiosite et un mouvement de confiance [7] Mieuxcette approche a effectivement permis a plusieurs etudiants defaire le pas vers la medecine preventive

6 Conclusions et perspectives

En somme plus de la moitie des etudiants enquetes presententune faible estime de soi et pres drsquoun etudiant sur trois estvulnerable a la depression Cette tendance est plus marquee chezles filles peut-etre plus sensibles et plus nuancees dans leurspropos Drsquoautre part plus drsquoun etudiant enquete sur dix presenteun risque de trouble psychique necessitant un soin et seulement20 de ceux-la beneficient drsquoune modalite de prise en charge Cerisque est plus souvent rapporte chez les garcons qui se montrentincisifs dans leurs reponses

Bien sur nos resultats ne sont pas exhaustifs et restent anuancer mais leur repetition et leur convergence permettent de lesconsiderer comme des indicateurs utiles sur le terrain Ainsi le faitdrsquoetre etudiant ne protege pas des risques en sante mentale et lesplus fragiles semblent echapper aux mesures actuelles deprevention

Alors qursquoune faible estime de soi potentialise les effets nefastesdu stress sur les eventuelles vulnerabilites sous-jacentes sastimulation pourrait contribuer a ameliorer la sante psychiqueen ameliorant certaines composantes anxieuses et depressivescomme le sentiment de culpabilite ou la crainte morbide delrsquoechec Ce serait retablir la relation circulaire drsquoautorenforcementreciproque entre estime de soi et performances scolaires [11]

Nous plaidons ainsi pour le developpement drsquoune politiqueactive drsquoinformation afin de faciliter lrsquoacces au soin precoce ensante mentale aupres des jeunes populations des le secondairemais aussi aupres des professionnels de premiere ligne comme lesenseignants les travailleurs sociaux les medecins generalistes etles infirmiers En ce sens un projet a mediatisation artistique avisee de destigmatisation est en cours de developpement pourlrsquoannee 2013 sous la forme drsquoun recit illustre sur la psychoseemergente chez le jeune adulte Lrsquoeclipse drsquoun ange

Declaration drsquointerets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits drsquointerets enrelation avec cet article

References

[1] Boujut E Koleck M Bruchon-Schweitzer M Bourgeois ML La sante mentalechez les etudiants enquete aupres drsquoune cohorte de 556 etudiants de 1re

annee Ann Med Psychol 2009167662ndash8

[2] Collet L Cottraux J Inventaire abrege de la depression de Beck (13 items) etude de la validite concurrente avec les echelles de Hamilton et de ralentisse-ment de Widlocher LrsquoEncephale 19861277ndash9

[3] EPSE (Observatoire expertise et prevention pour la sante des etudiants) Etudesur la sante mentale des etudiants premiers resultats 29 et 30 novembre2007 ENSP Consulte en ligne le 20 janvier 2013 sur URL httpwwwob-servatoire-epseorgenquetesenquete_maletrepdf

[4] EPSE (Observatoire expertise et prevention pour la sante des etudiants) Santeet condition de vie des etudiants Enquete nationale et synthese regionale2011ndash2012 Paris rue des ecoles 2012 299 p

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[6] Estingoy P Fort E Normand JC La sante mentale des etudiants A propos drsquouneenquete menee a lrsquouniversite Lyon 1 Congres de lrsquoencephale Paris 23ndash25 janvier 2013

[7] Estingoy P Regembal V Salome AG et al (2013) Representation des soins enpsychotherapie chez les etudiants recherche-action en sante mentale a lrsquouni-versite Lyon 1 Congres de lrsquoencephale Paris 23ndash25 janvier 2013

[8] Kessler RC et al The World Health Organization Adult ADHD Self-Report Scale(ASRS) a short screening scale for use in the general population Psychol Med200535245ndash56

[9] Kessler RC Adler M et al The prevalence and effects of adult attention deficithyperactivity disorder on work performance in a nationally representativesample of workers Occup Environ Med 200547565ndash72

[10] Kirkbride JB Stubbins C Jones PB Psychosis incidence through the prism ofearly intervention services BJP 2012200156ndash7 (Published online ahead ofprint December 22 2011 httpdoi 10 1192bjp bp 111 094896)

[11] Marsh HW Parker JW Determinants of student self-concept Is it better to be arelatively large fish in a small pond even if you donrsquot learn to swim as well JPers and Soc Psychol 198447213ndash23

[12] Miller TJ Mcglashan TH Rosen JL Somjee L Markovich PJ Stein K et alProspective diagnosis of the initial prodrome for schizophrenia based on thestructured interview for prodromal syndromes preliminary evidence ofinterrater reliability and predictive validity Am J Psychiatry 2002159863ndash5

[13] Morvan Y Louis A Brebant et al Prevalence des difficultes psychologiques desetudiants recours au generaliste ou au laquo psy raquo et retentissement sur le fonc-tionnement scolaire premiers resultats drsquoune enquete menee au service inter-universitaire de medecine preventive et de promotion de la sante de Paris aupresde 2886 etudiants 11e Congres de lrsquoEncephale Paris 23ndash25 janvier 2013

[14] Organisation mondiale de la sante Risque pour la sante des jeunes 64e

assemblee mondiale de la sante point 1316 28 avril 2011 WHA6425Consulte en ligne le 30 novembre 2012 sur URL httpappswhointgbebwhapdf_filesWHA64A64_25-frpdf

[15] Rosso-Debord V (deputee) Avis sur le theme des Formations superieures etrecherche universitaire ndash Vie etudiante Assemblee Nationale 11 octobre 2007no 277 80 p

[16] Saha S et al A systematic review of the prevalence of schizophrenia PLoS Med20052(5)e141 httpdoi101371journalpmed0020141

[17] Sapinho D et al Mesure de lrsquoepisode depressif majeur en population generaleenjeux contraintes limites BEH 200835ndash36314ndash7 laquo Sante mentale raquo

[18] Sautory O La macro CALMAR Redressement drsquoun echantillon par calage surmarge Serie des documents de travail de la Direction des statistiques demo-graphiques et sociales document F 9310 INSEE 1993 Disponible sur httpwwwinseefrfrmethodesdefaultasppage=outilscalmaraccueil_cal-marhtm MAJ 120313

[19] Vacher C Launay C Petitjean F Interet du concept de trouble schizotypiquedans la prevention de la schizophrenie Une etude menee dans une populationde jeunes adultes sans domicile fixe Ann Med Psychol 2001159330ndash5

[20] Vallieres EF Vallerand RJ Traduction et validation canadienne-francaise delrsquoechelle de lrsquoestime de soi de Rosenberg Int J Psychol 199025305ndash16

[21] Verger P et al Psychiatric disorders in students in six French universities 12-month prevalence comorbidity impairment and help-seeking Soc PsychiatrPsychiatric Epidemiol 201045189ndash99

P Estingoy et al Annales Medico

Discussion

-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 397

Dr J Birenbaumndash Parmi les etudiants acceptant une therapiequelles seraient les proportions respectives de ceux srsquoorientantplutot vers une therapie

a

nalytique

p

sychobiologique

c

ognitivo-comportementale

Reponse du Rapporteurndash Je nrsquoai pas ces chiffres mais il mesemble que la majorite des etudiants que nous voyons en Medecinepreventive est plutot demandeuse drsquoune demarche integrative et leconcept de psychotherapie de soutien compris comme uneapproche humaniste srsquoappuyant sur le renforcement des compe-tences propres des personnes en soins associant aussi bien desreferences psychodynamique que comportementale cognitive ouautres En deuxieme lieu lorsque sont proposees et expliqueesles diverses modalites possibles viennent les demandes plusspecifiques de TCC puis lrsquoapproche psychocorporelle Enfin uncertain nombre de personnes sont aussi en mesure de poser uneproblematique de type analytique et sont alors orientees vers cetype de prise en charge La demande pharmacologique est de faitexceptionnelle

Dr P Moutinndash Votre communication me paraıt tres inter-essante principalement dans lrsquointeret que vous portez a lrsquoetude dela vulnerabilite En effet comme lrsquoa decrit de facon detaillee le2 janvier dernier dans un quotidien du matin le docteur SamuelLepastier psychiatre psychanalyste la tendance est actuellementdans les medias a une diffusion excessive des etats lies a dessituations de stress Le risque est alors au moment de la prise encharge de tenir compte uniquement des facteurs exterieurs alrsquoorigine de lrsquoetat en oubliant ceux lies a la personne

Reponse du Rapporteurndash Merci Oui en effet nos interventionsde prevention face au stress chez les etudiants precisent combien lapersonnalite et ses capacites drsquoadaptation fruits de son histoire deses representations psychiques de son temperament de ses choixdeterminent en realite ce qui peut devenir pathologique ou non

Docteur J-G Veyratndash Merci pour cette tres interessante etudeUne question je ne crois pas que vous ayez pratique un testdrsquoalexithymie dans votre corpus Il aurait pu etre eclairant decomparer avec le resultat de Loas trouvant 17 de sujetalexithymiques dans son echantillon drsquoetudiants Bien sur ces17 ne sont pas consideres comme pathologiques mais crsquoest chezeux que se recruteront entre autres les futurs addictifs

Reponse du Rapporteurndash Nous nrsquoavons pas recherche lesalexithymiques effectivement porteurs drsquoune vulnerabilite trans-nosographique a des difficultes psychiques ou a des risquescomportementaux tels que lrsquoaddiction Crsquoest une piste a creuser

Dr P Houillonndash Nous venons drsquoassister a un etat des lieux sur lasituation specifique des etudiants en particulier sur leur vulner-abilite qui est analysee et chiffree Celle-ci est reliee a lrsquoambiancede stress drsquoune epoque de grande incertitude drsquoattente anxieuse dechangements imprevisibles et pour lesquels personne ne peut quedonc etablir de strategie En meme temps emerge en filigrane atravers ce qui vient drsquoetre dit lrsquoidee drsquoune opposition entre destroubles laquo nomenclatures raquo entraınant des reponses surtoutpsychopharmacologiques et des troubles laquo actuels raquo (c-a-d enlien avec les crises que nous traversons) pour lesquels noussommes assez depourvus Autant de facteurs de morbidite qui ontamene les auteurs a insister dans leur introduction sur lrsquoimpor-tance drsquoune information pertinente aupres des groupes concernes

en vue drsquoune prise de conscience des risques encourus Et crsquoest icique plusieurs questions se posent

c

omment delivrer cette information sachant que le renonce-ment aux soins est frequent comme cela a ete rappele et quelrsquoetudiant en apparence nrsquoattend rien drsquoautrui

q

ue faudrait-il modifier dans la pratique quotidienne pour que

lrsquoinformation soit mieux recue et suscite lrsquointeret envers desreponses susceptibles notamment drsquoattenuer les consequencesdu malaise existentiel noyau central de nombreuses formes dedepressions nouvelles atypiques ou masquees souvent accom-pagnees de cette anxiete sous-jacente plus ou moins habilementdissimulee

e

n resume quelles conditions principales seraient a reunir pour

une approche plus laquo communicante raquo de lrsquoindividu et du groupe Sur ce point le recul de la clinique qui vient drsquoetre souligne estcontre-productif dans la mesure ou une analyse soigneuse detableaux cliniques specifiques faciliterait une meilleure com-prehension des causes profondes avec pour consequence ladelivrance drsquoinformations plus ajustees et plus conformes auxattentes comme aux vrais besoins

c

omment en fin de compte envisager une information a vertu

preventive voire pedagogique a orientation curative

Pour repondre a ces interrogations le triple tropisme de lapresentatrice manifeste pour lrsquohistoire la philosophie et laclinique presente bien des avantages Il est meme presqueindispensable

Impossible en effet de se desinteresser drsquoune histoire indivi-duelle indissociable de la grande histoire qui est aussi celle deshommes confrontes avec leur temps

Impossible pour la philosophe de ne pas srsquointerroger sur le senset lrsquoorigine du laquo mal-etre raquo generateur de troubles psychocom-portementaux

Impossible pour la clinicienne de ne pas chercher a etablir decorrespondance entre lrsquoexpression drsquoune souffrance aux aspectsmultiformes et trompeurs (a inventorier) et lrsquoorigine de ce qui faitquestion et que seul un vrai dialogue avec echange de mots quiparlent peut soupconner

Compte tenu de votre experience acquise dans lrsquoapproche degroupe de jeunes adultes en difficulte quelle recommandationprincipale feriez-vous pour passer du simple laquo relationnel raquoindolore ou stereotype a un laquo communicationnel raquo capable de leverces inhibitions qui participent au refus des soins et des soignants

Reponse du Rapporteurndash Merci beaucoup pour votre commen-taire qui souleve tres justement le besoin de defendre le principedrsquoune philosophie des soins dans les pratiques quotidiennes

Ma premiere recommandation est alimentee par mon expe-rience quotidienne aupres de jeunes adultes qui ne veulent pas etreseulement laquo gueris de leurs maux raquo apres avoir ete etiquetesemballes ou protocolises mais surtout soulages du laquo mal a penservivre raquo entre soi et les autres Banalement ce serait de valoriser cetterencontre humaine impossible a mesurer mais aisement facile adevelopper en favorisant le recrutement drsquoacteurs de terrainsdirectement en lien avec les jeunes plus que le developpement desservices de controle technocratique lois ou reglements Donc faireconfiance a lrsquohumain prendre des risques pour developper le sens etle gout des responsabilites de chacun et en particulier des jeunesvis-a-vis drsquoeux-memes et de tous encourager la recompense et lareconnaissance Plus concretement lrsquoidee serait de promouvoir

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398398

toutes les formes drsquoechanges et de partages transgenerationnelstransprofessionnels la mise en œuvre drsquooperations de communica-tions portees par des pairs et des peres toutes mediationsconfondues pour informer bien sur et travailler sur le depistageprecoce des vulnerabilites psychopathologiques mais aussi pourdevelopper chez chacun le sens de lrsquoautre lrsquoempathie et lrsquoaltruismeles meilleures armes contre la souffrance de lrsquoame et lrsquoenfermementsur soi Bref rappeler que lrsquoavenir est devant chacun de nous et qursquoilnous appartient

Dr M Massonndash Je vous felicite pour cette communication Jevous signale egalement un travail coordonne par Guy Goodwin(UK) non encore publie sur lrsquoutilisation du Mood DisorderQuestionnaire (MDQ) drsquoHirschfeld pour depister les troublesbipolaires dans une population drsquoetudiants drsquoOxford

DOI de lrsquoarticle original httpdxdoiorg101016jamp201304014

0003-4487$ ndash see front matter

httpdxdoiorg101016jamp201304015

Reponse du Rapporteurndash Une echelle que nous attendons doncavec impatience

Pr E Pewzner-Apeloig ndash Je suis personnellement frappee par lafrequence des appels emanant des adolescents eux-memes jeveux dire que souvent ils sont a lrsquoinitiative de la demande drsquoaide etil nrsquoest pas rare qursquoils contactent un therapeute avant meme drsquoavoirparle de leur projet de psychotherapie a leurs parents

Drsquoautre part vous avez parle de la difficulte drsquointegration quidites-vous est plus frequente chez des etudiants boursiers certesvous avez raison drsquoinvoquer les difficultes financieres les obligeanta avoir une activite remuneree parallelement a la poursuite deleurs etudes Mais il me semble qursquoil ne faut pas negliger la placedes facteurs socio-culturels dans la comprehension de leur mal-etre et de la faible estime de soi

  • Vulneacuterabiliteacutes psychiques chez les eacutetudiants agrave propos de deux enquecirctes en santeacute mentale agrave lrsquouniversiteacute Lyon 1
    • Introduction
    • Probleacutematique
      • Des constats alarmants sur la santeacute mentale des jeunes
      • Les derniegraveres donneacutees de la litteacuterature
      • La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain
        • Meacutethodologie
          • Des enquecirctes deacuteclaratives en ligne
          • Le contenu des questionnaires
          • Les eacutechelles psychopathologiques
          • Analyse statistique
            • Les reacutesultats
              • Profil de la population eacutetudieacutee
              • Vulneacuterabiliteacute agrave la deacutepression
              • Vulneacuterabiliteacute aux prodromes schizophreacuteniques
              • Vulneacuterabiliteacute aux troubles attentionnels
              • Le niveau drsquoestime de soi
              • Lrsquousage de soins et indicateurs de seacuteveacuteriteacute
                • Discussion et perspectives
                  • Comparaisons aux donneacutees externes
                  • eacuteclairage depuis nos donneacutees internes
                    • Conclusions et perspectives
                    • Deacuteclaration drsquointeacuterecircts
                    • Reacutefeacuterences
                      • Discussion
Page 6: Vulnérabilités psychiques chez les étudiants : à propos de deux enquêtes en santé mentale à l’université Lyon 1

P Estingoy et al Annales Medico

Discussion

-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398 397

Dr J Birenbaumndash Parmi les etudiants acceptant une therapiequelles seraient les proportions respectives de ceux srsquoorientantplutot vers une therapie

a

nalytique

p

sychobiologique

c

ognitivo-comportementale

Reponse du Rapporteurndash Je nrsquoai pas ces chiffres mais il mesemble que la majorite des etudiants que nous voyons en Medecinepreventive est plutot demandeuse drsquoune demarche integrative et leconcept de psychotherapie de soutien compris comme uneapproche humaniste srsquoappuyant sur le renforcement des compe-tences propres des personnes en soins associant aussi bien desreferences psychodynamique que comportementale cognitive ouautres En deuxieme lieu lorsque sont proposees et expliqueesles diverses modalites possibles viennent les demandes plusspecifiques de TCC puis lrsquoapproche psychocorporelle Enfin uncertain nombre de personnes sont aussi en mesure de poser uneproblematique de type analytique et sont alors orientees vers cetype de prise en charge La demande pharmacologique est de faitexceptionnelle

Dr P Moutinndash Votre communication me paraıt tres inter-essante principalement dans lrsquointeret que vous portez a lrsquoetude dela vulnerabilite En effet comme lrsquoa decrit de facon detaillee le2 janvier dernier dans un quotidien du matin le docteur SamuelLepastier psychiatre psychanalyste la tendance est actuellementdans les medias a une diffusion excessive des etats lies a dessituations de stress Le risque est alors au moment de la prise encharge de tenir compte uniquement des facteurs exterieurs alrsquoorigine de lrsquoetat en oubliant ceux lies a la personne

Reponse du Rapporteurndash Merci Oui en effet nos interventionsde prevention face au stress chez les etudiants precisent combien lapersonnalite et ses capacites drsquoadaptation fruits de son histoire deses representations psychiques de son temperament de ses choixdeterminent en realite ce qui peut devenir pathologique ou non

Docteur J-G Veyratndash Merci pour cette tres interessante etudeUne question je ne crois pas que vous ayez pratique un testdrsquoalexithymie dans votre corpus Il aurait pu etre eclairant decomparer avec le resultat de Loas trouvant 17 de sujetalexithymiques dans son echantillon drsquoetudiants Bien sur ces17 ne sont pas consideres comme pathologiques mais crsquoest chezeux que se recruteront entre autres les futurs addictifs

Reponse du Rapporteurndash Nous nrsquoavons pas recherche lesalexithymiques effectivement porteurs drsquoune vulnerabilite trans-nosographique a des difficultes psychiques ou a des risquescomportementaux tels que lrsquoaddiction Crsquoest une piste a creuser

Dr P Houillonndash Nous venons drsquoassister a un etat des lieux sur lasituation specifique des etudiants en particulier sur leur vulner-abilite qui est analysee et chiffree Celle-ci est reliee a lrsquoambiancede stress drsquoune epoque de grande incertitude drsquoattente anxieuse dechangements imprevisibles et pour lesquels personne ne peut quedonc etablir de strategie En meme temps emerge en filigrane atravers ce qui vient drsquoetre dit lrsquoidee drsquoune opposition entre destroubles laquo nomenclatures raquo entraınant des reponses surtoutpsychopharmacologiques et des troubles laquo actuels raquo (c-a-d enlien avec les crises que nous traversons) pour lesquels noussommes assez depourvus Autant de facteurs de morbidite qui ontamene les auteurs a insister dans leur introduction sur lrsquoimpor-tance drsquoune information pertinente aupres des groupes concernes

en vue drsquoune prise de conscience des risques encourus Et crsquoest icique plusieurs questions se posent

c

omment delivrer cette information sachant que le renonce-ment aux soins est frequent comme cela a ete rappele et quelrsquoetudiant en apparence nrsquoattend rien drsquoautrui

q

ue faudrait-il modifier dans la pratique quotidienne pour que

lrsquoinformation soit mieux recue et suscite lrsquointeret envers desreponses susceptibles notamment drsquoattenuer les consequencesdu malaise existentiel noyau central de nombreuses formes dedepressions nouvelles atypiques ou masquees souvent accom-pagnees de cette anxiete sous-jacente plus ou moins habilementdissimulee

e

n resume quelles conditions principales seraient a reunir pour

une approche plus laquo communicante raquo de lrsquoindividu et du groupe Sur ce point le recul de la clinique qui vient drsquoetre souligne estcontre-productif dans la mesure ou une analyse soigneuse detableaux cliniques specifiques faciliterait une meilleure com-prehension des causes profondes avec pour consequence ladelivrance drsquoinformations plus ajustees et plus conformes auxattentes comme aux vrais besoins

c

omment en fin de compte envisager une information a vertu

preventive voire pedagogique a orientation curative

Pour repondre a ces interrogations le triple tropisme de lapresentatrice manifeste pour lrsquohistoire la philosophie et laclinique presente bien des avantages Il est meme presqueindispensable

Impossible en effet de se desinteresser drsquoune histoire indivi-duelle indissociable de la grande histoire qui est aussi celle deshommes confrontes avec leur temps

Impossible pour la philosophe de ne pas srsquointerroger sur le senset lrsquoorigine du laquo mal-etre raquo generateur de troubles psychocom-portementaux

Impossible pour la clinicienne de ne pas chercher a etablir decorrespondance entre lrsquoexpression drsquoune souffrance aux aspectsmultiformes et trompeurs (a inventorier) et lrsquoorigine de ce qui faitquestion et que seul un vrai dialogue avec echange de mots quiparlent peut soupconner

Compte tenu de votre experience acquise dans lrsquoapproche degroupe de jeunes adultes en difficulte quelle recommandationprincipale feriez-vous pour passer du simple laquo relationnel raquoindolore ou stereotype a un laquo communicationnel raquo capable de leverces inhibitions qui participent au refus des soins et des soignants

Reponse du Rapporteurndash Merci beaucoup pour votre commen-taire qui souleve tres justement le besoin de defendre le principedrsquoune philosophie des soins dans les pratiques quotidiennes

Ma premiere recommandation est alimentee par mon expe-rience quotidienne aupres de jeunes adultes qui ne veulent pas etreseulement laquo gueris de leurs maux raquo apres avoir ete etiquetesemballes ou protocolises mais surtout soulages du laquo mal a penservivre raquo entre soi et les autres Banalement ce serait de valoriser cetterencontre humaine impossible a mesurer mais aisement facile adevelopper en favorisant le recrutement drsquoacteurs de terrainsdirectement en lien avec les jeunes plus que le developpement desservices de controle technocratique lois ou reglements Donc faireconfiance a lrsquohumain prendre des risques pour developper le sens etle gout des responsabilites de chacun et en particulier des jeunesvis-a-vis drsquoeux-memes et de tous encourager la recompense et lareconnaissance Plus concretement lrsquoidee serait de promouvoir

P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398398

toutes les formes drsquoechanges et de partages transgenerationnelstransprofessionnels la mise en œuvre drsquooperations de communica-tions portees par des pairs et des peres toutes mediationsconfondues pour informer bien sur et travailler sur le depistageprecoce des vulnerabilites psychopathologiques mais aussi pourdevelopper chez chacun le sens de lrsquoautre lrsquoempathie et lrsquoaltruismeles meilleures armes contre la souffrance de lrsquoame et lrsquoenfermementsur soi Bref rappeler que lrsquoavenir est devant chacun de nous et qursquoilnous appartient

Dr M Massonndash Je vous felicite pour cette communication Jevous signale egalement un travail coordonne par Guy Goodwin(UK) non encore publie sur lrsquoutilisation du Mood DisorderQuestionnaire (MDQ) drsquoHirschfeld pour depister les troublesbipolaires dans une population drsquoetudiants drsquoOxford

DOI de lrsquoarticle original httpdxdoiorg101016jamp201304014

0003-4487$ ndash see front matter

httpdxdoiorg101016jamp201304015

Reponse du Rapporteurndash Une echelle que nous attendons doncavec impatience

Pr E Pewzner-Apeloig ndash Je suis personnellement frappee par lafrequence des appels emanant des adolescents eux-memes jeveux dire que souvent ils sont a lrsquoinitiative de la demande drsquoaide etil nrsquoest pas rare qursquoils contactent un therapeute avant meme drsquoavoirparle de leur projet de psychotherapie a leurs parents

Drsquoautre part vous avez parle de la difficulte drsquointegration quidites-vous est plus frequente chez des etudiants boursiers certesvous avez raison drsquoinvoquer les difficultes financieres les obligeanta avoir une activite remuneree parallelement a la poursuite deleurs etudes Mais il me semble qursquoil ne faut pas negliger la placedes facteurs socio-culturels dans la comprehension de leur mal-etre et de la faible estime de soi

  • Vulneacuterabiliteacutes psychiques chez les eacutetudiants agrave propos de deux enquecirctes en santeacute mentale agrave lrsquouniversiteacute Lyon 1
    • Introduction
    • Probleacutematique
      • Des constats alarmants sur la santeacute mentale des jeunes
      • Les derniegraveres donneacutees de la litteacuterature
      • La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain
        • Meacutethodologie
          • Des enquecirctes deacuteclaratives en ligne
          • Le contenu des questionnaires
          • Les eacutechelles psychopathologiques
          • Analyse statistique
            • Les reacutesultats
              • Profil de la population eacutetudieacutee
              • Vulneacuterabiliteacute agrave la deacutepression
              • Vulneacuterabiliteacute aux prodromes schizophreacuteniques
              • Vulneacuterabiliteacute aux troubles attentionnels
              • Le niveau drsquoestime de soi
              • Lrsquousage de soins et indicateurs de seacuteveacuteriteacute
                • Discussion et perspectives
                  • Comparaisons aux donneacutees externes
                  • eacuteclairage depuis nos donneacutees internes
                    • Conclusions et perspectives
                    • Deacuteclaration drsquointeacuterecircts
                    • Reacutefeacuterences
                      • Discussion
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P Estingoy et al Annales Medico-Psychologiques 171 (2013) 392ndash398398

toutes les formes drsquoechanges et de partages transgenerationnelstransprofessionnels la mise en œuvre drsquooperations de communica-tions portees par des pairs et des peres toutes mediationsconfondues pour informer bien sur et travailler sur le depistageprecoce des vulnerabilites psychopathologiques mais aussi pourdevelopper chez chacun le sens de lrsquoautre lrsquoempathie et lrsquoaltruismeles meilleures armes contre la souffrance de lrsquoame et lrsquoenfermementsur soi Bref rappeler que lrsquoavenir est devant chacun de nous et qursquoilnous appartient

Dr M Massonndash Je vous felicite pour cette communication Jevous signale egalement un travail coordonne par Guy Goodwin(UK) non encore publie sur lrsquoutilisation du Mood DisorderQuestionnaire (MDQ) drsquoHirschfeld pour depister les troublesbipolaires dans une population drsquoetudiants drsquoOxford

DOI de lrsquoarticle original httpdxdoiorg101016jamp201304014

0003-4487$ ndash see front matter

httpdxdoiorg101016jamp201304015

Reponse du Rapporteurndash Une echelle que nous attendons doncavec impatience

Pr E Pewzner-Apeloig ndash Je suis personnellement frappee par lafrequence des appels emanant des adolescents eux-memes jeveux dire que souvent ils sont a lrsquoinitiative de la demande drsquoaide etil nrsquoest pas rare qursquoils contactent un therapeute avant meme drsquoavoirparle de leur projet de psychotherapie a leurs parents

Drsquoautre part vous avez parle de la difficulte drsquointegration quidites-vous est plus frequente chez des etudiants boursiers certesvous avez raison drsquoinvoquer les difficultes financieres les obligeanta avoir une activite remuneree parallelement a la poursuite deleurs etudes Mais il me semble qursquoil ne faut pas negliger la placedes facteurs socio-culturels dans la comprehension de leur mal-etre et de la faible estime de soi

  • Vulneacuterabiliteacutes psychiques chez les eacutetudiants agrave propos de deux enquecirctes en santeacute mentale agrave lrsquouniversiteacute Lyon 1
    • Introduction
    • Probleacutematique
      • Des constats alarmants sur la santeacute mentale des jeunes
      • Les derniegraveres donneacutees de la litteacuterature
      • La faiblesse de lrsquooffre sur le terrain
        • Meacutethodologie
          • Des enquecirctes deacuteclaratives en ligne
          • Le contenu des questionnaires
          • Les eacutechelles psychopathologiques
          • Analyse statistique
            • Les reacutesultats
              • Profil de la population eacutetudieacutee
              • Vulneacuterabiliteacute agrave la deacutepression
              • Vulneacuterabiliteacute aux prodromes schizophreacuteniques
              • Vulneacuterabiliteacute aux troubles attentionnels
              • Le niveau drsquoestime de soi
              • Lrsquousage de soins et indicateurs de seacuteveacuteriteacute
                • Discussion et perspectives
                  • Comparaisons aux donneacutees externes
                  • eacuteclairage depuis nos donneacutees internes
                    • Conclusions et perspectives
                    • Deacuteclaration drsquointeacuterecircts
                    • Reacutefeacuterences
                      • Discussion