vue sur l’intérieur - pearson

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Vue sur l’intérieur L e corps humain est un chef-d’œuvre d’organisation. Tous ses organes sont de petites merveilles, dans leur structure, leur fonctionnement et la façon dont ils sont intégrés au grand tout de l’organisme. Avant d’en faire un objet d’étude et ensuite de travail, il faut d’abord en faire un objet d’admiration. À chacun et chacune d’entre vous, futurs professionnels de la santé, je dédie ce petit texte qui se veut un hommage au corps humain et à la vie. Avec des mots qui essaient de ne pas trop se prendre au sérieux mais qui n’arrivent pas à cacher l’émotion devant la grandeur du sujet qu’ils ont à décrire, voici un bref survol de l’extraordinaire exploration à laquelle cet ouvrage vous convie. Demander à son œil gauche de voir De quoi est fait son œil droit (C’est son droit et peut-être son devoir) À travers le cristallin de l’un Découvrir la rétine de l’autre Une fois sorti de son orbite Faire le tour de son globe oculaire Comme on observe la terre Par la fenêtre d’un satellite Installer un de ses cristallins Biconvexe et hyalin Dans son champ de vision Focaliser sur lui toute son attention Éplucher lentement sa lentille Comme on pèle un bulbe d’oignon Une larme de joie voilant sa pupille Lire au tableau noir De sa matière grise Des extraits du livre blanc De ses pensées Errer sur ses aires corticales Plonger dans ses profondeurs cérébrales Et être quelquefois surpris Foudroyé par un éclair de génie Mettre tous ses morceaux devant soi sur la table Et se voir obligé d’avouer ébahi Que rien de tout cela ne serait admirable Sans ce fragile fil qui s’appelle la vie René Lachaîne Prendre Sa main dans sa main Et comprendre Tout ce que comprend L’action de prendre Approcher son tympan De son cœur et entendre Le rythme à deux temps De sa musique de chambre Le chant du sang Le trafic ahurissant des globules Le travail incessant des valvules Toucher consterné À son sternum L’os austère et le cœur chaud de l’homme Côte à côte Scruter ce bel amalgame de tissus Dont on est issu Dévisser un à un ses viscères Et constater comment chacun s’insère Dans ce complexe d’organes Qui fait son orgueil Entreprendre des fouilles Pour détecter ce qui gargouille Pour mettre à jour ce qu’il y a Dans cette fosse iliaque Pour démêler tous ces pieds d’intestins Qui ont été de tous ses festins © 2014 Pearson France – Anatomie et physiologie humaines – Katja Hoehn, Elaine Marieb

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Page 1: Vue sur l’intérieur - Pearson

Vue sur l’intérieur

Le corps humain est un chef-d’œuvre d’organisation. Tous ses organes sont de petites merveilles, dans leur structure, leur fonctionnement et la façon dont ils sont intégrés au grand

tout de l’organisme. Avant d’en faire un objet d’étude et ensuite de travail, il faut d’abord en faire un objet d’admiration.

À chacun et chacune d’entre vous, futurs professionnels de la santé, je dédie ce petit texte qui se veut un hommage au corps humain et à la vie. Avec des mots qui essaient de ne pas trop se prendre au sérieux mais qui n’arrivent pas à cacher l’émotion devant la grandeur du sujet qu’ils ont à décrire, voici un bref survol de l’extraordinaire exploration à laquelle cet ouvrage vous convie.

Demander à son œil gauche de voirDe quoi est fait son œil droit(C’est son droit et peut-être son devoir)À travers le cristallin de l’unDécouvrir la rétine de l’autreUne fois sorti de son orbiteFaire le tour de son globe oculaireComme on observe la terrePar la fenêtre d’un satelliteInstaller un de ses cristallinsBiconvexe et hyalinDans son champ de visionFocaliser sur lui toute son attentionÉplucher lentement sa lentilleComme on pèle un bulbe d’oignonUne larme de joie voilant sa pupille

Lire au tableau noirDe sa matière griseDes extraits du livre blancDe ses penséesErrer sur ses aires corticalesPlonger dans ses profondeurs cérébralesEt être quelquefois surprisFoudroyé par un éclair de génie

Mettre tous ses morceaux devant soi sur la tableEt se voir obligé d’avouer ébahiQue rien de tout cela ne serait admirableSans ce fragile fil qui s’appelle la vie

René Lachaîne

PrendreSa main dans sa mainEt comprendreTout ce que comprendL’action de prendre

Approcher son tympanDe son cœur et entendreLe rythme à deux tempsDe sa musique de chambreLe chant du sang

Le trafic ahurissant des globulesLe travail incessant des valvules

Toucher consternéÀ son sternumL’os austère et le cœur chaud de l’hommeCôte à côte

Scruter ce bel amalgame de tissusDont on est issuDévisser un à un ses viscèresEt constater comment chacun s’insèreDans ce complexe d’organesQui fait son orgueil

Entreprendre des fouillesPour détecter ce qui gargouillePour mettre à jour ce qu’il y aDans cette fosse iliaquePour démêler tous ces pieds d’intestinsQui ont été de tous ses festins

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© 2014 Pearson France – Anatomie et physiologie humaines – Katja Hoehn, Elaine Marieb

Page 2: Vue sur l’intérieur - Pearson

Régulation de la concentration et du volume de l’urine25-15 Décrire le mécanisme à l’origine du gradient osmo­

tique dans la médulla rénale et expliquer l’importance de ce gradient ; montrer comment ce mécanisme est relié aux caractéristiques des tubules rénaux collecteurs et des vasa recta ainsi que des différentes parties de l’anse du néphron.

25-16 Expliquer ce qui distingue la formation d’urine diluée et celle d’urine concentrée ; préciser le rôle et le mode d’action de l’hormone antidiurétique.

25-17 Définir le terme « diurétique » ; donner des exemples de substances diurétiques et de leur mode d’action.

Jour après jour et même d’heure en heure, la quantité de liquides que nous ingérons et excrétons peut varier énormé-ment. Par exemple, si vous courez par une chaude journée d’été, vous vous déshydratez parce que vous perdez rapidement de l’eau par la transpiration. Par contre, si vous buvez un pichet entier de limonade en vous reposant sur la terrasse, vous vous surhydratez. Dans une situation comme dans l’autre, les reins procèdent aux ajustements nécessaires pour maintenir la concentration de solutés des liquides de l’organisme autour de 300 mmol/kg, soit la concentration osmotique du plasma san-guin. Le maintien d’une osmolalité constante dans les liquides extracellulaires est impératif pour empêcher les cellules, sur-tout celles de l’encéphale, de rétrécir ou de gonfler sous l’effet du mouvement osmotique de l’eau.

Au chapitre 3 (p. 83), nous avons vu que l’osmolalité d’une solution est la concentration de particules de solutés par kilo-gramme d’eau. L’osmolalité (concentration en solutés) des liquides de l’organisme est exprimée en millimoles par kilo-gramme (mmol/kg). Par exemple, l’osmolalité du plasma san-guin se situe entre 280 et 300 mmol/kg.

Les reins maintiennent la concentration de solutés dans les liquides de l’organisme en réglant la concentration et le volume de l’urine. Quand vous vous déshydratez, vos reins produisent une petite quantité d’urine concentrée. Quand vous vous surhydratez, ils produisent une grande quantité d’urine diluée.

Les reins s’acquittent de cette tâche en utilisant des méca-nismes à contre-courant. Dans les reins, le terme « contre-courant » signifie que les liquides s’écoulent dans des directions opposées à l’intérieur des segments adjacents du même tube reliés par une boucle en tête d’épingle* (figure 25.16). Ces mécanismes permettent l’échange de substances entre les deux segments.

* On pense souvent à tort que le terme « contre-courant » signifie que la direction de l’écoulement des liquides dans les anses des néphrons est à l’opposé de celle du sang dans les vasa recta. En fait, il n’existe pas de relation univoque entre les boucles des anses et les capillaires des vasa recta, comme pourraient le suggérer des illustrations comme celle de la figure 25.16. Il y a plutôt regroupement de nombreux tubules et capillaires. Chaque tubule est entouré de nombreux vaisseaux sanguins, dans lesquels le sens de l’écoulement du sang n’est pas nécessairement le contraire de celui des liquides dans le tubule (figure 25.7).

Deux types de mécanismes à contre-courant déterminent la concentration et le volume de l’urine :

■■ Le multiplicateur à contre-courant est l’interaction entre le filtrat dans les parties ascendante et descendante des longues anses du néphron juxtamédullaire.

■■ L’échangeur à contre-courant est la circulation du sang dans les parties ascendante et descendante des vasa recta adjacents.

Ces mécanismes à contre-courant établissent et maintiennent un gradient osmotique qui s’étend du cortex rénal jusqu’aux profondeurs de la médulla rénale. Ce gradient, appelé gradient osmotique de la médulla rénale, permet aux reins de faire varier la concentration de l’urine.

Comment les reins établissent-ils le gradient osmotique ? Le Zoom sur le gradient osmotique de la médulla rénale (figure 25.16) explore la réponse à cette question.

Multiplicateur à contre-courant

Prenez le temps d’étudier le mécanisme du multiplicateur à contre-courant décrit à la figure 25.16a. Ce dernier dépend du transport actif des solutés vers l’extérieur de la partie ascen-dante (voir « Point de départ » dans le schéma du cycle de rétroactivation).

Bien qu’elles ne soient pas en contact direct, les parties ascendante et descendante de l’anse sont assez proches l’une de l’autre pour influer mutuellement sur leurs échanges respectifs avec le liquide interstitiel. Plus la partie ascendante expulse du sodium, plus l’eau sort de la partie descendante et plus le filtrat devient concentré dans la partie descendante. La partie ascen-dante utilise ce filtrat de plus en plus concentré pour augmenter l’osmolalité du liquide interstitiel de la médulla en y transpor-tant activement des ions. L’interaction fonctionnelle entre les deux parties de l’anse du néphron établit un cycle de rétroac-tivation, car plus la partie ascendante réabsorbe activement les ions vers l’espace interstitiel, plus la partie descendante réab-sorbe de l’eau vers l’espace interstitiel également.

Comme le montre la figure 25.16 (haut de la page de droite), il existe une différence constante dans la concentration de filtrat (200 mmol/kg) entre la partie descendante de l’anse et la partie ascendante, ainsi qu’entre la partie ascendante et le liquide interstitiel. Cette différence reflète la puissance des pompes à NaCl de la partie ascendante, qui arrive tout juste à créer une différence de 200 mmol/kg entre l’intérieur et l’extérieur de la partie ascendante. En soi, un gradient de 200 mmol/kg ne per-mettrait pas l’excrétion d’urine très concentrée. L’efficacité de ce système repose sur le fait que, en raison du mouvement à contre-courant, l’anse du néphron est capable de « multiplier » ces petites variations de la concentration de solutés et de les trans-former, du cortex vers le fond de la médulla, en un gradient approchant 900 mmol/kg (1 200 mmol/kg – 300 mmol/kg).

Notez également que la réabsorption des ions Na1 et Cl2 dans la partie ascendante est à la fois passive (surtout dans le segment grêle) et active (dans le segment large, par l’intermé-diaire du cotransporteur Na1-K1-2Cl2).

Chapitre 25 Le système urinaire 1149

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des ions H1 (figure 26.12 2 ). Alors qu’elles ne peuvent pas récupérer le bicarbonate directement du filtrat, les cellules tubulaires peuvent envoyer vers le sang des capillaires péritu-bulaires les ions HCO3

2 produits dans leur cytoplasme. Les ions HCO3

2 sortent des cellules tubulaires en compagnie d’ions Na1 ou en échange d’ions Cl2 (figure 26.12 3b ). Les ions H1 sont activement sécrétés, principalement par le truchement d’un antiporteur Na1-H1, mais aussi par celui d’une H1-ATPase (figure 26.12 3a ). Dans le filtrat, les ions H1 se combinent aux ions HCO3

2, comme nous venons de le voir à la figure 26.12 4 , 5 . La réabsorption du bicarbonate dépend donc de la sécrétion active des ions H1.

En résumé, pour chaque ion HCO32 filtré qui « disparaît »

de la sorte, un ion HCO32 produit dans les cellules tubulaires

entre dans le sang. Quand de grandes quantités d’ions H1 sont sécrétées, des quantités équivalentes d’ions HCO3

2 entrent dans le sang péritubulaire. Les ions HCO3

2 sont finalement presque complètement retirés du filtrat.

Production d’ions bicarbonateLes nouveaux ions HCO3

2 qui peuvent s’ajouter au plasma sont produits par deux mécanismes rénaux habituellement régis par les cellules des tubules contournés proximaux et des tubules rénaux collecteurs. Ces mécanismes font intervenir l’excrétion rénale des acides par le truchement de la sécrétion et de l’excrétion des ions H1 ou des ions ammonium (NH4

1) dans l’urine. Examinons en quoi ces deux mécanismes diffèrent l’un de l’autre.

Tout au long de la récupération du bicarbonate filtré (figure 26.12), les ions H1 sécrétés ne sont pas excrétés ou per-dus dans l’urine. Ils sont plutôt tamponnés par les ions HCO3

2 dans le filtrat, et ils servent à former des molécules d’eau (qui sont réabsorbées selon les besoins).

Cependant, lorsque tous les ions HCO32 filtrés ont été uti-

lisés pour tamponner les ions H1 (ce qui se produit générale-ment quand le filtrat a atteint les tubules rénaux collecteurs), tout nouvel ion H1 sécrété commence à être excrété dans l’urine. La plupart du temps, c’est ce qui se passe.

La récupération des ions HCO32 rétablit la concentration

plasmatique des ions bicarbonate. Toutefois, le métabolisme des aliments libère normalement de nouveaux ions H1 dans l’organisme. Cette arrivée d’ions H1 supplémentaires dépense des ions HCO3

2 et doit donc être compensée par la production et l’ajout dans le sang de nouveaux ions HCO3

2 (qui ne sont pas filtrés) pour prévenir l’acidose. Ce processus d’alcalinisation du sang est le moyen par lequel les reins font échec à l’acidose.

Excrétion des ions H1 tamponnés La liaison des ions H1 à des tampons dans le filtrat réduit le gradient de concentration de H1 à son minimum, ce qui permet aux cellules intercalaires de type A de la pompe à H1-ATPase de sécréter les nombreux ions H1 dont l’organisme doit se débarrasser pour prévenir l’acidose. (La sécrétion d’ions H1 cesse quand le pH de l’urine descend et atteint 4,5, parce que les pompes à H1-ATPase ne peuvent pas agir contre ce gradient élevé.) Le principal tampon

CA

CO2CO2�H2O

2K�2K�

Na� Na�

3Na�3Na�

Jonction serrée

H2CO3H2CO3

Cellule du tubule contourné proximal

NoyauFiltrat dans la lumière du tubule

Cl�Cl�HCO3�

HCO3�

H2O CO2

AC AC

H� H� HCO3�

HCO3�

Na�

HCO3�

ATPase

ATPase

Capillaire péri-

tubulaire

1

24

5

6

3a 3b

1 Le CO2 se combine à l’eau dans la cellule du tubule pour former de l’acide carbonique (H2CO3).

2 Le H2CO3 se dissocie rapidement pour former les ions H� et bicarbonate (HCO3

�).

3a Des ions H� sont sécrétés dans le filtrat.

3b Pour chaque ion H� sécrété, un ion HCO3

� pénètre dans le capillaire péritubulaire soit par symport avec Na�, soit par antiport avec Cl�.

4 Les ions H� sécrétés se lient aux ions HCO3

� présents dans le filtrat et forment du H2CO3. Des ions HCO3

� disparaissent du filtrat à mesure que d’autres (formés dans les cellules tubulaires) entrent dans le sang du capillaire péritubulaire.

5 Le H2CO3 formé dans le filtrat se dissocie et libère du CO2 et du H2O.

6 Le CO2 diffuse dans les cellules tubulaires, et il y accroît la sécrétion d’ions H�.

Transport actif primaire

Transport actif secondaire

Diffusion simple

Transporteur protéique

Anhydrase carboniqueAC

Figure 26.12 La réabsorption des ions HCO32 filtrés est couplée à la sécrétion

des ions H1. Remarque : la dissociation de H2CO3 en CO2 et en H2O dans la lumière du tubule est catalysée par l’anhydrase carbonique seulement dans le tubule contourné proximal.

1190 quatrième partie Maintien de l’homéostasie

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