villages de joie - juin 2012 - numéro 221

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lire p 2, 3 » www.sosve.org DOSSIER Villages de joie LA REVUE DES DONATEURS juin 2012 / n° 221 / 2 Enquête / p 8 L’argent de poche, un geste qui fait grandir ? Zoom / p 6 Abobo-Gare : retour à la tranquillité lles étaient factrice, assistan- te sociale, employée de ban- que, agricultrice, employée de restauration, assistante maternelle ou familiale. Tou- tes ces femmes ont résolu- ment changé de métier et de mode de vie pour devenir mères SOS. Un engagement personnel et professionnel sur le long terme qui résulte d’une longue réflexion menée tout au long du processus de re- crutement mis en place par SOS Villa- ges d’Enfants. « Le recrutement d’une éducatrice familiale, dite mère SOS, est organisé en quatre étapes », ex- plique Anne-Sophie Gerin, responsable du recrutement et de la formation des mères SOS de SOS Villages d’Enfants. « Chaque mois, le groupe de travail dédié au recrutement des mères SOS se réunit en commission pour étudier les candidatures reçues, poursuit-elle. Il est constitué d’un directeur de vil- lage d’enfants SOS, d’une mère SOS, de la responsable des ressources hu- maines, d’une assistante de recrute- ment et de moi-même. Les personnes E Mère SOS, un engagement personnel et professionnel Si les profils des mères SOS sont très différents les uns des autres, elles ont toutes en commun le fait de s’être engagées sur une voie singulière, où se mêlent investissements professionnel et personnel.

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Villages de Joie, le revue des donateurs de SOS Villages d'Enfants

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lire p 2, 3 »www.sosve.org

DOSSIER

Villages de joie LA REVUE DES DONATEURS

juin 2012 / n° 221 / 2 €

Enquête / p 8

L’argent de poche, un geste qui fait grandir ?

Zoom / p 6

Abobo-Gare : retour à la tranquillité

lles étaient factrice, assistan-te sociale, employée de ban-que, agricultrice, employée de restauration, assistante maternelle ou familiale. Tou-tes ces femmes ont résolu-

ment changé de métier et de mode de vie pour devenir mères SOS. Un engagement personnel et professionnel sur le long

terme qui résulte d’une longue réfl exion menée tout au long du processus de re-crutement mis en place par SOS Villa-ges d’Enfants. « Le recrutement d’une éducatrice familiale, dite mère SOS, est organisé en quatre étapes », ex-plique Anne-Sophie Gerin, responsable du recrutement et de la formation des mères SOS de SOS Villages d’Enfants.

« Chaque mois, le groupe de travail dédié au recrutement des mères SOS se réunit en commission pour étudier les candidatures reçues, poursuit-elle. Il est constitué d’un directeur de vil-lage d’enfants SOS, d’une mère SOS, de la responsable des ressources hu-maines, d’une assistante de recrute-ment et de moi-même. Les personnes

E

Mère SOS, un engagement personnel et professionnelSi les profi ls des mères SOS sont très différents les uns des autres, elles ont toutes en commun le fait de s’être engagées sur une voie singulière, où se mêlent investissements professionnel et personnel.

2 / Villages de joie / JUIN 2012 / N° 221 / www.sosve.org

DOSSIERLe mot du président

Des situations qui appellent une réfl exion

SOS Villages d’Enfants France s’est joint à l’Unicef pour adresser aux responsables politiques mobilisés en période électorale, un manifeste qui alerte sur la situation des enfants et des jeunes dans notre pays.La France s’enorgueillit d’une législation protectrice de l’enfance qui va au-delà des principes fi xés par la convention internatio-nale des droits de l’enfant adoptée en 1989. En 1996 en effet, le législateur français a rappelé le droit spécifi que des fratries en l’inscrivant dans notre code civil, alors même que la convention ne fait à aucun moment mention du maintien des liens fraternels, essentiel cependant dans les situations graves pour restaurer l’équilibre et redonner la confi ance. En France pourtant, plus de 200 000 enfants sont reconnus en danger, accom-pagnés par les juges pour enfants et les services sociaux. Et il y a tous ces enfants, non pas en danger, mais malheureux, qui sont pris dans les turbulences de la vie familiale ou qui vivent dans la pauvreté. Ils ne relèvent naturellement pas des mêmes modes d’accompagnement, mais ils existent et le droit n’est que d’un faible recours. Ces situations, et bien d’autres qui touchent à l’adolescence, sont pressantes. Je ne doute pas que la Défenseure des enfants veuille conduire une réfl exion pour tenter d’aboutir à un projet de véritable code de l’enfance. Nous serons à ses côtés, si elle le souhaite, pour que les enfants et les jeunes en diffi culté obtiennent le respect de leurs droits et que la société de demain soit, pour eux, porteuse d’avenir.

Pierre PASCAL

Villages de joie. Magazine édité par SOS Villages

d’Enfants / 6, cité Monthiers - 75009 Paris /

Tél : 01 55 07 25 25 / Président : Pierre Pascal / Vice-présidents :

Jean-Pierre Rousselot et Michel Rémond / Directeur général

et directeur de la publication : Gilles Paillard / Rédacteur en

chef : François-Xavier Deler / Impression sur papier recyclé :

Imprimerie SIEP / Photos : ChantalS, Luis Paterno, Reinhard

Winkler, Katerina Ilievska, SOS Archives, Alexandra, Blend

Images, SOS Villages d’Enfants, droits réservés. Publication

trimestrielle éditée par SOS Villages d’Enfants / Abonnement

annuel : 8 €. Prix au numéro : 2 € / Commission paritaire :

N° 0112 H 81095 – ISSN : 0243.6949 – Dépôt légal

à parution. Cette revue est accompagnée d’un

encart d’appel à dons (enveloppe, lettre et bulletins

d’abonnement/don).

retenues doivent remplir un dossier très approfondi qui sera étudié lors de la commission sui-vante. » Les candidates sélection-nées seront alors reçues lors d’une réunion d’information collective. « Cette réunion permet de pré-senter SOS Villages d’Enfants et ses missions. Elle est suivie d’un entretien individuel avec deux membres de la commission de recrutement », précise encore Anne-Sophie Gerin.

Une joie de vivre communicative

L’objectif de cette rencontre est d’échanger sur les motivations et les attentes des postulantes, mais aussi de bien leur faire prendre la mesure de l’engagement personnel et profes-sionnel que représente la fonction de mère SOS. À l’issue de ce parcours, les candidates retenues effectuent deux stages pratiques d’une semaine au sein de deux villages d’enfants SOS différents, afi n d’observer la vie d’une maison familiale dans un vil-lage SOS. Enfi n, elles seront reçues par un cabinet de conseil en recru-tement dont la mission consiste à déceler d’éventuelles fragilités qui seraient jusqu’alors restées inaper-çues (voir interview p. 3).S’il n’y a pas de profi l type pour deve-nir mère SOS, quelques critères sont cependant nécessaires : il faut avoir un niveau scolaire au moins égal au CAP/BEP et savoir conduire. Il faut

aussi être prêt à quitter son domi-cile personnel pour vivre dans une maison familiale au sein du village SOS. La mère SOS travaille à temps complet pendant 3 à 4 semaines, suivies d’une semaine de repos pen-dant laquelle l’aide familiale prend le relais auprès des enfants. Une mère SOS peut venir au village seule ou en couple et/ou avec son propre enfant, sous certaines conditions.

Autre critère important : la maturité, car les futures mères SOS devront s’occuper, 24 heures sur 24, d’une fratrie de quatre ou cinq enfants, du bébé à l’adolescent, avec les respon-sabilités que cela suppose. « Être mère SOS demande une grande résistance physique et psychologi-que, souligne Anne-Sophie Gerin. Il faut être patient, ouvert, dynami-que et faire preuve d’une joie de vivre communicative. »

»

Il faut aussi être prêt

à quitter son domicile

personnel pour vivre dans

une maison familiale au sein

du village SOS.

« Mère SOS » : un métier

Cette profession est reconnue par le

statut d’éducatrice familiale depuis

2005. L’appellation « mère SOS » est

un terme affectif qui témoigne du lien.

/ 3

Àl’aube de la quarantaine, Catherine connaît un tournant dans sa vie professionnelle. Elle souhaite quitter l’univers de la res-tauration où elle travaille pour se tourner vers un métier en

contact avec des enfants. « Lorsque j’ai entendu parler de SOS Villages d’Enfants, postuler comme mère SOS a immédiate-ment été une évidence. Je m’investissais depuis plus de vingt ans dans une association humanitaire et je souhaitais donner une dimension plus humaine à ma vie professionnelle. Je réa-lisais alors un bilan de compétences et lorsque j’en ai parlé à mon conseiller, il m’a confi rmé que ce métier était fait pour moi. Dans mon esprit, c’était très clair : c’était cela que je vou-lais faire et rien d’autre. »Après avoir suivi le processus de recrutement, Catherine a pris ses fonctions de mère SOS au mois de décembre dernier. « J’ai rencon-tré les enfants dont je m’occupe désormais lors d’un stage d’une semaine au village d’enfants SOS de Plaisir (78). La plus jeune a cinq ans et la plus âgée, treize. Le contact est passé très rapi-dement et nous avons très vite trouvé nos marques. Cela corres-pond totalement à ce à quoi je m’attendais. L’équipe éducative est très présente et la solidarité entre mères SOS réelle. Cela m’a été d’une grande aide durant les premières semaines. » L’éloignement de son domicile, situé en Vendée ? « Ce n’est pas un problème, sourit-elle. Dans la restauration, j’étais habituée à ne pas avoir de week-ends et à travailler avec des horaires déca-lés. Mon domicile est éloigné mais, fi nalement, ce n’est pas plus mal. Lorsque je rentre chez moi, cela me permet de souffl er, de faire une vraie coupure… et de revenir avec le plein d’éner-gie ! » Catherine est heureuse alors de retrouver les enfants de la maison familiale qui – eux aussi – l’attendent avec impatience…

« Devenir mère SOS était une évidence »Mère SOS depuis quelques mois au village d’enfants SOS de Plaisir (78), Catherine a trouvé un nouvel épanouissement dans sa vie au village d’enfants SOS. Ses nouvelles fonctions lui ont permis de conjuguer harmonieusement dimensions personnelle et professionnelle.

Sur quel processus vous appuyez-vous pour

évaluer les candidates au poste de mère SOS ?

Lorsque nous recevons de futures mères

SOS, notre objectif est de travailler avec elles

sur leurs compétences plutôt que sur leurs

défauts. Les profi ls des mères SOS sont souvent

atypiques et il est intéressant de décloisonner

les univers personnel et professionnel. Pour

cela, nous confrontons les résultats des

travaux menés par une graphologue et les

conclusions auxquelles je suis parvenue à

l’issue d’un entretien de plus de deux heures

avec la candidate. Au cours de cet entretien,

j’ai recours à une méthode québécoise qui

permet d’identifi er, dans des situations

pas nécessairement professionnelles, les

compétences transversales des candidats :

la persévérance, l’esprit d’équipe, la facilité

d’adaptation, le sens de l’observation,

la minutie, la confi ance en soi, le sens

des responsabilités, la communication,

la débrouillardise, la créativité…

Quelles sont les compétences recherchées

pour les mères SOS ?

Nous cherchons à nous assurer que les

personnes pressenties aient le sens des

responsabilités, soient autonomes dans

leur travail, fassent preuve d’un réel sens

de l’organisation et soient capables de gérer

des enfants d’âges et de caractères différents,

ainsi que toutes les activités qui leur sont liées.

En effet, le rôle de mère SOS n’est pas simple

et, au-delà de l’enthousiasme des premières

semaines, il faut être capable, sur le long terme,

de se donner pleinement trois semaines durant

avant de reprendre son souffl e dans son propre

univers. Nous vérifi ons donc leur capacité à

s’inscrire dans la durée, à ne pas cacher leurs

éventuelles diffi cultés et à travailler avec l’aide

familiale et l’équipe éducative. Et bien sûr…

leur aptitude à aider les enfants à s’épanouir.

« Identifi er les compétences transversales »

Micheline Mauduit, directrice générale du cabinet Brigitte Croff Conseil spécialisé dans le conseil et la formation dans le secteur des services à la personne.

2 questions à…

4 / Villages de joie / JUIN 2012 / N° 221 / www.sosve.org

es enfants en situation de pau-vreté se perçoivent « avant tout comme des enfants ». Tel est le sentiment général qui prédomine à la lecture

des résultats de la vaste étude réalisée au cours de l’automne 2010 en régions Pro-vence - Alpes - Côte d’Azur, Rhône-Alpes et Ile-de-France. En observant le rapport entretenu par les enfants avec leur fa-mille, leur logement, leur scolarité, leurs loisirs et leurs pratiques alimentaires, il ressort que ces enfants « souriants, drô-les, voire espiègles », comme le souli-gnent les enquêteurs, vivent comme les autres leur vie d’enfant avec leurs joies et leurs préoccupations propres.

Une solidarité intra et interfamiliale

Ces jeunes mettent spontanément en avant leur famille en évoquant des liens étroits et solidaires avec leurs parents et la fratrie. Mais aussi plus largement avec les oncles, tantes, cousins et cousines. « C’est très important d’avoir des frè-res et sœurs. J’y tiens comme si c’était moi-même », explique Assamala, 10 ans. « Des fois, je préfère la regarder

cuisiner plutôt que de jouer », explique Khalil, 13 ans, au sujet de sa mère. Cet univers enfantin relativement préservé, très explicite chez les jeunes, s’exprime toutefois de manière différente chez les plus grands, davantage conscients des contraintes de la pauvreté. La volonté de « mettre de côté les choses qui ne vont pas » pour se préserver est prégnante.

Autre constat signifi catif qui témoigne de leur belle énergie : la place accor-dée au jeu. C’est avec le sourire qu’ils parlent de la complicité et du plaisir à partager des moments ludiques, que ce soit chez eux, au centre social, sur le terrain de jeu du quartier… Les enfants en situation de pauvreté montrent d’im-portantes capacités d’adaptation aux diffi cultés rencontrées par leur famille. Ils se socialisent en intégrant les codes

culturels et les habitudes de consomma-tion de leur environnement. Ces stra-tégies d’accommodement s’expriment également lorsque les ressources fi nan-cières de la famille sont réduites et que les enfants renoncent à l’acquisition de certains biens. Cette situation, inscrite dans le temps, n’est pas considérée comme un manque par les enfants mais plutôt comme un état de fait.

Des fragilités sous-jacentes

Cette attitude positive des plus jeunes est toutefois tempérée par des moments de gravité. Sans que le sentiment de honte ne soit jamais évoqué, les conséquences des privations apparaissent en fi ligrane lorsque les enquêteurs insistent et que les parents ne sont pas présents pour entendre les réponses. Parmi les princi-paux sujets douloureux : la promiscuité dans les logements ou dans les centres d’hébergement. Yanis, 14 ans, aimerait « avoir une chambre seul parce que la chambre est trop petite à trois, on n’a pas d’espace, on est tout serré . Une chambre, c’est pas que pour dormir, c’est aussi pour se détendre ».

L

Comment les enfants perçoivent-ils les conséquences de la pauvreté dans leur vie quotidienne ? Focus sur les principaux enseignements, parfois à rebours des idées reçues, d’une enquête menée d’octobre 2010 à mai 2011 en régions Provence - Alpes - Côte d’Azur, Ile-de-France et Rhône-Alpes (1).

Vivre la pauvreté : qu’en disent les enfants ?

En direct

Les enfants en situation

de pauvreté montrent

d’importantes capacités

d’adaptation aux difficultés

rencontrées.

www.sosve.org rubrique Actualités

/ 5

A C T U A L I T É en bref...

Autre point sensible : l’absence récur-rente de vacances hors du domicile qui, à leurs yeux, les stigmatisent par rapport aux autres enfants. Olivier, 16 ans, observe par exemple que cela fait quatre ans qu’il passe ses congés chez lui : « Tout le monde part en va-cances et ici il n’y a plus personne. C’est un peu lourd. J’aimerais bien faire comme tout le monde. Pourquoi moi je dois rester là ? ». Enfi n, un sen-timent récurrent de mal-être à l’école s’exprime chez certains adolescents au travers de l’évocation d’une certaine fatalité à se diriger vers des métiers moins valorisants socialement. « J’ai pas le choix », constate l’un d’eux qui travaille comme ferrailleur. Malgré toutes ces diffi cultés, l’étude rend compte du fait que les jeunes in-terrogés gardent tous l’espoir d’une vie « belle ». La plupart des enfants ont des rêves ambitieux, comme d’aller vivre aux États-Unis. Pourquoi ? Parce que c’est « le pays des rêves ».

(1) Vivre la pauvreté : qu’en disent les enfants ?, étude

conduite par le Dispositif régional d’observation

sociale (Dros) de Provence - Alpes - Côte d’Azur, la

Mission d’information sur la pauvreté et l’exclusion

sociale (Mipes) en Ile-de-France et la Mission

régionale d’information sur l’exclusion (MRIE)

en Rhône-Alpes, novembre 2011.

« Ils semblent vivre davantage dans le présent et être moins préoccupés de leur devenir »

Les « enfants pauvres » font-ils régulièrement l’objet d’études ?C’est seulement à partir des années 1990 que certains chercheurs américains et anglo-saxons se sont intéressés à cette population avec un objectif principal : évaluer les effets à long terme de la pauvreté afi n de mesurer son éventuelle reproduction dans les générations suivantes. La France, elle, va s’intéresser aux « enfants pauvres » surtout et démarre ses propres recherches – peu nombreuses – au début des années 2000. On voit que la question du devenir des enfants y est également centrale.

Quelle est la valeur ajoutée de cette étude des trois observatoires régionaux de Provence - Alpes - Côte d’Azur, de Rhône-Alpes et d’Ile-de-France ?C’est une des premières études sur la perception qu’ont les enfants en situation de pauvreté de leurs conditions de vie. L’enquête apporte des témoignages sur le quotidien de ces enfants, sur leurs ressentis, leurs relations avec leurs copains et leur famille, et ce à différents âges. C’est une approche sociologique qui aborde l’« enfant pauvre » non plus seulement comme un être en devenir, inachevé et dépendant des adultes, mais aussi comme un acteur de sa vie actuelle. C’est primordial.

Qu’en avez-vous retenu ?Selon cette enquête, les jeunes enfants ressentent la pauvreté différemment de leurs parents et des adultes en général. Ils semblent vivre davantage dans le présent et être moins préoccupés de leur devenir. Cette perception doit être acceptée et prise en compte par les adultes qui les entourent et les chercheurs qui s’intéressent à eux.

3 questions à

Vanessa Stettinger, sociologue, qui mène des recherches sur le vécu des enfants face à la pauvreté.

• « Musiques d’enfance » sur Radio Classique> À l’invitation d’Anny Duperey, de nombreuses personnalités évoquent un souvenir de leur enfance lié à un morceau de musique. Diffusion en mai et juin, puis de septembre à décembre.Pour écouter ces chroniques : www.sosve.org rubrique Actualités/Musiques d’enfance

• SOS Villages d’Enfants Mali*

> Suite aux événements survenus au Mali, les 139 enfants et leurs 17 mères SOS et aides familiales du village SOS de Socoura, près de Mopti ont été évacués – de façon préventive – le dimanche 1er avril, vers les villages SOS de Sanankoroba et de Kita. Ces deux villages SOS fournissent aux enfants déplacés et à leurs mères SOS les conditions d’hébergement et de restauration adéquates tout en assurant aux enfants la continuité de leur scolarité.

À Mopti, les équipes de SOS Villages d’Enfants Mali poursuivent leur mission auprès des enfants, des jeunes et des familles du voisinage : école SOS, cantine, infi rmerie. Les membres du personnel du village SOS restés sur place veillent sur les locaux et les équipements.

* Au moment de l’impression du magazine.

• COMMANDEZ L’AGENDA SOS VILLAGES D’ENFANTS 2012-2013

> Visibilité maximale, la semaine sur deux pages, tout au long de l’année scolaire (de septembre 2012 à septembre 2013).

Joignez le solidaire et l’utile : son prix de 15 € (frais de port inclus) est intégralement reversé à l’association. Il sera disponible à partir de fi n juillet 2012.

Pour commander : envoyez un chèque de 15 € à l’ordre de SOS Villages d’Enfants – Opération Agenda, en mentionnant vos coordonnées postales à l’adresse suivante : SOS Villages d’Enfants – Opération Agenda, 6 cité Monthiers, 75009 Paris.

6 / Villages de joie / JUIN 2012 / N° 221 / www.sosve.org

Zoom

Jean-Claude Angoulvant, administrateur de SOS Villages d’Enfants France, a visité le village d’enfants SOS d’Abobo-Gare en Côte-d’Ivoire, quelques mois après la crise politique qui avait nécessité l’évacuation des enfants. Il y a découvert un havre de paix, au cœur d’une société encore fragile. Récit.

n février 2011, la région d’Abidjan se retrouve au cœur du confl it qui secoue alors la Côte-d’Ivoire. Afi n d’assurer leur sécurité, les enfants et les mè-res SOS du village d’enfants SOS d’Abobo-Gare sont évacués vers l’est, au village SOS d’Aboisso.

Tous ont pu revenir au mois d’août suivant. Dès le mois de juin, le jardin d’enfants, l’école et le centre de soins avaient de nouveau ouvert leurs portes aux familles des environs.Un an plus tard, Jean-Claude Angoulvant se trouve à Abidjan dans le cadre de son activité professionnelle. Il en profi te pour contacter les responsables du village SOS d’Abobo-Gare, dont il est parrain, afi n de découvrir comment les enfants et le personnel ont surmonté cette période diffi cile. « Ma visite était improvisée, mais j’ai été reçu très cha-leureusement », raconte Jean-Claude Angoulvant.

Des enfants épanouis et bien habillés

Créé en 1971 dans un faubourg d’Abidjan, le village d’enfants SOS d’Abobo-Gare s’est peu à peu retrouvé au cœur d’un grand quartier populaire et déshérité, en raison de la forte croissance démographique et urbaine. Les besoins y sont considérables. « Les 3,5 hectares du village constituent un véritable ha-vre de paix, poursuit Jean-Claude Angoulvant. C’est le village SOS le plus ancien d’Afrique, mais il est propre, moderne, bien entretenu. À noter que, sans doute à cause de ce qu’il représente pour les Ivoiriens, et bien qu’il ait été évacué,

il n’a subi aucune incursion malveillante pendant le confl it alors que le quartier était pris dans la tourmente. Les en-fants sont épanouis et bien habillés. Ils disposent chacun de leur moustiquaire traitée contre le paludisme, ce qui est très important dans cette région. Quant à l’école primaire, qui joue un rôle essentiel, c’est la plus belle de Côte-d’Ivoire, avec son parement intégral en petits carreaux de verre qui la met à l’abri des moisissures tropicales. »Passionné par l’Afrique et spécialiste des questions de protec-tion sociale, Jean-Claude Angoulvant insiste sur le rôle d’un village SOS comme celui d’Abobo-Gare, qui – selon lui – va au-delà du secours durable apporté aux enfants en détresse. « Abobo-Gare remplit une mission d’assistance à ceux qui en ont besoin, apporte l’éducation et les soins médicaux, mais fait aussi fi gure de pôle de référence en termes de qualité environnementale, éducative, familiale et de sécurité, explique-t-il. Pour ses animateurs et responsables ivoiriens, l’enjeu est de contribuer à la construction d’une société civile forte et autonome. C’est un chantier de très longue haleine, reposant sur des initiatives et où l’on ne prêche que par l’exemple. »

Un retour à la tranquillité à Abobo-Gare

E

Abobo-Gare fait fi gure de pôle de référence

en termes de qualité environnementale,

éducative, familiale et de sécurité.

S O S V I L L A G E S D ’ E N FA N T S E N C Ô T E - D ’ I V O I R E

Le village d’enfants SOS d’Abobo-Gare compte 10 maisons

familiales et accueille une centaine d’enfants (voir le parcours

d’Adeline p. 10 et 11). Il comprend également un jardin d’enfants

SOS, une école primaire fréquentée par plus de 200 élèves et

un centre médico-social SOS.

• Jean-Claude Angoulvant,

lors de sa visite au village SOS

d’Abobo-Gare. •

• Les 3,5 hectares du village SOS sont un véritable havre de paix

pour la centaine d’enfants accueillis. •

/ 7

InfoEntretien

partenairesInfo partenaires

Des cuisines pour les villages d’enfants SOS

L’enseigne Cuisinella,

engagée durablement

aux côtés de SOS Villages

d’Enfants, reverse à l’association 15 € pour tout achat

d’une cuisine de la gamme STAR. Cette année, les

fonds collectés permettront d’équiper et de rénover

les cuisines du village SOS de Neuville (59). Cette

belle opération s’inscrit dans un vaste programme

de rénovation du village qui fêtera par ailleurs ses

50 ans en octobre. www.cuisinella.com •

1 pack acheté = 1 accès à l’hygièneDe juillet à septembre 2012, Lotus reversera

une partie des ventes de ses gammes mouchoir,

essuie-tout et papier toilette à SOS Villages

d’Enfants. Ce généreux don permettra de fi nancer

la construction d’infrastructures

sanitaires pour améliorer les

conditions d’hygiène et l’accès

à l’eau potable des populations

démunies du sud de Madagascar.

www.lotus-planete.com •

Des repas au profi t des jeunes des villages SOSPendant tout le mois de février, les hôtels

participants du groupe Marriott en Europe ont

reversé 1 € à l’association SOS Villages d’Enfants

par couvert servi au déjeuner et au dîner dans leurs

restaurants. À cette occasion, un dessert élaboré

par des enfants des villages SOS lors d’une journée

passée avec un

chef Marriott était

également proposé

à la carte des

restaurants. Cette

opération innovante

a pour objectif

de soutenir

les programmes d’accompagnement des jeunes

des villages SOS vers l’insertion et l’autonomie.

www.marriott.fr •

Rénover pour se reconstruirePartenaire de SOS Villages

d’Enfants depuis 2007,

Satas – désormais

Néopost – soutient

cette année la rénovation du sous-sol d’une maison

du village SOS de Plaisir (78). Cet aménagement

permettra de créer une salle de jeux pour les enfants.

www.neopost.fr •

Fête le Mur : éduquer par le sport

Pouvez-vous nous présenter l’association Fête le Mur ?Fête le Mur a été créée en 1996 par Yannick Noah, qui souhaitait transmettre sa passion du tennis mais surtout aider les jeunes des quartiers défavorisés à trouver leur place dans la société. Leurs parents ne peuvent généralement pas se permettre de payer d’inscription à un club sportif. Nous sommes aujourd’hui présents dans 26 zones urbaines sensibles dans toute la France et encadrons près de 3 000 jeunes qui pratiquent gratuitement le tennis chaque semaine.

Quelles sont, pour vous, les vertus du tennis ?Il s’agit bien sûr de donner un peu de plaisir aux jeunes des zones urbaines sensibles, mais cela va plus loin. Nous sommes convaincus des vertus éducatives du sport. Connaître ses forces et ses faiblesses, acquérir le goût de l’effort, gérer ses émotions et ses frustrations, respecter les règles, faire preuve de patience et de ténacité : toutes ces notions sont essentielles pour réus-sir sa vie. Nous aidons ces enfants à grandir dans les valeurs citoyennes et le respect des autres.Notre approche est différente de celle des écoles de tennis. Nos jeunes veulent tout de suite faire des matches ! Il nous faut donc concilier l’aspect ludique, la compétition, la technique et la pédagogie, pour ne pas les décourager.

Vos interventions dépassent-elles le cadre de la pratique du tennis ?Oui, nous avons aussi à cœur d’aller vers leurs parents et de les impliquer. Certaines de nos associations locales sont gérées par des familles du quartier. De plus, certaines équipes pédago-giques mettent en place des projets d’aide aux devoirs, forment les enfants aux gestes de premier secours…

Comment assurez-vous le fi nancement de vos actions ?Nous ne faisons pas appel à la générosité du public. Nous som-mes soutenus par des partenaires de confi ance : le ministère des Sports, la Fédération française de tennis, des fondations, des collectivités, des entreprises privées et des équipementiers

qui travaillent de longue date avec Yannick Noah et nous fournissent le matériel.Notre principe a toujours été la gratuité pour les enfants, mais nous pensons main-tenant qu’il est préférable de demander aux familles une contribution modeste : tous les jeunes vont désormais payer la licence annuelle FFT, d’un montant de 13 euros, car cela permet de promouvoir la notion d’engagement.

(1) Fête le Mur est bénéfi ciaire avec SOS Villages

d’Enfants des Boucles du Cœur en 2012 (cf. p. 12). www.sosve.org rubrique Nous soutenir

/ 7

Fondée par Yannick Noah, l’association Fête le Mur (1) permet à des milliers de jeunes des quartiers défavorisés de pratiquer le tennis. Le but est de les aider à s’épanouir, mais aussi de leur transmettre des valeurs essentielles : goût de l’effort, respect des règles… Rencontre avec Séverine Thieffry, sa directrice.

8 / Villages de joie / JUIN 2012 / N° 221 / www.sosve.org

Enquête

n France, 40 % des parents don-nent de l’argent de poche à leurs enfants. Un taux

émoussé par la crise puisqu’ils étaient 51 % en 2006, puis 45 % en 2008 (1). Cet usage coutumier des pays d’Europe du Nord comme l’Allemagne, l’Autriche et le Luxembourg, où les enfants reçoivent très tôt de l’argent, serait moins ancré dans les pays du Sud où il est plutôt donné de manière exceptionnelle. Pour la psychologue Marie-Claude François-Laugier (2), « l’ar-gent de poche n’est pas une obligation. Cela doit rester un don, un cadeau ».

Un usage institué entre

11 et 13 ans

Dans l’Hexagone, cet usage s’institue vers l’âge de 11 à 13 ans. « Avant l’âge de 9-10 ans, un enfant n’a pas la notion de l’argent », sou-ligne en effet la psychologue. Une étude (3) révélait ainsi en 2009 que 44 % des enfants de 8-10 ans reçoivent de l’argent de poche plus ou moins régu-lièrement, 61 % d’entre eux entre 11 et 14 ans et plus de 66 % vers 17 ans. Avec l’âge, la régularité et le montant des dons augmentent : de 5 à 9 € par mois en moyenne pour les 8-10 ans, de 10 à 14 € pour les 11-14 ans, de 15 à 24 € pour les 15-17 ans et de 25 à 49 € pour les 18-19 ans.

Il arrive également que les pa-rents complètent leur apport pour de menus travaux ou services. « Pour une bonne note à l’école, il vaut mieux aller choisir un cadeau avec son enfant, estime Marie-Claude François-Laugier. Sinon, il pourrait penser que tout est monnayable. En revanche, punir l’en-fant en lui supprimant son argent de poche n’est pas une bonne idée, excepté dans les cas extrêmes de délinquance et de consom-mation de drogue. »

Apprendre à gérer un budget

Pour une majorité de parents, donner de l’argent de poche à son enfant, c’est avant tout lui apprendre à gérer un budget, pour d’autres un moyen de le récompenser. « Lorsque l’on donne de l’argent de poche à un enfant, si on lui ex-plique que c’est pour son plaisir, cela lui permettra de différencier ses besoins de ses envies. C’est une no-tion fondamentale, explique la psychologue. Ce peut être aussi l’occasion de lui ap-prendre à différer ses en-vies en économisant. S’il ne dépense pas tout d’un seul coup, il aura un plaisir en-core plus grand à s’offrir quelque chose de mieux. »Pour les plus grands, les re-venus des petits boulots, réguliers ou saisonniers, vien-dront compléter leur argent

de poche. « L’enfant doit comprendre que l’argent ne tombe pas du ciel, qu’il est gagné par le travail de ses parents, poursuit Marie-Claude François-Laugier. C’est d’ailleurs ce qui l’incitera à faire des petits boulots, du babysitting, garder des chiens, des chats… » Près de la moitié des 15-17 ans dispose par ailleurs d’un compte bancaire à leur nom pour y déposer leur ar-gent (3). « Aux États-Unis, il existe des Money camps où les enfants immergés pendant quelques jours y apprennent l’essentiel de la fi nance, souligne Marie-Claude François-Laugier. Sans aller jusque-là, il est im-portant d’apprendre aux petits Français les rudi-ments de l’argent, ce qu’est

une banque, les bases de la gestion… » Mais attention toutefois, met en garde la psy-chologue : « L’argent doit cir-culer, servir à autrui dans l’échange et le partage. Il ne doit pas être là seulement pour se faire plaisir à soi. Sans compter qu’on peut aussi faire plaisir autre-ment qu’en achetant quelque chose, en faisant un dessin par exemple. L’argent n’est pas tout ».

(1) Sondage CSA pour le Crédit

Agricole, 2010.

(2) Marie-Claude François-Laugier

est psychologue clinicienne et

psychanalyste. Elle a exercé dans la

banque et la fi nance. Elle est l’auteur,

entre autres, de L’Argent dans le couple

et la famille (2007) aux éditions Payot.

(3) Étude TNS Sofres, Comportements

bancaires des jeunes, 2009.

Exceptionnel ou régulier, outil de récompense ou d’apprentissage, l’argent de poche revêt des usages divers dans les familles. Comment contribue-t-il pour les enfants et les jeunes à la découverte d’une certaine forme d’autonomie ? Enquête.

L’argent de poche, un geste qui fait grandir ?

L’enfant doit comprendre que l’argent

ne tombe pas du ciel, qu’il est gagné par

le travail de ses parents.

E

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T É M O I G N A G E SNicolas vit au village d’enfants SOS de Jarville depuis

une dizaine d’années. Il a 17 ans et suit un CAP pour

être sapeur-pompier. Depuis l’âge de 16 ans, il gère

déjà un petit budget.

« J’ai de l’argent de poche depuis l’âge de 7 ans. Lorsque

j’étais petit, c’était ma mère SOS qui me donnait ce dont

j’avais besoin, à la boulangerie par exemple. À 16 ans,

on m’a proposé de gérer davantage mon budget, pour

certaines dépenses de la vie quotidienne, ce que j’ai

accepté ; je reçois une somme mensuelle : 60 € pour

les vêtements, 15 € pour les dépenses d’hygiène et 30 €

d’argent de poche. À moi de m’organiser. J’ai par exemple

choisi de prendre un abonnement de téléphone

portable à 20 €/mois, il me reste donc 10 € d’argent

de poche. Ensuite, je fais attention, je prends soin

de mes vêtements, pour économiser et m’offrir autre

chose. Ce mois-ci, j’ai épargné mes 60 € pour pouvoir

inviter ma copine au restaurant. C’est vrai aussi que

ma mère SOS me fait parfois des cadeaux, des T-shirts

par exemple… Je suis très bien comme ça, je ne manque

de rien. Et j’apprends à gérer mon budget. Au début,

bien sûr, j’ai fait des erreurs… comme tout “claquer”

d’un coup. Mais c’est comme ça qu’on comprend.

Au fi nal, je pense que 16 ans, c’est un bon âge pour

apprendre à gérer. »

témoignages + sur www.sosve.org

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ans les villages d’enfants SOS, l’argent de poche est une obligation légale. « La dota-tion départementale inclut, dans son prix à la journée,

une somme pour l’argent de poche », explique Pierre Garnier, directeur du vil-lage d’enfants SOS de Digne-les-Bains. L’enfant reçoit ainsi de l’argent de poche dès qu’il sait compter, et parfois même en dernière année de maternelle. « À cet âge, c’est davantage un euro sym-bolique, comme pour s’acheter des bonbons… », évoque Pierre Garnier. L’enfant reçoit ensuite en moyenne 15 € par mois vers l’âge de 10 ans, entre 40 et 50 € au moment de la préadolescence, et des sommes plus importantes à partir de 16 ans. C’est à cet âge qu’il devra faire face à certaines dépenses couran-tes mais essentielles comme la brosse à dents, les vêtements…

Apprendre à dépenser

Progressivement, les jeunes appren-nent à gérer l’argent qui leur est confi é. « Ce sont des enfants qui, plus tard, seront lâchés dans la vie sans fi let. Là où un enfant aura le soutien de ses parents, eux n’auront rien, explique

Pierre Garnier. C’est important qu’ils fassent leurs propres expériences. Nous avions, par exemple, un jeune à qui on donnait de l’argent pour ses repas dans la semaine. Au début, il a tout dépensé et il ne lui restait plus de quoi avoir des repas équilibrés… Petit à petit, il a appris à mieux gérer

son argent. » Au sein des villages d’en-fants SOS, les enfants apprennent les bases théoriques de la gestion d’un bud-get. Reste la pratique. C’est un travail de longue haleine qui, selon le directeur, pourrait même commencer avant 16 ans. « J’ai connu un jeune qui avait très bien appris à faire des économies… Seulement, il ne savait pas dépenser. Et il a tout dilapidé en une seule fois !, se souvient Pierre Garnier. C’est facile d’apprendre à économiser, ce qui l’est moins, c’est d’apprendre à gérer ses dépenses ! C’est là où nous les aidons, chacun individuellement. »

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Chez SOS Villages d’Enfants, l’argent de poche donné à l’enfant est, encore plus qu’ailleurs, une pierre à l’édifi ce éducatif.

Apprendre à gérer son argent, un pas essentiel vers l’autonomie

C’est facile d’apprendre

à économiser, ce qui l’est

moins, c’est d’apprendre

à gérer ses dépenses !

D

10 / Villages de joie / JUIN 2012 / N° 221 / www.sosve.org

Adeline ladivine3 ans, Adeline est ac-cueillie au village d’en-fants SOS d’Abobo-Gare où elle grandit au sein d’une fratrie de dix en-fants, sous la houlette

bienveillante de Jacqueline, sa mère SOS. Quinze ans plus tard, elle s’ap-prête à disputer les 100 mètres et 200 mètres aux Jeux olympiques de Londres au sein de l’équipe natio-nale d’athlétisme de Côte-d’Ivoire. Une trajectoire tracée dès son plus jeune âge, lorsqu’Adeline disait

vouloir devenir « coureur » et que sa mère SOS lui rétorquait que ce n’était pas un métier…Or la petite fi lle aimait courir et, faute de pouvoir fouler la cendrée, elle jouait au foot avec ses frères. L’entraîneur du club repère alors sa très grande rapidité et lui de-mande d’être attaquante, puis lui

suggère d’abandonner le foot pour se consacrer à l’athlétisme. « Je ne savais pas ce que c’était, explique Adeline. J’ai découvert à l’entraî-nement ce que voulait vraiment dire être “coureur”. Et cela m’a confi rmée dans ma volonté de devenir professionnelle. » Dès 14 ans, au vu de ses performances,

J’ai découvert à l’entraînement ce que voulait

dire être « coureur ». Cela m’a confirmée dans

ma volonté de devenir professionnelle.

À

Parcours

• Adeline s’apprête à courir

les 100 et 200 mètres aux

prochains Jeux olympiques

de Londres. •

Après avoir grandi au village d’enfants SOS d’Abobo-Gare, en Côte-d’Ivoire, Adeline est aujourd’hui une étoile du sprint et participera cet été, à 18 ans, aux Jeux olympiques de Londres.

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Adeline rejoint un club accessi-ble aux plus de 16 ans et bat la meilleure du club. De compétitions en compétitions, de succès en succès, elle rejoint bientôt l’équipe nationale de Côte-d’Ivoire et par-ticipe aux championnats d’athlé-tisme juniors d’Afrique organisés au Togo, d’où elle revient avec une médaille d’or en relais.

Un soutien précieux

de ses proches

Un parcours qui doit beaucoup au soutien de ses proches et de sa mère SOS. Jacqueline l’encourage et fait alors offi ce de « coach à la maison », notamment en matière de régime alimentaire. Pour mieux réussir, Adeline doit ainsi renoncer à manger son plat préféré, le fufu, à base de banane et de manioc. Sa mère SOS la dissuade aussi d’aban-donner lorsque le découragement la gagne, en particulier lorsque les enfants et les mères SOS du village d’Abobo-Gare partent se mettre en sécurité au village SOS d’Aboisso, lors des confl its dans la région d’Abidjan en 2011. Adeline se retrouve alors sans repères pour ses entraînements. Jacqueline l’in-cite à tenir bon : « C’est ce que tu as choisi. Moi je t’encourage ». Elle lui propose alors un endroit propice à l’entraînement, à l’écart des serpents qui lui font peur… Sa grande sœur, Dindji-Léonie, qui, admirative, surnomme sa cadette « Adeline ladivine », la soutient aussi beaucoup, la stimulant pour

son travail scolaire lorsqu’elle revient harassée de l’entraînement ou prenant le relais pour les tâches domestiques…

Les Jeux olympiques à Londres

Aujourd’hui, à 18 ans, la jeune fi lle a des échéances importantes puisqu’elle participe aux champion-nats d’athlétisme seniors d’Afri-que en juin, aux championnats du monde juniors d’athlétisme de Barcelone en juillet et aux Jeux olympiques de Londres du 27 juillet au 12 août prochain. « Je serai aux Jeux olympiques de Londres, mais mon objectif personnel, ce sont les Jeux de 2016 au Brésil, souligne-t-elle. J’ai encore besoin d’années d’entraînement pour espérer remporter une médaille

aux Jeux olympiques. » Adeline s’inspire de son modèle, Hussein Bolt (1). Elle s’attache en ce moment à améliorer son départ, un point crucial dans les courses de sprint.Désormais installée en Grande-Bretagne, Adeline a dû s’habituer au climat et au froid, mais aussi aux horaires contraignants d’une vie partagée entre ses séances d’entraînement et ses études au Loughborough College, au centre de la Grande-Bretagne. « J’ai dû faire des choix, des sacrifi ces,

dit-elle, renoncer à certains loi-sirs que j’aime, comme la télévi-sion ou les jeux vidéo, pour tirer au mieux parti de mon temps. » Toujours parmi les premières de sa classe, douée pour les langues puisqu’elle a appris l’anglais, l’al-lemand, l’espagnol et l’italien par elle-même en lisant des livres ou en regardant la télévision, Adeline a ainsi réalisé un autre de ses rê-ves d’enfant : étudier l’anglais et le sport en Grande-Bretagne. Ses études sont sponsorisées par une bourse HSBC. Elle loge au campus et partage le quotidien avec cinq autres étudiantes de différentes na-tionalités (chinoise, coréenne…). Cette vie à plusieurs lui convient. « J’aime être en famille », sou-rit-elle. Adeline avait fait part de

ses rêves à Kathie de SOS Villages d’Enfants Angleterre, rencontrée au village SOS d’Abobo-Gare. À son retour en Angleterre, Kathie a tout mis en œuvre pour que les rêves d’Adeline puissent se concrétiser. Elle est aujourd’hui la personne ré-férente d’Adeline qu’elle considère comme sa fi lle.

(1) Athlète jamaïcain, spécialiste du sprint,

triple champion olympique et détenteur

de trois records du monde.

J’ai dû faire des choix, des sacrifices, renoncer

à certains loisirs que j’aime pour à la fois m’entraîner

et poursuivre mes études.

Partout en France, le 10 JUIN participez aux Boucles du Coeur !Inscriptions : dans votre magasin Carrefour

sur internet : www.lesbouclesducoeur.comsur Facebook : facebook.com/pages Les-Boucles-du-Coeur

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