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VAMOS A LA PLAYA Scénario Williams Crépin et Gilles Thomas D’après une histoire de Williams Crépin -1- Générique. L'autoroute vue d'en haut. Des carcasses de métal brillent sous les rayons du soleil. Une petite voiture sur la file de droite, allure d'escargot. VOIX ( volontaire ) Y a pas de honte à être un gagnant, merde ! -2- Le soleil, l'autoroute. Un bras qui pendouille le long d'une portière brûlante, un bras tout blanc comme un premier jour de vacances. Une petite Renault 5 usée, cabossée, poussiéreuse, glisse en douceur sur le bitume mou et tiède. On plonge, vision d'un rapace sur sa proie, sur le bras qui dépasse de la fenêtre ouverte. VOIX DE DAVID Les Français sont des veaux ! Et moi, je serais plutôt du genre taureau... (un éclat de rire dans la voix ) Tu vois ce que je veux dire ! Pas de réponse. Au volant, dégoulinant de sueur, cheveux mi-long collés sur la nuque, chapeau de paille aux oreilles, la trentaine, DAVID. Il se tourne vers le côté passager : assoupie, la tête calée contre la ceinture de sécurité, une très jolie fille, brune, la vingtaine, cheveux attachés dans un ruban. -1-

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  • VAMOS A LA PLAYAScénario Williams Crépin et Gilles Thomas

    D’après une histoire de Williams Crépin

    -1-Générique.

    L'autoroute vue d'en haut. Des carcasses de métal brillent sous les rayons du soleil.Une petite voiture sur la file de droite, allure d'escargot.

    VOIX ( volontaire )Y a pas de honte à être un gagnant, merde !

    -2-Le soleil, l'autoroute.

    Un bras qui pendouille le long d'une portière brûlante, un bras tout blanc comme un premier jour de vacances. Une petite Renault 5 usée, cabossée, poussiéreuse, glisse en douceur sur le bitume mou et tiède.

    On plonge, vision d'un rapace sur sa proie, sur le bras qui dépasse de la fenêtre ouverte.

    VOIX DE DAVIDLes Français sont des veaux !Et moi, je serais plutôt du genre taureau...(un éclat de rire dans la voix ) Tu vois ce que je veux dire !

    Pas de réponse.Au volant, dégoulinant de sueur, cheveux mi-long collés sur la nuque, chapeau de paille aux oreilles, la trentaine, DAVID. Il se tourne vers le côté passager : assoupie, la tête calée contre la ceinture de sécurité, une très jolie fille, brune, la vingtaine, cheveux attachés dans un ruban.

    -1-

  • David la regarde amoureusement. Sa main droite quitte le volant pour saisir la molette d'inclinaison du siège passager. Il la tourne progressivement et abaisse le siège. Tout à cette manoeuvre, il en oublie sa conduite.La voiture fait un écart, frôle la bordure de sécurité. Deux roues dans le bas-côté pas vraiment stabilisé. La fille se réveille en sursaut et lui jette un regard sombre. Elle redresse son siège.David se justifie, un sourire en coin.

    DAVIDJe voulais te mettre à l'aise, que tu sois mieux installée quoi ...

    LA FILLE Genre couchée... ( ironique)... dans un lit d'hôpital ?

    David la dévore des yeux.Le volant tremble bruyamment entre ses mains : y a comme un problème dans la direction ...Le visage de David se rembrunit.

    -3-Sur le bas-côté, David examine la roue avant droite

    LA FILLEÇa te dérange pas si je continue le voyage ? Si je traîne trop, ma mère va s'inquiéter ...

    Elle se penche vers la banquette arrière pour prendre son sac à dos.De l'extérieur, David jette un coup d'oeil dans la voiture.Il découvre le postérieur de sa passagère, serré-moulé, dans un jean délavé, artistiquement déchiré sous la naissance des fesses, qui laisse voir, bien plus que deviner, la douceur d'un carré de chair.La fille sort de la voiture avec son sac et commence à faire du stop.David déçu, les bras qui pendouillent le long du corps.

    DAVIDTu me files ton numéro de téléphone ?

    LA FILLEJ'ai pas le téléphone.

    DAVIDAttends, je vais te laisser le mien ...

    David va vers la voiture pour chercher de quoi noter.

    LA FILLETe fatigue pas, j'appelle jamais ...

    -2-

  • David perplexe.Une voiture pile net devant l'auto-stoppeuse.David ahuri la voit s'engouffrer dans l'auto.Penchée à la fenêtre, elle lui fait un coucou d'adieu.

    LA FILLE (ironique)Merci pour tout !

    DAVIDY a pas de quoi !

    -4-La voiture est montée sur cric. David, ruisselant de sueur ...

    ... installe la roue de secours et serre les écrous. Il regarde son T-shirt, une très légère trace de cambouis, à peine visible, lui crève les yeux. Mine dégoûtée de David qui le retire et le met dans un sac en plastique déjà rempli de nombreux autres T-shirts sales. Il ouvre une valise bourrée de T-shirts de rechange. Monsieur aime les T-shirts nickels.

    -5-Sa voiture réparée, David arrive au poste de péage.

    Il tend sa fiche à une préposée peu souriante puis fouille dans les poches de son blouson posé sur son dossier.Le montant à payer s'inscrit sur le tableau lumineux : 120 francs.David retourne les poches de son blouson à la recherche de son portefeuille: rien.

    DAVIDMerde !

    Il dévisage la préposée au péage.

    DAVIDLa salope !

    La femme prend ça pour elle.

    LA PREPOSEEVous pouvez répéter ?

    David sort de la voiture.

    DAVID (paniqué)Mon portefeuille !

    La femme ferme la vitre de sa casemate en la faisant glisser.

    -3-

  • Elle parle dans un micro en regardant David qui ne l'entend pas.Derrière on s'impatiente.

    AUTOMOBILISTET'avance !

    DAVID ( tremblant et répétant )Elle m'a piqué mon portefeuille ....

    AUTOMOBILISTE ( lui faisant signe de ne pas tenir compte du feu rouge devant la caisse )T'emmerde pas, fonce !

    DAVIDJ'ai pas envie d'avoir les flics au cul ...

    AUTOMOBILISTE ( ricanant, en passant la marche arrière )Moi c'est pareil, moins je les vois, mieux je me porte...

    Pour sûr, un motard de la gendarmerie apparaît derrière David.Il lui fait signe de dégager le passage et de le suivre avec sa voiture.La préposée du péage, rassurée par la présence policière, rouvre sa vitre.

    LA PREPOSEE (à David)Y a des nationales pour les pauvres !

    -6-Sur le bas-côté, la voiture de David est arrêtée ...

    entre deux motos de la gendarmerie. David, à l'extérieur, en compagnie de deux gendarmes, ravis d'avoir un "client ". Le deuxième gendarme fait le tour de la R5 en quête de la "petite bête " pour épingler David : pneus lisses, vignette mal collée ... Quand on cherche, on trouve toujours.

    GENDARME... Bien sûr, les papiers du véhicule sont dans votre portefeuille...

    DAVID Exactement ...

    DEUXIEME GENDARME ( ironique )Et le portefeuille envolé !

    DAVID (il répète, las)Exactement ...

    GENDARME ( le sourire aux lèvres )Auto-stoppeuse, brune, une vingtaine d'années ?

    -4-

  • DAVID (sur le même ton)Exact... (ahuri à retardement) ... Hein ? Vous la connaissez ?

    DEUXIEME GENDARMEJean moulant, avec une déchirure là ?... ( il montre l'endroit )

    DAVID Euh, j'ai pas fait attention ... je regarde pas ce genre d'endroit.

    GENDARME Ça fait un mois qu'elle traîne dans le secteur ... Toujours les mêmes victimes : des pauvres types ...

    DEUXIEME GENDARME... qui la ramassent en espérant finir la journée avec elle

    GENDARMEDes naïfs !

    DEUXIEME GENDARME ( avec un rictus )Des vicieux...

    Les deux gendarmes se marrent. David n'ose plus rien dire. Le deuxième gendarme est intrigué par le bazar qui s'entasse dans le coffre de la voiture.

    DEUXIEME GENDARMEOn peut jeter un coup d'oeil ?

    David leur ouvre le coffre en soupirant.Le deuxième gendarme se penche et regarde les dizaines de marionnettes entassées sur des sacs.

    DEUXIEME GENDARMEVous faites collection ?

    DAVIDNon, je les vends ... ( bas ) J'essaie...

    Le deuxième gendarme montre une marionnette, le personnage classique du Gendarme de Guignol ( bicorne de sergent de ville et moustache à la Brigade du Tigre ).

    DEUXIEME GENDARME (ironique)Amusant ...

    DAVID ( faux-cul )

    -5-

  • Hé !, c'est pas moi qui les fabrique ...

    Le premier gendarme s'est approché et s'est saisi de la marionnette.

    DAVIDLes gosses adorent ça ... C'est mieux que les Game Boys ... et puis c'est fabriqué en France...

    Le flic vérifie sur l'étiquette.

    DAVID... enfin je crois ! ... (moment de panique) ... Je vous fais une démo !

    David lui prend la marionnette et en pioche une deuxième dans le coffre. Il se glisse de l'autre côté de la voiture, se baisse et fait apparaître les deux marionnettes au bord du toit comme dans un petit théâtre. Il improvise un petit spectacle.

    DAVID (voix de dessin animé) - Bonjour, monsieur le gendarme, j'espère que vous attraperez beaucoup de voleurs ...(il imite la voix grave du deuxième gendarme avec beaucoup de réussite)- Les mains en l'air ...- Mais j'ai rien fait( la marionnette gendarme s'approche de l'autre et le palpe )- Ah ça chatouille ! ...

    Le premier gendarme sourit.

    DEUXIEME GENDARME ( sinistre )On est tombé sur un comique ...

    GENDARMETu les vends combien tes marionnettes ?

    David arrête et se relève.

    DAVID ( fier )30 francs... pièce, hein !Choisissez, la maison fait libre service !

    Le gendarme fouille rapidement dans le coffre et en extirpe 4 marionnettes.

    GENDARME ( à David )Je te dois ?

    -6-

  • DAVID4 fois 30... 120 francs ...

    GENDARMEC'est marrant ça, c'est exactement ce qu'il te faut pour le péage ...

    David, bouche bée, comprend qu'il n'y a rien à faire.

    GENDARMEJe leur donnerai !

    DEUXIEME GENDARMEAllez, circulez ...

    David remonte dans sa voiture.Le motard lui colle la marionnette gendarme sous le nez et la fait parler du nez.

    GENDARMEEt bonnes vacances !

    -7-David abandonne l'autoroute et s'engage sur une départementale

    -8-La voiture de David se faufile sur le parking...

    ... surchargé d’un hypermarché agrandi pour satisfaire la vague de fond consommatrice de la saison touristique. David trouve son bonheur en dehors des marquages de stationnement autorisé.Il sort de la voiture, coup d'oeil alentour sur les acheteurs potentiels : un amoncellement de nuages à base de bermudas et débardeurs. Gaffe aux orages en fin de soirée.David extirpe les marionnettes de son coffre. Puis il sort des tréteaux qu'il avait sur sa banquette arrière et installe une sorte d'étalage de marchand ambulant.

    DAVID ( rêveur ) Je liquide le stock, bye-bye les marionnettes, bonjour les pépettes !

    -9-Des transporteurs de fonds, devant la caisse principale...

    ... de l'hypermarché patientent, l'oeil aux aguets, la main sur la crosse de leur revolver.Le plus petit, copie conforme de Joe Dalton, se lisse la moustache avec l'extrémité de sa langue.En bons cow boys, ils savent créer une sympathique ambiance western avec les moyens du bord. Dommage pour eux, leur public potentiel est absorbé par l'empaquetage et le monnayage de ses précieuses denrées périssables.

    -7-

  • -10-Sur le parking, un homme, 40 ans , engoncé dans un costume

    bas de gamme étriqué, rectifie l'angle de ses lunettes de soleil qui glissent sur son nez ruisselant de sueur. Le type décroise les bras et découvre un badge "Sécurité" qui trône comme une décoration militaire sur son torse gonflé.Le vigile marche sur David qui tente d'attirer l'attention des vacanciers avec un boniment proche de celui qu'il a servi aux gendarmes... Sans grand succès : personne ne s'attarde.

    -11-Le vigile se plante devant David...

    VIGILEIci c'est pas un souk, tu remballes ton bordel et tu dégages !

    DAVIDJe fais de mal à personne ...

    VIGILEJ'ai des ordres : pas de mendiants sur le parking !

    DAVIDJe suis pas mendiant, je suis commerçant ... ambulant !

    Le vigile fait semblant de partir.

    VIGILEÇa tombe bien, t'as cinq minutes pour dégager !

    DAVIDCinq minutes, c'est trop juste ... le temps qu'je range ... c'est fragile ces articles...

    VIGILEJe te donne un coup de main, si tu veux !

    Le vigile donne un coup de pied dans l'étal qui s'écroule. Sourire sadique du type.

    VIGILE ( gueule de tueur )T'as quatre minutes pour dégager !

    -12-Les transporteurs de fonds s’éloignent de la caisse principale.

    -8-

  • Le grand gaillard porte les deux sacs gonflés de la recette de la mi-journée. Deux mètres devant, "Joe Dalton" ouvre la route en humectant sa moustache.

    -13-David, sur le parking, une marionnette à la main, en perpétuel...

    ... mouvement, comme une girouette.Son bordel rangé, il tente une nouvelle technique commerciale et accoste les gens à leur sortie de l'hypermarché.Il use sa salive sans succès.

    -14-Sur le parking, trois types, l'air patibulaire, assis dans ...

    ... un break Volvo, le regardent l'air perplexe.David erre entre les voitures en stationnement à la recherche d'un éventuel client. Coup de chance, c'est pas un client qu'il trouve mais trois. David approche, sourire commercial aux lèvres.

    DAVIDBien le bonjour, messieurs, je suis sûr que vous êtes de gentils papas qui ne demandent qu'à faire plaisirs à leurs petits monstres...

    Le type, à l'arrière du break, l'interrompt sans ménagement.

    TYPE 1On déteste les gosses !

    DAVID ( faisant parler sa marionnette )Il est pas gentil, le monsieur ...( parlant à sa marionnette comme un ventriloque à sa créature )Oh, tu sais, il a peut-être des problèmes le monsieur ... Et moi les gens qui ont des problèmes, je les comprends ... et je suis même prêt à leur faire des prix...

    Le type à l'avant, sur le siège passager, un petit nerveux sec comme un coup de trique, s'apprête à bondir dehors.

    TYPE 2Tire-toi, connard !

    Il est retenu par le troisième larron, celui qui est au volant : un type au visage marqué par 30 à 40 ans de loyaux service. Deux petits points bleus, tatoués au coin des paupières, lui allongent les yeux. Une toison, touffue et frisée, s'échappe de l'échancrure de sa veste de survêtement rouge.

    TYPE 3

    -9-

  • Calme Jean Paul... expire ... ( puis souriant mais ferme, à David ) ... Merci jeune homme, mais nous ne sommes pas intéressés.

    DAVID ( insistant, avec un air de chien battu )Soyez sympa, même les gendarmes m'en ont achetées

    TYPE 1Il nous cherche ou quoi ?

    En arrière plan, derrière David, les convoyeurs rejoignent leur camion.

    TYPE 2 ( à ses comparses )Les v'là !

    David se tourne pour voir de quoi il parle, puis regarde à nouveau le break Volvo.

    David se pince : Gérard Depardieu est là, devant lui !Pas le vrai, bien sûr, juste un masque en latex à l'effigie de l'acteur. Un flingue pointe contre son nez, tandis qu'un index se tend en travers de la bouche lippue de la star caricaturée.

    DEPARDIEUChuuut !

    Tu parles d’un silence... et ça pète.Action !

    On avait “Depardieu” en star, continuons avec “Belmondo” ( le type 2 ) et "Johnny Halliday" ( le type 1 ) qui sortent de la voiture eux aussi avec des masques de latex.Bonjour le casting ! Les deux compèrent visent directement les deux vigiles. "Johnny", avec un fusil mitrailleur “Uzi” de l’armée israélienne, jubile. Le grand gaillard tombe à genoux avec ses deux sacs sans avoir le temps de dégainer.Pris sous les rafales, "Joe Dalton" se jette au sol et roule par terre.Des restes de l’entraînement, des gestes réflexes qui sauvent.

    Un troisième vigile bondit hors de la camionnette.Coups de feu en cascade et panique générale !Des chariots à ras bord qui dessalent, des bouteilles d’huile qui percent et éclatent en communiant avec du vin local.Attention au mélange ! Explosif !

    David, aux premières loges, au milieu des tirs, bouche bée sous la mitraille.Les balles perdues roucoulent aux oreilles des vacanciers hystériques qui trébuchent, titubent, roulent et retrouvent le quatre pattes de leur petite enfance.

    Une rafale poinçonne à l’horizontale la voiture de David, de l’aile avant au réservoir.DAVIDMes marionnettes !!!

    -10-

  • David se précipite pour sauver sa marchandise. "Johnny" lui fait un croche-pied. Le jeune homme s'étale.

    JOHNNYBouge pas de là !

    David obéit. Il serre contre lui, comme le nounours de son enfance, la marionnette qu'il espérait leur vendre sur le parking.La Renault 5 explose.David n’existe plus. Il se sent nu.Retour à l'action.

    La Volvo break des truands fonce sur le vigile blessé avec les sacs."Joe Dalton", position du tireur couché, vide son chargeur dans le pare-brise.Ça vole en mille éclats : l'averse de verre après les coups de tonnerre des explosions.Le break termine sa course en s'enfonçant dans des caddies, vides, encastrés, rangés les uns dans les autres comme une gigantesque chenille à roulettes qui explose.

    C'est dans ce genre d’ambiance que certains individus sont amenés à entendre des voix, c'est le cas de David. Une voix en fait... une seule, pas celle de la raison, celle du type au masque de Johnny.

    JOHNNYT'obéis ou t'exploses, c’est tout simple !

    "Johnny" saisit David par le collet et le relève. David liquéfié lâche sa marionnette. "Johnny" se colle derrière lui et, le canon de son Uzi plaqué sur les omoplates, le fait avancer vers les sacs qui gisent à terre.

    DAVID (aux vigiles)Tirez pas, tirez pas !

    Après la tempête, le calme. On entendrait voler une mouche dans la chaleur asphyxiante du parking, mais voilà, il y a toujours un émotif qui pleurniche dans son coin pour casser les atmosphères.

    L'heure est aux responsables qui accourent à la rescousse des irresponsables. Des types en costard, frais sortis des bureaux où ronronnent encore les machines à air conditionné, fraient avec le menu fretin en shorts et maillots. Le plus vieux, le plus ventripotent, lacs de sueurs sous les aisselles, un look de chef, à ses côtés le jeune vigile de tout à l'heure qui gueule dans le silence.

    VIGILES'il vous plaît messieurs-dames !Gardez votre calme, tout va bien ! La situation est sous notre contrôle !

    Les sacs en main David et "Johnny" marchent à reculons vers une voiture en stationnement.Le conducteur, un type d'une quarantaine d'années, ne bronche pas.Il n’a pas encore pigé ce qui risque de lui arriver.

    -11-

  • Une rafale, tirée en l'air, est plus explicite qu'un long discours.Le type disparait en rampant par dessus le siège passager et va grossir les rangs des témoins apeurés, retranchés derrière un garage à caddies.

    David n’a pas cette chance. “Johnny” lui serre tellement le cou qu’il se croit parti dans les vapes.

    DAVID.. vous plaît... respi...rer...

    JOHNNYTa gueule !

    Le parking nage dans le flou, l’image tremble, surchauffée par le soleil qui plombe.

    David devine, plus qu’il ne voit, le convoyeur blessé - celui qui tenait les sacs - ramper vers son flingue.

    Maintenant ça va très vite : "Johnny" pivote et pousse David en force dans la voiture désertée. Il y jette aussi les deux sacs.Pendant cette brève manoeuvre, il montre son dos au convoyeur.Le blessé, qui a récupéré son arme, lui tire dessus. “Johnny” s’affaisse, avant même de grimper dans la voiture, le dos en bouillie. Du sang gicle sur la joue et le T-shirt de David.“Belmondo” sort son masque de derrière une ménagère, qu'il ceinture par la taille, et fait exploser la tête du convoyeur.David retient un hoquet de nausée.Il subit la scène à travers le pare-brise de la voiture en stationnement, comme le spectateur d'un drive-in.Au programme ce soir, un film inédit de Peckinpah. Dehors la fusillade.“Johnny”, blessé à mort, essaie, dans un dérisoire réflexe de survie, de rentrer se mettre à l’abri dans l’habitacle.

    JOHNNYPousse-toi connard !

    David se pousse en tremblant de peur. "Johnny" n'entrera jamais dans la voiture. Il s'écroule au sol en glissant contre la portière qui se ferme en claquant.David seul dans la bagnole. La tuerie dehors. Les clés le narguent sur le contact.Il démarre et enclenche la première pour sortir de ce merdier.

    -15-David roule comme un con sur le parking.

    Il renverse du caddie et lève de pauvres diables embusqués qui jaillissent devant lui et qu'il évite de justesse.

    -12-

  • DAVIDPoussez-vous !

    Une seule idée en tête : sauver sa peau !

    -16-Un rugissement de moteur.

    Une moto de trial, roue arrière, à la parade. “Belmondo” pile devant “Depardieu”. Une détonation retentit au moment où il se hisse à l'arrière de la moto . "Depardieu" se brise, hurle de douleur, les deux mains sur la jambe juste au dessus du pied."Belmondo" réplique aussi vite que dans le "gun fight" final d'un western et abat le vigile du magasin qui vient de tirer.Il chope son comparse par le survêt et l'aide à grimper sur la moto. Dans la manoeuvre, "Depardieu" laisse tomber son arme.Il n'a pas le temps de la ramasser. La moto démarre à fond.La fusillade cesse faute de combattants.La course poursuite commence.Les motards seront les chasseurs... et David le gibier.

    -17-Dans le coeur de la station-balnéaire.

    David déboule comme un furieux.Place au chauffard... et à ses poursuivants.Les étalages d'articles de plage s'éparpillent sur les trottoirs.Une machine à glaces "à l'italienne", éventrée, déverse sa vanille-fraise dans le caniveau.Au programme, Grand prix de Monaco sauvage dans les rues de St. Martin-sur-mer .

    -18-Aux abords de la plage.

    La course poursuite franchit la ligne d'arrivée. La concentration de voitures, cul à cul, empêche d'aller plus loin.

    David essaie de sortir, la portière conducteur est bloquée. Il chevauche le siège passager et s'empêtre dans les sacs des vigiles jetés dans la voiture par "Johnny". David hésite un instant... pas trop longtemps.Il retire son T-shirt maculé de sang, met les sacs du butin dans un fourre-tout en osier qui traîne sur la banquette arrière, prend le tout et s'éloigne vers la plage. Derrière, on manifeste sa mauvaise humeur en klaxonnant.

    -19-David court sur la plage bondée d’estivants, son sac en osier...

    ... à la main.

    -13-

  • Ses chaussures s’enfoncent dans le sable. Il s'arrête devant une poubelle, retire son pantalon et l'enfouit dans le sac plastique, rayé blanc et rouge, Vacances Propres. David se retrouve en slip.Rien d'anormal, il n'est pas le seul sur la plage.

    -20-La voiture bouche la rue dans un embouteillage monstre.

    La moto de trial arrive à sa hauteur. Les deux types ont retiré leurs masques de stars.Celui qui pilotait ( Jean-Paul ) s’engouffre dans la voiture et ressort les mains vides. Il jette un oeil sinistre à son pote ( Gérard ) qui souffre le martyr en essayant de maintenir en équilibre l’engin qui ronronne au ralenti. Le type derrière klaxonne. En maugréant, il montre aux truands la direction de la plage. Gérard fait merci de la tête.Jean-Paul enfourche la bécane illico presto et met les gaz droit sur la plage.

    -21-Les truands abandonnent la moto ensablée dans la dune.

    Ils descendent sur la plage qu'ils scrutent à la recherche de David : autant chercher une aiguille dans une meule de foin !

    -22-La plage, le soleil, de la chair qui rosit, qui rougit.

    David est étendu sur une serviette, lunettes de soleil, casquette publicitaire du Tour de France sur la tête. Blotti contre lui, le sac en osier d'où il a pioché sa panoplie de vacancier. Surtout ne pas relever la tête et montrer son visage aux deux truands dont les silhouettes sinistres se profilent à quelques mètres.Au loin des sirènes de police qui approchent.Les truands décampent sans paniquer. David souffle, soulagé.

    -23-Des vacanciers pestent en cercle autour de la voiture...

    ... abandonnée par David. Ils sont rejoint par la police toutes sirènes hurlantes qui s'élance vers la plage, sans se soucier un instant de démêler l’embouteillage.

    -24-Deux policiers patrouillent sur la plage...

    Pour David, le répit aura été de courte durée.Avachi sur sa serviette, il essaie de se donner une contenance en saisissant le magazine qui traîne dans le sac en osier.Il commence à le feuilleter et le repose aussitôt en ayant la désagréable impression que tous les yeux de la plage sont fixés sur lui.Il s'agit d'un magazine homo hard à la photo de couverture sans équivoque.David panique, les flics s'approchent.Il a une idée : à côté, deux gamins jouent avec des billes et des figurines de coureurs cycliste sur une piste tracée dans le sable. David propose de se joindre à eux.

    -14-

  • Le plus grand des deux gosses dévore sa casquette du Tour de France des yeux. David est ravi de la lui offrir en gage d'amitié.Le gamin replace les cyclistes de plastique en bon ordre sur la ligne de départ, c'est à David de commencer. Il donne une pichenette trop forte et la bille va valser dans les décors, ça commence mal.Les flics passent à côté d'eux sans leur prêter la moindre attention.

    -25-Jean-Paul marche à grandes enjambées dans l'artère...

    ... commerçante de la cité balnéaire. Gérard, la veste de survêtement largement ouverte sur sa poitrine en sueur, claudique derrière lui. Drôle de couple, à commencer par la disparité physique : Gérard est massif, imposant, calme, son acolyte, beaucoup plus jeune, est un petit nerveux qui fait une bonne tête de moins que lui.

    GERARDJean Paul, attends-moi !

    JEAN-PAUL ( l'attendant quand même )Pourquoi faire ?

    GERARDA deux on est plus fort !

    Jean-Paul le contemple avec mépris.

    JEAN-PAULTu t'es vu, tu comptes même pas pour un !?Faut pas rêver ! Un demi, je veux bien... et encore !

    GERARDUn et demi, c'est toujoursplus qu'un.

    JEAN-PAUL ( reprenant sa route )Tu sais, moi les chiffres !

    -26-La plage se vide à mesure que le soleil décline dans le ciel.

    D'impressionnants coups de soleil zébrent les épaules et le dos de David. Une dernière pichenette dans la bille pour passer la ligne d'arrivée, il sera lanterne rouge.David redresse la tête et fait la gueule, mais ce n'est pas à cause de son échec. Il vient de découvrir, une centaine de mètres devant lui, des policiers nerveux qui fouillent, sans ménagement, le sac d'un garçon de son âge. David propose aux gamins la construction d'un château de sable.Le plus grand fait la fine bouche, mais le plus petit est content : il lui tend un seau multicolore en riant. David lui rend son sourire et attaque son premier pâté.

    -27-

    -15-

  • Gérard, les traits tirés, est assis sur un banc.Il contemple la mer. Devant lui, Jean-Paul tourne en rond comme une bête en cage.

    JEAN-PAULJe comprends pas tous ces connards qui passent leurs vacances dans l'eau ! On est pas des poissons, merde !

    GERARDProfite du soleil, Jean-Paul !

    JEAN-PAULOn dégage pas de ce putain de bled avant d'avoir serré ce petit con !

    GERARDQu'est-ce qui te dit qu'il va nous attendre ?

    JEAN-PAULJe le vois pas faire la route en ce moment ... Doit y avoir un flic derrière chaque platane ! Allez, la pause est finie !

    Il entraîne Gérard à se lever, pour continuer le chemin.

    GERARD (soupirant, la main sur sa blessure )Une seconde...

    JEAN-PAUL ( avec une ironie sadique )Qu'est-ce qui t'arrive ma vieille ! T'as des ampoules aux pieds ?

    -28-Un imposant château de sable se dresse sur la plage.

    David et le plus grand des enfants admirent leur oeuvre. L'autre gamin rapplique en tirant sa mère par le bras.La maman arrive essoufflée, confuse et charmante.Un sourire de David.La maman fait une moue admirative.

    LA MAMANSuperbe votre château !

    David montre les enfants.DAVIDOn s'y est mis à trois !

    Les gosses fiers comme tout.

    LA MAMAN

    -16-

  • Bravo !

    Le plus petit des gamins s'est approché du sac de David : une partie du magazine est visible ...

    LA MAMANC'est gentil de vous être occupé des enfants...

    DAVIDJ'adore les gosses ...

    David aperçoit avec horreur le gamin qui feuillette le magazine homo hard. Il veut intervenir mais trop tard : la maman s'en est aussi aperçu.

    LA MAMANC'est à vous ?

    DAVID ( hyper mal à l'aise )Je ...

    LA MAMAN ( outrée )Venez les enfants !

    La mère attrape ses gosses et s'éloigne le plus vite possible de David.

    DAVIDJe vais vous expliquer !

    David la regarde s’éloigner en craignant qu'elle prévienne les flics.Il s'active d'un seul coup, glisse sa serviette, roulée en boule, dans le trou qui a servi de carrière à la construction. Un coup d’oeil à gauche, à droite.Il déroule le drap. Les sacs du hold-up chutent dans la planque. David ne peut s'empêcher d'en ouvrir un : il regorge de liasses de billets ! Sourire béat de David. Mais il doit se dépêcher : il plonge la main dans le sac ouvert, en extirpe quelques billets qu'il cache dans son poing serré, referme le sac, se lève et entame la destruction du château de sable afin de combler le trou.

    -29-La patronne de l’hôtel rit au nez de David...

    ... toujours en slip, le sac en osier en bandoulière.La brave femme se penche sur son registre comme si elle voulait vérifier une dernière fois, pour faire plaisir.

    PATRONNEMon pauvre garçon, ici c’est réservé depuis 6 mois ! Les vacances ça s'organise ! Vous avez essayé les campings !?

    Moue de David.

    -17-

  • PATRONNE (confiante)Tenez, piochez, en cherchant bien on trouve toujours son bonheur !

    Elle fait tourner un présentoir surchargé de prospectus, en quadrichromie, consacrés aux charmes de la région. David pioche au hasard en essayant d'avoir l'air intéressé.

    PATRONNEBougez pas !

    Elle disparait dans son arrière-boutique.

    PATRONNEFaut pas rester comme ça !Ça fait des cloques, et...

    Elle revient avec un tube de crème, mais David n'est plus là.

    PATRONNE... les coups de soleil ça pardonne pas !

    -30-Rue principale, les échoppes sont illuminées.

    David se faufile dans la nuit en évitant l'éclat des devantures.Il se glisse dans une de ces boutiques, moitié dans la rue et moitié en intérieur, et en ressort habillé d'un T-shirt et d'un bermuda. Habillé de neuf, il jette le sac en osier dans une poubelle et s'efface de nouveau dans la pénombre, vacancier parmi les vacanciers. Ses coups de soleil, même s'ils le font terriblement souffrir, lui fournissent un alibi précieux.Dans le coin il n’est pas le seul à avoir mangé bon.

    Une voiture peinturlurée le fait sursauter en crachotant une annonce pour le bal et le feu d'artifice du 14 juillet.Un peu plus loin, des hommes en bras de chemises terminent l'installation d'une piste de danse et d'une estrade face à la mer.

    -31-David déambule sur le front de mer, solitaire et soucieux.

    Il observe le faisceau éblouissant d'une torche de police qui chahute des silhouettes enveloppées dans des sacs de couchage sur la plage.La traque continue.Les effluves d’un bar de nuit l’attirent, pleines de promesses d’alcool, de musique et de compagnie.

    -32-

    -18-

  • Dans une rue tranquille, les deux truands en marche. Gérard stoppe et s'asseoit sur le capot d'une voiture. Il soulève le bas de son pantalon et examine sa blessure d'un air perplexe.Jean-Paul s'est retourné et vient vers lui.

    JEAN-PAULSi t'étais moins gros ça serait pas arrivé !( Gérard ne comprend pas )Tu prends trop de place. Les balles qui traînent, c'est pour ta gueule ... Question de volume ... ( il ricane )

    GERARDLe plan c'était de piquer le fric ... Pas de tirer dans le tas ...

    JEAN-PAULAlors à quoi ça sert ça ... si on s'en sert pas ?

    Il exhibe son flingue en le caressant amoureusement;

    GERARDCa sert à ce qu'on soit gentil avec nous ... Avec notre artillerie pointée sur eux, les mecs nous auraient filé le blé sans broncher ...

    JEAN-PAULPas d'accord. Les armes, faut pas les laisser s'encrasser ... sinon, tu vois, c'est comme avoir une super nana dans son lit et puis pas la sauter ...

    GERARD ( il fait semblant de chercher )Rafraîchis-moi la mémoire, c'est quand déjà, la dernière fois que t'as eu une super nana dans ton lit ?

    Jean-Paul hausse les épaules.

    GERARD (faible)Un petit nabot comme toi ...

    JEAN-PAUL ( le saisissant au collet )Putain, m'appelle jamais " nabot " ! ...

    GERARD ( pas du tout impressionné )Calme le steack mec... j'ai compris ...

    Gérard quitte le capot de la voiture et montre le chemin.

    GERARDAllez, le gnome, on va poser notre cul dans un troquet

    -33-

    -19-

  • David, accoudé au bar, avale sa troisième Vodka-orange.L'ambiance est chaude, l'espace bondé, enfumé, irrespirable. Le troquet rassemble toute la population adolescente et branchée de la station balnéaire et des campings alentours. Un groupe de musiciens, à l'abri de l'arrière-salle, massacre des standards de rock en toute impunité . Les amplis saturés, sous les accords majeurs, interdisent toute conversation cohérente. David drague sans conviction une jolie blonde qui tente de passer sa commande au bar à côté de lui. Son mec arrive, elle part danser en lui faisant tchao-tchao en rigolant. David teste une parade amoureuse sur la piste, sans conviction.

    Une banquette lui ira très bien pour sa quatrième Vodka-orange. Il s'adosse et grimace, ses coups de soleil le lancent comme des pics.Il repère une fille plutôt tarte, limite moche, qui risque de fêter Sainte-Catherine sur son pouf juste en face de lui. ALICE, 28 ans, avale sa consommation, cul sec, en le regardant droit dans les yeux.David croit percevoir un coup d’oeil tout sauf discret à son adresse, un regard sur les côtés : à part lui, c'est le désert sur la banquette ... La fille se lève et se glisse sur la terrasse face à la mer pour rafraîchir sa solitude. Lui fait-elle signe de la suivre ?David met ça sur le compte d’une insolation qui lui chauffe les oreilles et, comme elle, avale son alcool cul-sec.

    -34-Alice prend l’air sur la terrasse.

    Un type l’invite à danser. Un mec normal, bas de gamme, sans superflu ni surprise, pépère, juste un peu saoul pour se donner du courage.Alice, super contente, accepte avec joie. Le copain du gars, un grand costaud resté en retrait, intervient.

    LE COSTAUDC'est pas vrai !Tu vas pas faire danser ce boudin !?

    Gueule ahurie de la demoiselle.Complicité de mecs bourrés.

    MECTu dis ça parce que t'es jaloux ! Fais pas la gueule, j'te la prête !

    Le type pousse Alice, horriblement vexée, dans les bras de son pote. L'autre la réceptionne comme un ballon de rugby, et s'écroule en arrière.La pauvre fille se retrouve les quatre fers en l'air, jupes relevées, avachie sur les genoux du gars.Les deux mecs hurlent de rire. Les autres spectateurs de la scène ont du mal à contenir des sourires.Humiliée, elle se débat les larmes aux yeux. Le gars debout l'agrippe sans ménagement et la ramène vers lui.

    -20-

  • MECTe sauve pas ma chérie !

    Il tire de son côté, pendant que son pote la retient en lui écrasant la poitrine : elle est prise en sandwich.

    ALICELaissez-moi partir !

    Les types la pelotent en gloussant.

    MECFais pas ta Sainte Nitouche !

    Alice se dégage et fond sur David

    ALICE (implorante)S'il vous plaît. Aidez-moi !

    Le pochard rigole de voir Alice qui se protège derrière le frêle David.

    MEC ( à David )Merde, attends ton tour, y en aura pour tout le monde !

    DAVID (mal à l'aise)Ecoutez, soyez sympas...

    Le costaud chope David par le cou et le colle en force contre Alice.

    LE COSTAUDVas-y, tape-toi le cageot ! Moi, j’en veux pas pour mettre mes ordures !

    Ça s’énerve rapidos. Les mecs ont le vin teigneux et l'envie de se battre.David se dégage et déchire sa chemise neuve.L'autre soûlot lui met des claques par derrière.Bagarre de chiffonniers. C'est ni facile, ni très régulier.Voyant les videurs rappliquer, les types déguerpissent.David n'a rien vu, il relève la fille galamment.Les deux molosses l'attrapent par les cheveux et lui font traverser la piste de danse en le traînant et en le rouant de coups.Se dirigeant vers la sortie, ils passent devant le bar où les deux truands, perchés sur des tabourets, sirotent un verre.La scène n'échappe pas à Gérard.

    GERARD ( donnant un coup de coude à Jean-Paul )Hé, regarde ... C'est pas un bon établissement ça ? ...

    Les deux truands s'engouffrent dans le sillage des videurs. Evidemment, David ne les a pas vus ...

    -21-

  • -35- A l'extérieur du bar.

    Les videurs ont entraîné David à l'écart.Comme ça se passe si souvent, ils se calment les aigreurs, et les ardeurs sur le bagarreur amateur. Ils ont l’occasion de la soirée de se prouver qu’ils sont les plus forts.

    VIDEUR 1T'aimes ça la bagarre, hein ?Nous aussi, ça tombe bien !

    David, les bras autour de la tête, façon casque intégral, encaisse en gueulant. Les gros bras cognent à tour de rôle. Le nez de David pisse le sang.A l'entrée, les truands regardent la scène.

    JEAN-PAUL ( voulant intervenir )Putain, il est à nous ce mec ...

    GERARDLaisse, il vont nous le laisser juste à point ... Viens !

    Ils s'enfoncent dans l'obscurité du parking attenant d'où ils vont pouvoir suivre l'évolution de la situation. Alice sort du bar en hurlant.En pleine crise de nerfs, elle chope le videur, le plus près d'elle, le poing dans la tignasse, et tire, tire, en beuglant comme une folle.Le videur fait un pas en arrière, en secouant la tête violemment.Alice, agrippée à deux mains à sa chevelure, n'a aucune intention de le lâcher. Le type regrette sa coiffure un peu longue derrière les oreilles. La prise glisse sur les cheveux gras. Alice abandonne à contre coeur une touffe de cheveux en bataille entre les doigts de chaque main. Le mec se tient les tempes en gémissant.

    VIDEUR 2 (ahuri)Elle m'a arraché les cheveux ! Elle m'a arraché mes putains de cheveux !

    L'autre videur est immobile, estomaqué, avec à ses pieds David qui se tient le ventre. Mais David a de la chance : on ne s'occupe plus de lui ... David n'est plus frappé, Alice se calme. Le videur qu'elle a agressé en profite pour s'approcher d'elle.

    VIDEUR 2Salope, je te tue !

    Il lui envoie une claque qui résonne dans la nuit.

    -22-

  • Alice ne bouge, ni ne cille sous le coup. Mais très vite, elle a bouffé du lion. Elle lui explose les couilles d'un furieux coup de pied.Le fier à bras rebondit sur place en braillant.L'autre videur se rapproche. Alice hurle préventivement en le voyant s'approcher.

    VIDEUR 1Je vais t'arranger ta sale face de truie !

    Il sort un poing américain et se le glisse sur les phalanges avec un rictus.Alice se tait net.

    VIDEUR 1Ça calme tes petits nerfs, hein ?

    Alice saisit un parasol publicitaire qui trône sur une misérable table en fer. Elle agite le pieu du parasol comme une lance et tient ainsi le videur en respect.

    ALICESi t'avances, je t'embroche !

    VIDEUR 2Laisse tomber ... elle est folle !

    Les deux types abandonnent la partie.Ils rejoignent le bar à reculons, sans quitter des yeux Alice qui n'a pas lâché son parasol.

    VIDEUR 1Tire-toi, pétasse, les boudins comme toi, ça fait fuir la clientèle !

    Les videurs disparaissent dans t'établissement.Alice court vers David qui émerge, les mains enfoncées dans les côtes.

    ALICEVous avez mal ?

    DAVID (pince-sans-rire)Non... Pourquoi, je devrais ?

    -36-Depuis le parking, les truands observent la scène.

    JEAN-PAUL ( piaffant d'impatience )A notre tour de faire mumuse !

    GERARD (admiratif)Minute ! T'as vu la furie ?

    -23-

  • Jean-Paul lui montre son flingue.

    JEAN-PAULJ'ai de quoi la calmer la grosse !

    GERARD ( ironique )C'est comme ça que tu parles aux femmes, toi le grand séducteur ?

    -37-David grimace en se relevant, Alice est à ses côtés.

    L'excitation de l'action retombée, Alice craque.

    ALICELe monde est vraiment pourri...

    Elle fond en larmes comme une petite fille.Elle vient vers lui, pose la tête sur son épaule et sanglote doucement contre sa poitrine. Un slow, une rengaine, transporté par la brise, s'échappe du bar.

    ALICEVous voulez bien danser avec moi ? (suppliante) S'il vous plaît... personne veut jamais danser avec moi ! Juste une minute ! DAVIDDoucement, j'ai mal partout ! Et puis ...

    D'un air dégoûté, il montre son T-shirt auréolé de sang.

    ALICEÇa, je m'en fous

    Sourire timide.David approuve du regard et la guide en rythme.

    Enlacés, solitaires, dans le vent tiède d'une nuit de juillet, ils dansent, collés serrés, sur le slow de leur été. Quand le vent le permet on comprend quelques phrases du refrain: "On se chamaille, on se jette des bottes de pailles..."Le visage humide d'Alice sèche contre les joues du garçon. Puis, brusquement troublée par son étreinte, elle s'écarte et s'en va.

    DAVIDQu'est-ce qui t'arrive ? Attends !

    Il la rejoint.Elle le repousse.

    ALICEVous en profitez ! Toujours la même chose !

    -24-

  • DAVIDC'est toi qui te frottes ....

    ALICEPourquoi tu joues à ça avec moi !?Tu m'as regardé ? Ça se soigne les yeux !

    Alice met en avant, sans la moindre formalité, sa formidable poitrine.

    ALICEAlors qu'est-ce que tu penses du gros boudin ? Vas-y, tu peux le dire, j'm'en fous ! (elle le pousse vers le bar) Fonce là-dedans, y en a plein ! Des mignonnes avec des beaux petits culs !T'as du choix, elles viennent toutes pour ça ! (mutine)Moi, j'suis v'nue pour danser...

    Elle lui fredonne le slow de l'été à l'oreille, lui prend la main, un pas de danse.ALICEOn se chamaille, on se jette des bottes de pailles ... Elle est trop con cette chanson...

    La drôle de fille s'enfuit à nouveau. Cette fois David ne cherche pas à la retenir. Elle s'arrête, pivote, un regard vers lui, comme un regret.

    David ne se décide pas à la suivre.Il fait demi-tour et s'enfonce dans l'obscurité du parking.

    -38-David marche sur le parking ...

    ... en regardant son T-shirt sale d'un air tracassé.

    Voix de GERARDFinalement, je crois qu'on va vous prendre une de ces jolies marionnettes !

    David a à peine le temps de réaliser que déjà les deux truands l'escortent solidement, chacun d'un côté.

    GERARDAh, j'oubliais... (en gonflant les joues) ...Boum, a plus marionnettes !

    Jean-Paul plaque son flingue sur les côtes de David.

    JEAN-PAUL

    -25-

  • Toi aussi tu vas exploser, ça va vraiment être dégueulasse !

    GERARD ( à Jean-Paul )Calme-toi ... Jean Paul... expire !

    La répartition des rôles est claire, comme dans les polars où, pour les interrogatoires, il y a un flic sympa et une brute. Le sympa c'est Gérard, la brute c'est Jean-Paul.

    GERARD Je suis sûr que notre ami va être doux comme un agneau, hein?... ( puis d'un ton exagérément désolé en examinant sur le visage de David les traces du passage à tabac des videurs)... Oh mais, dis donc, qu'est-ce qui t'est arrivé, t'as fait une chute de planche à voile ? ...

    JEAN-PAULBon, ça suffit les salamaleks ! GERARD (à Jean-Paul)Deux secondes tu veux bien, on cause entre personnes de bonne composition.

    A David d'une voix claire et posée.

    GERARD... Alors voilà, mon associé et moi-même, voudrions savoir où est l'argent ?

    DAVID ( tentant le coup )De... de quoi vous parlez ?

    GERARD ( grimaçant, la main sur le front )Oh que ça commence mal, que ça commence mal !

    N'y tenant plus, Jean-Paul balance David contre une bagnole en stationnement.

    JEAN-PAULEnculé !

    L'alarme de la voiture hulule dans la nuit.

    GERARD ( à David )Tu vois, mon collègue il aime pas bien qu'on se moque de lui !

    Jean-Paul lui tape la tête contre la tôle.

    DAVID ( lâchant le morceau )Je l'ai enterré sur la plage ...

    -26-

  • JEAN-PAULDis pas de conneries !

    Attiré par le bruit de l'alarme, un des videurs du bar approche.

    JEAN-PAUL ( à Gérard )Je m'en occupe.

    Gérard entraîne David à l'écart.

    GERARD ( ton complice et inquiet )Tu sais qu'il veut vraiment te tuer ... Bon, bien sûr, il en fait beaucoup mais l'un dans l'autre je crois qu'il te veut vraiment du mal ...

    Du côté de la voiture, Jean-Paul est resté impassible. Le videur va vers lui et l'apostrophe.

    VIDEUREt toi le nabot ! Qu'est-ce que tu fabriques à côté de ma caisse ?

    Jean-Paul flingue le videur d'un coup de feu propre et net. L'homme s'affaisse sur place, un gratte-ciel qui s'effondre sous le choc des pains de dynamite.

    JEAN-PAUL ( crachant sur le corps du videur )Nabot toi même !

    L'acte de Jean-Paul laisse, pendant un court instant, Gérard interdit. David en profite pour lui échapper.Jean-Paul vise et tire dans la nuit.Gérard court quelques mètres, puis se plie de douleur.

    -39-Alice conduit en pleurs en essuyant ses larmes...

    ... d'un revers de manche.

    ALICE (en sanglotant)T'en avais un, tu le laisses partir...

    Elle baise la pierre pendant à son collier, une sorte de talisman.

    ALICEFaites le revenir ! S'il-vous-plaît, faut qu'il revienne !

    -40-David émerge sur la route et part à la rencontre...

    ... de la voiture qui fonce sur lui. Il hurle.

    DAVID

    -27-

  • Stop ! Alice découvre David qui court vers elle les bras en croix, surexposé dans ses phares, une apparition dans la nuit. Elle pile, l'auto se fout en travers.David rentre dans l'habitacle.

    DAVIDFonce !!! Fonce !!!

    David lui écrase le pied sur l'accélérateur.

    ALICE (illuminée)On se retrouve, c'est écrit !

    Une flamme éclaire la nuit, et le tireur (Jean-Paul), le temps de la détonation.Le pare-brise s'affaisse sur les genoux d'Alice.Alice recommence à hurler.

    Elle empoigne le volant et fonce droit sur le truand en fermant les yeux.David récupère les commandes et tire un grand coup sur le volant, avant qu'ils ne s'empalent dans un camion en stationnement.Ils évitent le choc d'extrême justesse.Alice cesse de crier.

    ALICEJe l'ai eu, tu crois que je l'ai eu !?(inquiète) J'ai entendu un drôle de bruit ...

    Alice s'enfonce le poing dans bouche, effrayée par le sens de ses paroles.

    Elle l'a raté d'un cheveu. Jean-Paul se relève en crachant de la poussière. L'air haineux, ilfixe les feux arrières de la petite bagnole qui s'effacent dans la nuit.

    -41-Alice conduit , David est à ses côtés.

    ALICET'habites où ?

    DAVID ( vaseux )Euh, là je ... je suis en vacances

    ALICET'es à l'hôtel ? Au camping ?

    DAVIDBen ...

    -28-

  • ALICE (enjouée)Tu veux qu'on aille chez moi ? ...

    DAVID ( sentant la galère )Non, il faut que je rentre ... au camping

    ALICE (déçue)D'accord, on y va ...

    La voiture s'arrête devant un poste de police.

    DAVIDQu'est-ce que tu fais ?

    ALICE ( comme si ça coulait de source )Ben, on va porter plainte

    DAVIDC'est pas la peine ...

    ALICEMais on nous a tiré dessus !

    DAVIDQu'est-ce que tu veux que je leur raconte ? Je les ai même pas vus ces types-là ...

    ALICEParce qu'ils étaient plusieurs ?!

    DAVIDJe sais pas ...

    ALICEFaut quand même le signaler ... peut-être que c'est pas la première fois que ça arrive ... Allez, viens !

    Elle ouvre la portière et s'apprête à descendre.

    DAVID Et si ... si on allait d'abord chez toi ?

    ALICE ( aux anges )C'est vrai, tu veux ?

    Il fait un oui mutin de la tête.Alice referme sa portière et démarre. Un sourire radieux éclaire son visage.

    -42-

    -29-

  • David suit Alice.Elle rentre dans une villa déglinguée, en front de mer.Ils sont dans le salon.

    ALICE ( désignant un canapé )Installe-toi, je vais te soigner

    David chuchote de crainte de réveiller quelqu'un.

    DAVIDTu sais, ça va aller, c'est pas la mort.(inquiet) Réveille-pas toute la baraque !

    Alice, du haut de l'escalier, hurle exprès.

    ALICE (exagérément fort)Tu peux hurler si tu veux, personne t'entend ! (volume normal) Je suis seule avec toi !

    Elle disparaît. David ouvre la porte -pour fuir ?-, observe la nuit, hésite puis referme la porte qui fait un horrible bruit en grinçant.Il jette un oeil vers l'étage.

    -43-Alertée par le bruit, Alice sort la tête de la salle de bains.

    Elle jette, vite fait, un coup d'oeil dans l’escalier pour vérifier que David n'est pas parti. Une ombre la rassure.Alice est fébrile, excitée. Elle se raccorde dans la glace, en marmonnant, fait un signe de croix en quatrième vitesse, s'asperge de parfum.

    ALICEMerci, grand merci...

    Elle pioche, dans son chemisier, une pierre verte, sertie d'une chaînette en or. Une variété de caillou miraculeux comme on en trouve par correspondance dans les magazines de télévision. Elle couvre le bijou de nombreux baisers en signe de remerciements.

    ALICEIl est chou, mais qu'il est chou!Merci, grand merci !(surexcitée)Trognon, trognon, trognon !

    -44-Une photo punaisée sur le mur intrigue David.

    Un homme, la quarantaine, pose, avec son collègue, devant sa moto de service. Deux motards de la gendarmerie.

    -30-

  • Un peu plus loin un vieux plan de St-Martin-sur-mer, d'avant les constructions "pieds-dans-l'eau". La maison y figure déjà, il la localise d'autant plus facilement qu'elle est entourée par un trait de stylo. Son index suit le court trajet qui sépare la demeure de son trésor enterré sur la plage. Alice descend en balançant, comme une écolière son cartable, une petite trousse flanquée d'une croix verte.

    ALICEIl vaut plus rien ce plan ... depuis, ils ont construit partout !

    Elle le rejoint et se colle innocemment contre lui. David remarque le parfum.Alice remarque... que David remarque.

    ALICE (en faute)J'en ai trop mis ?

    Elle se souffle dessus, persuadée de l'efficacité de la méthode, pour chasser le surplus.

    DAVIDNon, non... ça sent très bon !

    Pour changer de sujet, David montre la photo avec les motards.

    DAVIDC'est qui ?

    ALICEMon père ... avec Maurice, un collègue. Devine lequel c'est mon père ?

    DAVID ( montrant l'un des deux )Lui ?

    ALICE ( ravie )Comment t'as su ?

    DAVIDLui a pas de moustache, toi non plus, donc ...

    ALICET'es génial ! ... Allez, maintenant je joue à l'infirmière ... (elle montre la trousse)

    David se laisse soigner mais continue la conversation.

    DAVID Il ... il est gendarme où ?

    ALICE ( indiquant la voûte des cieux )

    -31-

  • Tout là-haut ... Les anges ont intérêt à pas faire d'excès de vitesse

    DAVID ( désolé )Je ...

    ALICEIl a été tué pendant un hold-up ... J'avais six ans ... Depuis je supporte plus la violence

    DAVIDDésolé pour ce soir ...

    ALICEFaut quand même se défendre ...

    Silence. David regarde son T-shirt maculé de sang.

    DAVIDDis, t'as pas un T-shirt à me prêter ?

    -45-Les truands errent dans la station.

    GERARD On va dormir où ?

    JEAN-PAULPouquoi faire dormir ?

    GERARDMerde, faut bien se reposer...

    JEAN-PAULJe sais pas, j'm'en tape... A la belle étoile, sur la plage ...

    GERARD (surpris)Sur la plage ?... T'as plus peur de l'eau !?

    Gérard vient de remarquer quelque chose, il change de ton.

    GERARDLe camping ça te dit ?

    A quelques mètres d'eux, un couple de cyclotouristes vient de poser un tandem contre un mur. Le tandem croule sous les sacs de voyage harnachés sur la fourche et le cadre. Carte routière en main, les cyclotouristes viennent demander un renseignement à Gérard qui leur sourit à l'avance.

    -32-

  • -46-Plusieurs verres plus tard, dans la villa.

    Les deux jeunes ont forcé sur l'alcool. David porte un nouveau T-shirt bien trop grand pour lui.

    ALICE (pâteuse)Viens, je vais te montrer quelque chose !

    DAVID (encore pire)Quoi ?

    ALICESurprise !

    DAVIDTu sais moi... les surprises en ce moment !

    Alice le tire par la main pour l'extraire de la douceur d'un fauteuil.

    -47-David au milieu du jardin derrière la villa

    Alice lui tient les deux mains et le fait tourner sur place, tout doucement.

    ALICEOuvre les yeux maintenant.

    Tout à coup, les uns après les autres, des nains de jardin semblent sortir de terre, grâce à un effet de lumière.

    ALICEFormidable, non ?

    David regarde la jeune fille avec inquiétude.

    DAVIDOuais... (pour lui faire plaisir)... génial !

    Alice l'entraîne à la rencontre de ses étranges créatures de plâtre.

    ALICEJe les peins moi-même !

    DAVIDAh ouais, super !

    Alice est tout à coup passionnée par ce qu'elle raconte.

    ALICE

    -33-

  • Lui, le pauvre chou quand je l'ai trouvé, il avait perdu la tête !

    Elle glisse son doigt à la base du cou d'un nain grassouillet au visage poupin.

    ALICESes propriétaires l'avait carrément abandonné, j'ai trouvé le corps dans un fossé, et la tête 100 mètres plus loin... C'est dingue ce que font les gens...

    DAVID (en écho)C'est dingue...

    Alice fait une bise sur le bonnet du nain.

    ALICEJ'adore les travailler ... Je me suis installé un petit atelier pour les restaurer ...

    De la main, elle montre une cabane en bois attenante à la maison avec, sur le côté, un vieux vélo.

    ALICEÇa m'occupe et ça me fait un peu d'argent, un petit peu...

    DAVID (sérieux)Moi c'est les marionnettes.

    Alice aux anges de trouver quelqu'un qui partage une passion similaire à la sienne.Elle le fait asseoir à ses côtés, sur la pelouse.

    ALICETu en as beaucoup ?

    DAVID (rêveur)J'en avais pas mal... mais j'en ai plus...

    ALICEPourquoi ?

    DAVID (sinistre)Un accident.

    ALICEJe suis désolée.

    Silence. David se raidit. Alice lui prend la main.David ébauche un mouvement pour se lever.

    ALICE (directe, bas, presqu'inaudible)

    -34-

  • J'ai envie... de faire l'amour.Je sais pas comment ça se demande ...Tout de suite faire l'amour avec toi.

    David silencieux.Alice debout la main tendue.

    ALICEViens...

    Une seconde d'hésitation de David, il va dire non.

    ALICE ( déçue, sourire triste )Ça va j'ai compris ... Te justifie pas ... J'ai l'habitude...

    DAVIDAttends ...

    ALICE (sèche)T'inquiète pas, t'auras ta chambre ...

    -48-Le camping municipal.

    Les truands sont en train de monter une tente. Visiblement, ils manquent d'expérience. L'édifice est bancal, les piquets instables ...Agenouillé, Jean-Paul maintient une corde, Gérard est de l'autre côté.

    GERARDTire maintenant ...

    Une des armatures s'écroule.

    JEAN-PAULMerde, ça fait chier ! ... Fallait piquer une caravane, putain !

    D'une tente voisine, on se plaint des éclats de voix de Jean-Paul.

    VOIX ( accent germanique )Chut ! C'est l'heure de dormir ...

    JEAN-PAUL ( se levant )Putain, personne me dit quand c'est l'heure de dormir !

    Il sort son flingue et se dirige vers la tente qui a osé protester.

    GERARD ( le retenant )Calme-toi... Jean Paul... expire...

    -49-

    -35-

  • La chambre de David est minuscule, mansardée.David est allongé, les bras croisés derrière la nuque. Ses yeux ouverts fixent le plafond : il repense à sa journée.

    On gratte à la porte. David relève la couverture et adopte la position du dormeur.La porte s'ouvre.Les yeux clos, semblant de dormir.

    Dans l'obscurité, il sent Alice qui lui caresse doucement le front. Elle lui chuchote à l'oreille.

    ALICETu dors ?

    Pas de réponse, Alice continue.

    ALICEMon ange ! Mon amour !Trognon... Trognon... Trognon...

    Alice lui caresse l'épaule, en plein sur ses coups de soleil.

    DAVID (sincère)Aïe ! Mes coups des soleil !

    ALICEExcuse-moi ...

    Le charme rompu, elle redevient timide, maladroite...David allume la lumière.Alice apparait complètement nue avec sa pierre magique qui pendouille autour de son cou. Elle couvre son opulente poitrine de ses mains, l'air effrayé.

    Lui reste interdit, immobile, oubliant ses coups de soleil. Alice sort sans un mot.Il éteint et s'allonge sur le ventre espérant enfin dormir tranquille.

    Erreur : la porte s'ouvre en laissant rentrer un rayon de lumière qui barre le dos brûlé de David.

    ALICEBouge-pas, je m'occupe de toi !Qu'est-ce que tu dois avoir mal, mon pauvre chéri !

    Alice passe de la crème sur le dos de David, en massant et en chantonnant une berceuse.

    -36-

  • ALICE"Doux, tout doux, dans le cou.Chaud, tout chaud dans le dos. "

    Progressivement, elle se colle contre lui, ses seins contre sa peau.David bouge pour se dégager. Alice l'embrasse à pleine bouche en l'étreignant de son corps avec passion. Elle est active, échevelée, possessive, elle se prépare à lui faire l'amour comme si c'était la dernière ou la première fois. David déconcerté.Alice se calme aussi brusquement qu'elle s'est excitée et le regarde avec des yeux de chien triste.

    ALICE (flippée)Il faut que tu sois doux, très doux, mon amour !

    DAVIDJ'ai encore rien fait...

    ALICEViens, doucement, tout doucement !

    Alice s'allonge sur le dos, les yeux clos. Elle l'attrape par les mains et l'entraîne vers elle, en elle.Alice prend maintenant David par la nuque et lui colle les oreilles contre sa bouche. Elle lui rentre la langue dans le lobe tout en répétant.

    ALICETranquille, fragile...Le petit oiseau dans son nid ! La première fois il doit être charmant !

    David relève la tête, incrédule, elle la presse contre ses seins.Il balbutie la bouche écrasée contre ses tétons.

    DAVID La première ... ?

    ALICEIl faut aimer pour faire l’amour ! ... (elle crie)Mon amour viens ! ...

    Alice se transforme en furie. Elle inverse la position, monte sur lui, fini les douceurs...

    ALICEVite ! Fort ! Viens ! Je veux sentir ton gros engin !Putain déchire-moi, fort ! Vas-y, je veux la sentir ta bite... Putain défonce-moi... plus !

    -37-

  • Maintenant, maintenant, balance la purée !Oui... c'est bon, ça brûle !

    Elle crie très fort, hurle, ses doigts lacèrent la peau de David qu'elle comprime au risque de l'étouffer.Enfin elle jouit.Alice timide juste après.Après le plaisir, la honte l'envahit.

    ALICE (embarrassée)C'est ce qu'on doit dire ? J'ai pas l'habitude, ils crient comme ça dans les films... en cassette.Je fais pareil !

    Elle se couche sur le côté et ramène le drap sur sa poitrine.

    ALICELes gros mots... ça te plaît ? Moi ça me gêne un peu !

    DAVIDOn dirait pas.

    Alice lui embrasse le torse tendrement et commence à le caresser.

    ALICETon petit oiseau dans mon nid !

    David se laisse faire avec plaisir et répond à ses caresses.

    -50-Les truands dorment dans leur tente enfin édifiée ...

    ... enfin c'est surtout Gérard qui dort. Il ronfle même, puissamment ... ça empêche Jean-Paul de trouver le sommeil. Jean-Paul a recours aux vieilles recettes : il siffle aux oreilles de Gérard. Effet nul.Jean-Paul sort son pistolet et introduit le canon de l'arme dans la bouche du bruyant dormeur.Le système est efficace, Gérard s'arrête.Jean-Paul retire son arme, le ronflement reprend.Il est obligé de laisser le canon en place pour espérer dormir.

    -51-La villa d'Alice avec, en arrière-plan, un ciel très bleu

    La caméra monte sur la façade ensoleillée jusqu'à une fenêtre au premier étage.

    -52-Dans la chambre dévastée.

    -38-

  • Sur le lit, David endormi, recouvert partiellement d'un drap fripé. Il ouvre un oeil. A ses côtés, la place est vide.Une pendulette sur la table de chevet : déjà 9 heures.

    DAVID ( paniqué )Merde !

    Il saute du lit.

    -53-Couloir du premier étage

    David habillé sort précipitamment de la chambre, en finissant d'enfiler son T-shirt définitivement trop grand. Il descend l'escalier mais s'arrête à mi-course devant Alice qui apparaît en bas.Elle est vêtue d'un vieux peignoir de bain élimé et porte un plateau avec un petit-déjeuner.

    ALICE ( souriante mais déçue )Je voulais te faire une surprise !

    DAVIDNon, c'est moi !

    ALICE ( mutine )La surprise ?

    DAVIDC'est moi qui vais te faire une surprise !

    ALICEC'est quoi ?

    DAVID (improvisant)Je ... je vais acheter des croissants.

    ALICE ( déçue )C'est plus une surprise, si tu me le dis ... et puis je fais un régime...

    DAVIDJe vais prendre que des petits ...

    Alice sourit, fière de son bonheur.

    -39-

  • -54-David sort de la villa perché sur le vélo

    Alice le regarde partir. Elle est un peu triste.

    ALICEFais gaffe... c'est le vélo de papa !

    -55-David pédale comme un fou jusqu'au littoral.

    Il pose le vélo contre un lampadaire et court vers la plage.

    -56-David dévale une dune de sable.

    Sa position lui permet une vue d'ensemble de la plage. Sans être encore la grosse foule, quelques vacanciers profitent du soleil matinal.Malchance : à l'endroit où est enterré son trésor, un groupe de vieillardes dynamiques s'initie aux joies de l'aérobic sous la houlette d'un jeune adepte de la gonflette.David remarque aussi une femme, genre clocharde, qui se balade avec un caddie rempli d'un bric-à-brac incroyable.La femme ramasse sur le sable une canette de bière. Elle l'examine, en regarde l'intérieur puis la rejette.La femme s'arrête à une poubelle. Elle fouille et trouve le pantalon que David avait jeté la veille. Elle le met dans son caddie et continue ses recherches.David rebrousse chemin après l'avoir bien observée.

    -57-Les deux truands sont assis sur un muret qui longe la plage.

    Entre eux, deux gobelets de café fumant et un sac de boulangerie avec des croissants.GERARDHier soir, pourquoi t'as flingué le mec sur le parking ?

    JEAN-PAULIl faisait chier ...

    GERARDSi tu tues tous les mecs qui te font chier ...

    JEAN-PAUL... eh ben, on me fera plus chier !

    Raisonnement imparable qui laisse Gérard perplexe.

    GERARD (la bouche pleine)Et ça te fait quoi de descendre un mec ?

    JEAN-PAULÇa me fait une balle en moins, c'est tout ...

    -40-

  • GERARDEt aujourd'hui on peut compter sur une journée sans cadavres ?

    JEAN-PAUL ( philosophe du désespoir )Une journée sans cadavres, c'est comme un repas sans vin.

    -58-Agence location de voitures.

    David, souriant, est au comptoir. Il attend que l'employée, la vingtaine pomponnée, ait fini de remplir le formulaire le concernant.

    FILLE LOCATIONVotre permis de conduire, s'il vous plaît ...

    David fait semblant de chercher, il tape sur ses poches vides.

    DAVIDJe l'ai oublié à la villa !

    FILLE LOCATIONC'est loin ?

    DAVIDHeu ... pas très !

    FILLE LOCATION (la tête dans son formulaire)Allez-y, le temps que je remplisse les papiers.

    DAVIDJe vous donnerai le permis en vous rendant la voiture. C'est plus simple !?

    La fille lève la tête de son imprimé.

    FILLE LOCATIONPas de permis, pas de voiture...

    Soupir de David.

    -59-Jean-Paul passe d'une voiture en stationnement à une autre...

    ... en vérifiant que les portières sont bien fermées.Gérard boitille derrière.

    GERARDArrête, tu vas nous faire repérer !

    Jean-Paul continue comme s'il n'avait pas entendu.

    -41-

  • GERARDTu piqueras une caisse quand on aura récupéré le magot !

    JEAN-PAULT'as pas mal à la tête à force de dire des conneries ?!

    Une voiture de la police municipale entre au ralenti dans le parking.Jean-Paul s'apprête à fuir en courant.Gérard lui pose la main sur l'épaule pour le retenir et le calmer.

    GERARDCalme... Jean-Paul... expire, lentement, c'est ça, sois naturel...

    JEAN-PAULMoi quand je suis naturel, je tire des caisses et je plombe des flics !

    La voiture de flics s'éloigne.

    -60-Rue commerçante.

    David sort d'un magasin avec un sac à dos flambant neuf.

    -61-David fait du vélo sur le sable mouillé.

    Sur ses épaules, le sac à dos vide ballote au rythme de ses coups de pédales.

    David a retrouvé ses repères et creuse avec l'énergie du désespoir.Il ne trouve rien. Il creuse plus profond.Le premier sac apparaît couvert de sable.

    -62-David sur son vélo s'engage dans une rue...

    ... en sens interdit. Sur ses épaules le sac à dos est gonflé par le précieux trésor. Malheureusement pour lui une voiture de la police municipale arrive juste en face et lui bloque la route. Un petit coup de sirène pour faire sérieux.Le flic au volant lui fait signe de faire demi-tour et de se remettre dans le bon sens de la circulation. David obtempère et réintègre le droit chemin.

    La voiture de police le suit au pas sur une centaine de mètres. David s'arrête devant une boulangerie en espérant que les policiers le dépasseront. Erreur, ils stoppent aussi.

    -42-

  • Pensant s’échapper, il rentre dans la boutique.La porte n’a pas le temps de se fermer, un des flics la retient.

    SERVEUSE (à David)Vous désirez ?

    David attend qu'on l'arrête. Il n'a même pas entendu la serveuse.

    SERVEUSEJe vous laisse réfléchir !

    En attendant elle tend d'office deux baguettes et deux pains au chocolat au policier.SERVEUSE (au flic)C'est vous tous ces barrages sur les routes ?

    POLICIER MUNICIPALAffirmatif ...

    SERVEUSE (soupirant)C'est pas bon pour notre image de marque, ça.

    POLICIER MUNICIPAL Tant qu'il y a la mer, les gens viennent ...

    Et il sort, ses baguettes sous le bras ...

    SERVEUSE (haussant les épaules)Complètement débile ce flic !

    David a vécu la scène complètement immobile et proche de la syncope.

    SERVEUSEIl va pas s'évanouir le jeune homme ?

    -63-Gérard traîne toujours la patte derrière son comparse.

    Ses traits sont marqués par la fatigue et la souffrance.

    GERARDJe crève de chaud... Arrête un peu !

    JEAN-PAUL (sec)Non ! Si tu m'avais laissé piquer une tire t'en s'rais pas là !

    Gérard s'arrête. Il regarde autour de lui en soupirant.

    GERARD Il est pas assez con pour se balader en plein jour...

    -43-

  • JEAN-PAULQu'est-ce que t'en sais qu'il est pas assez con ? Tu le connais ?

    GERARDSuffisamment pour savoir qu'il est moins con que toi !

    C'en est trop : l'air mauvais, Jean-Paul marche droit sur Gérard.

    GERARD ( lui exposant sa poitrine )Eh ben, vas-y, flingue-moi ! Je t'en prie ...

    JEAN-PAULMe tente pas ...

    Faisant face à Gérard, Jean-Paul ne voit pas David qui arrive en plein sur eux avec son vélo qui grince à chaque tour de roue.Gérard lui l'a vu.

    GERARDLe voilà !

    L'autre pense que c'est une blague et ne se retourne pas.

    JEAN-PAULMe prends pas pour un con !

    Gérard se lance à sa poursuite en claudiquant.

    JEAN-PAULTe fous pas de...

    Jean-Paul se retourne enfin. David voit Gérard foncer droit sur lui. Il freine et fait demi-tour.

    -64-David pédale frénétiquement.

    -65-Jean-Paul rejoint Gérard ...

    Les truands savent bien qu'à pied ils n'ont aucune chance de rattraper David. Jean-Paul avise une voiture qui s'apprête à quitter son stationnement. Il fonce vers elle et ouvre la portière pour monter à l'avant.Le conducteur, un homme d'une bonne cinquantaine d'années, est surpris par l'irruption de Jean-Paul.Il va protester mais le flingue du truand dingue, braqué sur ses côtes, lui en enlève l'envie.

    JEAN-PAULAllez, fonce ! ... Par là !

    -44-

  • Gérard grimpe à l'arrière, à côté d'un minuscule yorkshire qui se met à aboyer frénétiquement.

    GERARDFait frais ici ...

    JEAN-PAULBagnole climatisée ... j'ai le nez creux moi ...( puis au conducteur )Ecrase le champignon et fais taire ton clébard

    LE CONDUCTEURC'est parce que... elle aime pas qu'on crie...

    Le chien apeuré se blottit sur les genoux de Gérard qui sourit en le caressant.GERARD Voilà, voilà, faut pas avoir peur ... (puis pour Jean-Paul) ... il est mignon, ce petit chien

    -66-David sue abondamment sous le soleil et l'effort.

    A la faveur d'une circulation clairsemée la voiture des poursuivants se rapproche. David est fait. Jean-Paul passe la tête par la fenêtre.

    JEAN-PAULOn le tient, l'enculé !

    Le yorkshire aboie. La voiture pile. Jean-Paul se cogne contre le pare-brise et se tourne vers le conducteur désolé qui montre un feu tricolore au rouge.

    JEAN-PAULT'as peur pour ton permis à points ?

    Jean-Paul frappe le conducteur violemment au visage. Sous la violence des coups, le type perd connaissance et s'affaisse. Jean-Paul fait basculer le corps vers lui, l'enjambe et prend le volant.Le yorkshire aboie de plus belle.

    JEAN-PAUL ( à Gérard )Et fais taire ce chien, merde !

    GERARD ( très calme )On te dit qu'il faut pas crier? T'écoutes jamais quand on te parle ?

    -67- La voiture arrive à la hauteur de David.

    -45-

  • Elle fait un écart. David se casse la gueule sur le trottoir. La voiture pile alors que David reprend ses esprits. Jean-Paul sort de la voiture comme un diable de sa boîte. Il braque David avec son flingue.

    JEAN-PAULVa retrouver tes marionnettes, connard !

    ... et appuie sur la détente.Le coup de feu part.Gérard tire sur la manche du truand excité et détourne son bras.L'impact explose, 50 centimètres devant le nez de David qui croit mourir.

    Jean-Paul, fou furieux, envoie Gérard valdinguer contre la voiture.

    GERARD ( se justifiant )Si tu le butes, on saura jamais où est le fric !

    JEAN-PAUL ( presque calme )J'allais pas le buter ... ( puis éructant ) ... J'allais juste lui exploser sa putain de gueule de merde !

    -68-David profite que les deux truands papotent pour...

    ... escalader le portail d'une villa juste devant lui.

    -69-David traverse le jardin de la villa en courant.

    Un gros chien genre doberman se précipite sur lui et s'agrippe à son sac. David réussit à se dégager et à enjamber un grillage qui le fait passer chez le voisin.Le chien lui mord les mollets.

    -70-Au même moment devant la villa.

    Jean-Paul tente de faire la même chose que David mais il lui manque une dizaine de centimètres pour prendre prise sur le haut du portail.

    JEAN-PAULAide-moi, c'est trop haut !

    GERARD (bas)C'est toi qu'est trop petit, nabot !

    Gérard s'approche et fait la courte échelle à Jean-Paul. Le yorkshire tourne autour d'eux en aboyant.

    GERARDPour faire ce métier, il faudrait une taille minimum ...

    Jean-Paul disparaît de l'autre côté.

    -46-

  • -71-Jean-Paul, à peine atterri dans le jardin se trouve...

    ... nez à nez avec le chien ultra énervé.Le chien lui saute à la gorge, le truand dégaine et tire. Le molosse blessé tourne en rond en poussant des cris stridents. Jean-Paul continue son chemin jusque derrière la villa.David a disparu.Jean-Paul rebrousse chemin en pestant.

    -72-Du haut du portail, Jean-Paul saute sur le trottoir...

    ... et atterrit aux pieds de Gérard

    JEAN-PAULIl a foutu le camp, le connard !

    Gérard prend le petit yorkshire dans ses bras et le colle d'office dans les bras de Jean-Paul . Le truand ne sait pas quoi faire de l'animal qui jappe dans ses bras.Maintenant que l'autre a les mains prises par le chien, il lui pique son flingue et escalade le portail.

    JEAN-PAUL Qu'est-ce que tu fous, rends moi mon flingue ! Je te dis qu'il a foutu le camp !

    Le yorkshire se met à aboyer.

    JEAN-PAULTa gueule, connard !

    -73-Gérard dans le jardin de la villa

    Il s'approche du chien qui s'est couché sur le flanc. L'animal couine, pantelant.

    GERARDFais de beaux rêves...

    Il plaque l'arme sur la tête du chien, ferme les yeux ...

    -74-Dans une villa voisine.

    Un couple prend son petit-déjeuner sur une pelouse. Le type est plongé dans son quotidien dont la une est couverte des images sanglantes du hold-up. On entend une détonation, le coup de grâce tiré par Gérard.

    L'HOMME ( fort )Ça suffit, les pétards ...

    -47-

  • LA FEMME ( fataliste )Le 14 juillet c'est une fois par an.

    L'HOMME (bougon)Une fois de trop

    -75-Sa besogne faite, Gérard rejoint Jean-Paul dans la rue.

    GERARDJ'aime pas voir souffrir les animaux.

    Jean-Paul tend le yorkshire pour s'en débarrasser.

    JEAN-PAULRends-moi le flingue...

    GERARDPas question, t'es trop nerveux ...

    Le petit chien mord la main de Jean-Paul qui le laisse tomber par terre.

    JEAN-PAULPutain ! ...

    GERARDTu vois, t'énerves tout le monde !

    Bruit d'une voiture démarrant. Jean-Paul se retourne et aperçoit le conducteur au volant de sa voiture. Jean-Paul se précipite et pénètre dans l'habitacle. Le conducteur a le visage tuméfié et les gestes lents : il n'a pas eu le temps d'enclencher une vitesse.

    LE CONDUCTEURPitié, ne me frappez pas ! Pitié !

    JEAN-PAUL ( le frappant )On t'avait dit de pas bouger ! ...

    GERARD ( le retenant )Arrête ...

    JEAN-PAULPasse-moi le flingue... (énervé)...Sinon... je... je le finis à mains nues !

    LE CONDUCTEUR ( suppliant )Prenez la voiture ... elle est encore sous garantie ... Tenez, les papiers.

    -48-

  • Le type leur tend une pochette plastifiée avec la carte grise et l'assurance.GERARDPutain, on perd du temps ! ... ( au conducteur, autoritaire ) Demi-tour !

    JEAN-PAULC'est quoi ce plan ?

    GERARDCe plan c'est que le seul type qui nous intéresse, il est parti par là-bas ... alors pour le retrouver il faut se bouger le cul !

    JEAN-PAUL ( au conducteur )T'attends qu'j'te frappe, connard ?

    Tremblant, le conducteur obéit.

    -76-La voiture des truands en maraude.

    JEAN-PAUL ( abattu, à Gérard )On le retrouvera pas ... ( au conducteur ) Gare-toi là connard !

    Le conducteur obéit. Jean-Paul se tourne vers Gérard.

    JEAN-PAULLe flingue !

    GERARDPourquoi faire ?

    JEAN-PAULÇa me rassure ... c'est psychologique ...

    GERARDPsychopathique, tu veux dire ...

    JEAN-PAULSi tu penses me bluffer avec tes mots à la con, tu te trompes ...

    GERARDJe te rends ton joujou mais il faut que tu me jures de pas faire mal au monsieur, qui a été très gentil et très poli avec nous.

    -49-

  • JEAN-PAULIl va nous balancer aux flics !

    LE CONDUCTEURNon, je vous jure que non ...

    JEAN-PAULTa gueule, connard !

    GERARDTu vois, il a juré alors à toi maintenant ...

    JEAN-PAULA moi quoi ?

    GERARDA toi de jurer ... (il imite Jean-Paul )"Je jure de ne pas tuer le gentil monsieur dès que j'aurai récupéré mon pétard."

    JEAN-PAULÇa va, je jure de pas tuer le monsieur !

    Gérard lui rend son arme. Le conducteur a un sourire crispé.

    JEAN-PAUL ( au conducteur )Ça te fait rigoler ?

    LE CONDUCTEURNon, non ...

    JEAN-PAULJe supporte pas qu'on se foute de ma gueule !

    Jean-Paul pointe son arme sur la tempe du conducteur.

    GERARDT'as juré ...

    JEAN-PAUL ( avec morgue )Me souviens plus ...

    Jean-Paul appuie sur la gâchette. Le percuteur tape, "clac", plus de balle. Jean-Paul pas content. Gérard content.Le conducteur est pris de convulsions. Il se tient le bras droit.

    JEAN-PAULQu'est-ce qui lui arrive ?

    GERARD

    -50-

  • C'est le stress, le coeur qui lâche.Faut l'emmener à l'hosto.

    JEAN-PAULNon, mais t'es malade !?

    GERARDC'est lui qu'est malade ... Laisse tomber, c'est trop tard !

    Effectivement, le conducteur a rendu l'âme.

    JEAN-PAULMerde ! Tout ça, c'est de ta faute !

    GERARDPardon ?

    JEAN-PAULSi t'avais pas gâché la dernière balle pour le cabot, lui il serait mort comme tout le monde ... avec une balle dans la peau ... ( en regardant le corps )Merde, j'aime pas ça, ça fait mort naturelle, ça va nous porter malheur !Faut le bazarder, vite fait !

    GERARDOù ça ?

    JEAN-PAULN'importe où ... (comme un gamin) On dira que c'est un mec qui aura fait une crise cardiaque dans la rue, c'est tout ...

    GERARD ( ironique )T'as raison, avec ce que tu lui as mis sur la gueule, on va tout de suite penser à une crise cardiaque ...

    -77-David marche rapidement dans la rue, son sac sur le dos.

    Il est écorché aux genoux et à l'avant-bras.Apeuré, il jette souvent un coup d'oeil anxieux derrière lui pour s'assurer de l'absence des truands.Ça klaxonne derrière. David se retourne en sursaut.Il reconnaît tout de suite le pare-brise cassé : c'est la voiture d'Alice qui s'approche. David s'arrête. La voiture stoppe à sa hauteur. Alice est au volant. A ses côtés, une fille, 25 ans, belle comme une couverture de magazine féminin style "Jeune et Jolie": BEATRICE.

    -51-

  • Alice sort et court à la rencontre de David.

    ALICE ( paniquée )Mais t'es blessé ! Qu'est-ce qui t'est arrivé ?

    DAVIDJe... Je me suis cassé la figure ... (embarrassé) ... en vélo !

    Sans même regarder David, Béatrice lève les yeux au ciel.

    ALICE ( maternelle )Mon petit oiseau ! Voilà ce que c'est de sortir de son nid... quand on sait pas voler... Viens, je vais te soigner ...

    Elle lui ouvre grand la portière arrière. Après une hésitation, David fait le pas et monte. Alice remarque sa blessure au mollet.Elle examine la plaie de plus près..

    ALICE Tu t'es fait mordre !?

    DAVIDNon, non... (puis comme s'il s'en souvenait d'un seul coup)... Ah si... Un chien... un chien errant!

    Béatrice regarde David, en secouant la tête, comme si elle contemplait un débile profond.Alice retourne au volant.

    ALICEQu'est-ce que t'as fait du vélo ?

    DAVID (penaud)Ben... en fait... (rapidement) On me l'a piqué...

    BEATRICE ( ironique )Qui ça, le chien ?

    Sourire crispé de David. Alice fait enfin les présentations.

    ALICEBéatrice, ma soeur ...

    DAVID ( étonné )Ta ... ta soeur ?

    BEATRICE Pas jumelles mais presque ... On se ressemble, hein ?

    -52-

  • David sourit bêtement. Alice démarre.

    ALICE Allez, on rentre !

    BEATRICE ( protestant )Et mon maillot !?

    ALICEY a urgence, on a un blessé !

    BEATRICETu plaisantes ... ( se tournant vers David d'un air méprisant ) ... Je vais pas perdre une après-midi de soleil pour les trois égratignures de monsieur...

    DAVID ( à Alice, pour faire bonne figure )C'est vrai ... c'est superficiel !

    ALICE (minaudant)C'que t'es courageux mon petit oiseau...Je m'arrête à la pharmacie ... J'ai plus de compresses.

    -78-La voiture des truands est arrêtée dans une rue isolée.

    Jean-Paul, à l'extérieur, saisit les jambes du cadavre du conducteur affaissé à l'avant.Gérard, à l'arrière, caresse le yorkshire.

    JEAN-PAULOn le balance là le connard... Aide-moi !

    GERARDPour un enterrement dans la plus stricte intimité, faudra repasser.

    Gérard indique de la tête un groupe d'adolescents qui chahute sur le trottoir opposé.

    JEAN-PAUL ( soupirant )On fera ça en nocturne.

    Jean-Paul referme la portière et regarde le yorkshire.

    JEAN-PAULFaudrait aussi zigouiller le petit rat ...

    GERARDT'as peur qu'il parle ?

    -53-

  • JEAN-PAULJe voudrais pas le séparer de son maître ...

    GERARDMaintenant, son maître c'est moi.

    Jean-Paul s'approche du yorkshire qui aussitôt se met à grogner.

    GERARDTu vois, il t'aime pas ... c'est pas une preuve d'intelligence, ça ? ... ( puis indiquant le corps à l'avant ) ... Bon, ton copain on en fait quoi en attendant la nuit ?

    -79-Centre ville : rue commerçante.

    Alice se gare à proximité d'une pharmacie et sort de la voiture.

    ALICEJe suis là dans deux secondes.

    Elle s'éloigne d'un pas rapide vers la pharmacie. David et Béatrice restent seuls dans la voiture.

    BEATRICE ( ironique )T'as bien de la chance de te faire cajoler comme ça !

    David ne relève pas l'ironie et décide d'engager la conversation.

    DAVIDVous êtes là pour le week-end ?

    BEATRICEOuais, ça compromet tes plans ?

    DAVIDNon... non, j'ai pas de plan.

    Béatrice allume l'auto-radio pourri et monte le son assez fort. Pas facile à aborder, la Béatrice.David marque le tempo en claquant des doigts maladroitement et à contre temps.

    DAVID ( parlant de la musique )J'aime bien ... ça swingue !

    BEATRICE (désolée)M'étonne pas que tu te colles avec ma soeur !

    Elle change de fréquence et capte un vieux morceau de Bourvil:"Le croque madame". Elle se tourne vers David.

    -54-

  • BEATRICEÇa, t'aimes aussi ?

    Bide complet pour David qui ne sait plus quoi répondre. Elle éteint. Silence pesant qui ne dure pourtant pas longtemps.Béatrice sort de la voiture et laisse David seul.

    DAVIDOù tu ... vas ?

    Béatrice s'engouffre un magasin de lingerie féminine de l'autre côté de la rue. David ne peut s'empêcher de la mater : un short sexy, déchiré dans un jeans, met en valeur ses jambes toutes en longueur et moule ses fesses toutes en rondeur.

    David seul dans la voiture, assis sur la banquette arrière. Un coup d'oeil au tableau de bord. Alice est partie avec les clés de contact.Coup d'oeil à la pharmacie : pas de traces d'Alice. Nerveux, il sort de la voiture et marche quelques mètres pour se détendre, enfin essayer ... Il se retrouve en face du magasin de lingerie.De l'autre côté de la rue, dans la boutique, Béatrice lui fait signe de la rejoindre.David hésite.

    -80-Dans le magasin de lingerie.

    David, entouré de "body", de bas et de nuisettes en soie véritable, progresse en direction de Béatrice qui l'attire comme un aimant.Béatrice, une main sur l'épaule de David, les lèvres contre son oreille.

    BEATRICEFous-ça dans ton sac !

    Elle lui montre un déshabillé en satin qu'elle pose sur son corps en faisant des mines.David est gêné.Elle lui tend discrètement l'étoffe, roulée en boule. David panique.Il regarde dans tous les sens et refuse de prendre l'article.

    DAVIDÇa va pas la tête ...

    BEATRICET'as la trouille ?

    DAVIDC'est pas ça ... c'est... je ...

    BEATRICETu me l'offres, alors ?

    -55-

  • DAVID ( il bégaie )Je... je... Enfin oui, ça me ferait plaisir

    BEATRICE ( abrupte )Ça va pas Ducon... Y a que mon mec qui peut m'offrir ce genre de trucs !T'es mon mec, toi ?

    David fait non de la tête, l'air idiot.Béatrice raccroche le déshabillé.

    BEATRICEAllez, on se tire ... Avec ta gueule de petit saint, personne nous fera chier !

    Un vendeur qui les observait en douce depuis le début les aborde.

    LE VENDEUR ( mielleux )Je peux vous aider ?

    BEATRICENon, ça va, on regardait ... ( puis agressive ) ... Mais si vous voulez me fouiller, allez-y, vous gênez pas ... (sourire)J'adore me faire peloter par des inconnus !

    Le vendeur ne tombe pas dans le panneau, il abandonne Béatrice et se tourne vers David.

    LE VENDEUREt le petit monsieur on peut savoir ce qu'il a dans son sac à dos ?

    DAVID (mal à l'aise)Je vous jure, j'ai rien volé ...

    David tremble et rougit comme un enfant pris en faute.

    DAVIDJe le jure !

    LE VENDEURJe vous crois, je voudrais juste jeter un petit coup d'oeil !

    BEATRICEVous êtes lourd, puisqu'il vous dit qu'il a rien piqué ...

    David agrippe son sac à dos et cherche la sortie des yeux.Le vendeur se poste devant la porte d'un air satisfait.

    -56-

  • BEATRICEVous avez vu sa gueule...

    Béatrice montre des sous-vêtements "coquins".

    BEATRICEIl sait même pas à quoi ça sert !

    Le vendeur devant David, la main sur le sac.

    LE VENDEURVous préférez que j'appelle la police ?

    BEATRICEBen, ouais, appelez-les !

    David immobile au bord de la syncope. Le vendeur marche vers sa caisse et décroche le téléphone en regardant Béatrice dans les yeux.

    LE VENDEURVous l'aurez voulu !

    BEATRICELes flics adorent qu'on les dérange pour rien !

    Dans la rue, juste dehors, des enfants font péter des grappes de pétards.

    BEATRICESurtout aujourd'hui... Ils ont que ça à faire !

    A cet instant, un gamin balance un pétard qui pète dans la boutique.

    LE VENDEURPetit con !

    Le vendeur part à sa poursuite et s'arrête sur le devant de sa boutique.Il lève le poing et crie après la bande de mioches qui détale en riant.Béatrice et David en profitent pour sortir.Béatrice tourne autour du vendeur en l'énervant.

    BEATRICEQu'est-ce que vous attendez ? Vous avez pas un flingue dans votre tiroir caisse ? Pang Pang ! Dans les gosses... feront plus chier les moutards... Pang pang !

    Regards curieux de quelques badauds. Le vendeur est exaspéré.

    LE VENDEUR ( à Béatrice et David )Putain, foutez le camp !

    Le vendeur rentre dans sa boutique.

    -57-

  • -81-David et Béatrice dans la rue.

    David a toujours son précieux sac sur le dos.

    BEATRICE ( curieuse )Fais voir ce que t'as piqué ...

    DAVIDMais j'ai rien piqué ...

    BEATRICEFaut pas me prendre pour une conne... Laisse-moi deviner : c'est un cadeau pour Alice ? Un sous-tif pigeonnant ? Allez, fais montrer !

    En se marrant, elle s'agrippe à son sac à dos, soulève le rabat du dessus et plonge la main dans le sac. David tourne sur lui-même pour se dégager.

    DAVID ( hystérique )Arrête !

    BEATRICE ( abandonnant la partie )Pauvre naze !

    Béatrice se retrouve avec une poche en papier à la main : le sac de croissants qu'a acheté David.

    DAVID (se justifie)Des croissants pour Alice... Ils sont tout écrasés ... ( râlant ) ... Bravo !

    BEATRICET'es vraiment mignon ...

    Béatrice balance le sac de croissants entre deux voitures en stationnement.BEATRICEC'est pas bon pour son régime !

    Ils montent dans la voiture. Silence pesant. Alice revient avec un sac de pharmacie bien rempli.Elle monte dans la voiture, le quotidien local à la main.

    ALICERegardez !

    Elle leur montre la première page du journal avec sa une sur le hold-up sanglant à l'hypermarché. Crispation de David.

    BEATRICEPutain, y a eu la guerre ?

    -58-

  • ALICENon, pas ça, on s'en fout ! En dessous...

    Alice lui montre un petit encart en bas de la page.

    ALICE ( enthousiaste )Y a une foire à la brocante demain, à Berleville !

    BEATRICE ( sinistre )Le pied ...

    ALICE ( à David )L'année dernière, y avait un truc des années soixante ... un nain qui venait d'Amérique, avec la tête d'Elvis, des franges en céramique, tu te rends compte ... Je demande le prix ... 5000 balles ! Si j'avais de l'argent, je dis pas mais là ...

    BEATRICE (ironique )Demande à David de te l'offrir ...

    Sourire niais de David.

    -82-Rue commerçante : les truands dans " leur" voiture.

    Jean-Paul au volant. A ses côtés Gérard, le yorkshire en boule sur les genoux.JEAN-PAUL (frissons)Putain, on se les gèle !

    GERARD ( relevant le col de son survêt )Si tu l'avais pas buté, on aurait eu le mode d'emploi de la climate ...

    Jean-Paul éternue bruyamment.

    JEAN-PAULJe l'ai pas buté ...

    GERARDAllez, gare-toi là, on va se réchauffer les os au soleil.

    Jean-Paul se gare.JEAN-PAUL ( montrant de la tête le yorkshire)Tu vas le garder longtemps ce clébard ?

    GERARDJ'ai jamais pu piffer les salauds qui abandonnent leurs chiens en vacances.

    -59-

  • JEAN-PAULJ'me balade pas avec ce chien de pédé.

    Gérard ne répond pas et ouvre la porte. Le yorkshire saute sur le trottoir.

    JEAN-PAUL Tu prends pas sa laisse ?

    GERARDLa laisse c'est la prison du chien !

    JEAN-PAULT'es vraiment fêlé !

    Les deux truands marchent côte à côte. Le chien trottine devant eux.Soudain, Gérard s'arrête net.

    GERARDDis, regarde ... La bagnole d'hier soir ... Je rêve, à l'arrière... le petit con !

    Effectivement la voiture d'Alice est coincée dans la file de voitures qui roulent au pas.Gérard retient Jean-Paul qui fonce déjà tête baissée.