une nouvelle ruralité émergente regards croisés sur les transformations rurales africaines

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UNE NOUVELLE RURALITÉ ÉMERGENTE REGARDS CROISÉS SUR LES TRANSFORMATIONS RURALES AFRICAINES

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  • UNE NOUVELLERURALIT MERGENTE

    REGARDS CROISS SURLES TRANSFORMATIONSRURALES AFRICAINES

  • Cirad 2013 ISBN : 978-2-87614-692-1 Deuxime dition, mai 2013 Photo de couverture : Sylvain Perret - Cirad 2005 Impression : Impact Imprimerie - Saint Gly du Fesc

  • UNE NOUVELLERURALIT MERGENTE

    REGARDS CROISS SURLES TRANSFORMATIONSRURALES AFRICAINES

  • Citation : Losch B., Magrin G., Imbernon J. (dir.), 2013, Une nouvelle ruralit mergente. Regards croiss sur les transformations rurales africaines. Atlas pour le Programme Rural Futures du NEPAD, Montpellier : Cirad, 46 p.

  • Cet atlas sur les transformations rurales africaines a t conu la demande du NEPAD et sous le pilotage dIbrahim Assane Mayaki, secrtaire excutif de lAgence du NEPAD, dEstherine Lisinge Fotabong, directrice des programmes et de la coordination, et Benot Faivre-Dupaigre, conseiller agricole du secrtaire excutif.

    Il sinscrit dans le cadre du partenariat entre le Cirad et le NEPAD et a t prpar, avec le soutien financier de lAFD, pour alimenter les travaux et dbats du Forum africain pour le dveloppement rural (FADR) organis Cotonou, Bnin, du 2 au 4 mai 2013. Il contribue aux rflexions du programme Rural Futures du NEPAD.

    La ralisation de latlas a impliqu plusieurs quipes du Cirad (les units de recherche Art-Dev, Bsef, Cired, Mosa et Tetis, et la Dlgation la communication). Il a t coordonn par Bruno Losch, Graud Magrin et Jacques Imbernon. Le Cirad est seul responsable des erreurs et omissions qui auraient pu survenir dans sa prparation.

    Coordination gnrale : Ibrahim Assane MayakiEstherine Lisinge FotabongBenot Faivre-Dupaigre

    Coordination scientifique : Bruno LoschGraud MagrinJacques Imbernon

    Coordination ditoriale :Cathy Rollin

    Auteurs :Nicolas BricasBenot DavironBruno DorinValry GondJacques ImbernonBruno LoschGraud MagrinGwenalle Raton

    Analyse de donnes : Michel Passouant

    Cartographie :Audrey JolivotJean-Claude Lorente

    Maquette et mise en page : Laurence Laffont

  • AvAnt-proposAlors que nous clbrons les cinquante ans dexistence de lOUA / Union africaine, la forte croissance conomique enregistre au cours des dernires annes par plusieurs pays africains est une excellente nouvelle. Cependant, cette croissance ne sest pas traduite par un recul significatif de la pauvret : elle na pas cr suffisamment demplois dcents et ne sest pas accompagne dune rduction des ingalits. Aussi les pays du continent sont-ils confronts au dfi de promouvoir une croissance diversifie et durable, permettant la cration demplois, lradication de la pauvret et la rduction des ingalits, en particulier dans les zones rurales o la grande majorit des pauvres vit dans un isolement certain, sans bnficier dinfras-tructures et de filets de scurit adquats.

    Lenjeu est aussi de convertir cette croissance conomique globale en une vritable transformation structurelle: cest cette transforma-tion qui permettra de rduire les carts persistants entre les villes et les campagnes, mais galement de diminuer les disparits au sein des zones rurales et entre les diffrentes rgions et qui donnera la possibilit aux populations rurales de mieux contribuer au dvelop-pement national et la durabilit de notre environnement et dtre reconnues ce titre - .

    Lobjectif gnral du Programme Rural Futures du NEPAD est de sus-citer des rflexions nouvelles et de contribuer lmergence dune vision commune sur les trajectoires possibles de dveloppement, en sappuyant sur une production de connaissances notamment des indicateurs stratgiques de la transformation structurelle du conti-nent. A ce titre, cet atlas prsente les principales caractristiques de lAfrique rurale en dcrivant, sous la forme de cartes et graphiques, les indicateurs qui nous permettront de suivre nos progrs en ma-tire de dveloppement rural et de changement structurel. Il aborde la question de deux faons :

    dune part, par une illustration claire des principaux facteurs de transformation, tels que la dmographie, lurbanisation, la densi-fication et la polarisation des territoires, linstar par exemple des rgions du Golfe de Guine;

    plus important encore, cet atlas rvle les tendances lourdes dun continent o lespace rural connat de profondes recompo-sitions issues de laccroissement des relations villes-campagnes et des liens conservs par les citadins avec leurs terroirs dorigine. Cette proximit cre dvidentes opportunits de diversification des activits, pour le commerce et pour les petites entreprises, qui sont les catalyseurs dune transformation conomique qui pourrait tre dterminante pour lavenir de lAfrique.

    Ces Regards croiss sur les transformations rurales africaines montrent aussi clairement les multiples dfis plus spcifiques que nous avons relever, comme celui du dveloppement agricole qui reste en de de son potentiel de croissance inclusive. Ils rvlent la ncessit de renforcer la fois le capital social et linvestissement conomique, tout en facilitant la promotion dune approche multi-sectorielle. Ils mettent enfin en vidence limbrication des problmes structurels, humains, conomiques, environnementaux et politiques que nous, dcideurs, ne prenons pas suffisamment en compte.

    Ainsi, cet atlas devrait servir de rfrence pour alimenter nos dbats sur les questions du dveloppement territorial et de la transforma-tion structurelle de notre continent, et aussi nourrir les processus de dveloppement national. Il sera rgulirement mis jour pour suivre les progrs que nous accomplissons sur la voie de la transformation rurale africaine.

    Dr Ibrahim Assane Mayaki

    Secrtaire excutif de lAgence du NEPAD

    Ancien Premier ministre du Niger

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    L ISTE DES CARTES ET F IGURES

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    INTRODUCT ION Villes et campagnes la recherche dun nouveau modle : il faut dsegmenter les territoires et les politiques ! Page 13

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    PEUPLEMENT, DEMOGRAPHIE ,URBANISAT IONPlanche 1 : La dernire transition dmographique mondiale Page 17

    Planche 2 : Un continent durablement rural mais une ruralit recompose Page 19

    Planche 3 : Lurbanisation africaine : croissance, palier et incertitude Page 21

    Planche 4 : Densification et diversification urbaine : mgapoles et archipels Page 23

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    DYNAMIQUES ECONOMIQUESET PERFORMANCES AGRICOLESPlanche 5 : Une lente transition conomique qui appelle un nouveau modle territorial Page 27

    Planche 6 : Performances de la production alimentaire : un potentiel largement inexprim Page 29

    Planche 7 : Une agriculture dexportation vulnrable Page 31

    Planche 8 : Alimentation : lAfrique la conqute de son march intrieur Page 33

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    RESSOURCES NATURELLESET DYNAMIQUES REG IONALESPlanche 9 : Des terres vacantes ? Pression sur les ressources et choix de dveloppement Page 37

    Planche 10 : Les relations villes-campagnes en Afrique de louest : une densification valoriser Page 39

    Planche 11 : Le bassin du Congo : une faible dforestation face de multiples menaces Page 41

    Planche 12 : Les ressources du lac Tchad : amnager ou sadapter ? Page 43

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    SOURCES

    Page 46NOTES

  • Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

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    PEUPLEMENT, DEMOGRAPHIE ,URBANISAT IONPlanche 1 : La dernire transition dmographique mondiale Page 17

    Planche 2 : Un continent durablement rural mais une ruralit recompose Page 19

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    DYNAMIQUES ECONOMIQUESET PERFORMANCES AGRICOLESPlanche 5 : Une lente transition conomique qui appelle un nouveau modle territorial Page 27

    Planche 6 : Performances de la production alimentaire : un potentiel largement inexprim Page 29

    Planche 7 : Une agriculture dexportation vulnrable Page 31

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    RESSOURCES NATURELLESET DYNAMIQUES REG IONALESPlanche 9 : Des terres vacantes ? Pression sur les ressources et choix de dveloppement Page 37

    Planche 10 : Les relations villes-campagnes en Afrique de louest : une densification valoriser Page 39

    Planche 11 : Le bassin du Congo : une faible dforestation face de multiples menaces Page 41

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    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    CARTES C 1 : Les Etats dAfrique par grandes rgions, p.12

    C 2 : Densit dmographique en 2010, p. 16

    C3 : Indice de fcondit (moyenne 2005-2010), p. 16

    C4 : Croissance de la population rurale (1980-2010 ), p. 18

    C5 : Importance de la population active agricole, p.18

    C6 : Accessibilit aux villes de plus de 50 000 habitants (Mali), p. 18

    C7 : Accessibilit aux villes de plus de 50 000 habitants (Kenya), p. 18

    C8 : Lurbanisation en 1960, p. 20

    C9 : Lurbanisation en 2010, p. 20

    C10 : Noyaux de peuplement urbain en 2010, p. 22

    C11 : Niveaux de revenu moyen par habitant et parts sectorielles du PIB, p. 26

    C12 : Croissance moyenne du produit intrieur brut par habitant (2000-2010), p. 26

    C13 : Productivit de la terre, p. 28

    C14 : Disponibilits en terres cultives, p. 28

    C15 : Productivit du travail, p. 28

    C16 : Place des produits agricoles dans les exportations de biens et services, p. 30

    C17 : Disponibilit alimentaire moyenne, p. 32

    C18 : Valeur des importations alimentaires, p. 32

    C19 : Niveaux de malnutrition, p. 32

    C20 : Densits dmographiques et aires protges, p. 36

    C 21 : Zones de pression sur les terres et les eaux, p. 36

    liste des cartes et figUres

    C22 : Les transactions sur les terres agricoles, p. 36

    C 23 : Densits rurales rgionales de quatre pays (Ghana, Burkina Faso, Bnin, Togo), p. 38

    C 24 : Rseau de transport autour de Bamako (Mali), p. 38

    C 25 : Places marchandes de la priphrie de Bamako (Mali), p. 38

    C 26 : La dforestation dans le bassin du Congo (2000-2012), p. 40

    C 27 : La vgtation de la zone frontalire Cameroun-RCA-Congo, p. 40

    C 28 : Evolution du rseau de pistes forestires de la zone frontalire Cameroun-RCA-Congo (1992-2012), p. 40

    C 29 : Dynamiques des usages dans le bassin du lac Tchad, p. 42

    FIGURES Fig. 1 : Evolution de la population par grandes rgions entre 1950-2050, p. 16

    Fig 2 : Taux de croissance urbaine par grandes rgions (1950-2050), p. 20

    Fig. 3 : Croissance urbaine par classes de villes en Afrique de louest, centrale et orientale (1960 2020), p. 22

    Fig. 4 : Profils-type de changement structurel (1961-2010), p. 26

    Fig. 5 : Productivit de la terre compare par grandes rgions du monde, p. 28

    Fig. 6 : Parts de march de lAfrique dans les exportations agricoles mondiales, p. 30

    Fig. 7 : Composition compare des exportations agricoles entre lAfrique et le reste du monde (moyenne 2009-2011), p. 30

    Fig. 8 : Structure de la consommation alimentaire des huit capitales de lUEMOA en 2008, p. 32

    Fig. 9 : Part des dpenses montaires dans la consommation alimentaire des mnages ruraux en Afrique de louest et du centre (14 pays), p. 32

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    1Villes et campagnes

    la recherche dun nouveau modle :il faut dsegmenter les territoires

    et les politiques ! Bruno Losch

    Graud Magrin

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    Afrique australe

    Afrique centrale

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    Afrique du nord 0 500 1 000Km

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    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

  • villes et campagnes la recherche dUn noUveaU modle : il faUt dsegmenter les territoires et les politiqUes ! Commencer par mentionner les villes dans lintroduction dun ouvrage consacr la nouvelle ruralit africaine nest quun apparent paradoxe. Car lAfrique rurale nest plus celle que nous croyons connatre. Ses transformations rapides refltent les effets de la vigoureuse pous-se dmographique et urbaine du continent, autant que les modalits de son intgration au systme conomique mondial. Or, le poids des reprsentations conduit toujours penser les futurs africains possibles sur la base des vieilles catgories du rural et de lurbain, alors quelles ne correspondent plus aux ralits des espaces vcus par les populations du continent.

    Les politiques actuelles sont trop clives

    Lmergence de nouvelles territorialits africaines, produite par la croissance dmographique et lexpansion des villes, constitue le changement le plus profond des dernires dcennies. Ces nouveaux territoires rsultent de la densification des rseaux de routes et du dveloppement des bourgs ruraux et des petites villes, stimul par les changes de leurs arrire-pays. Ils sont aussi le produit des pratiques des populations locales : acteurs conomiques, avec un tissu actif de commerants et commerantes, de transporteurs et artisans, dployant des stratgies cheval sur lurbain et le rural ; modes de vie des mnages qui diversifient le contenu et les lieux de leurs activits en profitant pleinement du dveloppement des radios rurales, des progrs de llectrification, de la diffusion de moyens de transport collectifs ou individuels moins co-teux et, surtout, de la rvolution de la tlphonie mobile, adopte par les campagnes africaines presque en mme temps que par le reste du monde. Ces changements qui ne doivent pas faire oublier quil existe encore une Afrique des villages reculs o lisolement renforce une ex-trme pauvret rurale - rduisent lespace-temps, distillent des convergences entre le rural et lurbain, et contribuent linvention concrte de nouvelles configurations territoriales.

    Ces recompositions ont gnralement chapp aux politiques publiques. A cause de la segmentation statistique entre le rural et lurbain, dont la dfinition instable rend alatoire la perception du rel. Mais aussi cause de la segmentation des politiques elles-mmes qui, en abandonnant il y a plusieurs dcennies llaboration de stratgies de dveloppement bases sur des visions moyen et long terme au profit dune gestion de court terme, a conduit une juxtaposition dapproches sectorielles et souvent , une dterritorialisation de laction publique.

    Les dfis dune double transition dmographique et conomique

    Il est peu probable que des politiques sectorielles, aussi sophistiques soient-elles, puissent rpondre lampleur des dfis du continent, si elles ne sont pas rarticules et intgres dans une vision globale. Car si lAfrique a dj connu des changements spectaculaires, ses dyna-miques dmographiques tendent en acclrer le rythme, ce qui pose des questions de nature et dampleur ingales en regard des trajectoires dvolution des autres parties du monde.

    En effet, atteignant 1 milliard dhommes en 2010, contre 100 millions au dbut du XXe sicle, le continent verra encore sa population doubler dici 2050. Du fait des caractristiques actuelles du peuplement, cette pousse dmographique concernera aussi bien les villes que les cam-pagnes, qui resteront statistiquement majoritaires jusquaux annes 2030. Cette croissance signifie une densification des espaces, une pression sur lenvironnement et les ressources, et des enjeux considrables de gestion des villes, accentus par la tendance la mtropolisation qui favorise les grandes concentrations urbaines.

    Cette vague de fond de la dmographie africaine est un atout pour un continent qui a t dura-blement handicap par son sous-peuplement. Mais si cette transition dmographique la der-nire du monde est indite par sa rapidit et son ampleur, elle lest aussi par sa dconnexion vis--vis dun processus daccumulation endogne.

    La transformation des conomies africaines est extrmement lente : lagriculture reste tou-jours le socle de lactivit dune population qui est majoritairement rurale ; lurbanisation sest effectue sans industrialisation et repose dabord sur un secteur informel qui rend difficile le financement des infrastructures ncessaires ; surtout, ces volutions se sont dessines sans changement apparent des formes dinsertion du continent dans la mondialisation. LAfrique reste une rgion dexportation de matires premires brutes peu diversifies et dimporta-tion de produits manufacturs, une position qui sest rvle jusqu prsent la fois source de vulnrabilit et peu porteuse de dveloppement. Seuls quelques rares pays situs aux deux extrmits septentrionale et mridionale du continent font jusquici vritablement exception, avec des conomies plus diversifies, plus riches, adosses une urbanisation forte densit conomique.

    Les changements rcents dans les relations extrieures de lAfrique ne semblent pourtant pas favorables une vritable transition conomique. Les agricultures dexportation, aprs avoir support lessentiel des stratgies de dveloppement au moment des indpendances, ont connu un long dclin. Elles maintiennent dsormais leurs parts de marchs et connaissent quelques succs rcents, mais limits gographiquement. Elles ont aussi longtemps conduit occulter le potentiel du secteur des cultures alimentaires destines au march intra-africain, dont la croissance a heureusement russi accompagner, globalement et jusqu prsent, celle de la population. Mais jusqu quand ?

    Surtout, depuis la fin des annes 1990, on a assist un boom des secteurs extractifs (mines, hydrocarbures), en rponse la demande dun march mondial tir par les besoins en matires premires ncessaires la croissance des grands pays mergents. Lexportation des res-sources minrales a progress dans de trs nombreux pays, et elle va connatre des croissances plus fortes encore avec lexploitation de nouveaux gisements. La valeur montaire de ces

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    Cirad 2013

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    Afrique centrale

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    Afrique du nord 0 500 1 000Km

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    Bruno Losch Graud Magrin

  • ressources a dj relgu lagriculture une portion congrue des grands agrgats cono-miques nationaux. Or, ces activits pourvoyeuses de rente crent peu demplois et ont gn-ralement des consquences ambivalentes : elles crent certes de la croissance en valeur abso-lue, mais cette croissance nest pas de nature inclusive et permet difficilement dentraner les activits de la majorit de la population. Elle est plutt de nature stimuler lurbanisation via linvestissement des rentes dans le btiment et les travaux publics et conduit, souvent, ngli-ger lagriculture et favoriser la voie, dapparence plus facile, des modles alimentaires base de produits imports.

    Quelles alternatives pour lemploi de jeunes ?Lun des principaux dfis du continent est pourtant celui de lemploi. Du fait de leur structure dmographique, les conomies africaines vont continuer accueillir chaque anne un nombre croissant de jeunes actifs. Les nouveaux actifs, qui taient environ 15 millions par an en 1995, sont environ 20 millions aujourdhui et seront prs de 30 millions en 2030. Deux sur trois seront des ruraux. Cette expansion de la population active est une chance pour une rgion qui a d porter du fait de la rapidit de sa transition dmographique la plus forte proportion dinac-tifs de lhistoire au pire moment, au plus fort de la crise des annes 1980-90. Elle constitue un exceptionnel moteur de croissance conomique, condition toutefois que des secteurs dacti-vit existent hauteur de cette offre demplois. Cest ici un enjeu crucial pour les politiques de dveloppement.

    Lindustrie et les services modernes ne fournissent jusqu prsent quune part trs limite de lemploi urbain. Les soupapes migratoires sont de plus en plus contraintes dans les ples de la mondialisation qui taient historiquement les plus ouverts, comme les conomies matures dAmrique du nord et dEurope. Les pays mergents ne sont pas prts daccueillir un hori-zon proche de nombreux migrants africains. Ces campagnes africaines en pleine transforma-tion devront en consquence jouer un rle majeur dans les adaptations venir et fournir des emplois, agricoles et non agricoles, au plus grand nombre.

    Rinvestir dans des stratgies de dveloppement territorial

    Relever un tel dfi ne pourra faire lconomie dune reterritorialisation des politiques publiques. Au-del de la ncessaire intgration des rgions africaines par les grandes infras-tructures qui contribuera aussi terme dcloisonner les espaces conomiques et largir les opportunits de dveloppement associs aux changes internes , cest par une approche

    La tragdie des systmes dinformation africainsLe mot est fort mais il est de plus en plus frquemment employ pour caractriser la situation des bases de connaissance et des appareils statistiques. Il existe quelques exceptions et des progrs rcents ont t enregistrs dans certains pays, grce notamment la coopration internationale, mais, globalement, les systmes dinformation actuels ne permettent plus de guider laction publique. Avoir une politique des grands nombres , selon lexpression dAlain Desrosires, est pourtant une ncessit afin de disposer doutils de connaissance et de gouvernement.

    Les dfis relever et les nombreux conflits sur lusage des ressources devraient faire de la reconstruction et du dveloppement de ces systmes dinformation une priorit. Il sagit notamment de mieux connatre et comprendre la ralit des conomies rurales, les nouvelles dynamiques territoriales et la situation concrte de loccupation de lespace. Comment grer la densification attendue du continent sans une connaissance prcise des pleins et des vides , des zones de pression et des potentiels ?

    volontariste de dveloppement des territoires, densifiant les relations villes-campagnes, dotant le rseau des villes moyennes des fonctions urbaines ncessaires lentranement des dynamismes locaux et leur articulation aux zones mtropolitaines, qumergeront les initiatives et les innovations qui consolideront le dveloppement conomique et social. Lagriculture devra continuer jouer toute sa part, en profitant du potentiel du march intrieur africain tout comme des opportunits extrieures, car cest par la croissance des revenus agricoles que se renforcera une demande rurale moteur de diversification conomique lchelle rgionale.

    Favoriser laugmentation des productions et des revenus agricoles tout en maintenant une multifonctionnalit des activits rurales garante de rsilience face la variabilit climatique, entretenir et prserver le capital environnemental et la biodiversit, appuyer le dveloppement demplois non agricoles, supposent des politiques publiques inventives articulant outils dam-nagement du territoire et dappui aux secteurs conomiques, construction dinfrastructures et mdiation entre acteurs, et renforcement du capital humain. Ce sont de telles politiques qui sont consolider ou inventer pour fconder les nouvelles ralits rurales et faire de ces territorialits mergentes le creuset de vritables trajectoires de dveloppement.

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    NPlanche 1La dernire transition dmographique mondiale

    Bruno Losch

    Planche 2Un continent durablement rural

    mais une ruralit recomposeBruno Losch

    Planche 3Lurbanisation africaine :

    croissance, palier et incertitude Graud Magrin

    Planche 4Densification et diversification urbaine :

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    6,4

    4,82,9

    4,8

    4,8

    5

    2,4

    4,7

    2

    3,5

    4,6

    4,6

    6

    2,7

    5,9

    3,4

    5,5

    6,4

    4,3

    4,7

    5,55,2

    5,44,3

    4

    3,4

    5,3

    4,7

    5,4

    5,4

    3,6

    5,1

    1,7

    5,1

    2,6

    3,9

    < 1

    1 - 10

    10 - 50

    50 - 100

    100 - 500

    > 500

    Nombre dhab. / km2

    C2. Densit dmographique en 2010Source : Afripop

    C3. Indice de fcondit (moyenne 2005-2010)Source : WPP 2010

    Fig. 1. Evolution de la populationpar grandes rgions entre 1950-2050Source : WPP 2010

    2

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    16

  • 1la dernire transition dmographiqUe mondiale

    Bruno Losch

    Le continent africain, vaste et trs ingalement peupl, a connu une forte

    croissance de sa population au cours des cinquante dernires annes,

    qui lui fait rattraper progressivement son dficit dmographique. Cette dynamique

    de croissance dbouche sur une amlioration du potentiel dactivit, qui

    devra tre consolid par la mise en uvre de politiques de dveloppement adaptes.

    Le boom de la population africaine

    Avec un peu plus dun milliard dhabitants en 2010, lAfrique est le deuxime continent le plus peupl au monde (15% de la population mondiale), mais elle se situe loin derrire lAsie (60%). Longtemps sous-peuple, sa tran-sition dmographique (diminution dcale dans le temps de la mortalit et de la natalit) a t tardive : elle en est dautant plus specta-culaire, avec des taux de croissance annuels qui ont atteint plus de 4% (soit un double-ment de la population en moins de vingt ans) dans de nombreux pays.

    Cette croissance, qui a frl les 3% en moyenne continentale au dbut des annes 1980, reste forte (2,3% en 2010) ; daprs les projections des Nations Unies (hypothse moyenne), elle va se poursuivre pendant plusieurs dcennies, certes en ralentissant. Cela sexplique par linertie lie la jeunesse de la population, mais aussi par la dynamique propre lAfrique subsaharienne, caractri-se par la permanence dindices de fcondit

    levs, avec 4,6 enfants par femme en moyenne rgionale et jusqu 7,2 enfants par femme au Niger, lindice le plus lev du monde.

    En consquence, la population du continent va saccrotre de 1,2 milliard dindividus dici 2050 et, cette date, lAfrique comptera 2,1 milliards dhabitants et prs de 25% de la population mondiale, contre 55% pour lAsie. En moins dun sicle, elle aura invers son poids dmographique vis--vis de lEurope (qui comptait 22% du total mondial en 1950 contre 10% pour lAfrique). Surtout, le conti-nent continuera de crotre au-del de 2100 : cest la seule rgion du monde dans ce cas, avec lAmrique du nord, mais avec une popultion sans commune mesure (3,6 milliards de personnes prvues lhorizon 2100 contre 500 milions pour le nord du continent amricain).

    Un peuplement trs ingal et des dynamiques

    rgionales marques Le peuplement de lAfrique est trs ingal et caractris par limportance des zones peu peuples, voire inhabites de faon perma-nente, du fait du Sahara, qui divise le continent en deux, et dautres rgions hostiles lim-plantation humaine parce que linsuffisance du nombre des hommes ne permettait pas damnager le milieu, comme la grande fort quatoriale. Cette morphologie continentale, hrite de lhistoire, sest longtemps traduite par une concentration de la population sur le pourtour mditerranen, les hautes terres, les savanes de la zone soudanienne et dAfrique

    australe, avant que le dveloppement des rgions ctires ne polarise le peuplement, en relation avec lintgration progressive du continent dans lconomie mondiale.

    Le peuplement actuel rvle toujours des zones denses dans la rgion des Grands Lacs, sur les hauts plateaux thiopiens, malgaches et dAfrique australe, et sur les ctes : la frange mditerranenne, la cte orientale, le golfe de Guine, o les foyers humains ont fait la jonction avec les rgions peuples de la bande soudanienne (du Nigria au Burkina Faso).

    Cette rpartition ingale de la population a produit des dynamiques de croissance fortement diffrencies.

    La rgion la moins peuple, lAfrique australe, a connu son pic de croissance dans les annes 1970, avant denregistrer une inflexion rapide, accentue par la pandmie de sida. LAfrique du nord, qui tait avec lAfrique de louest la rgion la plus peuple du continent en 1950, a progress fortement jusquau milieu des annes 1980, avant de marquer le pas. Elle a t rapidement dpasse par louest et lest du continent, qui ont connu une longue pous-se dmographique de prs de quatre d-cennies, appele se poursuivre un rythme moins soutenu jusquen 2050. Avec 300 mil-lions dhabitants aujourdhui, les deux rgions avoisineront 800 millions dans quarante ans. LAfrique centrale, longtemps handicape par son sous-peuplement, connait un rattrapage rapide, avec la plus forte croissance enre- gistre aujourdhui. Elle rattrapera pratique-ment lAfrique du nord lhorizon 2050.

    La pousse salutaire de la population active

    et ses impratifs Cette volution rapide sest accompa-gne dune forte modification de la struc-ture par ge du peuplement, caractristique de la transition dmographique. Pendant longtemps, le rapport entre la population

    dge actif (de 15 64 ans) et la population inactive a t particulirement dfavorable : en Afrique saharienne, le ratio dactivit a atteint le seuil historiquement bas dun actif pour un inactif au milieu des annes 1980. Ce fardeau des inactifs pour la population en ge de travailler et pour lconomie dans son ensemble est survenu au pire moment de la crise et des politiques daustrit ; il a han-dicap fortement les conomies africaines au moment o la Chine, par exemple, avait deux actifs pour un inactif : un avantage consid-rable qui sest renforc dans les annes 2000 (la Chine compte aujourdhui 2,5 actifs pour un inactif quand lAfrique subsaharienne peine atteindre les 1,2).

    La situation africaine va cependant samlio-rer, avec une monte en puissance de la po-pulation active qui se poursuivra jusquaprs 2050, alors que les autres rgions du monde seront toutes sur une tendance dcroissante. LAfrique touchera donc son dividende d-mographique . Celui-ci sera un moteur de croissance puissant condition que lenviron-nement conomique, institutionnel et poli-tique soit favorable la cration demplois.

    En effet, le grand dfi africain des prochaines dcennies sera doffrir des emplois une jeunesse toujours plus nombreuse une tape dlicate laquelle sont confronts aujourdhui les pays dAfrique du nord au risque de voir saccrotre les tensions sociales et politiques et la pression dsordonne sur lusage des ressources naturelles. En Afrique subsaharienne, 17 millions de jeunes arrivent aujourdhui chaque anne sur le march du travail. Ils seront 25 millions dans quinze ans.

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    17Plan

    che

  • 2

    Croissance annuellede 1980 2010 (%)

    Donnes manquantes

    < 0

    0 - 1

    1 - 2

    2 - 3

    > 3

    //

    2

    2,1

    2,8

    -0,21,5

    2

    0,8

    2,91,8

    1,1

    3,1

    2,6

    2,1

    2,5

    1,4

    2,1

    1,4

    2

    2,8

    0,7

    2,4

    3 2,7

    -0,2

    0,6

    1,4

    1,1

    1,5

    2,12,2

    1,5

    -1,2

    2,4

    0,4

    2,3

    2,11,6

    2,7

    1,7 2,1

    1,1

    0,7

    2,21,9

    3,3

    2,6

    2,1

    1,7

    1

    0

    2,5

    -0,6

    0,8

    Population active agricole /totale en 2010 (%)

    Pas de donnes

    < 25

    25 - 45

    45 - 55

    55 - 70

    > 70

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    25

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    56

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    38

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    26

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    75

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    79

    6253

    39

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    8

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    17

    56

    73

    //

    Koulikoro

    Sikasso

    Niono

    Koutiala

    Sgou

    Mopti

    Gao

    Kayes

    BAMAKO

    TO

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    Koulikoro

    Sikasso

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    Koutiala

    Sgou

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    M A U R I T A N I A

    A L G E R I A

    N I G E R

    NIGE

    RIA

    G H A N AB E N I N

    TO

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    G U I N E A

    SENE

    GAL

    0 100 200

    0 50 100 150 300 Miles

    300 kilometresIBRD 38602

    TO

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    C T E D I V O I R ESIERR ALEONE

    0 40 80 160120

    0 40 80 120 Miles

    Garissa

    Lodwar

    Mombasa

    KakamegaEldoret

    Nyeri

    Thika

    Machakos

    MeruKisumu

    Kitale

    Nakuru

    NAIROBI

    Garissa

    Lodwar

    Mombasa

    KakamegaEldoret

    Nyeri

    Thika

    Machakos

    MeruKisumu

    Kitale

    Nakuru

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    E T H I O P I A

    S O M A L I A

    T A N Z A N I A

    U G A N D A

    SUDAN

    INDIANOCEAN

    LakeVictoria

    IBRD 38602

    200 Kilometers

    C4, Croissance de la population rurale (1980-2010)Source : WUP 2011

    C6, Accessibilit aux villes de plus de 50 000 habitants (Mali)Source : Losch et al. 2012

    C7, Accessibilit aux villes de plus de 50 000 habitants (Kenya)Source : Losch et al. 2012

    C5, : Importance de la population active agricoleSource : FAOSTAT

    Cirad 2013

    Capitale nationale

    Villes > 50 000 hab.

    Temps de parcours jusqu' la villede 50 000 habitants la plus proche (en heures)

    16

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    18

  • Un continent dUrablement rUral mais Une rUralit recompose

    Bruno Losch

    A lexception de ses franges nord et sud, lAfrique reste majoritairement rurale et la

    population des campagnes continuera daugmenter bien aprs

    2050 une exception mondiale. La densification du peuplement

    et lamlioration des communications conduisent cependant des

    recompositions des modes de vie et des territoires. Transformer cette

    nouvelle ruralit en facteur de dveloppement constitue

    un dfi majeur pour les politiques.

    Des ruraux encore majoritaires

    Si le peuplement du continent est trs ingal en densit, la rpartition spatiale de la popula-tion dans les territoires est toujours marque par le poids dmographique des campagnes. Avec un peu plus de 620 millions dhabitants en 2010, celles-ci ont connu une forte crois-sance dmographique : dans 27 pays, elles ont enregistr un taux de croissance annuel suprieur 2% au cours des trois dernires dcennies.

    Lurbanisation, tardive lexception de la frange mditerranenne, mais aussi un rythme de croissance des villes qui a marqu le pas au cours des deux dernires dcennies, font que le continent reste encore majori-tairement rural (au deux tiers en 2010 pour lAfrique subsaharienne contre un peu moins de la moiti pour lAfrique du nord). Il le restera au moins jusquau milieu des annes 2030.

    LAfrique constitue, avec les pays de lAsie du sud, le plus gros rservoir rural du monde.

    Surtout, lAfrique au sud du Sahara est la seule rgion o la population rurale continuera de crotre en valeur absolue bien aprs 2050. Avec 310 millions de ruraux supplmentaires cette date, la population rurale subsaha-rienne va augmenter de 57% en quarante ans (elle amorcera un lger repli en Afrique du nord).

    Mais des ralits rurales qui changent

    Ce caractre massif de la ruralit africaine ne doit cependant pas occulter lampleur des recompositions qui caractrisent les cam-pagnes. En effet, la densification du peuple-ment lie la croissance dmographique, le dveloppement du rseau urbain et lam-lioration considrable des conditions de transport ont entrain une mixit accrue des espaces, qui remet de plus en plus en cause la pertinence dune reprsentation qui oppose le rural et lurbain.

    Il existe encore une Afrique des villages recu-ls dans de nombreuses rgions. Cepen-dant, dans les zones de peuplement les plus importantes, la multiplication et le dvelop-pement des petites et moyennes agglom-rations a considrablement rduit les temps daccs aux villes. Cette accessibilit et cette connectivit nouvelle des espaces peuvent tre plus ou moins intenses et plus ou moins dveloppes selon les territoires, mais elles se traduisent par une profonde recomposi-tion au sein des campagnes.

    Or, ces changements constituent un point aveugle des systmes statistiques officiels, qui proposent des dfinitions des populations et des territoires urbains et ruraux cales sur des critres htrognes, variant dun pays lautre, bass soit sur un niveau de peuple-ment, soit sur un statut administratif, ou en-core sur limportance de lactivit agricole. Les catgories urbaine et rurale noffrent donc quune ide imprcise et souvent fausse de la ralit. Les projections dmographiques vingt, trente ou quarante ans indiquent une tendance trs gnrale qui masque lessen-tiel des volutions territoriales.

    Une diversification des activits dont les moteurs

    doivent tre renforcsLes zones rurales restent encore ancres dans lagriculture et rares sont les mnages ruraux qui ne poursuivent pas, au moins par-tiellement, une activit agricole. Cette impor-tance de lagriculture est traduite par le poids des actifs agricoles dans la population active totale, qui reste trs lev, et enregistre, dans certains pays, les plus forts taux du monde, au-dessus de 75%. Si cette ralit agricole est prgnante, elle nest pourtant plus exclu-sive.

    En effet, la connexion croissante aux mar-chs des produits agricoles et des biens de consommation, la lente progression des niveaux de vie qui gnre de nouvelles de-mandes, et une mobilit accrue entre cam-pagnes, bourgs ruraux et petites villes, d-bouchent sur de nombreuses opportunits de diversification des activits dont sempa-rent progressivement les ruraux (commerce, transport, transformation des produits, m-tiers divers de lartisanat). Ainsi, les mnages sont de plus en plus pluriactifs, avec des sp-cialisations diffrentes selon les membres de la famille, dont certains pratiquent des

    activits saisonnires au rythme des temps morts agricoles. Ils sont aussi, parfois, mul-ti-localiss , avec des activits de chaque ct de cette sparation souvent de moins en moins nette - entre le rural et lurbain, frquemment permises par des migrations pendulaires lorsque les conditions de trans-port et la distance sy prtent. On rencontre donc des villageois qui surbanisent (et aussi des no-citadins qui ont pu garder une ex-ploitation agricole) et ces volutions peuvent prendre la forme dconomies familiales en archipel , o plusieurs membres du mnage exercent des activits dans des lieux diff-rents, parfois loigns (comme la grande ville ou mme ltranger).

    Pourtant, si cette diversification rurale est une tendance lourde, il ne faut pas occulter son caractre composite. Elle se dveloppe au sein des mnages sans quil y ait frquem-ment une spcialisation complte dans une seule activit : les niveaux de revenu restent modestes et les emplois salaris temps plein sont rares, en zone rurale comme dans les petites villes. En consquence, les sorties compltes de lactivit agricole sont encore rduites et les mnages ruraux grent en permanence une sorte de nouvelle mobilit la fois sectorielle et spatiale.

    Ces changements sont importants. Ils sont cependant insuffisants pour avoir permis au niveau densemble - une hausse significa-tive des niveaux de vie. Les revenus ruraux en Afrique subsaharienne restent extrme-ment faibles et leur amlioration impose la fois daugmenter les performances agricoles et de dvelopper les fonctions des petites villes. Cest tout lenjeu du dveloppement territorial.

    Croissance annuellede 1980 2010 (%)

    Donnes manquantes

    < 0

    0 - 1

    1 - 2

    2 - 3

    > 3

    //

    2

    2,1

    2,8

    -0,21,5

    2

    0,8

    2,91,8

    1,1

    3,1

    2,6

    2,1

    2,5

    1,4

    2,1

    1,4

    2

    2,8

    0,7

    2,4

    3 2,7

    -0,2

    0,6

    1,4

    1,1

    1,5

    2,12,2

    1,5

    -1,2

    2,4

    0,4

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    2,11,6

    2,7

    1,7 2,1

    1,1

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    Population active agricole /totale en 2010 (%)

    Pas de donnes

    < 25

    25 - 45

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    Koulikoro

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    300 kilometresIBRD 38602

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    C T E D I V O I R ESIERR ALEONE

    0 40 80 160120

    0 40 80 120 Miles

    Garissa

    Lodwar

    Mombasa

    KakamegaEldoret

    Nyeri

    Thika

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    MeruKisumu

    Kitale

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    NAIROBI

    Garissa

    Lodwar

    Mombasa

    KakamegaEldoret

    Nyeri

    Thika

    Machakos

    MeruKisumu

    Kitale

    Nakuru

    NAIROBI

    E T H I O P I A

    S O M A L I A

    T A N Z A N I A

    U G A N D A

    SUDAN

    INDIANOCEAN

    LakeVictoria

    IBRD 38602

    200 Kilometers

    C4, Croissance de la population rurale (1980-2010)Source : WUP 2011

    C6, Accessibilit aux villes de plus de 50 000 habitants (Mali)Source : Losch et al. 2012

    C7, Accessibilit aux villes de plus de 50 000 habitants (Kenya)Source : Losch et al. 2012

    C5, : Importance de la population active agricoleSource : FAOSTAT

    Cirad 2013

    Capitale nationale

    Villes > 50 000 hab.

    Temps de parcours jusqu' la villede 50 000 habitants la plus proche (en heures)

    16

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    192Planche

  • Cirad 2013

    2

    Taux d'urbanisation en 2010 (%)

    Pas de donnes

    < 20

    20 - 30

    30 - 40

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    > 60

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    16

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    28

    53

    //

    0

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    Afrique de l'est Afrique centrale Afrique du nord Afrique australe Afrique de l'ouest

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    Taux d'urbanisation en 1960 (%)

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    C9. Lurbanisation en 2010 Source : WUP 2011

    C8. Lurbanisation en 1960WUP 2011

    Fig. 2. Taux de croissance urbainepar grandes rgions (1950-2050)

    Source : WUP 2011

    2

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    20

  • 3Graud Magrin

    lUrbanisation africaine : croissance, palier et incertitUde

    Une croissance urbaine soutenue depuis 60 ans a permis lAfrique de rattraper

    en partie son retard durbanisation. Mais son processus durbanisation reflte

    les incertitudes de sa trajectoire de dveloppement. Le continent se

    conformera-t-il aux modes de transition conomique et urbaine observs ailleurs

    (o les progrs de lurbanisation accompagnent le dveloppement

    conomique) ou bien assistera-t-on une stagnation de lurbanisation classique , plafonnant sous leffet de la permanence

    dune conomie primaire exportatrice de ressources naturelles ?

    Un rattrapage fulgurant

    LAfrique connat la croissance urbaine la plus rapide au monde (3,2% annuels) avec une diffrence marque entre lAfrique sub-saharienne (3,6%) et lAfrique du nord (2%). En Afrique subsaharienne, la population ur-baine a t multiplie par 10 entre 1950 et 1990 tandis que la population totale triplait.. Conakry, la capitale de la Guine, a vu sa po-pulation multiplie par 60 entre 1950 et 1990. LAfrique parcourt en quelques dcennies un chemin que lEurope a ralis en deux sicles.

    Cette forte croissance urbaine sexplique dabord par les niveaux durbanisation trs faibles en dbut de priode. Le ralentis- sement du rythme de croissance conscutif

    la crise conomique des annes 1980-1990 se fait sentir aujourdhui sur tout le continent, mais de faon trs ingale selon les rgions.

    Deux Afriques urbaines

    Les taux durbanisation part de la popula-tion urbaine dans la population totale sont infrieurs la moyenne mondiale en 1960 comme en 2010. Cependant, deux grands types de situation se distinguent.

    LAfrique la plus urbaine se situe aux deux ex-trmits du continent. Dans les trois pays du Maghreb, les deux pays africains du Machrek et en Afrique du Sud, les citadins sont envi-ron un tiers de la population en 1960, parfois prs de la moiti (Afrique du Sud). En 2010, le taux durbanisation avoisine les deux tiers de la population. Lvolution est la plus marque dans les pays ayant dispos dune rente im-portante des hydrocarbures (Algrie, Libye).

    En Afrique subsaharienne, les taux durba-nisation sont plus faibles. En 1960, ils sont compris entre 10 et 20%, avec des pays par-ticulirement ruraux o lurbanisation est embryonnaire (moins de 10% de citadins), notamment en Afrique orientale (Ethiopie, Ouganda, Burundi, Rwanda, Kenya, Tanza-nie, Mozambique) ou au Sahel (Burkina Faso, Niger, Tchad) l. Quelques cas prsentent des taux durbanisation suprieurs 20% : il sagit de pays ayant concentr des fonctions poli-tiques particulires (Sngal et Congo, siges des capitales administratives de fdrations coloniales), de pays o lessor de lconomie minire ou de lagriculture dexportation a

    stimul une urbanisation prcoce (actuelle RDC, Ghana), ou de quelques territoires peu peupls (Guine Equatoriale, Djibouti).

    En 2010, les taux durbanisation ont partout fortement augment et souvent doubl, pour se situer prsent entre 20 et 40%. Ceux qui restent les plus ruraux (entre 10 et 20% durbains) sont les pays des hautes terres dAfrique orientale ou des Grands Lacs (Ethiopie, Rwanda, Burundi, Ouganda, Malawi) ou certains pays sahliens (Niger). Certains pays ont connu une progression de lurbani-sation timide, reflet dun marasme cono-mique en lien avec des difficults politiques, comme la RDC, la Somalie, la Sierre Leone ou lErythre, o les taux durbanisation ont au mieux peine doubl depuis 1960, alors quils ont t souvent multiplis par 3 ou 4 ailleurs. En outre, deux facteurs contribuent expli-quer les diffrences nationales : dune part, les pays en position littorale sont dans len-semble plus urbaniss que les pays enclavs (Sngal et Mauritanie vs autres pays sah-liens) ; dautre part, les pays ayant dvelopp lexploitation des ressources extractives, en particulier les hydrocarbures, ont connu aussi un rythme durbanisation particulirement rapide (Angola, Nigeria, Botswana), vidant parfois compltement les campagnes dans le cas de pays peu peupls (Gabon).

    Panne ou pause de croissance ?

    Les taux de croissance urbaine par grande rgion, partout levs, marquent une ten-dance au ralentissement. En 2010, lAfrique du nord a rejoint lAfrique australe avec des

    taux de croissance urbaine modrs (1,5-2%/ an), tendance qui devrait se poursuivre (1%/ an attendus en 2050), les rservoirs ruraux tant dj largement entams.

    En Afrique subsaharienne, lessentiel de la pousse urbaine a eu lieu dans les annes 1950 1970 ( jusqu 6-7%) avant de mar-quer le pas (4% en 2010, autour de 3% atten-dus en 2050). La convergence sy observe au moment de la profonde crise conomique des annes 1980-1990, au plus fort de la pousse dmographique. Alors que la crois-sance naturelle reste forte (2,6% par an), cette dclration de lurbanisation signi-fie que le solde migratoire nest plus que lgrement positif.

    Lhypothse dune panne urbaine sanc-tionnant la crise est alors mise : en lab-sence de nouveaux moteurs de croissance, chmage, pauvret et problmes urbains de tous ordres rduiraient lattractivit des villes et amneraient lurbanisation plafon-ner un niveau infrieur 50%. Echapper cette ornire suppose dinventer de nouveaux modles de dveloppement adap-ts aux formes contemporaines doccupa-tion des territoires.

    Cirad 2013

    2

    Taux d'urbanisation en 2010 (%)

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    Taux d'urbanisation en 1960 (%)

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    C9. Lurbanisation en 2010 Source : WUP 2011

    C8. Lurbanisation en 1960WUP 2011

    Fig. 2. Taux de croissance urbainepar grandes rgions (1950-2050)

    Source : WUP 2011

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

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  • 2< 50 000 hab.

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    Analyse en cours

    Taille des villes dans un rayon de 100 km

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    C10. Noyaux de peuplement urbain en 2010Source : Africapolis (voir note 1)

    Fig. 3. Croissance urbaine par classes de villesen Afrique de louest, centrale et orientale (1960 2020)Source : Africapolis

    Cirad 2013

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

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  • Jacques Imbernon

    densification et diversification Urbaine : mgapoles et archipels

    Lexique Mgapole : on appelle mgapole une trs grande agglomration urbaine peuple de plusieurs millions dhabitants. Le seuil de population a t fix par lONU 10 millions dhabitants. il en existe entre 20 et 25 dans le monde.

    Ville : la dfinition des villes varie selon les systmes statistiques natio-naux, ce qui conduit une grande imprcision des catgories urbaine et rurale. Pour le programme Africapolis, qui propose une cartographie des zones urbaines, est considre comme urbaine toute unit locale adminis-trative de plus de 10 000 habitants dont lagglomration principale abrite plus de la moiti de la population. Une agglomration est dfinie comme un ensemble de constructions dont aucune nest distante des autres de plus de 200 mtres ; elle exclut de lespace urbain tous les usages agricoles.

    Lextraordinaire pousse urbaine qui caractrise lensemble de lAfrique

    saccompagne de lmergence progressive de mgapoles et dune recomposition des

    armatures urbaines. Cette urbanisation est cependant affecte par la faiblesse

    des chelons infrieur et intermdiaire, qui handicape la diversification

    des conomies locales. Cest tout lenjeu du dveloppement territorial.

    Des morphologies urbaines diversifies

    La croissance urbaine est actuellement loi-gne des records observs dans les annes 1950-1970, lorsquelle atteignait 7-8% par an (doublement de la population en 10 ans) et jusqu 10% pour certains pays (Mauritanie, Cte dIvoire, Togo, Tanzanie, Mozambique, Botswana).

    Paralllement, lurbanisation change de forme. Les espaces urbaniss doivent tre considrs non plus du point de vue de la seule densit et continuit du bti, mais de la connectivit des rseaux de villes. En effet, de grandes aires urbanises articules appa-raissent, comme par exemple le long du litto-ral du Golfe de Guine, entre Accra et Lagos.

    LAfrique ne compte que peu de grandes villes par rapport aux autres continents : une tren-taine de villes millionnaires pour un milliard dhabitants, quand les Etats-Unis en ont 40 pour 285 millions. Les grandes villes consti-tuent des systmes urbains trs diffrencis,

    selon trois types dominants : macrocphale, cest le cas du Sngal, de la Tunisie, de la Cte dIvoire, du Mali, de la Guine ou de Madagascar la capitale concentre plus de 20% de la population totale du pays et plus de 60% de la population urbaine (80 % pour Conakry) et lcart de taille avec la 2me ville du pays est trs important ; bicphale comme au Cameroun, o Yaound est la mtropole administrative et Douala la mtropole cono-mique ; multipolaire hirarchis, comme en Afrique du nord (Algrie, Maroc), en Afrique australe et au Nigria.

    Nouvelles villes et urbanisation par le bas

    Lmergence de nouvelles villes relve de processus de densification et de crois-sance endogne, voire, dans quelques cas, de choix politiques volontaristes. Des villes nouvelles ont ainsi t cres ex-nihilo (ou partir dune petite agglomration) sur la base dune volont damnagement du terri-toire. Cest le cas de nouvelles capitales natio-nales (Nouakchott, Dodoma, Yamoussoukro, Abuja), qui peuvent atteindre aujourdhui prs dun million dhabitants.

    Mais cest la croissance des agglomrations existantes qui constitue le phnomne ma-jeur : dveloppement des villes secondaires partir de leurs fonctions administratives (chefs-lieux de divisions territoriales) et en fonction du potentiel de leur hinterland ; urba-nisation in situ de gros villages qui deviennent bourgs ruraux puis petites villes partir de fonctions diverses (commerciales, de service ou mme religieuses).

    Cette urbanisation par le bas est particu-lirement vive en Afrique de louest, du centre et de lest. Cest la catgorie des petites villes de moins de 50 000 habitants qui a la plus forte croissance, aprs celle des grandes mtropoles millionnaires, alors que les villes intermdiaires (entre 200 000 et un million dhabitants) apparaissent comme le maillon faible des armatures urbaines.

    Lmergence d archipels mtropolitains

    Les villes petites et moyennes prolifrent la priphrie des grandes villes. Il ne sagit pas dun processus de priurbanisation comme le connaissent les pays les plus riches : les systmes demploi et de transport ne le per-mettent pas. En Afrique de louest, ces villes constituent des tissus urbaniss dont le semis se distribue le long des grands axes de communication radiaux pour former de vastes bassins multipolariss. Cest le cas en particulier dans le Golfe de Guine et dans tout le Nigria. On observe aussi des dispo-sitifs analogues sur les hauts plateaux thio-piens, dans le corridor Nairobi - Kampala et dans les Grands Lacs.

    Ces bassins urbains, qui esquissent de futures mgapoles, peuvent tre rappro-chs du concept darchipel mtropolitain thoris par Olivier Dollfus. On observe ain-si aujourdhui en Afrique des grappes de villes constituant des archipels, fonction-nant en rseau, sur un autre mode que celui des centres polarisant des territoires selon le modle classique centre-priphrie. Le fonc-tionnement de ces rseaux ne repose pas sur la contigut (distance) mais sur la connexit topologique. Les axes de circulation sur le territoire jouent un rle prpondrant.

    Ainsi, en Afrique de louest, le dveloppe-ment des littoraux, o se situent les grandes mtropoles ctires, a dbouch sur une structuration en dents de peigne . Ces axes mridiens, perpendiculaires aux ctes, engendrent eux-mmes une prolifration de petites agglomrations entre Dakar et Touba, Abidjan et Bouak, Accra et Kumasi,

    Lom et Kara, Cotonou/Porto Novo et Abomey, Lagos et Ibadan qui sinscrivent dans les trajectoires dchange anciennes du commerce de traite. De tels rseaux nord-sud permettent de valoriser les compl-mentarits entre zones cologiques (forts, savanes, Sahel, dsert) ; ils engendrent de vritables axes de peuplement.

    Un modle durbanisation incomplet et qui reste dfinir

    LAfrique mergente est aujourdhui celle des grandes mtropoles connectes au rseau des villes mondiales. Mais cette connexion ne sera porteuse de dveloppement que si elle saccompagne dune densification du rseau urbain, dont le dsquilibre actuel constitue un handicap. Les archipels tendent accentuer les vides, et faute de fonctions urbaines affirmes consquence de la prio-rit accorde aux mtropoles , les petites villes et surtout les chefs-lieux rgionaux souffrent dune anmie structurelle qui grve le renforcement territorial. Cette faiblesse de lurbanisation intermdiaire (le chanon manquant de lurbanisation) est un handicap majeur qui limite la densification des relations villes campagnes, cl dune diversification conomique rurale porteuse de changement structurel.

    Cest cette rappropriation des territoires en rponse une mtropolisation devenue difficilement grable qui constitue la cl dun nouveau modle de dveloppement.

    < 50 000 hab.

    50 000 - 250 000 hab.

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    > 5 000 000 hab.

    Analyse en cours

    Taille des villes dans un rayon de 100 km

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    C10. Noyaux de peuplement urbain en 2010Source : Africapolis (voir note 1)

    Fig. 3. Croissance urbaine par classes de villesen Afrique de louest, centrale et orientale (1960 2020)Source : Africapolis

    Cirad 2013

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

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    SPlanche 5Une lente transition conomique

    qui appelle un nouveau modle territorial Bruno Losch

    Planche 6Performances de la production

    alimentaire : un potentiel largement inexprimBruno Dorin

    Planche 7Une agriculture dexportation vulnrable

    Benot Daviron

    Planche 8Alimentation :

    lAfrique la conqute de son march intrieurNicolas Bricas

    3

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    Cirad 2013

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    Agriculture Secteur extractif

    PIB (2010, en $ courants / hab.)

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    2,9

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    6,3-0,5

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    Part de l'agriculture dans le PIB (en %)

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    C11. Niveaux de revenu moyen par habitantet parts sectorielles du produit intrieur brutSource : WDI

    C12. Croissance moyenne du produit intrieur brutpar habitant (2000-2010)Source : WDI

    Fig. 4. : Profils-type de changement structurel(1961-2010)Source : FAOSTAT, WDI et calculs auteurs (voir encadr et note 2)

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    26

  • Des trajectoires de changement diffrencies

    Les parts de lagriculture dans le PIB et dans la population active consti-tuent des indicateurs frquemment utiliss pour analyser la situation structurelle dune conomie. La prise en compte de leur volution conjointe permet notamment desquisser des trajectoires mais aussi des rythmes de changement. Une telle approche est rductrice et se trouve confronte la qualit variable des donnes, mais elle permet dclairer des situations nationales extrmement contrastes. La figure 4 propose quatre profils-type de changement structurel qui rvlent de fortes diffrences dvolution depuis les annes 1960 (les courbes de chaque type se lisent de droite 1961 - gauche - 2010). Le type 1 correspond aux pays qui ont connu les volutions les plus marques, caractriss par une forte urbanisation et une sortie significative du secteur agricole : il comprend la fois des conomies rentires bases sur lexportation de produits miniers (Algrie, Libye, Congo), des conomies diversifies marques par le dveloppement industriel (Afrique du Sud, Maurice, Tunisie), tout en conservant parfois un sec-teur agricole dexportation dynamique (Maroc, Egypte). Le type 3 au contraire est celui des pays fortement ruraux et agricoles (Afrique de lest, Madagascar, Mali, Niger), o les volutions densemble ont t particulirement lentes sur la priode. Le type 2 constitue une situation intermdiaire avec un poids plus limit de lagriculture, mais qui reste cependant lev (Cte dIvoire, Ghana, Cameroun, Sngal). Le type 4, enfin, prsente lvolution atypique des pays o le poids de lagri-culture sest renforc : il sagit essentiellement des pays ayant connu des crises et o le repli de lactivit sest durablement effectu sur le secteur agricole (Sierre Leone, Libria, Guine-Bissau, RDC et RCA).

    Cirad 2013

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    Agriculture Secteur extractif

    PIB (2010, en $ courants / hab.)

    Part du PIB (en %)

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    2,9

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    6,3-0,5

    2,8

    0,3

    -0,1

    4,8

    1,5

    1,8

    14,2

    1,1

    3,4

    4,8

    3,6

    -0,7

    1,8

    //

    0

    10

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    0 10 20 30 40 50 60Par

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    %)

    Part de l'agriculture dans le PIB (en %)

    Prol 1

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    Prol 4

    C11. Niveaux de revenu moyen par habitantet parts sectorielles du produit intrieur brutSource : WDI

    C12. Croissance moyenne du produit intrieur brutpar habitant (2000-2010)Source : WDI

    Fig. 4. : Profils-type de changement structurel(1961-2010)Source : FAOSTAT, WDI et calculs auteurs (voir encadr et note 2)

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    275Planche

    Plan

    che

    Une lente transition conomiqUe qUi appelle Un noUveaU modle territorial

    Bruno Losch

    Le continent a connu une transformation conomique trs lente caractrise par le poids rcurrent du secteur agricole et une

    urbanisation sans industrialisation. Les trajectoires de changement structurel font cependant apparatre de fortes diffrences nationales selon que les pays disposent ou

    non de rentes extractives, certains pays amorant par ailleurs une diversification conomique effective. La densification conomique des territoires fait partie

    des rponses possibles au besoin de changement de modle de dveloppement.

    La grande disparit des situations nationales

    Les discours sur la situation conomique du continent sont trs contrasts. La rcur-rence de crises depuis les indpendances a marqu les esprits, alors que le taux de crois-sance soutenu de la rgion dans les annes 2000, aprs une longue stagnation, offre des arguments aux tenants dune possible mer-gence. Le revenu moyen par tte a progress de 30% au cours de la dernire dcennie et la croissance africaine a globalement rsist la rcession mondiale rcente. Les prix des ressources minrales ont jou un rle vident dans cette tendance, mais ils nexpliquent pas tout. Certains pays, notamment en Afrique de lest (Ethiopie, Rwanda, Mozambique), progressent rapidement sans bnficier de richesses minires ou ptrolires.

    Au-del de la conjoncture actuelle, la rgion est avant tout caractrise par de profondes

    disparits, en termes de croissance, certains pays ayant mme connu du fait de difficul-ts politiques ou de conflits des volutions moyennes ngatives depuis 2000. Trois en-sembles distincts se dtachent : lAfrique du nord correspond elle-seule 35% du pro-duit intrieur brut (PIB) du continent ; un seul pays, lAfrique du Sud, fournit lui seul 20% du PIB ; le reste de lAfrique subsaharienne (47 pays) est lorigine des 45% restants, alors quelle compte 75% de la population. En consquence, 27 des 48 Etats au sud du Sahara sont dans le groupe des pays faible revenu de la Banque mondiale (< 1 025 $ par habitant et par an), dont 13 moins de 500 $, ce qui signifie des situations concrtes dex-trme pauvret et moins de 2$ par jour et par habitant en moyenne.

    La faiblesse du changement structurel face des dfis majeursAlors que les conomies dAfrique du nord et de lAfrique du Sud ont t largement recom-poses au cours des cinquante dernires annes, consquence de leur urbanisation et du dveloppement, pourtant ingal, des industries et des services, lAfrique subsa-harienne reste durablement marque par le poids de son secteur primaire et lexploitation de ses ressources naturelles, celles du sol et du sous-sol. Parmi les pays dAfrique conti-nentale et Madagascar, 19 ont plus de 50% de leur PIB bas sur lagriculture, les mines et lnergie. Le secteur manufacturier est extrmement limit et seuls les secteurs des services et du BTP tirs par la croissance urbaine ont progress, au dtriment de la

    production de biens. Une situation trs loigne des processus dmergence enregistrs en Asie de lest et du sud-est.

    Les raisons de cette anmie structurelle sont bien sr multiformes. Elles sexpliquent par linsertion tardive du sous-continent dans lconomie mondiale, une tutelle coloniale contraignante qui dure jusquaux annes 1960, voire 1970 marque par un clate-ment des territoires consolid au moment des indpendances , et par une urbanisation rcente et rentire base sur ladministration tatique et les matires premires. LAfrique subsaharienne est la rgion de lurbanisa-tion sans industrialisation : un phnomne atypique dans lhistoire conomique mondiale.

    Cette inertie est renforce lorsquon consi-dre galement la structure demploi et le poids de lagriculture dans la population active : dans les pays marqus par des taux de ruralit lev, lagriculture concerne souvent plus de 70% des actifs. Le sous-continent demeure trs majoritairement agricole.

    Une question centrale est ds lors celle de la rponse aux dfis dune croissance dmo-graphique extrmement forte, caractri-se par la pousse des jeunes actifs, dans le contexte dune mondialisation qui offre dvidentes opportunits, mais aussi les contraintes dune concurrence internationale exacerbe par les carts de comptitivit, qui ne sont pas aujourdhui en faveur de lAfrique. Ces contraintes risquent fort dailleurs dtre renforces par les consquences du chan-gement climatique global et par la tension sur les ressources naturelles non renouvelables.

    A la recherche dun nouveau modle

    Laugmentation rapide de la population active et lvolution positive du rapport actifs/inactifs, souvent qualifi de dividende dmographique , sont a priori favorables la croissance. Ils impliquent nanmoins de dfinir des stratgies, dans un environne-ment international concurrentiel, pour offrir

    des emplois au plus grand nombre tout en amliorant les revenus. Il nexiste videm-ment pas de prt--porter en termes de politiques, mais entre les mirages dune industrialisation qui simposerait rapidement et la priorit la conqute des marchs loin-tains, il apparat que le potentiel considrable du march intra-africain offre de solides perspectives pour la densification co- nomique des territoires. Consolider lint-gration conomique rgionale, connecter les mtropoles leurs arrire-pays, renforcer les attributs conomiques des villes moyennes, stimuler la demande rurale par un appui accru au secteur agricole, dmultiplier les efforts de formation, sont sans exclusives des leviers possibles dune diversification conomique porteuse de dveloppement.

  • 3

    Cirad 2013

    0

    5000

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    15000

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    25000

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    ha

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    1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010

    Europe

    Asie

    Amrique du sud

    Amrique du nord

    Afrique

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    Croissance annuelle 1970 2007 (%)

    Donnes manquantes

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    1 - 2

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    > 5

    Kcal. / hectare / jour en 2007

    < 0

    0 - 1

    1 - 2

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    20 000

    77 000

    40 000

    10 000

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    Croissance annuelle1970 - 2007 (%)

    Donnes manquantes

    < -2

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    Surface cultive (ha / actif )

    en 2007

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    25

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    Croissance annuelle1970 - 2007 (%)

    Donnes manquantes

    < 0

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    1 - 2

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    > 5

    Kcal / actif / jour en 2007

    25 000

    100 00

    50 000

    10 000

    C13. Productivit de la terre (productivit alimentaire vgtalepar hectare cultiv)Source : Dorin 2011

    C14. Disponibilits en terres cultives (surface cultive par actif agricole)Source : Dorin 2011

    Fig. 5. Productivit de la terre compare par grandes rgions du mondeSource : Dorin 2011

    C15. Productivit du travail (productivit alimentaire vgtaleen Kcal par actif agricole)

    Source : Dorin 2011

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    28

  • La production alimentaire a globalement suivi la croissance dmographique et urbaine grce laugmentation

    des surfaces cultives mais aussi des rendements. La lente rosion de la pro-duction alimentaire par habitant, compen-se par des importations, pose la question de la capacit de rponse laugmentation

    de la population alors que les surfaces cultives par actif diminuent.

    Mais la faiblesse de la productivit offre de considrables marges de progrs.

    Des performances ingales en de des besoins globaux

    En 2007, lAfrique concentre 15% de la popu-lation mondiale pour 16% des terres culti-ves. Sur ces terres ne poussent cependant que 8% des calories alimentaires vgtales produites la mme anne dans le monde (et 4% des calories animales). Cet cart masque toutefois un phnomne important : depuis 1970, cette production alimentaire vgtale a augment en moyenne de 2,6% par an, un rythme similaire celui de lAsie (2,7%) et lgrement suprieur la moyenne mondiale (2,15%).

    Cette volution positive est composite et ambivalente. Elle rsulte de laccroissement des surfaces cultives qui frle en moyenne 0,9% par an depuis 1970 (le plus fort taux

    observ aprs lAmrique Latine) mais aussi des rendements qui enregistrent pourtant le plus bas taux (1,7%) aprs lEurope et lex-URSS. Partant dun faible niveau, ces rende-ments demeurent donc parmi les plus bas au monde en 2007. Ce sont eux toutefois qui ont contribu pour 65% laugmentation de la production, contre 35% attribuables laccroissement des surfaces.

    Cette volution positive en valeur absolue ne doit cependant pas faire oublier une tendance beaucoup plus proccupante : avec la plus forte croissance dmographique au niveau continental (2,65% par an en moyenne), la production alimentaire vgtale par habitant a diminu de presque 0,1% par an sur la p-riode le seul taux ngatif observ lchelle mondiale pour natteindre que 2 785 kcal/capita en 2007 (la moyenne mondiale est suprieure 5 000 kcal Afrique comprise). En consquence, laugmentation des disponibili-ts alimentaires par habitant, qui demeurent les plus faibles au monde, tout spcialement en produits animaux (lait, viandes, ufs), ne peut se faire que par un recours accru aux importations.

    Une grande diversit de situations mais

    des dfis similairesLanalyse des processus qui sous-tendent cette volution densemble implique de prendre en compte dimportantes diffrences entre pays qui expriment la grande diversit des situations africaines :

    La croissance moyenne du rendement alimentaire (exprim en kilocalories par hectare) a frquemment dpass 2% par an, tout spcialement dans les pays ayant bn-fici du progrs de lirrigation. La Tunisie et le Maroc se dmarquent avec un taux sup-rieur 10%. Il nempche que les rendements journaliers de 2007 sont tous infrieurs la moyenne mondiale (22 000 kcal) lexception de lEgypte et du Swaziland, en partie cause de leur importante production sucrire.

    Faute dalternatives suffisantes en termes demploi en dehors de lagriculture, la popu-lation active agricole africaine a augment de 1,9% par an, soit beaucoup plus que les surfaces cultives (0,9%). En consquence les surfaces cultives par actif ont rgress dans trois quarts des pays pour atteindre des valeurs presque aussi faibles quen Asie : dans plus de vingt pays la surface moyenne est in-frieure 1 ha. Cette volution est paradoxale eu gard au potentiel cultivable largement mconnu et met en vidence dimportants problmes daccs (statuts fonciers) et dac-cessibilit (enclavement).

    Cette diminution des surfaces cultives par actif est problmatique puisquelle contri-bue, combine la faible progression des

    rendements, une productivit du travail modeste (le ratio en kilocalories par actif est une approximation du revenu prix rels constants : kcal/actif = kcal/ha x ha/actif). La productivit du travail agricole a diminu ou peu augment dans les pays dAfrique centrale et de lest et, en 2007, dans plus de trente pays, elle reste infrieure la moyenne asiatique dj trs faible (14 600 kcal/actif/jour contre plus de 260 000 en Europe par exemple).

    Avec de si bas niveaux de revenu du travail, quelles sont les perspectives offertes aux actifs agricoles ? Migrer dans des bidonvilles ou survivre dans les campagnes ? Paral-llement aux opportunits de diversifica-tion rurale et de migration vers des emplois dcents dans les villes, les rponses devront venir de la promotion de modles de dve-loppement agricole adapts. La faiblesse des productivits offre des marges de progrs considrables qui peuvent tre mobilises pour rpondre aux multiples d-fis conomique, social et environnemental, exacerbs plus quailleurs dans le monde par une transition dmographique qui est loin dtre acheve.

    Pourquoi utiliser les calories alimentaires comme unit de mesure ?Analyser les performances alimentaires en calories est inhabituel. Cette analyse prsente des inconvnients aux plans conomique (la calorie dune graine de mas ne vaut pas celle dune graine de caf) et nutritionnel (la calorie est un indicateur insuffisant de la valeur nutritionnelle des productions et consommations). Mais elle offre aussi dnormes avantages. La conversion de quantits (produites, changes ou consommes) en calories permet en effet :

    dagrger des volumes de produits trs diffrents sans recourir la conversion montaire qui pose dautres problmes ;

    dvaluer le rendement de systmes complexes combinant plusieurs cultures par an sur une mme parcelle.

    Est ici considr comme produit alimentaire toute biomasse pouvant, sous sa forme primaire, servir daliment ltre humain, et servant effecti-vement cet usage (graines, racines, huile, etc.) ou non (semences, aliments pour animaux, biocarburants, etc.), aprs transformation ou non. Cette dfinition intgre donc la majorit des produits agricoles, avec des exceptions comme les fibres, le caoutchouc, le tabac ou les fourrages (luzernes, pailles, etc.) pour lesquels une conversion en calories alimentaires est impossible. Comme ces productions occupent galement des surfaces cultives (cultures annuelles et prennes), leur non-prise en compte peut introduire un biais dans lestimation du rendement (productions/surface). Cest notamment le cas en Afrique pour les rgions productrices de coton.

    Cette analyse en calories alimentaires utilise en amont, et pour lessentiel, des donnes de la FAO. Elle a t utilise par la prospective Agrimonde. Le dtail des sources et de la mthodologie est prsent dans Dorin 2010 et Dorin et al. 2013.

    Cirad 2013

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    Europe

    Asie

    Amrique du sud

    Amrique du nord

    Afrique

    Ex-URSS

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    Croissance annuelle 1970 2007 (%)

    Donnes manquantes

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    Surface cultive (ha / actif )

    en 2007

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    Croissance annuelle1970 - 2007 (%)

    Donnes manquantes

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    Kcal / actif / jour en 2007

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    C13. Productivit de la terre (productivit alimentaire vgtalepar hectare cultiv)Source : Dorin 2011

    C14. Disponibilits en terres cultives (surface cultive par actif agricole)Source : Dorin 2011

    Fig. 5. Productivit de la terre compare par grandes rgions du mondeSource : Dorin 2011

    C15. Productivit du travail (productivit alimentaire vgtaleen Kcal par actif agricole)

    Source : Dorin 2011

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    296Planche

    Plan

    che

    performances de la prodUction alimentaire : Un potentiel largement inexprim

    Bruno Dorin

  • 3

    Cirad 2013

    Pas de donnes

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    > 75

    Moyenne 2009-2011(en % du total des exportations)

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    0,5

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    3,3

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    83,1

    25,3

    18,4

    9,6

    27,14,7

    21,9

    80,3

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    22,7

    42,6

    43,6

    9,4

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    60,7

    11,5

    9,4

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    59,7

    32,4 30,4

    84,4

    57,1

    33,1

    20,7 40,4

    92

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    0,0

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    1995

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    1997

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    2006

    2007

    2008

    2009

    2010

    2011

    Produits animaux

    Crales et prparations base de crales

    Lgumes et fruits

    Sucres, prparations base de sucre, et miel

    Caf, th, cacao, pices, produits drivs

    Tabacs bruts et fabriqus

    Olagineux

    Caoutchouc naturel, balata,guayule, etc., formes primaires.

    Lige et bois

    Fibres textiles et leurs dchets

    %

    0% 5% 10% 15% 20% 25% 30%

    Produits animaux

    Crales et prparations base de crales

    Lgumes et fruits

    Sucres, prparations base de sucre, et miel

    Caf, th, cacao, pices, produits drivs

    Boissons

    Tabacs bruts et fabriqus

    Olagineux

    Caoutchouc naturel, balata, guayule, etc.,formes primaires.

    Lige et bois

    Fibres textiles et leurs dchets

    Autres

    MondeAfrique

    C16. Place des produits agricoles dans les exportations de biens et servicesSource : Comtrade

    Fig. 6. Parts de march de lAfrique dans les exportations agricolesmondiales (par groupes de produits)Source : Comtrade

    Fig. 7. Composition compare des exportations agricolesentre lAfrique et le reste du monde (moyenne 2009-11)

    Source : Comtrade

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    30

  • Cirad 2013

    Pas de donnes

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    Moyenne 2009-2011(en % du total des exportations)

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    32,4 30,4

    84,4

    57,1

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    20,7 40,4

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    58,2

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    1995

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    1997

    1998

    1999

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    2001

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    Produits animaux

    Crales et prparations base de crales

    Lgumes et fruits

    Sucres, prparations base de sucre, et miel

    Caf, th, cacao, pices, produits drivs

    Tabacs bruts et fabriqus

    Olagineux

    Caoutchouc naturel, balata,guayule, etc., formes primaires.

    Lige et bois

    Fibres textiles et leurs dchets

    %

    0% 5% 10% 15% 20% 25% 30%

    Produits animaux

    Crales et prparations base de crales

    Lgumes et fruits

    Sucres, prparations base de sucre, et miel

    Caf, th, cacao, pices, produits drivs

    Boissons

    Tabacs bruts et fabriqus

    Olagineux

    Caoutchouc naturel, balata, guayule, etc.,formes primaires.

    Lige et bois

    Fibres textiles et leurs dchets

    Autres

    MondeAfrique

    C16. Place des produits agricoles dans les exportations de biens et servicesSource : Comtrade

    Fig. 6. Parts de march de lAfrique dans les exportations agricolesmondiales (par groupes de produits)Source : Comtrade

    Fig. 7. Composition compare des exportations agricolesentre lAfrique et le reste du monde (moyenne 2009-11)

    Source : Comtrade

    Une noUvelle rUralit mergente regards croiss sUr les transformations rUrales africaines

    317Planche

    Plan

    che

    Une agricUltUre dexportation vUlnrable Benot Daviron

    Les exportations de produits agricoles conservent un rle dterminant pour de nombreux pays mais elles ont t

    dclasses par la monte en puissance du secteur extractif au niveau continental. Alors que la composition des exportations

    a peu volu, lexception de lessor des fruits