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Bull. Soc. Hist. Nat. Toulouse, 150, 2014, 5-14 (1) Une nouvelle association lichénique saxicole-calcifuge : le Fuscideetum lygaeae ass. nov. par Clother Coste 26 rue de Venise, 81100 Castres e-mail : [email protected] RÉSUMÉ Description du Fuscideetum lygaeae Coste ass. nov. une association lichénique nouvelle pour la science. Le syntaxon est commun sur les gneiss du domaine subméditerranéen languedocien ; il est caractérisé par Fuscidea lygaea et Schaereria cinereorufa ; il appartient à l’Umbi- licarion hirsutae, à l’ordre des Aspiciletalia gibbosae et à la classe des Rhizocarpetea geographici. Il peut être qualifié de saxicole-calcifuge, photophile et héliophobe, hygrophile et non hydrophile, peu ou pas thermophile, peu ombrophile et peu ou pas nitrophile. Mots clés : lichens, saxicole-calcifuge, association lichénique, domaine subméditerranéen languedocien. A new saxicolous lichen association : Fuscideetum lygaeae nov. ass. ABSTRACT This paper describes Fuscideetum lygaeae Coste, a lichenic community new to science. The community is common on the gneiss of the sub- mediterranean Languedoc area ; it is characterized by Fuscidea lygaea and Schaereria cinereorufa and it belongs to the Umbilicarion hirsutae, in order Aspiciletalia gibbosae and class Rhizocarpetea geographici. This community can be found on hard siliceous rocks. The syntaxon is photophilous and heliophobous, hygrophilic and non-hydrophilic, more or less thermophilic, more or less nitrophilous. Key words : Lichens, siliceous, saxicolous, lichenic community, Languedoc submediterranean area. Introduction Les communautés lichéniques saxicoles-calcifuges fran- çaises ont fait l’objet de quelques travaux phytosociolo- giques relativement récents - en particulier MENARD (1997) - qui donnent une bonne idée des groupements lichéniques acidophiles du sud de la France. Pour les autres pays Européens, EGEA & LLIMONA (1987, Espagne) et WIRTH (1972, Allemagne) ont permis de mieux comprendre les regroupements européens de lichens des roches acides. Depuis plus de 20 années de prospections lichénologiques dans le sud de la France, il a été souvent observé un grou- pement de lichens à l’écologie très caractéristique, qui n’a pas été décrit dans les principales références lichénologiques européennes. En effet les surfaces exposées au nord des grandes parois verticales de gneiss ou de grès quartzitique sont très lar- gement colonisées par Fuscidea lygaea souvent associé à Schaereria cinereorufa formant ainsi une nouvelle associa- tion lichénique saxicole-calcifuge pour la science qu’il est proposé de nommer le Fuscideetum lygaeae Coste. Caractères généraux des sites étudiés Localisation des relevés Pour la description de l’association les relevés phytosocio- logiques ont été réalisés dans le Tarn et l’Hérault. De nom- breuses observations ont été faites dans les départements du Gard, de la Lozère, de l’Ardèche et des Pyrénées-Orientales, malheureusement il n’a pas été possible de faire des rele- vés phytosociologiques dans ces départements, mais il a été réalisé d’abondants prélèvements partiels afin de déterminer les espèces présentes dans la communauté. Le cortège flo- ristique est identique aux relevés effectués dans le Tarn et l’Hérault.

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Bull. Soc. Hist. Nat. Toulouse, 150, 2014, 5-14

(1)

Une nouvelle association lichénique saxicole-calcifuge :le Fuscideetum lygaeae ass. nov.

par Clother Coste

26 rue de Venise, 81100 Castres e-mail : [email protected]

Résumé

Description du Fuscideetum lygaeae Coste ass. nov. une association lichénique nouvelle pour la science. Le syntaxon est commun sur les gneiss du domaine subméditerranéen languedocien ; il est caractérisé par Fuscidea lygaea et Schaereria cinereorufa ; il appartient à l’Umbi-licarion hirsutae, à l’ordre des Aspiciletalia gibbosae et à la classe des Rhizocarpetea geographici. Il peut être qualifié de saxicole-calcifuge, photophile et héliophobe, hygrophile et non hydrophile, peu ou pas thermophile, peu ombrophile et peu ou pas nitrophile.

Mots clés : lichens, saxicole-calcifuge, association lichénique, domaine subméditerranéen languedocien.

A new saxicolous lichen association : Fuscideetum lygaeae nov. ass.

AbstRAct

This paper describes Fuscideetum lygaeae Coste, a lichenic community new to science. The community is common on the gneiss of the sub-mediterranean Languedoc area ; it is characterized by Fuscidea lygaea and Schaereria cinereorufa and it belongs to the Umbilicarion hirsutae, in order Aspiciletalia gibbosae and class Rhizocarpetea geographici. This community can be found on hard siliceous rocks. The syntaxon is photophilous and heliophobous, hygrophilic and non-hydrophilic, more or less thermophilic, more or less nitrophilous.

Key words : Lichens, siliceous, saxicolous, lichenic community, Languedoc submediterranean area.

Introduction

Les communautés lichéniques saxicoles-calcifuges fran-çaises ont fait l’objet de quelques travaux phytosociolo-giques relativement récents - en particulier menARd (1997) - qui donnent une bonne idée des groupements lichéniques acidophiles du sud de la France.

Pour les autres pays Européens, egeA & LLimonA (1987, Espagne) et WiRth (1972, Allemagne) ont permis de mieux comprendre les regroupements européens de lichens des roches acides.

Depuis plus de 20 années de prospections lichénologiques dans le sud de la France, il a été souvent observé un grou-pement de lichens à l’écologie très caractéristique, qui n’a pas été décrit dans les principales références lichénologiques européennes.

En effet les surfaces exposées au nord des grandes parois verticales de gneiss ou de grès quartzitique sont très lar-

gement colonisées par Fuscidea lygaea souvent associé à Schaereria cinereorufa formant ainsi une nouvelle associa-tion lichénique saxicole-calcifuge pour la science qu’il est proposé de nommer le Fuscideetum lygaeae Coste.

Caractères généraux des sites étudiés

Localisation des relevés Pour la description de l’association les relevés phytosocio-

logiques ont été réalisés dans le Tarn et l’Hérault. De nom-breuses observations ont été faites dans les départements du Gard, de la Lozère, de l’Ardèche et des Pyrénées-Orientales, malheureusement il n’a pas été possible de faire des rele-vés phytosociologiques dans ces départements, mais il a été réalisé d’abondants prélèvements partiels afin de déterminer les espèces présentes dans la communauté. Le cortège flo-ristique est identique aux relevés effectués dans le Tarn et l’Hérault.

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Biogéographie et climat Les sites d’observation de la communauté sont situés (Fig.

1) dans le sud de la France en région Midi-Pyrénées (Tarn), région Languedoc-Roussillon (Gard, Hérault, Lozère, Pyré-nées-Orientales) et Région Rhône-Alpes (Ardèche), dans le domaine biogéographique du Massif-Central – Montagne Noire et le domaine subméditerranéen Languedocien. Les sites sont situés à l’étage collinéen et à l’étage montagnard (T = 9° à 14°C, avec des étés chauds, M+/-23°C) sous om-broclimats subhumide et humide.

GéologieEn se référant aux cartes géologiques régionales les roches

étudiées sont : 1. des gneiss, orthogneiss pour le Banquet, à gros yeux

pour Malamort, oeillés pour Albine et Saut de Vésoles, 2. des grès quartzitiques blancs pour Arifat, Mont Roc,

Grateloup, 3. des conglomérats de quartzites blancs et des schistes

siliceux blancs pour le roc Suzadou. Ces formations sont datées du Cambrien à l’Ordovicien

(-570 à - 439 MA).

Matériel et Méthode

Méthode d’échantillonnageCompte tenu de la nature de la roche, la méthode de pré-

lèvement intégral (Roux 1990) étant impossible à mettre en œuvre, les échantillonnages ont été réalisés par la méthode de prélèvement partiel.

Après avoir reconnu le groupement à étudier, les recou-vrements de chaque espèce ont été évalués par la méthode

d’évaluation d’abondance-dominance (voir le détail ci-des-sous).

De nombreux relevés d’échantillons de roche ont été effec-tués à l’aide d’un marteau et d’un burin pour déterminer en laboratoire les taxons non identifiables sur le terrain.

Ces échantillons ont été mis dans des enveloppes papier sur lesquelles ont été notées toutes les informations écolo-giques utiles : l’altitude en m, les expositions locale et géné-rale, la nature du support, la pente du support, les caractéris-tiques du support, la surface étudiée en cm², le recouvrement en % du recouvrement de chaque taxon identifié.

DéterminationsTous les éclats de roche récoltés sont étudiés sous la loupe

binoculaire : des réactions avec des réactifs habituellement utilisés (smith et AL. 2009) sont réalisées, des coupes de thalle ou de fructifications sont étudiées sous le microscope.

Les coupes de thalles ou fructifications sont réalisées sous la loupe binoculaire à l’aide d’un scalpel muni d’une lame neuve et sur des échantillons secs (pour faciliter les coupes). La coupe est déposée sur une lame sur laquelle on a déposé au préalable une goutte d’eau ou de KOH (pour éclaircisse-ment du montage) puis recouvert d’une lamelle.

Les observations sont réalisées sous le microscope dans la majorité des cas en direct au grossissement de 400 ou à l’immersion au grossissement de 1000.

Les ouvrages de détermination utilisés sont : - pour les lichens : cLAuzAde & Roux (1985 et les supplé-

ments) ; ozendA & cLAuzAde (1970) ; PuRvis et AL. (1992) ; smith et AL. (2009) ; thüs (2002) ; WiRth (1980 et 1995).

- pour les champignons lichénicoles non lichénisés : cLAu-zAde et AL. (1989).

- pour les bryophytes : smith (1978).

Tableaux phytosociologiques (tableaux 1 et 2)

Évaluation abondance-dominanceSur le terrain le recouvrement de tous les taxons présents sur

la roche est évalué par la méthode d’abondance-dominance.Le recouvrement est noté en chiffre de 1 à 5 selon l’échelle

suivante : 1 : 1 à 5% de recouvrement, 2 : 5 à 25%, 3 : 25 à 50%, 4 : 50 à 75% et 5 : 75 à 100%. Pour les surfaces infé-rieures à 1% le recouvrement est noté par un +.

SociabilitéPour chaque taxon on a également noté la forme de colo-

nisation de chaque espèce. La sociabilité est évaluée par un chiffre de 1 à 5 correspondant à l’échelle suivante : 5 : thalle dense et continu, 4 : thalle groupé en large tache continue, 3 : thalle groupé en tache non continue, 2 : thalle petit et séparé, 1 : thalle isolé et unique.

FertilitéPour chaque taxon on a précisé la fertilité du spécimen :

« f » pour une espèce fructifère et « s » pour l’absence de fructifications.

Fig ure 1 : Localisation des observations de l’association dans les domaines biogéographiques français.

7(3) UNE NOUVELLE ASSOCIATION LICHÉNIQUE SAXICOLE-CALCIFUGE : LE FUSCIDEETUM LYGAEAE ASS. NOV.

Paramètres phytosociologiquesLes données recueillies sur le terrain et les déterminations saisies dans un tableau Excel permettent de calculer les paramètres

phytosociologiques de présence (P), de recouvrement moyen global (RMG) et de dominance de recouvrement (DR) : tableaux 1 (pp. xx-yy) et 2 (pp. xx’-yy’).

Tableau 1 : Composition floristique du Fuscideetum lygaeae ass. nov. dans sa forme typique.

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9(5) UNE NOUVELLE ASSOCIATION LICHÉNIQUE SAXICOLE-CALCIFUGE : LE FUSCIDEETUM LYGAEAE ASS. NOV.

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Tableau 2 : Composition floristique du Fuscideetum lygaeae ass. nov. dans sa forme appauvrie.

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Degré de présence (P)Le degré de présence est basé sur le nombre de relevés

dans lesquels le taxon considéré est présent. Ce paramètre est indiqué par des chiffres romains de I à V selon les pour-centages de présences suivants : I : taxon présent dans 1 à 20% des relevés, II : 21 à 40%, III : 41 à 60%, IV : 61 à 80% et V de 81 à 100% des relevés.

Recouvrement moyen global (RMG) Le RMG en pourcentage correspond au recouvrement

de taxon dans l’ensemble des relevés. Il est calculé par la somme des recouvrements pour chaque espèce divisé par le nombre de relevés effectués en %.

Les pourcentages de recouvrements pour chaque espèce sont évalués à partir des degrés d’abondance-dominance par les correspondances suivantes : 1 = 2,5%, 2 = 15%, 3 = 37,5%, 4 = 62,5%, 5 = 87,5% et par + = 0,1%.

Dominance de recouvrement (DR)La DR en pourcentage indique la surface occupée par une

espèce par rapport à la totalité des recouvrements de toutes les espèces d’un tableau de relevés. Elle est calculée pour chaque espèce par la division de son RMG par la somme des RMG de toutes les espèces d’un tableau de relevés.

Spectre biologique Le spectre biologique illustre la morphologie globale du

groupement étudié. Il est calculé par la somme des DR pour chaque taxon à mor-phologie différente observé dans le groupement : lichens à thalle crustacé, squamuleux, lépreux, foliacé, fruticuleux, umbiliqué, complexe, les champignons lichénicoles, bryo-phytes, algues vertes et cyanobactéries.

Résultats

Fuscideetum lygaeae Coste

Composition floristique (Tableau 1)Les deux espèces caractéristiques du syntaxon sont Fusci-

dea lygaea, très largement dominant (RMG = 66,3%, DR = 56%), et Shaereria cinereorufa à la représentation plus dis-crète (RMG = 4,8%, DR = 4,0%).

Les autres espèces correspondent aux caractéristiques des unités supérieures auxquelles le syntaxon appartient (voir le tableau 1 pour les espèces) :

Umbilicarion hirsutae (DR = 4,6%) (communautés photo-philes, peu thermophiles et hygrophiles),

Aspicilietalia gibbosae (D.R = 2,5%) (communautés pho-tophiles à héliophiles).

La classe des Rhizocarpetea geographici (DR = 8%) (communautés saxicoles-calcifuges, ombrophiles et non hydrophiles).

Les espèces transgressives Elles sont issues principalement des alliances adjacentes à

l’Umbilicarion hirsutae (voir Tableau 3) :

1. du Pertusarion aspergillae (DR= 2,9%) (Communau-tés photophiles, héliophobes, peu hygrophiles, +/- thermo-philes),

2. du Xanthoparmelion conspersae (DR=2,5%) (Commu-nautés +/- héliophiles et +/- nitrophiles),

3. du Porpidion tuberculosae (DR=1,8%) (Communautés hygrophiles et coniophiles).

Tableau 3 : Position syntaxonomique du Fuscideetum lygaeae ass. nov.

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Elles sont aussi issues de l’Ephebetum lanatae (DR=1,8%) (communautés ékréophiles) ainsi que du Chrysotrichion chlorinae (DR=1,8%) (classe de communautés lichéniques stégophiles).

On notera la faible présence (DR = 0,7%) d’espèces carac-téristiques de l’Umbilicarietalia cylindricae correspondant aux communautés subalpines présentes à l’étage montagnard.

Formes appauvriesLa forme appauvrie la plus fréquente de l’association

correspond à de grands peuplements à Fuscidea lygaea où manque Schaereria cinereorufa vraisemblablement par défi-cit d’humidité favorable à l’installation de l’espèce.

Une deuxième forme également appauvrie apparaît dans le tableau 2 (relevé 124, colonne 9) où seul se trouve Schae-reria cinereorufa par excès d’humidité (écoulements abon-dants et rapide dessiccation de la roche) qui ne permet pas l’installation de Fuscidea lygaea, comme en témoigne dans le relevé la présence d’Euopsis pulvinata (taxon ékréophile) au fort recouvrement.

Enfin une troisième forme appauvrie (Tableau 2, relevé 123, colonne 8) apparaît dans les stations plus sèches où manquent les deux caractéristiques de l’association mais dans lequel Fuscidea cyathoides est largement présent, for-mant ainsi une expression de l’alliance à laquelle l’associa-tion appartient.

Dans ces trois formes appauvries, les espèces caractéris-tiques des unités supérieures et les transgressives sont les mêmes que la forme typique de l’association du tableau 1.

ÉcologieLes caractéristiques écologiques du syntaxon sont dé-

duites des observations de terrain lors des récoltes mais aussi des caractéristiques écologiques des espèces présentes dans les relevés. Le plus fréquemment, l’association colonise les grandes parois verticales ou inclinées des gneiss. Les sur-faces colonisées sont toujours protégées des rayons directs du soleil dans les stations lumineuses. Elles ne sont pas pro-tégées des pluies directes par un surplomb, mais du fait de la configuration des parois et de leur orientation, elles ne sont pas soumises aux fortes et violentes pluies, et sont toujours protégées des fortes dessiccations. Elles peuvent être égale-ment soumises à de lents écoulements en flaque. Les stations sont assez peu enrichies en substances azotées comme en té-moigne la faible présence de taxons franchement nitrophiles.

Cette association peut donc être qualifiée de saxicole-cal-cifuge, photophile et héliophobe, peu ou pas thermophile, hygrophile et non hydrophile, légèrement ombrophile et peu ou pas nitrophile.

PhysionomieL’association est dominée par les thalles crustacés de cou-

leur sombre variant du gris violacé au noir qui confère à la roche une ambiance sombre très particulière (voir coste 2013 pour les illustrations). Sur ce fond grisâtre de l’asso-ciation apparaissent quelques petites taches éparses et claires (blanches, jaunes ou verdâtres) des espèces accompagnantes

telles que Rhizocarpon, Pertusaria, Lepraria, Tephromella, Aspicilia… La roche est entièrement couverte de lichens : le recouvrement total est de 118,3 %, 100% de thalle lichénique saxicole et 18,3% de bryophytes, champignons lichénicoles, lichens, algues et cyanobactéries épilichéniques.

Spectre biologique et richesse lichéniqueL’association est principalement formée (Fig. 2) de li-

chens à thalle crustacé (79,7%) et dans une moindre mesure les lichens à thalle squamuleux de Schaereria cinereorufa (4,1%). On notera également une représentation non négli-geable des algues vertes et des cyanobactéries témoignant d’une humidité surfacique récurrente. Du point de vue ri-chesse lichénique, l’association dans sa forme typique est moyennement riche en espèces puisqu’elle comprend 16,6 espèces en moyenne (Tableau 1) et dans ses formes appau-vries environ 13,5 espèces en moyenne (Tableau 2).

Position syntaxonomiqueLe Fuscideetum lygaeae est à insérer dans la classe phy-

tosociologique des Rhizocarpetea geographici WiRth 1972 qui regroupe les communautés de lichens saxicoles-cal-cifuges, ombrophiles, de photophiles à héliophiles et non hydrophiles. Il appartient à l’ordre des Aspicilietalia gibbo-sae WiRth 1972 (communautés de lichens de photophiles à héliophiles) et à l’alliance de l’Umbilicarion hirsutae ceRn. & hAdAc 1944 (communautés de lichens photophiles, peu thermophiles et hygrophiles).

Les unités phytosociologiques observées dans les relevés sont les suivantes :

Classe : Rhizocarpetea geographici WiRth 1972Ordre : Rhizocarpetalia reducti WiRth 1972 Alliance : Porpidion tuberculosae WiRth 1972Ordre : Aspicilietalia gibbosae WiRth 1972 Alliance : Umbilicarion hirsutae ceRn. et hAdAc

1944

Figure 2 : Spectre biologique du Fuscideetum lygaeae ass. nov.

14 (10)CLOTHER COSTE

Association : Fuscideetum lygaeae ass. nov.

Alliance : Xanthoparmelion conspersae ceRn. et hAdAc 1944

Alliance : Pertusarion aspergillae egeA et LLimo-nA 1987

Ordre : Umbilicarietalia cylindricae WiRth 1972 Alliance : Umbilicarion cylindricae gAms 1927Classe : Chrysotrichetea chlorinae WiRth 1972Ordre : Chrysotrichetalia chlorinae WiRth 1972 Alliance : Chrysotrichion chlorinae smARdA et

hAdAc 1944

La position syntaxonomique du Fuscideetum lygaeae peut être résumée comme l’indique le tableau 3.

Conclusion

Une association lichénique correspond à un noyau d’es-pèces caractéristiques et indicatrices de conditions écolo-giques clairement définies. À ce titre le Fuscideetum lygaeae Coste, 2013 s’inscrit parfaitement dans cette définition. En effet ce syntaxon colonise les grandes parois verticales de plusieurs mètres carrés de gneiss de préférence, abritées des rayons directs du soleil mais situées dans les stations bien éclairées et légèrement protégées des pluies directes voire occasionnellement soumises à de faibles écoulements d’eau en flaque, et toujours protégées des fortes dessiccations de la roche et assez peu enrichies en substances azotées.

C’est donc une association saxicole-calcifuge (de préfé-rence les gneiss), photophile et héliophobe, hygrophile et non hydrophile, légèrement ombrophile, peu ou pas thermo-phile, peu ou pas nitrophile. Elle apparaît dans le sud de la France dans la région eurosibérienne aux étages collinéen et montagnard sous ombroclimats humide ou subhumide, le long de la limite de la région méditerranéenne dans laquelle elle existe à l’étage subméditerranéen (Domaine submédi-terranéen languedocien). En l’absence de données phytoso-ciologiques complémentaires, il est à ce jour impossible de proposer une répartition géographique précise du syntaxon, mais il semble, d’après les répartitions connues des espèces caractéristiques, que cette communauté existe dans le sud et le centre de l’Europe. Selon WiRth (1972) Schaereria cine-reorufa est caractéristique du Pertusarietum corallinae Frey, 1922. Ce syntaxon est composé de Pertusaria corallina et Schaereria cinereorufa et des espèces des unités supérieures identiques au présent travail. Pertusaria corallina est consi-déré ici comme caractéristique de la classe phytosociologique (comme WiRth en 1972) et Schaereria cinereorufa comme caractéristique du Fuscideetum lygaeae. L’association en Allemagne de Pertusaria corallina et de Schaereria cine-reorufa doit être considérée comme une forme très appau-vrie du Fuscideetum lygaeae en limite d’aire de répartition. C’est peut-être également le cas dans les Îles Britanniques à l’étage montagnard et subalpin (smith et AL. 2009) où il est

fait mention de Fuscidea lygaea et Schaereria cinereorufa sans autre précision phytosociologique. Le syntaxon décrit dans le présent travail regroupe principalement deux taxons : Fuscidea lygaea et Schaereria cinereorufa dans une nou-velle association lichénique : Fuscideetum lygaeae Coste.

RemeRciements

Ils s’adressent à Antoine qui m’a accompagné pendant les périodes de prospection ainsi que les membres de l’association « Les Amis des Sciences de la Nature (ASNAT) » et particulièrement Daniel, Monique et Yvonne. Mes remerciements s’adressent Jean-Pierre Tarayre (ASNAT) pour son aide précieuse à la détermination des roches des secteurs étudiés.

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