une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine ... · mémoire et rapport de stage...
TRANSCRIPT
Université Lyon II Institut d’Urbanisme de Lyon
Mémoire et rapport de stage de 1ère année de Master « Sciences des Sociétés et de leur Environnement »
Mention « Urbanisme et Aménagement »
Une définition ambigüe et élusive de la centralité
urbaine à Romans comme échec de la
revalorisation du centre ancien
Stage au Service Urbanisme de la mairie de Romans-sur-Isère dans la Drôme
Du 1er Février au 16 juillet 2010
Enseignant tuteur : Philippe CHAUDOIR Marisa JULIEN
Maître de stage : Aurélie RODET Promotion 2009/2010
1
2
Remerciements
Je remercie tout particulièrement Aurélie Rodet, responsable adjointe du service
urbanisme et tutrice de mon stage de Master 1, qui a su me guider tout au long de mon
travail et qui a trouvé un certain équilibre en me laissant assez d’autonomie et en me
donnant des pistes de réflexions riches aussi bien pour ma mission que pour mon mémoire.
Je remercie toutes les personnes que j’ai sollicitées pour les entretiens réalisés et toutes
les personnes qui m’ont fait parvenir des documents qui ont alimenté ce rapport de stage et
ce mémoire.
Je remercie plus généralement toutes les personnes du service Urbanisme, avec
lesquelles j’ai eu le plaisir de travailler quotidiennement, ainsi que Martine Buon, responsable
du service Urbanisme et Christelle Mottet, directrice de l’Aménagement urbain de la ville de
Romans.
Enfin, je remercie Philippe Chaudoir qui a été disponible chaque fois que je l’ai sollicité.
3
Mots clés
Centralité, centre ancien, centre-ville, représentation de la ville, imagerie,
patrimonialisation, revalorisation
Résumé
Le centre ancien de Romans-sur-Isère a fait l’objet depuis plus de trente ans d’une
attention particulière de l’action publique, qui a développé des outils et des actions pour le
réhabiliter et le revaloriser.
Bien au-delà, de cet objectif de revalorisation, le centre ancien fait office, dans
« l’imagerie » (défini par Yves Chalas) ou l’imaginaire des décideurs politiques, de centre-
ville à part entière. Pourtant, il existe une extension du centre-ville qui s’est réalisée hors des
murs du centre ancien, avec l’émergence d’autres centres dynamiques - l’espace des
Boulevards et Marques Avenue - à la fois proches et séparés du centre ancien. Les élus
locaux focalisent leur action sur le centre historique et, pours diverses raisons, omettent
alors l’extension du centre-ville. Le centre ancien ne profite donc pas du dynamisme
important de ces autres centres romanais et est donc relégué au statut de quartier ancien
dégradé malgré une action massive sur celui-ci.
Il s’agira de comprendre les raisons de cette situation locale particulière et de rendre
compte des différents freins des décideurs politiques locaux pour penser, de manière plus
large, la centralité « réelle » de Romans. Une Réflexion plus globale sera exposée sur la
représentation du centre-ville que nous pouvons développer dans nos sociétés
européennes : c’est-à-dire qu’il existe une certaine confusion entre centralité et patrimoine.
Nous mettrons en avant et expliqueront les mécanismes qui font que le centre-ville peut
alors parfois se limiter au centre historique dans l’imagerie ou l’imaginaire des élus, des
associations, des techniciens ou encore des habitants.
4
Sommaire
Mots clés ................................................................................................................................................. 3
Résumé .................................................................................................................................................... 3
Sommaire ................................................................................................................................................ 4
Préambule ............................................................................................................................................... 5
PARTIE I : RAPPORT DE STAGE ...................................................................................................... 7
Introduction ............................................................................................................................................. 8
La ville de Romans : entre crises et mutations ........................................................................................ 9
La mairie de Romans : jeux d’acteurs, adaptation et freins de l’action ................................................ 22
Deux missions réalisées : informations et communication, synthèse de la situation et aide à la
décision sur un même territoire, le centre ancien romanais ................................................................ 38
Conclusion et perspectives .................................................................................................................... 47
PARTIE II : MEMOIRE .................................................................................................................. 50
Une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine à Romans comme échec de la
revalorisation du centre ancien ............................................................................................................ 50
Introduction : ......................................................................................................................................... 51
Pourquoi y a-t-il une centralité éclatée à Romans-sur-Isère ? .............................................................. 55
Une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine ............................................... 66
Un échec de la revalorisation du centre ancien : une conséquence de la définition élusive du centre-
ville ........................................................................................................................................................ 84
Conclusion : ........................................................................................................................................... 94
Sources: ................................................................................................................................................. 97
Glossaire .............................................................................................................................................. 101
Tables des illustrations ........................................................................................................................ 102
Tables des matières ............................................................................................................................. 103
Annexes ............................................................................................................................................... 106
5
Préambule
Mon parcours universitaire a toujours été animé par l’envie d’être pluridisciplinaire :
j’ai débuté par une première année dans une classe préparatoire littéraire sans avoir pour
autant l’objectif de devenir professeur. Cette première année fut l’occasion d’aborder des
matières différentes (géographie, histoire, philosophie), autant de champs des sciences
humaines que je trouvais intéressants et dans lesquels j’aurais voulu y voir un potentiel et
futur métier. Néanmoins, bien que l’analyse de théories et des idées abstraites et
scientifiques me plaisent, je me sens plus attirée par un travail concret, de terrain, tout en
abordant des champs sociaux, spatiaux, historiques et de prospectives, voire d’éthique. La
thématique urbaine répondait à cette exigence. Mon parcours universitaire s’est donc affiné
en postulant à l’Institut d’Urbanisme de Lyon (IUL) dès la troisième année de licence
« études urbaines ». Depuis cette troisième année de licence jusqu’à la fin de la première
année de Master à l’IUL, une double volonté s’est affirmée dans mon futur projet
professionnel: la pluridisciplinarité et avoir un possible débouché professionnel qui me
permettrait d’agir concrètement ou d’aider à la décision sur l’action portée sur la ville.
J’ai pu donc voir à travers différents dossiers réalisés au cours de ces deux années
passées des sujets très liés à la métropole lyonnaise. Même si les grandes problématiques
métropolitaines m’intéressent réellement, j’ai voulu pour mon stage professionnalisant,
travailler dans une ville moyenne et donc dans une plus petite structure. Ce qui me
permettait de voir la globalité du fonctionnement, avec l’espoir d’une plus ample
connaissance du terrain : que ce soit en lien avec les techniciens, les acteurs locaux et
notamment les élus, et d’aborder de manière plus approfondie leur fonctionnement et leurs
interactions.
Originaire de la région, j’ai donc postulé au service urbanisme de la mairie de
Romans, sans connaissance particulière de cette ville si ce n’est Marques Avenue et le
Musée de la Chaussure. Le stage aura été l’occasion de connaître dans de nombreux détails
la commune et plus encore la « vieille-ville » romanaise. Mon choix de la structure de stage
s’est aussi porté sur une collectivité pour comprendre l’inscription et la réalisation urbaines
de l’intérêt général défini par des élus locaux.
6
La mission proposée par le service urbanisme a éveillé ma curiosité : réaliser un
diagnostic exhaustif du centre ancien romanais dans le but de déposer un dossier de
candidature pour le Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés
(PNRQAD) en 2011. Cette mission est à la croisée de différents thèmes (étude sociale, du
logement, commercial, patrimonial etc.) puisqu’il s’agissait d’être le plus transversal possible
et d’avoir une vision globale du territoire.
La prise de recul sur ma mission ainsi que diverses lectures de textes de chercheurs ont
peu à peu fait germer le sujet de mon mémoire. Selon ma propre expérience, le travail de
mémoire fut un travail intéressant sur la définition de moins en moins claire de la ville avec
l’avènement de la « ville émergente », et plus particulièrement de ce qui fait centre-ville
aujourd’hui. Bien que mon sujet se base sur le cas du centre ancien romanais, les nombreux
entretiens que j’ai réalisés auprès des acteurs locaux et mes différentes lectures plus
théoriques m’ont permis de comprendre de manière globale certains mécanismes dans la
représentation de ce que doit être un centre-ville aujourd’hui, parfois déconnectée de la
réalité de la ville actuelle, et sur ce que peut apporter un urbaniste ou un chercheur sur ce
sujet.
7
PARTIE I : RAPPORT DE STAGE
8
Introduction
Avant de présenter la structure dans laquelle j’ai réalisé mon stage, le service
Urbanisme de la mairie de Romans-sur-Isère, il s’agit de réaliser une brève introduction sur
la situation de la ville de Romans pour mieux cerner les problématiques qui la concernent,
la mairie romanaise étant largement imprégnée de celles-ci.
Il s’agit seulement de rappeler le contexte romanais passé et actuel et un cadrage qui
permettront de faciliter la compréhension du fonctionnement de la structure, et d’articuler
plus aisément la partie du rapport de stage avec la problématique du mémoire qui suivra.
Ensuite, il s’agira d’exposer la structure dans laquelle j’ai réalisé mon stage : ses
actions, les différents rôles des techniciens de la Direction de l’Aménagement Urbain et du
service Urbanisme, les partenaires de la ville de Romans ainsi que les différentes limites de la
structure que j’ai pu constater. Puis, j’exposerai les deux missions que j’ai du remplir et qui
avait comme support d’étude le même territoire : le centre ancien romanais. J’exposerai
aussi des critiques vis-à-vis de mon travail avec pour perspective une première vision du
métier d’urbaniste.
9
La ville de Romans : entre crises et mutations
Localisation de Romans
Romans-sur-Isère est la troisième ville de la Drôme, après Valence et Montélimar.
Cette Ville drômoise est située dans l’espace géographique qu’on appelle la Drôme des
collines et détient un certain rayonnement sur l’ensemble du Vercors, bien qu’elle soit
directement en concurrence avec la ville de Valence, pôle économique principal du
département.
Figure 1 Cartes de localisation de Romans-sur-Isère
10
Brève histoire urbaine de Romans
C’est au creux de la conque, au bord de l’eau et près du gué que, au IXe siècle Barnard
l’archevêque de Vienne, fonde son monastère (future Collégiale Saint Barnard). Cet
emplacement permettait dès l’origine le passage au gué entre le cône de déjection de la
Savasse et de l’Isère. Un « burgus » se forme très tôt autour du monastère au XIème siècle,
la première enceinte est prévue pour protéger cet ensemble bâti. Une fois close, la ville
continue de prospérer. Les différents marchés et foires, le pont, et la situation au carrefour
de grands itinéraires contribuent à la renommée de Romans.
L’urbanisation se développe au Nord et au Sud avec la création d’un faubourg de
l’autre côté du rivage de l’Isère : Bourg-de-Péage. Les activités et le commerce se
développent fortement, la population s’accroît, d’autres faubourgs se créent hors des murs.
Une seconde enceinte à la fin du XIVe siècle va englober dans la ville ses nouveaux
territoires urbains.
Jusqu’au XVIe siècle, Romans est plus peuplée et plus importante que la ville de
Grenoble. Au XVe siècle et XVIe siècle, 40 % de la population vit du travail de la terre, mais la
fabrication et le commerce des draps ainsi que des cuirs commencent à prospérer. Les
murailles sont démolies en 1832, les enceintes font place au boulevard. Les pierres des
remparts sont réutilisées pour construire les bâtiments qui viennent étendre un peu plus
Romans dans l’espace. L’avenue Gambetta est percée en 1883 en direction de Grenoble. La
construction d’une nouvelle caserne, la caserne Bon (aujourd’hui Marques Avenue) date
aussi de 1883. Des usines de chaussure s’y installent. Au XIXe siècle, on passe de l’artisanat à
l’industrie en ce qui concerne la fabrication de la chaussure. Dès 1864, l’urbanisation devient
exponentielle à Romans notamment grâce au succès des activités de la chaussure et de la
tannerie. Au XXe siècle, l’extension de la ville démarre au Nord, la vieille ville est alors
habitée majoritairement par les ouvriers, le centre ancien de Romans commence à se
paupériser. Se crée un habitat en dehors du centre ancien qui présente toutes les normes de
confort de l’époque. Souvent, les gens les plus aisés partent du centre historique, même si
certains, déjà attirés par le « cachet de l’ancien » y restent. Parallèlement, la vieille ville
continue sa paupérisation, habitée désormais par une population d’immigrés. Elle connaît
11
des problèmes de circulation en raison de l’étroitesse de son réseau de rues et son
commerce périclite.
Figure 2 Carte d'urbanisation de Romans et Bourg-de-Péage
Pour répondre à une demande toujours plus grande de logements et notamment de
logements sociaux, pour accueillir les ouvriers venant grossir les rangs de la main d’œuvre
industrielle, le quartier de la Monnaie est crée. Néanmoins, la situation se dégrade très
vite : dès la fin des années 1970 on constate des dysfonctionnements dans le quartier de la
Monnaie et, parallèlement, émerge une prise de conscience sur l’état tout aussi inquiétant
du centre ancien. Cette prise en compte particulière des problèmes de ces deux quartiers
concorde avec l’arrivée au pouvoir du Parti Socialiste à la mairie de Romans, comme nous
l’explique Jean Decauville qui travaille depuis plus de trente ans sur Romans: « Le quartier de
la Monnaie qui a l’époque n’avait à peine qu’une quinzaine d’années, était déjà confronté à
des difficultés. Même à l’époque on parlait déjà de renouvellement urbain. Ensuite, la
12
deuxième préoccupation de cette nouvelle équipe municipale était le Centre Ancien. J’étais
très surpris par l’état de dégradation du centre ancien de Romans »1.
Actuellement, on peut parler de trois enjeux d’aménagement principaux pour
Romans : la «Politique à deux têtes de Romans qui perdure depuis une trentaine d’années,
avec comme cibles prioritaires le quartier de la Monnaie et le Centre Ancien»2. Ensuite,
Romans, ville industrielle quasi monofonctionnelle en crise depuis la moitié des années
1970, détient de nombreuses friches industrielles dans son tissu urbain. Le renouvellement
urbain de ces friches se fait progressivement. Ainsi, Romans tente de retrouver une nouvelle
image, un nouveau souffle, pour ne plus être une ville sinistrée qui a subi de plein fouet la
fermeture successive d’usines du cuir et qui détient un taux de chômage record (17% en
2006 contre 9% en France).
1 Source : Entretien avec Jean Decauville, équipe d’animation de l’OPAH sur Romans et Bourg-de-Péage, le 8
avril 2010 2 Source : Entretien avec Jean Decauville, équipe d’animation de l’OPAH sur Romans et Bourg-de-Péage, le 15
avril 2010
13
Romans : une ville moyenne entre concurrence et coordination avec d’autres villes
La commune de Romans détient 33 600 habitants et est considérée comme une ville
moyenne. Depuis le début des années 1980, Romans connut une décroissance légère de sa
population, puis la ville connaît une remontée démographique depuis les années 2000.
Toutefois, Romans a une population qui augmente très faiblement par rapport aux autres
communes environnantes. Les communes rurales de la Communauté de Communes du Pays
de Romans (CCPR) sont touchées principalement par le phénomène de périurbanisation. Ce
phénomène-là reste un phénomène bien plus global à l’échelle nationale puisque « les
modalités de l’urbanisation se sont modifiées ces dernières décennies. D’une forme
traditionnellement compacte, les villes se sont progressivement diluées dans l’espace
environnant »3. Il y a donc depuis quelques années un phénomène de « desserrement de la
ville centre »4 et Romans n’échappe pas à ce mouvement. Notons que pour Romans, Il y a
deux mécanismes qui alimentent ce phénomène : la continuité des départs des ménages
vers des communes périphériques et le départ des étudiants vers des pôles universitaires et
d’activités environnants, à savoir Valence, Lyon ou Grenoble. Il existe donc une réelle fuite
des jeunes actifs, ce qui explique alors un vieillissement de la population sur Romans.
Romans réussit tout de même à se maintenir malgré un solde migratoire négatif. Il est
important de souligner « qu’aucune des villes de la taille de Romans en Rhône-Alpes n’a
enregistré de solde migratoire positif »5. La situation de Romans n’est donc pas un cas
unique dans la région. Actuellement, Romans arrive à stabiliser sa population grâce à un
solde naturel soutenu généré par une natalité de bon niveau.
A proximité de Romans, se trouve la commune de Bourg-de-Péage qui est considérée
comme la « Ville-sœur » de Romans : comme nous l’avons évoqué précédemment, Bourg-
de-Péage est un faubourg de Romans dans sa constitution. Aujourd’hui, il y a une forte
animosité entre les deux communes qui n’est pas un phénomène nouveau et s’est
constituée au fil du temps. « Il existe de gros problèmes de coordination entre Romans et
Bourg de Péage, ces problèmes remontent loin dans le passé. Par exemple, Romans et Bourg
3 Source : RERAT P., Mutations Urbaines, mutations démographiques, contribution à l’explication de la déprise
démographique des villes-centres, Revue D’Economie Régionale & Urbaine, 2006 (p.727) 4 Source : Rapport de présentation du PLU de Romans, 2006
5 Source : Rapport de présentation du PLU de Romans, 2006
14
de Péage faisaient partis de différents diocèses : Bourg-de-Péage dépendait du diocèse de
Valence alors que Romans dépendait du diocèse de Vienne. Plus récemment, Bourg-de-Péage
était de droite et Romans de gauche, ce qui a considérablement compliqué la coordination
entre ces deux communes. Dans les années 1920, un plan d’embellissement de la ville a été
crée, et n’a pas été possible de couvrir l’ensemble des deux communes »6. Aujourd’hui
encore, la Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager (ZPPAUP) n’a
été réalisée que sur Romans, alors que Bourg-de-Péage s’est constitué comme étant un
faubourg de Romans avec un bâti ancien qui aurait mérité d’être inclus dans la ZPPAUP
nouvellement crée et instaurée en 2008. Cette très nette distinction entre Romans et Bourg-
de-Péage persiste. Des animosités se cristallisent aussi au niveau des impôts : les Romanais,
payant plus d’impôts que les Péageois, ceux-ci ne comprennent pas pourquoi il y a un tel
écart sachant que les Péageois profitent de tous les avantages que peut offrir la ville de
Romans. Aujourd’hui, Romans et Bourg-de-Péage sont toutes les deux des communes de
gauche, cela a permis d’avancer sur certains points car : par exemple, cela ne fait que depuis
quelques années qu’un bus de transport en commun traverse l’Isère pour desservir les deux
communes, ce qui n’était pas le cas auparavant.
Ensuite, ces deux communes ne font pas parties des mêmes communautés de
communes (Communautés de Communes du Pays de Romans (CCPR) et Communautés de
Communes du Canton de Bourg-de-Péage (CCBP)) alors que ces deux territoires sont parties
intégrantes d’un même bassin de vie. Néanmoins, un effort tout particulier est porté sur la
coordination de l’activité économique avec la création du syndicat mixte de Romans Bourg-
de-Péage Expansion (RBE).
Néanmoins, est pensée et sera probablement crée, très prochainement
(approximativement en septembre 2011), une future Communauté d’Agglomération qui
regrouperait la nouvelle Communauté d’Agglomération de Valence qui est en cours de
construction actuellement, la CCPR et LA CCPB. Au cours de certaines réunions, j’ai pu
constater qu’il y avait un certain engouement pour cette future structure de la part des élus
locaux romanais. Cette nouvelle Communauté d’Agglomération sera t’elle un nouveau
souffle notamment pour la sphère politique ? Est-ce un projet permettant une plus grande
6 Source : Entretien avec Eric OLIVIER-DRURE, responsable du service archives de la mairie de Romans, le 18
mars 2010
15
cohérence avec le territoire valentinois ? Ce projet pourrait-il produire un nouveau
dynamisme et peut-être des nouveaux moyens financiers qui permettront de porter de plus
grands projets d’infrastructures ou d’aménagements urbains ? Autant de questions qui se
posent et alimentent un certain espoir de renouveau dans la dynamique du territoire.
Figure 3 Organisation des structures administratives et territoriales de Romans et Bourg-de-Péage
L’ensemble Romano-péageois représente le pôle urbain de la Drôme des collines : les
acteurs se forment selon cet ensemble géographique, notamment dans le secteur de
l’Habitat où les acteurs locaux se réunissent lors de certaines instances. J’ai pu assister à ce
type de réunions qui traite d’un territoire plus vaste que la simple délimitation de Romans.
Romans se situe à proximité de Valence (Valence se situe à 25 km de Romans) et
donc, par conséquent, il existe une certaine concurrence qui se met en place entre ces
deux pôles urbains. Valence est une ville deux fois plus grande en termes de population
avec 66 000 habitants et représentant de manière plus vaste une agglomération de 110 000
habitants. La ville de Valence détient une activité commerciale plus fleurissante, car cette
ville profite de sa position dans le couloir rhodanien, elle capte donc les flux économiques
qui vont de Lyon à Marseille. Romans est située plus proche du Vercors et se trouve donc
plus à l’intérieur de la Drôme des collines et est, par conséquent, plus isolée par rapport à
16
cette dynamique du couloir rhodanien. Romans et Valence sont deux villes qui profitent de
la proximité de Valence TGV (crée dans la commune d’Alixan entre Valence et Romans, en
2001). Ce nouvel équipement rend plus accessible Romans, car se situant actuellement a 35
minutes de Lyon, et à 2h10 de Paris en TGV.
17
Crise industrielle et reconversion
L’activité du cuir : prospérité et déclin
Romans a connu dès le Moyen-âge une période de prospérité dans l’activité du
textile, dans un premier temps, puis s’est peu à peu reconvertie dans l’activité du cuir avec
la création de tanneries qui se sont développées au bord de la Savasse et du canal de la
Martinette pour l’utilisation de l’eau, servant au travail du cuir. L’activité du cuir était donc
très présente dans la ville. Elle s’est poursuite et s’est industrialisé au XIXe siècle. Enfin,
l’activité du cuir trouva sa dernière spécialisation dans la fabrication de chaussures haute
gamme qui s’est développée et s’est industrialisée, jusqu’à ce qu’elle fasse la renommé de
Romans en lui donnant le statut de « capitale de la chaussure de luxe » en France.
La ville de Romans a connu une crise notable de l’industrie du cuir avec la fermeture
de différentes usines de tannerie et de fabricants de chaussure. L’industrie du cuir a connu
des difficultés dès la moitié des années 1970 (concurrence avec la mondialisation, coût de la
main d’œuvre trop chère, licenciements). Ces difficultés se sont poursuivies jusqu’à son
agonie très récente avec la fermeture des dernières unités de production de la chaussure de
luxe : la liquidation du groupe Stéphane Kélian le 22 août 20057 et la fermeture de l’usine
Jourdan le 17 décembre 2007 pour ne citer qu’elles. Une longue dégringolade de l’activité
industrielle du cuir s’est irrémédiablement réalisée malgré des efforts de reconversion dans
cette filière avec la création de la « cité cuir » (un atelier de démonstration à vocation
touristique, un atelier de fabrication artisanale ainsi qu’un projet d’entreprise) et une
stimulation de micro-entreprises de créateurs. Néanmoins, la tentative de reconversion ne
s’est faite que par l’aide à la formation et à l’emploi, comme nous pouvons le voir à travers
les mots du préfet relaté par le journal local l’Impartial : « Nous avons pu faire une
proposition de reclassement soit dans un emploi, soit au sein d’une formation
professionnalisant aux trois-quarts des licenciés de chez Kélian et Jourdan que la plate forme
accueille »8. On peut regretter que des fonds exceptionnels au niveau de grands projets
urbains n’ont pas pu être débloquer pour améliorer l’image de la ville pouvant par ce biais
attirer d’autres investisseurs sur Romans, comme l’exprime Jean-David Abel, élu à
7 Source : ROLLAND F. Quelles mesures pour les salariés et l’industrie de la chaussure ?, L’Impartial, 2005 8 Source : BIGORRE M., Mobilisation générale pour le cuir, l’Impartial, le 29 mars 2007
18
l’urbanisme : « Nous avons raté le coche dans les années 1980-90 par rapport à certaines
subventions, car Romans était une ville quasi monofonctionnelle, c’est-à-dire que tout
tournait autour du cuir (maroquinerie, chaussures, création de boites en carton pour les
chaussures, beaucoup d’entreprises ont embauché de la main d’œuvre et avaient une activité
de près ou de loin avec le cuir). On aurait pu avoir des subventions pour des projets de ville et
des projets d’aménagements urbains considérables avec cette situation. Surtout qu’on était
dans une époque où l’Etat avait de l’argent. *…+ Il aurait été vraiment intéressant d’utiliser
des fonds de reconversion industrielle car, avec ceux-ci, on aurait pu obtenir des
financements même pour un projet avec un volet urbain important *…+ La ville de Romans
avait un contrat de site qui nous a servi pour tout ce qui est formation pour la reconversion
des personnes qui se sont retrouvées au chômage. Mais nous n’avions pas de projets urbains
prêts et bien ficelés qui auraient pu être financés par ce contrat de site »9.
Pourtant, malgré cette crise industrielle violente, la ville de Romans reste dans les
esprits « la ville de la chaussure de Luxe ». Une communication volontaire est faite en ce
sens : cette image « marketing » reste prégnante dans les mémoires collectives et ne se
limitent pas qu’aux Romanais, puisque des personnes de Paris ou d’autres grandes villes
viennent encore aujourd’hui acheter des chaussures à Romans notamment parce qu’il y a
encore de grandes marques, souvent moins chères qu’ailleurs grâce au système des
magasins d’usine (comme la marque de chaussures de luxe Clergerie par exemple). Une
clientèle de connaisseurs s’est donc formée au cours des années et perdure encore
aujourd’hui.
9 Source : Entretien avec Jean-David Abel, élu à l’urbanisme, le 3 mai 2010
19
La création du Musée International de la Chaussure en 1971, installé dans l’ancien
couvent de la Visitation, inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques,
n’est pas anodine. Il permet de communiquer sur la spécialisation de Romans dans la
fabrication de chaussure de luxe bien que ce Musée ait vocation à retracer, de tous lieux et à
toutes époques, l’Histoire de la chaussure.
Figure 4 Publicité du Musée de la Chaussure à Romans (source: Site Internet au Pays de Romans et Bourg-de-Péage)
Les solutions choisies de la reconversion
Cependant, après les fermetures successives des usines, beaucoup de Romanais n’ont
plus réellement foi en cette image de la chaussure comme unique ressource pour la ville.
Les élus locaux ont donc pris d’autres directions pour pouvoir faire face à cette crise
industrielle durable.
La mairie a recruté du personnel pour combler ce passage à vide dans l’activité
économique et le marché de l’emploi romanais, notamment dans les domaines culturels.
Par exemple, avec le Carnaval, remis au goût du jour par la Maison de Quartier Saint-Nicolas
dans les années 1990, « c’est en 1997 que la mairie de Romans s’est réapproprié le Carnaval
en le finançant par le biais de subventions bien plus importantes et en le
professionnalisant »10. D’autres fonds financiers ont été débloqués notamment pour les
activités théâtrales, d’autres subventions ont été mises en place pour des activités
culturelles et l’embauche de personnel. La mairie de Romans, positionnée à gauche sur
l’échiquier politique (Parti Socialiste) depuis 1977 jusqu’à aujourd’hui, a durablement misé
10
Source : Entretien avec Martial Gaffet, responsable de la vie associative romanaise, le 8 avril 2010
20
sur le domaine culturel pour faire face à la crise industrielle du cuir, même si actuellement
quelques coupures dans le budget ont été réalisées, notamment par rapport au Carnaval qui
a reçu parfois de vives critiques au niveau du budget qui lui était accrédité et qui, par
conséquent, a revu son enveloppe budgétaire à la baisse.
Plus récemment, une réponse dans le développement économique et commercial a
aussi été donnée avec la création de Marques Avenue en 1997. Il s’agit d’un centre
commercial de magasins d’usines qui est installé dans une ancienne caserne militaire
réhabilitée. C’est le premier centre de magasins d’usines situé au sud de la France, et jusqu’à
maintenant il reste le seul.
Une reconversion s’est donc réalisée dans les magasins d’usine et dans la vente de
vêtements. On peut donc dire qu’il y a un lien entretenu avec le passé même s’il reste assez
ténu: on passe de l’activité de la création de la chaussure aux magasins d’usine de
vêtements, « le maire y voit une occasion d’opérer la mutation économique de la ville qui
possède déjà une culture de magasins d’usine avec les entrepôts de fabricants locaux de
chaussures de luxe. »11
Marques Avenue reste une réussite puisque, à son ouverture, on comptait 44
boutiques sur 7 000 m² en 1999, et ces chiffres sont en constante augmentation. Des
annexes de la caserne sont donc à leur tour réhabilitées pour pouvoir accueillir de nouvelles
boutiques, signe incontestable de réussite économique. « Créée en 1998, la « cellule emploi
Marques Avenue » constitue un service d’aide au recrutement visant à mieux cerner en
amont le besoin en compétences des entreprises, et à constituer un fichier qualifié de
candidats disponibles correspondant aux profils de poste. Des profils de compétences et un
dossier de candidature ont été élaborés. La cellule emploi a sélectionné les candidatures, les
a proposées aux entreprises et a assuré le suivi post recrutement. 1 200 candidatures ont été
traitées et au final 92 Romanais recrutés. Cette mobilisation pour l’emploi a favorisé la
cohésion autour du projet et contrebalancé en partie les assauts contestataires de certains
11
Source : MALBOSC F., Du développement économique au renouvellement urbain ? à propos de l’implantation de Marques Avenue, Les cahiers du DSU, décembre 2001, page 62
21
commerçants»12. Marques Avenue est une opération économique et urbanistique qui avait
donc pour but premier que la capitale de la chaussure de luxe ne fasse plus figure de ville
sinistrée.
Malgré des difficultés dues à la crise industrielle du cuir qui toucha de plein fouet
Romans, des initiatives ont été prises par les élus locaux pour « redresser la barre » et tenter
de trouver un nouveau souffle pour la ville dans le domaine culturel et dans la spécialisation
de magasins d’usine.
Maintenant, nous allons voir comment la mairie romanaise et son activité sont
largement influencées par ce contexte particulier: une structure qui jongle entre des freins
de l’action sur la ville et une adaptation à ces difficultés qui se fait progressivement.
12
Source : MALBOSC F., Du développement économique au renouvellement urbain ? à propos de l’implantation de Marques Avenue, Les cahiers du DSU, décembre 2001, page 62
22
La mairie de Romans : jeux d’acteurs, adaptation et freins de l’action
J’ai réalisé mon stage de Master 1 au service Urbanisme de la mairie de Romans, du 1er
février au 16 juillet 2010, soit un stage d’une durée de 5 mois et demi dans une structure
publique.
Organisation de la structure
La coordination de divers services
Le service Urbanisme dans lequel j’ai réalisé mon stage fait partie intégrante d’une
direction plus large : la Direction de l’Aménagement Urbain (DAU). La DAU a avant tout le
rôle d’assurer la cohérence de l'intervention des cinq services de la direction et des deux
chargés de mission ainsi qu’assurer la continuité du suivi opérationnel des projets
structurants comme l'Opération de Renouvellement Urbain (ORU) ayant lieu dans le quartier
de la Monnaie.
La DAU regroupe différents services à savoir :
- Le service Etudes Urbaines qui a pour objectifs de concevoir des projets
d’aménagement urbain et d’études diverses, de piloter des projets (conception,
communication, réalisation, gestion de la ligne budgétaire) et de faire le suivi des
travaux.
- Le service Urbanisme qui a pour objectifs l’instruction des autorisations
d’occupation du droit des sols, d’instruire des dossiers d’emplacements réservés et le
suivi des commissions communales d’accessibilité et de sécurité, d’assurer le
relationnel avec les demandeurs, les promoteurs, et les architectes, d’élaborer et de
suivre des documents de planification (PLU) et de réglementation (ZPPAUP), de
réaliser un suivi de l’opération façades en lien avec la CCPR et RBE, d’animer et de
coordonner les actions pour le centre ancien et pour la politique de logement, d’assurer le
suivi de la RHI et de l’OPAH (comités de pilotage), de mettre en œuvre des procédures
de police des immeubles menaçant ruine et des procédures juridiques (insalubrité,
23
abandon manifeste, …), de réaliser un suivi du foncier (avec la phase amont des actes :
Déclaration d’Intention d’Aliéner (DIA), la préemption et l’expropriation), de mettre en
œuvre et de suivre le règlement de l’affichage et de la publicité, d’assurer la
coordination avec le Service Communal d’Hygiène et de Santé (SCHS) et le Centre
d’Amélioration du Logement de la Drôme (CALD) des problématiques d’insalubrité, et
enfin de suivre les contentieux de l’urbanisme.
- le service Espaces Verts qui a pour objectifs l’élaboration et la gestion du marché, de
concevoir et chiffrer les projets neufs, d’assurer le suivi des chantiers, d’assurer la
pérennité du patrimoine vert tout en y intégrant le cadre du développement durable
(Agenda 21), de mettre en œuvre le plan de gestion des espaces verts ainsi que des
stratégies spécifiques aux espaces verts (fleurissement, arbre en milieu urbain,
gestion de l’eau, produits phytosanitaires et méthodes alternatives).
- le service Voirie et Mobilité qui a pour objectifs d’assurer la maîtrise d’ouvrage des
projets urbains de la ville, de piloter et d’assurer le suivi des chantiers des grosses
réparations de voiries, de définir et de mettre en œuvre la politique communale en
matière de déplacements urbains et de stationnements, d’assurer la gestion de
l’occupation du domaine public, d’assurer la coordination de travaux avec les
partenaires, d’assurer la communication, la concertation et l’information des projets
de travaux.
- le service Eau et assainissement qui a pour objectifs d’élaborer des programmes
d’études et de travaux communaux et intercommunaux, d’assurer un suivi
administratif, technique et financier ainsi qu’un suivi de la qualité de l’eau distribuée
et de l’épuration des eaux usées.
Deux personnes sont chargées de missions distinctes : la mission Recensement qui
doit préparer et suivre le recensement partiel annuel et l’adressage, gérer le relationnel avec
l’INSEE, accueillir le public et enfin délivrer l’attestation de numérotation de voirie. Et enfin,
la mission Sécurité Routière doit coordonner les actions de prévention routière avec les
autres acteurs communaux, être l’interlocuteur en matière de sécurité routière dans la
réalisation des travaux neufs ou d’entretien de la voirie, de mettre en place un répertoire
24
« accidentologie » et une cartographie des différents types d’accidents en vue d’une
prévention adéquate, et enfin assurer des interventions auprès des établissements scolaires.
Plus simplement, la Direction de l’Aménagement Urbain est organisée comme ceci :
Figure 5 Organigramme de la Direction de l'Aménagement Urbain de la ville de Romans
Si la DAU regroupe tous ces services c’est aussi parce qu’ils ont affaire à des
thématiques communes sur certains dossiers. Il a donc été mis en place des réunions
communes et des groupes de travail plus ponctuels. Par exemple, durant la période de mon
stage, un groupe de travail sur les stations du Chemin de Croix a été mis en place. Cette
opération consiste à revaloriser et à restaurer les 21 stations du Chemin de croix du Grand
Voyage, ce groupe a donc mobiliser le service Urbanisme, le service Etudes Urbaines (ces
deux premiers services se chargeant de savoir quelle valorisation au niveau de
l’aménagement doit-on réaliser et selon quelle intégration urbaine ?) et le service Voirie
(plutôt chargé de vérifier si la chaussée bordant la station est correcte, etc.). Bien sûr ces
réunions de groupe ne se limitent pas qu’aux simples services de la DAU. Par exemple, pour
25
le groupe de Travail sur le Chemin de Croix, le service des Archives étaient aussi convié pour
rappeler quelle valeur patrimoniale a ce Monument Historique vieux de presque 500 ans.
Le service DAU réunissant les chefs de service régulièrement permet de faire partager
des avis et des conseils différents selon leurs champs d’application afin d’opter pour le
meilleur choix possible avant de le présenter aux élus, qui eux trancheront au niveau de la
décision finale.
Penchons nous plus particulièrement sur l’organisation du service Urbanisme, service
dans lequel j’ai réalisé mon stage :
Figure 6 Organigramme du service Urbanisme de la ville de Romans
Le service Urbanisme détient actuellement huit agents au total : deux personnes se
chargent de l’accueil (elles enregistrent les dossiers et accueillent les administrés, tentent de
répondre à leurs questions, répondent aux courriers après avis des instructeurs ou
distribuent le courrier aux responsables des services quand la procédure ne concerne pas le
PLU ou la ZPPAUP), trois personnes instruisent les dossiers dont une personne qui chapote
l’ensemble de l’instruction. Au cours de l’instruction, il y a vérification de la décision prise
26
par au moins deux instructeurs pour ne louper aucun détail du dossier. Une autre personne
se chargeant de l’action foncière. Enfin, les deux autres personnes sont la responsable du
service urbanisme et son adjointe (étant Aurélie Rodet, ma tutrice). Ces deux personnes ont
divers rôles à remplir et fonctionnent en binôme : elles rencontrent les personnes qui ont un
projet urbain sur la commune, font le lien entre les autres services de la mairie ou de la CCPR
selon le secteur concerné, ainsi qu’avec les « personnes-conseils » quand il y a création de
logements ou réhabilitation dans les secteurs protégés, elles expliquent le règlement du PLU
ou de la ZPPAUP s’il y a besoin aux administrés, elles ont un rôle de pédagogie à travers des
instances comme les commissions extra-municipales (par exemple sur la densité ou le
logement social) et les réunions publiques, et enfin elles réalisent un travail sur les
opportunités foncières pour l’installation de nouvelles activités, et, dans une certaine
mesure, font de l’aide à la décision politique.
La responsable du service urbanisme et la directrice du Développement et de
l’Aménagement Urbain (DAU) rencontrent des investisseurs immobiliers ou porteurs de
projets. Il s’agit lors de ses réunions informelles de voir ce qui est possible de faire selon les
règles d’urbanisme, les démarches qu’il faut faire afin de le voir aboutir, si le projet peut
converger vers une certaine volonté politique. Ces personnes assument donc un rôle
d’intermédiaire avec les élus avant qu’il y est une rencontre plus officielle. J’ai aussi pu
remarquer qu’il fallait avoir des qualités de négociateur et de diplomate (avec les
promoteurs) pour faire converger le projet urbain vers plus de qualité.
Les techniciens de la CCPR sont pour la plupart des anciens agents de la ville de
Romans. Leurs relations initiales au sein de la Ville de Romans étant bonnes, cette très
bonne entente a permis de faciliter les premières années d’existence de la CCPR ainsi que la
coordination avec la ville de Romans. Tous ces acteurs se connaissent et partagent beaucoup
d’informations. L’ensemble des ces acteurs, comme j’ai pu l’évoquer précédemment,
réalisent un certain travail d’aide à la décision des élus. Cependant, un équilibre est à
trouver entre une aide réelle à la décision et un écart substantiel pour que les élus puissent
vraiment décider par eux-mêmes et exercer pleinement leurs rôles. Je me suis donc rendu
compte de l’importance qu’ont les élus dans leurs choix des questions urbaines et des
aménagements urbains, ce dont je n’avais pas idée avant ce stage. Les techniciens peuvent
alors avancer une orientation pour la décision future mais ce seront toujours les élus qui ont
27
le dernier mot, car ils restent les détenteurs de la définition de l’intérêt général durant leur
mandat.
Au niveau de l’Urbanisme, la mairie de Romans-sur-Isère détient la compétence de la
maîtrise d’ouvrage. Le service Urbanisme reçoit les Permis de Construire (PC), les Permis de
Démolir (PD), les Déclarations Préalables de travaux (DP), les Certificats d’Urbanisme (CU),
Les responsables du service Urbanisme ainsi que certaines personnes de la Direction de
l’Aménagement Urbain doivent se coordonner et répondre à la commande politique pour ce
qui est de grands projets. Une collaboration forte avec les bureaux d’études s’effectue (que
ce soit pour l’élaboration du PLU ou les opportunités foncières avec EPORA etc.).
Le service Urbanisme détient aussi un rôle d’encadrement et de réajustement des
projets par le biais de réunions successives dans le temps, processus incrémental qui
permet de gagner du temps quand un PC est déposé car cela signifie qu’un accord a été
trouvé.
Enfin rappelons que la répartition des compétences se fait comme ceci entre la ville de
Romans et la CCPR : comme dit précédemment, la commune détient la compétence de
l’Urbanisme, et délivre les Permis de Construire, les Déclarations Préalables de travaux, les
Permis de Démolir, les Certificats d’Urbanisme… la CCPR détient la compétence en matière
d’Habitat et en matière d’équipements publics.
Le contentieux de l’urbanisme : un problème constant pour le service Urbanisme
Le contentieux de l’urbanisme est important, il représente 95% des contentieux
juridiques à Romans. Une attention toute particulière est donc portée sur les procédures (un
ensemble de formations dans ce sens sont proposées aux fonctionnaires). La mairie de
Romans est souvent attaquée par des associations qui remettent en cause les PC permettant
la construction de bâtiments de logements sociaux. L’avocat de la ville réalise une vacation
tous les mois où les techniciens du service Urbanisme mais aussi les techniciens juridiques
peuvent poser des questions juridiques très pointues, afin d’agir en conséquence et éviter
des surcoûts de procédures juridiques et enfin pour éviter d’être attaquer tout azimut.
28
Pourtant, ce problème de contentieux de l’urbanisme pourrait parfois être évité. En
effet, la phase de concertation n’est pas toujours opérationnelle à Romans. L’amélioration
du projet selon la prise en compte de l’avis des habitants se fait souvent dans la
confrontation, lors de réunions publiques pour présenter le projet fini. Des associations de
personnes soucieuses de préserver « la valeur de leurs biens immobiliers » se forment et
attaquent le projet. Néanmoins, cela reste assez difficile de défendre un projet qui, on le sait
à l’avance, sera rejeté par la population car on construit des « logements sociaux »
disséminés dans la ville. Les élus locaux conscients de ce problème font aussi l’effort de
présenter les projets privés (qui n’ont pas toujours la qualité que peuvent présentés les
logements sociaux d’Habitat Pays de Romans (HPR)), ce que peu de villes moyennes font. En
parallèle, un travail de pédagogie est réalisé : des réunions publiques ou des commissions
extra-municipales sont prévues sur la densité urbaine ou les logements sociaux. Une autre
manière de faire qui s’installe progressivement dans le paysage politique local.
29
Produits et ressources de la structure
Une commande politique contrainte par des ressources économiques limitées
Les élus locaux déterminent les grandes orientations de leurs mandats et surtout les
projets à plus court terme. Il y a donc une commande politique qui est à la base du travail
qu’effectue les techniciens, d’où l’importance d’être en accord avec les principes que
semblent défendre l’équipe municipale en place (au niveau des idées politiques). La
temporalité du mandat politique est très présente, il s’agit de faire des actions qui aient
une visibilité dans le paysage urbain comme des actions urbaines lourdes (suivi de l’OPAH
même si cette procédure est pilotée actuellement par la CCPR et la CCCBP, les procédures de
Résorption de l’Habitat Insalubre (RHI) qui obtiennent de bons résultats même si les
procédures sont souvent qualifiées de « longues et couteuses » etc.).
Actuellement, des contraintes économiques sont très fortes et font arriver à des
impasses successives une action qui se voudrait massive, notamment sur le centre ancien
par exemple. C’est pourquoi il existe un besoin très important de subventions concernant
les projets urbains de manière générale sur Romans. Par exemple, l’ORU mis en place sur le
quartier de la Monnaie détient un financement public et des subventions étatiques fortes, la
marche de manœuvre est alors plus importante et permet une certaine rapidité d’exécution
selon les termes de Philippe Dresin, premier adjoint du maire : « nous avons été les premiers
de la Région en 2004 à signer un contrat avec l’ANRU, et nous sommes les premiers à avoir
fini actuellement »13.
Une nouvelle Communauté d’Agglomération : un nouveau souffle pour la ville de
Romans ?
A l’horizon se profile la création d’une nouvelle Communauté d’Agglomération
regroupant la toute nouvelle CA de Valence (composée de 11 communes) qui devrait
fusionner avait la CCPR et la CCCBP. Nous avions déjà évoqué l’espoir que pouvait susciter
cette nouvelle structure pour les élus locaux. Néanmoins, cette nouvelle structure soulève
des inquiétudes chez les fonctionnaires employés par la mairie car elle est synonyme de
13
Source : Entretien avec Philippe Dresin, premier adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1
er juin 2010
30
polyvalence, de flexibilité, de réactivité, de changement rapide. Il y a à peine un an, un
changement d’organisation des services fut réalisé causant pour certains le changement
d’un service à un autre ou d’un poste complètement différent du précédent. Avec la création
de cette nouvelle CA, certaines compétences risquent de disparaître de la ville, une nouvelle
organisation dans une année environ, et donc une adaptation à la nouvelle place du
personnel.
La formation continue comme atout du fonctionnariat
Toutefois, rappelons que le système du fonctionnariat permet de se former tout au
long de sa carrière professionnelle, et donc de s’adapter plus amplement aux aléas des
nouvelles organisations internes. Cela peut même être une opportunité car les formations
successives permettent de se spécialiser et d’obtenir une plus grande capacité d’expertise
dans le domaine qui intéresse le fonctionnaire. Certaines formations permettent, par
exemple, d’obtenir la capacité de donner une réponse technique aux problématiques
auxquelles certains sont confrontés. Au cours de mon stage, j’ai pu assister à une
réunion/formation sur l’éco-réhabilitation organisée par la Direction Régionale des Affaires
Culturelles (DRAC). Etaient présents divers acteurs locaux de St-Etienne, de Grenoble et de
Lyon ainsi que des acteurs de structures régionales. La problématique centrale était de
savoir comment concilier la réduction de l’impact sur l’environnement, le confort de
l’habitat et la sauvegarde du patrimoine dans la réhabilitation d’un bâtiment. Ces
problématiques se posées plus concrètement en ces termes : Comment sauvegarder l’aspect
patrimonial alors que parfois l’architecture ancienne crée des déperditions de chaleur très
importantes ? Comment crée de l’isolation efficace sans dénaturer ce patrimoine ? Au cours
de cette réunion/formation il y a pu avoir un retour des expériences faites, ce qui permet
d’enrichir chacun et de pouvoir tester ces nouvelles techniques sur son territoire. La
formation continue est donc un atout considérable pour progresser dans sa carrière
professionnelle.
Cette formation continue permet aussi, pendant les sessions de formation, de soulever
des problèmes communs de différents services de villes ou d’intercommunalités, de savoir
comment les choses fonctionnent ailleurs et donc de piocher dans les bonnes idées ou de
faire part de ce qui est mis en place dans sa propre collectivité.
31
Les partenaires
Le principal partenaire de la ville de Romans est la CCPR. Cependant, une
collaboration forte se fait aussi avec la CCCBP, notamment sur l’OPAH située sur les centres
anciens romano-péageois. Les deux Communautés de Communes qui détiennent une vision
plus stratégique des territoires à une échelle supérieure, font partie du bassin de vie. La
CCPR a été crée le 22 décembre 1997, après la dissolution du Syndicat d’Aménagement du
Pays de Romans qui a avait été crée en 1988 et qui comptait 19 communes. La Communauté
de Communes compte actuellement 20 communes et un peut plus de 49 000 habitants.
Autre partenaire important : Le Conseil d’Architecture d’Urbanisme et
d’Environnement (CAUE) avec la présence d’un architecte conseil qui fait des permanences
pour soit conseiller, soit pour revenir sur des dossiers qui ne s’intègrent pas bien à
l’environnement ou sont contraires aux règles prescrites par la ZPPAUP. Une vacation
gratuite de l’architecte conseil est prévue une demi-journée par mois pour le territoire de la
ZPPAUP et une journée entière par mois pour le reste du territoire romanais. Ces vacations
servent à faciliter l’instruction du dossier que ce soit pour un permis de construire comme
pour une déclaration préalable de travaux. L’architecte conseil ainsi que la responsable du
service Urbanisme (ou son adjointe) rencontre les promoteurs, les constructeurs ou les
administrés qui ont déposé un PC ou une Déclaration Préalable de travaux lors de ces
vacations. Ce travail en amont est réalisé pour gagner du temps pendant l’instruction du
dossier tout en essayant de donner une qualité à l’ouvrage réalisé.
Enfin les autres partenaires importants qu’il faut citer sont L’Architecte des Bâtiments
de France (ABF) et les prestataires extérieurs. L’ABF donne son accord pour chaque dossier
soumis à la réglementation de la ZPPAUP.
32
Retour critique sur la structure
Les avantages d’une petite structure
J’ai pu discerner au cours de mon stage que, dans les villes moyennes ou dans les
petites structures, les techniciens au statut de cadre n’ont pas une mission assignée comme
dans le Grand Lyon. Par exemple, un technicien peut avoir comme unique mission le
développement économique du quartier de la Part-Dieu. Dans la ville de Romans, ils sont
polyvalents, s’occupent de nombreux dossiers, et peuvent avoir une vision d’ensemble des
problématiques de la commune comme de détails fins sur certains dossiers.
Le fait d’avoir réalisé son stage dans une petite structure m’a aussi permis de
rencontrer les élus, malgré leur emploi du temps chargé. Nous avons donc pu avoir diverses
rencontres lors de réunions formelles et d’entretiens plus personnels, ce qui n’aurait peut-
être pas été possible dans une plus grande structure dans une plus grande ville. La
présentation du rendu de ma mission s’est faite pendant des instances où ils étaient
présents. Au fur et à mesure du stage, j’ai pu constater que je prenais de plus en plus de
crédibilité auprès des élus, notamment avec la présentation de l’avancement de mes deux
missions, depuis le mois de mars puis jusqu’au début du mois de juillet.
Pareillement, j’ai pu m’intégrer dans l’équipe des techniciens et être considéré comme
l’une des leurs. J’ai pu constater qu’il y avait une bonne communication entre les techniciens
et les élus même s’il peut parfois y avoir des désaccords. Cette communication facilitée est
peut-être due au nombre restreint d’agents, et par le fait qu’il n’y ait pas d’intermédiaires
pouvant faire le lien (à part pour le premier adjoint et le maire). Les rapports sont donc plus
directs.
Néanmoins, j’ai pu constater différentes limites d’action de la structure lors de mon
stage.
33
Le mille-feuille administratif : un frein de l’action ?
Ce mille-feuille administratif, évoqué plus tôt, fait arriver à des impasses des
collaborations qui pourraient être intéressantes et force de proposition. On arrive parfois à
des incompréhensions ressenties par des agents de la mairie, comme le confie Eric Olivier-
Drure, responsable du service des Archives de la ville de Romans : « Aucun projet commun
n’est réalisé s’il n’y a pas la structure commune qui permet de le cadrer. Par exemple, avec la
médiathèque du centre ancien nous ne faisons plus de projets communs depuis que c’est la
CCPR qui la gère. Nous n’avons pas les mêmes leviers d’action sur le territoire (Ville de
Romans, CCPR). Puis, beaucoup de couches administratives se superposent (Ville de Romans,
CCPR, RBE), elles n’ont pas les mêmes moyens et ont parfois du mal à travailler ensemble,
alors que les questions urbaines sont transversales par nature »14.
Actuellement, il existe une mutation progressive vers une échelle administrative plus
large (la prochaine étant la future Communauté d’Agglomération regroupant les aires
urbaines de valence, Romans et Bourg-de-Péage) et cela passe par la création d’une
multitude d’instances administratives qui ont différents domaines d’intervention sur le
territoire romanais et péageois. C’est cet éparpillement des compétences qui peut causer
l’incompréhension chez les administrés mais aussi chez les techniciens qui ne voient pas
aboutir des projets à cause de la complexité administrative locale et territoriale française.
Difficultés financières de Romans
Bien que la difficulté soit déjà connue avant cette date, c’est en 2008 que la situation
d’endettement est annoncée et officialisée pour la ville de Romans. La cours des comptes
avait donc un droit de regard sur les finances de la mairie romanaise et des restrictions sont
imposées dans le budget: cette situation s’est durablement installée jusqu’à la mi-2009. La
tension était donc forte au sein de la mairie durant cette période. Différentes raisons sont à
l’origine de cette situation de surendettement : la conjoncture économique actuellement
n’est pas favorable aux collectivités territoriales, parallèlement, l’Etat se désengage
financièrement en délivrant moins de subventions aux structures territoriales, la ville-centre
que représente Romans au cœur de la CCPR assume beaucoup (trop ?) de compétences,
14
Source : Entretien avec Eric OLIVIER-DRURE, responsable du service des archives, le 18 mars 2010
34
enfin les choix politiques locaux ne se sont pas faits dans la réduction budgétaire alors qu’il y
avait de moins en moins de ressources (de nombreuses usines ont fermées et donc il y a eu
de moins en moins de taxe professionnelle pouvant être utilisée comme ressource par la
mairie). A plané pendant quelques temps, la possibilité que Romans soit mise sous tutelle
par le préfet, cette épisode a durablement marqué les esprits que ce soit pour les habitants,
les techniciens, les employés de la mairie, la direction générale et bien sûr les élus locaux.
De plus, le budget reste très complexe à comprendre, « seuls quatre personnes
comprennent le budget dans le détail, parmi les élus »15. Il y a donc eu l’intégration de
personnes qui ont des connaissances sur la fiscalité et tout ce qui est aspect financier dans la
nouvelle équipe municipale, afin de redresser la situation financière.
Freins d’action des villes moyennes
De manière plus générale, divers freins sont rencontrés par les villes moyennes : elles
sont à des étapes différentes au niveau de l’intercommunalité et à des vitesses différentes
au niveau partenarial alors que les grandes villes ont parfois une maîtrise plus approfondie
et plus aboutie de ce que veulent les élus sur leur territoire (plus de pouvoir, plus de fonds
financiers, plus de leviers d’action).
Par exemple, le service Urbanisme exerce un contrôle sur les constructions mais il n’y a
pas de vérifications strictes sur tout ce qui est réalisé (Déclaration Préalable et Permis de
Construire) à part si l’administré ou l’entreprise demande une déclaration de conformité des
travaux ou, mais c’est plutôt rare, quand les techniciens le remarquent en parcourant la ville.
Par exemple, dans le centre ancien ou sur les boulevards, des enseignes trop criardes (le
blanc et le noir sont proscrits dans la ZPPAUP) ont été remarquées par des techniciens du
service Urbanisme. Après ce constat, une prise de contact est réalisée avec les commerçants,
ils peuvent dans le meilleur des cas retravailler l’enseigne et les couleurs utilisées, et
proposer des subventions possibles par le biais de l’opération façades.
Des leviers d’action sont bien moins importants pour les villes moyennes en
comparaison avec les grandes villes concernant la qualité de la production immobilière sur
15
Source : Martine BUON, responsable du service Urbanisme de la ville de Romans, le 7 juillet 2010
35
leur territoire: les villes moyennes ont souvent affaire à de petits promoteurs immobiliers ou
à des géomètres n’ayant pas forcément une culture et une volonté de créer de la qualité au
niveau des logements (notamment par rapport aux produits immobiliers proposés dans les
lotissements). La ZPPAUP du centre ancien a permis une maîtrise accrue de ce qui est
réalisé en termes de réhabilitation du bâti. Un cadrage réglementaire strict existe donc
seulement sur les zones de ZPPAUP (il y en a quatre en tout : une dans le centre ancien, une
entre les boulevards et le quartier de la gare, une sur la cité-jardin Jules Nadi et enfin une
concernant la protection naturelle d’une partie des berges de l’Isère). Le PLU impose
seulement des gabarits et le type de fonctions des bâtiments, une réglementation stricte
n’existe pas ailleurs, hors de la ZPPAUP. Il est donc difficile d’imposer des normes
qualitatives notamment en périphérie et dans les nouvelles zones ouvertes à
l’urbanisation.
De plus, actuellement, est seulement mis en place des outils incitatifs (comme les
OPAH, les opérations façades), les outils coercitifs font « peur » car considérés comme bien
plus radicaux. Les élus craignent de se mettre à dos certaines personnes bien qu’ils ont
conscience que dans certains cas il faut agir. Un effort a été fait en ce sens récemment avec
le vote d’une Opération de Restauration Immobilière (ORI) sur la ZPPAUP. Cet outil permet
de prescrire des travaux aux propriétaires, s’ils ne sont pas effectués dans le délai imparti,
les propriétaires se voient exproprier de leurs biens. Bien sûr, des aides financières (et plus
particulièrement la défiscalisation) peuvent être mises en place pour aider les propriétaires à
effectuer les travaux. L’ORI est « un outil sans équivalent et d’une grande potentialité
opérationnelle »16 mais, l’expropriation qui peut s’en suivre, reste parfois un frein pour
certaines communes qui veulent l’utiliser. En effet, la mairie se voit la charge du bâtiment s’il
y a expropriation, et, pour le cas de Romans, il n’y a pas forcément l’argent nécessaire pour
réhabiliter le bien bâti. On peut dire alors que Romans détient un autre point pénalisant :
c’est l’absence de Société d’Economie Mixte (SEM) dans la Drôme avec une marche de
manœuvre élargie et un pouvoir financier plus important. Une SEM pourrait assumer ce
rôle, notamment pour les ORI. Par exemple, la SEM du Pays de la Loire a pu mettre en place
des ORI sur Saint-Etienne : des opérations qui jusque là on fait leurs preuves. Ce type de
16
Source : RENE-BAZIN A., Le renouvellement urbain dans les centres anciens, évolution et pratique des outils juridiques (in Les espaces du renouvellement urbain), p. 196
36
structure, ayant des leviers d’actions et des outils juridiques importants, manque donc
cruellement à Romans.
Plus généralement, des vacations de l’architecte-conseil sont mises en place toutes les
deux semaines pour permettre d’améliorer les projets immobiliers projetés sur la commune.
J’ai pu assister à certaines vacations. J’ai trouvé ces vacations très intéressantes car on peut
se rendre compte que les constructeurs qui ont pris rendez-vous avec l’architecte-conseil en
vue de voir leur projet validé par l’instruction, proposent selon leurs termes « ce que les gens
veulent ». Or, ces promoteurs ne proposent pas autre chose que des maisons ou des
immeubles standardisés présentés dans des catalogues. Si on modifie quelques choses de
la structure de la maison ou de l’immeuble, l’acheteur paiera bien plus cher, ce qui crée un
réel effet dissuasif. Le rôle de l’architecte-conseil est de tirer la qualité des nouveaux
produits immobiliers vers le haut, et donc de pousser les promoteurs à améliorer de manière
sensible le produit immobilier avant le dépôt du PC ou pendant son instruction.
Ces vacations se sont peu à peu institutionnalisées à Romans grâce notamment à la
prise de conscience générale des collectivités sur l’étalement urbain et sur le fait qu’on a
laissé se construire des quartiers entiers de lotissement qui ne proposaient que le minimum.
Enfin, dernière illustration des freins d’action des villes moyennes : le désengagement
de l’Etat. J’ai pu assister à un comité de pilotage de l’OPAH où étaient présents l’équipe
d’animation des représentants de l’Habitat de la CCPR et de la CCCBP, des techniciens du
service Urbanisme de la mairie de Romans et de Bourg-de-Péage, des élus locaux, ainsi que
deux représentants de l’Agence Nationale de l’Amélioration de l’Habitat (ANAH). Ce comité
de pilotage permet de présenter une vision synthétique des résultats depuis que l’OPAH est
opérationnelle sur Romans et Bourg-de-Péage. Durant ce comité de pilotage, Jean Julian, le
représentant de l’ANAH dans la Drôme, a annoncé qu’il y aurait des changements
concernant les subventions données par l’ANAH : la commune se verrait chargée du
logement conventionné pour tout ce qui concerne les réhabilitations de propriétaires
bailleurs, le logement intermédiaire serait le seul type de loyer pouvant obtenir des
subventions étatiques. De plus, on passerait à des conventions sans travaux, c’est-à-dire que
l’on passerait à des exonérations sur l’impôt foncier. Cela semble difficilement applicable
37
dans un parc bâti très dégradé comme dans le centre ancien de Romans et de Bourg-de-
Péage. Il y a donc, plus que le simple désengagement de l’Etat, une inadaptation aux
situations locales. Des techniciens de la CCPR tentent, au cours de ce comité de pilotage, de
faire comprendre aux représentants de l’ANAH que ce n’est pas adapté à la situation de
Romans et de Bourg-de-Péage. Malheureusement, il n’y a pas tant de possibilités de faire
remonter ces difficultés, mis à part par le biais du représentant de l’ANAH dans la Drôme.
A cela s’ajoute un changement des règlements des conventions avec l’ANAH tous les
deux ans ou tous les 18 mois. Les Communautés de Communes ou les villes ont du mal à
animer et à exercer ces nouvelles règles car les administrés ont du mal à comprendre ces
changements très rapides. Il n’y a pas de stabilité qui permet d’instaurer une procédure qui
soit pérenne, qui instaure une confiance entre les habitants et les services communaux.
38
Deux missions réalisées : informations et communication, synthèse de
la situation et aide à la décision sur un même territoire, le centre
ancien romanais
Je fus chargée de deux missions principales qui se sont faites en parallèle puisque le
travail avait pour délimitation le même territoire : le centre ancien de Romans. Ma première
mission consistait en la réalisation d’une carte synthétique des aménagements urbains en
projet ou en cours sur le centre ancien et la deuxième mission, plus longue à réaliser,
concernait la création d’un diagnostic exhaustif du centre ancien de Romans en vue de
créer un dossier de candidature pour le PNRQAD en 2011.
Réalisation d’une carte synthétique des aménagements urbains en projet ou
en cours sur le centre ancien romanais
Cette première mission relevée d’une commande politique avant tout : je devais créer
un outil cartographique demandé depuis un certain temps par l’élu à l’Urbanisme, monsieur
Jean-David Abel. Il s’agissait de créer un outil interne de cartographie et de communication
sur l’ensemble des aménagements urbains en projet ou en cours sur le centre ancien
romanais17, de le rendre efficace et réactif pour un possible dossier de subvention, et enfin
qu’il puisse servir à la prospective politique.
Cette carte interactive fut crée, dans un premier lieu, avec le logiciel Power Point et
déboucha sur une première présentation devant les élus locaux, puis les chefs de services de
la mairie. Dans un deuxième temps, cette carte fut développée sur une couche SIG du
logiciel disponible sur Romans (Editop). Cette carte finalisée a été rendue accessible par tous
les services communaux, RBE et la CCPR. Ce travail a pour but d’avoir une vision globale et
synthétique des projets en cours ou futurs sur le centre ancien. A terme, cet outil pourrait
être utilisé par les élus concernant la hiérarchisation des priorités des aménagements
urbains futurs, ainsi que pour les techniciens afin d’être le plus réactif possible si un dossier
de subventions doit être crée.
17
Source : voir capture d’écran de la carte en annexes
39
Pour créer cet outil, j’ai assisté à une formation brève mais efficace sur le logiciel SIG
de la mairie de Romans (« editop ») et de la CCPR. Grâce à mes connaissances sur Mapinfo
notamment, j’ai pu avancer rapidement sur cette mission, le logiciel intercommunal étant
encore plus simple d’utilisation.
Comment rendre l’outil facile d’utilisation, efficace, quasi intuitif ?
Chaque projet est composé de pastilles de couleurs différentes selon les thèmes
(équipements publics, voiries, stationnements, circulation motorisée, piétonisation et modes
doux, places et placettes, redynamisation commerciale, renouvellement urbain,
réhabilitation, patrimoine, projets en devenir). La localisation du projet se fait par le biais
d’un système de pastillage. Une fiche de synthèse accompagne chaque pastille et apparaît à
l’écran quand on clique sur celle-ci. Chaque fiche de synthèse est constituée des données
suivantes : le nom de l’aménagement, la date de la dernière mise à jour de la fiche de
renseignement (pour pouvoir constater si les données sont récentes ou non), l’adresse, le
descriptif du projet, le zonage de la parcelle dans la ZPPAUP et du PLU, les servitudes
particulières si celles-ci existent, le propriétaire du bâtiment ou de l’espace public, la
maîtrise d’ouvrage, la maîtrise d’œuvre, les partenaires, le stade d’avancement du projet
(projet à définir, projet en cours de réflexion, projet en cours de finalisation ou travaux en
cours), le calendrier avec la validation politique, le coût des travaux quand il est évalué, le
montage financier, une photo du site ou du projet à réaliser, un plan de masse et un extrait
cadastral. Pour récolter toutes ces informations, j’ai dû assister au groupe de travail sur le
centre ancien, où une séance était prévue pour relater tous les aménagements urbains
projetés sur le centre ancien. Après cela, j’ai dû lire des documents internes au service
Urbanisme, ou aux services Etudes Urbaines et rencontrer des techniciens pour pouvoir
remplir ces fiches de synthèse.
L’inscription de cet outil dans une couche SIG trouve son utilisation pérenne par les
services communaux et intercommunaux. Néanmoins, cet outil doit être réactualisé tous les
trois mois environ, j’ai donc dû trouver une personne du service Urbanisme qui en fasse le
suivi après mon départ, pour qu’il soit opérationnel tout au long de son existence.
Une autre petite mission de cartographie a été faite en parallèle de celle-ci et fut
fortement liée à la première : j’ai dû créer une carte de parcours dans le centre ancien pour
40
la visite du préfet18 du 4 juin 2010 concernant la politique de la ville en vue de classer le
centre ancien en ZUS (aujourd’hui classée en CUCS de niveau 2, mais pas en ZUS comme le
quartier de la Monnaie). Cette visite du préfet et son parcours dans le centre ancien avec les
élus et certains techniciens (étaient présents les responsables de la mission politique de la
ville et de la direction de l’Aménagement Urbain) avait pour but d’obtenir deux nouveaux
postes d’agents de médiation grâce au Fond Interministériel de Prévention de la
Délinquance (FIPD). J’ai donc pu assister à une réunion préalable pour préparer cette visite,
et plus particulièrement proposer le parcours qui serait effectué durant la visite. Au cours
de cette réunion, j’ai pu proposer certains points du parcours en montrant les points
nerveux ou « points durs » c’est-à-dire les Ilots en déshérence comme la « maison du
Mouton » que les différentes OPAH n’ont pas pu éradiquer, les bâtiments qui mériteraient
tout simplement une réhabilitation ou encore le nouveau local jeunes dans le centre ancien
pour encadrer la délinquance et enfin le travail à faire avec la Maison de Quartier Saint-
Nicolas en ce qui concerne l’encadrement des jeunes.
Figure 7 la Maison du Mouton, le plus vieux bâtiment du centre ancien romanais (Mars 2010, photo prise par Marisa JULIEN)
Cette mission a été une bonne introduction à la deuxième mission plus complète et
plus intéressante : la création d’un diagnostic exhaustif et transversal du centre ancien de
Romans-sur-Isère.
18
Cette cartographie est consultable dans les annexes.
41
Création d’un diagnostic exhaustif du centre ancien de Romans, en vue de
créer un dossier de candidature pour le PNRQAD en 2011.
Le centre ancien fait parti de la « Politique à deux têtes »19 de Romans (la deuxième
« tête » étant le quartier de la Monnaie). Depuis que le PS est au pouvoir à Romans (c’est-à-
dire plus précisément depuis 1977), jusqu’à aujourd’hui, le centre ancien est considéré
comme étant un espace urbain à revaloriser. L’OPAH-RU et l’Opération façades prenant fin
en 2011, le centre ancien faisant déjà l’objet d’une politique soutenue, la municipalité
souhaite poursuivre la revalorisation du centre ancien et tente de trouver un « renouveau »
à travers une nouvelle procédure, encore plus englobante qu’une simple OPAH : le
Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés (PNRQAD).
Annonay se situant à 50 kilomètres a été l’une des 40 villes retenues pour cette procédure et
a pu obtenir de larges subventions (plus de sept millions d’euros). Cette démarche a eu de
larges échos dans la presse locale, ce qui a suscité l’envie chez l’équipe municipale de
Romans de postuler, elle aussi, pour un futur dossier de candidature pour le PNRQAD qui
aura peut-être lieu en 2011.
Romans aimerait bénéficier de ces subventions pour lancer des travaux plus
conséquents sur son centre historique. Le PNRQAD représente beaucoup plus de
subventions qu’une procédure de réhabilitation classique du parc privé : seuls 40 quartiers
ont été sélectionnés nationalement pour ne pas émietter les moyens et agir plus
profondément sur quelques quartiers. Une ambition est clairement affichée par le ministère
du logement avec le PNRQAD, puisque l’objectif chiffré étant que d’ici 2016, nous devons
compter : « la réhabilitation de 60 000 logements privés, dont au moins 20 000 à loyer conventionné,
et la production de 30 000 logements locatifs sociaux, dont 5000 places d’hébergements ou de
logements adaptés »20.
Pourtant, on peut quand même se poser la question de ce qui différencie réellement le
PNRQAD par rapport à une simple OPAH ? Le PNRQAD est « outil qui incite une vision plus
globale de ce que l’on veut faire sur le territoire »21, cet outil permet d’articuler certains
19
Source : Entretien avec Jean Decauville, membre de l’équipe d’animation de l’OPAH, le 8 avril 2010 20
Source : THOUVENOT A., Requalifier le logement des quartiers anciens, La Gazette, 30 novembre 2009, p32-34. 21
Source : Entretien avec Jean Decauville, membre de l’équipe d’animation de l’OPAH, le 15 avril 2010
42
outils ou des financements différents comme le Fond d’Intervention pours les Services et
l’Artisanat et le Commerce (FISAC), les RHI, les ORI et puis les OPAH. Il s’agirait d’un outil
plus souple puisqu’il semblerait « qu’un projet global avec des thématiques tout azimut
pourrait être monté, celui-ci s’appuierait sur un financement fort de l’Etat, un partenariat
plus important et des procédures multiples »22. Est espéré une deuxième vague de cette
procédure pour 2011, bien qu’aujourd’hui la politique nationale de rigueur ne se prête pas à
la reconduction de ce plan de relance pour les quartiers ancien dégradés.
Ce diagnostic a aussi pu réactualiser les données du centre ancien, le dernier
diagnostic étant réalisé en 1996. J’ai pu récupérées des données « FILOCOM »23 sur le Parc
Privé Potentiellement Indigne (PPPI) datant de 2005 ainsi que des données de l’INSEE datant
de 2006 et des données de la Caisse des Allocations Familiales (CAF) de 2009 puisque les
dernières données systématiquement citées commençaient à dater puisqu’elles étaient de
1999. Ce diagnostic a permis d’avoir un « regard réactualisé » et rationnel sur le centre
ancien par les chiffres et non pas par seulement des sentiments intuitifs qu’ont certains
acteurs que j’ai pu interroger. Contrairement à ce qui peut parfois être évoqué par certains
habitants de Romans, il y a une population mixte dans le centre ancien et non pas
seulement une population en grande difficulté socio-économique (même si une tranche de
la population est dans cette situation).
Au cours de cette mission, j’ai dû endosser le rôle d’une personne faisant les liens
entres les études précédentes et récentes, éparpillées dans différentes structures
publiques que ce soit au sein des services de la ville de Romans, ou bien au sein de la CCPR
et de RBE.
Les services de la mairie tendent à développer une culture de la transversalité, qui
n’existait pas auparavant en tentant d’avoir un regard plus global sur la situation et en
mettant en place de groupes de travail spécifiques et d’outils en commun. Mon rôle a été de
22
Source : Entretien avec Jean Decauville, membre de l’équipe d’animation de l’OPAH, le 15 avril 2010
23 Le système d’observation statistique des logements, dénommé FILOCOM, correspond à un traitement
automatisé de données issues des fichiers fiscaux et fonciers. Ses principales finalités sont l’aide à la définition et à la mise en œuvre des politiques locales de l’habitat, l’aide à la programmation du logement social, à l’observation et à l’évaluation des politiques publiques. Le fichier FILOCOM (Fichier des LOgements par COMmunes) est un fichier construit par la Direction Générale des Impôts (DGI) pour les besoins du Ministère de l’Equipement (actuel Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement Durable et de l’Aménagement du Territoire ou MEEDDAT).
43
faire le lien à travers ce diagnostic à la fois en participant à toutes les réunions de « groupe
de travail sur le centre ancien » (rôle de récolte d’informations, de participation voire
d’animation) qu’à d’autres groupes de travail plus ponctuels en lien avec le centre ancien
(groupe « Banque de France », groupe « Chemin de Croix », groupe « piétonisation »). J’ai eu
le droit d’assister à certaines rencontres avec des investisseurs, des propriétaires bailleurs
pour la plupart. J’ai rencontré par exemple des investisseurs privés et intéressés pour la
réhabilitation de trois logements sur la côte Jacquemart dans le centre ancien, avec les
subventions de l’ANAH dans le dispositif de l’OPAH. J’ai aussi rencontré d’autres
investisseurs souhaitant rénover de vieux bâtiments, et y installer une activité culturelle par
exemple (une ancien chapelle du centre ancien serait transformer en galerie d’art
contemporain et un petit théâtre de représentations serait crée). Ces diverses rencontres
m’ont permis d’avoir une certaine conception des projets dans le centre ancien par le biais
des investisseurs privés.
J’ai donc pu rencontrer des acteurs très différents lors des entretiens : des techniciens
de la mairie, des ingénieurs, des élus locaux et aussi des personnes du monde associatif.
Cette mission aura suscité certaines compétences, notamment la polyvalence, la capacité de
gérer en autonomie son travail, et enfin les multiples présentations sollicitaient la capacité
d’être à l’aise à l’oral. Après un rendu écrit24, j’ai réalisé trois présentations orales du bilan
de cette mission : une devant certains techniciens de la mairie de Romans, l’équipe
d’animation de l’OPAH et des agents de la CCPR et de la CCCBP, une autre devant les élus, et
enfin une dernière devant tous les responsables des directions de la ville de Romans.
Cette mission m’a grandement intéressé car elle fut très transversale et a permis
d’avoir une vision globale d’une certaine situation urbaine: j’ai pu autant aborder des
questions de patrimoine bâti et de réhabilitation, que des questions sociales et
économiques, de savoir quel bilan peut-on portait sur les outils urbanistiques (zonages du
PLU, ZPPAUP, OPAH, RHI, opérations façades, FISAC), ainsi que d’aborder les questions des
représentations de la ville et de l’espace vécu25 et perçu par les techniciens, les élus et les
habitants. Ce Diagnostic peut aussi servir à informer les acteurs locaux des problématiques
24
Diagnostic territorial du centre ancien de Romans, consultable sur le logiciel dans la rubrique « missions de stage » 25
FREMONT A., La région espace vécu, collection Champs, Flammarion, 1999, 288p.
44
du centre ancien et, après 30 ans d’actions, dresser le bilan d’où est ce que nous en sommes
aujourd’hui dans la volonté de revaloriser celui-ci.
Regards critiques sur la mission
Les deux missions que j’ai réalisé ont permis et ont été utiles dans le sens où beaucoup
d’études (sociales, de santé, de l’habitat, économiques, foncières, immobilières) ont été
réalisées sur le centre ancien mais celles-ci étaient éparpillées et ne sont donc pas
centralisées à un endroit précis où les techniciens et les élus pourraient se référer. Cet
éparpillement des études peut être considéré comme une réelle perte d’informations
pourtant intéressantes, qui ne sont pas toujours lues car faute de temps des élus et des
techniciens. Ma mission aura donc eu l’effet de centraliser ces études tout en ayant un
regard assez synthétique sur le centre ancien. Le document du diagnostic du centre ancien
dépasse la simple structure du service Urbanisme puisque j’ai pu le diffuser à l’ensemble des
services (service des Archives, Mission politique de la ville et service Etudes Urbaines) et des
partenaires (RBE, la CCPR, l’équipe d’animation de l’OPAH, l’association de la Sauvegarde du
Patrimoine).
Néanmoins, j’ai pu remarquer que les études urbaines (ou autres) sont perçues
comme synonymes de valeurs procédurales plutôt que de regard neuf sur le territoire.
C’est-à-dire que certaines études sont réalisées uniquement dans le but d’avoir des
subventions. Ce document produit pourrait faire office de synthèse complète des
problématiques du centre ancien, tout en donnant des axes d’aménagements futurs. J’ai
donc tenté de créer ce document de diagnostic du centre ancien comme étant un outil qui
peut-être opérationnel au-delà du simple dossier de candidature pour le PNRQAD. Il a fallu
proposer d’autres fonds intervenant dans différents domaines, qui rentreraient dans un
projet plus global et d’autres procédures pouvant valoriser le centre ancien (Le Fond
National de l’Aménagement Du Territoire (FNADT), le label Villes d’Art et d’Histoire, le Fond
Européen de Développement Régional (FEDER) etc.).
Dans un premier temps, ma mission a participé encore et toujours au regard unique
et par conséquent à l’action projetée sur le centre ancien, elle participe à une vision floutée
45
de ce qu’est le centre-ville aujourd’hui sur Romans26, c’est aussi pour cela que j’ai essayé d’y
insérer une réflexion plus large sur le centre-ville dans une dernière partie27 du diagnostic.
Le périmètre choisi pour le diagnostic ne s’est donc pas limité aux limites du centre
ancien stricto census28, nous avons décidé avec l’équipe des techniciens lors de la première
réunion du groupe de travail de centre ancien d’élargir le périmètre aux boulevards jusque
devant Marques Avenue (puisque le nouvel office de tourisme va être mis en place dans un
bâtiment se trouvant sur le tènement de Marques Avenue), et d’étendre le périmètre à
l’Ouest comme à l’Est pour penser les connexions du centre ancien avec les nouveaux
équipements et les nouveaux projets urbains (Cité de la Musique, le Bâtiment Jourdan
transformé probablement en hôtel de luxe etc.). Même si ce périmètre élargi était pensé
qu’en termes de projets d’équipements et d’amélioration d’accès ou d’esthétisme, ce fut
pour moi l’occasion de pousser la réflexion en proposant une partie sur le rapport à la
centralité qu’entretient le centre ancien.
26
Ceci est le cœur de mon mémoire, par conséquent je ne développerai pas cette idée ici. 27
Voir diagnostic centre ancien dans les annexes sur le logiciel dans la rubrique « missions de stage » 28
Voir carte page suivante
46
Figure 8 Périmètre d'étude choisi pour le diagnostic du centre ancien
A partir de là, une prise de recul a été effectuée sur la centralité de manière plus
élargie. Ce sujet était parfois évoqué par bribes dans certaines études, certains témoignages,
certaines réunions publiques (on insistait notamment sur le fait que les habitants
n’arrivaient pas à situer le centre-ville à Romans), mais ce sujet n’a jamais été abordé de
manière globale et plus théorique. Un sujet sur lequel je voulais m’exprimer plus largement :
le mémoire fut la meilleure occasion et le meilleur exercice pour cela. En premier lieu, je me
suis donnée comme cadre de réflexion le rapport du centre historique à la centralité
actuelle. Ensuite, j’ai alimenté ma réflexion grâce à des textes théoriques, des textes de
chercheurs pouvant créer une montée en généralité de mon sujet et ne pas faire qu’une
étude de cas purement locale.
47
Conclusion et perspectives
Bilan personnel
Concernant mon intégration dans l’équipe du service Urbanisme, elle fut facilitée
grâce à l’organisation des bureaux des pré-instructeurs et des instructeurs en « open-
space ». Cet espace de travail m’a permis de participer à des discutions et de tisser de vrais
liens avec l’ensemble du service. Au delà de cette possibilité de se sociabiliser au sein de la
structure, cette organisation m’a permis de voir comment cela se passe au bas de l’échelle,
d’aborder ce que l’on n’apprend pas en cours magistraux et qu’on a du mal à percevoir
quand on est étudiant (car n’étant pas propriétaire d’un bien immobilier, n’ayant jamais fait
de démarches pour des travaux ou d’avoir à réaliser une demande de Permis de Construire,
tout cela représentant des procédures inconnues de ma personne) c’est-à-dire : de percevoir
comment l’accueil du public se passe, de constater les réactions des administrés face à des
règles « complexes » d’urbanisme et de poser des questions sur des détails des procédures,
du PLU, de la ZPPAUP. J’ai donc du adopter le statut « d’éponge » pour pouvoir absorber le
maximum de données qualitatives et pour puiser des informations au premier échelon de la
chaîne. J’ai donc pu observer le rapport qu’ont parfois les administrés avec les normes
réglementaires, voire parfois d’assister aux conflits qui peuvent en découler car le droit tout
puissant de la propriété privée est encore très présent dans l’esprit des Français.
Au début du stage, les stagiaires disposaient de peu d’espace à la base. Un autre
bureau était initialement prévu pour les stagiaires. L’ambiance y étant plus calme, car il n’y
avait pas d’accueil du personnel. Ce bureau m’a surtout servi pour réfléchir sur la manière
dont mener mon diagnostic, pour prendre des rendez-vous avec les différents acteurs, pour
commencer à structurer ma pensée et engager l’écriture du diagnostic. Malgré l’espace
limité du service, les techniciens ont eu une bonne idée de prendre deux stagiaires : Jean-
François BLAIN et moi-même. Nous venons tous deux de la même promotion de l’IUL. Nous
avions deux missions très différentes (sa mission étant de réaliser un inventaire du
patrimoine agricole sur la commune de Romans en vue de la prochaine révision du PLU),
mais celles-ci ont permis d’élargir nos connaissances mutuellement en ayant un droit de
regard et des conseils portés sur le travail de l’un et de l’autre, sur nos missions respectives.
48
Cet autre regard critique sur mon travail m’a permis de peaufiner le rendu final de ma
mission.
Par rapport au « statut de stagiaire », j’ai eu la vive impression que les techniciens ont
pris au sérieux dès le début ma capacité à réaliser ma mission, ce qui m’a permis d’avoir une
réelle place à leurs côtés. Cette confiance assez spontanée est peut-être due à l’accueil de
bons stagiaires auparavant. Ma tutrice, Aurélie Rodet a cadré ma mission et m’a laissé une
grande autonomie dans la manière dont je pouvais la réaliser. Etant jeune et sortie de
l’Institut d’Urbanisme de Grenoble (IUG) il y a seulement deux ans, il me semble que ma
tutrice avait une grande confiance en moi et dans mon niveau universitaire qui, peut-être, se
rapprochait du sien, notamment au niveau des savoirs et des enseignements que l’on a pu
avoir toutes les deux au sein d’Instituts d’Urbanisme.
Au niveau des élus, cela a été un peu plus différent : j’ai pris de la crédibilité au fur et à
mesure et de manière rythmée par les présentations orales de mon travail. Lors de ma
mission, les exercices oraux et de communication furent très sollicités et, malgré ma timidité
naturelle, j’étais très à l’aise dans ce type d’exercice (peut-être que les différents exercices
oraux de l’IUL y sont pour quelque chose).
Regard sur le métier d’urbaniste
Enfin, bien que ma mission fut fort intéressante, j’aimerai voir plus amplement le
projet urbain, savoir comment le monter et constater quels types de problèmes sont
rencontrés. J’ai pu en voir des bribes avec les réunions concernant la Cité de la Musique,
bien que ce projet soit piloté par la CCPR. Mais, actuellement, je n’ai pas de connaissances
approfondies sur la manière dont monter un projet et j’aimerais pouvoir le suivre de sa
conception au plus petit détail final. Il est de mon avis qu’il s’agit de compléter ma formation
en ce sens, par rapport à ma volonté de coupler, dans la voie professionnelle, le diagnostic
et le projet urbain, c’est-à-dire le constat d’une situation urbaine et la meilleure réponse
que l’on peut porter à cette situation.
49
J’ai apprécié d’être la personne qui « fait le lien », qui joue le rôle de médiateur et qui
doit détenir ce que Viviane Claude appelle la «multi-pluri-inter-trans-disciplinarité»29. Cette
caractéristique est loin d’être nouvelle puisqu’elle revient en force, au milieu des années
1960, dans la définition de l’urbaniste. Néanmoins, ce premier stage professionnalisant m’a
permis de confirmer que l’urbaniste « paraît naviguer entre les disciplines scientifiques, des
savoirs et des savoir-faire »30. J’ai réellement apprécié d’avoir produit des études qui aident
à la décision politique. De manière plus large, le développement urbain ou encore les
« manageurs de projet » seraient des métiers qui m’intéressent car « développer un quartier
un territoire, c’est pouvoir être l’opérateur d’un travail collectif, c’est-à-dire prendre appui sur
des ancrages, réseaux, intérêts locaux, mais aussi nationaux, européens, voire
internationaux, jouer entre les différentes échelles territoriales, savoir coordonner les
enveloppes financières venues de sources variées, monter des dossiers. C’est aussi jouer des
positions d’interface en alliant ces divers champs de l’action publique qui sont nombreux,
diversifiés, apparemment hétérogènes entre eux qu’ils relèvent du social, de l’économie, de
la culture, de l’habitat »31, autant de paramètres qui selon moi sont stimulants pour une
future carrière professionnelle.
29
Source : CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle (p.209) 30
Source : CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle (p.212) 31
Source : CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle (p.225)
50
PARTIE II : MEMOIRE
Une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine à Romans
comme échec de la revalorisation du centre ancien
51
Introduction :
Les pouvoirs publics communaux de Romans-sur-Isère ont depuis plus de trente ans
essayé de « tirer vers le haut » le centre historique romanais par le biais d’outils comme
l’OPAH, les RHI, le FISAC, le classement en ZPPAUP, une politique de la ville assez soutenue.
Pourtant, le centre ancien comprend toujours du bâti dégradé, une vacance de locaux
commerciaux importante, et encore plus, une image négative qui relègue ce centre
historique au fort potentiel patrimonial et touristique au rang de « quartier ancien
dégradé ».
Des réponses ont déjà été apportées concernant cette non-redynamisation du centre
ancien : comme l’inadaptation des outils que sont les OPAH ou l’OPAH-RU actuel portés sur
le centre ancien, ne pouvant pas apporter une « mixité vers le haut » pourtant attendue par
les élus locaux32.
A travers ce mémoire, j’essaierai d’apporter une réponse autre concernant la non-
revalorisation de ce centre ancien. L’hypothèse générale que j’aborderai portera sur le
rapport à la centralité qu’entretient le centre historique. Au cours de l’analyse, nous
aborderons la notion de centralité, et plus précisément de la « centralité endogène, liée au
système de relations que noue un centre avec sa zone d’influence »33 : définition qui est « la
plus classiquement retenue »34. Nous écarterons les réflexions largement diffusées sur les
rapports centralités/périphéries. L’idée de la centralité sera ici abordée uniquement de
manière intra-urbaine, le centre sera alors considéré comme un espace polarisant des
activités de services (avec une portée spatiale plus ou moins importante35) et qui est
reconnu comme centre-ville par les habitants ou les personnes extérieures de la ville. Nous
reprendrons aussi l’idée de Jérôme Monnet de définir la centralité comme « une qualité
attribuée à un espace et non comme l’attribut intrinsèque d’un lieu »36.
32
Source : SOULAGEON S., l’OPAH-RU, un outil pertinent pour le centre ancien de Romans-sur-Isère ? (mémoire de Master 1), IUL, 2008 33
Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004 (p.65) 34
Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004 (p.65) 35
Théorie des lieux centraux de Walter Christaller 36
MONNET J. Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.400)
52
Mis en avant par Yves Chalas, il existe de nos jours un réel décalage dans les
représentations entre la « ville d’hier »37 et la « ville émergente »38 ou « ville
contemporaine »39, et cela se décline notamment par rapport aux centralités d’hier
(centralité historique) et aux centralités émergentes (nouveaux pôles de centralité en
périphérie). Ce décalage de représentation avec la réalité d’aujourd’hui se focalisera donc
uniquement sur la centralité en traitant l’exemple de Romans-sur-Isère. Plus concrètement,
nous noterons vite un décalage de représentation du centre-ville qui se délimite au centre
ancien et qui ne correspond pas avec la réalité de la ville aujourd’hui. A Romans, il existe
une extension du centre-ville qui s’est développée hors des enceintes de la vieille ville, et qui
n’est pas prise en compte par les décideurs politiques en tant que centralité urbaine
globale. Cette définition élusive du centre-ville « réel » nuit d’une certaine manière à la
revalorisation du centre historique, et nous tenterons de le démontrer au cours de l’analyse.
Il existe donc un certain paradoxe de ce cas empirique : le centre historique est considéré
comme le centre-ville (selon les acteurs locaux) et pourtant le centre historique n’a pas une
dynamique de centralité urbaine, c’est-à-dire qu’il n’est pas considéré, à l’heure actuelle,
comme un pôle ayant « une efficacité d’attraction »40.
Le cœur du problème se décline alors de cette manière : Pourquoi existe-il une
représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine actuelle qui se focalise
uniquement sur le centre ancien? Et comment cette définition ambigüe et élusive du
centre-ville nuit-elle à la revalorisation du centre historique ?
La représentation de la centralité sera abordée selon le discours des décideurs
politiques et de l’action publique qui en découle. En complément d’autres éléments de
réponse seront abordés brièvement dans ce mémoire, comme le rôle de l’action publique
dans la création d’une dynamique de centralité (y’a-t-il une action publique suffisante pour
en faire un quartier inséré dans une dynamique de centralité?) ou les freins potentiels à une
action massive sur le centre ancien (Existe-t-il des freins (financiers, au niveau des outils) à
une action lourde sur le centre ancien ?). Mon hypothèse centrale sera celle de cette
37
Source : CHALAS Y., l’invention de la Ville, collection villes, Antropos, 2003 38
Source : CHALAS Y. L’invention de la ville, collection villes, Anthropos, 2003 39
Source : SECCHI B., (sous la direction de CHALAS Y.), L’imaginaire aménageur en mutation, (p.125) 40
Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004 (page 65 et 66)
53
définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine sur Romans comme échec de la
revalorisation du centre ancien.
Schématiquement, ma démonstration et le déroulement de mon argumentation
fonctionneront selon ce cadre d’analyse :
Cette argumentation sera expliquée et détaillée au cours du mémoire et sera
développée en trois temps :
Tout d’abord, il s’agit de dresser un constat actuel sur la complexité de la centralité à
Romans-sur-Isère : pourquoi existe-t-il un éclatement de la centralité, et une délimitation
imprécise du centre-ville, et comment cela se traduit-il sur le terrain ? Il s’agira aussi de
savoir comment le concept de « centralité » (pensée ici en terme « d’efficacité
Représentation de la centralité déconnectée avec
la réalité urbaine d'aujourd'hui.
Réalité: présence d'une centralité éclatée à Romans =
centre historique + autres centres porteurs de dynamisme
Définition et délimitation ambigüe et élusive du
centre-ville
centre-ville = centre historique
Focalisation de l'action publique sur le centre
ancien
Pas de dynamisme de centralité constatée sur
le centre historique.
Centre historique = quartier ancien dégradé
Parce qu’il y a Entraine
Entraine Conséquence
54
d’attraction »41 et « d’éléments d’influence »42) nous éclaire sur la différenciation de ces
centres (quelles formes de centralités abordent-ils distinctivement ?).
Malgré la diversité de ces « centres », il existe une focalisation toute particulière de
l’action publique sur le centre ancien. Cette focalisation est due à une représentation
déconnectée de la réalité urbaine d’aujourd’hui, à savoir qu’il y a une omission de
l’extension du centre-ville de Romans qui s’est pourtant réalisée hors des enceintes de la
vieille ville. Il s’agira de dégager les raisons de cette représentation qui définit et localise le
centre-ville uniquement sur le centre historique. Nous pourrons voir qu’il existe des raisons
considérées comme « classiques » (pour le dire simplement, dans « l’imagerie »43 que les
décideurs politiques ont des villes européennes, le centre-ville doit forcément intégrer ou
être localisé dans le centre historique notamment dû au phénomène de patrimonialisation
des centres historiques) et des raisons inhérentes à Romans (des freins propres qui
empêchent les élus communaux de penser le centre hors du périmètre du centre historique)
Enfin, cette représentation guide l’action publique et se focalise sur le centre ancien,
mais n’arrive pas à le faire sortir de son statut de « quartier ancien dégradé ». Et donc nous
essaierons de démontrer que cette pensée de la centralité, qui écarte les autres « centres »
relativement dynamiques de Romans, nuit à la revalorisation du centre historique romanais.
41
Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004, p.65 42
Source : GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004, p.65 43
Source : CHALAS Y. L’invention de la ville, Anthropos, collection Villes, 2003
55
Pourquoi y a-t-il une centralité éclatée à Romans-sur-Isère ?
Historique de la création de la ville et déplacement de la centralité au fil du temps
Un développement particulier de la ville
Tout d’abord, la ville de Romans s’est développée sur un site particulier: le « Romans
historique » s’est installé entre le bord de l’Isère et une montée topographique, ce qui fait
que le centre ancien actuel se trouve « coincé »44 entre ces deux éléments géographiques.
Cette caractéristique est considérée parfois, dans le discours des Romanais, comme un point
faible. Ce site d’origine a fait que la ville ne s’est pas développée autour du centre historique
mais au Nord de celui-ci.
La destruction des remparts a laissé place aux boulevards. Il commence alors à y avoir
une différenciation entre un haut et bas de la ville. La ville, devant s’adapter à l’utilisation
de la voiture à l’heure du fordisme, délaisse peu à peu l’utilisation du tramway, et
transforme sa principale place d’arme (l’actuelle place Jean Jaurès) en parking pour accueillir
les voitures des Romanais ou les véhicules des personnes venant travailler à Romans. La
coupure morphologique entre le bas de la ville, étant l’amende médiévale de Romans, et le
haut de la ville, étant l’extension de l’urbanisation du XIXe siècle et du XXe siècle, s’accentue
fortement.
Le centre historique n’est plus le centre à part entière
De manière générale, le centre historique peut « se confondre avec les autres
centres, ou en être complètement coupé, cela dépend en partie de sa dimension, et de la
croissance récente de la ville : à Reims ou à Toulouse a peu près tout le centre-ville se tient
dans le centre-historique, à Montpellier relativement peu de chose. Dans les villes
européennes, le centre historique lui-même comporte souvent deux parties : la cité,
éventuelle héritière de la ville romaine et qui associait le pouvoir ecclésiastique et le pouvoir
laïque ; le bourg, ville marchande ; cathédrale et palais dans l’une, hôtel de ville et beffroi
44
Source : Entretien avec Philippe Dresin, premier adjoint aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1
er juin 2010
56
dans l’autre»45. Contrairement à cette définition, le pouvoir religieux et le pouvoir laïque se
trouvent tous deux dans le centre ancien. Par exemple, la mairie s’est installée sur la place
Jules Nadi, espace public nouvellement crée à la place d’un couvent. Le pouvoir politique est
donc situé dans le centre ancien. Quant au patrimoine religieux, il est peu à peu habité par
des associations ou des activités de l’ordre du culturel : l’exemple le plus frappant étant celui
du Musée de la Chaussure installé dans l’ancien Couvent de la Visitation. Malgré ces
quelques fonctions phares du centre ancien, pouvons-nous dire que la centralité se trouve
encore dans le centre ancien ? Pour répondre en partie à cette question, penchons nous
plus amplement sur la définition de centre-ville qu’en fait Pierre George et Fernand Verger
dans le Dictionnaire de la Géographie: « A la notion descriptive de centre s’associe celle du
noyau originel, historique et fonctionnel. Une série de termes homologues en langue
française et dans les langues étrangères européennes désigne la partie initiale de la ville, qui
monopolise d’une façon plus ou moins absolue les fonctions urbaines supérieures : activités
politiques et administratives (spécialement dans les capitales), activités bancaires, activité
de gestion commerciale, agences de voyage et équipement de grand tourisme, centre
culturel, commerce de détail des produits et objets de luxe, services « rares » (professions
libérales, cabinets d’affaires et de consultation juridique, cabinets médicaux de spécialistes,
etc.).*…+ Les difficultés croissantes de développement des fonctions de centres conduisent à
diverses opérations spontanées ou dirigées : démultiplication du centre, par création de
centre-relais qui attirent les fonctions centrales les plus nouvelles, décentralisation par
redistribution des fonctions « centrales » en divers points de la ville et même de
l’agglomération *…+ Souvent difficile d’accès par les moyens de circulation désormais en
usage, il (le centre historique) devient un isolat, une aire historique, une manière de musée
urbain réservé au tourisme et à un petit nombre de résidences traditionnelles »46. Certes, le
centre ancien romanais détient certains atouts « centraux » comme le fait qu’il reste encore
aujourd’hui le centre culturel, historique et politique de Romans. Néanmoins, il trouve son
inadaptation à l’évolution moderne de la société, notamment par rapport à l’utilisation de la
voiture et à la non-mise en norme du confort standard qui est demandé aujourd’hui dans les
logements. D’autres parties de la ville, et notamment l’extension du centre-ville, ont pu
accueillir ces nouvelles normes et adaptations de la ville moderne et contemporaine. 45
BRUNET R., Les mots de la géographie, dictionnaire critique, la Documentation française, Collection dynamiques du
territoire, 1992 (page 96) 46
GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 2004 (page 66)
57
Rappelons que la ville de Romans s’est développée au Nord en étendant des faubourgs
hors de ces enceintes. Ensuite, quand les murailles cerclant la vieille ville furent détruites en
1832, le principal faubourg, édifié majoritairement au XIXe siècle et situé sur une zone plane
et en hauteur par rapport au centre ancien, prit de l’importance avec l’installation de
commerces de proximité, la présence du tramway ou encore son adaptation progressive à la
voiture. Ce faubourg sera plus tard appelé par les Romanais l’espace des « Boulevards »
(voir carte page suivante), et demeure encore aujourd’hui un lieu de vie à part entière des
Romanais. Puis, l’urbanisation se développa de manière exponentielle encore et toujours au
Nord du centre ancien.
Nous pouvons alors placer ce que j’ai appelé le point « imaginaire » de la centralité sur
la place Jean Jaurès (qui fut une ancienne place d’arme et où est installé actuellement le
parking principal de la ville). Nous appelons la Place Jean Jaurès point « imaginaire » de la
centralité car cette place est plus considérée comme une coupure entre le « haut et le bas
de la ville » qu’un espace reliant ces deux centres. Toutefois, la centralité se déplaça donc
peu à peu au Nord et ne se situe définitivement plus dans le centre ancien. C’est à la fin des
années 1990, avec l’ouverture de Marques Avenue, une ancienne caserne militaire
réhabilitée et où furent installés, dans une grande opération de renouvellement urbain, de
nombreux magasins d’usine de vêtements dans ces nouveaux locaux, que la centralité se
déplaça à nouveau, toujours plus au Nord du centre ancien mais aussi plus à l’Est.
58
Figure 9 Carte illustrant de manière schématique le déplacement de la centralité au fil du temps
La redistribution des fonctions centrales, notamment commerciales, s’est effectuée à
la fois hors des enceintes de la vieille-ville et proche de celles-ci. Il ne s’agit donc pas
réellement de la création de « edge-cities », mais d’une centralité déplacée et proche tout
de même de son noyau originel.
Ce déplacement de la centralité et l’éclatement des divers centres à Romans ont pour
conséquence un véritable impact psychologique. Quand on fait l’expérience auprès des
Romanais ou même des techniciens de la mairie ou de la CCPR en leur posant la question
triviale « où est le centre ville de Romans? », des réponses très disparates apparaissent,
d’autres répondent avec franchise qu’ils ne savent pas (par exemple Jean Decauville,
responsable de l’équipe de l’animation de l’OPAH sur Romans et Bourg-de-Péage, avoue à
propos de la localisation du centre-ville de Romans que « c’est vrai qu’on a du mal à le
déterminer »47) ou qu’il n’y en a tout simplement pas.
47
Entretien avec Jean Decauville, responsable de l’équipe de l’animation de l’OPAH Romans et Bourg-de-Péage, le 8 avril 2010
59
Cependant, une division géographique entre le haut et le bas de la ville s’institue
dans les consciences. Dans de nombreux entretiens réalisés en 2009 par Céline Boudet, une
concurrence entre les commerçants du haut et ceux du bas se fait ressentir comme l’illustre
les citations suivantes de trois commerçants différents : « la mairie s’obstine avec le Romans
historique, le bas de la ville. Ils investissent beaucoup dans ce secteur, tout ce qui est du côté
de Saint Barnard, Saint Nicolas, la rue Pêcherie… » ; « Tout se passe toujours en haut de la
ville » ; « rien ne nous fait travailler tout est en bas » ; « nous sommes le boulevard des
oubliés »48. Il existe donc des animosités des commerçants du « haut de la ville » concernant
la focalisation des aides publiques sur les commerces du centre ancien (avec le Fisac
principalement) et des animosités des commerçants du « bas de la ville » concernant la
meilleure visibilité et une certaine facilité d’accès des commerces des boulevards.
Aujourd’hui, il manque une réelle lisibilité urbaine qui nous permettrait de constater
un centre-ville uni à Romans-sur-Isère. « Les Romanais n’arrivent pas clairement à identifier
le morceau de ville qui fait centre-ville. »49 avoue un technicien de la ville de Romans. Au-
delà de ce sentiment qu’il n’y a pas ou qu’on a du mal à déterminer le centre-ville romanais,
c’est le centre ancien qui pâtit encore plus de cette non-visibilité. L’agencement de la ville
fait que les touristes ont parfois du mal à s’y retrouver comme l’explique la directrice de
Marques Avenue : « il y a un haut et un bas de la ville, je l’ai ressenti quand je suis arrivée et
les clients pour ceux qui connaissent le bas de la ville, le centre historique, ça va ils ne sont
pas trop perdus. Pour les gens qui ne sont pas d’ici ils ont parfois du mal et certains ne
trouvent jamais le centre historique. C’est vrai que c’est compliqué pour y accéder, c’est en
contrebas et, avec cette artère qui traverse la ville, le bas de la ville on y va moins souvent. Il
faut rester très attentif à ces commerces car ils sont en grande difficulté *…+ ce sont des
commerces indépendants et quand ils commencent à prendre l’eau, ils sont tous seuls »50.Ce
constat est donc plutôt alarmant : les élus locaux veulent faire du centre ancien le fer de
lance de la reconversion de la ville et le mettre en avant pour changer l’image de Romans,
48
Source : propos recueillis par BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009 49
Source : Entretien avec Eric OLIVIER-DRURE, responsable du service des archives de la ville de Romans, le 18 mars 2010 50
Source : propos recueillis par BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009
60
mais, actuellement, il existe un certain désamour de certains Romanais pour ce centre
historique et les touristes ou les promeneurs n’arrivent pas à le trouver.
Comment le rayonnement lié au concept de centralité peut-il éclairer la complexité
morphologique des centres à Romans-sur-Isère ?
Complexité morphologique des « centres » de Romans et leur rayonnement
à des échelles différentes
« Un centre est habituellement identifié comme un lieu spécifique, caractérisé par un
ensemble de facteurs qui le distinguent d’autres lieux avec lesquels il est dans une relation
dominante suivant différentes échelles de mesure de sa « supériorité » : les surfaces y sont
plus chères parce que la concurrence pour les obtenir est plus grande, il est le siège du
pouvoir parce que les acteurs principaux de la décision s’y localisent, il concentre les usagers
parce qu’il offre différents bien et services qu’ils recherchent, et vice-versa. Ces échelles de
mesure et de valeur sont celles de centralités différenciables, que l’on peut catégoriser de
diverses manières à l’échelon intra-urbain »51. Cette définition nous permet de dissocier
« centre » et « centralité » : à Romans il y a des centres dissemblables ayant une
« centralité » différente, c’est-à-dire des fonctions centrales distinctes pour chacun des
centres.
Nous nous posons les questions suivantes pour les différents espaces centraux que
nous avons délimités, à savoir Marques Avenue, l’espace des boulevards et le centre ancien:
Quelles fonctions de centralité assument-ils ? Y’ a-t-il une bonne accessibilité, une bonne
attractivité des commerces, la présence de services, une influence territoriale ? Voici une
carte des centralités différenciés de Romans (page suivante) qui permettra d’illustrer
l’explication qui va suivre.
51
MONNET J., Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (page 401)
61
Figure 10 Carte de la centralité à Romans: des centres différenciés?
62
Il existe donc bel et bien une centralité effective à Romans mais nous pouvons dire
qu’il y a une différenciation des pôles de centralité distincts avec un rayonnement très
différent de l’un à l’autre :
- Marques Avenue : est le pôle commercial régional. Marques Avenue est considéré
comme la « locomotive commerciale » de Romans en accueillant 1,5 millions de
visiteurs par an. Marques Avenue a permis de pérenniser une certaine clientèle qui ne
venait à Romans que pour la chaussure de luxe, cet espace a uniquement une fonction
commerciale. Néanmoins, Marques Avenue ne fait pas partie du centre-ville selon les
Romanais, mais est considéré comme tel par les non-Romanais. Et pourtant, Marques
Avenue reste le grand oublié du centre-ville, ou de ce qu’on pourrait appeler le
« projet centre-ville » qui se dessinerait dans le long terme. De manière descriptive,
Marques Avenue peut faire penser à un centre commercial périphérique notamment
avec la présence de nombreux parkings pour accueillir les personnes venant de
l’extérieur (voir photo ci-dessous), même si Marques Avenue n’est pas constitué en
tôle comme la plupart des centres commerciaux situés en entrée de ville (beaucoup de
personnes reconnaissent que Marques Avenue est un centre commercial agréable
avec une certaine qualité architecturale).
Figure 11 Marques Avenue, Avenue Gambetta à Romans
63
Rappelons tout de même qu’il était stratégique d’installer Marques Avenue vers
le centre et que « le projet semble aussi avoir confirmé le potentiel d’attractivité
attendu, non seulement en termes de fréquentation, mais aussi en termes de
redynamisation de l’activité commerciale du centre-ville »52. Ce qui semble assez
étrange c’est que la volonté stratégique de placer Marques Avenue proche du centre-
ville (c’est-à-dire en quasi continuité de l’espace des boulevards et à 800 mètres du
centre ancien) ne l’inclut pourtant pas dans le futur « Management de centre-ville ».
Les raisons de cette omission seront expliquées un plus tard au cours de l’analyse.
- Les boulevards : représentent le centre réel des Romanais avec des
commerces de proximité, des enseignes commerciales locales et nationales, mais aussi
de nombreux logements dans des bâtiments pour la plupart construit au XIXe et
jusqu’à la moitié du XXe siècle. C’est donc un espace urbain mixte puisqu’il accueille
aussi des équipements importants comme le collège et le lycée principal de la ville.
Cet espace répond d’une certaine manière à une centralité de ville moyenne avec un
rayonnement qui se limite à l’étendue de la ville. Cet espace est souvent cité comme
étant « L’espace vécu » des Romanais, même s’il ne fait pas l’unanimité lors des
entretiens ou des enquêtes précédentes, cet espace reste largement cité par les
Romanais comme étant pour eux l’espace le plus « central » de la ville.
- Le centre historique : au niveau commercial, il détient des enseignes
commerciales locales qui n’ont pas un rayonnement fort, à part pour certaines qui ont
une clientèle de «connaisseurs». Cette aire urbaine historique détient un
rayonnement touristique plutôt faible (à part pour les journées du patrimoine et pour
le Carnaval53 où le centre ancien sert de « décor urbain ») aux grands regrets des élus
locaux. C’est aussi le centre administratif et associatif de Romans. Le centre
historique a une mixité de fonctions, même si le logement a connu une forte vacance
jusqu’au début des années 2000 (19,6 % en 1999). Le centre historique connaît aussi
52
Source : MALBOSC F., Du développement économique au renouvellement urbain ? à propos de l’implantation de Marques Avenue, Les cahiers du DSU, décembre 2001, page 62 53
Les participants non-Romanais du Carnaval de Romans de l’année 2009 étaient d’origine de communes départementales voisines pour 73 % d’entre eux, 10% sont issus de la région, 17% proviennent d’un périmètre plus large (source : BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009
64
des problèmes socio-économiques forts. Ce quartier est parfois dénigré par les
Romanais eux-mêmes, notamment à cause des problèmes de délinquance et du
sentiment d’insécurité qui en découle, comme l’exprime le responsable du service
Réglementation et Tranquillité publique : « Nous avons affaire à une délinquance
jeune qui crée un trouble dans le centre ancien. Le moindre fait dans les petites rues
du centre ancien est amplifié, notamment au niveau du bruit ou du désordre général.
Dans le centre ancien, nous ne sommes pas dans les mêmes problématiques que le
quartier de la Monnaie où il y a de grands espaces ouverts. En plus, l’obscurité tombe
plus vite dans les ruelles du centre ancien, qu’ailleurs dans la ville, car le bâti est plus
dense et les ruelles plus étroites »54. La coprésence de cette petite délinquance et des
commerces locaux que l’on veut redynamiser fait du centre ancien le quartier « le plus
problématique »55. Rappelons que « L’habitat ancien des quartiers centraux offre un
ensemble de perceptions qui concernent la matérialité de l’environnement urbain
comme ses caractéristiques sociales. En caricaturant, une rue étroite et un peu hors des
flux avec quelques commerces et des façades travaillées est l’idéale pour développer
des perceptions villageoises ou communautaires. Encore faut-il que les usagers aient
un comportement qui aille dans le même sens : s’ils sont agressifs, fermés ou
compassés, le perception risque d’être faussée »56. Ce centre historique ne
correspond pas au village idéal où la vie sociale n’est caractérisée que par la solidarité
et l’interconnaissance des résidents. Ce centre ancien est alors relégué au statut de
« quartier ancien dégradé ».
Enfin, « Force est de constater qu’à l’évidence la ville s’est étendue et contenue
de s’étendre toujours plus selon des critères et des contours qui ne sont plus de la ville
centre ancienne. Cette ville d’hier ne représente plus qu’une faible portion des
territoires urbains et surtout des pratiques urbaines habitantes »57. Pour le cas de
Romans, le centre historique n’est alors plus qu’une faible proportion du centre-ville.
54
Source : Entretien avec Franck Mallinjoud, responsable du service Règlementation et Tranquillité Publique de la ville de Romans, le 18 février 2010 55
Source : Entretien avec Franck Mallinjoud, responsable du service Réglementation et Tranquillité publique de la ville de Romans, le 18 février 2010 56
Source : BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés, n°132, 2008, (p.35) 57
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection (p.94)
65
Que ce soit pour les boulevards ou pour le centre historique, on reproche souvent à la
ville de Romans de ne pas avoir un centre-ville vivant en soirée et la nuit comme le rappelle
Nadège Gautier, chargée de la mission commerce et artisanat de RBE : « la vie nocturne est
au point mort, cela est aussi dû au fait que Romans n’est pas une ville étudiante »58.
Enfin de compte, Ces différents centres ont certaines fonctions de centralité mais ils
restent chacun d’entre eux incomplets et ne répondent pas à tous les objectifs d’un centre-
ville « complet » et dynamique.
Malgré la présence d’autres « centres » dynamiques et à proximité du centre ancien, il
y a une action publique qui est uniquement menée sur le centre ancien, pourquoi ?
La partie suivante abordera plus amplement les « représentations » de la centralité
urbaine et pourquoi cela influe sur une définition ambigüe de celle-ci, à Romans.
58
Source : Entretien avec Nadège Gautier, chargée de la mission commerces et artisanat de RBE, le 14 avril 2010
66
Une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine
Une conception européenne du centre-ville, intégrée dans « l’imagerie »59
des décideurs politiques
Avant de rentrer dans le détail des raisons qui font que les décideurs politiques ont
une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine, qu’entendons-nous
par imagerie ?
L’imagerie ancrée dans le discours et l’action des décideurs politiques
L’imagerie que définit Yves Chalas nous éclaire grandement sur ce qui se passe à
Romans : « L’imagerie est constituée pour l’essentiel de trois composantes majeures.
Premièrement, d’illusions tenaces et de contrevérités qui, malgré les réfutations successives
par l’épreuve des faits ou les progrès de la pensée, continuent d’animer la démarche
urbanistique et de la légitimer. Deuxièmement, de réflexions sérieuses qui ont eu leur
moment de gloire non usurpée, qui étaient de ce fait utiles à l’urbanisme, mais qui, le temps
et surtout l’évolution des données faisant leur œuvre, ne servent plus guère à grand-chose.
Ces théories passées et dépassées se mettent alors à constituer un ensemble de certitudes
qui encombre, qui n’a plus de rapport avec la réalité, et va à l’encontre même des
observations effectuées sur le terrain urbain et des pratiques effectives de l’urbanisme sur
ce même terrain. Troisièmement, de vrais problèmes, mais qui ne trouvent pas de solutions
compte tenus de la manière dont ils sont posés »60. Ici, les trois composantes de l’imagerie
s’applique à Romans et se décline de cette manière: premièrement, dans l’imaginaire des
décideurs politiques le centre ancien est le centre-ville, or cette vision ne prend pas en
compte l’extension du centre-ville qui s’est opérée dès le XIXe siècle. Deuxièmement, la
vague de patrimonialisation du cadre bâti et de réhabilitation opérante depuis la loi Malraux
et qui a connu un large engouement à cette époque, est encore à l’œuvre dans le centre
ancien romanais. Et enfin, troisièmement, s’effectue une observation sur la centralité à
Romans des différents acteurs locaux qui est soit défaillante et involontaire (c’est-à-dire que
pour certains le centre-ville ne peut être que dans le centre ancien), soit omise et volontaire
59
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.88) 60
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.88)
67
(certains acteurs savent qu’il y a eu une extension du centre-ville mais l’omette car une
action sur l’ensemble du centre-ville serait trop compliquée ou coûteuse à réaliser).
A l’imagerie, Yves Chalas oppose l’imagination. On pourrait définir l’imagination
comme étant la réfutation des représentations intégrées dans l’imagerie, et proposent de
nouvelles manières de penser la ville. Rappelons que «la contradiction ou plutôt le couple
systémique que forment l’imagerie et l’imagination est transversal. Il est présent chez chaque
acteur et dans chaque secteur de l’urbanisme»61. C’est-à-dire que certains acteurs politiques
se rendent bien compte, lors d’entretiens approfondis, que le centre n’est plus dans le
centre ancien : « Enfin de compte, la colonne vertébrale de Romans est située sur les
Boulevards, au-dessus du centre historique »62. Pourtant, l’imagerie reste très présente dans
leur discours en faisant du centre ancien le centre-ville à part entière. Nous détaillerons
cette représentation par divers exemples plus tard dans l’analyse, et notamment à travers
un dispositif prochainement mis en place à Romans qui est celui du Mangement de centre-
ville.
Quelles représentations en découlent? Quel décalage de représentations s’effectue ?
Yves Chalas montre aussi qu’il existe de nouvelles centralités dans la ville-territoire,
c’est-à-dire les métropoles et leurs aires urbaines, qu’il y a eu, au cours du temps, création
de nouvelles centralités, c’est ce qu’on a pu appeler les edges cities63 (ville-lisère).
« Nombreux sont aujourd’hui les chercheurs ou les praticiens qui appellent de leurs vœux
l’invention de nouvelles façons d’appréhender les réalités urbaines sans cesse plus
complexes qui se développent sous nos yeux : Yves Chalas, par exemple, dans ses recherches
sur la « ville émergente », nous propose de nous débarrasser de l’imagerie qui a jusqu’à
présent guidé notre approche de la ville pour construire de nouvelles figures représentatives
qui permettent de rendre compte du développement sans précédent de la mobilité *…+ de
l’apparition à côté des centres historiques de nouvelles formes de polarités »64. Yves Chalas
rappelle qu’il ne faut pas négliger ces nouvelles centralités dans la culture urbanistique et ne
pas se donner comme seule référence le centre historique pour seul et unique centre qui a 61
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.89) 62
Source : Entretien avec Jean-David Abel, élu à l’urbanisme de la ville de Romans, le 3 mai 2010 63
Source : GARREAU, 1991 64
Source : NOVARINA G., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p. 67)
68
de la valeur. Ces nouvelles centralités sont des cœurs de vie pour beaucoup de
« territoriants »65. Rappelons aussi que cette conception reste très européenne
contrairement, par exemple aux conceptions américaines des villes car « La ville américaine
a moins de mépris que la ville européenne pour ses vastes périphéries flottantes »66 ou
encore il y a bel et bien une opposition entre « la ville européenne et la ville américaine –
l’opposition géométrique – la ville avec un centre et la ville sans centre, ou encore la
différence spatiale - la ville dense et la ville étendue »67.
Cette analyse se cale sur l’exemple métropolitain, ce qui ne concerne pas le cas de
Romans. Néanmoins, cette analyse permet d’utiliser une grille de lecture qui est applicable
pour Romans, dans le sens où il y a une réduction du centre-ville au centre ancien dans
« l’imagerie » ou « l’imaginaire » des décideurs politiques : cela est l’une des causes des
actions menées depuis plus de trente ans sur celui-ci. Cette conception de la centralité
provient des époques précédentes, ce n’est donc pas une vision construite par les décideurs
politiques actuels, mais plus une « imagerie » héritée et qui s’est perpétuée dans
l’inconscient collectif (aussi bien au niveau de certains techniciens, des associations que des
élus locaux). Est resté l’image de la ville du XIXe siècle, alors que le centre historique est
devenu qu’une simple partie du centre-ville. Il y a donc « omission » de cette extension de
la centralité actuelle. Des mécanismes de représentations s’enclenchent : les autres centres
sont considérés comme moins importants et secondaires par rapport au centre historique.
A travers l’action portée sur le centre ancien et « en dépit de la réalité du passé, la rêverie, le
désir même du village dans la ville persistent et se manifestent »68.
Les savoirs sur la ville qui émergent ou ont émergé il y a déjà quelques années (comme
pour la ville émergente d’Yves Chalas) ne sont pas toujours intégrées aux pratiques
professionnelles comme le rappelle Viviane Claude dans son ouvrage Faire la Ville : « Des
pratiques professionnelles sont ainsi exercées à partir des savoir d’hier, parfois des savoirs
65
Terme utilisé par MUNOZ F., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.83 et 88) : « Territoriante est dès lors la population métropolitaine qui grâce aux améliorations dans les réseaux et systèmes de transport et de télécommunications, peut participer à des activités différentes dans des lieux différents du territoire de manière quotidienne. Le territoriant a une présence multiple et variée dans l’espace métropolitain lui-même multiple et varié » 66
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.84) 67
Source : MUNOZ F., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.82) 68
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.99)
69
d’hier sur l’urbain d’hier. Cela tient autant à l’effet d’inégale distribution des connaissances
entre les praticiens, qu’à l’effet des générations et à la plus ou moins grande efficacité des
concepts dont le praticien dispose pour envisager son action. *…+ Savoirs et pratiques ne sont
donc pas synchrones, de même que l’urbain et le savoir sur l’urbain ne sont pas
synchrones »69. Cette réflexion s’adapte très bien à la situation romanaise et expose
l’entrecroisement de plusieurs raisons à ce décalage de représentations sur la centralité :
d’une part, les savoirs sur la ville-émergente ne sont pas intégrés dans les pratiques
professionnelles locales et, d’autre part, que de nouvelles formes urbaines émergent sans
que les chercheurs n’aient eu encore le temps de les analyser et de produire des écrits sur
celles-ci. Cela a donc pour conséquence que l’action sur l’urbain peut parfois être totalement
décalée et inadaptée par rapport à la réalité de la ville actuelle.
Pourtant, il est connu et reconnu que « les résultats des analyse empiriques, au fond ne
surprennent guère, mais permettent de rogner les ailes à quelques mythes et projections
simplistes. Certes, le modèle monocentrique appartient au rayon des accessoires démodés ;
le desserrement des populations et des activités est à peu près partout évident »70. Ce
discours là reste très enfoui dans la pensée des décideurs politiques, la vieille-ville comme
centre-ville reste la représentation la plus prégnante dans l’imaginaire des élus locaux. Il
existe donc un décalage entre le désir politique et la réalité de la ville aujourd’hui. Dans les
priorités politiques les plus importantes et les plus citées pour Romans est de faire du centre
ancien un espace redynamisé beau et concourant à l’image de Romans, malgré des moyens
limités. Est affichée une certaine volonté dans le discours politique d’avoir un patrimoine
bâti et historique connu de tous et pas seulement reconnu par les professionnels et les
techniciens et d’aller à l’encontre d’un certain « désamour » des Romanais pour ce centre
ancien.
69
Source : CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle (p. 235) 70
Source : COFFEY W., MANZAGOL C., SHEARMUR R., Centralités métropolitaines, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.279)
70
Le Mangement de centre-ville : un nouvel outil illustrant ce décalage de représentations
Le Mangement de centre-ville est un exemple de la constitution d’un outil et d’une
future gouvernance partagée publique/privée qui a pour objectif de redynamiser le centre-
ville. A l’origine, cette opération préalable à la création du Management de centre-ville a été
menée par RBE, comme le raconte Nadège Gautier, chargée de la mission commerce et
artisanat : « Est en cours d’étude sur Romans ce qu’on appelle « une gestion centre-ville ».
C’est une opération de Mangement de projet de centre-ville suivie par Pierre Francis,
membre de l’AMCV (Association du Mangement de centre-ville). Cette association belge
promut un partenariat public-privé favorisant la coopération de tous les acteurs du centre-
ville (que ce soit des élus, des commerçants, des personnes travaillant dans le tourisme,
l’animation culturelle etc.) et que cette coopération permettrait de créer une forme de
développement économique et social au sein de la ville. Dans l’Idéal, ce regroupement serait
transversal et neutre (partage des pouvoirs, avec souvent la maire comme président,
l’adjoint étant un commerçant) et pourrait permettre un financement qui se composerait de
50% de fonds publics et 50% de fonds privés. Mais cela, est rarement le cas, l’investissement
public est souvent bien plus important ».71 La personne membre de l’AMCV a rencontré
nombre d’acteurs, mais a surtout été cadré par l’élu romanais chargé du commerce dans le
centre ancien, et par ce biais, il s’est donc largement imprégné de la priorité politique de la
ville de Romans de faire du centre ancien un espace dynamique et central. D’où la
conclusion que « pour ce qui est de Romans, Pierre Francis pense qu’il faudrait partir d’un
périmètre de centralité restreint (c’est-à-dire, délimiter un périmètre englobant la rue
Mathieu-de-la-Drôme, la place Maurice Faure et la côte des Cordeliers) »72.
Le résultat actuel est que ce nouvel outil de gouvernance et de redynamisation du
centre-ville se focalise uniquement sur le centre ancien, et a en évincé les acteurs privés
des « autres centres » dynamiques romanais au fur et à mesure des réunions publiques.
Les commerçants des boulevards déçus de voir qu’on revenait toujours au centre ancien,
s’éclipsent dès la fin de la première réunion publique. Marques Avenue n’étant pas présent,
est exclu même des pensées. Dans ce cas, sont exclus les facteurs dynamiques des
Boulevards et de Marques Avenue, comme si « l’observation ne peut donc être basée que sur
71
Source : Entretien avec Nadège Gautier, chargée de mission commerce et artisanat à RBE, le 14 avril 2010 72
Source : Entretien avec Nadège Gautier, chargée de mission commerce et artisanat à RBE, le 14 avril 2010
71
un simple recueil de données (qualitatives ou quantitatives), car elle suppose un choix, qui est
établi en fonction d’intentions initiales qui sont construites à partir de représentations que
l’on s’est forgée au préalable »73. L’idée et la représentation que le centre-ville se délimite
au centre ancien se perpétue donc même dans les outils qui ne se veulent pas uniquement
publics mais de l’ordre du partage des pouvoirs entre le public et le privé.
Les raisons de cette focalisation sur le centre ancien
Des raisons « classiques »
J’entends par «raisons classiques» des raisons de la focalisation de l’action publique
sur les centres historiques diffusées largement en France et en Europe et pas seulement sur
Romans.
Le centre historique est considéré comme une « aubaine » pour se reconvertir après la
crise industrielle de la chaussure et du cuir à Romans. Il y a donc une patrimonialisation du
centre ancien romanais qui est, en réalité, assez classique après la crise d’une ville en quasi
mono-activité. Comme expliqué dans le rapport de stage, la reconversion de Romans se fait
par la culture ou par la valorisation du patrimoine74 .
Romans peut être désignée comme ce qu’appelle Max Rousseau une ville
perdante : « Le terme de villes perdantes vise à illustrer le fait que les bouleversements
sociaux, économiques et politique survenus depuis une trentaine d’années en Europe ont
entrainé une redistribution des cartes qui a bénéficié à certaines villes ou types de villes, mais
a également rendu certaines largement perdantes : parmi celles-ci, les villes portuaires et les
villes les plus anciennement industrialisées sont les plus touchées. Nous définirons les villes
perdantes comme possédant deux types de problèmes : l’un objectif, l’autre subjectif *…+ Les
villes se caractérisent par des taux relativement élevés de phénomènes habituellement
perçus comme problématiques : chômage, faible qualification de la population, insécurité,
part importante de la population âgée, multiculturalisme *…+ Un autre type de problème
subjectif qui découle de ce premier tout en étant distinct : elles (les villes perdantes) ont
73
Source : NOVARINA G., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (P ;71) 74
Source : ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement
urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008
72
mauvaise presse, une mauvaise image, bref, les représentations que l’on s’en fait, dans les
milieux dominants tout au moins, sont souvent négatives »75. Romans rentre parfaitement
dans cette description de la ville perdante. Alors, advient que « le plus important pour
l’image de la ville est la requalification du centre-ville »76 et donc le centre ancien pour
Romans. « La requalification du centre-ville passe par la mise en valeur, par les services de
l’urbanisme et de la communication, du patrimoine de la ville »77. Nous pouvons faire le
parallèle avec la ville de Roubaix qui a développé, comme à Romans, depuis la crise
industrielle, une patrimonialisation accrue de son tissu urbain78. Roubaix a réhabilité son
patrimoine industriel en créant une ZPPAUP, instauré une opération façades, obtenu le label
« Ville d’Art et d’Histoire » ainsi que mis en place des associations culturelle et artistiques
visant la revalorisation de Roubaix. Les mêmes outils ont été mis en place à Romans (sauf le
label « Ville d’Art et d’Histoire », pourtant désiré par les élus locaux), bien que ce
phénomène de patrimonialisation ne se soit pas tourné vers son patrimoine industriel mais
vers son centre historique. Nous pouvons alors dresser le constat que Romans suit un
schéma assez classique de patrimonialisation79 après une crise industrielle profonde.
La centralité est donc vue à travers le prisme du patrimoine historique et bâti, et de
ce fait déforme ce qu’est réellement le centre-ville. Globalement, « la culture urbaine
classique qui est la nôtre, en Europe notamment, associe, confond parfois, purement et
simplement, centralité et patrimoine, et de ce fait nous empêche de percevoir les centralités
nouvelles »80.
Pourtant, Romans ne détient que peu de monuments historiques, mais les élus locaux
misent plutôt sur un tissu urbain ancien, des rues étroites, un parcellaire morcelé ou encore
une typologie des habitations. En France, nous sommes assez en retard par rapport à
d’autres pays européens pour protéger ces tissus urbains anciens, comme le rappelle
Françoise Choay : « Ainsi Ruskin fut le premier à dire la valeur et à promouvoir la
75
Source : ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.77) 76
ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.80) 77
ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.81) 78
ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 79
Patrimonialisation : reconnaissance des instances compétentes de la valeur du patrimoine présenté 80
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.117)
73
conservation d’un héritage modeste, celui des architectures domestique et vernaculaire qui
constituent en particulier, le tissu des villes anciennes. Quant aux Italiens, dans le sillage
tracé par Giovannoni, ils furent les premiers, après la guerre de 1914, à considérer les villes
anciennes comme des monuments historiques à part entière. En France, il a fallu attendre
1964 pour voir promulguer le décret d’application de la loi du 4 août 1962 sur les secteurs
sauvegardés, dite loi Malraux 81». C’est seulement depuis les années 1970 que « les
politiques de protection du patrimoine sont devenues les instruments privilégiés de la gestion
urbaine dans les espaces bâtis ayant plus d’un siècle d’âge »82.
Une échelle de valeurs du patrimoine se dessine alors. Cette échelle de valeurs ne se
fait pas forcément selon l’ancienneté du patrimoine, mais du goût de l’époque : « à côté de
la valeur pour l’histoire de l’art que possèdent à nos yeux toutes les œuvres d’art
(monuments) anciennes, sans exception, il existe manifestement une valeur purement
artistique, indépendante de la place qu’occupe l’œuvre dans le développement de
l’histoire »83 . Et, « chaque lieu est source de représentations mentales qui incluent des
jugements de valeur par rapport à des référents culturels au sens le plus large, faisant appel
à l’esthétique, à l’histoire, au pouvoir, au prestige »84. Dans le discours des élus romanais, le
patrimoine trouve sa valeur dans sa rareté, c’est-à-dire que plus il est ancien, plus il est rare,
précieux, et donc à en prendre soin voire à revaloriser. C’est le cas du centre ancien
romanais.
Durant les entretiens, cette échelle de la valeur patrimoniale de la ville se décline sur
les différents centres romanais : ce qui est plus ancien détient une valeur supérieure car
considéré comme plus rare. Le centre ancien est classé en ZP1 dans la ZPPAUP de Romans,
des normes strictes y sont incluses et une protection accrue est mise en place sur ce centre
historique à travers cette réglementation. L’espace des boulevards est classé en ZP2, des
normes architecturales y sont incluses mais sont bien moins strictes que sur le centre ancien.
On veut donc insister sur les particularismes du centre ancien et les protéger, à savoir ce
81
Source : CHOAY F., Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p.21) 82
MONNET J. Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.409) 83
Source : CHOAY F. (texte fondateur de RIEGL A.), Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p .165) 84
Source : BOURDEAU-LEPAGE L., A la recherche de la centralité perdue, Revue d’Economie Régionale et Urbaine, 2009 (p.6)
74
qu’on peut appeler « le non-rectiligne, le non-uniformisé, l’importance du recoin, des
bizarreries de l’histoire architecturale, des décors et des normes successives accumulés en un
même lieu. Bref, tout ce que n’ont pas, encore, les cités périphériques réhabilitées et qui fait
des vieux centres des espaces uniques, singuliers, originaux, qui développent un fort
sentiment d’attachement et rendent plus aisée l’appropriation »85. Agir sur le centre
historique c’est aussi une façon de ne pas vouloir l’uniformité, l’indifférenciation, la
banalité, la non-animation des autres morceaux de la ville, et encore plus l’urbanisme de
catalogue86 des quartiers résidentiels périphériques.
Le centre historique peut-être utilisé comme facteur identitaire pour une ville, et cela
se retrouve par exemple dans le discours de Jean-David Abel, élu à l’Urbanisme de la ville de
Romans : « le centre historique est un facteur d’identification dans le sens où quand on se
trouve dans un centre historique on peut dire, selon la morphologie, le bâti, l’architecture les
matériaux le mobilier urbain, dans quelle ville nous sommes. Car aujourd’hui, on note une
certaine homogénéisation des modes de faire de la ville (au niveau de la forme adoptée, des
matériaux utilisés) dans des quartiers récents. Ces quartiers plus récents ne participent pas à
l’identification de la ville ». Il est donc bien questions que « le centre historique de la ville
patrimoniale est un vecteur de l’identité urbaine »87. L’évolution moderne et contemporaine
de la ville a fait que « jusqu’alors, la maîtrise de la mobilité générale a été avant tout
recherchée dans le passage à des échelles supérieures suivant l’élargissement sans fin du
modèle centre-périphérie et de ses couronne, faisant disparaître la variété croissante des
centralités. Le résultat est catastrophique, il mène à la rupture de l’identité »88, ce qui doit
être évité selon les acteurs politiques locaux. On veut insister sur la rareté des biens
immobiliers du centre ancien, une façon de faire l’habitat qui n’existe plus aujourd’hui avec
par exemple les hôtels particuliers (photos page suivante).
85
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.52) 86
Source : BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.32) 87
Source : WATREMEZ A., L’entretien itinérant : pour une construction d’un dispositif méthodologique de narration des habitants dans la ville patrimoniale, Etudes de communication, n° 31, 2008, (p 78) 88
Source : BEAUCHARD J. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p. 119)
75
Figure 12 Quelques images des hôtels particuliers dans le centre ancien romanais (photos prises par Marisa JULIEN)
Ce sont des biens immobiliers qui sont très rares au niveau régional voire national, et
certaines associations et certains élus romanais essaient de communiquer sur ceci pour
refaire prendre goût aux Romanais de cette richesse patrimoniale.
Une certaine mise en scène du centre ancien se réalise à travers l’animation
culturelle. Le meilleur exemple est celui du Carnaval de Romans en février. Le tissu urbain
du centre ancien est alors exploité lors de ces festivités. Paul Claval nous explique en ces
termes les atouts de la ville ancienne : « les avantages de la concentration ne sont pas tous
économiques. La réunion de foules nombreuses permet l’éclosion de formes de sociabilité
spécifique des grands nombres. Les sensibilités sont alors exacerbées, des mouvements
d’entrainement collectif se dessinent. Cela donne aux manifestations religieuses, aux
rassemblements politiques ou aux fêtes une dimension qu’elles ne peuvent connaître
lorsqu’elles ne réunissent pas d’effectifs suffisants »89. Le centre ancien est propice à ce type
rassemblement festif. Derrière cet événement festif, il y a une volonté politique que les
Romanais se réapproprient le centre historique, et de le faire découvrir aux autres
personnes qui viennent assister au Carnaval de Romans.
89
Source : CLAVAL P., Réflexions sur la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.287)
76
Figure 13 Le carnaval de Romans, le 27 février 2010 (Photos prises par Marisa JULIEN)
Le jour du Carnaval c’est plus de 15 000 personnes qui investissent le centre-ville,
associations, spectateurs, carnavaliers, promeneurs, touristes, et ce, en plus des habitants
présents à l’année tels que les commerçants et les résidents90. C’est une stratégie des élus
locaux que d’utiliser ce charisme historique du centre ancien lors de ce jour de festivité,
comme le raconte un bénévole : « cette année le défilé est parti place Jules Nadi, on a pris le
centre ancien, jusqu’à Jean Jaurès. Comme le centre historique est resserré, il y a cet effet de
masse qui est sympathique »91.
Rappelons qu’il est parfois difficile pour les élus locaux de sortir de cette conception
européenne de la centralité urbaine, notamment pour les villes moyennes, car agir sur le
centre historique pour le revaloriser c’est aussi trouver une reconnaissance, une image
renouvelée, un certain dynamisme avec l’arrivée du tourisme, c’est aussi retrouver une
sorte d’épaisseur historique de la ville. Et c’est « après des décennies de politiques du
monument saisi hors contexte, les actions ont intégré l’alentour de l’objet revitalisé *…+ Des
centres historiques tombés dans l’oubli sont maintenant territoires de reconnaissance »92.
« Si les bâtiments sont sans intérêt particulier, leur organisation d’ensemble est celle de la
ville traditionnelle »93, et c’est sur cette option-là que les élus romanais misent leur
programme politique.
90
Source : BOUDET C., Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009 91
Source : propos recueillis par BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009 92
Source : COLIN-DELAVAUD A., HERSCHON J-C, ORELLANA L., Dossier: nouvelles formes d’intervention dans la gestion du territoire patrimonial urbain, l’information géographique n°2, 2006 (p.6) 93
Source : CHARMES E., Le retour à la rue comme support de la gentrification, Espaces et société, 2005 (p.127)
77
Sortir de cette conception européenne de la centralité urbaine est d’autant plus
difficile dans un contexte où la patrimonialisation est recherchée aussi pour avoir une plus-
value financière et pour faire-valoir une image qualitative et spécifique de la ville (avec
l’exemple du label Villes d’Art et d’Histoire). Enfin de compte, les élus locaux essayent
d’arriver à obtenir l’image de la ville patrimoniale à travers le centre ancien romanais : « la
ville patrimoniale est dotée d’un centre historique considéré comme un secteur présentant un
caractère historique, esthétique ou de nature à justifier la conservation, la restauration et la
mise en valeur. Son tissu urbain est hérité des villes médiévales, il est constitué de rues
étroites, d’une certaine hauteur des bâtiments, et de l’omniprésence du patrimoine. *…+ Ces
villes donnent à voir ce patrimoine, le médiatisent à travers de nombreux dispositifs, dans le
cadre d’une politique touristique forte à travers des labels (Ville et Pays d’Art et d’Histoire,
Patrimoine mondial de l’humanité. Elles voient ainsi passer dans leurs murs des milliers, voire
des millions de touristes, et, parfois la cohabitation avec les habitants ne se fait pas en toute
sérénité »94, jusqu’à arriver à une pandémie patrimoniale95 européenne et de plus en plus
mondiale.
Il s’agit alors d’obtenir des retombées économiques et une image renouvelée avec
l’avènement du tourisme culturel. « Le tourisme culturel a pour objet l’élargissement des
horizons, la recherche de connaissances et d’émotions au travers de la découverte d’un
patrimoine culturel *…+. Il est visité in situ ou à travers des lieux de conservations (musées) ou
des événements (fêtes, festivals). Le tourisme culturel n’est pas exclusivement urbain, mais
ceux qui s’y adonnent sont presque exclusivement hébergés en ville, où se trouvent la grande
majorité des lieux visités »96 .Il s’agit d’atteindre l’objectif de reproduire ce qui a pu se passer
et fonctionner pour certaines villes patrimoniales car « les villes historiques ont bénéficié
d’un traitement de faveur, indissolublement lié au développement du tourisme »97 .
On peut se demander pourquoi, à l’époque actuelle, insiste-t-on autant sur le
patrimoine, et notamment sur le patrimoine bâti ? Dans nos sociétés européennes, il existe
94
Source : WATREMEZ A., L’entretien itinérant : pour une construction d’un dispositif méthodologique de narration des habitants dans la ville patrimoniale, Etudes de communication, n° 31, 2008, (p.77 à 78) 95
Source : COLIN-DELAVAUD A., HERSCHON J-C, ORELLANA L., Dossier: nouvelles formes d’intervention dans la gestion du territoire patrimonial urbain, l’information géographique n°2, 2006 (p.6) 96
Source : MERLIN P., Le Tourisme en France : Enjeux et Aménagement, ellipses, collection Carrefours, 2006, (p. 142) 97
Source : BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.29)
78
une certaine fétichisation du patrimoine98 qui est due à « une réaction passéiste et
nostalgique et qui érige en modèles des formes et des modes d’organisation qui, porteurs
d’une valeur mémorial, n’en sont point devenus anachroniques, alors qu’ils appelleraient une
continuation avec le cours de l’histoire »99. Nous sommes arrivés à « une nouvelle époque
pour laquelle l’avenir paraît obscur, plus lourd de menaces que gros d’espérances, et dans
laquelle le présent est souvent lu en termes de pertes de substance et de disparition des
qualités du passé »100. S’exerce un retour sur le passé comme valeur sûre, par appréhension
de l’avenir, l’urbanisme et l’aménagement sont des champs de l’action imprégnés de ces
nouvelles visions sociétales.
Des raisons inhérentes à Romans
Au-delà de ces généralités sur la patrimonialisation quasi unanime des centres
historiques européens, revenons au contexte local du cas romanais en rappelant qu’il existe
une réelle attache personnelle et presque intime et affective des élus vis-à-vis de ce centre
ancien. Nous pouvons distinguer deux explications à cet attachement : une avouée avec le
rôle pédagogique de l’historicité du centre ancien qui est souvent mis en avant par les
décideurs politiques (comme l’exprime Jean-David Abel : « il est du devoir des responsables
politiques de se charger du centre ancien car il y a un patrimoine fort, une certaine épaisseur
historique de ce quartier »101 ) et une moins avouée qui est un attachement « intime » des
élus au centre ancien. Par exemple, le centre ancien représente pour eux le lieu actuel
d’habitation ou pour ceux qui n’y habitent pas, ils ont le désir d’y habiter quand il sera en
grande partie réhabilité et quand la situation se sera améliorée.
Nombre d’acteurs font porter leur voix dans le centre ancien: des associations de
commerçants ou encore l’association de la sauvegarde du patrimoine romanais et péageois
interpellent souvent la mairie quant aux problèmes du centre ancien ou sont parfois force de
proposition pour le revaloriser. Ces acteurs font largement reconnaître qu’il faut mettre en
valeur l’historicité du centre et qui manque une mise en valeur de qualité concernant ce
98
Source : CHOAY F., Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p.35) 99
Source : CHOAY F., Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p.35) 100
GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.189) 101
Source : Entretien avec Jean-David Abel, élu à l’Urbanisme, le 3 mai 2010
79
domaine, comme le met en exergue ce président associatif : « A Romans y a beaucoup de
choses historiquement, y a une église romane la plus vieille de la région, si ce n’est de
l’Europe, il reste des bouts de remparts, y’a un beau centre historique, mais on en parle pas
beaucoup, ça manque un peu de mettre en valeur le patrimoine avec des associations, des
choses médiévales »102.
A Romans, il existe certains aménagements centraux qui ne voient pas le jour à cause
de blocages politiques successifs. Il suffirait de travailler sur les espaces publics, la
signalétique, une communication plus efficace etc. mais bien au-delà d’un problème de
représentation du centre-ville, la ville de Romans connaît ses propres limites pour penser
ces aménagements « centraux » et donc forcément considérés comme plus chers, plus
délicats à mettre en place. Comme nous l’avons pu l’expliquer plus amplement dans le
rapport de stage, il y a de réels problèmes de financement à Romans. Il plane toujours l’idée
dans les consciences de la possible mise sous tutelle de la mairie romanaise. D’autant plus,
que nous sommes actuellement dans un contexte de réductions budgétaires importantes au
niveau notamment de l’Urbanisme et des subventions données par l’Etat. A Romans, il y a
des actions publiques qui arrivent à des impasses successives car il existe « un certain
fatalisme à Romans »103 où les élus s’empêchent eux-mêmes de penser des aménagements
d’ampleur pouvant revaloriser le centre ancien ou le centre-ville, et notamment de penser la
centralité urbaine hors du centre ancien. Rappelons que, actuellement, « le spectre temporel
de nos projections politiques est limité et prudent »104. Ce constat général se trouve exact
pour Romans car c’est bien, par prudence ou par hésitation, que l’action publique se limite.
Néanmoins, bien que cette raison puisse être considérée comme inhérente à Romans,
il existe d’une manière générale ce que Philippe Genestier appelle un certain « scepticisme »
ou un « désabusement »105 quand à l’avenir qui se profile, dans notre « société
d’incertitudes »106. La société d’incertitudes « ce n’est pas seulement une société en manque
de réponses face aux problèmes qui se posent à elles. C’est une société qui en est à se
102
Source : Propos recueillis par BOUDET C. in Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans et son inscription dans le centre-ville, (mémoire de fin d’études), 2009 103
Source : Entretien Jean-David ABEL, élu à l’urbanisme, troisième adjoint 104
Source : GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.166) 105
Source : GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p. 159) 106
Source : CHALAS Y., L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.231)
80
demander ce que sont les problèmes qui la travaillent et la transforment. De même, la
société d’incertitude ce n’est pas seulement une société de l’incapacité à prévoir. C’est une
société qui en est réduite à découvrir ses potentialités néfastes notamment qu’une fois
l’événement produit *…+ La société d’incertitudes est une société qui ne sait plus ce qu’elle
gagne ou ce qu’elle perd en avançant »107. Il n’est donc pas rare de constater une certaine
prudence, voire une réticence, de nombre d’élus avant d’agir concrètement sur des
problèmes urbains identifiés, qui plus est dans une ville moyenne en proie à une crise
économique sans précédent.
Parler du futur, jugé trop incertain, limite donc l’action et crée un véritable
retournement vers le passé comme valeur sûre. De manière globale, « nous subissons ainsi
un hiatus entre une aspiration à une transformation globale et volontaire du monde *…+ et
les lectures partielles et fragmentaires du réel qui dominent actuellement et qui commandent
la conception modeste, voire résignée, de ce qui nous paraît relever de l’ordre du
possible »108. L’imprévisibilité du futur ne laisse pas intact l’aménagement et l’urbanisme, et
notamment pour certains grands projets urbains et une action massive qui seraient pourtant
essentiels pour la centralité romanaise.
Est alors mis en avant la complexité de monter un grand projet comme l’avoue
Philippe Dresin : « j’espère que ce grand projet d’aménagement (la place Majeure) verra le
jour bientôt et se déroulera, si tout se passe bien, entre 2012 et 2018 »109. Philippe Genestier
nous rappelle qu’« il existe un autre facteur majeur d’imposition du scepticisme politique
ambiant, c’est la conscience exacerbée de la complexité des problèmes et du caractère
intrinsèquement aporétique des questions actuelles »110 et Anne René-Bazin développe cette
idée en l’exprimant en ces termes « La discontinuité de l’action publique, l’incertitude du
droit, et plus encore, l’instabilité des dispositifs financiers rendent très difficile l’élaboration
de montage opérationnels : les maîtres d’ouvrage se trouvent en attente de la prochaine
réglementation, ou de la définition de la nouvelle enveloppe annoncée, se substituant en
107
Source : CHALAS Y., L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.231 et 232) 108
Source : GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.160) 109
Source : Entretien avec Philippe Dresin, 1er
adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1
er juin 2010
110 Source : GENESTIER P. (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des
Humanités, l’Harmattan (p.168)
81
général à un autre financement ; effet de rupture, de discontinuité, décrédibilisation des
projets, souvent longs à monter. Il est rassurant de monter de petits projets limités dans
l’espace et le temps, afin de ne pas encourir des changements de règle du jeu »111. Les
actions publiques se limitent donc à quelques petites opérations urbaines sur le centre
ancien (RHI, opération façades), plutôt que de lancer, par exemple, le projet massif de la
place Majeure qui est dit pensé sur « le long terme »112, pour ne pas dire « pour le mandat
politique prochain ».
Enfin, j’ai pu évoquer le fait que la ville-centre (Romans) assume encore beaucoup de
compétences par rapport à la CCPR, notamment au niveau de l’Urbanisme. On peut dès lors
affirmer qu’il y a un problème de l’échelle décisionnelle. Actuellement, est mis en exergue
un choix qu’il faudrait très prochainement prendre entre la future Communauté
d’Agglomération qui pourrait assumer la compétence de l’Urbanisme et créer un nouveau
dynamisme et la volonté des élus romanais de ne pas détacher l’Urbanisme de la ville de
Romans, comme le dit Philippe Dresin à propos du projet de la Place Majeure: « C’est à la
commune de porter ce projet, la CCPR n’a plus les moyens que la ville de Romans » 113
Se dessine alors une appréhension de la perte totale de l’action sur le territoire par les
élus locaux romanais.
111
Source : RENE-BAZIN A., Le renouvellement urbain dans les centres anciens, évolution et pratique des outils juridiques, chapitre 3, (p.207) 112
Source : Entretien avec Philippe Dresin, 1er
adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1
er Juin 2010
113 Source : Entretien avec Philippe Dresin, 1
er adjoint délégué aux finances et au service public communal,
président d’Habitat Pays de Romans, le 1er
Juin 2010
82
L’omission des « autres centres » de Romans dans la définition du centre
ville
L’espace des Boulevards et Marques Avenue sont des espaces qui sont pensés comme
dynamiques mais qui ne sont pas pensés comme étant le centre urbain valorisant et à
valoriser. Dans cette sous-partie, il s’agit seulement d’aborder la représentation des ces
« autres centres » des acteurs locaux, l’effet de cette omission dans la définition du centre-
ville ne sera aborder que dans la troisième partie.
L’espace des Boulevards fonctionne sans l’aide de l’action publique. Cet espace détient
une meilleure lisibilité urbaine par rapport au centre historique, et par ce biais obtient un
plus grand investissement des acteurs privés sur cet espace. L’espace des Boulevards est
donc susceptible d’avoir moins besoin d’aide publique même si cet espace connaît
certaines difficultés. Par exemple, l’espace des boulevards connaît un taux de mitage114 de
14%, alors que passé un taux de mitage de 15% relève d’un risque de déstructuration et
donc des discontinuités spatiales y sont présentes115. Or, le centre ancien cumule un taux de
mitage de 22%. Le centre ancien détient des rues en déshérence commerciale, et certaines
rues fonctionnent plutôt bien. Néanmoins, le chiffre du taux vacances des locaux
commerciaux de 22% est un constat alarmant, et c’est ce chiffre-là qui reste dans la
mémoire des élus locaux qui veulent sauvegarder cette mixité de fonctions dans le centre
ancien et cet esprit de village avec des enseignes proprement locales. L’action publique se
focalise donc sur le centre ancien alors que l’espace des Boulevards mériterait peut-être des
aides publiques concernant les unités commerciales déjà existantes ou futures.
Marques Avenue est une opération de renouvellement urbain qui a réussi et qui
fonctionne en autonomie aujourd’hui. Marques Avenue est du domaine du privé
uniquement. Traditionnellement, en France, l’action publique investit seulement dans les
espaces où il y a des problèmes soulevés et reconnus, Marque Avenue est alors écarté de
l’action publique depuis que cette opération fonctionne « toute seule », c’est-à-dire sans
l’aide de financement public. Ici, nous pouvons dire que Marques Avenue relève de ce
114
Le taux de mitage correspond au pourcentage de cellules commerciales vacantes par rapport au total des cellules commerciales 115
Source : Etude de définition d’un Schéma de Développement Commercial sur le territoire du Syndicat Mixte Romans Bourg de Péage Expansion –SM conseil PIVADIS, juin 2007
83
qu’Yves Chalas appelle de l’urbanisme apophatique116. Rappelons qu’est apophatique
« l’attitude qui consiste à se préoccuper davantage du mal que du bien, du négatif que du
positif, de l’extérieur que de l’intérieur, du superflu que de l’essentiel etc. et ce par stratégie,
de façon à laisser au bien, au positif, à l’intérieur, à l’essentiel le plus de chances, de
possibilités et de liberté d’exister »117. Il n’y a donc pas d’action fondamentale voire aucune
action du tout ni même de partenariat avec Marques Avenue pour les raisons évoquées. Et
donc en contrebalancement, on n’agit que sur ce qui ne va pas : le centre ancien.
Quelles sont les conséquences pour le centre ancien de cette définition du centre-ville
qui se focalise uniquement sur celui-ci et qui écarte les autres « centres » dynamiques de
Romans ? A priori, on pourrait penser que cet investissement massif lui soit bénéfique. Mais
cet investissement sur la longue durée ne signifie t’il pas qu’il y a de réelles difficultés à le
revaloriser, le redynamiser, le réhabiliter ? Et qu’il n’existe pas de dynamisme de centralité
sur ce centre ancien pourtant considéré comme centre-ville à part entière par la sphère
politique locale ? Comment la définition élusive du centre-ville est alors un frein majeur à sa
revalorisation ?
La partie suivante abordera les effets concrets de la définition élusive du centre-ville
sur le centre historique.
116
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.162) 117
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.162)
84
Un échec de la revalorisation du centre ancien : une conséquence de la
définition élusive du centre-ville
Des outils inadaptés à une logique de centralité
Ce qui faut entendre dans le terme « logique de centralité » c’est un dynamisme où
se concentre et où se crée de la richesse qu’elle soit économique, culturelle et sociale. Il
s’agit de montrer dans cette sous-partie que certains outils sont inadaptés à ce qu’on attend
d’un centre-ville revalorisé (par le biais de la gentrification notamment) mais aussi de ce
qu’on pourrait plutôt attendre d’une centralité ancienne (des projets urbains comme la
piétonisation qui correspondent plus à une centralité historique plutôt que d’accueillir la
voiture à tout prix, signe de modernité).
Des outils ne permettant pas une gentrification du centre historique, comme facteur de
revalorisation
Sur le centre ancien romanais, des outils comme les OPAH ont été utilisés depuis plus
de trente ans qui ne répondent pas à un objectif de gentrification pourtant voulue par les
acteurs locaux et qui semble être une phase quasi obligatoire de la revalorisation des
centres aujourd’hui.
Avant d’approfondir ce point là, rappelons ce qu’est la gentrification : « La
gentrification décrit le processus à travers lequel des ménages de classes moyennes avaient
peuplé d’anciens quartiers dévalorisés du centre de Londres, plutôt que d’aller résider en
banlieues résidentielles selon le modèle dominant jusqu’alors pour ces couches sociales »118.
Contrairement aux villes américaines, « les villes d’Europe continentale n’ont en effet pas
connu le même déclin économique de leur centre, ni le même primat du marché par rapport
aux politiques urbaines ou aux politiques du logement. La gentrification n’est apparue que
plus récemment comme l’objectif délibéré de politiques de régénérations urbaine »119.
Enfin, « Les premières étapes de la gentrification des centres historiques ont été soutenues
par les politiques de préservation du patrimoine mises en place dans le sillage de la loi
118
CUSIN F., La gentrification en question. Entre stratégies résidentielles des nouvelles classes moyennes et mutations socioéconomiques des villes, Espaces et sociétés, n°134, 2008 (p.168) 119
CUSIN F., La gentrification en question. Entre stratégies résidentielles des nouvelles classes moyennes et mutations socioéconomiques des villes, Espaces et sociétés, n°134, 2008 (P.169)
85
Malraux de 1962, les politiques paysagères inspirées par le retour à la rue ont favorisé
l’extension de la gentrification aux quartiers anciens peu pourvus en bâtiments de grande
valeur architecturale. Ces politiques ont d’autant plus efficaces qu’elles ont complétées par
diverses mesures, telles que les OPAH ou les PRI, visant à l’éradication de l’habitat insalubre
et à la normalisation des quartiers populaires. Elles ont également bénéficié du renfort des
acteurs du marché immobilier, attirés, par la plus-value que laissaient espérer des quartiers
sous-valorisés par rapport à leur localisation »120. Le schéma est alors simple : pour l’action
publique la gentrification permet une réhabilitation de qualité du bâti, et donc une
revalorisation du centre-ville ou du centre historique concerné. Les outils comme les OPAH
sont souvent cités pour lancer une possible gentrification. Pourtant ces outils sont
actuellement inadaptés pour la situation de Romans121 : avec les OPAH successives du centre
ancien, on mise avant tout sur le logement conventionné, et donc on répond principalement
à un marché de personnes qui sont locataires et qui ont des moyens financiers limités. Il y a
absorption de la vacance de logements mais on ne favorise pas pour autant une certaine
gentrification ou on ne la fait pas durer comme le regrette Philippe Dresin qui le raconte en
ces termes : « par exemple, des personnes se sont installées dans des logements se situant
devant la place Macel qu’on vient d’aménager, et à cause de ces faits de délinquance qui se
passent sur cette placette, ils déménagent aussitôt »122. La cohabitation des personnes en
difficulté socio-économique ou de la petite délinquance avec les nouveaux arrivants, un peu
plus riches et ayant certaines attentes quant à leur cadre de vie, se fait difficilement. Les
personnes de classes moyennes voulant vivre proche ou dans le cœur de la ville, orientent
leurs choix vers l’espace des Boulevards, plus conforme aux normes standard de confort.
Reste tout de même une population mixte dans le centre ancien romanais: la classe
supérieure y étant présente, les professions intellectuelles supérieures étant légèrement
plus nombreuses (7%) dans le centre ancien en 2006 que sur l’ensemble de la commune
romanaise (5%)123. Toutefois, une grande part de la population est paupérisée ou en voie de
paupérisation (un tiers des familles présente sur le centre ancien sont des familles
120
Source : CHARMES E., Le retour à la rue comme support de la gentrification, Espaces et société, 2005 (p.128) 121
Source : SOULAGEON S., L’OPAH-RU : un outil pertinent pour le centre ancien de Romans-sur-Isère ?, IUL 2007, 104 p. 122
Source : Entretien avec Philippe Dresin, 1er
adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1
er Juin 2010
123 Source : Données INSEE sur le centre ancien en 2006
86
monoparentales en 2006, 7% allocataires du RMI en 2007 alors que la moyenne de la Drôme
était de 3,3%, 20% de personnes vivent dans le centre historique avec de très bas
revenus).124
Sur le centre ancien, une population ouvrière était présente après la guerre (malgré le
fait que déjà des personnes soient attirées par le cachet de l’ancien), à partir de là, on
commence déjà à assister à un « processus de densification et de paupérisation » puis le
centre ancien « devient un lieu d’accueil de l’immigration »125 autre et moins important que
celui du quartier de la Monnaie à Romans. « Les catégories moyennes qui ont émergé avec
les Trente glorieuses se sont heurtées à des difficultés pour trouver un espace urbain qui leur
est propre : les quartiers populaires étaient inconfortables et les quartiers bourgeois
traditionnels trop onéreux »126. Pourtant, il y a des volontés politiques clairement affichées
puisque selon les mots du premier adjoint de la ville de Romans, Monsieur Dresin : « il s’agit
d’attirer des personnes plus aisées, et donc d’introduire des « bobos » dans le centre ancien
afin de créer une mixité vers le haut »127. Cette volonté s’inscrit dans un cadre assez global
puisque « Les changements actuellement à l’œuvre dans les contextes socio-économiques
nationaux conduisent progressivement celles-ci à mettre en œuvre des politiques visant à
transformer symboliquement le centre-ville pour l’adapter au goût des classes moyennes
dont la venue pour résider mais aussi pour consommer est attendue afin de pallier le déclin
économique »128. La revalorisation de la ville passe par la gentrification, et donc par
l’établissement de classes moyennes supérieures, de « bobos », de « gentrifieurs »129.
Se développe donc une « vision de la gentrification comme solution au déclin urbain,
comme politique de développement économique local »130. Cette gentrification est donc
parfois largement provoquée par l’action publique et ne relève pas forcément que d’un
simple mouvement spontané. La gentrification passe aussi par « le renouvellement 124
Source : Données de la CAF sur le centre ancien en 2006 125
Source : BACQUE M-H., En attendant la gentrification : discours et politiques à la Goutte d’Or (1982-2000), Les presses de Science-Po, sociétés contemporaines n°63, 2006, (p.65) 126
Source : CHARMES E., Le retour à la rue comme support de la gentrification, Espaces et société, 2005, (p.121) 127
Source : Entretien avec Philippe Dresin, premier adjoint délégué aux finances et au service public communal, président d’Habitat Pays de Romans, le 1
er juin 2010
128 Source : ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement
urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.76) 129
Source : CLERVAL A., Les anciennes cours réhabilitées des faubourgs : une forme de gentrification à Paris, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.105) 130
Source : ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132, 2008 (p.79)
87
progressif de propriétaires occupants »131 voir leur installation par le biais d’outils comme
les OPAH. Pour le cas de Romans, nous sommes encore loin de cette situation puisque 75%
des habitants du centre ancien sont des locataires en 2006132, il existe donc un réel
déséquilibre entre propriétaires bailleurs et propriétaires occupants. Les OPAH successives
n’ont pas arrangé la situation puisqu’elles favorisent la réhabilitation des programmes de
logements de propriétaires bailleurs, et ne fait que maintenir tout au plus les propriétaires
occupants dans le centre ancien133.
Comment provoquer la gentrification ? Souvent, « cet investissement de quartiers
anciens s’inscrit dans l’exaltation de la valeur de l’ancienneté »134. Les élus locaux désirent
attirer les classes moyennes supérieures par ce biais, le patrimoine n’est donc pas seulement
une reconversion économique et un facteur identitaire comme j’ai pu le développer dans la
deuxième partie, mais aussi un argument de vente pour attirer les gentrifieurs.
Abordons aussi le fait que « la question de l’école est centrale pour comprendre les
processus de gentrification »135. Or, c’est une question qui n’est pas ou peu abordée dans la
revalorisation du centre ancien de Romans, même si des problèmes sont détectés à l’Ecole
Saint-Just (fort turnover des élèves, stratégie d’évitement par le biais des écoles privées),
l’une des principales écoles du centre ancien romanais. Actuellement, un travail reste encore
à réaliser avec la politique de la ville. Cet état de fait place plutôt le centre ancien au même
rang des « quartiers cumulant les handicaps » comme le quartier de la Monnaie, qu’un
centre revalorisé et gentrifié.
Il existe donc une gentrification attendue, voulue, qui semble inhérente aujourd’hui à
ce qu’est une grande ou moyenne ville européenne.
Nous pouvons aussi rappeler qu’il y a une différenciation entre une gentrification qui
est en cours dans les centres historiques des métropoles et qui ne l’est pas dans les centres
historiques de certaines villes moyennes, qui se trouvent alors relégué au statut de
131
Source : CLERVAL A., Les anciennes cours réhabilitées des faubourgs : une forme de gentrification à Paris, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.97) 132
Source : données INSEE sur le centre ancien en 2006 133
Source : SOULAGEON S., L’OPAH-RU : un outil pertinent pour le centre ancien romanais ?, IUL, 2007, 104 p. 134
Source : BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés, n°132, 2008 (p.23) 135
Source : CUSIN F., La gentrification en question. Entre stratégies résidentielles des nouvelles classes moyennes et mutations socioéconomiques des villes, Espaces et sociétés, n°134, 2008, (p.176)
88
« quartier ancien dégradé ». « Alors que les centres urbains de petite et de moyenne
dimension connaissent souvent des difficultés, les noyaux les plus importants bénéficient d’un
dynamisme considérable : l’époque favorise les métropoles. Elles desservent directement des
espaces plus larges. Elles attirent les activités qui ont besoin de maintenir des relations
suivies avec des centres lointains. Les entreprises choisissent volontiers d’y installer leurs
sièges sociaux ou leurs services commerciaux »136. Malgré ce constat, certains chercheurs
rappellent qu’ « au delà de ces supers centres-historiques qui n’attirent pas que des
difficultés, mais aussi des touristes et des investisseurs, les autorités des autres villes
prennent conscience de l’intérêt d’avoir elles aussi un centre, qui, pour n’être point revêtu de
la dignité de patrimoine mondial n’en est pas moins un territoire urbain reconnu
nationalement comme la partie la plus ancienne et la plus chargée d’histoire »137. Même si ce
processus de gentrification « tend à se généraliser dans l’ensemble du monde
occidentale »138, Romans est une ville moyenne qui ne capte pas la population voulue et est
en concurrence directe avec la proximité de Valence, qui bénéficie d’un centre-ville identifié,
connu et gentrifié.
Une action qui se limite à la vieille ville
Une délimitation stricte de l’action se fait de manière quasi systématique sur le
centre ancien romanais. Il existe une concentration exclusive de ces outils sur le centre
ancien notamment avec l’OPAH-RU, alors qu’il existe aussi des îlots qui ont besoin d’une
grande réhabilitation sur l’espace des boulevards. La ZPPAUP a notamment été crée plus
spécialement pour le centre ancien même si d’autres zones entourant le centre ancien ont
été classés et font l’objet de normes à respecter concernant la réhabilitation du bâti.
Actuellement, il n’y a pas de hiérarchisation des aménagements urbains. Certains se
font au grès des opportunités et des subventions comme le raconte Jean-David Abel : « Il
faut avoir un projet cohérent et bien défini pour avoir des subventions, ce qui a pu manquer
parfois à Romans *…+ Nous n’avions pas de projets urbains prêts et bien ficelés qui auraient
136
Source : CLAVAL P., Réflexions sur la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000, (p.297) 137
Source : COLIN-DELAVAUD A., HERSCHON J-C, ORELLANA L., Dossier: nouvelles formes d’intervention dans la gestion du territoire patrimonial urbain, l’information géographique n°2, 2006 (p.8) 138
Source : LEBRETON A., MOUGEL G., La gentrification comme entre articulation entre forme urbaine et globalisation : approche comparative Londres/ Berlin, Espaces et sociétés, n°132, 2008, pages 57 à 73
89
pu être financé par ce contrat de site »139. Donc, au-delà de cette concentration des outils et
des subventions sur le centre ancien, une désorganisation des priorités d’aménagements à
réaliser sème le trouble dans le processus de revalorisation. Une certaine cohérence reste à
trouver, et certains élus en sont conscients.
Enfin, seulement des aides publiques directes, comme le Fisac, sont mises en place
uniquement sur le centre ancien. Il n’existe pas une stimulation de l’investissement privé qui
serait peut-être bénéfique, car les commerces installés ne vivraient pas seulement au
crochet du financement public comme l’avoue une technicienne de RBE : « il faut avoir les
« reins solides » si on veut s’installer dans le centre ancien »140, puisque certains commerces
ne peuvent boucler leur budget sans l’apport régulier du Fisac.
Une inadaptation du centre historique à l’évolution moderne et
contemporaine
Comme nous l’avons déjà évoqué ultérieurement, le centre historique ne s’est pas
adapté à l’évolution moderne et contemporaine. D’où peut-être l’idée d’avoir un traitement
particulier du centre ancien, sans pour autant en faire « un musée à ciel ouvert », mais d’en
faire une partie intégrante du centre-ville mais pas le centre-ville à part entière, comme
l’illustre Françoise Choay : « vouloir faire pénétrer de force les formes les plus intenses de la
vie moderne dans un organisme urbain conçu selon des critères anciens revient à arriver de
façon irrémédiable le conflit de deux systèmes fondamentaux différents, et non pas à les
résoudre. Une tout autre voie doit être suivie, lorsque c’est possible. Il faut désengorger le
noyau urbain ancien, en empêchant que la nouvelle urbanisation ne vienne lui imposer une
fonction à laquelle il est totalement inadapté »141. Le tissu du centre historique romanais
est en grande partie inadapté à la voiture. Il s’agit donc ne pas « forcer le passage » comme
cela s’est fait depuis longtemps en imposant la circulation de véhicules dans des rues
inadaptées à ce type de trafic. L’accessibilité est l’une des clés pour certains à la
dynamisation du centre-ville, et donc, par transposition, du centre ancien. Pourtant il
139
Source : Entretien avec Jean-David Abel, élu à l’Urbanisme, le 3 mai 2010 140
Source : Entretien avec Nadège Gautier, chargée de mission Commerce et Artisanat, RBE, le 14 avril 2010 141
Source : CHOAY F. (texte fondateur de GIOVANNONI G.), Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection la couleur des idées (p.171)
90
s’agirait plutôt de miser sur une piétonisation progressive, qui permettrait une
déambulation facilitée et agréable des promeneurs et des habitants, et répondrait donc plus
à un objectif de centralité ancienne et historique. C’est une prise de conscience qui se fait
peu à peu avec quelques projets de piétonisation en cours de réflexion.
91
Une absence de projet global sur le centre-ville « réel »
Une centralité symbolique pouvant faire le lien entre les centres qui n’arrive pas à
émerger
La place Jean Jaurès qui est l’espace public qui pourrait faire le lien entre Marques
Avenue, les boulevards et le centre ancien n’est pas pensé comme tel aujourd’hui. C’est la
place centrale de la ville et en même temps c’est celle qui est le moins attirante à cause de
son envahissement de véhicules, une mauvaise signalétique, un état dégradé de la chaussée
et un mobilier urbain pauvre ou mal organisé qui ne rend pas lisible l’espace urbain
environnant. Cet espace public crée plus une coupure entre le haut et le bas de la ville, entre
Marques Avenue et le centre ancien, qu’un espace liant ces centres séparés.
Figure 14 Photos de l'actuelle Place Jean Jaurès, place centrale de la ville de Romans (Photos prises par Marisa JULIEN, 2010)
Le projet de la place Majeure est un projet urbain vieux de 20 ans, il s’agissait
d’enterrer un parking sous-terrain afin de libérer l’espace public de l’omniprésence de la
voiture. Aujourd’hui encore il s’agit du même projet mais avec quelques modifications : des
bâtiments de logements et quelques locaux commerciaux en rez-de-chaussée devraient
s’ériger à l’Est de la place, créant donc une coupure urbaine définitive avec Marques
Avenue. Le projet de la place Majeure est donc pensé comme une revalorisation de
l’espace publique plutôt que comme un espace public pouvant organiser la centralité.
Cet espace permettrait pourtant une lisibilité de l’espace accrue et rendrait d’autant
plus efficace une signalétique qui fait défaut aujourd’hui. Cela rendrait engageant l’espace
intermédiaire entre les boulevards et le centre ancien. Donc au-delà des problèmes
financiers de la ville de Romans, il existe bel et bien une délimitation du centre-ville au
92
centre ancien et une omission certaine des boulevards et de Marques Avenue comme
faisant parti du centre-ville vécu.
Ce qui est d’autant plus dommageable puisque cette place pourrait assumer le rôle de
centralité symbolique : « Une centralisation proprement symbolique intervient dès lors que
l’on symbolise un espace plus grand dans un espace plus petit, qui devient un point
représentant symboliquement une surface (l’équivalent géographique d’une synecdoque
linguistique) »142 . Cela peut être le cas d’un monument ou bien d’une place représente le
centre d’une ville et donc sa puissance bien que, paradoxalement, ce soit une centralité
« vide ». Une place centrale peut donc être « un lieu-centre qui joue son rôle référentiel
sans difficulté »143. L’aménagement urbain de cette place jouerait un certain rôle
symbolique comme l’explique Jérôme Monnet : « dans nombre de cas, il est manifeste que
l’aménagement cherche à promouvoir une symbolique de la centralité, pour instituer ou
renforcer la centralité globale de l’espace aménagé »144. Cet espace pourrait jouer le rôle de
« lien » en unifiant d’une certaine manière les centres romanais et en rendant lisible le
centre-ville aux yeux de tous.
L’inexistence de partenariats avec des acteurs privés importants
Il n’existe pas de partenariat avec des acteurs privés importants. Il y a des commerces
avec des enseignes locales avant tout dans le centre ancien, même si il y a la présence de
quelques enseignes de renommée comme Clergerie qui sont présentes. Néanmoins, il n’y a
aucun lien ni de partenariat envisagé avec Marques Avenue, alors que la ville pourrait
profiter de ce dynamisme économique privé. Est évincée l’idée de créer un lien physique ou
partenarial avec les autres centres dynamiques « romanais », alors que le centre romanais
y trouverait peut-être un dynamisme nouveau.
142
MONNET J., Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.408) 143
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (P.46) 144
MONNET J. Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000 (p.414)
93
« Changer de regard » pour un projet global
Ce qu’il faut, enfin de compte, c’est aussi « changer de regard ou une ressensibilisation
du regard »145 sur ce qu’est réellement la centralité à Romans, car ce qui peut être
paradoxal ou contre-intuitif c’est que, pour redynamiser le centre ancien, il faut le penser
et agir hors de ses délimitations propres. Il serait alors possible « d’agir à nouveau de
manière créative et collective, et non pas nostalgique avec des solutions conçues au
rétroviseur, sur le terrain concret du paysage ou in situ »146.
Cette absence de projet global ne permet pas d’intégrer le centre historique à une
dynamique de centralité plus élargie : nous pouvons faire une différenciation entre un
centre historique intégré à la dynamique de centralité mais n’assumant pas tous les rôles
(économique, commercial, tertiaire), mais seulement certains (touristique et associatif) et un
centre historique relégué au statut de « quartier ancien dégradé » où l’action publique ne se
focalise que sur celui-ci et non pas sur ces connexions avec d’autres éléments urbains plus
dynamiques. Peut-être faudrait-il alors oser agir sur cette centralité élargie car « l’histoire est
pleine de contaminations et d’hybridations. Le centre de l’imaginaire urbain s’est, à
plusieurs reprises, déplacé et c’est pour cela, que nous devons persévérer, peut-être encore
pour longtemps, dans un travail, patient et désormais moins ingénu, de description des
situations territoriales les plus diverses, en les soumettant avec nos projets à des tensions,
pour apprécier leurs réactions et apprendre d’elles »147.
145
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.129) 146
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p. 129) 147
Source : SECCHI B., (sous la direction de CHALAS Y.) L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités, l’Harmattan (p.144-145)
94
Conclusion :
La définition du centre-ville à Romans se limite uniquement au centre ancien, et cela
est dû à diverses origines liées et concomitantes.
Premièrement, nous pouvons soulever des phénomènes assez classiques et globaux,
c’est-à-dire qu’il existe une « imagerie » assez commune sur ce que devrait être un centre-
ville selon une certaine conception européenne : à savoir que le centre ville est souvent
confondu avec le patrimoine bâti et par conséquent avec le centre historique, et que ce
phénomène s’amplifie avec une patrimonialisation forte de ce tissu urbain après une crise
industrielle dans une ville quasi-mono-fonctionnelle. Ces schémas sont jugés classiques lors
de notre analyse car elle se retrouve dans beaucoup d’autres villes partageant certaines
caractéristiques avec Romans-sur-Isère.
Deuxièmement, il existe aussi des phénomènes inhérents au contexte local de
Romans : existent des freins propres à la ville qui ne permettent pas de penser la centralité
d’une manière assez globale et d’unifier les « centres » éclatés de Romans (c’est-à-dire le
centre ancien, l’espace des boulevards et Marques Avenue) par le biais d’aménagements
centraux. Ces freins propres à la ville de Romans sont des freins financiers voire
psychologiques dans la sphère politique locale.
Ces divers éléments créent un manque de lisibilité urbaine, et ne permettent pas de
valoriser le centre ancien ayant pourtant un potentiel patrimonial fort. Il y a donc une action
qui se focalise uniquement sur le centre ancien, alors que la solution pour le redynamiser
serait peut-être de penser le centre ancien hors de ses limites, de penser ses connexions
possibles et donc de créer un projet urbain sur la centralité « réelle » de Romans.
Ce que nous apprend le cas de Romans :
Contrairement à ce que l’on peut penser aujourd’hui où l’économie de marché
contrôlerait tout, et notamment le développement de la ville, Il existe encore un poids
considérable des décideurs politiques locaux dans la formation et la définition de la ville.
L’action ou l’inaction politique sur la ville étant un choix, un choix qui peut avoir pour origine
une représentation particulière ou comme l’appelle Yves Chalas une « imagerie » faite sur la
95
ville. Le cas de Romans porte sur une représentation de la centralité se limitant au centre
ancien.
Yves Chalas, dans l’Invention de la ville, avait remarqué le décalage de représentations
et l’omission d’autres pôles de centralité hors du centre historique, alors qu’il y a, depuis
plusieurs décennies, l’avènement d’une ville polynucléaire. Sa démonstration s’attachait à
l’exemple de Grenoble et donc plus généralement à des grandes villes ou des métropoles
avec un rayonnement plus important, et donc à des centralités éclatées dans ces aires
urbaines. Le cas de Romans met en avant ce décalage mais à une échelle plus interne (à
l’intérieure même de la centralité) et dans les villes moyennes. A Romans, il existe d’autres
centralités qui se sont développées hors du noyau initial de la ville ancienne, et il n’y a pas
eu une prise en compte de cette extension du centre-ville par les décideurs politiques. Cela
est dû à une imagerie très intégrée dans la pensée et le discours des élus notamment. Il
s’agissait de faire remarquer que la centralité n’est plus dans le centre ancien mais s’y étend
au delà de ses délimitations propres. Ce constat permettrait d’envisager une nouvelle
imagination qui serait possible d’intégrer et qui aurait des répercussions sur l’action urbaine.
Néanmoins, nous pouvons encore nous poser cette question : est-ce que « l’imagerie est-
elle dépassable ? Oui parce qu’on peut appeler, à l’inverse, l’imagination vive de l’urbanisme,
faite non pas de recettes et de certitudes, mais de doutes et de réserves à l’égard justement
du prêt-à-penser inhérent à l’imagerie urbanistique.»148
Peut-être faudrait-il donc faire appel à l’urbanisme à pensée faible149 théorisé par
Yves Chalas. La pensée faible peut-être définie comme étant « le contraire d’une pensée
simple, d’une pensée pétrie de certitudes et orientée vers des perspectives d’avenir
clairement tracées. Une pensée faible est devenue une pensée plus incertaine, plus complexe,
moins systématique et par là même moins polémique, moins constituée en doctrine »150. On
pourrait la définir plus simplement comme étant une pensée pratique, une pensée qui agit
selon les réalités du terrain et propose des solutions malgré l’incertitude de l’avenir.
Il s’agit donc de laisser de côté les représentations de la centralité définie comme étant
synonyme de patrimoine, et d’intégrer dans l’imagination vive des décideurs politiques et
148
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.88) 149
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.152) 150
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.152)
96
des techniciens d’autres pôles de centralité vécus comme tels par les habitants. « Une
question se pose cependant, légitime : est-ce que l’imagination vive ne deviendra pas à son
jour imagerie ? La réponse est oui, sans ambages, l’imagination vive d’aujourd’hui promeut
l’imagerie de demain. Telle est la règle »151. Pourtant, malgré l’énoncé de cette vérité brutale
mais qui ne doit pas être stérile, il faudrait sortir de cette conception du centre historique
comme étant un village à part entière et penser la centralité, pour Romans, ou les
centralités, pour les métropoles, dans leur ensemble et leur multiplicité car « la ville n’est
ville que parce qu’elle est foncièrement renégate. La ville tourne le dos à son passé, à ses
racines, à ses traditions, alors que le village s’y enfoui. La ville, la vraie ville, est toujours
mouvante et surprenante. Elle ne cesse de se faire et de se refaire. Elle semble à jamais
inachevée, toujours en chantier pour présenter inlassablement de multiples et nouveaux
visages »152.
151
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.89) 152
Source : CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes (p.79)
97
Sources:
Ouvrages :
- BRUNET R., Les mots de la géographie, dictionnaire critique, la Documentation
française, Collection dynamiques du territoire, 518 p., 1992
- CHALAS Y., L’imaginaire aménageur en mutation, La librairie des Humanités,
l’Harmattan, 340 p., 2008
- CHALAS Y., L’invention de la ville, anthropos, collection villes, 199 p., 2003
- CHOAY F., Le patrimoine en questions, anthologie pour un combat, SEUIL, collection
la couleur des idées, 214 p., 2009
- CLAUDE V., Faire la ville, les métiers de l’urbanisme au XXe siècle, collection
eupalinos, Parenthèses, 253 p., 2006
- CERTU, Comprendre l’espace public pour mieux programmer son aménagement,
approches sensibles, dossiers du CERTU n°182, 166 p., 2007
- FREMONT A., La région espace vécu, collection Champs, Flammarion, 1999, 288p.
- GEORGE P., VERGER F., Dictionnaire de la géographie, PUF, 462 P., 2004
- LACAZE J-P., La transformation des villes et les politiques publiques 1945-2005,
presses de l’école nationale des Ponts et Chaussées, 255 p., 2006
- MALBOSC F. Du développement économique au renouvellement urbain ? A propos de
l’implantation de Marques Avenue à Romans, Les cahiers du DSU, 2001
- MERLIN P., Le Tourisme en France : Enjeux et Aménagement, ellipses, collection
Carrefours, 155 p., 2006
Articles de revues spécialisées :
- BACQUE M-H., En attendant la gentrification : discours et politiques à la Goutte d’Or
(1982-2000), Les presses de Science-Po, sociétés contemporaines n°63, pages 63 à
83, 2006
- BOURDEAU-LEPAGE L., A la recherche de la centralité perdue, Revue d’Economie
Régionale et Urbaine, 2009
- BOURDIN A., Gentrification : un « concept » à déconstruire, Espaces et sociétés,
n°132, 2008, pages 23 à 37
98
- CHARMES E., Le retour à la rue comme support de la gentrification, Espaces et
société, 2005, pages 115 à 135
- CLAVAL P., Réflexions sur la centralité, Cahiers de Géographie du Québec, volume 44,
n°123, décembre 2000, pages 285 à 301
- CLERVAL A., Les anciennes cours réhabilitées des faubourgs : une forme de
gentrification à Paris, Espaces et sociétés, n°132, 2008, pages 91 à 106
- COFFEY W., MANZAGOL C., SHEARMUR R., Centralités métropolitaines, Cahiers de
Géographie du Québec, volume 44, n°123, décembre 2000, pages 277-281
- COLIN-DELAVAUD A., HERSCHON J-C, ORELLANA L., Dossier: nouvelles formes
d’intervention dans la gestion du territoire patrimonial urbain, l’information
géographique n°2, 2006, pages 6 à 10
- CUSIN F., La gentrification en question. Entre stratégies résidentielles des nouvelles
classes moyennes et mutations socioéconomiques des villes, Espaces et sociétés,
n°134, 2008, pages 167 à 179
- LEBRETON A., MOUGEL G., La gentrification comme entre articulation entre forme
urbaine et globalisation : approche comparative Londres/ Berlin, Espaces et sociétés,
n°132, 2008, pages 57 à 73
- MALBOSC F., Du développement économique au renouvellement urbain ? à propos de
l’implantation de Marques Avenue, Les cahiers du DSU, décembre 2001, page 62
- MONNET J. Les dimensions symboliques de la centralité, Cahiers de Géographie du
Québec, volume 44, n°123, décembre 2000, pages 399-418
- RERAT P., Mutations urbaines, mutations démographiques, contribution à
l’explication de la déprise des villes-centres, Revue d’Economie Régionale et Urbaine,
n°2005, 2006, pages 725-750
- RENE-BAZIN A., Le renouvellement urbain dans les centres anciens, évolution et
pratique des outils juridiques, chapitre 3, page 191 -207
- VOISIN C., Le centre, la mémoire, l’identité. Des usages de l’histoire dans la (re)-
construction du Nouveau marché de Dresde, Espaces et sociétés, mars 2007, page 87
à 101
- ROUSSEAU M., « Bringing politics back in » : la gentrification comme politique de
développement urbain ? Autour des « villes perdantes », Espaces et sociétés n°132,
pages 75 à 90, 2008
99
- WATREMEZ A., L’entretien itinérant : pour une construction d’un dispositif
méthodologique de narration des habitants dans la ville patrimoniale, Etudes de
communication, n° 31, 2008, pages 77 à 92
Articles de la presse locale romanaise :
- Association de la Sauvegarde du Patrimoine romanais-péageois, Histoire et
Patrimoine de Romans et Bourg-de-Péage, 20 ans de chroniques dans l’Impartial,
imprimerie Deval, 264 p., 2009
- BIGORRE M., Mobilisation générale pour le cuir, l’Impartial, le 29 mars 2007
- ROLLAND F. Quelles mesures pour les salariés et l’industrie de la chaussure ?,
L’Impartial, 14 octobre 2005
Documents internes à la ville de Romans, RBE ou la CCPR :
- Etude de définition d’un Schéma de Développement Commercial sur le territoire du
Syndicat Mixte Romans Bourg de Péage Expansion – SM conseil PIVADIS, juin 2007
- JULIEN M., Diagnostic territorial du centre ancien romanais, 2010
- Rapport de présentation du PLU de Romans, 2006
- Rapport de présentation de la ZPPAUP de Romans, 2008
Mémoires précédents sur Romans :
- BOUDET Céline, Etudes sur les retombées socio-économiques : le Carnaval de Romans
et son inscription dans le centre-ville, 2009, 58 p.
- SOULAGEON Stéphanie, L'OPAH RU: un outil pertinent pour le centre ancien de
Romans sur Isère? , IUL, 2007, 104 p.
Autre mémoire:
- SIRVAIN Alexandre, Les enjeux de la valorisation des centres anciens : l’approche
bordelaise, IUP, 2009, 53 p.
100
Sites Internet :
- Site Drôme des Collines :
http://www.dromedescollines.fr/drome/drome-geographie.php#
- Site au Pays Romans et Bourg-de-Péage :
http://www.romans-tourisme.com/decouvrir-pays-de-
romans/detail.asp?idoi=26AASOR100035&cat=visites-patrimoine
- Site du CERTU à propos des données FILOCOM :
http://www.observation-urbaine.certu.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=241
Entretiens réalisés (voir annexes) :
- Entretien avec Franck Mallinjoud- Sujet Principal : la tranquillité publique sur le centre
ancien
- Entretien Philippe Pourtier – Mission Politique de la ville
- Entretien avec Eric Olivier-Drure - Sujet principal : Le patrimoine dans le centre ancien
- Entretien Jean Decauville– OPAH sur le centre ancien (responsable de l’équipe de
l’animation de l’OPAH Romans-Bourg-de-Péage).
- Entretien avec Martial Gaffet - Sujet principal : La vie associative dans le centre ancien
- Entretien Nadège Gauthier– RBE expansion – Redynamisation commerciale centre ancien
- Entretien avec Françoise Sarraillon – directrice de l’association de sauvegarde du
patrimoine Romano-péageois
- Entretien Jean-David Abel – élu à L’urbanisme, troisième adjoint
- Entretien Cléo Delon – élue à la tranquillité publique, deuxième adjointe
- Entretien Philippe Drésin – 1er adjoint délégué aux finances et au service public communal,
président d’Habitat Pays de Romans
101
Glossaire
ANAH : Agence Nationale de l’Amélioration de l’Habitat
CA : Communauté d’Agglomération
CAF : Caisse d’Allocation Familiale
CALD : Centre d’Amélioration du Logement de la Drôme
CAUE : Conseil d’Architecture d’Urbanisme et de l’Environnement
CC : Communauté de Communes
CCPR : Communauté de Communes du Pays de Romans
CCCBP : Communauté de Communes du Canton de Bourg-de-Péage
CUCS : Contrat Urbain de Cohésion Social
DRAC : Direction Régionale des Affaires Culturelles
EPORA : Etablissement Public foncier de l’Ouest Rhône-Alpes
FEDER: Fond Européen de Développement Régional
FIPD : Fond Interministériel de Prévention de la Délinquance
FISAC : Fond d’Intervention pour les services, le commerce et l’Artisanat
HPR : Habitat Pays de Romans
OPAH : Opération Programmée de l’Amélioration de l’Habitat
OPAH-RU : Opération Programmée de l’Amélioration de l’Habitat – Renouvellement Urbain
PNRQAD : Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés
RBE : Romans Bourg-de-Péage Expansion
RHI : Résorption de l’Habitat Insalubre
SCHS : Service Communal d’Hygiène et de Santé
SEM : Société d’Economie Mixte
ZPPAUP : Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager
ZUS : Zone Urbaine Sensible
102
Tables des illustrations
Figure 1 Cartes de localisation de Romans-sur-Isère ................................................................. 9
Figure 2 Carte d'urbanisation de Romans et Bourg-de-Péage ................................................. 11
Figure 3 Organisation des structures administratives et territoriales de Romans et Bourg-de-
Péage ........................................................................................................................................ 15
Figure 4 Publicité du Musée de la Chaussure à Romans (source: Site Internet au Pays de
Romans et Bourg-de-Péage) .................................................................................................... 19
Figure 5 Organigramme de la Direction de l'Aménagement Urbain de la ville de Romans .... 24
Figure 6 Organigramme du service Urbanisme de la ville de Romans .................................... 25
Figure 7 la Maison du Mouton, le plus vieux bâtiment du centre ancien romanais (Mars
2010, photo prise par Marisa JULIEN) ...................................................................................... 40
Figure 8 Périmètre d'étude choisi pour le diagnostic du centre ancien .................................. 46
Figure 9 Carte illustrant de manière schématique le déplacement de la centralité au fil du
temps ........................................................................................................................................ 58
Figure 10 Carte de la centralité à Romans: des centres différenciés? ..................................... 61
Figure 11 Marques Avenue, Avenue Gambetta à Romans ...................................................... 62
Figure 12 Quelques images des hôtels particuliers dans le centre ancien romanais (photos
prises par Marisa JULIEN) ......................................................................................................... 75
Figure 13 Le carnaval de Romans, le 27 février 2010 (Photos prises par Marisa JULIEN) ....... 76
Figure 14 Photos de l'actuelle Place Jean Jaurès, place centrale de la ville de Romans (Photos
prises par Marisa JULIEN, 2010) ............................................................................................... 91
103
Tables des matières Mots clés ..................................................................................................................................... 3
Résumé ........................................................................................................................................ 3
Sommaire .................................................................................................................................... 4
Préambule ................................................................................................................................... 5
PARTIE I : RAPPORT DE STAGE ...................................................................................................... 7
Introduction ................................................................................................................................. 8
La ville de Romans : entre crises et mutations ............................................................................... 9
Localisation de Romans ................................................................................................................... 9
Brève histoire urbaine de Romans ................................................................................................ 10
Romans : une ville moyenne entre concurrence et coordination avec d’autres villes ................. 13
Crise industrielle et reconversion ................................................................................................. 17
L’activité du cuir : prospérité et déclin ...................................................................................... 17
Les solutions choisies de la reconversion .................................................................................. 19
La mairie de Romans : jeux d’acteurs, adaptation et freins de l’action ......................................... 22
Organisation de la structure ..................................................................................................................... 22
La coordination de divers services ............................................................................................ 22
Le contentieux de l’urbanisme : un problème constant pour le service Urbanisme ................ 27
Produits et ressources de la structure ...................................................................................................... 29
Une commande politique contrainte par des ressources économiques limitées ..................... 29
Une nouvelle Communauté d’Agglomération : un nouveau souffle pour la ville de Romans ? 29
La formation continue comme atout du fonctionnariat ........................................................... 30
Les partenaires .......................................................................................................................................... 31
Retour critique sur la structure ................................................................................................................. 32
Les avantages d’une petite structure ............................................................................................ 32
Le mille-feuille administratif : un frein de l’action ? ..................................................................... 33
Difficultés financières de Romans ................................................................................................. 33
Freins d’action des villes moyennes .............................................................................................. 34
Deux missions réalisées : informations et communication, synthèse de la situation et aide à la
décision sur un même territoire, le centre ancien romanais ......................................................... 38
Réalisation d’une carte synthétique des aménagements urbains en projet ou en cours sur le centre
ancien romanais ........................................................................................................................................ 38
Création d’un diagnostic exhaustif du centre ancien de Romans, en vue de créer un dossier de
candidature pour le PNRQAD en 2011. ..................................................................................................... 41
104
Regards critiques sur la mission ................................................................................................................ 44
Conclusion et perspectives ......................................................................................................... 47
Bilan personnel ......................................................................................................................................... 47
Regard sur le métier d’urbaniste .............................................................................................................. 48
PARTIE II : MEMOIRE .................................................................................................................. 50
Une définition ambigüe et élusive de la centralité urbaine à Romans comme échec de la
revalorisation du centre ancien................................................................................................... 50
Introduction : ............................................................................................................................. 51
Pourquoi y a-t-il une centralité éclatée à Romans-sur-Isère ? ....................................................... 55
Historique de la création de la ville et déplacement de la centralité au fil du temps .............................. 55
Un développement particulier de la ville ...................................................................................... 55
Le centre historique n’est plus le centre à part entière ................................................................ 55
Complexité morphologique des « centres » de Romans et leur rayonnement à des échelles différentes
.................................................................................................................................................................. 60
Une représentation de la centralité déconnectée de la réalité urbaine......................................... 66
Une conception européenne du centre-ville, intégrée dans « l’imagerie » des décideurs politiques .... 66
L’imagerie ancrée dans le discours et l’action des décideurs politiques ...................................... 66
Quelles représentations en découlent? Quel décalage de représentations s’effectue ? ............. 67
Le Mangement de centre-ville : un nouvel outil illustrant ce décalage de représentations ........ 70
Les raisons de cette focalisation sur le centre ancien ............................................................................... 71
Des raisons « classiques » ............................................................................................................ 71
Des raisons inhérentes à Romans ................................................................................................ 78
L’omission des « autres centres » de Romans dans la définition du centre ville...................................... 82
Un échec de la revalorisation du centre ancien : une conséquence de la définition élusive du
centre-ville ................................................................................................................................. 84
Des outils inadaptés à une logique de centralité ...................................................................................... 84
Des outils ne permettant pas une gentrification du centre historique, comme facteur de
revalorisation ................................................................................................................................. 84
Une action qui se limite à la vieille ville ........................................................................................ 88
Une inadaptation du centre historique à l’évolution moderne et contemporaine .................................. 89
Une absence de projet global sur le centre-ville « réel » ......................................................................... 91
Une centralité symbolique pouvant faire le lien entre les centres qui n’arrive pas à émerger .... 91
L’inexistence de partenariats avec des acteurs privés importants ............................................... 92
« Changer de regard » pour un projet global ................................................................................ 93
105
Conclusion : ............................................................................................................................... 94
Sources: ..................................................................................................................................... 97
Glossaire ................................................................................................................................... 101
Tables des illustrations .............................................................................................................. 102
Tables des matières ................................................................................................................... 103
Annexes .................................................................................................................................... 106
Feuille d’évaluation du stage .................................................................................................................. 107
Capture d’écran de la carte des aménagements urbains en cours ou en projet sur le centre ancien, sur
le logiciel SIG Editop (première mission réalisée au sein de la ville de Romans) .................................... 108
Carte de parcours de la visite du préfet dans le centre ancien, le 4 juin 2010 (Réalisation mai 2010,
Marisa JULIEN) ........................................................................................................................................ 109
Entretien avec Franck Mallinjoud – Responsable du Service Tranquillité Publique et Réglementation -
Sujet Principal : la tranquillité publique sur le centre ancien ................................................................. 110
Entretien avec Philippe Pourtier – Responsable de la Mission Politique de la ville ............................... 114
Entretien avec Eric Olivier-Drure – Responsable du service des Archives de la ville de Romans - Sujet
principal : Le patrimoine dans le centre ancien ...................................................................................... 118
Entretien avec Jean Decauville– Responsable de l’équipe d’animation de l’OPAH Romans-Bourg-de-
Péage ....................................................................................................................................................... 122
Entretien avec Martial Gaffet – Responsable de la vie associative de la ville de Romans...................... 129
Entretien avec Nadège Gauthier– RBE – Chargée de la mission Commerces et Artisanat sur le centre
ancien romanais ...................................................................................................................................... 133
Entretien avec Françoise Sarraillon – Directrice de l’association de sauvegarde du patrimoine romano-
péageois .................................................................................................................................................. 137
Entretien avec Jean-David Abel – Elu à L’urbanisme, troisième adjoint ................................................. 140
Entretien avec Cléo Delon – Elue à la tranquillité publique, deuxième adjointe .................................... 144
Entretien avec Philippe Drésin – 1er adjoint délégué aux finances et au service public communal,
président d’Habitat Pays de Romans ...................................................................................................... 147
106
Annexes
107
Feuille d’évaluation du stage
108
Capture d’écran de la carte des aménagements urbains en cours ou en projet sur
le centre ancien, sur le logiciel SIG Editop (première mission réalisée au sein de la
ville de Romans)
109
Carte de parcours de la visite du préfet dans le centre ancien, le 4 juin 2010
(Réalisation mai 2010, Marisa JULIEN)
110
Entretien avec Franck Mallinjoud – Responsable du Service Tranquillité
Publique et Réglementation - Sujet Principal : la tranquillité publique sur le
centre ancien
Entretien réalisé le jeudi 18 février 2010, de 10h30 à 11h30, au service réglementation et
tranquillité publique de la ville de Romans, à la mairie centrale.
La situation actuelle dans le centre ancien :
- Existe-t-il des actes de délinquance dans le centre ancien ? Si oui, quels sont ces actes de
délinquance dans cette partie de la ville? Est-ce des actes inciviques ou des actes plus graves?
La situation actuelle dans le centre ancien est préoccupante. Nous avons affaire à une
délinquance jeune qui crée un certain trouble dans le centre ancien. Le moindre fait dans les petites
rues du centre ancien est amplifié, notamment au niveau du bruit ou du désordre général. Dans le
centre ancien, nous ne sommes pas dans les mêmes problématiques que le quartier de la Monnaie
où là il y a des grands espaces ouverts. En plus, l’obscurité tombe plus vite dans les ruelles du centre
ancien, qu’ailleurs dans la ville, car le bâti est plus dense et les ruelles plus étroites.
Cette petite délinquance est d’autant plus embêtante que dans le centre ancien on est dans un secteur porteur avec des commerces de qualité. Les commerçants se plaignent beaucoup de cette délinquance qui nuit à leurs affaires.
Les faits de délinquance sont essentiellement des actes d’incivilité. Cela se traduit par un rassemblement sur l’espace public avec des chahuts, de l’agressivité, et des dégradations nocturnes. Mais, il n’y a pas d’agressions physiques, ni de vols ou de braquages.
- Quelles sont les personnes responsables de ces actes ? Ce sont des petits groupes de jeunes qui forment ce qu’on appelle de « la petite délinquance »
itinérante dans la ville de Romans. Il y a eu des problèmes ailleurs, aujourd’hui, une partie du centre ancien est touchée par ce phénomène.
- Qui sont les victimes de ces actes de délinquances ? Les commerçants se plaignent souvent des actes inciviques car cela nuit à leur commerce.
Néanmoins, les riverains s’en plaignent aussi.
- Ces phénomènes se passent à quel moment de la journée ?
En soirée et La nuit principalement.
- Est-ce des actes réguliers ou ponctuels ?
Ce sont des actes plutôt réguliers commis par le même groupe de jeunes.
111
- Dans le centre ancien, y a-t-il des lieux particulièrement touchés par des actes de délinquance ? (les lieux incriminés en 1996 étant les squares Marcel CARNE, celui du monument aux morts, la galerie marchande et la médiathèque, ainsi que les ruelles et les immeubles insalubres).
Oui, nous avons localisé ces actes d’incivilité dans 6 à 7 rues dans le centre ancien. Ce sont surtout la rue du Puits du Cheval, la rue Folquet, la rue de l’Ecosserie, la rue du Fuseau et la rue Pêcherie qui sont le plus touchées.
- En 1996, le sentiment d’insécurité était bien plus fort malgré des actes de délinquance plutôt peu nombreux, est-ce la même situation aujourd’hui ?
Nous sommes un peu dans la même situation qu'auparavant apparemment car c’est bien le
sentiment d’insécurité qui prédomine, car il n’y a pas d’actes graves en soi. Mais les personnes ont parfois peur que ça dégénère, d’où le sentiment de peur.
- Le sentiment d’insécurité est-il présent dans le centre ancien ? De manière générale, est-il plus fort qu’avant ou non ?
Il est toujours présent et nuit considérablement aux commerçants. Je ne sais pas s’il est plus
fort qu’avant.
112
Comparaison avec le reste de la commune :
- Le centre ancien est-il plus touché par les actes de délinquance par rapport aux autres secteurs de la commune ?
Les autres secteurs sont beaucoup plus calmes. Le centre ancien est vraiment notre priorité car
c’est vraiment le quartier le plus problématique. C’est pour cela d’ailleurs que l’on a crée un groupe de réflexion et d’actions spécialement pour le centre ancien.
Notre but c’est de créer de la sécurité. On a alors décidé de travailler sur certains points : on intensifie les patrouilles pédestres (2 à 3 agents tous les soirs) avec un ilotage précis. Ces patrouilles servent essentiellement à dissuader l’incivilité et de prévenir la population. On exerce deux contrôles mensuels d’identité sous procureur de la République, on exerce aussi des contrôles routiers. Nous faisons une action forte sur la prévention avec les correspondants de nuit.
Il existe aussi un chantier d’insertion des jeunes. Cela concerne les 15-17 ans, ce sont souvent des personnes déscolarisées. On les incite à faire des travaux, notamment dans le centre ancien, où ils repeignent des façades ou des intérieurs. Cela leur donne une première expérience professionnelle. Nous devrions aussi travailler avec les maisons de quartiers et les associations pour trouver des solutions ensemble.
On insiste aussi sur la présence des élus qui vont au contact de cette population. Nous
intervenons donc sur l’information de la population sur l’espace public. Il y aurait bien sûr un
réaménagement urbain à penser dans le centre ancien pour lutter contre cette petite délinquance.
Pour résumer, cette commission spéciale sur le centre ancien est constitué de techniciens et d’élus. Il s’agit d’avoir une vision globale de la situation, d’adopter une position et une stratégie. Même si pour l’instant nous avons ciblé les lieux où il y a le plus d’actes d’incivilité, un périmètre reste à définir. Enfin, il faut identifier les personnes qui posent problèmes.
- La délinquance est-elle liée au fait qu’il y est un cumul de nombreux lieux insalubres dans le centre ancien (ruelles et immeubles insalubres) ou une vacance de commerces importantes?
Bien sûr, cela influe beaucoup sur la localisation de la délinquance. S’il y a moins de passages, il
y a donc plus d’insécurité, ou du moins de sentiment d’insécurité. Comme l’adage le dit « la nature a horreur du vide », du coup les jeunes qui posent problèmes s’approprient les lieux. S’il y a abandon de commerces en rez-de-chaussée, l’affichage sauvage se développe sur l’ancienne devanture, les anciens propriétaires du commerce ne nettoient plus devant leurs magasins, les détritus s’amassent. Tous ces éléments font aussi que cela ne crée pas une ambiance « rassurante ». Ce n’est pas un hasard si les rues qui sont le plus touchées par les actes d’incivilité sont les rues qui ont perdues de nombreux commerces, ce sont aussi les rues les plus sales.
113
Amélioration potentielle :
- Selon vous, comment peut-on lutter contre ces phénomènes ? En intensifiant nos actions ou en développant d’autres qui ressortiront de notre commission
spéciale sur le groupe ancien. En espérant que cela ne déplace pas le problème dans une autre partie de la ville, car cette petite délinquance est enfin de compte itinérante, elle s’adapte aux conditions qu’on lui impose.
- L’aménagement urbain a-t-il le pouvoir de participer à cette lutte (plus d’éclairage la nuit, etc.)?
L’éclairage a été jugé satisfaisant dans le centre ancien. Cela signifie qu’on est dans les
normes. Mais peut-être qu’il faudrait faire un travail plus poussé sur le centre ancien. Les commerçants et les riverains voudraient peut-être de l’éclairage plus longtemps ou plus clair. Il faut donc voir avec l’éclairage géré par la CPPR.
Autre question :
- Quel est votre rôle au sein de la structure ? Vos missions ? J’occupe le poste de directeur de la tranquillité publique et réglementation depuis août 2009.
Je dirige donc au total trois services. Tout d’abord, le service réglementation qui s’occupe des places de stationnements, des horodateurs, des abonnements de stationnements, de la circulation des taxis, de la place attribuée pour les cirques. Ensuite, nous gérons aussi le service hygiène et santé. Et enfin, la police municipale qui détient deux postes (un à la monnaie, un au centre-ville). On compte 17 agents de terrains sans compter les administratifs. Toute la direction réglementation et tranquillité publique compte 35 personnes.
Donc, mon rôle est de manager ces trois services. Je siège au pôle urbanisme et au pôle
tranquillité publique. Une commission de sécurité se réunit tous les 15 jours, elle réunit le
responsable HPR, les élus, le directeur général des services et le commissaire de police.
J’occupe un rôle important dans la coordination des actions avec le cabinet et la direction
générale. Je rencontre aussi les habitants et les riverains, je fais un compte-rendu de ce qui ressort
de cette rencontre, je sers donc d’interface entre la municipalité et le terrain.
Je fais aussi la coordination entre les services (urbanisme, voierie) avec les arrêtés pris.
J’ai aussi occupé une fonction dans la police nationale pendant 20 ans, je m’occupe donc aussi
de faire le lien entre la police nationale et la gendarmerie, j’essaye de coordonner les actions et de
faciliter les rapports.
114
Entretien avec Philippe Pourtier – Responsable de la Mission Politique
de la ville
Entretien réalisé le mercredi 3 mars 2010, de 16h à 17h à la Mairie annexe Est de la
ville de Romans.
Groupe centre ancien
- En quoi consiste le groupe de travail de la politique de la ville sur le centre ancien ? Ce groupe de travail consiste en quatre éléments : tout d’abord faire des constats (que se
passe t’il dans le centre ancien ? relever des données sociales, qualifier le quartier, soulever les points qui font débat, relever les faiblesses et les points forts du centre ancien), décrire une méthodologie (vision et action d’ensemble, hiérarchiser les priorités, valider les différents champs d’actions etc.) identifier les chantiers (insertion par l’activité professionnelle, l’éducation, la médiation et l’animation, la prévention spécialisée, la Maison du Quartier et les associations, le lien avec les commerçants et habitants, la propreté urbaine, les outils de sécurité, l’urbanisme, le peuplement, l’éclairage, la création d’un flux centre-ville, le mobilier urbain et la construction d’un discours, d’une présence), élaborer un calendrier de travail (différentes thématiques abordées dans le groupe de pilotage se réunissant à peu près une fois par mois).
L’élu référent de ce groupe de travail est Cléo DELON. - Quel est votre rôle dans ce groupe de travail ? Je suis le technicien référent de ce groupe de travail.
Politique de la ville :
- Comment la politique de la ville agit sur le centre ancien ? Quelles missions ? Quelles actions concrètes ? Quels objectifs ?
Avant le CUCS, nous avions un contrat de ville, notamment sur le centre ancien global.
Aujourd’hui, nous sommes passés au CUCS (Contrat Urbain de Cohésion Sociale), le CUCS a trois niveaux d’interventions. Le quartier de la Monnaie est en ZUS (Zone Urbaine Sensible), c’est-à-dire en zone 1 du CUCS. Le centre ancien est en zone 2 (une zone non-ZUS).
Un diagnostic sur la santé présenté par le CAREPS en juin 2009 montre certaines données
sociales sur le centre ancien plutôt préoccupantes (7,4% d’allocataires du RMI, 3,5% d’allocataires de
l’AAH, 5,1% de femmes allocataires de l’API, 26,2% de familles monoparentales et 20% de personnes
avec de très bas revenus). Ces indicateurs sociaux nous montrent très clairement que le centre
ancien présente de nombreuses difficultés, c’est pour cela qu’il serait intéressant de le classer, lui
aussi, en ZUS. Nous avons créé un argumentaire pour une extension du périmètre ZUS de la ville de
Romans pour que le secteur de la Monnaie soit élargi au Sud et pour que le centre ancien obtienne
aussi ce zonage fort de priorité de l’action de la politique de la ville. Mais pour l’instant, une réforme
de la politique de la ville est en cours, nous ne savons pas si le zonage sera toujours de mise, peut-
être que la réforme n’agira plus sur des quartiers entiers considérés comme prioritaires, mais plutôt
sur des îlots identifiés comme prioritaires. On agirait alors sur des zones beaucoup plus restreintes.
Donc, nous verrons à l’avenir si nous pourrons classer ou non le centre ancien en ZUS.
115
Données sur le centre ancien :
- Avez-vous d’autres diagnostics sur le centre ancien ? qu’est ce qui en ressort ?
Un diagnostic sur la prévention de la délinquance dans le centre ancien a été fait récemment,
je pourrais vous le communiquer plus tard. Il est vrai qu’il y a de la petite délinquance sur le centre
ancien qui perturbe fortement la situation. On note aussi quelques problèmes de trafic de drogue et
de fondamentalisme religieux, qui reste minoritaires néanmoins. Ces problèmes de sécurité font plus
que de créer un simple sentiment d’insécurité, ils commencent à se cristalliser dans la réalité. C’est-
à-dire que certaines personnes ne se réapproprient plus certains lieux (par exemple, on note
« l’enferment » des personnes se logeant dans les immeubles entourant le square René Char, les
habitants ne se réapproprient plus cette cour intérieure ouverte au public actuellement, mais qui
sera prochainement fermée la nuit pour cause de faits de délinquance récurrents).
Nous réalisons aussi un travail de repérage et de diagnostic sur les équipements sociaux. On
dénombre quelques équipements sociaux comme la Maison de Quartier Saint-Nicolas, le Centre
Médical Départemental (CMD), deux écoles (l’école Manchorelle et l’école Saint-Just).
- Avez-vous des données socio-économiques récentes sur le centre ancien? Lesquelles ?
Quelques unes, notamment sur des indicateurs sociaux sur le centre ancien qui montre une
situation préoccupante (voir précédemment).
On peut faire le constat d’une population mixte dans le centre ancien, mais qui détient une
part de population connaissant de grandes difficultés. On peut même parler de « quart monde »,
c’est-à-dire des personnes en grandes difficultés financières et parfois complètement désocialisées.
De plus, il me semble que les logements sociaux ne sont pas de si grandes qualités dans ce secteur.
Quoiqu’il faudrait faire un état des lieux avec HPR, pour constituer une cartographie avec le nombre
exact de chaque logement sur les immeubles leur appartenant. Il existe aussi de gros problèmes
énergétiques au niveau des habitations (elles ne sont plus aux normes, ces bâtisses sont parfois
impossible à chauffer).
- Au niveau de la vie associative dans le centre ancien : est-elle importante ? quelles sont le
type d’associations présentes dans le centre ancien ? quels rôles tiennent-elles dans le centre
ancien ?
La vie associative dans le centre ancien n’est pas réellement liée aux habitants du centre
ancien, il en existe très peu qui exploite le cadre du centre ancien en lui-même. Néanmoins, il en
existe certaines comme la « Boucherie chevaline », qui créent des animations culturelles.
116
CUCS :
- Pourquoi avoir choisi le centre ancien comme zone du CUCS ?
Comme dit précédemment, le centre ancien est en difficulté aujourd’hui socialement parlant.
De plus, nous avons une moindre tradition de partenariat dans ce quartier par rapport à celui de la
Monnaie. On ne s’est pas encore fait assez visible aux yeux des habitants et des associations.
- Quels sont les objectifs du CUCS sur le centre ancien?
Nos objectifs sont de mieux intégrer nos équipes d’accompagnement car aujourd’hui et de
manière générale, l’accompagnement reste très fragile dans le centre ancien.
Il faut aussi développer la médiation, que ce soit au niveau des correspondants de nuit, qu’au
niveau des écoles et des structures d’animations culturelles et sociales (par exemple, nous avons du
mal à insérer des activités de l’école Saint-Just dans la Maison de Quartier Saint-Nicolas). Il faut aussi
limiter le turnover dans l’école Mancherolle, car on atteint des sommets de taux de turnover dans
cette école (près de 50 à 60% par an). Cela est lié à la situation sociale des parents la plupart du
temps. L’école Saint-Just mériterait aussi d’être réhabilitée (locaux détériorés) car elle a un potentiel
bâti très important, mais se pose aujourd’hui la question du relogement de cette école et les moyens
publics ne sont pas assez suffisants pour s’attaquer à un chantier d’une telle ampleur.
Nous faisons aussi d’autres actions d’encadrement des jeunes, notamment avec le
conservatoire où il y a des actions de découverte culturelle (culture ou sport) en espérant que cela
débouche sur une intégration d’un club de droit commun.
Néanmoins, le partenariat reste difficile avec les écoles même si nous développons des actions
comme le « club coup de pouce clé » ou des ateliers avec les CM2. Nous ne sommes pas dans la
même logique que dans le quartier de la Monnaie, les élèves qui sont en primaire dans le centre
ancien (en zone de DRE (Dispositif de Réussite Educative)) se retrouvent au collège Triboulet par la
suite, qui lui ne se situe pas en DRE. Le suivi de ces élèves se fait alors très difficilement. Dans le
quartier de la Monnaie, la composante «insertion » et le « contact jeune » sont repérés et sont
rentrés dans les habitudes.
Dans le centre ancien, on aide aussi le public des 12-25 ans avec une prévention spécialisée par
le biais de l’aide sociale à l’enfance. Des éducateurs spécialisés prennent contact avec ces jeunes
dans la rue la plupart du temps. Il existe aussi un dispositif spécifique sur les jardins des musées qui
connaissent une occupation d’une population très mixte : des médiateurs agissent sur le terrain. Des
« habitants relais » devraient être développés prochainement, car ils sont en contact avec les
habitants et peuvent faire remonter des problèmes sur lesquels on peut agir.
Au niveau du centre ancien, la politique de la ville a deux grands points faibles : la santé et la
culture. Pour la santé, nous n’avons pas d’instances de coordination du personnel de santé avec la
politique de la ville (on constate un début de coordination avec Romans Nord, mais il n’y en a
quasiment pas sur le centre ancien). Au niveau de la culture, le centre ancien est doté d’un
patrimoine culturel et bâti très fort et très intéressant mais celui-ci est peu utilisé. On ne constate
pas de démocratisation de la culture dans le centre ancien.
117
On constate aussi de gros problèmes concernant la trame viaire et les espaces publics dans le
centre ancien, alors qu’un vrai travail y est fait avec HPR dans le quartier de la Monnaie.
118
Entretien avec Eric Olivier-Drure – Responsable du service des
Archives de la ville de Romans - Sujet principal : Le patrimoine dans le
centre ancien
Entretien réalisé le jeudi 18 mars 2010 de 9h à 11H, aux archives de Romans, 3 rue
des Clercs.
- Y’a-t-il beaucoup de tourisme à Romans ? Quels bâtiments attirent le plus les touristes ?
La collégiale Saint Barnard et le musée de la Chaussure.
- Quels sont les bâtiments historiques qui, selon vous, ne sont pas assez mis en valeur ?
Beaucoup du patrimoine est complètement inconnu ou méconnu aux yeux des Romanais, le
chemin de croix en fait partie. Le chemin de croix appartient à la ville, il existe 21 stations. La plupart
sont dans le centre historique, deux sont sur l’avenue Berthelot et une (la XXIème) se situe dans le
Calvaire des Récollets. Une restauration spécifique a été lancée en 2004, et est toujours en cours
aujourd’hui. Cette restauration est importante car en 2015, nous fêterons le 500ème anniversaire du
chemin de croix, une mise en valeur est donc très importante pour ce monument classé. Néanmoins,
ces stations sont loin d’être immuables, certaines ont bougées, d’autres ont disparues (sauf celle qui
se situe au calvaire des récollets, celle-ci n’a pas bougé), mais cela fait aussi en quelque sorte partie
de ce patrimoine immatériel de la ville de Romans. Au début, 14 stations en tout ont été crées par
deux franciscains revenant de Palestine en 1515. Ces 14 stations retracent la « Voie douloureuse »
aboutissant à un Calvaire (d’où le nom de Calvaire des Récollets). Les stations ont été détruites selon
plusieurs vagues (protestantisme, révolution) puis laissées à l’abandon. Actuellement, ces stations
du « grand voyage » sont accolées à des bâtiments privés ou se situent sur la voirie publique. Il faut
donc penser la restauration dans son ensemble, un travail doit être fait sur l’environnement de la
station, c’est-à-dire sur les façades et la voirie. Il faut donc faire un travail transversal pour restaurer
correctement le chemin de croix d’où la nécessité de croiser le travail des différents services de la
collectivité car des problématiques patrimoniales devraient intervenir dans tout ce qui concerne les
aménagements urbains, les espaces verts, la voirie etc.
L’avenue Berthelot a un aspect peu esthétique, mais nous avons fait un travail sur la
circulation, la ville a pu la mettre en sens unique pour les voitures (sens de la montée), seuls les bus
peuvent l’utiliser dans les deux sens. La CCPR a des compétences en éclairage par exemple, il faudrait
donc aussi travailler avec la Communauté de Communes pour savoir comment l’éclairage peut
mettre en valeur les stations du chemin de croix. Toutes les actions devraient être portées par la ville
et faire l’objet d’un message fort afin que les Romanais puissent connaître plus amplement le
patrimoine de leur ville.
119
- Quel constat faites-vous sur la communication qui est faite sur le patrimoine de Romans ?
De manière générale, Romans a un potentiel touristique et patrimonial fort mais qui reste très
sous-exploité. C’est pour cela que j’essaie de participer à des réunions où la logique patrimoniale a
un impact. Certains édifices ne sont pas du tout mis en valeur : les remparts du XIVe et XVe siècle de
Romans menacent de s’écrouler alors que, par exemple, à Buis les baronnies, leurs remparts sont
bien moins importants que ceux de Romans et pourtant ils ont été restaurés et sont bien connus
dans la région. Nous ne profitons pas de ce type de communication sur le patrimoine de Romans. Les
remparts de Romans sont donc à revaloriser.
Il y a des monuments historiques à Romans mais il n’y a pas que cela, il existe un patrimoine
plus récent (il y a notamment du patrimoine du XXe siècle qui est très intéressant à Romans :
logements sociaux, cité Jules Nadi, friches industrielles etc.), cela nous pousse à réfléchir sur « qu’est
ce qui fait réellement patrimoine » ? Il faut que ce qui est sauvegardé soit exemplaire, et de par sa
forme et par rapport à ce qui a aussi pu être sauvegardé dans la région (ne pas sauvegarder un
élément mineure qui est mieux représenté ailleurs). Il faudrait faire un Inventaire de tout ce qui est
susceptible d’être du patrimoine afin d’avoir une vision globale et de savoir ce qui peut être
sauvegardé ou non. Cet inventaire pourrait, dans un deuxième temps, avoir une déclinaison
pédagogique. La ZPPAUP a pu identifier des zones de sauvegarde, mais l’inventaire peut aller plus
profondément dans le détail car beaucoup d’édifices patrimoniaux ont été détruits sans qu’on le
sache réellement (par exemple : il existe des peintures murales médiévales dans certaines bâtisses,
mais les personnes ne le savant pas et ajoutent du placo par-dessus). Cependant, ce travail
d’inventaire patrimonial demanderait un travail de terrain très lourd et couteux même si l’on ne part
pas de rien aujourd’hui.
Des anciens équipements sportifs seraient intéressants aussi à réexploiter (par exemple, la
piscine à Saint-Donnat ou la piscine ouverte à Bourg-de-Péage). Cela s’est fait par exemple à Roubaix,
une ancienne piscine a été réexploitée en musée d’Art. Certains petits patrimoines devraient être mis
en avant dans le centre ancien comme les lavoirs. Il existait une forte thématique liée à l’eau dans le
centre ancien qui a peu à peu disparue (lavoirs, fontaines, le canal de la Martinette etc.). Cette
richesse serait peut-être une orientation à réexploiter pour l’aménagement global du centre-ancien.
Des subventions doivent être possibles de la région pour réhabiliter ce petit patrimoine. Néanmoins,
la ville n’était pas tournée vers l’Isère comme on peut aisément le croire, certes il existait un port à
Romans et l’Isère servait de voie de communication, mais la ville était tournée vers l’intérieure
(notamment vers la place Maurice Faure).
De plus, il faut savoir qu’ l n’existe que très peu de « places médiévales » dans le centre ancien,
en réalité, le tissu urbain était encore plus dense à l’époque qu’aujourd’hui. Nous avons crée, au fil
du temps, des places et de placettes pour aérer le tissu urbain.
Le quartier de Saint-Romain a été rasé, il existait encore dans les années 1950. Cette partie de
la ville fait donc aussi partie du centre ancien. Le cheminement piéton reste sous-exploité dans le
centre ancien et nous avons remarqué qu’un gros problème de signalétique ne rendait pas compte ni
efficace les indications sur le patrimoine romanais.
120
Enfin, il ne faut pas oublier que la commune de Romans après-guerre est encore très rurale et
était loin de l’étalement urbain que l’on peut constater aujourd’hui. La vie rurale était assez forte
avec notamment l’existence des fêtes dans les Balmes. Un patrimoine agricole serait intéressant
aussi d’examiner.
- De quel type de patrimoine le service des archives s’occupe ?
De manière générale, le service des archives ne s’occupe que des bâtiments publics
appartenant à la ville (monuments classés ou inscrits, comme la collégiale, la tour Jacquemart, le
chemin de croix, le Calvaire, le musée de la Chaussure, les remparts, le cercle militaire), alors que le
service urbanisme peut aussi gérer le patrimoine privé.
- La ZPPAUP sert-elle selon vous à sauvegarder la particularité du centre ancien ?
Oui, néanmoins, La ZPPAUP ne peut pas examiner toutes les particularités patrimoniales du
centre ancien. L’Opération façades accompagne aussi fortement la redynamisation touristique du
centre historique. Le fait de classer un bâtiment « monument historique » permet aussi d’utiliser un
levier pour sauvegarder ce patrimoine.
Nous n’avons pas intégré la collégiale Saint-Barnard dans la ZPPAUP, pour la laisser dans la
réglementation spécifique aux Monument Historiques, c’est-à-dire que dans un rayon de 500 m du
monument une zone de protection des abords permet de réglementer son environnement. Ce
périmètre se répercute alors aussi sur la rive de Bourg-de-Péage, puis que cette commune ne fait pas
partie de la ZPPAUP.
Il existe aussi de véritables questions de normes à respecter dans le centre ancien avec la
réglementation de la ZPPAUP ainsi qu’avec les nouvelles normes environnementales et de sécurité.
Comment faire la part des choses ? Car pour exemple, les fenêtres doivent avoir des menuiseries
spécifiques, des volets en bois, et ne pas avoir du PVC ou de double vitrage standardisé. L’isolation
n’est donc pas aux normes actuelles. Il y a donc un réel travail à faire avec les prestataires de services
pour respecter toutes ces normes sans dénaturer le bâti du centre ancien.
- Comment redynamiser le centre ancien de Romans ?
Il existe une contradiction entre le fait d’étendre des activités économiques aux entrées de
villes (à chaque rond-point) et de vouloir redynamiser le centre ancien. Il faut qu’il y ait une vision
d’ensemble pour prioriser certains enjeux dans la commune de Romans.
Il existe aussi un problème d’identité et d’identification du centre à Romans (centre ancien,
marques avenue ?), il n’y a pas un centre mais des centres à Romans. Les Romanais n’arrivent pas
clairement identifier le morceau de ville qui fait centre-ville.
- Y a-t-il un travail de coordination qui est fait avec Bourg-de-Péage ?
Un réel travail devrait être fait avec Bourg de Péage car ce patrimoine profite aussi à cette
commune (des rives péageoises, on peut profiter d’une des meilleures vues sur le centre ancien et la
Collégiale Saint-Barnard). Mais, il existe de gros problèmes de coordination entre Romans et Bourg
de Péage, ces problèmes remontent loin dans le passé. Par exemple, Romans et Bourg de Péage
faisaient partis de différents diocèses : Bourg-de-Péage dépendait du diocèse de Valence alors que
121
Romans dépendait du diocèse de Vienne. Plus récemment, Bourg-de-Péage était de droite et Romans
de gauche, ce qui a considérablement compliqué la coordination entre ces deux communes. Dans les
années 1920, un plan d’embellissement de la ville a été crée, et n’a pas été possible de couvrir
l’ensemble des deux communes. Aujourd’hui encore, la ZPPAUP n’a été réalisée que sur Romans,
alors que Bourg-de-Péage s’est constitué comme étant un faubourg de Romans avec un bâti ancien
qui aurait mérité d’être inclus dans cette ZPPAUP. Cette très nette distinction entre Romans et
Bourg-de-Péage persiste. Des animosités se cristallisent aussi au niveau des impôts : Les Romanais
payant plus d’impôts que les Péageois et ils ne comprennent pas pourquoi il y a un tel écart sachant
que les Péageois profitent de tous les avantages que peut offrir la ville de Romans. Aujourd’hui,
Romans et Bourg-de-Péage sont toutes les deux des communes de gauche, cela a permis d’avancer
sur certains points car, par exemple, cela ne fait que depuis quelques années qu’un bus de transport
en commun traversent l’Isère pour desservir les deux communes, ce qui n’était pas le cas
auparavant.
Quelle sensibilisation au patrimoine à l’échelle du territoire ?
Un travail de sensibilisation au patrimoine de Romans est réalisé sur l’ensemble de la ville. La
sensibilisation vise certains publics : les plus jeunes dans les écoles, les bibliothèques etc., mais aussi
les personnes qui sont à la retraite (ce qui concerne 30% de la population de la commune, ce qui
n’est pas à négliger). Beaucoup de choses disparaissent, la sensibilisation permettrait d’associer la
population a fin de créer un débat sur ce qu’il faut ou non conserver. Il s’agit de faire « lire sa ville »
aux habitants. Mais, il faut aussi faire un travail interne de sensibilisation des différents services de la
ville de Romans afin que ceux-ci prennent en compte le patrimoine dans les différents projets.
La sensibilisation au patrimoine riche de Romans devrait se faire à l’échelle de la Communauté
de Commune, car les autres communes profitent aussi du rayonnement patrimonial de Romans. Par
exemple, la Collégiale devrait être portée par un territoire plus vaste que celui de la commune de
Romans car l’ensemble du territoire en profite. Il y a peu de temps le service des archives n’avaient
aucun lien avec l’Office du tourisme, ce qui peut sembler impensable de nos jours. Aucun projet
commun n’est réalisé s’il n’y a pas la structure commune qui permet de le cadrer. Par exemple, avec
la médiathèque du centre ancien nous ne faisons plus de projets communs depuis que c’est la CCPR
qui la gère. Nous n’avons pas les mêmes leviers d’action sur le territoire (Romans, CCPR). Puis,
beaucoup de couches administratives se superposent (Ville de Romans, CCPR, RBE), elles n’ont pas
les mêmes moyens et ont parfois du mal à travailler ensemble, alors que les questions urbaines sont
transversales par nature.
122
Entretien avec Jean Decauville– Responsable de l’équipe d’animation
de l’OPAH Romans-Bourg-de-Péage
Entretien réalisé le jeudi 8 Avril de 9H à 10h15, service Urbanisme de la mairie
centrale de Romans.
Historique de l’action publique menée sur le centre ancien de Romans
Cela fait une trentaine d’années que j’ai commencé à travailler sur Romans. J’ai travaillé sur la
première OPAH mise en place et qui débuta en 1979, j’étais salarié au CALD. A cette époque, la
municipalité, nouvellement de gauche, se trouvait confrontait à deux gros problèmes : le quartier de
la Monnaie qui a l’époque n’avait à peine qu’une quinzaine d’années, était déjà confronté à des
difficultés. Même à l’époque on parlait déjà de renouvellement urbain. Ensuite, la deuxième
préoccupation de cette nouvelle équipe municipale était le Centre Ancien. J’étais très surpris par
l’état de dégradation du centre ancien de Romans. Je suis originaire de Normandie et avec les
bombardements de la seconde guerre mondiale, des quartiers anciens ont complètement été
détruits et reconstruits par la suite. On avait en quelque sorte des « quartiers neufs » dans les villes
importantes de Normandie. Ma surprise a donc était d’autant plus grande quand j’ai constaté l’état
dans lequel se trouvait le centre ancien de Romans. Il y avait d’énormes rats dans les rues et dans les
cages d’escalier du quartier Pêcherie. On était en présence d’une population en grande difficulté ou
en voie de grande précarisation. Beaucoup de personnes originaires du Maghreb étaient installées
dans certains quartiers (rue Pêcherie). Une autre population dite « à part » s’installait déjà parce
qu’elles appréciaient les vieux logements et leurs particularités architecturales, surtout qu’ils
n’étaient pas chers à l’époque. Mais la majorité de la population du centre ancien était ouvrière.
Nous avons donc décidé de « mettre le paquet » sur certains quartiers : la rue Pêcherie et la
rue Saint-Nicolas. On avait comme objectif de réhabiliter de l’habitat, on avait l’aide de l’intervention
publique qui, à l’époque, était extrêmement forte par le biais d’organismes publics (HLM Romans) et
de subventions très importantes (on pouvait aller jusqu’à 60 à 70% de subventions pour les
propriétaires bailleurs.
Le constat que l’on peut tirer au niveau des politiques publiques sur le centre ancien c’est que
celles-ci n’ont pas changé depuis une trentaine d’années. Les OPAH visent surtout la réhabilitation
des Propriétaires Bailleurs. Ces outils sont parfois mal adaptés aux situations de terrain, comme par
exemple sur le centre ancien de Romans. Bien évidemment, c’est l’Etat qui crée ces outils là.
En 5 ans, le temps de la première OPAH, le quartier Pêcherie a pris un aspect physique
complètement neuf. Mais, on s’est rendu compte que des bâtiments qu’on avait réhabilités il y a de
cela une trentaine ou une vingtaine d’années et qui aujourd’hui tombent en désuétude. Alors peut-
être qu’ils ont été mal-réhabilités car il n’y avait pas toutes les normes de confort ou d’isolation que
l’on détient aujourd’hui. Peut-être aussi que l’on était moins sensible à la qualité des logements et la
condition de l’habitat, notamment en ce qui concerne l’ensoleillement des logements, de leurs tailles
etc. La première OPAH a été créée dans un contexte politique particulier car une institution a été
créée entre Valence et Romans (car même bord politique à l’époque) nommée l’AEUVR (Agence
Etudes Urbaines Valence Romans). L’AEUVR a crée l’opération « îlot 10 ». Cette opération avait pour
123
objectif de réaliser un curetage complet dans le quartier Pêcherie avec des créations d’ouverture, de
percements etc. Pourtant, aucun percement n’a été crée. Il a manqué un vrai travail global.
Pour les OPAH intermédiaires (OPAH « pêcherie » de 1985 à 1987, OPAH « Romans plateau »
de 1990 à 1993), je n’étais pas sur les projets, mais je pense qu’on a fait comme auparavant, c’est-à-
dire « réhabiliter les yeux fermés ». Il devait y avoir des objectifs que l’on a rempli, certes, au niveau
quantitatif mais pas forcément au niveau qualitatif.
Or, tout n’est pas réhabilitable et cela a été une réelle prise de conscience en 1995. Car il y a
des erreurs qui ont aussi été commises : on a parfois réhabilité des immeubles qui auraient dû être
détruits. Le quartier Pêcherie est encore aujourd’hui le quartier le plus difficile, on fait encore trop de
social dans ce quartier, il faudrait peut-être mettre des immeubles en copropriété, ce qui est possible
de faire aujourd’hui. Ce qu’il faudrait sur le centre ancien c’est de la réhabilitation de qualité et une
intervention bien plus lourde sur certains quartiers et sur l’espace public.
A partir de 1995, s’est posé la question d’agir plus lourdement sur les quartiers du centre
ancien par le biais de RHI (procédures de Résorption de l’Habitat Insalubre). Une étude sur ces
possibles RHI, qui s’est étalée sur deux ans, a été réalisée avec Yves Potier. Nous avons essayé de
déterminer quels secteurs pouvaient être démolis. On a cerné des espaces dans le quartier Saint-
Nicolas où il existait de réelles situations mal-vivables. Ces RHI permettent de détruire des
immeubles complètement insalubres, de réfléchir sur l’aménagement de petites places publiques
voire de reconstruire d’autres logements.
Néanmoins, les RHI sont aussi des outils avec une « entrée sociale ». On lance des enquêtes
sociales et des enquêtes sur l’insalubrité gérées par la DDASS, on dresse des constats sur les
conditions d’habitat des habitants. Avec ce type d’outil on a une vision sanitaire des choses.
Les études préalables ont donné un résultat de « RHI multi-sites » qui touchent le quartier
Pêcherie, le quartier Jacquemart, la rue Saint-Nicolas. Ces sites sont dispatchés dans le centre ancien.
Le bâti n’étant pas réhabilitable, des espaces publics sont pensés, comme ce qui a été réalisé depuis
peu sur la rue des Vieilles Ecoles (création d’une placette).
Les RHI permettent d’avoir des aides extrêmement importantes (financent 70% du déficit de
l’opération). On détient aussi des outils juridiques, par exemple, on peut exproprier beaucoup plus
facilement. Néanmoins, ce sont des opérations qui mettent du temps à être réalisées avec une RHI.
Pendant cette période, la commune a largement investi dans le centre ancien en termes de
places et de parkings.
Enfin, une troisième période de l’action publique marque le regain d’intérêt du patrimoine
bâti sur le centre ancien notamment de la part des élus. On a décidé d’arrêter de banaliser le
patrimoine (en mettant des faux plafonds en détruisant des cheminées datant du XVIe siècle etc.).
Avec les TIA (Travaux d’Intérêt Architectural), on a pu mobiliser des aides que l’on n’avait jamais
utilisées auparavant avec les OPAH. Pourtant c’est un outil très utile pour mettre en valeur le
patrimoine extérieur et intérieur des logements dans le centre ancien.
124
J’ajouterai que c’est parfois difficile de faire changer les mentalités et de convaincre les élus
d’agir autrement sur le centre ancien. Néanmoins, j’ai moi-même était élu et c’est un rôle qui n’est
pas facile du tout, car la temporalité des mandats, c’est-à-dire 6 ans, s’écoule très vite et il est parfois
aussi difficile de convaincre ses propres collègues sur le bienfait de prendre des risques qui
permettent de changer une situation de manière bien plus radicale.
Patrimoine et réhabilitation :
- Etait- ce plus facile de réhabiliter avant quand il n’y avait pas de normes strictes découlant
de la ZPPAUP ?
La ZPPAUP est un règlement mais surtout une reconnaissance des élus de la nécessité de
sauvegarder ce patrimoine qui peut réellement faire office de valeur ajoutée.
La réhabilitation permet d’imposer des normes de qualité et de respect du patrimoine. Nous
ne sommes plus dans la négociation constante avec les propriétaires (bailleurs et occupants) puisque
la ZPPAUP fait office de loi réglementaire. Les subventions ne sont délivrées qu’à condition que ces
règles soient respectées. Cela permet aussi une meilleure coordination avec le service urbanismes et
avec l’ABF.
De plus, Romans détient ce que certains appellent un « maximum de patrimoine intéressant »
dans la Drôme et celui-ci reste complètement sous-exploité. Le centre-ancien de Romans détient de
véritables joyaux qui ne sont pas mis en valeurs comme les cours intérieures des hôtels particuliers.
On peut les voir seulement pendant les journées du patrimoine. Alors que, par exemple, dans le
quartier de Saint-Jean à Lyon, ces cours intérieures détiennent une grille de qualité qui permet de
créer une transparence sur la qualité de ces cours intérieures.
Centralité à Romans et logique urbaine:
- Pourquoi n’y a-t-il pas une réflexion plus large sur la centralité à Romans ?
Je sais qu’il existait des projets qui n’ont jamais aboutis comme la création d’un parking sous
terrain sous la place Majeure. Je ne pense pas que ce soit la priorité aujourd’hui.
- Quel est le centre de Romans exactement ? centre ancien (certains Romanais ne
connaissent même pas le centre ancien)? Marques Avenue ? Boulevard ? Quartier au Sud de la
Gare ?
C’est une bonne question. C’est vrai qu’on du mal à le déterminer.
- Y a t’il des éléments extérieurs qui freinent la redynamisation du centre ancien tant en
terme d’occupation de logement qu’en terme commercial ?
Bien sûr, par exemple, dans le quartier Duchesne, qui est situé relativement proche du centre
ancien, il y avait des friches industrielles importantes. On a reconstruit des grands programmes de
logements où les gens ont accès à des appartements aux normes d’isolation d’aujourd’hui et avec
des garages intégrés aux pieds des immeubles. C’est dommage en un sens car on a construit
uniquement du logement, on aurait pu faire des quartiers plus mixtes avec l’intégration d’activités
tertiaires avec des bureaux etc. Du coup ces logements aux normes standards concurrencent
125
fortement les logements du centre ancien où le « charme de l’ancien » n’est pas suffisant pour attirer
une population non-avertie.
Le problème du stationnement se pose durablement dans le centre ancien : comment
répondre aux exigences des personnes qui désirent avoir leur voiture tout proche de leur logement
alors que le charme du centre ancien peut se traduire aussi par sa piétonisation ?
Enfin, étendre de grandes zones commerciales en entrées de villes et tenter de redynamiser
les centres des villes sont deux objectifs complètement contradictoires. Cela n’est pas forcément le
cas à Romans, mais on peut retrouver ce phénomène dans des communes voisines. Il faut donc faire
attention à ce type de phénomène et faire des choix stratégiques concernant la redynamisation des
centres-villes.
Entretien le 15 Avril de 9h00 à 9h40 au service Urbanisme de la mairie centrale de
Romans.
- Quelle est la différence entre le périmètre OPAH et l’OPAH RU soutenue (au niveau des
subventions)?
Entre l’OPAH et l’OPAH-RU il n’y a pas énormément de différence. Une OPAH simple dure 3
ans et une OPAH-RU dure 5 ans.
Théoriquement, l’OPAH-RU est imprégné du système de l’ANRU (comme on peut le retrouver
dans le Renouvellement Urbain dans le quartier de la Monnaie): il pourrait donc être prévu des
démolitions (RHI) et avec un programme de reconstruction, ainsi qu’un travail important sur les
espaces publics. Néanmoins, cela ne s’est pas passé comme cela sur Romans. Sous l’équipe
municipale précédente, il y a eu un moment de flottement vis-à-vis de ce que l’on voulait faire sur le
centre ancien. Avec le Contournement Nord Ouest de Romans (CNOR), de très lourds
investissements ont été injectés dans ce projet qui est en cours de réalisation aujourd’hui. Du même
coup, l’arbitrage financier ne s’est pas fait en notre faveur pour un projet d’ensemble sur le centre
ancien. D’ailleurs, la ville de Romans avait fait un dossier de candidature pour l’ANRU sur le centre
ancien mais qui n’a pas abouti. On retrouve encore « la politique à deux têtes » de Romans qui
perdure depuis une trentaine d’années, avec comme cibles prioritaires le quartier de la Monnaie et
le Centre Ancien.
Au dernier Comité de Pilotage de l’OPAH, Jean Julian, le représentant de l’ANAH dans la
Drôme, nous a annoncé qu’il y aurait un changement des règles de subventions : on ne financerait
plus les travaux de Propriétaires Occupants, il y aurait seulement des facilités financières pour les
Propriétaires Bailleurs. Or, cela fragiliserait encore plus la situation du Centre ancien. Néanmoins, il
reste encore jusqu’à fin 2011 pour la convention l’OPAH-RU, je pense qu’il y aura des adaptations
locales et que l’on sauvegardera nos règles initiales de la convention de l’OPAH-RU jusqu’à sa fin.
126
- Première OPAH sur Romans et Bourg de Péage ?
C’est la deuxième OPAH qui a lieu à la fois sur Romans et Bourg-de-Péage. Pour la précédente
OPAH, c’était la CCPR qui avait l’étude préalable en ciblant des immeubles que la DDASS et le SCHS
suivaient de près.
- Comment fonctionne le processus de l’OPAH ? Est-ce le comité de pilotage qui propose
directement à des publics cibles du centre-ancien son aide ou est-ce le contraire ?
Nous réalisons des permanences d’accueil certains jours et avons produits de simples
communications dans la presse. On a voulu éviter « le tout-venant », car on a des objectifs précis, on
préfère faire une action massive sur un immeuble plutôt que réhabiliter une toute petite pièce dans
un appartement. Nous travaillons avec les services techniques municipaux. En fait, le service
Urbanisme fait un premier tri des personnes qui veulent réaliser des travaux intérieurs dans leurs
logements sur le Centre Ancien. Puis, le service Urbanisme recueille les coordonnées des personnes,
nous les donnent, et nous les rappelons dans les plus brefs délais afin de convenir à une première
rencontre pour savoir quel est leur projet et quelle est la hauteur des subventions dont ils ont droit.
- Quelle est la différence une OPAH et un PNRQAD ?
Le PNRQAD est un outil qui incite une vision plus globale de ce que l’on veut faire sur le
territoire. Je pense que c’est un outil qui emprunte un peu aux outils financés par l’ANRU. Il y a la
possibilité de réaliser des acquisitions publiques. Avec le PNRQAD, il semblerait qu’un projet global
avec des thématiques tout azimut pourrait être monté, celui-ci s’appuierait sur un financement fort
de l’Etat, un partenariat plus important et des procédures multiples.
Il serait intéressant que la ville puisse acquérir des bâtiments, les réhabiliter ou les rénover et
les revendre seulement à des propriétaires occupants.
En 2009, 20 villes ont été sélectionnées (dont Annonay) pour le PNRQAD, nous attendons les
retours officiels sur les premiers résultats de cette procédure pour en savoir plus. Nous attendons
aussi la seconde sélection pour savoir combien d’autres villes peuvent profiter de la procédure du
PNRQAD.
127
Logements
- Y’a-t-il Beaucoup de demandes de commerces de rez-de-chaussée qui veut se transformer
en logements ?
Il y en a assez peu. On ne l’autorise que très rarement car un logement seul au rez-de-chaussée
cumule de nombreuses nuisances (passage de personnes ou de voitures, bruits, odeurs). Le centre
ancien n’a pas la bonne configuration pour ce type de changement de destination. C’est d’ailleurs
pour cela qu’on a voulu intégrer dans le PLU des rues dans le Centre Ancien ou le changement des
commerces en logement est impossible. L’avis du service d’hygiène permet aussi de légitimer ce
choix.
- Comment faire pour créer de la mixité sociale ? Quelles procédures ? Quelles règles avec
L’OPAH ?
Pour la réhabilitation d’un immeuble de Propriétaires Bailleurs il doit y avoir : un tiers de
logements conventionnés, un tiers de logements intermédiaires, et le dernier tiers doit être des
logements libres. Je trouve que c’est une très bonne règle que l’on est tenu de respecter ! Cette
règle est inscrite dans la convention pour ce qui est de la mixité à l’immeuble.
La convention parle aussi de mixité à l’îlot (quand on réhabilite moins de trois logements par
exemple). Or, dans la convention, il n’est pas défini ce qu’on appelle « îlot ». De plus, quand on a
autorisé un logement conventionné à une personne et qu’au niveau de l’îlot on a atteint le tiers des
logements conventionnés, et que l’on refuse à une autre personne la création d’un logement
conventionné, il peut y avoir un recours devant la justice. Et sachant que nous n’avons pas de règle
très stricte à ce sujet, la justice peut donner raison à la personne à qui nous n’avons pas donné notre
accord.
Il faut aussi savoir que l’on arrive à 60% d’aides pour la création d’un logement conventionné,
ce qui suscite une volonté forte des Propriétaires Bailleurs à vouloir en créer.
- Un relogement est-il prévu pour les habitants vivant dans des logements insalubres (le
temps des travaux) ?
Nous essayons, durant le temps des travaux d’une réhabilitation d’immeuble, de faire du
relogement dans le même immeuble (c’est-à-dire que la personne habite dans un autre logement du
même immeuble durant le temps de travaux).
A vrai dire, on trouve toujours des solutions. Le relogement peut se faire à l’extérieur de
l’immeuble initial, ou les Offices HLM proposent aussi des logements le temps des travaux.
- Les nouveaux programmes doivent-ils respecter l’architecture usitée dans le centre
ancien ? voir la reproduire ?
Il est déjà arrivé après une RHI de reconstruire à l’identique. Les ABF ont assez de pouvoir dans
le centre ancien de Romans. Leur avis est bien respecté ce qui n’est pas le cas dans toutes les
communes voisines.
128
Or, je trouve cela dommage qu’il n’y est pas de place pour l’architecture contemporaine dans
le Centre Ancien. C’est d’autant plus dommage qu’avec l’architecture contemporaine on pourrait
faire des logements avec une haute performance énergétique, ce qui est bien plus dur avec un bâti
ancien. On est encore trop frileux en France pour mélanger l’ancien et le moderne, comme cela peut
se faire en Espagne ou ailleurs.
129
Entretien avec Martial Gaffet – Responsable de la vie associative de la
ville de Romans
Entretien réalisé le jeudi 8 avril 2010 de 11h à 12h, service Urbanisme de la ville de
Romans.
- Comment se porte la vie associative dans le centre ancien? Y a-t-il beaucoup
d’associations? Si oui, quels types d’associations ? Quels publics ?
Il y a beaucoup d’associations dans le centre ancien. Celles-ci sont diverses et variées.
La plus active est celle de la Maison de Quartier Saint-Nicolas. Cette Maison de Quartier
héberge une dizaine d’associations en « réseaux solidaires ». Il existe un lieu dans la Maison de
Quartier qu’on appelle « le Petit Nicolas » prévu pour les 0 à 6 ans. Cet un espace d’accueil a été
crée pour les parents et les enfants, un psychologue est à leur disposition pour parler de tous les
problèmes qu’ils peuvent rencontrer. Il y a aussi des ateliers d’éveil. Tout cela est anonyme et gratuit.
Cette structure a son importance dans le centre ancien.
Cette Maison de Quartier a 20 ans, elle a déménagé il y a 10 ans vers l’école Saint Just pour
plus de proximité avec les habitants. Elle détient un rôle d’ « Education populaire », c’est-à-dire
qu’on accueille les habitants qui veulent créer un projet ou juste participer à des activités, la Maison
de Quartier propose son aide pour les réaliser. Cela peut se faire sur le long terme ou en fonction
d’activités plus ponctuelles. Les Maisons de Quartiers ne fonctionnent donc pas comme les MJC, elles
n’ont pas un catalogue préétabli d’activités mais elles se mettent au service des envies des gens.
La Maison de Quartier abrite l’association « contrecoup » qui lutte contre les violences
conjugales. Ce sont surtout des femmes qui interpellent ce collectif, il peut y avoir des débats et une
écoute attentive vis-à-vis de ce public, voire des aides pour un relogement quand la personne se
trouve dans une situation d’urgence.
Des projets plus ponctuels sont organisés autour des jeunes. Nous le faisons en partenariat
avec le Lycée et le Collège Triboulet.
Les « soirées du lavoir » animent aussi le centre ancien. Ces soirées se passent au mois de juin
et au mois de juillet, le vendredi soir. Les habitants participent et profitent de cette petite festivité
avec parfois des animations musicales, des barbecues… cela dépend des envies des habitants. Cela
fait 5 ans à peu près que cela existe et ces petites festivités marchent plutôt bien.
Des sorties en car pendant les vacances sont prévues (Annecy, aller voir la mer etc.) pour un
prix très modeste afin que certaines personnes puissent avoir un semblant de vacances ; car ce sont
des personnes qui ne pourraient pas partir en temps normal.
La Maison de Quartier a aussi mis en place un centre de loisirs participatif « nature et
enfants ». Nous louons un gîte dans le Vercors pendant quelques jours durant les vacances scolaires.
On essaye d’intégrer les parents dans le projet (repas, animation etc.). C’est en quelque sorte une
« porte d’entrée pour la famille », et cela permet aussi de sortir les enfants de leur quartier. La
Maison de Quartier Saint-Nicolas se veut être un groupement d’associations de proximité. Une Fête
130
de la Saint-Nicolas (6 décembre) est animée par la Maison de quartier : un défilé se fait dans le
centre-ville.
Il existe d’autres associations (hors Maison de Quartier) dans le centre ancien. Par exemple, le
collectif « Hameçon » se situe rue Pêcherie (où se trouvent de nombreux artisans); ce collectif
permet d’encadrer un parcours artistique et de faire quelques expositions ponctuelles sur la place
Folquet et le long de la rue Pêcherie. Se met en place un projet d’ « expression artistique » sur les
vitrines non-occupées. C’est une association qui essaye de stimuler l’activité économique des
artisans, même si à la base, il n’y a pas de but lucratif derrière ces activités.
La Boucherie Chevaline existe depuis 10 ans environ. C’est un café associatif qui est ouvert à
certaines horaires. Il permet de créer du lien social. La Boucherie Chevaline a un rayonnement sur
l’ensemble de la commune. Un calendrier de l’avant a été mis en place au mois de décembre : les
participants créent de l’animation dans la rue, chez l’habitant, dans les commerces. Des vides-grenier
sont aussi parfois organiser/animer par la Boucherie Chevaline. Néanmoins, certaines personnes ont
du mal à y aller car il y a une transmission de valeurs politiques (écologie) envers les participants et
cela crée parfois un certain amalgame.
Trois associations de commerçants sont présentes dans le centre ancien. L’association
commerciale du centre historique (placée rue Mathieu-de-la-Drôme s’occupe de la braderie, créent
parfois des défilés de modes dans la rue Mathieu-de-la-Drôme), et participent ensemble à la
décoration de noël. L’association de la Côte jacquemart fait participer les commerçants à la
décoration de Noël et puis sur d’autres activités plus ponctuelles (par exemple, un concours de
dessin des enfants qui ont été affichés dans une vitrine de commerce vacant). Enfin, une dernière
association de commerçants existe c’est celle de l’association des deux places, Perrot de Verdun et
celle du joueur de Flûte. Cette dernière association est en sommeil actuellement.
L’association Accès Université populaire se trouve au-dessus de l’école Saint-Just. Cette
association a pour but de transmettre le savoir et les savoir-faire (formation sur le long terme au
niveau de l’apprentissage des langues, du savoir culinaire, des cycles philo sont aussi mis en place).
Cette association a un certain rayonnement sur l’ensemble de la ville mais elle reste peu fréquentée
par les habitants du centre ancien.
Au niveau des écoles : l’association des parents d’élèves de Saint-Just participe à la Kermesse
de l’Ecole, animent des vides-grenier et créent des festivités ponctuelles. L’école maternelle
Manchorelle qui est composée de 3 ou 4 classes, détient un centre de loisirs pour les enfants. Ce
centre de loisirs a une bonne réputation, mais son dynamisme est un peu mis en vieille aujourd’hui.
La Maison des syndicats est une structure qui a un rayonnement très important sur
l’ensemble de la ville.
L’association des amis de la vigne Saint-Nicolas est animée par un groupe d’anciens qui fait du
vin une fois par an.
L’association de sauvegarde du patrimoine Romanais Péageois basée rue des Clercs anime
des visites du centre ancien et est gérée par des personnes qui ont une grande connaissance de
l’histoire de Romans (rôle d’informations et de sensibilisation).
131
L’association des anciens combattants est basée dans le quartier Saint-Nicolas.
L’association « Romans International » a un rôle de coopération avec les cinq villes jumelées
avec Romans Varèse (Italie) en 1957, Coalville (Royaume-Uni) en 1962, Zlin (République Tchèque) en
1967, Straubing (Allemagne) en 1970 et Zadar (Croatie) en 1985. Trois objectifs : Permettre la
connaissance la culture de l’autre, développer l’apprentissage interculturel et sensibiliser à la
citoyenneté européenne.
Au niveau des associations dites « artistiques », on dispose du théâtre de la courte échelle
avec dans les mêmes locaux, au premier étage, l’association Empi et Riaume qui concourt à la
conservation des danses folkloriques locales avec une manifestation nommée « Folklore » au mois de
juillet dans Romans. Au deuxième étage, se trouve l’association le Fil à la Patte qui est une
association de danse contemporaine. Cette compagnie de dans partage ses locaux avec l’association
« le petit monde artistique » qui est une association de danse basée sur le mode des comédies
musicale (pour les 6 à 20 ans).
Au niveau environnemental, il existe la Maison de la Nature, elle se situe vers les berges de
l’Isère. Elle regroupe plus d’une quinzaine d’associations concernant la nature et l’environnement. La
Maison de la Nature rayonne sur la ville et même au-delà. De plus, elle profite d’un nouveau parc
restauré (dont pourrait bénéficier le centre ancien) et d’un « hôtel pour les insectes » (insectes qui
nichent ici car la ville a dénaturé leur lieu de vie).
Enfin, il existe une Association syndicale des locataires, ce type d’associations sont très peu
nombreuses dans le centre ancien. Cette association se situe dans l’Immeuble St George, en face de
la future Cité de la Musique. L’association détient un local pour se réunir et permet aux locataires de
partager des moments de convivialité.
- Les Associations ou la Maison de Quartier du centre ancien sont-elles mobilisées pour le
Carnaval ? et la population du centre ancien ?
C’est une question assez délicate. Car, en fait, c’est la Maison de Quartier Saint-Nicolas qui a
remis au goût du jour le Carnaval de Romans en faisant participer des personnes du centre ancien. Et
c’est en 1997 que la mairie de Romans s’est réapproprié le carnaval en le finançant par le biais de
subventions bien plus importantes, et en le professionnalisant. La Maison de Quartier Saint-Nicolas
s’est donc en quelque sorte « fâchée » avec la mairie, même si certaines années elle a participé au
carnaval (et d’autres années non).
Pour les commerçants, la situation aussi est délicate. Certains commerçants dans l’alimentaire
font un très bon chiffre d’affaires le jour du Carnaval. D’autres commerçants (hors alimentaire) ont
un chiffre d’affaires moins importants le jour du Carnaval, notamment ceux qui sont basés « en haut
de la ville », sur les boulevards. Alors que pour la fête de la musique, les commerçants se mobilisent
bien mieux.
- Quelle vision avez –vous du centre ancien de manière générale ? Comment le décririez-
vous en quelques mots ?
Même si la tissu associatif est assez étalé sur la commune, le centre ancien détient un atout
que d’autres quartiers de Romans n’ont pas : le centre ancien détient un nombre considérable de
132
salles culturelles (Les Cordeliers, la salle Jean Villard, l’Ecole Saint Just etc.) qui participent vivement à
l’aspect vivant du tissu associatif. Ces salles culturelles ne sont pas seulement utilisées par des
associations du centre ancien mais par d’autres associations de Romans.
Ensuite, ce qui porte parfois à quelques tensions dans le centre ancien, c’est la cohabitation
des personnes qui viennent pour les commerces et les habitants du centre ancien.
Malgré tout, je trouve que le centre ancien est plutôt vivant et que c’est un joli quartier. Il est
d’ailleurs mis en valeur par le marché du vendredi matin et encore plus avec celui du dimanche
matin. Le marché du dimanche est un rendez-vous hebdomadaire pour beaucoup de gens. Il connaît
un gros succès car des gens de Valence et de Tain viennent faire leurs courses ici.
Néanmoins, c’est vrai que la vie nocturne dans Romans s’arrête très tôt. Peut-être que cela est
dû au sentiment d’insécurité qui pèse sur le centre ancien (bien que moi-même je ne le ressens pas)
et notamment du côté de la place Macel et du Square René Char.
- Votre rôle dans la structure ?
Je suis le directeur de la vie associative et des quartiers. Je suis en charge de la coordination
des quatre mairies annexes, de la cohésion des équipes qui travaillent sur la vie associative, je suis
chef de ce service, je travaille aussi sur les événements festifs, je fais un peu le lien avec toutes les
associations. Je conseille aussi les nouvelles associations arrivant sur Romans concernant leurs
activités, je les conseille notamment sur leur budget. Je peux donc aider à « monter » une
association, et la mettre en lien avec d’autres associations. Je fais surtout le lien avec les maisons de
quartier. Le service peut aussi proposer des objectifs clairement définis pour certaines associations
subventionnées. Enfin je fais aussi le lien entre les élus municipaux et les élus du monde associatif.
133
Entretien avec Nadège Gauthier– RBE – Chargée de la mission
Commerces et Artisanat sur le centre ancien romanais
Entretien le mercredi 14 avril de 9h30 à 10h30, au service Urbanisme de la mairie de
Romans
- Sur quel territoire travaillez-vous ?
Le Territoire de Romans-Bourg-de-Péage Expansion (RBE) regroupe 35 communes. L’action de
RBE se concentre avant tout sur Romans même si nous agissons sur quelques communes rurales.
RBE est un syndicat économique qui a été crée en 2006. Après la « crise de la chaussure », nous
devions regrouper les deux communautés de communes sous la forme d’un syndicat. La création de
ce regroupement a été impulsée par le sous-préfet. RBE devait s’occuper du volet économique et
cela s’est accompagné par un Contrat de Site.
Avant la création de RBE, La communauté de Commune de Romans (CCPR) avait déjà mis en
place un soutien au commerce et à l’artisanat. Parallèlement, Bourg-de-Péage avait fait la même
chose concernant son territoire, ce qui a facilité le regroupement du volet économique sous RBE.
RBE détient trois types d’opérations, dont une que l’on a paramétré sous le nom
d’ « agglomération centre ». Une quinzaine d’actions sont regroupées sous cette opération qui vont
des études économiques, à la « gestion centre-ville », du lien avec Valence, du marché à Romans, du
volet d’accompagnement du commerce etc.
Nous sommes en lien avec les associations de commerçants (association des commerçants du
centre historique, de la Côte Jacquemart, et de Fanal). Nous sommes entrain de mettre en place un
périmètre plus large sur Romans et Bourg de Péage appelé « duo de villes » qui regrouperait le
maximum de commerçants afin qu’ils créent des animations communes. En 2008, on avait essayé de
réaliser cette démarche, mais cela avait été très complexe au niveau de la distribution des
subventions.
- Comment ces actions sont-elles financées ?
C’est le Fond d’Intervention pour les Services, l’Artisanat et le Commerce (Fisac) et des fonds
propres de RBE qui donnent des subventions aux commerçants. Par exemple, pour la plupart des
subventions données aux commerces et à l’artisanat, elles représentent 20% du projet (10%
provenant du Fisac, 10% de RBE), pour les études préalables (50% sont financés par le Fisac, 50%
sont financés par RBE), pour ce qui est des animations commerciales et artisanales c’est en grande
partie le Fisac qui les financent. Des partenariats sont réalisés aussi : par exemple, avec la ville de
Romans nous avons travaillé ensemble sur l’acquisition du 37 et 39 Côte Jacquemart (Commerces et
logements à réhabiliter).
134
- Quelles procédures pour redynamiser les commerces ? Comment cela se passe
concrètement ?
La porte d’entrée de toutes nos actions : c’est le commerce. Le commerce n’a pas qu’une
fonction purement économique, il participe grandement au cadre de vie, il permet d’autres fonctions
comme la promenade, la vie d’un quartier, les rencontres et le contact social.
Au niveau de nos actions, nous n’avons pas de périmètres très précis, notamment au niveau
des rues. Nous aidons pour le rafraichissement des façades, la modernisation des locaux, nous
proposons une aide pour l’installation dans les locaux commerciaux.
Se pose aussi la question de l’échelle de décision : la commune peut être une échelle plus
adaptée sur les secteurs prioritaires (rues commerciales) qu’elle veut redynamiser ? A mon sens, elle
peut être un bon niveau de décision si elle gère tout ce qui est de l’ordre de l’opérationnel. A voir
aussi s’il y a un regroupement des deux communautés de communes de Romans et de Bourg de
Péage, cette probable alliance aura plus de compétences et pourra aussi être une échelle adaptée
concernant la redynamisation commerciale.
- Pourquoi ne pas miser sur une redynamisation plus globale sur « les centres de Romans »
(hauts et bas de la ville) ainsi que de penser une redynamisation commerciale en lien avec
Marques avenue ?
Est en cours d’étude sur Romans ce qu’on appelle une « gestion centre-ville ». C’est une
opération de Mangement de projet de centre-ville suivie par Pierre Francis, membre de l’AMCV
(Association du Management du Centre-ville). Cette association belge promut un partenariat public-
privé favorisant la coopération de tous les acteurs du centre-ville (que ce soit des élus, des
commerçants, des personnes travaillant dans le tourisme, l’animation culturelle etc.) et que cette
coopération permettrait de créer une forme de développement économique et social au sein de la
ville.
Dans l’Idéal, ce regroupement serait transversal et neutre (partage des pouvoirs, avec souvent
le maire comme président, l’adjoint étant un commerçant) et pourrait permettre un financement qui
se composerait de 50% de fonds publics et de 50% de fonds privés. Mais, cela est rarement le cas,
l’investissent public est souvent bien plus important. Néanmoins, Saint-Etienne, Neuville-sur-Rhône,
Nouméa, des communes dans l’Ain ont réalisé cette « gestion centre-ville » et cela fonctionne bien.
C’est une réussite notamment au niveau de la collaboration des élus et des commerçants.
Pour ce qui est de Romans, Pierre Francis pense qu’il faudrait partir d’un périmètre de
centralité restreint (c’est-à-dire, délimiter un périmètre englobant la rue Mathieu-de-la-Drôme, la
place Maurice Faure, et la côte des Cordeliers). Ensuite, quand les premiers effets bénéfiques se font
ressentir, il faudrait étendre cette action sur un périmètre élargi.
Bien sûr, Marques Avenue devrait être un partenaire essentiel de cette redynamisation du
centre-ville. Pourtant, on ne l’inclurait pas forcément dans ce périmètre élargi (le périmètre élargi
étant le centre ancien, les boulevards et le quartier en dessus de ces boulevards).
135
Il est vrai qu’il existe une sorte de coupure du linéaire commercial avec sur les boulevards et
la rue Jacquemart la présence des commerces de proximité (notamment avec les commerces
alimentaires) et des services alors que sur la côte de Cordeliers et la rue Mathieu de la Drôme nous
avons plus affaire à des boutiques de prêt-à-porter et de haute gamme.
Un travail sur la signalétique est en cours. On ne peut pas affirmer que cette nouvelle
signalétique ramènera des personnes dans les commerces, mais elle favorisera peut-être les
déplacements des personnes jusque dans le Centre ancien.
L’office de Tourisme qui est en cours d’installation dans Marques Avenue est une aubaine
pour redynamiser le centre ancien, on pourrait peut-être drainer le flux des visiteurs qui viennent à
Marques Avenue jusque dans le centre-ancien.
- Quelles rues sont les plus dynamiques dans le centre ancien ? et pourquoi certaines le sont
et d’autres non ?
La rue Mathieu-de-la-Drôme a longtemps été en situation de déprise. Aujourd’hui c’est celle
qui a le plus de cachet. Néanmoins, sa redynamisation est due à une initiative privée. De plus, se
pose la question de la piétonisation ou non sur cette rue.
La côte des Cordeliers est dynamique, la place Maurice Faure l’est un peu moins car les
personnes traversant la rue Mathieu-de-la-Drôme ne continuent pas sur la place Maurice Faure
(problèmes d’enseigne). Alors que la vacance des commerces reste assez stable sur les boulevards, la
première moitié de la rue Jacquemart, la côte des Cordeliers, on note une certaine déprise sur la
place Maurice Faure.
- Faites- vous une sélection des commerces installés : commerces de proximité ou
commerces de haut de gamme ? Quels sentiments animent les commerçants vis-à-vis du centre
ancien ?
Non, nous ne faisons pas de sélection, cela se fait assez naturellement, car les locaux dans le
centre ancien sont souvent très chers. Il faut donc avoir « les reins solides » si on veut s’installer dans
le centre ancien.
Certains commerçants cherchent le passage avant tout, donc ils veulent s’installer sur les
boulevards. Pourtant, quand des locaux intéressants se libèrent dans le centre ancien, cela ne gène
pas les commerçants de s’installer ici.
Néanmoins, d’autres personnes propriétaires des commerces de proximité (par exemple une
pharmacie placée Maurice Maure) du centre ancien ferment boutique car ils rencontrent des
difficultés au quotidien : des faits de délinquance récurrents, une trop grande concentration de
population en grande difficulté socio-économique comme principaux clients etc.
La « mixité vers le haut » ne se fait pas, j’ai l’impression que la population se paupérise de plus
en plus dans le centre ancien, alors que la mixité doit se réaliser de manière extrêmement fine. Je
suis en contact avec des agences immobilières qui refusent de diffuser des annonces de logements
ou de locaux de commerces dans certains secteurs du centre historique. C’est dommage car le centre
ancien détient une réelle plus-value touristique et commerciale qui s’ignore totalement. Il faudrait en
136
effet miser sur un marketing urbain plus prononcé, mais ce sont des opérations qui coûtent souvent
très chères et qui doivent être réalisées sur le long terme.
Ensuite, la vie nocturne à Romans est au point mort, cela est aussi dû au fait que Romans n’est
pas une ville étudiante. C’est difficile de revenir à des habitudes perdues. Je trouve que ce serait déjà
bien si les commerces du centre ancien soient ouverts entre midi et deux au moins le vendredi et le
samedi.
Enfin, les abords du centre ancien ne sont pas suffisamment traités. Le quartier de la Presle et,
notamment son parking dégradé, renvoient une image négative et ne donnent pas envie de
s’aventurer dans le centre ancien. Même si le problème du stationnement est récurent dans le
centre ancien, il faudrait au moins qu’il y est un meilleur entretien des places de stationnements qui
existent déjà à Romans
- Quel rôle dans votre structure ?
Je suis chargée de la mission commerces et artisanat. Les personnes qui ont le même type de
mission que moi sont appelés « animateurs Fisac ». Mais je n’aime pas tellement cette catégorisation
car les fonds financiers comme le Fisac peuvent être diminués voir disparaître avec la conjoncture
actuelle. Or, il faut bien que notre structure perdure même si nos financements diminuent. C’est
pour cela que nos actions ne portent pas le nom « Fisac » mais « politique d’intervention
commerce », ce qui est aussi une appellation bien plus parlante.
137
Entretien avec Françoise Sarraillon – Directrice de l’association de
sauvegarde du patrimoine romano-péageois
Entretien réalisé le mercredi 21 avril 2010 de 9h30 à 10h45, dans les bureaux de
l’association de la Sauvegarde du patrimoine Romano-péageois, rue des clercs.
- Quelles actions et quels objectifs votre association de sauvegarde du patrimoine s’est-elle
fixée ?
Tout d’abord, notre association a un rôle d’informations sur la richesse patrimoniale du centre
ancien romanais. Il existe une vraie méconnaissance des gens mais aussi des élus et des directeurs de
service de la mairie concernant le patrimoine romanais, même si nous discernons bien que, parmi
eux, certains ont la volonté de le connaître. On constate que de nombreux Romanais ne
s’approprient pas le patrimoine de leur ville.
Pourtant, il est de l’intérêt de la ville de miser sur son patrimoine en le valorisant, cela
permettrait de dégager peut-être des fonds pour enfin débloquer certaines situations.
Notre association est composée d’une vingtaine de personnes et nous faisons des groupes de
travail qui diffèrent selon la thématique que l’on souhaite étudier. Par exemple, on a voulu travailler
sur le canal de la Martinette à Romans, et ce travail a aboutit à une visite pendant les journées du
patrimoine, beaucoup de personnes ont été intéressées et ne connaissaient pas du tout ce canal
alors qu’il faisait partie intégrante de la vie quotidienne des Romanais auparavant. Nous faisons aussi
un grand travail d’animation pendant les journées du patrimoine qui attirent beaucoup de gens. Je
fais visiter le centre ancien aux personnes qui le souhaitent mais aussi aux personnes travaillant à la
mairie pour les sensibiliser à la richesse patrimoniale du centre historique. Nous avons de très beaux
hôtels particuliers avec des cours intérieures mais qui ne sont pas mis en valeur. C’est réellement
dommage, il faudrait trouvait un système pour ouvrir sur l’extérieur ces bâtiments pour que cela
profite à tous.
- Quelles difficultés votre association rencontre t’elle ?
Les financements de la DRAC pour tout ce qui concerne le moyen et le petit patrimoine ne
sont plus réellement à l’ordre du jour. Le service des archives rencontrent de très grandes difficultés
pour obtenir des fonds afin de restaurer le patrimoine qui menace de s’écrouler. Par exemple, sur les
remparts restants, vers le musée de la Chaussure, un arbre pousse dessus et ses racines abiment
considérablement celui-ci. Il me semble qu’il ne faudrait pas tant de moyens humains et financiers
pour pouvoir résoudre ce problème, mais rien n’est fait pourtant il s’agit bien d’une situation
d’urgence.
De plus, l’office de Tourisme qui s’est transformé récemment en EPIC (regroupant RBE, La
CCPR, la communauté de Communes du Canton de Bourg de Péage), est géré d’une manière
politique. Ce ne sont plus les associations qui portent actuellement les animations, la programmation
des offices de tourisme. Et avec tout ce mille-feuilles administratif, on a l’impression que les moyens
138
se dispersent aussi vers les autres communes et que le centre historique de Romans n’est plus
prioritaire, qu’il est laissé pour compte.
On remarque bien aussi que beaucoup de projets n’avancent pas dans le centre ancien ; Par
exemple sur la place Folquet, cela fait déjà un petit moment que l’on se rend compte qu’il y a un
problème important concernant la propreté des espaces publics. Les élus s’en sont bien rendu
compte, et un projet devait être réalisé dans ce sens ; et pourtant rien a encore été fait.
Pour tous ces problèmes, on essaye d’interpeller les élus, mais ils ne sont pas souvent
disponibles.
Parfois, on participe à des présentations faites par la mairie. Par exemple, nous avons participé
à « la commission consultative patrimoine – urbanisme » où le personnel de la mairie nous a
présenté les projets en cours, comme par exemple, la Cité de la Musique ou les logements bientôt
construits sur le tènement Citroën. Nous étions assez déçus de ce type de présentation car nous
pensions qu’il aurait été plus judicieux de discuter des projets avant qu’ils se réalisent, de créer un
dialogue entre la population et la mairie de Romans plutôt que de réaliser une simple présentation
sans échange.
- Selon vous, qu’est ce qui serait à améliorer dans le centre ancien de Romans ? Au niveau
patrimonial ? au niveau de sa gestion ?
La signalétique devrait être changée. Nous savons qu’un travail fait par RBE est fait dans ce
sens. Nous trouvons encore dommage que notre association ne soit pas consultée concernant ce
projet. Il me semble qu’il serait judicieux de placer quelques plans du centre ancien où serait
représenté tout le patrimoine intéressant du centre ancien. Ces plans pourraient être positionnés à
certains endroits stratégiques par exemple : sur la place Maurice Faure, sur la place du Pont Neuf ou
vers la Cité de la Musique. Il faut aussi faire attention à l’affichage sauvage car les restaurants
placardent parfois sur les murs du centre ancien leurs enseignes avec une flèche pour les situer. Si ce
phénomène continue une pollution visuelle va se propager rapidement dans le centre historique.
Un réel cheminement dans la ville devrait être pensé. Cela fait déjà un petit moment que l’on
attend que la rue Mathieu-de-la-Drôme, la place Maurice Faure ainsi que la rue Saint-Nicolas
deviennent piétonnes. Encore faut-il penser à des parkings de report pour que cela puisse se
réaliser. Je pense en plus que cela peut être vraiment bénéfique pour la Place Maurice Faure si on
supprime le stationnement. Car les personnes qui font du shopping dans la rue Mathieu-de-la-Drôme
ne vont pas jusqu’à la place Maurice Faure pensant que c’est un simple parking. Cela nuit
considérablement aux commerçants qui sont situés sur cette place.
Je me demande aussi pourquoi placer l’office de Tourisme dans Marques Avenue ? A mon
sens, il faudrait aussi penser aux Romanais et aux personnes qui vont directement sur le centre
ancien en plaçant une antenne de l’office de Tourisme sur la place Maurice Faure, avec une
personne qui serait au moins embauché l’été pour l’animer.
Au niveau du personnel municipal, il manque un « Monsieur ou une Madame centre ancien »
qui permettrait de faire remonter tout ce qui ne va pas aux services techniques et aux élus.
139
Au niveau de la propreté, un travail important doit être fait car certaines personnes font
preuve d’incivilité en ne ramassant par les déjections de leurs chiens notamment. Cela nuit
considérablement à l’image du centre historique.
Il faudrait aussi valoriser certains bâtiments et certains lieux de Romans. Le Calvaire des
Récollets en est le parfait exemple car il détient une richesse considérable et a résisté au temps
malgré ses destructions successives (Réforme, Révolution française etc.). Une renaissance de ce
Calvaire s’est effectuée au XIXe siècle et témoigne de l’investissement de la nouvelle bourgeoisie
romanaise dans « l’art funéraire ». Beaucoup de chapelles funéraires ont été crées à cette époque,
on retrouve différents styles : le style néo-gothique, le style néo-classique et le style néo-romantique.
Malheureusement, ce Calvaire est aujourd’hui complètement dégradé, des infiltrations d’eau et des
faits de vandalisation l’ont durablement abîmé. Ce Calvaire est aussi méconnu des gens de manière
générale car il est fermé au public et qu’il n’y a pas de communication faite sur celui-ci.
Dans la Rue Pêcherie, se trouve « la Vierge qui s’évanouit », elle aussi mériterait d’être
réhabilitée, mais une action sur l’ensemble du bâtiment sur laquelle la Vierge s’adosse devrait être
faite.
Comme je l’ai dit précédemment, il faudrait qu’il y ait un travail fait sur les hôtels particuliers
et leurs cours intérieures, ainsi que sur les anciennes maisons des tanneurs, des drapiers etc. Il
faudrait aussi penser à exploiter la thématique de l’eau qui était omniprésente à l’époque et qui
tend à disparaître de plus en plus. Une personne membre de notre association a la volonté d’investir
dans l’ancienne chapelle sur l’actuel parc Saint-Romain et de la transformer en galerie d’art
contemporain. Nous sommes entrain de réfléchir sur la manière d’interpeller les élus et la population
sur ce projet afin de mobiliser le maximum de personnes.
Enfin, il s’agirait de communiquer un peu plus sur le chemin de croix. Le jour du vendredi
saint, environ 800 personnes de religion chrétienne et même des personnes non pratiquantes
réalisent le chemin de croix. Cette manifestation est tout de même encadrée par des religieux, cela
se fait de manière assez recueillie et sereine. Nous avons déjà eu quelques reportages sur le chemin
de croix du Grand Voyage sur France 3, mais il faudrait peut-être relancer cette communication
chaque année pour le faire connaître plus amplement.
140
Entretien avec Jean-David Abel – Elu à L’urbanisme, troisième adjoint
Entretien réalisé le lundi 3 mai de 14h45 à 16h, dans e bureau de Monsieur Abel de
la mairie de Romans.
- Quelle est votre position d’élu vis-vis du centre ancien ? Quelles espérances vis-à-vis de ce
quartier ? Quels buts de l’action politique menée ? Quels obstacles (au niveau de la marche de
manœuvre)?
A mon sens, le centre historique des villes fait la différence entre les villes elles-mêmes. Il
produit une ambiance bien particulière et crée une spécificité et un caractère propre à la ville. Le
centre historique est un facteur d’identification dans le sens où quand on se trouve dans un centre
historique on peut dire, selon la morphologie, le bâti, l’architecture, les matériaux, le mobilier urbain,
dans quelle ville nous sommes. Car aujourd’hui, on note une certaine homogénéisation des modes
de faire de la ville (au niveau de la forme adoptée, des matériaux utilisés) dans des quartiers plus
récents. Ces quartiers plus récents ne participent à l’identification de la ville.
Il faut s’attacher à une réhabilitation pour la qualité de vie aussi bien pour les habitants que
pour les personnes qui sont de passage dans Romans. Le centre ancien est un axe majeur et évident
de la politique locale. Il est du devoir des responsables politiques de se charger du centre ancien car
il y a un patrimoine fort, une certaine épaisseur historique de ce quartier avec une utilisation
spécifique de matériaux à préserver. Le centre historique peut assumer un rôle d’éducation et de
pédagogie envers les jeunes sur le passé de la ville.
Cependant, nous avons une marche de manœuvre relativement faible pour deux raisons :
nous avons un frein au niveau financier et un frein au niveau juridique.
Tout d’abord, la commune n’a pas assez de moyens financiers, nous sommes dans un contexte
tendu, et de manière générale l’argent se fait rare même au niveau des subventions de la Région et
de l’Etat. De plus, il faut avoir un projet cohérent et bien défini pour avoir des subventions, ce qui a
pu manquer parfois à Romans. Nous avons aussi raté le coche dans les années 1980-90 par rapport à
certaines subventions, car Romans était une ville quasi monofonctionnelle, c’est-à-dire que tout
tournait autour du cuir (maroquinerie, chaussures, création de boites en carton pour les chaussures,
beaucoup d’entreprises ont embauché de la main d’œuvre et avaient une activité de près ou de loin
avec le cuir). On aurait pu avoir des subventions pour des projets de ville et des projets
d’aménagements urbains considérables avec cette situation. Surtout qu’on était dans une époque où
l’Etat avait de l’argent. Enfin de compte, le centre ancien a obtenu seulement des subventions dites
« normales ». Alors, qu’il aurait été vraiment intéressant d’utiliser des fonds de reconversion
industrielle car, avec ceux-ci, on aurait pu obtenir des financements même pour un projet avec un
volet urbain important. Des bourgs du Vercors d’à peine deux mille habitants ont eu ce type de
subventions. Ces bourgs avaient une industrie liée à l’eau qui s’est peu à peu éteinte, ils ont pu
réaliser une reconversion touristique et créer des aménagements urbains avec ces fonds financiers.
La ville de Romans n’a pas eu la chance d’obtenir ce type de subventions.
La ville de Romans avait un contrat de site qui nous a servi pour tout ce qui est formation pour
la reconversion des personnes qui se sont retrouvées au chômage. Mais nous n’avions pas de projets
urbains prêts et bien ficelés qui auraient pu être financé par ce contrat de site.
141
Il serait aussi intéressant d’utiliser le FNADT (Fond National pour l’Aménagement et le
Développement du Territoire). Dans les années 1990, le FNADT avait beaucoup de fonds auparavant,
il y en a beaucoup moins aujourd’hui mais c’est une source financière qui existe toujours et qu’on
pourrait solliciter pour l’aménagement des espaces publics. Le FNADT pourrait être une solution pour
les aménagements urbains que l’on veut créer, mais c’est un outil qui doit être porté par tout le
monde.
Nous sommes dans une période de « fric rare », c’est pour cela qu’il est essentiel d’avoir une
vision de projet d’ensemble et de ne pas être seulement que dans la réparation et la compensation. Il
faut vraiment avoir un projet d’aménagement qui marque un changement durable sur l’image du
quartier. La commune devrait créer des aménagements notamment sur l’espace public afin d’attirer
des investisseurs privés dans le centre ancien. Aujourd’hui, cette initiative privée est embryonnaire,
c’est à nous de la stimuler.
Au niveau des moyens juridiques : cela fait trente ans qu’on utilise les OPAH. Puis, au fil du
temps nous avons multiplié les opérations et la réglementation sur le centre ancien (PLU, ZPPAUP,
OPAH, OPAH-RU, RHI, procédure de péril et bientôt ORI). Mais, nous avons parfois affaire à des
procédures longues qui n’ont pas toujours été coercitives vis-à-vis des propriétaires qui ne veulent
pas réhabiliter leurs biens immobiliers.
- Qu’attendez-vous de mon diagnostic ? quelles réponses espérez-vous vis-à-vis de celui-ci ?
Je pense que le travail de diagnostic des aménagements urbains et de la création de la
cartographie de ceux-ci sur le centre-ancien est un boulot nécessaire. Ce travail permettra d’avoir
une vision d’ensemble. Et à partir de là, pourra se dessiner une hiérarchie dans ces aménagements
urbains : nous déterminerons lesquels sont prioritaires, lesquels sont secondaires, et puis déterminer
quels aménagements urbains sont intéressants mais qui ne sont pas pressants. Et puis, nous
dresserons, par ce biais, toutes les choses qui sont à faire sur le centre ancien.
C’est aussi une manière de dire aux acteurs économiques, commerciaux, politiques et aux
habitants qu’il y a une volonté de réhabilitation globale sur le centre ancien. On donne un sens à ce
qui veut être fait. C’est aussi une façon de contrecarrer le marché qui augmente les prix immobiliers
malgré une mauvaise image du centre ancien. Il n’y a pas d’intérêt général défendu par les agences
immobilières. Il faut arriver à relancer les investissements et arriver à une valorisation aussi réussie
que dans d’autres centres historiques d’autres villes.
Concernant la mission du diagnostic pour le projet de candidature du PNRQAD, il faut insister
sur plusieurs points :
- Tout d’abord, le centre historique de Romans a un très fort potentiel.
- Que tout n’est pas dégradé, seuls quelques îlots le sont.
- Cela fait trente ans que les politiques communales tentent de réhabiliter le centre ancien. Il y
a une volonté politique très forte concernant le centre historique, car c’est un enjeu économique et
urbain pour tout le bassin. Se décline une volonté de créer un cœur d’attractivité.
- Il existe une paupérisation d’une part de la population dans le centre ancien, avec un
manque d’entretien du patrimoine de certains propriétaires.
142
- Une amélioration des espaces publics est à réaliser pour attirer des particuliers et des
promoteurs sur le centre ancien.
- Pour mettre en œuvre des aménagements urbains, il y a trop d’étapes administratives. Du
même coup, il n’y a pas d’effet de changement fort sur l’image du centre ancien. Peut-être qu’avec le
PNRQAD, nous pourrions créer ce changement d’image en concentrant les efforts et créant le déclic
de la redynamisation.
- Pourquoi ne pas créer un projet de centralité avec l’effet d’aubaine que pourrait provoquer
Marques Avenue ? Pourquoi le projet de la Place Majeure prend autant de temps à sortir de terre,
alors qu’à mon sens c’est un projet qui participerai grandement à la redynamisation de Romans sur
le long terme et changerai durablement son image ?
Le centre historique, c’est en quelque sorte le centre avant le centre de la ville moderne. Enfin
de compte, la colonne vertébrale de Romans est située sur les boulevards, au dessus du centre
historique.
Il existe en effet un frein financier par rapport au projet de la Place Majeure. Cela fait déjà un
moment qu’avait été voulu d’enterrer un parking, et de créer ce qu’on appelle « une place Majeure »
(déclinaison de ce qui est fait en Italie avec les places « majore »). On a chiffré à 10 millions d’euros
ce projet. Il me semble que c’est vraiment élevé comme chiffrage d’opération alors que l’on pourrait
créer une place grande et sobre, qui serait efficace comme point central de la ville.
- Depuis combien de temps y a t’il un élu délégué au centre ancien ?
Le centre ancien est une préoccupation politique depuis trente ans. De manière générale,
c’est surtout le délégué à l’urbanisme qui s’est occupé des thématiques du centre ancien, même s’il y
a d’autres élus qui s’en chargent en fonction de leur champ d’action. Pierre Brillaud, élu au centre
historique, s’occupe enfin de compte plus du commerce et de la relation avec les commerçants du
centre historique.
Concernant la carte des Aménagements Urbains du Centra ancien :
- Qu’est ce qui est prévu Place Macel ?
La place Macel a été crée il y a peu et est plutôt bien réussie. Mais, il este un carré se situant
devant la place Macel où un grand mur se dresse, derrière se trouve une cour intérieure squattée.
Devant ce mur se trouvent des voitures qui ne rendent pas lisible le cheminement jusqu’au marché
situé place Maurice Faure. Il s’agit de prévoir et de créer un petit mur et un square (jardins sud), et
de restituer une partie de la cour intérieure aux propriétaires.
- Comment est la qualité et l’état de marche des Fontaines et des bassins dans le centre
ancien?
Un travail important devrait être réalisé sur les éléments d’eau du centre ancien. La place
fontaine couverte a déjà un aspect esthétique intéressant mais la fontaine présente ne marche plus
actuellement (ne marche plus du tout l’hiver), c’est dommage car cela crée une ambiance sympa et
c’est agréable de se trouver en ville et d’entendre le bruit de l’eau qui coule. Une réflexion plus large
143
devrait être faite au niveau de l’envahissement de la voiture sur la place Perrot de Verdun qui nuit à
la lisibilité urbaine (aux enseignes commerciales et au mobilier urbain).
Il y a un bassin rue du puits du cheval qui n’est pas en état de marche, la population dégrade
celui-ci en jetant des détritus. Pourtant, nous avons un budget pour son entretien, mais la lenteur
administrative bloque de simples processus comme celui-ci.
- Au niveau de la piétonisation du centre ancien?
Il faut miser sur une piétonisation ou sur des zones de ralentissement dans le centre ancien.
On peut laisser la côte des cordeliers utilisable par la voiture, mais pour le reste il faut miser sur la
piétonisation de la Rue Mathieu-de-la-Drôme, de la place Perrot de Verdun, de la rue Saint Nicolas et
créer une zone où la circulation est ralentie sur la rue de l’Armillerie.
- Au niveau de la rue Mathieu-de-la-Drôme ?
J’aurais voulu que soit réalisé un aménagement urbain particulier sur cette rue, car elle c’est
surement l’une des plus dynamiques dans le centre ancien. On pourrait y installer des arcs et un
couvert végétal (matériaux : aluminium, plexiglas). Un travail sur l’éclairage public serait à combiner
pour créer une ambiance tout à fait particulière. C’est avec ce type d’aménagement qu’on peut faire
la différence (voir ce type d’aménagement nulle part ailleurs), qui améliore le cadre de vie des
habitants et qui peut marquer l’esprit des gens qui viennent faire du shopping dans le centre ancien
(Romanais et personnes venant visiter Romans). Néanmoins, ce type d’aménagement d’agrément
est compliqué à réaliser, et puis il faut voir si c’est techniquement possible.
On pourrait peut-être mobiliser d’autres manières de financer ce type d’aménagement urbain.
L’Epargne locale pourrait être l’un de ces outils. Il s’agit de demander aux personnes qui ont les
moyens financiers et qui laissent leur « argent dormir à la banque », s’ils veulent participer à
l’amélioration de l’image de la ville. Cet investissement serait sur le court terme, c’est-à-dire que les
personnes investissent leur argent sur 3 à 5 ans par le biais d’une SEM. Cette démarche est vraiment
intéressante car les habitants qui ont de l’argent peuvent devenir les acteurs de leur ville. Cette
manière de faire resterait exploratoire, mais si celle-ci fonctionne, cela peut être très enrichissant
pour la ville, l’action publique et les habitants. Malheureusement, aujourd’hui les élus se limitent
trop eux-mêmes. Il y a une sorte de fatalisme à Romans couplée à une logique trop administrative
qui freinent les démarches, surtout si celles-ci sont nouvelles ou innovantes.
144
Entretien avec Cléo Delon – Elue à la tranquillité publique, deuxième
adjointe
Entretien réalisé le mardi 4 mai de 12h15 à 12h45, au bureau de Mme Delon, à la
mairie de Romans.
- Quelle position d’élue adoptez-vous vis-vis du centre ancien ? Quelles espérances avez-
vous vis-à-vis de ce quartier ? Quels buts de l’action politique menée ? Quels obstacles (au niveau
de la marche de manœuvre)?
En tant qu’élue, j’adopte l’optique de la politique de la ville avant tout. Ma mission est celle de
faire revenir la tranquillité publique dans les quartiers où elle fait défaut. Sur le centre ancien, nous
rencontrons plusieurs difficultés : il existe des actes d’incivilités et une inadaptation des
comportements des jeunes avec les habitants et les commerçants. Un fort mécontentement se fait
ressentir, les gens sont excédés par cette multiplication de faits de délinquance.
Il existe donc des faits de dégradation diverse et variée, qui touchent la plupart du temps les
commerces. A côté de cela, il existe aussi du trafic de stupéfiants (héroïne) et de cannabis qui n’est
pas forcément visible aux yeux des habitants et des commerçants. L’association du trafic de cannabis
et des jeunes se fait parfois et crée une très mauvaise ambiance.
Comment agissons nous sur cette délinquance ? Il y a d’abord une mise en place d’une action
directe sur les incivilités en faisant passer une police pédestre dans les rues qui sont le plus sujettes à
ces faits de délinquance.
Puis, nous avons mis en place un travail de médiation avec les dispositifs des correspondants
de nuit avec une augmentation des effectifs et une ouverture d’un local pour les jeunes (qui s’est fait
le 3 mai 2010). Certains jeunes jouent au football jusqu’à très tard dans la nuit ou chahutent, cela
crée des nuisances sonores pour les riverains. Ce local pour les jeunes permettrait de canaliser ces
jeunes et de leurs proposer des activités sur le parc saint-Romain par exemple. Nous avons aussi la
volonté de créer un bureau de correspondants de nuits où les jeunes et les habitants peuvent se
référer.
Nous travaillons en lien avec la police nationale sur l’activité délinquante avec une focalisation
sur le centre ancien (multiplication des contrôles).
- Au niveau de la Tranquillité publique sur le centre ancien, quelle position adoptez-vous ?
Est-ce selon vous une situation alarmante ? Avons-nous affaire à une délinquance qui se limite
qu’à quelques rues du centre ancien ?
Il y a une focalisation sur deux espaces à Romans au niveau de l’action menée pour la
tranquillité publique : le quartier de la Monnaie et le centre ancien. Comme on peut le voir, il y a un
lien fort avec la politique de la ville. Le centre ancien voit ses indicateurs sociaux dégringoler et cela
empire depuis quelques années. On peut donner plusieurs explications par rapport à cela : d’abord il
y a une population qui habitait sur la Monnaie qui s’est installée sur le centre ancien. Une partie du
trafic de cannabis s’est aussi transféré de la Monnaie au centre ancien. Mais il faut relativiser ce fait,
car il y avait aussi ce type de faits sur le centre historique.
145
Ce territoire est aussi moins connu de manière générale par les forces de police. Et puis, il y a
moins de choses de faites sur le centre ancien que sur le quartier de la Monnaie. N’oublions pas que
le centre ancien n’est pas classé en ZUS alors que le quartier de la Monnaie l’est. Du coup, nous
n’avons pas les mêmes dispositifs d’action. Sur le quartier de la Monnaie, les personnes qui sont en
chargent d’encadrer les jeunes connaissent la population, le travail de partenariat est bien plus fort.
Sur le centre ancien, nous n’avons pas cette logique partenariale de la politique de la ville avec le
tissu associatif. On note tout de même une difficulté des associations du centre historique à
encadrer cette jeunesse qui cause des soucis au niveau de la tranquillité publique. Il n’y a pas par
exemple d’éducateurs sur le terrain, nous rencontrons une réelle difficulté à ce niveau-là.
Auparavant, c’était le quartier Saint-Nicolas qui était beaucoup plus touché par la délinquance.
Maintenant, ce sont les quartiers ouest qui sont le plus touchés et qui connaissent une récurrence au
niveau des faits de dégradation (rue de l’Armillerie, rue du Fuseau, Rue Puits du cheval, square René
Char). Parfois, il y a eu un débordement des faits de dégradation sur la côte Jacquemart et la rue
Mathieu-de-la-Drôme.
Nous rencontrons aussi un problème général d’incivilité dans le centre ancien, avec un dépôt
d’ordures et d’encombrants des habitants dans les rues. Ce sont souvent des personnes en difficulté
sociale qui posent ces encombrants dans la rue (vieux meubles etc.), car ce sont bien souvent des
personnes qui n’ont pas de voitures et qui ne peuvent déposer ces encombrants dans une
déchèterie. Les jeunes délinquants s’amusent à mettre le feu à ces encombrants, ce qui crée un réel
problème de sécurité dans le centre ancien. Il est difficile d’agir sur ce problème au niveau des
moyens d’actions de la tranquillité publique. Je pense qu’il faut surtout maintenir la mixité sociale
voir la réintroduire dans certains quartiers. Il faudrait aussi agir de manière plus globale sur le centre
ancien, car des rues sont vraiment peu esthétiques, voire complètement dégradées. Il faut forcer
certains propriétaires à restaurer leur immeuble.
Sur le long terme, il serait bien de travailler sur la création d’un lien bien plus profond avec
l’Education nationale, car il y a des écoles sur le territoire du centre ancien. Et c’est en encadrant les
personnes dès le plus jeune âge qu’on est le plus efficace dans la prévention de la délinquance.
Enfin, au niveau de notre fonctionnement et des moyens financiers qui nous sont donnés,
nous rencontrons de nombreux freins. Premièrement, il va y avoir une refonte de la géographie
prioritaire qui va prendre forme à la fin de l’année 2010. Nous sommes dans un contexte où il y a une
réduction de nombre de ZUS. C’est pour cela que nous ne sommes pas forcément très optimistes
quant au classement du centre ancien en ZUS, même si nous essayons de sensibiliser le préfet sur ces
questions là. Le FIPD (Fond Interministériel de la Prévention de la Délinquance) a eu une
restructuration financière. Par exemple, pour la Drôme est prévu 340 000 euros pour la
vidéosurveillance et seulement 18 000 euros pour la médiation. Alors qu’il y a trois ans, nous avions
un budget de 88 000 euros pour la médiation. On subit les choix étatiques au niveau local. A Romans,
c’était surtout le travail de médiation que l’on voulait développer et qui me semble le plus adapté à
la situation. De plus, même si on investit dans la vidéosurveillance, la commune doit investir 50 % des
frais car l’entretien coûte cher et puis, pour certains cas, il y a une masse salariale à gérer par la suite
(qui se traduit par une surveillance derrière les caméras, même si on peut basculer cette surveillance
sur le commissariat la nuit et les week-ends).
146
De manière générale, on assiste à une restriction budgétaire qui ne va pas dans le bon sens et
qui complique, enfin de compte, de plus en plus la situation.
147
Entretien avec Philippe Drésin – 1er adjoint délégué aux finances et au
service public communal, président d’Habitat Pays de Romans
Entretien réalisé le mardi 1er juin, de 10H30 à 11h, dans le bureau de Monsieur
Dresin, à la mairie de Romans.
- Quelle est votre position d’élu vis-vis du centre ancien ? Quelles espérances vis-à-vis de ce
quartier ? Quels buts de l’action politique menée ? Quels obstacles (au niveau de la marche de
manœuvre)? Qu’est ce qui est possible de faire et de ne pas faire ?
Nous avons plusieurs espoirs vis-à-vis du centre ancien, nous voulons le réhabiliter
massivement et nous souhaiterions qu’il devienne le quartier le plus vivant de la ville. Les
problématiques du centre ancien sont assez transversales et touchent tous les domaines que ce soit
l’urbanisme, le cadre de vie ou le dynamisme commercial.
Mais nous rencontrons de nombreuses difficultés. Dans un premier temps, il est difficile de
mettre en place une maîtrise globale et transversale de tout cela. Ensuite, il faut engager un
partenariat public et privé dans le centre ancien, ce qui est plus difficile à mettre en place. Par
exemple, cela a été bien plus facile d’agir sur le quartier de la Monnaie où tout était public.
Puis, nous connaissons des problèmes de finances sur les projets qui permettraient
d’améliorer l’ensemble du centre ancien. Enfin, le centre ancien détient une situation géographique
compliquée puisqu’il se trouve « coincé » entre une rivière et une montée topographique. On peut
remarquer que le centre ancien a une topographie qui se trouve, enfin de compte, assez proche de la
situation du vieux Lyon.
Je pense qu’il faut mener plusieurs actions dans le temps : sur le court, le moyen et le long
terme.
Pour ce qui est des actions à mener sur le court terme : Nous devons résoudre de grands
problèmes de sécurisation. Vous le savez sûrement, le centre ancien est très touché par des faits de
délinquance et cela irrite beaucoup les habitants du centre historique. Par exemple, des personnes
se sont installées dans des logements se situant devant la place Macel qu’on vient d’aménager, et à
cause de des faits de délinquance qui se passent sur cette placette, ils déménagent aussitôt. Nous
pouvons aussi agir sur le peuplement du centre ancien. En effet, nous avons un atout considérable :
HPR est un bon interlocuteur dans le centre ancien, et nous travaillons ensemble concernant
l’intervention i par le biais du peuplement. Notre but est d’essayer de ne pas fragiliser encore plus la
situation. Il s’agit aussi d’attirer des personnes plus aisées, et donc d’introduire des bobos dans le
centre ancien afin de créer une mixité vers le haut.
A moyen terme, il s’agit de travailler sur la piétonisation, la circulation, et la réappropriation de
l’espace public dans le centre ancien. Je pense qu’il faut créer des parkings de report pour les
personnes qui n’habitent pas dans le centre ancien et créer des zones de stationnement de proximité
qui seraient des garages publics groupés.
Sur le long terme, il faudrait agir de manière massive sur le bâti très dégradé, et créer un réel
travail sur les boulevards et la place Jean Jaurès.
148
Enfin, il faudrait créer une gouvernance unique et partagée pour tous ces projets (et
notamment celui de l’espace public de la place jean Jaurès) avec un chef de projet politique et un
chef de projet technicien.
- N’y a t’il pas un lien à créer avec le management de centre-ville ?
Le management de centre-ville a plutôt une visée commerciale. Nous préférerions avoir un
chargé de mission plus global du centre ancien, qui ferait le lien entre tous, et qui serait LA personne
identifiée aux yeux de tous et à laquelle il faut se référer. Il est vrai qu’émerge depuis quelques
temps, l’idée qu’il n’y a pas de centre-ville à Romans, la place majeure pourrait faire le lien entre le
haut et le bas de la ville, car c’est bel et bien une « rupture » entre un haut et un bas de la ville qui
est ressentie par les commerçants. J’espère que ce grand projet d’aménagement verra le jour bientôt
et se déroulera, si tout se passe bien, entre 2012 et 2018. En 2011, nous voulons lancer un concours
d’architectes pour cette place. En 2012, les Romanais pourront faire un choix selon trois scénarios
possibles pour cette place et enfin, en 2013, les travaux pourront débuter.
Actuellement, nous voulons afficher une volonté politique qui se veut forte alors
qu’auparavant celle-ci n’était pas assez importante pour porter le projet.
- Le projet pourrait peut-être porté par la CCPR ?
Non, c’est à la commune de porter ce projet, la CCPR n’a pas plus de moyens que la ville de
Romans. Je pense que le problème financier doit être aussi résolu avec l’apport de moyens étatiques
(notamment avec le PNRQAD). De plus, nous avons déjà de bons contacts avec l’ANRU, puisqu’avec
l’Opération de Rénovation Urbaine (ORU) sur la Monnaie, nous avons été réalistes et efficaces. On
s’est engagé pour ce qu’on était capable de faire. D’ailleurs, nous avons été les premiers de la
Région en 2004 à signer un contrat avec l’ANRU, et nous sommes les premiers à avoir fini
actuellement.
- Qu’attendez-vous de mon diagnostic ? quelles réponses espérez-vous vis-à-vis de celui-ci ?
Ce diagnostic serait intéressant s’il nous permet de candidater pour le PNRQAD. Avec cela, il
serait possible que la commune porte le projet de la place Jean Jaurès, à condition bien sûr qu’il y ait
des financements étatiques qui soient conséquents.