traité complet du magnétisme animal, cours en douze leçons

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Du Potet de Sennevoy, Jean (1796-1881). Trait complet du magntisme animal, cours en douze leons. 1882.

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TRAIT

COMPLET DE

MAGNTISME

ANIMAL

COURS EN DOUZK LEONS

LIBRAIRIE

GERMER

BAILLIRE

ET

G".

DU OUVRAGES MEMEAUTEUR lu Magntisme Le Propagateur animal, 2 vol. in-8, 1827(puis), 4 dit., 1869, 1 vol, Manuel le l'tudiant magntiseur, 3 fr, 50. gr. in-18 avec fig, La Magie lvoile, ou Principesdo scienceocculte.1852.1 vol. 100fi\ in-4, avec flg. to tho stutly of animal An introduction Magn8 fr. tisai. 1 vol.in-12. Lonrton, 838. 1 Le Magntisme oppos a la Mdecine, ou Mmoirepour e servir l'histoire du Magntisme n Francoet en Angleterre,do 1820 6 fr. a 1840.1 vol. in-8. lu MagnEssai sut* renseignement philosophique 5 fr. tisme. 1815.1 vol. in-8. Journal lu Magntisme, rdig par une socit de magntiseurs et do mdecins, sous la direction do M. le baron du Potet on commenc 1845. d Cottecollection, o 1845 1855,forme 14 vol. in-8. du Thrapeutique Magntique, rgles de l'application Magntisme l'exprimentationure et au traitementdes maladies;spirituap 1 lisme; son principe et ses phnomnes. fort vol.do luxe in-8. 12 fr.

1000-2. SUCC. SA1NT-0UBN. PAKIS, 1MI\ C1IAIX, DE

TRAIT

COMPLET ni;

MAGNTISME

ANIMAL

COURS

EN DOUZE PAR

LEONS

M.

LE

BARON

DU

POTET

DITION QUATRIME et Revue,corrige considrablement augmente.

PARIS LIBRAIRIE GERMER BAILLIRE ET 0e 108 108, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, Aucoin del.iruellaiilofrullp. 1882

AYIS

DE

L'DITEUR

La premire dition de cet ouvrage parut en 1834, sous le titre de Cours de magntisme animal en sept leons; elle taij la reproduction fidle des cours que M. du Potet faisait cette poque l'Athne central de Paris. La deuxime dition fut publie en 1840 Besanon ; elle n'tait que la rimpression de la premire, mais on avait ajout la fin de l'ouvrage le rapport entier de M. Husson, prsent l'Acadmie de mdecine en 1831. La troisime dition a t revue, corrige et augmente d'un grand nombre de matriaux importants, dont voici les principaux : 1 Le fluide et l'me ; 2 Le Rapport complet de M. Husson en 1825 ; 3 Le Rapport entier de M. Husson en 1831 ; 4 Le somnambulisme puysgurique ; 5 La voyante de Prevorst ; 6 Les phnomnes produits par la magntisation ; 7 Le somnambulisme spontan ; 8 Les gurisons opres par le magntisme ; 9 Les propositions de Mesmer ; 10 Les auteurs modernes qui ont runi en corps de doctrine les opinions de leur temps sur le magntisme ;

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AVIS DE L'DITEUR

11 Les bohmes ; l 0 Le catchisme magntique de Puysgur; 13 Un modle d'un traitement magntiquo, accompagn * do somnambulisme ; 14 La magntisation intermdiaire ; 15 Les procds magntiques de M, du Potet ; 16 Les manifestations spirituolles en France ; 17 Les manifestations spirituelles aux tats-Unis d'Amrique ; 18 Les hallucinations, les apparitions fausses et vraies ; , 19 L'insensibilit magntique, oprations pratiques Cherbourg Poitiers, Calcutta et Madras ; 20 La magie dans l'Inde. D'aprs ces additions, ce livre, qui est arriv a sa quatrime dition, renferme tout ce qui s'est fait en magntisme jusqu' ce jour, G,B.

AVANT-PROPOS DITION DE LA PREMIRE

le c Lebienestdansle inonde ontre mat,et la vio c del'autre. contre mortj l'unestleremde la Quoprtendez-vous apprendre, nous s'orlerontN nous d ils,peut-tro? oussavions, faisions june et n partiedeceschoses, la naturemme ouslesavait diteslongtemps l'undonossemavantvous.Quand blables ouffre, pitinenousforce-t-elle a emla s pas o s brasser, errernos amis,pourles consoler u sou? lagerleursmaux N'avons-nous centfoispress pas avecdlicesleurscoeurscontrenotrecoeur?Qulveutfaire du bienno s'approche-t-il de pas oonquo sessemblables, quiveutleurnuireno craint-il as et p leur approohe? on, vousn'avezrien invent, t e N votroart tait dj presquetout entier dans nos coeurs. i

J'offre ces leons aux hommes clairs qui aimant la Vrit pour elle-mme, ne veulent ni souffrir qu'elle soit dguise, ni se donner aux yeux des ignorants le facile, mais ridicule mrite d'tre placs par leur savoir au-dessus des notions ordinaires. Je ne viens pas dire mes lecteurs de croire parce que je crois, je viens les prier de ne pas opposer lgrement et sans examen des dngations hasardes des assertions appuyes sur des faits et sur des tmoignages irrcusables. Je veux, en publiant ces leons, rendre un clatant hom mage la vrit, donner mes lves les moyens de mo

AVANT-PROPOSDE LA PREMIRE DITION seconder, dtruire les objections de ceux qui m'attaquent, fournir do nouvelles armes ceux qui mo dfendent, et clairer los personnes qui, trop confiantes dans les bienfaits du magntisme et du somnambulisme, s'y livrent sans discernement et sans rserve. A l'imitation de Mesmer, de Puysgur et de Deleuze, je me suis propos enfin d'ouvrir l'art de gurir des routes nouvelles, et je ne sache pas qu'il y ait au monde de plus noble but que celui de travailler au soulagemom do l'humanit. \)u POTKT.

VIII

COURS DE MAGNTISME ANIMAL

PREMIRE

LEON

DO NTP.ODUCTION.HISTORIQUE MAGNTISME. MESMER, PUYSGUR Lebiene&t ansle monde d contrele mal,et la vie contrela mort; l'un est le remdedo l'autre. nous s Quepretendiv-vitns appieudro?'ccrieront-ils Nous nousluisions junepartio peut-trt. etsavions, d deces choses, ta nuturu mmenousles avait dites a longtempsvantvous Quandl'un denos semblables l souffre,a piti nenousforce-t-elle soulagereurs p.is embrasser, serrernos amis,pourles con.-oior ou l maux? N'avons-nous centfoispresseavecdlices pas leurscoeurs ontronotrecoeur? c veutf Quiconque lire du bien ne s'uppoclie-t-ii de ses semblables, et pas qui veut leur nuireno craint-ilpas leur approche? e Non,vousn'avezrieninvente, t vutreart tait dj toutentier dansnoscoeurs. presque MESSIEURS, Pntr dets bienfaits qui doivent rsulter pour le gerre humain de la dcouverte du magntisme animal, je me suis dcid venir vous en entretenir. Ce n'est pas sans quelque crainte toutefois, car les phnomnes magntiques que j'ai vous faire connatre sont si tonnants, qu'ils pourront souvent vous paratre exagrs : mais plus ils vous paratront extraordinaires, plus ils mriteront de fixer votre attention, s'ils sont vrais. Il y aurait ds lors, de ma part, faiblesse coupable ne pas les proclamer hautement. Je viens donc joindre ma voix celle des hommes gnreux qui n'ont pas craint de braver le ridicule que l'irr* Du POET,

COURS DE MAGNTISME flexion ou l'envie dversent toujours sur les novateurs, ot comme eux, rvlant une vrit utile, jo viens remplir un devoir que les amis do l'humanit sauront apprcier. Jo vous prio, messieurs, avant de regarder commo fabuleux les faits tonnants dont j'aurai vous entretenir, de les tudier, do les analyser, et do no porter un jugement qu'aprs un rigoureux et silencioux examen. Il n'est aucun de vous qui, lorsqu'il sera convaincu do la vertu curativo du magntisme dans nos maladios, ne veuille essayer sur un parent, sur un ami, sur un malheureux, le pouvoir de faire le bien que nous a dparti la nature. Go dernier motif serait donc suffisant pour vous dterminer un srieux examen ; mais il en est une foule d'autres que nous vous ferons connatre et que vous n'apprcierez pas moins. Si nous avons reconnu que le magntisme pout faire le bien, nous avons galement reconnu que, semblable tous les autres agents do la nature, il peut aussi faire du mal; vous devez donc apprendre h lo bien connatre, afin de vous mettre en garde contro les accidents qu'il peut produire. Je n'ai pas lieu do croire, messieurs, que vous serez disposs porter un jugement prcipit sur la doctrine que je viens vous exposer. Dans le cas, peu probable, ou quelques-uns pourraient l'tro, je les prierais de vouloir bien se rappeler que nous ne connaissons pas les bornes du possible, et qu'il s'agit, dans cette question, bien moins encore de faits passs que de faits venir; car, chaque instant, nous pouvons en faire natre de nouveaux. Quels ne seraient donc pas vos regrets si un jour vous acquerriez la certitude que ce que vous auriez rejet comme n'existant pas, existait cependant, et pouvait exercer une grando influence sur notre destine?

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3 HISTORIQUE Mais je viens appeler votre attention sur des faits plutt quo sur des doctrines : vous entendrez leur langage. Vous n'aurez pas, comme certains corps* savants, de vieilles erreurs surmonter, des prjugs a vaincre; vous tes riches d'avenir, et, pour acqurir une vrit nouvelle, quelques heures d'attention ne vous effrayeront pas. Jo chercherai m'entourer de tous les tmoignages que j'aurai pu recueillir ; et lorsque je ne serai pas assez heureux pour vous citer des noms connus de vous, des noms qui font autorit dans les sciences, ma tche deviendra moins difficile, car je vous inspirerai plus de confiance. J'espre donc bientt pouvoir vous faire partager la conviction que j'ai que nous possdons en nous une force qui n'a pas encore t apprcie, et que cette force est peut-tre le meilleur remde applicable la plupart de nos maux. Alors mme que mes efforts n'auraient d'autre rsultat que de faire pntrer le doute dans votre esprit, je m'estimerai encore heureux, car il vous serait difficile de rester longtemps dans l'incertitude : vous ne tarderiez pas vouloir, que dis-je? tre forcs un examen srieux, et le rsultat de cet examen, je n'en doute pas, sera tout en ma faveur. Riche do faits acquis par un travail assidu, pendant nombre d'annes, le magntisme ayant t presque mon unique tude, je vous ferai part du fruit de mes longues recherches, et jo vous indiquerai, pour arriver une conviction, une route plus courte peut-tre que vous ne la trouveriez ailleurs. Lorsque je vous aurai fait connatre la conduite de tous les corps savants l'gard du magntisme, vous vous direz que c?est vous, qui examinez avant de juger, plutt qu' ceux qui jugent sans examen, qu'il appartient de prononcer sur cette question. Vous reconnatrez que rarement une gnration profite d'une dcouverte faite par elle, et que,

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COURS DE MAGNTISME

presque toujours celle qui la suit est appele en jouir. Si vous vous rappelez combien d'obstacles ont eu surmonter la circulation, l'inoculation, l'mtique, vous ne trouverez pas surprenant que, pour le magntisme, l'esprit de parti ait suivi sa marche accoutume, et que nous ayons eu subir nous-mme cette dure loi. Le temps de la justice viendra pour le magntisme, comme il est venu pour tant d'autres dcouvertes mconnues ou discrdites leur origine; cette science, qui trouve aujourd'hui tant de dtracteurs, sera rhabilite, et les attaques de ceux qui ont cherch l'touffer ne resteront plus que comme des monuments attestant les passions des hommes et leur aveuglement. Mais si, dans l'examen que je sollicite et que vous allez faire, vous veniez dcouvrir que ce que nous vous donnons pour une vrit n'est qu'une erreur de notre esprit, il serait de votre devoir de nous rfuter et de prmunir le public contre une doctrine d'autant plus dangereuse qu'elle proccupe aujourd'hui tous les esprits. Mais nous sommes loin de redouter cette dernire supposition : les faits ont parl, nous les avons examins attentivement; ils nous sont trop bien prouvs pour que nous ayons redouter rien de semblable. D'un autre ct, s'il vous est dmontr que nous avons tous, sans exception, la facult de dvelopper des effets magntiques, vous prendrez de plus en plus confiance en nos paroles, et, quelles quo soient nos assertions, vous vous garderez de les rejeter avant de les avoir vrifies. Dj, messieurs, cet examen se fait partout. Il n'est pas, sachez-lo bien, un seul point de l'Europe o le magntisme ne soit tudi et exerc par ces hommes fort habiles, et dont le dfaut n'est pas srement d'tre crdules. Si l'utilit de cette science n'est pas encore gnralement comprise, du moins son existence n'est point mise en doute.

5 HISTORIQUE Ce ne sont donc plus quelques enthousiastes qui donnent dos thories et qui racontent des faits; ce sont des savants d'un ordre lev, des mdecins clbres, dont on peut citer les noms, qui pratiquent aujourd'hui le magntisme sur les divers points du globe. Frapp de ce mouvement gnral des esprits, M. Husson demandait, ds 1826, l'Acadmie de mdecine de Paris, (si elle n'accorderait pas quelque attention un ensemble i1.ephnomnes qui avaient fix un si haut point l'intrt et les recherches des peuples que nous avons l'orgueil de croire en arrire de nous, sous le rapport de la civilisation et sous celui de la science. M. Husson demandait aussi l'Acadmie de mdecine si elle souffrirait plus longtemps que le magntisme ft pratiqu sous ses yeux par des gens entirement trangers la science, par des femmes que l'on promne clandestinement dans Paris et qui semblent faire mystre de leur existence. M. Husson aurait pu donner bien d'autres motifs l'examen qu'il provoquait; je tcherai de suppler ici ce qu'il n'a point dit ou pas cru devoir dire. Jo vous ferai connatre l'tat du magntisme en France, ses partisans et ses dtracteurs; je vous signalerai ensuite les abus qu'a introduits parmi nous la pratique du magntisme et du somnambulisme mal dirigs, ainsi que la fausse route o sont entrs quelquefois ses preneurs. Je no marcherai qu'appuy sur des faits hautement avous par ceux mmes qui les ont produits, afin que votre raison puisse constamment vous clairer sur ce que Vous devez croire ou rejeter. Plusieurs cours ont dj t faits sur le sujet dont je viens vous entretenir; nous devons l'histoire du magntisme aux savantes confrences du docteur Bertrand, qui en a dvelopp les principaux phnomnes et leur a donn

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COURS DE MAGNTISME

ainsi une certaine publicit. Son exemple a produit de bons effets; plusieurs mdecins, dont nous citerons les noms ailleurs, ont recherch comme lui la vrit et ont dpos leurs convictions dans des ouvrages qui sont gnralement estims. Plus tard, un autre mdecin de la Facult de Paris, sans dout plus hardi que ses confrres, a provoqu l'Acadmie de mdecine, et l'a, pour ainsi dire, force faire une dmarche dont cependant elle redoutait les suites. Vous savez combien les discussions qui s'levrent ce sujet furent longues et orageuses; combien de mdecins se prononcrent pour ou contre l'examen de la question, et vous savez que le rsultat de cette lutte fut que, une majorit de 35 voix contre 25, une commission de 11 membres serait nomme. Moi-mme, je ne suis pas rest inactif au milieu de ces grands dbats; j'ai constamment, comme vous le verrez bientt, sollicit les membres de l'Acadmie de mdecine et des sciences d'tre tmoins de faits que j'offrais de leur montrer, pour former leur opinion. Plusieurs savants distingus ont rpondu mon appel, et je puis me rendre le tmoignage d'avoir contribu pour quelque chose au s xs que les partisans du magntisme ont obtenu. Plus tard, j'ai dvelopp mes opinions sur le magntisme dans un cours public, qui a t suivi par un grond nombre de jeunes mdecins. Plusieurs d'entre eux ont magntis et ont obtenu des effets magntiques remarquables. J'ai des rapports crits qui ne laissent aucun doute sur cet heureux rsultat. Constamment la tte des magntiseurs, je leur ai appris ne pas reculer devant une dmonstration publique en prsence d'incrdules. Ils avaient banni ces derniers de leurs expriences, je les appelai aux miennes. Le8 magntiseurs exprimentaient dans l'ombre, j'ai, moi, expriment au grand jour; ils ne magntisaient que des femmes faibles ou des hommes malades, j'ai magntis des

7 hommes robustes, et j'ai prouv qu'ils n'taient pas moins susceptibles que les premiers des effets magntiques. Les magntiseurs s'adressaient timidement aux mdecins et leur demandaient humblement quelques-uns de leurs malades pour les traiter parle magntisme; moi, je suis all les provoquer jusque dans leurs sanctuaires, et je n'ai pas eu me repentir de mon audace. Au rcit de mes expriences dans les hpitaux, un grand nombre de jeunes gens m'imitrent et obtinrent des phnomnes dignes de fixer l'attention des mdecins qui on ont t les tmoins : VHtel-Dieu, la Salptrire et la Charit seraient l pour appuyer de leur tmoignage mon assertion. Je pourrais encore rappeler votre mmoire une foule de faits magntiques consigns depuis quelques annes dans des ouvrages estims ; je pourrais vous citer des recherches faites sur le mme sujet par les docteurs Jostan et Georget. A des tmoignages si respectables, je pourrais joindre celui de beaucoup de jeunes professeurs de mdecine qui ont pris dans leurs cours la dfense du magntisme. Plusieurs thses ont t soutenues sans trop de blme, mais le temps n'tait pas encore venu pour la Facult d'accorder quelques encouragements ce qui est vrai, mais qui est trop en dehors des tudes classiques. J'aurais trop faire si je voulais vous citer tous les tmoignages que nous avons en notre faveur ; ceux dont je viens de parler sont, j'ose le dire, plus que suffisants pour tablir que le magntisme existe rellement. Comment so fait-il donc que le public montre encore tant de tideur pour une vrit qui a trouv des dfenseurs si nombreux et si clairs? A quoi attribuer, dans un sicle de lumires, tant d'indiffrence pour une dcouverte destine tendre si prodigieusement le cercle des connaissances humaines? Et vous, messieurs, redouteriez-vous encore le ridicule

HISTORIQUE

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COURS DE MAGNTISME qui s'attache si mal propos ceux qui tudient et qui pratiquent le magntisme? S'il en.tait ainsi, vous ne resteriez pas longtemps sous l'influence de cette crainte; j'aurai bientt vous citer des noms auxquels vous ne craindriez pas d'associer les vtres. Et, aprs tout, le-ridicule ou la honte ne pourrait retomber que sur ceux qui nient ou qui calomnient sans preuves! Demandez-leur, quand ils vous affirment effrontment que le magntisme n'existe pas, s'ils ont vu des faits, s'ils ont, expriment. Ils vous rpondront qu'ils n'ont rien observ, rien vu; car il est au-dessus d'eux d'tudier ce qu'ils appellent une jonglerie. Des tmoins de tous les rangs et de toutes les conditions viennent-ils en foule dire au public : Nous avons examin, nous avons vu, on leur rpond hardiment : Vous n'avez pas examin, vous n'avez pas vu; on vous a tromeux-mmes, avec ps ! Les malades se prsentent-ils des signes certains d'une gurison complte, on les regarde. on sourit; on leur dit aussitt : Vous n'aviez point de mal ; votre imagination vous a guris ' ! Messieurs, serait-ce par cette assurance de langage, et l'aide do si grossiers moyens, que l'on esprait vous dtourner de l'tude du magntisme? Jo suis loin do le penser vous avez une autre mthode, et surtout une autre logique. Vous comprendrez qu'entre des gens qui disent : Nous avons vu, nous avons fait, et d'autres qui rpondent : Ce que vous prtendez avoir vu ou fait est impossible; vous ete les jouets d'une illusion; vous comprendrez, dis-je, que les 1. Quelquefoismme on trouve plus commode de substituer la calomnie un mensongo formel : c'est ainsi que M. Rcatnler crut devoir annoncer un jour, on pleine Acadmie, que la fille Sutnson, que j'avnls dclar avoir gurie par le magntisme, tuit moite VHii'l-lJkul Malheureusement pour le dtracteur du magntique, lo lllle Samson a affirm et publi dputa qu'elle se portait fort bien

9 HISTORIQUE seconds doivent inspirer plus de dfiance que les premiers ; et vous ferez justice d'un pareil systme, car il ne peut tre que celui des sots ou des gens de mauvaise foi. Vous vous graverez dans la mmoire ces paroles de Montaigne : Condamne'' comme impossibles des choses peu vrai semblables tmoignes par des gens dignes de foi, c'est se faire fort, par une tmraire prsomption, de savoir jusqu'o va la possibilit. Avant de vous parler, messieurs, de l'tat actuel du magntisme en France, je dois remonter son appariton parmi nous et vous faire le rcit des vnements qui l'ont accompagn et suivi : je serai trs-court, car il n'entre pas dans mon plan de vous entretenir d'une foule de particularits que vous pouvez lire dans les divers ouvrages qui traitent de l'histoire du magntisme dans les premiers temps. Je n'observerai pas, non plus, rigoureusement l'ordre des dates, parce qu'il me faudrait pour cela un temps qui sera plus utilement employ vous entretenir d'expriences et de rsultats. Mesmer (Frdric-Antoine) mais naquit d'honntes, pauvres parents, le 23 mai 1744, Weiler, prs de Stem, sur le Rhin ; son pre tait garde forestier du prince archevque de Constance. Il passa son enfance la campagne, presque toujours abandonn lui-mme. Ds ce moment, on remarqua en lui un got trs-prononc pour tout ce qui tait recherches naturelles, ainsi que son zle inlatigable pour connatre la source et l'embouchure du plus petit ruisseau. A seize ann, ses parents, qui l'avaient destin la clricature, l'envoyrent Dillingen, chez les Jsuites, pour y faire ses tudes de thologie; il rencontra l un homme d'un grand mrite, qui le prit sous sa protection et le fit avancer

COURS DE MAGNTISME rapidement. Mais bientt il abandonna la thologie et les Jsuites pour s'occuper de mdecine. Port par son gnie s'loigner de la route trace, reconnaissant le peu de certitude de l'art de gurir, il voulai l'tablir sur des bases plus vraies. Le besoin de connatre la vrit se faisait sentir vivement son esprit ; il la cherchait avec ardeur, et je ne saurais mieux vous en donner une ,. ide qu'en vous citant ce qu'il crivait lui-mme, dans v juste le moment o il tait le plus absorb par une grande pense : Le systme qui m'a conduit la dcouverte du magn tisme animal, dit-il, n'avait pas t l'ouvrage d'un jour. Les rflexions s'taient successivement accumules dans mon esprit. Je ne devais qu' la constance le courage ncessaire pour attaquer les prjugs de la raison et de la philosophie, sans tre mes propres yeux coupable de tmrit. Le froid accueil que l'on fit aux premires notions dont je hasardai la publicit m'tonna comme si je ne l'avais point prvu. La drision surtout me parut excessivement dplace de la part des savants, et particulirement de celle des mdecins, puisque mon systme, dnu de toutes preuves, aurait encore t aussi raisonnable que ceux qu'ils honorent tous les jours du nom de principes. Ce mauvais succs me porta discuter de nouveau mes opinions. Loin de perdre cet examen, elles en sortirent revtues des couleurs de l'vidence. En effet, tout me disait qu'il existait ncessairement, dans les sciences, des principes ngligs ou non aperus, autres que ceux que nous admettions. Tant que les principes des sciences, me rptais-je chaque instant, seront faux ou incertains, les efforts des plus beaux gnies seront infructueux pour le bonheur ou l'instruction de leurs semblables. Je comparais les mdecins des voyageurs hors de leur route, qui s'garent de plus en plus, en courant tou-

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11 HISTORIQUE jours devant eux, au lieu de revenir sur leurs pas pour se reconnatre. Une ardeur brlante s'empara de mes sens; jo ne cher chais plus la vrit avec amour, je la cherchais avec inquitude : la campagne, les forts, les solitudes les plus retires, eurent seules des attraits pour moi ; je m'y sentais plus prs de la nature. Toutes les autres occupations me devinrent impor* tunes *.les moments que je leur donnais me paraissaion autant de vols faits la vrit. Insensiblement, le calme revint dans mon esprit. La vrit, que j'avais poursuivie si ardemment, ne me laissa plus de doute sur mon existence; elle tait obscurcie, mais je voyais distinctement la trace qui menait elle, et je ne m'en cartais plus. C'est ainsi que j'acquis la facult de la soumettre l'exprience l. Vous dire, messieurs, comment Mesmer parvint reconnatre l'existence de l'agent dont nous poursuivons l'tude, cela nous parat difficile. Fut-ce par la force seule de son gnie, comme il semble le faire pressentir, ou avait-il lu les auteurs qui, longtemps avant lui, avaient trait cette matire? C'est ce qu'il nous importe peu de savoir : quoi qu'il en soit, Mesmer mrite toute notre reconnaissance pour avoir rappel les esprits vers l'tude du magntisme. Cependant sa doctrine ne fut mise en pratique que vers l'an 1775, poque vers laquelle il publia une partie de son systme. Les principes de Mesmer n'taient pas, au fond, aussi diffrents de ceux des autres mdecins qu'on pourrait se le figurer. 1. Mesmeradressa en 1776un mmoire sur sa dcouverte tous les corps savants de l'Europe. Un seul, l'Acadmiede Berlin, lui fit la grce de lui rpondre, et il rsultait de cette rponse trs-laconique qu'il n'tait qu'un visionnaire. (Mmoireset Aphorismea de Mesmer,nouvelledition. 1840,1 vol. grand in-18.)

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COURS DE MAGNTISME

Mesmer pensait que tous les mouvements internes et externes qui s'oprent dans notre corps, soit en sant, soit en maladie, ont lieu par l'action des nerfs : or, ce que Mesmer pensait, les autres mdecins le pensaient aussi. Mesmer pensait que l'action, des nerfs dpendait elle-mme de l'action d'un fluide trs-subtil,, les autres mdecins le pensaient aussi. Mesmer pensait que ce fluide tait lui-mme soumis diffrents agents dont les uns, comme les corps qui nous environnent, sont en dehors de nous; les autres, comme les diffrentes affections de notre me, notre volont, nos passions, l'organisation de notre machine : or, les autres mdecins pensaient galement cela., Mesmer pensait que l'tat normal de nos fonctions, duquel dpend la sant, s'entretient par l'action rgulire de nos nerfs ; les autres mdecins le pensaient aussi. Mesmer prtendait que la gurison de nos maladies s'opre par des coctions et par des crises ; les autres mdecins le prtendaient aussi. En quoi Mesmer et les mdecins de son temps diffraientils donc? Le voici. Mesmer croyait avoir trouv le secret de diriger volont, et par des moyens faciles, le fluide qui met nos nerfs en action, et par l de lour procurer celui dont ils ont besoin, soit pour la conservation de lf, sant, soit pour la gurison des maladies. Mesmer croyait connatre mieux que les mdecins de son temps et que ceux qui l'avaient prcd la nature du fluide nerveux ; et c'est l ce qu'on lui contestait. Ses ides ne furent point gotes : il se trouva repouss de toutes parts, bien qu'il et trait par le magntisme un grand nombre de maladies et qu'il et obtenu le succs le plus complet. Aprs avoir t en butte plusieurs scnes scandaleuses, il quitta Vienne en 1777, croyant avoir fait assez pour ses

.13 HISTORIQUE ingrats concitoyens, et emportant l'espoir qu'ils lui rendraient un jour plus de justice. Peu d'annes s'taient coules, et dj ce que l'on appelait la dcouverte de Mesmer faisait la plus vive sensation chez les peuples voisins. Aussi, quand il arriva Paris, en 1777, prcd de sa rputation, s'y trouva-t-il l'objet de l'attention publique. Il ne tarda pas contracter des liaisons avec les mdecins les plus distingus de la capitale, notamment avec le docteur Deslon, membre de la Facult de mdecine et premier mdecin du comte d'Artois. De toutes parts, on s'empressa de donner Mesmer l'assurance qu'il serait plus heureux en France que dans sa patrie, et on l'engagea prsenter son systme l'Acadmie des sciences. Mal accueillies de l'Acadmie des sciences, les ides de Mesmer chourent galement auprs de la Socit de mdecine. Cependant la franchise et la bonne foi de ses procds lui concilirent un grand nombre de mdecins, qui se livrrent avec zle la pratique du magntisme et en publirent partout les heureux rsultats. Trait sarts gard, jo dirai presque ignominieusement, par les Socits savantes, Mesmer tait en revanche recherch avec empressement par un grand nombre de personnages distingus. Cet accueil lui donna l'ide d'ouvrir un traitement, o les malades accoururent en foule pour se faire traiter par la nouvelle mthode, et les gurisons clatantes qui s'y firent achevrent la rputation de Mesmer. Messieurs, si les premiers propagateurs du magntisme animal eussent suivi l'exemple d'un ancien philosophe, qui se contenta de marcher devant quelqu'un qui niait le mouvement, s'ils se fussent borns produire des faits, au lieu de chercher les expliquer, il y a longtemps que la cause du magntisme serait gagne; mais ils n'ont pas suivi cette

'

COURS DE MAGNTISME marche, ils se sont trop hts de btir des systmes et de les prsenter comme renfermant tous les secrets de leur art. Emports par l'enthousiasme, les partisans de la doctrine magntique ne surent point mettre de bornes leur croyance. La gurison de quelques maladies leur fit croire la possibilit de les gurir toutes. Ils eurent l'imprudence d'crire qu'il n'y avait qu'une vie, qu'une sant, qu'une maladie, et par consquent qu'un remde, et que cet unique remde tait le magntisme. Portant leurs prvisions dans l'avenir, ils crurent devoir prdire que l'agent de Mesmer oprait un grand changement dans nos moeurs et une modification complte de notre organisation. Nos pres, disaient-ils, ne tomberont plus qu' l'extr mit de la dcrpitude. Il n'y aura plus rien dans les hpitaux qui rvolte l'humanit; on parcourra doucement la carrire de ses jours, et la mort sera moins triste, parce qu'on y arrivera de la mme manire qu'on s'avance dans la vie. Les peuples sains et robustes pourront carter les pi demies, les maladies amenes par les cours des sicles, etc. Les hommes ne connatront nos maux que par l'histoiro ; leurs jours prolongs agrandiront leurs projets et les ils jouiront de cet ge si vant, o le consommeront; a travail se faisait sans peine, la vie passait sans chagrin et la mort approchait sans horreurs. Et enfin, messieurs, ces belles promesses taient publies et accompagnes de rflexions non moins tranges. Ce que nous venons d'annoncer parat respiror l'on thousiasme, disaient-ils; mais on saura, un jour, que nous avons mnage la disposition des esprits et que nous sommes demeurs au-dessous du sujet que) nous avions peindre. Vous comprenez, messieurs, tout ce que do telles asser-

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15 HISTORIQUE tions avaient alors de rvoltant et de chimrique; et pourtant elles taient soutenues, appuyes par des hommes de mrite : tant la passion peut quelquefois nous aveugler et fausser notre jugement! Ce qui ne vous tonnera pas moins que l'enthousiasme des magntiseurs, c'est la conduite des corps savants de cette poque, qui ne surent pas mieux que les premiers conserver assez de sang-froid pour prononcer sans passion vsur le magntisme. ; Vous savez que des commissions nombreuses furent nommes d'office par Louis XVI pour examiner le systme de Mesmer, et que ces commissions furent composes des Lavoisier, des Bailly, des Franklin, des Jxissieu et d'une foule d'autres savants non moins illustres : on tait donc en droit de tout attendre d'un semblable aropage; coup sr, la lumire devait en sortir, et pourtant cela n'arriva pas. Mais, messieurs, il faudrait vous reporter cette poque et en feuilleter les archives, pour avoir une ide de l'agitation dans laquelle cette simple question de magntisme avait jet la France. D'un ct, on voyait les corps savants, aveugls par l'esprit de parti, chercher proscrire cette dcouverte; de l'autre, une partie de la cour et de la ville embrasser avec chaleur la nouvelle doctrine et prendre fait et cause pou*1 Mesmer, dont le caractre avait su se concilier l'estime gnrale. Les uns niaient tous les faits de la magntisation, ou les expliquaient par des causes errones que je vous ferai connatre plus tard; les autres, au contraire, adoptaient tout ce qu'avait dit et crit leur chef, et par cela mme allaient beaucoup trop loin dans leurs croyances. La guerre tait vive des deux cts :. Paris tait inond de brochures (il en a paru plus de cinq cents dans l'espace

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de dix-huit mois) ; l'esprit, l'rudition et le sarcasme y brillaient tour tour. On croirait difficilement aujourd'hui tant d'irritation, si des tmoignages irrcusables n'taient l pour nous rvler l'acharnement des deux partis. La querelle s'envenimait de plus en plus, et c'est le moment o les esprits taient ainsi disposs que les membres de la commission choisissent pour examiner la question du magntisme : aussi, messieurs, je dois le dire avec douleur, leur rapport se trouve partout empreint de leurs prventions, et partout nous voyons les commissaires aux prises avec la vrit, que toujours ils ludent; tous les arguments leur sont bons pour expliquer des faits qui taient alors inexplicables, et ils ne craignent pas de compromettre une rputation justement acquise, pour laisser la postrit un monument qui doit signaler un jour les cueils du gnie, lorsqu'il est anim par la passion. Cependant, malgr les rapports passionns des commissaires, les faits se multiplient, ils parlent, et le magntisme sort triomphant d'une lutte dans laquelle on s'tait promis peut-tre de l'touffer. Cette circonstance nous rappelle que bien des questions importantes ont t dcides sans le concours des savants, et souvent mme en opposition formelle avec la vrit. Tout le monde se souvient que les premiers qui prtendirent avoir vu tomber des arolithes ne purent faire croire la ralit de leur rcit. Mais enfin des faits semblables furent attests par d'autres tmoins, et personne ne conteste aujourd'hui un phnomne alors ni par ce qu'il y avait do plus savant. Ce qui est arriv l'occasion des arolithes arriverai indubitablement l'gard du magntisme animal, et le moment n'en est pas loign. Mais continuons notre rcit. A ct de la force se trouve presque toujours l'intol-

HISTORIQUE

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rance : les corps savants, qui pouvaient impunment imposer au public leurs croyances ou leurs opinions, n'ignoraient pas le mal qu'ils pouvaient faire Mesmer; aussi commencrent-ils, longtemps avant de prsenter leur rapport, perscuter les partisans de la nouvelle doctrine, et un grand nombre de mdecins furent-ils victimes de leur zle pour la propagation du magntisme ; on poussa l'impudeur jusqu' vouloir les faire mentir leur propre conscience. Aujourd'hui, ces faits nous paratraient incroyables, s'ils n'taient consigns dans une foule de mmoires crits dans le temps par les mdecins perscuts. Permettez-moi do vous citer un fragment de l'un de ces mmoires, pour donner une ide de l'animosit qui existait alors contre Mesmer et ses partisans. J'extrais ce passage d'une brochure intitule Rapport au public de quelques abus auxquels le magntisme a donn lieu, par M. Dongl, docteur rgent * : On dnonce trente docteurs magntisants, on donne un mniat chacun en particulier. Ils arrivent presque tous et sont relgus dans une salle spare de l'assemble. Chacun attendait avec impatience l'appel gnral, et se promenait en long et en large avec sa faon de penser et d'agir. On m'apprend qu'il est question de nous faire signer une espce de formulaire. Nous verrons ce qu'il contient, dis-je alors, et nous signerons, ou nous ne signecirons pas. L'appariteur parat enfin et m'appelle : comme le plus ancien, j'avais cet honneur-l. J'entre, fort surpris de n'tre suivi d'aucun de mes compagnons. On me fait asseoir, et M. le doyen commence par me demander si j'ai donn de l'argent pour me faire instruire du magntisme. Surpris encore plus de cette question, je rpondis, par respect, 1.Cette brochure a t publie en 1783. Du POTJJT.

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que M. Deslong ne prenait point d'argent, qu'il ne recovait que dos mdecins pour observer et l'aider; qu'il tait on no peut plus honnte, modeste et complaisant, et que d'aillours la Facult ne l'ignorait pas, Jo ne fatiguerai point le lecteur par le dtail des autres questions. Je fus interrog en criminel, et je me croyais transfr en la grande chambro de la Tournelle. On finit enfin par me prsenter une formule laquelle je ne crus pas devoir m'assujettir. Je ne voulus point signer, et rptai la Facult, pour lui prouver mon zle et ma soumission, que je n'avais pas encore trouv dans cette mthode un degr d'utilit suffisant pour lui en rendre compte, que j'y avais observ quelques effets pouvant tre attribus l'action de la chaleur d'un homme sain sur un infirme; qu'il fallait, pour magntiser les malades dans leur lit, beaucoup de courage, de force et de sant, etc. Je sortis; un autre me succda. Voici quelle tait la formule qu'on voulait faire signer chaque docteur rgent : Aucun docteur ne se dclarera partisan du magntisme animal, ni par ses crits ni par sa pratique, sous peine d'tre ra>i du tableau des docteurs rgents. Cet arrt est du 27 aot 1784. Vous le voyez, messieurs, il est ais de vous dmontrer que les corps savants n'ont jamais suivi d'autre systme que de combattre aveuglment tout ce qui tait vrai, tout ce qui tait utile. Je pourrais, l'appui de cette assertion, vous citer l'exemple si connu de Galile perscut pour avoir mis en vidence le vrai systme des cieux; celui de Christophe Colomb, annonant en vain le nouveau monde; celui de Harvey, dmontrant pendant trente annes la circulation du sang, sans pouvoir y faire croire. Plus tard, on a vu combien de temps la Facult de mdecine a condamn la pratique du quinquina, si prcieux dans les fivres intermit-

19 HISTORIQUE tentes; celle de l'antimoine, dont on fait un usage si frquent aujourd'hui. On sait qu'on 1636, aprs de longues discussions et d'inutiles efforts de la part des partisans du nouveau mdicament, a Facult fltrit et chassa de son sein un clbre mdecin, parco que ce mdecin avait, contre sa dfense, fait usage de l'rntique rprouv. N'a-t-on pas, mme de notre temps, vu Yinoculation proscrite par la Facult, qui, dans un dcret de l'anne 1745, la traita de meurtrire, de criminelle et de magique? C'est au milieu du xvm sicle que la Facult parlait ainsi de l'inoculation! non moins anime, alors, contre les inoculateurs qu'elle ne l'a t depuis contre les magntiseurs, elle les appelait bourreaux et imposteurs, et donnait aux inoculs les qualifications de dupes et d'imbciles. Tant de vrits mconnues et perscutes devraient, ce me semble, nous rendre plus circonspects et nous empcher de nier, sans examen, des faits attests, quelque tranges qu'ils puissent nous paratre. Mais ce n'est pas ainsi que nous procdons : L'exprience des sicles passs est perdue pour nous, ou du moins nous n'en tirons que des instructions striles et qui ne nous servent plus de rien, quand l'occasion se prsente d'en faire usage; car telle est la nature de notre esprit, que les choses qui nous paraissent les plus claires, quand nous les considrons en elles-mmes et d'une manire gnrale, nous ne savons plus en faire l'application dans les cas particuliers, quand nous sommes gars par nos prjugs et nos prventions. Je reviens, messieurs, au jugement inique prononc par l'ancienne Facult contre quelques-uns de ses membres, accuss de croire et de pratiquer le magntisme. . Plusieurs docteurs rgents ne se soumirent point au jugement prononc contre eux : ils ne voulurent poinj transigner avec leur conscience, furent impitoyablement

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rays de la liste des docteurs rgents, et privs des honneurs et des moluments qui taient attachs leurs fonctions. De ce nombre taient le docteur Deslon, premier mdecin du comte d'Artois, et M, Varnier, autre docteur rgent, qui, disait-on, montrait dans sa pratique, dans ses discours et ses crits, trop d'obstination pour le prtendu magntisme animal. Ce dcret est du 23 avril 1784. Il donna lieu un mmoire de M. Varnier, qui se rendit appelant. Ce mmoire, rdig par M. Fournel, avocat, est un monument prcieux o la sagesse et la prudence sont mises en opposition avec la sottise et le dlire de la Facult. Ce mmoire est appuy d'une consultation de dix-sept avocats des plus distingus, qui tous blment la conduite de la Facult, surtout lorsqu'elle exigeait le serment de ne jamais croire au magntisme et de ne s'en dclarer jamais partisan 1 L'acte d'iniquit d'un corps qui devait se respecter contribua beaucoup augmenter les partisans de la nouvelle doctrine ; et ce qui devait encore donner plus de fondement au systme de Mesmer et branler le respect que quelques personnes, conservaient encore pour la dcision des savants qui l'avaient jug, ce fut la rsolution de M, de Jussieu, qui ne voulut pas signer le rapport fait par Mauduyt, Andnj et Caille, avec lesquels il avait galement t charg de l'examen. M. de Jussieu fit un rapport particulier, dans lequel, sans admettre entirement le systme de Mesmer, il semble pourtant y reconnatre quelque fondement i. M. de Jussieu fit un acte de grand courage en se sparant 1. Mesmer, crivant un de ses amis, en 1783,disait : Monexis tence ressemble absolument celle de tous les hommes, qui, en a combinant des ides fortes et d'une vaste tendue, sont arrivs a une grande vrit; ils appartiennent cette erreur ou cette vrit ; et, selon qu'elle est accueillieou rejete, ils viventadmirs ou meurent malheureux. Mais quoi qu'ils tentent pour recouvrer leur indpendanceprimitive,c'est--dire pour sparer leur destine

21 HISTORIQUE de ses confrres, et ne craignit pas de braver les traits du ridicule qui poursuivait, dans le monde savant, tous les partisans du magntisme, et peut-tre mme les menaces du pouvoir. Partout en Franco se formaient dos Socits sous le nom de Socits de l'harmonie : beaucoup de personnes distingues taient inities aux secrets de Mesmer; Lyon, Bordeaux, Rouen, Strasbourg, Nantes, avaient des traitements publics o taient cfuris gratis un grand nombre de malades. La Socit do la seule ville de Strasbourg comptait cent quatre-vingts membres. Des procs-verbaux constatant les gurisons qui s'opraient dans ces traitements taient imprims et rpandus avec profusion *. Malgr les faits clatants et positifs de l'existence du magntisme, Mesmer tait jou sur la scne; des pomes burlesques taient imprims contre sa doctrine, et des chansons o lui-mme tait travesti circulaient dans Paris. Le magntisme tait le sujet de toutes les cunversations. Mesmer, avant de quitter la France, se rendit Spa, o le drangement de sa sant le retint quelque temps, Plusieurs malades d'un rang distingu et d'une fortune considrable avaient suivi Mesmer Spa, pour ne pa3 interrompre leurs traitements : ces malades partageaient vivement la douleur de celui auquel ils croyaient devoir le de celle du systme dont ils sont les auteurs, ilsne font que d'inuo tiles eflorts. Leur travail est celui de Sysiphe,qui roule malgr lui le rocher qui l'crase; rien ne peut les soustraire la tche qu'ils se sont impose. 1. Ce qui prouve bien la bonnefoides partisans de Mesmeret la ralitdes cures qu'ils opraient,c'est que,en mme tempsqu'ilsdposaient chezle notaire les originauxdes certificats constatantles gurisons de maladies, ils dposaient galement des fonds spcialement destins la vrificationdes faits et leur rfutation, s'ils taient tronqus. La mdecine ordinaire ne nous a jamais offert de semblablesexemples.

COURS DE MAGNTISME soulagement de leurs maux. Attachs au magntisme, dont ils ressentaient les effets bienfaisants, ils rsolurent d'assurer sa propagation en France, en procurant, au moyen d'une souscription, l'auteur de la dcouverte, une fortune indpendante qui le mt mme de la rpandre de la manire qu'il jugerait le plus convenable. Cette souscription eut lieu en effet : Mesmer accepta la proposition qui lui fut faite de former des lves; et le nombre de souscripteurs, qui devait tre de cent, dpassa de beaucoup ce nombre, quoique le prix de chaque souscription ft de cent louis. Les membres de cette Socit, instruits de la doctrine de Mesmer, excutrent le projet qu'ils avaient form; ils rpandirent gratuitement la connaissance du magntisme dans les provinces, et Mesmer quitta la France pour n'y plus revenir. Vous devez trouver trange que, aprs avoir fait tant de bruit, il se soit clips tout coup. Eh! messieurs, vous savez tous qu'une agitation bien autrement grande que celle qu'il avait cause survint en France : on eut alors d'autres intrts dfendre que ceux de la science; chacun, dans le tumulte des affaires publiques, songea soi et s'occupa peu d'une vrit qui n'tait plus rien, en prsence des vnements majeurs qui captivaient toutes les attentions et changeaient toutes les existences. Le magntisme, abandonn comme toutes les sciences librales, fut oubli avec les membres qui en possdaient la connaissance; les lves de Mesmer, tous riches et titrs, furent obligs de s'expatrier pour sauver leur vie, qui n'tait plus en sret dans leur pays; ils reportrent la dcouverte du magntisme son berceau : l'Allemagne, la Hollande profitrent de ses bienfaits, et quelques-uns des lves de Mesmer la portrent mme en Amrique. Aussi, pendant un espace de plusieurs annes, nous ne

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23 HISTORIQUE voyons en France nulle trace du magntisme : seulement quelquos individus isols agissaient dans le silence et faisaient le bien autour d'eux, sans publier le rsultat de leur pratique. Bientt arrivrent les Puysgur, anims d'une philanthropie que des infortunes personnelles n'avaient point altre; ils rapportrent et entretinrent le feu sacr qu'ils avaient reu de leur matre Mesmer. Avec eux, on vit bientt s'ouvrir de nouveaux traitements, et malgr les sarcasmes et les railleries des gens qui, sans avoir rien vu, nient tous les faits, ils publirent de trs-bons ouvrages, o ils exposrent une doctrine nouvelle, appuye par de nouveaux et nombreux faits '. La dcouverte du somnambulisme par M. do Puysgur prtait mille charmes l'tude de la magntisation; et la physiologie et la psychologie s'enrichirent d'une dcouverte qui fera bientt votre admiration. Si l'enthousiasme qui accompagna la seconde apparition du magntisme parmi nous fut moins grand, il fut aussi plus durable; on fit moins parade de cette vrit nouvelle, et plus d'hommes s'occuprent, dans le silence du cabinet, mditer sur ses rsultats. Quelques hommes osrent cependant rompre des lances avec les incrdules; mais n'ayant eux-mmes aucunes rgles, pour se conduire, et ne sachant pas d'une manire certaine reconnatre les faits vrais de ceux qui pouvaient n'tre que simuls, ils ne purent faire le bien qu' demi. L'abb Faria fut un de ces derniers : il ouvrit un cours public de magntisme et attira chez lui beaucoup de savants. Sans juger 1. PUYSGUR. Mmoires pour servir l'histoire et l'tablissement du magntismeanimal, 38 dition, 4820. Du Magntisme animal considrdans ses rapports avec diversesbranches do la physique, 1 1807, vol. in-8. Recherches, xpriences observations hysioloet e p giquessur l'hommedans l'tat de somnambtdisme aturel et dans le n somnambulisme 1 provoqua l'acte magntique. 8H, 1 vol,h>8setc. par

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COURS DE MAGNTISME encore les doctrines de ce magntiseur, nous devons lui rendre pleine justice; il contribua beaucoup rpandre le magntisme en France. Dou d'une puissance presque incroyable tsi l'on ne savait que cette puissance augmente par l'exercice), il fora quelques savants reconnatre une force qui leur tait inconnue : nous tions alors dans un sicle plus positif; et comme, plus que jamais, on reconnaissait qu'il n'y avait point d'effet sans cause, les nouveaux convertis au magntisme crurent qu'il tait de leur dignit de ne pas ddaigner l'tude de cette dcouverte. Ils s'attachrent donc et suivirent de plus en plus l'homme prodiges; ils apprirent eux-mmes magntiser; ils reconnurent bientt que ces effets magntiques se produisaient par une cause naturelle, dpendante de notre volont; que cette facult tait commune tous, et que l'abb Faria ne faisait que la mettre en jeu avec plus d'nergie, mais sans privilge spcial. Des ouvrages majeurs parurent; le nom de leurs auteurs, la rputation dont ils jouissaient dans le monde, fixrent enfin d'une manire durable l'opinion de beaucoup de gens instruits : non que ces derniers crussent pour cela tout ce qu'on racontait de la facult magntique; mais, prenant en considration le mrite bien conuu des gens qui disaient avoir expriment, leur bonne foi et leur dsintressement, ils ne pouvaient sans tmrit taxer de mensonges des faits si bien attests. L'incrdulit flchit devant la vrit; le doute pntra de toutes parts dans les rangs des corps savants. Chacun fut alors plus soigneux de sa renomme : on n'osa plus crire contre ce que l'on ne connaissait pas; on abandonna les pithtes peu honorables dont on se servait habituellement pour dsigner les personnes qui s'occupaient rpandre la connaissance du magntisme. Mais seulement on opposa une force d'inertie dsesp-^ rante; on se refusait voir des faits, les examiner. Il y

25 HISTORIQUE avait bien e et l quelques individus qui, force d'instances, consentaient voir; mais la majeure partie des savants, qui se souvenaient d'avoir t juges dans cette question et de s'tre prononcs pour la ngative, n'osaient pas courir lo risque d'tre forcs de donner une rtractation : ils craignaient d'tre convaincus et accuss de lgret. M. de Puysgur leur facilitait pourtant les moyens do evenir de leur premire dcision. Voici quel tait le langage de cet homme estimable. Toute dcouverte dans les sciences, disait-il, devant, pour tre admise, tre revtue de la sanction des savants, c'est eux seuls qu'il appartient de prononcer, tant sur l'existence que sur l'utilit du magntisme animal; certain do lo ralit des faits que j'ai observs, autant je mets du prix les en persuader, autant je leur soumets avec docilit tous les aperus et toutes les consquences que mon esprit ou mon sentiment en auraient pu tirer. Quelque svre que soit leur jugement mon gard, il ne pourra que satisfaire au dsir que j'ai de n'admettre que des vrits; mais qu'il n'en soit gnralement reconnu qu'autant qu'elles seront sanctionnes par leur lumire et revtues de leur autorit, L'utilit des sciences et l'estime que je leur porte me feront toujours tre flatt des leons que je recevrai des savants et n'tre afflige que de leur indiffrence. M. de Puysgur est mort sans tre parvenu son but; les savants ont gard le silence. Les mmes hommes cependant se sont enquis avec ardeur des phnomnes de la lumire, de ceux de l'lectricit, etc., et aujourd'hui mme ils recherchent avec empressement ceux que prsente le galvanisme, et ils ferment opinitrement les yeux sur les phnomnes qui proviennent de la vie elle-mme; ils ont compltement approfondi ou s'occupent d'approfondir la nature de tous ces fluides trangers la vitalit, et les effets surprenants du fluide vital leur

COURS DE MAGNTISME sont entirement inconnus : ces effets, si importants tudier pour parvenir la connaissance vritablo de l'homme, n'ont encore obtenu quo leur ddain, Aussi nous voyons se confirmer ce que je vous disais en commenant, que c'est aux jeunes gens propager la dcouverte du magntisme. Vous verrez quo, au sein mme de nos Acadmies, ce sont les plus jeunes membres qui se sont prononcs pour l'examen, que ce sont eux seuls qui ont expriment et reconnu les vieilles erreurs de leurs devanciers et qui ont os, secouant le joug d'un prjug qui pesait sur eux de toute l'autorit de la chose juge, reconnatre et proclamer hautement la vrit. Lorsque nous vous aurons convaincus de l'existence du magntisme animal, nous esprons que vous joindrez votre voix la ntre pour en propager la connaissance ei l'usage. Vous accuserez la tideur des savants et surtout des mdecins, car rien de ce qui intresse la vie des hommes ne doit leur tre indiffrent; vous leur reprocherez de laisser dans l'oubli une vrit aussi importante que l'est celle du magntisme. Appels chaque jour prononcer sur des effets dont la cause leur chappe, chaque jour ils se voient rduits la ncessit malheureuse de corriger la nature, qu'ils ne connaissent point, par les procds d'un art que souvent ils ne connaissent pas davantage ; chaque jour, ils ont donc des souhaits former, pour qu'une rvolution avantageuse au progrs des sciences dveloppe enfin quelques germes de vrit sur le sol ingrat qu'ils cultivent depuis si longtemps avec tant de constance et si peu de succs *. Vous vous plaindrez hautement de les voir reculer devant un examen srieux et attentif. 1. On lit dans la plupart des livres modernes que, l'poque du renouvellementdes sciences, la mdecines'est perfectionne;que les dcouvertes immenses qu'on a faites en anatomie, en physique, en

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27 HISTORIQUE Vous interrogeant, vous vous demandez sans doute pourquoi l'Acadmie de mdecine n'a pas encore pris de rsolution sur ce sujet, bien qu'un rapport, o tous les intrts de corps ont t mnags, lui ait t lu le 28 juin 1831, par M. Husson, nomm rapporteur par la commission du magntisme. Vous chercherez les motifs d'un semblable refus d'examen! d'un semblable dni de justice! et votre tonnement sera grand lorsque je vous donnerai connaissance des faits que contient ce rapport : ils sont d'une telle nature, que la commission, compose de onze membres de l'Acadmie, s'est dclare convaincue, bien que la plupart des membres de cette commission fussent incrdules avant l'examen. Vous verrez que l'un des commissaires soumis lui-mme la magntisation * en a prouv les effets les plus vidents et les moins contestables, non-seulement dans une sance, mais dans plusieurs, toujours devant ses confrres et dans des circonstances qui n'taient cependant nullement favorables aux expriences. Tous ces faits que je vous signalerai ont t consigns dans des procs-verbaux qui furent signs par tous les ' membres de la commission. Vous penserez que ce n'est pas remplir son mandat que de taire une vrit qui peut tre utile l'avancement de la science et notre bonheur, s'il est vrai toutefois que chimie,ne permettent pas de rvoquerses progrsen doute ; qu'elles ont appris aux praticiens des routes nouvelles; qu'elles lui ont fait voir de nouvellesforces; que l'conomieanimaleest mieux connue, te qu'il est plus ais d'en rtablirles ressorts lorsqu'ils sont drangs. Maissi cela est vrai, pourquoidonc,malgrles secouro d'une thoorio lumineuse,la pratique a-t-elle si peu chang? gurit-on plus srement? prvoit-on mieux la terminaisondes maladies? d. DISSZE,m. 1. C'est moi qui le magntisais.

COURS DE MAGNTISME l'action magntiquo exerce une influonco salutaire sur l'conomio animale. . Ngliger d'approfondir la thorie du magntisme et les moyens do rendre ses effets plus sensibles, ne point chercher si son influence plus ou moi u grande ne pourrait dterminer le sige de nos maux, c'est ressembler aux habitants d'phso. Si parmi nous, disaient-ils, quelqu'un veut exceller ou trouver un nouvel art, qu'il soit banni ; qu'il aille porter ailleurs sa supriorit et ses lumires. Ce langage es-t dur, mais la conduite des savants et des mdecins semble le justifier compltement. Car quels sont les motifs qui pourraient s'opposer l'adoption du magntisme? Serait-ce parce qu'on a cri au miracle en apercevant quelques phnomnes tranges? Eh ! messieurs, il n'y a rien de merveilleux dans le magntisme animal. C'est un agent naturel, encore inaperu, inou pour plusieurs, et voil tout. Il n'y a de merveilles, de miracles que pour les sots. Plus les peuples sont ignorants, plus il y a de miracles, parce que, ignorant la plupart des phnomnes de la nature, il y a un plus grand nombre de faits qui chappent leurs connaissances et leur paraissent trangers ses lois : plus les peuples s'instruisent, plus leurs connaissances s'tendent, moins il existe de faits qui les surprennent. Lorsqu'ils en rencontrent de nouveaux, ils ne s'tonnent plus, ils ne crient pas au miracle, ils ne les nient mme pas, mais ils les tudient et les rapprochent d'autres faits analogues dj connus. Ainsi s'accrot par des anneaux successifs la chane des connaissances humaines. Il est remarquer que tout ce qui est nouveau et surtout inaccoutum excite en nous le rire, le mpris ou l'tonnement. Le sage ne doit ni mpriser ni s'tonner, il doit examiner. La plupart des phnomnes de la nature sont tous au moins aussi surprenants que ceux du magntisme animal : 2S

2J HISTORIQUE certes la lumire parcourant 4 millions de lieues par minuto, nous donnant la facult de reconnatre l'existence d'objets placs plusieurs milliards de lieues do nous, et cela dans un instant, faisant pntrer le spectacle do l'immensit de la nature entire par une ouverture de la grandeur d'une tte d'pingle, est un miracle bien autrement surprenant que l'influence d'un individu sur un autre la distance do quelques pieds. L'attraction rgissant l'univers, se faisant sentir sans intermdiaire des distances normes d'un astre un autre, maintenant ainsi dans leur cours les globes clestes, n'est-elle pas encore une merveille bien autrement surprenante? Et cependant qui fait attention la magie de la lumire et de l'attraction? A peine quelques hommes s'en occupent-ils; le reste jouit de leura bienfaits sans s'en tonner et mme sans y songer. Pourquoi? Parce que ce sont des choses habituelles. Il est tmraire, il est mme insens de vouloir imposer des bornai la nature, et il n'y a plus aujourd'hui que l'hypocribie qui se serve de ces moyens pour arrter l'essor du magntisme, car rien dans ses effets ne viole les lois de la nature. On a dit et rpt que le magntisme favorisait la superstition. Eh! messieurs, qui ne reconnat que cette ' assertion est un mensonge intress? Le magntisme, au contraire, dtruit toute espce de superstition, et c'est un de ses grands bienfaits. Mais que ne dit-on pas d'une chose dont on ne veut pas reconnatre l'utilit? Vous vous livrerez donc, messieurs, l'examen que nous venons vous proposer; vous y apporterez cet esprit de doute qui consiste ne croire ou nier que lorsqu'on a examin, vu, appliqu ses sens. C'est la seule rgle, la seule cause de toute connaissance positive et de tout progrs dans les sciences, Messieurs, la pratique du magntisme nous dispose la philosophie, non cette philosophie orgueilleuse qui veut

COURS DE MAGNTISME dominer l'opinion, mais a cette philosophie douce et tranquille qui rapprooho les hommes, qui nous fait voir un frre dans celui qui a besoin de nous; qui, aprs les devoirs que nous avons remplir, nous inspire le besoin de consacrer no3 moments de loisir des actes de charit; qui nous loigne des discussions politiques, nous porte ne pas nous attacher des systmes, mais rectifier notre jugement par des faits; qui nous dmontre la spiritualit de l'ame, la puissance de la volont, l'usage que nous pouvons faire de cette volont; qui nous dtache des plaisirs frivoles et nous inspire le got des bonnes moeurs; qui nous montre enfin que les hommes sont fils d'un mme pre, unis par des relations physiques et morales; qu'ils sont comme les membres d'un mme corps, qu'ils sympathisent les uns avec les autres, et qu'ils peuvent tous exercer une influence salutaire sur leurs semblables. On peut ajouter que l'tude du magntisme joint la vrit de l'histoire l'intrt du roman et le merveilleux de la ferie ; qu'il produit les effets les plus curieux, les plus intressants et les plus utiles; qu'il procure les plus grandes jouissances ; qu'il faut mme de grands efforts pour ne pas s'exalter au dernier point, la vue de toutes les merveilles du magntisme de l'homme. Il fait voir un nouvel ordre de choses, il vous transporte dans un nouvel univers, rpand un nouveau jour sur tous les objets du ressort de la physique, agrandit le domaine de nos connaissances, dont on peut dire qu'il est la clef; il manifeste d'une manire clatante la toute-puissance et les merveilles du souverain tre, et remplit le coeur de l'homme de la plus profonde vnration pour l'ordre, l'harmonie et les rapports qui rgnent dans l'univers, d'o drivent plusieurs lois tant physiques que morales, lois primitives et essentielles qu'on ne peut transgresser sans prouver les peines attaches cette transgression. Il procure des plai-

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31 HISTORIQUE sirs qui sont autant au-dessus des autres plaisirs quo la science du magntisme ost au-dessus des autres sciences : plaisirs si vifs, qu'ils ont fait dire l'illustre auteur des mmoires do Busancy qu'ils donnaient trop d'existence. Avant de terminer cotte leon, je dois vous entretenir des causes particulires qui m'ont engag prendre la dfense du magntisme et m'y dvouer sans rserve. Il y a trente-cinq ans qu'un tudiant en mdecine eut occasion de faire devant une nombreuse assemble de mdecins une srie d'expriences dont le rsultat a t trsconnu. Voici le fait : On parlait un jour devant M. Husson, mdecin del'HtelDieu, d'expriences magntiques faites dans le monde sur des malades qu'on prtendait avoir guris de cette manire. On contestait devant ce savant mdecin l'existence du magntismo, pensant qu'il partageait le doute manifest par les personnes qui composaient alors sa clinique. Mais M. Husson rpondit qu'avant de nier une chose, il fallait avant tout l'examiner, et que si on lui amenait un magntiseur, il s'empresserait de le mettre l'preuve, pour juger si, en effet, le magntisme existe, ou si ce n'tait qu'une jonglerie. On pensait gnralement que la hardiesse des partisans du magntisme n'irait pas jusqu' s'exposer venir, en face d'aussi bons juges, jouer un rle qui ne pouvait que faire; natre le ddain et le ridicule. Mais, contre toute attente, le magntiseur, prvenu de cette disposition, arriva le lendemain la visite du professeur; vous dire comment il fut reu, vous pouvez le deviner; il n'y eut que M. Husson qui conserva sa gravit. Bref, une malade fut choisie, non par le magntiseur, mais par les assistants : on prit une jeune fille extrmement malade, pensant que si le magntisme la gurissait, ce ne serait qu'un jeu pour lui de gurir tout l'hpital. Tous les moyens que fournit la mdecine avaient t employs suns

COURS DE MAGNTISME succs. Douze cents sangsues, vingt saignes, autant de vsicatoires, Veau glace, les affusions froides^ Vopium, le musc, la dite la plus rigoureuse, etc., etc., rien n'avait pu arrter des vomissements de sang qui menaaient les jours de la malade; et, rduite au dernier degr de marasme, elle attendait sa fin prochaine. Place sur un brancard, on la porta dans une chambre spare o les expriences devaient commencer. L'tudiant magntiseur s'approcha d'elle sans cependant la toucher, tendant simplement la main eu face de la rgion pigastrique et la dirigeant sur le3 principaux viscres des cavits splanchniques; il continua cette manoeuvre pendant vingt minutes seulement. Pendant ce temps, aucun changement ne s'tait fait apercevoir chez la malade; elle fut reporte son lit, et chacun pensait qu'elle avait t dplace inutilement. Mais, messieurs, dater de ce moment, plus de vomissements. Quelle tait donc la cause d'un aussi grand changement? La malade suivait son rgime habituel, et depuis plus de neuf mois on n'avait rien vu de semblable. Le magntisme tait encore rcus, car on n'avait pas aperu de changement apparent pendant son application ; dans le doute, les expriences recommencrent, et l'on vit bientt natre tous les phnomnes les plus extraordinaires du somnambulisme : l'insensibilit aux moxas, aux piqres, l'ammoniaque, et enfin un isolement complet pour tout ce qui n'tait pas le magntiseur. Des faits si tranges, raconts par des mdecins qui en avaient t les tmoins, attirrent une affluence considrable. Parmi les curieux, il y en eut plusieurs qui furent mcontents de ces expriences, et qui, quoique convaincus, disaient-ils, de la ralit du magntisme, jurrent cependant d'employer leur crdit en arrter la propagation. Ils ne se bornrent pas cette menace, ils cherchrent bientt faire planer sur l'tudiant en mdecine, des sounoiis injurieux son caractre et sa fran-

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33 HISTORIQUE chise. Cette conduite rprhensible ne fit qu'enflammer le zle de l'tudiant pour la vrit. Il se promit, son tour, d'employer ses facults et tout son temps la rpandre, et de se venger, par la publicit, des moyens qui, dans cette circonstance, venaient de lui faire remporter le plus beau triomphe que tout homme gnreux puisse envier. La malade fut gurie ; elle sortit de l'Htel-Dieu au bout de vingt-sept jours. Messieurs, la personne qui fit ces expriences vient remplir son voeu ; heureuse si elle peut vous dterminer essayer vous-mmes le moyen qui lui fit obtenir quelque succs; vous l'aiderez de cette manire justifier le magntisme et les magntiseurs des calomnies sans nombre qu'on s'est plu rpandre sur eux. Vous l'aiderez rpandre une vrit consolante et faire connatre tous les hommes la richesse inconnue que leur organisation recle. Vous nous aiderez les tirer de cette ignorance profonde o ils sont encore touchant les merveilleuses facults de l'me humaine. Messieurs, dans la prochaine leon, je vous entretiendrai des faits qui prouvent d'une manire vidente l'existence du principe que l'on appelle magntisme animal. Vous jugerez de la valeur des grands mots employs par ' nos adversaires pour servir expliquer ses effets, Vimagination, la chaleur animale, l'imitation, l'rthisme de la peau, et tout rcemment le mot extase. Vous reconnatrez quo le magntisme a une manire d'agir qui lui est propre et se trouve tout fait indpendante des causes qui lui ont t assignes ; Qu'il ne faut point de foi pour l'employer ou le recevoir, qu'il n'est le privilge de personne en particulier ; Que nous le possdons tous, et que, tant le rsultat de notre organisation, la mort seule peut nous en priver. Du POTET, 3

COURS DE MAGNTISME Lorsque cette vrit vous sera dmontre, nous vous parlerons des phnomnes particuliers qu'il produit sur nous, et notamment du somnambulisme et des faoults que l'on acquiert dans cet tat, facults les plus tranges de toutes. Nous rechercherons le magntisme dans l'antiquit, et nous en trouveions de nombreuses traces dans les auteurs anciens et modernes et dans les traditions populaires de tous les pays : les Oracles, la Pythie, sur son trpied, les Sibylles, les Possds, les Visions, les Prdictions, les Magiciens, les sortilges, les sorts, les charmes, offrent des indices assez vidents pour les hommes qui examinent sans prvention. Nous vous ferons connatre ensuite les dangers qui rsultent d'une application irrflchie et exerce comme elle l'est maintenant par une foule de personnes qui ne l'ont pas tudie d'une manire spciale. Nous examinerons les doctrines qui ont servi de base au magntisme, celles surtout qui rgnent aujourd'hui, et nous vous tracerons des procds qui nous semblent plus en harmonie avec l'tat actuel de cette science et la seule route suivre pour arriver une conviction solide, conviction qui ne doit tre base que sur des faits physiques et purement matriels. Pour vous faire bien comprendre les procds enseigns par moi, jo magntiserai devant vous quelques personnes, pour vous montrer comment on peut obtenir la production des phnomnes magntiques, en vous mettant en vidence cette vrit, que chaque individu porte en soi-mme sa vie et sa mort, comme la sant et la maladie; Que tout ce qui se peut connatre de la nature est manifest en nous; Et enfin, que l'on peut, en imitant la nature, l'obliger faire un effort au del de ses productions ordinaires en l'aidant par industrie et obtenir ainsi la gurison d'une foule de maladies que la nature seule, ou aide d'un habile mdecin, ne pourrait gurir.

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DEUXIME

LEON

DU D DE LE FLUIDE L'AME. PREUVES E L'EXISTENCE MAGN ET A FAITES L'nTEL-DIEU A LASALTISME. EXPRIENCES F DE PTR1RE. RAPPORT M. HUSSON, AIT A L'ACADMIE EN ROYALE DEMDECINE 1825. * 0 philosophes naturalistes abuss, curieux prtendus erp qu' demi,VOUB ants,vousno saveztre rien.Pntrez avant voir plus croyez etvousne voyez del'tre auxoorecsuperficielles et, sansvousarrter s des vrits commo quivousdtournent profondes lo uo lisez autant qu'il q peut, v trephysjquoousmontre dansl'intrieur. Enlui estla vloet la vioestla lumire deshommes. Quelestdonccet agentqui a tant d'empireur le s E Une corpsde l'homme? st-ilmoralou physique? ou manationo notremeintellectuelle un rayon d dtach do quelqueastre bienfaisant? hasse-t-il C n desmaladies devant ousla cohorte,effrayante comme une vapeurlgre?Etablit-il nfinlo rgnede la e santsurla terre' MESSIEURS, Dans ma premire leon, je n'ai fait que parcourir rapidement l'historique de la dcouverte du magntisme animal, et que vous indiquer les difficults qui ont retard son tablissement et son enseignement dans les coles. Vous aurez remarqu combien les corps savants avaient mis de partialit dans l'examen qu'ils avaient fait de la dcouverte de Mesmer. J'aurais pu, m'appuyant d'une foule de tmoignages crits, ne laisser dans vos esprits aucun doute ce sujet; mais il ne s'agit plus de discussions sur des faits anciens ; il n'est plus question de savoir si le magntisme existait du temps d Mesmer; ce qui importe, c'est de savoir s'il existe au temps oit nous vivons.

COURS DE MAGNTISME Produjt-on sur la nature humaine des effets, en employant des procds particuliers ? l'homme exerce-t-il cette action par l'intermdiaire d'un agent ? Quelle est la nature de cet agent? La cause en a-t-elle toujours exist*? et pourrons-nous, par la seule application du principe que nous croyons possder, gurir quelques maladies 1 Telles sont, messieurs, les questions que nous nous proposons d'examiner : et de leur solution entire doit dcouler pour nous le doute ou la croyance. Laissant de ct toutes les hypothses, nous n'allons nous attacher qu' des faits bien avrs, attests par des hommes capables de bien observer, et que nous pourrions reproduire, s'il en tait besoin. Je voudrais, messieurs, adopter la marche que l'on suit pour l'tude des sciences physiques, vous faire connatre les effets les plus simples du magntisme, avant de vous parler des effets les plus composs. Mais cette mthode ne peut tre employe que d'une manire arbitraire ; car les phnomnes produits sur la nature vivante diffrent essentiellement de ceux que l'on observe ailleurs. Vous le savez, messieurs, les lois physiques sont constantes, invariables ; elles ne sont sujettes ni augmenter ni diminuer; tandis que les corps vivants, au moral comme au physique, n'offrent presque jamais la mme manire d'tre, et montrent, au contraire, des modifications infinies, Je vais cependant procder de cette manire, et ne m'occuper d'abord que d'une srie de phnomnes prsentant peu pr3 les mmes caractres physiologiques. Je laisserai de ct tous ceux qui m'loigneraient de cette marche et les reprendrai dans une autre sance ; mais, je vous le rpte, je vais suivre une mthode factice, je vais employer une rgle arbitraire, une rgle quo n'admet point l'tude pratique, car les effets magntiques les plus simples se prsentent souvent avec les effets les plus extraordinaires.

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37 EXISTENCE DU MAGNTISME Quoi qu'il en soit, j'ai la persuasion que le magntisme, ce principe actif que nous possdons en nous et qui, lorsque nous le voulons, se manifeste extrieurement par ses effets, a des lois particulires et constantes; seulement, elles sont encore trop ignores pour qu'on puisse les tablir d'une manire rigoureuse et les suivre toujours dans leurs manifestations. Messieurs, lorsque l'on sait que l'on possde en soi la facult magntique, et que l'on est dtermin la mettre en jeu, on ne tarde pas voir natre des effets qui paraissent en tre le produit, car l'individu sur lequel vous dirigez votre action prouve des modifications dans sa manire d'tre habituelle. Quelquefois ces changements s'oprent brusquement et sont trs-apercevables, mme pour l'observateur le moins attentif; souvent votre action ne se fait sentir qu' la longue, et il faut, dans ce cas, pour les reconnatre, possder des connaissances physiologiques *. Les phnomnes produits par la magntisation sont nombreux. Quelques-uns de ses effets peuvent tre regards comme provenant d'agents connus et dj tudis. D'autres, au contraire, semblent tre le rsultat de causes insaisissables, et par l se soustraire toutes les lois de la nature, telles du moins que nous les avons tablies, et nous reporter au temps o tout tait merveilleux, o la crdulit n'avait point de limites. Cependant, messieurs, rassurez-vous, ces phnomnes, si extraordinaires pour les personnes qui les considrent une premire fois, cessent bientt d'tre des prodiges pour celui qui a l'habitude d, les examiner, et, si l'on ne peut encore les soumettre l'analyse et les expliquer, ce temps arrivera immanquablement. Gicron disait, il y a deux mille ans : Quelque phnoi.Les effets magntiquesne se manifestentpas toujours instantan* ment,parce que nous n'avonspas, commela torpille,un rservoiro le fluidepuisse s'accumuler et d'o il puiseo tre lancavecabondance.

COURS-DE MAGNTISME mne qui se prsente vous, il est de toute ncessit que la cause en soit dans la nature; quelque trange qu'il vous paraisse, il ne peut tre hors de la nature. Cherchez-en donc la cause, et tchez de la trouver si vous pouvez; si vous ne la trouvez pas, tenez pour certain qu'elle n'en existe pas moins, parce qu'il ne peut rien se faire sans cause; et toutes ces terreurs ou ces craintes que la nouveaut de la chose aurait pu faire natre en vous, repoussez-les de votre esprit, en considrant que ces phnomnes viennent de la nature. La cause des effets magntiques ne peut donc tre hors de la nature, c'est aux esprits attentifs qu'il appartient de la rechercher et de la dvelopper. LE FLUIDE DE L'AMEJ Une polmique intressant la science s'est ouverte, entre plusieurs hommes de mrite, sur cette question. Un fluide, un agent venant de nos organes, peut-il tre dmontr ; son action sur les magntiss, s'il existe, est-elle la cause relle des phnomnes, ou plutt les phnomnes magntiques sont-ils dtermins seulement par les facults de l'me humaine? On peut rsumer ainsi les opinions contradictoires qui se sont produites dans les livres et dans le Journal du magntisme. Chaque crivain apporte des preuves, et, aprs un combat assez long, nul ne peut tre vaincu. Le fluide, terrass, se relve plus fort et plus dispos qu'avant sa chute. L'Ame, qui a chancel un instant, revient dans la lice, comme si nulle blessure ne l'et atteinte. On aime voir cette lutte pacifique, o les armes, quoique courtoises, font jaillir des clairs. Spectateur intress la victoire des fluidistes, car nous dclarmes tout d'abord qu'ils seraient vainqueurs, nous n'en rendons pas moins

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EXISTENCEDU MAGNTISME 39 justice la valeur dploye dans ce champ clos par un terrible adversaire. Nous l'aimions bien, et pourtant nous voulions qu'il succombt. C'est que sa chute doit tre avantageuse notre parti s sa dfaite un triomphe pour luimme; car, en tombant, il aura rpandu beaucoup de lumire sur ce qui tait plus contestable que le fluide magntique : il a dbrouill l'me, ce souffle divin qui, en nous, organise la matire, et que l'on reprsente trnant au milieu de son difice, non pas comme le chef d'une monarchie entoure d'institutions rpublicaines, mais d'un brillant cortge, et se servant, pour transmettre ses volonts, ses ordres dans tout le royaume, d'un vaste rseau de voies de communication dont la tlgraphie lectrique ne peut offrir qu'une bien faible image. Mais l'me, comme ses messagers, n'a point encore cess d'tre invisible. M. le docteur Ordinaire a donc raison; ses adversaires n'ont point tort. Pourquoi alors cette mle, si l'on no peut s'entendre aprs comme avant? C'est qu'il ne faut point couter son sentiment seulement, et dire : Ceci est ou n'est pas, en considrant un seul fait, mais voir l'ensemble. Il s'agit de savoir si l'agent magntique n'emporte point avec lui de quoi satisfaire toutes les opinions par le double effet qu'il produit. En effet, si vous prenez seulement pour tude le sommeil lucide ou somnambulique, vous n'obtenez qu'un rsultat plutt moral que physique; mais si, au contraire, vous tudiez simplement tous les singuliers phnomnes que la magntisation produit sans amener le sommeil, vous tes tent de reconnatre un agent semblable celui dit lectrique ; car les corps magntiss accusent la succession rapide ou lente de tous les faits dus cet agent. En vain vous cherchez en eux les facults de l'me : elles n'y sont point alors et ne peuvent y tre. Faisons quelques expriences. J'approche mon pied d'un animal endormi, il ne bouge

COURS DE MAGNTISME point; je dirige, par ma volont, la force magntique cette 1 extrmit, elle obit; et qu'apercevons-nous? Un envahissement gradu de tout le systme nerveux de l'animal ; il se charge vraiment comme une bouteille de Leyde; et lorsque sa capacit ne peut plus recevoir cet coulement, il s'agite, se convuls et se rveille. L'ai-je touch? Non, Est-ce mon me qui a agi? Oui, dites-vous ; mais alors pourquoi le temps est-il ncessaire ? comment les phnomnes sont-ils gradus et suivent-ils toujours la mme marche, marche en tout identique avec celle produite par des agents physiques purs ? L'me n'est point encore ici, pas plus que dans le courant qui convuls une grenouille soumise au galvanisme. Si je soumets un tre humain, dormant du sommeil naturel, la mme preuve, l'effet est identique avec celui preuve par l'animal. On peut objecter qu'on ne voit point ce fluide ou cette force; ce n'est pas une raison. Il me suffit de constater la loi d'une circulation certaine, d'en pouvoir graduer les effets. Je n'ai pas besoin d'un autre tmoignage que celui qui s'offre moi; car il vient de la nature elle-mme; mon imagination n'y peut rien. Qu'importe que cet agent soit capricieux dans son action, ou qu'il passe d'un corps dans un autre, quittant celui-ci pour affecter celui-l, et qu'il produise, dans certains cas, des effets que je n'ai point d'avance voulus et mme souponns? Il n'en devient que plus vident que mon me y est tout fait trangre. L'lectricit lance de l'espace vers la terre n'est point dirige par une me; c'est une force aveugle, mais qui pourtant subit une loi d'affinit : elle est soumise des attractions et des rpulsions, comme l'est l'agent magntique. Le malheur des magntiseurs, c'est de vouloir et d'avoir voulu, ds le principe, faire de la philosophie transcendante.

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EXISTENCE DU MAGNTISME 41 A peine Mesmer a-t-il parl physique magntique, que nous voyons natre les martinistes. Cependant il n'tait point encore question de somnambulisme. Puysgur arrive : c'est le fluide; Deleuze : c'est dj quelque chose d'animique; Billot : de purs esprits; Faria : la seule volont; d'Hnin de Cuvilliers : l'imagination; Bertrand : une pidmie morale; Chardel ; quelque chose entre l'me et la matire; Rostan : un agent nerveux; Georget crut y voir d'abord le fluide nerveux, puis quelque chose comme l'me; pour la commission de l'Acadmie de mdecine (1831), c'est un agent nerveux ; enfin d'autres ne virent plus d'agent, plus de force, mais des mes de morts. Nous en passons, et des meilleurs l Oh 1 oh ! messieurs, de grce, n'allez pas chez les trpasss chercher la chose; mais considrez vos efforts tout humains. Je vous le rpte, sans agent vous ne pouvez rien; avec lui-mme, vous serez impuissants produire d'autres fruits que ceux de sa nature. Je ris de vos superbes puissances. A vous entendre, on vous croirait capables d'oprer les plus grandes merveilles; en vous voyant agir, on constate votre infriorit relative. C'est que vous quittez le droit chemin, c'est que vous allez chercher cette foudre humaine o elle n'est pas; votre organisation la produit et la scrte, il ne vous faut avoir recours ceux qui ne peuvent vous la donner, parce qu'en mourant ils l'ont perdue pour jamais. Comment! je communique le calorique de mon sang, et je rchauffe ainsi ceux qui m'approchent, ayant plus froid que moi 1 et je ne pourrais point de mme, me dpouillant de ma richesse nerveuse, enrichir pour un instant l'tre moins heureux que moi! lorsque je vois surtout les missions de ce fluide, tout involontaires, agiter, convulser tout ce qui se trouve dans mon rayon ou mon atmosphre, vous vouiez faire intervonir je ne sais plus quelle divinit pour

COURSDE MAGNTISME des oeuvres si simples : c'est que vous vous croyez des vases d'lection, des esprits d'lite, ayant parent avec un monde invisible d'o vient toute puissance. Prenez garde, bientt les tres les plus matriels vous dpasseront de cent coudes, car ils auront trouv le vritable secret pour agir; et celui qui, dans un pugilat, terrasse son adversaire et l'assomme, tait plus fort que lui. Il s'agit en cela d'tre bien organis et de savoir porter des coups : en magntisme, c'est l'emploi de la mme force nerveuse par un mcanisme diffrent. Mais jo m'loigne de mon sujet; aussi bien ce n'tait pas inutile : il faut ter toute ressource son antagoniste et lui couper les vivres. Revenons au fluide et l'me ; il faut avouer que l'on fait cette dernire un peu matire; voyez comme tous les ressorts s'affaiblissent aprs des magntisations successives. L'me serait donc susceptible d'usure? Elle se complairait sans doute produire ces soubresauts, ces trismus de muscles, ces convulsions, toutes ces agitations des magntiss? Non, l'me n'apparat point encore dans cet ordre de phnomnes; c'est la force brute, l'agent simple, celui-l mme qui excite en nous les mmes mouvements lorsque nous sommes malades et que sa circulation souffre quelque drangement. Je n'ai pas besoin qu'une somnambule me dise : il est ou il n'est pas; je m'en rapporte au fait lui-mme, qui me dmontre rigoureusement son existence. Sans lui, je ne pourrais absolument rien au dehors de moi, et rien au dedans, si les nerfs qui le conduisent ont reu quelque atteinte. En vain vous m'objecterez la pense qui produit, mme au loin; ce sera pour moi une mission du mme agent, ayant lieu par d'autres voies. Il est alors port par les milieux, comme le pollen des plantes, qui, spar de la fleur, porte la fcondation de grandes distances. Je dis plus : lo mme agent existe dans toute l'animalit.

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43 EXISTENCE DU MAGNTISME La torpille, chez les poissons; plusieurs espces de reptiles; quelques oiseaux mme nous le montrent. L'homme seul, de tous les tres, est celui qui il a t dparti avec le plus de libralit, et bientt cette vrit sera dmontre. Pour moi, l'agent magntique est celui-l mme des mouvements, et je ne m'tonne point si dernirement, l'Acadmie, un savant prtendait, avec la seule contraction de quelques-uns de ses muscles, faire mouvoir une aiguille. Il est l'agent mme de toute digestion comme de toute circulation; car c'est ainsi que par lui nous allons chez les autres activer, rgulariser ces fonctions. Je ne doute point qu'il ne s'introduise en nous tous par l'acte respiratoire; mais nous le recevrons cru; il est alors soumis la vie, qui en spare les parties trop grossires avant de l'employer. Sa base est donc une lectricit compose, et si l'on n'avait point dj prouv que l'lectricit, le galvanisme, l'aimant, sont une seule et mme chose, cette preuve serait acquise par les effets que nous produisons naturellement, car il est tout cela ensemble, quoique cependant modifi. Bien mieux, on peut prouver qu'il s'chappe de nous par ondes; chaque acte de volont agit avec la rgularit de coups de piston, soit qu'il soit destin des oeuvres intrieures ou qu'il aille au loin se perdre. Notre nature s'en dbarrasse le plus qu'elle peut. C'est ainsi que nous voyons dans l'enfance, o il est abondant, cette multiplicit de mouvements, ce besoin irrsistible d'aller et de venir, de parler et de chanter. Plus tard, dans l'ge adulte, n'excite-t-il point tous les dsirs, en tourmentant la vie de l'tre qui ne veut point obir? ne produit-il pas, et souvent, un vritable somnambulisme? C'est lui encore qui dtermine la danse de Saint-Guy, l'pilepsie, l'hystrie, les convulsions, et toute une longue

COURS DE MAGNTISME srie d'autres dsordres o la science officielle s'embrouille plaisir. Dans un ge avanc, sa source se tarit; il se montre avec difficult : c'est alors un privilge de le possder; il faut pour cela n'avoir point msus de la vie. Puis un jour il nous dlaisse tout fait ; c'est la fin de la journe, le terme de notre labeur. Souvent encore, en s'enfuyant, il donne des preuves nouvelles de sa puissance : il remue le corps, l'agite en tous sens ; mais ce n'est plus alors la volont qui le meut et lui donne essor; il ne connat plus de frein; la volont humaine est sans puissance sur lui, les soupapes qui le retenaient sont brises; il est, semblable au feu souterrain qui remue parfois la terre. La chaleur baissant en laisse voir peine les effets; le froid est le signal de sa fuite. C'est lui qui donne la jeunesse une aurole, en se portant la face. Il illumine le continent, et c'est ainsi qu'il est facile l'observateur de reconnatre le vice ou la chastet; par l'une il se conservo, par l'autre il est dtruit. Puis, comme le flux et le reflux de la mer, il lve ou abaisse nos forces. Lorsque l'on comprime un des mille canaux o il circule, le membre s'engourdit; si l'on fait plus : une section du nerf, on donne lieu une paralysie instantane; la volont alors perd son empire dans la partie lse. Maintenant, que penser de cet agent? Est-ce un fluide? Pour moi, la question est rsolue affirmativement; moins que tous les autres fluides ne changent de nom, je lui conserve celui qu'il a reu sa naissance. Plus fluide que la lumire elle-mme, il passe au travers de tous les corps,, et nous pouvons ajouter qu'il lui faut cette subtilit pour l'usage auquel la nature l'a destin. L'me s'en revt, elle en forme son atmosphre, il donne et subit ses impressions, rien n'arrive l'me sans l'affecter, les instruments o il n'est plus deviennent inutiles .* foyer son

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45 EXISTENCE DU MAGNTISME est le cerveau; lorsqu'il y est abondant, le yeux brillent d'un vif clat, et je ne m'tonne plus si les anciens peignaient les dieux et les hros autrement que les autres hommes, et les reprsentaient entours de rayons lumineux. Mais c'est trop s'lever, il nous faut redescendre. Ne senton pas quand il s'coule? Il ne faut pour cela que faire quelques expriences ; les malades savent parfaitement la main qui en fournit davantage, ils vous en avertissent. Une digestion laborieuse ne diminue-t-elle point lu facult de magntiser? La crainte, en agissant sur les instruments de transmission, empche sa sortie, et c'est pour cela que tous les magntiseurs irrsolus ont manqu leurs expriences devant les autorits de la science. Non, l'me n'est point dans les faits simples du magntisme, le sommeil mme s'opre sans son concours ; c'est le fluide qui monte au cerveau et le comprime doucement. L'opium, le chloroforme, etc., agissent diffremment; aussi ne produisent-ils point le mme sommeil. L'me n'est point non plus dans les faits de gurison; ils sont dus des oprations de chimie et de physique transcendante. Nous cherchons vous le dmontrer ! L'me humaine n'est point encore dans les instincts surprenants des dormeurs; car ils sont du domaine de l'animalit. Lui attribuer toutes nos erreurs, toutes ces prophties dmenties, c'est dtruire ses attributions d'essence immortelle. Le sommeil lucide est plein de dceptions, il nous trompe et nous aveugle sans raison, parce que nous ne savons voir les choses avec philosophie et distinguer le vrai du faux. Les sens ont plus servi l'tude du magntisme que toutes les rvlations; et, si quelques magntistes donnent des preuves de folio, ce n'est certes pas l'me de leurs extatiques qui les tromprent, mais les crations toutes fantastiques de leur imagination. Le magntisme perce lo voile qui entoure l'me, il sort alors quelques clairs

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COURS DE MAGNTISME qui blouissent; ces secousses branlent le sens moral, mais presque tout ce qui vient de lumire passe au travers de la couche de prjugs et d'ignorance*, on nous rend en paroles ce qui n'a point de langage pour se traduire; de l les fausses notions et ces enluminures que l'on retrouve dans tous les crits, Est-ce donc ainsi que la science peut se crer et s'tablir? Quoi ! on voit chaque jour des faits physiques, rsultats certains d'un agent, d'une force; les mouvements produits sont identiques avec ceux dtermins par d'autres agents, aussi physiques, et cela ne suffit point pour admettre la cause relle de leur production ! Il faut recourir l'me. Les sorciers admettaient le dmon. Je n'ose pas dire s'ils furent plus raisonnables; moi-mme, plus d'une fois, plein d'enthousiasme la vue de mes oeuvres, j'ai cru l'int