tout savoir sur le permis de construire · toire par un document d’urba - nisme. le permis de...

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53 TERRITORIAL Zepros 1 | Novembre 2017 JURIDIQUE | PRATIQUE n Quels projets de construction sont soumis à un permis de construire? Toute construction nouvelle doit être précédée de la délivrance d’un permis de construire, à l’exception de celles qui en sont dispensées et de celles qui sont soumises à simple déclaration préalable (art. R. 421-1, C. urb.). En synthèse, est soumise à permis de construire toute construction nouvelle d’une surface de plancher de plus de 20 m², d’une emprise au sol supérieure à 20 m² et d’une hauteur de plus de 12 m. Les tra- vaux sur construction existante sont également soumis à permis de construire selon les mêmes seuils: création d’une surface de plancher supérieure à 20 m², emprise au sol supérieure à 20 m² et hauteur supérieure à 12 m (art. R. 421-14 et suiv., C. urb). Enfin, dans les zones urbaines couvertes par un plan local d’urbanisme, tous les travaux sur constructions exis- tantes ayant pour effet la création d’une surface de plancher ou d’une emprise au sol supérieures à 40 m² sont soumis à permis de construire. n Qui peut présenter une demande de permis de construire? Le permis de constuire doit être sollicité par le ou les propriétaires du terrain, son mandataire ou par une personne attestant être autorisée par ces personnes pour exécuter les travaux (art. R. 423-1 C. urb.). Le pétitionnaire n’a pas besoin de démontrer qu’il détient un titre l’habilitant à construire. Il doit simplement attester qu’il remplit les exigences posées par l’article R.423-1 du Code de l’urba- nisme pour déposer sa demande. Le service instructeur n’a pas à vérifier la validité de cette attesta- tion, sauf cas de fraude avérée. n Qui délivre le permis de construire? L’arrêté de permis de construire peut être pris par le maire au nom de la commune dans les com- munes dotées d’un plan local d’urbanisme, ainsi que dans les communes dotées d’une carte communale élaborée après la loi « Alur » du 24 mars 2014. Il peut être également pris par le maire au nom de l’État dans les opéra- tions situées à l’intérieur du péri- mètre d’urbanisation d’une agglo- mération nouvelle ou encore en l’absence de couverture du terri- toire par un document d’urba- nisme. Le permis de construire est également délivré par le préfet au nom de l’État dans d’autres cas, exposés à l’article R. 422-2 du Code de l’urbanisme (exemples: construction de logements dans une commune ayant peu de loge- ments sociaux, d’ouvrages de pro- duction, de transport, de distribu- tion et de stockage d’énergie, etc.). n Quel est le délai entre l’envoi du dossier de demande et la délivrance du permis de construire? Le délai d’instruction d’une demande de permis de construire court à compter de la réception en mairie d’un dossier complet (art. R. 423-19 C. urb.). Une exception existe lorsque le permis ne peut être délivré qu’après enquête publique, le délai courant alors à compter de la réception, par l’autorité compétente, du rapport du commissaire enquêteur (art. R. 423-20 C. urb.). Il existe ensuite trois types de délai. Le délai d’ins- truction de droit commun est de deux mois lorsque la demande porte sur une maison individuelle et de trois mois pour les autres types de construction (art. R. 423- 23 C. urb.). Le délai de droit commun est majoré dans certains cas (art. R.423-24 et suiv. C. urb.). Le délai majoré peut encore être prolongé exceptionnellement dans certains cas (art R. 423-34 et suiv. C. urb.). n De quelles pièces doit être composé le dossier de demande de permis de construire? La composition du dossier de demande de PC est précisément décrite (art. R. 431-4 et suiv. C. urb.). Certaines pièces doivent obligatoi- rement figurer dans ce dossier : le formulaire Cerfa dûment rempli (formulaire n° 13406 si c’est une maison individuelle ou n° 13409 dans les autres cas), précisant l’identité du demandeur, la nature des travaux, la surface de plancher projetée, etc. Une notice archi- tecturale présentant le projet de construction, des documents gra- phiques, des plans et des photo- graphies d’insertion sont égale- ment exigés (art. R. 431-7 à R. 431-11. C. urb.). En revanche, d’autres pièces ne seront deman- dées que dans certaines hypo- thèses particulières liées à la nature du projet ou à sa situation. À titre d’exemple, lorsque le projet porte sur une dépendance du domaine public, le dossier doit comprendre l’accord du gestion- naire du domaine pour engager la procédure d’autorisation d’occu- pation dudit domaine (C. urb., art. R. 431-13). n Combien de temps est valable le permis de construire? Le pétitionnaire doit mettre en œuvre son projet de construction dans un délai de trois ans à comp- ter de la notification de l’arrêté de PC (art. R. 424-17. C. urb.). Ce délai peut ensuite être prorogé d’un an, renouvelable une fois (art. R. 424-21 C. urb.). n Quels sont les événements affectant le permis de construire nécessitant une démarche adminis trative? Si le pétitionnaire, une fois son permis de construire obtenu, s’aperçoit que des ajustements doivent être réalisés, il devra alors solliciter la délivrance d’un permis de construire modificatif qui portera seulement sur les modifi- cations apportées au permis de construire initial (formulaire Cerfa n° 13411). Le pétitionnaire a égale- ment la possibilité de transférer le bénéfice du permis de construire qui lui a été délivré à une tierce per- sonne, à condition que ce permis soit encore valide. La pratique du transfert résulte d’une simple démarche administrative (formu- laire Cerfa n° 13412). n Comment contester un permis de construire? Le permis de construire ne peut être contesté que devant une juri- diction administrative (à savoir le tribunal administratif territoria- lement compétent en première instance). Toute personne ou organisme n’est pas recevable à saisir le juge : elle doit disposer d’une qualité lui donnant intérêt pour agir. Une association ne peut agir contre un permis de construire que si le dépôt de ses statuts en préfecture est intervenu antérieu- rement à l’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire (C. urb., art. L. 600-1-1). Pour toute autre personne privée, la recevabi- lité de sa requête est désormais conditionnée par la démonstration de ce que «la construction, l’amé- nagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utili- sation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe réguliè- rement ou pour lequel elle béné- ficie d’une promesse de vente, de bail ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L.261-15 du Code de la construction et de l’habitation». Le délai de recours à l’encontre d’un permis de construire court, à l’égard des tiers, à compter du premier jour d’une période conti- nue de deux mois d’affichage continu sur le terrain des pièces mentionnées à l’article R. 424-15 du Code de l’urbanisme. Il est donc recommandé, pour que le délai puisse courir, que le pétitionnaire fasse constater l’affichage de son permis par deux constats d’huissier dressés à deux mois d’intervalle. Outre le recours per- mettant d’obtenir l’annulation du permis de construire, ce dernier peut également voir, à bref délai, ses effets suspendus par le juge des référés du tribunal adminis- tratif compétent, lorsqu’un doute sérieux sur la légalité de l’autorisa- tion est relevé par ce dernier, l’urgence étant en principe présu- mée au vu du «caractère difficile- ment réversible» de la construction autorisée. Enfin, en cas de recours «excédant la défense des intérêts légitimes du requérant», ce dernier peut être condamné au paiement de dommages-intérêts si le pétition- naire démontre qu’il a subi un préjudice du fait de ce recours (art. L. 600-7 C. urb.). Cette demande doit être présentée par un mémoire distinct et pourra l’être pour la pre- mière fois en appel. Le but de cette mesure est de lutter contre les recours abusifs, notamment lorsqu’un voisin du projet de construction fait obstacle au projet de construction par l’introduction de nombreux recours qui ne sont pas sérieux. Les arrêtés de refus L’autorité compétente peut rendre un arrêté de refus de permis s’il estime, par exemple, que le dossier de demande ne répond pas aux exigences du Code de l’urbanisme ou si le pro- jet de construction viole le règlement du plan local d’urbanisme. Le deman- deur peut alors saisir le juge administratif en vue d’obtenir l’annulation de l’arrêté de refus de permis, notamment si la motiva- tion du refus n’est pas satisfaisante. TOUT SAVOIR SUR LE PERMIS DE CONSTRUIRE Par Martin Mattiussi-Poux, avocat au Cabinet Seban & Associés

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53TERRITORIAL

Zepros 1 | Novembre 2017 JURIDIQUE | PRATIQUE

n Quels projets de construction sontsoumis à un permis de construire?

Toute construction nouvelle doitêtre précédée de la délivrance d’unpermis de construire, à l’exceptionde celles qui en sont dispensées et de celles qui sont soumises à simple déclaration préalable (art. R. 421-1, C. urb.). En synthèse,est soumise à permis de construiretoute construction nouvelle d’une surface de plancher de plus de 20m², d’une emprise ausol supérieure à 20 m² et d’unehauteur de plus de 12 m. Les tra-vaux sur construction existantesont également soumis à permisde construire selon les mêmesseuils: création d’une surface deplancher supérieure à 20 m², emprise au sol supérieure à 20m²et hauteur supérieure à 12m (art.R. 421-14 et suiv., C. urb). Enfin,dans les zones urbaines couvertespar un plan local d’urbanisme, tousles travaux sur constructions exis-tantes ayant pour effet la créationd’une surface de plancher ou d’une emprise au sol supérieuresà 40 m² sont soumis à permis de construire.

n Qui peut présenter une demande de permis de construire?

Le permis de constuire doit êtresollicité par le ou les propriétairesdu terrain, son mandataire ou par une personne attestant êtreautorisée par ces personnes pour exécuter les travaux (art. R. 423-1 C. urb.). Le pétitionnaire n’a pas besoin de démontrer qu’il détientun titre l’habilitant à construire. Il doit simplement attester qu’ilremplit les exigences posées parl’article R.423-1 du Code de l’urba-nisme pour déposer sa demande.Le service instructeur n’a pas à vérifier la validité de cette attesta-tion, sauf cas de fraude avérée.

n Qui délivre le permis de construire?

L’arrêté de permis de construirepeut être pris par le maire au nomde la commune dans les com-munes dotées d’un plan local d’urbanisme, ainsi que dans lescommunes dotées d’une cartecommunale élaborée après la loi« Alur » du 24mars 2014. Il peutêtre également pris par le maire au nom de l’État dans les opéra-tions situées à l’intérieur du péri-mètre d’urbanisation d’une agglo-mération nouvelle ou encore enl’absence de couverture du terri-toire par un document d’urba-nisme. Le permis de construire estégalement délivré par le préfet aunom de l’État dans d’autres cas,exposés à l’article R. 422-2 du Code de l’urbanisme (exemples:construction de logements dansune commune ayant peu de loge-ments sociaux, d’ouvrages de pro-duction, de transport, de distribu-tion et de stockage d’énergie, etc.).

n Quel est le délai entrel’envoi du dossier de demande et ladélivrance du permisde construire?

Le délai d’instruction d’une demande de permis de construirecourt à compter de la réception en mairie d’un dossier complet (art.R. 423-19 C. urb.). Une exceptionexiste lorsque le permis ne peutêtre délivré qu’après enquête publique, le délai courant alors à compter de la réception, par l’autorité compétente, du rapportdu commissaire enquêteur (art.R.423-20 C. urb.). Il existe ensuitetrois types de délai. Le délai d’ins-truction de droit commun est de deux mois lorsque la demandeporte sur une maison individuelleet de trois mois pour les autrestypes de construction (art. R.423-23 C. urb.). Le délai de droit commun est majoré dans certainscas (art. R.423-24 et suiv. C.urb.).Le délai majoré peut encore êtreprolongé exceptionnellement dans certains cas (art R. 423-34et suiv. C. urb.).

n De quelles pièces doitêtre composé le dossierde demande de permisde construire?

La composition du dossier de demande de PC est précisémentdécrite (art. R.431-4 et suiv. C. urb.).Certaines pièces doivent obligatoi-rement figurer dans ce dossier : le formulaire Cerfa dûment rempli(formulaire n° 13406 si c’est unemaison individuelle ou n° 13409dans les autres cas), précisantl’identité du demandeur, la naturedes travaux, la surface de plancherprojetée, etc. Une notice archi-tecturale présentant le projet deconstruction, des documents gra-phiques, des plans et des photo-graphies d’insertion sont égale-ment exigés (art. R. 431-7 à R. 431-11. C. urb.). En revanche,d’autres pièces ne seront deman-dées que dans certaines hypo-thèses particulières liées à la nature du projet ou à sa situation. À titre d’exemple, lorsque le projetporte sur une dépendance du domaine public, le dossier doitcomprendre l’accord du gestion-naire du domaine pour engager laprocédure d’autorisation d’occu-pation dudit domaine (C. urb., art.R. 431-13).

n Combien de temps est valable le permis de construire?

Le pétitionnaire doit mettre en œuvre son projet de constructiondans un délai de trois ans à comp-ter de la notification de l’arrêté de PC (art. R. 424-17. C. urb.). Ce délai peut ensuite être prorogéd’un an, renouvelable une fois (art. R. 424-21 C. urb.).

n Quels sont les événementsaffectant le permis deconstruire nécessitantune démarche adminis-trative?

Si le pétitionnaire, une fois son permis de construire obtenu,s’aperçoit que des ajustements doivent être réalisés, il devra alors

solliciter la délivrance d’un permisde construire modificatif qui portera seulement sur les modifi-cations apportées au permis deconstruire initial (formulaire Cerfan° 13411). Le pétitionnaire a égale-ment la possibilité de transférer le bénéfice du permis de construirequi lui a été délivré à une tierce per-sonne, à condition que ce permissoit encore valide. La pratique dutransfert résulte d’une simple démarche administrative (formu-laire Cerfa n° 13412).

n Comment contester unpermis de construire?

Le permis de construire ne peutêtre contesté que devant une juri-diction administrative (à savoir le tribunal administratif territoria-lement compétent en première instance). Toute personne ou organisme n’est pas recevable àsaisir le juge : elle doit disposerd’une qualité lui donnant intérêtpour agir. Une association ne peutagir contre un permis de construireque si le dépôt de ses statuts enpréfecture est intervenu antérieu-rement à l’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire (C. urb., art. L.600-1-1). Pour touteautre personne privée, la recevabi-lité de sa requête est désormaisconditionnée par la démonstrationde ce que «la construction, l’amé-nagement ou les travaux sont denature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utili-sation ou de jouissance du bienqu’elle détient ou occupe réguliè-rement ou pour lequel elle béné-ficie d’une promesse de vente, de bail ou d’un contrat préliminairementionné à l’article L.261-15 du Code de la construction et de l’habitation».Le délai de recours à l’encontre d’un permis de construire court, à l’égard des tiers, à compter dupremier jour d’une période conti-nue de deux mois d’affichagecontinu sur le terrain des piècesmentionnées à l’article R. 424-15du Code de l’urbanisme. Il est donc

recommandé, pour que le délaipuisse courir, que le pétitionnairefasse constater l’affichage de son permis par deux constatsd’huissier dressés à deux moisd’intervalle. Outre le recours per-mettant d’obtenir l’annulation dupermis de construire, ce dernierpeut également voir, à bref délai,ses effets suspendus par le jugedes référés du tribunal adminis-tratif compétent, lorsqu’un doutesérieux sur la légalité de l’autorisa-tion est relevé par ce dernier, l’urgence étant en principe présu-mée au vu du «caractère difficile-ment réversible»de la constructionautorisée.Enfin, en cas de recours «excédantla défense des intérêts légitimes du requérant», ce dernier peut être condamné au paiement dedommages-intérêts si le pétition-naire démontre qu’il a subi un préjudice du fait de ce recours (art.L. 600-7 C. urb.). Cette demandedoit être présentée par un mémoiredistinct et pourra l’être pour la pre-mière fois en appel. Le but de cette mesure est de lutter contreles recours abusifs, notammentlorsqu’un voisin du projet deconstruction fait obstacle au projetde construction par l’introductionde nombreux recours qui ne sontpas sérieux. �

Les arrêtés de refusL’autorité compétente peutrendre un arrêté de refusde permis s’il estime, parexemple, que le dossier dedemande ne répond pasaux exigences du Code de l’urbanisme ou si le pro-jet de construction viole le règlement du plan local d’urbanisme. Le deman-deur peut alors saisir lejuge administratif en vued’obtenir l’annulation del’arrêté de refus de permis,notamment si la motiva-tion du refus n’est pas satisfaisante.

TOUT SAVOIR SUR LE PERMIS DE CONSTRUIREPar Martin Mattiussi-Poux, avocat au Cabinet Seban & Associés