topologie et analyse hilbertienne

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TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE DAVID DOS SANTOS FERREIRA – LICENCE 3 esum´ e. Ces notes de cours sont consacr´ ees d’une part ` a la topologie des espaces m´ etriques, et d’autre part ` a l’analyse des espaces hilbertiens. En ap- plication de l’analyse hilbertienne, nous verrons la convergence des s´ eries de Fourier en moyenne quadratique. Quelques r´ ef´ erences ponctuelles sont faites ` a la topologie g´ en´ erale mais le cadre global reste m´ etrique. Table des mati` eres Introduction 1 1. Espaces m´ etriques 2 2. Espaces complets, espaces compacts, espaces connexes 19 3. Quelques exemples d’espaces m´ etriques 47 4. Espaces de Hilbert 64 5. eries de Fourier 92 Annexe A. Espaces de Hilbert non s´ eparables 98 Introduction Un des objectifs de ce cours est de donner une d´ efinition de la convergence des suites et de la continuit´ e des fonctions, lorsque la nature des termes de la suite, ou les variables (et ´ eventuellement les images) de la fonction, n’est pas forc´ ement num´ erique ; les termes ou variables peuvent par exemple ˆ etre des vecteurs, des matrices, des fonctions, des ensembles, etc. Le domaine de l’Analyse se focalise particuli` erement sur l’´ etude des suites et des fonctions et de leurs propri´ et´ es as- soci´ ees (convergence, continuit´ e, d´ erivabilit´ e,...). On veut donc pouvoir expliquer ce que signifie converger vers une limite pour une suite d’´ el´ ements tr` es g´ en´ eraux. Pour cela, on garde `a l’esprit la d´ efinition de la convergence d’une suite de nombres : une suite num´ erique (x n ) nN converge vers x R si lorsque l’indice n croit, le terme de la suite x n s’approche de x. Plus formellement, cela signifie que pour tout ε> 0, il existe un rang N N au del`a duquel x n est proche de x ` a ε> 0 pr` es n N, n N ⇒|x n - x| < ε. De mani` ere imag´ ee, la convergence d’une suite (x n ) nN permet de dire que si l’on se fixe une marge d’erreur arbitraire ε> 0, un algorithme inductif de calculs de 1

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Page 1: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

DAVID DOS SANTOS FERREIRA – LICENCE 3

Resume. Ces notes de cours sont consacrees d’une part a la topologie desespaces metriques, et d’autre part a l’analyse des espaces hilbertiens. En ap-plication de l’analyse hilbertienne, nous verrons la convergence des series deFourier en moyenne quadratique. Quelques references ponctuelles sont faites ala topologie generale mais le cadre global reste metrique.

Table des matieres

Introduction 11. Espaces metriques 22. Espaces complets, espaces compacts, espaces connexes 193. Quelques exemples d’espaces metriques 474. Espaces de Hilbert 645. Series de Fourier 92Annexe A. Espaces de Hilbert non separables 98

Introduction

Un des objectifs de ce cours est de donner une definition de la convergence dessuites et de la continuite des fonctions, lorsque la nature des termes de la suite,ou les variables (et eventuellement les images) de la fonction, n’est pas forcementnumerique ; les termes ou variables peuvent par exemple etre des vecteurs, desmatrices, des fonctions, des ensembles, etc. Le domaine de l’Analyse se focaliseparticulierement sur l’etude des suites et des fonctions et de leurs proprietes as-sociees (convergence, continuite, derivabilite,...). On veut donc pouvoir expliquerce que signifie converger vers une limite pour une suite d’elements tres generaux.

Pour cela, on garde a l’esprit la definition de la convergence d’une suite denombres : une suite numerique (xn)n∈N converge vers x ∈ R si lorsque l’indicen croit, le terme de la suite xn s’approche de x. Plus formellement, cela signifieque pour tout ε > 0, il existe un rang N ∈ N au dela duquel xn est proche de xa ε > 0 pres

∀n ∈ N, n ≥ N ⇒ |xn − x| < ε.

De maniere imagee, la convergence d’une suite (xn)n∈N permet de dire que si l’onse fixe une marge d’erreur arbitraire ε > 0, un algorithme inductif de calculs de

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x assure qu’a partir d’un certain nombre d’iterations, l’approximation xn fourniepar l’algorithme approche x a une erreur de ε > 0 pres. On voit l’importance icide la notion de proximite entre les termes de la suite et leur possible limite. Notrepremiere tache sera donc de definir quelle est la notion de distance qui permetde mesurer la proximite entre elements d’un ensemble quelconque E. L’idee estd’etudier cette notion avec le minimum d’hypotheses de structure sur l’ensemble.

La deuxieme partie du cours adopte un autre point de vue, celui qui consistea imposer davantage de structures sur l’ensemble (structure vectorielle, structureeuclidienne et completude de l’espace) de maniere a le faire ressembler a notreespace euclidien habituel. Neanmoins, meme dans cette optique plus contraintepar les structures, pouvoir considerer la dimension infinie est une perspectiveinteressante ; la motivation provient de l’etude des espaces de fonctions (qui sontgeneralement de dimension infinie). Parmi les applications de l’analyse hilber-tienne figure l’etude de la convergence des series de Fourier dans l’espace desfonctions periodiques de carre integrable, exemple typique d’espace de Hilbert.

1. Espaces metriques

1.1. Distances et topologie. Motive par notre volonte de mieux cerner la no-tion de proximite dans un ensemble quelconque, commencons par definir la notionde distance.

Definition 1.1. Une distance (ou une metrique) sur un ensemble E est uneapplication d : E × E → R+ qui verifie les axiomes suivants

(i) pour tout x, y ∈ E on a d(x, y) = d(y, x),

(ii) pour tout x, y ∈ E, d(x, y) = 0 si et seulement si x = y,

(iii) pour tout x, y, z ∈ E, on a

d(x, y) ≤ d(x, z) + d(z, y).

Cette derniere est appelee inegalite triangulaire.

Si un ensemble E est muni d’une distance d, on dit que (E, d) est un espacemetrique.

Remarque 1.2. L’inegalite triangulaire est equivalente a

|d(x, y)− d(y, z)| ≤ d(x, z)

pour tout x, y, z ∈ E.

Exemple 1.3.— Soit (E, ‖ · ‖) un espace vectoriel norme (cf. paragraphe 1.5) alors d(x, y) =‖x− y‖ definit une distance sur E.

— Soit E un ensemble quelconque non vide, alors

d(x, y) =

0 si x = y

1 si x 6= y

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est une distance sur E, appelee distance discrete.— Soit Sn−1 ⊆ Rn la sphere unite dans l’espace euclidien, alors

d(x, y) = arccos〈x, y〉 ∈ [0, π]

est une distance (appelee distance geodesique). Cf. le chapitre d’exemplesde distances.

La boule ouverte de centre x et de rayon r ≥ 0 est l’ensemble

B(x, r) =¶y ∈ E : d(x, y) < r

©et la boule fermee de centre x et de rayon r ≥ 0 est l’ensemble

B′(x, r) =¶y ∈ E : d(x, y) ≤ r

©.

1.2. Topologie. Notre interet se porte maintenant sur la description de certainescaracteristiques des sous-sensembles d’un espace metrique liees a la distance.

Definition 1.4. On dit qu’un point x ∈ A est interieur a A s’il existe ε > 0 telque B(x, ε) ⊆ A. L’interieur d’une partie A est l’ensemble des points interieurs

A =¶x ∈ A : ∃ε > 0/B(x, ε) ⊆ A

©⊆ A.

On dit qu’une partie U ⊆ E d’un espace metrique est ouverte si tout point de Uest interieur, autrement dit si

U = U.

Exemple 1.5. Une boule ouverte est ouverte. En effet, soit y ∈ B(x, r) alors yest interieur a B(x, r) car

B(y, r − d(x, y)) ⊆ B(x, r).

Remarque 1.6. Un ouvert est toujours la reunion de boules ouvertes : pour toutx ∈ U il existe r > 0 tel que B(x, r) ⊆ U et donc

U =⋃

(x,r)∈PB(x, r), P =

¶(x, r) ∈ U ×R∗+ : B(x, r) ⊆ U

©.

Definition 1.7. Un ensemble F ⊆ E d’un espace metrique E est ferme si soncomplementaire est ouvert.

Exemple 1.8. Une boule fermee est fermee. En effet,

E \B′(x, r) =¶y ∈ E : d(x, y) > r

©est ouvert car y /∈ B′(x, r) est interieur a E \B′(x, r) puisque

B(y, r − d(x, y)) ⊆ E \B′(x, r).

Proposition 1.9.— Une reunion quelconque d’ouverts est ouverte.— Une intersection finie d’ouverts est ouverte.— Une intersection quelconque de fermes est fermee.

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— Une reunion finie de fermes est fermee.

Demonstration. Soient (Uh)h∈H une famille d’ouverts de (E, d), montrons que

U =⋃h∈H

Uh

est ouvert : soit x ∈ U , il existe h ∈ H tel que x ∈ Uh. Comme Uh est ouvert, ilexiste r > 0 tel que B(x, r) ⊆ Uh ⊆ U . Donc x est interieur a U et U est ouvert.

Soient (Uj)1≤j≤n une famille finie d’ouverts de (E, d), montrons que

U =n⋂j=1

Uj

est ouvert : pour tout 1 ≤ j ≤ n, comme Uj est ouvert, il existe rj > 0 tel queB(x, rj) ⊆ Uj. On choisit alors

r = min(r1, . . . , rn) > 0

pour lequel on a B(x, r) ⊆ B(x, rj) pour tout j et donc B(x, r) ⊆ U , ce quisignifie que x est interieur a U . U est donc ouvert. Les deux assertions sur lesfermes s’obtiennent par passage au complementaire.

Remarque 1.10. On appelle espace topologique tout couple (E, T ) constituepar un ensemble E et une famille T ⊆ P(E) de sous ensembles de E tels que :

(i) ∅ ∈ T , E ∈ T ,

(ii) toute reunion d’elements de T est dans T ,

(iii) toute intersection finie d’elements de T est dans T .

D’apres la proposition precedente, si (E, d) est un espace metrique, le coupleconstitue par l’ensemble E et l’ensemble des ouverts de E pour la distance d estun espace topologique. Il existe des espaces topologiques qui ne sont pas issusd’une distance, les elements de T sont tout de meme appeles les ouverts, et leuretude est l’objet de la topologie generale.

Definition 1.11. On dit qu’un point x ∈ E est adherent a A si pour tout ε > 0la boule B(x, ε) rencontre A

B(x, ε) ∩ A 6= ∅.L’adherence d’un ensemble A est l’ensemble des points adherents a A

A =¶x ∈ E : ∀ε > 0, B(x, ε) ∩ A 6= ∅

©⊇ A.

Proposition 1.12.— L’interieur d’une partie est ouverte. C’est le plus grand ouvert contenu dans

cette partie.— L’adherence d’une partie est fermee. C’est le plus petit ferme contenant

cette partie.— Une partie A est fermee si et seulement si elle est egale a son adherence.

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Demonstration.— Soit x ∈ A, il s’agit de montrer que x est interieur a A. Comme x est

interieur a A, il existe r > 0 tel que B(x, r) ⊆ A. Montrons que B(x, r) ⊆ A :soit y ∈ B(x, r), comme B(y, r − d(x, y)) ⊆ B(x, r) ⊆ A, y est interieur aA. Montrons maintenant que

U =⋃

V ouvert ⊆UV.

Si x est interieur a U , il existe r > 0 tel que B(x, r) ⊆ U et comme la bouleB(x, r) est ouverte x ∈ ⋃

V ouvert ⊆U V . Inversement si x ∈ ⋃V ouvert ⊆U V

alors il existe un ouvert V tel que x ∈ V ⊆ U . Comme V est ouvert, ilexiste r > 0 tel que B(x, r) ⊆ V ⊆ U donc x est interieur a U .

— Il faut montrer que le complementaire de l’adherence de A

E \ A =¶x ∈ E : ∃ε > 0, B(x, ε) ∩ A = ∅

©est ouvert : si x n’est pas dans l’adherence de A alors il existe ε > 0 telque B(x, ε) ⊂ E \ A et alors B(x, ε) ⊆ E \ A car si y ∈ B(x, ε) alorsB(y, ε− d(x, y)) ⊆ B(x, ε) ⊆ E \ A et y n’est pas adherent a A. Montronsque

A =⋂

F ferme ⊇AF.

L’adherence de A est un ferme contenant A donc il contient l’intersectiona droite, et il reste a montrer que si x est adherent a A et que si F est unferme contenant A alors x ∈ F . Supposons que cela ne soit pas le cas, alorsil existe ε > 0 tel que B(x, ε) ⊆ E \ F\ ⊆ E \A et x ne peut etre adherenta A, ce qui est en contradiction avec les hypotheses.

— Si A est ferme alors comme l’adherence est le plus petit ferme contenant Aon a A = A. La reciproque est claire puisque l’adherence est fermee.

Proposition 1.13. Le passage au complementaire echange interieur et adherence :pour toute partie A ⊆ E

E \ A = E \ A, E \ A =˚ E \ A.

Demonstration. Le complementaire de l’interieur de A est un ferme contenantE \ A donc

E \ A ⊇ E \ Aet le complementaire de E \ A est un ouvert contenu dans A donc

E \ÄE \ A

ä⊆ A

ce qui signifie

E \ A ⊆ E \ A.

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Pour obtenir la deuxieme egalite, on applique la premiere en remplacant A parson complementaire

E \ ˚ E \ A = A

et un passage au complementaire permet de conclure.

Proposition 1.14.— Si A ⊆ B alors A ⊆ B,

—˚ A ∩B = A ∩ B,

— A ∪ B ⊆ ˚ A ∪B,— Si A ⊆ B alors A ⊂ B,— A ∪B = A ∪ B,— A ∩B ⊆ A ∩ B.

Demonstration. Les trois dernieres assertions s’obtiennent a partir des trois premi-eres par passage aux complementaires en utilisant l’echange des interieurs et desadherences donne par la proposition 1.13.

— Si A ⊆ B alors A est un ouvert contenu dans B et comme B est le plusgrand ouvert contenu dans B, on a A ⊆ B.

— Comme A∩B est un ouvert contenu dans A∩B, et comme˚ A∩B est le plus

grand ouvert contenu dans A∩B, on a A∩B ⊆ ˚ A∩B. Inversement, comme˚ A ∩ B est un ouvert contenu dans A ∩ B, donc dans A, on a

˚ A ∩ B ⊆ A.

Par symetrie, on a egalement˚ A ∩B ⊆ B.

— Comme˚ A ∪B est un ouvert contenu dans A ∪B, on a A ∪ B ⊆ ˚ A ∪B.

Definition 1.15. La frontiere d’un ensemble A, notee ∂A, est l’ensemble

∂A = A \ A

des points x ∈ E pour lesquels toute boule B(x, ε) de rayon ε > 0 rencontre A etson complementaire

B(x, ε) ∩ A 6= ∅ et B(x, ε) ∩ (E \ A) 6= ∅.

Exemple 1.16.

1. Q = ∅, Q = R,

2. ]0, 1] = [0, 1],

3. Attention la frontiere de la boule n’est pas forcement la sphere ! Pour la dis-tance discrete B(x, 1) = x est ouverte et fermee donc

∂B(x, 1) = ∅.

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On termine en definissant la distance d’un element x ∈ E a un ensemble nonvide A ⊆ E notee abusivement d(x,A)

d(x,A) = infa∈A

d(x, a)

et le diametre d’un ensemble A (eventuellement ∞)

diamA = sup(x,y)∈A×A

d(x, y).

L’ensemble est dit borne si le diametre est fini.

1.3. Convergence des suites.

Definition 1.17. On dit qu’une suite (xn)n∈N de E converge vers ` ∈ E (ou a `pour limite) si

∀ε > 0 ∃N ∈ N tel que ∀n ∈ N, n ≥ N d(xn, `) < ε.

On dit que la suite converge si elle a une limite `.

Remarque 1.18. Dire que la suite (xn)n∈N converge vers ` ∈ E equivaut a direque

lim d(xn, `) = 0.

Lemme 1.19. La limite d’une suite convergente est unique.

On peut donc parler de la limite d’une suite et adopter la notation ` = limxnsans ambiguıte.

Demonstration. Si une suite (xn)n∈N de E converge vers ` ∈ E et `′ ∈ E alorspour tout ε > 0, il existe N ∈ N et N ′ ∈ N tels que

∀n ∈ N, n ≥ N ⇒ d(xn, `) <ε

2et d(xn, `

′) <ε

2.

On choisit alors n = max(N,N ′) et on a par l’inegalite triangulaire

d(`, `′) ≤ d(xn, `) + d(xn, `′) <

ε

2+ε

2= ε.

Ce qui implique d(`, `′) = 0 et donc ` = `′.

Definition 1.20. Une suite est dite extraite d’une suite (xn)n∈N de E si elle estde la forme

Äxϕ(n)

än∈N ou ϕ : N → N est une fonction strictement croissante

(c’est a dire une injection). On parle aussi de sous-suite. On dit que la suite(xn)n∈N admet une valeur d’adherence s’il y a une suite extraite (xϕ(n))n∈N quiconverge. La limite de cette sous-suite est alors appelee valeur d’adherence.

Exemple 1.21. (x2n)n∈N et (x2n+1)n∈N sont des suites extraites de (xn)n∈N.

Lemme 1.22. Soit ϕ : N→ N une fonction strictement croissante alors ϕ(n) ≥n pour tout entier n.

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Demonstration. On procede par recurrence. Supposons que ϕ(n) ≥ n alors ϕ(n+1) > ϕ(n) et comme ϕ prend des valeurs entieres ϕ(n+1) ≥ ϕ(n)+1 ≥ n+1.

Lemme 1.23. Une suite convergente admet une et une seule valeur d’adherence.

Demonstration. Supposons que la suite (xn)n∈N converge vers ` alors toute sous-suite (xϕ(n))n∈N converge vers ` et le lemme decoule de l’unicite de la limite. Ceciest du au fait que

∀ε > 0 ∃Nε ∈ N tel que ∀n ∈ N, n ≥ Nε d(xn, `) < ε,

et que ϕ(n) ≥ n impliquent

∀ε > 0 ∃Nε ∈ N tel que ∀n ∈ N, n ≥ Nε d(xϕ(n), `) < ε.

Ceci prouve que dans le cas d’une suite convergente, il n’y a qu’une seule valeurd’adherence, la limite.

Ce resultat est souvent utilise comme un critere de divergence. Ainsi la suite((−1)n)n∈N ne converge-t-elle pas car elle a deux valeurs d’adherence, 1 et −1.

Lemme 1.24. Dans un espace metrique (E, d), la suite (xn)n∈N admet x commevaleur d’adherence si et seulement si

lim inf d(xn, x) = 0.

Demonstration. La suite (xn)n∈N admet x comme valeur d’adherence si et seule-ment s’il existe une suite extraite (xϕ(n))n∈N telle que lim d(x, xϕ(n)) = 0 autre-ment dit si et seulement si 0 est valeur d’adherence de la suite (d(x, xn))n∈N.Comme la limite inferieure d’une suite a valeurs reelles positives est la plus pe-tite valeur d’adherence, et que les valeurs d’adherence d’une suite positive sontpositives, le resultat precedent suffit a montrer le lemme.

Definition 1.25. On dit qu’une suite (xn)n∈N de E est une suite de Cauchy si

∀ε > 0 ∃N ∈ N tel que ∀n,m ≥ N d(xn, xm) < ε.

Lemme 1.26. Une suite convergente est une suite de Cauchy.

Demonstration. Soit (xn)n∈N une suite convergeant vers `. Soit ε > 0, il existeN ∈ N tel que pour tout n ≥ N on a d(xn, `) < ε/2, et par consequent

d(xn, xm) ≤ d(xn, `) + d(xm, `) <ε

2+ε

2= ε.

Ainsi (xn)n∈N est une suite de Cauchy.

Remarque 1.27. La reciproque est fausse en toute generalite : si l’on munit Qde la distance habituelle, la suiteÑî

10n√

10n

én∈N

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est de Cauchy (car elle converge vers√

2 dans R) mais ne converge pas dans Q.Nous nous interesserons par la suite aux espaces (dits complets) ou la reciproqueest vraie.

Definition 1.28. Une suite (xn)n∈N est dite bornee si l’ensemble de ses valeurs¶xn : n ∈ N

est un ensemble borne de E, i.e. si

supn,m∈N

d(xn, xm) <∞.

Grace a l’inegalite triangulaire, une suite est bornee si et seulement s’il existey ∈ E et M > 0 tels que

∀n ∈ N d(xn, y) ≤M.

Lemme 1.29. Une suite de Cauchy est bornee.

Demonstration. Soit (xn)n∈N une suite de Cauchy. Il existe N ∈ N tel que pourtout n,m ≥ N

d(xn, xm) ≤ 1

ce qui implique

supn,m∈N

d(xn, xm) ≤ 1 + maxn,m≤N−1

d(xn, xm).

Ce qui prouve que la suite (xn)n∈N est bornee.

Lemme 1.30. Une suite de Cauchy qui admet une valeur d’adherence est conver-gente.

Demonstration. Soit (xn)n∈N une suite de Cauchy qui admet une valeur d’adherence` ∈ E. Il existe une sous-suite (xϕ(n))n∈N convergeant vers `. Soit ε > 0, il existeN ∈ N tel que pour tout entier n ≥ N

d(xϕ(n), `) <ε

2

et il existe M ∈ N tel que pour tous entiers n,m ≥ N

d(xm, xn) <ε

2.

Comme ϕ(n) ≥ n, on a pour tout entier n ≥ max(N,M)

d(xn, `) ≤ d(xn, xϕ(n)) + d(xϕ(n), `) <ε

2+ε

2= ε.

Ce qui signifie que la suite (xn)n∈N converge vers `.

On peut maintenant donner une caracterisation sequentielle de l’adherence.

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Lemme 1.31.

A =¶x ∈ E : x = limxn ou (xn)n∈N est une suite de A

©En particulier, un ensemble est ferme si et seulement si pour toute suite d’elementsde A qui converge, la limite reste dans A.

Demonstration. Si x est adherent a A pour tout n ∈ N, la boule B(x, 2−n)rencontre A et donc il existe xn ∈ A tel que d(xn, x) < 2−n. La suite (xn)n∈Nd’elements de A converge alors vers x. Reciproquement, soit x ∈ E la limited’une suite (xn)n∈N d’elements de A, alors pour tout ε > 0, il existe n ∈ N telque d(xn, x) < ε et donc B(x, ε)∩A 3 xn. Donc toute boule B(x, ε) rencontre Aet x est adherent a A.

Lemme 1.32. d(x,A) = 0 si et seulement si x ∈ A.

Demonstration. Supposons que d(x,A) = 0 alors il existe une suite (xn)n∈N deA telle que d(xn, x) < e−n. Sinon il existerait un entier n ∈ N tel que pour touta ∈ A on ait d(x, a) ≥ e−n et dans ce cas infa∈A d(x, a) ≥ e−n > 0. Ainsi x est lalimite d’une suite d’elements de A et donc est adherent a A. Reciproquement six ∈ A alors x = limxn avec xn ∈ A et donc en passant a la limite dans l’inegalited(x,A) ≤ d(xn, x), on obtient d(x,A) = 0.

Definition 1.33. On dit qu’un ensemble A d’un espace metrique (E, d) est densesi

A = E

i.e. pour tout x ∈ E il existe une suite (xn)n∈N d’elements de A tels que x =limxn, ou encore pour tout ε > 0 il existe a ∈ A tel que d(x, a) < ε.

1.4. Continuite. On veut maintenant generaliser egalement la notion de conti-nuite.

Definition 1.34. Soient (E, dE) et (F, dF ) deux espaces metriques, on dit qu’unefonction f : E → F est continue en x0 ∈ E si pour tout ε > 0, il existe δ > 0 telque pour tout x ∈ E

si dE(x, x0) < δ alors dF (f(x), f(x0)) < ε.

On dit que f est continue sur E si f est continue en tout point x0 ∈ E.La fonction f est uniformement continue si pour tout ε > 0 il existe δ > 0 tel

que pour tout x, x0 ∈ E

si dE(x, x0) < δ alors dF (f(x), f(x0)) < ε.

Enfin, une fonction f est lipschitzienne s’il existe K ≥ 0 tel que

∀x, y ∈ E, dF (f(x), f(y)) ≤ Kd(x, y).

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Une fonction uniformement continue est evidemment continue, et une fonctionlipschitzienne est evidemment uniformement continue. Remarquons que l’asser-tion definissant la continuite peut se reecrire de maniere ensembliste sous la formesuivante : pour tout ε > 0 il existe δ > 0 tel que

f−1(BF (f(x0), ε)) ⊇ BE(x0, δ),

i.e. x0 est interieur a f−1(BF (f(x0), ε))) pour tout ε > 0.

Remarque 1.35. La fonction distance a un point z ∈ Edz : E → R+

x 7→ dz(x) = d(x, z)

est lipschitzienne lorsque l’on munit R+ de la distance habituelle associee a lavaleur absolue

|d(x, z)− d(y, z)| ≤ d(x, y)

grace a l’inegalite triangulaire. En particulier, elle est continue.

Donnons une caracterisation plus globale de la continuite 1.

Theoreme 1.36. Une fonction f : E → F est continue si et seulement si l’imagereciproque de tout ouvert de F est un ouvert de E. Une fonction f : E → F estcontinue si et seulement si l’image reciproque de tout ferme de F est un fermede E.

Demonstration. Supposons que f soit continue. Soit V un ouvert de F , on veutmontrer que f−1(V ) est ouvert : soit x0 ∈ f−1(V ), alors f(x0) ∈ V et comme Vest ouvert il existe ε > 0 tel que BF (f(x0), ε) ⊆ V . De la continuite de f en x0

on deduit qu’il existe δ > 0 tel que

BE(x0, δ) ⊆ f−1(BF (f(x0), ε)) ⊆ f−1(V ).

Ainsi x0 est interieur a f−1(V ) et f−1(V ) est ouvert.Reciproquement, supposons que l’image reciproque de tout ouvert de F est un

ouvert de E. Soit x0 ∈ E et soit ε > 0, comme f−1(BF (f(x0), ε)) est l’imagereciproque d’un ouvert de F , donc un ouvert de E, il existe δ > 0 tel queBE(x0, δ) ⊆ f−1(BF (f(x0), ε)) et f est donc continue en x0.

La derniere assertion s’obtient par passage au complementaire puisque

E \ f−1(A) = f−1(E \ A)

et le theoreme est demontre.

Exemple 1.37. Cette caracterisation de la continuite permet de prouver facile-ment que certains ensembles (que l’on peut ecrire comme l’image reciproque d’unouvert de R par exemple par une fonction continue) sont ouverts, e.g.¶

x ∈ Rn : xn > 0©, GLn(R) =

¶A ∈ Mn(R) : detA 6= 0

©1. qui est en fait la definition de la continuite dans le cas des espaces topologiques generaux.

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ou fermes, e.g. ¶x ∈ Rn : xn = 0

©, kerA, A ∈ Mn(R).

Remarque 1.38. L’image directe d’un ouvert par une fonction continue n’est pasforcement un ouvert (penser a une fonction f : R→ R constante, par exemple).

Il peut parfois etre utile d’avoir une caracterisation sequentielle de la continuite.

Theoreme 1.39. Une fonction f : E → F est continue si et et seulement si pourtoute suite (xn)n∈N de E convergeant vers x ∈ E, la suite des images (f(xn))n∈Nconverge vers l’image de la limite f(x) ∈ F .

Demonstration. Supposons que f : E → F soit continue, et soit (xn)n∈N de Eune suite convergeant vers x ∈ E. Soit ε > 0, il existe δ > 0 tel que pour toutx ∈ E

si dE(x, x0) < δ alors dF (f(x), f(x0)) < ε.

Il existe N ∈ N tel que pour tout entier n ≥ N on ait dE(xn, x) < δ. On endeduit que pour tout entier n ≥ N on a dF (f(xn), f(x)) < ε.

Supposons que f : E → F verifie la caracterisation sequentielle et montronsque f est continue. Soit A un ferme de F , soit (xn)n∈N une suite de f−1(A)convergeant vers x ∈ E alors la suite des images (f(xn))n∈N de A converge versf(x), et comme A est ferme, f(x) ∈ A. Ainsi f−1(A) est ferme dans E pour toutferme A de F donc f est continue.

Exemple 1.40. La fonction distance a un point etant continue, si la suite (xn)n∈Nconverge vers x ∈ E alors pour tout y ∈ E

lim d(xn, y) = d(x, y).

Theoreme 1.41. La composee de deux fonctions continues est continue.

Demonstration. Soient f : E → F et g : F → G deux fonctions continues entreespaces metriques (E, dE), (F, dF ) et (G, dG). Soit V un ouvert de G alors

(g f)−1(V ) = f−1(g−1(V ))

est un ouvert de E car g−1(V ) est un ouvert de F par continuite de g.

Definition 1.42. Soient (E, dE) et (F, dF ) deux espaces metriques, une isometrieentre ces deux espaces metriques est une application I : E → F qui preserve lesdistances

dF (I(x), I(y)) = dE(x, y), x, y ∈ E.Remarquons que I est automatiquement continue (car lipschitzienne) et injective.On dit que E et F sont isometriques s’il existe une isometrie I : E → F bijective.

Exemple 1.43. Une rotation M ∈ On(R) est une isometrie sur Rn muni de ladistance euclidienne

‖Mx−My‖2 = ‖M(x− y)‖2 = ‖x− y‖2.

Page 13: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

13

Remarque 1.44. Du point de vue metrique, un espace isometrique a un autreest comme une copie ; toutes les proprietes topologiques (convergence de suite,continuite, ouverts, fermes, etc.) se transmettent de l’una l’autre.

1.5. Espaces vectoriels normes. Rappelons la definition d’une norme. Onconsiderera des espaces vectoriels dont le corps des scalaire K est soit le corpsdes reels R soit le corps des complexes C.

Definition 1.45. Une norme sur un espace vectoriel (E,+, .) (dont le corps desscalaire K est R ou C) est une application N : E → R+ verifiant les axiomessuivants

(i) pour tout λ ∈ K et tout x ∈ E on a N(λx) = |λ|N(x),

(ii) pour tout x ∈ E, N(x) = 0⇔ x = 0,

(iii) pour tout x, y ∈ E, N(x+ y) ≤ N(x) +N(y) (inegalite triangulaire).

Traditionnellement, on utilise ‖x‖ pour designer la norme de x ∈ E. Un espacevectoriel norme est la donnee d’un couple (E, ‖ · ‖) forme d’un espace vectorielE et d’une norme ‖ · ‖.Exemple 1.46.

1. `p =¶u = (un)n∈N ∈ CN :

∑∞n=0 |un|p <∞

©muni de la norme

‖u‖p =

( ∞∑n=0

|un|p) 1p

.

2. `∞ =¶u = (un)n∈N ∈ CN : sup |un| <∞

©muni de la norme

‖u‖∞ = sup |un|.

3. Lp(Rn) ensemble des (classes d’equivalence de) fonctions mesurables f tellesque ∫

Rn|f |p dx <∞

muni de la norme

‖f‖Lp =Å∫

Rn|f |p dx

ã 1p

.

Si (E, ‖ · ‖) est un espace vectoriel norme, il est clair que

d(x, y) = ‖x− y‖definit une distance sur E. La norme est une application 1-lipschitzienne parl’inegalite triangulaire ∣∣∣‖x‖ − ‖y‖∣∣∣ ≤ ‖x− y‖ = d(x, y).

En particulier, elle est continue et on peut passer a la limite dans les normes

lim ‖xn‖ = ‖ limxn‖lorsque (xn)n∈N est une suite convergente (cf Theoreme 1.39).

Page 14: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

14

Lemme 1.47. Dans un espace vectoriel norme, l’adherence d’une boule ouverteest la boule fermee de meme centre et de meme rayon.

Ce n’est pas forcement vrai dans le cas d’un espace metrique quelconque (cf.TD).

Demonstration. La boule fermee B′(x, r) est un ferme contenant la boule ouverteB(x, r) donc

B(x, r) ⊆ B′(x, r).

Si y ∈ B′(x, r) alors la suite (yn)n∈N donnee par

yn = x+n

n+ 1(y − x)

est dans la boule ouverte B(x, r) et converge vers y.

L’etude de la continuite des applications lineaires dans un espace vectorielnorme est facilitee par le fait que si elles sont continues alors elles sont forcementlipschitziennes.

Theoreme 1.48. Soit ϕ : (E1, ‖ · ‖1)→ (E2, ‖ · ‖2) une application lineaire entredeux espaces vectoriels normes. Les assertions suivantes sont equivalentes

1. ϕ est continue,

2. ϕ est continue en 0,

3. ϕ est bornee sur la boule unite fermee de E1,

4. ϕ est bornee sur la sphere unitee de E1,

5. il existe k > 0 tel que ‖ϕ(x)‖2 ≤ k‖x‖1,

6. ϕ est lipschitzienne,

7. ϕ est uniformement continue.

Demonstration. Montrons que les assertions impliquent les suivantes.

1⇒ 2 Par definition.

2⇒ 3 Comme ϕ est continue en 0, il existe δ > 0 tel que si ‖x‖1 < δ alors‖ϕ(x)‖2 = ‖ϕ(x) − ϕ(0)‖2 ≤ 1. Par suite, on a pour tout x ∈ E1 tel que‖x‖1 ≤ 1

‖ϕ(x)‖2 =2

δ

∥∥∥∥∥ϕÇδ

2x

å∥∥∥∥∥2

≤ 2

δ

car la norme de δx/2 est inferieure a δ/2 < δ.

3⇒ 4 C’est evident car SE1(0, 1) ⊂ BE1(0, 1).

4⇒ 5 On note k = supθ∈SE1(0,1) ‖ϕ(θ)‖2,∥∥∥∥∥ϕ

Çx

‖x‖1

å∥∥∥∥∥2

≤ k car x/‖x‖1 ∈ SE1(0, 1),

implique ‖ϕ(x)‖2 ≤ k‖x‖1 car ϕ est lineaire.

Page 15: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

15

5⇒ 6 On a ‖ϕ(x)−ϕ(y)‖2 = ‖ϕ(x−y)‖2 par linearite et on applique l’inegalitede l’assertion precedente.

6⇒ 7 C’est evident.

7⇒ 1 C’est evident.

Ainsi on a demontre l’equivalence des assertions.

Remarque 1.49. Pour une application continue, on parle (abusivement) d’ap-plications bornees car elles sont bornees sur la boule unite fermee (ou la sphere).

Exemple 1.50. Si E1 est un espace vectoriel de dimension finie 2, toutes lesapplications lineaires sont continues. En effet si l’on choisit une base (e1, . . . , ed)de E1, par equivalence des normes sur un espace vectoriel de dimension finie(cf. section sur les compacts) on peut utiliser la norme ‖x‖1 =

∑dj=1 |xj| pour

x =∑dj=1 xjej, et on a

‖ϕ(x)‖2 ≤d∑j=1

‖ϕ(ej)‖2|xj| ≤ sup1≤j≤d

‖ϕ(ej)‖2 ‖x‖1.

Exemple 1.51. En revanche, en dimension infinie, il existe des applicationslineaires non continues. Meme l’identite peut ne pas etre continue ! En effet, si

Id : (`1, ‖ · ‖∞)→ (`1, ‖ · ‖1)

etait continue, il existerait une constante C > 0 telle que l’inegalite∞∑n=0

|un| ≤ C supn∈N|un|

soit vraie pour toute suite (un)n∈N de `1. Ceci est absurde car en choisissant lasuite (1, . . . , 1︸ ︷︷ ︸

m termes

, 0, 0, . . . ) avec m = [C] + 1, on obtiendrait m ≤ C.

Definition 1.52. L’ensemble des applications lineaires continues est un K-espacevectoriel (sous-espace de C0(E1, E2)) que l’on note L(E1, E2) et que l’on peutmunir de la norme

‖ϕ‖L(E1,E2) = supx∈E1:‖x‖1=1

‖ϕ(x)‖2 = supx∈E1\0

‖ϕ(x)‖2

‖x‖1

.

On parle de norme subordonnee aux normes ‖ · ‖1 et ‖ · ‖2.

Exercice 1.53. Verifier que le supremum precedent definit bien une norme etque

‖ϕ ψ‖L(E1,E3) ≤ ‖ϕ‖L(E2,E3) × ‖ψ‖L(E1,E2).

En particulier, verifier que si ϕ ∈ L(E) = L(E,E) est un endomorphisme continusur un espace vectoriel norme E alors ‖ϕn‖L(E) ≤ ‖ϕ‖nL(E) ou ϕn = ϕ · · · ϕdesigne la composee n fois.

2. Dans ce cas, on peut aussi supposer E2 de dimension finie, quitte a le remplacer par ϕ(E1)qui est de dimension finie.

Page 16: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

16

Remarque 1.54. On utilise souvent des majuscules pour designer des applica-tions lineaires d’un espace vectoriel et la notation matricielle

Ax = A(x), AB = A B

meme lorsque l’on est en dimension infinie.

Proposition 1.55. Soit E un espace vectoriel norme, soit GL(E) ⊆ L(E)le groupe des applications lineaires continues bijectives dont la reciproque estegalement continue, alors l’application

GL(E)→ GL(E)

A 7→ A−1

est continue lorsque GL(E) est muni de la norme ‖ · ‖L(E) de L(E).

Demonstration. Soient A,B ∈ GL(E) on a

B−1 − A−1 = A−1(A−B)B−1

ce qui implique

‖B−1‖L(E) ≤ ‖A−1‖L(E) + ‖A−1‖L(E)‖A−B‖L(E)‖B−1‖L(E)

et donc lorsque

‖A−B‖L(E) ≤1

2‖A−1‖L(E)

on en tire

‖B−1‖L(E) ≤ ‖A−1‖L(E) +1

2‖B−1‖L(E)

soit en faisant passer le deuxieme terme de droite a gauche

‖B−1‖L(E) ≤ 2‖A−1‖L(E).

Ainsi pour tout B ∈ BL(E)(A, 1/(2‖A−1‖L(E))), on a grace a la premiere formule

‖B−1 − A−1‖L(E) ≤ 2‖A−1‖2L(E)‖B − A‖L(E).

Soit A ∈ GL(E) et soit ε > 0, en choisissant

δ = min

Ç1

2‖A−1‖L(E)

2‖A−1‖2L(E)

åon obtient que pour tout B ∈ BL(E)(A, δ)

‖B−1 − A−1‖L(E) < ε.

Ce qui signifie que A 7→ A−1 est continue en tout A ∈ GL(E).

Page 17: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

17

Proposition 1.56. Soit E un espace vectoriel norme, soit n ∈ N un entier,l’application

L(E)→ L(E)

A 7→ An

est continue lorsque L(E) est muni de la norme ‖ · ‖L(E).

Demonstration. Supposons n ≥ 2, soient A,B ∈ L(E), on a

Bn − An =n−1∑k=0

Ak(B − A)Bn−k−1

par telescopage :n−1∑k=0

Ak(B − A)Bn−k−1 =n−1∑k=0

AkBn−k −n−1∑k=0

Ak+1Bn−k−1

︸ ︷︷ ︸=∑n

j=1 AjBn−j

= Bn − An.

Si B ∈ BL(E)(A, 1) on a

‖B‖L(E) ≤ ‖A‖L(E) + ‖B − A‖L(E) ≤ ‖A‖L(E) + 1

et donc grace a la premere formule

‖Bn − An‖L(E) ≤Ç n−1∑k=0

‖A‖kL(E)‖B‖n−k−1L(E)

å‖B − A‖L(E)

≤ nÄ1 + ‖A‖L(E)

än−1‖B − A‖L(E).

Soit A ∈ L(E) et soit ε > 0, pour tout B ∈ BL(E)(A, δ) avec

δ = min

Ç1 + ‖A‖L(E),

ε

nÄ1 + ‖A‖L(E)

än−1

å> 0

on a‖Bn − An‖L(E) < ε

donc A 7→ An est continue en tout A ∈ L(E).

1.6. Distances equivalentes, topologie induite et metrique produit. Ontermine ce panorama des espaces metriques avec quelques considerations sur lanotion d’equivalence des distances, et certaines metriques particulieres.

Definition 1.57. On dit que deux distances sur un meme ensemble sont to-pologiquement equivalentes si l’ensemble des ouverts pour l’une coıncident avecl’ensemble des ouverts pour l’autre. L’equivalence topologique est une relationd’equivalence.

Lemme 1.58. Deux distances sont topologiquement equivalentes si et seulementsi toute boule ouverte non vide de l’une contient une boule ouverte non vide del’autre de meme centre.

Page 18: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

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Remarque 1.59. Pour deux distances topologiquement equivalentes, la conver-gence des suites vers une limite est equivalente. De meme pour les proprietesde nature topologique (caractere ouvert, ferme, continuite). Enfin, l’adherence etl’interieur sont identiques pour des distances topologiquement equivalentes.

Demonstration. Soit E un espace metriques et d1 et d2 deux distances topologi-quement equivalentes. SoitB1(x, r) une boule de (E, d1), c’est un ouvert de (E, d1)donc de (E, d2) qui contient x donc il existe % > 0 tel que B2(x, %) ⊆ B1(x, r).Avec le raisonnement symetrique, une boule B2(x, r) contient une boule B1(x, %)de (E, d1). Reciproquement, soit E muni de deux distances d1 et d2 telles quetoute boule de l’une contient une boule de l’autre de meme centre. Soit U unouvert de (E, d1), montrons que U est ouvert pour (E, d2) : soit x ∈ U , il exister > 0 tel que B1(x, r) ⊆ U , et comme B1(x, r) contient une boule ouverte nonvide B2(x, %) de centre x de (E, d2), on a B2(x, %) ⊆ U et x est interieur a U pourd2.

Definition 1.60. On dit que deux distances d et δ sur un meme ensemble sontmetriquement equivalentes s’il existe deux constantes c > 0 et C > 0 telles quepour tous x, y ∈ E

cd(x, y) ≤ δ(x, y) ≤ Cd(x, y).

C’est une relation d’equivalence.

Il est facile de verifier que l’equivalence metrique implique l’equivalence topo-logique.

Soit (E, d) un espace metrique et A ⊆ E un sous ensemble de F alors larestriction dA de la distance sur E a A

dA : A× A→ R+

(x, y) 7→ dA(x, y) = d(x, y)

est une distance sur A, et on dit que (A, dA) est un sous-espace metrique de(E, d). Les boules de (A, dA) sont les traces des boules de l’espace ambiant sur A

BA(x, r) =¶y ∈ A : d(y, x) < r

©= B(x, r) ∩ A.

Proposition 1.61. Un ensemble U est un ouvert de (A, dA) s’il existe un ouvertV de (E, d) tel que U = V ∩A. Un ensemble F est un ferme de (A, dA) s’il existeun ouvert G de (E, d) tel que F = G ∩ A.

Demonstration. Soit V un ouvert de (E, d), montrons que V ∩ A est un ouvertde (A, dA) : soit x ∈ V ∩ A alors comme V est ouvert dans E, il existe r > 0 telque B(x, r) ⊆ V et donc

BA(x, r) = B(x, r) ∩ A ⊆ V ∩ A.

Ce qui signifie que x est interieur a A (dans le sous-espace metrique (A, dA)) etdonc que V ∩ A est ouvert dans A.

Page 19: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

19

Reciproquement soit U un ouvert de (A, dA), par la remarque 1.6, on a

U =⋃x∈U

⋃r>0:BA(x,r)⊆U

BA(x, r) =

Ñ ⋃x∈U

⋃r>0:B(x,r)∩A⊆U

B(x, r)

︸ ︷︷ ︸=V ouvert de(E,d)

é∩ A.

Un ensemble F est ferme si et seulement si A \ F est ouvert dans (A, dA), i.e. siet seulement s’il existe un ouvert V de (E, d) tel que

A \ F = A ∩ (E \ F ) = V ∩ Aet donc

F = (E \ V ) ∩ A.Ce qui prouve la derniere assertion car G = E \ V est ferme si et seulement si Vest ouvert.

Remarque 1.62. Notons que si A est ouvert dans E alors les ouverts de (A, dA)sont des ouverts de (E, d). Attention ! Si A n’est pas ouvert, un ouvert de (A, dA)n’est pas forcement un ouvert de (E, d). Par exemble, [0, 1[ est un ouvert de(R+, | · |).

On termine en definissant des distances sur le produit cartesien E = E1×· · ·×En d’espaces metriques (Ej, dj) : si x = (x1, . . . , xn) et y = (y1, . . . , yn) ∈ E,

— dE,p(x, y) =

Ñn∑j=1

dj(xj, yj)p

é 1p

si x = (x1, . . . , xn) ∈ E

— dE,∞(x, y) = max1≤j≤n dj(xj, yj) si x = (x1, . . . , xn) ∈ E .Toutes ces distances sont metriquement equivalentes.

2. Espaces complets, espaces compacts, espaces connexes

2.1. Espaces complets. Rappelons la definition d’une suite de Cauchy : (xn)n∈Nest de Cauchy si pour tout ε > 0, il existe N ∈ N tel que pour tous entiersn,m ≥ N on a d(xn, xm) < ε.

Definition 2.1. Un espace complet est un espace metrique pour lequel toute suitede Cauchy est convergente. Lorsqu’il s’agit d’un espace vectoriel norme, on ditque c’est un espace de Banach.

2.1.1. Les reels sont complets. Donnons une definition axiomatique des reels(sans construction). L’ensemble des reels est l’unique (a isomorphisme de corpspres) corps totalement ordonne 3 verifiant l’axiome de la borne superieure.

3. Il est sous-entendu qu’un corps ordonne est commutatif et que l’ordre est compatible avecla structure algebrique i.e. pour tout x, y, z dans le corps

x < y ⇒ x+ z < y + z, et x > 0, y > 0 ≥ 0⇒ xy > 0.

Page 20: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

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Axiome de la borne superieure. Toute partie non vide majoree de R admetune borne superieure.

Remarque 2.2. Une autre definition possible (equivalente) est : l’ensemble desreels est l’unique (a isomorphisme de corps pres) corps totalement ordonne ar-chimedien (i.e. pour tout element du corps, il existe un entier superieur a cetelement 4) complet. Dans ce cas, le theoreme qui suit decoule de la definition.

Theoreme 2.3. Le corps des nombres reels est un espace complet.

Exemple 2.4. L’exponentielle est bien definie ; en effet la serien∑k=0

xk

k!

converge car la suite des sommes partielles forme une suite de Cauchy. En effet,comme pour tout entier k ≥ q, on a

k! = q!k−q∏j=1

(q + j) ≥ q!qk−q

on tire pour tous entiers m > n ≥ q∣∣∣∣∣ m∑k=n+1

xk

k!

∣∣∣∣∣ ≤ m∑k=n+1

|x|k

k!≤ qq

q!

m∑k=n+1

Ç |x|q

åk≤ qq

q!

Ç |x|q

ån+1q

q − |x|.

Si l’on choisit q = [x] + 1 ou [x] designe la partie entiere de x, comme (|x|/q)n+1

tend vers 0 car q > |x|, il existe un entier N ∈ N tel que

qq

q!

Ç |x|q

ån+1q

q − |x|< ε

et ainsi pour tout m > n ≥ max(N, q) on a∣∣∣∣∣ m∑k=0

xk

k!−

n∑k=0

xk

k!

∣∣∣∣∣ < ε

ce qui prouve que la serie exponentielle est une suite de Cauchy.

Pour demontrer la completude du corps des reels, nous nous appuierons sur lesdeux resultats qui suivent et qui sont une consequence de l’axiome de la bornesuperieure.

Theoreme 2.5 (Convergence des suites monotones). Une suite croissante (un)n∈Net majoree converge vers supun. De meme, une suite decroissante (un)n∈N et mi-noree converge vers inf un.

4. Un corps totalement ordonne qui verifie l’axiome de la borne superieure est forcementarchimedien ; si N etait majore alors il admettrait une borne superieure ` et de n + 1 ≤ ` ontire n ≤ n+ 1

2 ≤ `−12 pour tout n, et donc ` ≤ `− 1

2 ce qui est absurde.

Page 21: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

21

Demonstration. Faisons la demonstration dans le cas d’une suite croissante ma-joree, le raisonnement est similaire pour une suite decroissante minoree. La suiteetant majoree, l’ensemble

¶uk, k ∈ N admet bien une borne superieure. Soit

ε > 0, supuk − ε ne peut etre un majorant, donc il existe n0 ∈ N tel que

un0 > supuk − ε.

Comme la suite est croissante, on a alors pour tout entier n ≥ n0

un ≥ un0 > supuk − ε.

On en deduit

−ε < un − supuk ≤ 0 < ε.

La suite converge vers supuk.

Theoreme 2.6. Soient (un)n∈N et (vn)n∈N deux suites respectivement croissanteet decroissante telle que un ≤ vn, alors (un)n∈N et (vn)n∈N convergent. De plussi (un − vn)n∈N tend vers 0, alors (un)n∈N et (vn)n∈N ont meme limite `. On ditdans ce cas que (un)n∈N et (vn)n∈N sont des suites adjacentes.

Demonstration. D’apres le theoreme de convergence monotone, comme (un)n∈Nest majoree par v0 et (vn)n∈N est minoree par u0, les deux suites convergentrespectivement vers supun et inf vn. La derniere assertion vient du theoremed’encadrement des suites que nous ne redemontrerons pas.

On peut maintenant introduire les notions de limite superieure et inferieure.Soit (xn)n∈N une suite bornee de nombres reels. On considere la suite decroissanted’ensembles

Ap =¶xn : n ≥ p

©et

ap = inf Ap = infn≥p

xn, bp = supAp = supn≥p

xn

Il est clair que (ap)p∈N est une suite croissante et (bp)p∈N une suite decroissante,et que ap ≤ bp. D’apres le theoreme 2.6, ces deux suites convergent.

Definition 2.7. Soit (xn)n∈N une suite de nombres reels bornee. On appellelimite inferieure et limite superieure

lim supxn = limp→∞

supn≥p

xn, lim inf xn = limp→∞

infn≥p

xn.

Lemme 2.8. Soit (xn)n∈N une suite bornee de nombres reels, si

lim supxn = lim inf xn

alors la suite converge (et la limite est lim supxn).

Demonstration. C’est une consequence du theoreme d’encadrement par des suitesconvergentes puisque ap ≤ xp ≤ bp pour tout p ∈ N.

Page 22: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

22

Demonstration de la completude du corps des reels. Soit (xn)n∈N une suite de Cau-chy de reels ; elle est bornee et il suffit donc de montrer que limites inferieureet superieure coıncident. Pour tout ε > 0, il existe N ∈ N tel que pour toutn,m ≥ N on a

|xn − xm| < ε.

Soit p ≥ N , l’inegalite precedente implique xn < ε+ xm pour tout n ≥ p et doncbp < ε+ xm pour tout m ≥ N . En passant a la borne inferieure, on obtient doncbp < ε+ ap soit

bp − ap < ε.

Ce qui signifie que lim ap = lim bp soit lim supxn = lim inf xn.

En raisonnant sur les parties reelles et imaginaires ou sur les coordonnees, onen deduit facilement le corollaire suivant.

Corollaire 2.9. Le corps des complexes est complet. Les espaces vectoriels Rn,Cn sont complets.

Proposition 2.10. Soit (E, d) un espace metrique complet et soit A ⊆ E. L’es-pace (A, d) est complet si et seulement si A est ferme dans (E, d).

Demonstration. Supposons (A, d) est complet ; si (xn)n∈N est une suite d’elementsde A convergeant vers x ∈ E alors cette suite est une suite de Cauchy dans Adonc converge dans A. Par unicite de la limite, x ∈ A. Reciproquement si A estferme alors si (xn)n∈N est une suite de Cauchy dans A, c’est une suite de Cauchydans E, donc converge vers x ∈ E. Comme A est ferme x ∈ A, et cette suite deCauchy converge dans A.

2.1.2. Convergence absolue des series. Soit E un espace de Banach, on note ‖ · ‖la norme sur E, soit L(E) l’espace des applications lineaires bornees de E dansE, c’est egalement un espace de Banach (cf. lemme 2.12 qui suit), et par abus onnotera egalement

‖A‖ = sup‖u‖=1

‖Au‖

la norme sur L(E). Rappelons que l’on a

‖AB‖ = sup‖u‖=1

‖A(Bu)‖ ≤ ‖A‖ sup‖u‖=1

‖Bu‖ ≤ ‖A‖ ‖B‖.

Theoreme 2.11. Un espace vectoriel norme est un espace de Banach si et seule-ment si toute serie absolument convergente est convergente.

Demonstration. Soit E un espace de Banach, et soit∑n≥0 xn une serie absolument

convergente, la suite de sommes partielles est une suite de Cauchy car l’inegalitetriangulaire implique ∥∥∥∥∥ m∑

k=n

xk

∥∥∥∥∥ ≤ m∑k=n

‖xk‖

Page 23: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

23

et la somme de droite tend vers 0 car la serie∑ ‖xk‖ est convergente. La serie∑

n≥0 xn converge donc.Inversement, soit E un espace norme tel que toute serie absolument convergente

soit convergente. Soit (xn)n∈N une suite de Cauchy, grace au Lemme 1.30, il suffitde montrer qu’il existe une valeur d’adherence. Construisons a present une sous-suite (xϕ(n))n∈N convergente. Comme (xn)n∈N est une suite de Cauchy, pour toutk ∈ N, il existe Nk ∈ N tel que

‖xn − xm‖ ≤1

2kpour n,m ≥ Nk

et on peut construire une extractrice ϕ : N→ N par recurrence

ϕ(k + 1) = max(ϕ(0), . . . , ϕ(k), Nk+1) + 1

de sorte que

‖xϕ(k+1) − xϕ(k)‖ ≤1

2kpour k ∈ N.

On en deduit doncn∑k=0

‖xϕ(k+1) − xϕ(k)‖ ≤n∑k=0

1

2k≤ 2

ce qui implique que la suite croissante des sommes partiellesÄ∑n

k=0 ‖xϕ(k+1) −xϕ(k)‖

än∈N est majoree donc convergente. Par suite, la serie

∑k≥0(xϕ(k+1)−xϕ(k))

est absolument convergente donc convergente. Or on a

xϕ(n) =n−1∑k=0

(xϕ(k+1) − xϕ(0)) + xϕ(0)

donc la sous-suite (xϕ(n))n∈N ainsi construite converge.

Lemme 2.12. Soit F un espace de Banach et E un espace vectoriel norme alorsl’espace vectoriel L(E,F ) des applications lineaires continues de E dans F estun espace de Banach.

Demonstration. Soit (ϕn)n∈N une suite de Cauchy d’applications ϕn : E → F ,alors comme

∀x ∈ E ‖ϕn(x)‖F ≤ ‖ϕn‖L(E,F )‖x‖Ela suite des images (ϕn(x))n∈N de x est une suite de Cauchy de F . Comme F estcomplet, cette suite converge, et on considere alors

ϕ : E → F

x 7→ ϕ(x) = limϕn(x).

Par linearite de la limite, il est clair que ϕ est lineaire et comme une suite deCauchy est bornee, il existe M > 0 tel que

∀n ∈ N ∀x ∈ E ‖ϕn(x)‖F ≤ ‖ϕn‖L(E,F )‖x‖ ≤M‖x‖

Page 24: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

24

ce qui en passant a la limite implique que ϕ est continue puisque

∀x ∈ E‖ϕ(x)‖F ≤M‖x‖,i.e. ϕ ∈ L(E,F ). Il reste a verifier que ϕ est la limite de (ϕn)n∈N dans L(E,F ).Soit ε > 0, il existe N ∈ N tel que pour tous entiers n,m ≥ N on a

∀x ∈ E ‖ϕn(x)− ϕm(x)‖F ≤ ε‖x‖en passant a la limite lorsque m tend vers l’infini, on obtient pour tout entiern ≥ N

∀x ∈ E ‖ϕn(x)− ϕ(x)‖F ≤ ε‖x‖et ainsi ϕ est la limite de (ϕn)n∈N dans L(E,F ).

Exemple 2.13. On peut alors definir l’application exponentielle sur l’espacevectoriel L(E) : soit A ∈ L(E), la serie exponentielle

expA =∞∑k=0

Ak

k!

converge absolument. Notons que S(t) = exp(tA) est solution de l’equationdS

dt= S

S(0) = IdE.

Lemme 2.14. Soit E un espace de Banach et soit A ∈ L(E) tel que ‖A‖L(E) < 1alors IdE + A est une bijection d’inverse continue donnee par

(IdE + A)−1 =∞∑k=0

(−1)kAk.

Demonstration. La serie converge absolument car ‖A‖L(E) < 1 et

A

Ç ∞∑k=0

(−1)kAkå

=∞∑k=1

(−1)kAk+1 = IdE −∞∑k=0

(−1)kAk

ce qui prouve que la somme est l’inverse (continu) de IdE + A.

2.1.3. Theoreme du point fixe. Un outil primordial dans la resolution de certainesequations est l’existence de points fixes, garantie dans un espace complet par letheoreme du point fixe de Picard.

Definition 2.15. Une application f : E → E sur un espace metrique est ditecontractante si elle est lipschitzienne avec une constante de Lipschitz strictementinferieure a 1

∃k ∈ [0, 1[ ∀x, y ∈ E, d(f(x), f(y)) ≤ kd(x, y).

Remarque 2.16. Attention ! La notion de contractance est fluctuante dans lalitterature. Pour pouvoir appliquer le theoreme de Picard, il faut l’existence d’uneconstante de Lipschitz dans [0, 1[. D’autres notions plus laches ne guarantissentpas l’existence de points fixes (cf. contre-exemples en travaux diriges).

Page 25: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

25

Theoreme 2.17 (Theoreme du point fixe de Picard). Soit (E, d) un espacemetrique complet et f : E → E une application contractante alors il existe ununique point fixe de f . En outre la suite (xn = fn(x0))n∈N converge vers le pointfixe et on a l’estimation

d(xn, x0) ≤ kn

1− kd(f(x0), x0)

ou 0 ≤ k < 1 est la constante de Lipschitz de f .

Demonstration. Commencons par montrer l’unicite : supposons que x, y ∈ Esoient des points fixes de E alors on a

d(x, y) = d(f(x), f(y)) ≤ kd(x, y)

et donc d(x, y) = 0 car k ∈ [0, 1[. Par recurrence, on a

d(xn+1, xn) ≤ knd(f(x0), x0)

et en iterant l’inegalite triangulaire, on obtient

d(xm, xn) =m−1∑j=n

d(xj+1, xj) ≤Çm−1∑k=n

kjåd(f(x0), x0) ≤ kn

1− kd(f(x0), x0)

ce qui implique que (xn)n∈N est une suite de Cauchy donc converge. Notons x lalimite, en passant a la limite dans la relation

xn+1 = f(xn)

on en deduit que x est un point fixe de f . En passant a la limite lorsque m tendvers l’infini dans l’inegalite

d(x, xn) ≤ kn

1− kd(f(x0), x0)

on obtient l’inegalite annoncee.

2.1.4. Applications du theoreme de point fixe. Le theoreme du point fixe est unoutil puissant pour resoudre des equations (qui peuvent se mettre sous la formed’une equation au point fixe). Les applications sont donc nombreuses (et il existed’autres versions du theoreme du point fixe parfois plus adaptees aux equationsque l’on cherche a resoudre). Nous choisissons d’en presenter deux (tres classiques)utiles en analyse et en geometrie. Nous aurons besoin du resultat suivant.

Lemme 2.18. Soit F un espace de Banach et (E, d) un espace metrique alorsl’espace vectoriel C0

b (E;F ) des applications continues bornees de E dans F munide la norme

‖f‖C0 = supx∈E‖f(x)‖F

est un espace de Banach.

Demonstration. La preuve est similaire a celle du lemme 2.12 et sera vue entravaux diriges.

Page 26: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

26

Remarque 2.19. En particulier, l’espace C0(I, E) des fonctions continues surun intervalle I ⊆ R ferme borne a valeurs dans un espace de Banach est un espacede Banach, car les fonctions continues sur un intervalle ferme borne de R sontbornees (ceci est une consequence de resultats sur la compacite que nous verronspar la suite).

On peut appliquer le theoreme du point fixe pour resoudre des equationsdifferentielles ordinaires dans un espace de Banach E. Soit f : R × E → Eune fonction continue, soit x0 ∈ E et soit I un intervalle de R contenant t0, oncherche des fonctions x : I → E de classe C1 telles que

dx

dt(t) = f(t, x(t)), t ∈ I

x(t0) = x0

.(2.1)

Il faut ajouter des conditions sur la fonction f pour etre certain d’avoir dessolutions. Avec une condition de Lipschitz sur f , on peut resoudre cette equationdans un premier temps localement — c’est a dire sur un intervalle I suffisammentpetit.

Theoreme 2.20 (Theoreme de Cauchy-Lipschitz local). Soit E un espace deBanach et x0 ∈ E, soit f : R × E → E une fonction continue. Supposons quef verifie la propriete suivante : il existe deux reels r > 0 et C > 0 tels que pourtout x ∈ B(x0, r) et tout t ∈]t0 − r, t0 + r[⊆ I on a

‖f(t, x)− f(t, y)‖E ≤ C‖x− y‖E.Alors il existe δ > 0 et une unique solution x : [t0 − δ, t0 + δ] → E de classe C1

a l’equation differentielle ordinaire (2.1).

Demonstration. L’equation differentielle (2.1) est equivalente a

x(t) = x0 +∫ t

t0f(s, x(s)) ds.

On considere alors la boule fermee B(x0, r/2) ⊆ E, d’apres le lemme 2.18 l’espacevectoriel F = C0([t0 − δ, t0 + δ]; B(x0, r/2)) muni de la norme

‖x‖F = sup|t−t0|≤δ

‖x(t)‖E

est un espace de Banach. L’application definie par

Φ(x)(t) = x0 +∫ t

0f(s, x(s)) ds, x ∈ F

est a valeurs dans la boule fermee B(x0, r/2) si l’on choisit δ > 0 assez petit ; eneffet, si t ≥ t0 on

‖Φ(x)(t)− x0‖E ≤∫ t

t0‖f(s, x(s))‖E ds ≤Mδ

avec M = sups∈I,‖y‖≤r/2

‖f(s, y)‖E

Page 27: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

27

et de meme si t ≤ t0, et il suffit alors de choisir δ ≤ r2M

. Il s’agit donc de montrerque Φ : F → F admet un point fixe. Pour cela, montrons qu’elle est contractante ;pour tout |t− t0| ≤ r/2 et t ≥ t0 on a

‖Φ(x)(t)− Φ(y)(t)‖E ≤∫ t

t0‖f(s, y(s))− f(s, x(s))‖E ds

≤ C∫ t

t0‖y(s)− x(s)‖E ds ≤ Cδ‖y − x‖F

et en passant au supremum, on obtient ‖Φ(x) − Φ(y)‖F ≤ Cδ‖y − x‖F , ce quiprouve que Φ est contractante si l’on choisit δ < C−1. Par le theoreme du pointfixe de Picard, il existe un unique point fixe de Φ, et donc une unique solutionde (2.1) definie sur [t0 − δ, t0 + δ].

Ce resultat local peut etre ameliore en un resultat global que nous ne demontreronspas. Pour cela, il faut une condition de Lipschitz en tous points.

Definition 2.21. Une fonction f : R × E → E continue est dite localementlipschitzienne par rapport a la seconde variable si pour tout t0 ∈ R et tout x0 ∈ Eil existe deux reels δ > 0 et C > 0 tels que pour pour tout x, y ∈ B(x0, δ) et toutt ∈]t0 − δ, t0 + δ[ on ait

‖f(t, x)− f(t, y)‖E ≤ C‖x− y‖E.

Theoreme 2.22 (Theoreme de Cauchy-Lipschitz). Soit E un espace de Banach,soit f : R×E → E une fonction localement lipschitzienne par rapport a la secondevariable, pour tout x0 ∈ E, il existe une unique solution maximale x : I → E(avec t0 ∈ I) de classe C1 a l’equation differentielle ordinaire (2.1) et l’intervalled’existence I de la solution maximale est ouvert.

Remarque 2.23. Dire que x est une solution maximale de l’equation (2.1) si-gnifie que si y : J → E est une autre solution de (2.1) alors J ⊆ I et y = x|J . Onne peut donc prolonger la solution sur un intervalle de temps plus grand.

La deuxieme application porte sur le theoreme des fonctions implicites : soitf : U → R une fonction de classe C1 sur un ouvert U ⊆ Rn contenant l’originetelle que f(0) = 0, on s’interesse a l’equation

f(x) = 0

et on aimerait trouver une condition pour que l’ensemble des solutions de cetteequation soit le graphe d’une fonction ϕ : U ′ ⊆ Rn−1 → R de classe C1 avecϕ(0) = 0

f−1(0) =¶x = (x′, xn) ∈ U : xn = ϕ(x′), x′ ∈ U ′ ⊆ Rn−1

©autrement dit pour que f−1(0) soit (au moins localement pres de 0) la surfacedonnee par le graphe de ϕ. Il est clair (voir le cas d’un cercle par exemple lorsque

Page 28: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

28

n = 2) que la normale ne peut etre horizontale

∇f(0) =

Ç∂f

∂x1

(0), . . . ,∂f

∂xn(0)

å/∈ xn = 0

donc que∂f

∂xn(0) 6= 0.

Cette condition est en fait suffisante (au moins localement).

Figure 1. Cercle et tangente verticale, la partie rouge n’est pas un graphe.

Theoreme 2.24 (Theoreme des fonctions implicites). Soit U ⊆ Rn un ouvert deRn contenant 0 et soit f : U → R une fonction de classe C1 telle que f(0) = 0et

∂f

∂xn(0) 6= 0

alors il existe δ > 0, r > 0 et une fonction ϕ : BRn−1(0, r)→]− δ, δ[ de classe C1

telle que

(i) BRn−1(0, r)× [−δ, δ] ⊆ U ,

(ii) ϕ(0) = 0,

(iii) si Uδ,r = BRn−1(0, r)×]− δ, δ[ alors

f−1(0) ∩ Uδ,r =¶(x′, ϕ(x′)) : x′ ∈ BRn−1(0, r)

©.

En outre, on a pour tout x′ ∈ BRn−1(0, r)

∂ϕ

∂x′(x′) = −

Ç∂f

∂xn(x′)

å−1∂f

∂x′(x′).

Page 29: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

29

Demonstration. Comme U est ouvert et contient 0, on a BRn−1(0, r)× [−δ, δ] ⊆ Usi r et δ sont choisis assez petits. La fonction definie par

(x′, a, b) 7→ 1−Ç∂f

∂xn(0)

å−1 ∫ 1

0

∂f

∂xn(x′, ta+ (1− t)b) dt

est continue et vaut 0 en (0, 0, 0), donc il existe r > 0 et δ > 0 tels que∣∣∣∣∣1−Ç∂f

∂xn(0)

å−1 ∫ 1

0

∂f

∂xn(x′, ta+ (1− t)b) dt

∣∣∣∣∣ ≤ 1

2(2.2)

pour tout x′ ∈ BRn−1(0, r) et tout a, b ∈ [−δ, δ]. Quitte a reduire r, par continuitede f en 0, on peut supposer egalement que

|f(x′, 0)| ≤ δ

2

∣∣∣∣∣ ∂f∂xn (0)

∣∣∣∣∣, x′ ∈ BRn−1(0, r).

D’apres le lemme 2.18, C0(BRn−1(0, r), [−δ, δ]) est un espace de Banach et onconsidere le sous-espace ferme

F =¶ϕ ∈ C0(BRn−1(0, r), [−δ, δ]) : ϕ(0) = 0

©qui est donc un espace de Banach. Pour ϕ ∈ F on introduit la fonction continue

G(ϕ)(x′) = ϕ(x′)−Ç∂f

∂xn(0)

å−1

f(x′, ϕ(x′)).

On a alors

G(ϕ)(x′) =Ç1−

Ç∂f

∂xn(0)

å−1 ∫ 1

0

∂f

∂xn(x′, tϕ(x′)) dt

åϕ(x′) +

Ç∂f

∂xn(0)

å−1

f(x′, 0)

et ainsi etant donne (2.2)

|G(ϕ)(x′)| ≤ δ

2+

∣∣∣∣∣ ∂f∂xn (0)

∣∣∣∣∣−1

|f(x′, 0)| ≤ δ.

Par consequent G definit bien une application de F dans F . Montrons qu’elle estcontractante ; on a

G(ϕ)(x′)−G(ψ)(x′) =Ç1−

Ç∂f

∂xn(0)

å−1 ∫ 1

0

∂f

∂xn(x′, tϕ(x′) + (1− t)ψ(x′)) dt

å(ϕ(x′)− ψ(x′))

et etant donne (2.2) on obtient

‖G(ϕ)−G(ψ)‖C0 ≤ 1

2‖ϕ− ψ‖C0 .

Page 30: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

30

G est donc une application contractante et d’apres le theoreme du point fixe dePicard, il existe une fonction ϕ continue qui est point fixe et qui verifie donc

f(x′, ϕ(x′)) = 0, x′ ∈ BRn−1(0, r).

En outre si x ∈ Uδ,r est tel que f(x) = 0 alors comme

0 = f(x)− f(x′, ϕ(x′)) =

Ç ∫ 1

0

∂f

∂xn(x′, txn + (1− t)ϕ(x′)) dt

å(xn − ϕ(x′))

on en deduit xn = ϕ(x′) car le premier facteur de droite est non-nul grace a (2.2)puisque xn, ϕ(x′) ∈]− δ, δ[. On a ainsi demontre que

f−1(0) ∩ Uδ,r =¶(x′, ϕ(x′)) : x′ ∈ BRn−1(0, r)

©.

Il reste a montrer que ϕ est de classe C1 sur BRn−1(0, r). De la relation

f(x′, ϕ(x′ + h′))− f(x′, ϕ(x′)) = f(x′, ϕ(x′ + h′))− f(x′ + h, ϕ(x′ + h′))

on tire grace a la formule de Taylor avec reste integral a l’ordre 1

ϕ(x′ + h′)− ϕ(x′) = −Ç ∫ 1

0

∂f

∂xn(x′, tϕ(x′ + h′) + (1− t)ϕ(x′)) dt

å−1

× (f(x+ h′, ϕ(x′ + h))− f(x′, ϕ(x′ + h′)))

et d’apres (2.2) et l’inegalite des accroissements finis, on obtient

|ϕ(x+ h′)− ϕ(x′)| ≤ 2‖h′‖∣∣∣∣∣ ∂f∂xn (0)

∣∣∣∣∣−1

supB(0,δ)

‖∇f‖

ce qui signifie que ϕ est lipschitzienne. Sachant que ϕ(x′ + h′) − ϕ(x′) = O(h′),on peut ecrire

0 = f(x′ + h′, ϕ(x′ + h′))− f(x′, ϕ(x′))

=∂f

∂xn(x′, ϕ(x′))(ϕ(x′ + h′)− ϕ(x′)) +

∂f

∂x′(x′, ϕ(x′)) · h′ + o(h′)

d’ou l’on deduit

ϕ(x′ + h′)− ϕ(x′) = −Ç∂f

∂xn(x′, ϕ(x′))

å−1∂f

∂x′(x′, ϕ(x′)) · h′ + o(h′)

ce qui permet de dire que ϕ est derivable et que l’on a

∂ϕ

∂x′(x′) = −

Ç∂f

∂xn(x′, ϕ(x′))

å−1∂f

∂x′(x′, ϕ(x′)).

Comme le terme de droite est continu, ϕ est de classe C1.

Remarque 2.25. Le theoreme des fonctions implicites est valable dans un cadreplus general, a savoir sur un ouvert d’un espace de Banach produit, mais il fautd’abord connaıtre la notion de differentielle sur un espace vectoriel norme (cf.cours de calcul differentiel).

Page 31: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

31

2.1.5. Existence d’un espace complete. Etant donnee l’importance de la notionde completude, il peut etre interessant de savoir si l’on peut completer unespace metrique qui ne le serait pas. Voici un resultat permettant de dire qu’unespace metrique est, a isometrie pres, toujour un sous-espace d’un espace metriquecomplet. En Master, d’autres procedes de completion (parfois plus effectifs oupermettant de conserver des structures telles que celles d’espace vectoriel) serontvus.

Theoreme 2.26 (Completion d’un espace metrique). Un espace metrique estisometrique a un sous-ensemble dense d’un espace metrique complet.

Demonstration. Soit (E, d) un espace metrique, pour tout x ∈ E, on note dx :E → R l’application define par

dx(y) = d(x, y).

On munit C0b (E; R) l’espace des fonctions continues bornees de E dans R de la

distance d∞ : C0b (E; R)× C0

b (E; R)→ R+ donnee par

d∞(f, g) = supy∈E|f(y)− g(y)|

ce qui fait de (C0b (E; R), d∞)un espace complet. L’inegalite triangulaire donne

pour tout y ∈ E|dx(y)− dx0(y)| = |d(x, y)− d(x0, y)| ≤ d(x, x0)

autrement dit dx − dx0 est bornee par d(x, x0). On considere l’application J :(E, d)→ (C0

b (E,R), d∞) definie par

J(x) = dx − dx0 .C’est une application lipschitzienne car

J(x)− J(z) = dx − dzet ainsi

d∞(J(x), J(z)) = supy∈E|dx(y)− dz(y)| = sup

y∈E|d(x, y)− d(z, y)|

or l’inegalite triangulaire implique

|d(x, y)− d(z, y)| ≤ d(x, z)

ce qui permet de dire, apres passage a la borne superieure en y, que J est 1-lipschitzienne

d∞(J(x), J(z)) ≤ d(x, z).

En outre, on a

d(x, z) = dx(z)− dz(z) ≤ supy∈E|dx(y)− dz(y)| = d∞(J(x), J(z))

les deux inegalites permettent de conclure que J est une isometrie

d∞(J(x), J(z)) = d(x, z).

Page 32: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

32

On munit F = J(E) de la distance d∞ : F est un ferme de l’espace complet(C0

b (E; R), d∞) donc c’est un espace complet. En notant U = J(E), l’applicationJ : E → U est une bijection et une isometrie. De plus, U est dense dans F car

U = J(E) = F.

Ainsi U est isometrique a un sous-espace dense d’un espace complet.

Remarque 2.27. Le desavantage de cette construction est qu’elle ne s’appliquepas bien a la construction 5 de R par completion de Q, et qu’elle n’est pas tresadaptee a la completion des espaces vectoriels normes 6.

2.2. Espaces compacts. Les intervalles fermes bornes dans R jouent un roleparticulier (e.g. une fonction continue y est bornee et atteint un maximum etun minumum). On voudrait distinguer des espaces metriques dont les proprietespourraient etre similaires.

Definition 2.28. Un espace metrique (E, d) est dit compact s’il verifie la pro-priete de Borel-Lebesgue : de tout 7 recouvrement de E par des ouverts Ur

E ⊆⋃r∈R

Ur

on peut extraire un sous-recouvrement fini, i.e. il existe r1, . . . , rm ∈ R tels que

E ⊆m⋃j=1

Urj .

Un sous-ensemble A de E est dit compact s’il l’est en tant qu’espace metriquemuni de la distance induite.

Remarque 2.29. Les ouverts pour la distance induite sur une partie A de Esont la trace d’ouverts de E sur A : or un recouvrement de A par des ouverts deA est equivalent a un recouvrement par des ouverts de E

A ⊆⋃r∈R

Ur ⇔ A ⊆⋃r∈R

(Ur ∩ A)

Une partie A de E est donc compacte si elle verifie la propriete de Borel-Lebesguepour des ouverts de l’espace ambiant E.

Exemple 2.30. Les intervalles fermes bornes de R sont compacts. Supposonsque

[a, b] ⊆⋃r∈R

Ur

5. On utilise dans la preuve le fait que C0b (E;R) est complet, et ce fait repose sur l’existence

et la completude de R.6. J n’est pas un isomorphisme vectoriel.7. L’ensemble d’indices R n’est pas forcement denombrable !

Page 33: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

33

et considerons

B =¶x ∈ [a, b] : [a, x] peut-etre recouvert par un nombre fini de Ur

©β = supB.

Montrons que β ∈ B (i.e. β = maxB). Soit (bn)n∈N une suite maximisante de B.Comme β ∈ Ur0 , il existe ε > 0 tel que ]β − ε, β + ε[⊆ Ur0 . Il existe alors n ∈ Ntelle que βn ∈]β − ε, β + ε[ donc [βn, β] ⊆ Ur0 . Comme βn ∈ B, on a

[a, βn] ⊆m⋃j=1

Urj

et en deduit

[a, β] = [a, βn] ∪ [βn, β] ⊆m⋃j=0

Urj .

En outre, si β < b alors

β + θ ∈ B, θ ∈ [0,min(ε, b− β)[

car

[a, β + θ] = [a, β] ∪ [β, β + ε[⊆m⋃j=0

Urj ,

ce qui contredit que β est un majorant de B. On a donc forcement b = β et ainsib ∈ B, donc [a, b] peut-etre recouvert par un nombre fini de Ur.

Il y a une caracterisation sequentielle de la compacite dans les espaces metriques.Elle est similaire a celle que l’on connait sur les intervalles bornes de R.

Theoreme 2.31. Un espace metrique est compact si et seulement s’il verifie lapropriete de Bolzano-Weierstrass : de toute suite on peut extraire une sous-suiteconvergente.

Pour prouver ce resultat, nous allons faire un petit detour en introduisant unenotion intermediaire.

Definition 2.32. On dit qu’un sous-ensemble A d’un espace metrique (E, d) estprecompact si pour tout ε > 0, A peut etre recouvert par un nombre fini de boules(ouvertes) de rayon ε > 0 et de centres dans A, i.e. s’il existe a1, . . . , am dans Atels que

A ⊆m⋃j=1

B(aj, ε).

Un ensemble compact est precompact car si ε > 0 du recouvrement

E =⋃x∈E

B(x, ε)

on peut extraire un sous-recouvrement fini

E =m⋃j=1

B(xj, ε).

Page 34: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

34

Nous verrons un peu plus loin quelle condition il faut imposer a un ensembleprecompact pour qu’il soit compact.

Demonstration du theoreme 2.31. Supposons que E verifie la propriete de Borel-Lebesgue, et soit (xn)n∈N une suite bornee de E. Considerons la suite decroissantede fermes

Fn =¶xm : m ≥ n

©.

Supposons que ∩n∈NFn = ∅ alors

E ⊆⋃n∈N

E \ Fn

et par la propriete de Borel-Lebesgue,

E ⊆m⋃j=1

E \ Fnj , i.e.m⋂j=1

Fnj = ∅

ce qui est absurde car⋂mj=1 Fnj = Fnm 6= ∅. Soit x ∈ ⋂mn∈N Fn, on va construire

une suite (xϕ(n))n∈N telle que

d(xϕ(n), x) <1

n+ 1.

Supposons que l’on ait construit les premiers termes xϕ(0), . . . , xϕ(n) ; comme x ∈Fϕ(n)+1, la boule ouverte B(x, 1/(n + 2)) rencontre l’ensemble des valeurs de lasuite (xm)m≥ϕ(n)+1 et il existe donc xϕ(n+1) avec ϕ(n + 1) ≥ ϕ(n) + 1 tel qued(xϕ(n+1), x) < 1/(n + 2). Ceci prouve que x est valeur d’adherence de la suite(xn)n∈N.

Inversement supposons que E verifie la propriete de Bolzano-Weierstrass. Mon-trons que E est precompact. Soit ε > 0, montrons que E est une reunion finie deboules de rayon ε

E =m⋃j=1

B(xj, ε)

Si ce n’etait pas le cas, alors on pourrait construire une suite (xn)n∈N telle que

∀n,m ∈ N d(xn, xm) ≥ ε.

Une telle suite ne possede pas de valeurs d’adherence (car aucune suite extraiten’est de Cauchy) et viole la propriete de Bolzano-Weierstrass. On construit unetelle suite par recurrence : si l’on a construit les termes x0, . . . , xn, il suffit d’ob-server que

E 6=n⋃j=0

B(xj, ε)

et qu’il existe donc xn+1 ∈ E tel que

d(xn+1, xj) ≥ ε pour j = 0, . . . , n.

Page 35: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

35

On considere alors un recouvrement de E

E ⊆⋃r∈R

Ur

par des ouverts Ur. Il existe ε > 0 tel que toute boule de rayon ε est contenuedans l’un des Ur. Si ce n’etait pas le cas, on aurait

∀ε > 0 ∃x ∈ E tel que ∀r ∈ R B(x, ε) ( Ur

en particulier, il existerait une suite (xn)n∈N de E telle que

∀r ∈ R B(xn, 2−n) ( Ur.(2.3)

Or il existe une suite extraite (xϕ(n))n∈N convergente, et la limite x ∈ E appartienta l’un des ouverts Ur0 . Il existe δ > 0 tel que B(x, δ) ⊆ Ur0 , et donc

BÄxϕ(n), 2

−ϕ(n)ä⊆ B

Äxϕ(n), 2

−nä ⊆ B(x, δ) ⊆ Ur0

pour tout n assez grand, ce qui est en contradiction avec (2.3). En outre commeon a montre que E est precompact, on a

E =m⋃j=1

B(xj, ε) ⊆m⋃j=1

Urj

et l’equivalence entre les proprietes de Borel-Lebesgue et de Bolzano-Weierstrassest ainsi demontree.

Remarque 2.33. On retrouve le fait qu’un intervalle ferme borne est compact,car il verifie la propriete de Bolzano-Weierstrass ; de toute suite bornee, on peutextraire une sous-suite convergente (exercice : le reprouver, par exemple en utili-sant la dichotomie).

Corollaire 2.34. Un espace compact est complet.

Demonstration. Soit (E, d) un espace compact et soit (xn)n∈N une suite de Cau-chy de E. La propriete de Bolzano-Weierstrass implique que cette suite a une va-leur d’adherence. Le lemme 1.30 permet de conclure que cette suite converge.

Proposition 2.35. Un sous-ensemble compact A ⊆ E est ferme et borne dans(E, d).

Demonstration. On a A ⊆ ⋃x∈E B(x, r) pour ε > 0, on peut donc en extraire unsous-recouvrement fini E ⊆ ⋃mj=1B(xj, r) donc

δ(E) = supx,y∈E

d(x, y) ≤ 2r + max1≤j,k≤m

d(xj, xk).

Soit (xn)n∈N une suite de A qui converge vers x ∈ E. D’apres la propriete deBolzano-Weierstrass, il existe une sous-suite qui converge vers un element de Adonc x ∈ A. Ainsi A est ferme.

Proposition 2.36. Un sous-ensemble ferme d’un espace compact est compact.

Page 36: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

36

Demonstration. Soit F un ferme dans un espace compact (E, d). Soit (xn)n∈Nune suite de F , comme E est compact, il existe une sous suite (xϕ(n))n∈N quiconverge vers x ∈ E. Comme F est ferme, x ∈ F , ce qui signifie que F verifie lapropriete de Bolzano-Weierstrass, et est donc compact.

2.2.1. Compacite et continuite. Il nous reste a voir si la compacite est preserveepar les fonctions continues et quelles sont les consequences.

Theoreme 2.37. L’image d’un espace compact de E par une application continuef : E → F entre deux espaces metriques est compacte.

Demonstration. Un recouvrement de l’image de E par f par des ouverts

f(E) ⊆⋃r∈R

Ur

induit un recouvrement de l’espace E par des ouverts

E ⊆ f−1

Ç ⋃r∈R

Ur

å=⋃r∈R

f−1(Ur)

puisque f est continue. Comme E est compact, on peut en extraire un sousrecouvrement fini

E ⊆⋃j=1m

f−1(Urj) = f−1

Ç m⋃j=1

Urj

ået cela donne un sous recouvrement fini de l’image

f(E) ⊆m⋃j=1

Urj .

Par consequent f(E) est compact.

Theoreme 2.38 (Heine). Une fonction f : E → F continue sur un espacecompact E est uniformement continue.

Demonstration. Soit ε > 0, pour tout x ∈ E il existe δ > 0 tel que pour touty ∈ BE(x, 2δ) on a d(f(x), f(y)) < ε/2. Du recouvrement par des ouverts

E ⊆⋃x∈E

⋃δ∈Dx

BE(x, δ), Dx =¶δ > 0 : BE(x, 2δ) ⊆ f−1

ÄB(f(x), ε/2)

ä©on peut extraire un sous-recouvrement fini

E ⊆m⋃j=1

BE(xj, δj), δj ∈ Dxj

et on pose δ = min(δ1, . . . , δm). Dans ce cas, si d(x, y) < δ alors x ∈ B(xj, δj) etdonc

d(y, xj) ≤ d(y, x) + d(x, xj) < δ + δj ≤ 2δjet donc

d(f(x), f(y)) ≤ d(f(x), f(xj)) + d(f(xj), f(y)) <ε

2+ε

2= ε

Page 37: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

37

ce qui prouve que f est uniformement continue.

Theoreme 2.39. Une fonction continue f : (E, d) → (R, | · |) sur un espacecompact est bornee et atteint un maximum et un minimum.

Demonstration. L’image f(E) de E est un compact de R donc un intervalle fermeborne. Soit (f(xn))n∈N une suite maximisante

lim f(xn) = supEf

on peut extraire une sous-suite (xϕ(n))n∈N convergeant vers x ∈ E. Etant donneque f est continue, on a alors

f(x) = lim f(xϕ(n)) = supEf.

Ainsi f atteint un maximum. Il en est de meme pour le minimum.

Theoreme 2.40. Sur un espace vectoriel de dimension finie, toutes les normessont equivalentes.

Demonstration. Soit V un espace vectoriel de dimension finie, soit (e1, . . . , en)une base de V . Par transitivite de l’equivalence, il suffit de montrer que toutenorme ‖ · ‖ sur V est equivalente a la norme

‖v‖1 =n∑j=1

|vj|, v =n∑j=1

vjej ∈ V.

Par l’inegalite triangulaire, on a

‖v‖ ≤n∑j=1

|vj|‖ej‖ ≤ β ‖v‖1, β = max1≤j≤n

‖ej‖ > 0.

Inversement, on considere

S =¶v ∈ V : ‖v‖1 = 1

©la sphere unite de (V, ‖ · ‖1), qui est un compact. En effet, toute suite (xn)n∈N deS a des coordonnees inferieures ou egales a 1, donc on peut extraire coordonneesapres coordonnees des sous-suites convergentes. Comme l’application ‖ · ‖ estlipschitzienne sur (V, ‖ · ‖1) car∣∣∣‖v‖ − ‖w‖∣∣∣ ≤ ‖v − w‖ ≤ β‖v − w‖1,

elle est continue et atteint son minimum

α = infθ∈S‖θ‖ = ‖θ0‖ > 0.

On a alors

α‖v‖1 ≤ ‖v‖

car v/‖v‖1 ∈ S si v 6= 0. Les deux normes sont donc equivalentes.

Page 38: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

38

Corollaire 2.41. Un espace vectoriel norme de dimension finie est un espace deBanach.

2.2.2. Les compacts sont-ils les fermes bornes ? Nous avons vu que les partiescompactes sont fermees et bornees, inversement les segments fermes bornes de Rsont compactes. Cette propriete reste-elle vraie pour des espaces metriques ?

Oui...

Theoreme 2.42. Dans un espace de dimension finie, les ensembles compactssont les fermes bornes.

Demonstration. D’apres le theoreme 2.40 toutes les normes sont equivalentes surun espace vectoriel de dimension finie. Autant travailler avec la norme ‖ · ‖∞.Soit K un ensemble ferme et borne. Soit (xn)n∈N une suite de K. Comme K estborne, il existe R > 0 tel que K ⊆ [−R,R]n. De chaque suite de coordonnees,on peut extraire tour a tour des sous-suites convergentes. On obtient ainsi unesous-suite (xn)n∈N convergenant vers x ∈ K. On verifie ainsi la propriete deBolzano-Weierstrass et K est compact.

Mais...

Theoreme 2.43 (Riesz). Un espace vectoriel norme reel ou complexe est dedimension finie si et seulement si sa boule unite fermee est compacte.

Demonstration. Soit E un espace vectoriel norme reel ou complexe. On note ‖ · ‖la norme dans E. Si E est de dimension finie, alors la boule unite fermee est unensemble ferme et borne donc compact. Il s’agit donc de prouver la reciproque.Supposons que E est de dimension infinie. Il existe donc une suite (en)n∈N devecteurs independants.

On note V0 = 0 et Vn = Vect(e1, . . . , en) si n ≥ 1. Le sous-espace vectorielVn de dimension finie est un ensemble ferme. En effet, si l’on considere la norme

|v|n =Å n∑j=1

v2j

ã 12

, pour tout v =n∑j=1

vjej ∈ Vn

alors elle est equivalente a la norme ‖ · ‖ sur Vn puisque c’est un espace vectorielde dimension finie. Ainsi si (uk)k∈N est une suite de vecteurs de Vn convergeantdans E vers u ∈ E, alors c’est en particulier une suite de Cauchy dans (Vn, ‖ · ‖)et donc dans (Vn, | · |n), ce qui implique que chacune des suites (uk,j)k∈N descoordonnees de uk selon ej

uk =n∑j=1

uk,jej

est une suite de Cauchy dans R ou C, donc converge. Ceci permet d’affirmer queuk converge vers une limite u ∈ Vn dans (Vn, | · |n), l’equivalence des normes, anouveau, donne u = u, et donc u ∈ Vn.

Page 39: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

39

Il est clair que d(en, Vn−1) > 0 car si ce n’etait pas le cas, on aurait en ∈ Vn−1

puisque Vn−1 est ferme, ce qui contredirait l’independance des vecteurs ek. Enoutre, il existe vn ∈ Vn−1 tel que

d(en, Vn−1) = ‖en − vn‖.

En effet, si l’on choisit r > d(en, Vn−1) alors

d(en, Vn−1) = infv∈B(en,r)∩Vn−1

‖v − en‖

et comme B(en, r) ∩ Vn−1 est un ferme borne, donc un compact dans l’espacevectoriel de dimension finie (Vn, ‖ · ‖), cette borne inferieure est atteinte.

On considere alors la suite

wn =en − vn‖en − vn‖

.

Cette suite est constituee de vecteurs de norme 1 (appartenant donc a la bouleunite fermee de E), et de plus si n > m alors Vm−1 ⊂ Vn et

‖wn − wm‖ =1

‖en − vn‖

∥∥∥∥en − ‖en − vn‖wm︸ ︷︷ ︸∈Vm−1⊂Vn

∥∥∥∥≥ 1

‖en − vn‖d(en, Vn) = 1.

Ainsi a-t-on ‖wn − wm‖ ≥ 1 si n 6= m, ce qui veut dire que la suite (wn)n∈Nne possede pas de valeur d’adherence. Aucune sous-suite de (wn)n∈N ne peutconverger, ce qui implique que la boule unite fermee n’est pas compacte.

Remarque 2.44.

1. Dans le cas d’un espace hilbertien, le calcul est plus direct ; il suffit deconsiderer une suite (wn)n∈N orthonormee (que l’on peut obtenir par exempleen procedant a une orthonormalisation de Gram-Schmidt), et de constaterque cette suite ne peut avoir des valeurs d’adherence puisque si n 6= m

‖wn − wm‖2 = ‖wn‖2 + ‖wm‖2 − 2 Re〈wn, wm〉 = 2.

2. La preuve ne fonctionne pas dans le cas d’un Q-espace vectoriel, on a utilisele caractere complet du corps des scalaires pour deduire du fait que la suitedes coordonnees etant une suite de Cauchy, elle converge. Ceci intervientdans la preuve du caractere ferme des sous-espaces Vn de dimension fini. Letheoreme n’est pas vrai pour les Q-espaces vectoriels ; en effet, le corps desreels R est un Q-espace vectoriel de dimension infinie, pourtant la bouleunite fermee [−1, 1] pour la norme usuelle est compacte.

3. Une autre preuve du theoreme de Riesz repose sur la propriete de Borel-Lebesgue. Si la boule unite fermee est compacte alors il existe e1, . . . , en ∈ E

Page 40: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

40

tels que

B(0, 1) ⊂n⋃j=1

B

Çej,

1

2

ået dans ce cas si l’on pose F = Vect(e1, . . . , en), on a

d(x, F ) ≤ 1⇒ d(x, F ) <1

2

car d(x, F ) = ‖x− f‖ (cf. l’autre preuve de Riesz). Comme x− f ∈ B(0, 1),il existe ej tel que x− f ∈ B(ej, 1/2) et

d(x, F ) ≤ ‖x− f − ej‖ <1

2.

En utilisant alors le fait que d(λx, F ) = |λ|d(x, F ) pour tout scalaire, et eniterant, on trouve

d(x, F ) ≤ 1⇒ d(x, F ) <1

2k

et en passant a la limite, on trouve alors

d(x, F ) ≤ 1⇒ d(x, F ) = 0.

En utilisant a nouveau d(λx, F ) = |λ|d(x, F ), on s’affranchit de la conditionde gauche, et on obtient donc d(x, F ) = 0, soit x ∈ F .

Dans le meme ordre d’idee, on a le resultat suivant.

Theoreme 2.45. Un espace vectoriel norme complet de dimension infinie n’ad-met pas de base 8 denombrable.

Corollaire 2.46. Sur l’espace vectoriel des polynomes (a coefficients reels oucomplexes), il n’existe pas de norme qui rende cet espace complet.

Demonstration. Supposons qu’il existe une base (e1, e2, . . . ) denombrable de Eet que E est complet. On note

Fn = Vect(e1, . . . , en)

le sous espace vectoriel engendre par les n premiers vecteurs de la base. Lesespaces vectoriels Fn sont fermes car de dimension finie (cf. preuve du theoremede Riesz), donc on a pour tout entier n ∈ N

d(en+1, Fn) > 0

et comme dans la preuve du theoreme de Riesz, il existe fn ∈ Fn tel que

d(en+1, Fn) = ‖en+1 − fn‖.

8. Algebrique, par opposition a base hilbertienne, une notion que nous verrons dans laseconde partie du cours.

Page 41: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

41

On considere alors

x =∞∑n=0

3−nen+1 − fnd(en+1, Fn)

cette somme est bien definie car la serie est absolument convergente puisque

3−n‖en+1 − fn‖d(en+1, Fn)

≤ 3−n.

Pour tout f ∈ Fn, on a alors

x− f =3−n

d(en+1, Fn)

Çen+1 −

Çfn + 3nd(en+1, Fn)

Çf −

n−1∑k=0

3−kek+1 − fkd(ek+1, Fk)

åå︸ ︷︷ ︸

∈Fn

å+

∞∑k=n+1

3−kek+1 − fkd(ek+1, Fk)

et par l’inegalite triangulaire

‖x− f‖ ≥ 3−n

d(en+1, Fn)d(en+1, Fn)−

∞∑k=n+1

3−k = 3−n − 3−n−1 3

2=

3−n

2

ce qui permet de conclure

d(x, Fn) ≥ 3−n

2pour tout entier n ∈ N. Si (e1, e2, . . . ) etait une base de E alors il existerait ntel que x ∈ Fn et on aurait donc d(x, Fn) = 0, ce qui est en contradiction avecl’inegalite precedente.

2.2.3. Precompacite et compacite. Voyons quelle condition on peut imposer a unensemble precompact pour qu’il soit compact.

Theoreme 2.47. On peut extraire de toute suite d’un ensemble precompact unesous-suite de Cauchy.

Demonstration. Soit (xn)n∈N une suite d’un ensemble precompact A. Montronspar recurrence que l’on peut construire une suite de boules (B(ak, 2

−k))k∈N etune sous suite (xnk)k∈N telles que pour tout k ∈ N

xnk ∈k⋂j=0

B(aj, 2−j).

La sous-suite (xnk)k∈N est de Cauchy car pour tout k ≥ j

d(xnk , xnj) ≤ d(xnk , anj) + d(anj , dnj) < 2−j+1

peut etre rendu arbitrairement petit pour j grand.Procedons a la construction par recurrence. L’ensemble A peut etre recouvert

par un nombre fini de boules de rayon 1, et l’une au moins, notons la B(a0, 1)contient une infinite de termes de (xn)n∈N, en particulier on peut choisir xn0 ∈

Page 42: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

42

B(a0, 1). Supposons que l’on ait construit an0 , . . . , ank et xn0 , . . . , xnk de telle sorteque ∩kj=0B(aj, 2

−j) contienne une infinite de termes de (xn)n∈N et

xnk ∈k⋂j=0

B(aj, 2−j).

Comme A ∩ ∩kj=0B(aj, 2−j) peut etre recouvert par un nombre fini de boules de

rayon 2−k−1, l’une au moins, que l’on note B(ak+1, 2−k−1) contient une infinite de

termes de (xn)n∈N, et donc

#

®n ∈ N : xn ∈

k+1⋂j=0

B(aj, 2−j)

´=∞

et il existe xnk+1∈ ∩k+1

j=0B(aj, 2−j).

Corollaire 2.48. Un ensemble precompact et complet verifie la propriete deBolzano-Weierstrass, donc est compact.

Theoreme 2.49. Un ensemble est compact si et seulement s’il est precompactet complet.

Demonstration. Il suffit de montrer que si A est compact alors il est precompactet complet. Il est clair que (A, d) est complet car par la propriete de Bolzano-Weierstrass, une suite de Cauchy admet une valeur d’adherence et converge donc.En outre, soit ε > 0, supposons que A ne peut etre recouvert par un nombre finide boules de rayon ε, alors on peut construire par recurrence une suite (xn)n∈Nde A telle que

∀n,m ∈ N d(xn, xm) ≥ ε.

Une telle suite ne possede pas de valeurs d’adherence (car aucune suite extraiten’est de Cauchy) et viole la propriete de Bolzano-Weierstrass. Si l’on a construitles termes x0, . . . , xn de la suite, il suffit d’observer que

A 6⊆n⋃j=0

B(xj, ε)

et qu’il existe donc xn+1 ∈ A tel que

d(xn+1, xj) ≥ ε pour j = 0, . . . , n.

En conclusion, l’ensemble A est precompact.

Corollaire 2.50. Soit (E, d) un espace metrique complet et soit A ⊂ E unensemble precompact, alors A est compact.

Demonstration. L’adherence d’un ensemble precompact reste precompact car pourtout ε > 0, il existe x1, . . . , xm tels que

A ⊆m⋃j=1

B

Çxj,

ε

2

å

Page 43: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

43

et ainsi

A ⊆m⋃j=1

B

Çxj,

ε

2

å⊆

m⋃j=1

B′Çxj,

ε

2

å⊆

m⋃j=1

B(xj, ε).

Par consequent, (A, d) est complet (puisque (E, d) est complet) et precompactdonc compact.

2.3. Espaces connexes. On veut a present determiner de combien de morceauxest constitue un ensemble.

Definition 2.51. Un espace metrique (E, d) est connexe s’il ne peut se decomposeren la reunion de deux ouverts non vides disjoints. Autrement dit E est connexesi lorsque

E = U ∪ V, U ∩ V = ∅ou U et V sont des ouverts de (E, d), on a forcement U = ∅ ou V = ∅. Unepartie A de E est connexe si l’espace (A, d) est connexe. Cela signifie que A estconnexe si

A ⊆ U ∪ V, U ∩ V ∩ A = ∅ou U et V sont des ouverts de (E, d) entraıne U ∩ A = ∅ ou V ∩ A = ∅.

Exemple 2.52. Un intervalle de R est un ensemble connexe. Supposons queI ⊆ U ∪ V avec U, V ouverts disjoints de I, si I ∩ U 6= ∅ et I ∩ V 6= ∅ alors ilexiste u0 ∈ I ∩ U et v0 ∈ I ∩ V . Comme (u0 + v0)/2 ∈ I on a

— soit (u0 + v0)/2 ∈ U et dans ce cas on note u1 = (u0 + v0)/2 et v1 = v0

— soit (u0 + v0)/2 ∈ V et dans ce cas on note v1 = (u0 + v0)/2 et u1 = u0.On continue ce processus par induction et on construit ainsi deux suites adjacentesde l’intervalle [u0, v0] qui convergent vers ` ∈ [u0, v0] ⊆ I. On a alors ` ∈ U ∩ V , orU ⊆ I ∩V c et V ⊆ I ∩U c donc ` ∈ U c ∩V c ∩ I ce qui est absurde car I ⊆ U ∩V .

Reciproquement, tout ensemble connexe de R est un intervalle. Soit I un en-semble connexe de R et soit a, b ∈ I, il s’agit de montrer que tout x compris entrea et b est dans I. Supposons pour fixer les idees que a ≤ x ≤ b ; si x /∈ I alors

I ⊂ ]−∞, x[ ∪ ]x,∞[

et donc on peut decomposer I en deux ouverts (de I) disjoints

I = U ∪ V, U = ]−∞, x[ ∩ I, V = ]x,∞[ ∩ I

avec a ∈ U et b ∈ V . Ce qui est en contradiction avec le fait que I est connexe.

Exemple 2.53.

1. x est toujours connexe dans un espace metrique (E, d).

2. Q n’est pas connexe car Q ⊆ó−∞,

√2î∪ó√

2,+∞î

avec Q∩ó−∞,

√2î6= ∅.

3. A = z ∈ C : |z| 6= 1 n’est pas connexe car A ⊆ z ∈ C : |z| < 1 ∪ z ∈C : |z| > 1.

Page 44: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

44

Proposition 2.54. Soit (E, d) un espace metrique, les trois assertions suivantessont equivalentes

(i) E est connexe,

(ii) E ne peut s’ecrire comme la reunion de deux fermes disjoints non vides,

(iii) les seuls ensembles a la fois ouverts et fermes sont le vide et E.

Demonstration. Supposons E connexe et E = F ∪ G avec F ∩ G = ∅ alorsF c ∪ Gc = E et F c ∩ Gc = ∅ par passage au complementaire. Comme Ec et F c

sont ouverts on en deduit que l’un ou l’autre doit etre vide, i.e. que F ou G estvide.

Soit E un espace qui ne peut s’ecrire comme la reunion de deux fermes disjointsnon vides, et soit A un ensemble a la fois ouvert et ferme alors

E = A ∩ Ac, A ∩ Ac = ∅

et donc A = E ou A = ∅ puisque A et Ac sont fermes.Soit E un espace metrique ou les seuls ensembles a la fois ouverts et fermes

sont le vide et E, supposons que

E = U ∪ V, U ∩ V = ∅

ou U et V sont ouverts. Alors U est a la fois ouvert et ferme (car E \ U = V estouvert) donc est soit vide, soit egal a E. Ainsi E est connexe.

Theoreme 2.55. Un espace metrique (E, d) est connexe si et seulement si touteapplication f : E → 0, 1 continue entre (E, d) et 0, 1 muni de la metriquediscrete est forcement constante.

Remarque 2.56. Les ouverts de 0, 1 muni de la distance discrete sont

∅, 0 = B(0, 1), 1 = B(1, 1), 0, 1.

Demonstration. Supposons E connexe alors

E = f−1(0) ∪ f−1(1)

et les deux ensembles f−1(0), f−1(1) sont ouverts (car 0 et 1 sont ou-verts pour la metrique discrete) et disjoints. On en deduit que f−1(0) = ∅ ouf−1(1) = ∅ et donc que f est constante.

Reciproquement supposons que toute application f : E → 0, 1 continue estforcement constante. Alors si

E = U ∪ V, U ∩ V = ∅

on considere l’application f : E → 0, 1

f(x) =

0 si x ∈ U1 si x ∈ V

.

Page 45: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

45

Cette application est continue car

f−1(0, 1) = E, f−1(0) = U, f−1(1) = V, f−1(∅) = ∅et donc l’image reciproque de tout ouvert est ouvert. Ainsi f est constante, si fest egale a 0 alors V = ∅ et sinon U = ∅.

Proposition 2.57. Soit (Aj)j∈J une famille d’ensembles connexes d’un espacemetrique (E, d) telle que

Ai ∩ Aj 6= ∅, ∀i, j ∈ Jalors A =

⋃j∈J Aj est connexe.

Demonstration. Soit f : A→ 0, 1 une application continue alors f |Ai est conti-nue, donc constante, mais comme Ai ∩ Aj 6= ∅ on a

f |Ai = f |Ajet ainsi f est constante sur A.

Proposition 2.58. Soit A un ensemble connexe et soit A ⊆ B ⊆ A alors B estconnexe.

Demonstration. Supposons que B ⊆ U ∪ V ou U et V sont des ouverts de (E, d)tels que U ∩ V ∩ B = ∅, alors comme A ⊆ B est connexe, on a U ∩ A = ∅ ouV ∩ A = ∅. Supposons pour fixer les idees que A ⊆ E \ U , comme E \ U estferme, on a donc en passant aux adherences A ⊆ E \ U et donc B ∩ U = ∅.

Proposition 2.59. L’image d’un espace connexe par une application continueest connexe.

Demonstration. Soit f : E → F une application continue entre deux espacesmetriques. Supposons que f(E) = U ∪ V ou U, V sont deux ouverts disjoints deF , alors on a E = f−1(U)∪f−1(V ) avec f−1(U), f−1(V ) deux ouverts disjoints deE. Comme f est connexe on a f−1(U) = ∅ et donc U = ∅ ou bien f−1(V ) = ∅et donc V = ∅.

Corollaire 2.60 (Theoreme des valeurs intermediaires). Soit f : I → R unefonction continues, soit a, b ∈ I et soit x ∈ R tel que f(a) ≤ x ≤ f(b) alors ilexiste c ∈ I tel que x = f(c).

Demonstration. Supposons pour fixer les idees que a < b alors f([a, b]) est unintervalle contenant f(a) et f(b), donc il contient x, donc il existe c ∈ [a, b] telque x = f(c).

Definition 2.61. Un espace metrique (E, d) est dit connexe par arcs si pour toutcouple de points x, y de E, il existe une fonction γ : [0, 1]→ E continue telle que

γ(0) = x, γ(1) = y.

Proposition 2.62. Un espace connexe par arcs est connexe.

Page 46: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

46

Remarque 2.63. La reciproque n’est pas vraie (cf. travaux diriges).

Demonstration. Supposons que E ne soit pas connexe. Alors E = U ∪ V avecU ∩ V = ∅ et U 6= ∅. Il existe donc x ∈ U et y ∈ V . On considere

I =¶t ∈ [0, 1] : γ(t) ∈ U

©= γ−1(U), J =

¶t ∈ [0, 1] : γ(t) ∈ V

©= γ−1(V )

ce sont deux ouverts disjoints non vides (car 0 ∈ I et 1 ∈ J) tels que [0, 1] = I∪J .Ceci contredit le fait que [0, 1] est connexe.

Corollaire 2.64. Un ensemble convexe dans un espace vectoriel norme est connexepar arcs.

Exemple 2.65. Les boules d’un espace vectoriel norme sont convexes doncconnexes par arc donc connexes.

Definition 2.66. Dans un espace metrique (E, d) la reunion de tous les en-sembles connexes contenant x

C(x) =⋃

A connexe 3xA

est un ensemble connexe 9 contenant x. On dit que c’est la composante connexede x dans E. C’est le plus grand ensemble connexe contenant x.

Remarque 2.67. L’espace E est connexe si et seulement si C(x) = E pour toutx ∈ E.

Proposition 2.68. Dans un espace metrique,

(i) pour tout x ∈ E, la composante connexe C(x) de x est fermee,

(ii) la famille des composantes connexes de E forment une partition de E.

Demonstration. Comme C(x) est connexe par la proposition 2.58, on a C(x) ⊆C(x) et donc C(x) est fermee. En outre, si on considere la relation d’equivalence appartenir a la meme composante connexe on a

E =⋃

x∈E/∼C(x)

et si C(x)∩C(y) 6= ∅ alors C(x) = C(y) car C(x)∪C(y) est un ensemble connexepar la proposition 2.57 contenant x et y donc C(y) ⊆ C(x) ∪ C(y) ⊆ C(x) etC(x) ⊆ C(x) ∪ C(y) ⊆ C(y), ce qui implique que x et y appartiennt a la memecomposante connexe et donc x ∼ y soit x = y.

Lemme 2.69. Dans un espace metrique (E, d), un ensemble connexe non vide ala fois ouvert et ferme est une composante connexe.

9. D’apres la proposition 2.57.

Page 47: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

47

Demonstration. Soit C un ensemble connexe ferme et ouvert non vide : soit x ∈ C,montrons que C est la composante connexe C(x) de x. Comme C est connexe etque C(x) est le plus grand connexe contenant x, on a

C ⊂ C(x).

Supposons qu’il existe y ∈ C(x) \ C alors on a

C(x) = C ∪ C(x) \ C︸ ︷︷ ︸reunion de 2 fermes

avec C(x) ferme et C(x) \ C = C(x) ∩ Cc ferme car C est ouvert, disjointset non vides, ce qui contredit la connexite de C(x). Ainsi C(x) \ C est vide etC(x) = C.

3. Quelques exemples d’espaces metriques

3.1. Distances geodesiques.

3.1.1. Distance sur l’hypersphere. On se place dans le cadre de l’espace euclidienRn de dimension n ≥ 2 que l’on munit du produit scalaire canonique et de lanorme euclidienne associee

〈x, y〉 =n∑j=1

xjyj, |x| =»〈x, x, 〉 =

Ç n∑j=1

x2j

å 12

.

On considere alors l’hypersphere unite (de centre l’origine et de rayon 1)

Sn−1 =¶x ∈ Rn : |x| = 1

©que l’on munit de la distance suivante

d(x, y) = arccos〈x, y〉.

Rappelons que la fonction cos est une bijection (decroissante) de l’ensemble[0, π] vers [−1, 1] et que arccos : [−1, 1]→ [0, π] est sa reciproque. On a donc

0 ≤ d(x, y) ≤ π.

Verifions d’abord que l’application d est bien definie puisque 〈x, y〉 ∈ [−1, 1]lorsque x, y ∈ Sn−1 par l’inegalite de Cauchy-Schwarz.

Lemme 3.1 (Inegalite de Cauchy-Schwarz). Pour tout x, y ∈ Sn−1, on a

|〈x, y〉| ≤ 1

et en outre il n’y a egalite que lorsque y = x ou y = −x.

Demonstration. En sommant les inegalites

xjyj ≤1

2x2j +

1

2y2j

Page 48: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

48

on tire

〈x, y〉 ≤n∑j=1

xjyj ≤1

2

n∑j=1

x2j +

1

2

n∑j=1

y2j ≤ 1

et en changeant x en −x, on obtient l’autre inegalite. Si 〈x, y〉 = 1 alors toutes lesinegalites precedentes sont des ’egalites, et donc x = y tandis que si 〈x, y〉 = −1alors avec le changement x en −x, on obtient x = −y.

Pour verifier que d est bien une distance, nous aurons besoin du resultat suivant,permettant de parametrer les points de la sphere.

Lemme 3.2. Soit n ≥ 2 et soit z ∈ Sn−1, tout x ∈ Sn−1 se decompose sous laforme

x = (cosα)z + (sinα)ξ

ou α = d(x, z) ∈ [0, π] et ξ ∈ Sn−1 ∩ z⊥.

Remarque 3.3. Lorsque z, ξ ∈ Sn−1 avec ξ ∈ z⊥ sont fixes, la courbe

γ : [0, π]→ Sn−1

α 7→ (cosα)z + (sinα)ξ

est le demi-cercle dans le plan Vect(z, ξ) partant du point z (avec le vecteur ξ pourtangente) et arrivant au point antipodal −z (avec le vecteur −ξ pour tangente).

Page 49: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

49

Demonstration. On complete v1 = z en une base orthonormee B = (v1, v2, . . . , vn)de Rn, et on decompose x dans cette base

x =n∑j=1

λjvj, λj ∈ R.

Comme B est une base orthonormee, on a

λ21 +

n∑j=2

λ2j = |x|2 = 1

et en outreα = d(x, z) = arccos〈x, z〉 = arccosλ1

de sorte que

x = (cosα)z +n∑j=2

λjvj

avec ∣∣∣∣∣ n∑j=2

λjvj

∣∣∣∣∣2

=n∑j=2

λ2j = 1− cos2 α = sin2 α.

Comme α ∈ [0, π], on a sinα ≥ 0 et ainsi∣∣∣∣∣ n∑j=2

λjvj

∣∣∣∣∣ = sinα.

Si α = 0, on peut choisir ξ = v2, si α 6= 0 alors on peut choisir

ξ =1

sinα

n∑j=2

λjvj ∈ Sn−1 ∩ z⊥

puisque vj ⊥ z pour tout j ≥ 2.

Avec l’aide de ce lemme, on peut maintenant montrer que d est une distance.Cette application est clairement symetrique et si d(x, y) = 0 alors 〈x, y〉 = 1et le cas d’egalite dans Cauchy-Schwarz implique y = x. Pour ce qui est del’inegalite triangulaire, soient x, y, z ∈ Sn−1, on decompose x, y en utilisant lelemme precedent

x = (cosα)z + (sinα)ξ

y = (cos β)z + (sin β)η

avec α = d(x, z) ∈ [0, π], β = d(y, z) ∈ [0, π] et ξ, η ∈ Sn−1 ∩ z⊥. Rappelons quel’on a

sinα, sin β ∈ [0, 1], 〈ξ, η〉 ∈ [−1, 1] par Cauchy-Schwarz

ainsi le calcul du produit scalaire

〈x, y〉 = cosα cos β + sinα sin β︸ ︷︷ ︸≥0

〈ξ, η〉︸ ︷︷ ︸∈[−1,1]

Page 50: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

50

donne la minoration

〈x, y〉 ≥ cosα cos β − sinα sin β = cos(α + β).

Or la fonction arccos est decroissante et comme— si α + β ∈ [0, π] alors arccos(cos(α + β)) = α + β,— et si α + β ∈ [π, 2π] alors arccos(cos(α + β)) ≤ π ≤ α + β

on en deduit

d(x, y) ≤ arccos(cos(α + β)) ≤ α + β = d(x, z) + d(y, z)

ce qui montre l’inegalite triangulaire.

Remarque 3.4. Lorsque n = 3, la boule de centre x et de rayon r ∈]0, π]

B(x, r) =¶x ∈ Sn−1 : d(x, y) < r

©est la calotte de la sphere ayant pour pole nord le point z delimite par le meridiende colatitude α (ou de latitude α−π/2). Par exemple, la boule de centre B(x, π/2)est l’hemisphere nord (sans l’equateur pour la boule ouverte).

3.1.2. Distance sur l’hyperboloıde. On se place dans le cadre de l’espace euclidienRn de dimension n ≥ 2 et on considere la forme quadratique q suivante et sa formebilineaire b associee

q(x) = x21 −

n∑j=2

x2j , b(x, y) = x1y1 −

n∑j=2

xjyj.

Page 51: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

51

On note

B =

à1 0 . . . 00 −1 . . . 0...

.... . .

...0 0 . . . −1

í=

Ç1 00 −In−1

åla matrice associee a la forme bilineaire B. Notons que

(Bz)⊥ =¶x ∈ Rn : b(x, z) = 0

©.

L’hyperboloıde

Hn−1 =¶x ∈ Rn : q(x) = 1

©= Hn−1

+ ∪Hn−1−

se scinde en deux nappes

Hn−1± =

¶x ∈ Rn : q(x) = 1, ±x1 ≥ 1

©.

On munit la nappe superieure Hn−1+ de la distance suivante

d(x, y) = arcosh b(x, y).

Figure 2. Hyperboloıde a deux nappes

La fonction cosinus hyperbolique

cosh r =er + e−r

2

Page 52: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

52

est une bijection (croissante) de l’ensemble [0,+∞[ vers [1,+∞] et sa reciproqueest la fonction

arcosh s = logÄs+√s2 − 1

ä, s ≥ 1.

Verifions d’abord que l’application d est bien definie puisque b(x, y) ∈ [1,+∞[lorsque x, y ∈ Hn−1

+ .

Lemme 3.5. Pour tout x, y ∈ Hn−1+ , on a

b(x, y) ≥ 1

et en outre il n’y a egalite que lorsque y = x.

Demonstration. Si x, y ∈ Hn−1+ alors

n∑j=2

x2j = x2

1 − 1,n∑j=2

y2j = y2

1 − 1

et par l’inegalite de Cauchy-Schwarz

b(x, y) ≥ x1y1 −Ç n∑j=2

x2j

å 12Ç n∑j=2

y2j

å 12

= x1y1 −»x2

1 − 1»y2

1 − 1.

On pose t = arcoshx1 et s = arcosh y1 et on a

x1y1 −»x2

1 − 1»y2

1 − 1 = cosh t cosh s− sinh t sinh s = cosh(t− s) ≥ 1

ce qui prouve b(x, y) ≥ 1.En outre, si b(x, y) = 1 alors toutes les inegalites presentees sont des egalites :

en particulier cosh(t− s) = 1 donc t = s soit x1 = y1 et comme il y a egalite dansCauchy-Schwarz, (y2, . . . , yn) = λ(x2, . . . , xn) avec λ ∈ R. Comme on a

1 = b(x, y) = x21 − λ

n∑j=2

x2j = x2

1 − λ(x21 − 1)

on en deduit soit x1 = y1 = 1 et donc (y2, . . . , yn) = (x2, . . . , xn) = 0, soitλ = 1, et donc (y2, . . . , yn) = (x2, . . . , xn). Dans tous les cas, si b(x, y) = 1 alorsx = y.

Pour verifier que d est bien une distance, nous aurons besoin du resultat suivant,permettant de parametrer les points de l’hyperboloıde superieur. On considereegalement pour cela l’hyperboloıde (a une nappe)

Kn−1 =¶x ∈ Rn : q(x) = −1

©.

Lemme 3.6. Soit n ≥ 2 et soit z ∈ Hn−1+ , tout x ∈ Hn−1

+ se decompose sous laforme

x = (coshα)z + (sinhα)ξ

ou α = d(x, z) et ξ ∈ Kn−1 ∩ (Bz)⊥.

Page 53: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

53

Figure 3. Hyperboloıde a une nappe

Remarque 3.7. Lorsque z ∈ Hn−1+ et ξ ∈ Kn−1 ∩ (Bz)⊥ sont fixes, la courbe

γz,ξ : R→ Hn−1+

α 7→ (coshα)z + (sinhα)ξ

est une hyperbole dans le plan Vect(z, ξ) passant par le point z avec le vecteur ξpour tangente en α = 0.

Figure 4. Hyperbole γz,ξ sur l’hyperboloıde a deux nappes

Page 54: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

54

Demonstration. Supposons α > 0, et considerons le vecteur

ξ =1

sinhα(x− b(x, z)z).

On a

b(ξ, z) =1

sinhα(b(x, z)− b(x, z)q(z)) = 0

et en outre

q(ξ) =1

sinh2 α

Äq(x) + b(x, z)2q(z)− 2b(x, z)2

ä=

1

sinh2 α

Ä1− b(x, z)2︸ ︷︷ ︸

1−cosh2 α

ä= −1.

Si α = 0, n’importe quel choix de ξ est valable.

On peut maintenant montrer que d est une distance. Cette application estclairement symetrique car b est une forme bilineaire symetrique et si d(x, y) = 0alors b(x, y) = 1 et le cas d’egalite dans le lemme 3.5 implique x = y. Pour cequi est de l’inegalite triangulaire, soient x, y, z ∈ Hn−1

+ , on decompose x, y enutilisant le lemme precedent

x = (coshα)z + (sinhα)ξ

y = (cosh β)z + (sinh β)η

avec α = d(x, z), β = d(y, z) et ξ, η ∈ Kn−1∩ (Bz)⊥. On a alors besoin du lemmesuivant :

Lemme 3.8. Soit z ∈ Hn−1+ , pour tout ξ, η ∈ Kn−1 ∩ (Bz)⊥, on a

|b(ξ, η)| ≤ 1.

Demonstration. On note t = arcosh z1, comme∑nj=2 z

2j = z2

1 − 1 = sinh2 t, onpeut ecrire z sous la forme

z = (cosh t, sinh t ω′) avec ω′ ∈ Sn−2.

On complete alors les vecteurs

v1 = (1, 0, . . . , 0), v2 = (0, ω′)

en une base orthonormee B = (v1, v2, . . . , vn) et si on decompose ξ ∈ Kn−1∩(Bz)⊥

dans la base B, on obtient

ξ = λ sinh t v1 + λ cosh t v2 +n∑j=3

λjvj, λ2 +

n∑j=3

λ2j = 1

De meme a-t-on pour η ∈ Kn−1 ∩ (Bz)⊥

η = µ sinh t v1 + µ cosh t v2 +n∑j=3

µjvj, µ2 +

n∑j=3

µ2j = 1

Page 55: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

55

et ainsi

b(ξ, η) = λµ(sinh2 t− cosh2 t︸ ︷︷ ︸=−1

)−n∑j=3

λjµj = −Çλµ+

n∑j=3

λjµj

å.

L’inegalite de Cauchy-Schwarz donne alors

|b(ξ, η)| ≤Çλ2 +

n∑j=3

λ2j

å 12ǵ2 +

n∑j=3

µ2j

å 12

= 1

ce qui demontre l’inegalite annoncee.

Grace a ce lemme, le calcul du produit bilineaire

b(x, y) = coshα cosh β + sinhα sinh β︸ ︷︷ ︸≥0

b(ξ, η)︸ ︷︷ ︸≤1

donne la majoration

b(x, y) ≤ coshα cosh β + sinhα sinh β = cosh(α + β)

et comme la reciproque du cosinus hyperbolique est croissante,on en deduit

d(x, y) ≤ α + β = d(x, z) + d(y, z)

ce qui montre l’inegalite triangulaire.

3.2. Distance de Hausdorff. Soit (E, d) un espace metrique, on considereK(E) l’ensemble des compacts non vides de (E, d). Rappelons que la distanced’un point x ∈ E a un ensemble A est donnee par

d(x,A) = infa∈A

d(x, a)

et que

d(x,A) = 0 ⇐⇒ x ∈ A.Lorsque A ⊂ E, on utilise la notation suivante

Aε =¶x ∈ E : d(x,A) < ε

©pour designer un ε-voisinage de A. Cet ensemble est ouvert car c’est l’imagereciproque de l’intervalle ouvert ]− ε, ε[ par la fonction continue x 7→ d(x,A).

Lemme 3.9. L’application h : K(E)×K(E)→ R+ definie par

h(A,B) = max

Çsupa∈A

d(a,B), supb∈B

d(b, A)

ålorsque A,B ∈ K(E) est une distance. Elle est appelee distance de Haudorff.

Page 56: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

56

Demonstration. Cette application est clairement symetrique et il evident queh(A,A) = 0. De plus si h(A,B) = 0 alors on a

supa∈A

d(a,B) = 0⇒ A ⊂ B

et de memesupb∈B

d(b, A) = 0⇒ B ⊂ A

soit A = B. Il reste a montrer l’inegalite triangulaire. On a pour tout (a, b, c) ∈A×B × C

d(a, b) ≤ d(a, c) + d(c, b)

et en passant a la borne inferieure en B

d(a,B) ≤ d(a, c) + d(c, B)

on en tire pour tout a ∈ A et tout c ∈ Cd(a,B) ≤ d(a, c) + h(C,B).

On passe alors a la borne inferieure en C

d(a,B) ≤ d(a, C) + h(C,B)

soit pour tout a ∈ Ad(a,B) ≤ h(A,C) + h(C,B).

Finalement, on asupa∈A

d(a,B) ≤ h(A,C) + h(C,B)

et en intervertissant le role de A et B, on en deduit l’inegalite triangulaire.

Lemme 3.10. Soient A1, . . . , Am et B1, . . . , Bm des compacts non vides de E,alors on a

h

Ç m⋃j=1

Aj,m⋃j=1

Bj

å= max

1≤j≤mh(Aj, Bj).

Demonstration. Commencons par le cas m = 2 ; on a

d(a,B1 ∪B2) ≤ infb∈B1∪B2

d(a, b) = minÄd(a,B1), d(a,B2)

äet donc

d(a,B1 ∪B2) ≤

h(A1, B1) si a ∈ A1

h(A2, B2) si a ∈ A2

ce qui permet d’affirmer

supa∈A1∪A2

d(a,B1 ∪B2) ≤ maxÄh(A1, B1), h(A2, B2)

ä.

En intervertissant les roles des Aj et des Bj, on obtient

h(A1 ∪ A2, B1 ∪B2) ≤ maxÄh(A1, B1), h(A2, B2)

ä.

Une recurrence sur m ≥ 2 permet d’obtenir le cas general.

Page 57: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

57

Lemme 3.11. Soit ε > 0 et soient A,B ∈ K(E) alors h(A,B) < ε equivaut a

A ⊆ Bε et B ⊆ Aε.

Demonstration. L’inegalite h(A,B) < ε equivaut a

d(a,B) < ε ∀a ∈ A et d(b, A) < ε ∀b ∈ B

c’est -a-dire

a ∈ Bε ∀a ∈ A et b ∈ Aε ∀b ∈ B.Ceci termine la preuve.

Lemme 3.12. Une suite decroissante de compacts non vides a une intersectionnon vide.

Demonstration. Soit (An)n∈N une suite decroissante de compacts, si leur inter-section est vide ⋂

n∈NAn = ∅

alors on a

A0 ⊆∞⋃n=1

Acn

et par la propriete de Borel-Lebesgue, il existe des entiers n1, . . . , nm tels que

A0 ⊆m⋃k=1

Acnk

ce qui implique

m⋂k=1

Ank = AM = ∅, M = max(n1, . . . , nm)

que l’un des compacts AM est vide.

3.2.1. Completude de la distance de Hausdorff.

Theoreme 3.13. L’espace metrique (K(E), h) est complet.

Pour preparer la preuve de ce resultat, nous aurons besoin de trois lemmes.

Lemme 3.14. Soit (An)n∈N une suite de Cauchy de (K(E), h), alors pour toutn ∈ N

∞⋃k=n

Ak

est precompact.

Page 58: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

58

Demonstration. Soit ε > 0, il existe N ∈ N tel que pour tout entier k ≥ N

h(Ak, AN) <ε

2

soit

Ak ⊂ (AN)ε2 .

Comme AN est compact donc precompact, il existe x1, . . . , xm ∈ AN tels que

AN ⊆m⋃j=1

B

Çxj,

ε

2

åce qui implique

Ak ⊂ (AN)ε2 ⊆

m⋃j=1

B(xj, ε)

pour tout k ≥ N . Ainsi ∪∞k=NAk est precompact. Si n ≤ N − 1 alors ∪N−1k=nAk est

compact comme reunion fini de compacts, donc precompact et donc

∞⋃k=n

Ak =N−1⋃k=n

Ak ∪∞⋃k=N

Ak

est precompact.

Lemme 3.15. Soit (An)n∈N une suite de Cauchy de (K(E), h), alors la suite(Bn)n∈N definie par

Bn =∞⋃k=n

Ak

est une suite decroissante de K(E) telle que limh(An, Bn) = 0.

Demonstration. D’apres le lemme precedent, ∪∞k=nAk est precompact donc Bn estcompact. La suite (Bn)n∈N est donc une suite decroissante de K(E) et il s’agit demontrer limh(An, Bn) = 0. Soit ε > 0, comme (An)n∈N est une suite de Cauchy,il existe N ∈ N tel que pour tous entiers k ≥ n ≥ N , on ait

h(Ak, An) < ε

ce qui implique que pour tout k ≥ n et tout x ∈ Akd(x,An) ≤ h(Ak, An) < ε.

On en deduit

supx∈∪∞

k=nAk

d(x,An) < ε

et ainsi 10

supx∈Bn

d(x,An) = supx∈∪∞

k=nAk

d(x,An) < ε

10. On a : supx∈V d(x, F ) = supx∈V d(x, F ) par passage a la limite dans les inegalites larges.

Page 59: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

59

pour tout entier n ≥ N . Comme de plus

supx∈An

d(x,Bn) = 0 car An ⊂ Bn

on obtient

h(An, Bn) < ε

pour tout entier n ≥ N .

Lemme 3.16. Soit (Bn)n∈N une suite decroissante de (K(E), h), alors cette suiteconverge et on a

limBn =⋂n∈N

Bn.

Demonstration. D’apres le lemme 3.12,

A =⋂n∈N

Bn

est un compact non vide de E. Montrons que pour tout ε > 0, il existe N ∈ Ntel que BN ⊂ Aε. Ceci suffit a montrer que A = limBn puisque la suite (Bn)n∈Netant decroissante, on a alors

Bn ⊆ BN ⊆ Aε, ∀n ≥ N

et ainsi puisque A ⊂ Bn

h(A,Bn) < ε ∀n ≥ N.

Pour cela, procedons par l’absurde et supposons qu’il existe ε > 0 tel que

Cn = Bn ∩ (Aε)c 6= ∅pour tout entier n. La suite (Cn)n∈N est une suite decroissante de compacts nonvides et de plus ⋂

n∈NCn = A ∩ (Aε)c = ∅.

Ceci est en contradiction avec le lemme 3.12.

Demonstration du theoreme 3.13. Soit (An)n∈N une suite de Cauchy de (K(E), h),d’apres le lemme 3.15, la suite (Bn)n∈N definie par

Bn =∞⋃k=n

Ak

est une suite decroissante de (K(E), h) telle que limh(An, Bn) = 0. D’apres lelemme 3.16, l’ensemble

A =⋂n∈N

Bn =⋂n∈N

∞⋃k=n

Ak

est un compact non vide de E et on a A = limBn. On en deduit A = limAnpuisque limh(An, Bn) = 0, ainsi (K(E), h) est un espace complet.

Page 60: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

60

3.2.2. Compacite.

Theoreme 3.17. Si (E, d) est un espace metrique compact alors (K(E), h) estun espace metrique compact.

Remarque 3.18. Si E n’est pas compact alors (K(E), h) peut ne pas etre com-pact. En effet si E est un espace de Hilbert separable, si S est la sphere unite deE et si (en)n∈N est une base hilbertienne alors la suite (An)n∈N donnee par

An = Vect(e0, . . . , en) ∩ S

est une suite (croissante) de compacts non vides (chacun des An est ferme borned’un espace vectoriel norme de dimension finie, donc verifie la propriete de Bolzano-Weierstrass). Cette suite n’admet pourtant pas de valeur d’adherence car pourtous entiers m ≥ n+ 1

h(An, Am) = supx∈Am

d(x,An) = supx∈Am

Çm−1∑k=n

|〈x, ek〉|2å 1

2

= 1.

Demonstration du theoreme 3.17. Montrons que K(E) est precompact. Commeil est complet, cela suffit a demontrer que K(E) est compact. Soit ε > 0, commeE est compact donc precompact, il existe x1, . . . , xm des points de E tels que

E =m⋃j=1

B(xj, ε).

L’ensemble des parties non vides de S = x1, . . . , xm a 2m− 1 elements que l’onnote A1, . . . , A2m−1, ce sont des compacts de E car des ensembles de cardinal fini(donc des fermes donc des compacts dans E) et montrons que

K(E) =2m−1⋃j=1

BK(E)(Aj, ε).

Soit A ∈ K(E), on considere l’ensemble

Ak =¶xj ∈ S : d(xj, A) < ε

©on a par definition

Ak ⊂ Aε

et comme

A ⊆⋃

xj∈AkBE(xj, ε)︸ ︷︷ ︸=Aε

k

∪⋃

xj∈S\Ak

BE(xj, ε)︸ ︷︷ ︸⊂E\A

on en deduit A ⊂ Aεk. Ainsi, on a

h(Ak, A) < ε

soit A ∈ BK(E)(Ak, ε).

Page 61: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

61

3.2.3. Systeme de fonctions iterees.

Definition 3.19. Soient fi : E → E des application θi-lipschitziennes avec θi ∈[0, 1[ pour i = 1, . . . , d, l’application de Hutchinson f : K(E)→ K(E) associee acette suite d’applications contractantes est donnee par

f(A) =⋃i∈Ifi(A), A ∈ K(E).

Theoreme 3.20. Soient f1, . . . , fd des applications θi-lipschitziennes avec θi ∈[0, 1[, alors l’application de Hutchinson f est θ-lipschiztienne avec

θ = max(θ1, . . . , θd) ∈ [0, 1[.

Demonstration. En appliquant le lemme 3.10, on a

h(f(A), f(B)) ≤ max1≤i≤d

hÄfi(A), fi(B)

ä.

Comme fi est θi-lipschitzienne, on a

d(fi(a), fi(b)) ≤ θi d(a, b)

pour tout a ∈ A et tout b ∈ B. En passant a la borne inferieure en B, on endeduit

d(fi(a), fi(B)) ≤ θi d(a,B)

pour tout a ∈ A et en passant a la borne superieure en A, on en deduit

supa∈A

d(fi(a), fi(B)) ≤ θi supa∈A

d(a,B).

En intervertissant les roles de A et B, et en prenant le maximum, on en tire

hÄfi(A), fi(B)) ≤ θi h(A,B).

Finalement, on a

h(f(A), f(B)) ≤ max1≤i≤d

hÄfi(A), fi(B)

ä≤ max

1≤i≤dθi h(A,B)

ce qui prouve que l’application de Hutchinson est θ-lipschitzienne avec θ =max(θ1, . . . , θd).

Corollaire 3.21. Soient f1, . . . , fd des applications θi-lipschitziennes avec θi ∈[0, 1[, il existe un unique compact Af ∈ K(E) point fixe de l’application de Hut-chinson f

Af =d⋃i=1

fi(Af ).

Ce point fixe est obtenu par iteration

An = fn(A0), A0 ∈ K(E).

Dans ce contexte, la famille (f1, . . . , fd) est appelee un systeme de fonctionsiterees.

Page 62: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

62

Exemple 3.22. On choisit E = R2 muni de la distance euclidienne. Soit A0 letriangle equilateral de sommets a = (0, 1) ,b = (

√3/√

2) et c =√

2). Soit f1, f2

et f3 les homothetie de rapport 1/3 et de centres respectifs a, b et c

f1(x) = a+1

3(x− a), f2(x) = b+

1

3(x− b) f3(x) = c+

1

3(x− c).

Figure 5. Premieres iterees A0, A1, A2, A3, A4 (source Wikipedia :https://fr.wikipedia.org/wiki/Triangle_de_Sierpiski)

A1 = f1(A0) ∪ f2(A0) ∪ f3(A0)

A2 = f1(A1) ∪ f2(A1) ∪ f3(A1)

A3 = f1(A2) ∪ f2(A2) ∪ f3(A2)

Le point fixe Af est le triangle de Sierpinski.

Figure 6. Triangle de Sierpinski (source Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Triangle_de_Sierpiski)

3.3. Theoreme de plongement de Kuratowski. Ce dernier paragraphe sortde la litanie precedente d’exemples particuliers pour montrer que tout espacemetrique peut etre vu comme sous-ensemble ferme d’un espace de Banach (aisometrie pres). Ainsi un espace metrique est toujours un sous-truc d’un espacede Banach.

Theoreme 3.23 (Kuratowski). Tout espace metrique est isometrique a un sous-ensemble d’un espace de Banach.

Page 63: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

63

Demonstration. La preuve est similaire a la construction d’une completion d’unespace metrique (theoreme 2.26). Soit (E, d) un espace metrique, l’espace (C0

b (E; R), ‖ ·‖∞) des applications bornees et continues sur E est un espace de Banach et apresavoir fixe x0 ∈ E on considere l’application

J : E → C0(E; R)

x 7→ J(x) = dx − dx0 .

Montrons que J est bien definie : l’application J(x) : E → R est continue (carlipschitzienne) et bornee grace a l’inegalite triangulaire

|J(x)(z)| ≤ d(x, x0), z ∈ E

et J est une isometrie

‖J(x)− J(y)‖∞ = supz∈E|d(z, x)− d(z, y)| = d(x, y),

l’egalite venant du fait que le supremum est un maximum atteint en z = x oux = y.

Il existe une variante du theoreme de plongement precedent.

Theoreme 3.24 (Arens-Eells). Tout espace metrique est isometrique a un sous-ensemble ferme d’un espace vectoriel norme.

Demonstration. Soit (E, d) un espace metrique, on note F ⊆ P(E) l’ensemble desparties finies non vides de E. On fixe x0 ∈ E et si x ∈ E on note Jx l’application

Jx : F → R

A 7→ d(x,A)− d(x0, A)

qui grace a l’inegalite triangulaire appartient a l’espace B(F ; R) des fonctionsbornees de F dans R. On munit l’espace B(F ; R) de la norme

‖f‖∞ = supA∈F|f(A)|,

et on note

V = Vect(Jx, x ∈ E)

le sous-espace vectoriel des combinaisons lineaires∑mk=1 λkJyk d’elements de la

famille Jx, x ∈ E

F 3 A 7→m∑k=1

λkÄd(xk, A)− d(x0, A)

ä.

On considere alors l’application

J : E → V

x 7→ Jx

Page 64: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

64

qui est une isometrie

‖J(x)− J(y)‖∞ = supA∈F|Jx(A)− Jy(A)| = sup

A∈F|d(x,A)− d(y, A)| = d(x, y)

l’egalite venant du fait que le supremum est un maximum atteint en A = x ouA = y. Il reste a montrer que J(E) est ferme dans V . Soit (Jxn)n∈N une suitequi converge vers f dans V ; comme f ∈ V on a

f(A) =m∑k=1

λkJyk(A) =m∑k=1

λkÄd(yk, A)− d(x0, A)

äet comme avec A = x0, y1, . . . , ym

‖Jxn − f‖∞ ≥ |Jxn(A)− f(A)| = min(d(xn, x0), d(xn, y1), . . . , d(xn, ym))

tend vers 0, on en deduit que (xn)n∈N admet comme valeur d’adherence l’un aumoins des elements de A. Notons y cette valeur d’adherence,

limxϕ(n) = y

par continuite de J

f = lim Jxϕ(n) = Jy

ce qui donne f ∈ J(E). Ainsi J(E) est fermee.

4. Espaces de Hilbert

4.1. Espaces prehilbertiens. Un espace prehilbertien est un espace vectorielmuni d’un produit scalaire. Faisons quelques rappels a ce sujet avant de passeraux espaces de Hilbert.

4.1.1. Produit hermitien.

Definition 4.1. Un produit hermitien sur un espace vectoriel H est une formesesquilineaire hermitienne definie positive. Rappelons que ϕ : H ×H → C est

(i) sesquilineaire si ϕ(λx + µy, z) = λϕ(x, y) + µϕ(x, z) et ϕ(y, x) = ϕ(x, y)pour tous x, y, z ∈ H et tous λ, µ ∈ C,

(ii) hermitienne si ϕ(y, x) = ϕ(x, y) pour tous x, y ∈ H,

(iii) positive si ϕ(x, x) ≥ 0 pour tout x ∈ H,

(iv) et definie positive si ϕ(x, x) ≥ 0 pour tout x ∈ H et ϕ(x, x) = 0 impliquex = 0.

Lemme 4.2 (Inegalite de Cauchy-Schwarz). Soit ϕ une forme sesquilineaire her-mitienne positive sur un espace vectoriel H alors on a

|ϕ(x, y)| ≤»ϕ(x, x)

»ϕ(y, y)

pour tous x, y ∈ H.

Page 65: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

65

Demonstration. Soit t ∈ R, on a

0 ≤ ϕ(tx+ y, tx+ y) = t2ϕ(x, x) + 2tReϕ(x, y) + ϕ(y, y)

et donc le discrimant du trinome de droite est negatif

∆ = 4(Reϕ(x, y))2 − 4ϕ(x, x)ϕ(y, y) ≤ 0

ce qui donne

Reϕ(x, y) ≤»ϕ(x, x)

»ϕ(y, y)

pour touts x, y ∈ H. En appliquant cette derniere inegalite a eiθy, on obtient

|ReÄe−iθϕ(x, y)

ä| ≤

»ϕ(x, x)

»ϕ(y, y)

et donc en choisissant θ ∈ R tel que e−iθϕ(x, y) = |ϕ(x, y)|, l’inegalite de Cauchy-Schwarz en resulte.

On deduit de l’inegalite de Cauchy-Schwarz»ϕ(x+ y, x+ y) ≤

»ϕ(x, x) +

»ϕ(y, y)

car

ϕ(x+ y, x+ y) = ϕ(x, x) + ϕ(y, y) + 2 Reϕ(x, y)

≤ ϕ(x, x) + ϕ(y, y) + 2»ϕ(x, x)

»ϕ(y, y)

= (»ϕ(x, x) +

»ϕ(y, y))2.

On en deduit que

‖x‖ =»ϕ(x, x)

est une norme sur H, et desormais on note

〈x, y〉 = ϕ(x, y)

le produit hermitien. On dit que x ∈ H est perpendiculaire ou orthogonal a y ∈ Hsi 〈x, y〉 = 0 et ce que l’on note

x ⊥ y.

Theoreme 4.3 (Pythagore). Dans un espace prehilbertien H, on a

x ⊥ y ⇒ ‖x+ y‖2 = ‖x‖2 + ‖y‖2.

Dans un espace reel, la reciproque est vraie.

Rappelons que si A est un sous-ensemble de H alors peut considerer l’ortho-gonal de A

A⊥ =¶x ∈ H : 〈x, a〉 = 0 ∀a ∈ A

©.

Proposition 4.4. Soient A,B deux sous-ensembles d’un espace prehilbertien Halors on a les proprietes suivantes :

(i) A⊥ est un sous-espace vectoriel ferme de H,

(ii) si A ⊆ B alors B⊥ ⊆ A⊥,

Page 66: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

66

(iii) A⊥ = (VectA)⊥,

(iv) A⊥ = A⊥,

(v) VectA ⊆ (A⊥)⊥,

(vi) VectA ∩ A⊥ = 0.

Demonstration.

(i) Toute combinaison lineaire de vecteurs perpendiculaires a a ∈ A est ortho-gonal a a, donc il est clair que A⊥ est un sous-espace vectoriel de H. Deplus, si x = limxn avec xn ⊥ a alors x ⊥ a par passage a la limite, donc ilest clair que A⊥ est ferme.

(ii) C’est evident.

(iii) D’apres le point precedent, on a (VectA)⊥ ⊆ A⊥. De plus, si x est orthogo-nal a tout element de A alors x est orthogonal a toute combinaison lineaired’elements de A, donc A⊥ ⊆ (VectA)⊥.

(iv) D’apres (ii) on a A⊥ ⊆ A⊥. En outre si x est orthogonal a tout elementde a alors il est orthogonal a toute limite de suites de A par passage a lalimite, donc A⊥ ⊆ A⊥.

(v) (A⊥)⊥ est un sous-espace vectoriel ferme contenant A donc VectA ⊆ (A⊥)⊥.

(vi) Comme A⊥ = (VectA)⊥, il s’agit de montrer que F ∩ F⊥ = 0 si F =VectA est un sous-espace vectoriel. Si x ∈ F ∩ F⊥ alors ‖x‖2 = 〈x, x〉 = 0donc x = 0.

On rappelle enfin l’identite du parallelogramme

1

2‖x− y‖2 +

1

2‖x+ y‖2 = ‖x‖2 + ‖y‖2.(4.1)

4.1.2. Caracterisation des espaces prehilbertiens. L’identite du parallelogrammecaracterise en fait les espaces prehilbertiens.

Lemme 4.5. Un espace vectoriel E norme dont la norme verifie l’identite duparallelogramme pour tous couple (x, y) de vecteurs est un espace prehilbertien.

Demonstration. On definit la forme suivante

〈x, y〉 =1

4

Å‖x+ y‖2 − ‖x− y‖2 + i‖x+ iy‖2 − i‖x− iy‖2

ãpour laquelle on a

〈x, x〉 = ‖x‖2.

Il reste a verifier que 〈·, ·〉 est sesquilineaire puisqu’elle est est definie positive. Ona

〈ix, y〉 = i〈x, y〉, 〈−x, y〉 = −〈x, y〉(4.2)

Page 67: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

67

et on peut calculer la somme

‖x+ y + z‖2 − ‖x+ z − y‖2 + ‖x− y‖2 + ‖z − y‖2︸ ︷︷ ︸12‖x−z‖2+ 1

2‖x+z−2y‖2

−‖x+ y‖2 − ‖z + y‖2︸ ︷︷ ︸− 1

2‖x−z‖2− 1

2‖x+2y+z‖2

= ‖x+ y + z‖2 − 1

2‖x+ 2y + z‖2︸ ︷︷ ︸

=−‖y‖2+ 12‖x+z‖2

−‖x+ z − y‖2 +1

2‖x+ z − 2y‖2︸ ︷︷ ︸

‖y‖2− 12‖x+z‖2

= 0

ce qui donne la relation

‖x+ y + z‖2 − ‖x+ z − y‖2 = ‖x− y‖2 − ‖x+ y‖2 + ‖z − y‖2 − ‖z + y‖2

et lorsque l’on change y en iy

‖x+ iy + z‖2 − ‖x+ z − iy‖2 = ‖x− iy‖2 − ‖x+ iy‖2 + ‖z − iy‖2 − ‖z + iy‖2.

On en tire finalement

〈x+ z, y〉 = 〈x, y〉+ 〈z, y〉.

En prenant x = z, on obtient 〈2x, y〉 = 2〈x, y〉 puis par recurence

〈nx, y〉 = n〈x, y〉

pour tout entier n ∈ N (l’egalite 〈0, x〉 = 0 est triviale) et en appliquant cettederniere relation a x/n et y, on en deduit

〈x, y〉 =1

n〈x, y〉

pour tout entier n ∈ N∗. Ceci donneÆp

qx, y

∏=p

q〈x, y〉

pour tout couple (p, q) d’entiers. Avec (4.2), par densite des rationnels dans lesreels et continuite de x 7→ 〈x, y〉, on en tire

〈λx, y〉 = λ〈x, y〉

pour tout nombre complexe λ ∈ C. Ceci demontre que 〈·, ·〉 est un produit her-mitien.

4.2. Espaces de Hilbert et L2.

Definition 4.6. Un espace de Hilbert est un espace prehilbertien complet (pourla distance associee au produit hermitien).

Theoreme 4.7 (Riesz-Fischer). Soit (Ω, T , µ) un espace mesure alors l’espaceL2(Ω, µ) des (classes de) fonctions mesurables de carre integrable est un espacede Hilbert.

Page 68: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

68

Demonstration. Soit (fn)n∈N une suite de Cauchy pour la norme L2 ; il existe unesous-suite (nk)k∈N telle que

‖fnk+1− fnk‖L2 ≤ 2−k

pour tout k ∈ N. On considere alors la fonction mesurable g : Ω → R ∪ ∞definie par

g(x) =∞∑k=0

|fnk+1(x)− fnk(x)|, x ∈ Ω.

Or on a par l’inegalite triangulaire∥∥∥∥∥ m∑k=0

|fnk+1− fnk |

∥∥∥∥∥L2

≤m∑k=0

‖fnk+1− fnk‖L2 ≤ 2(1− 2−m+1)

et par le theoreme de convergence monotone (ou de Beppo-Levi)Ç ∫Ω|g(x)|2 dµ

å 12

≤ 2

ce qui implique que g est finie µ-presque partout. Il existe donc un ensemblenegligeable N tel que g(x) <∞ pour x /∈ N ; sur Ω \N , la serie

∑k≥0 fnk+1

(x)−fnk(x) converge absolument et on peut donc definir

f(x) = fn0(x) +∞∑k=0

fnk+1(x)− fnk(x), x ∈ Ω \N.

On prolonge f par 0 sur N , cette fonction est mesurable et de carre integrablecar fϕ(0) l’est et ∫

Ω

∣∣∣∣∣ m∑k=0

(fnk+1− fnk)

∣∣∣∣∣2

dµ ≤∫

Ω|g|2 dµ <∞.

De plus, comme

∞∑`=k

(fn`+1− fn`) = f − fn0 −

k−1∑`=0

(fn`+1− fn`)︸ ︷︷ ︸

=fnk−fn0

= f − fnk

on a

‖fnk − f‖ =

∥∥∥∥∥ ∞∑`=k

(fn`+1− fn`)

∥∥∥∥∥ ≤ ∞∑`=k

2−` = 2−k+1

donc f est une valeur d’adherence de la suite (fn)n∈N dans L2(Ω, dµ). Le lemme1.30 permet alors de conclure que cette suite converge.

Remarque 4.8. Cette preuve peut etre reprise mutatis mutandi pour montrerque Lp(Ω, µ) est un espace de Banach lorsque p ≥ 1. En outre, un sous produitde cette demonstration est le fait que pour une suite (fn)n∈N convergente deL2(Ω, µ) (qui est donc une suite de Cauchy), il existe une sous suite (fnk)k∈N qui

Page 69: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

69

converge presque partout (cela decoule du fait que |f(x)| ≤ g(x) est finie presquepartout).

4.3. Projection sur un sous-espace ferme. Soit K un ensemble convexeferme de H, rapelons que la distance d’un vecteur x ∈ H a K est

d(x,K) = inff∈K‖x− f‖.

Dans un espace de Hilbert, cette distance est atteinte.

Theoreme 4.9. Soit H un espace de Hilbert et soit K un ensemble convexe fermede H, la distance de x a K est atteinte en un unique vecteur πK(x) de K.

Demonstration. Commencons par montrer l’unicite ; supposons que f, f ′ ∈ Ksoient tels que

‖x− f‖ = ‖x− f ′‖ = d(x,K)

alors l’identite du parallelogramme appliquee a x− f et x− f ′ donne

1

2‖f − f ′‖2 + 2

∥∥∥∥∥x− f + f ′

2

∥∥∥∥∥2

= 2d(x,K)2

or on a

d(x,K) ≤∥∥∥∥∥x− f + f ′

2

∥∥∥∥∥ ≤ 1

2‖x− f‖+

1

2‖x− f ′‖ = d(x,K)

donc‖f − f ′‖ = 0

et f et f ′ sont egaux.Soit (fn)n∈N une suite minimisante 11

limn→∞

‖x− fn‖ = d(x,K).

Montrons que c’est une suite de Cauchy : par l’identite du parallelogramme, ona

1

2‖fn − fm‖2 = −2

∥∥∥∥∥x− fn + fm2

∥∥∥∥∥2

︸ ︷︷ ︸≥d(x,K)2

+‖x− fn‖2 + ‖x− fm‖2

≤ ‖x− fn‖2 + ‖x− fm‖2 − 2d(x,K)2

et le terme de droite tend vers 0 lorsque (n,m) tend vers l’infini. Comme H estcomplet, cette suite converge vers f ∈ E. Comme K est ferme, on a f ∈ K et enoutre

d(x,K) = limn→∞

‖x− fn‖ = ‖x− f‖.Ce qui demontre le theoreme.

11. Elle est obtenue en disant que d(x, F ) + 2−n ne peut etre un minorant de ‖x− f‖ lorsquef ∈ K et donc qu’il existe fn ∈ K tel que d(x,K) ≤ ‖x− fn‖ ≤ d(x,K) + 2−n.

Page 70: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

70

On peut alors definir la projection sur l’ensemble convexe ferme K

πK : E → K

x 7→ πK(x).

Dans le cas ou K = F est un espace vectoriel ferme, on a alors

〈x− πF (x), f〉 = 0, ∀f ∈ Fpuisque les fonctions

‖x− πF (x) + tf‖2 = ‖x− πF (x)‖2 + t2‖f‖2 + 2tRe〈x− πF (x), f〉‖x− πF (x) + itf‖2 = ‖x− πF (x)‖2 + t2‖f‖2 + 2t Im〈x− πF (x), f〉

admettent leur minimum en t = 0 et ont donc une derivee nulle en t = 0.Reciproquement si y ∈ F est tel que 〈x− y, f〉 = 0 pour tout f ∈ F alors

‖x− y + f‖2 = ‖x− y‖2 + ‖f‖2 ≥ ‖x− y‖2

implique que ‖x− y‖ = d(x, F ) et donc y = πF (x). On en deduit ainsi

x− πF (x) ∈ F⊥.Notons finalement que F⊥ est ferme et que lorsque y ∈ F⊥

〈x− (x− πF (x)), y〉 = 0

ce qui, en vertu de la caracterisation precedente, donne

πF⊥(x) = x− πF (x).

En resume nous avons les resultats suivants.

Corollaire 4.10. Soit H un espace de Hilbert et soit F un sous-espace vectorielferme de H, alors

H = F ⊕ F⊥

et les projections sur chacun des sous-espaces vectoriels fermes F et F⊥ sontcaracterisees par l’une ou l’autre des proprietes suivantes

(i) d(x, F ) = ‖x− πF (x)‖, et d(x, F⊥) = ‖x− πF⊥(x)‖(ii) πF (x) ∈ F ainsi que 〈x − πF (x), f〉 = 0 pour tout f ∈ F , et πF⊥(x) ∈ F⊥

ainsi que 〈x− πF⊥(x), g〉 = 0 pour tout g ∈ F⊥.

Remarque 4.11. On a ‖πF‖ ≤ 1 car

‖x‖2 = ‖πF (x)‖2 + ‖πF⊥(x)‖2.

Corollaire 4.12. Dans un espace de Hilbert H, pour tout sous-espace vectorielF ⊆ H, on a

(F⊥)⊥ = F

En particulier, un sous-espace vectoriel F est dense dans un espace de Hilbert Hsi et seulement si F⊥ = 0.

Page 71: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

71

Demonstration. D’apres la proposition 4.4, il suffit de montrer (F⊥)⊥ ⊆ F .Comme F⊥ = F⊥, quitte a remplacer F par son adherence, on peut suppo-ser F ferme. Si x ∈ (F⊥)⊥ alors 〈x, g〉 = 0 pour tout g ∈ F⊥ donc πF⊥(x) = 0 etainsi x = πF (x) ∈ F .

Remarque 4.13. Pour une partie A ⊆ H, on a (A⊥)⊥ = VectA car A⊥ =(VectA)⊥.

Exemple 4.14. Soit w : R→ R une fonction mesurable positive telle que

Mk =∫ ∞−∞

x2kw(x) dx <∞

pour tout k ∈ N et telle que pour un intervalle I ⊂ R

w(x) > 0, x ∈ I, w(x) = 0 x ∈ R \ I,alors C[x] est dense dans L2(I, w dx). On commence par enoncer le resultat sui-vant : si g ∈ L1(R; dx) et si

gn(x) =n√2π

∫ ∞−∞

e−n2

2(x−t)2g(t) dt

alors

limn→∞

∫ ∞−∞

∣∣∣gn(x)− g(x)∣∣∣ dx = 0.

En effet, on a

gn(x)− g(x) =1√2π

∫ ∞−∞

e−t2

2

ÄgÄx− t

n

ä− g(x)

ädt

et donc par l’inegalite de Minkowski integrale

‖gn − g‖L1 ≤ 1√2π

∫ ∞−∞

e−t2

2

∥∥∥gÄ · − tn

ä− g

∥∥∥L1

dt

ce qui donnelim ‖gn − g‖L1 = 0

par le theoreme de convergence dominee. En effet, on a

e−t2

2

∥∥∥gÄ · − tn

ä− g

∥∥∥L1≤ 2e−

t2

2 ‖g‖L1 ∈ L1

et de plus 12 pour tout t ∈ R

lim∥∥∥gÄ · − t

n

ä− g

∥∥∥L1

= 0

ce qui prouve ce premier enonce.Demontrons a present la densite de C[x] dans L2(I, w dx). Soit f ∈ L2(I, w dx)

tel que f ∈ C[x]⊥ alors ∫ ∞−∞

tkf(t)w(t) dt = 0

12. Il s’agit d’un resultat d’integration qui se prouve par densite des fonctions continues. Onpeut soit se referer au cours d’integration soit admettre ce resultat.

Page 72: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

72

et ainsi pour tout n ∈ N

gn(x) =n√2π

∫ ∞−∞

e−n2

2(x−t)2f(t)w(t) dt = 0

par developpement de l’exponentielle en serie et interversion de serie et d’integrale(Theoreme de Fubini-Tonelli). Or par Cauchy-Schwarz, on a∫ ∞

−∞|f(t)|w(t) dt ≤

Ç ∫ ∞−∞

w(t) dt︸ ︷︷ ︸=M0<∞

å 12Ç ∫ ∞−∞|f(t)|2w(t) dt

å 12

<∞

ce qui signifie que g = fw ∈ L1(Rn; dx), et par consequent∫ ∞−∞|f(x)|w(x) dx = lim

n→∞

∫ ∞−∞

∣∣∣gn(x)− f(x)w(x)∣∣∣ dx = 0.

On en deduit g = fw = 0 soit f = 0. Ainsi C[x]⊥ = 0.

4.4. Theoreme de representation de Riesz et applications. En dimensionfinie, si ϕ : H → K est une forme lineaire alors en choisissant une base ortho-normee (e1, . . . , en) de H, on peut decomposer un vecteur x ∈ H dans la base

x =n∑j=1

〈x, ej〉ej

et en tirer une expression de la forme lineaire

ϕ(x) =n∑j=1

〈x, ej〉ϕ(ej) =

Æx,

n∑j=1

ϕ(ej)ej

∏comme un produit hermitien avec un vecteur x0 donne par

x0 =n∑j=1

ϕ(ej)ej.

La question se pose de savoir si cette representation d’une forme lineaire commeun produit hermitien avec un vecteur est toujours vraie. Malheureusement, on nedispose pas d’une notion de base adaptee. Mais afin de voir ce qui peut etre fait,on peut remarquer que la construction precedente de x0 peut etre amelioree. Eneffet, si ϕ est non nulle, par le theoreme du rang, on a

dim kerϕ = n− 1

et ainsidim(kerϕ)⊥ = n− (n− 1) = 1

ce qui implique que l’on peut d’abord choisir une base orthonormee (e1, . . . , en−1)de kerϕ et la completer en une base orthonormee (e1, . . . , en) deH avec (kerϕ)⊥ =Ken. Dans ce cas, on a

x0 =n∑j=1

ϕ(ej)ej = ϕ(en)en

Page 73: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

73

autrement dit le vecteur x0 est a chercher comme vecteur directeur de la droite(kerϕ)⊥. Ceci reste vrai en dimension infinie, et cette intuition est a la base dutheoreme de representation suivant.

Theoreme 4.15 (Theoreme de representation de Riesz). Soit ϕ une forme lineairecontinue sur H alors il existe un unique vecteur x0 ∈ H tel que

ϕ(x) = 〈x, x0〉pour tout x ∈ H. De plus on a ‖ϕ‖L(E,K) = ‖x0‖.

Demonstration. L’unicite est evidente car si deux vecteurs x0 et y0 conviennentalors

‖x0 − y0‖2 = 〈x0, x0 − y0〉 − 〈y0, x0 − y0〉 = ϕ(x0 − y0)− ϕ(x0 − y0) = 0

ce qui implique x0 = y0. Voyons l’existence. Si ϕ est nulle alors on peut choisirx0 = 0, et si ϕ est non-nulle alors il existe un vecteur y0 ∈ H tel que ϕ(y0) 6= 0.Comme ϕ est continue, son noyau est un sous-espace ferme de E, on pose alors

y0 = πkerϕ⊥(y0).

On a ϕ(y0) = ϕ(y0) 6= 0 et y0 ⊥ kerϕ donc

Vect(y0) ⊂ (kerϕ)⊥.

En outre, si x ∈ (kerϕ)⊥ alors on a

x− ϕ(x)

ϕ(y0)y0 ∈ kerϕ ∩ (kerϕ)⊥ = 0

et doncVect(y0) = (kerϕ)⊥.

Notons que l’on aH = kerϕ⊕ Vect(y0),

puisque tout vecteur x se decompose de maniere unique sous la forme

x =

Çx− ϕ(x)

ϕ(y0)y0︸ ︷︷ ︸

∈kerϕ

å+ϕ(x)

ϕ(y0)y0.

Sachant cela, on peut egalement ecrire la decomposition suivante

x = x− 〈x, y0〉‖y0‖2

y0︸ ︷︷ ︸∈Vect(y0)⊥=kerϕ

+〈x, y0〉‖y0‖2

y0

et donc par unicite de la decomposition dans H = kerϕ⊕ Vect(y0),

ϕ(x) =〈x, y0〉‖y0‖2

ϕ(y0) = 〈x, x0〉.

si l’on pose x0 = ϕ(y0)y0/‖y0‖2. Ce qui demontre le theoreme de Riesz.

Page 74: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

74

Corollaire 4.16. Soit T une application lineaire bornee sur un espace de Hilbert,alors il existe une unique application lineaire bornee T ∗ sur H telle que

〈Tx, y〉 = 〈x, T ∗y〉pour tous x, y ∈ H. On appelle cette application lineaire T ∗ l’adjoint de T . On a(T ∗)∗ = T et ‖T ∗‖L(H) = ‖T‖L(H).

Demonstration. Si y ∈ H alors la forme lineaire x 7→ 〈Tx, y〉 est bornee parl’inegalite de Cauchy-Schwarz et le fait que T est bornee. Par le theoreme derepresentation de Riesz, il existe donc un unique y∗ ∈ H tel que

〈Tx, y〉 = 〈x, y∗〉et on considere l’application T : y 7→ y∗. Il est clair qu’elle est lineaire grace a lasesquilinearite du produit scalaire et l’unicite dans le theoreme de representationde Riesz. En outre on a

‖T ∗y‖2 = 〈T ∗y, T ∗y〉 = 〈TT ∗y, y〉 ≤ ‖TT ∗y‖‖y‖ ≤ ‖T‖L(H)‖T ∗y‖‖y‖et ainsi en simplifiant ‖T ∗y‖ ≤ ‖T‖L(H)‖y‖, donc T ∗ est bornee avec ‖T ∗‖L(H) ≤‖T‖L(H). Il est clair que (T ∗)∗ = T et en appliquant l’inegalite precedente a T ∗

on obtient ‖T‖L(H) ≤ ‖T ∗‖L(H) et donc ‖T ∗‖L(H) = ‖T‖L(H).

Remarque 4.17. En travaux diriges, on verra la notion plus generale de l’adjointd’une application T : E → F entre deux espaces de Hilbert differents.

Corollaire 4.18. Le dual topologique d’un espace de Hilbert est isometrique al’espace de Hilbert.

Demonstration. L’isometrie est donne par 13

Φ : E → E ′

x 7→ 〈 · , x〉et cet isomorphisme est continu.

Theoreme 4.19 (Theoreme de Hahn-Banach). Soient F un sous-espace vectorield’un espace de Hilbert H et ϕ : F → C une forme lineaire continue, il existe unprolongement ϕ : E → C de ϕ a H continue.

Demonstration. On commence par prolonger ϕ par continuite a F

ϕ(x) = limn→∞

ϕ(xn) si x = limn→∞

xn.

Comme F est un espace de Hilbert, d’apres le theoreme de representation deRiesz, il existe un vecteur x0 ∈ F tel que

ϕ(x) = 〈x, x0〉, x ∈ F .

13. Notons que dans le cas d’un espace hilbertien complexe, cette application n’est pas lineairemais anti-lineaire.

Page 75: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

75

Un prolongement possible est alors

ϕ(x) = 〈x, x0〉, x ∈ Hpour lequel on a par Cauchy-Schwarz

|ϕ(x)| ≤ ‖x0‖ ‖x‖.Or ‖x0‖ = ‖ϕ‖ = ‖ϕ‖ donc le prolongement ϕ est une forme lineaire continue dememe norme que ‖ϕ‖.

Remarque 4.20. Remarquons que le prolongement ϕ ainsi construit est tel que

ϕ|F⊥ = 0.

Le prolongement est egalement donne par

ϕ = ϕ πF .

Une derniere application est le theoreme de Radon-Nikodym. Nous nous conten-terons du cas de deux mesures de probabilite. Cette preuve utilisant le theoremede representation de Riesz est due a John Von Neumann.

Theoreme 4.21. Soient µ et λ deux mesures de probabilite sur un espace mesu-rable (X, T ). Il existe une fonction f positive λ-presque surement et un ensembleN tels que λ(N) = 0 et

µ(A) =∫Af dλ+ µ(A ∩N)

pour tout ensemble mesurable A ∈ T .

Demonstration. On considere la mesure de probabilite ν = (λ+ µ)/2 et la formelineaire

L2(X, ν)→ C

u 7→ 1

2

∫Xu dµ.

Cette forme lineaire est continue car∣∣∣∣∣∫Xu dµ

∣∣∣∣∣ ≤ 1

2

Ç ∫X|u|2 dµ

å 12

≤ 1√2

Ç ∫X|u|2 dν

å 12

.

Par le theoreme de representation de Riesz, il existe h ∈ L2(X, ν) telle que∫Xu dµ =

∫Xuh dν

pour tout u ∈ L2(X, ν). En particulier si A est mesurable, 1A ∈ L2(X, ν) car νest une mesure de probablite, et on en deduit

µ(A) = 2∫Ah dν

On considere alorsB = h−1(]−∞, 0[)

Page 76: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

76

et on aµ(B) ≤ 0

soit µ(B) = 0 et donc ∫Bh dλ = 0

soit λ(B) = 0. On considere ensuite

N = h−1([1,+∞[)

pour lequel on a

µ(N) =∫Nh dµ+

∫Nh dλ ≥ µ(N) +

∫Nh dλ

soit λ(N) = 0. La fonction h est a valeurs dans [0, 1] λ-presque surement. Enfin,etant donne un ensemble mesurable A, on considere

An = A ∩ h−1([0, n/(n+ 1)])

et comme on a ∫Xu(1− h) dµ =

∫Xuh dλ

pour tout u ∈ L2(X, ν), en prenant u = 1An/(1− h) ∈ L2(X, ν) car∫An

1

(1− h)2dν ≤ (n+ 1)2

on obtient

µ(An) =∫An

h

1− hdλ.

Ainsi en passant a la limite

µ

Ç ⋃n∈N

An

å= lim

n→∞µ(An) =

∫A

h

1− hdλ

et comme µ(B) = 0

µ(A) = µ(A ∩N) + µ(A ∩B) + µ

Ç ⋃n∈N

An

å= µ(A ∩N) +

∫A

h

1− hdλ

et le theoreme est demontre avec f = h/(1− h).

Le theoreme de Radon-Nikodym pour des mesures de probabilites en decouleimmediatement.

Corollaire 4.22 (Radon-Nikodym). Soient µ et λ deux mesures de probabilite surun espace mesurable (X, T ). La mesure µ est absolument continue 14 par rapporta λ si et seulement s’il existe une fonction f positive λ-presque surement telleque

µ(A) =∫Af dλ

14. i.e. tout ensemble negligeable pour λ est negligeable pour µ.

Page 77: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

77

pour tout ensemble mesurable A ∈ T .

Remarque 4.23. Dans le cas ou λ n’est pas une mesures de probabilite mais estσ-finie, il existe une suite d’ensembles (Xn)n∈N de λ-mesure finie tels que

X = ∪n∈NXn

et on considere la mesure de probabilite

Λ(A) =1

2

∞∑n=0

2−nλ(A ∩Xn)

λ(Xn).

Il n’est pas difficile de voir que µ est absolument continue par rapport a λ siet seulement si elle est absolument continue par rapport a Λ. En appliquant leresultat precedent, on trouve que µ est absolument continue par rapport a λ siet seulement s’il existe F positive Λ-presque surement (donc λ-presque partout)telle que

µ(A) =∫AF dΛ =

1

2

∞∑n=0

2−n∫A∩Xn

Fdλ

pour tout ensemble A ∈ T , et ainsi µ a pour densite

f =1

2

∞∑n=0

2−n1XnF.

Dans le cas ou ni λ ni µ ne sont des mesures de probabilites, mais sont toutesdeux σ-finies, il existe une suite croissante d’ensembles (Xn)n∈N de µ-mesure finietels que

X = ∪n∈NXn

et on considere la suite de mesures de probabilite

µn(A) =µ(A ∩Xn)

µ(Xn)

absoluments continues par rapport a λ si et seulement si µ l’est. On appliquealors le resultat obtenu dans la premiere partie de cette remarque ; il existe unesuite de fonctions gn positives λ-presque partout telles que

µn(A) =∫Agn dλ

pour tout ensemble A ∈ T , et ainsi en notant fn = µ(Xn)gn

µ(A) = limn→∞

µ(A ∩Xn) = limn→∞

∫Afn dλ.

La suite (fn(x))n∈N est croissante pour λ-presque tout x ∈ X car∫Afn+1 − fn dλ = µ(A ∩Xn+1)− µ(A ∩Xn) ≥ 0

pour tout A ∈ T . On a alors par convergence monotone

µ(A) =∫A

limn→∞

fn dλ

Page 78: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

78

ce qui signifie que f = limn→∞ fn converge λ-presque partout et que µ a pourdensite f .

Remarque 4.24. Ce resultat est important pour pouvoir detecter des variablesaleatoires absolument continues. Rappelons que si (Ω, T , P ) est un espace proba-bilise, une variable aleatoire est une application X : Ω→ R mesurable (R etantmuni de la tribu B des boreliens et de la mesure de Lebesgue λ). La loi de X estla probabilite LX : B → [0, 1] donnee par

LX(I) = P (X−1(I)) = PÄω ∈ Ω : X(ω) ∈ I

ä.

Une variable aleatoire absolument continue est une variable aleatoire X dont laloi est absolument continue par rapport a la mesure de Lebesgue λ

λ(N) = 0⇒ LX(N) = 0,

autrement dit la probabilite que X prenne des valeurs reelles negligeables estnulle. Le theoreme de Radon-Nikodym permet alors d’affirmer qu’il existe unefonction (appelee densite de X) fX positive presque partout telle que

LX(I) = P (X ∈ I) =∫IfX(t) dt, I ∈ B

pour laquelle on a en particulier∫RfX(t) dt = P (Ω) = 1.

Un exemple est une variable aleatoire X de loi gaussienne (ou normale) pourlaquelle

fX(t) =1√2π

e−t2/2.

4.5. Theoreme ergodique de Von Neumann. Ce paragraphe donne une ap-plication du theoreme de projection sur un sous-espace ferme a la theorie ergo-dique.

Theoreme 4.25 (Von Neumann). Soit H un espace de Hilbert, soit T : H → Hune application lineaire de norme inferieure ou egale a 1, alors

F = ker(IdH − T ) = ker(IdH − T ∗)et pour tout x ∈ H

lim1

n

n−1∑k=0

T k(x) = πF (x).

Demonstration. On montre d’abord

ker(IdH − T ) =¶x ∈ H : 〈T (x), x〉 = ‖x‖2

©ce qui donne aisement ker(IdH −T ) = ker(IdH −T ∗). L’inclusion de ker(IdH −T )dans l’ensemble de droite est triviale et si 〈T (x), x〉 = ‖x‖2 alors

‖x− T (x)‖2 = ‖x‖2 + ‖T (x)‖2 − 2 Re〈T (x), x〉 = ‖T (x)‖2 − ‖x‖2 ≤ 0

Page 79: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

79

et donc x ∈ ker(IdH − T ). On peut alors montrer

F = Im(IdH − T )⊥

et on en deduit

F⊥ = Im(IdH − T ).

En effet, soit x ∈ F alors pour tout u ∈ H〈x, u− T (u)〉 = 〈x− T ∗(x), u〉 = 0

et reciproquement si x ∈ Im(IdH − T )⊥ alors pour tout u ∈ H〈x− T ∗(x), u〉 = 〈x, u− T (u)〉 = 0

et donc T ∗(x) = x, ce qui implique x ∈ F .Soit x ∈ H et soit ε > 0, comme F⊥ = Im(IdH − T ) il existe y ∈ Im(IdH − T )

tel que

‖πF (x)− y‖ < ε

2.

Comme y ∈ Im(IdH −T ), il existe u ∈ H tel que y = u−T (u) et par telescopage

n−1∑k=0

T k(y) =n−1∑k=0

T k(u)−n−1∑k=0

T k+1(u) = u− T n(u)

ce qui permet de calculer

1

n

n−1∑k=0

T k(x) =1

n

n−1∑k=0

T kÄπF (x)

ä︸ ︷︷ ︸

=πF (x)

+1

n

n−1∑k=0

T kÄπF⊥(x)

ä= πF (x) +

1

n

n−1∑k=0

T kÄπF⊥(x)− y

ä+

1

n

ÄIdH − T n−1

ä(u).

Comme T est de norme inferieure a 1, on en deduit∥∥∥∥∥ 1

n

n−1∑k=0

T k(x)− πF (x)

∥∥∥∥∥ ≤ ‖πF (x)− y‖︸ ︷︷ ︸<ε/2

+2

n‖u‖.

Il existe N ∈ N tel que 2‖y‖/N < ε/2 pour n ≥ N , ce qui prouve que pour toutn ≥ N ∥∥∥∥∥ 1

n

n−1∑k=0

T k(x)− πF (x)

∥∥∥∥∥ < ε.

Le theoreme est demontre.

Voyons maintenant une application de ce theoreme a la theorie ergodique. Soit(X, T , µ) un espace mesure de mesure finie

µ(X) <∞

Page 80: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

80

on se place dans l’espace de Hilbert H = L2(X,µ; R) des fonctions de carreintegrables a valeurs reelles. CommeX est de mesure finie, les fonctions constantessont de carre integrable, on note F le sous-espace de H des fonctions constantes,c’est a dire la droite vectorielle engendree par la fonction constante egale a 1

F = Vect(1).

Il est raisonnable de normaliser la fonction constante egale a 1

e0 =1»µ(X)

qui est de norme egale a 1, et on a ainsi

F = Vect(e0).

Comme F est de dimension finie, c’est un sous-espace ferme de H et la projectionorthogonale sur F peut etre calculee

πF (f) = 〈f, e0〉e0 =1

µ(X)

∫Xf dµ

et l’orthogonal de F est le sous-espace vectoriel des fonctions de moyenne nulle

F⊥ =

®f ∈ H :

1

µ(X)

∫Xf dµ = 0

´.

Definition 4.26. Soit (X, T , µ) un espace mesure de mesure finie, on dit qu’uneapplication mesurable θ : X → X est ergodique si elle preserve la mesure, i.e.

µ(θ−1(Y )) = µ(Y ), ∀Y ∈ T ,et si tout ensemble mesurable invariant par θ est de mesure nulle ou pleineÄ

θ−1(Y ) = Yä⇒ĵ(Y ) = 1 ou µ(Y ) = X

ä.

Lemme 4.27. Soit θ : X → X une application mesurable qui preserve la mesurealors pour toute fonction u ∈ L1(X,µ), la fonction u θ est dans L1(X,µ) et deplus ∫

Xu θ dµ =

∫Xu dµ.

En particulier, l’application

T : H → H

f 7→ f θest une isometrie lineaire.

Demonstration. Pour prouver la seconde assertion il suffit d’appliquer la premiereassertion a la fonction u = |f |2 ∈ L1(X,µ). Si Y ∈ T , on a∫

X1Y θ dµ =

∫X

1θ−1(Y ) dµ = µ(θ−1(Y )) = µ(Y ) =∫

1Y dµ

Page 81: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

81

et par linearite, la premiere assertion est demontree pour les fonctions etagees.Soit u ∈ L1(X,µ), il existe une suite (un)n∈N de fonctions etagees qui convergevers u presque partout. D’apres le lemme de Fatou∫

X|u θ| dµ ≤ lim inf

∫X|un θ| dµ = lim inf

∫X|un| dµ =

∫X|u| dµ < +∞

donc u θ ∈ L1(X,µ) et u 7→ u θ est continue sur L1(X,µ). En supposant alorsque (un)n∈N est une suite de fonctions etagees convergeant vers u dans L1(X,µ),on en deduit alors

‖u θ‖L1 = lim ‖un θ‖L1 = lim ‖un‖L1 = ‖u‖L1

et donc la premiere assertion est demontree.

Pour pouvoir appliquer le theoreme de Von Neumann, il reste a identifierker(IdH − T ) pour T : f 7→ f θ.

Lemme 4.28. Soit θ : X → X une application ergodique alors

F = ker(IdH − T ) = Vect(e0).

Demonstration. Les fonctions dans ker(IdH − T ) verifient

f θ = f

l’inclusion des fonctions constantes dans ce noyau est evidente. Soit f ∈ ker(IdH−T ), il s’agit de montrer que la fonction

g = πF⊥(f) = f − πF (f) = f − 1

µ(X)

∫Xf dµ

est nulle. Or g verifie

g θ = g,∫Xg dµ = 0.

L’ensemble

Y = g−1(]0,+∞[) =¶x ∈ X : g(x) ≥ 0

©est invariant par θ car

x ∈ Y ⇔ θ(x) ∈ Yet comme θ est ergodique, Y est de mesure nulle ou pleine. Si µ(Y ) = 0 alorsg est strictement negative presque partout et son integrale ne peut etre nulle.Si µ(Y ) = µ(X) alors g est positive presque partout et comme son integrale estnulle, g est nulle presque partout.

En appliquant alors le theoreme ergodique de Von Neumann a l’applicationT : f 7→ f θ dans l’espace de Hilbert H = L2(X,µ), on obtient le corollairesuivant.

Page 82: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

82

Corollaire 4.29. Soit (X, T , µ) un espace mesure de mesure finie et soit θ :X → X une application ergodique alors pour tout f ∈ L2(X,µ) on a

lim1

n

n−1∑k=0

f θk =1

µ(X)

∫Xf dµ

ou θk = θ · · · θ︸ ︷︷ ︸k fois

et la convergence a lieu en norme L2, i.e.

lim∫X

∣∣∣∣∣ n−1∑k=0

f θk − 1

µ(X)

∫Xf dµ

∣∣∣∣∣2

dµ = 0.

4.6. Bases hilbertiennes. On veut maintenant definir une notion analogue acelle des bases orthonormees dans un espace euclidien de dimension finie.

Definition 4.30. On dit qu’une famille (eα)α∈A est orthonormee si

〈eα, eβ〉 =

1 si α = β

0 si α 6= β.

On dit qu’une famille (eα)α∈A est totale si l’espace engendre vectoriel engendrepar cette famille est dense dans H

Vect(eα, α ∈ A) = H

i.e. pour tout x ∈ H, il existe une suite (xn)n∈N qui converge vers x avec

xn =Jn∑j=1

λ(n)j e

α(n)j, α

(n)j ∈ A, λ

(n)j ∈ K.

Une base hilbertienne de H est une famille orthonormee totale.

Nous traiterons seulement le cas des espaces de Hilbert separables (qui sontceux qui apparaissent en pratique). Le cas des espaces de Hilbert generaux esttraite en annexe ; pour montrer qu’il existe une base hilbertienne, il faut utiliserle lemme de Zorn.

Definition 4.31. Un espace prehilbertien H est dit separable s’il existe une partiedense denombrable dans H.

Theoreme 4.32. Un espace prehlbertien de dimension infinie est separable si etseulement s’il existe une base hilbertienne denombrable (en)n∈N.

Remarque 4.33. Si un espace de Hilbert admet une base hilbertienne finie(e0, . . . , en) alors

H = Vect(e0, . . . , en) = Vect(e0, . . . , en)

est de dimension finie n + 1. Inversement, on sait deja qu’un espace de Hilbertde dimension finie admet une base othonormee (en utilisant le procede d’ortho-normalisation de Gram-Schmidt sur une famille libre maximale) qui est alors unebase hilbertienne.

Page 83: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

83

Demonstration. Supposons que H est un espace de Hilbert de dimension infinieseparable. Soit A une partie dense denombrable de H

A =¶a0, a1, . . . , an, . . .

©on extrait de A une suite (an)n∈N libre 15 et generatrice de VectA, on utilise leprocede d’orthonormalisation de Gram-Schmidt pour construire la base hilber-tienne. On commence avec e0 = a0/|a0|, puis on suppose que l’on a construit unefamille e0, . . . , en orthonormee telle que

Vect(e0, . . . , en) = Vect(a0, . . . , an)

et on choisit alors

en+1 =1

λ

Çan+1 −

n∑k=n+1

〈an+1, ek〉ekå, λ =

∥∥∥∥∥an+1 −n∑

k=n+1

〈an+1, ek〉ek∥∥∥∥∥−1

ou λ est bien defini car an+1 /∈ Vect(e0, . . . , en). On a donc

〈en+1, ej〉 = 0, 0 ≤ j ≤ n, ‖en+1‖ = 1,

Vect(e0, . . . , en+1) = Vect(a0, . . . , an+1).

Avec cette construction Vect(en, n ∈ N) = Vect(an, n ∈ N) = VectA = H. Cequi signifie que (en)n∈N est une base hilbertienne.

Inversement, on suppose queH admette une base hilbertienne (en)n∈N denombrable,on pose alors

A = VectL(en : n ∈ N) =∞⋃n=0

VectL(e0, . . . , en)︸ ︷︷ ︸'Ln+1 denombrable

avec L = Q si H est reel et L = Q + iQ si H est complexe. Cet ensemble estdenombrable et montrons que A est dense dans H. Soient x ∈ H et soit ε > 0, ilexiste donc N ∈ N et des scalaires λ0, . . . , λn (dans R ou C) tels que∥∥∥∥∥x− N∑

n=0

λnen

∥∥∥∥∥ < ε

2

et comme Q est dense dans R (et Q+iQ est dense dans C), il existe x0, . . . , xN ∈L tels que

|xn − λn| <ε

2(N + 1)

et on a ∥∥∥∥∥ N∑n=0

(xn − λn)en

∥∥∥∥∥ ≤ N∑n=0

|xn − λn| < (N + 1)ε

2(N + 1)<ε

2.

15. Si une telle suite n’existe pas alors VectA est de dimension finie, et donc ferme, et doncH = Vect(A) = Vect(A) est de dimension finie.

Page 84: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

84

Ainsi, grace a l’inegalite triangulaire∥∥∥∥∥x− N∑n=0

xnen︸ ︷︷ ︸∈A

∥∥∥∥∥ < ε

2+ε

2= ε,

ce qui prouve que A est dense dans H.

Remarque 4.34. Pour montrer qu’une famille (en)n∈N est une base hilbertienne,il suffit de verifier que

(i) (en)n∈N est une suite orthonormee,

(ii) si 〈x, en〉 = 0 pour tout n ∈ N alors x = 0.

En outre, si x = limxn avec xn ∈ Fn = Vect(e0, . . . , en) alors

xn =n∑k=0

〈x, ek〉ek = πFn(x)

Remarque 4.35. Attention a ne pas confondre la notion de base algebrique,pour laquelle tout vecteur de l’espace se decompose en une combinaison lineairefinie de vecteurs de la base et la notion de base hilbertienne ou l’on autorise dessommes infinies

x =∞∑k=0

〈x, ek〉ek.

Exemple 4.36. Si H = L2([−π, π]) alors (en)n∈Z avec en = einx est une basehilbertienne pour le produit scalaire

〈f, g〉 =1

∫ π

−πf(x)g(x) dx.

Le caractere orthonorme est un simple calcul, et il faut verifier que l’espace despolynomes trigonometriques

P = Vect(en : n ∈ Z) =¶e−imxP (eix) : P ∈ C[x]

©est dense dans H. On prolonge les fonctions de H en des fonctions periodiques.

Lemme 4.37. L’espace des polynomes trigonometriques est dense dans l’espacedes fonctions de carre integrable sur [−π, π].

Demonstration. Soit f ∈ L2([−π, π]) une fonction non nulle. On considere lepolynome trigonometrique Pn ∈ P

Pn(x) =1

2In(2 + cos x)n ≥ 0, In =

∫ π

0(2 + cos x)n dx

pour lequel on a ∫ π

−πPn(y) dy = 1,

Page 85: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

85

et on construit la suite

fn(x) =∫ π

−πPn(x− y)f(y) dy =

∫ π

−πPn(y)f(x− y) dy ∈ P .

Remarquons que par l’inegalite de Minkowski integrale, on a

‖fn‖L2 ≤∫ π

−πPn(y)‖f( · − y)‖L2 dy ≤ ‖f‖L2 .

On a alors

f(x)− fn(x) =∫ π

−π(f(x− y)− f(x))Pn(y) dy

et il en resulte par l’inegalite de Minkowski integrale

‖f − fn‖L2 ≤∫ π

−πPn(y)‖f( · − y)− f‖L2 dy

≤∫ δ

−δPn(y)‖f( · − y)− f‖L2 dy + 4‖f‖L2

∫ π

δPn(y) dy.

Comme la translation par y ∈ R est continue sur L2per(R), il existe δ > 0 tel que

‖f( · − y)− f‖L2 < ε2

pour tout y ∈ [−δ, δ] et donc

‖f − fn‖L2 ≤ ε

2

∫ δ

−δPn(y) dy︸ ︷︷ ︸≤1

+2‖f‖L2

∫ π

δ

(2 + cos y)n

Indy.

Pour conclure, il suffit de remarquer que

0 ≤∫ π

δ

(2 + cos y)n

Indy ≤ (2 + cos δ)n

In(π − δ) −→

n→∞0

carIn

(2 + cos δ)n=∫ δ

0

Ç2 + cos x

2 + cos δ

åndx︸ ︷︷ ︸

tend vers +∞par convergence monotone

+∫ π

δ

Ç2 + cos x

2 + cos δ

åndx︸ ︷︷ ︸

tend vers 0par convergence dominee

tend vers l’infini lorsque n tend vers l’infini. En effet, il existe N ∈ N tel quepour tout n ≥ N on a

0 ≤∫ π

δ

(2 + cos y)n

Indy <

ε

2‖f‖L2

ce qui entraıne

‖f − fn‖L2 <ε

2+ε

2= ε

pour tout entier n ≥ N .

Exemple 4.38. On considere l’espace de Hilbert H = L2(R, e−x2/2dx/

√2π)

muni du produit scalaire suivant

〈f, g〉 =1√2π

∫ ∞−∞

f(x)g(x)e−x2

2 dx

Page 86: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

86

et les polynomes de Hermite

Hn(x) =(−1)n

n!ex2

2

Åe−

x2

2

ã(n)

.

La suite des plynomes de Hermite (Hn)n∈N forment une base hilbertienne de H.En effet, on peut montrer par recurrence que Hn est un polynome de degre N etsi m > n alors

〈Hm, Hn〉 =(−1)m√

2πm!

∫ ∞−∞

Äe−

x2

2

ä(m)Hn(x) dx = 0

en integrant par parties. De meme si f ∈ H est orthogonal a tout polynome deHermite alors

0 = 〈f,Hn〉 =(−1)n√

2πn!

∫ ∞−∞

Åe−

x2

2

ã(n)

f(x) dx.

La transformee de Fourier de la gaussienne est la gaussienne, par consequent

FÇÅ

e−x2

2

ã(n)å

= (iξ)nFÅ

e−x2

2

ã=

1√2π

(iξ)ne−ξ2

2 .

Par Plancherel, on a

0 =1√2π

∫ ∞−∞

(iξ)n

n!e−

ξ2

2 f(ξ) dx

et par consequent en sommant une serie

0 =∫ ∞−∞

eixξe−ξ2

2 f(ξ) dx = F−1Äe−

ξ2

2 fä

soit e−ξ2

2 f = 0 et donc f = 0.

Theoreme 4.39 (Inegalite de Bessel). Soit (en)n∈N une base hilbertienne dansun espace de Hilbert H et soit x ∈ H alors

n∑k=0

|〈x, ek〉|2 ≤ ‖x‖2.

Demonstration. Soit Fn = Vect(e0, . . . , en) et soit xn =∑nk=0〈x, ek〉ek alors on a

〈x− xn, ej〉 = 0

et ainsi xn ⊥ Fn ce qui signifie

xn = πFn(x) =n∑k=0

〈x, ek〉ek.

On a alorsn∑k=0

|〈x, ek〉|2 = ‖πFn(x)‖2 ≤ ‖x‖2

car ‖πF‖ ≤ 1.

Page 87: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

87

Corollaire 4.40 (Egalite de Parseval). Soit (en)n∈N une base hilbertienne dansun espace de Hilbert H et soit x ∈ H alors x =

∑∞k=0〈x, ek〉ek et

‖x‖2 =∞∑k=0

|〈x, ek〉|2.

Demonstration. D’apres l’inegalite de Bessel, la serie∑k≥0 |〈x, ek〉|2 converge car

c’est une suite croissante bornee. De plus, avec les notations de la preuve del’inegalite de Bessel, la suite (xn)n∈N converge puisque c’est une suite de Cauchycar si m ≥ n

‖xm − xn‖2 =

∥∥∥∥∥ m∑k=n+1

〈x, ek〉ek∥∥∥∥∥

2

=m∑

k=n+1

|〈x, ek〉|2 ≤∞∑

k=n+1

|〈x, ek〉|2

Notons y la limite de cette suite, comme on a

〈x− y, ej〉 = limn→∞〈x− xn, ej〉 = 0

pour tout j ∈ N, on en deduit y = x. En outre, on a

〈x− xn, xn〉 = 0

et ainsi

‖x− xn‖2 = 〈x− xn, x〉 = ‖x‖2 − ‖xn‖2 = ‖x‖2 −∞∑k=0

|〈x, ek〉|2

tend vers 0 lorsque n tend vers l’infini.

Remarque 4.41. Un espace hilbertien separable est isomorphe a `2(N). L’iso-morphisme est donne par

F : H → `2(N)

x 7→ (〈x, en〉)n∈Nqui est une isometrie par Parseval. On a alors

〈x, y〉 =∞∑n=0

〈x, en〉〈y, en〉.

Remarque 4.42. Dans le cas H = L2([−π, π]), l’egalite de Parseval se lit

1

∫ π

−π|f(x)|2 dx =

∑n∈Z|cn(f)|2

ou

cn(f) = 〈f, en〉 =1

∫ π

−πf(x)e−inx dx

est le n-ieme coeffcient de Fourier de f . Rappelons que

Fn = Vect(ek, : −n ≤ k ≤ n)

Page 88: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

88

et la projection de F sur cet espace de polynomes trigonometriques est

Sn(f) = πFn(f) =n∑

k=−nck(f)eikx.

On a convergence L2 de la serie de Fourier (Sn(f))n∈N vers f

limn→∞

∫ 2π

0|f(x)− Sn(f)(x)|2 dx = 0.

4.7. Suites faiblement convergentes. Soit H un espace de Hilbert de dimen-sion infinie, d’apres le theoreme de Riesz, aucune boule de H ne peut-etre com-pacte et d’une suite bornee, on ne peut a priori pas extraire de sous-suite conver-gente. Neanmoins, si l’on est pret a affaiblir la notion de convergence, on peutgarder la propriete de Bolzano-Weiertrass.

Definition 4.43. On dit qu’une suite (un)n∈N d’un espace de Hilbert H convergefaiblement vers u ∈ H si pour tout v ∈ H on a

limn→∞〈un, v〉 = 〈u, v〉.

Dans ce cas, u est la limite faible de la suite (un)n∈N.

Remarque 4.44. La limite faible d’une suite (un)n∈N est unique : en effet, si uet u′ sont des limites faibles de (un)n∈N on a

〈u, v〉 = limn→∞〈un, v〉 = 〈u′, v〉

et donc

〈u− u′, v〉 = 0

pour tout v ∈ H, ce qui implique u = u′ si l’on choisit v = u− u′.

Remarque 4.45. La convergence faible correspond a une topologie qui n’est pasmetrisable et que nous ne decrirons pas.

Lemme 4.46. Une suite faiblement convergente est bornee.

Demonstration. Soit (un)n∈N une suite faiblement convergeante ; pour tout θ ∈ Havec ‖θ‖ = 1, la suite (〈un, θ〉)n∈N est convergente donc bornee, et on peut doncconsiderer

M(θ) = supn∈N|〈θ, un〉|.

La suite (un)n∈N est bornee si et seulement si

sup‖θ‖=1

M(θ) < +∞

car si ce supremum est fini

‖un‖ ≤M

Çun‖un‖

å≤ sup‖θ‖=1

M(θ)

Page 89: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

89

et reciproquement si la suite (un)n∈N est bornee alors

M(θ) ≤ supn∈N‖un‖, θ ∈ H, ‖θ‖ = 1.

Raisonnons par l’absurde et montrons que si sup‖θ‖=1 M(θ) = +∞ alors on peutconstruire une famille orthonormee (en)n∈N et une fonction ϕ : N → N stricte-ment croissante telle que pour tout entier n ∈ N

|〈uϕ(n), en〉| ≥ n

Çn+

n−1∑k=1

M(ek)

k

å〈uϕ(n), ek〉 = 0, ∀k ≥ n+ 1.

Supposons un instant que cette construction ait ete faite alors si l’on considere

v =∞∑n=1

enn

qui est bien defini car la serie∑n≥1 1/n2 est convergente, on a

|〈uϕ(n), v〉| =∣∣∣∣∣ n∑k=1

〈uϕ(n), ek〉k

+∞∑

k=n+1

〈uϕ(n), ek〉k︸ ︷︷ ︸=0

∣∣∣∣∣≥∣∣∣∣∣〈uϕ(n), en〉

n

∣∣∣∣∣− n−1∑k=1

|〈uϕ(n), ek〉|k

≥Çn+

n−1∑k=1

M(ek)

k

å−Ç n−1∑k=1

M(ek)

k

å= n

et la suite (〈uϕ(n), v〉)n∈N ne peut-etre convergente, ce qui contredit le fait que(un)n∈N est faiblement convergente.

Il reste a construire par recurrence la suite (en)n∈N et la fonction ϕ. Supposonsque l’on ait construit e0, e1 . . . , en des vecteurs orthonormes et ϕ(0) < ϕ(1) <· · · < ϕ(n) tels que

|〈uϕ(m), em〉| ≥ m

Çm+

m−1∑k=1

M(ek)

k

å〈uϕ(m), ek〉 = 0, m+ 1 ≤ k ≤ n

pour tout 0 ≤ m ≤ n. On considere le sous-espace vectoriel

V = Vect(e0, e1, . . . , en, u0, u1, . . . , uϕ(n))

et l’espace de Hilbert se decompose selon

H = V ⊕ V ⊥.On remarque alors que

supk∈N‖πV ⊥(uk)‖ = sup

k∈Nsupw∈V ⊥‖w‖=1

|〈uk, w〉| = +∞.

Page 90: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

90

Si ce n’etait pas le cas alors en notant M = supk∈N ‖πV ⊥(uk)‖, comme

‖uk‖2 = ‖πV (uk)‖2 + ‖πV ⊥(uk)‖2

on aurait en notant (v1, . . . , vm) une base orthonormee de V avec m = dimV

‖uk‖2 =m∑j=1

|〈uk, vj〉|2 + ‖πV ⊥(uk)‖2 ≤m∑j=1

M(vj)2 +M2,

ce qui contredit l’hypothese slon laquelle la suite (uk)k∈N est non bornee. Commesupk∈N supw∈V ⊥,‖w‖=1 |〈uk, w〉| = +∞, il existe en+1 ∈ V ⊥ et ϕ(n + 1) ∈ N telque

|〈en+1, uϕ(n+1)〉| ≥ (n+ 1)

Çn+ 1 +

n∑k=1

M(ek)

k

å.

On a forcement ϕ(n + 1) ≥ ϕ(n) + 1 car 〈en+1, uk〉 = 0 pour tout 0 ≤ k ≤ϕ(n). En outre en+1 ⊥ uϕ(0), . . . , uϕ(n), ce qui termine donc la construction parrecurrence.

Lemme 4.47. On considere un espace de Hilbert H separable de diimensioninfinie et (en)n∈N une base hilbertienne de H. Soit u ∈ H et (un)n∈N une suitebornee telle que pour tout k ∈ N on ait

limn→∞〈un, ek〉 = 〈u, ek〉

alors (un)n∈N converge faiblement vers u.

Demonstration. Par Cauchy-Schwarz, on a |〈un − u, ek〉| ≤ ‖u‖ + M et parconsequent

|〈un − u, v〉| ≤m∑k=0

|vk||〈un − u, ek〉|+ (‖u‖+M)∞∑k=m

|vk|2

avec vk = 〈v, ek〉. On choisit alors m ∈ N assez grand de telle sorte que

∞∑k=m

|vk|2 <ε

2(M + ‖u‖)

et pour tout 0 ≤ k ≤ m, il existe Nk tel que

|〈un − u, ek〉| <ε

(m+ 1)(1 + |vk|)pour tout n ≥ Nk. On en deduit

|〈un − u, v〉| <ε

2+ε

2= ε.

pour tout n ≥ N = max(N0, . . . , Nk).

Theoreme 4.48 (Banach-Alaoglu). De toute suite bornee (un)n∈N d’un espacede Hlbert separable, on peut extraire une sous-suite faiblement convergente.

Page 91: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

91

Demonstration. Soit (en)n∈N une base hilbertienne, d’apres le lemme precedent,il suffit d’extraire une sous-suite et de trouver u ∈ H tels que

〈uϕ(n) − u, ek〉 = 0

pour tout k ∈ N. On utilise le procede diagonal de Cantor pour cela. Comme(〈un, e0〉)n∈N est une suite born’ee de nombres par Cauchy-Schwarz, il existe unesous suite (〈uϕ0(n), e0〉)n∈N convergeant vers u0 ∈ K, et comme (〈uϕ0(n), e1〉)n∈Nest une suite bornee de nombres, il existe une sous suite (〈uϕ0ϕ1(n), e1〉)n∈Nconvergeant vers u1 ∈ K. En iterant, on construit une suite d’extractrices

ϕ0, . . . , ϕn, . . .

telles que

(〈uϕ0···ϕm(n), ek〉)n∈N converge vers uk

pour tout k = 0, . . . ,m. On considere alors

ϕ(n) = ϕ0 · · · ϕn(n)

qui est strictement croissante car de ϕn+1(n+ 1) ≥ n+ 1 > n on tire ϕ(n+ 1) >ϕ(n). Montrons que

limn→∞〈uϕ(n), ek〉 = uk.

Soit k ∈ N et soit ε > 0, il existe N ∈ N tel que pour tout m ≥ N

|〈uϕk(m), ek〉 − uk| < ε

et comme ϕ(n) = ϕk(ϕk+1 · · · ϕn(n)) avec ϕk+1 · · · ϕn(n) ≥ n, on a

|〈uϕ(n), ek〉 − uk| < ε

pour tout n ≥ N . On considere alors

u =∞∑k=0

ukek

qui est bien defini car en passant a la limite dans l’inegalite de Bessel

m∑k=0

|〈uϕ(n), ek〉|2 ≤M2

on obtientm∑k=0

|uk|2 ≤M2

et donc que la serie∑k≥0 |uk|2 converge. On a donc la propriete desiree car uk =

〈u, ek〉.

Page 92: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

92

5. Series de Fourier

Soit f une fonction 2π-periodique mesurable et integrable sur l’intervalle [−π, π](et donc sur tout intervalle de taille 2π)∫ π

−π|f(x)| dx <∞,

on lui associe ses coefficients de Fourier

ck(f) =∫ π

−πf(x)e−ikx dx.

La serie de Fourier de f est la suite des sommes partielles (symetriques)

Sn(f)(x) =n∑

k=−nck(f)eikx.

La question de la convergence des series de Fourier et de savoir sous quelles condi-tions cette serie converge vers la fonction f (et pour quel type de convergence).

Lemme 5.1 (Riemann-Lebesgue). Soit f ∈ L1([−π, π]) alors

limn→±∞

cn(f) = 0.

Demonstration. Supposons que f soit de classe C1 et 2π periodique alors enintegrant par parties, on a

cn(f) =1

2inπ

∫ π

−πf ′(x)e−ikx dx =

cn(f)

2inπ

Soit f ∈ L1([−π, π]) et soit ε > 0 alors il existe g ∈ C1 2π-periodique telle que

‖f − g‖L1 <ε

2

et il existe N ∈ N tel que pour tout entier relatif n avec |n| ≥ N on ait

|cn(g)| ≤ ε

2.

On en deduit

|cn(f)| < ε

2+ |cn(f − g)| ≤ ε

2+ ‖f − g‖L1 <

ε

2+ε

2= ε

pour tout entier relatif n ∈ Z tel que |n| ≥ N .

Lemme 5.2. Soit f une fonction 2π periodique et integrable sur [−π, π] alors fest integrable sur n’importe quel intervalle de taille 2π et∫ a+2π

af(x) dx =

∫ π

−πf(x) dx.

Page 93: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

93

Demonstration. On a∫ a+2π

af(x) dx = −

∫ a

−πf(x) dx+

∫ π

−πf(x) dx+

∫ a+2π

πf(x) dx

et ∫ a

−πf(x) dx =

∫ a+2π

πf(x) dx

par le changement de variable y = x− 2π dans l’integrale de droite.

Remarque 5.3. Le produit de convolution de deux fonctions periodiques f, g ∈L1([−π, π])

f ∗ g(x) =∫ π

−πf(x− y)g(y) dy

est commutatif

f ∗ g(x) = g ∗ f(x) =∫ π

−πf(y)g(x− y) dy

car par changement de variable et grace au lemme precedent∫ π

−πf(y)g(x− y) dy =

∫ π+x

−π+xf(x− z)g(z) dz =

∫ π

−πf(x− z)g(z) dz.

5.1. Noyau de Dirichlet, noyau de Fejer. Il est commode de voir les sommesde Fourier sous la forme d’un produit de convolution. On calcule

Sn(f)(x) =n∑

k=−nck(f)eikx =

∫ π

−π

1

n∑k=−n

eik(x−y)

︸ ︷︷ ︸=Dn(x−y)

f(y) dy

et on introduit le noyau de Dirichlet

Dn(x) =1

n∑k=−n

eikx =1

Ç1 + 2 Re

n∑k=1

eikxå

=1

sin(n+ 12)x

sin x2

.

Ainsi, on peut ecrire la somme de Fourier comme un produit e convolution

Sn(f)(x) = Dn ∗ f(x) =∫ π

−πDn(x− y)f(y) dy =

∫ π

−πDn(y)f(x− y) dy.

Remarquons que l’on a ∫ π

−πDn(x) dx = Sn(1) = 1.

De meme si l’on interesse aux sommes de Cesaro (moyenne des Sn(f))

σn(f)(x) =1

n

n−1∑k=0

Sk(f) =∫ π

−π

1

n

n−1∑k=0

Dk(x− y)︸ ︷︷ ︸=Fn(x−y)

f(y) dy

Page 94: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

94

on peut introduire le noyau de Fejer

Fn(x) =1

n

n∑k=0

Dk(x) =1

2πn

n∑k=0

sin(k + 12)x

sin x2

=1

2πn

sin2 n2x

sin2 x2

≥ 0

et on peut alors ecrire la somme de Cesaro comme un produit de convolution

σn(f)(x) = Fn ∗ f(x) =∫ π

−πFn(x− y)f(y) dy =

∫ π

−πFn(y)f(x− y) dy.

Remarquons que l’on a comme pour le noyau de Dirichlet∫ π

−πFn(x) dx = σn(1) = 1.

5.2. Theoreme de Dirichlet. On note

f(x+ 0) = limh→0+

f(x+ h), f(x− 0) = limh→0+

f(x− h)

lorsque ces limites existent.

Theoreme 5.4 (Dirichlet). Soit f une fonction 2π-periodique, integrable sur[−π, π] et soit x ∈ [−π, π] tels que les limites f(x± 0) existent et tels qu’il existeδ > 0 tel que∫ δ

0

|f(x+ h)− f(x+ 0)|h

dh <∞,∫ δ

0

|f(x− h)− f(x− 0)|h

dh <∞

alors on a

limn→∞

Sn(f)(x) =f(x+ 0) + f(x− 0)

2.

Remarque 5.5. Si f est une fonction 2π periodique et derivable par morceaux,i.e. il existe une subdivision a0 = −π < a1 < · · · < an < an+1 = π telle que f soitderivable sur les intervalles ]aj, aj+1[ et se prolonge en une fonction derivable 16

sur [aj, aj+1] pour tout 0 ≤ j ≤ n, alors elle verifie les hypotheses du theoremede Dirichlet.

En effet, si x ∈]aj, aj+1[, alors f est continue en x donc f(x± 0) = f(x) et onchoisit δ > 0 assez petit de sorte que x+ δ ∈]aj, aj+1[ et∣∣∣∣∣f(x+ h)− f(x)

h− f ′(x)

∣∣∣∣∣ ≤ 1

pour tout h ∈ [−δ, δ[ ce qui implique∫ δ

−δ

|f(x+ h)− f(x)|h

dh ≤ (1 + |f ′(x)|)δ.

Si x = aj alors f se prolonge en une fonction f derivable sur [aj, aj+1], comme

f(aj + h) = f(aj + h) = f(aj) + cjh+ o(h)

16. Ce qui signifie que le prolongement est derivable a droite en aj et a gauche en aj+1.

Page 95: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

95

avec cj la derivee a droite de f en aj, on en deduit f(aj) = f(aj + 0), et ainsi ilexiste δ > 0 tel que ∣∣∣∣∣f(aj + h)− f(aj + 0)

h− cj

∣∣∣∣∣ ≤ 1

ce qui donne comme auparavant∫ δ

−δ

|f(aj + h)− f(aj + 0)|h

dh ≤ (1 + cj)δ.

Et les calculs sont similaires a gauche 17 de aj.

Demonstration. On commence par observer que

Sn(f)(x)− f(x− 0) =∫ π

−πDn(y)(f(x− y)− f(x− 0)) dy

et comme le noyau de Dirichlet est paire

Sn(f)(x)− f(x− 0) =∫ π

−πDn(y)(f(x+ y)− f(x+ 0)) dy.

En faisant la moyenne des deux egalites precedentes, on trouve

Sn(f)(x)− f(x+ 0) + f(x− 0)

2

=1

2

∫ π

−πDn(y)(f(x+ y) + f(x− y)− f(x+ 0)− f(x− 0)) dy

soit, etant donne que l’integrande est paire

Sn(f)(x)− f(x+ 0) + f(x− 0)

2

=∫ π

0Dn(y)(f(x+ y) + f(x− y)− f(x+ 0)− f(x− 0)) dy.

On pose alors

g±(y) =f(x± y)− f(x± 0)

2 sin y2

.

On a

g± ∈ L1([0, π])

car 2 sin(y/2) ≥ y et donc∫ π

0|g±(h)| dh ≤

∫ δ

0|g±(h)| dh+

∫ π

δ|g±(h)| dh

≤∫ δ

0

|f(x± h)− f(x± 0)|h

dh+1

2 sin δ2

Ä‖f‖L1 + |f(x± 0)|

ä.

17. Dans le cas ou j = 0 ou j = n+ 1, il faut utiliser la periodicite.

Page 96: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

96

Par le theoreme de Riemann-Lebesgue, on a

limn→∞

∫ π

0g±(x)eixei

n2x dx = lim

n→∞2(−1)n

∫ π

−πg±(2x+ π)ei2x︸ ︷︷ ︸

∈L1

einx dx = 0

et de meme

limn→∞

∫ π

0g±(x)e−ix︸ ︷︷ ︸∈L1

e−in2x dx = 0

ce qui implique que

Sn(f)(x)− f(x+ 0) + f(x− 0)

2=∫ π

0(g+(x) + g−(x)) sin

ÄÄn+ 1

2

äxä

dx

tend vers 0 et acheve donc la demonstration.

5.3. Theoreme de Fejer et convergence L2. Le premier theoreme concerneles moyennes de Cesaro σn(f) des sommes de Fourier, il y a convergence danstous les espaces de Lebesgue (pour L∞ il faut supposer de plus la continuite def).

Theoreme 5.6 (Fejer). Soit f ∈ C0(R) periodique de periode 2π alors on a

limn→∞

‖σn(f)− f‖L∞ = 0.

Soit f ∈ Lp([−π, π]) avec 1 ≤ p <∞ alors on a

limn→∞

‖σn(f)− f‖Lp = 0.

Demonstration. On commence par observer que

σn(f)(x)− f(x) =∫ π

−πFn(y)(f(x− y)− f(x)) dy.

Soit ε > 0, comme f est continue sur [−π, π], f est uniformement continue graceau theoreme de Heine, il existe donc δ > 0 tel que

|y| < δ ⇒ |f(x− y)− f(x)| < ε

2.

On a alors

|σn(f)(x)− f(x)| ≤ ε

2

∫ δ

−δFn(y) dy︸ ︷︷ ︸≤1

+4‖f‖L∞∫ π

δFn(y) dy

or on a ∫ π

δFn(y) dy ≤ π − δ

2πn sin2 δ2

−→n→∞

0

et il existe N ∈ N tel que pour tout n ≥ N on ait∫ π

δFn(y) dy ≤ ε

8‖f‖L∞

Page 97: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

97

ce qui implique

‖σn(f)− f‖L∞ <ε

2+ε

2= ε

pour tout n ≥ N .Soit maintenant f ∈ Lp([−π, π]) avec 1 ≤ p <∞, commencons par remarquer

que l’inegalite de Minkowski integrale

‖σn(f)‖Lp ≤∫ π

−π‖Fn(y)f( · − y)‖Lp dy ≤ ‖f‖Lp .

Soit ε > 0, il existe g ∈ C0([−π, π]) periodique telle que

‖f − g‖Lp ≤ε

3

et on a alors

‖σn(f)− f‖Lp ≤ ‖σn(f − g)‖Lp + ‖σn(g)− g‖Lp + ‖g − f‖Lp

≤ (2π)1p‖σn(g)− g‖L∞ + 2‖g − f‖Lp

et comme d’apres la premiere partie de la preuve, il existe N ∈ N tel que

‖σn(g)− g‖L∞ <ε

3(2π)1p

on en deduit

‖σn(f)− f‖Lp <2ε

3+ε

3= ε

pour tout n ≥ N .

Le theoreme de Fejer fournit une autre preuve du fait que (einx)n∈Z est unebase hilbertienne.

Corollaire 5.7. L’espace des polynomes trigonometriques est dense dans L2([−π, π])

Demonstration. Si f ∈ L2([−π, π]) est telle que cn(f) = 〈f, einx〉 = 0 alors on aσn(f) = 0 et donc

‖f‖L2 = limn→∞

‖σn(f)− f‖L2 = 0

soit f = 0.

On peut appliquer les resultats de l’analyse hilbertienne.

Theoreme 5.8. Soit f ∈ L2 alors on a

limn→∞

‖Sn(f)− f‖2L2 = lim

n→∞

∫ π

−π|Sn(f)(x)− f(x)|2 dx = 0

et on a l’egalite de Parseval

‖f‖2L2 =

1

∫ π

−π|f(x)|2 dx =

∑n∈Z|cn(f)|2.

Page 98: TOPOLOGIE ET ANALYSE HILBERTIENNE

98

5.4. D’autres theoremes de convergence. Il existe d’autres resultats de con-vergence (ou de divergence) des series de Fourier. Certains sont difficiles, voiretres difficiles a demontrer. Comme on a vu la convergence dans L2, on peuts’interesser a la convergence dans Lp.

Theoreme 5.9 (Convergence Lp). Soit f ∈ Lp([−π, π]) avec 1 < p < ∞ alorslimn→∞ ‖Sn(f)− f‖Lp = 0

La demonstration est delicate, et passe par des estimations de continuite surla transformee de Hilbert. La convergence Lp implique qu’il existe une sous-suitede sommes de Fourier qui converge presque partout. En fait, il y a convergencepresque partout pour la serie de Fourier.

Theoreme 5.10 (Carleson-Hunt). Soit f ∈ Lp([−π, π]) avec 1 < p < ∞ alorsf(x) = limn→∞ Sn(f)(x) pour presque tout x ∈ [−π, π].

Il n’existe pas a ce jour de demonstration simple de ce resultat du a Carleson(dans le cas p = 2) et a Hunt (dans le cas p > 1). On peut egalement citer desresultats de divergence.

Theoreme 5.11. Soit x ∈ [−π, π], il existe une fonction f ∈ C0([−π, π]) periodiquetelle que (Sn(f)(x))n∈N diverge.

Une demonstration de ce resultat passe par le theoreme de la borne uniformeou theoreme de Banach-Steinhaus qui sera vu en Master 1. Enfin, il existe unresultat de Kolmogorov qui montre que le cas des fonctions L1 est pathologiquepour la convergence.

Theoreme 5.12 (Kolmogorov). Il existe une fonction f ∈ L1([−π, π]) dont laserie de Fourier diverge pour presque tout x ∈ [−π, π].

En particulier, le theoreme de Carleson et Hunt ne s’applique pas pour lesfonctions L1.

Annexe A. Espaces de Hilbert non separables

Dans cet appendice, on veut considerer le cas des espaces de Hilbert qui ne sontpas necessairement separables et montrer qu’ils admettent une base hilbertienne,i.e. une famille (non denombrable si l’espace n’est pas separable) orthonormeetotale.

Theoreme A.1. Dans un espace de Hilbert non reduit a 0, il existe une basehilbertienne.

A.1. Lemme de Zorn. Pour pouvoir demontrer l’existence d’une base hilber-tienne, il nous faudra disposer d’un principe, proche du principe de recurrence(qui stoppe pour ainsi dire une induction), permettant de choisir notre familleorthonormee maximale. Rappelons que le principe de recurrence peut se deduirede l’axiome suivant sur les entiers naturels :

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Axiome. Tout ensemble non vide d’entiers naturels admet un plus petit element.

En effet, si (Hn)n∈N est une famille d’hypotheses fondee et hereditaires alorssi l’ensemble E = n ∈ N : Hn est fausse est non vide, il contient un plus petitelement n0 ≥ 1 (car 0 /∈ E), pour lequel n0− 1 /∈ E. Le caractere hereditaire per-met alors d’affirmer que n0 /∈ E, fournissant ainsi une contradiction, et etablissantE = ∅.

Le principe de recurrence est donc intimement lie a la notion d’ordre. Unensemble ordonne est dit inductif si tout sous-ensemble totalement ordonne (i.e.pour lequel on peut toujours comparer deux elements : a, b ∈ Q⇒ a ≤ b ou b ≤a) admet un majorant. Un element maximal d’un ensemble ordonne (P,≤) estun element de a ∈ P l’ensemble tel que

b ∈ P et a ≤ b⇒ a = b.

Lemme de Zorn. Un ensemble non vide ordonne et inductif admet un elementmaximal.

Le lemme de Zorn est equivalent a l’axiome du choix. Nous laisserons ces as-pects de cote. Pour illustrer l’utilite du lemme de Zorn (et donner un avant goutde l’esprit de la preuve de l’existence d’une base hilbertienne), on peut demontrerl’existence d’une base dans un espace vectoriel (de dimension finie ou non).

Theoreme A.2. Dans un espace vectoriel non reduit a 0, il existe une base(i.e. une famille libre et generatrice de vecteurs).

Demonstration. On considere l’ensemble P des familles libres de vecteurs de l’es-pace vectoriel E 6= 0, que l’on munit de l’ordre par l’inclusion. L’ensemble Pest non vide (car v ∈ P si v 6= 0) et inductif : si Q ⊂ P est un ensemblede familles libres de vecteurs totalement ordonnes, alors on peut construire unmajorant par concatenation

S =⋃S∈Q

S.

Verifions que S est une famille libre : soit (v1, . . . , vn) une famille de S alors ilexiste (S1, . . . , Sn) des familles libres telles que vj ∈ Sj. Comme Q est totalementordonne, on peut comparer les familles Sj deux a deux ; supposons pour fixer lesidees que S1 est la plus grande, i.e.

vj ∈ Sj ⊂ S1.

Supposons alors que∑nj=1 λjvj = 0 ; comme S1 est libre, on a λ1 = · · · = λn = 0.

D’apres le lemme de Zorn, il existe une famille libre maximale B ∈ P . Cettefamille est generatrice, car si x ∈ E, B∪x ne peut etre libre (sinon B ne seraitpas maximal), et ainsi il existe v1, . . . , vm ∈ B et des scalaires (λ0, λ1, . . . λm) telsque

λ0x+n∑k=1

vk = 0.

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Le scalaire λ0 ne peut etre nul car sinon (v1, . . . , vm) serait liee, et B egalement,donc on peut ecrire x comme une combinaison lineaire des vj.

A.2. Existence d’une base hilbertienne. Il est clair qu’une base hilbertienneest une famille orthonormee qui est maximale pour l’inclusion ; en effet si (eα)α∈Aest une base hilbertienne, et si (fβ)β∈B est une famille contenant (eα)α∈A alors sion avait fβ qui n’etait pas dans (eα)α∈A, on aurait

〈fβ, eα〉 = 0

pour tout α ∈ A car (eα)α∈A est incluse dans (fβ)β∈B qui est orthonormee et fβ 6=eα. Comme (eα)α∈A est totale, cela implique fβ = 0, ce qui est en contradictionavec ‖fβ‖ = 1. Il est donc logique d’utiliser le lemme de Zorn pour construire unefamille orthonormee maximale, qui sera la base hilbertienne recherchee.

Demonstration du Theoreme A.1. On considere l’ensemble P des familles ortho-normees de l’espace de Hilbert H 6= 0, que l’on munit de l’ordre par l’inclusion.L’ensemble P est non vide (car v/‖v‖ ∈ P si v 6= 0) et inductif : si Q ⊂ Pest un ensemble de familles orthonormees totalement ordonnes, alors on peutconstruire un majorant par concatenation

S =⋃S∈Q

S.

Verifions que S est une famille orthonormee : si v, w ∈ S alors v ∈ S et w ∈ T ,et comme Q est totlement ordonne, on a S ⊆ T ou T ⊆ S. Supposons que S estla plus grande alors v, w ∈ S et comme S est une famille orthonormee :

〈v, w〉 = 0 si v 6= w, ‖v‖2 = ‖w‖2 = 1

et donc S est une famille orthonormee. D’apres le lemme de Zorn, il existe unefamille orthonormee maximale B ∈ P . Montrons que B est totale, i.e. VectB =H, ce qui equivaut a (VectB)⊥ = 0. Si ce netait pas le cas, il existerait x ∈(VectB)⊥ non nul, et dans ce cas B ∪ x/‖x‖

©serait une famille orthonormee

strictement plus grande que B ce qui est en contradiction avec le fait que B estmaximal pour l’inclusion.