théorie financière : un survol théorique

54
  Othman GAGA [email protected]   La théorie financière : un survol théorique

Upload: othman-gaga

Post on 20-Jul-2015

447 views

Category:

Documents


1 download

DESCRIPTION

si vous rencontrez des problèmes de téléchargement, contactez-moi via : [email protected] ou encore mon compte twitter : @GAGAOthman

TRANSCRIPT

Page 1: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 1/54

 

Othman GAGA

[email protected] 

La théorie financière : un survol

théorique

Page 2: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 2/54

 

Avertissement:

Le présent document est un passage du mémoire : « la Théorie

financière : entre cœur et périphérie – une approche par la

régression quantile » qui a été soutenu en vue de l’obtention du

Master de recherche en Finance Appliquée délivré par l’Université

Cadi Ayyad de Marrakech. En cela, la diffusion de ce document se fait

dans le respect du droit d’auteur. L’utilisation totale ou partielle dudocument à des fins pédagogiques et non commerciales est admise à

condition de citer l’auteur.

Page 3: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 3/54

 

Tables des matières :

Introduction : ........................................................................................................................................... 1

Chapitre 1 : Les agents économiques en théorie financière : l’homo-economicus face aux biais

psychologiques. ................................................................................................................................... 4

1. La théorie de la finance moderne : le paradigme ................................................................... 4

a) Les hypothèses de l’efficience des marchés : ...................................................................... 4

b) De l’analyse moyenne-variance au modèle d’équilibre des actifs financiers : ................... 7

(i) L’analyse moyenne-variance : ......................................................................................... 7

(ii) Le modèle d’équilibre des actifs financiers : ............................................................... 9

c) Le modèle d’évaluation par arbitrage : ............................................................................. 12

2. La finance comportementale : l’antithèse. ........................................................................... 14

a) la limite à l’arbitrage : ........................................................................................................ 14

b) Biais Psychologiques : ........................................................................................................ 17

(i) Formation des jugements : ............................................................................................ 18

(ii) Préférences et anticipations : .................................................................................... 20

Chapitre 2 : Implications de l’hétérogénéité des anticipations sur la formation des prix. ........... 24

1. Hétérogénéité des anticipations : ......................................................................................... 24

a) Asymétrie d’information et formation des comportements : .......................................... 24

(i) L’HEM : une redéfinition. .............................................................................................. 24

(ii) le Herding dans les marchés financiers : une approche rationaliste. ....................... 26

(1) Cascade informationnelle : .................................................................................... 26

(2) Le herding basé sur la compensation : .................................................................. 29

b) L’hétérogénéité des anticipations liée à l’irrationalité :.................................................... 30

(i) La théorie du feedback : ................................................................................................ 30

(ii) Le marché en situation de sous-réaction et de sur-réaction : .................................. 32

2. La riposte de l’HEM : entre modèle multifactoriel et suspicion méthodologique. ............... 35

a) Le modèle de Fama-French : ............................................................................................. 35

(i) Genèse et présentation du modèle : ............................................................................. 35

(ii) Interprétation des facteurs de risque et limites du modèle : ................................... 37

b) Suspicions méthodologiques : quand les anomalies deviennent artéfacts. ..................... 40

Bibliographie.......................................................................................................................................... 44

Page 4: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 4/54

 

Liste des figures :

Figure 1 Choix du portefeuille efficient qui maximise la fonction d'utilité ...................................... 7

Figure 2 Transformation de la frontière efficiente en présence de l'actif sans risque..................... 8

Figure 3 La droite CML et la droite SML ............................................................................................ 10

Figure 4 Schéma Méthodologique des tests empiriques de l'HEM .................................................. 12

Figure 5 Pondération des probabilités et la fonction de valeur....................................................... 21

Figure 6 Situation de sous-réaction suite à une nouvelle information ........................................... 33

Figure 7 Situation de sur-réaction de la part des marchés............................................................... 34

Figure 8 Schéma méthodologique des tests des anomalies ............................................................. 42

Page 5: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 5/54

1

Introduction :

Plus que toute autre discipline économique, l’économie financière est, probablement, celle

qui noue la relation la plus forte avec les agents économiques, dans la personne des

investisseurs, d’une part et les institutions, régissant les marchés financiers, d’autre part. En

effet, la théorie financière fournit, aux premiers, les directives en matières d’investissement

tandis qu’elle offre, aux secondes, les principales orientations en vue d’établir des politiques

ad hoc. L’implication majeure de cette relation r éside dans le rapprochement entre la théorie

et la réalité. En cela, l’analyse économico-financière, aussi normative soit-elle, n’a de valeur 

que si elle est validée empiriquement par les données. La théorie financière la plus imposante

est celle de l’efficience des marchés (Fama, 1965 ; Samuelson, 1965). Celle-ci peut être

perçue comme étant une application de la pensée néoclassique aux marchés financiers. Sur

cette base repose les principaux modèles, dits rationnels, d’évaluation des actifs financiers tels

que le modèle d’équilibre des actifs financiers (Sharpe, 1965, Lintner, 1965) et le modèle

d’évaluation par arbitrage (Ross, 1976). L’ensemble de ces travaux constitue un corpus plus

connu sous le nom de la théorie de la finance moderne(ci-après TFM). Cette dernière

constitue la cœur de la théorie financière. 

La TFM est une approche normative, s’inscrivant dans la tradition de l’école néoclassique, qui

consiste à privilégier l’analyse des marchés en situation d’équilibre. En cela, l’explication et

la modélisation des répercussions des interactions des différents agents économiques, opérant

dans des marchés complexes, se trouvent sacrifiées sous l’autel de l’homogénéisation des

anticipations. le but étant de faire prévaloir l’analyse du marché. Cette conception des

marchés financiers a permis plusieurs avancées aussi bien sur le plan théorique que sur le plan

pratique. En effet, le risque est devenu mesurable avec les travaux de Markowitz (1952,

1958). La valeur d’équilibre des actifs est devenu calculable1. Plus encore, la relation entre

rentabilité et risque est devenue tangible.

Cela étant dit, les récents développements qu’ont connus les marchés financiers, tels que le

renforcement de la liquidité, l’élargissement des produits financiers (produits dérivés, marché

de change…) et, surtout, la fréquence alarmante des crises financières, ont mis à mal la place

occupée par la TFM. En effet, entre crises boursières et rentabilités anormales, les

1Modèles cités ci-haut.

Page 6: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 6/54

2

prescriptions de la TFM ne semblent plus trouver un écho dans la réalité. Cet état de fait a

induit une tollé de critiques, principalement en dehors du cercle académique, concluant, à tort

ou à raison, la défaillance de la théorie financière.

D’un autre côté, maints travaux ont pris comme point de départ le relâchement de certaines

hypothèses de la TFM afin d’étudier le comportement des marchés. Ces travaux portent

notamment sur le manque de rationalité des investisseurs et l’asymétrie de l’information.

Citons à titre d’exemple la théorie de la finance comportementale qui est considérée comme

étant le principal rival de la TFM. Contrairement à cette dernière, ces travaux constituent la

 périphérie de la théorie financière. L’objectif de la périphérie réside dans l’explication des

sous- problèmes. En d’autres termes, le but est d’expliquer certaines situations et événements

isolés en s’appuyant sur l’interaction des agents. En effet, la principale conclusion de ces

travaux est que l’absence d’une des hypothèses de la TFM conduit probablement à des

anticipations hétérogènes et par voie de conséquence à un déséquilibre quasi-structurel des

marchés.

Par ailleurs, la méthodologie adoptée par la périphérie est positive. Ce choix méthodologique

empêche toute extrapolation à une généralisation des prescriptions de la périphérie à

l’ensemble du marché. De surcroît, le lien entre la périphérie et la réalité est très dur à établir.

En effet, les théories périphériques expliquent les phénomènes financiers de façon isolée, et

ainsi les détecter à travers les données disponibles est une tâche ardue.

Alors, pourquoi parle-t-on encore de la périphérie ? l’une des principales raisons est que celle-

ci explique certains aspects qui ont été longtemps éludé par la TFM. D’une autre part, les

difficultés éprouvées par cette dernière constitue le fer de lance de la périphérie. Par

difficultés, nous entendons la présence notoire des anomalies (i.e. rentabilités anormales qui

ne sont pas justifiées par le risque) et certaines crises telles que les bulles spéculatives . En

effet, ces phénomènes ne trouvent pratiquement aucune justification tangible de la part du

cœur de la théorie financière. Certaines explications telles que le modèle multifactoriel de

Fama-French (Fama et French, 1993), partant d’une logique inductive, attribuent la présence

des anomalies comme étant des facteurs de risque. Cela dit, cette proposition a causé un débat

houleux aussi bien de la part du cœur que de la périphérie.  

Cependant, il convient de noter que les explications de ces phénomènes, provenant de la

 périphérie, demeurent purement hypothétiques en raison de l’absence de lien tangible entre les

volets théoriques et empiriques de la périphérie. C’est d’ailleurs pour cette raison que le

Page 7: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 7/54

3

 présent document n’analysera que très brièvement les travaux liés aux anomalies, et ce

principalement pour deux raisons. La première est due à une large documentation concernant

ces phénomènes. La seconde est due au fait que ces phénomènes ne peuvent être liés ni au

renforcement de la périphérie ni à la défaillance du cœur de la théorie financière. 

En fait, ce modeste travail se propose de privilégier un débat théorique mettant en relief les

 principales conclusions du cœur et de la périphérie en mettant l’accent sur la dynamique

pouvant exister entre les agents. Le but étant de dresser, en premier lieu, un état des lieux des

principaux résultats de la périphérie. En second lieu, le présent mémoire présentera les

difficultés empiriques des théories périphériques ainsi que les critiques adressées à ces

théories de la part des tenants de la TFM.

Page 8: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 8/54

4

Chapitre 1 : Les agents économiques en théorie financière : l’homo-

economicus face aux biais psychologiques.

Ce premier chapitre a pour finalité la présentation du rôle de l’agent économique dans lathéorie financière. A cet effet, nous allons passer en revue les principales évolutions de cette

dernière en passant de la théorie de la finance moderne à la finance comportementale.

Toutefois, il est à souligner que certains concepts ne seront traités que brièvement en vue de

ne pas encombrer ledit chapitre. Cela dit, chaque concept traité sera lié à une référence pour

de plus amples explications. De surcroît, certaines notions importantes seront accompagnées

d’un encadré disponible dans les annexes. 

La section 1 abordera les principaux développements de la finance moderne alors que la

section 2 s’attèlera sur les rouages de la finance comportementale.

1.  La théorie de la finance moderne : le paradigme

a)  Les hypothèses de l’efficience des marchés :

La théorie d’efficience (notée HEM ci-après) a façonné la théorie financière tant par ses

multiples implications que par ses vastes ramifications, au point de s’élever au rang de

dogme. En vue de mieux cerner cette notion, il convient d’énoncer les hypothèses sur 

lesquelles elle repose :

  H1 : les marchés sont sans frictions (absence des coûts de transaction) ;

  H2 : l’information est gratuite et est connue par la totalité des agents ;

  H3 : les agents sont tous d’accord sur l’implication de l’information actuelle () à la

fois sur les prix actuels () et sur la distributions des prix futurs ().

Force est de constater que ces hypothèses sont, pour le moins, restrictives. Toutefois, les

 partisans de l’HEM avancent qu’elles sont, certes, suffisantes mais pas nécessaires. Ainsi

Fama (1970) écrivait-il : « …Mais un marché sans friction où l’information est disponible

 gratuitement et où les investisseurs s’accordent sur son implication n’ est pas une description

réaliste des marchés. Heureusement, ces conditions sont suffisantes mais pas nécessaires… »

Sous la lumière de ces hypothèses, les marché reflètent totalement et correctement l’ensemble

des informations pertinentes à la détermination des prix des actifs (Fama, 1965). De façon

 plus formelle, les prix suivent une martingale (Samuelson,1965). Bien que d’autres

Page 9: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 9/54

5

économistes tels que Fama (1965) aient proposé le modèle de marche aléatoire, la martingale

demeure le modèle qui se plie le plus à la définition présentée ci-haut. Formellement, elle

s’énonce comme suit :

  (1.1) 

L’équation (1.1) signifie que les prix futurs (  évoluent suivant un processus aléatoire.

Ces derniers peuvent prendre n’importe quelle forme hormis celle engendrée par 

l’anticipation conditionnelle sur l’information actuellement disponible (). De façon plus

simple, en se basant sur l’information disponible à l’instant t, les agents sont incapables de

 prévoir l’évolution des prix futurs. En effet :

 

Ainsi, la martingale suppose que l’investissement des agents s’apparente à un jeu équitable

« fair game » (les gains et pertes espérés sont nuls) . Il s’en suit que l’évolution des rentabilités

est aussi aléatoire et ne peut être prédite par l’information disponible. Cette notion de

l’efficience est qualifiée d’efficience informationnelle.

La définition de l’HEM peut, de prime abord, paraitre audible et concise, cependant elle ne

laisse pas moins entretenir une certaine ambigüité. En effet, deux passages méritent de plus

amples explications à savoir : « reflètent totalement et correctement » et « l’ensemble des

informations pertinentes ».

Le premier passage renvoie à la vitesse (totalement ) et la manière (correctement ) avec

lesquelles les prix incorporent l’information. Plus concrètement, c’est aux agents qu’incombe

la mission de refléter totalement et correctement  l’ensemble des informations. En effet, suite à

l’arrivée d’une nouvelle information, l’agent révise correctement  ses connaissances en se

 basant sur la loi de Bayes. Dans une telle optique, il est doté d’une capacité cognitive

illimitée à traiter une quantité infinie d’informations, lui permettant ainsi de résoudre les

 problèmes les plus complexes. En cela, l’agent traite tous les états de la nature (totalement ) en

leur assignant des probabilités conformes à des préférences normatives. D’une manière plus

explicite, il utilise la fonction d’utilité espérée (ci-après UE) de Von Neumann-Morgenstern

(1944) si la distribution de probabilité est connue. Si elle ne l’est pas, il utilise la fonction

d’utilité espérée subjective (ci-après UES) de Savage (1954). Plus formellement, l’agent doit

maximiser, la fonction suivante :

Page 10: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 10/54

6

  (1.2) 

Effectivement, pour chaque état de la nature l’agent assigne un degré d’utilité  

(préférences normatives) et une probabilité appartenant à une distribution. Cependant,

comment peut-on identifier cette dernière ? cette question nous mène au deuxième passage de

la définition.

En effet, connaître toute l’information n’est qu’un préalable. L’agent ne doit retenir que

l’ensemble des informations pertinentes en vue de former ses anticipations. la question qui se

pose concerne justement le contenu desdites informations. Une première réponse nous vient

de la théorie des anticipations rationnelles (Muth, 1961). Une anticipation rationnelle est celle

qui satisfait l’égalité suivante :

    (1.3) 

L’équation (1.3) signifie tout simplement que l’anticipation de l’agent ( ) doit être égale à

l’anticipation optimale ( ). Cette dernière est atteinte quand l’investisseur procède non

seulement à l’analyse  de l’ensemble de l’information disponible mais aussi, et surtout, en

faisant le lien entre ces informations et le modèle régissant l’évolution de la variable

anticipée. La théorie des anticipations rationnelles suggère que l’agent doit connaître le

modèle de fonctionnement de l’économie2. Dans des termes plus précis, la fonction UES doit

égaliser celle de l’UE. Ainsi, l’agent assigne des probabilités provenant de la véritable

distribution qui régit la variable anticipée. l’HEM se base sur cette préposition en fournissant,

toutefois, une réponse aussi évasive que la précédente. En effet, les informations pertinentes

d’un actif sont les informations d’ordre économique et politique afférentes à l’entreprise , à

son secteur et/ou l’économie (voire les économies) où elle opère (Fama, 1965).

En regroupant les deux passages de la définition, un marché efficient est un marché atomique

qui contient un très grand nombre d’agents homogènes qui appliquent la loi de Bayes pour 

formuler leurs connaissances et ayant des préférences compatibles avec la fonction d’utilité de

Von Neumann-Morgenstern. En ce faisant, les prix reflètent la valeur fondamentale des actifs.

Autrement dit, les prix sont à leur juste valeur.

Dans un plan théorique, l’HEM présente une certaine solidité. Cependant, l’estimation de

celle-ci, en pratique, est impossible. Cette impossibilité découle principalement de

2 Ibid. 

Page 11: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 11/54

7

l’explication évasive de « l’ensemble des informations pertinentes ». Pour palier à ce

problème, plusieurs économistes ont essayé de délimiter le champ desdites informations en

 proposant des modèles testables servant, par la même occasion, d’extensions à l’HEM. 

b)  De l’analyse moyenne-variance au modèle d’équilibre des actifs financiers :

(i)  L’analyse moyenne-variance :

Markowitz (1952,1958)3  est l’un des premiers économistes à présenter formellement un

modèle de sélection de portefeuille. Ce dernier offre aux investisseurs deux critères de

décision. Lesquels sont la moyenne et la variance (ou l’écart-type). Le premier critère décrit la

rentabilité espérée tandis que le second décrit le risque. D’où le nom de l’analyse moyenne-

variance.

Dans une optique de moyenne-variance, l’agent fait face à un problème d’optimisation qui

peut être formulé par deux façons. La première consiste à minimiser le risque (variance) pour

un niveau de rentabilité espérée (moyenne) donné. la seconde, quant à elle, consiste, à

maximiser la rentabilité espérée pour un niveau de risque donné. Il est important ici de noter

que ces deux dernières mesures ne sont pas calculées à partir des données historiques mais

sont anticipées rationnellement de la part des agents. Ainsi, la frontière des portefeuilles

minimisant le risque se dessine au fur et à mesure que l’investisseur se déplace d’un niveau de

rentabilité à un autre. Celle-ci est appelée frontière efficiente.

3  Notons ici que le modèle de Markowitz précède l’HEM. Cependant, la présentation de ce modèle est une

étape incontournable à la présentation du MEDAF.

 

 

     

Frontière efficiente

Portefeuille optimal 

Courbes d’indifférence 

Figure 1 Choix du portefeuille efficient qui maximise la fonction d'utilité

Page 12: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 12/54

8

D’après la figure 1, l’investisseur n’aura pas intérêt à investir dans un portefeuille se situant

au-dessous de la frontière efficiente. Le portefeuille optimal à choisir est celui qui appartient à

ladite frontière et qui satisfait la condition de tangence avec la courbe d’indifférence de

l’investisseur. En somme, le modèle moyenne variance n’indique que l’ensemble de

 portefeuilles rationnels. Le choix du portefeuille optimal revient à l’investisseur. De ce fait,

cette analyse revêt un aspect purement microéconomique.

Sharpe (1964, 1965) et Lintner (1965) ont travaillé indépendamment sur l’agrégation des

travaux de Markowitz pour aboutir à un modèle plus général. En effet, l’objectif était de

trouver une solution où les agents concordent à choisir le même portefeuille optimal (H3 de

l’HEM). Ainsi, en formulant des hypothèses additionnelles et en ajoutant au marché un actif 

sans risque, le modèle d’équilibre des actifs financiers (MEDAF ci-après) est né.

Désormais, l’investisseur a le choix d’allouer son argent entre les actifs risqués et l’actif sans

risque (). Ce dernier est caractérisé par des flux futurs connus et une variance nulle. La

présence d’un tel actif permet à l’investisseur de le combiner linéairement (ligne

d’investissement) avec des portefeuilles risqués. En procédant à ce type de combinaisons, le

choix optimal consiste à choisir le portefeuille qui fournit la ligne d’investissement qui

satisfait la condition de tangence avec la frontière efficiente des actifs risqués (le portefeuille

M dans figure 2.a. Un tel portefeuille est appelé « portefeuille du marché ».

Cependant même si la rationalité dicte aux investisseurs le choix du portefeuille qui vérifie lacondition de tangence, Le positionnement de l’investissement sur la ligne sera guidé par leurs

Frontière efficiente

des actifs risqués

M

 

 

 

Zone de prêt

 Zone d’emprunt   

 

 

 A

B

Frontière efficiente des actifs

risqués

Nouvelle frontière efficiente 

Lignes

d’investissement  

Figure 1.2.a Figure 1.2.b 

  

 

 

 

 

Figure 2 Transformation de la frontière efficiente en présence de l'actif sans risque

Page 13: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 13/54

9

préférences (figure 2.b). Le théorème de séparation (Tobin, 1958) nous donne de plus amples

explications. En effet, en présence d’un actif sans risque, tout investisseur rationnel doit

impérativement faire deux décisions. La première, appelée décision d’investissement, lui dicte

de choisir la ligne d’investissement qui satisfait la condition de tangence. La seconde décision

consiste à positionner l’investissement sur la ligne optimale eu égard aux préférences 

normatives de chaque investisseur. Elle est appelée décision financière.

(ii)  Le modèle d’équilibre des actifs financiers :

En supposant la gratuité de l’information (H2 de l’HEM), l’absence de friction (H1 de

l’HEM) ainsi que l’atomicité des agents, le MEDAF devient une agrégation naturelle des

choix d’investissement des agents4. Bien évidemment, cette agrégation est conditionnée par

l’homogénéité des anticipations (H3 de l’HEM). De façon plus spécifique, tous les agentsanticipent les mêmes moyennes et variances inhérentes à chaque actif. De surcroît, ces

dernières doivent provenir des véritables distributions qui les régissent (UES=UE). Sans cette

condition, le MEDAF serait plus compliqué et presque inutilisable.

Dans sa forme théorique le MEDAF s’écrit comme suit :   (1.4) 

 

L’équation (1.4) signifie que la rentabilité espérée d’un actif ou d’un portefeuille () est

égale à l’actif sans risque ( plus la prime de marché  multipliée par un coefficient

(). Le risque est scindé en deux catégories. La première renvoie à un risque spécifique qui

est non rémunéré puisque l’investisseur peut l’éliminer en investissant dans le portefeuille M

(décision d’investissement). La deuxième renseigne sur le risque systématique qui est

rémunéré par beta . Ce dernier mesure la part de volatilité de la rentabilité de l’actif associée

avec la variabilité de la rentabilité .

4Etant donné que tous les agents choisiront le portefeuille M, les investissement rationnels appartiennent à la

droite qui lie ce dernier avec l’actif sans risque. Cette droite est appelée Capital Market Line CML (figure 1.3.a)  

Page 14: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 14/54

10

En équilibre, les rentabilités des actifs doivent former une droite appelée Security Market

Line (SML), comme le montre la figure 3.b. En effet, si la rentabilité passe en dessus (sous-

évaluation) ou en dessous (surévaluation) de la SML, les agents achèteront les actifs sous-

évalués ( actif A, figure 3.b) et vendront les actifs surévalués (actif B, figure 3.b). L’action

collective des investisseurs aboutira à un nouvel équilibre.

Contrairement à l’HEM, le MEDAF peut être testé en pratique. Sa forme empirique est la

suivante:   (1.5)  est un terme d’erreur qui est supposé satisfaire les conditions suivantes :

  = 0

  = 0

   

, appelé alpha de Jensen, mesure la distance entre la rentabilité en équilibre est la

rentabilité observée (). Outre l’ajout d’alpha dans l’équation (1.5), Il est important de

souligner qu’il existe une très grande différence entre cette dernière et l’équation (1.4). En

effet,  est la rentabilité espérée tandis que est la rentabilité historique. Ajoutons à cela le

fait que  est souvent exprimé en termes d’indices boursiers qui sont loin de représenter la

rentabilité espérée du marché (). Tout cela ne fait de l’équation (1.5) qu’une simple

approximation de la formule théorique du MEDAF.

 

 

 

CML

 Actifs sous-évalués

B

 

 

 

 

 

 

 Actifs

surévalués

     A

Figure 3.a Figure 3.b

Figure 3 La droite CML et la droite SML

Page 15: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 15/54

11

Quoi qu’il en soit, la forme empirique du MEDAF permettaient aux économistes de tester 

l’équilibre sur les marchés financiers, et par déduction l’HEM. Les méthodes les plus utilisées

consistent à étudier la signification d’alpha (Jensen, 1968), la stabilité de beta (Roenfeldt,

Greipentorg et Palfman, 1978 ; Carpenter et Upton, 1981) et la linéarité entre la rentabilité et

le risque (Sharpe et Cooper, 1972 ; Black Jensen et Scholes, 1972 ; Fama et MacBeth, 1973).

Les premiers tests effectués étaient plutôt en faveur du MEDAF5. Cependant, vers la fin des

années soixante-dix, des articles fusait tout azimuts en fustigeant ce dernier de critiques. En

effet, d’autres variables prédisaient la rentabilité. De surcroît, la rentabilité présentaient

certaines irrégularités. Ces critiques forment ce que l’on appelle «anomalies». Dans une

optique financière, une anomalie est toute rentabilité anormale qui n’est pas justifiée par la

rentabilité ajustée par le risque et qui indique l’inefficience des marchés et/ou une

inadéquation du modèle d’évaluation d’actif (en l’occurrence le MEDAF). Toutefois, il est

nécessaire de s’arrêter sur la méthodologie empirique de ces travaux. Le schéma

méthodologique peut être résumé dans la figure 4.

Cette méthodologie n’est pas exempte de toute critique. En effet, tester l’HEM, suppose faire

le test de deux hypothèses indissociables. la première concerne le modèle d’évaluation tandis

que la seconde concerne l’HEM, entrant ainsi dans un cercle vic ieux. Les résultats issus de

cette méthodologie ne peuvent être imputés à l’HEM puisqu’elle est testée conjointement

avec un modèle d’évaluation. Cet état de fait est communément appelé le problème des

hypothèses jointes (Fama, 1970).

Ces anomalies ont scindé les partisans de l’HEM en deux clans. Ceux qui rejettent totalement

la validité empirique des anomalies (MacKinlay, 1995 ; Shwertz, 2003) et ceux qui imputent

l’existence de celles-ci au MEDAF et non à l’HEM (Fama et French, 1992, 1993 ; Ross,

1976a, 1976b). Ces derniers ont préféré de jeter le discrédit sur le MEDAF et ont essayé

d’apporter de nouveaux modèles en vue de mieux expliquer la rentabilité.

5Ibid.

Page 16: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 16/54

12

c)  Le modèle d’évaluation par arbitrage :

L’arbitrage peut être dépeint comme étant une application de la loi du prix unique aux

marchés financiers. Cela suppose qu’un actif dispose d’un substitut parfait. Ce dernier, peut

être un autre actif ou un portefeuille présentant les mêmes rentabilités futures pour tous les

états de la nature.

Si cet actif diverge de son substitut (rentabilité anormale), les investisseurs rationnels auront

une opportunité de gain immédiate et illimitée sans engendrer le moindre coût et sans prendre

le moindre risque. Cette opportunité est appelée opportunité d’arbitrage, laquelle consiste à

vendre le plus cher et à acheter le moins cher. Etant donnée l’atomicité des agents, l’action

collective de ces derniers ramènera les prix à leur niveau fondamental. Dans un tel contexte,

l’absence d’arbitrage est un signe d’équilibre et d’efficience des marchés.  

Ainsi, pour que l’absence d’arbitrage ait lieu, le marché doit être sans friction et contenir un

certain nombre d’agents qui préfèrent plus de richesse à moins de richesse (préférences

normatives) et pour lesquels un portefeuille optimal peut être construit.

Plus formellement, l’arbitrage peut être schématisé de la façon suivante :

MEDAF Ensemble des informations

Critères de l’efficience 

H othèses

Résultats

Tests

Rejeter l’hypothèse nulle: inefficience

 Ne pas rejeter l’hypothèse nulle : efficience 

Figure 4 Schéma Méthodologique des tests empiriques de l'HEM

Page 17: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 17/54

13

  Investissement initial nul :   où   est la valeur monétaire

détenue pour chaque actif.

  L’arbitrage est sans risque :  pour chaque état de la nature.

Il s’en suit, que l’absence d’arbitrage se traduit par : pour chaque état dela nature. C’est sur cette base que Ross (1976a,1976b) a établit le modèle d’évaluation par 

arbitrage (APT, ci-après).

L’APT est formulé comme suit :

  (1.6) 

Où F représente le nombre de facteurs expliquant la rentabilité,  est le terme d’erreur.  A

l’instar du MEDAF, l’ATP suppose deux types de risques :

  Risque systématique : associé avec la variation des facteurs

  Risque spécifique : associé avec le terme d’erreur. 

Les conditions de l’APT sont similaires à celles de l’arbitrage :

  Investissement initial nul.

 

L’absence de risque suppose l’annulation des risques systématique et spécifique :o  Elimination du risque systématique :  

o  Elimination du risque spécifique :   , cette condition

nécessite que  

  En équilibre (absence d’arbitrage), les conditions ci-haut transforment l’équation (1.6)

en6

:  

Si ces conditions sont respectées, l’APT devient :

  (1.7) 

Où   et sont des primes de risque disposant de la même valeur pour chaque actif.

Remarquons que l’APT n’ a pas hérité de la simplicité du MEDAF. En effet, l’application en

 pratique de ce modèle est très complexe. Si c’est une tâche faisable pour les académiciens,  

6 Selon l’APT, la rentabilité en équilibre doit-être nulle.

Page 18: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 18/54

14

c’est une autre paire de manche pour les praticiens qui n’ont ni l’expertise ni le temps pour le

faire.

Par ailleurs, la condition de l’élimination du risque spécifique constitue le talon d’Achille de

l’APT. En effet, force est de constater qu’il est très rare de trouver une série financière

disposant d’un terme d’erreur ayant une moyenne nulle. En cela, l’équation (1.7) ne tient qu’à

une approximation.

Les problèmes de complexité et d’exactitude ne doivent pas faire oublier un tout autre

problème qui fait défaut à l’APT. En effet, si la rentabilité est représentée par un nombre de

facteurs K, l’APT reste muet sur ce que ces facteurs peuvent représenter. Rappelons que l’une

des fonctions principales des modèles d’évaluation rationnels est de délimiter le champ des

informations pertinentes. Malheureusement, l’APT a émis plus de zones d’ombre qu’il en a

dissipé, et par voie de conséquence, il n’a pas été en mesure de détrôner le MEDAF.  

2.  La finance comportementale : l’antithèse. 

La finance comportementale est une discipline qui prône l’analyse de l’agent économique

sous un nouvel ongle. Désormais, ce dernier est soumis à des biais psychologiques lui

empêchant d’appliquer correctement la loi de Bayes et/ou de dresser des préférences

normatives. Telle est la définition que l’on donnera au terme « irrationnel » qui sera utilisé de

façon récurrente lors de cette section. Cette discipline est constituée de deux pans : la limite à

l’arbitrage ainsi que les biais psychologiques. 

a)  la limite à l’arbitrage :

La présence d’agents irrationnels n’a pas été totalement occultée par l’HEM. Cependant,

selon cette dernière, leur influence sur la formation des prix est insignifiante. Cette

proposition revient à Friedman (1953) qui considérait que si les agents irrationnels arrivent à

faire dévier le prix d’un actif de ses fondamentaux, le prix dudit actif divergerait de son

substitut. Ainsi, une opportunité d’arbitrage est créée. Cette dernière serait immédiatement

saisie par les agents rationnels. Etant donné que ces derniers ne peuvent influencer les prix en

raison de leur atomicité, leur action collective ramènerait le prix de l’actif à sa valeur 

fondamentale. De ce fait, l’absence d’opportunité d’arbitrage, appelée aussi « no free lunch »,

est considéré comme étant une situation d’équilibre et d’efficience des marchés.

Toutefois, la finance comportementale ne voit pas les choses du même œil. Si l’efficience des

marchés implique l’absence d’opportunité d’arbitrage, l’inverse n’est pas vrai. Pour mettre au

claire cette idée, nous nous baserons sur la proposition de Friedman : « les agents qui

Page 19: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 19/54

15

investissent sur la base du bruit perdront leur argent au profit des arbitragistes, menant ainsi

à une diminution aussi bien de leur richesse que de leur effet sur la demande »7

écrivait-il.

Supposons qu’il existe deux types d’investisseurs. Les premiers forment des anticipations

rationnelles et sont appelés arbitragistes. Les seconds, quant à eux, manquent de rationalité.

Par conséquent, leur demande est affectée par des décisions qui ne sont pas justifiées par les

informations pertinentes . Ils sont appelés « noise traders ».

Il s’en suit qu’avec l’existence de ces deux catégories, le prix ne pourra plus être identique à

la valeur fondamentale. Désormais, le processus de formation des prix est constitué non

seulement par cette dernière mais aussi par du bruit « noise » (Kyle, 1985 ; Black, 1986). La

première composante est injectée par les agents rationnels alors que la seconde est injectée par

les agents irrationnels (d’où le nom noise traders).

Pour qu’un arbitrage ait lieu, les arbitragistes doivent être neutre vis-à-vis du risque et

disposer d’une demande parfaitement élastique pour l’actif mal-évalué au niveau du prix de

son substitut. Ces deux conditions supposent la présence d’un substitut parfait. En présence

d’un tel substitut, l’opportunité d’arbitrage n’engendre ni coût ni risque.

Les partisans de la finance comportementale estiment qu’en réalité cet arbitrage est à la fois

couteux et risqué. Effectivement, certains actifs tels que les actions et les obligations ne

disposent pas d’un substitut parfait. Cet état de fait ôte les arbitragistes de leur couverture. A

titre d’illustration, si l’actif est inférieur à sa valeur fondamentale, la logique d’arbitrage

voudrait que les agents achètent ledit actif et vendent à découvert son substitut. Ainsi, même

si le prix de l’actif baisse encore plus à court terme, l’agent sera immunisé. Seulement, s’il

n’existe pas de substitut parfait, les agents ne seront plus immunisés et devront suppor ter un

risque lié à l’imperfection du substitut. Un tel risque est dit risque fondamental (Shleifer et

Summers ,1990). En cela, les arbitragistes seront averses au risque et leur demande ne sera

plus parfaitement élastique8.

En insérant les coûts de transactions dans notre analyse, le processus d’arbitrage devient

couteux et plus risqué même si un substitut parfait existe. Effectivement, la vente à découvert

engendre un coût. Si les prix divergent de leur substitut pour une longue période, les coûts de

la vente à découvert pourraient être plus élevés que le profit de l’arbitrage lui-même. Par

7Ibid.

8Pour que la demande ne soit plus élastique, le nombre des arbitragistes doit être fini.

Page 20: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 20/54

16

conséquent, les arbitragistes seront dans l’obligation de solder leur positions avant même que

les prix reviennent à leur fondamentaux. Ce risque porte le nom de « Horizon risk » (Abreu et

Breunnermeier, 2002).

Implicitement, les deux types de risque précités s’appuient principalement sur 

l’imprévisibilité de la demande des noise traders. En effet, même si l’influence de ces derniers

sur les prix est grande, leur demande demeure imprévisible et difficilement détectable

(Shiller, 1984 ; Summers, 1986). Ainsi, l’arbitrage comporte un risque supplémentaire lié aux

noise traders (Delong et al, 1990).

En effet, même si les arbitragistes arrivent à détecter une opportunité d’arbitrage, il se peut

que ces derniers ne la saisissent pas. Ne pouvant pas prévoir la demande des noise traders, les

arbitragistes seront moins enclins à les contrattaquer vu que leurs positions pourraient

engendrer un coût et des pertes à court et à moyen terme. En effet, cette constatation est

renforcée davantage quand les investisseurs institutionnels jouent le rôle d’arbitragistes.

Shliefer et Vishny (1997) avancent que l’arbitrage défini par Friedman n’est vrai qu’en état de

virtualité, pour reprendre leurs mots c’est un arbitrage de « manuel » : « …les millions de

 petits traders [référence à l’atomicité des agents] ne sont pas ceux qui disposent des

connaissances et des informations nécessaires pour effectuer un arbitrage »

9

 

Plus explicitement, l’arbitrage est un apanage réservé à un cercle réduit d’investisseurs

hautement spécialisés. Ces derniers sont, pour la plupart, des gestionnaires de portefeuilles.

Autrement dit, ils utilisent l’argent de leurs clients pour effectuer un arbitrage10

. De là nait un

conflit agent/principal que Shliefer et Vishny appellent la séparation entre le cerveau et le

capital.

Les clients des arbitragistes jugent ces derniers à partir de leurs performances passées. C’est

un acte tout à fait rationnel puisqu’ils ne peuvent inférer l’habilité des arbitragistes qu’à partir 

de cette information. Supposons que les prix entament une chute par rapport à leurs

fondamentaux, les arbitragistes disposeront, à priori, d’une opportunité d’arbitrage menant à

un profit certain quand les prix reviendront à leur fondamentaux. Entre-temps, leurs

portefeuilles accuseront une perte (en raison de la baisse des prix), la seule chose que leurs

clients déduiront est que les arbitragistes perdent de l’argent. De ce fait, ils retireront leurs

9Ibid.

10 L’analyse qui suit suppose que les arbitragistes sont tous des gestionnaires de portefeuilles.  

Page 21: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 21/54

17

argents de ce fonds. Afin d’éviter un retrait massif, les arbitragistes seront forcés

d’abandonner leurs positions, laissant ainsi l’opportunité d’arbitrage inexploitée. Notons ici

que l’hypothèse de base est que les arbitragistes utilisent l’argent de leu rs clients en vue

d’effectuer un arbitrage. Cette hypothèse est très raisonnable puisque la majorité des bourses

interdisent aux gestionnaires de fonds de vendre à découvert (Barberis et Thaler, 2003).

En somme, si l’influence des noises traders persistent, il y’aurait une forte chance que les prix

divergent de leurs fondamentaux pour une longue période. En effet, en cas d’atomicité des

agents, l’arbitrage est couteux et risqué. Il le devient encore plus quand le groupe

d’arbitragistes ne contient plus que les gestionnaires de fonds. Cet état de fait porte le nom de

la limite à l’arbitrage. 

Même si la limite à l’arbitrage semble réaliste, elle demeure conditionnée par une hypothèse

qui a trait aux comportements des noise traders. Si ces derniers agissent d ’une manière

aléatoire, leurs actions s’annuleront mutuellement. Pour que leurs influences persistent, il faut

que leur actions soient corrélées. Autrement dit, les noise traders devront faire pratiquement

les mêmes erreurs. C’est justement sur ce point que s’attèle le deuxième pan de la finance

comportementale à savoir les biais psychologiques.

b) 

Biais Psychologiques :La majorité des décisions financières est prise dans un climat où règne un grand degré

d’incertitude. Dans un cadre rationnel, l’agent doit envisager, exhaustivement, toutes les

alternatives possibles et choisir, parmi elles, celle qui maximise ses intérêts. Toutefois, l’être

humain ne dispose pas d’une capacité cognitive capable de résoudre un tel problème.

Miller (1954) a trouvé que la capacité humaine à traiter les informations ne dépasse guère le

chiffre sept plus ou moins deux. Autrement dit, le cerveau humain ne peut traiter qu’un

nombre réduit d’informations allant de 5 à 9 seulement. De surcroît, la capacité humaine àeffectuer des tâches de façon simultanée est très réduite (Kahneman, 1973). En somme, la

capacité cognitive, requise pour résoudre des problèmes de prise de décision complexes,

excèdent largement la capacité cognitive humaine. Pour remédier à cela, les agents utilisent

des méthodes heuristiques (Tversky et Kahneman, 1974) qui sont loin de satisfaire la loi de

Bayes.

L’un des exemples marquants est la construction de portefeuille. Construire un portefeuille

exige de traiter non seulement l’ensemble des actifs de façon isolée mais d’examiner aussi

Page 22: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 22/54

18

l’interaction qui peut exister entre eux (coefficient de corrélations). Baltussen et Post (2007)

ont trouvé que les investisseurs utilisent des méthodes heuristiques qui ne tiennent compte que

des distributions marginales des actifs. De surcroît, les investisseurs se focalisent sur la

fluctuation individuelle des actifs qu’ils détiennent tout en négligeant la fluctuation globale de

leurs portefeuilles. Une telle action mène souvent à des portefeuilles sous-optimaux qui se

situent en dessous de la frontière efficiente (Baltussen et Post, 2007 ; Barberis et Huang,

2003).

Ainsi, l’étude de ces méthodes heuristiques revêt une importance capitale en vue de voir 

comment les erreurs individuels des agents tendent à converger.

(i)  Formation des jugements :

L’une des étapes préalables à la formation des anticipations est la formation des jugements.

Celle-ci implique, dans un contexte de rationalité, l’usage de la loi de Bayes. Plusieurs

expériences, relevant du domaine de la psychologie et de l’économie expérimentale, ont

montré que les gens n’arrivent pas à appliquer correctement ladite loi.

L’une des principales raisons est causée par l’image que les gens ont d’eux -mêmes. En effet,

ils ont souvent tendance à surestimer leurs jugements menant ainsi à plusieurs biais altérant

leurs décisions. En effet, parmi ces biais il y a tout d’abord le biais d’ « optimisme ».

Weinstein (1980) a trouvé que plus de 90% des enquêtés estiment qu’ils sont au-dessus de la

moyenne dans des domaines tels que les talents de conducteur, la capacité de s’entendre avec

des inconnus et le sens d’humour. De surcroît, Buehler Griffin et Ross (1994) ont montré que

la plupart des gens sous-estiment le temps d’accomplissement d’une tâche.

Un autre biais qui va de pair avec l’ «optimisme» est la « surconfiance ».effectivement, quand

il s’agit d’estimer des quantités (p. ex. le taux de croissance des dividendes), les gens

élaborent des intervalles de confiance trop étroits. Selon une étude conduite par Alpert etRaiffa (1982), l’intervalle de confiance de 98% dressé par les enquêtés ne contenaient que

60% des valeurs justes.

De surcroît, la manière, dont les alternatives sont présentées, jouent un rôle prépondérant dans

la prise de décision. Les gens traitent les informations telles qu’elles sont présentées. De façon

 plus précise, ils n’utilisent que l’information qui est explicitement offerte à eux. Ce

 phénomène est appelé inertie cognitive (Slovic, 1972). A cela s’ajoute le concept de

comptabilité mentale (Kahneman et Tversky, 1981 ; Kahneman et Lovallo, 1993 ; Thaler,

Page 23: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 23/54

19

2000). Cette dernière se manifeste par le biais de la séparation des décisions. En effet, les gens

ont tendance à élaborer des tranches de décisions. A titre illustratif, le budget familial est

subdivisé en sous-catégories : « budget du ménage », « budget des loisirs », « budget

d’investissements » etc.. Cette manière d’allocation tend à éluder l’interaction mutuelle des

alternatives de décision. En cela, les décisions prises, dans ce cadre, se situent en-deçà de la

décision optimale (Thaler, 1999).

En somme, la façon avec laquelle les gens traitent les alternatives qui s’offrent à eux se prête

très mal aux prescriptions rationnelles de la théorie de la finance moderne. Dans une telle

optique, la loi de Bayes se trouve bafouer. Kahneman et Tversky (1974) ont montré que

quand les gens essaient de déterminer la probabilité qu’un événement A est généré par un

modèle B, ou qu’un objet A appartient un à une classe B, ils ont recours à une méthode

heuristique appelée « représentativité ». cette dernière consiste à évaluer la probabilité en se

basant sur le degré avec lequel A reflète les caractéristiques de B, menant ainsi à un biais

appelé « négligence du taux de base ».

Un autre biais, et non des moindres, surgit quand on utilise la méthode de représentativité. Ce

dernier concerne la taille de l’échantillon. En effet, Le jet d’une pièce de monnaie six fois

donnant trois piles et trois faces est moins représentatif que le jet de la même pièce 1000 fois

donnant 500 piles et 500 faces. Toutefois, la plupart des gens vont trouver que ces deux

dernières expériences sont aussi informatives l’une que l’autre.

Ce biais est très important dans un contexte financier. Effectivement, des investisseurs soumis

à un tel biais auront tendance à considérer un analyste, qui a fait quatre bonnes

recommandations successives, comme un analyste compétent (Barberis et Thaler, 2003). Ce

biais est souvent appelé « la loi des petits nombres » (Rabin, 2002).

Contrairement à la méthode de représentativité, la méthode de conservatisme (Edwards, 1968)

consiste à surpondérer le taux de base. Même si ces méthodes paraissent aux antipodes, elles

peuvent très bien cohabiter chez la même personne. En effet, si les données à inférer sont

représentatives du modèle qui les génèrent, les agents opteront pour la méthode de

représentativité. Si par contre, les données sont peu représentatives, les agents se fieront

davantage à leur connaissances antérieures en optant pour la méthode de conservatisme.

La question intéressante est de savoir si les agents éluderont ces biais avec l’expérience. De

surcroît, on pourrait croire que certains agents dotés d’une grande expertise tels que les traders

Page 24: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 24/54

20

sont loin de subir de tels biais. Camerer et Hogarth (1999) se sont attelés sur cette question.

Leur travail montre que même en connaissant ces biais psychologiques, les agents retombent

souvent dans la même erreur. Plus encore, les traders expérimentés sont les agents qui

exhibent le plus le biais de surconfiance. En somme, avec le temps, les agents peuvent réduire

l’effet des biais psychologiques, par contre ils ne peuvent guère l’éradiquer totalement. Ainsi,

la persistance des erreurs de jugement exerce un effet non négligeable sur la formation des

anticipations.

(ii)  Préférences et anticipations :

La théorie de la finance moderne se base essentiellement sur la fonction d’utilité espérée de

Von Neumann-Morgenstern. Pour que les agents appliquent correctement la fonction UE, ces

derniers doivent impérativement dresser des préférences satisfaisant des axiomes normatifs(i.e. la complétude, transitivité, continuité et l’indépendance). Cependant, maints travaux

expérimentaux ont montré que les agents transgressent ces axiomes de plein fouet.

Il est à signaler que l’UE demeure une bonne approximation de la façon avec laquelle les

agents évaluent les alternatives de décision. Toutefois, les partisans de la finance

comportementale argumentent que la violation de l’UE prend une place prépondérante dans

l’explication de certains phénomènes financiers (Barber is et Thaler, 2003). En cela, à une

fonction UE normative répond une théorie prospective positive (Kahneman et Tversky, 1979,

1992).

La théorie prospective a connu un essor considérable ces dernières années. En effet, elle est

considérée comme la meilleure théorie descriptive des décisions dans un climat de risque.

D’ailleurs, Tversky et Kahneman (1986) argumentent que l’approche normative est vouée à

l’échec parce que les gens font fréquemment des choix qui sont impossibles à justifier dans

une optique normative.

Cette théorie est formulée pour des loteries avec au moins un résultat non-nul sous la forme

suivante :

 

Ce couple est lit de la façon suivante : « obtenir le résultat x avec une probabilité p ou bien le

résultat y avec une probabilité q » avec ou . Face à ces alternatives, les

agents font appel à la fonction suivante pour effectuer leur choix :

Page 25: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 25/54

21

  (1.8)    est une fonction de pondération de la probabilité tandis que   est une fonction de

valeur assignée pour chaque résultat.

La théorie prospective présente l’utilité sous forme de gains et pertes au lieu de la richesse

finale. Cette idée n’est pas très récente puisque Markowitz (1952) l’a utilisé dans le modèle de

moyenne-variance. Cela dit, en relaxant les axiomes normatifs, Kahneman et Tversky ont

trouvé des remarques fort intéressantes, ce que montre la figure 5.

La figure 5.a présente l’allure de la fonction de valeur    . D’une part, Cette dernière est

concave dans le domaine des gains, cela signifie que les agents sont averses au risque

concernant les gains. D’autre part, elle est convexe dans le domaine des pertes montrant ainsi

un penchant pour le risque s’agissant des pertes. Il est à noter aussi que cette courbe présente

un nœud (kink ) à l’origine. Cet état de fait met en relief une plus grande sensibilité en cas de

 pertes qu’en cas de gains, ceci est plus connu sous le nom d’ « aversion aux pertes ».

La figure 5.b, quant à elle, présente l’allure de la fonction de pondération des probabilités . En effet, cette fonction n’est pas linéaire. Ainsi, les petites probabilités sont

surpondérées ( ). Cela signifie qu’une augmentation absolue de 0,01 à 0,02 est

perçue comme étant supérieure à une augmentation absolue de 0,3 à 0,1, ceci est appelé

« l’effet possibilité ». De surcroît, le passage de 1 à 0,99 reçoit plus d’importance qu’un

passage au sein des probabilités modérées (p. ex. de 0,31 à 0,3), ceci porte le nom de « l’effet

certitude ».

Valeurs

GainsPertes

   D   é  c   i  s   i  o  n   d  e   P  o  n   d   é  r  a   t   i  o  n  :                    

0.5

0.5

0

1

1

Probabilité déclarée : p

Figure 5 Pondération des probabilités et la fonction de valeur

Page 26: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 26/54

22

En regroupant les deux caractéristique de   et de , la concavité de la première

fonctionne dans le domaine des gains engendre une aversion au risque ; cependant au niveau

des probabilités faibles la surpondération de la deuxième fonction l’emporte conduisant ainsi

à un penchant considérable pour le risque. Ainsi, les agents ont tendance à être averses au

risque dans le domaine des gains à l’exception des gains affichant des faibles probabilités.

Similairement, les agents disposent d’un penchant pour le risque au niveau du domaine de

pertes en raison de la convexité de  tout en étant averse au risque pour les pertes ayant

une faible probabilité de se produire en raison de la surpondération de .

Kahneman et Tversky (1992) ont développé une généralisation de cette théorie qui porte le

nom de la théorie prospective cumulative (ci-après TPC). Elle s’énonce comme suit :

  (1.9) 

Avec :

 

Et :

 

 et  sont respectivement les fonctions de pondérations des probabilités dans les

domaines des pertes et des gains. est le paramètre d’aversion au pertes, d’après les

estimations de Kahneman et Tversky (1992) ce paramètre se situe aux alentours de 2.

La TPC capture certaines anomalies cités dans la section précédente. Premièrement, elle

capture comment la façon avec laquelle les alternatives sont présentées affecte le choix des

agents (méthodes de conservatisme et de représentativité). En effet, 30 à 40% changent leur

avis en fonction de la présentation du problème auquel ils font face (Barberis et Thaler, 2003).

Deuxièmement, elle capture aussi la manière avec laquelle les agents réagissent à ces

problèmes (comptabilité mentale). Si les agents utilisent la comptabilité mentale, ils

considéreront les alternatives de façon isolée.

Page 27: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 27/54

23

Par ailleurs, la TP et la TPC évoluent dans un cadre où les probabilités sont connues. Si ces

 probabilités sont inconnues, la logique rationnelle préconise l’usage de la UES de Savage

(1954). Ellsberg (1961) a démontré que les agents sont mal à l’aise dans les situations où les

probabilités sont inconnues. En effet, ce phénomène est connu sous le nom d’ « aversion à

l’ambiguïté ». Heath et Tversky (1991) affirment qu’en pratique, l’aversion à l’ambiguïté est

conditionnée par la compétence dont l’agent croit disposer. Si l’agent pense être incompétent

concernant l’évaluation d’une distribution de probabilité, il décidera soit d’éviter l’alternative

afférente à cette distribution, soit de suivre d’autres agents qu’il croit compétents (Tversky et

Fox, 1995). En revanche, si l’agent estime qu’il est compétent, un effet opposé à l’aversion au

risque aura lieu. Il est appelé « préférence pour le familier » (Barberis et Thaler, 2003). La

notion de compétence aura une importance majeure dans le développement du chapitre

suivant.

Synthèse :

A travers ce chapitre, nous avons présenté comment le rôle de l’agent économique a évolué au

sein de la théorie financière. En effet, la théorie de la finance moderne et à sa tête l’HEM ne

donne à l’agent qu’un rôle minime. En revanche, la finance comportementale place le

comportement de celui-ci ainsi que ses singularités au cœur de ses intérêts. Ainsi, l’homo-

economicus semble céder le pas à l’homo-sapiens.

Toutefois, il est important de souligner que la finance comportementale puise sa force

essentiellement des anomalies présentes sur le marché. Or, celles-ci ne peuvent guère être

utilisées comme arguments en vue de réfuter l’HEM. Effectivement, le champ des

informations pertinentes constitue un rempart insurmontable protégeant l’HEM de toute

critique sur le plan empirique.

Même si l’HEM demeure irréfutable, il est permis de douter de ses implications théoriques et

 plus particulièrement l’homogénéité des anticipations. En effet, le prochain chapitre sera

dédié aux travaux qui ont traité de l’hétérogénéité des anticipations ainsi que de ses

implications sur les marchés boursiers.

Page 28: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 28/54

24

Chapitre 2 : Implications de l’hétérogénéité des anticipations sur la

formation des prix.

Lors du dernier chapitre, nous avons présenté la place occupée par les agents dans les deux

courants majeurs en théorie financière. Le présent chapitre pousse le débat encore plus loin en

exposant les principaux travaux qui ont mis en exergue l’interaction entre des agents émettant

des anticipations différentes.

Pour ce faire, une redéfinition de l’HEM s’impose avec acuité. Une fois la redéfinition faite,

nous allons présenter l’hétérogénéité des anticipations liée, dans un premier temps, à

l’asymétrie de l’information puis celle liée à l’irrationalité d’une partie des agents. Afin de

maintenir l’objectivité du présent chapitre, nous allons aussi présenter la riposte des partisans

de l’HEM. Celle-ci peut être scindée, elle-aussi, en deux catégories. La première prône une

rationalisation des anomalies via des modèles multifactoriels tandis que la seconde réfute, sur

un plan plutôt méthodologique, l’existence des anomalies. Rappelons que ces dernières

constituent le fer de lance de la finance comportementale. Porter atteinte aux anomalies

revient donc à limiter cruellement les arguments de la finance comportementale.

Ainsi, la première section présentera l’hétérogénéité des anticipations sous ses deux formes.

La seconde section, quant à elle, abordera plutôt les tentatives de rationalisation et les

critiques envers les anomalies.

1.  Hétérogénéité des anticipations :

a)   Asymétrie d’information et formation des comportements :

(i)  L’HEM : une redéfinition.

Lors du chapitre précédent, la répartition de l’information parmi les investisseurs étaient

considérée comme étant équitable, exogène et surtout indépendante du processus de formation

des prix. C’est justement sur cette base que les modèles rationnels s’appuient. Cela dit, une

répartition équitable de l’information suppose que cette dernière soit gratuite.

En effet, si l’information est onéreuse, tout agent rationnel ne va l’acquérir que si son coût

marginal équivaut au bénéfice marginal de son acquisition. De surcroît, si les actions des

agents informés sont parfaitement reflétées par les prix, l’inférence de l’information à travers

les prix est possible. Ainsi, les agents non informés bénéficieront de l’information sans

l’acquérir. En ce faisant, aucun investisseur n’est incité à acquérir l’information et au final le

Page 29: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 29/54

25

prix ne reflétera que du bruit. Cet état de fait porte le nom du paradoxe de Grossman-Stiglitz

(Grossman et Stiglitz, 1980).

Ainsi, si les prix reflètent l’information, aucun agent n’est incité à l’acquérir. En revanche, si

les prix ne la reflètent pas, son acquisition devient bénéfique. L’implication majeure du

paradoxe de Grossman-Stiglitz est de mettre en relief la prépondérance de l’asymétrie

d’information au sein des marchés financiers. En vue de contrecarrer ce paradoxe, Fama

(1991) a proposé diverses formes d’efficience en définissant trois ensembles d’informations, à

savoir :

  La forme faible consiste à tester l’efficience des actifs en considérant les

informations historiques (cours antérieurs et présents) comme étant l’unique

composante de l’ensemble d’information disponible aux agents. 

  La forme semi-forte, quant à elle, suggère de tester l’efficience à partir de l’ensemble

de l’information publique. L’inconvénient avec cette forme réside dans la difficulté,

voire l’impossibilité, à rassembler la totalité de l’information publique.

  La forme forte englobe toute l’information disponible y compris les informations

 privilégiées des insiders (actionnaires majoritaires, PDG et délits d’initié …) 

Le test d’efficience sous ces formes consiste à examiner si l’ensemble des informations

associé pour chaque forme permet de réaliser des profits anormaux. Si ces derniers ne sont

 pas vérifiés, l’hypothèse d’efficience sous la forme considérée n’est pas rejetée. Toutefois,

cette méthodologie est limité sur deux plans. Le premier est d’ordre théorique, comme on l’a

vu lors de la section dédiée à la limite à l’arbitrage, l’absence des profits anormaux

n’implique pas l’efficience des marchés. Le deuxième, quant à lui, est plutôt d’ordre

empirique car même en spécifiant l’ensemble d’information, la conduction de ces tests

suppose l’association d’un modèle aux ensembles de l’information. D’où le problème des

hypothèses jointes proposé par Fama lui-même.

Quand l’information n’est pas gratuite, l’asymétrie d’information sévit inexorablement dans

les marchés financiers. Cela va sans dire que les comportements des agents se trouvent

influencés en cas d’asymétrie. D’ailleurs, Van Nieuwerburgh et Veldkamp (2010) ont

démontré sur un plan microéconomique que l’acquisition de l’information mène souvent à

une sous-diversification. Plus précisément, quand les agents choisissent quelle information

Page 30: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 30/54

26

acquérir avant d’investir, leurs portefeuilles est souvent sous-diversifié. Il est donc

indispensable d’étudier le comportement des agents dans un tel cadre.

(ii)  le Herding dans les marchés financiers : une approche rationaliste.

Le herding vient du mot « herd » qui signifie troupeau en anglais. Au-delà de son appellation

 péjorative, un tel comportement suppose que la décision d’un agent est influencée par les

décisions des autres agents qui l’ont précédé. Le mot herding a été proposé pour la première

fois par Banerjee (1992) ; Bikhchandani , Hirshleifer et Welsh (1992).

Un agent entre dans une situation de herding quand sa décision lui dicte d’investir sans

connaître les décisions des autres agents ; mais ne suit pas sa propre décision quand il

découvre que les agents qui l’ont précédé ont décidé de ne pas investir, et vice-versa. Ainsi,

quand un agent imite les autres, il décide de ne pas utiliser l’information dont il dispose.

Comme nous allons le voir cette décision peut être rationnelle, le herding rationnel peut se

manifester dans les marchés financiers sous deux formes à savoir : la cascade

informationnelle, et le herding basé sur la compensation.

(1)  Cascade informationnelle :

Les travaux des auteurs précités portent sur des opportunités d’investissement qui supposent

la constance des prix. Or, dans un contexte financier, le prix est la seule courroie de

transmission de l’information. En cela, leurs résultats ne peuvent guère être transposés aux

marchés financiers. La première application du herding aux marchés financiers revient à

Avery et Zemsky (1998).

Bien évidemment, une cascade informationnelle ne peut jamais se produire dans un marché

efficient aux sens fort. En effet, quand les prix reflètent l’ensemble des informations (y

compris les actions des agents précédents), les agents seront indifférents à acheter ou vendre

un actif.

Avery et Zemsky (1998) ont ajouté une autre dimension à l’incertitude concernant la

 pertinence de l’information détenue par les agents. Supposons que le marché est scindé en

deux groupes. Le premier «H» contient des agents détenant des informations privées

pertinentes (pH proche de 1) tandis que le second «L» contient des agents détenant des

informations privées contenant du bruit (pL  proche de 0.5). A cela s’ajoute le fait qu’aucun

des agents ne sait vers où penche la majorité. Autrement dit, la proportion de chaque groupe

est inconnue. Dans un tel cadre, même si le marché est efficient au sens semi-fort, dans la

Page 31: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 31/54

27

mesure où les prix incorporent la totalité de l’ensemble de l’information publique, une

cascade informationnelle peut se déclencher à tout moment.

A titre illustratif supposons un jeu à information incomplète11

. Ce jeu concerne un groupe

hétérogène de joueurs qui font face à la même situation à savoir la décision d’investir ou non

dans un actif. Plus formellement, les joueurs ont le choix entre deux décisions :

 

Si cela signifie que le signal observé par le joueur i est un bon signal et donc celui-ci va

investir : . Et inversement, quand le signal inféré est mauvais ( ), le joueur i ne

va pas investir :

.

Supposons aussi que les joueurs peuvent appartenir aux groupes H et L. De surcroît, les

 joueurs appartenant au premier groupe forment la majorité, cependant cette information est

inconnue. Ajoutons aussi que la bonne décision à faire consiste à ne pas investir. Cela dit, le

 joueur i ne peut inférer l’information détenue par les autres qu’à travers le prix de l’actif. Le

 premier joueur à investir se base uniquement sur l’information qu’il détient alors que les

autres qui le succèdent se baseront tant sur l’information dont ils disposent que sur les

décisions des joueurs antérieurs. De surcroît, tous les investisseurs sont rationnels dans lamesure où ils appliquent correctement la loi de Bayes. Pour le premier joueur, la loi de Bayes

s’énonce comme suit : 

  (2.1) 

Pour les joueurs ultérieurs, elle devient :

 

(2.2) 

Avec  

Supposons que les deux premiers joueurs à investir appartiennent au groupe L et les troisième

et quatrième joueurs appartiennent au groupe H. Selon l’équation (2.1), le premier joueur va

11Cet exemple est inspiré de l’article de Bikhchandani et Sharma (2001) 

Page 32: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 32/54

28

suivre son signal et investir. Ensuite, le deuxième joueur va investir à son tour puisque son

signal, bien qu’il soit incorrect, est renforcé par l’équation (2.2). En appliquant la loi de

Bayes (équation (2.2)), le troisième joueur va faire fi de son signal et investira. En effet, le

signal de ce dernier est annulé par le signal d’un des premiers joueurs. En consultant le prix

de l’actif, le quatrième joueur appartenant aussi au groupe H conclut que les premiers joueurs

(y compris le troisième) ont un signal positif à l’égard dudit actif, et investira à son tour.

Ainsi, une cascade informationnelle se déclenche. En présence de cette dernière, l’information

détenue par les joueurs n’est plus incorporée dans les prix.

Il est à souligner que les cascades informationnelles sont de nature idiosyncratique et se

détruisent très vite. Elles sont idiosyncratiques dans le sens où des événements aléatoires

combinés avec les décisions des premiers agents déterminent le comportement des agents qui

vont suivre. D’ailleurs à travers l’exemple, nous avons vu comment une minorité, ayant tort, a

pu dévier la décision de la majorité ayant raison. Cela dit, les cascades informationnelles se

détruisent vite car, avec l’avènement d’une nouvelle information publique, les agents vont se

rendre compte de leur erreur. Dans l’exemple précédent, la cascade informationnelle entraine

dans un premier temps une hausse des prix due à la forte demande des agents. Cela dit, quand

elle se détruit, les agents vont vendre massivement l’actif, conduisant ainsi à une baisse des

 prix. D’où un excès de volatilité qui n’est pas lié aux fondamentaux de l’actif. 

En somme, quand le marché est efficient au sens fort (l’incertitude est liée uniquement à

l’investissement) une cascade informationnelle ne peut pas se produire. Cependant, quand le

marché souffre d’une asymétrie d’information (efficience aux sens semi-fort et faible), ces

dernières peuvent sévir à n’importe quel moment même si tous les investisseurs sont

rationnels.

Il est à signaler que les agents jouent un rôle non négligeable concernant cette asymétrie. En

effet, les actions des agents tendent vers un équilibre de Nash dans le sens où le herding peut

être inefficient comme le cas de l’exemple. Si les joueurs étaient altruistes alors l’équilibre

serait Pareto-optimal. Formellement, si les agents doivent maximiser non seulement leur

utilité mais aussi celles des autres agents, alors les prix reflèteront toute l’information.

Revenons au troisième joueur, si ce dernier est altruiste il devra faire part de l’information

dont il dispose aux autres. La seule façon de le faire est de ne pas investir, en cela le

Page 33: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 33/54

29

quatrième investisseur en appliquant la loi de Bayes serait indifférent à investir ou non12

. Et

s’il est altruiste à son tour, il décidera de ne pas investir. Ainsi, l’asymétrie d’information est

due en grande partie à l’ « égoïsme » des agents.

Toutefois, la détection d’un tel herding au niveau empirique est très dure. En effet, le premier 

problème qui se pose est la détection entre un véritable herding et un herding fallacieux. Ce

dernier est caractérisé par un groupement des anticipations mais suite à une information

 partagée par tous les agents. Dans un tel cadre, ces derniers ne s’imitent pas entre eux, mais

effectuent le choix le plus rationnel à faire.

(2)   Le herding basé sur la compensation :

Ce deuxième type de herding rationnel est dû aussi à l’asymétrie d’information, mais cette

fois-ci d’une autre nature. En effet, le herding basé sur la compensation (Maug et Naik, 1996 ;

Admati et Pfleider, 1997) est lié à un problème d’agence confrontant un gestionnaire de fonds

(agent) à son employeur (principal). Etant donné que le dernier n’est pas sûr de la compétence

du premier, le principal embauche l’agent sous les termes d’un contrat. Ce dernier stipule que

la performance de l’agent doit être au moins égale à un b enchmark. Lequel peut être la

 performance d’autres gestionnaires de fonds ou d’un indexe. Ainsi, l’agent est incité à imité le

benchmark menant ainsi au herding.

Plus formellement, la fonction d’utilité de l’agent peut être formulée comme suit :

  (2.3) 

Où  et  sont respectivement la rentabilité et le risque du portefeuille tandis que  mesure

le degré d’aversion au risque.  est la rentabilité du benchmark. La fonction   est une

fonction hybride qui peut être une fonction de profit si l’agent surperforme le benchmark 

comme elle peut être une fonction de coût si l’agent fait moins que le benchmark. La

concavité de cette fonction implique une asymétrie imposant à l’agent de fournir plus d’effort

en vue de rester le plus près possible du benchmark. Dans une telle optique, ce régime de

compensation éloigne l’agent du principe de diversification, menant ainsi à des portefeuilles

souvent inefficients (Brennan, 1993 ; Roll, 1992).

Maug et Naik (1996) ont focalisé leur analyse à un seul actif risqué, leur résultat ont aboutit à

conclure que ce type de compensation mène à un herding efficient éludant, de surcroît, les

12Les actions favorables des deux premiers joueurs seront annulées par les actions du troisième et quatrième

 joueurs.

Page 34: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 34/54

30

problèmes afférents à la sélection adverse et au hasard moral. Toutefois Admati et Pfleider

(1997) ont élargit l’analyse à plusieurs actifs risqués et ont trouvé que le herding basé sur la

compensation est inefficient et ne permet pas de surmonter les problèmes d’hasard moral et de

sélection adverse.

D’un point de vue empirique, Lakonishok, Shleifer et Vishny (1992) ont établit une mesure de

herding (ci-après LSV). Celle-ci consiste à étudier la tendance moyenne d’un groupe

homogène de gestionnaires de fonds à acheter ou à vendre certains actifs par rapport à ce

qu’ils pouvaient décider s’ils agissaient indépendamment. Cependant, la mesure LSV présente

un certain nombre de limites. La première est liée à la distinction entre herding

intentionnel/fallacieux. En effet, LSV mesure réellement la corrélation des décisions des

gestionnaires de fonds. Si le herding entraine une corrélation, l’inverse n’est pas vrai. De plus,

les gestionnaires peuvent appartenir à des fonds dont les objectifs sont divergents. Ainsi,

construire un groupe de gestionnaires homogène devient une tâche ardue.

En somme, même si le marché est efficient aux sens semi-fort et faible, l’hétérogénéité des

anticipations peut avoir lieu. En effet, quand les informations privées ne sont pas incorporées

dans le processus de formation des prix, l’asymétrie d’information sévit inexorablement. Cette

asymétrie conduit les agents (investisseurs individuels et institutionnels) à faire des décisions

qui ne sont pas optimales aux yeux de l’HEM. Bien évidemment, les agents, en pratiquant le

herding, alimentent davantage l’asymétrie d’information. Cela dit, avec l’avènement d’une

nouvelle information publique, les groupements d’anticipations liés au herding peuvent se

détruire assez vite. D’où le caractère éphémère du herding rationnel.

b)  L’hétérogénéité des anticipations liée à l’irrationalité :

Si le herding rationnel est éphémère, celui proposé par la thèse comportementale est plus

structurel. En effet, en s’appuyant sur la limite à l’arbitrage, la finance comportementale

suggère que le herding peut être de longue durée. Nous allons présenter les théories

comportementales les plus abouties concernant ce sujet à savoir : la théorie du feedback 

positive et les situations de sur-réaction et de sous-réaction des marchés.

(i)  La théorie du feedback :

La théorie du feedback a été longtemps en dehors des discussions académiques. Ce n’est

qu’avec la réapparition des bulles spéculatives notamment celles qu’ont connu les Etats-Unis

(bulle internet) et le Japon que cette théorie est revenue à l’ordre du jour. Cela dit, cette

théorie reste mitigée en raison du manque de cohésion de ses arguments.

Page 35: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 35/54

31

Selon la théorie du feedback, les bulles se déclenchent quand les prix de certains actifs

augmentent faisant le succès de certains investisseurs (Shiller, 2003). Ce succès suscite une

attraction de ces actifs qui est amplifiée aussi bien par le bouche-à-oreille que par les médias.

Ainsi, bon nombre d’investisseurs, mus par des biais psychologiques tels que la surconfiance

et les biais afférents à la représentativité, investissent dans ces actifs sur la seule base que les

prix vont augmenter encore plus. Et donc, un premier feedback est crée. Quand le feedback 

entame plusieurs boucles, une bulle spéculative se déclenche. En ce faisant, l’évolution des

prix est régie uniquement par le fait que les investisseurs anticipent que ces derniers vont

augmenter encore plus. Ainsi, plus aucune information n’est incorporée par les prix. Bien

évidemment, cette situation n’est pas soutenable et la bulle implosera menant ainsi à un krach

boursier qui peut être totalement indépendant des fondamentaux des actifs.

Greenwood et Nagel (2009) ont étudié la composition des portefeuilles des gestionnaires de

fonds durant la période de la bulle internet en segmentant les gestionnaires en deux catégories.

La première contenant des gestionnaires seniors expérimentés alors que la seconde renferme

des jeunes gestionnaires inexpérimentés. Leurs résultats ont montré que la deuxième catégorie

est celle qui a investit le plus dans les actifs technologiques et ce lors de l’apogée de la bulle.

Les gestionnaires expérimentés, quant à eux, ont très peu investi. Ainsi, l’inexpérience peut

être aussi un facteur conduisant à la constitution des bulles.

Il est à souligner que les agents rationnels peuvent contribuer aussi à la formation des bulles

(Barberis et Thaler, 2003). Sachant pertinemment que cette évolution est insoutenable, les

agents rationnels au lieu de contrattaquer en effectuant des arbitrages, achètent eux-aussi ces

actifs, au tout début de la formation de la bulle, et les revendent ensuite aux agents

irrationnels. Ainsi, une autre dimension s’ajoute à la limite à l’arbitrage. Cependant, il

convient de noter que cette assertion demeure subjective et ne peut être vérifiée

empiriquement.

Une autre explication du rôle des agents rationnels concernant les bulles spéculatives est

fournie par Cheng, Hong et Stein (2002). Ces derniers associent l’inertie des agents rationnels

aux restrictions légales sur la vente à découvert. En effet, quand une bulle spéculative se

déclenche, l’hétérogénéité des anticipations se scindent principalement en deux groupes. Les

 premiers (agents irrationnels) y sont favorables et font preuve d’optimisme tandis que les

seconds (agents rationnels) s’y opposent et portent un jugement plutôt pessimiste.

Page 36: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 36/54

32

Cela dit, quand la vente à découvert est interdite, les agents rationnels ne sont plus en mesure

de contrattaquer la formation des bulles puisqu’un tel arbitrage devient risqué et coûteux.

Ainsi, le marché n’incorpore que le jugement optimiste des agents irrationnels. De surcroît,

plus les anticipations sont hétérogènes et plus le marché évaluera les actifs sur la base des

 jugements des agents irrationnels. En se basant sur un questionnaire, Barsky (2009) a étudié

de plus près cette question, en l’appliquant à la bulle japonaise. Ses conclusions étaien t en

faveur de cette théorie.

A l’instar du herding rationnel, la détermination des bulles spéculatives est une tâche ardue

sur le plan empirique. Déterminer le motif des investissements des agents est presque

impossible. Ajoutons à cela le manque de données dû à la confidentialité, les économistes se

sont tournés vers d’autres méthodes telles que les questionnaires et l’économie expérimentale.

Cela dit, une théorie comportementaliste s’est penchée sur l’explication de l’hétérogénéité des

anticipations en se basant sur des résultats empiriques plus ou moins tangibles à savoir les

anomalies. Cette théorie fera l’objet de la section suivante. 

(ii)  Le marché en situation de sous-réaction et de sur-réaction :

Les anomalies observées en finance, concernant la taille (Banz, 1981), l’effet de levier 

(Bhandari, 1988), la valeur comptable (Stattman, 1980 ; Rosenberg, Reid et Lanstein, 1985) et

le ratio bénéfice/prix (Basu, 1983), présentent des irrégularités qui rendent les rentabilités

prévisibles. Comme nous avons vu lors du dernier chapitre, ces irrégularités peuvent

renseigner soit sur l’inefficience des marchés soit sur l’inadéquation du MEDAF. Lors de

cette partie nous nous focaliserons sur la première proposition.

Dans une approche comportementaliste, les anomalies ont principalement deux implications

sur les marchés financiers. La première observée à court terme, concerne la présence d’une

auto-corrélation positive des rentabilités (Culter, Poterba et Summers, 1991). En d’autres

termes, les rentabilités passées expliquent les rentabilités futures dans le court-terme,

renseignant ainsi sur une sous-réaction du marché. Jegadeesh et Titman (1993) ont trouvé que

les stratégies momentum, consistant à acheter les actions ayant une bonne performance et à

vendre celles ayant affiché une mauvaise performance durant les trois derniers mois,

permettent aux investisseurs de réaliser des profits anormaux dans les 3 à 12 mois qui suivent.

Selon Barberis, Shleifer et Vishny (1998) la sous-réaction des marchés est attribuée au biais

de conservatisme. Si les agents sont affectés par ce biais alors les prix s’ajusteront aux

Page 37: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 37/54

33

nouvelles informations de façon graduelle. Entretemps, les stratégies momentum seront

bénéfiques.

La deuxième implication des anomalies est observée à long-terme. En effet, les rentabilités

passées et futures deviennent corrélées négativement (voire la figure 7). En cela, les actions

qui ont réalisé les rentabilités les plus faibles (élevées) durant les cinq dernières années ont

tendance à réaliser des rentabilités élevées (faibles) durant les cinq prochaines années

(DeBondt et Thaler, 1985). La sur-réaction des marchés est due aux biais liés à la méthode

heuristique de représentativité. En effet, certains investisseurs, utilisant cette méthode, ont

tendance à extrapoler trop loin les données historiques. Leur stratégie d’investissement est

qualifiée de naïve (Lakonishok, Shleifer et Vishny, 1994). Dans un tel contexte, certaines

stratégies deviennent profitables. Celles-ci consistent à vendre les actions ayant réalisé des

rentabilités historiques élevées et à acheter celles qui ont réalisé de faibles rentabilités dans le

passé. Cette stratégie est qualifiée, quant à elle, de contrariante13

.

13Ibid.

Période de sous-

réaction

 Nouvel

équilibre

 

                    

  

 Ancien

équilibre

 Arrivée d’une nouvelle information 

 Entre t 0 et t 3 , les rentabilités deviennent 

auto-corrélées positivement. Dans cet 

intervalle, une augmentation du prix en

t 1 engendre une augmentation du prix en

t 2 

  

Figure 6 Situation de sous-réaction suite à une nouvelleinformation

Page 38: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 38/54

34

Hong et Stein (1999) ont élaboré un modèle traitant un marché sur lequel il existe deux typesd’investisseurs. Ces derniers ne peuvent traiter qu’un sous-ensemble de l’information

publique disponible. Les investisseurs, appartenant au premier groupe, se fondent uniquement

sur l’information dont ils disposent sans tenir compte des prix présents et passés. Il sont

appelés « newswatchers » (ci-après NW). Les NW peuvent s’apparenter aux investisseurs qui

se basent sur l’analyse fondamentale. En effet, ce type d’analyse se focalise d’avantage sur

l’anticipation des cours futurs en se basant sur des informations n’ayant pas trait aux

séquences historiques des cours. En revanche, les investisseurs du second groupe utilisent les

 prix historiques comme unique source d’information. En effet, les informations liées aux

fondamentaux ne sont pas prises en compte. Ces investisseurs sont appelés « momentum

traders » (ci-après MT). Là aussi, les MT peuvent être apparentés aux analystes chartistes. Ces

derniers ne font confiance qu’aux séquences historiques des cours sans se baser sur les

informations pouvant toucher les fondamentaux où les informations spécifiques des actifs. Par

ailleurs, Il est à souligner que les NW et les MT sont dotés d’une rationalité limitée. 

Quand les NW sont les seuls investisseurs sur le marché, le prix s’ajuste graduellement aux

nouvelles informations (sous-réaction du marché). Ainsi, les stratégies momentum sont

profitables. Les MT ont alors tout intérêt à entrer dans le marché. Une conclusion hâtive

pourrait suggérer que les MT, en effectuant les stratégies momentum, feront revenir les prix à

leur juste valeur. Toutefois, selon Hong et Stein cette conclusion est peu probable.

En effet, la demande des premiers MT fera augmenter les prix, exerçant ainsi une externalité

négative sur les MT qui vont suivre. Il est à rappeler que la seule information à la disposition

des MT est la séquence des prix historiques. Ainsi, une augmentation des prix est inférée

  

 Ancien

équilibre

Période de sur-

réaction

 Nouvel

é uilibre

                    

 

 Les rentabilités passées (de t -1 à t 0) sont 

corrélées négativement avec les rentabilités

allant de t 0 à t +1

 

Figure 7 Situation de sur-réaction de la part desmarchés

Page 39: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 39/54

35

comme étant synonyme de l’arrivée d’une bonne nouvelle. Cependant, l’augmentation des

prix peut être due aussi à la demande des premiers MT à investir. Ajoutons à cela le fait que

les MT ultérieurs ne savent pas s’ils figurent parmi les premiers où les derniers de leur 

groupe, ils investiront à leur tour sur la base de l’ex ternalité des premiers MT. Cela a pour

effet une augmentation excessive des prix. Ne pouvant augmenter indéfiniment, les prix

baisseront menant ainsi à une sur-réaction du marché. En somme, l’hétérogénéité des agents

peut vraisemblablement mener au passage d’une situation de sous-réaction à une situation de

sur-réaction de la part des marchés.

Même si la théorie avancée par Hong et Stein semble convaincante, les suspicions planent

autour de la validité des anomalies qui forment le socle de leur théorie. En effet, deux

questions sont à poser. La première question est intimement liée au problème des hypothèses

 jointes. En effet, si les anomalies sont dues uniquement à l’insuffisance du MEDAF, il se

 pourrait bien qu’elles soient des facteurs de risques non compris par le MEDAF. La deuxième

question, plus radicale, soupçonne la validité empirique et méthodologique des travaux

 portant sur les anomalies. En d’autres termes, ces dernières peuvent être inexistantes en

réalité.

En vue de répondre à ces questions, nous allons présenter lors de la deuxième partie de ce

chapitre les réponses fournies par les partisans de l’HEM.

2.  La riposte de l’HEM : entre modèle multifactoriel et suspicion

méthodologique.

a)  Le modèle de Fama-French :

(i)  Genèse et présentation du modèle :

Le modèle Fama-French (ci-après MFF) est un modèle multifactoriel qui préconise

l’explication de la rentabilité par le biais de trois facteurs. La singularité de ce modèle est

qu’il donne aux anomalies un aspect rationnel. De façon plus spécifique, les anoma lies,

engendrant des profits anormaux, existent bel et bien. Cela dit, leur existence ne peut être en

aucun cas considérée comme une limite de l’HEM. Bien au contraire, elles sont considérées

comme étant fondamentalement risquées.

Ainsi, MFF se veut une relève du MEDAF. A ce titre, Fama et French (1992) ont procédé à

des tests empiriques afin de mettre le lien entre la rentabilité et quatre variables capturant les

anomalies les plus notables : la taille mesurée par la capitalisation flottante, le ratio

bénéfice/cours, le levier d’endettement, le ratio de la valeur comptable/valeur de marché (ci-

Page 40: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 40/54

36

après BE/ME) ainsi que le beta du MEDAF. Leur étude a porté sur les actions de la New York 

Stock Exchange (NYSE), de l’American Stock Exchange (AMEX) et du NASDAQ pour une

période allant de 1963 à 1990.

Dans un premier temps, les auteurs ont conduit des tests uni-variés. Autrement dit, ils ont

effectué des régressions linéaires simples en vue d’expliquer la rentabilité par chaque

variable. Les résultats de ces tests ont montré que toutes les variables étaient statistiquement

significatives hormis le bêta.

Dans un deuxième temps, ils ont réalisé un test multi-varié en régressant la rentabilité par

rapport aux cinq variables. Les variables inhérentes à la taille et à la BE/ME ont vu leur effet

se fortifier avec l’inclusion des autres variables. Plus encore, ces deux variables semblent

absorber l’effet de levier ainsi que le ratio bénéfice/cours. Ces résultats ont poussé Fama et

French (1993) de proposer le FFM sous la forme suivante:

  (2.4) 

Où   est l’excès de rentabilité de l’actif i à l’instant t.  est la prime de

marché. Notons ici que l’on ne parle plus du portefeuille du marché mais uniquement d’un

indexe représentatif de l’échantillon.   est le terme d’erreur qui mesure le risque

spécifique de l’actif i.

La variable SMB « SMALL MINUS BIG14

» est une prime de taille tandis que la variable

HML « High Minus Low15

» est une prime de valeur. En effet, Fama et French ont préféré

exprimer ces primes sous forme de portefeuilles mimétiques. Ainsi, les facteurs taille et valeur

sont exprimés tacitement dans le modèle. SMB est un portefeuille mesurant la différence entre

la rentabilité des actions à petite capitalisation (SMALL) et celles à grande capitalisation(BIG). Cette différence est supposée être positive vu que les petites capitalisations sont plus

risquées que celle disposant d’une grande taille. De façon similaire, HML est un portefeuille

mesurant la différence entre la rentabilité des actions à ratio BE/ME élevé (High), appelées

aussi actions de valeur, et celle des actions à ratio BE/ME faible appelées actions de

14Petit moins grand

15Elevé moins faible

Page 41: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 41/54

37

croissance (Low). Là aussi, cette différence doit être positive car les actions de valeur sont

plus risquées que celles de croissance16

.

La prime de marché, quant à elle, n’a qu’un rôle secondaire dans l’explication de la

rentabilité. Effectivement, le rôle du marché se cantonne à faire le lien entre l’actif sans risque

et HML et SMB. D’après les résultats de Fama et French (1993), l’inclusion des deux

portefeuilles stabilisent le coefficient de la prime de marché autour de 1. Ainsi, les principales

explications de la rentabilité proviennent de HML et SMB.

Par ailleurs, le MFF se base sur une supposition selon laquelle tous les agents sont rationnels

(au sens de l’HEM). Dans une telle optique, les variables taille et BE/ME devraient être

interprétées comme étant des proxys capturant la sensibilité de la variation de la rentabilité à

l’égard d’un ensemble de facteurs de risques communs. De façon plus simple, ces variables

expriment une prime de rentabilité liée à des risques systématiques et donc non diversifiables.

L’argument avancé par Fama et French est de nature exclusivement empirique. En effet,

concernant les actions américaines de 1963 à 1990, les coefficients ainsi que les R² montrent

un lien solide entre la rentabilité et SMB et HML. De surcroît, l’alpha, non -significatif et très

proche de zéro, traduit une bonne spécification du MFF par rapport au MEDAF.

D’un point de vue empirique, FFM présente une certaine solidité. En effet, FFM explique

mieux que le MEDAF la variabilité de la rentabilité aux Etats-Unis (Fama et French, 1993),

au Japon (Fama et French, 1998) en Allemagne, Grande Bretagne et en France (Malin et

Veeraraghavan, 2004).

(ii)  Interprétation des facteurs de risque et limites du modèle :

La robustesse empirique du MFF ne doit pas faire oublier un problème majeur concernant ce

modèle. En effet, ce dernier suppose que les primes de taille et de valeur sont des facteurs de

risque sous toile de fond d’efficience et de rationalité. Si tel est le cas, quelle signification

économique doit-on attribuer à ces deux facteurs ?

Une explication intuitive consiste à considérer les actions à petite capitalisation et celle de

valeur comme étant fondamentalement risquées. Cela signifie que les agents, étant rationnels,

vont détenir ces actions en contrepartie d’une rentabilité supérieure étant donné la relation

positive entre le risque et la rentabilité. Ainsi, les profits liés à la taille et à la valeur ne sont

pas anormaux mais plutôt fondamentaux.

16Voir la page ??; pour plus d’explication concernant le calcul des deux portefeuilles.

Page 42: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 42/54

38

Toutefois, pour que cette explication soit confirmée, un lien doit être établit entre ces

variables et l’économie. Sans cela, le MFF n’a plus aucun sens. Une première tentative

d’explication concerne le lien entre les facteurs expliquant les bénéfices (dividendes, chiffre

d’affaires…) et les facteurs expliquant la rentabilité. En se basant sur le fait que les seconds

facteurs reflètent les premiers, Fama et French (1995) ont essayé de définir la taille et le ratio

BE/ME comme étant des indicateurs de bénéfices. A travers des tests empiriques, ils ont pu

faire le lien entre la part expliquée du bénéfice et celle de la rentabilité par le marché et la

taille. Toutefois, ce lien n’a pas pu être démontré pour le ratio BE/ME. La raison en est

l’incorporation du bruit dans la mesure des chocs des prévisions des bénéfices17.

Malheureusement, même si le lien bénéfice/rentabilité a été démontré concernant le marché et

la taille, la raison économique qui motive ce lien reste toujours inexpliquée.

D’autres auteurs ont tenté de revêtir le MFF d’un aspect théorique. Ces tentatives sont, pour le

moins, atypiques en théorie financière, vu que l’on pose tout d’abord la conclusion et l’on

cherche ensuite son explication. En effet, le point de départ consiste à identifier les actions de

valeur (ratio BE/ME élevé) comme étant souffrantes d’une détresse financière et les actions

de croissance (ratio BE/ME faible) comme étant des firmes affichant une bonne santé

financière (Chan et Chen, 1991). D’une autre part, les actions à petite capitalisation sont

considérées comme étant économiquement fragiles tandis que les grandes capitalisation sontperçues comme étant des firmes solides sur le plan économique (Fama et French, 1995). En

bref, la taille (capitalisation boursière) renseigne sur une détresse économique tandis que la

valeur (ratio BE/ME) renvoi à une détresse financière.

Ainsi, HML et SMB renseignent sur une détresse relative. En effet, les firmes, réalisant des

 bénéfices faibles, disposent d’un ratio BE/ME élevé ainsi que d’un coefficient positif 

concernant HML (

). Et inversement, les actions, affichant des bénéfices élevé disposent,

d’un ratio BE/ME faible. Par conséquent, le coefficient   pour ces firmes est négatif.

Similairement, les firmes de petite taille, caractérisées par une petite capitalisation, disposent

d’un coefficient relatif à SMB () positif alors que les grandes capitalisations ont un

coefficient  négatif.

Xing et Vassalou (2004) ont fait lien entre le facteur SMB au risque de défaut en utilisant le

modèle de Merton. D’une autre part, Li, Xing et Vassalou (2000) ont investigué le lien entre

les informations inhérentes à l’évolution du PIB et les facteurs HML et SMB pour dix pays.

17Ibid.

Page 43: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 43/54

39

Kelly (2003), en se basant sur 18 pays, suggère que les facteurs du MFF contiennent une

information à propos de l’inflation et de la croissance. En effet, SMB est corrélé négativement

avec l’inflation et positivement avec la croissance du PIB. D’une autre part, HML est corrélé

 positivement avec la croissance mais n’a aucun lien avec l’inflation. De plus, Campbell,

Hilsher et Szilagyi (2008) se sont basés sur la détresse financière des entreprises. Selon ces

auteurs, leurs conclusions suggèrent que les entreprises en détresse financière délivrent une

rentabilité anormale qui peut de surcroît être la locomotive du pouvoir explicatif du MFF.

Cela dit, il convient de noter que ces travaux affrontent deux limites. L’un d’ordre

méthodologique : la nature des tests conduits sont questionnables, alors que l’autre concernent

une ambiguïté de finalité. En effet, si un lien entre une quelconque variable macroéconomique

et les facteurs est établit, l’effet de cette variable sur les facteurs restent imprécis dans le sens

où son effet ne peut être départagé entre les deux facteurs. De surcroît, la pérennité de ce lien

n’a pas pu être vérifiée.

Le fait que le FFM est dénué de tout aspect théorique, le rend une proie facile aux critiques.

Effectivement, le succès empirique du modèle n’a pas pu rassembler l’unanimité des partisans

de l’HEM et encore moins des comportementalistes. Daniel et Titman (1997) ont avancé que

les facteurs HML et SMB peuvent être liés aussi bien aux fondamentaux des entreprises qu’à

l’irrationalité des agents.

Plus encore, Arnott, Markowitz et al. (2007) ont montré que les effets valeur et taille ne

capturent que le bruit incorporé dans le processus de formation des prix. En effet, quand le

 bruit sévit sur le prix d’un actif, sa rentabilité anticipée conditionnée par le prix ou par le ratio

prix/dividende baisse avec ces deux indicateurs. Cela dit, les rentabilités élevées des ces actifs

ne sont nullement dues à un risque systématique mais plutôt au bruit qui révise les prix et/ou

les ratios prix/dividendes des actifs à la baisse. Autrement dit, les rentabilités des actifs,

particulièrement ceux à petite capitalisation et à ratio BE/ME élevé, engendrent des

rentabilités élevées parce qu’ils sont sous-évalués. Selon Arnott, Markowitz et al.18

 

l’hypothèse rationnelle préconisée par Fama et French est à proscrire.

Une autre implication importante concerne le fonctionnement du marché en présence d’un

bruit négatif. En effet, dans une telle situation la rentabilité espérée inconditionnelle n’est

plus tributaire uniquement du bêta mais aussi de la volatilité idiosyncratique ainsi que de la

18Ibid.

Page 44: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 44/54

40

volatilité du bruit. En d’autres termes, le risque spécifique, ou une partie du moins, peut être

non diversifiable.

D’autres travaux ont tenté de peaufiner ou de rivaliser avec le MFF, en offrant, toutefois, des

modèles qui s’inscrivent dans la même veine que ce dernier. A titre d’exemple, Carhart

(1997) a ajouté une variable au MFF à savoir la variable « Winners Minus Loosers » WML en

vue de tenir compte du momentum. D’un autre côté, Chen, Novy-Marx et Zhang (2010) ont

établit un modèle multifactoriel, assez similaire au MFF, qui comporte la prime du marché et

deux autres variables. La première, appelée « Low Minus High » LMH, tenant compte d’un

facteur d’investissement. La seconde, appelée « High Minus Low » HML, renseigne, quant à

elle, sur la rentabilité sur les actifs. Selon eux, leur modèle est nettement supérieur au MFF.

Toutefois, il est important de signaler que même si ces modèles surpassent le MFF sur le plan

empirique, ils n’ont pas pu combler le déficit théorique. En effet, tant qu’une interprétation

économique n’est pas attribuée aux différents facteurs, l’usage du MFF, ainsi que de ses

extensions, demeure pernicieux.

En cela, force est de constater que le MFF reste, pour l’instant, un modèle purement

heuristique. A cet égard, les critiques se sont abattues sur le MFF sur tous les fronts allant des

 partisans de l’HEM jusqu’aux financiers comportementalistes. Les principaux critiques

 provenant des partisans de l’HEM sont présentées dans la sous-section suivante.

b)   Suspicions méthodologiques : quand les anomalies deviennent artéfacts.

Les auteurs, qui doutent de l’honnêteté empirique des travaux sur les anomalies, constituent

l’aile dure de l’HEM. En effet, ces auteurs se sont farouchement opposés tant envers les

comportementalistes qu’envers le MFF. Selon les opposants aux anomalies, celles-ci

disparaissent, se renversent ou s’atténuent dès que la littérature qui les documente soit

publiée. Cet état de fait mène à faire deux conclusions. La première questionne directement la

validité statistique des anomalies. En effet, ces dernières peuvent être le fruit d’une simple

aberration statistique. En revanche, la deuxième suggère qu’il se peut que ces anomalies

existent ; mais dès qu’elles deviennent connues, les investisseurs s’emparent de ces

opportunités menant ainsi à leur disparition.

Les fervents défenseurs de l’HEM suggèrent que certains auteurs ont été tellement emportés

par la frénésie de la « quête des anomalies », qu’ils se sont focalisés exclusivement sur la

recherche de résultats surprenants. De surcroît, les tests ultérieurs de ces anomalies

concernent des échantillons qui présentent les mêmes caractéristiques que celles des premiers

Page 45: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 45/54

41

articles qui les ont trouvés. Ainsi, ce processus peut mener vraisemblablement à des résultats

erronés.

En effet, Lo et MacKinlay (1990) ont avancé le phénomène du data-snooping selon lequel les

tests effectués de telle manière ne peuvent guère être généralisés. Plus particulièrement, les

tests des anomalies, souffrant du biais du data-snooping, sont ceux qui répliquent les mêmes

conditions de l’article de référence traitant de l’anomalie. En effet, en reprenant les mêmes

conditions de l’article de référence, le test ne peut être qu’en faveur de l’anomalie. La figure 8

montre le schéma méthodologique général de ces tests. Ces derniers sont influencés

particulièrement par la période, le marché ou le segment (un secteur ou une catégorie

d’actions) étudiés et l’horizon (quotidien, mensuel, trimestriel…). Bref, le data-snooping met

l’accent sur le fait d’apprivoiser les données de telle sorte à ce que le test aboutisse au résultat

escompté par l’auteur. 

Une solution à ce problème consiste à tester l’anomalie en question sur une base neutre et

indépendante. Pour ce faire, l’auteur doit effectuer son test sur d’autres marchés ou bien sur 

des dates et/ou des horizons différents que ceux utilisées par l’article de référence. Cela dit, il

est important de souligner que le data-snooping est une arme à double tranchant. En effet,

tester les anomalies dans le seul but de les réfuter peut mener à choisir des données ayant des

caractéristiques totalement opposées à celles trouvées par l’article de référence. Ainsi, les

données sont domptées de la même façon que les partisans des anomalies. La conséquence de

ces travaux, d’un côté comme de l’autre, est très dangereuse dans le sens où l’avancée de la

science économique est sacrifiée sous l’autel des jugements d’opinions. 

Page 46: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 46/54

42

Par ailleurs, si l’existence des anomalies est permise, alors les investisseurs individuels et

institutionnels saisiront l’opportunité de les corriger par le biais de l’arbitrage (Mackinlay,

1995). A titre d’exemple, Schwert (2003) a étudié l’évolution des anomalies après que la

littérature les documentant soit apparue. Ses résultats étayaient la thèse de la disparition post-

publication. Ses travaux ont porté sur les anomalies les plus connues à savoir les effets taille,

valeur, week-end et janvier. Ainsi, l’existence des anomalies ne peut être qu’éphémère, et

donc l’HEM prévaut à long-terme sur les marchés financiers. Toutefois, outre la limite à

l’arbitrage, cette conclusion avoue à demi-mot que les agents ne sont pas totalement

rationnels. En effet, si les investisseurs sont rationnels au sens de l’HEM, ils doivent, dès le

départ, connaître ces anomalies et les neutraliser. De surcroît, si les investisseurs n’agissent

sur les anomalies qu’après leur découverte par le cercle académique, celles-ci peuvent

disparaître. Cependant, rien n’empêche, dans ce cas, d’autres anomalies de se former. Par 

conséquent, celles-ci ne vont être neutralisées qu’après leur découverte par les économistes.

Et donc, le déséquilibre peut être structurel.

Définition de la période Définition de l’horizon 

Critères de l’anomalie 

Hypothèses

Résultats

Tests

Rejeter l’hypothèse de

l’anomalie 

 Ne pas rejeter l’hypothèse de

l’anomalie 

Choix du marché ou d’un segment

Figure 8 Schéma méthodologique des tests des anomalies

Page 47: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 47/54

43

En somme, les arguments des opposants aux anomalies comportent un certain degré de

subjectivité. Cela dit, leurs travaux renseignent sur une implication clef qui fera sans doute

avancer la science économique. Laquelle consiste à porter l’analyse des anomalies à un

niveau ex-ante. En effet, la quasi-totalité des travaux portant sur les anomalies ont été réalisés

à un niveau ex-post. Comme nous avons pu le voir cette analyse est limitée et suscite bon

nombre de critiques. D’ailleurs, l’une des principales limites du MFF est que tous les efforts,

qui ont été déployés, se sont cantonnés à un niveau ex-post contrairement au MEDAF. En

effet, les tentatives de certains auteurs qui ont pu mettre le lien entre les facteurs du MFF et

certaines variables macroéconomiques ont été vaines. La raison est simple, en effet, tant que

les canaux de transmissions entre ces variables et les facteurs n’a pas été établit ex-ante, le

MFF demeurera une méthode heuristique.

Post et van Vliet (2007) ont testé le MFF et le modèle à quatre facteurs de Carhart durant la

période pré-1963 en vue de tester le biais du data-snooping. Leurs résultats suggèrent que les

bonnes performances de ces modèles multifactoriels dépendent largement de la période post-

1963. Plus précisément, la taille perd son habilité en matière d’explication de la rentabilité

durant la période précédant l’année 1963. Ces résultats ont mené les auteurs à conclure que

ces modèles peuvent être liés soit au biais du data-snooping soit à des raisons autres que le

risque. Ces dernières ont trait particulièrement à la liquidité et aux coûts de transactions. Eneffet, plus la taille d’une entreprise est petite et plus les coûts de transactions qu’elles

engendrent sont élevés.

Synthèse :

A travers ce chapitre, nous avons pu voir, lors de la première section, les principales

implications de l’hétérogénéité des anticipations sur un plan théorique. La deuxième section,

quant à elle, nous a permis de voir la limite des études empiriques.

Concernant le herding rationnel, sa validation empirique demeure une tâche ardue vu le

manque de données et la difficulté de séparer entre le herding réel et fallacieux. D’une autre

 part, l’hétérogénéité des anticipations liées à l’irrationalité d’une partie des agents se base

essentiellement sur les anomalies présentes sur le marché. Comme on l’avait vu, le test des

anomalies peut laisser à désirer. Ainsi, au problème des hypothèses jointes s’ajoute le biais du

data-snooping.

Page 48: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 48/54

44

BibliographieAbreu, D., & Brunnermeier M. (2002). Synchronization Risk and Delayed Arbitrage. Journal of 

Financial Economics, 66(2-3), 341-360.

Admati, A., & Pfleiderer, P. (1997). Does it All Add Up? Benchmarks and the Compensation of 

Active Portfolio Managers. Journal of Business, 70(3), 323 – 50.

Alpert, M., & Raiffa, H. (1982). A Progress Report on the Training of Probability Assessors. In : D.

Kahneman, P. Solvic & A. Tversky (eds.) Judgment Under Uncertainty : Heuristics and Biases (pp-

294-305). Cambridge : Cambridge University Press.

Arnott, R., Hsu, J., Liu, J., & Markowitz, H. Does Noise Create the Size and Value Effects ?. Working

Paper, Retrieved from : http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=936272 

Avery, C., & Zemsky, P. (1998). Multidimensional Uncertainty and Herd Behavior in Financial

Markets. American Economic Review, 88(4), 724 – 48.

Bai, J. (1995). Least Absolute Deviation Estimation of A Shift. Econometric Theory, 11(3), 403 – 436.

Baltussen, G., & Post, G.T. (2007). Irrational Diversification. Working Paper, Retrieved from :

http://ssrn.com/abstract=989242. 

Banerjee, A. (1992). A Simple Model of Herd Behavior. Quarterly Journal of Economics, 107(3) 797 – 818.

Banz, R.W. (1981). The Relationship Between Return and Market Value of Common Stocks. Journal

of Financial Economics, 9(1), 103-126.

Barberis, N., & Huang, M. (2008). Stock as a Lotteries : the Implication of Probability Weighting forSecurity Prices. American Economic Review, 98(5), 2066-2100.

Barberis, N., & Thaler, R. (2003). A Survey of Behavioral Finance. In : G.M. Constantinides & M.

Harris & R. M. Stulz (ed.)  Handbook of the Economics of Finance (pp 1053-1128). Amsterdam :

Elsevier.

Barberis, N., Shleifer, A., & Vishny, R.W. (1998).  A Model of Investor Sentiment .Journal of 

Financial Economics, 49(3), 307-343.

Barsky, R.B. (2009). The Japanese Bubble: A 'Heterogeneous' Approach. NBER Working Paper No.

15052. Cambridge, MA : NBER.

Basu, S. (1983). The Relationship Between Earnings Yield, Market Value, and Return for NYSE

Common Stocks : Further Evidence. Journal of Financial Economic, 12(1), 129-156.

Baur, D.G., & Schulze, N. (2009). Financial Market Stability  –  A Test. Journal of International

Financial Markets, Institutions and Money, 19(3), 506-519.

Baur, D.G., & Schulze, N. (2010). The Risk of Beta  – Investor Learning and Prospect Theory. Paper

presented at the Finance and Corporate Governance Conference, Australia.

Bhandari, L.C. (1988). Debt/Equity Ratio and Expected Common Stock Returns : Empirical Evidence.

Journal of Finance, 43(2), 507-528.

Page 49: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 49/54

45

Bikhchandani, S., Hirshleifer, D., & Welch, I. (1992). A Theory of Fads, Fashion, Custom and

Cultural Change as Informational Cascades. Journal of Political Economy, 100(5), 992 – 1026.

Black, F. (1986). Noise. Journal of Finance, 41(3), 529-543.

Black, F., Jensen, M., & Scholes, M. (1972). The Capital Asset Pricing Model : Some Empirical Tests.In M. Jensen (Ed.) Studies in the Theory of Capital Markets (pp. 1085-1094). New York, NY:

Praeger.

Blaug, M. (1992). The Methodology of Economics : or how Economists Explain. Cambridge

University Press.

Brennan, M. (1993). Agency and Asset Prices. Finance Working Paper No. 6-93, Los Angeles, CA :

UCLA.

Buehler, R., Griffin, D., & Ross, M. (1994). Exploring the Planning Fallacy : Why People

Underestimate Their Task Completion Times. Journal of Personality and Social Psychology, 67(3),366-381.

Caballero, R.J. (2010). Macroeconomics after the Crisis: Time to Deal with the Pretense-of-

Knowledge Syndrome. NBER Working Paper No. 16429. Cambridge, MA : NBER.

Camerer, C., & Hogarth, R. (1999). The Effects of Financial Incentives in Experiments: A Review

and Capital-Labor Production Framework. Journal of Risk and Uncertainty, 19(1-3), 7-42.

Campbell, J.Y, Hilscher, J., & Szilagyi, J. (2008). In Search of Distress Risk. Journal of finance,

63(6), 2899-2939.

Carhart, M.M. (1997). On Persistence in Mutual Fund Performance. Journal of Finance, 52(1), 57-82.

Carpenter, M.D., & Upton, D.E. (1981). Trading Volume and Beta Stability. Journal of Portfolio

Management, 7(2), 60-64.

Chan, K.C, & Chen, N. (1991). Structural and Return Characteristics of Small and Large Firms.

Journal of Finance, 46(4), 1467-1484.

Chen, J., Hong, H., & Stein, J.C. (2002). Breadth of Ownership and Stock Returns. Journal of 

Financial Economics, 66(2),171-205.

Chen, L., & Novy-Marx, R., & Zhang, L. (2010). An Alternative Three-Factor Model. Working Paper,

Retrieved from :http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1418117 

Chen, M.Y., Kuan C.M. (2001). Testing Parameter Constancy in Models with Infinite Variance

Errors. Economics Letters, 72, 11-18.

Cutler, D.M., Poterba, J.M., & Summers, L.H. (1991). What Moves Stock Prices?. Journal of Portfolio

Management, 15(3), 4-12.

Daniel, T., & Titman, S. (1997). Evidence on the Characteristics of Cross Sectional Variation in Stock 

Returns. Journal of finance, 52(1), 1-33.

DeBondt, W.F.M., & Thaler, R. (1985). Does the Stock Market Overreact?. Journal of Finance, 40(3),

793-805.

Page 50: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 50/54

46

DeLong, J.B., Shleifer, A., Summers, L., & Waldman, R. (1990). Noise Trader Risk in Financial

Markets. Journal of Political Economy, 98(4), 703-738.

Edwards, W. (1968). Conservatism in Human Information Processing. In : B. Kleinmutz (ed.) Formal

 Representation of Human Judgment (pp. 17-52). New York, NY : Wiley.

Ellsberg, D. (1961). Risk, Ambiguity, and the Savage Axioms. Quarterly Journal of Economics 75(4),

643−69. 

Fama, E.F, French, K.R, & Davis, J. (2000). Characteristics, Covariances and Average Returns

1929 –1997. Journal of Finance, 55(1), 389−406. 

Fama, E.F, French, K.R. (2004). The Capital Asset Pricing Model: Theory and Evidence. Journal of 

Economic Perspectives, 18(3), 25-40.

Fama, E.F, French, K.R. (2006). The Value Premium and the CAPM. Journal of Finance, 61(5),

2163-2185.

Fama, E.F, & French, K.R (1995). Size and Book-to-Market Factors in Earnings and Returns. Journal

of Finance. 50(1), 131-155.

Fama, E.F, & French, K.R (1996). Multifactor Explanations for Asset Pricing Anomalies. Journal of 

Finance, 51(1), 55-84.

Fama, E.F, & French, K.R (1998). Value Vs. Growth: The International Evidence. Journal of Finance,

53(6), 1975−1999. 

Fama, E.F, & French, K.R (2001). Disappearing Dividends: Changing Firm Characteristics or Lower

Propensity to Pay?. Journal of Financial Economics; 60(1), 3−43.

Fama, E.F, & French, K.R. (1992). The Cross-Section of Expected Stock Returns. Journal of Finance,

47(2), 427−465.

Fama, E.F, & French, K.R. (1993). Common risk factors in the returns of bonds and stocks. Journal of 

Financial Economics, 33, 3−56. 

Fama, E.F. (1965). The Behavior of Stock-Market Prices. Journal of Business, 38(1), 34-105.

Fama, E.F. (1970). Efficient Capital Markets : A Review of Theory and Empirical Work. Journal of 

Finance, 25(2), 383-417.

Fama, E.F. (1991). Efficient Capital Markets: II. Journal of Finance. 96(5), 1575 – 1617.

Fama, E.F. (1998). Market Efficiency, Long-Term Returns and Behavioral Finance. Journal of 

Financial Economics, 49(3), 283−307. 

Fama, E.F., & MacBeth, J. (1973). Risk, Return and Equilibrium : Empirical Tests. Journal of Political

Economy, 81(3), 607-636.

Fox, C., & Tversky, A. (1995). Ambiguity Aversion and Comparative Ignorance. Quarterly Journal of 

Economics 110:585−603. 

Friedman, M. (1953). The Case for Flexible Exchange Rates. In:  Essays in Positive Economics (pp.

157-203). Chicago, IL : Chicago University Press.

Page 51: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 51/54

47

Greenwood, R., & Nagel, S. (2009). Inexperienced Investors and Bubbles. Journal of Financial

Economics, 93(2), 239-258.

Grossman, S.J., & Stiglitz, J. (1980). On the Impossibility of Informationally Efficient Markets.

American Economic Review 70 (3), 393 – 408.

Gujarati, D. (2004). Basic Econometrics. New York : NY. McGraw-Hill.

Hao, L., & Naiman, D.Q. (2007). Quantile Regression ( Quantitative Application in the Social

Sciences). Thousand Oaks, CA : Sage.

Heath, C., & Tversky, A. (1991). Preference And Belief: Ambiguity and Competence in Choice Under

Uncertainty. Journal of Risk and Uncertainty 4(1),5−28. 

Hohl, K. (2009). Beyond the Average Case: The Mean Focus Fallacy of Standard Linear Regression

and the Use of Quantile Regression for the Social Sciences. London School of Economics Working

Paper.

Homsud, N., Wasunsakul, J., & Joongpong, J. (2009). A Study of Fama and French Three Factors

Model And Capital Asset Pricing Model in the Stock Exchange of Thailand. International Research

Journal of Finance and Economics, 25(3), 31-40.

Hong, H., & Stein, J.C. (1999). A Unified Theory Of Underreaction, Momentum Trading, And

Overreaction In Asset Markets. Journal of Finance, 54(6), 2143-2184.

Jegadeesh, N., & Titman, S. (1993). Returns to Buying Winners and Selling Losers: Implications for

Stock Market Efficiency. Journal of Finance, 48(1), 65-91.

Jensen, M.C. (1968). The Performance of Mutual Funds in the Period 1945-1965. Journal of Finance,

23(2), 389-416.

Kahneman, D. (1973). Attention and Effort. Englewood Cliffs, NJ : Prentice Hall.

Kahneman, D., & Lovallo, D. (1993). Timid Choices and Bold Forecasts : A Cognitive Perspective On

Risk Taking. Management Science, 39(1), 17-31.

Kahneman, D., & Tversky, A., (1974). On The Psychology of Prediction. Psychological Review,

80(5), 237-251.

Kahneman, D., & Tversky, A., (1979). Prospect Theory: An Analysis of Decision Under Risk.

Econometrica 47(2), 263-291.

Kelly, P.J. (2003). Real and Inflationary Macroeconomic Risk in the Fama and French Size and Book-

to-Market Portfolios. Working paper , University of South Florida .

Koenker, R. (2000). Galton, Edgeworth, Frisch, and Prospects for Quantile Regression in

Econometrics. Journal of Econometrics, 95(2), 347 – 374.

Koenker, R. (2005). Quantile Regression. New York : NY, Cambridge University Press.

Koenker, R., & Bassett G. (1978). Regression Quantiles. Econometrica, 42(1), 33-50.

Koenker, R., & d’Orey V. (1987). Computing Regression Quantiles. Applied Statistics, 36(3) 383– 

393.

Page 52: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 52/54

48

Koenker, R., & Park B.J. (1996). An Interior Point Algorithm for Nonlinear Quantile Regression.

Journal of Econometrics, 71(1), 265 – 283.

Kothari, S.P., Shanken, J., & Sloan, R.G. (1995). Another Look at the Cross-Section of Expected

Stock Returns. Journal of Finance, 50(2), 185-224.

Kyle, A.S. (1985). Continuous Auctions and Insider Trading. Econometrica, 53(6), 1315-1335.

Lakonishok, J., Shleifer, A., & and Vishny, R.W. (1992). The Impact of Institutional Trading on

Stock Prices. Journal of Financial Economics, 32(1), 23 – 43.

Lakonishok, J., Shleifer, A., & and Vishny, R.W. (1994). Contrarian Investment, Extrapolation and

Risk. Journal of Finance, 49(5), 1541-1578.

Li, Q., Vassalou, M., & Xing, Y. (2000). An Investment-Growth Asset Pricing Model. Working paper.

New York, NY : Columbia University.

Lintner, J. (1965). The Valuation of Risk Assets and the Selection of Risky Investments in Stock 

Portfolios and Capital Budgets. Review of Economics and Statistics, 47(1), 13-37.

Lo, A.W., & MacKinlay, D.C. (1990). Data-Snooping Biases in Tests of Financial Asset Pricing

Models. Review of Financial Studies, 3(3), 431-467.

MacKinlay, A.C. (1995). Multifactors Models do not Explain Deviations from the CAPM. Journal of 

Financial Economics, 38(1), 3-28.

Malin, M., & Veeraraghavan, M. (2004). On the Robustness of Fama and French Multifactor Model:

Evidence from France, Germany and United Kingdom. International Journal of Business and

Economics, 3(2), 155-176.

Maris, G. (2009). Application of the Fama and French Three-Factor-Model to the Greek Stock Market.

University of Macedonia Working Paper No.2309.

Markowitz, H. (1952). The Utility of Wealth. Journal Of Political Economy, 60, 151-158.

Markowitz, H. (1958). Portfolio Selection : Efficient Diversification of Investments . New York, NY:

Wiley.

Maug, E., & Naik, N. (1996). Herding and Delegated Portfolio Management: The Impact of Relative

Performance Evaluation on Asset Allocation. IFA Working Paper No. 223-96. London : London

Business School.

Miller, G.A. (1956). The Magical Number Seven Plus or Minus Two : Some Limits in Our Capacityfor Processing Information. Psychological Review, 63(2), 81-97.

Muth, J.F. (1961). Rational Expectations and the Theory of Price Movements. Econometrica, 29(3),

315-335.

Post, T., & van Vliet, P. (2007). Downside Risk and Asset Pricing. Journal of Banking and Finance,

30(3), 823-849.

Rabin, M. (2002). Inference by Believers in the Law of Small Numbers. Quarterly Journal of 

Economics, 117(3), 775-816.

Roenfeldt, R.L., Greipentorg, G.L., & Palfman, C.C., (1978). Further Evidence on the Stationarity of Beta Coefficients. Journal of Financial and Quantitative Analysis, 13(1), 117-121.

Page 53: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 53/54

49

Roll, R. (1992). A Mean/Variance Analysis of Tracking Error. Journal of Portfolio Management,

18(4), 13 – 22.

Rosenberg, B., Reid, K., & Lanstein, R. (1985). Persuasive Evidence of Market Inefficiency. Journal

of Portfolio Management, 11(3), 9-17.

Ross, S.A. (1976). The Arbitrage Theory of Capital Asset Pricing. Journal of Economic Theory, 13(3),

341-360.

Samuelson, P.A. (1965). Proof That Properly Anticipated Prices Fluctuate Randomly. Industrial

Management Review, 6(2), 41-49.

Savage, L. (1964). The Foundation of Statistics. New York, NY: Wiley.

Schwert, G.W. (2003). Anomalies and Market Efficiency. In : G.M. Constantinides & M. Harris & R.

M. Stulz (ed.) Handbook of the Economics of Finance (pp 939-974). Amsterdam : Elsevier.

Sharpe, W.F. (1964). Capital Asset Prices : a Theory of Market Equilibrium Under Conditions of Risk.

Journal of Finance, 19(3), 425-442.

Sharpe, W.F., & Cooper, G.M. (1972). Risk-Returns Classes of New York Stock Exchange Common

Stocks : 1931-1967. Financial Analysis Journal, 28(2), 46-54.

Shiller, R. (1984). Stock Prices and Social Dynamics. Brookings Papers on Economic Activity, 2, 457-

498.

Shiller, R.J. (2000). Measuring Bubble Expectations and Investor Confidence. Journal of Psychology

and Financial Markets 1(1), 49 – 60.

Shiller, R.J. (2003). From Efficient Markets Theory to Behavioral Finance. The Journal of Economic

Perspectives, 17(1), 83-104.

Shleifer, A., & Summers, L. (1990). The Noise Trader Approach to Finance. Journal of Economic

Perspective, 4(2), 19-33.

Shleifer, A., & Vishny, R. (1997). The Limits of Arbitrage. Journal of Finance, 52(1) ,53-55.

Stattman, D. (1980). Book Values and Stock Returns. The Chicago MBA : A Journal of Selected

Papers, 4, 25-45.

Summers, L. (1986). Does the Stock Market Rationally Reflect Fundamental Values ?. Journal of 

Finance, 41(3), 591-601.

Thaler, R.H. (1999). Mental Accounting Matters. Journal Of Behavioral Decision Making, 12(3), 183-206.

Tobin, J. (1958). Liquidity Preference as Behavior Towards Risk. Review of Economic Studies, 25(1),

65-68.

Tversky, A., & Kahneman, D. (1986). Rational Choice and the Framing of Decisions. Journal of 

Business 59(4), 251−278. 

Tversky, A., & Kahneman, D. (1992). Advances in Prospect Theory: Cumulative Representation of 

Uncertainty. Journal of Risk and Uncertainty 5(4), 297−323. 

Van Nieuwerburgh, S., & Veldkamp, L. (2010). Information Acquisition and Under-Diversification.Review of Economic Studies, 77(2), 779-805.

Page 54: Théorie Financière : un Survol Théorique

5/17/2018 Th orie Financi re : un Survol Th orique - slidepdf.com

http://slidepdf.com/reader/full/theorie-financiere-un-survol-theorique 54/54

50

Vassalou, M., & Xing, Y. (2004). Default Risk in Equity Returns. Journal of Finance, 59(2), 831-868.

von Hayek, F.A. (1974). The Pretence of Knowledge. Prize Lecture, The Sveriges Riksbank Prize in

Economic Sciences in Memory of Alfred Nobel.

von Neumann, G., & Morgenstern, O. (1944). Theory of Games and Economic Behavior. PrincetonUniversity Press.

Weinstein, N. (1980). Unrealistic Optimism About Future Life Events. Journal of Business, 39(5),

806-820.