théorie et ontologie du droti chez dworkin

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Droit et Société 2-1986 17 Résumé La doctrine de Dworkin n’est au fond qu’une illustration du principe de légalité, puisqu’il soutient que le droit en Vigueur est complet et permet au juge de trouver une solution juste pour chacun des litiges. Il est com- plet parce que, à côté des règles, il contient des principes implicites, que le juge doit découvrir et énoncer. La faiblesse de cette thèse est qu’il n’y a aucune norme préexistant aux énoncés sur les principes. Ceux-ci ne peu- vent donc être ni Vrais ni faux. Ils sont le fruit de la libre création du droit par les juges. Summary Dworkin’s theory is basically an expression of the rule of law doctrine, since it holds that the existing body of laws is complete, so allowing the judge to tint the right answer to a question of law in each case. The sys- tem is complete because along with the rules, it includes implicit princi- ples which the judge must discover and pronounce. The weakness in this thesis lies in the fact that there is no rule which pre-exists this pro- nouncement of principles. Such pronouncements can therefore be neither true nor false. They are the fruit of the free creation of law by the judge Selon l’intuition heureuse de Herbert Hart 1 , le noyau de la philosophie juridique de Ronald Dworkin est une réaffirmation du « noble rêve » de la culture juridique américaine, c’est-à-dire la pré- tention (ou la croyance) que les juges appliquent à chaque affaire exclusivement un droit déjà existant sous la forme de normes gé- nérales et abstraites 2 . Théorie et ontologie du droit chez Dworkin Riccardo Guastini* * Istitutó di Filosofia e Sociolo- gia del Diritto, Università di Genova, Italia. L’auteur Né à Gênes en 1946, il a fait par la suite ses études à la Faculté dé Droit de l’Université de cette ville. De 1973 à 1976, il ensei- gna la philosophie du droit à l’Université de Sassari ; de 1977 à 1979, il fut professeur de doc- trine de l’État à la Faculté des Sciences Politiques de Trieste. Depuis 1976, il est professeur de théorie générale du droit à la Faculté de Droit de Gênes où, depuis 1984, il enseigne aussi le droit constitutionnel. Ses prin- cipaux travaux sont : – Marx dalla filosofia del diritto alla scienza della società. Il lessi- co giuridico marxiano 1842- 1851, Il Mulino, Bologna, 1974 ; – I due poteri. Stato borghese e stato operaio nell’analisi marxis- ta, Bologna, Il Mulino, 1978 ; – La democrazia vanificata. Sta- to autoritario e movimenti di op- posizione, Milano, Ottaviano, 1979 ; Problemi di teoria del diritto, Bologna, Il Mulino, 1980 ; – Marxismo e teorie del diritto, Bologna, Il Mulino, 1980 ; Lezioni di teoria analitica del diritto, Torino, Giappichelli, 1983 ; – Lezioni sul linguaggio giuridi- co, Torino, Giapichelli, 1985 ; – « La teoria generale dei diritto in URSS », Materiali per una sto- ria della cultura giuridica, 1, 1971 ; – « Completezza e analogia », Materiali per una storia della cultura giuridica, 6, 1976 ; – « Norberto Bobbio teorico del dirrito », Materiali per una storia della cultura giuridica, 8, 1978 ; 9, 1979 ; 10, 1980. 1. Cf. HART, American Jurisprudence through English Eyes. Pour une bibliographie de et sur Dworkin, cf. GUASTINI, Soluzioni dubbie ; cf. aussi M. COHEN (ed.), Ronald Dworkin and Contemporary Jurisprudence. 2. Sur le principe du rule of law et pour une importante distinction entre deux ver- sions de ce principe, cf. DWORKIN, Political Judges and the Rule of Law, p. 261-264 et aussi DWORKIN, The Forum of Principle.

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L’égalité comme valeur semble avoir de nos jours une place particulière dans la philosophie du droit. En effet, plus que toute autre, l’aspiration à l’égalité est devenue le palimpseste de toute communauté moderne. Toutefois, la question de sa prédominance sur les autres valeurs - et notamment la liberté - s’affirme deplus en plus comme une problématique d’actualité. À travers une perspective historique et philosophique, l’égalité s’affirme comme une valeur dont la genèse se trouve au coeur de la « démotique » occidentale. Ainsi, la notion a été tour à tourappréhendée comme la transposition juridique d’une forme d’égalité primordiale,comme un instrument de protection égale de certaines libertés fondamentales,comme un principe politique de participation à la démocratie, la formulation desconditions d’accès équitable aux ressources, une égalité des chances ou uneégalité de traitement devant les instances judiciaires.

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  • Droit et Socit 2-1986

    17

    Rsum

    La doctrine de Dworkin nest au fond quune illustration du principe delgalit, puisquil soutient que le droit en Vigueur est complet et permetau juge de trouver une solution juste pour chacun des litiges. Il est com-plet parce que, ct des rgles, il contient des principes implicites, quele juge doit dcouvrir et noncer. La faiblesse de cette thse est quil ny aaucune norme prexistant aux noncs sur les principes. Ceux-ci ne peu-vent donc tre ni Vrais ni faux. Ils sont le fruit de la libre cration du droitpar les juges.

    Summary

    Dworkins theory is basically an expression of the rule of law doctrine,since it holds that the existing body of laws is complete, so allowing thejudge to tint the right answer to a question of law in each case. The sys-tem is complete because along with the rules, it includes implicit princi-ples which the judge must discover and pronounce. The weakness in thisthesis lies in the fact that there is no rule which pre-exists this pro-nouncement of principles. Such pronouncements can therefore be neithertrue nor false. They are the fruit of the free creation of law by the judge

    Selon lintuition heureuse de Herbert Hart 1, le noyau de laphilosophie juridique de Ronald Dworkin est une raffirmation du noble rve de la culture juridique amricaine, cest--dire la pr-tention (ou la croyance) que les juges appliquent chaque affaireexclusivement un droit dj existant sous la forme de normes g-nrales et abstraites 2.

    Thorie et ontologie du droitchez Dworkin

    Riccardo Guastini*

    * Istitut di Filosofia e Sociolo-gia del Diritto,Universit di Genova, Italia.

    Lauteur

    N Gnes en 1946, il a fait parla suite ses tudes la Facultd Droit de lUniversit de cetteville. De 1973 1976, il ensei-gna la philosophie du droit lUniversit de Sassari ; de 1977 1979, il fut professeur de doc-trine de ltat la Facult desSciences Politiques de Trieste.Depuis 1976, il est professeur dethorie gnrale du droit laFacult de Droit de Gnes o,depuis 1984, il enseigne aussi ledroit constitutionnel. Ses prin-cipaux travaux sont : Marx dalla filosofia del dirittoalla scienza della societ. Il lessi-co giuridico marxiano 1842-1851, Il Mulino, Bologna, 1974 ; I due poteri. Stato borghese estato operaio nellanalisi marxis-ta, Bologna, Il Mulino, 1978 ; La democrazia vanificata. Sta-to autoritario e movimenti di op-posizione, Milano, Ottaviano,1979 ; Problemi di teoria del diritto,Bologna, Il Mulino, 1980 ; Marxismo e teorie del diritto,Bologna, Il Mulino, 1980 ; Lezioni di teoria analitica deldiritto, Torino, Giappichelli,1983 ; Lezioni sul linguaggio giuridi-co, Torino, Giapichelli, 1985 ; La teoria generale dei dirittoin URSS , Materiali per una sto-ria della cultura giuridica, 1,1971 ; Completezza e analogia ,Materiali per una storia dellacultura giuridica, 6, 1976 ; Norberto Bobbio teorico deldirrito , Materiali per una storiadella cultura giuridica, 8, 1978 ;9, 1979 ; 10, 1980.

    1. Cf. HART, American Jurisprudence through English Eyes. Pour une bibliographiede et sur Dworkin, cf. GUASTINI, Soluzioni dubbie ; cf. aussi M. COHEN (ed.), RonaldDworkin and Contemporary Jurisprudence.2. Sur le principe du rule of law et pour une importante distinction entre deux ver-sions de ce principe, cf. DWORKIN, Political Judges and the Rule of Law, p. 261-264 etaussi DWORKIN, The Forum of Principle.

  • Riccardo GuastiniThorie et ontologie du droitchez Dworkin

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    Cette illusion sduisante nest videmment quun corollaire dela doctrine de la rule of law (le gouvernement de la loi), autrementdit du principe de lgalit dans la fonction juridictionnelle. Pourcommencer, je voudrais tracer sommairement une carte des pr-supposs fondamentaux, caractristiques du noble rve 3. Pre-mier prsuppos : faire et dire le droit sont des choses tout fait diffrentes. Faire le droit signifie crer des normes gn-rales et abstraites susceptibles de rgler une quantit indfinie deconflits. Au contraire, dire le droit signifie appliquer ces normesprconstitues des cas individuels et concrets. Tandis que faire le droit est une activit avec un contenu hautement discr-tionnaire (politique), dire le droit est une activit qui nentranepas des valuations ou des dcisions politiques.

    Cette faon de penser, qui distingue la puissance cratrice denormes de la puissance (seulement) excutive des normes cres parautrui, est au fondement de la doctrine de la sparation des pou-voirs dans ses multi-formes versions.

    Deuxime prsuppos : le pouvoir de faire le droit doit tre r-serv des organes dmocratiques, lectifs, cest--dire politique-ment responsables.

    Symtriquement : les juges (et, en gnral, les organes ditsdapplication), tant des organes bureaucratiques non soumis une responsabilit politique doivent se limiter appliquer les nor-mes gnrales quils trouvent toutes faites et prtes lusage. Enaucun cas les juges ne peuvent tre autoriss produire des nor-mes nouvelles ad-hoc pour rsoudre les controverses sur lesquellesils sont appels juger.

    Le troisime prsuppos est dj implicite dans les prc-dents : chaque dcision juridictionnelle doit tre fonde sur la loi.La loi, de son ct, doit prdterminer dune faon univoque lasolution de chaque controverse possible sans laisser au jugedespaces de discrtion.

    2. Le principe de lgalit dans ladministration de la Justice estattaqu et mis en crise par le fait que, dans chaque systme juridi-que, il y a beaucoup de cas douteux ou difficiles (hard cases). Onpeut distinguer au moins trois espces diffrentes de cas diffici-les 4.

    En premier lieu il y a des cas dont la solution est incertaine, caril existe des doutes quant linterprtation dune disposition lgi-slative : il nest pas certain que la disposition lgislative en ques-tion concerne la controverse sur laquelle on doit juger.

    Beaucoup de doutes interprtatifs sont dtermins par deuxcaractristiques des langues naturelles (dans lesquelles les loissont formules) : lindtermination smantique et lambigut syn-taxique 5. Par exemple, une disposition lgislative ayant pour objetles jeunes hommes ou bien les peines cruelles serait trsindtermine. Dautre part, les dispositions ayant la forme Si x, y

    3. Je vais laborer librementquelques ides tires de : DICEY,The Law of the Constitution ;CARR DE MALBERG, Contribution la thorie gnrale de ltat ;KELSEN, General Theory of Lawand State ; VILE, Constitutiona-lism and the Separation of Po-wers ; BOBBIO, Legalit ;MATTEUCCI, Costituzionalismo ;MARSHALL, Constitutional Theory.

    4. DWORKIN (Hard Cases) ne dis-tingue pas clairement entre lesdiverses sortes de cas difficiles.En particulier, il ne distinguepas entre les doutes naissantdune lacune et les doutes nais-sant dune obscurit dans la loi.

    5. Par exemple, cf. CARRI, Notassobre derecho y lenguaje, p. 49et suiv. ; CARRI, Legal Principlesand Legal Positivism.

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    et z, alors w sont syntaxiquement ambigus puisquil nest pasclair du tout si la consquence juridique w doive tre appliquedisjonctivement dans les situations simples (x), (y) et (z) ou bienseulement dans la situation complexe (x + y + z).

    En deuxime lieu, il y a des cas dont la solution est incertainecar on ne trouve pas de dispositions lgislatives susceptiblesdapplication la controverse en question. Il sagit de situationsqui sont traditionnellement appeles par la doctrine lacunes dudroit (tegat sapa) 6.

    En troisime lieu, il y a des cas dont la solution est difficile carplusieurs (au moins deux) normes incompatibles semblent applica-bles la mme controverse. Il sagit des situations quon appelletraditionnellement antinomies du droit 7. (Mais Dworkin nesoccupe pas dantinomies. Au contraire, il ne semble mme passupposer leur existence).

    Le principe de lgalit exige qu chaque controverse soit tou-jours applicable une norme univoque prconstitue et il exige, enoutre, qu chaque controverse soit applicable une norme seule-ment. Si le droit nest pas complet (sil y a des lacunes), il peut seproduire des controverses qui nentrent dans le domaine daucunenorme. Si le droit nest pas cohrent (sil y a des antinomies), ilpeut se produire des controverses qui entrent en mme tempsdans le champ dapplication de d eux normes incompatibles. Si laformulation de la loi est indtermine ou ambigu, il peut se pro-duire des controverses pour lesquelles on ignore tout fait dans lechamp dapplication de quelle norme elles pourraient entrer.

    Dans tous ces cas, le principe de lgalit ne rgit pas la fonc-tion juridictionnelle, puisque la controverse en question nest pasrsolue de faon univoque par le droit existant. Donc le juge peut(et normalement il doit) dcider dune faon discrtionnaire, cest--dire en faisant une valuation thique et politique des intrts enconflit. Lorsque la loi est obscure, incomplte ou incohrente, ledroit nest pas certain, les dcisions judiciaires ntant pas prvisi-bles 8.

    On comprend donc pourquoi la philosophie juridique deDworkin, son but tant une dfense de la rule of law, consiste prin-cipalement dans lanalyse des cas douteux et prcisment de ladoctrine de la compltude (ou plutt de la compltabilit ) dudroit.

    3. Beaucoup dessais de Dworkin aboutissent une mmeconclusion univoque : pour chaque question de droit il existe tou-jours une rponse juste (right answer), une solution correcte dupoint de vue du droit en vigueur 9. Cela quivaut dire justementque le droit est complet ou au moins compltable par le jugesans employer aucune discrtion 10.

    Si, en prsence de lacunes lgislatives, les tribunaux pouvaienttrancher arbitrairement les controverses qui leur sont soumises, on

    6. Cf. CONTE, Saggio sulla com-pletezza degli ordinamenti giu-ridici ; PERELMAN (ed.), Le pro-blme des lacunes en droit.

    7. Cf. GAVAZZI, Delle antinomie ;PERELMAN (ed.), Les antinomies endroit.

    8. Cette ide est critique parDWORKIN dans The Model of Ru-les, I. Cf. GUASTINI, Due note diteoria del diritto.

    9. Cf. DWORKIN, No Right Ans-wer ?.

    10. Pour une analyse du conceptde discrtion , cf. DWORKIN,The Model of Rules, 1, p. 31 etsuiv.

  • Riccardo GuastiniThorie et ontologie du droitchez Dworkin

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    pourrait dire que ces controverses-l nadmettent aucune solutioncorrecte. Mais si, au contraire, les lacunes ventuelles sont com-bles (ou susceptibles dtre combles) par lusage de principes dudroit, alors mme les cas qui chappent aux prvisions du lgisla-teur auront nanmoins une solution juridique approprie : celleprcisment qui est suggre (pas par la loi pleine de lacunes) maispar les principes.

    La thse de la compltude du droit est soutenue par Dworkinsoit avec des arguments de politique du droit, soit avec des argu-ments dontologie du droit. La politique du droit concerne ce queles juges doivent faire ; lontologie du droit concerne ce que ledroit est.

    1) Du point de vue politique, Dworkin conformment latradition du libralisme juridique soutient que les juges, danschaque controverse qui leur est soumise doivent toujours fairevaloir les droits et les obligations prexistants des parties (et voilla right thesis) 11.

    Cela signifie deux choses. En premier lieu, les juges ne sont pasautoriss crer des normes nouvelles loccasion dune contro-verse particulire. Cela serait une violation du principe (libral) se-lon lequel la loi ne dispose que pour lavenir et na point deffet r-troactif. En deuxime lieu, les juges doivent juger sur la base desdroits et des obligations des individus : cest--dire quils ne sontpas autoriss dcider, soit dans un but politique ou social collec-tif (policies), soit sur la base dun calcul des cots et des profits(comme il est suggr au contraire par lorientation de politique dudroit dite economic analysis of law). De tels choix ont une naturepolitique et sont donc rservs au pouvoir lgislatif 12.

    2) Du point de vue ontologique, Dworkin soutient que le prin-cipe de lgalit dans la fonction juridictionnelle est ralisable puis-que le droit nest pas constitu seulement de rgles de droit expli-cites mais aussi de principes (principles). Peut tre des affaires par-ticulires donnent-elles lieu des difficults dans la dcision puis-quelles nentrent pas dans le champ dapplication dune rgle dedroit spciale. Cependant, cela ne signifie pas que, dans ce cas, lesjuges aient un pouvoir discrtionnaire au sens fort, cest--direquils soient libres de tout lien juridique. Les cas qui ne sont pasprvus par la loi sont toutefois susceptibles dune solution correc-te, puisquils entrent dans le champ dapplication dun principe (oude plusieurs principes) de droit. Autrement dit, les principes ontune fonction de clture du systme juridique : ils permettent decombler les lacunes de la loi 13.

    4. Dans lhistoire de la culture juridique, la doctrine librale dela compltude du droit a connu au moins trois versions significati-ves 14.

    11. Cf. DWORKIN, Hard Cases,p. 82 et suiv.

    12. Cf. DWORKIN, Hard Cases,p. 90 et suiv. Pour une critiquede la doctrine dite economicanalysis of law , cf. DWORKIN, IsWealth a Value ?, et Why Effi-ciency ?.

    13. DWORKIN, The Model of Rules,1, p. 35 et suiv.

    14. Cf. GUASTINI, Comptetezza eanalogia.

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    Premire version : le droit est ncessairement complet pourdes raisons logiques. On peut rappeler au moins deux argumentsen faveur de cette thse :

    a) juridiquement chaque conduite peut tre seulement ou liciteou illicite ; il nest pas possible quune conduite soit en mmetemps et licite et illicite (principe de non-contradiction) ; il nest pasnon plus possible quune conduite ne soit ni licite ni illicite (prin-cipe du tertium non datur) ; donc, chaque conduite qui nest pasqualifie dillicite par le droit est licite ; en tous cas chaque conduitea sa propre qualification juridique ; donc le droit est complet ;

    b) chaque systme juridique contient implicitement une norme gnrale exclusive selon laquelle tout ce qui nest pas in-terdit est permis, puisque pas interdit signifie prcisment permis ; la norme gnrale exclusive a une fonction de clturedu systme.

    Cette faon de penser aboutit une politique de sententia fe-renda : devant les cas qui ne sont pas prvus par la loi, les jugesdoivent argumenter a contrario.

    Deuxime version : le droit est ncessairement complet puis-quil est pourvu dune nature organique et dune force dex-pansion caractristique, cest--dire dune aptitude se dvelop-per en sadaptant aux situations nouvelles. Naturellement, lins-trument de ce dveloppement continu est lextension par analogie, partir des normes existantes, aux cas non prvus par le lgisla-teur. Il est tout fait vident que cette faon de penser aboutit une politique de sententia ferenda oppose et symtrique de laprcdente : les juges doivent argumenter, pas a contrario, mais asimili.

    Troisime version : le droit nest pas ncessairement, mais ildoit tre complet pour des raisons politiques videntes (les jugesne doivent pas crer le droit, les dcisions judiciaires doivent treprvisibles, etc.). Cette faon de penser aboutit une recommanda-tion de politique lgislative, cest--dire une suggestion aux lgisla-teurs : le lgislateur doit faire des lois claires, systmatiques, com-pltes, etc.

    La doctrine de la compltude de Dworkin ressemble la se-conde des doctrines mentionnes. Devant les cas difficiles dit-il les juges doivent adopter une sorte de procd de lanalogie lar-gie, cest--dire quils doivent appliquer les principes gnraux dudroit 15.

    Or, dans le langage commun des juristes, on parle de prin-cipes du droit dans plusieurs sens diffrents 16.

    Premier sens : on parle de principes pour dsigner des disposi-tions lgislatives ayant un contenu relativement gnral (par exem-ple les dispositions sur les contrats en gnral).

    Deuxime sens : on parle de principes pour dsigner des dis-positions lgislatives qui revtent un rle fondamental dans

    15. DWORKIN, No Right Answer ?

    16. Cf. GUASTINI. Produzione dinorme a mezzo di norme.

  • Riccardo GuastiniThorie et ontologie du droitchez Dworkin

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    lordre juridique grce leur position hirarchique dans le systmedes sources (cest le cas des dispositions de la constitution for-melle) ou de toute faon, grce leur importance politique.

    Troisime sens : on parle de principes pour dsigner des nor-mes qui ne sont exprimes par aucun nonc lgislatif spcifique,mais qui sont labores par les juristes (ou par les juges) au moyendes techniques dargumentation collectivement dsignes parlexpression analogia juris.

    Or, nous pouvons appeler explicite une norme juridiquequi, selon une certaine interprtation, est la signification dunedisposition lgislative. Tandis que nous pouvons appeler impli-cite une norme qui nest imputable aucune disposition lgisla-tive spcifique comme tant sa signification, mais qui a t labo-re par les juristes (bien quen la tirant du matriel lgislatif exis-tant) 17. Si nous adoptons ces conventions linguistiques, alors nouspouvons dire que les principes du premier et du deuxime genresont des normes explicites, tandis que les principes du troisimegenre sont des normes implicites. Il faut remarquer que les princi-pes, soit explicites, soit implicites, peuvent avoir une structure lo-gique quelconque. Un principe peut confrer une position juridiquesubjective (un droit, une obligation, etc.). Mais un principe peutaussi bien avoir une structure tlologique cest--dire quil peutprescrire la ralisation dun certain but. Toute cette chane de dis-tinctions est tout fait trangre Dworkin mais elle est nces-saire pour claircir sa pense. A ce point nous pouvons dire que lesprincipes dont parle

    Dworkin sont :a) des normes implicites,b) des normes qui confrent droits et obligations.En effet, les principes explicites chappent au discours de

    Dworkin pour la raison vidente que, si une situation de fait entredans le champ dapplication dune norme explicite, nous ne som-mes pas en prsence dune lacune et le cas (selon Dworkin) nestpas difficile. Les principes tlologiques, que Dworkin appelle poli-cies, sortent de son discours en ce sens que selon lui, les juges doi-vent faire valoir des droits et non pas poursuivre des buts sociaux.Cela dpend du fait Que, son avis, les droits sont prconstituspour les juges tandis que les buts sociaux ne le sont pas 18.

    5. Selon Dworkin, dans chaque systme juridique national il y aune doctrine thique et politique implicite (un ensemble de valeursmorales), qui constitue le fondement et la justification du droit envigueur 19. Le juge idal devrait tre capable, par un raisonnementinductif, de tirer cette doctrine du droit crit (soit lgislatif, soit ju-risprudentiel) existant. Lensemble des principes gnraux consti-tutifs dune telle doctrine, leur tour, serait de nature :

    17. Cf. GUASTINI, A TentativeAnalysis of Two Juristic Senten-ces.

    18. DWORKIN, Hard Cases, p. 82et suiv.

    19. Ibid., p. 105 et suiv. ; ID., CanRights Be Controversial ?

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    a) diriger linterprtation des dispositions indtermines ouambigus (pour chaque disposition on doit choisir la significationla plus conforme aux principes gnraux),

    b) engendrer (en les justifiant) un nombre indfini de normesspcifiques aptes offrir des solutions correctes (right answers)pour chaque controverse possible.

    Il faut remarquer que cette faon de penser de Dworkin estfonde sur une hypothse difficilement dmontrable : je veux par-ler du dogme de la cohrence du droit. Si un systme juridique na-tional ntait pas considr comme cohrent, on ne pourrait passoutenir quune et une seule doctrine thique et politique (bien quetrs gnrale et abstraite et donc indtermine) est au fondementdu systme tout entier. Par contre, si le systme nest pas cohrent,on peut tirer de lui non pas une seule doctrine mais plusieurs doc-trines politiques en conflit entre elles.

    La thse de Dworkin est trs faible puisque tous les systmesjuridiques contemporains, sans aucune exception, sont le rsultatdune production normative trs tendue dans le temps. Ils se sontforms dune faon alluvionnaire dans des situations institution-nelles et politiques toujours diffrentes. Ils sont le fruit pas dune,mais de beaucoup de politiques du droit en conflit entre elles. Ilsincorporent donc de nombreux principes et des normes incompati-bles, cest--dire beaucoup dantinomies. Est-il imaginable quune etune seule doctrine politique (quon suppose cohrente) soit capablede donner une justification chacune des normes et chacun desprincipes du systme ? Est-il imaginable quil y ait une doctrine po-litique, bien que trs gnrale, qui soit capable de fonder soit unenorme, soit son contraire ? Mais la difficult la plus grave pour lathorie de Dworkin est la suivante :

    On a vu que, dans les cas douteux, les juges doivent faire ap-plication des principes implicites du systme. Il va sans dire que leprincipe de lgalit est sauf si, et seulement si, ces principes bienquimplicites sont prconstitus pour le juge et ne sont pas le r-sultat dune cration judiciaire du droit. Par contre, si les juges in-ventent librement les principes de droit, cela veut dire quils seconduisent comme des lgislateurs : ils accomplissent des choix,de nature politique. Ainsi, tout le discours de Dworkin repose surlhypothse que les principes prexistent aux dcisions judiciaires.

    A ce point donc, Dworkin devrait faire deux choses. En premierlieu, il devrait argumenter en faveur de l existence des normesimplicites dans le droit : cest--dire, il devrait dmontrer que lasource des normes implicites est le lgislateur et en tous cas pas lejuge. En deuxime lieu, il devrait dire clairement quelles normesimplicites existent et dans quelles conditions on peut vridique-ment affirmer la validit dune norme implicite.

    La voie la plus vidente (bien quelle ne soit pas dpourvuedobstacles), pour argumenter en faveur de lexistence de normes

  • Riccardo GuastiniThorie et ontologie du droitchez Dworkin

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    implicites, semble tre la suivante : le droit nest quun langage ; lelangage normatif du droit (cest--dire le discours lgislatif) estpourvu de proprits logiques comme celles du langage de laconnaissance (le discours scientifique) ; il existe donc des normesimplicites qui peuvent tre tires des normes explicites au moyendun procd logique. Nanmoins Dworkin prfre une voie diff-rente, plus sophistique et ouvertement anti-empiriste 20.

    Il assimile le jeu de la jurisprudence et d la science juridi-que un jeu littraire. Imaginons dit-il que dans un club de lec-teur de Charles Dickens, on dcide de parler d David Copperfieldcomme si David tait un personne relle, et donc quon se pose dequestions sur David auxquelles on ne trouve aucune rponse expli-cite dans les pages de Dickens. Par exemple : est-ce que David taihomosexuel ? Des questions de ce genre, sel or Dworkin, non seu-lement ont un sens, mais en core elles admettent des rponsesvraies. pal exemple, il est vrai que David tait homosexuel si unetelle proposition concorde avec toutes les propositions sur Davidexpressment affirmes par Dickens, et/ou telle proposition donnedes explications satisfaisantes de la conduite de David dcrite(mais pas explique) par Dickens.

    Selon Dworkin, cela provient du fait que, au-del et ct desfaits bruts (hard facts) il existe dnigmatiques faits de cohrencenarrative 21. Autrement dit : le monde de David Copperfield nestpas un monde de papier , cest--dire quil nest pas simplementrductible aux pages effectivement crites par Dickens mais quecest un univers dou dune existence indpendante. Par cons-quent, ce monde est susceptible dtre tudi et dcouvert au-deldes paroles de Dickens.

    Dune manire analogue : le droit, selon Dworkin, nest pas ununivers purement linguistique (lensemble des paroles du lgisla-teur). Au contraire cest un univers peupl de faits moraux pastrop diffrent du monde du Sollen de Hans Kelsen ou du TiersMonde de Karl Popper 22.

    Et symtriquement : la science juridique et la thorie du droitne sont pas des disciplines purement meta-linguistiques portantsur le langage du lgislateur. La science juridique ne parle pas dulangage lgislatif : elle parle de ces faits normatifs particuliers quisont au-del du discours lgislatif et qui peuvent tre apprhendssans la mdiation du discours lgislatif, car ce discours ne cre pasces faits-l mais il les rflchit seulement 23.

    Selon Dworkin, une norme implicite N1 est valide lune des

    conditions suivantes (disjonctivement suffisantes) :1) le lgislateur na explicitement cr aucune norme incompa-

    tible avec N1 ;

    2) il est trs probable que le lgislateur aurait explicitementpromulgu N

    1 sil avait prvu la controverse rsolue par N

    1 ;

    20. DWORKIN, No Right Answer ?,p. 19 et suiv.

    21. Ibid., p. 27 et suiv.

    22. KELSEN, Reine Rechtslehere ;POPPER, Objective Knowledge.

    23. Cf. BULYGIN, Norms, Norma-tive Propositions, and Legal Sta-tements.

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    3) N1 peut tre justifie par (et lintrieur de) la mme doc-

    trine thique et politique qui a prsid la promulgation des nor-mes explicites du systme juridique en question ;

    4) N1 constitue la justification dune ou de plusieurs normes

    explicites du systme.Selon Dworkin, lorsque au moins une de ces conditions est r-

    alise, le jugement sur la validit de Ni est une proposition vraie 24.Malheureusement, la thorie de Dworkin se fonde sur une hy-

    pothse ouvertement mtaphysique qui, comme telle, nest passusceptible de vrification ou de falsification. Elle peut seulementtre constitutive ment accepte ou rejete.

    Il ne fait pas de doute quune telle prsupposition est incom-patible avec la thorie analytique du droit qui est construite surdes bases empiristes. Selon cette thorie, le droit est un langage : lelangage du lgislateur et dautres autorits normatives. Il ny a au-cune ralit normative inaccessible nos sens et indpendante desparoles du lgislateur 25.

    Dun point de vue empiriste, parler de David Copperfield est une mtonymie : cela neveut rien dire de plus que parler desparoles de Charles Dickens. Chaque nonc sur les inclinationssexuelles de David, qui ne serait pas un nonc purement mta-linguistique portant sur le roman, loin dtre vrai ou faux, seraitsimplement un nonc dpourvu dun sens quel conque. En touscas, un nonc sur David, exactement comme les noncs de la m-taphysique ou de la thologie, porterait sur une entit imaginaire.Un tel nonc nappartient pas au discours comme fonction de laconnaissance : son seul sens est de faire des contes 26.

    Ou mieux, du point de vue de la connaissance, ce ne sont passeulement les noncs sur David qui sont dpourvus de sens maisaussi les questions mmes qui sollicitent ces noncs comme leursrponses. On peut poser des questions senses (auxquelles on peutsensment rpondre) non pas propos de David mais seulement propos du discours de Dickens.

    Cest seulement un nonc portant sur ce que Dickens a critqui peut tre soumis des contrles : un tel nonc peut donc seultre dit vrai ou faux.

    On doit tout de mme remarquer quun certain nombrednoncs sur David, organiss convenablement et de telle sortequils constituent une trame narrative, bien que dpourvus de va-leur logique, finiront par donner lieu un nouveau roman deDickens . Malheureusement, ce ne serait quun roman apocryphe.

    En laissant de ct les jeux littraires et en revenant lascience juridique, on trouve que, dans le droit, les choses ne sepassent pas dune faon diffrente. Parler de normes ne veutpas dire parler des entits mystrieuses du monde du Sollen, maisplus simplement cela veut dire parler du discours lgislatif.

    24. DWORKIN, No Right Answer ?

    25. Cf. BOBBIO Scienza del dirittoe analisi del linguaggio ;GUASTINI, Il diritto come linguag-gio, il linguaggio del diritto.

    26. Cf. GUASTINI, Soluzioni dub-bie. Sur le langage de la fabulation , cf. ROSS, Directi-ves and Norms, p. 29 et suiv. ;ROSS, Legal Fictions ; SEARLE, TheLogical Status of Fictional Dis-course.

  • Riccardo GuastiniThorie et ontologie du droitchez Dworkin

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    Chaque nonc sur une norme qui naurait pas t expres-sment formule par le lgislateur nest pas proprement parlerun nonc mtalinguistique sur une norme (puisquil ny a aucunenorme prexistante dont on puisse parler). Un tel nonc est pluttun nonc directement normatif : cest la formulation mme (laseule formulation existante) de la norme en question. Donc, un telnonc nest ni vrai ni faux. Il est le fruit de la libre cration dudroit par les juristes ou les juges 27.

    Lorsquils formulent des principes de droit implicites, les juris-tes ne parlent pas de la loi ou du droit existants. En suivant Alek-sanderPeczenick, on peut dire quils parlent dans la loi ou ledroit 28. Ils ne dcrivent pas des normes en vigueur mais ajoutentplutt au discours lgislatif des noncs normatifs apocryphes .

    Il est bien vrai que ces noncs pseudo-lgislatifs peuvent treaccepts par la communaut des juristes. Mais une telle accepta-tion na rien voir avec la vrit : elle dpend des restes constituti-ves du jeu social quon appelle doctrine juridique .

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    27. Cf. GUASTINI, Produzione dinorme a mezzo di norme ; ID., AFramework for the Analysis ofJudicial Discours.

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