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CLYSTERE E-revue mensuelle illustrée Histoire des objets et instruments médicaux Histoire de la santé ISSN 2257-7459 Numéro 13 – Octobre 2012 SOMMAIRE Editorial : lettre à la rédaction (G. Gaboriau) Numéro Spécial : Les instruments de l’histoire de l’otoscopie (JP Martin) SOS décryptage : une seringue à transfusion de sang pur de Duffaud (P.Lépine) Actualités / Courrier des lecteurs /Rubrique à broc / Nouveautés en librairie / Envois Conception –réalisation : © Dr Jean-Pierre Martin – Centre hospitalier Jean Leclaire – 24200 Sarlat-la-Canéda, France. Abonnement gratuit sur : www.clystere.com

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CLYSTERE E-revue mensuelle illustrée

Histoire des objets et instruments médicaux

Histoire de la santé

ISSN 2257-7459 Numéro 13 – Octobre 2012

SOMMAIRE

Editorial : lettre à la rédaction (G. Gaboriau)

Numéro Spécial : Les instruments de l’histoire de l’otoscopie (JP Martin)

SOS décryptage : une seringue à transfusion de sang pur de Duffaud (P.Lépine)

Actualités / Courrier des lecteurs /Rubrique à broc / Nouveautés en librairie / Envois

Conception –réalisation : © Dr Jean-Pierre Martin – Centre hospitalier Jean Leclaire – 24200 Sarlat-la-Canéda, France.

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EDITORIAL

Une fois n’est pas coutume, l’éditorial de ce numéro est une lettre à la rédaction, sous la plume du Dr Guy Gaboriau, anesthésiste et membre du conservatoire du patrimoine médical de Rennes.

Une terminologie proposée pour les collections d’instruments médicaux anciens

A propos de la biographie de Charrière signalée récemment dans Clystère, et éditée deux ans avant sa disparition par le regretté Jimmy Drulhon, je voudrais faire part d’une sug-gestion qu’il avait émise dans les notes de bas de page de son ouvrage.

« Collection d’instruments médicaux anciens », le domaine qui nous rassemble dans cette revue, est une expression bien peu sobre et j’oserais dire : peu valorisante.

Monsieur Drulhon proposait, lui, en en détaillant l’étymologie, de reprendre un terme abandonné, dans le but de remédier à ce problème.

En l’occurrence, l’acologie, (du grec akos, remède ; logos, discours » écrivait-il) pour indiquer la « science des instruments de chirurgie ». Il citait le Dictionnaire Universel Larousse, édition de 1866, comme premier ouvrage où ce mot lui paraissait avoir été utilisé.

Que ne tentons-nous donc pas de faire connaître et diffuser ce terme, ce faux néolo-gisme, qui identifierait de la sorte, en tant qu’entité bien spécifique, l’objet de notre passion ?

A vos réflexions …

G. Gaboriau

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HISTOIRE DES INSTRUMENTS

LES INSTRUMENTS DE L’HISTOIRE DE L’OTOSCOPIE

Jean-Pierre Martin

E-mail : [email protected]

L'examen de l'intérieur du conduit auditif externe, ou otoscopie, s'est longtemps heurté, comme celui de toutes les cavités naturelles de l'organisme, au problème de l'éclairage. Rappelons que le conduit auditif externe n'est pas rectiligne (il est orienté en bas et en avant), qu'il est parfois très étroit, réduit à une simple fente qui fait obstacle à l'observation. Il est divisé en deux portions, une externe dilatable (paroi cartilagineuse), une interne non dilatable (paroi osseuse). Le premier ouvrage consacré aux maladies de l'organe de l'audition fut l’œuvre posthume de Joseph Heurnius, que publia son fils Otho Heurnius en 1602. C'est à Fabricius von Hilden (1560-1634)1 qui posa en 1646 les bases de la chirurgie de l'oreille (extraction de corps étrangers, de polypes), que l’on attribue généralement l'invention du premier spéculum2 auriculaire vers 1580, mais une phrase de Pierre de la Cerlata (décédé vers 1423) laisse penser que son invention lui est antérieure : « per inspectionem ad solem trahendo aurem et ampliando cum speculo aut alio instrumento » ( par l'inspection de l'oreille et se prolongeant jusqu'au coucher du soleil avec un spéculum ou un autre instrument )3. Miot attribue à Hilden l’idée d’éclairer le conduit auditif : « Primo locum splendidum elegi, ita quidem ut radii solares in auris meatum penetrarent » (En premier lieu, j'ai choisi un endroit magnifique, de telle sorte que les rayons solaires pénètrent dans le conduit auditif)4. Mais dès le IXe siècle, Rhazès (830-932) recommandait de toujours examiner l'oreille à la lumière du soleil5. Fallope (1523-1562) prôna lui l'usage d'un réflecteur6, et utilisa un tube de plomb poussé dans l'oreille pour cautériser les polypes avec un bourdonnet7 trempé dans de l'acide sulfurique. Willis détruisait les corps étrangers (par exemple des haricots) à l'aide d'un fil métallique rougi passé à travers un tube introduit dans l'oreille. Dans l'encyclopédie méthodiste de 17928, à la définition de spéculum, aucun n'est pourtant destiné à l'examen de l'oreille. On n'y trouve des spéculums que pour l'examen de l'anus (speculum ani), du vagin (speculum matris), de la bouche (speculum oris) ou de l'oeil (speculum oculi). Est-ce à dire qu'entre le XVe (Pierre de Cerlata) et la fin du XVIIIe l'usage du spéculum auriculaire s'était perdu ?

1 Fabricius von Hilden : Opera Omnia. 2 Spéculum : du latin speculum : miroir. Les parois internes des spéculums étaient généralement polies afin de refléter la lumière, comme un miroir. 3 Wilde W.R. : Practical observations on aural surgery and the nature and treatment of diseases of the ear with illustrations. Churchill, London, 1853. 4 Miot C. : Traité pratique des maladies de l’oreille. Paris, Savy, 1871. 5 Hartmann A. : Les maladies de l'oreille et leurs traitements. Traduction de la quatrième édition de 1889 par le Dr Potiquet. Asselin et Houzeau, Paris, 1890. 6 Hartmann A. : Les maladies de l'oreille et leurs traitements. Traduction de la quatrième édition de 1889 par le Dr Potiquet. Asselin et Houzeau, Paris, 1890. 7 Bourdonnet : Rouleau de charpie qu'on pose sur une plaie pour absorber le pus et empêcher le recollement des bords. 8 De la Roche, Petit-Radel: Encyclopédie méthodique, chirurgie. Tome 2. Panckoucke, Paris, 1792.

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Quoi qu'il en soit, selon les époques et les méthodes, un, deux, ou trois éléments furent utilisés pour examiner l'intérieur du conduit auditif externe : – une source de lumière. – un outil intermédiaire concentrant et transmettant la lumière vers et dans l'oreille. – un outil, le speculum, permettant d'élargir le conduit pour laisser passer les rayons lumineux jusqu'à la membrane tympanique. Nous allons passer en revue ces trois éléments, et conclurons par les appareils qui les combinèrent pour aboutir aux otoscopes que nous utilisons de nos jours. Les sources lumineuses.

Les praticiens avaient à leur disposition deux types de lumière : La lumière naturelle Qu'il s'agisse de la lumière solaire ou de la lumière diffuse du jour « tombant de nuages blancs »9, l'examen ne pouvait se faire que de jour, au mieux par temps ensoleillé, ce qui était rare dans certains pays ou régions. La lumière du jour seule ne permettait que difficilement l'examen du tympan. Pour le soleil, le patient devait être examiné entre 11 et 15 h. Le seul avantage de la lumière naturelle était de ne pas modifier les couleurs naturelles des tissus sains ou malades. Le patient était assis, le profil exposé à la source lumineuse, la tête légèrement inclinée (Fig.110). Malheureusement, lorsque l'axe de vision de l'opérateur (de dos par rapport à la source lumineuse) s'alignait sur celui du conduit auditif, sa tête faisait obstacle aux rayons lumineux et gênait l'observation11. Les positions respectives du malade, du praticien et de la source lumineuse étaient donc importantes. L'oreille du patient devait être orientée au mieux de manière à placer l'axe du conduit auditif dans celui des rayons solaires incidents.

Menière (1789-1862) installait ses patients sur un fauteuil à dossier élevé et leur coinçait la tête à l'aide d'un coussin ou d'un oreiller. Il abandonna cette technique, laissant la tête du patient libre, ce qui facilitait son orientation dans l'axe des rayons solaires incidents. De plus, la possibilité laissée au patient de retirer sa tête en cas de douleur liée à l'examen était rassurante.

9 Baratoux J. : Guide pratique pour l'examen des maladies du larynx, du nez et des oreilles. Société d'éditions scientifiques, Paris, 1892. 10 Toynbee J. : Maladies de l’oreille, nature, diagnostic et traitement. Paris, Delahaye, 1874. 11 Toynbee Joseph : The diseases of the ear : their nature, diagnosis, and treatment. John Churchill, London, 1860.

Figure 1 : examen auriculaire à la lumière naturelle.

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Garrigou-Desarènes utilisait une glace disposée à l'extérieur de l'appartement où il examinait ses malades : « Pour obtenir avec la lumière du jour un éclairage que je trouve insuffisant dans beaucoup de cas... il faut que la lumière diffuse tombe directement sur un miroir concave ou soit renvoyée sur ce réflecteur par une glace placée en dehors de l'appartement dans une certaine inclinaison. Mais le temps est-il trop sombre, l'examen devient impossible. »12. Cette méthode est l’ancêtre de celle des réflecteurs que nous évoquerons plus loin. La lumière artificielle Produite initialement par une bougie, puis par des lampes à gaz, enfin par des ampoules électriques, elle nécessitait pour ces dernières, avant l'apparition des réseaux de distribution de courant, l'usage de batteries de plusieurs éléments dont il fallait renouveler les liquides et le zinc fréquemment, ce qui était coûteux. Depuis quelques années, l'éclairage est dispensé par des L.E.D13. Passons en revue les diverses sources artificielles de lumière qui furent utilisées.

Lumière produite par une bougie La première lumière artificielle utilisée en intérieur, pour pallier au manque de lumière solaire, fut, et c’était une évidence, celle d’une bougie. Cette méthode peu efficace en raison de sa faible luminosité, obligeait les médecins à approcher la bougie très près de l’oreille du patient, ce qui occasionna des accidents, les cheveux du malade ou du médecin prenant feu14.

Lampes à gaz

Lumière de Drummond Elle était produite par le mélange enflammé de l'oxygène avec le gaz d'éclairage que l'on projetait sur un crayon de chaux ou de magnésie. Lampes à gaz Fourni en ville par diverses compagnies, le gaz n'était pas disponible en campagne, sauf à installer chez soi un appareil qui produisait un gaz contenant des carbures en grande abondance et donnait une lumière plus blanche que celle fournie par le gaz des compagnies. Le gaz d'éclairage avec un bec à double courant d'air donnait une lumière blanc bleuâtre parfaitement suffisante. En usant d'un verre bleuâtre ou violacé, la lumière obtenue était encore plus blanche. Un des meilleurs éclairages était fourni par le « bec Aüer » qui se montait sur toutes les lampes à gaz (Fig.2)15. Ce bec qui donnait une belle lumière blanche était en fait un bec Bunsen dont l'extrémité

était coiffée d'un manteau en tissu de coton préalablement trempé dans une solution composée de zircone, de nitrate ou d'acétate de lanthane,

12 Garrigou-Desarènes : de l'otoscopie et de l'otoscope parabolique. Société de médecine Pratique de Paris, SD. 13 LED : Light-Emitting Diode (en français Diode Electroluminescente (DEL)). 14 Gaboriau G. Pour jeter un oeil dans l'oreille : l'otoscope à bougie de Brunton. Clystère (www.clystere.com), n° 10, mai 2012. 15 Baratoux J. : Guide pratique pour l'examen des maladies du larynx, du nez et des oreilles. Société d'éditions scientifiques, Paris, 1892.

Figure 2 : Bec Aüer.

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d'oxychlorure de risconium, etc.16 Lampes à pétrole ou à essence minérale Elles devaient être équipées d'une double mèche, dont la première seule plongeait dans l'essence ainsi apportée à la seconde qu'entourait un cylindre métallique. Ceci évitait tout risque d'explosion. Parmi les lampes à pétrole, Baratoux cite celle de Bernard et Lempereur dont la flamme affectait la forme d'une tulipe et qui donnait une lumière moins colorée que les lampes habituelles. Ces lampes avaient l'inconvénient de diffuser la forte odeur des combustibles utilisés17. Lampes à huile Elles avaient un pouvoir éclairant inférieur à celui des lampes à gaz ou à pétrole. L'utilisation d'un verre de lampe formé de deux troncs de cônes réunis par leur partie étroite (verre de Bayle) (Fig.3)18, améliorait la combustion et la qualité de la lumière produite. Lampes électriques Les lampes électriques fournissaient une lumière blanche à fort pouvoir éclairant, mais nécessitaient des batteries aussi coûteuses que volumineuses. Ces systèmes imposaient un entretien régulier. En ville, l’électricité étant distribuée progressivement à domicile, les cabinets médicaux qui en étaient dotés purent être équipés d’instruments électriques, pour l’éclairage ou la cautérisation par exemple. L’électricité relégua les lampes à gaz au rang des antiquités. Progressivement l’apparition de batteries de petits volumes permit de s’affranchir du réseau électrique et autorisa la fabrication d’otoscopes qui embarquaient dans leur manche des piles sèches, parallélépipédiques puis cylindriques, de taille décroissante. Nous le verrons plus loin, la forme des manches des otoscopes s’affina et suivit la forme des piles.

Lumière et fibres optiques

Welch Allyn fut le premier fabricant à introduire la lumière à fibre optique dans des instruments médicaux comme les otoscopes en 1980. En 2000 ce fabricant commença la fabrication des lampes frontales médicales à L.E.D. Produire de la lumière n’était pas suffisant pour examiner l’intérieur de l’oreille. Encore fallait-il concentrer les rayons lumineux produits sur une cible étroite, le conduit auditif externe. Pour cela fut ajouté à la source lumineuse un système qui permettait tout à la fois de concentrer les rayons lumineux et de les diriger vers la cible. On regroupe ces systèmes sous le nom de concentrateurs / réflecteurs. 16 Baratoux J. : Guide pratique pour l'examen des maladies du larynx, du nez et des oreilles. Société d'éditions scientifiques, Paris, 1892. 17 Baratoux J. : Guide pratique pour l'examen des maladies du larynx, du nez et des oreilles. Société d'éditions scientifiques, Paris, 1892. 18 Baratoux J. : Guide pratique pour l'examen des maladies du larynx, du nez et des oreilles. Société d'éditions scientifiques, Paris, 1892.

Figure 3 : Verre Bayle.

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Les systèmes concentrateurs et réflecteurs de lumière. Les limites de l'examen à la simple lumière solaire directe furent rapidement atteintes. L'examen du tympan était probablement un évènement exceptionnel nécessitant la conjonction favorable d'un très bon ensoleillement, d'un patient facilement mobilisable et orientable, d'un conduit auditif large et plutôt rectiligne. Il apparut nécessaire d'améliorer l'éclairage du conduit auditif, le moyen le plus simple étant le recours à un réflecteur dont le rôle était de concentrer et focaliser les rayons lumineux (naturels ou artificiels) vers l'intérieur du conduit auditif. On utilisa soit des réflecteurs concaves, soit des lentilles convexes, seuls ou en association. Parallèlement, le besoin de s'affranchir de la lumière naturelle amena à la création de lampes spécifiquement destinées à

l'éclairage de l'oreille. Réflecteurs et lampes furent progressivement combinés. Quel que soit le modèle de lampe et de réflecteurs utilisés, il importait que ceux-ci soient mobiles pour pouvoir au mieux orienter la lumière vers la cavité auriculaire. La mobilité fut obtenue en ajoutant à la lampe fixée sur une table, un système de crémaillère, ou en fixant le réflecteur à la lampe par un système de tiges ou bras articulé permettant de l'orienter dans tous les sens.

Nous allons les passer en revue, sans aucune exhaustivité, tant les modèles furent nombreux. Nous n’avons retenu que les plus marquants. Systèmes utilisant la lumière naturelle Hartmann donne en 1889 une description des réflecteurs dont on suppose qu'elle représente le meilleur compromis technique obtenu après des décennies d’essais en terme d'utilisation et d'éclairage : « le réflecteur en usage est concave, il a 15 à 20 cm de foyer et porte à son centre une ouverture d'environ 1 cm de diamètre. Il est soit muni d'un manche (Hoffmann, De Troeltsch), soit fixé sur la tête du médecin, d'ordinaire au moyen d'un bandeau. Si on utilise le réflecteur à manche, on le tient de la main droite, la main gauche étant occupée à maintenir le spéculum ». Le réflecteur à manche qui mobilisait une main, n'était plus guère employé en 1889. Le plus simple était d'utiliser le réflecteur fixé sur un bandeau frontal. Le réflecteur devait pouvoir bouger dans tous les sens. Hoffman préférait un modèle qui fixait le réflecteur grâce à une double articulation à boule. Les réflecteurs montés sur un système solidaire d'un spéculum ne permettaient pas d'introduire d'instruments en même temps que l'on pratiquait l'examen. Les plus anciens réflecteurs semblent être ceux de Hoffmann, Grüber et Trölscht, ce dernier ayant été cité par Wilde en 1844. Les praticiens allemands utilisaient des miroirs concaves de 8-9 cm de diamètre et de 14-16 cm de foyer. Ces miroirs étaient étamés avec une feuille d’argent et percés d’un trou central comme les miroirs d’ophtalmoscopes.

Figure 5 : miroir de Trölscht.

Figure 4 : Appareil de Morell-Mackenzie (réflec-teur monté sur bras articulé).

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Miroir concave de grande taille de Von Trölscht Le meilleur éclairage était obtenu, selon Turnbull, avec le miroir concave de grande taille de Von Trölscht. Ce miroir avait un point focal de 15 cm. Ceci implique que le miroir devait être à 13 ou 14 cm maximum du pavillon de l'oreille pour que le cône lumineux réfléchi éclaire l'intérieur du spéculum introduit dans le conduit auditif. L'orifice central du miroir permettait d’observer le conduit à faible distance. Réflecteur de Weber Weber conçut un réflecteur, qualifié de « petit appareil très propre » par Turnbull, et consistant en un miroir de type ophtalmoscopique, percé d'un trou en son centre par lequel l'opérateur regardait et recevant la lumière naturelle, produite par une flamme ou renvoyée par un miroir. La lumière était reflétée par une double lentille. Le support du miroir servait également à supporter le spéculum, lequel était fixé par un anneau. Réflecteur frontal Un autre dispositif consistait à fixer le miroir sur le front de l'opérateur à l'aide d'un bandeau (comme avec le miroir de Clar). La lumière était placée devant la tête du patient et une petite lentille pouvait être tenue entre la source lumineuse et le miroir réflecteur frontal. Le moindre mouvement de tête déplaçait le cône de lumière obtenu en dehors de sa cible. Réflecteur de Czermak Le réflecteur était fixé sur une plaque tenue entre les dents. Hartmann le recommandait à ceux qui ne pouvaient utiliser le réflecteur sur bandeau frontal. Il convenait parfaitement pour des examens au domicile des patients, prenant peu de place dans la trousse. Il existait des modèles où le réflecteur était relié à la pièce buccale par une double articulation à boule. Réflecteur de Semeleder Le réflecteur était fixé sur une monture de lunettes. Réflecteur de Berthold Le réflecteur était fixé sur un anneau passé à un doigt de la main gauche.

Figure 6 : Réflecteur de Weber.

Figure 7 : Réflecteur de Semeleder.

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Figure 9 : éclairage à la bougie avec une cuillère en argent comme réflecteur.

Otoscope de Duplay Il ne s’agit pas d’un otoscope, mais bien d’un réflecteur, construit sur le même principe que celui de Clar, à la différence qu’il n’est percé que d’un seul trou pour la vision. Son concepteur était le chirurgien Simon Duplay, qui donna aussi son nom à un spéculum. Systèmes à lumière produite par une bougie Bougie et cuillère en argent

Afin d’améliorer la lueur produite par une bougie, les praticiens imaginèrent d’y accoler un réflecteur, le plus souvent il s’agissait d’une cuillère en argent. Nous avons reproduit le système, et avons pu constater que le foyer du rayon lumineux ainsi produit était situé à environ 10 cm de la source, ce qui ne facilitait pas de manière significative l’examen de l’oreille du patient. Menière utilisait ce système19.

Système réflecteur d'Archibald Cleland (1741).

En 1741, Archibald Cleland, un chirurgien militaire anglais, utilisa un réflecteur constitué d'un verre convexe circulaire de 7 à 10 cm de diamètre monté sur un manche dans lequel était glissée une bougie20. Les rayons lumineux produits par la

bougie étaient renvoyés et concentrés vers l'orifice naturel à explorer. Cet instrument ne servait pas uniquement pour les oreilles.

Lampe de Miller Cette lampe imaginée par le Dr Chowne porte le nom de son fabricant qui l'a perfectionnée. Elle consiste en une bougie contenue dans un tube de Palmer à ressort de 15 cm fixé sur un pied de 6,25 cm de diamètre et creux de 1,87 cm pour recevoir le réflecteur lorsque la lampe n'était pas en service (fig. 6-7)21. Au sommet se trouve un capuchon qui servait également à éteindre la bougie et à

19 Miot C. : Traité pratique des maladies de l’oreille. Paris, Savy, 1871. 20 Cleland A. : instruments proposed to remedy some kinds of deafness proceeding from obstructions in the external and internal auditory passages. Philosophical Transactions, 1741. 21 Toynbee J. : Maladies de l’oreille, nature, diagnostic et traitement (trad. Darin G.). Paris, Delahaye, 1874.

Figure 10 : Réflecteur d’Archibald Cleland (1741)

Figure 8 : Otoscope de Duplay, modèle Collin 1898.

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la protéger durant le transport. Cette lampe, peu onéreuse, pouvait être utilisée dans toutes sortes de situations, et pas seulement pour l'examen de l'oreille22. Ce n’est qu’une variante du système de Cleland.

Système de Bozzini (1806, 1828)

Wilde évoque l'ajout par Bozzini (qui exerçait en Allemagne à Francfort-sur-le-Main) d'un miroir concave au système de Cleland, sans grand effet23. Garrigou-Desarènes, dans un mémoire non daté, évoque la création par Bozzini en 1828 d'un réflecteur lui permettant d'examiner les oreilles et le pharynx24. Bozzini avait créé en 1806 le conducteur de lumière (lichtleiter)25, un système optique permettant l'exploration des cavités du corps humain. Outre les cavités uro-génitales, le lichtleiter, qui fut équipé de miroirs à 45 et 90° permit d'explorer des zones cachées par des angulations, comme le larynx. Il est considéré par certains comme l'inventeur du laryngoscope. Il ne semble cependant pas que le lichtleiter ait été utilisé pour les oreilles. Système de Deleau (1823) Deleau modifia ce système en insérant une fine bougie entre deux miroirs concaves26. Il en donna la description dans un mémoire de 182327 : « Miroirs métalliques concaves pour rassembler les rayons d'une bougie et les diriger dans le fond du conduit auditif. Ces deux miroirs, opposés l'un à l'autre, suppléent en partie aux rayons solaires pour éclairer le conduit auditif. Ils se meuvent facilement sur la tige carrée qui supporte la bougie. Le miroir

22 Toynbee J. : The diseases of the ear : their nature, diagnosis, and treatment. John Churchill, London, 1860. 23 Wilde W.R. : Practical observations on aural surgery and the nature and treatment of diseases of the ear. John Churchill, Londres, 1853. 24 Garrigou-Desarènes : de l'otoscopie et de l'otoscope parabolique. Société de médecine Pratique de Paris, SD. 25 Gonzalès J. : Initiation à l'histoire de la médecine et des idées médicales. Comprendre pour mieux savoir. Heures de France, 2005. 26 Franck M. : Practische Anleitung zur Erkenntniss und behandlung der ohrenkrankheiten. Erlangen, 1845. 27 Deleau J. : Description d'un instrument pour rétablir l'ouïe dans plusieurs cas de surdité inventé par M. Deleau Jeune. Extrait des annales de l'industrie nationale et étrangère. Fain, Paris, 1823.

Figure 12 : Lampe de Miller, ouverte (à gauche), fermée (à droite).

Figure 11 : Otoscopie avec lampe de Miller et spéculum.

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qui est placé près de l'oreille est peu concave. Les rayons qu'il réfléchit sur toute la surface du miroir placé près de la bougie, ainsi que ceux qui arrivent d'elle directement sur celui-ci, sont de nouveaux réfléchis et réfractés par ce second miroir qui a son foyer un peu au-delà de l'ouverture que l'on remarque au centre du premier miroir ».

Figure 13 : Système de Deleau (1823)

Lampe de Buchanan (1825) Vint ensuite la lampe de Buchanan28 qui semblait mieux tirer parti des lois de l'optique. Il utilisa initialement deux lentilles convexes pour illuminer l’intérieur de l’oreille, avec un excellent résultat, excepté que ce système occupait ses deux mains qui ne pouvaient pas mobiliser le pavillon de l’oreille vers l’arrière pour contrer l’angulation du conduit auditif

externe, ou utiliser des instruments pour retirer, par exemple, un corps étranger. Pour rendre leur liberté à ses deux mains, Buchanan conçut son « Inspector Auris », connu sous le terme de lampe de Buchanan. Elle consistait en une lanterne sphérique en étain comportant une large ouverture sur une face. Un tube d’acier dont l’intérieur était poli

était soudé à la lanterne. Sur ce tube était vissé un autre tube plus petit également en acier poli. A l’intérieur de ces tubes, un système complexe de plusieurs lentilles convexes et concaves était destiné à concentrer et transmettre la lumière produite par une bougie, dont la fumée était évacuée au sommet de la lanterne par un ensemble de petits trous. Otoscope de Bonnafont Aubry présente encore en 1900 un modèle d’otoscope de 28 Buchanan T. : Illustrations of acoustic surgery. London, 1825.

Figure 14 : Lampe de Buchanan (1825).

Figure 15 : Otoscope de Bonnafont (catalogue Aubry, Paris, 1900).

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Bonnafont, datant probablement des années 1840-1850, improprement dénommé otoscope puisqu’il s’agit en réalité d’un système réflecteur et concentrateur de lumière à bougie. La lumière est apportée directement par introduction d'une bougie dans le tube principal de l'otoscope qui comporte une extrémité fermée dotée d’un miroir concave (A), de l’autre une lentille convergente (B). Les rayons lumineux produits par la bougie passent, pour les uns, directement à travers la lentille, pour les autres, après avoir été réfléchis par le miroir. Il en résultait un faisceau lumineux assez petit et assez intense29. Système à lumière produite par une lampe à huile Lampe de Kramer (après 1833) La lampe de Buchanan fut améliorée par Kramer, qui substitua à la bougie une lampe à huile de type Argand. Cette lampe ressemblait à une lanterne magique avec une boite en étain à l'intérieur noirci, dotée d'une lampe et d'un réflecteur puissants à l'opposé desquels se trouvait un tube avec deux lentilles convexes de 6,25 cm de diamètre. Ce système permettait de projeter un disque lumineux d'environ 15 mm dans le spéculum introduit dans le conduit auditif. Kramer, dont la lampe était trop encombrante pour être pratique, reconnut cependant que rien ne valait les rayons solaires pour éclairer l'oreille. Autres lampes Divers modèles de lampes portables pour l'éclairage des oreilles furent utilisés. Wilde utilisait une lampe faite d'une boite à laquelle était fixée une lampe à pétrole et deux réflecteurs métalliques, dont l'un était orienté au bout d'un bras et projetait la lumière dans un spéculum dans lequel l'opérateur regardait à l'aide d'un tube muni de deux petites lentilles. Toutes ces lampes avaient l'inconvénient de mal révéler certaines lésions auriculaires et de ne pas permettre l'utilisation d'instruments comme des porte-caustiques. Système à lumière produite par une lampe à gaz Lampe de Segala Cette lampe était de conception simple, mais ne fonctionnait qu'avec le gaz. Elle était composée de deux tiges de fer, l'antérieure mesurant 10 cm de haut et étant surmontée d'un brûleur à gaz relié à un tube d'arrivée de gaz en caoutchouc. Cette tige verticale était reliée par une tige horizontale de 10 cm à une seconde tige verticale haute de 7,5 cm au sommet de laquelle était fixé un réflecteur circulaire de 11,25 cm de diamètre, percé en son centre d'un trou de 1,25 cm de diamètre, pour permettre à l'observateur de regarder à travers. Fixés à la tige horizontale, il y avait une balle et une poignée mobile grâce auxquelles la lampe pouvait être tenue dans la bouche de l'examinateur dont les deux mains étaient ainsi libérées.

29 Miot C. : Traité pratique des maladies de l’oreille. Paris, Savy, 1871.

Figure 16 : Lampe de Kramer (1833).

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Système à lumière produite par une lampe électrique Réflecteur de Clar C’est vers 1880 qu’Emile Moure, l’un des pionniers de l’ORL en France installé à Bordeaux, y ramena le réflecteur de Clar. On ne présente plus cet instrument mythique qui est devenu un symbole désignant celui qui le porte comme étant médecin, au même titre que le stéthoscope. Il est constitué d’un réflecteur concave percé de deux trous qui permettent à l’observateur de voir le conduit auditif qu’il éclaire grâce à une petite lampe dont la position est réglable afin de rétrécir ou élargir le faisceau lumineux réfléchi. Ce réflecteur est fixé sur un bandeau frontal, dont divers modèles ont été fabriqués. Les spéculums Le spéculum-forceps dit d'Hildanus inventé au XVIe siècle, consistait en une pince terminée par deux valves que l'on peut écarter selon les besoins. En raison de son poids, ce spéculum ne pouvait être laissé en place sans être tenu, ne laissant à l'opérateur qu'une main libre. De plus, une fois en place, l'espace libre entre les valves pouvait laisser passer poils et cérumen, qui venaient gêner l'observation en obturant une partie du conduit. Wright et Fabrizi rejetaient l'utilisation du speculum. Si l'on en croit Hartmann, en 1889 seuls les spéculums cylindro-coniques en caoutchouc durci ou en métal (argent ou maillechort) étaient encore utilisés. Les spéculums à deux valves et ceux coniques (introduits par Troeltsch en Allemagne) avaient été délaissés. Rappelons que le conduit auditif externe comporte deux parties, une externe aux parois cartilagineuses souples qui fait suite au méat, une interne aux parois osseuses rigides. Nous allons présenter les différents types de spéculums en suivant la classification proposée en 1871 par Miot30, à laquelle nous ajoutons le spéculum à une valve.

Spéculum à une valve31 Introduit dans l'oreille, il permettait, par une traction exercée à l'aide de la poignée, d'écarter le conduit auditif.

30 Miot C. : Traité pratique des maladies de l’oreille. Paris, Savy, 1871. 31 Wilde W.R. : Practical observations on aural surgery and the nature and treatment of diseases of the ear. John Churchill, Londres, 1853.

Figure 18 : Spéculum à une valve.

Figure 17 : Réflecteur de Clar. Modèle Collin 1898.

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Spéculums bivalves Spéculums bivalves à branches Spéculum de Fabrice de Hilden Spéculum composé de deux valves longues, larges et épaisses, se réunissant en tronc de cône allongé. Les valves étaient supportées par des branches de forme pyramidale, massives, quasiment dans le prolongement des valves.

Spéculum de Itard

Itard modifia le spéculum de Hilden en aplatissant le tronc de cône, et en allégeant les branches auxquelles il conserva la faible angulation par rapport aux valves, qui restèrent trop larges.

Figure 19 : Spéculum de Itard.

Spéculum-forceps à deux valves de Kramer Ce spéculum était utilisé avant 1850. Constitué de deux poignées maintenues écartées l'une de l'autre par un ressort puissant. Chaque branche, dans sa partie distale, était terminée par un demi-entonnoir. Lorsque l'on appuyait sur les deux branches, les deux valves de l'entonnoir s'écartaient. Les différents modèles de ce spéculum avaient en commun d'être encombrants, chers et peu efficaces. Il était également trop lourd pour rester seul en place dans le conduit et devait être tenu d'une main. Son poids et son encombrement pouvaient générer des douleurs lors de l'examen. De plus, une fois en place avec les deux valves ouvertes, le cérumen et les poils du conduit auditif pouvaient gêner l'examen. Comparé au spéculum d’Itard, les valves étaient plus étroites, mais les branches trop courtes.

Figure 20 : Spéculum-forceps de Kramer à deux valves.

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Spéculum de Triquet Triquet modifia le spéculum de Kramer en ajoutant entre les branches une règle graduée en millimètres destinée à mesurer la largeur du conduit.

Figure 21 : Spéculum de Triquet.

Spéculum de Blanchet Le spéculum de Blanchet était en forme de cône à base élargie, avec des branches courtes et perpendiculaires aux valves. La forme conique favorisait l’introduction de l’instrument, mais aussi sa chute lorsque les valves étaient écartées. Il devait donc être tenu en permanence. Spéculum de Garrigou-Désarènes

Ce spéculum, dont l’écartement des valves était limité, était muni d’un écran percé d’un trou central, pour éviter les rayons lumineux parasites, non dirigés dans le conduit. Cet écran fut considéré comme inutile, limitant l’éclairage du conduit et gênant l’utilisation d’instruments dans le conduit.

Spéculum de Miot En concevant son spéculum, Miot réalisa la synthèse des avantages des différents modèles existant. Les valves ne devaient être ni trop étroites (inefficaces) ni trop larges (difficiles à introduire), ni trop courtes (inefficaces pour redresser la portion souple du conduit) ni trop

Figure 23 : Spéculum de Miot à branches longues et réflecteur.

Figure 22 : Spéculum à écran de Garrigou-Désarènes.

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longues (incommodes et douloureuses), résistantes sans être trop épaisses, de surface interne polie pour refléter la lumière. Les valves devaient adopter une forme cylindrique aplatie et non pas un cône, afin de ne pas ressortir du conduit une fois ouvertes. Les branches devaient être rigides, fortement coudées et obliques par rapport à l’axe longitudinal des valves. La plupart des speculums avaient des branches perpendiculaires à l’axe des valves, ce que Miot trouvait peu pratique, car elles étaient au contact de la tête du patient, ce qui gênait la manipulation. Miot fit fabriquer son speculum idéal par Galante et lui ajouta un miroir réflecteur concave de 12 cm de foyer fixé sur une branche. La partie intérieure proximale des valves était noircie ou dépolie, la partie distale avait une surface intérieure brillante. Spéculums bivalves sans branches Spéculum de Bonnafont Le premier spéculum de ce type est attribué à Bonnafont. Il est composé de deux valves articulées, longues et déprimées dans leur partie moyenne, étroites à leur partie distale. Selon son inventeur, ce spéculum a l’avantage d’être léger et de tenir seul dans le conduit32. Ce type de spéculum était réputé supprimer les inconvénients du spéculum à tube plein, et pouvait être utilisé dans tous les cas, quelle que soit la forme du conduit auditif. Les deux valves, en s'écartant, corrigeaient les déformations et sinuosités du conduit auditif, l'élargissaient et laissaient entrer la lumière jusqu'au tympan. La longueur des valves permettait de le positionner dans la partie extensible du conduit en évitant l'introduction dans la partie osseuse (où la peau se trouvant coincée entre os et valve occasionnait des douleurs), et de rester en place sans l'aide de la main. De plus, tenant compte de la forme ovale du conduit auditif dans sa partie dilatable (ovale de haut en bas et d'arrière en avant), les valves du spéculum de Bonnafont n'étaient pas arrondies comme celle du spéculum d'Itard, « mais presque plates et très minces de manière qu'en se dilatant elles ramènent l'ovale du conduit à la forme arrondie dans toute la partie dilatable »33. Spéculum de Garrigou-Désarènes Doté de deux valves convexes ayant chacune une branche courte et légère, il était muni d’une crémaillère permettant d’écarter les valves. Spéculum de Miot Composé de deux valves munies de branches très petites réunies par une charnière et s’écartant à l’aide d’une vis.

32 Bonnafont JP. : Traité théorique et pratique des maladies de l’oreille et des organes de l’audition. Paris, Baillière, 1860. 33 Bonnafont JP : Traité théorique et pratique des maladies de l'oreille et des organes de l'audition. JB Baillière et Fils, Paris, 1860.

Figure 25 : Spéculum bivalve de Miot à branches courtes.

Figure 24 : Spéculum de Bonnafont.

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Spéculum bivalve à articulation de Collin L’un des rares spéculums qui porte le nom de l’inventeur constructeur, et non pas celui d’un médecin. Ce spéculum se retrouva dans le catalogue de nombreux fabricants.

Spéculums pleins Les spéculums pleins (sans valves) furent conçus pour éviter les inconvénients du spéculum d'Hildanus. Le plus ancien, simple entonnoir de corne, a été inventé par Neubourg34 en 1827, alors que généralement leur invention est attribuée au Dr Gruber de Vienne qui les introduisit en Angleterre suite à un article paru en 184435. Ces speculums ne différaient que par leur forme générale ovale, cylindrique, conique, et la section distale circulaire ou ovale. Il en existait de différente matière : corne, ivoire, argent, maillechort, caoutchouc durci, verre. Le métal, facile à nettoyer, fut rapidement préféré au caoutchouc durci. Les spéculums en verre, légers et résistants aux caustiques, très bon marché, avaient l’inconvénient d’avoir des parois épaisses. Les fabricants les vendaient généralement par lot de trois de tailles différentes. De nombreux médecins ont fait construire leur propre modèle de spéculum, apportant juste ce qu’il fallait de modifications à ceux existant déjà pour pouvoir le baptiser de leur nom (Wilde, Grubert, Toynbee, Politzer), sans pour autant apporter d’innovation majeure. Ainsi, le spéculum de Politzer n’était que la combinaison de ceux de Wilde et de Toynbee. Spéculum de Gruber

Le Dr Gruber était un médecin viennois. Turnbull36 affirme que la première description du spéculum auriculaire est due à Wilde en 1844 : « petit tube d'argent conique mesurant 3,7 cm de long, 1,56 cm de largeur dans sa plus grande ouverture, et variant de 2 à 4 lignes (1 ligne = 12 points = 0,2255 cm) dans sa plus petite ouverture ». L'intérieur et l'extérieur des deux extrémités étaient polis et les deux ouvertures circulaires. Il était recommandé de disposer de spéculums de deux ou trois tailles différentes. Il est

clair que ce spéculum améliora l'examen de l'oreille. Certains auteurs comme Bonnafont 34 Miot C. : Traité pratique des maladies de l’oreille. Paris, Savy, 1871. 35 Gruber : Otorrhaea. Dublin Journal of Medical Science, 1844. 36 Turnbull L. : A clinical manual of the diseases of the ear. JB Lippincott & Co, Philadelphia, 1872.

Figure 27 : Spéculum conique de Gruber.

Figure 26 : Spéculum bivalve de Collin.

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estimaient que le spéculum à un tube plein cylindrique ne pouvait être utilisé que pour les conduits auditifs larges, au risque de générer des douleurs37. Toynbee lui reconnaissait deux défauts majeurs. Premièrement, du fait de sa forme conique, d'obturer une partie du conduit auditif et d'en gêner l'observation. Deuxièmement, de ne pas tenir en place seul et de mobiliser une main de l'opérateur. Spéculum de Wilde Très peu de différence avec celui de Grüber en dehors d’un petit renflement du bord de la partie proximale, pour une meilleure prise digitale.

Spéculum d'Avery Avery, comme Toynbee, ne trouvait pas les spéculums de Gruber très pratiques. Il les modifia en supprimant la forme conique, qu'il remplaça, sur 1,87 cm par un tube cylindrique de diamètre constant. Ces spéculums furent appelés « cylindri-coniques ». Toynbee considérait que cela ne supprimait pas un autre

défaut, celui de la forme circulaire de l'extrémité distale du spéculum.

Spéculum de Toynbee Il semble que Toynbee modifia le spéculum d'Avery en donnant une forme ovale à son extrémité distale, mais en conservant la partie distale à diamètre constant, cylindrique et non conique. Il en fit la description en août 1850 dans le Lancet. Dans le livre de Wilbur38, les spéculums de Toynbee ont cet aspect. Pour une meilleure prise en main du spéculum, Toynbee aplatit la partie externe la plus large, le rebord faisant un angle de 90° avec l'extrémité distale. Il conseillait de posséder trois ou quatre tailles différentes de spéculum. Quant au fait que les spéculums devaient être en verre argenté, Toynbee était contre, l'épaisseur du matériau étant trop importante et encombrant le conduit auditif.

37 Bonnafont JP : Traité théorique et pratique des maladies de l'oreille et des organes de l'audition. JB Baillière et Fils, Paris, 1860. 38 Wilbur C.K. : Antiques medical instruments. Ed. Schiffer, 2008.

Figure 29 : Spéculum d’Avery.

Figure 30 : Spéculum d’Avery modifié par Toynbee.

Figure 28 : Spéculum de Wilde.

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Spéculum conique de Forster Spéculum conique terminé par une partie cylindrique de très petit diamètre d'un demi-pouce de long (soit environ 12 mm) lui permettant de s'insérer dans la partie osseuse du conduit auditif. Bonnafont reprochait aux spéculums coniques et à celui de Forster en particulier d'occuper une partie de l'espace du conduit auditif et de gêner l'observation, ce qui n'était pas le cas, selon lui, du spéculum à valves. Spéculum d’Erhard La forme est très proche de celle du spéculum ovale de Grüber ci-après. Les spéculums d’Erhard étaient souvent en verre.

Spéculum ovale de Grüber

Gruber modifia son spéculum conique dont il bomba la partie proximale.

Spéculum de Toynbee.

Toynbee modifia l'ouverture circulaire des spéculums de Gruber en ouverture ovale, épousant la forme naturellement ovale du méat auditif. Cette adaptation était censée causer moins de douleurs au patient. On trouva à la vente des spéculums de Toynbee de forme cylindrique et ovale.

Spéculum de Boucheron Ce spéculum entrait dans la catégorie des spéculums cylindri-coniques. Présent dans le catalogue Luer de 1912.

Figure 33 : Spéculum de Toynbee.

Figure 32 : Spéculum ovale de Grüber.

Figure 31 : Spéculum en verre d’Erhard.

Figure 34 : Spéculum de Boucheron.

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Spéculum en gomme dure de Politzer.

Politzer utilisa des spéculums en gomme dure, moins lourds, l'aspect sombre des parois intérieures favorisant une meilleure définition des parties illuminées du conduit auditif39. Il en existait des modèles courts.

Spéculum du Dr Le Mée Semblable au spéculum de Toynbee, avec une partie distale cylindrique toutefois plus allongée.

Pinces à spéculum La tenue des spéculums pleins avec deux doigts étant souvent difficile, certains eurent l’idée d’inventer des pinces permettant de les tenir. Les spéculums dont la partie proximale présentait un bord renflé, étaient ainsi insérés facilement dans la gouttière de la pince. Ce système revenait à celui des anciens spéculums à valves et branches, à la seule différence que

le spéculum plein gardait un calibre fixe, contrairement aux valves qui pouvaient être écartées. Il y eut différents modèles de pinces porte-spéculums, toutes assez similaires, nous n’en présentons que deux.

39 Turnbull L. : A clinical manual of the diseases of the ear. JB Lippincott & Co, Philadelphia, 1872.

Figure 33 : Spéculum de Politzer.

Figure 37 : Pince porte-spéculum de Miot. Figure 36 : Pince porte-spéculum de Levi.

Figure 34 : Spéculum de Politzer court.

Figure 35 : Spéculum de Le Mée.

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Spéculum trivalve Ce spéculum est une invention anglaise, mais il est peu connu et a été rapidement abandonné. Spéculum pneumatique Entrant dans le registre des instruments à usage curatif et non pas uniquement à usage otoscopique, nous ne l’évoquons pas. Systèmes combinés : les otoscopes Pour Baratoux40 le terme d'otoscope ne devait être donné ni à l'appareil d'éclairage, ni au miroir, ni au spéculum utilisés isolément, car si ces instruments ne sont pas toujours nécessaires, on est souvent obligés de les utiliser en même temps. Ce terme devait donc être réservé à la réunion de l'appareil de concentration de la lumière et du spéculum ou du miroir. Otoscope de Jean-Pierre Bonnafont Inventé par Jean-Pierre Bonnafont et construit en 1833-1834 à Toulon par Juglar (opticien de la Marine), cet otoscope se composait d'un cylindre en cuivre de 20 cm de long sur 15 mm de diamètre. Il était garni de 3 lentilles (f,g,h), formant un microscope grossissant 4-5 X, et doté d'un réflecteur en cristal ou en platine percé d'une ouverture pupillaire (d), et d'un second cylindre (ce) communiquant avec le corps de l'instrument par une ouverture supportant une lentille à double convexité placée en face du miroir réflecteur (d). Pour l'utiliser, une bougie (qui fut remplacée par le verre d'une lampe à huile ou à pétrole) était introduit dans le cylindre (cc) de manière que le foyer de sa lumière (a) soit bien en face de la lentille (e) qui les concentre sur le miroir (d), puis vers le conduit auditif préalablement dilaté par un speculum.

Bonnafont fit évoluer son otoscope. Il supprima les lentilles grossissantes, et le trou du miroir réflecteur. Pour faciliter le positionnement de la lampe entre le médecin et le malade, il mit un 40 Baratoux J. : Guide pratique pour l'examen des maladies du larynx, du nez et des oreilles. Société d'éditions scientifiques, Paris, 1892.

Figure 39 : schéma montrant la lampe insérée dans l’otoscope de Bonnafont.

Figure 38 : Otoscope de Bonnafont, modèle de 1834.

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support mobile doté d'une cuvette supérieure recevant le pied de la lampe et articulée avec le support par un pas de vis permettant de hausser (ou baisser) la lampe à hauteur de la tête du patient.

Dans sa version améliorée, le cylindre qui accueille la lampe à 6 cm de haut pour 5 cm de diamètre et est composé de deux valves articulées à charnières pouvant s'ouvrir et se refermer en s'adaptant au mieux à la taille de la lampe. Ce cylindre comporte sur un côté une ouverture de 2 cm de diamètre munie

d'une lentille biconvexe reliée à un petit tube perpendiculaire au tube principal de l'instrument. Un miroir percé en son centre et disposé à 45° par rapport au grand axe du tube principal réfléchit les rayons lumineux vers l'extérieur où se fixe le spéculum à deux valves. Les trois lentilles faisant microscopes de la première version ont été supprimées, ce qui a permis de raccourcir le tube principal. Cet otoscope étant utilisé uniquement au cabinet, la lampe était fixée sur un support en cuvette, réglable en hauteur grâce à une vis. Spéculum-otoscope à primes de Warden Warden présenta en 1845, à la Scottisch society of arts un système de prisme ajouté à un spéculum dans le but de focaliser la lumière à l'intérieur des cavités du corps humain41, notamment vaginale et vésicale. Dans le même temps, il présenta un otoscope conçu sur ce principe qui fut adopté par l'armée. Malgré ses promesses, il semble que Warden ne publia aucun travail sur son otoscope.

41 Warden A. : Sequel to description of the application of a totally reflecting prism to the investigation of disease in the open cavities of the body. Transactions of the royal scottisch society of arts. Vol III. Edinburgh, 1851.

Figure 41 : otoscope de Bonnafont sur son support à vis réglable en hauteur. Figure 40 : Otoscope de Bonnafont simplifié.

Figure 42 : Spéculum-otoscope à prisme de War-den.

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Otoscope parabolique de Garrigou-Desarènes42 (1854) Conscient de l'insuffisance de la lumière naturelle, trop faible et aléatoire, pour l'examen de l'oreille, Garrigou-Desarènes se tourna vers la lumière artificielle produite par « les lampes simples que l'on trouve partout » et surtout vers un réflecteur puissant. Il opta pour un réflecteur de forme parabolique car « un point lumineux placé au foyer d'un tube bien poli de forme parabolique envoie tous ses rayons parallèlement ». La lampe dans cet otoscope était placée au foyer de la surface parabolique (D). Les rayons lumineux venant de la lampe arrivaient parallèlement à l'ouverture (B). Afin de concentrer les rayons lumineux sur le tympan, un verre convexe était placé en (B) à l'ouverture de la parabole. Ce verre plan convexe avait un foyer de 18 cm, et était doublé sur son côté plan par un verre

bleu, cette couleur formant le complément de la teinte jaunâtre de la lampe et produisant au total une clarté très blanche. Cet instrument fut construit par Guéride. Léger, peu encombrant, il s'adaptait à toutes les lampes et pouvait être facilement transporté pour un examen au domicile du patient. Garrigou l'utilisait avec un spéculum bivalve réglable par crémaillère. Auriscope de Grant (septembre 1857) Grant, un médecin américain de Newark dans le New Jersey, publia en 1857 la description de son auriscope, constitué d’un cylindre sur lequel était fixé un entonnoir latéral, au fond duquel un miroir incliné à 45° réfléchissait la lumière vers le spéculum. Ce miroir était percé en son centre pour permettre l’observation à travers lui grâce à un petit tube. Appareil de Clark43(octobre 1857)

42 Garrigou-Desarènes : de l'otoscopie et de l'otoscope parabolique. Société de médecine Pratique de Paris, SD. 43 Tienmann G. : The american armamentarium chirurgicum. New-York, 1879.

Figure 44 : Auriscope de Grant.

Figure 43 : Otoscope parabolique de Garrigou-Désarènes.

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Clark vit un jour un employé du service des eaux contrôler son compteur caché dans un logement sous le trottoir. L’employé utilisa un petit miroir pour capter et diriger les rayons solaires à travers l’orifice du couvercle obturant la trappe. C’est ainsi que Clark dit avoir eu l’idée de construire son appareil, que Georges Tienmann, le célèbre fabricant d’instruments médicaux new-yorkais réalisa pour lui44. Clark, qui publia la description de son otoscope en octobre 1857, rendit

justice avec élégance en novembre 185745 à Grant qui avait décrit un otoscope identique en… septembre 185746 sous la dénomination d’Auriscope! Clark expliqua qu’il n’avait pas eu le temps de lire le numéro de septembre avant de publier son propre article. Sincère ou simplement pris la main dans le sac, on retiendra que la paternité de cet otoscope qui inspira ceux de Toynbee et Brunton doit donc être attribuée à Grant. Notons toutefois que le spéculum était amovible dans le modèle de Clark, et pouvait ainsi être nettoyé facilement.

Spéculum éclairé de Toynbee (avant 1854) L'appareil de Clarke fut modifié par Toynbee qui lui ajouta un entonnoir plus large et une série de spéculums. La présence du miroir à 45° dans le corps de l'instrument n'autorisait que l'observation, car il était impossible d'introduire un instrument dans l'oreille à travers lui. Le terme de spéculum est ici erroné, puisque le système comprend réflecteur + spéculum, et fait donc classer cet instrument parmi les otoscopes. A l’époque de sa création le terme d’otoscope comme le définit Baratoux en 1892 n’était pas encore entré dans la pratique courante. Notons que dès le milieu du XIXe siècle, les spéculums des otoscopes étaient amovibles et pouvaient ainsi être nettoyés facilement.

44 Clark HJ. : The reflecting otoscope and artificial drum. The medical and surgical reporter, 1857, Vol X, n° 10, 188-192. 45 Clark HJ. : Auriscope v. otoscope. Justice to Grant. The medical and surgical reporter, 1857, Vol X, n° 11, 556. 46 Grant G. : On the physical exploration of the ear by means of the Auriscope. The medical and surgical reporter, 1857, Vol X, n° 9, 449-4522.

Figure 46 : Otoscope ou Spéculum éclairé de Toynbee.

Figure 45 : Appareil de Clark.

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Modèle de Toynbee modifié par Hinton Hinton modifia le spéculum éclairé de Toynbee en lui ajoutant deux éléments : la bougie servant à produire la lumière concentrée dans l'entonnoir latéral fut fixée par un système de joint universel directement sur l'entonnoir ; un second tube de vision avec lentille permettait à un étudiant de voir ce que voyait l'opérateur. Turnbull se servait de cet instrument fabriqué pour lui par le Dr Gerhard lors d'une de ses visites à Londres. Otoscope de Brunton

Dans un article du Lancet de 186547, Brunton présente son otoscope, dont la conception ne diffère de celle de celui de Toynbee que par l'ajout d'une poignée mobile sur l'entonnoir latéral. Seule concession à Toynbee faite par Brunton, le spéculum qui équipe cet otoscope est de « type Toynbee ». Il semble donc que Brunton a copié le spéculum éclairé de Toynbee (antérieur à 1854), l'a légèrement modifié, et que l'histoire a retenu le nom de l'imitateur et non celui de l'inventeur ! Cet otoscope eut une très belle longévité, puisqu’il était encore

présent dans des catalogues en 1943 (Marque Simal). Luer en vendait un modèle avec éclairage électrique (présent au catalogue en 1912). Une description détaillée de cet otoscope a été faite par Guy Gaboriau dans un précédent numéro de Clystère48.

47 Brunton J. : A new otoscope or speculum auris. Lancet, 2 decembre 1865, Vol. 86, Issue 2205, 617-618. 48 Gaboriau G. : Pour jeter un œil dans l’oreille : l’otoscope à bougie de Brunton. Clystère (www.clystere.com), n° 10, Mai 2012.

Figure 47 : Otoscope de Toynbee modifié par Hinton.

Figure 48 : Spéculum de Brunton comme décrit dans l’article princeps du Lancet de 1865.

Figure 49 : Otoscope de Brunton (mo-dèle Lépine, Lyon).

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La fée électricité L’électricité, qu’elle soit délivrée par des piles sèches ou par le réseau, s’invita dans la conception des instruments utilisés pour l’otoscopie, qui furent modifié de manière minime. Cependant, elle ne s’imposa que progressivement, des instruments « à l’ancienne » comme l’otoscope de Brunton persistant jusque dans les années 1940-50, alors que les otoscopes à lumière électrique étaient sur le marché dès les années 1910. Spéculum éclairant du Dr Hautant. Il s’agissait d’un spéculum plein sur lequel était fixée une mini-ampoule de forme allongée qui suivait le bord inférieur de l’intérieur du spéculum. La main faisait office de manche. Spéculum présent dans le catalogue Drapier de 1937. Spéculum auri de Wappler Ce « spéculum » qui associe source lumineuse électrique, speculum et loupe est à ranger dans la catégorie otoscope. La lumière est délivrée par une ampoule alimentée par un cordon électrique qui traverse le manche. Il préfigure la forme de nos otoscopes de poche modernes. Le modèle ci-contre était présent dans le catalogue Luer de 1912.

Figure 50 : Spéculum éclairant du Dr Hautant.

Figure 50 : Spéculum auri électrique de Wappler.

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Electro-otoscope de Haike Présenté dans le catalogue Luer de 1912, cet otoscope était alimenté par l’électricité et disposait d’une loupe. Différents modèles similaires ont été vendus, comme celui du catalogue Simal de 1943, qui possédait en sus une prise d’air pour mobiliser le tympan.

Auriscope du Dr J. Le Mée Cet otoscope n’est rien d’autre qu’un otoscope de Toynbee (ou de Brunton) doté d’une ampoule alimentée par une pile sèche qui occupe l’emplacement du pavillon latéral. Il est apparu dans les catalogues dans les années 1910.

Figure 51 : Electro-otoscope de Haike.

Figure 52 : Otoscope de Le Mée.

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Otoscope moderne Pour aboutir à l’otoscope moderne que tout médecin a dans sa trousse, il suffisait de reprendre les bases posées par les otoscopes de Haike et de Wappler. Le manche accueille des piles rondes bien moins encombrantes que les anciennes piles carrées. Le spéculum amovible est monté sur une tête qui contient une micro-ampoule dont on peut faire varier l’intensité dans certains modèles. Cette tête est équipée d’une loupe permettant une meilleure vision. Enfin, les problématiques d’éclairage étant les mêmes en laryngoscopie ou en ophtalmoscopie, des coffrets furent vendus qui contenaient différentes têtes adaptables au manche : otoscope, laryngoscope, ophtalmoscope. Enfin, à l’ère de l’usage unique, les spéculums sont en plastique, jetables. Leur forme a peu évolué et grosso modo, leur forme est celle de ceux de Toynbee. Les modèles récents d’otoscope ont abandonné les manches en métal pour le

plastique, plus léger, et de plus petite taille, rendue possible par la miniaturisation des piles. Nec plus ultra, un écran vidéo miniature occupe la partie proximale du spéculum où l’observateur plaçait son œil. Il est même possible de capturer l’image et de la télécharger sur son ordinateur ! Conclusions L'histoire de l'otoscopie est un modèle d'évolution de l'instrumentation destinée à un usage particulier, ici celui de l'éclairage du conduit auditif externe en vue de l'examen du tympan. Les promoteurs en furent essentiellement anglo-saxons, allemands, autrichiens et français. L'amélioration de la technologie et la miniaturisation ont permis de regrouper en un seul instrument, les trois éléments indispensables et autrefois séparés : source lumineuse, concentrateur / réflecteur de lumière, spéculum. On a vu apparaître progressivement la forme de l'otoscope de poche que nous connaissons aujourd'hui, issue des instruments primitifs dont seuls les éléments pertinents et efficaces ont été conservés. Les lignes de l'instrument se sont progressivement simplifiées, épurées devrais-je dire, gagnant toujours plus en ergonomie grâce aux avancées technologiques successives : le soleil a été remplacé par la bougie, elle-même supplantée par les becs de gaz, puis les lampes électriques à batteries. L'invention des piles a permis leur insertion au cœur de l'instrument, comme dans

Figure 53 : Otoscope mo-derne, manche métal, marque Heine.

Figure 54 : Spéculum en plastique, usage unique.

Figure 55 : Otoscope moderne avec écran vidéo.

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l'otoscope de Le Mée, dont le manche parallélépipédique, peu pratique dans la main, a pu adopter une forme cylindrique plus ergonomique grâce à la miniaturisation des piles en petits cylindres.

Figure 55 : Coffret avec manche universel sur lequel s’adaptent des accessoires pour otoscopie, ophtalmoscopie, laryngoscopie.

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SOS DECRYPTAGE

Une seringue à transfusion de sang pur de Duffaud

Philippe Lépine

Musée d’histoire de la médecine de Lyon

E-mail : [email protected]

Le Musée d’histoire de la Médecine de Lyon possède une trousse métallique contenant une seringue complexe et portant l’inscription :

SERINGUE A TRANSFUSION DU

SANG PUR DE « DUFFAUD »

Brevetée S.G.D.G. FRANCE ET ÉTRANGER

Je n’avais jamais prêté d’attention particulière à cette seringue, sans ou-vrir la boite je pen-sais que c’était la seringue de JUBÉ. Mais notre seringue du Musée d’Histoi-re de la Médecine est bien différente et plus complexe.

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Cette seringue possède 2 pistons, à l’intérieur d’un cylindre de verre. L’un est manœuvré par la tige de piston mais l’autre est libre. Ce piston n’est en effet qu’une sorte de sou-pape. Il a un axe de sec-tion carrée qui en em-pêche la rotation et son mouvement longitudinal est dû à la pression ou dépression du sang à l’arrière de l’autre piston.

Les cannelures du piston libre se présentent successivement en regard des tubulures d’entrée et de sortie pratiquées dans le cylindre de verre. Le mouvement de transfusion se fait donc automatiquement alors qu’il nécessitait une rotation du piston avec la seringue de JUBÉ. Nous n’avons pas trouvé, jusqu’à maintenant de description de cette seringue. Il semblerait que la vie de cette seringue ait été très courte puisqu’elle a dû ap-paraître à peu près au même moment que l’appareil à transfusion de JOUVELET qui date du début de l’année 1934.et qui est beaucoup plus simple. D’ailleurs, la seringue en notre possession semble n’avoir jamais été utilisée Nous serions heureux de savoir si quelqu’un a des informations sur cette seringue…

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ACTUALITES

Signalé par René Van Tiggelen, conservateur du Belgian Museum for radiology : Le vendredi 26 avril 2013, à l'hôpital militaire de Bruxelles, se tiendra un symposium d'une journée, consacré à la médecine militaire spécialisée pendant la Grande Guerre.

Du nouveau concernant le musée de l’Assistance Publique Hôpitaux de Paris, dont nous avons évoqué la fermeture dans le précédent numéro de Clystère, suite à la mise en vente de l’Hôtel de Miramion où il était situé. Le Professeur Jean-François Moreau, président de l’ADAMAP (Association des amis du musée de l’Asssistance Publique Hôpitaux de paris), nous informe de la probable vente de l’Hôtel Miramion à Xavier Niel, le riche opérateur télé-phonique (Free). Il est probable que l’acheteur ne donnera pas suite aux vœux de l’ADAMAP qui souhaitait que l’acquéreur de Miramion maintienne les collections en place en attendant leur transfert dans 4 ou 5 ans dans les nouveaux locaux dédiés au musée dans l’Hôtel-Dieu, sous la protection bienveillante de la toute proche Notre-Dame de Paris. Inquiétudes donc sur la préservation des collections durant les multiples déménagements nécessaires, et leur stock-age… Pour en savoir plus, l’article de La Tribune : http://www.latribune.fr/vos-finances/immobilier/20121009trib000723741/xavier-niel-va-acheter-l-ancien-musee-de-l-ap-hp-.html

COURRIER DES LECTEURS Au courrier des lecteurs ce mois-ci :

Concernant l’article « Collectionneurs en danger ? : radioactivité et instruments médi-caux anciens » (Jean-Pierre Martin, Clystère n° 9, Avril 2012), René Van Tiggelen, conser-vateur du Belgian museum for radiology (http://www.radiology-museum.be) a fait les com-mentaires suivants :

« L'aventure "radioactive" récente que vous relatez, n'est pas si rare que cela; encore de nos jours, on tombe sur des cas similaires et difficiles souvent à résoudre. J'ai même eu le cas d'un tube radiogène dont l'anode en tungstène avait été contaminée à la fabrication par.... du ra-dium ! Une petite remarque : l'orthographe du découvreur des rayons X est Röntgen (et non von Röntgen). La première radiographie humaine n'est pas celle de sa femme mais de sa propre main, réalisée avant le 23 décembre 1895. La photo que vous présentez, est la radiographie de la main du professeur, prise par son collègue le professeur von Kölliker, lors de la première démonstration publique, à l'université de Würsburg le 23 janvier 1896 ».

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Concernant l’article « Haschich, chanvre et cannabis : l’éternel retour » (P-A Fabre, Clystère n° 13, octobre 2012), le Professeur Denis Goulet, Facultés de médecine de Montréal et Sherbrooke, directeur du Groupe de recherche en histoire de la santé et des institutions (GREHSI) a souhaité apporter les commentaires suivants : « l'usage du cannabis en Amérique est apparu bien avant 1920. Au Québec, son usage re-monte au moins au XIXe siècle… ».

Concernant l’article « Le sexographe du Pr J Capron » (JP Martin, Clystère n° 13, oc-tobre 2012), le Dr Gilbert Guiraud nous signale que dans le chapitre la controverse des pou-lets (p.147 à 150) du livre de Patrick Deville Peste et Choléra , il est question d'un « appareil appelé Xographe* d'un "Nostradamus de l'aviculture" destiné à déterminer le sexe des pous-sins (entre autre). Yersin va se livrer à une expérience de grande envergure à partir d'une méthodologie rigoureuse pour en arriver à la conclusion qu'il s'agit là d'une farce à classer dans la "catégorie des tables tournantes et autres facéties semblables (sic)". Il s'agit à n'en pas douter du Sexographe que vous présentez dans le dernier numéro de votre revue.

RUBRIQUE A BROC

Dr Philippe Dumoulin : « Usant du tout nouveau "RUBRIQUE A BROC", je me permets de demander conseil concernant la meilleure méthode pour préserver des instruments mixtes. Je songe particulièrement aux instruments chirurgicaux (acier/ivoire) et, de manière moins pré-occupante, aux instruments d'examen (fonte/bois) ». Contact : [email protected]

NOUVEAUTES EN LIBRAIRIE

René van Tiggelen : Radiology in a trench coat. Mili-tary radiology on the western front during the great war. Traduction Jan Dirckx. Academia Press, 2012 (220 p). ISBN : 9789038219394. Publié en 2011 en français sous le titre “La radiologie monte au front », cet ouvrage fort documenté et illustré (260 figures) est édité en anglais. Il compte l’histoire de la radiologie militaire pendant la première guerre mondiale, à peine 20 ans après la naissance de cette discipline médicale, à la base du diagnostic. Poussée par les nécessités de la guerre, la radiologie va con-naître un développement rapide. Mais faute de précau-tions, les personnels des unités radiologiques furent aussi les premières victimes « nucléaires » par exposi-tion aux rayonnements ionisants. (site de l’éditeur : http://www.academiapress.be)

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ENVOIS

Remerciements à M. le Dr Patrice Borel pour l’envoi du numéro spécial (n° 61 – avril 2012) de « l’ami de Pézenas » intitulé La médecine au temps jadis, qui présente sous forme de catalogue la collection des étains médicaux et hospitaliers du Dr Patrice Borel, et le droguier de la faculté de pharmacie de l’Université de Montpellier. Cette exposition se tient jusqu’au 15 novembre 2012 au musée de Vulliod-Saint-Germain (3 rue Albert Paul Allies, 34 Pézenas, Tel : 04 67 98 90 59). La collection d’étains du Dr Borel compte pas moins de 200 pièces du XVIIIe à nos jours, allant du clystère à la boule à sangsues en pas-sant par les palettes à saignées et les coffrets aux saintes huiles. Ce catalogue est de consultation agréable, richement illustré en couleur, et se termine par quelques pages sur le droguier de la faculté de pharmacie, deuxième de France avec 9000 échantil-lons de drogues conservés dans une salle de 250 m², et divers instruments d’optique anciens, des pots d’herboristerie et divers ouvrages anciens d’enseignement de la botanique.

Le Dr Patrice Borel recherche des lieux d’expositions temporaires en France à partir de No-vembre 2012. Vous pouvez le contacter par mail : [email protected]

Remerciements à M. le Dr Quentin Désiron (CHU de Liège, Belgique) pour l’envoi du tiré à part en PDF de son article intitulé : Désiron Q. : History of intrumental Haemostasis and the particular contribution of Jules E. Péan. Acta Chir. Belg., 2007, 107, 88-95. Cet article remarquable en anglais retrace l’histoire de l’hémostase qui a probablement commencé par la compres-sion digitale des vaisseaux aux temps préhistoriques. Sont passés en revue les méthodes et instruments utilisés aux différentes époques pour lutter contre les hémorragies par plaies vasculaires. L’article richement illustré se termine sur une courte biographie de Péan et sur un impressionnant coffret du maître contenant une cinquantaine de pinces hé-mostatiques de différentes tailles, que l’auteur a déniché en 2006. Si vous souhaitez un copie du PDF de cet article, contactez

l’auteur ([email protected]) ou [email protected]

PROCHAIN NUMERO : 1er Décembre 2012