tavail Écit de fin d’Études en vue de l’obtention du diplôme d’État … · 2017. 9....
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Institut Régional de Formation aux Métiers de la Rééducation et de la Réadaptation
Pays de la Loire.
54, rue de la Baugerie - 44230 Saint Sébastien sur Loire
RÔLE DU MASSEUR-KINÉSITHÉRAPEUTE AU SEIN D’UNE ÉQUIPE INTERDISCIPLINAIRE DANS LA PRISE EN CHARGE D’UNE PERSONNE ÂGÉE FRAGILE EN PERTE D’AUTONOMIE
POUR RÉHABILITATION À LA MARCHE À LA SUITE D’UN ALITEMENT PROLONGÉ
Margaux MARTIN
Travail Écrit de Fin d’Études En vue de l’obtention du Diplôme d’État de Masso- Kinésithérapie
Année scolaire 2016-2017
RÉGION DES PAYS DE LA LOIRE
AVERTISSEMENT
Les travaux écrits de fin d’études des étudiants de l’Institut Régional de Formation aux Métiers
de la Rééducation et de la Réadaptation sont réalisés au cours de la dernière année de
formation MK. Ils réclament une lecture critique. Les opinions exprimées n’engagent que les
auteurs. Ces travaux ne peuvent faire l’objet d’une publication, en tout ou partie, sans l’accord
des auteurs et de l’IFM3R.
Résumé
Du fait du vieillissement de la population, la prise en charge masso-kinésithérapique en gériatrie
est devenue essentielle pour améliorer la qualité de vie de ces personnes âgées fragiles en
retardant l’entrée dans la dépendance. Cette prise en charge masso-kinésithérapique s’inscrit
dans une démarche interdisciplinaire présente en centre de rééducation ou en structure
hospitalière et permet ainsi une rééducation gériatrique globale, centrée sur les différents
critères du syndrome de fragilité.
Ce travail écrit porte sur l’étude d’un cas clinique : la rééducation masso-kinésithérapique de
Mme R. réalisée au Centre Hospitalier Loire Vendée Océan de Machecoul, au sein d’une équipe
interdisciplinaire pour réhabilitation à la marche suite à un alitement prolongé consécutif à une
fracture du grand trochanter droit. Son séjour a été l’occasion de travailler son schéma de
marche et son équilibre en prenant en compte son état poly-pathologique afin de limiter sa
perte d’autonomie potentiellement réversible.
Les progrès de Mme R. ont permis d’améliorer ses déplacements et gestes de la vie
quotidienne, lui évitant d’entrer dans le stade de la dépendance iatrogène présente en milieu
hospitalier. Malheureusement, l’attitude en triple flexion de son membre inférieur droit
séquellaire à ses deux AVC et la présence d’une escarre talonnière d’évolution défavorable, due
l’alitement prolongé, a freiné la rééducation. À son départ, Mme R. marchait avec un rollator 4
roues sur de plus grandes distances mais avec un schéma de marche altéré.
Mots-clés
- Chute
- Syndrome d’immobilisation
- Fragilité
- Interdisciplinarité
- Dépendance iatrogène
Summary
Due to the ageing of the population, geriatric patients physiotherapy care becomes essential to
improve life quality of these frail elderly people by delaying dependency. This physiotherapy
care joins an interdisciplinary approach present in rehabilitation center or in hospital and so
allows an overall geriatric rehabilitation, focused on the various criteria frail syndrome.
This essay is about the study of a clinical case : the physiotherapy rehabilitation of Mrs. R carried
out in the “Centre Hospitalier Loire Vendée Océan” in Machecoul, within an interdisciplinary
team for walking rehabilitation following a extended bed rest. Her stay was the opportunity to
work on her walking pattern and her balance considering her poly-pathological state in order to
limit her potentially reversible dependency.
The progress of Mrs. R allowed her to improve her movements and everyday actions avoiding
her entering in a vicious circle wich is the psychomotor-mismatch syndrome.
Unfortunately, the triple flexion attitude of her right lower limb sequelae due to both stroke and
the presence of a heel bedsore with negative development , due to the prolonged bed rest, has
slowed down the rehabilitation. When she left, Mrs. R was walking with a 4 wheels rollator on
greater distance but with an unusual walking pattern.
Keywords
- Fall
- Downtime syndrome - Frail - Interdisciplinarity - Iaotrogenic dependency
Abréviations
- CHLVO : Centre Hospitalier Loire Vendée Océan - PA: Personne âgée - EVA : Échelle Visuelle Analogique - AVQ : Activités de la vie quotidienne - CMPR : Centre de Médecine Physique et Réadaptation
Sommaire
I. Introduction ..................................................................................................... 1
II. Cadre conceptuel ............................................................................................. 3
A. Le syndrome de fragilité : état d’équilibre instable ............................................................. 3 B. Etiologies de la chute et ses conséquences chez la personne âgée .................................... 4 C. La dépendance iatrogène ..................................................................................................... 6 D. Le syndrome d’immobilisation ............................................................................................. 7 E. Le concept d’interdisciplinarité ............................................................................................ 8
III. Dossier médical et présentation de la patiente ................................................ 9
A. La patiente ............................................................................................................................ 9 B. Anamnèse ............................................................................................................................. 9 C. Antécédents médicaux et chirurgicaux ................................................................................ 9 D. Pathologies associées ......................................................................................................... 10 E. Traitement rééducatif ........................................................................................................ 10
IV. Examen initial le 13/09/2016 .......................................................................... 10 A. Examen des déficits de structure ................................................ Erreur ! Signet non défini. B. Examen des déficits de fonction ........................................................................................ 11 C. Examen des limitations d’activités ..................................................................................... 13 D. Examen des restrictions de participation ........................................................................... 15
V. Diagnostic masso-kinésithérapique ................................................................ 15
A. Objectifs de prise en charge ............................................................................................... 17 B. Moyens ............................................................................................................................... 18
VI. Traitement masso-kinésithérapique ............................................................... 18
A. Principes ............................................................................................................................. 18 B. Techniques de rééducation masso-kinésithérapique ........................................................ 19 C. Autres prises en charge ...................................................................................................... 25
VII. Évaluation finale le 04/01/2017 au CMPR « Le Clousis » ............................... 25
VIII. Discussion ....................................................................................................... 26
A. Retentissement de l’immobilisation prolongée chez les personnes âgées fragiles .......... 26 B. Repérage de la population susceptible d’entrer dans la dépendance .............................. 28
IX. Conclusion ...................................................................................................... 30 Références bibliographiques Annexes
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I. Introduction L’Organisation Mondiale de la Santé définit une personne âgée comme une personne ayant 60
ans ou plus. Entre 2015 et 2050, la proportion des 60 ans et plus dans la population mondiale va
presque doubler, passant de 12% à 22% (1).
Ces personnes peuvent être considérées comme fragiles : syndrome clinique entre pathologie et
normalité (2). Le principal révélateur de fragilité pour un kinésithérapeute est la chute.
«On entend par chute un événement l’issue duquel une personne se retrouve, par
inadvertance, sur le sol ou toute autre surface située un niveau inférieur celui o elle se
trouvait précédemment » (3). Parmi les personnes âgées (plus de 60 ans), il existe trois profils
principaux que sont les personnes indépendantes (sujets en bonne santé générale), les
personnes fragiles (sujets limité dans leurs activités) et les personnes dépendantes (sujets
pathologiques). Le sujet chuteur se situe en principe dans la catégorie des personnes fragiles.
C’est une personne qui a chuté au moins une deux fois dans l’année et qui nécessite une prise
en charge préventive et/ou rééducative pour lutter contre l’involution irréversible de sa
fonction d’équilibration. (4,2) .
La chute de la personne âgée (PA) est la plupart du temps le résultat d’un déséquilibre postural
non compensé par sa fonction d’équilibration cause d’un manque de réserve fonctionnelle et
adaptative. (4,5) Elle survient au cours d’activités physiques domestiques souvent ordinaires.
Les conséquences de la chute sont plus graves pour la population de personnes âgées. Elles
peuvent engendrer un état poly-pathologique avec la plupart du temps, une fracture du fémur
(50%), une hospitalisation (30%), une institutionnalisation (40%), éventuellement une perte
d’indépendance définitive, voire un risque accru de mortalité dans le pire des cas. (12 000
décès/an) (4). Les chutes peuvent avoir également des conséquences psychologiques et
psychomotrices graves (apparition d’un sentiment de dévalorisation, de perte d’estime et de
confiance en soi, de la peur d’une nouvelle chute, d’un syndrome de désadaptation
psychomotrice avec un syndrome post-chute (4, 5, 6,7). Elles sont l’origine d’une diminution
des activités qui peuvent entrainer une perte d’autonomie et amener la personne âgée vers une
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institutionnalisation. Ces conséquences sont donc préoccupantes sur les plans sanitaires,
économiques et sociaux. (4 ,7)
Étant donné la réversibilité de la fragilité, les kinésithérapeutes ont une action à jouer car une
prise en charge adaptée des troubles fonctionnels pourrait replacer les sujets fragiles dans une
trajectoire de vieillissement réussi. (7,8, 9) Ceci permettrait moins de « souffrances » futures
liées l’entrée dans la dépendance et par conséquent, de réduire le coût socio-économique de
la vieillesse. L’action du kinésithérapeute est cependant indissociable de l’action d’autres
professionnels de santé tels que médecin, infirmière, diététicienne, psychologue. (10, 11,12)
Mme R, retraitée de 74 ans rencontrée dans le cadre d’un stage au Centre Hospitalier « Loire
Vendée Océan » Machecoul, a été victime d’une chute de sa hauteur son domicile. La
patiente est incapable d’expliquer la cause de sa chute et combien de temps elle est restée
allongée au sol. Présente-t-elle des troubles mnésiques ou tout autre trouble cognitif ?
D’autre part, Mme R. présente une réticence l’u lisa on de son déambulateur mis à sa
disposition en chambre. Elle reste assise la plupart du temps et ne se déplace qu’en fauteuil de
chambre accompagnée d’une tierce personne depuis son hospitalisation. Sans stimulation de
l’équipe soignante, Mme R. ne prend aucune initiative. S’agit-il d’une incompréhension des
consignes données en vue de l’utilisation de l’aide technique ? A-t-elle une appréhension la
marche seule sans accompagnement par une tierce personne ? A-t-elle les capacités motrices
pour se déplacer ? Ces observations concernant l’apragmatisme de cette patiente ont amené de
nombreuses questions. Comment redonner envie à la patiente de marcher ? Comment prendre
en charge une personne à risque de chute élevé qui se montre réticente l’u lisa on de l’aide
technique ? Comment redonner con ance Mme R et lui perme re un retour domicile
sécurisé alors que de nombreux critères prédicteurs de chute révèlent une fragilité et un risque
majeur d’entrer dans un schéma de désadaptation psychomotrice ? Quelle est la place du
masseur-kinésithérapeute au sein de l’équipe pluridisciplinaire concernant la rééducation de
cette patiente poly-pathologique ? Comment empêcher l’entrée de la patiente dans la
dépendance et donc vers l’entrée en institution ?
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II. Cadre conceptuel
A. Le syndrome de fragilité : état d’équilibre instable
Le concept gériatrique anglo-saxon de « fragilité » datant des années 80 est apparu il y a
seulement 4-5 ans en France. (14). À ce jour, aucune définition consensuelle n’a pu être
proposée. Cependant, en 2011, la Société Française de Gériatrie et de Gérontologie (SFGG) a
adopté la définition suivante : « La est un syndrome clinique. Il reflète une diminution
des capacités physiologiques de réserve qui altère les mécanismes d’ d p on u s ess. Le
syndrome de fragilité est un marqueur de risque de mortalité e d’événements péjoratifs,
no mmen d’incapacités, de chu es, d’hosp s on e d’entrée en institution. La prise en
charge des déterminants de la fragi peut réduire ou retarder ses conséquences. Ainsi, la
s’ nsc d ns un p ocessus po en e emen réversible » (15,16).
La fragilité est donc un syndrome clinique gériatrique réversible étudié selon trois approches
(15,2) :
- Une approche médicale : caractérisée par une association de plusieurs pathologies, une
malnutrition avec une perte de poids, des capacités d’équilibration et de marche diminuées
entraînant une sédentarité, une altération cognitive avec un syndrome confusionnel, des
troubles psychosociaux générés par l’isolement, des antécédents de fracture et une poly-
médication.
- Une approche physiologique : caractérisée par une diminution des réserves physiologiques
entraînant une réponse de moins bonne qualité des différents systèmes (cardiovasculaire,
immunitaire, nerveux, endocrinien, rénal et musculo-squelettique) face à un stress
environnemental, physique, ou psycho-social, même minime.
- Une approche fonctionnelle caractérisée par des limitations et/ou incapacités à réaliser
certaines activités de la vie quotidienne (AVQ), entraînant des restrictions de participation.
Deux modèles de fragilité avec un certains nombre de critères caractéristiques de cet état sont
validés à ce jour :
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- Le modèle phénotypique de Fried composé de 5 critères : perte de poids involontaire déclarée
ou constatée de plus de 4,5 kg dans les 12 derniers mois, fatigue subjective, ralentissement de
la vitesse de marche, diminution de la force de préhension, et sédentarité.
Le patient de plus de 65 ans est dit fragile s’il est en présence de 3 critères minimum.
Les sujets ayant 1 ou 2 critères sont dits pré -fragiles et les sujets ne présentant aucun des
critères sont considéré rés comme robustes. (15, 17,18)
- Un modèle dit de « déficits cumulés » qui détermine un indice cumulé de fragilité. Ce modèle
liste 92 déficits, symptômes ou situations clinique qui sont notés comme présents ou absents.
La somme de toutes les variables présentes chez un patient divisée par 92 permet d’obtenir
l’indice de fragilité. Plus le score est élevé, plus les sujets sont considérés comme fragiles. (18).
Le modèle phénotypique permet de déterminer la prévalence de la fragilité tandis que le
deuxième modèle détermine le niveau de sévérité de celle ci. La prévalence augmente avec
l’âge et elle est plus importante chez les femmes. (15)
B. Etiologies de la chute et ses conséquences chez la personne âgée
Avec l’avancée en âge, le mécanisme de la chute est multifactoriel (4, 5,6).
Elle implique simultanément des facteurs sanitaires et personnels (état de santé général,
pathologies aiguës ou chroniques, vieillissement physiologique), circonstanciels (activité en
cours, chaussures et équipements inadaptés, prise de risque), environnementaux
(habitats inadaptés, sols glissants, escaliers exigus et/ou sans rampe, tapis, obstacles) et
médicamenteux (psychotropes, antidépresseurs, hypnotiques et anxiolytiques, antipsychotiques
et cardio-vasculaires) (4,6).
Figure 1. Caractéristiques des 2 modèles de fragilité
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Figure 2. Classification générale des causes de chute (corpus de gériatrie)
Les causes non curables de la chute représentent potentiellement des facteurs de récidive. De
plus, d’autres éléments doivent être recherchés l’examen (6) :
- Le nombre de chutes antérieures : une chute dans les 3 derniers mois indique un risque élevé
de récidive
- n temps passé au sol supérieur 3 heures
- Un score au test de Tinetti < 20 points
- L’exécution du Time up and go test supérieur 20 secondes
- Un maintien en station unipodale inférieur à 5 secondes
- Une altération des réactions d'adaptation posturales : réactions d'équilibration et réactions
parachutes
- L’impossibilité de réaliser une double tâche
Les conséquences des chutes sont d’ordre psychologique (peur de tomber à nouveau),
traumatique (fracture 6 à 8%) (6), fonctionnel (restriction d’activités et perte d’autonomie),
social (source d’institutionnalisation), psychomotrice (perte des automatismes avec altération
des capacités d’équilibration) et mortalité (figures 1a et 1b). (4,6) .À noter qu’un sujet qui a
peur de tomber, tombera à nouveau. (2)
Le syndrome post-chute est le versant soudain du syndrome de désadaptation psychomotrice. Il
correspond à une perte des automatismes posturaux entrainant une perte des réactions
d’adaptations posturales avec parfois une difficulté ou une impossibilité à se remettre debout.
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(2,8). Le syndrome post-chute est une urgence gériatrique pouvant évoluer vers une perte
définitive de mobilité si aucune prise en charge n’est effectuée.
Figure 3a. Cause des décès accidentels chez les sujets Figure 3b. Causes des décès accidentels chez les sujets de plus de 65 ans chez les femmes de plus de 65 ans chez les hommes
C. La dépendance iatrogène
Les hospitalisations sont l’origine du déclin fonctionnel chez les personnes âgées fragiles. (18,
19, 20) En effet, 30 à 60 % d’entre elles perdent de l’autonomie sur les activités de base de la
vie quotidienne (AVQ) et par conséquence, 20% des patients âgés augmentent leur niveau de
dépendance de façon importante au cours d’une hospitalisation. (4,18)
Cette perte d’autonomie se produisant au cours de l’hospitalisation résulte de la fragilité
préexistante du patient associée la sévérité de la pathologie l’origine de l’hospitalisation
mais également l’environnement hospitalier, les soins et traitements dispensés inadaptés
(changes, alitement prolongé, absence de stimulation, sondage urinaire, prescription de
psychotropes… ). Cette inadaptation est appelée la « dépendance iatrogène ». (18) Elle est
définie comme « la part la plus souvent évitable de la dépendance acquise durant
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l’hospitalisation en relation avec les soins.
D. Le syndrome d’immobilisation
Le syndrome d’immobilisation est un ensemble de symptômes physiques, psychiques et
métaboliques consécutif à un alitement ou simplement à une réduction d’activité due à un état
pathologique ou à un événement particulier entraînant, sur le plan psychique, une démotivation
(deuil, contrariétés diverses…). (20) La gravité du symptôme dépend de l’âge de la personne
ainsi qu’au temps de maintien en situation de décubitus. (2)
Conséquences à court terme
Sur le plan cutané, des rougeurs et/ou des escarres de décubitus peuvent apparaître au niveau
des zones d’appui (talons, fesses, coudes…)
Sur le plan cardio-vasculaire, la conséquence est une stase veineuse et/ou thrombose.
L’immobilisation peut également engendrer des troubles de la déglutition avec des fausses
routes ou encore de la constipation. Au niveau respiratoire, il y a une diminution de la
ventilation avec possibilité d’encombrement. Enfin, on peut retrouver des stases urinaires, des
troubles métaboliques ou encore psychiatriques. (2,20)
Conséquences à moyen termes
L’hypotension orthostatique, les infections respiratoires et atélectasies sont les conséquences
cardiovasculaires et respiratoires de l’immobilisation moyen terme.
Sur le plan musculo-squelettique, la position en décubitus engendre une ou plusieurs attitudes
vicieuses articulaires au niveau des membres supérieurs et inférieurs mais également une
amyotrophie. De plus, plusieurs conséquences dont l’action du masseur-kinésithérapeute est
moindre viennent s’ajouter telles que des fécalomes, des infections urinaires, une incontinence,
des infections sur escarre, une malnutrition, une dépression, etc. (2,20)
Conséquences à long terme
Les conséquences long terme d’une immobilisation prolongées sont palliatives.
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E. Le concept d’interdisciplinarité
« Qui relève des relations entre plusieurs disciplines, plusieurs sciences. » (21)
À ne pas confondre avec la pluridisciplinarité qui elle est à considérer comme un état : c'est
l'association, la juxtaposition de plusieurs disciplines et non l’interaction. L’interdisciplinarité
consiste à mobiliser les compétences de plusieurs praticiens ayant des spécialités différentes
alors que la pluridisciplinarité mobilise des acteurs de formation et de compétence différentes.
(11,12, 22,23) À ne pas confondre non plus interdisciplinarité et inter-professionnalité.
L’interdisciplinarité s’appuie sur une articulation entre des savoirs (23) tandis que l’inter-
professionnalité recouvre plutôt la fragmentation des professions et de leur sphère
d’intervention dans les soins des patients. A cet égard, ce qui compte c’est la mise en œuvre
d’une pratique collaborative mettant en œuvre une dynamique d’équipe, respectant le rôle et la
responsabilité de chaque profession ainsi que du patient et son entourage.(23) On peut dire que
cette approche plurielle et coordonnée du patient âgé, depuis les urgences jusqu’
l’organisation de sa sortie, conditionne la qualité des soins.
L’interdisciplinarité au service de la fragilité
L’aspect multifactoriel de la fragilité révèle la nature même des soins nécessités par les
personnes âgées. La personne âgée, du fait du vieillissement de ses réserves physiologiques,
associe souvent plusieurs pathologies.
Dans ce cadre, une prise en charge globale et interdisciplinaire semble indispensable pour
assurer la qualité des soins. Parmi ces disciplines, on peut citer l’importance de la diététicienne
afin d’assurer une alimentation la plus adaptée évitant une amyotrophie et faiblesse musculaire
trop importantes (24). L’ergothérapeute a également un rôle dans la prise en charge de la
fragilité en adaptant le domicile du sujet et en proposant des aides matérielles et fonctionnelles
qui compensent les déficits du sujet. Le psychiatre permet de traiter la dépression et
démotivation, principal facteur du syndrome d’immobilisation. (25) Enfin, le médecin adapte le
traitement médicamenteux afin d’éviter une dépendance iatrogène néfaste la rééducation.
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III. Dossier médical et présentation de la patiente
A. La patiente
Mme R, âgée de 74 ans, droitière, pèse 69 kg et mesure 166 cm soit un IMC de 25,04 kg/m2 :
elle est donc, selon l’OMS, en surpoids.
Mme R est retraitée depuis 2002 de la fonction de secrétaire notariale à Beauvoir/Mer. Veuve,
elle vit dans cette même ville, avec ses deux filles âgées de 38 et 42 ans dans une maison
individuelle avec trois marches d’escalier d’accès. Ses deux filles ne sont pas présentes dans la
journée, raison pour laquelle elle a été transférée en service de soins de suites.
Elle ne bénéficie d’aucune aide domicile. Avant sa chute, Mme R. était autonome dans ses
activités de la vie quotidienne. Ses principaux loisirs étant la lecture et la télévision.
B. Anamnèse Mme. R a chuté son domicile le 18/06/2016 6h00 du matin. C’est une de ses filles qui l’a
retrouvé au sol avec une perte d’urine et qui a appelé le SAM . Mme R. est incapable
d’expliquer l’origine de sa chute, s’il y a eu malaise ou si c’est une chute par maladresse.
Cela a conduit à une hospitalisation le même jour dans le service de chirurgie orthopédique et
traumatologique dans le CHU de Challans où il a été diagnostiqué une fracture non déplacée du
grand trochanter droit sous la prothèse totale de hanche.
Elle a ensuite été prise en charge dans le service de Service de Soins de Suite et de Réadaptation
au CHLVO de Machecoul pour la poursuite de la prise en charge de cette atteinte.
C. Antécédents médicaux et chirurgicaux Parmi les antécédents médicaux de Mme R, nous retenons une œsophagite peptique, une
diverticulose, deux AVC ischémiques en 2015 responsables d’une hémiparésie droite, une
arythmie cardiaque par fibrillation auriculaire, une cardiopathie dilatée, une alcoolisation
chronique non sevrée, une myélofibrose primitive sous HYDREA et ARANESP et un diabète non
insulinodépendant. Sur le plan chirurgical, on lui a posé en 2005 une prothèse totale de hanche
à droite suite à des coxalgies droites évoluant depuis 1 an et demi avant l’opération,
d’aggravation progressive faisant apparaitre une impotence fonctionnelle partielle (boiterie).
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D. Pathologies associées Un entretien avec une de ses fille révèle que depuis ses deux AVC datant de 2015, il persiste de
légers troubles mnésiques et phasiques (débit de parole réduit, manque du mot, non
reconnaissance des personnes du quotidien, oublis…), une très grande fatigabilité et l’apparition
d’un flessum du membre inférieur droit apparut 3-4 mois avant la chute.
De plus, elle présente une escarre de type IV au niveau du talon gauche à type de phlyctènes
découpées, dû l’alitement prolongé durant l’été, malgré la prévention anti-escarre et la mise
en place d’un matelas air. Ceci s’explique par une artériopathie oblitérante des membres
inférieurs prédominante à gauche empêchant la cicatrisation.
Son dossier médical révèle une alcoolisation chronique non sevrée, une incontinence urinaire et
un début de syndrome dépressif depuis l’hospitalisation (absence de participation, d’envie et
d’intérêt) avec une dénutrition. Cette dénutrition sera surveiller. En effet, un défaut de
nutrition pourra entrainer des carences provoquant entre autre une fragilité osseuse, lourdes
de conséquences en cas de chute.
E. Traitement rééducatif À la suite de l’opération, il est décidé d’un traitement orthopédique avec marche sans appui sur
son membre inférieur droit jusqu’ consolidation. Le 03/08/2016 (J+46), suite la consultation
de contrôle avec le chirurgien, la remise en appui est autorisée avec l’aide d’un déambulateur.
La patiente est sous traitement par ELIQUIS qui est un anticoagulant et antidépresseurs.
IV. Examen initial le 13/09/2016
A. Examen des déficits de structure
Les deux AVC ischémiques gauches de 2015 ont eu des répercussions cérébrales importantes
dans la région cérébrale touchée par l’ischémie. De plus, la fracture péri-prothétique de la
hanche droite a entrainé une faiblesse osseuse du massif trochantérien. Sur le plan cutané,
trophique, une escarre talonnière de type IV à gauche est apparue suite l’alitement prolongé
durant l’été.
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B. Examen des déficits de fonction
Examen morphostatique :
En position assise, on observe une légère cyphose dorsale avec une antéprojection de la tête. En
décubitus dorsal, Mme R. présente une attitude de son membre inférieur droit en triple flexion
et rotation latérale et une position en équin du pied droit. Ces attitudes sont retrouvées lors de
la position debout même si la triple flexion est majorée en décharge.
Fonction algique :
Mme R ne ressent aucune douleur en regard de la région traumatisée c’est dire au niveau de
la hanche droite, même pendant l’effort et les mobilisations. Les seules douleurs prendre en
compte sont une douleur derrière le genou droit et la douleur d’escarre au niveau du talon
gauche. La douleur derrière le genou apparaît en décharge, pendant l’étirement des
ischios-jambiers cotée à 6/10 sur l’EVA. Pour le talon, la douleur est cotée 2/10 sur l’EVA que
ce soit en charge ou en décharge car Mme R n’arrive pas poser ses talons à plat sur le sol du
fait de la position en équin droite et de l’escarre talonnière gauche.
Fonctions cutanée, trophique et circulatoire :
Sur le plan cutané, trophique et circulatoire, Mme R. présente deux escarres talonnières en
raison de l’alitement prolongé durant l’été. L’escarre talonnière droite est en voie de
cicatrisation tandis que l’escarre talonnière gauche de stade IV évolue défavorablement malgré
la prévention anti-escarre et la mise en place d’un matelas air. Il y a des pansements sur les
deux talons. Une légère amyotrophie des membres inférieurs est observée dûe l’alitement et
à la non-utilisation. Mme R. ne présente aucun signe de phlébite. Elle est sous anticoagulants et
porte des bas de contention, en prévention thrombo-embolique.
Fonction ostéo-articulaire :
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Les amplitudes des articulations des membres supérieurs sont fonctionnelles. Au niveau des
membres inférieurs, le bilan articulaire a été réalisé de façon passive par mesure angulaire à
l’aide d’un goniomètre à deux branches. La patiente était en position allongée. Il existe des
limitations en terme d’amplitude articulaire en ce qui concerne l’extension (+20°), l’abduction
(15°) et la flexion active et passive (90°) de l’articulation coxo-fémorale droite en comparaison
au côté sain.
En ce qui concerne l’articulation du genou, on note également un déficit d’extension mesuré
20° contre 10° à gauche. De plus, la flexion dorsale des deux chevilles est limitée à 0° que le
genou soit tendu ou fléchit. La cheville droite ayant tendance à se positionner en équin. Les
autres amplitudes articulaires sont comparables des deux côtés. Mme R. ne présente pas de
différence de longueur des membres inférieurs.
Fonction musculaire :
La quantification de la force musculaire a été réalisée par analogie au testing musculaire
international. En ce qui concerne le membre inférieur droit, on relate une légère faiblesse
musculaire globale cotée à 4 par rapport au côté sain. Seul le moyen fessier droit est à 2. Le
patient ne pouvant se mettre en appui sur la pointe des pieds par manque d’équilibre et
d’appréhension, le triceps sural n’a pas été testé dans toutes ses capacités (2+). Par ailleurs,
tous les groupes musculaires (par fonction) présentent une cotation à 5/5 au niveau des MS. À
la palpation, des rétractions musculaires des ischios-jambiers et des adducteurs droits sont
observées.
Fonction sensitive :
Sur le plan sensitif, la patiente ne présente aucun troubles de la sensibilité proprioceptive de
type statesthésique et kinesthésique au niveau des deux membres inférieurs
Fonction cognitive :
Lors de la réalisation du Mini GDS par la neuropsychologue de l’hôpital, Mme R obtient un score
de 1 sur 4. Ce résultat correspond à une forte probabilité de dépression.
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La neuropsychologue a également pris soin de tester son attention et sa cognition l’aide du
Mini Mental State Examination. La patiente a obtenu un score de 23/30. Ce résultat met en
évidence une dysfonction cognitive : elle présente un manque du mot habituel avec des
troubles mnésiques et est désorientée dans le temps et l’espace. Mme R. a besoin
d’approbation pour chacun de ses actes et ne demande aucune aide.
Fonction uro-génitale et digestive :
Mme R est incontinente depuis son hospitalisation. Sur le plan digestif, elle est constipée et son
abdomen est météorisé.
Fonction psychologique :
n suivi par le psychiatre de l’établissement s’est mis en place en raison d’un syndrome
dépressif majoré et de troubles du sommeil qui se sont installés chez la patiente suite à son
institutionnalisation. Elle se sent surtout déprimée par sa perte d’autonomie et par
l’hospitalisation. De plus, un suivi par l’addictologue a été entamé dans un but de sevrage
complet de l’alcool.
C. Examen des limitations d’activités Autonomie dans les AVQ
La patiente a besoin d’aide auprès de l’aide-soignante pour la toilette et l’habillage du bas du
corps. Certaines capacités de la patiente sont sous-exploitées telles que la toilette du visage, se
peigner et l’habillage du haut du corps. Mme R a les capacités physiques pour faires ces activités
mais doit sans cesse être stimulée. Une infirmière lui refait ses pansements aux talons tous les
deux jours et lui apporte ses médicaments.
Transferts
Mme R. est capable de réaliser les transferts fauteuil-lit, couché-assis et inversement, seule.
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Le passage assis à debout nécessite plusieurs tentatives du fait du déficit musculaire à droite et
de l’impossibilité d’appuyer sur les talons. Il est réalisé avec appui sur les membres supérieurs.
La consigne de s’appuyer sur les accoudoirs et non sur les poignées du déambulateur est
répétée à chaque début du transfert. Le transfert debout-assis est acquis mais nécessite une
surveillance : la patiente ne freine pas la descente l’aide des accoudoirs et se laisse tomber.
Équilibre
L’équilibre assis est validé avec déséquilibres intrinsèques. Lors de poussées, les réactions
parachutes des membres supérieures sont peu efficaces et retardées.
Le maintien statique debout sur sol stable, yeux ouverts puis fermés est tenu plus de 10
secondes. La patiente éprouve des difficultés à réduire son polygone de sustentation, même
avec une aide extérieure du fait du non appui sur le talon gauche. Le maintien unipodal est
maintenu 3 secondes à droite. Il est impossible à gauche cause de l’escarre et donc de la
surface d’appui réduite. Ensuite, un tapis de mousse est placé sous les pieds de la patiente afin
de perturber l’entrée proprioceptive. L’équilibre bipodal dans cette position est tenu 3
secondes. Nous observons donc que l’entrée proprioceptive est très sollicitée chez cette
patiente. Lors de mouvements céphaliques, l’équilibre bipodal est tenu plus de 10 secondes.
Lors de déséquilibres intrinsèques en position debout, pieds écartés à la largeur du bassin,
quelques oscillations sont remarquées mais l’équilibre est tenu et les stratégies de hanche sont
convenables. La patiente s’agrippe aux poignées du déambulateur lors de déséquilibres
extrinsèques, facteur prédictif du risque de chute du fait de l’instabilité de cette aide technique.
Il n’y a pas de différence notable sans les chaussures.(26)
Lors du test de Tinetti, qui évalue l’équilibre statique et dynamique, la patiente obtient le score
obtient le score de 14 sachant qu’un score inférieur 20 indique un risque de chute très élevé.
Ce test s’effectue avec le chaussage habituel de Mme R qui porte des baskets fermées.
( Annexe 1)
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Déplacements :
La patiente vient en salle de rééducation avec son fauteuil de chambre, poussée par un
soignant. En salle de rééducation et pour le retour en chambre, elle utilise un déambulateur à
deux roues sous surveillance.
Elle réalise le Timed Up and Go avec le déambulateur en 30 secondes. (Annexe 2)
Le test de marche sur 10 mètres a été chronométré à 34 secondes. Sa vitesse de marche est
donc 3,4 m/s sachant que la valeur seuil de 0,6 m/s marque l’état de fragilité du sujet. Son
périmètre de marche est de 20m soit la distance entre la salle de rééducation et sa chambre. La
patiente doit cependant être stimulée pour avancer.
Le Stop Walking When Talking, qui évalue le coût attentionnel de la marche, est négatif.
En chambre, elle n’utilise pas son déambulateur, ce qui nécessite l’aide d’une tierce personne
pour l’emmener dans la salle de bain.
Son schéma de marche est altéré avec une hauteur et longueur du pas diminués, un polygone
de sustentation trop réduit, les pieds ont tendance se croiser. Il n’y a pas d’attaque par le
talon. Ces derniers ne touchent pas le sol du fait de l’escarre talonnière gauche et de l’attitude
en varus équin de la cheville droite. Le déroulement du pas est absent.
La patiente marche avec un flessum bilatéral de genoux avec une attitude en rotation latérale
de hanche à droite pour augmenter son polygone. Avec le déambulateur, il n’y a pas de
dissociation des ceintures. De plus, la patiente fixe son regard sur le sol.
D. Examen des restrictions de participation
Du fait de la perte importante de son autonomie, un retour à domicile est impossible à
envisager. Mme R. doit donc poursuivre sa rééducation au sein du Service de Soin de Suite.
V. Diagnostic masso-kinésithérapique Mme R, 74 ans présente un diagnostic de fracture du grand trochanter droit sur PTH non
déplacée, traitée orthopédiquement. Cette fracture est survenue suite à une chute de sa
hauteur du côté hémiparétique séquellaire à deux AVC, le 18/06/2016 à son domicile.
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Nous sommes à 41 jours de l’autorisation de la reprise d’appui.
Elle vit avec ses deux filles, absentes la journée, dans une maison avec trois marches d’escalier
d’accès. Avant sa chute, la patiente était autonome dans les activités de la vie quotidienne. Elle
ne sortait pas de chez elle, ses loisirs étant la lecture et la télévision.
Pour les activités de la vie quotidienne dans le service, la patiente a besoin d’aide pour la
toilette et l’habillage du bas du corps, pour les déplacements et les transferts et nécessite une
stimulation pour les activités qu’elle sait faire elle-même : alimentation, toilette et habillage du
haut du corps.
Elle ne présente pas de douleur de hanche à l ‘appui et la mobilisation.
Suite l’alitement prolongé, elle présente deux escarres talonnières dont une de type IV
gauche douloureuse ainsi qu’une attitude en triple flexion de son membre inférieur droit et un
pied en équin. La hanche droite est limitée en extension de 20° et en abduction de 15°. Le
genou droit est limité en extension de 20° contre 10° à gauche et la flexion dorsale des deux
chevilles est nulle.
Un déficit global de force musculaire est retrouvé pour tous les mouvements des membres
inférieurs, et ce de manière symétrique. L’abduction de hanche droite est cotée à 2. Des
tensions musculaires des ischios jambiers et adducteurs sont retrouvées à la palpation pouvant
expliquant le déficit d’extension de genou et d’abduction de hanche.
Des troubles de la sensibilité profonde au niveau du membre inférieur droit, séquellaire à ses
deux AVC de 2015, peuvent expliquer le mauvais placement du membre droit lors de la marche.
L’équilibre unipodal est impossible sans appui du membre supérieur. Les stratégies
d’équilibration posturales et parachutes sont absentes et inefficaces.
À la marche, un mauvais déroulement du pas est noté, avec une absence d’attaque par le talon,
une hauteur et longueur du pas diminués avec une vitesse de marche trop lente et polygone de
sustentation considérablement diminué : les pieds ont tendance à se croiser lors de la marche,
augmentant considérablement le risque de chute. Du fait de la grande fatigabilité et du manque
d’initiative, le périmètre de marche est limité à 30m avec une pause.
Mme R souhaite pouvoir rentrer le plus vite possible pour retrouver ses deux filles.
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Problématique : Comment permettre à Mme R de retrouver une autonomie antérieure à la
chute en prenant en considération son état fragile et poly-pathologique, en vue d’un retour
domicile, sachant que la patiente n’a pas été stimulée pendant 3 mois ?
A. Objectifs de prise en charge
Dans le cadre de la rééducation de cette patiente l’objectif principal sera de lui éviter une
perte totale d’autonomie avec une dépendance iatrogène trop importante lui empêchant le
retour à domicile. Il s’agira donc de recouvrer un maximum de capacités présentes avant la
chute.
De ce fait, il s’agira alors pour nous, tout au long de la prise en charge, de veiller à :
Soulager les douleurs si elles sont présentes ;
Lutter contre le flessum de hanche et de genou droit en décharge et en charge ;
Optimiser et sécuriser les transferts de façon l’autonomiser le plus possible ;
Travailler l’équilibre et la marche en vue d’une ré-autonomisation aux déplacements
en se focalisant sur le placement du membre inférieur droit au sol ;
Renforcer ses membres inférieurs ;
Effectuer un entretien articulaire global au niveau de la hanche traumatisée et plus
globalement afin d’éviter une sous-utilisation de ses capacités ;
Stimuler continuellement la patiente pour lui donner envie d’être actrice de sa
rééducation ;
Dédramatiser la chute et apprendre le relevé du sol ;
Réduire les facteurs de chute en relation avec l’équipe pluridisciplinaire ;
À plus long terme, mon objectif principal sera d’envisager la reprise d’activité de la patiente
ainsi que son retour à domicile dans une autonomie la plus complète possible.
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B. Moyens
La prise en charge s’effectue sur un plateau technique de rééducation avec disposition :
Des plans de Bobath
Des tables de massage
Des barres parallèles
Des objets variés utile à la rééducation : ballons de différentes tailles, élastiques, poids,
cônes, bâtons, mousse, plateau de Freeman
Un espalier
Différentes aides techniques : déambulateur, rollator, cannes anglaises et simples
VI. Traitement masso-kinésithérapique
A. Principes Donner des consignes simples et brèves et ne pas hésiter à les répéter ;
Travailler dans une ambiance calme ;
Eviter de mettre la patiente en situations d’échec et valoriser les progrès tout en lui
apportant un soutient psychologique ;
Assurer une rééducation infra-douloureuse afin d’éviter la majoration des troubles et la
crainte de la patiente ;
Respecter la fatigabilité de la patiente en adaptant l’heure, l’intensité des séances et des
exercices et en aménageant des temps de repos ;
Privilégier le travail fonctionnel et répété afin d’autonomiser les techniques et
d’autonomiser la patiente ;
Intégrer activement la patiente à sa rééducation afin de la motiver et de lui faire prendre
conscience de ses progrès ;
Considérer la patiente dans sa globalité, en prenant bien compte des antécédents
neurologiques, physiques, cognitifs et psychologiques ;
Transmettre et participer au sein de l’équipe pluridisciplinaire.
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B. Techniques de rééducation masso-kinésithérapique
Ma prise en charge est hebdomadaire raison d’une séance par jour d’une heure.
Lutte contre le flessum pour améliorer le schéma de marche
En décharge, on constate une attitude en triple flexion du membre inférieur droit. À la
mobilisation, on observe une hypo-extensibilité des ischios jambiers et des adducteurs, plus
importante à droite qui entraine des douleurs à la mobilisation. Nous choisissons donc de
commencer chaque séance par un massage décontracturant pendant 15 minutes. La patiente
est en décubitus dorsal sur un plan de Bobath avec un coussin triangulaire au niveau de la
région dorsal et de la tête dans un souci de confort. Un coussin est également positionné sous
ses genoux pour détendre les gastrocnémiens et éviter une sensation de gêne au niveau des
creux poplité. Nous positionnant en regard de sa hanche droite, nous effectuons d’abord des
manœuvres superficielles afin de prendre un maximum d’informations sur la région traiter..
Ensuite nous nous focalisons sur les muscles contracturés et réalisons des manœuvres
profondes à titre de pétrissages et de pressions glissées profondes afin d’agir au niveau
musculaire le long du trajet du muscle. On prend soin de réaliser nos techniques dans le sens
disto-proximal pour respecter la physiologie circulatoire. Dans un second temps, on associe à
ces massages, des manœuvres de mobilisation pour augmenter l’étirement. Le sens des
pressions glissées s’inverse et devient proximo-distal. Enfin, nous terminons par des étirements
des muscles concernés, 3 fois pendant 20 secondes et des techniques de contracté-relâché.
L’action de ces techniques passives est majorée par la mise en place d’une installation nocturne
permettant de posturer le genou droit en extension. Cette décision a été prise lors de la réunion
de synthèse suite à l’insuffisance des techniques kinésithérapiques. Elle a été choisie et installée
par l’ergothérapeute. De plus, l’ajout d’un myorelaxant dans le traitement médicamenteux de la
patiente par le médecin a permis de récupérer en amplitude et en souplesse.
Travail des transferts en sécurité pour gagner en autonomie
Les transferts sont travaillés au début de chaque séance. Les transferts les plus importants à
travailler sont le passage de assis à debout et inversement car ce sont les plus souvent utilisés
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au cours de la journée. Pour le transfert assis-debout, la patiente est assise dans son fauteuil de
chambre qui présente deux accoudoirs. Nous lui indiquons la démarche à suivre : « avancez les
fesses au bord du fauteuil, reculez les pieds le plus près possible du fauteuil, penchez vous en
avant, levez-vous en poussant à la fois sur les accoudoirs et sur vos deux jambes, une fois
debout venez attraper le déambulateur ». Au début de l’apprentissage, nous devions l’aider
avec une prise au niveau de son pantalon pour l’inviter se pencher vers l’avant en lui répétant
d’utiliser les accoudoirs et non les poignées du déambulateur. Lors du transfert debout-assis,
Mme R. s’assoit très souvent au bord du fauteuil, en ne freinant pas la descente ce qui est
dangereux ; elle risque de chuter d’o l’importance de le travailler pour l’automatiser. Il s’agit
de bien reculer les membres inférieurs jusqu’ ce que les creux poplité touchent le siège. A ce
moment-là, elle peut commencer à attraper les accoudoirs ce qui déclenchera une inclinaison
du tronc vers l’avant. Ensuite, elle freine le mouvement pour ne pas arriver brutalement sur la
chaise. Mme R. le fait correctement uniquement sur sollicitations verbales.
Lorsque les transferts sont acquis par la patiente, nous le transmettons directement au
personnel soignant via le dossier médical informatisé et l’oral afin que les aides-soignantes
prennent conscience des capacités de la patiente et la laisse les réaliser elle-même en chambre
dans un but de ré-autonomisation. De plus, la consigne de se lever et de se rassoir elle-même de
son fauteuil dans la chambre est donnée à la patiente.
Travail de l’équilibre debout pour diminuer le risque de chute
Du fait de sa chute, de son âge, de l’alitement prolongé, de l’escarre talonnière, de
l’hémiparésie droite et du manque de stimulation et motivation à se mettre en charge, le risque
de désadaptation et de perte de stratégies d’équilibre est prépondérant. De plus, la poursuite
thérapeutique va nécessiter l’utilisation de cannes anglaises donc un bon équilibre debout est
primordial. Le travail de l’équilibre se fait suivant une progression : perturbation d’une entrée
sensorielle, déséquilibres intrinsèques puis extrinsèques. De plus, pour augmenter la difficulté,
le polygone de sustentation sera progressivement rétrécit.
Le travail est réalisé dans les barres parallèles pour assurer une sécurité. Nous nous plaçons
assis devant elle et une chaise est juste derrière elle par précaution.
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Lors de la perturbation d’une entrée sensorielle isolée, celle-ci va être stimulée, obligeant la
patiente à utiliser les autres entrées sensorielles pour maintenir son équilibre postural statique.
Pour perturber l’entrée vestibulaire, Mme R tourne la tête progressivement à gauche puis à
droite ; l’entrée proprioceptive, un tapis de mousse est placé sous les pieds de la patiente ; et
l’entrée visuelle, Mme R ferme les yeux.
Les déséquilibres intrinsèques sont obtenus à partir des mouvements volontaires du tronc, de la
tête et des membres supérieurs. Mme R doit chercher un petit cône autour d’un bâton et le
faire glisser sur le bâton situé de l’autre côté. En progression, ces bâtons vont être de plus en
plus éloignés de la patiente, majorant l’instabilité et un transfert du poids plus important.
ne fois que Mme R. se sent l’aise dans cette position les pieds écartés, la base d’appui est
modifiée. Ayant du mal à garder les pieds dans une position autre, des marquages sont
disposées au sol sur lesquelles elle doit mettre ses pieds. Ces marquages sont positionnés de
manière à avoir un pied placé devant l’autre sur une marche. Enfin l’exercice se termine, par la
mise en place du tapis en mousse sous les pieds pour combiner perturbation sensorielle et
déséquilibres intrinsèques.
Dès lors que Mme R. obtient un bon contrôle postural debout lors des déséquilibres
intrinsèques, les déséquilibres extrinsèques sont alors effectués l’aide :
- De poussées sur différentes parties du corps et dans différentes directions.
Pour débuter, la patiente est prévenue du moment et du sens de la poussée. En progression,
elle sera prévenue de moins en moins. Pour maintenir son équilibre, la patiente devra utiliser
des stratégies d’adaptations posturales de hanche pour lutter contre le déséquilibre.
Ces poussées vont être augmentées de telle sorte que le centre de gravité de la patiente sorte
de son polygone de sustentation, l’entrainant donc perdre son équilibre et à être obligée de se
rattraper avec les membres supérieurs ou inférieurs. Les réactions parachutes du membre
inférieur sont délétères chez la patiente, il est donc judicieux d’insister en l’interdisant le plus
possible d’utiliser ses membres supérieurs et en l’éloignant de tout appui.
- De lancers et de réceptions de ballons. En progression, le poids du ballon sera augmenté,
engendrant des déséquilibres plus importants.
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Renforcement musculaire des membres inférieurs
Chez la personne âgée, l’augmentation de la force musculaire améliore certains paramètres
fonctionnels tels que la vitesse de marche, le contrôle postural ainsi que le transfert assis-
debout et diminue le risque de chute. (2). Dans un premier temps, au début de la rééducation,
le renforcement s’effectue en décubitus dorsal l’aide des diagonales de Kabat du membre
inférieur. Ensuite, avec un coussin triangulaire sous les membres inférieurs, la patiente réalise
un travail segmentaire des quadriceps avec poids aux chevilles en surveillant que ça n’aggrave
pas le flessum de hanche à plus ou moins long terme. Les abducteurs sont travaillés avec un
élastique tendu au niveau des genoux. Le moyen fessier, plus faible, est renforcé par des
résistances manuelles du thérapeute, au niveau de la face latérale de cuisse.
En progression, ces muscles sont travaillés en charge. Pour renforcer le quadriceps permettent
un récurvatum actif, un élastique est placé autour du genou de la patiente, attaché à un barreau
de l’espalier ; la patiente doit reculer son genou, contre l’élastique, sans reculer les fesses et le
tronc en se tenant. Le moyen fessier est renforcé perpendiculairement au mur avec un coussin
intercalé entre la patiente et ce dernier.
Rééducation de la marche pour améliorer le schéma et le périmètre de marche
Du fait de son âge, il est primordial de verticaliser et de faire marcher la patiente au plus vite
tant sur le plan fonctionnel que psychique et métabolique. La marche est travaillée, dans un
premier temps, de façon analytique dans les barres parallèles. Se situant à côté de la patiente
pour la sécuriser, on la conseille également sur la réalisation de la marche. Nous lui expliquons
les différentes phases de la marche et surtout le placement et déroulement du pas qui sont les
points les plus sensibles chez Mme R. Afin de travailler la largeur et longueur du pas, des
marquages au sol sont placés tout le long des barres parallèles sur lesquels la patiente doit
poser ses pieds afin d’avoir un feedback visuel d’un placement correct des pieds l’un par
rapport l’autre, avec un écartement et une longueur de pas adaptés. Les marques sont
disposées de telle sorte que le talon du pied antérieur soit au niveau des orteils du pied
postérieur. Dans un premier temps, les feedbacks oraux que je fournis sont essentiels : en effet
la patiente a du mal à se concentrer et à bien positionner son membre inférieur droit et ce,
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encore plus quand la fatigue se fait ressentir. De plus, la fatigue de la patiente et le manque de
motivation limitent les allers-retours ; de ce fait le périmètre de marche est restreint à 2 voire 3
allers retours pendant les premières séances. Mais cela s’améliore tout au long de la prise en
charge avec un périmètre de marche qui augmente progressivement.
L’attaque et le déroulement du pas ne sont travaillés qu’ partir du port de chaussures sans
appui talonnier commandées par l’ergothérapeute. Ces chaussures permettent de limiter la
bascule du bassin qui risque d’accentuer la flexion du membre inférieur droit la marche. En ce
qui concerne le déroulement du pas, je lui explique les différentes étapes à suivre. Celui-ci doit
se faire en attaquant le pied au sol par le talon et en se déroulant ensuite sur le bord externe
jusqu’ la tête du premier métatarsien pour finir sur les orteils et donner le pas postérieur. La
patiente, debout, entre les barres, répète plusieurs fois le mouvement. Le déroulement du pas
droit est impossible cause de l’attitude irréductible en varus équin. Pour augmenter la hauteur
du pas, des obstacles sont placés le long des barres parallèles. Pour augmenter le temps d’appui
unipodal, nécessaire lors de la phase oscillante de la marche, Mme R doit venir placer son pied
sur une marche, sans se tenir avec les MS. En progression, cet exercice est réalisé hors des
barres. Pour faire comprendre à la patiente son attitude en flexion et rotation externe, je place
un miroir au bout des barres parallèles afin de lui fournir un feedback visuel et ainsi effectuer
une autocorrection. La rééducation de la marche est poursuivie sur le trajet de la salle de
rééducation la chambre pour travailler l’endurance. Des pauses sont effectuées en fonction de
la fatigabilité de la patiente, très variable d’une séance l’autre. La chambre de Mme R. étant
située au milieu du couloir, son périmètre de marche doit être suffisant pour accéder seule à la
salle de restauration (environ 40m). Celle-ci se fait avec différentes aides techniques : le
déambulateur deux roues les 4 premières semaines et deux cannes anglaises ensuite. Pour
chercher à diminuer le coût attentionnel de la marche, une tâche cognitive est associée lors de
la marche. Il s’agit, par exemple, de donner des noms de ville ou des noms d’animaux. Le calcul
mental étant trop compliqué pour la patiente. Au fur et à mesure des séances, Mme R
augmente ses performances et réussit à effectuer 10 allers retours dans les barres et à effectuer
l’aller retour jusqu’ sa chambre la dernière semaine sans la moindre douleur ni fatigue.
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Dès lors que les capacités motrices de la patiente lui permettait d’aller seule en salle de
rééducation, nous l’avons transmis l’équipe soignante afin qu’elle la laisse se déplacer seule.
Travail du relevé du sol
Vivant seule à domicile le plus souvent, il nous a paru essentiel de travailler le relever du sol afin
d’éviter une station prolongée au sol qui favorise chez la personne âgée une décompensation
physique et psychologique d’autant plus que cette patiente est incapable de dire si oui ou non
elle est restée longtemps au sol.(27) Une dédramatisation de la chute est effectuée en amont.
Par le biais d’explications et de démonstrations des différentes étapes du relever du sol, cela
permet à la patiente de moins appréhender et de mieux accepter cette situation.
L’apprentissage du relever du sol s’inspire des niveaux d’évolution motrice (NEM) décrits par Le
Métayer (28). Cela permet une activation de la mémoire procédurale qui est constituée
d’automatismes sensorimoteurs acquis durant le développement de l’enfant. Le relever du sol
va alors passer par les étapes suivantes :
- Passage de décubitus dorsal à décubitus latéral ;
- Du décubitus latéral à la position petite sirène ;
- De la position petite sirène à la position quadrupédie ;
- De la position quadrupédie à la position genoux dressés ;
- De la position genoux dressés à la position chevalier servant ;
- Et de la position chevalier servant à la position debout ;
La descente au sol va s’effectuer activement par Mme R. par les étapes du relever du sol mais
en sens inverse. Au départ, Mme R. va jusqu’ la position assise. La position en décubitus dorsal
étant encore trop traumatisante pour Mme R. Le relever du sol s’effectue alors partir de cette
position. Cela n’est pas gênant puisque la position assise est bien souvent la position spontanée
suite à une chute. Ainsi une adaptation des NEM est faite en commençant par la position assise.
De la position assise, Mme R. passe par la position petite sirène, et les enchaînements suivants
pour arriver à la position debout. À partir de la position quadrupédie, Mme R. peut prendre un
point d’appui pour finir le redressement. Lors de ces différentes étapes du relever du sol, des
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guidances verbales et tactiles sont données à la patiente ainsi que des déséquilibres
intrinsèques et extrinsèques afin d’améliorer la stabilité dans chaque position. Des guidances
tactiles de bonnes qualités sont indispensables pour sa compréhension et la réussite du relever
du sol. En effet, si Mme R. est en situation d’échec, elle adopte un comportement fataliste en
disant qu’elle n’y arrivera pas, et donc se décourage.
C. Autres prises en charge
En dehors des séances de masso-kinésithérapie, Mme R bénéficie d’autres prises en charge :
Ergothérapie : atelier « mémoire » en groupe, propositions d’aménagements du domicile (visite
du domicile), attelle d’extension et chaussure talon évidé ; travail de l’autonomie pour la
toilette et l’habillage ;
Addictologue : intervient pour le sevrage de l’alcool ;
Médicale : surveillance et régulation du traitement médicamenteux ;
Neuropsychologue : prise en charge de l’état anxio-dépressif
Infirmière : pansement d’escarres, stimulation pour les AVQ en chambre et apport du
traitement médicamenteux
Nutritionniste : mise en place d’une alimentation avec pain sans sel et d’une fiche alimentaire
de suivi ;
Assistante sociale : mise en place d’aides ménagères domicile.
Étant donné la persistance de la difficulté à la marche malgré la prise en charge
kinésithérapique, la patiente a été transféré le 3/10/2016 au CMPR Le Clousis de Saint Jean de
Monts, qui bénéficie d’un plateau technique plus adapté à son niveau fonctionnel actuel.
VII. Évaluation finale le 04/01/2017 au CMPR « Le Clousis » Sur le plan articulaire, le flessum de hanche a diminué, passant de 20° à 5° et de 10° à 20° pour
le genou droit. Il persiste un flessum de 5° pour le genou gauche. Sur le plan musculaire, le
quadriceps est côté à 5 et le moyen fessier à 4. Concernant l’équilibre, la patiente tient debout
les yeux fermés avec un polygone de sustentation réduit. L’appui unipodal est maintenu sans
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appui mais seulement 5 secondes. Lors de déséquilibres intrinsèques, la patiente utilise les
bonnes stratégies d’adaptations posturales de hanche. Lors de déséquilibres extrinsèques, elle
utilise majoritairement les membres supérieurs pour se rattraper.
La vitesse de marche est de 1.5m/s avec une canne anglaise. Lors du test des 6 minutes la
patiente parcourt 120m avec deux cannes anglaises. Le polygone de sustentation est élargit
contrairement à la hauteur et longueur du pas. La patiente est capable de se relever seule du sol
et de monter et descendre des escaliers en utilisant la rampe. Le TUG est réalisé en 22 secondes
avec une canne anglaise. La patiente utilise dorénavant une canne anglaise pour de courtes
distances et l’intérieur et le rollator 4 roues pour de plus grandes distances.
Sur le plan cognitif, Mme R. est plus épanouie, plus investit dans sa rééducation et le manque du
mot se fait moins ressentir. La patiente n’hésite plus demander de l’aide.
Sur le plan nutritionnel, la patiente a repris 2 kg en 2 mois. L’escarre est en voie de cicatrisation.
Comme vu avec l’assistante sociale, les pansements seront continués à domicile ainsi qu’une
prise en charge masso-kinésithérapique car il persiste encore des rétractions musculaires.
VIII. Discussion
L’élaboration de ce mémoire m’a permis de réaliser l’importance des conséquences physiques,
cognitives et psychologiques de la non-stimulation d’une personne âgée fragile, ayant subi un
traumatisme même minime, lors d’un alitement prolongé. Le repérage et la prévention de cet
état de fragilité avant l’entrée en institution, constituant la porte d’entrée dans une possible
dépendance iatrogène est donc essentielle.
A. Retentissement de l’immobilisation prolongée chez les personnes âgées fragiles
L’immobilisation est nuisible pour le sujet âgé. En effet, la personne âgée est particulièrement
vulnérable aux complications du décubitus de part ces caractéristiques qui lui sont propres :
diminution des réserves physiologiques multi-systémiques, état poly-pathologique, maladies
chroniques, poly-pharmacie fréquente. ( 29,31, 32)
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Ces conséquences du vieillissement participent à augmenter les risques de survenue de
complications de décubitus et de troubles psychologiques lors d’une immobilisation prolongée.
Les causes d’immobilisation, nécessitant un alitement sont peu nombreuses : traumatiques
(fractures), neurologiques (AVC récent avec hémiplégie, coma ou troubles de la vigilance),
décompensation cardiaque et respiratoire, thrombose veineuse profonde, hypotension, fièvre
importante. (20) L’impact psychologique d’une chute antérieure peut également, sans
occasionner la plupart du temps des traumatismes sérieux, entrainer un ralentissement
psychomoteur et une perte de confiance en soi se traduisant par un confinement au lit ou au
fauteuil avec une réduction des activités et un retrait social. L’incidence de complications
hospitalières atteint 38% chez les personnes âgées (19)
A l’hôpital, les pathologies d’immobilisation, expliquées ultérieurement, peuvent survenir suite
à une immobilisation abusive dans des structures inadaptées : perfusions limitant la mobilité,
personnel soignant en sous-effectif engendrant un confinement du patient au lit de part une
absence de stimulation, un manque de moyens matériels empêchant la verticalisation précoce
pourtant primordiale contre les maux de l’immobilité (31), installation de barrières de lit jour et
nuit, mise en place de protections abusives.
Ces pathologies d’immobilisation correspondent au syndrome de régression ou désadaptation
psychomotrice et au syndrome de glissement.
Le syndrome de désadaptation psychomotrice (SDPM) (9,20,33)
Il s’agit d’un syndrome gériatrique associant une composante motrice (rétro pulsion du tronc en
station assise compromettant l’installation au fauteuil, les transferts assis-debout et debout-
assis ainsi que la qualité de marche), une composante neurologique (hypertonie oppositionnelle
à la mobilisation passive, une inefficacité voire une disparition des réactions d’équilibration
posture et des réactions parachutes), un ralentissement idéatoire caractérisé par une
diminution de prise d’initiative, des troubles mnésiques, une dévalorisation avec perte de
confiance en soi et repli sur soi-même, une restriction des activités avec une recherche de la
dépendance ( demande couche, incapacités de se laver, s’habiller, manger seule, demande de
protectionss…)
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Ce syndrome d’immobilisation peut survenir brusquement ( syndrome post-chute) ou de
manière progressive.
Le syndrome de glissement (20)
Chez la personne âgée, le syndrome de glissement apparaît au cours d’une maladie ou après un
intervalle libre consécutif à une pathologie aiguë et guérie dont il ne subsiste plus aucun signe
clinique. Le patient adopte alors un comportement de grande opposition s’associant un refus
généralisé : mutisme, refus de s’alimenter, météorisme abdominal, rétention urinaire, refus de
contact, troubles du sommeil régression psychomotrice. Si la prise en charge multidisciplinaire
de ce syndrome n’est pas mise en œuvre précocement, il peut conduire la personne la mort.
Retentissement de l’immobilisation prolongée sur l’organisme
Les principaux systèmes de l’organisme vont également être concernés par le décubitus
prolongé :
- Fonction cardio-vasculaire : hypotension orthostatique, désadaptation cardio-vasculaire liée à
une augmentation de la fréquence, maladie thrombo-embolique veineuse ;
- Fonction respiratoire : diminution de l’ampliation thoracique causée par une réduction du
tonus des muscles respiratoires, favorisant les sécrétions bronchiques et donc les infections ;
- Fonction digestive : dénutrition protéino-énergétique, constipation, fécalome ;
- Fonction urinaire : infections, rétention urinaire ou au contraire incontinence ;
- Fonction cutanée : escarres de différents stades ( Annexe) au niveau des zones d’appui ;
- Fonction articulaire et musculaire : amyotrophie, enraidissement des articulations, spasticité et
rétractions tendineuses, déminéralisation osseuse.
B. Repérage de la population susceptible d’entrer dans la dépendance
Afin de définir objectivement l’état de risque précédant l’état de dépendance et d’identifier la
population cible qui peut bénéficier des interventions de prévention, la communauté
scientifique a décrit le « syndrome de fragilité ».
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29
C’est le stade précoce de la dépendance caractérisé par un déclin fonctionnel débutant qui
permet au sujet d’être dépendant dans les AVQ mais avec certaines difficultés et qui peut être
potentiellement réversible en cas d’interventions adaptées. Du fait qu’elles n’ont pas encore
atteint le stade de dépendance sévère, les personnes âgées fragiles représentent une cible
optimale pour les interventions de dépistage de la dépendance.(18) Afin de faciliter ce dernier,
plusieurs outils cliniques ont été développés, notamment et l’outil de repérage de la fragilité du
Gérontopole(GFST).
Cet outil est utilisé par le médecin généraliste et lui permet le repérage simple et rapide des
principaux critères de fragilité (selon le modèle phénotypique de Fried). Lorsque celui-ci juge, de
façon subjective, le patient fragile fort risque d’entrer dans la dépendance, il peut l’orienter
vers une clinique de fragilité qui regroupe les cliniques ambulatoires de fragilité et l’hôpital de
jour des fragilités. Le médecin est donc directement impliqué dans l’élaboration du Plan
Personnalisé de Soins et de Prévention (PPSP). Le GFST a été récemment validé par la HAS
comme outil national pour le repérage de la fragilité chez les personnes ayant 65 ans ou plus. En
effet, l’aide de cet outil, près de 95 % des patients envoyés vers une clinique de fragilité suite
cette évaluation, étaient fragiles ou pré-fragiles, à fort risque de rentrer dans la dépendance.
En plus du GFST, l’auto-questionnaire FiND qui permet de repérer les personnes âgées fragile
vivant à domicile, a également été validé (18). Il permet l’individu de s’auto-détecter comme
étant fragile afin d’être sensibilisé sur la nécessité éventuelle d’une intervention médicale.
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IX. Conclusion
Ce travail écrit a permis d’appréhender la prise en charge d’une personne âgée fragile, poly-
pathologique un stade débutant de dépendance iatrogène et de perte totale d’autonomie.
Cette fragilité chez cette patiente s’est installée de manière progressive, suite une prise en
charge médicale inadaptée l’obligeant rester confiner au lit. Cette réduction des activités,
pourtant réalisables avant l’hospitalisation, a entraîné un syndrome anxio-dépressif avec une
perte de force et des troubles de l’équilibre.
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I
Annexe 1 – Test de Tinetti
II
Annexe 1 – Test de Tinetti (suite)
III
Annexe 2 – Timed Up and Go
Timed Up and Go au bilan initial
IV
Annexe 2 – Timed Up and Go
Timed Up and Go au bilan final