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ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE EN BOURGOGNE & SANTÉ Dossier thématique – Septembre 2012 Crédit photo : Xavier BENONY / ADEME

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ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE EN BOURGOGNE

& SANTÉ Dossier thématique – Septembre 2012

Crédit photo : Xavier BENONY / ADEME

Table des matières Avant - propos............................................................................................................................. 3 I. La santé en Bourgogne .................................................................................................... 4 II. Les impacts observés et préssentis ............................................................................... 5

1. Une modification des évènements extrêmes qui ont un fort impact sur la santé humaine 5 2. Une modification de différents aspects de qualité de vie.................................................... 7 3. L’apparition de nouvelles maladies..................................................................................... 9

III. Pistes d’adaptation ......................................................................................................... 14

1. L’adaptation des individus................................................................................................. 14 2. Mettre en place des réseaux de surveillance ................................................................... 14 3. Renforcer la recherche ..................................................................................................... 15 4. Anticiper ............................................................................................................................ 15 5. Agir au niveau du bâti ....................................................................................................... 17

Liste des Experts ...................................................................................................................... 18 Bibliographie ............................................................................................................................. 19

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Avant-propos Cette synthèse, réalisée à partir d’enquêtes auprès d’experts régionaux (passages en italique) et de données bibliographiques (passages en caractères normaux), est par essence non exhaustive. Elle a pour but d’esquisser les principaux impacts du changement climatique sur le domaine de la santé en Bourgogne et des pistes d’adaptation à travers divers exemples parfois régionaux, parfois nationaux, voire internationaux. Pour cela, elle est structurée en trois grandes parties, traitant respectivement :

- des caractéristiques de la santé en Bourgogne ; - des impacts observés et pressentis du changement climatique sur la santé

bourguignonne ; - des pistes d’adaptation des modes de gestion de la santé aux impacts présentés.

Pour des informations complémentaires, vous pouvez consulter les ouvrages recensés dans la bibliographie (cf. page 18), contacter Alterre Bourgogne (www.alterre-bourgogne.fr) ou des experts régionaux (cf. page 18). D’autres documents du même type sont disponibles sur les thématiques suivantes : la biodiversité, la forêt, la vigne, l’élevage, la santé, les risques naturels, l’urbanisme et l’aménagement et téléchargeables sur www.bourgogne.ademe;fr et www.alterre-bourgogne.org. Fiche rédigée dans le cadre du Projet régional 2010–1012, copiloté par l’ADEME et Alterre, intitulé « Adaptation au changement climatique en Bourgogne : contribution à l’élaboration des stratégies régionales et territoriales » et financé par le Programme Énergie Climat Bourgogne.

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I. La santé en Bourgogne En Bourgogne, les problématiques sanitaires sont différentes selon les territoires. C’est pourquoi il faut souvent descendre à l’échelle infra-départementale pour analyser les tendances (ORS). L’ORS (Observatoire régional de la santé) de Bourgogne a réalisé une typologie des cantons bourguignons en 5 classes afin de mettre en évidence leurs caractéristiques socio-sanitaires (ORS, 2010) :

- Classe 1 : Cantons ruraux peu peuplés, avec une population âgée, socialement peu favorisée, éloignée des équipements de santé, en surmortalité générale et prématurée.

- Classe 2 : Cantons ruraux avec une population relativement âgée, éloignée des équipements de santé, en surmortalité de causes traumatiques.

- Classe 3 : Cantons très peuplés, avec des situations de précarité et un mode de vie isolé fréquents, une offre de soins libéraux importante, à proximité des services de soins, en surmortalité prématurée.

- Classe 4 : Cantons relativement favorisés, avec des densités de professionnels de santé réduites mais assez proches des services de soins, en sous-mortalité générale et prématurée.

- Classe 5 : Cantons socialement favorisés, avec une population jeune, un recours et une offre de soins libéraux importants, à proximité des équipements de santé, en sous-mortalité générale et prématurée.

En analysant les résultats (cf. Figure 1), plusieurs caractérisations des territoires bourguignons ressortent avec, schématiquement :

- Deux types d’espaces ruraux qui peuvent être mis en avant : l’un à l’est, constitué essentiellement de cantons de Côte-d’Or et de Saône-et-Loire (classe 2) et l’autre à l’ouest, avec principalement des cantons de la Nièvre et de l’Yonne (classe 1). Ces deux espaces apparaissent comme peu favorisés tant sur le plan économique que sanitaire, notamment pour les cantons de la Nièvre et de l’Yonne.

- Un paradoxe des villes-centres (classe 3) où l’offre de soins et l’accès aux services hospitaliers apparaissent plus aisés mais avec une surmortalité prématurée : la proximité des services de soins, aussi divers soient-ils, n’induit pas nécessairement un recours aux soins. Les différences sociales d’une partie de la population doivent alors être prises en compte pour expliquer ce paradoxe. L’état de santé d’une population ne peut s’expliquer uniquement par une offre de soins importante/réduite : d’autres facteurs sont nécessaires, tels que les déterminants sociaux, les conditions de vie, l’environnement physique et social. De manière générale, il existe de fortes inégalités sociales de santé : les indicateurs de santé sont souvent reliés aux indicateurs sociaux (catégories socioprofessionnelles par exemple). La relation n’est pas automatique et de nombreux facteurs sont à prendre en compte, mais ce constat est souvent vérifié (ORS).

- Des espaces périurbains (classe 5), disposant d’une offre de soins importante, socialement favorisés et en sous-mortalité. Ils sont principalement situés en Côte-d’Or.

- Des cantons de la classe 4, se situant dans une situation intermédiaire avec certains atouts du rural et de l’urbain. Ces cantons présentent des indicateurs sociaux favorables, un état de santé plutôt bon et sont peu éloignés des services hospitaliers, même si l’offre de soins libéraux y est réduite.

Figure 1 : Typologie des cantons

bourguignons (ORS, 2010)

II. Les impacts observés et préssentis Le changement climatique aura des incidences sur la santé humaine, à la fois directes (liées aux effets physiologiques de la chaleur et du froid) et indirectes. Une augmentation de certaines de ces incidences a déjà été observée en Europe au cours des dernières décennies. Par exemple, on estime que les vagues de chaleur de l'été 2003 ont, à elles seules, provoqué plus de 70 000 décès supplémentaires (Commission européenne, 2009). De nombreux rapports nationaux recensant les risques sanitaires potentiels s’accordent sur trois principaux types d’impacts en France :

- Une modification en fréquence et en intensité de certains événements climatiques extrêmes comme les canicules (II.1) ;

- Des modifications progressives de l’environnement (raréfaction et pollution de l’eau, pollution de l’air…) et des modes de vie modifiant des expositions existantes, voire entraînant de nouvelles expositions (II.2) ;

- L’émergence de maladies infectieuses parfois exotiques (II.3).

1. Une modification des évènements extrêmes qui ont un fort impact sur la santé humaine

a. Vers une inversion des pics de mortalité entre l’hiver et l’été ?

Le premier effet cité du changement climatique sur la santé est généralement l’augmentation de la mortalité estivale du fait de canicules de plus en plus fréquentes. En 2003, la Bourgogne est arrivée au troisième rang des régions françaises les plus éprouvées par la canicule avec une augmentation de près de 40 % de la mortalité en août (1 984 décès au lieu de 1 426 en moyenne) comme l’illustre la Figure 2. Cela s’explique par la conjonction de températures particulièrement élevées, de nuit comme de jour, et d’une proportion de personnes âgées nettement supérieure à la moyenne nationale.

Figure 2 : Nombre mensuel de décès

en Bourgogne (Besancenot et al., 2006)

  Pour l’essentiel, ce sont les quinze jours du 4 au 18 août, qui ont été les plus touchés : 1 233 décès au lieu de 665, soit une augmentation de plus de 85 %. Mais tous les départements n’ont pas été également éprouvés : la surmortalité a atteint une hausse de 103 % dans l’Yonne, alors qu’elle n’a pas dépassé 88 % en Côte-d’Or, 80 % en Saône-et-Loire et 70 % dans la Nièvre (Besancenot et al., 2006).

Or, le changement climatique devrait se traduire par une augmentation de l’intensité et la fréquence des vagues de chaleur comme on peut le voir sur la Figure 3 (prédictions de Météo France selon différents scénarios d’émissions jusqu’en 2050). Notons que les températures minimales, qui jouent souvent un rôle décisif, en permettant ou non un repos nocturne réparateur, devraient aussi augmenter…

Figure 3 : Évolution du nombre de jours de

canicule entre 2000 et 2050 (InVS, 2010)

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En parallèle de l’augmentation des températures, le vieillissement de la population et sa concentration dans les zones urbaines vont conduire à une augmentation du nombre de personnes vulnérables à la chaleur. Une augmentation des décès, en surnombre l’été durant les jours les plus chauds, est donc à craindre (InVS, 2010 ; ARS ; CIRE).

VULNÉRABILITÉS Des études ont permis de mettre en évidence des caractéristiques significativement liées au décès (InVS, 2010 ; Besancenot, 2002 ; ARS) :

- âge (enfants en bas âge, personnes âgées), - sexe (femmes), - catégorie socioprofessionnelle (faible niveau), - degré d’autonomie (faible), - antécédents médicaux : personnes ayant des

pathologies chroniques (hypertension, obésité, insuffisance cardiaque…)

- habitat et urbanisme (faible isolation thermique, îlots de chaleur…),

- comportements d’adaptation à la vague de chaleur (se vêtir moins que d'habitude, utiliser des moyens de rafraîchissement) souvent moins observés dans les faibles latitudes.

Tous les décès surnuméraires enregistrés durant ces vagues de chaleur ne sont pas seulement dus à la déshydratation, au coup de chaleur et à l'hyperthermie : la surmortalité serait aussi alimentée par les maladies cardiovasculaires, cérébro vasculaires, respiratoires et mentales (Besancenot, 2002).

Cependant, en 2003 par exemple, il n’a pas été observé d’augmentation d’infarctus dans le département de la Côte d’Or : on ne peut pas dire que des températures très chaudes influencent directement le risque d’infarctus à court terme. En revanche, on ne sait pas si elles ont un effet à long terme (RICO)… Concernant les accidents vasculaires cérébraux (AVC), on pense que des températures très élevées pourraient provoquer des occlusions du fait de la baisse du débit sanguin, mais ce phénomène n’a pas non plus été significativement mis en évidence lors de la canicule de 2003. Ceci serait dû au climat tempéré de la France : avec des températures moins élevées, ce phénomène y est moins observé qu’aux Etats-Unis ou en Australie (OAVC). A l’inverse, il est généralement estimé que le changement climatique se traduira par une baisse de la morbidité et de la mortalité hivernale dues aux crises d’angines, d’asthme, gelures, ou au risque d’hypothermie (CIRE). Par exemple, le risque d’infarctus, qui est le 2e cause de mortalité en France, derrière les cancers, est multiplié par deux en-dessous de -5 °C : ce risque pourrait donc diminuer significativement en hiver (RICO). La même tendance pourrait être observée pour les AVC, 3e cause de mortalité en France même sur les patients ne présentant pas de facteur de risque (les grands froids peuvent occasionner des « dissections artérielles » chez les moins de 55 ans sans facteurs de risque) (OAVC). De manière indirecte, le réchauffement climatique pourrait aussi diminuer le nombre d’accidents liés au verglas ou à la neige ainsi que celui des intoxications (notamment au CO) dues à la mise en place de systèmes de chauffage d’appoint inadaptés (CIRE). Il y aurait alors progressivement une inversion des pics de mortalité entre l’hiver et l’été. Cependant, des vagues de froid exceptionnelles pourront toujours se produire, avec un impact sanitaire important (InVS, 2004) : infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux, infections respiratoires, hypothermies et intoxications au monoxyde de carbone (systèmes de chauffage déficients ou véhicules immobilisés par le froid). Par ailleurs, la population pourrait s’habituer à des niveaux moyens de température plus élevés et se montrer plus sensible qu’à présent pour un même niveau de température, que ce soit par une diminution de son adaptation physiologique au froid ou par une moindre adaptation comportementale (InVS, 2010). Il est donc difficile de projeter l’impact du changement climatique sur l’évolution de la mortalité hivernale, même si les avis tendent à pencher pour une diminution de celle-ci. Même si cela est le cas, il reste à évaluer la résultante entre les conséquences sanitaires dues à l’évolution des canicules, et celles résultant des vagues de froid. Au niveau européen, le projet Peseta estime que la diminution de la mortalité hivernale pourrait compenser l’augmentation de la mortalité estivale (InVS, 2010). En France, d’autres prédisent une augmentation globale de la mortalité (Besancenot, 2007) : si l'on extrapole les situations réalisées au cours des hivers les plus froids et des étés les plus chauds du dernier demi-siècle, le nombre des décès pourrait reculer d'entre 5 et 7 % au cours du trimestre décembre-février, alors qu'il augmenterait d'entre 12 et 18 % au cours des mois de juin à août…

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b. Quid des effets sanitaires dus aux inondations et aux tempêtes… L’impact du changement climatique sur les tempêtes et les inondations n’est pour le moment pas clair. Cependant, du fait de leurs multiples impacts sur la santé, il est important de les surveiller de près. Les événements extrêmes localisés présentent des similarités dans leurs impacts sur la santé humaine. À court terme, les décès, les traumatismes et leur pronostic vital, dus à l’effet direct de l’événement, sont la principale préoccupation (noyades, crises cardiaques, blessures…). Puis, dans un second temps, les conséquences indirectes des dégâts prédominent. On doit s’attendre à observer (InVS, 2010) :

- des traumatismes dus aux actions de réhabilitation, de nettoyage ou aux effondrements de bâtiments ;

- des pathologies liées à la précarisation induite par l’évènement extrême : des hypothermies, des intoxications au monoxyde de carbone (utilisation inadéquate de groupes électrogènes et de chauffages de fortune), des infections d’origine hydrique (contaminations de captage), des déshydratations par difficultés d’approvisionnement en eau potable ;

- un impact sur la santé mentale des populations affectées (dépression, troubles anxieux, état de stress post-traumatique, augmentation de dépendance à l’égard de substances psycho-actives, suicide…). L’exemple typique est celui des inondations (ONERC, 2009) : l’analyse fait état d’une augmentation significative du taux de délivrance de nouveaux traitements psychotropes dans les communes sinistrées dans les trois semaines suivant l’évènement.

Par ailleurs, les établissements de santé et médico-sociaux seront, eux aussi, exposés aux aléas climatiques extrêmes provoquant dans certains cas le déplacement de personnes, comme l’orientation de personnes âgées en maison de retraite (MEEDAT et MSJSV, 2008).

2. Une modification de différents aspects de qualité de vie

a. Des températures plus chaudes en général : meilleur confort d’hiver et moindre confort d’été

Des hivers plus doux pourraient permettre que les personnes en situation précaire ou travaillant à l'extérieur souffrent moins pendant la période hivernale (Commission européenne, 2009). A l’inverse, il a été observé qu’un réchauffement moyen de 2 °C serait suffisant pour produire un impact direct sur le fonctionnement de l’organisme humain (coups de chaleur, déshydratation aiguë, accidents cardio-vasculaires ou cérébro-vasculaires)… (Deneux, 2002)

b. Un ensoleillement plus intense donc plus dangereux ?

Il semble logique que si l’ensoleillement augmente, statistiquement les maladies liées à une plus forte exposition aux UV, comme des cancers de la peau, devraient augmenter (ARS ; ORS). En effet, les UV-A, comme les UV-B, sont mutagènes pour les cellules de la peau humaine. Aujourd’hui, on estime à environ 80 000 le nombre de cancers cutanés non mélanocytaires en France chaque année. En Europe, on prévoit dans les prochaines années une augmentation de 22 % du nombre de ce type de cancers chez les sujets âgés de plus de 65 ans, et de 50 % chez ceux de plus de 80 ans (MEEDAT et MSJSV, 2008). De plus, le réchauffement climatique peut engendrer un développement des sorties à l’extérieur exposant plus aux rayonnements UV les effets délétères pourraient se combiner : à l’augmentation de l’ensoleillement estival associée à une exposition probablement plus fréquente des individus, se cumulerait l’augmentation globale d’UV consécutive à la diminution de la couche d’ozone. En effet, 1 % d’ozone en moins dans la stratosphère signifie 1 à 2,5 % d’UV en plus (MEEDAT et MSJSV, 2008). Cependant, ce phénomène ne serait réellement constaté que dans deux ou trois décennies (Deneux, 2002).

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c. Une baisse de la qualité de l’air ? Dans les couches basses de l’atmosphère, la pollution à l’ozone pourrait être renforcée par l’augmentation des températures (effet indirect) (CIRE). Des niveaux très élevés d’ozone avaient été observés pendant la vague de chaleur de l’été 2003. Même si les effets sur la santé associés ont été relativement marginaux par rapport à ceux liés aux températures élevées, ils peuvent sans doute être considérés comme le prototype de ce qui pourrait se produire dans le futur (InVS, 2010).

L’Observatoire des infarctus de Côte-d’Or a mis en évidence que l’ozone augmente les risques d’infarctus chez les personnes vulnérables : il suffit de quelques heures d’exposition lors de pics de pollution pour que ces personnes aient un infarctus (RICO). De même, les pics d’ozone peuvent créer une inflammation entraînant un AVC chez des patients à risque (OAVC). 1*

L’effet du changement climatique sur les niveaux de fond d’ozone est plus discuté. En effet, les résultats des modèles sont assez contradictoires, car les effets sont opposés entre, d’une part l’augmentation de la production d’ozone provoquée par celle de la température, et d’autre part, de l’élimination de l’ozone par l’augmentation possible des précipitations et de la charge en eau de l’atmosphère (InVS, 2010).

d. Un développement des allergies ?

On peut supposer que le changement climatique induira une augmentation des allergies liées aux pollens (ORS ; CIRE). En France, 20 à 25 % de la population souffrent de réactions allergiques (rhinites et crises d'asthme) et les allergies liées au pollen auraient doublé en 20 ans. Le changement climatique pourrait induire plusieurs conséquences sur la pollinisation (MEEDAT et MSJSV, 2008) :

- Une augmentation des concentrations de pollens dans l’air du fait de la fréquence accrue d’un temps chaud, ensoleillé et exempt de fortes précipitations (Besancenot, 2007) ;

- Une précocité des saisons polliniques comme cela a été prouvé pour le bouleau au niveau européen (Emberlin et al., 2007) ;

- Un déplacement de l'aire de répartition de nombreuses espèces végétales (dont certaines fortement allergisantes) du Sud vers le Nord de la France (ambroisie, pollen d’oliviers, certaines graminées…).

e. Une dégradation de la qualité de l’eau ?

La ressource en eau impacte la santé humaine de trois manières (ARS) :

- La quantité d’eau potable disponible : les sécheresses peuvent conduire à une forte diminution de la ressource ce qui met en danger l’approvisionnement des populations. Cela a été le cas en 2003 où certaines communes ont dû s’approvisionner par des citernes. Si les sécheresses se succèdent régulièrement, on peut se poser la question de la durabilité de telles solutions (ARS). Les restrictions d’eau imaginables ou possibles pourraient aussi entraîner dans la population une diminution des conditions d’hygiène générale conduisant à une augmentation d’un certain nombre de pathologies spécifiques (dermatoses, maladies infectieuses…) (MEEDAT et MSJSV, 2008).

1 . HENROTIN JB, ZELLER M, LORGIS L, COTTIN Y, GIROUD M, BÉJOT Y. Evidence of the role of short-term exposure to low levels of ozone on ischemic cerebral and cardiac events. The Dijon Vascular Project (DIVA). Heart 2010;96(24):1990-6.

VULNERABILITÉS. Il existe des groupes plus à risque lors de pollutions atmosphériques : les personnes âgées, les personnes ayant de l’hypertension ou des problèmes respiratoires (RICO).

VULNERABILITÉS La pollution urbaine aggrave la toxicité des pollens en fragilisant la surface des grains et, en permettant la sortie des protéines allergisantes (MEEDAT et MSJSV, 2008).

- La qualité de l’eau potable : des phénomènes pluvieux très forts peuvent entraîner des inondations. Pour certains captages insuffisamment protégés cela provoquerait un risque d’intrusion d’eau de pluie fortement chargée en polluant. Les épisodes pluvieux qui suivent les périodes de sécheresse prononcées génèrent souvent des pics de pollution notamment de nitrates (ARS). Par ailleurs, l'eau froide apportée par les réseaux internes des immeubles peut subir une prolifération de bactéries du genre Legionella, lorsque sa température augmente au-delà de 25°C (MEEDAT et MSJSV, 2008).

- La qualité de l’eau de baignade : l’augmentation de l’ensoleillement et des températures

sont des conditions propices aux blooms algaux, phénomène aggravé s’il y a présence de nutriments dans l’eau et en situation d’eaux stagnantes du fait de la sécheresse. Ces algues peuvent produire des toxines (cas des cyanobactéries) dangereuses pour la santé humaine (ARS), pouvant entraîner des effets directs cutanés auprès des baigneurs, mais surtout des conséquences en cas de consommation d’eau voire d’aliments contaminés (poissons planctonophages et produits dérivés). Un développement possible des « maladies des mains sales » du type fièvre typhoïde ou choléra pourrait aussi apparaître (ORS). A l’inverse, une augmentation de l’ensoleillement estival favorise l’auto-épuration de certains rejets déversés dans les systèmes aquatiques, contribuant donc à une augmentation de la qualité des eaux (MEEDAT et MSJSV, 2008).

D’autres impacts indirects sur les activités et la santé humaine pourraient voir le jour à plus long terme. Par exemple, lors des périodes de sécheresse prolongées et répétitives, avec l’augmentation des températures, il est probable que notre production d’électricité soit plus ou moins affectée. Associé à des pointes de consommation (climatisation, production de froid…), cela pourrait entraîner des tensions sur les approvisionnements, très préjudiciables pour les établissements de santé et les EHPAD où les besoins sont importants (ARS)…

3. L’apparition de nouvelles maladies

a. Modifications des conditions environnementales de la dissémination, l’installation et le développement d’agents infectieux

En modifiant les conditions environnementales, le changement climatique agira indirectement sur la dissémination, l’installation et le développement à large échelle d’espèces de vecteurs et d’agents infectieux. Plusieurs mécanismes peuvent être concernés de façon directe (Viboud, 2005) :

- Le taux de réplication du pathogène : Il peut augmenter avec la température. Par exemple, pour la dengue et le paludisme, le cycle de réplication du pathogène varie avec la température ambiante. Une température minimale est nécessaire pour les pathogènes se développant dans l’eau.

- Le mouvement du pathogène : Certains pathogènes sont transportés par l’air ou l’eau en mouvement (les vents favorisent ces transports), d’autres contaminent les réservoirs d’eau potable lors de fortes précipitations…

- Les mouvements et le développement du vecteur ou du réservoir : La distribution géographique d’un grand nombre de vecteurs comme les arthropodes (moustiques, tiques, mouches) est limitée par des conditions minimales et maximales d’humidité et de température. On s’attend donc à une remontée de ceux-ci vers le Nord avec le réchauffement climatique (ARS). L’augmentation des températures serait également susceptible de modifier la durée de migration et la trajectoire des oiseaux migrateurs, souvent réservoirs de nombreuses maladies.

- L’évolution génétique du pathogène : Peu d’études existent à ce sujet, bien que l’on s’intéresse de plus en plus aux mécanismes d’adaptation et de persistance des agents pathogènes.

Par ailleurs, le climat peut favoriser le développement d’agents infectieux de manière indirecte par le biais de changements écologiques ou de modifications des activités humaines. Par exemple, dans le cas de la fièvre de la Vallée du Rift, les fortes précipitations favorisent la création de flaques d’eau propices au développement des moustiques, accroissant la transmission du virus. Dans la zone tropicale, la sécheresse peut provoquer une augmentation

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de l’incidence de la dengue car la population stocke l’eau dans des récipients ouverts, où le moustique aime se reproduire. En France, un développement du nombre de piscines ou réserves d’eau et une intensification de systèmes d’arrosage ou d’irrigation, avec développement de points d’eau stagnante résiduelle pourrait favoriser la multiplication d’insectes vecteurs d’arboviroses. Les températures élevées favorisent l’utilisation de l’air conditionné, facilitant la présence et la transmission du bacille responsable de la maladie du légionnaire (MEEDAT et MSJSV, 2008)… A l’inverse, l’assèchement de mares ou de cours d’eau devraient avoir un effet positif en diminuant, voire même en supprimant la transmission de nombreux agents pathogènes liés à l’eau. Les preuves en sont seulement indirectes, avec une relation inverse existant entre le nombre de cas de dengue ou de paludisme, par exemple, et la proximité d’un lieu humide (MEEDAT et MSJSV, 2008).

Il est important de souligner la complexité et la multiplicité des possibilités de transmission de maladies infectieuses et des mécanismes en jeu comme l’illustre la Figure 4. Pour de nombreuses maladies, les conditions météorologiques ne sont pas les seules causes explicatives de leur développement. Les contextes socio-économiques jouent un rôle important, ce qui rend complexe la compréhension de l’évolution des épidémies et des

s maladies.

b. Les maladies susceptibles de se développer en France

les, quatre sont usceptibles d’affecter l’Homme (ONERC, 2006 ; MEEDAT et MSJSV, 2008) :

e Nord ou à hiverner dans des zones plus proches de leurs zones de reproduction.

utres espèces vectrices locales, méconnues ou sous-estimées, ne sont pas exclues…

nouvelle

La plupart des maladies infectieuses humaines, avant de se transmettre d’homme à homme, proviennent de zoonoses. Or les vecteurs de transmission sont souvent limités par les températures basses : avec le réchauffement climatique, certains pourraient étendre leurs aires géographiques en latitude ainsi que vers des altitudes plus élevées. Un groupe d’experts, mis en place par l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments a identifié six maladies animales généralement considérées comme « exotiques » qui pourraient concerner le territoire français dans les prochaines années du fait du réchauffement. Parmi els

- La fièvre de West Nile et la fièvre de la vallée du Rift. L’extension de ces arboviroses est un risque prioritaire. Les oiseaux constituent l'unique réservoir du virus West Nile. Il est transmis accidentellement aux hommes, comme aux équidés, par la piqûre de diverses espèces de moustiques. Les atteintes humaines restent habituellement asymptomatiques, mais il arrive qu'elles soient mortelles. Depuis quelques années, l'infection par le virus West Nile suscite un regain d'intérêt avec l'apparition de flambées plus rapprochées chez l'Homme ou les chevaux dans le bassin méditerranéen (Italie en 1998, Camargue en 2000, Var en 2003). La température, l'insolation et l'humidité couplée aux précipitations modulent l'agressivité des principaux vecteurs potentiels de ce virus. En outre, le climat agit indiscutablement sur le réservoir du virus, en l'occurrence les oiseaux, qui ont depuis quelques années tendance à migrer de plus en plus loin vers l

- Le développement possible du virus du Chikungunya en France métropolitaine fait

aujourd’hui l’objet de supputations : l’augmentation de la température des écosystèmes aquatiques est favorable à une plus forte production de larves de moustiques, l’introduction accidentelle des vecteurs est très probable, d’a

- Les leishmanioses constituent un troisième risque potentiel : Ces maladies

parasitaires sont présentes en Europe et les phlébotomes, qui en sont les vecteurs, sont très sensibles aux modifications climatiques. La maladie peut être cutanée, le plus souvent bénigne, quand le réservoir principal est constitué par des rongeurs, ou viscérale, plus grave, quand ce sont les canidés sauvages ou domestiques les

Figure 4 : Facteurs de transmission des

maladies humaines (ONERC, 2007)

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principaux réservoirs. Cependant des moyens de lutte existent. En France, où l'on n'a longtemps identifié que quatre foyers indépendants (Corse, Cévennes, agglomération marseillaise, département des Alpes-Maritimes), la remontée vers le Nord du climat de type méditerranéen pourrait transformer des micro-foyers instables en zones endémiques homogènes. D'ores et déjà, il semble que tout le triangle Andorre-Lyon-Nice soit touché (Besancenot, 2007).

e de campagnes de dératisation devrait permettre une lutte efficace contre la maladie.

facilement maîtrisée. Il s'ensuit que, sans être nul, risque reste minime (Besancenot, 2007).

les pathologies qui seraient susceptibles d’être impactées par le changement climatique :

- La leptospirose. La maladie est déjà présente dans notre pays et lors de la canicule de

2003, sa recrudescence semble avoir été observée en métropole au moins dans un département. De plus, suite au réchauffement, une multiplication des baignades risque d’augmenter le nombre de leptospiroses observé. Cependant, la mise en plac

La réapparition du paludisme est beaucoup plus discutée et semble, au final, peu probable (ORS). En effet, une élévation de la température aurait pour effet de raccourcir le cycle sporogonique du vecteur. Cela accroîtrait les possibilités de transmission de la maladie notamment dans des régions où elle était auparavant entravée par un niveau thermique trop bas. Toutefois, il ne faut pas oublier que la maladie a sévi en France à l'état endémique jusqu'au début du XXe siècle. Si elle a été éradiquée, ce n'est pas à la suite d'un refroidissement, mais grâce à la lutte antivectorielle, ainsi qu'à l'assainissement des terres humides et des marais. Ce n'est donc pas le climat qui constitue le facteur limitant. Des cas cliniques de paludisme importé sont régulièrement signalés aux abords des aéroports internationaux, sans qu'il en résulte une épidémie. Seul un apport massif de parasites, d'une souche compatible avec les populations vectorielles locales, pourrait occasionner une reprise de la transmission. Mais dans cette éventualité, il est probable que la réintroduction de la maladie serait aussitôt détectée, donc assezle Une remontée d’autres maladies vectorielles comme la maladie de Lyme (déjà présente en Bourgogne) pourrait être observée (ORS). Les Tableaux 1, 2 et 3, publiés par l’InVS, récapitulent les principa

Tableau 1 : Pathologies véhiculées par des moustiques ou des phlébotomes - Etat des lieux et épidémiologie (InVS, 2010)

Tableau 2 : Infections entériques - Etat des lieux et épidémiologie (InVS, 2010)

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Tableau 3 : Pathologies véhiculées par des tiques ou des rongeurs - Etat des lieux et épidémiologie (InVS, 2010)

Mais la plupart des maladies susceptibles d’évoluer sont très difficiles à suivre, ce qui constitue un problème. C’est le cas des allergies par exemple : il n’y a en général pas de décès et les médicaments prescrits ne sont pas spécifiques. Parfois, on peut trouver des indicateurs indirects. C’est le cas des diagnostics d’asthme collectés dans les écoles par les médecins scolaires, ou des hospitalisations qui donnent une tendance. Pour la maladie de Lyme, on peut identifier les cas à partir d’analyses de sang faites dans les laboratoires mais, là encore, cela ne représente pas tous les cas (ORS). Toutefois, si on observe des évolutions, il est difficile de faire la part entre les différents facteurs explicatifs. Il y a une réelle difficulté à discerner ce qui relève du changement climatique. Par exemple, il semble y avoir une augmentation des mélanomes, mais cela est sans doute aussi dû à l’augmentation de l’espérance de vie (donc de la probabilité d’avoir un cancer) et/ou à de meilleurs diagnostics (ORS)... De même, les transports et les voyages sont susceptibles de ramener de nombreux pathogènes. L’introduction du bouleau en France, et surtout dans les villes, a augmenté le nombre d’allergies (CIRE)… D’autres impacts pourraient apparaître à plus long terme et sont donc très difficiles à prévoir… (ORS) Enfin, le plus inquiétant est que les inégalités sociales risquent de se creuser. Les catégories socioprofessionnelles les plus défavorisées sont les plus vulnérables. Elles risquent de souffrir davantage que les autres des impacts du changement climatique. C’est le constat lors de catastrophes comme des inondations ou encore des canicules : les plus touchées sont les personnes qui ont des logements précaires, mal isolés, parfois construits en zone inondable du fait de la pression foncière (ORS)…

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III. Pistes d’adaptation Des démarches d’adaptation très efficaces ont vu le jour dans les établissements de santé et les EHPAD suite à la canicule de 2003. L’amélioration sur le bâti est plus lente mais c’est la voie la plus prometteuse et la plus soutenable que le Plan régional santé environnement 2011-2015 vise à promouvoir:

1. L’adaptation des individus Qu'elle soit physiologique, comportementale ou technologique, l'adaptation existe. La meilleure preuve en est que le seuil thermique au-dessus duquel le nombre des décès augmente fortement est nettement plus élevé dans les climats chauds (27,5 °C en Belgique, 31 °C à Paris, 41 °C à Séville…) (Besancenot, 2007). Il semble, en effet, qu’il y ait eu moins de surmortalité dans le Sud de la France lors de la canicule de 2003 (ORS). On peut raisonnablement penser que cela est dû au fait que la population connaisse mieux le comportement à observer (s’hydrater, prendre des douches froides…) (CIRE). La solidarité envers les personnes fragiles et isolées est une stratégie d’adaptation efficace, ses avantages dépassent le cadre des canicules (ORS). Ce qui est certain, c’est que, si l’Homme peut s’adapter, cela devra se faire très rapidement : le changement climatique est en cours et risque de s’amplifier. Cela n’a rien à voir avec les variations climatiques à l’échelle des temps géologiques (ARS). Enfin un déplacement spontané de la population issue des zones à risques vers des zones moins exposées n’est pas à exclure (des zones méditerranéennes vers les zones océaniques). De tels déplacements pourront avoir un impact favorable sur la santé, bien qu’il soit difficile d’en faire l’évaluation. Mais les conséquences seront aussi économiques et sociales (MEEDAT et MSJSV, 2008).

2. Mettre en place des réseaux de surveillance

a. Surveillance sanitaire

Le Haut Conseil de la santé publique indiquait en 2009 la mise en place et le renforcement de la surveillance comme des actions prioritaires de santé publique (2009). Des pistes concrètes d’action devront être dégagées concernant la surveillance épidémiologique des maladies, de leurs vecteurs et des hôtes réservoir (oiseaux, moustiques, tiques, acariens...). Les facteurs environnementaux favorables à leur propagation, dont les variations climatiques, seront également suivis (ONERC, 2006). Pour certains risques considérés, des systèmes de surveillance en continu et d’alerte, ou des études ad hoc existent déjà : ces systèmes doivent être renforcés, la qualité des données doit être assurée. Il est nécessaire aussi de les rendre accessibles, mais aussi d’assurer une meilleure mise en relation et en cohérence des systèmes actuels de surveillance environnementaux et sanitaires (InVS, 2010). En Bourgogne, il existe de nombreux registres, notamment pour les cancers. Deux sont à signaler car assez rares en France :

- l’Observatoire des infarctus de Côte-d’Or, créé en 2001, est unique en France : les six centres de soins du département, qu’ils soient publics ou privés, enregistrent les infarctus qui surviennent chaque jour, ainsi que diverses informations sur les patients touchés (âge, sexe, traitements, facteurs de risque…). Ceux-ci sont ensuite recontactés un an après pour effectuer un suivi. Au niveau national, depuis 2005, la Société française de cardiologie (SFC) organise un recensement des infarctus pendant un mois tous les 5 ans (FAST-MI).

- l’Observatoire des AVC de Dijon, créé en 1985, a été longtemps unique en France (rejoint par Brest et bientôt Lille) (OAVC).

Mais on ne peut pas mettre en place des registres pour toutes les maladies. Cela coûterait trop cher. Il est important d’améliorer le système d’observation et de surveillance déjà en place (ORS) et de coordonner les différents registres (infarctus, AVC, cancers…) qui existent en

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Bourgogne. Leur spécificité pourrait être utilisée comme réseau de surveillance. Il serait utile de formaliser des partenariats, de produire des indicateurs et de fixer un rythme régulier d’études sur les maladies et leurs liens avec les facteurs environnementaux en utilisant ces registres. Cela doit être une politique régionale en collaboration avec l’InVS et l’ARS (RICO). Il apparaît nécessaire de développer l’interdisciplinarité pour mettre en perspective les conséquences sanitaires des modifications environnementales, sociales et économiques (InVS, 2010).

b. Contrôle des installations et lieux à risques Afin de prévenir les risques sanitaires potentiels liés au changement climatique, il sera nécessaire de renforcer les contrôles dans les lieux susceptibles de présenter un risque pour la santé. Cela pourrait par exemple être un renforcement de la surveillance de la chaîne du froid, du producteur au consommateur. De même, du fait de l’élévation de la température, il est nécessaire de renforcer le contrôle sanitaire de la qualité des rejets et des eaux situées en aval des points de rejets des effluents (MEEDAT et MSJSV, 2008). En ce qui concerne l’eau potable, il est important de mieux sécuriser les captages vis-à vis du risque d’inondation et que chaque collectivité soit incluse dans un schéma directeur d’alimentation en eau potable où la question du changement climatique soit prise en compte.. Pour les eaux de baignade, la mesure des toxines algales n’est pas systématique. Des campagnes de mesures organisées par les ARS ont permis d’identifier des espèces susceptibles de produire des toxines. Sur les sites à risque, la recherche des cyanobactéries ou des toxines devra être prise en charge par le gestionnaire de la baignade afin de prévenir le risque sanitaire. Dans tous les cas le changement de la couleur de l’eau doit être considéré comme une alerte pouvant justifier d’interdire la baignade dans l’attente d’une évaluation plus précise des causes.

3. Renforcer la recherche Le Haut Conseil de la santé publique a mentionné comme prioritaires les recherches sur (Haut Conseil de la santé publique, 2009 ; InVS, 2010) :

- l’impact du réchauffement climatique sur les transferts et transformations des contaminants chimiques et sur la qualité des eaux et la qualité de l’air sur l’ensemble du territoire ;

- les capacités d’adaptation des agents infectieux et de leurs hôtes au changement

climatique ; - les capacités d’adaptation de l’Homme aux changements climatiques (santé

publique, physiologie de la thermolyse, modifications des relations hôte/agent infectieux, immunité des muqueuses…);

- la perception des conséquences sanitaires du changement climatique dans la

population et les comportements subséquents en termes d’exposition (aux vecteurs, au milieu environnemental modifié par le climat) et d’adaptation au changement climatique.

4. Anticiper Pour ne pas se perdre dans les mesures de prévention, il sera sans doute nécessaire de hiérarchiser l’importance relative des différentes conséquences attendues du changement climatique pour la santé et encourager l’adaptation au niveau local (Haut Conseil de la santé publique, 2009).

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a. Sensibilisation de la population

Il faudra communiquer sur les risques sanitaires d’origine climatique au grand public à travers, par exemple, des messages et campagnes d’information (Haut Conseil pour la santé, 2009) ou d’une large campagne nationale de communication (OAVC). Des alertes météorologiques sont nécessaires, afin de mettre en garde la population lors de périodes de froid intense ou de canicule, et diffuser les conseils de prévention (InVS, 2010). Si la pollution en ozone augmente, il faudrait alors éviter l’exposition de la population en limitant la circulation des personnes lors des pics de pollution. Cependant ce type de message de santé publique est difficile à faire passer sans affoler la population (RICO). Si les campagnes de prévention sont un bon outil, il faut savoir lesadapter à la population "cible". Il ne suffit pas de diffuser de l’information, il faut que les gens se l’approprient. Souvent ce sont les catégories les plus aisées qui bénéficient de ces campagnes. Les catégories socioprofessionnelles défavorisées ne sont pas sensibilisées car le message ne leur est pas adressé de la bonne manière. Par exemple, pour décliner le Programme national nutrition santé (domaine dans lequel les disparités se sont aggravées), il est nécessaire de développer des actions complémentaires aux messages du type "consommez 5 fruits et légumes par jour" (exemple :Consommer des fruits et légumes avec un petit budget, Intérêt nutritionnel de la consommation de fruits et légumes sous toutes formes comme les surgelés et les conserves…). Il en va de même pour la prévention solaire par exemple. Il faudrait privilégier des actions de proximité qui prennent en compte les centres d’intérêt des populations visées (ORS). Il serait également utile de repérer les profils des personnes à risque et de faire une « éducation thérapeutique » en leur conseillant les gestes à faire et ne pas faire en hiver (bien contrôler sa tension…) et en été (s’hydrater…) (OAVC).

b. Plans de prévention Il faudra sans doute mettre en place des plans de réponse aux phénomènes météorologiques extrêmes incluant l'étude systématique des effets sanitaires (somatiques et psychologiques) de ces phénomènes et la prise en charge des populations fragiles et à risque (Haut Conseil de la santé publique, 2009). Certains de ces plans existent déjà mais doivent être régulièrement réévalués. Par exemple, depuis la vague de chaleur de 2003, la France active chaque été un Plan national canicule s’appuyant sur un Système d’alerte canicule et santé (SACS) et un suivi d’indicateurs sanitaires en temps réel. Ce système a été conçu pour prévenir et réduire la mortalité et la morbidité pendant les vagues de chaleur. Les retours d’expérience depuis 2004 semblent indiquer que le plan contribue à réduire efficacement la vulnérabilité des populations (InVS, 2010). Différents résultats vont dans le sens d’un impact réduit de la canicule de 2006 par rapport à ce qui était attendu, avec notamment la disparition de l’effet d’emballement de la mortalité observé en 2003 (CIRE, ORS).

c. Formation du personnel soignant

Selon l’importance de l’offre locale de soins, plus ou moins grande selon les régions, le suivi des pathologies associées à certains aléas climatiques sera plus ou moins fourni en données (MEEDAT et MSJSV, 2008). Il est donc indispensable d’intégrer les risques sanitaires d’origine climatique aux formations initiale et continue des professions de santé, notamment les médecins généralistes (Haut Conseil de la santé publique, 2009 ; OAVC). Il serait nécessaire aussi de former davantage d’infectiologues, d’épidémiologistes, de spécialistes de santé publique... On peut également citer le besoin d’ophtalmologistes pour la cataracte et la DMLA (dégénérescence maculaire liée à l’âge) associées à une plus longue exposition aux rayons ultra-violets, et de psychologues et psychiatres pour les états de stress post aléas exceptionnels (MEEDAT et MSJSV, 2008). De plus, le risque épidémiologique venant notamment de la modification des zones géographiques et des comportements des vecteurs, une piste importante d’adaptation est la veille sanitaire à travers la surveillance des vecteurs. Elle nécessite de former des systématiciens, ornithologues, entomologistes, taxinomistes, écologues, naturalistes…. Ceux-ci sont de plus en plus rares et sont indispensables à l’observation et la lutte contre les maladies vectorielles (CIRE ; ONERC, 2006).

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5. Agir au niveau du bâti « Le bâti, c’est un des plus gros problèmes »... Il a, de manière générale, un rôle important à jouer dans l’adaptation au changement climatique (ARS). Mais il y a relativement peu d’échanges entre le monde de la santé et celui de l’urbanisme/bâtiment. Il serait intéressant de développer des actions ou du moins des réflexions communes (ORS). Dans le génie civil et urbain du XXIe siècle, certains paramètres prendront davantage d’importance dans la planification du territoire national : la sélection des lieux constructibles pour tenir compte de la vulnérabilité aux risques d’inondations et de crues, la densification des villes où les populations, de plus en plus nombreuses, sont exposées à un même aléa (îlots de chaleur, débordements de réseaux d’eaux usées…) (MEEDAT et MSJSV, 2008 ; Haut Conseil de la santé publique, 2009). Les matériaux de construction des habitats constituent aussi un point de vigilance. Certains sont de bons supports pour le développement des moisissures (MEEDAT et MSJSV, 2008). Mais la santé ne se limite pas à l’absence de maladie, elle inclut aussi le bien-être. Les bâtiments sont, en général, isolés contre le froid mais très peu contre le chaud (CIRE)… Or il est nécessaire de lutter contre les îlots de chaleur et d’augmenter le confort intérieur en hiver comme en été. Si l’on veut assurer un confort thermique tout en réduisant les consommations énergétiques pour diminuer la vulnérabilité énergétique, il faut s’engager sur une modification du bâti. On arrive alors à des solutions plus soutenables pour l’environnement et la santé des occupants (ARS). Depuis le plan canicule, les établissements accueillant des personnes vulnérables, comme les maisons de retraite, ont mis en place une pièce rafraîchie où les résidents peuvent aller en cas de vague de chaleur. Mais cela ne suffit pas si la canicule dure plusieurs jours voire plusieurs semaines. C’est pourquoi le nouveau Plan régional santé-environnement (PRSE) incitera les audits thermiques dans ces établissements afin de renforcer le confort d’été général des résidents et des salariés qui y travaillent. Il n’y a pas de solution unique, les établissements ayant été construits à diverses époques, avec des configurations, des matériaux, des expositions différentes (ARS)... Toutefois, ces actions peuvent aller à l’encontre d’un autre problème émergent, la qualité de l’air intérieur : en renforçant l’isolation pour consommer moins d’énergie, on diminue le renouvellement de l’air. Avec le confinement, le risque d’intoxication au CO ou d’allergies aux acariens augmente. Dans les situations connues de présence de radon, le taux de ce gaz toxique peut augmenter ce qui favoriserait le risque de cancer associé (CIRE). D’où l’importance de la réflexion en amont sur les projets de construction ou de rénovation. Bien dimensionner les installations de renouvellement de l’air en minimisant les pertes énergétiques, est aussi important que de prendre la meilleure décision possible en matière de choix d’isolation ou de matériaux de construction.

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Liste des Experts

Enquêtés : Le 12/04/2011 : Marianne ZELLER, Ingénieur de Recherche, Responsable Scientifique de

l’Observatoire des infarctus de Côte-d’Or (RICO) Le 14/04/2011 : Maurice GIROUD, Neurologue, Responsable de l'Observatoire des AVC de

Dijon (OAVC) Le 14/04/2011 : Claude TILLIER, Coordinateur de la cellule de l'InVS en région Bourgogne

Franche-Comté (CIRE) Le 15/04/2011 : Bruno MAESTRI, Responsable adjoint du département Prévention et

gestion des risques et des alertes sanitaires de l’Agence Régionale de Santé de Bourgogne (ARS)

Le 25/05/2011 : Isabelle MILLOT, Médecin de santé publique, Directrice des études,

Observatoire Régional de la Santé de Bourgogne (ORS)

Autres experts conseillés (n’ayant pas pu être enquêtés) : Patrick ARVEUX, Registre des cancers du sein et des cancers gynécologiques de Côte-

d’Or Anne-Marie BOUVIER, Registre des cancers digestifs Marc MAYNADIE, Registre des hémopathies

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Bibliographie Besancenot J.P., 2007. Notre santé à l’épreuve du changement climatique – Synthèse de l’ouvrage ; 2007 ; 6p. Besancenot J.P., 2002. Vagues de chaleur et mortalité dans les grandes agglomérations urbaines. In Environnement, Risques & Santé ; Volume 1, Numéro 4, Synthèses, Septembre-Octobre 2002 ; pages 229-240. Besancenot J.P., Havard S., Cassagne E., 2006. L’été meurtrier de 2003 en Bourgogne [en ligne]. In Revue Géographique de l'Est ; vol. 46, 2006, mis en ligne le 18 décembre 2009, [réf. du 29 juin 2011]. URL : <http://rge.revues.org/135> Commission Européenne, 2009. Les effets du changement climatique sur la santé humaine, animale et végétale ; Document de travail des services de la Commission accompagnant le Livre Blanc - Adaptation au changement climatique: vers un cadre d'action européen ; Avril 2009 ; 22p. Deneux M., 2002. Rapport sur l’évaluation de l’ampleur des changements climatiques, de leurs causes et de leur impact prévisible sur la géographie de la France à l’horizon 2025, 2050 et 2100 - Tome I ; Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, 2002. Emberlin J., Laaidi M., Detandt M., Gehrig R., Jaeger S., Myszkowska D., Nolard N., Rantio-Lehtimäki A., Stach A., 2007. Changement climatique et évolution du contenu pollinique de l’air dans sept pays européens : exemple du bouleau – Synthèse d’article. In Revue française d’allergologie et d’immunologie clinique ; no.47, 2007; pages 57-63. Haut Conseil de la santé publique, 2009. Avis relatif aux risques pour la santé liés aux effets qualitatifs du changement climatique ; Novembre 2009 ; 7p. InVS, 2004. Froid et santé – Eléments de synthèse bibliographique et perspectives ; Institut de Veille Sanitaire, Mars 2004 ; 48p. InVS, 2010. Impacts sanitaires du changement climatique en France - Quels enjeux pour l’InVS ? ; Institut de Veille Sanitaire, Mai 2010 ; 54 p. ISSN : 1 958-9719 MEEDAT et MSJSV, 2008. Les effets qualitatifs du changement climatique sur la santé en France - Rapport de groupe interministériel ; Avril 2008 ; 42p. ONERC, 2006. Stratégie nationale d’adaptation au changement climatique ; La documentation française, 2006 ; 93p. ISBN : 978-2-11-006618-0 ONERC, 2007. Changements climatiques et risques sanitaires en France ; La documentation française, 2007 ; 208p. ISBN : 978-2-11-006735-7 ONERC, 2009. Changement climatique : Coût des impacts et pistes d’adaptation ; La documentation française, 2009 ; 195p. ISBN : 978-2-11-007803-2 ORS, 2010. ATLAS Social Santé en Bourgogne ; Septembre 2010 ; 118p. Viboud C., 2005. Climat et maladies infectieuses. In Santé-environnement et santé-travail : Nouvelles perspectives de recherches - Document d’orientation scientifique ; ANR, 2005 ; 1.4 Changements globaux et impacts sur la santé, 3p.

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