suivi de la migration automnale de la cigogne noire

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aves, 40/1-4 (2003) 155 Le dØfi que s’est lancØ le programme " Cigognes sans FrontiLres " est de suivre la Cigogne noire (Ciconia nigra) jusqu’ ses quartiers d’hivernage. Entre 1995 et 1999, vingt-sept individus ont ØtØ ØquipØs d’un Ømetteur afin d’Øtudier la pØriode de prØ-migration, la migration automnale, l’hiverna- ge et la migration printaniLre. Mis sur pied en Belgique et Ølargi la France et au Grand-DuchØ du Luxembourg, ce programme poursuit un tri- ple objectif : scientifique, de conservation et pØdagogique. Cet article est une contribution l’objectif scientifique du programme. Les don- nØes satellitaires obtenues lors de ces cinq annØes de suivi sont traitØes selon trois grands axes : - Les trajets migratoires : quels sont les itinØrai- res privilØgiØs ? quels sont les obstacles la migration de la Cigogne noire et comment les surmonte-t-elle ? - Les performances de vol : quelles sont les dis- tances parcourues lors des migrations ? Combien de temps leur faut-il ? Quelle est l’in- fluence des conditions mØtØorologiques ? L’ge des cigognes a-t-il une influence sur les performances migratoires ? - Les quartiers d’hivernage : oø vont les cigognes et quels milieux frØquentent-elles ? aves, 40 (1-4) 2003 : 155 - 164 RBSUM - Dans le cadre du programme " Cigognes sans FrontiLres ", vingt-sept individus originaires d’Europe occidentale ont ØtØ ØquipØs d’Ømetteurs Argos (technique de suivi par tØlØmØtrie satellitaire). L’objectif est d’approfondir les connaissances de leur Øcologie et des milieux qu’elles frØquentent, afin de mieux les protØger. Ce travail Øtudie en particulier le suivi de la migration automnale des Cigognes noires. Le traitement cartographique des donnØes reues a permis de connatre la trajectoire et les points de passage obligØ de Cigognes noires, de dØnombrer et de localiser les jours de repos pris par chaque individu, de localiser et caractØriser leurs sites d’hivernage. Les traitements mathØmatiques ont permis de dØtailler une sØrie de variables liØes aux performances migratoires de vol, telles que la distance totale parcourue, la distan- ce journaliLre ou le nombre de jours de vol actif nØcessaires pour atteindre les quartiers d’hi- vernage. Ils ont Øgalement permis de comparer les performances entre les parcours europØens et africains, et entre les individus selon leur ge. Enfin les conditions mØtØorologiques ont ØtØ mises en relation avec les jours de repos et de longues Øtapes pour dØterminer quelles sont les conditions mØtØorologiques favorables la migration. Suivi de la migration automnale de la Cigogne noire (Ciconia nigra) par télémétrie satellitaire Gérard JADOUL, Frédéric HOURLAY, Anne-Christelle TOUSSAINT Introduction

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Page 1: Suivi de la migration automnale de la Cigogne noire

aves, 40/1-4 (2003) 155

Le défi que s'est lancé le programme " Cigognessans Frontières " est de suivre la Cigogne noire(Ciconia nigra) jusqu'à ses quartiers d'hivernage.Entre 1995 et 1999, vingt-sept individus ont étééquipés d'un émetteur afin d'étudier la période depré-migration, la migration automnale, l'hiverna-ge et la migration printanière. Mis sur pied enBelgique et élargi à la France et au Grand-Duchédu Luxembourg, ce programme poursuit un tri-ple objectif : scientifique, de conservation etpédagogique. Cet article est une contribution àl'objectif scientifique du programme. Les don-nées satellitaires obtenues lors de ces cinqannées de suivi sont traitées selon trois grandsaxes :

- Les trajets migratoires : quels sont les itinérai-res privilégiés ? quels sont les obstacles à lamigration de la Cigogne noire et comment lessurmonte-t-elle ?

- Les performances de vol : quelles sont les dis-tances parcourues lors des migrations ?Combien de temps leur faut-il ? Quelle est l'in-fluence des conditions météorologiques ?L'âge des cigognes a-t-il une influence sur lesperformances migratoires ?

- Les quartiers d'hivernage : où vont les cigogneset quels milieux fréquentent-elles ?

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RBÉSUMÉ - Dans le cadre du programme " Cigognessans Frontières ", vingt-sept individus originairesd'Europe occidentale ont été équipés d'émetteursArgos (technique de suivi par télémétrie satellitaire).L'objectif est d'approfondir les connaissances de leurécologie et des milieux qu'elles fréquentent, afin demieux les protéger. Ce travail étudie en particulier lesuivi de la migration automnale des Cigognes noires.Le traitement cartographique des données reçues apermis de connaître la trajectoire et les points depassage obligé de Cigognes noires, de dénombrer etde localiser les jours de repos pris par chaque individu, de localiser et caractériser leurs sitesd'hivernage. Les traitements mathématiques ont permis de détailler une série de variablesliées aux performances migratoires de vol, telles que la distance totale parcourue, la distan-ce journalière ou le nombre de jours de vol actif nécessaires pour atteindre les quartiers d'hi-vernage. Ils ont également permis de comparer les performances entre les parcours européenset africains, et entre les individus selon leur âge. Enfin les conditions météorologiques ont étémises en relation avec les jours de repos et de longues étapes pour déterminer quelles sont lesconditions météorologiques favorables à la migration.

Suivi de la migration automnale dela Cigogne noire (Ciconia nigra) par télémétrie satellitaire

Gérard JADOUL, Frédéric HOURLAY, Anne-Christelle TOUSSAINT

Introduction

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Cigognes et données Argos

Entre 1995 et 2000, 27 Cigognes noires (14 adul-tes, 6 immatures et 7 juvéniles) ont été équipéesd'une balise Argos. Elles ont été capturées dansdes volières construites sur de petits ruisseaux,après avoir été attirées par la présence de nom-breuses truitelles. La plupart des oiseaux ont étécapturés en période de pré-migration, dans qua-tre régions différentes : en province duLuxembourg (Belgique), dans les départementsde Côte d'Or, de Haute-Marne et des Ardennes(France). On ignore généralement d'où les cigo-gnes sont originaires, elles peuvent avoir effec-tué des distances importantes entre leur site denidification et les zones de pré-migration.

Les balises Argos sont fixées sur le dos des cigo-gnes à l'aide d'un ruban de téflon. Ces émetteurspèsent moins de 65 grammes et ont une autono-mie de 900 heures. Ils sont programmés pourémettre en continu de 8.00 GMT et 16.00 GMTet ce, tous les jours en période de migration ettous les 5 jours en période de pré-migration ethivernage.

Des données complètes ne sont pas obtenuespour les 27 oiseaux, celles-ci étant déficientesnotamment pour l'hivernage et les migrationsprintanières. En revanche les données sont assezcomplètes concernant la migration automnale.Sur le tronçon Départ-Gibraltar, les données sontcomplètes pour 23 oiseaux et sur le tronçonGibraltar-Arrivée pour 15 oiseaux.

Migration automnaleTrajets migratoires

Les cartes sont réalisées grâce au logiciel CartoFauna - Flora conçu par Yvan BARBIER (UMH,Laboratoire de Zoologie).

Performances de vol

Quatre types de paramètres ont été calculés : desparamètres de durée (durée du trajet, nombre dejours de repos, nombre de jours de vol actif), dedistance (distance journalière, distance maxima-le, distance moyenne, distance totale effectuée)

et des rapports de distance (distance réelle par-courue / distance théorique).

Patterns généraux

Des analyses visuelles et des comparaisons demoyennes ont permis d'identifier les itinérairespréférentiels de migration pour les 15 cigognesarrivées dans leurs quartiers d'hivernage.

Influence des conditions météorolo-giques

Les cartes synoptiques des archives de l'InstitutRoyal Météorologique de Belgique sont analyséesen se focalisant sur deux comportements antago-nistes de la Cigogne noire : les jours de repos etles jours de longues étapes (jours où la Cigogneparcourt plus de 1,5 fois la distance journalièremoyenne). Pour ces jours particuliers, une série devariables météorologiques ont été relevées : lanébulosité (3 classes : faible, modérée, forte), ledéveloppement de nuages bas (absence de nuagesbas, présence de cumulus de beau temps, présen-ce d'autres nuages bas), la différence entre la tem-pérature de l'air et la température du point de rosée(plus cette différence est faible, plus le taux d'hu-midité de l'air est élevé), la force du vent (4 clas-ses selon l'échelle anémométrique de Beaufort :1= très légère brise, 5 km/h; 2= légère brise,11km/h; 3= petite brise, 19 km/h; 4= brise jolie,28 km/h; il n'y a pas eu de vents plus forts durantla période étudiée), et la direction du vent. Destests d'indépendance entre chacune des variablesmétéorologiques et le comportement des oiseauxpermettent de mettre en évidence l'influence desconditions météorologiques.

Influence de l'âge des oiseaux

Des comparaisons de moyennes pour chacunedes variables décrivant les performances migra-toires des juvéniles, des immatures et des adultessont effectuées.

Les quartiers d'hivernage

Les données analysées ont deux origines : le sys-tème Argos et la bibliographie, notamment larevue Malimbus.

Matériel et méthodes

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Migration automnale

Les trajets migratoires

Les cartes de deux individus, Léna et Guillaume(Fig. 1), représentent les trajets migratoirescaractéristiques empruntés par les Cigognes noi-res nichant en Europe occidentale. Une carte desynthèse (Fig. 2) reprend les trajets pour l'en-semble des oiseaux suivis. En France, lesCigognes noires quittent les zones de pré-migra-tion pour prendre une direction sud-ouest et fran-chir les Pyrénées par l'ouest (PyrénéesAtlantiques) pour la majorité. En Espagne, ladirection générale est nord-est - sud-ouest, quiest la plus courte jusqu'à Gibraltar, en évitant les

formations montagneuses de plus de 1.000mètres d'altitude. En Espagne les trajets migra-toires sont plus disparates, le couloir migratoires'élargit. Une fois le détroit de Gibraltar traversé,les trajets sont encore canalisés pendant plus de500 km sur une trajectoire rectiligne qui relieGibraltar et le nord de la Mauritanie; les cigo-gnes franchissent le versant ouest du Moyen etdu Haut-Atlas en des points culminant à 4.000mètres d'altitude. Les trajectoires commencent àdiverger entre l'ouest du Mali et le nord de laMauritanie; deux voies de migration se dessinentalors (Fig. 3) : la voie occidentale, qui aboutit ausud de la Mauritanie, au Sénégal ou au sud-ouestdu Mali, et la voie orientale, qui atteint le BurkinaFaso, le Togo, le Bénin et le sud-est du Mali.

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Résultats et discussion

Fig. 1 - Cartes des trajets de la migration automnale de Léna et Guillaume. Ces deux trajectoires sont carac-téristiques de parcours effectués par les Cigognes noires lors de leur migration automnale. - Maps of fallmigration routes for Léna and Guillaume. Those two routes are characteristics for Black Stork fall migration.

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Les performances de vol

Patterns généraux

Les Cigognes noires parcourent plus de 5.000km durant la migration : 2.000 km en Europe et3.000 km en Afrique. Huit jours de vol actif sontnécessaires jusqu'à Gibraltar, puis 12 supplé-mentaires jusqu'aux sites d'hivernage. La migra-tion se fait donc en 20 jours de vol actif, cepen-dant elle dure près de 25 jours car les cigogness'arrêtent en moyenne 5 jours sur le trajet : 4jours en Europe et 1 sur le tronçon africain. Laplupart des jours de repos ont lieu entre 36° et40° de latitude nord, dans le sud de l'Espagne sur

un site particulièrement fréquenté, le bassin deGuadiana, qui constitue un lieu de halte avant ledétroit de Gibraltar.

En Europe les Cigogne noires parcourent enmoyenne 233 km par jour (maximum : 373 km),et en Afrique une moyenne de 261 km par jour(maximum : 439 km). La distance journalièremoyenne effectuée est donc de 250 km.

Le temps de survol des deux continents est pra-tiquement identique alors que les oiseaux par-courent une distance nettement plus élevée enAfrique qu'en Europe. Les distances journalières

Fig. 2 - Carte reprenant l'ensemble des localisationsrécoltées lors de la migration automnale des 27Cigognes noires dans le cadre du programme"Cigognes sans Frontières". - Map showing all thesatellite localizations collected during the fall migra-tion of 27 Black Storks - "Cigognes sans frontières"program.

Fig. 3 - Carte représentant la scission du couloirmigratoire de l'Afrique de l'Ouest en deux voies àhauteur de la Mauritanie. - Map showing the splittingof the west-African migration route at the level ofMauritania.

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et le nombre de jours de vol actif sont plus fai-bles en Europe.

La vitesse moyenne de vol est de 37,9 km/h surl'ensemble du trajet.

Les rapports de distance sont similaires sur lesdeux tronçons Départ-Gibraltar et Gibraltar-

Arrivée, à savoir 1,18 pour l'Europe et 1,20 pourl'Afrique. La trajectoire est donc assez directe,tant pour rejoindre Gibraltar que, à partir de là,les quartiers d'hivernage.

Fig. 4 - Les performances migratoires en relation avec la nébulosité (A); avec les types de nuages (B); avec ladifférence de température entre l'air ambiant et le point de rosée(C); avec la force du vent (D) exprimée selonl'échelle de Beaufort; avec la direction du vent pour les jours de repos (E) et pour les longues étapes (F). -Migration performances related to cloudiness (A); clouds types (B); difference of temperature betweenambient air and dew point (C); wind force (D) according to the Beaufort's scale; and direction of wind for restdays (E) and long distance days (F).

A B

C D

E F

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Influence des conditions météorolo-giques

Nébulosité (Fig. 4A)

Des conditions de forte nébulosité sont associéesà plus de 60 % des jours de repos, mais se ren-contrent encore pour 18 % des longues étapes.Le test d'indépendance confirme que la couver-ture nuageuse influence de façon très significati-ve la progression de la Cigogne noire.

Présence de nuages bas (Fig. 4B)

La majorité des jours de repos sont caractériséspar la présence de nuages bas de "mauvaistemps" de type strato et cumulo-nimbus. 70 %des longues étapes se font soit en l'absence denuages bas, soit en présence de cumulus de"beau temps". Le test prouve qu'il y a une rela-tion de dépendance entre le type de nuages bas etles performances migratoires de la Cigognenoire.

Différence entre la température de l'airet la température du point de rosée (Fig. 4C)

Les jours de repos correspondent majoritaire-ment à des différences de températures inférieu-res à 10 °C, tandis que 80 % des longues étapessont associées à des différences comprises entre6 et 15 °C. Les jours de repos sont donc le plussouvent liés à la présence de précipitations ou debrouillard.

Force du vent (Fig. 4D)

La force du vent était de 2 ou 3 pour la majoritédes jours de repos et de longues étapes. La forcedu vent n'influence donc pas le comportementmigratoire, du moins dans la gamme de vitesseconsidérée.

Direction du vent (Fig. 4E et 4F)

Elle a une forte influence sur les performancesdes Cigognes noires. Pendant les jours de halte,le vent est majoritairement de secteur sud-ouest,et pendant les jours de longues distances, le ventest de secteur nord-est ou nord-ouest.

Le comportement migratoire des Cigognes noi-res est donc fortement influencé par les condi-tions météorologiques. Les jours de repos sontassociés à une série de conditions climatiquesintercorrélées : nébulosité importante, dévelop-pement de stratus et cumulo-nimbus, vent desecteur sud-ouest, et forte humidité relative del'air.

Influence de l'âge des oiseaux

La comparaison des performances de vol relati-ves aux différentes classes d'âge permet de direque les adultes, les immatures et les juvénilesréalisent des performances assez semblables.Cependant, les juvéniles et les immatures ten-dent à effectuer des haltes migratoires plusimportantes que les adultes mais des étapes jour-nalières plus longues que les adultes. Il sembleque les juvéniles et les immatures effectuent deshaltes migratoires assez longues afin de recons-tituer leurs réserves énergétiques. Ils tendent àeffectuer des étapes plus longues mais entrecou-pées de haltes plus longues et plus fréquentes,tandis que les adultes effectuent cette distance àun rythme plus constant : les distances quoti-diennes sont plus courtes et réparties sur un plusgrand nombre de jours de vol actif. Ce constatdoit peut-être être attribué à l'inexpérience desjuvéniles. Les distances journalières plus lon-gues entament sans doute davantage leurs réser-ves énergétiques et les contraignent vraisembla-blement à effectuer plus de vol battu en début eten fin de journée, lorsque les thermiques sontpeu développés. Les oiseaux seraient donc for-cés de s'arrêter plus souvent pour refaire le pleinde calories.

Hivernage

Description des aires d'hivernage

L'aire d'hivernage des Cigognes noires nichanten Europe occidentale est située entre 10 ° et16 ° de latitude nord et entre les isohyètes de 200et 1.000 mm. Elles restent au nord de la végéta-tion beaucoup plus dense de la forêt tropicale.On observe deux régions à fortes concentrations

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de Cigognes noires hivernantes, correspondantaux deux voies de migration : une région com-prenant le Sénégal, le sud-ouest du Mali et le sudde la Mauritanie, l'autre région comprenant leBurkina Faso, le sud-est du Mali, le nord duTogo, le Ghana et le Bénin.

La connaissance des sites d'hivernage de laCigogne noire nous a permis de caractériser sonhabitat. Les milieux naturels des quartiers d'hi-vernage sont des savanes herbeuses, arbustivesou arborées, très riches en points d'eau, mares etrivières. En Mauritanie, où le climat est encoresous influence sahélienne, ce sont des steppes oùsurvivent encore quelques baobabs. Lorsque lescigognes arrivent dans leurs quartiers d'hiverna-ge, la saison des pluies est terminée et lesniveaux d'eau dans les oueds et les fleuves sontau plus haut. Au fil de la saison, les oueds s'as-sèchent, laissant en amont des petites mares quidisparaîtront bien vite. Dans celles-ci, de nomb-reux poissons prisonniers sont des proies facilespour les cigognes. Ainsi, suit-elle l'assèchementdes oueds, se rapprochant progressivement desgrands fleuves.

Statut des sites d'hivernage

Une analyse détaillée montre que 70 % des sitesfréquentés par la Cigogne noire correspondent àdes Parcs Naturels ou des réserves cynégétiques.Même si moins de 50 % de ces sites apportentune protection directe aux oiseaux, les accès sontlimités, les oiseaux sont peu dérangés et ne ris-quent pas d'être chassés.

Fidélité aux zones d'hivernage

Les adultes font preuve d'une fidélité manifestepar rapport à leur site d'hivernage. De même ilssont fidèles à leur zone de nidification. Les cigo-gnes montrent donc un comportement territorialdans les deux aires afin de conserver les ressour-ces qu'elles ont trouvées. Les deux années quiprécèdent la reproduction semblent être mises àprofit pour rechercher des sites réunissant tousles aspects nécessaires aux cigognes pour assurerleur survie sans entrer en compétition avec d'au-tres individus. En effet, à la fois dans les quar-tiers d'hivernage et les aires de reproduction, lesjeunes présentent des comportements erratiques.

Gérard JADOUL

Frédéric HOURLAY

Anne-Christelle TOUSSAINT

c/o Gérard JADOUL

Grand’Rue, 12B - 6870 Awenne

[email protected]

Cet article est basé sur les travaux suivants :

HOURLAY, F. (1999) : Suivi des migrations automnaleet printanière de la Cigogne Noire (Ciconia nigra),ainsi que de ses déplacements dans les zonesd'hiver-nage et de reproduction par radiotélémétrie satelli-taire. Mémoire présenté dans le cadre du D.E.S.pour les Pays en voie de Développement (orientationzoologie), ULg, 70 p.

TOUSSAINT, A.-C. (2000) : Suivi de la migrationautomnale de la Cigogne Noire (Ciconia nigra) partélémétrie satellitaire. Mémoire présenté pour l'ob-tention du titre d'ingénieur Industriel, InstitutSupérieur Industriel Huy-Gembloux, 60 p.

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Twenty-seven Black Storks (14 adults, 6 imma-ture and 7 young birds) were captured andequipped with Argos satellite transmitters bet-ween 1995 and 2000. Most birds were capturedduring the pre-migration period, within four dif-ferent regions : province of Luxembourg(Belgium), Côte d'Or, Haute-Marne andArdennes départements (France). We generallydo not know where the storks were from, as theymight have travelled long distances betweenbreeding territories and pre-migration areas.

Argos transmitters weight less than 65 grams foran autonomy of 600 hours. They are program-med to emit continuously from 8:00 to 16:00GMT, everyday during migration and one dayout of five in pre-migration and wintering per-iods. Complete data were not available for all 27birds, particularly during pre-migration and win-tering. But on the other hand, data are quite com-plete during the migration period. For the firststage, from start to Gibraltar, data are completefor 23 birds and for the last stretch, Gibraltar toarrival, for 15 storks.

Four parameters were studied : duration of jour-ney (number of rest days, numbers of activeflying days), distances (daily, maximum, mean,total) and comparison between actual distance ofthe followed route and theoretical distance.

Maps from the Royal Meteorological Institute ofBelgium (I.R.M.) are compared with the beha-viour of the birds especially for rest and long dis-tance days (when a stork travels more than 1,5time the mean daily distance). For those particu-lar days, meteorological data were collected :cloudiness (3 categories : low, moderate, high),development of low cloud (no low cloud, "niceweather" cumulus, other low clouds), differencebetween air temperature and temperature of dewpoint (the lower this difference, the higher the airhumidity rate), strength of wind (4 categories

according to the Beaufort scale (from 1 to 4,there was no higher wind during the time of ourstudy), and direction of wind.

Comparisons of the parameters listed abovewere conducted according to the ages of trackedbirds.

Fall migration

Migration routes

Maps of two individuals, Lena and Guillaume(Fig. 1), show typical routes followed by westEuropean Black Storks. A synthetic map (Fig.2)shows routes of all tracked birds. In France,storks choose a southwest route and the majorityof them cross the Pyrenees at its western end. InSpain, the general direction is from northeast tosoutheast, which is the shortest to Gibraltar. Inthis country, migration routes become morevariable, spread out, as the migration corridorwidens. Once the strait of Gibraltar is crossed,routes gather again in a narrow corridor duringmore than 500 km along a line between Gibraltarand northern Mauritania. Storks cross the AtlasMountains on its western end where they oftenreach an altitude of 4,000 meters. Migration rou-tes begin to diverge between western Mali andnorthern Mauritania where two routes can bedrawn (Fig. 3) : the western one, that ends insouthern Mauritania, Senegal or south-westernMali; and the eastern route, that reaches BurkinaFaso, Togo, Benin and south-eastern Mali.

Flight performances

General pattern

Black Storks travel more than 5000 km duringtheir migration : 2,000 km in Europe and 3,000km in Africa. Eight days of active flight are nee-ded to reach Gibraltar, then 12 days till the win-tering grounds. Therefore, migration takes 20

Study of fall migration of Black Storks (Ciconia nigra)by satellite telemetry

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days of active flight. Nevertheless, the journeylasts about 25 days because the birds stop gene-rally 5 days on average : four days in Europe andone in Africa. Most of rest days take place bet-ween latitudes 36° and 40° north, in southernSpain on a particular, highly frequented place,that is the Guadiana basin, a major stopoverbefore crossing the straits of Gibraltar.

In Europe, birds usually fly 233 km a day onaverage (maximum : 373 km), and in Africa, anaverage of 261 km a day (maximum : 439 km).Mean daily distance travelled is therefore 250km. Time spent in flight is almost the samealthough the birds have to travel a lot greater dis-tance in Africa than in Europe. On the entiremigration journey, the average speed is 37.9km/h.

Influence of weather conditions

Cloudiness (Fig. 4A)Heavy cloudy conditions are associated withmore than 60 % of rest days, but also with 18 %of long distance days. Independence test con-firms that the cloudiness has an influence on theBlack Stork progression.

Presence of low clouds (Fig. 4B)Majority of rest days coincides with low cloudsof "bad weather" types (strato and cumulo-nim-bus). 70 % of long distance flights are achievedwhen there are no low clouds, or with "goodweather" clouds (cumulus types). Test provesthat there is a relationship between the type oflow cloud and migratory performances of BlackStorks.

Difference between air temperature and tem-perature of dew point (Fig. 4C)Most of rest days correspond to differences oftemperatures less than 10°C, and 80% of longdistance days are achieve when those differencesare between 6 and 15°C. Rest days are thereforerelated with rainy or foggy days.

Wind force (Fig. 4D)Wind force was 2 and 3 on the Beaufort's scalefor most of rest and long distance days. Windforce therefore doesn't influence the migrationbehaviour, at least inside the considered range.

Direction of wind (Fig. 4E & 4F)It has a strong impact on the Black Storks' per-formances. During stopover days, wind was inmajority from southeast, and during long distan-ce days, from northeast or northwest. The beha-vior of birds is strongly influenced by weatherconditions. Rest days are associated with a seriesof interrelated conditions : high cloudiness, "badweather" clouds development, winds fromsouthwest and high air humidity.

Influence of age

Comparison of flight performances and age ofbirds shows that adults, immature and youngstorks, realize similar performances duringmigration. Nevertheless, young and immaturestorks tend to make longer distances flightsinterrupted by longer and more frequent stopo-ver. Adults travel that distance in a more constantway : the daily distances are shorter and spreadover a greater number of active fly days. Thisconclusion could be attributed to the lack ofexperience of young birds. Longer daily distan-ces cost them more energy and force them to flyflapping their wings at the beginning and at theend of the day, when thermals are not developedyet. Birds may be forced to stop regularly to fillup calories.

Wintering

Description of wintering grounds

Wintering grounds of Black Storks breeding inEurope are located between 10° and 16° latitudenorth and between isohyets 200 and 1,600 mm(MILICH, 1997). We found two areas with a highdensity of wintering storks, corresponding toboth migration routes : an area including

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Senegal, south-west Mali and south Mauritania;and the other one including Burkina Faso, south-east Mali, north Togo, Ghana and Benin.

The knowledge of the Black Stork winteringsites allowed us to describe its habitat. Naturalhabitats in wintering grounds are grassy, shrubbyor tree-scattered savannah, enriched with water-points, ponds or rivers (BOUSQUET, 1992). InMauritania, where climate is still under theinfluence of Sahel, the wintering quarters aresteppes where few baobabs still survive. Whenthe storks arrive there, the rain season is over andwater levels in oueds and rivers are at theirhighest. With the progression of the dry season,oueds dry out, leaving small pools behind wherethe storks can easily catch fishes, an easy prey bythen. The storks follow the drying of oueds, andfinally come closer to the main rivers (HOURLAY,1999).

Wintering grounds conservation status

70 % of sites used by the storks correspond withNatural Parks or Game Reserve. Even if lessthan 50 % of those sites offer a direct protectionfor birds, accesses are limited, birds are not dis-turbed and are not hunted.

Wintering grounds fidelity

Adults show a real fidelity to their winteringsites, as they do for their breeding sites. BlackStorks show therefore a territorial behaviour inboth areas to preserve their resources. The firstand second years of their existence seem to bededicated to the search of sites that meet all thenecessary features without having to competewith other individuals. As a matter of fact, youngand immature birds show more erratic beha-viours on the wintering and breeding areas.

G. Jadoul