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Rencontres de L'Express Styles avec Tom Ford et Robin Wright qui osent des incursions pour l'un au cinéma et pour l'autre dans la mode.TRANSCRIPT
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RR e n c o n t r e
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Créateur superstar de la fin
du XXe siècle, il fait sensation
à 48 ans en réalisant son premier
film, A Single Man, en salles
le 24 février. Sans renoncer à la
mode. L’Express Styles l’a rencontré.
Ford : Moteur!
Souvenez-vous : c’était en 2003.Une publicité Gucci, photo-graphiée par Terry Richard-son, exhibait en pleine pagede magazines un pubis épiléen forme de G. Le point culminant d’une logomaniaet d’une arrogance assumée
des marques de luxe dont Tom Ford, instiga-teur de cette provocation remarquée et pluslargement du courant « porno chic », est de-venu le symbole vivant. C’est à ce natif d’Aus-tin (Texas) que l’on doit la résurrection, en tan-dem avec Domenico De Sole, de la griffeitalienne moribonde et engluée dans des affaires familiales au début des années 1990.Directeur créatif du Gucci Group, il a dans lafoulée pris les commandes du prêt-à-porterd’Yves Saint Laurent pendant quatre ans, avantde décider de se retirer en avril 2004 de la viemodeuse dans un coup d’éclat, suite à des dés-accords avec l’actionnaire principal, PPR. Bienplus, il est l’auteur du basculement de la modedans l’ère de l’image globale, du créateur su-
perstar qui ne dessine pas mais donne des « inputs » à ses équipes, les yeux rivés sur lescourbes de ventes. Avec succès : celles du GucciGroup sont passées de 230 millions de dollarsen 1994 à 3 milliards de dollars en 2003.
Sept ans plus tard, les logos sont rentrés àl’intérieur des sacs, la crise est passée par làet même les couturiers les plus flamboyantsparlent de nouvelle modestie. Et Tom Forddans tout ça ? Le voici, à 48 ans, qui reçoit detoute sa superbe, affable et tout sourire, dansune suite de l’hôtel George-V, costume de ca-chemire gris (« 35 heures de travail… ») etboots en croco vernis de son cru, en pleinepromo de son premier long-métrage, A Sin-gle Man, inspiré d’un roman de ChristopherIsherwood. « J’ai lu tous les scénarios en cir-culation à Hollywood et beaucoup de gensm’ont envoyé ceux qu’ils imaginaient pourun créateur de mode : esthétisants mais sansâme. Or le style sans substance, je peux le fairedans la mode. Je ne trouvais rien et je me suissouvenu de ce livre, que j’avais lu à l’âge de20 ans, et qui, vingt-cinq ans plus tard, a prisun relief totalement différent. L’histoire d’unhomme en pleine crise de la quarantaine quin’arrive pas à voir son futur. Ça m’a parlé etj’ai eu l’intuition que c’était le bon choix. »Résultat, l’homme qui a fondé en 2005 sa so-ciété de production Fade to Black et financéen grande partie son film a su fédérer autour de son projet un casting 5 étoiles : Colin Firth, la sublime Julianne Moore, Mat-thew Goode – remarqué notamment dansMatch Point, de Woody Allen – et le tout jeune Nicholas Hoult, lumineuse révélation qui vientde tourner Le Choc des Titans, au côté de RalphFiennes. Et depuis sa présentation à la ���
Tom Ford sur le tournage de son premier film. « Techniquement, je me suis senti très à l’aise parce que,dans la mode, j’ai travaillé avec de grands photographes. »
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Tom Ford : moteur !
Mostra de Venise, récompensée par unprix d’interprétation masculine pour ColinFirth, le film enchaîne les nominations, en attendant le verdict des Oscars, le 7 mars.
Une reconversion gonflée qui n’a pas fait ciller le monde de la mode, tant le person-nage au nom prédestiné et au physique sansaspérités de jeune premier (adolescent, il afait l’acteur dans des sériestélé) n’a jamais caché songoût pour le 7e art. A son pan-théon cinématographique, ilinscrit son premier émoi,Le Magicien d’Oz, Vertigo de Hitchcock, les films de Kubrick, de De Sica et d’Anto-nioni ou, plus récemment, Le scaphandre et le papillonde Julian Schnabel. «Techni-
quement, je me suis senti très à l’aise parceque, dans la mode, j’ai travaillé avec de grandsphotographes comme Irving Penn, RichardAvedon, Helmut Newton, Mario Testino, Ste-ven Meisel… J’ai dû apprendre quelques trucssur la caméra, mais j’avais acquis au fil desannées le sens du cadre et de la narration. »Et derrière l’esthétique ultra-léchée de A Sin-gle Man qui peut agacer – de la moquette mielau brushing laqué de Julianne Moore trans-posant l’American way of life des années 1960avec le perfectionnisme quasi obsessionnelqu’on lui connaît – on se laisse toucher parl’histoire de George, qui donne une intensitésensible à chaque rencontre d’un jour qu’ilvoudrait voir le dernier, dévasté par la mortde son compagnon. « Le thème de l’homo-sexualité n’a pas été décisif : c’est une histoire
universelle sur l’isolement etla perte d’un être cher. Le li-vre a beaucoup fait parler àsa sortie, en 1964, parce quec’était la première fois qu’unauteur traitait de l’homo-sexualité d’une façon trèsnormale. Sa représentationau cinéma est souvent bour-rée de clichés et j’ai voulu évi-ter ça. Pour ma part, je suis
“Ma mode révèle aussi
ma personnalité,mais en surface”
Sur le tapis rouge,au dernier Festival
de Venise, Tom Ford et les
acteurs de A SingleMan, Julianne
Moore (ci-contre etci-dessous) et Colin
Firth, qui reçut le prix
d’interprétationmasculine.
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très à l’aise avec ma sexualitéet, si je devais lister dix chosesqui me définissent, être gayn’en ferait pas partie. » Si,dans sa vie privée, M. Ford af-fiche la stabilité d’une rela-tion de vingt-trois ans avecRichard Buckley, ex-rédac-teur en chef de Vogue HommeInternational, c’est sur le ter-rain professionnel, en quit-tant Gucci Group, qu’il a sentice glissement abyssal qui fait vaciller la per-ception. Sans parler des attaques qui ont conti-nué d’aller bon train sur sa vision créativede l’intouchable mythe Yves Saint Laurent,lui le Texan habitué au marketing. « J’ai changécomplètement ma vie en décidant d’inter-rompre ma carrière. J’ai vécu ça violemment,comme un divorce, voire une mort. Arrivé àun certain point, se demander dans quelledirection on veut aller est un passage obligé :cela me rapproche du personnage interprétépar Colin Firth. Maintenant, je me sens trèsbien : j’ai réalisé un film et j’ai ma propre griffede mode et de parfums. »
Car, excepté cette année de remise à zérodes compteurs – psychanalyse et nombreuxséjours dans son ranch refuge de Santa Fe àl’appui – Tom Ford n’a jamais renoncé à lamode. En avril 2005, un an précisément aprèsson départ du Gucci Group, il annonçait lelancement de la marque Tom Ford, accom-pagné à nouveau par Domenico De Sole. Encommençant par des lunettes et par une lignede parfums avec le groupe cosmétique EstéeLauder, dont le plus connu, Black Orchid, n’estpas sans entraîner dans son sillage le style àforte charge érotique qui a fait son succès. De-puis 2006, il crée également une collection devêtements et d’accessoires masculins ultra-luxueux, fabriqués par le groupe italien Ermenegildo Zegna, avec sa principale bou-tique sur Madison Avenue, à New York. Unestratégie step by step qui tranche avec ses mé-thodes bulldozer d’antan et fait monter le dé-sir de celles qui rêvent de se reglisser un jourdans ses fourreaux vertigineux. « Je prépare
pour bientôt mon retour dansla mode féminine, mais je neveux plus du rythme effrénédes défilés. Créer pour lesfemmes me passionne, onpeut y exprimer un point devue sur la culture contempo-raine. La mode homme re-pose avant tout sur un soucide qualité et de service », af-firme ce diplômé du dépar-tement architecture de la Par-
sons School of Design de New York, qui affichesur sa biographie un chiffre record de 23 prixde mode décernés par ses pairs. Reste que,en mettant en balance vingt ans de mode etun long-métrage, Tom Ford n’hésite pas : « Cefilm est la chose dont je suis le plus fier detoute ma carrière et la plus intime, car c’estplus facile de faire son introspection en se pro-tégeant derrière la fiction. Ma mode révèleaussi ma personnalité, mais en surface. AvecA Single Man, c’est la première fois que je peuxparler vraiment de moi : au fond, même sibeaucoup de gens ne veulent pas le croire, jesuis très timide et j’ai dévoilé mes sentimentsà cinq personnes au plus dans ma vie. D’ici le prochain, dans deux ou trois ans, je peux retourner dans ma coquille ! » �
Anne-Laure Quilleriet
“Ce film est la chose dont je suis le plusfier, et la plus
intime.”
Bio27 août 1961
Naissance à
Austin, Texas.
1990 Créateur
de la ligne femme
de Gucci.
2000 Directeur de
la création d’Yves
Saint Laurent
Rive Gauche,
d’YSL Beauté
et de Gucci.
2004 Démissionne
du Gucci Group.
2005 Lance la
marque Tom Ford.
2009 Présentation
à Venise de
A Single Man,
son premier
long-métrage.
Ci-dessous, des créations Tom Ford, avecl’eau de parfumJasmine Musket, à gauche, un modèle homme printemps-été 2010.
Ci-contre, Tom Ford
à 17 ans, en 1978, et aujourd’hui.
R e n c o n t r eR
Robin Wright
Bouleversante dans Les Vies
privées de Pippa Lee, de Rebecca
Miller, la comédienne vient de
tourner sous la direction de Robert
Redford. En exclusivité, elle
se confie en toute intimité.
“J’ai repris ma vieen main”
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Il est 2 heures du matin à Paris. Le téléphonesonne, enfin : « Hiii ! It’s Robin ! » La voix est swinguante, joueuse. De sa maison, à Santa Monica, au bord de l’océan, Robin la magnifique, nouvelle égérie de Gérard Darel, a choisi de se raconter à L’Express Styles : sa nouvelle vie, sa passion pour la France, ses projets... Elle aborde tous les sujets. A l’excep-
tion de Sean Penn, son ex-mari.
Comment s’est passée votre rencontre avec Robert Redford et qui est cette femme mystérieuse que vous incarnez dans Le Conspirateur (sortie en août 2010) ?� J’ai joué avec Redford il y a neuf ans, dans Le Dernier
Château. J’étais sa fille… Je n’aurais jamais cru pouvoirdevenir sa muse ! [Rires.] Dans le film, j’incarne une ca-tholique, Mary Surratt, impliquée dans la conspiration quientraîna l’assassinat du président Lincoln. Elle fut la pre-mière femme exécutée aux Etats-Unis. On a tourné en cos-tumes d’époque. Robert se baladait au milieu de décorsde la guerre de Sécession, dégaine d’ado, jean et casquetterouge. Sa vision du personnage était très moderne : unefemme refoulée, dont la foi en Dieu s’était muée en un dé-sir quasi mystique pour son jeune avocat. Rien ne se passeentre eux, mais certaines scènes débordent d’érotisme.
Nouvelle égérie de la marque Gérard Darel,
ici photographiée par Peter Lindbergh.
Au Festival de Cannes 2009, lors de la présentation des Vies privées de Pippa Lee, vous étiez rayonnante, si sûre de vous…� Je me sens plus légère, plus libre. Je suis passée à unautre chapitre de ma vie. J’ai toujours donné la prioritéà ma famille et à l’éducation de mes enfants, avant macarrière. Je ne voulais pas qu’ils soient élevés par unenounou. Maintenant, ils sont grands. Ma fille, Dylan,18 ans, vient d’entrer à l’université. Elle a un vrai talentpour l’écriture. Hopper a 16 ans et il habite avec moi.C’est un guitariste fabuleux. Un jour, je leur ai dit : Vousavez régi ma vie pendant toutes ces années… A pré-sent, c’est moi que je vais prendre par la main ! On m’asouvent fait remarquer qu’il y avait des points communsentre Pippa Lee, l’héroïne du film, et moi : elle incarneune femme modèle, mère de deux enfants, muse et épousedévouée qui vit à l’ombre de son mari. A 50 ans, elle seréveille enfin, décidée à s’écouter plutôt qu’à se confor-mer. Mais je ne suis pas Pippa, qui est tout de même unpeu fêlée !Maintenant que votre vie vous appartient, de quoi avez-vousenvie ?� De me surprendre ! Je songe à un projet depuis six anset, là, je veux le faire pour de vrai. Il s’agit d’un docu-mentaire sur les horreurs qui se passent au Congo, oùdes milliers de femmes sont violées tous les jours parles milices. J’ai vu un reportage dans lequel une Congo-laise demandait à un jeune soldat : « Pourquoi faites-vousça ? » Sa réponse m’a glacée. Il a expliqué qu’ils utilisaientles femmes comme des armes de guerre. Qu’en les vio-lant ils anéantissaient leur puissance. Il a ajouté : « Nouscraignons qu’autrement les femmes ne puissent gou-verner le pays, et même le monde. » Je veux réaliser moi-même ce court-métrage, interviewer des soldats, desCongolaises, des membres de Médecins sans frontièresqui les aident…Vous avez toujours été une actrice très exigeante, refusé desblockbusters comme Jurassic Park ou Batman… A qui dites-vous oui aujourd’hui ?� Je rêve de jouer le rôle de Romy Schneider dans un re-
make de La Piscine tournépar Yvan Attal, qui m’a di-rigée dans New York, I LoveYou, mais, pour le moment,je ne peux rien dire de ceprojet. Ce que je désire leplus aujourd’hui est de mefondre dans un person-nage, sans qu’il reste tracede Robin Wright quand on regarde le film. J’y suisrarement parvenue : dansLe Conspirateur et dans She’sSo Lovely [avec Sean Penn].J’espère y arriver avec le réa-lisateur israélien Ari Fol-man : je tourne avec lui ladeuxième partie de Valseavec Bachir. Ce sera mi-ani-mation, mi-réalité. Je serai un personnage de cartoon !Qu’est-ce qui vous lie à la France ?� J’ai commencé à gagner ma vie à Paris comme man-nequin. J’avais 16 ans et j’habitais à la Muette. J’ai adoré,mais ça n’a duré qu’une année. J’aimerais retourner vivre à Paris pour quelque temps mais, cette fois-ci, ceserait au bord de la Seine. Je voudrais voler un peu decette classe innée que possèdent les Françaises : leurfaçon de porter un verre de vin à la bouche, de dégus-ter la vie, de prendre leur temps pour choisir une robeou une pomme au marché. D’ailleurs, l’une de mesmeilleures amies est Charlotte Gainsbourg : la grâce etl’élégance… J’ai accepté de devenir l’égérie de GérardDarel parce que je me sens à l’aise dans ce style dé-pouillé, sensuel, subtil, où la femme est tellement miseen valeur que l’on finit par oublier le vêtement. Le shoo-ting avec Peter Lindbergh a été la cerise sur le gâteau :j’ai rarement été aussi moi-même devant un objectif.En regardant les clichés, je me suis même trouvée trèsfrançaise ! � Paola Genone
M E S F I L M S
Par effractionD’Anthony Minghella(2006), avec Jude Law.
Forrest Gump De Robert Zemeckis
(1994), avec Tom Hanks.
She’s So Lovely De NIck Cassavetes
(1997), avec Sean Penn .
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Membredu jury
au festival deCannes 2009
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