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www.cmoblat.ca www.omi-qc-on.com Solidarités et engagements d’hier à aujourd’hui Témoin d’une compassion qui agit Vol. 6, no. 2 Mai 2017 « Savez-vous quand la nuit est finie et le jour vraiment levé?», demande un rabbin. « C’est quand vous pouvez regarder le visage de n’importe quel être humain, et reconnaître que c’est là votre sœur, votre frère. Tant que vous ne pouvez pas voir cela, c’est encore la nuit pour vous. » (Récits et paraboles de vie de Pierre Mourlon Beernaert s.j.) Illustraon : Eduardo Malpica

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Page 1: Solidarités et engagements · Vol. 6, no. 2 Mai 2017 « Savez-vous quand la nuit est finie et le jour vraiment levé?», demande un rabbin. « C’est quand vous pouvez regarder

www.cmoblat.ca www.omi-qc-on.com

En missionSolidarités et engagements

d’hier à aujourd’hui

Témoin d’une compassion qui agit

Vol. 6, no. 2Mai 2017

« Savez-vous quand la nuit est finie et le jour vraiment levé?», demande un rabbin. « C’est quand vous pouvez regarder le visage de n’importe quel être humain, et reconnaître que c’est là votre sœur, votre frère. Tant que vous ne pouvez pas voir cela, c’est encore la nuit pour vous. » (Récits et paraboles de vie de Pierre Mourlon Beernaert s.j.)

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Bulletin trimestriel En missionISSN 2292-6941 (imprimé)ISSN 2292-695X (en ligne)

Éditeur :Centre Missionnaire Oblat (CMO)

Communications et infographie :Eduardo Malpica

Comité de rédaction :Ariane Boyer Roy, Eugène Lapointe, o.m.i., Raymond

Marquis, o.m.i., Réjean Mathieu, Ali C. Nnaemeka, o.m.i., Luc Tardif, o.m.i., Réjean Vigneault, o.m.i.

Correction :Ariane Boyer Roy, Eduardo Malpica

Impression : Expédition :Imprime-Emploi DXP Postexperts

Chères lectrices, chers lecteurs,

Et si l’amour était le plus fort? est une question que le P. Bernard Ménard o.m.i s’est toujours posée. En 2001, il a publié un livre* au Québec qui porte comme titre cette même question. Il nous interroge, car il ne souhaite pas donner des réponses. Il souhaite plutôt guider. Le texte se veut en effet un livre-outil. On ne nous demande pas de lire d’une seule traite, car « la Parole livre ses secrets à qui prend le temps d’écouter, en conversation prolongée et répétée. »

Le P. Gustave Pelletier o.m.i., lui, a écouté. En 1995, il a réfléchi sur son ex-périence missionnaire de vingt ans en Bolivie dans les pages de l’Apostolat International*. Dans cette terre de mission, une réponse à cette question lui a été révélée. L’amour était effectivement le plus fort et il le nomma « amour vrai ». Aujourd’hui, les volontés de suivre les traces de cet amour sont toujours ancrées dans le présent et assurent de futurs engagements comme celui du pré-novice oblat Joey Methé.

La solidarité n’a définitivement pas de frontières. Elle se dresse ici comme ail-leurs devant les injustices et les inégalités. Elle est parfois reçue comme un appel doux; d’autres elle se manifeste par un réveil brutal. Dans les deux cas, c’est un appel à l’action qui doit se réaliser : poser des gestes libérateurs face à une réalité inique. Les peuples autochtones peuvent en témoigner largement.

Enfin, la solidarité a aussi besoin de réflexion. Comment peut-elle se déployer au niveau local? Au moment de mettre En mission sous presse, Ariane Boyer Roy, directrice du CMO, participe à un voyage missionnaire sur la Côte-Nord et en solidarité avec les Innus et les Oblats de la région. Le périple se pré-sente comme une opportunité pour tisser des liens et tracer des ponts avec

ces acteurs.

Nous disions que l’amour est le plus fort, et il l’est à condition de continuer à écouter et de voir dans l’Autre la possibilité d’un monde meilleur. Bonne lecture! Bonne saison estivale!

Eduardo MalpicaCoordonnateur des

communications et de la collecte de fonds au CMO

*Voir en page de couverture

En mission, mai 2017 - Vol. 6, no. 2

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Avec la remontée du populisme en Occident, il est plus important que jamais de s’engager et de militer pour la justice sociale. Contrer ce phénomène est primordial, car le populisme entraîne l’injustice; surtout parmi les gens les plus vulnérables de notre société. Pour moi, s’engager aujourd’hui dans les mouvements de justice sociale, c’est suivre Jésus. Voilà pourquoi, depuis dix ans, je m’implique dans ces luttes.

De mon côté, mon implication s’est surtout manifestée dans le mouvement étudiant lorsque je fus élu président de mon association étudiante à l’Université Laurentienne à Sudbury (Ontario) en 2008. En voyant les frais de scolarité augmenter (et qui continuent d’augmenter aujourd’hui), je voyais de plus en plus d’étudiants cumuler deux ou trois emplois pour boucler les fins de mois. La pauvreté est une dure réalité que beaucoup d’étudiants doivent endurer. De plus, leurs dettes les suivent en moyenne entre cinq et dix ans. J’ai pu vite constater que ce milieu est presque un microcosme de la société à venir. En effet, la pauvreté et l’endettement massif des étudiants nous donnent un aperçu des inégalités qui sont présentes partout dans notre société et nous permettent aussi de faire un constat assez éloquent  : nous vivons dans une société où les riches s’enrichissent davantage et les pauvres croupissent devant les dettes.

En étant solidaires entre nous, nous avons la possibilité de mieux lutter contre ces injustices. Par contre, un problème que j’ai facilement pu identifier parmi ces mouvements est un manque de fondement spirituel. Les militants qui luttent en raison de leur foi (ou spiritualité) font preuve d’une plus grande profondeur dans leurs convictions. Leurs revendications sont effectivement plus solides, car leur foi est au centre de leur projet. De mon côté, c’est Jésus, le solidaire des plus vulnérables et souffrants, qui est au coeur du mien. C’est une façon de répondre à son appel d’aimer nos prochains. Alors, il ne faut surtout pas se décourager, car si nous continuons à lutter et si nous continuons d’avoir la foi, je crois fermement que nous pouvons construire une société plus solidaire.

Joey Methé, pré-novice oblat

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Cliché pris lors d’une manifestation à Ottawa revendiquant la réduction de frais de scolarité

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P. G u s t a v e P e l l e t i e r M é t i e r : m i s s i o n n a i r e

En mission, mai 2017 - Vol. 6, no. 2

Une société solidaire, le P. Gustave Pelletier o.m.i. en sait quelque chose. Il en a fait l’apprentissage au moyen d’une expérience vécue dans sa propre chair de l’oppression et de la domination des puissants sur les « éternels oubliés » de l’histoire. La mission du P. Pelletier est en effet le récit d’une renaissance : « les pauvres m’ont mis au monde une deuxième fois », affirme-t-il. Chronique sur la mission du P. Gustave Pelletier en terres boliviennes.

Le P. Pelletier est devenu mission-naire à 45 ans. C’était en 1970. Après 15 ans à œuvrer comme économe au grand séminaire d’Ot-tawa, on lui a demandé : « as-tu pensé à ta réorientation? » « Oui, je voudrais aller en Bolivie », a-t-il répondu du tac au tac. Et il est parti et y a passé vingt ans. Le P. Pelletier

avait une idée en tête : « évangéliser et convertir ces pauvres Indiens.» Il

ignorait totalement les défis qui l’attendaient et la transformation qu’il allait subir. Le pays vivait des temps politiques mouvementés : la dictature militaire battait son plein et le P. Pelletier, lui, intégrait à sa vie langue et culture, mais aussi connaissance sociale : l’historie des mines et ses enjeux. La transforma-tion commençait. Un événement viendra l’accélérer.

Les militaires sont entrés chez lui et l’ont emprisonné avec seize autres mi-neurs. Rien ne justifiait sa détention sauf le fait d’habiter le même bâtiment où fonctionnait la Radio Pie-XII qui était, selon le régime, subversive. En pri-son, impuissant et maltraité, le P. Pelletier faisait l’expérience de l’oppression des « perdants ». Lui qui avait toujours été un gagnant, il perdait devant les fusils des tortionnaires. Il en gagnait par contre en solidarité. Il allait trouver ce qu’il avait tant cherché pendant longtemps : « En prison avec les autres détenus, je me suis laissé initier à la solidarité des pauvres entre eux. Avec eux, j’ai partagé mes sentiments d’impuissance. Ils m’ont écouté et compris. Je suis passé alors de la pitié à l’amour vrai pour eux. En prison, j’ai rencontré le Christ vivant, dans le monde. Je l’avais beaucoup cherché ailleurs, mais il était ici, dans mes frères opprimés. »

Plusieurs autres épisodes confirment sa rencontre avec le « Christ vivant. » Il y est question de sacrifices et de solidarités. C’est la Bolivie qu’a connue le P. Pelletier. D’autres Oblats sont aussi passés par cette expérience et au-jourd’hui, au Québec, ils s’engagent à réparer des injustices et à réconcilier des collectivités.

Eduardo Malpica, coordonnateur des communications au CMO

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À droite, le P. Pelletier, o.m.i., accompagné du P. Robert Durette o.m.i., portant solidairement un casque de mineur bolivien dans les années 1980

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J’avais 18 ans quand j’ai découvert un Jésus engagé. Pas le Jésus doucereux ou pointilleux des images pieuses ou des sermons du dimanche. Un prêtre français, Pierre Thivollier, avait intitulé ses récits d’Évangile, Le Libérateur, avec, en couverture, le dessin d’un Jésus militant passionné.

Cinquante ans plus tard, j’ai écrit Et si l’amour était le plus fort? – récits bi-bliques pour nos temps de questionnement et d’espérance. Une lecture enga-gée de l’aventure du Nazaréen et des premières communautés de « disciples de la Voie », ces chrétiens qui sont en chemin tout comme leur Maître. Les 300 illustrations permettent de le reconnaître agissant dans le quotidien des personnes et des sociétés d’aujourd’hui.

Dans ma 84e année, me voilà engagé dans un grand rassemblement où les Premières Nations et les gens arrivés au pays depuis 4, 40 ou 400 ans (nous sommes tous des immigrés!) vont se RENCONTRER. Pourquoi? Pour se mieux comprendre, s ’a p p r é c i e r, porter en-semble dans la prière les cris et les espoirs des popula-tions autoch-tones souvent objet de discri-mination.

Qu’est-ce qui m’a travaillé le cœur tout au long de ce chemine-ment? La dé-couverte d’un Jésus incarné dans la réa-lité sociale de son temps, et contestataire des pratiques religieuses qui écrasaient le

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S u r l e s t r a c e s d ’ u n J é s u s e n g a g é

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peuple et masquaient le vrai visage de Dieu. Cette découverte est devenue une passion, nourrie par mes engagements en milieu populaire de Montréal et du Vieux-Hull et par mon travail durant sept ans à L’Arche, auprès des personnes vivant avec un handicap intellectuel. J’ai aussi accompagné des couples homosexuels et des prisonniers. Et aujourd’hui je suis engagé dans cette recherche d’authentique réconciliation avec les peuples qui nous ont accueilli chez eux et que nous avons peine à endurer sur les territoires que nous avons déclaré être chez nous.

Y a-t-il, dans la condition des personnes marginalisées, quelque chose qui nous dise l’Évangile de façon unique? À en croire le pape François, oui — lui qui nous renvoie sans cesse dans les périphéries et qui conteste vigoureuse-ment les privilèges des fonctionnaires haut gradés de l’Église. À l’origine d’un engagement social, il y a un regard, une prise de conscience de la situation vécue par d’autres humains. De nos jours, il faut invoquer trois nouveaux saints : S’INformer, S’INdigner, S’IMpliquer. Sans cette information ni cette indignation, on ne tiendra pas dans une implication qui mène au changement essentiel. La règle des Oblats (art.4) précise : « À travers le regard du Sauveur crucifié nous voyons le monde. » En effet, nous voyons à la fois les crucifiés de notre temps et les pouvoirs civils ou religieux qui les gardent en cet état.

Une question se pose : la véritable solidarité est-elle possible dans le contexte où nous, les Occidentaux, sommes venus ici coloniser et faire des convertis à la foi chrétienne? La religion n’est-elle pas un obstacle à un projet d’alliance où chaque culture est pleinement valorisée? Même si les colons venus de France avaient le mandat d’établir des alliances plutôt que de s’emparer des ressources, il est clair que nous avons exercé, surtout sous le régime britan-nique, une domination. Et la manière de vivre la mission à cette époque lais-sait peu de place aux croyances et rituels des Premières Nations. Il était donc essentiel de laisser exprimer les blessures du passé et d’admettre de graves erreurs. Il est tout aussi important de reconnaître les apports d’un grand nombre de missionnaires à la préservation des langues autochtones. Et l’ap-proche de la mission prônée par Vatican II reconnaît les traces de l’Esprit en toute tradition qui loue l’œuvre du Créateur et l’harmonie entre les humains.

Tout bien considéré, le dépouillement que nous vivons présentement se des-sine comme le passage obligé pour qu’« Amour et Vérité se rencontrent, Jus-tice et Paix s’embrassent » (Ps. 84,11).

Bernard Ménard o.m.i.

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Melissa Mollen Dupuis est Innue et originaire d’Ekuanitshit sur la Côte-Nord. Engagée dans le mi-lieu culturel et communautaire autochtone, elle a co-fondé en 2012 la section québécoise d’Idle No More [Fini l’aphatie]. Le but : rompre avec la torpeur et la passivité ambiantes en po-sant des actions concrètes face aux politiques gouvernemen-tales fédérales. Très active dans ses débuts, la « mouvance » est aujourd’hui dans l’attente. « À cette époque-là, on a semé des graines. Aujourd’hui, on attend les arbres, ensuite les fruits », affirme-t-elle.

D’après votre expérience, comment définissez-vous la notion de solidarité et d’engagement? Pourquoi s’engager aujourd’hui?

Je pense que s’engager n’a jamais été autant nécessaire que maintenant. Cela vient du fait que les gens de la communauté dans un sens large n’ont jamais été aussi séparés. On a une tendance à se diviser par nos opinions politiques, nos goûts, etc. Même au niveau des réseaux sociaux, on crée des groupes avec des personnes qui ont les mêmes opinions, alors qu’une communauté n’est pas créée seulement de gens qui ont uniquement la même histoire, ou les mêmes opinions, la même origine ethnique, la même identité. Cette solidarité est par conséquent le besoin de reconnaître qu’une communauté n’est jamais homogène, mais malgré cela ses membres travaillent, vivent ensemble et créent la société dans laquelle ils sont ensemble.

Comment avez-vous fait pour mobiliser des gens au Québec?

La problématique du mouvement Idle No More vient du Canada anglais, mais en tant qu’Autochtone, on n’a pas choisi qui nous colonisait à l’époque. On sait bien que la colonisation s’est faite par les Français ici et, dans le reste du Canada, par les Anglais. Cela a malheureusement causé une séparation linguistique entre groupes autochtones. Alors, ce qui se passait dans les com-munautés dans l’ouest avait de la difficulté à se rendre dans les communau-tés francophones. Nous avons donc commencé par traduire des textes, infor-mer et renseigner les Autochtones sur la direction que prenait la mouvance.

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L’utilisation des réseaux sociaux ont fortement contribué à la mobilisation de la mouvance citoyenne

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Cela a été aussi fait avec les non-Autochtones. Nous suivons ainsi l’idée de réconciliation issue de la Commission de Vérité et Réconciliation (2015) : informer les deux communautés au moyen de l’éducation populaire. Nous avons commencé par une question : « est-ce que vous connaissez les onze nations? » Personne n’en connaissait. On associait les Autochtones à des images du passé. Dans ce contexte, l’éducation populaire a permis de connaître les onze nations. On les a aussi informé sur les politiques d’assimi-lation. Ils répondaient : « J’ignorais que les pensionnats ont été faits à mon nom. » Ils ne savaient même pas qu’ils ont existé! Nous avons ainsi pu discu-ter de colonisation et de racisme systémique.

En ce qui concerne les moyens de mobilisation, qu’est-ce qui distingue Idle No More d’autres groupes sociaux?

Nous ne sommes pas un groupe organisé au même titre qu’une organisation sociale ou politique. Nous sommes plutôt une mouvance. On a voulu garder cette forme-là chez Idle No More – Québec. Il y a déjà des politiciens autochtones dans les questions autochtones et des activistes qui font beaucoup de travail de terrain, mais il manquait la flexibilité de pouvoir agir rapidement de façon consensuelle et démocratique entre les membres sans avoir à se préoccuper des structures politiques ou encore de payer des loyers pour des locaux. Cela nous donne la possibilité de nous prononcer sur la scène publique au moyen de la mobilisation et par la revendication de la justice de base, tout en gardant une structure non-raciste, anticolonialiste et pour la justice sociale dans la mobilisation pacifique. Aussi, on s’est réapproprié des modes de communication. Avant, pour attirer l’attention des médias il fallait bloquer des routes et des ponts, mais aujourd’hui grâce à Facebook et Twitter, on s’est organisé de façon consentie d’un océan à l’autre.

Quelles sont les revendications que vous mettez de l’avant actuellement?

Premièrement, la protection de l’eau face aux sables bitumineux. Les droits des femmes autochtones, aussi. Présentement, il y a la commission d’enquête sur les femmes autochtones disparues et assassinées qui est entamée. L’accès à l’éducation pour les enfants autochtones dans les communautés est également revendiqué. Ce sont là des droits humains de base, c’est-à-dire qu’on soit Autochtone ou non-Autochtone, il s’agit des droits dont nous tous devons jouir au Canada, mais malheureusement, quand tu es Autochtone, tu fais partie des premiers groupes dont ces droits sont brimés. D’autre part, on s’oppose à l’extractivisme canadien ici et ailleurs dans le monde. L’exploitation des ressources naturelles n’est définitivement pas la manne. On voit souvent que ce sont les communautés pauvres et vulnérables qui en souffrent les premiers ici comme ailleurs. Il est donc question d’une solidarité entre êtres humains que nous devons également pratiquer.

Cette entrevue a été réalisée par Eduardo Malpica, coordonnateur des communications au CMO. Elle a été éditée et condensée.

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Depuis 2008, le CMO fait partie d’un réseau internatio-nal d’organisations impliquées dans la collecte de fonds pour soutenir des projets réalisés par des Oblats partout à travers le monde. Ces organisations sont basées dans une multitude de pays : Allemagne, Australie, Canada, États-Unis, Irlande, Italie et Pologne. Elles se réunissent sur une base an-nuelle pour coordonner leurs efforts, favoriser la circulation d’informations et partager leurs meilleures pratiques en matière de collecte de fonds. Dans les dernières années, les participants ont incorporé à leurs réflexions un souci particulier pour l’autonomisation des partenaires oblats et la pérennité des activités qu’ils réalisent localement.

Devant l’utilité et le succès de ces efforts de concertation, les organisations membres du groupe ont manifesté en 2016 le besoin de passer à un niveau supérieur de solidarité envers leurs partenaires. L’idée est d’élargir le réseau actuel et d’y inclure des représentants des pays qui reçoivent l’aide financière des collecteurs de fonds. En incluant les Oblats de ces pays dans leurs discus-sions, les collecteurs de fonds pourront plus facilement connaître les attentes de leurs partenaires et les inclure dans leurs réflexions lors de la prise de décisions. Ces partenaires, œuvrant aussi dans la collecte de fonds à l’échelle locale, en ont aussi certainement à nous enseigner à ce chapitre.

Un groupe de travail, dont fait partie le CMO, se penche actuellement sur cette question. À travers sa démarche, le groupe est à l’écoute de mission-naires originaires de chaque continent, dont l’opinion orientera la manière dont se dessinera ce nouveau réseau étendu. En matière de solidarité inter-nationale, les relations traditionnelles Nord-Sud doivent être repensées. Les nouveaux outils technologiques permettent aujourd’hui le développement de solidarités Sud-Nord et Sud-Sud. Ces solidarités enrichiront nos réflexions et nous permettront de remplacer les dynamiques traditionnelles de dépen-dance par une nouvelle interdépendance de tous les acteurs impliqués.

Ariane Boyer Roy, directrice générale du CMO et responsable des projets

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Les participants à la rencontre annuelle de 2016 à Toronto

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En mars dernier, le P. Alfred Ravelomampisandraibe, o.m.i., s’est présenté depuis Maliotenam à nos lecteurs. Il nous avait parlé de son ordination et sa mission à Madagascar. Dans le texte ci-dessus, il va nous entretenir sur son obédience en territoire autochtone québécois.

J’ai reçu mon obédience par le Provincial de la Province Notre-Dame-du-Cap, P. Luc Tardif o.m.i. Je devais partir travailler avec les Autoch-tones dans les réserves de Maliotenam et d’Uashat. Dans un premier temps, j’ap-prends la langue et la culture innue. Je suis des cours d’innu trois fois par semaine

avec madame Noella McKenzie qui est une femme d’origine innue et possède également une bonne connaissance de la langue. Cela me permet d’acquérir une bonne base. En effet, j’arrive tant bien que mal à célébrer les messes en innu et, progressivement, j’arrive à saisir quelques mots lorsque j’entends les gens parler. La langue est très importante. La majorité des gens de la commu-nauté ainsi que les aînés parlent innu et en sont très fiers. Pourtant, je trouve surprenant que lorsque les parents parlent en innu avec leurs enfants, eux, ils répondent toujours en français.

Sur le plan pastoral, la culture peut se manifester aussi dans le sacrement du baptême. Les parents habillent leurs enfants dans un habit traditionnel innu. Le baptême d’un nouveau-né dans la famille est une occasion de rassemble-ment. Certains membres de la famille peuvent effectuer de longs voyages pour honorer cet événement de leur présence. Je considère ce geste des parents comme un véritable acte de foi.

En tant que missionnaire, je pense qu’il est nécessaire d’être disponible à vivre dans une communauté innue pour apprendre la langue et également être solidaire avec eux et ouvert à la culture et aux personnes de cette com-munauté. Il s’agit surtout d’établir des relations de fraternité et d’amitié dans lesquelles chaque personne se sentira valorisée. En adoptant cette attitude, le missionnaire peut partager et témoigner de la richesse de sa relation avec le Seigneur. Ce sont les raisons pour lesquelles j’ai visité toutes les commu-nautés de cette Première Nation. Je vous en parlerai davantage dans ma pro-chaine chronique.

P. Alfred Ravelomampisandraibe o.m.i., missionnaire à Maliotenam

En mission, mai 2017 - Vol. 6, no. 2

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Le P. Alfred et sa professeure d’innu, Noella McKenzie

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GATINEAU, QCMme Madeleine Trudel-Villeneuve

ILES-DE-LA-MADELEINE, QCM. Paul-Émile Cyr

LONGUEIL, QCSr. Odette Bertrand, snjm

RICHELIEU, QCP. Lionel Goulet o.m.i.

F. Gilles Lemire o.m.i. P. Normand Harvey o.m.i. P. Léo Cantin o.m.i. P. Robert Bergeron o.m.i.

TROIS-RIVIÈRES, QCMme Chantal Lanneville

VAL-DES-MONTS, QCMme Rollande Clément

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Le sacerdoce baptismal

L’article de Sabrina Di Matteo (En mission, mai 2017) décrit une réalité : la Mission de la femme dans l’Église est unique et irremplaçable. Mon interro-gation concerne l’aspect revendication du ministère sacerdotal au nom de l’égale dignité de l’homme et de la femme. Pour moi, le fait d’accéder au sacerdoce ministériel est une vocation, un appel de Dieu.

En contemplant Marie, je vois sa mission sacerdotale à l’Annonciation, à Cana, au pied de la Croix, au Cénacle. Par elle, le Salut est entré dans notre monde. Elle y a été partie prenante. De même, combien de femmes de chez nous, parmi les Saints et bienheureux du Canada, ont bâti, et ce, dans tous les domaines. Leur être baptismal-sacerdotal s’est ainsi évangéliquement épa-noui. Un authentique discernement spirituel irait de soi.

Léonie Therrien m.i.c.

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201

7

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